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SOCIÉTÉ<br />
coup d’entre eux se sont mis à nu<br />
au risque de provoquer des réactions violentes<br />
d’entourages excluant toute once de<br />
féminité. En 1990, le footballeur anglais<br />
Justin Fashanu avait ainsi effectué son<br />
coming-out. Il s’est suicidé huit ans plus<br />
tard, ne supportant plus les insultes et<br />
le calvaire enduré. Pas vraiment le genre<br />
d’exemple incitant les homos à sortir du<br />
placard. « Les joueurs homos ne disent rien<br />
car ils ont peur », avait confirmé Antoine<br />
Griezmann au journal espagnol El Païs,<br />
début juin. Un climat délétère détaillé par<br />
Patrick Mignon : « Il existe de nombreux<br />
outrages liés à l’homosexualité masculine :<br />
pédé, tarlouze, tapette. Cette codification<br />
incite logiquement au silence. Et un tel vocabulaire<br />
n’existe pas pour les lesbiennes. »<br />
NAVRATILOVA N’A PAS EU LE CHOIX<br />
Le tapis rouge ne leur est pourtant toujours<br />
pas déplié. Martina Navratilova et Billie-<br />
Jean King ont brisé l’omerta en 1981. On<br />
oublie bien souvent que la première nommée<br />
s’est retrouvée coincée par un souci<br />
administratif au moment de demander<br />
sa naturalisation. Elle fut donc contrainte<br />
d’avouer ses penchants pour les deux sexes.<br />
La presse américaine s’en fit l’écho, remplaça<br />
bisexuelle par homosexuelle, et la Tchécoslovaque<br />
de naissance perdit, contre son<br />
gré, le contrôle de son intimité en même<br />
temps que de nombreux contrats. La mémoire<br />
collective n’a pas forcément retenu,<br />
non plus, que sa comparse, alors mariée à<br />
un homme, avait été dénoncée par une ancienne<br />
maîtresse et vit, elle aussi, plusieurs<br />
de ses sponsors la fuir illico.<br />
Deux histoires douloureuses qui sont restées<br />
sans suite jusqu’en 1999 et le comingout<br />
d’Amélie Mauresmo. En assumant sa<br />
vie privée, à 19 ans, « avec insouciance et<br />
naïveté mais sans être piégée », comme elle<br />
l’avait reconnu sur France 2 en 2016, la<br />
Française s’est aussi exposée « à un déchaînement<br />
qui a mis du temps à être digéré ».<br />
Depuis, en tournois, les joueuses ne se<br />
cachent plus forcément, voire plus du<br />
tout, sans pour autant revendiquer leur<br />
attirance pour les femmes ni se poser en<br />
ambassadrice de la cause homosexuelle.<br />
Tout se sait, ou presque. Rien ne s’étale.<br />
Une discrétion insupportable pour Margaret<br />
Court, qui a récemment ruiné la<br />
crédibilité que ses trophées lui avaient<br />
apportée : « Le tennis est rempli de lesbiennes.<br />
Quand je jouais, il n’y en avait que<br />
quelques-unes, mais ces deux ou trois amenaient<br />
des jeunes dans des soirées et ce genre<br />
de choses. » Ekaterina Bychkova (32 ans),<br />
jeune retraitée des courts jamais entrée<br />
dans le Top 100 mondial, a carrément<br />
versé dans la délation : « Il y a beaucoup<br />
de filles qui aiment les filles dans le monde<br />
du tennis. Je dirais que 10% sont lesbiennes.<br />
Rennae Stubbs, Lisa Raymond, Eleni Daniilidou,<br />
Francesca Schiavone, Casey Dellacqua<br />
ou Carla Suarez-Navarro. » Sauf<br />
omission de notre part, certaines joueuses<br />
ici citées n’ont jamais communiqué sur le<br />
64 TENNIS MAGAZINE