Les Nouvelles de Jérusalem - Numéro 105 - Printemps 2023

neutralité dans la guerre qui se profilait.
Antioche et sa région tombent
dans l’escarcelle d’Atatürk. Pour
un peu la famille Demirci appartenait
à l’empire français ! À quoi
tiennent les destinées… Baptisé
grec-orthodoxe, Yunus entre au
petit séminaire capucin, à Mersin.
Il sera religieux, catholique, de la
famille de saint François.
À Jérusalem, il décroche son doctorat
en archéologie en 2019 avec
une thèse sur « Les synagogues en
Asie mineure dans l’antiquité tardive
dans leurs contextes urbain
et religieux ». Depuis, il enseigne
chez les franciscains, les salésiens
de Don Bosco et les dominicains.
Sa pagelle d’assignation porte officiellement
la mission qu’il assume
désormais auprès de l’École biblique
et archéologique française
de Jérusalem.
Comment devient-on archéologue
? Le chemin passe d’abord
par les langues anciennes qui le
mènent naturellement à la terre qui
les a portées. « Avec l’archéologie,
on plonge dans le concret, on travaille
aussi avec ses mains ». Et
quand on lui demande si les archéologues
ne sont pas un peu des affabulateurs,
il rétorque : « Oui, mais
si on invente, il faut inventer bien !
La clarté doit habiter la description
des sites. Alors, il existe des
interprétations, elles peuvent différer.
Et puis le temps qui passe, et
l’étude, apportent leurs évolutions.
Il faut que, ce qui reste hypothèse,
soit fondé. La science ne progresse
pas par ses résultats mais par ses
questions ; et les discussions qui
s’ensuivent créent une dynamique
vertueuse ».
Quand il évoque ses débuts à
l’École, il paie tribut au frère Sigrist,
naguère Directeur : « C’est
lui qui m’a invité à enseigner ».
Ce qu’il apprécie à l’École ? « La
collaboration entre religieux d’une
part, et d’autre part l’ambiance très
belle avec les frères qui veulent
bien m’accueillir et les étudiants,
même si leurs questions me contredisent
parfois. Mais c’est à la fois
une question d’humilité et une
stimulation. J’enseigne, mais j’apprends
aussi beaucoup ».
Belle réponse capucine.
Fr. Benoît Vandeputte, o.p.
Rédacteur en chef
Vie de l’École
Rendez-vous en terre arménienne
Les visites du samedi attirent toujours
autant de visiteurs et d’expatriés
en Terre Sainte. Les liens
étroits entre le couvent Saint-
Étienne et la communauté arménienne
de Jérusalem ont permis de
découvrir leur quartier, l’un des
plus secrets de Jérusalem.
Ville dans la ville, on y entre par la
porte Saint-Jacques. Accompagné
par Georges Hintlian, l’historien
de la communauté, les visiteurs
du samedi déambulent à travers
le quartier, les ruelles calmes et
paisibles, le couvent… Ce qui est
tout un derrière ces murs difficilement
franchissables. Fermé depuis
de nombreuses années, le Musée
d’art et d’histoire Edward et Helen
Mardigian, y rouvrait ses portes en
Novembre 2022 ! Les visiteurs du
samedi ont sauté sur l’occasion !
Il faut voir ce magnifique bâtiment,
construit comme séminaire en 1853,
transformé aujourd’hui pour devenir
un relais de la culture arménienne,
ainsi qu’un témoin du lien séculaire
entre les arméniens et la Ville sainte.
Au-delà, il s’agit d’un mémorial,
hommage à tous les Arméniens victimes
du génocide ottoman pendant
la Première guerre mondiale.
Mais alors, quelle est la pièce la plus
fascinante du musée ? La majestueuse
mosaïque des oiseaux, datant
du sixième siècle, découverte en
1894, merveilleusement mise en valeur
sous la verrière à l’entrée du musée
? Ou cette découverte amusante :
une splendide chape liturgique, faite
d’un morceau de la tente de Bonaparte,
après sa défaite de Saint-Jeand’Acre
en 1799 ? Ou encore tout
simplement les ravissantes poteries
et créations artistiques de nombreux
artistes arméniens ?
Une chose est sûre : franchir ces
murs en vaut la peine.
Clémence de Guernon
Chargée de communication
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