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qu’un contrat de disque juteux lui est proposé.<br />
« On agitait un chèque sous mes<br />
yeux alors que le football ne m’avait pas<br />
donné un sou en huit ans, dur de refuser<br />
dans ces conditions. J’ai donc choisi la<br />
musique et renoncé au foot. » Si le choix<br />
s’imposait, il nous faut, pour mieux saisir<br />
sa portée, revenir sur ce que le football<br />
représente pour elle.<br />
Elevée à Aigburth, Liverpool, le<br />
club des <strong>Red</strong>s tient vite une place<br />
importante dans sa vie : « Si vous<br />
naissez dans une famille qui supporte<br />
les <strong>Red</strong>s, vous n’y échapperez pas. »<br />
Elle doit son prénom à son père. « Chelsea<br />
était une petite équipe à l’époque, c’est pas<br />
comme s’il voulait m’appeler Tottenham<br />
par exemple », plaisante-elle. Ma mère a<br />
dit : “D’accord, c’est un joli prénom mais<br />
Engagée à Fulham,<br />
Chelcee a aussi joué<br />
à Liverpool, Everton,<br />
avec les Tranmere<br />
Rovers et les Spurs.<br />
on va modifier l’orthographe”, comme sur<br />
mon passeport que j’exhibe promptement<br />
quand on ne me croit pas. »<br />
Enfant unique, Grimes comprend vite<br />
que le foot sera le seul moyen de s’entendre<br />
avec les garçons, ses cousins ou<br />
ceux de sa rue. « C’était ça ou rester à la<br />
maison faire des devoirs. Après des<br />
débuts difficiles, les progrès sont vite<br />
arrivés. J’étais la première choisie dans<br />
l’équipe. » Son grand-père remarque une<br />
annonce du centre de formation Ian Rush<br />
(fondateur et ancienne idole des <strong>Red</strong>s)<br />
dans le journal local. Sa mère l’y inscrit.<br />
Elle est l’unique fille. Les Liverpool Ladies<br />
(rebaptisées depuis Liverpool FC Women),<br />
qui s’entraînent sur le même terrain, la<br />
remarquent. « Elles me proposent de faire<br />
un essai. À l’époque, je n’avais même pas<br />
de crampons ! Mais ma prestation les a<br />
convaincues, et j’ai pu intégrer les U10<br />
de Liverpool, avant de signer un contrat<br />
pour cinq ans. »<br />
Quant à la musique, c’est une passion<br />
que Chelcee développe un peu plus tard :<br />
ado, elle est fan de pop et grandit avec les<br />
tubes de J-Lo, Beyoncé, Pink et Kanye. À<br />
la maison, sa mère préfère la dance, son<br />
beau-père Sting, et Simon & Garfunkel.<br />
Pour son diplôme de fin d’études secondaires,<br />
Grimes opte pour la spécialité<br />
musique pour mettre les chances de son<br />
côté. De fait, un professeur ayant remarqué<br />
ses talents d’écriture l’encourage en<br />
ce sens. À 16 ans, elle décroche un contrat<br />
d’enregistrement de six mois grâce à un<br />
concours sur Juice FM, une radio locale.<br />
Ryan Babel, ailier hollandais de Liverpool<br />
est le propriétaire du studio, l’occasion<br />
pour la jeune Anglaise d’assister à tous les<br />
matches des <strong>Red</strong>s et d’apprendre les<br />
ficelles de l’enregistrement avec l’ingénieur<br />
de Babel. La voilà mordue de<br />
musique.<br />
En plus du plaisir de chanter, Chelcee<br />
découvrir celui de se produire sur scène.<br />
« Je jouais tous les soirs à Liverpool. Le<br />
buzz attirait toujours plus de public, se<br />
souvient-elle. Les jeunes se tatouaient les<br />
textes de mes chansons dont j’avais moimême<br />
oublié les paroles. <strong>The</strong> Truth était<br />
l’une d’elles, un gamin se l’était entièrement<br />
tatoué. Je leur disais : “Ne faites pas<br />
ça, vos mères vont hurler.’’ Mais en observant<br />
le phénomène j’ai compris que<br />
quelque chose se passait. » Une chose qui<br />
la mettra devant un choix cornélien : le<br />
football ou la musique. Ce sera la seconde.<br />
Elle signe un contrat avec le label RCA.<br />
« Ils voyaient en moi l’Alicia Keys<br />
anglaise », confie-t-elle, mais rapidement,<br />
son manager est licencié ; son successeur<br />
l’ignore pendant deux ans, avant de la<br />
débarquer sans préavis. Désorientée, abattue<br />
et fauchée, Grimes s’installe à Londres<br />
et poursuit son rêve d’auteurecompositrice<br />
en enregistrant seule où elle<br />
peut, dans une chambre, un sous-sol.<br />
Aujourd’hui, Grimes juge cette période<br />
sans complaisance. « À 18 ans, à part jouer<br />
au foot, j’avais peu vécu. Après une année<br />
blanche, j’ai écrit quatre chansons et<br />
obtenu très vite un contrat de disque, pas<br />
vraiment mérité, pour être honnête. » Elle<br />
se fixe alors de nouveaux défis. « J’ai<br />
voyagé, appris à me connaître et me suis<br />
lancée dans l’écriture. Un jour, quelqu’un<br />
m’appelle et me dit : “Nous apprécions vos<br />
talents de compositrice et vous proposons<br />
un contrat de publication.” J’ai accepté<br />
même si c’était la scène que je visais. » Elle<br />
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