GRAMMAIRE COMPARÉE LANGUES SLAVES
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<strong>GRAMMAIRE</strong> <strong>COMPARÉE</strong><br />
DES<br />
<strong>LANGUES</strong> <strong>SLAVES</strong><br />
TOME IV<br />
LA FORMATION DES NOMS<br />
PAR<br />
ANDRÉ TAILLANT<br />
Professeur honoraire au Collège de France<br />
Directeur d'études à l'École des Hautes Études<br />
Publié avec le concours du Centre national de la Recherche scientifique<br />
ÉDITIONS KLINCKSIECK<br />
li, rue de Lille, Paris - 7 e<br />
= = |974 -
La loi du 11 mars 1957 n'autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l'article 41, d'une<br />
part, que « les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste<br />
et non destinées à une utilisation collective » et, d'autre part, que les analyses et les courtes<br />
citations dans un but d'exemple et d'illustration, « toute représentation ou reproduction<br />
intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants-droit ou<br />
ayants-cause, est illicite » (alinéa 1 er de l'article 40).<br />
Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc<br />
une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code Pénal.<br />
ISBN 2-252-01611-6<br />
(S) Éditions KLINCKSIECK. Paris. 1974.
DU MÊME AUTEUR<br />
Grammaire de la langue serbo-croate (en collaboration avec<br />
Antoine MEILLET). Paris, Champion, 1924.<br />
La langue de Dominko Zlataric, poète ragusain de la fin du<br />
xvi e siècle. Paris, Champion, I. 1928, II. 1931.<br />
Le De Autexusio de Méthode d'Olympe, version slave et texte<br />
grec édités et traduits en français. Paris, Firmin-Didot,<br />
1930.<br />
L'Ëvangéliaire de Kulakia, un parler slave du Bas-Vardar (en<br />
collaboration avec André MAZON). Paris, Droz, 1938.<br />
De Virginitate de saint Basile, texte vieux-slave et traduction<br />
française. Paris, Institut d'Études slaves, 1943.<br />
Le Traité contre les Bogomiles de Cosmas le Prêtre (en collaboration<br />
avec Henri-Charles PUECH). Paris, Droz, 1945.<br />
Manuel du vieux slave, I, Grammaire, II, Textes et glossaire.<br />
Paris, Institut d'Études slaves, 1948, 2 e éd., 1963-1964.<br />
Le Livre des secrets d'Hénoch, texte slave et traduction française.<br />
Paris, Institut d'Études slaves, 1952.<br />
Discours contre les Ariens de saint Athanase, version slave et<br />
traduction française. Sofia, Académie des Sciences de<br />
Bulgarie, 1954.<br />
Grammaire comparée des langues slaves.<br />
Tome I - Phonétique. Paris, IAC, 1950.<br />
Tome II - Morphologie : Flexion nominale, Flexion pronominale.<br />
Paris, IAC, 1958.<br />
Tome III - Le verbe. Paris, Éditions Klincksieck, 1966.<br />
La Zadonsëina, épopée russe du xv e siècle, Paris, Institut d'Études<br />
slaves, 1967.<br />
L'Évangile de Nicodème, texte slave et texte latin, Paris, Droz,<br />
1968.<br />
Twtoa -moiiY-slnvfs T hpxt.es et a-lossaire. II. traductions et notes,
AYANT-PROPOS<br />
Ce livre sur la formation des noms en slave est le prolongement<br />
de celui de A. Meillet : Études sur l'étymologie et le vocabulaire du<br />
vieux slave, II, Formation des noms, Paris, 1905, 2 e édition, 1961.<br />
En lui apportant des compléments, il s'applique à en garder<br />
l'esprit, œuvre d'un disciple qui continue celle de son maître<br />
sous sa direction toujours agissante.<br />
Voici une bibliographie sommaire renvoyant aux études qui<br />
ont été le plus Utilisées spécialement pour la dérivation.<br />
Baltique : A. LESKIEN, Die Bildung der Nomina im Litauischen,<br />
Leipzig, 1891.<br />
J. ENDZELIN, Leltische Grammatik, Heidelberg, 1923.<br />
Slave commun : W. VONDRÂK, Vergleichende slavische Grammatik,<br />
Gôttingen, I, 2 e éd., 1924.<br />
Russe : Grammalika russkogo jazyka, Académie des Sciences de<br />
l'URSS, Moscou, 1953.<br />
Polonais : J. Los, Gramatyka polska, Lwôw-Warszawa-Krakôw,<br />
II, 1925.<br />
Z. KLEMENSIEWICZ, T. LEHR-SPLAWINSKI, S. URBANCZYK,<br />
Gramatyka historyczna jçzyka polskiego, Varsovie, 1955.<br />
W. DOROSZEWSKI, Monografje slowotwôrcze, Varsovie, I, 1928,<br />
II, 1929.<br />
Tchèque : J. HoLUB-Fr. KUPECNY, Elymologicky slovnik jazyka<br />
ëeského, Prague, 1952.<br />
Y. MILLET, Les postverbaux en tchèque, Paris, 1958.<br />
Slovène : A. BAJEC, Besedotvorje slovenskega jezika, Ljubljana,<br />
I, 1950, II-III, 1952.<br />
Serbo-croate : T. MARETIC, Gramatika i stilistika hrvatskoga<br />
ili srpskoga knjizevnog jezika, Zagreb, 2 e éd., 1931.<br />
M. STEVANOVIC, Savremeni srpskohrvatski jezik, Belgrade, I,<br />
1964.
8 BIBLIOGRAPHIE<br />
L'histoire du vocabulaire slave a sa base dans le vocabulaire<br />
du vieux slave, dont l'établissement exige pour beaucoup de mots<br />
le renvoi aux textes. Voici une liste des abréviations :<br />
Mikl(osich), Srezn(evskij), dictionnaires du vieux slave et du<br />
slavon.<br />
Ass(emanianus), Mar(ianus), Sav(a), Zogr(aphensis), Ostr(omir),<br />
Nik(olja), manuscrits de l'Évangile.<br />
Ps(alterium) Sin(aiticum), Bon(oniense), Pog(odinianum),<br />
manuscrits du Psautier.<br />
Euch(ologium Sinaiticum), Cloz(ianus), Supr(asliensis), textes<br />
en rédaction vieux-slave.<br />
Athan(ase), Constantin le) Pr(être), Cyr(ille de) Jér(usalem),<br />
Gr(égoire de) Naz(ianze), Ham(artole), Hés(ychius), Hom(iliaire<br />
de) Mih(anovic), Izb(ornik de) Svjat(oslav), J(ean l')Ex(arque),<br />
Pand(ectes d')Ant(iochus), Théod(oret), (de) Virg(initate).<br />
Les références à l'Homiliaire de Mihanovic renvoient à l'édition<br />
photographique de R. Aitzetmuller, Graz, 1957, et celles à<br />
Athanase à l'édition de Sofia, 1954; pour les Vies de Constantin<br />
et de Méthode et pour Cosmas, elles renvoient à la pagination de<br />
mes Textes vieux-slaves, I, Paris, 1968.
INTRODUCTION<br />
§ 701. La formation des noms. — L'étude de la morphologie<br />
de la dérivation présente des difficultés plus grandes que celles<br />
de la morphologie flexionnelle. Les faits de dérivation ne sont<br />
pas homogènes, et ils ne constituent pas un système relativement<br />
simple comme celui de la flexion, dont toute grammaire bien faite<br />
peut donner l'essentiel et la presque totalité.<br />
Certains procédés de dérivation touchent au système de la<br />
flexion nominale ou verbale, certains suffixes nominaux se sont<br />
incorporés à la flexion nominale. La première partie du présent<br />
livre sera consacrée à l'étude des « suffixes flexionnels » : étude<br />
très longue, mais surtout du fait de la formation des « postverbaux »,<br />
en nombre quasi illimité, et dont seul le minuscule élément suffixal,<br />
-û ou -a, qui relève de la flexion, constitue la caractéristique.<br />
Quant aux autres suffixes, de forme et de productivité variées,<br />
ils donnent des mots qui n'existent que comme faisant partie<br />
du vocabulaire réel — et aussi, ce n'est pas à négliger, virtuel.<br />
De même que les dictionnaires enregistrent dans l'ordre alphabétique<br />
les mots des langues, de même on a créé des dictionnaires<br />
rétroverses qui les enregistrent en partant des finales. Volumineux<br />
comme les dictionnaires dans le bon sens, ils sont d'une utilité<br />
limitée, mais réelle : les finales qu'ils présentent sont de toutes<br />
sortes et restent à interpréter, mais on y trouve des données sur<br />
la productivité des suffixes — les « postverbaux » à suffixe zéro<br />
leur échappant —, et ils contribuent à montrer que la dérivation<br />
est un fait d'usage, non un fait morphologique régulier.<br />
§ 702. Les suffixes et leur emploi. — Il y a des suffixes productifs<br />
et des suffixes rares ; des suffixes actuellement productifs, d'autres<br />
qui l'ont été dans le passé et dont subsistent des restes plus ou<br />
moins nombreux ; d'autres qui ne figurent plus qu'à l'état de<br />
vestiges, et qui ne représentent plus que des finales dont l'origine<br />
pourrait être toute différente.<br />
Même les suffixes les plus productifs ne s'emploient pas librement.<br />
De « chauffer ». le français tirp u If ^hanffonro » moi. —...
10 INTRODUCTION [§ 702]<br />
il ne dit pas normalement « le chaussage ». Des dérivés comme<br />
« chaussage » ou « chaussement » sont possibles, ils peuvent être<br />
essayés, ils existent sûrement dans des langues particulières,<br />
technique, administrative, mais pour réussir dans la langue<br />
commune il faut que l'usage les adopte, et le choix de l'usage est<br />
capricieux, précédé par des tentatives individuelles qui ont connu<br />
ou non le succès.<br />
C'est là une différence essentielle entre la morphologie flexionnelle<br />
et la morphologie de la dérivation : de « chausser », tandis<br />
qu'un dérivé « chaussage » est risqué, on fléchit en toute liberté<br />
« je chaussais, j'ai chaussé, je chausserai ». Les cas de limitation<br />
sont exceptionnels, et il faut en chercher les causes. De « frire »,<br />
on ne dira pas « nous frions », mais c'est parce que la langue<br />
distingue l'intransitif « frire » et le factitif « faire frire », et qu'il<br />
y a peu de raison de faire dire à des poissons « nous frions ».<br />
Pour « chaussage », la seule raison est que cela ne se dit pas<br />
ordinairement. Mais des concepts nouveaux exigent leur vocabulaire,<br />
et « téléviser » a appelé aussitôt « télévision », « téléviseur », en<br />
rendant acceptable « télévisage ». Il y a eu constamment dans les<br />
langues ces développements de la dérivation, tandis que de vieux<br />
dérivés se perdaient faute d'emploi. Et ces développements sont<br />
luxuriants à certains moments de l'histoire des langues, spécialement<br />
au contact d'une civilisation nouvelle avec ses exigences.<br />
Le contact étroit avec le grec, les nécessités de la traduction, ont<br />
amené en vieux slave une masse de dérivés, certains forgés<br />
laborieusement et qui sont devenus des caractéristiques du slavon,<br />
puis du russe qui les a accueillis : vïsedrùziteljïstvo « toute-puissance<br />
», r. vsederzitel'stvo, en regard de TOxvToxpa-ropioc qui n'apparaît<br />
pas lourd dans la dérivation assouplie du grec. Puis la civilisation<br />
européenne à base latine a continué cet enrichissement. Et les<br />
renouveaux nationaux se sont imposé la tâche de remplacer les<br />
emprunts étrangers par des dérivés slaves : le serbo-croate, qui<br />
avait créé èdrezak « tranche » un peu à l'imitation de r. otrézok<br />
et comme correspondant de l'allemand Abschnitt et Abschnitzel,<br />
s'en est servi dans les menus de restaurants au sens d'« escalope,<br />
Schnitzel » pour éliminer snicla des ménagères.<br />
La luxuriance du romantisme, dans des langues encore en train<br />
de fixer leur forme moderne, a pu provoquer une débauche de<br />
créations nouvelles. Le critique serbe J. Skerlic s'est plu à relever<br />
chez l'écrivain Sima Milutinovic les nombreux mots fabriqués<br />
par lui sans utilité et sans succès : iducnosl d'après budùcnôst<br />
« avenir », navjescavka de navjescivati « annoncer », etc. Toutes<br />
les langues littéraires ont leurs auteurs prodigues en néologismes,<br />
et dans certaines sciences des termes nouveaux donnent l'illusion<br />
d'idées nouvelles. En linguistique, pour prendre un exemple
[§ 703] INTRODUCTION 11<br />
plaisant, L. Tesnière a essayé le mot « phrasillon », en enrichissant<br />
d'une unité un aimable suffixe de productivité assez restreinte.<br />
Il ne faut pas se presser de rejeter ces inventions : si elles sont<br />
acceptées, elles ne sont plus du tout choquantes ou risibles.<br />
Des suffixes se forment comme caractéristiques de certains<br />
ordres de concepts : ainsi -ite, -ose en médecine, « névrite »,<br />
« dermatose » ; -aie, -ure en chimie, « sulfate », « sulfure ». Un<br />
cas curieux est le développement tout récent en français du suffixe<br />
-rama sur la base de « panorama » : « discorama », « musicorama<br />
», etc. ; et « construrama », nom d'une exposition, dont la<br />
forme barbare apporte justement la justification, puisque c'est<br />
l'abréviation commerciale de « panorama de la construction ».<br />
§ 703. La forme des suffixes. — Pourquoi « chauffage » et non<br />
« chaufïement », mais « échauffement » et non « échauffage » ? Il<br />
faut penser que ce n'est pas absolument sans raison, et qu'entre<br />
plusieurs formes concurrentes de suffixes un instinct, et non le<br />
hasard, a pu faire choisir une forme plutôt qu'une autre ; ceci à<br />
l'origine, et après c'est chose acquise et relevant de la mémoire de<br />
l'usage. Cet instinct, individuel ou collectif, c'est le « sentiment de<br />
la langue », produit spontané d'une expérience et d'une longue<br />
pratique, et qui est fait de toutes sortes de choses : recherche de<br />
l'aisance de prononciation et de l'euphonie selon l'entourage<br />
phonétique, recherche d'un sens clair et répondant bien à ce que<br />
l'on veut dire, en fonction de réminiscences et d'associations d'idées<br />
inconscientes.<br />
Il y a, pour la création de dérivés nouveaux, des modèles<br />
antérieurs. Le cas simple est celui de -rama, où le chef de file est<br />
unique, « panorama » (« diorama » en est secondaire et sans influence).<br />
Mais avec « chauffage » et « échauffement » il y a toute la<br />
masse des dérivés en -âge et en -ment. Dans ces deux mots, on<br />
croit percevoir une certaine différence de valeur des suffixes.<br />
Pour s'en assurer, il faut examiner d'autres oppositions du même<br />
genre, entre « perçage » et « percement », etc. Mais il y en a des<br />
quantités, et les différences de suffixes répondent-elles toujours<br />
à de mêmes différences de sens?<br />
Ces problèmes se posent avec les langues qui ont une tradition<br />
et dont on suit l'histoire, le français, où -âge, bien qu'ancien, peut<br />
faire office de suffixe jeune et vivace à côté de -ment plus vieux et<br />
plus usé. Ce ne peut guère être le cas pour une langue de civilisation<br />
nouvelle comme le vieux slave, dont l'essentiel du vocabulaire de<br />
la culture savante est récent et calqué sur le grec. C'est pourquoi<br />
on trouve dans la dérivation des variantes fréquentes : vralarjï<br />
et vratïniku «portier», prëdanïniku, prëdavïniku et prëdateljï<br />
« traître », pravostï, pravota et pravunii « écruité ». neiirîip wliMcinn
12 INTRODUCTION [§ 702]<br />
et velikota « grandeur », etc. Un choix se fait ensuite, un usage<br />
s'établit, de façon en partie, indépendante selon les langues slaves.<br />
Les suffixes restent à peu près les mêmes, et ils se prêtent aisément,<br />
pour les formes, à une étude comparée, mais les emplois, les valeurs,<br />
les degrés de fréquence en divergent beaucoup. Quant au vocabulaire<br />
courant et de la culture matérielle, avec ses outils de dérivation,<br />
il divergeait régionalement et il n'a pas cessé de le faire, et<br />
en outre il est connu de façon très incomplète pour les périodes<br />
anciennes.<br />
Dans le vocabulaire abstrait, qui continue celui des langues de<br />
culture antérieures, le grec, le latin, pour une grande partie des<br />
langues slaves le vieux slave et les slavons, certains suffixes se<br />
présentent sous deux formes, l'une de la langue réelle, l'autre de<br />
la langue de culture, en français -aison et -ation, « inclinaison » et<br />
« inclination ». C'est le cas en russe pour les suffixes du substantif<br />
verbal, -nie, -lie, et -n'ë, -t'ë, en bulgare pour -nie russe et -ne<br />
(§ 415), en russe pour le participe présent en -usëij, -jascij et -uci,<br />
-juci (§ 281). Il y a là emprunt de suffixes à la langue de culture, et<br />
l'on a de même en macédonien les, gérondifs -ajk'i, -ejk'i, d'où bulg.<br />
-ajki, -ejki, pris au serbe, et en polonais les noms de famille en<br />
-owicz pris au russe (§ 868).<br />
§ 704. Origines et évolution des suffixes. — Les suffixes sont<br />
pour une grande part des éléments hérités, dont l'origine est trop<br />
lointaine pour être restée reconnaissable. Des éléments suffixaux<br />
en -t-, en -d-, en -k-, en -s-, etc., du slave, on peut seulement dire<br />
qu'ils se retrouvent dans les autres langues indo-européennes et<br />
qu'ils remontent à l'indo-européen commun. La question est de<br />
savoir ce que le slave en a fait, comment il les a traités dans son<br />
système morphologique, comment il les a élargis et diversifiés,<br />
présentant -k- sous des formes -kù, -uku, -ïca, -ica, -nikû, etc.<br />
Certains suffixes sont issus de seconds termes de composés :<br />
c'est net pour le suffixe adverbial -ment du français, « fermement »<br />
qui représente lat. firmâ mente ; net aussi pour les suffixes de<br />
l'allemand, -heit, -schaft, etc. ; ce n'est que vraisemblable pour<br />
grec -OTCOÇ et lat. -ôx, qui peuvent contenir le nom de l'« œil », gr.<br />
(ÎOTCC (acc.), si. oko. Mais les faits clairs de cet ordre sont rares,<br />
il est périlleux de rattacher hâtivement d'autres suffixes à des<br />
racines nominales ou verbales, et il faut se garder d'interpréter<br />
lat. -mentum, fr. -ment, suffixe de substantifs, par lat. mens. En<br />
slave, il n'y a dans cet ordre de notable que les dérivés de noms<br />
de nombres, adverbes en -sïdi, -kralû (§ 330), adjectifs en v. si.<br />
-gubû, s.-cr. -struk, où le sentiment de la composition est si<br />
reconnaissable que le bulgare a pu, à l'inverse, tirer du suffixe<br />
-mina un substantif min (§ 317).
[§ 703] INTRODUCTION 13<br />
Ce qui est beaucoup plus important, ce sont les emprunts de<br />
suffixes, assez nombreux à toutes époques pour constituer une<br />
catégorie spéciale dans le classement des suffixes (§ 1193). C'est<br />
là un point encore où la morphologie de la dérivation s'écarte<br />
de la morphologie flexionnelle pour rejoindre le vocabulaire :<br />
entre des langues distinctes, les emprunts de vocabulaire sont<br />
libres, mais il n'y a pas en principe d'emprunts flexionnels.<br />
Les suffixes, en tant qu'ils sont porteurs d'un sens, tendent<br />
à s'élargir, à prendre plus de corps pour être plus significatifs :<br />
le français a « clou-tier », « gru-tier » (qui manœuvre la grue),<br />
d'après « sabot-ier », etc. Dans les langues slaves, le suffixe -ici<br />
de noms d'agents reste productif en serbo-croate sous la forme<br />
-lac, et -vec en slovène (§ 836). Le suffixe -nu d'adjectif a laissé des<br />
traces abondantes (§ 1070), mais sa forme productive est -ïnu ;<br />
c'est parce que le slave, qui réduit largement ses groupes de<br />
consonnes, supporte mal les désinences ou suffixes à initiale<br />
consonantique (§ 173). D'autres causes peuvent agir qui provoquent<br />
des changements de forme : ainsi la perte de l'alternance<br />
du type k : c en russe ( § 111) amène la transformation en -jaga<br />
du suffixe v. si. -çdzï (§ 1016), noyant ce suffixe d'emprunt qui<br />
était bien caractérisé dans un type suffixal expressif. Le serbocroate,<br />
qui à la différence du russe n'aime pas les mots slavons,<br />
avait accueilli le slavonisme bozastvo « divinité », v. si. bozïstvo,<br />
r. bozestvô, qui rendait plus aisé la prononciation d'une finale<br />
-zstvo, mais il l'a remplacé par bozànstvo (§ 941), en ayant recours<br />
à une superposition, apparente, de suffixes.<br />
Car les suffixes se superposent librement : sur pravu « droit »<br />
se forme pravïda « droiture, justice », de là pravïdïnu « juste »,<br />
pravïdïniku « un juste », subst., et son adjectif possessif v. si.<br />
pravïdïnicï « du juste », l'adjectif dérivé r. prâvedniceskij, l'abstrait<br />
r. prdvednicestvo « état du juste ». C'est un trait des langues slaves<br />
que cette aisance de la dérivation, et sa grande clarté. Ainsi<br />
beaucoup de mots longs s'analysent facilement, et le sens en<br />
apparaît aussitôt même si on ne les connaissait pas. Mais les suffixes<br />
eux-mêmes, -Ida, -ïsku, ne s'analysent pas, et l'on ne voit pas<br />
exactement comment s'est constitué le lourd suffixe -ïstvo (§ 942),<br />
sûrement produit d'une suite d'élargissements dont on reconstitue<br />
imparfaitement les étapes.<br />
§ 705. Slave et baltique. — La comparaison avec le baltique aide<br />
peu. Entre les langues slaves, sur un fonds commun que fournit<br />
à peu près l'état vieux-slave, et si bien conservé en gros que soit<br />
ce fonds commun après une évolution d'un millénaire, les divergences<br />
dans le détail sont importantes, du fait de la srrande liberté
14 INTRODUCTION [§ 702]<br />
de la dérivation et des influences des différentes langues voisines.<br />
De l'état balto-slave antérieur, ce qui reste le plus reconnaissable,<br />
ce sont les éléments d'époque indo-européenne, qui se retrouvent<br />
dans toutes les langues. Pour les innovations communes qui<br />
remonteraient à cet état balto-slave, elles apparaissent mal à<br />
côté des innovations ultérieures divergentes : car les suffixes qui<br />
s'accordent trop bien, comme si. -ïniku et lit. -ininkas (§ 845),<br />
sont justement les plus suspects, ceux pour lesquels on peut le<br />
plus croire à des emprunts des langues baltiques au slave. La<br />
comparaison avec le baltique n'aide en rien à l'explication du<br />
suffixe slave -ïniku, ni de -ïstvo dont le baltique n'a pas l'équivalent,<br />
ni d'autres suffixes caractéristiques du slave. Cette<br />
comparaison n'en doit pas moins être poursuivie systématiquement,<br />
comme dans les domaines de la phonétique et de la morphologie<br />
flexionnelle : à défaut de preuves spectaculaires de l'existence<br />
d'une unité spéciale balto-slave, elle se révèle fructueuse en<br />
fournissant suffisamment d'accords entre les deux groupes de<br />
langues pour confirmer cette unité.<br />
Meillet, qui pour sa Formation des noms avait le modèle de la<br />
Bjldung der Nomina im Litauischen de Leskien, a été déçu par<br />
l'absence de preuves incontestables de l'unité balto-slave dans la<br />
dérivation. Et il en a tiré la conclusion qu'une unité réelle n'avait<br />
pas existé. Son hypothèse était en réaction contre la facilité avec<br />
laquelle les comparatistes avaient accepté, sans examen suffisant,<br />
celle de l'unité. Elle a surpris, puis elle a séduit comme une<br />
nouveauté, et elle a été à son tour acceptée sans grand examen.<br />
Meillet est seulement arrivé, à mon avis, à ce résultat positif que<br />
ce n'est pas dans la dérivation, matière mouvante, qu'on peut<br />
trouver la solution de problèmes de parenté de langues.<br />
§ 706. Classement des suffixes. — La dérivation est à cheval<br />
entre la morphologie et le vocabulaire. Pour le vocabulaire, le<br />
classement le plus sûr et le plus commode est simple : il est<br />
alphabétique. D'autres classements, par catégories sémantiques,<br />
par degrés de fréquence des mots, peuvent être intéressants, mais<br />
rien ne vaut à la base un bon dictionnaire.<br />
Avec les suffixes, c'est moins simple : l'énumération ne suffit<br />
pas, et ils appellent la description. Il y a des suffixes qui s'incorporent<br />
au système morphologique flexionnel. Le plus grand nombre<br />
fournit du vocabulaire, mais dans des conditions très différentes<br />
et qu'il faut distinguer, comme en morphologie flexionnelle il<br />
importe de distinguer les types productifs et ceux qui ont cessé de<br />
l'être. Il y a des suffixes d'emploi si libre qu'ils touchent aux<br />
formations flexionnelles à jeu automatique, comme les substantifs<br />
verbaux en -nije, -tije et les adjectifs possessifs en -ovu. Il y a ceux
[§ 7061 INTRODUCTION 15<br />
de grande extension, ceux d'extension limitée, ceux qui ne sont plus<br />
vivants, ceux qui ne sont plus représentés que par des mots isolés<br />
et qu'on n'analyse plus. Il est impossible de séparer rigoureusement<br />
toutes ces catégories, et l'on distinguera plus sommairement :<br />
I. Les suffixes flexionnels.<br />
II. Les suffixes productifs — compte tenu de ce que comporte<br />
d'imprécis et de changeant le concept de productivité ; et en<br />
considérant en principe la productivité de date ancienne, sans<br />
les développements trop limités à des langues particulières.<br />
III. Les suffixes variés ; et ici il faut, comme pis-aller, recourir<br />
à l'ordre alphabétique, et énumérer les suffixes contenant un k,<br />
un n, etc., en partant d'un élément consonantique et en passant<br />
en revue les formes, qui peuvent être disparates, des suffixes<br />
qui présentent cet élément.<br />
On ajoutera : les composés.<br />
Et cela, en s'en tenant fidèlement à la forme. Car présenter un<br />
classement par concept, c'est introduire dans l'exposé des suffixes<br />
une complication qui rend la recherche malaisée et, ce qui est plus<br />
grave, c'est y introduire de l'arbitraire.
PREMIÈRE PARTIE<br />
LES SUFFIXES FLEXIONNELS
CHAPITRE PREMIER<br />
SUFFIXES *-o-, *-â-, *-i-<br />
§ 707. Suffixe *-o~. — Réduit en vieux slave, dans les masculins,<br />
à nom. sing. -û qui s'amuït dès le x e siècle dans toutes les langues<br />
slaves, ce n'est plus depuis bien longtemps un suffixe, mais un<br />
élément thématique qui caractérise un type de flexion nominale.<br />
Il en est de même pour le baltique, nom. sing. -(a)s, et généralement<br />
pour les langues indoeuropéennes. Ce n'est que dans des formations<br />
de type très ancien, et par opposition à des formes athématiques,<br />
qu'on voit l'élément -o- prendre l'aspect d'un dérivé suffixal :<br />
gr. $ÔQOÇ « serpent d'eau, hydre », en face de VÔCOQ « eau ». Le thème<br />
i.-e. *dhwer- avait un dérivé *dhworo-, mais en slave dvïrï « porte »<br />
et dvoru « cour » sont deux mots indépendants.<br />
C'est donc de l'étymologie, et non de la dérivation, que relève<br />
l'étude de substantifs masculins comme dvoru, ou casu « moment »<br />
(§ 1135), qui sont des thèmes en *-o- sans suffixe reconnaissable.<br />
Mais il y a toute une vaste catégorie de substantifs du type<br />
flexionnel en *-o- qui sont sans suffixe et n'en sont pas moins des<br />
dérivés, se caractérisant par l'absence de suffixe, les « postverbaux<br />
»(§ 721).<br />
Tandis que les substantifs masculins du type en *-o-, v. si. -û,<br />
sont en nombre illimité, avec ou sans suffixe, les neutres en si. -o<br />
apparaissent surtout dans des dérivés suffixaux (§ 125). Ils ne<br />
fournissent pas en principe de postverbaux : obïdo « trésor » est<br />
une formation ancienne isolée, et voir § 827.<br />
L'élément -o est une désinence flexionnelle, mais qui, étant bien<br />
caractérisée, se rapproche d'un suffixe et est analogue à la finale -a<br />
qui, elle, est pour une part un suffixe : on peut considérer comme<br />
des dérivés en -o les adverbes et les substantifs du typé blago en<br />
face de l'adjectif blagu. L'effectif des mots en -o formés directement<br />
sur la racine est très limité, et ces mots isolés présentent des
20 SUFFIXES * -O-, -a- [§ 708]<br />
vocalismes radicaux divers (§ 823), sans trace de développement<br />
d'un vocalisme caractéristique comme o dans les masculins en *-o-.<br />
On y trouve des neutres • hérités du fonds indo-européen, *jïgo<br />
« joug », mçso « viande », tîlo « sol », kolo « roue », *dervo sur la racine<br />
*derw-, *dru- (§ 191) ; *zïrno « grain » doit être un dérivé suffixal,<br />
mais de date indo-européenne (§ 1074) ; vëko « paupière » n'a qu'un<br />
correspondant baltique, lit. vôkas (§ 1039) ; lono « sein » est sûrement<br />
un dérivé suffixal (§ 1074) ; pour gnëzdo «nid», voir § 39, pour<br />
brjuxo « ventre » et ruxo « vêtement », § 1138 ; pour olovo « plomb »,<br />
§ 1191. Un groupe d'égale importance est celui des emprunts<br />
anciens au germanique, vino, *bïrdo, cedo, lice, vëno (§ 209), *melko<br />
(§ 468), mylo (§ 1164), stado (§ 1002). Ces neutres sur radical<br />
monosyllabique constituent un type peu vivace et qui a été attiré<br />
par le type plus caractérisé des athématiques en -es-, ainsi divo<br />
«miracle» (§ 191).<br />
§ 708. Suffixe *-â-. — Ici, il s'agit bien d'un suffixe, pour une<br />
part. Il fournit quelques dérivés féminins de masculins en -û :<br />
rabu « serviteur, esclave »r fém: raba.<br />
sçsëdû « voisin », fém. sçsëda (J. Ex.), s.-cr. susjeda.<br />
vûnuku « descendant, petit-fils », fém. vunuka (Ham.), r. vnûka,<br />
s.-cr. ùnuka.<br />
pastorûku «beau-fils» (§ 198), fém. pasloruka en slavon, s.-cr.<br />
pâslôrka, slov. pdslorka.<br />
bratanu «neveu» (§ 1094), fém. bratana.<br />
drugu «compagnon, ami», fém. druga (Luc XV, 9, Ham.),<br />
s.-cr. drûga.<br />
kuru « coq », fém. r. kûra « poule », pol. et v. tch. kura, slov.<br />
kûra.<br />
Mais il faut observer que drugu, substantif, est en même temps<br />
adjectif (§ 257) ; que sçsëda est un composé du type des postverbaux<br />
(§ 1222) ; que vûnuku est sûrement un dérivé en *-koet<br />
un adjectif substantivé (§ 1038), que kuru peut l'être aussi<br />
(§ 1114), et que rabû a quelque rapport avec l'adjectif lat. orbus<br />
(§ 774). Le féminin bratana fait partie d'un type à suffixe -ana<br />
(§ 1095) ; apostola « femme apôtre » (Thècle, Ass. 121 r ) est un mot<br />
latin ; r. suprûga « épouse » est le féminin nouveau de suprug<br />
« conjoint, époux », pour v. si. sçprçgû « attelage, couple » (§ 763).<br />
Cet emploi suffixal de -a se distingue donc mal de son emploi<br />
morphologique dans la formation des féminins des adjectifs, et<br />
ce sont des suffixes plus caractérisés, -ica (§ 879), -ynji (§ 919),<br />
-ija (§ 1028), qui fournissent les féminins des substantifs : raba a<br />
en vieux slave un doublet rabynji, dans l'Évangile sçsëda Luc XV,<br />
9 (Nili. 1 ) n'est aue la variante en slavon serbe de v. si. sosëdunii
[§ 708] SUFFIXES * -o-, -a- 21<br />
(et r. sosédka, pol. sqsiadka, § 886) ; le slavon pastoruka l'est de<br />
pastoruky (§ 203), et s.-cr. et slov. pastorka de slov. pâstorkinja<br />
et s.-cr. dial. Le féminin slave, rare, mais normal, de apostolu<br />
est apostolica.<br />
Le baltique a lit. -é, qui répond à si. -ja et à skr. -ï (§ 155) :<br />
draûgas « ami », fém. draùgê (si. druga) ; diëvas « dieu », fém. deivë<br />
(skr. devah, devi, si. bogu, bogynji) ; vilkas «loup», fém. vilkè<br />
(skr. vrkt, si. *vïlëica, r. volëica). Le rapport entre lit. -é et skr. -ï<br />
n'est pas direct, et c'est dans le suffixe élargi si. -i-ca que l'élément<br />
-ï se reconnaît le mieux ; lit. -è peut résulter d'une extension de<br />
*-yâ- que le slave présente dans des dérivés de thèmes masculins<br />
en *-i- : v. si. yospozda « maîtresse » de gospodï, lïsla « belle-mère »<br />
de tïstï (§ 1027). Dans deivë en regard de diëvas, le vocalisme<br />
nouveau -ei- (§ 52) trahit un remaniement, tandis que le féminin<br />
isolé lit. esva, asvà « jument » garde le -â de skr. âçvâ, lat. equd.<br />
Si en slave -a n'est plus guère un suffixe servant à la formation<br />
de substantifs féminins, il reste la caractéristique d'une quantité<br />
de mots du genre réel féminin : zena « femme », baba « grand-mère »,<br />
kobyla « jument », etc. Et v. si. snuxa « bru », r. snoxd, qui a pris<br />
la place d'un thème en *-o- féminin, gr. vuoç, du fait de l'élimination<br />
en slave, et ailleurs (skr. snusâ), de ce type ancien de féminins<br />
(§ 124). Par contre, le type des masculins en -a (§ 208) s'est non<br />
seulement conservé, mais a été largement développé dans les<br />
langues slaves comme formation expressive.<br />
On trouve un collectif en -a, gospoda (§ 211), mais isolé, à côté<br />
d'une série de collectifs en -ija, brat(r)ija, etc. (§ 1028). Le type<br />
en -a est avant tout un type flexionnel, avec une extension qui est<br />
celle de nombreux suffixes (-ja, -na, etc.), et, sur thème nu, celle<br />
d'une des deux formes de postverbaux (§ 721). Antérieurement,<br />
il avait servi à la normalisation de flexions athématiques : vesna,<br />
voda (§ 176), sestra (§ 198) ; et voir koza, noga, rosa, § 744 ; juxa,<br />
muxa, § 761 ; *sïlezena « rate » (§ 1097). Une partie de ces formes en<br />
-a peuvent ne pas continuer directement des athématiques, mais<br />
en représenter des dérivés : ainsi zemlja, zima, zena (§ 175), comme<br />
*serda «milieu» sur *sïrd- (§ 806). On voit ensuite, dans une<br />
partie des langues slaves, -(u)va se substituer à -y, -uv- (.§ 201).<br />
Des féminins en -a présentent dans leur vocalisme radical<br />
l'allongement caractéristique qu'on désigne par le nom sanskrit<br />
de vrddhi « croissance, renforcement » :<br />
R. vôron « corbeau », lit. vafnas, fém. r. vorôna « corneille », lit.<br />
vârna (§ 116). De façon semblable :<br />
R. sorôka « pie », s.-cr. svrâka, lit. sârka, féminin eh rapport<br />
rvmKnVvlû ntrcin L»/•»»»_ û rrr» // />nrKûon v\
22 SUFFIXE * -i- [§ 709]<br />
R. vydra « loutre », lit. ûdra, sur thème *udr- (§ 1117).<br />
R. korôva « vache », s.-cr. krâva, lit. kdrvé, en regard d'un<br />
masculin *krwo-, et lit. . gâlvq, acc. (r. golovâ) «tête», d'un<br />
balto-slave *gâl-wà, en regard d'un masculin germ. *kal-wa-<br />
(§ 1185).<br />
Lit. gumbas « enflure », et fém. lette gumba d'intonation rude,<br />
s.-cr. gùba{§ 767).<br />
Lit. drahgas « perche » et fém. drdnga, slov. drçg et fém. s.-cr.<br />
drùga « grand fuseau » (§ 767).<br />
R. korôsta « croûte », s.-cr. kràsta, sur thème lit. kars-, inf.<br />
kafsti, d'intonation douce (§ 1165).<br />
Slavon pëgu « tacheté » sur la racine *peig- d'intonation douce,<br />
et subst. féminin s.-cr. pjëga «tache de rousseur» (§ 820).<br />
S.-cr. pjëna « écume », lit. spâinè, en regard du masculin skr.<br />
phénah (§ 1075).<br />
En baltique :<br />
Lit. stirna « chevreuil », lette stifna, peut-être sur un masculin<br />
*s(t)rn-, mais le féminin slave, s.-cr. sfna, est d'intonation douce<br />
(§ 1076). " ' "<br />
Lette siëva « femme, épouse », qui peut être sur un dérivé en<br />
*-wo- (si. posivu, § 1182) de la racine dont le dérivé en *-mo-, lit.<br />
seimà, lette sàime « famille », présente l'intonation douce (§ 1067).<br />
Lit. svâinë « sœur de la femme », voir § 1072.<br />
La vrddhi est une caractéristique de dérivé qu'on peut reconnaître,<br />
avec élément sufïîxal, dans (j)asika de osa «tremble»<br />
(§ 1045) ; et voir az(ï)no «cuir», lit. ozkà «chèvre», et skr. ajâ,<br />
si. koza (§ 744).<br />
Suffixe *-i-<br />
§ 709. — Du suffixe *-u-, il ne reste qu'un type de flexion qui se<br />
contamine avec la flexion en *-o-. Le suffixe *-i-, s'il a aussi donné<br />
un type de flexion, est également important comme type de<br />
dérivation, et il concurrence largement les postverbaux en -û<br />
et en -a.<br />
Il ne s'agit que des féminins en -ï. Les masculins, en nombre<br />
limité, sont encore bien représentés en vieux slave (§ 169), mais<br />
le type n'est plus productif. On y trouve des noms de parenté,<br />
zçtï « gendre », etc. ; des noms d'animaux, rysï « lynx », et particulièrement<br />
d'oiseaux, *telervï « coq de bruyère », etc., auxquels<br />
on peut joindre gogolï «vanneau », r. gôgol', et *vudûdï «huppe »,<br />
mot à redoublement onomatopéique et de forme flottante (r.<br />
udôd, etc.), d'après leurs adjectifs possessifs (§ 294), v. r. gogolinu,<br />
v. si. vùdudinù (Théod.) ; des dérivés suffixaux divers, tatï
[§ 710] SUFFIXE * -i- 23<br />
« voleur », bëgunï « fuyard », etc. Mais on n'a guère comme thème<br />
en -i- de date indo-européenne que ognï « feu », auquel on doit<br />
joindre *çzï «serpent» (§ 77), lit. angis, lat. anguis. Plusieurs<br />
mots sont sûrement ou probablement des emprunts, kumetï,<br />
gostï, gospodï, Ijudije, peut-être golçbï. Plusieurs résultent de<br />
normalisations d'athématiques, pçtï, zvërï, dëverï, moggtï, et<br />
d'autres, comme dïnï, conservent des traces de flexion athématique,<br />
mais sont en train de passer à la flexion en -ï. Enfin quelques mots<br />
sont en regard de verbes : bolï « malade » et composé oëebolï<br />
«malade des yeux» (§ 1212) de bolëti, medvëdï «ours», composé<br />
à second terme -ëdï de jasti, navï « mort » de nyti, factitif naviti<br />
(§ 519) ; usidï «fugitif» de sïd-, avec un allongement vocalique<br />
qu'on retrouve sûrement dans upirï «revenant» et *notopirï<br />
«chauve-souris, papillon (de nuit)» (§ 171) en regard de *pïr-,<br />
pere- « voler » (§ 472), comme dans le type féminin de rëcï « parole »<br />
(§ 715).<br />
§ 710. — Les féminins en -ï. — Le type a été productif et n'a<br />
pas cessé de l'être (§ 167), et les formations en sont variées, si<br />
nombreuses, et souvent si flottantes avec les formes en -û et en<br />
-a, qu'il faut faire un choix parmi elles et examiner d'abord les<br />
exemples sûrs du vieux slave.<br />
Le plus difficile est de trouver un substantif féminin en -ï dont<br />
la flexion remonte à l'indo-européen : osï « axe, essieu », lit. asis,<br />
lat. axis (§ 36), et encore pourrait-il s'agir de l'adaptation d'un<br />
athématique *aks~. C'est cette adaptation qu'on trouve dans solï<br />
« sel », gr. aXç, gén. âkoç, mysï « souris », lat. mus, gén. mûris, dvïrï<br />
« porte » (§ 174), et kostï « os », vïsï « village » (§ 175). On a d'autre<br />
part -ï dans des emprunts : au germanique, lïstï « ruse » de got.<br />
lists, vestï « chose » de got. waihts (§ 36) ; au grec, kadï « cuveau »<br />
de xâôi(ov), et au grec savant jeresï « hérésie, aïgeaiç », varï «tour,<br />
/?ctgtç », vpostasï U7TO(JTKCJ!.Ç, olokavûtosï ôXoxavrmoiç (Cant. XI, 38),<br />
en slavon serbe xarï « grâce, %&QIÇ » et mod. hâr, etc.<br />
En dehors de ces emplois morphologiques, -ï en valeur de suffixe<br />
fournit abondamment des abstraits, dérivés de noms, adjectifs<br />
et moins nettement substantifs, et de verbes.<br />
§ 711. Dérivés d'adjectifs. — En vieux slave :<br />
bystrï « rapidité » (Ham.), r. bystr' ;<br />
necistï «impureté» (Hés. LXXVIII, 1), r. nécist', s.-cr. nêcïst,<br />
et r. ancien et dial. cist' « terrain nettoyé, essart », mais prôcist', etc.<br />
sont postverbaux (§ 796) ;<br />
crûvljenï « le rouge », r. cérvlen' « l'écarlate », et slavon crûvenï<br />
(§ 409), s.-cr. cfvën ;
24 SUFFIXE * -i- [§ 709]<br />
klosnï « défaut physique, mutilation » (Éph. V, 27, Cosmas<br />
12721), sur klosnu « estropié » (§ 1071) ;<br />
laskrudï « gourmandise » (§ 12) ;<br />
Ijutï « violence, rigueur » (Athan., Ham.), s.-cr. Ijûl « roche » ;<br />
sumotrï «considération, but» (Gyr. Jér.), supposant un adjectif<br />
*motru (§ 641) ;<br />
praz(dï)nï « loisir » (Izb. Svjat., Pand. Ant.), nepraznï « occupation<br />
» (Cyr. Jér.), sur praz(di)nu (§ 1071) ;<br />
ravinï « plaine » (J. Ex.), s.-cr. râvan ;<br />
rïvïnï « zèle, rivalité » (Gr. Naz.) ;<br />
studenï « le froid », s.-cr. sludën ;<br />
sytï « satiété », sur sylu, verbe sytiti, du germanique, à côté de<br />
lit. sôtis (§ 618) ;<br />
tvrudï « solidité, firmament » ;<br />
vetusï « vétusté, vieillerie » (Rom. VII, 6, Gr. Naz.), r. vélos,<br />
v'ètos ;<br />
izvëstï «connaissance sûre » (§ 1169), sur l'adjectif izvëslû ;<br />
zelenï « du vert » (Pand. Ant.), r. zélen', s.-cr. zêlën ;<br />
zulï « le mal » ;<br />
zestocï « dureté », r. zëstoc' ;<br />
lënï n'apparaît que dans une locution, v. si. ne lënï « il ne faut<br />
pas tarder» (Phil. III, 1, Athan.), v. tch. lën më «j'ai paresse»,<br />
pol. len mi, bulg. len me e, et peut être adverbe (§ 1199) ;<br />
prëproslï « simplicité » (Pand. Ant.) est ordinairement adverbe,<br />
et oprostï «accomplissement» est sur le verbe oprostiti (§ 714) ;<br />
le slavon a le substantif proslï « droit chemin ».<br />
En slavon :<br />
bëlï « le blanc », r. bel', pol. biel ;<br />
ërûnï « le noir », r. cem' « nielle », s.-cr. crn ;<br />
debelï « grosseur » ;<br />
golï « rameau (nu) », tch. hûl « bâton », slov. gçl « jeune tronc<br />
ébranché », et r. gol' « nudité » ;<br />
novï « prémices, nouvelle lune », r. nov' « blé nouveau » ;<br />
raznï « différence », r. rozn' ;<br />
zlutï « le jaune », r. zell' ;<br />
Et dans les langues slaves :<br />
*dïlzi « longueur » dans v.r. v dolozï, pol. w dluz.<br />
V. r. krëpï, mod. krep' « force, forteresse ».<br />
Pol. przestrzen « espace » en regard de przeslronny « spacieux »<br />
pour v. si. prostranû, avec une fausse alternance o : ie (§ 1070).<br />
Tch. plan « étendue plate » et « sauvageon », sur plany « plat »<br />
et « sauvage », et Usen « embarras, détresse », sur tës(k)ny (§ 1070).<br />
Bulg. prâhân «amadou» sur *praxnu (§ 1070).
[§ 710] SUFFIXE * -i- 25<br />
Et d'autres féminins en -ï ont l'aspect de dérivés d'adjectifs,<br />
ainsi v. si. plësï «calvitie» (§ 1138), et des mots à suffixe -rî,<br />
*dubrî, igrï, *rebrï (§ 1118), comme *kçdrï (§ 1113).<br />
D'autre part, dans les dérivés de noms de nombres, on a v. si.<br />
cetvrutï « le quart », r. cétvert', s.-cr. cèlvrl, de là r. tret' « le tiers »<br />
(§ 316) ; et la série des nombres cardinaux de cinq à neuf, pgfï, etc.<br />
(§ 305), dont le rapport avec les ordinaux, pçtu, etc., est simple,<br />
du moins apparemment.<br />
§ 712. Dérivés de substantifs. — Un abstrait en -ï sur thème<br />
de substantif prend une valeur de collectif, mais l'exemple le plus<br />
net est v. si. cçdï « les gens » en face de cçdo « enfant », sûrement<br />
emprunt au germanique, et c'est même au germanique que doit<br />
remonter l'opposition du neutre en -o- et du féminin en -i- (§ 19).<br />
Celle de v. si. skçdulu «tuile, poterie » et skçdulï (-dilï, § 61) «des<br />
tuiles» n'est pas sûre (§ 1055).<br />
Un féminin bylï « plante », rare en vieux slave, se retrouve dans<br />
slov. bil « tige (d'herbe) », slovaque byV « un brin » (tch. byl est<br />
masculin), mais c'est un dérivé en -li sur le sens ancien de la racine<br />
by- (§ 1056), le collectif étant bylije (§ 925) ; une formation plus<br />
récente est r. byl' « événement, ce qui a eu lieu », abstrait tiré du<br />
participe parfait bylû.<br />
Le vieux-russe poganï « les païens » est de poganu, adjectif et<br />
substantif (§ 274), avec un singulatif v. si. poganinu ; il prend le<br />
sens d'un collectif en désignant des personnes, mais comme r.<br />
cern' « noirceur » au sens de « bas peuple, plèbe », et c'est un abstrait<br />
d'adjectif : r. pôgan' « ordure », s.-cr. pôgân.<br />
On garde peut-être un collectif ancien *grobï dans l'adverbe<br />
grobijç (§ 1203) : le mot grobu n'a pas autrement de collectif, le<br />
serbo-croate grôblje «cimetière» étant nouveau (§ 933).<br />
C'est dans les noms de peuples qu'apparaît le type de collectifs<br />
en -ï : Busï « les Russes » (Ham.), v. r. Cudi « les Tchoudes » (§ 263).<br />
§ 713. Dérivés de verbes. — Les exemples sont nombreux<br />
en vieux slave, avec une extension vaste, illimitée, dans les langues<br />
slaves. En vieux slave :<br />
blçdï «égarement», de blede-, blçsti (§ 263), en regard du postverbal<br />
blçdû (§ 762) ;<br />
borï « lutte » (Gr. Naz.) ;<br />
jadï « le manger », et sûnëdï, izëdï (Gr. Naz.), de jad-, sunëd- ;<br />
mazï « onguent » (Pand. Ant.), r. maz', pômaz', slov. mâz (§ 783) ;<br />
pletï « tresse, fouet » (Izb. Svjat.), r. plet' « fouet », v. pol. pleé<br />
« tresse », de plet- (§ 803) ;<br />
v. r. prçzï « boucle », v. si. vuprçzï (Pand. Ant.), et poduprçzï<br />
(Izb. Sviat.) « attelaere ». r. ÛDriaz'. tch. zânrez. etc. (8 7631 :
26 SUFFIXE * -i- [§ 709]<br />
rëcï « parole », de rece-, s.-cr. rljec, slov. rêë, à côté du postverbal<br />
rokù{§ 726);<br />
skrubï « affliction », en -regard de skrûbëti « être affligé », r.<br />
skôrbnut' « se ratatiner » ( § 592) ;<br />
Uni « courroie », de *lïn- « tendre » (§ 457), r. -tinât' ;<br />
tvarï « création », utvarï « parure », de tvoriti, postverbal tvoru<br />
( § 736) ; s.-cr. tvâr, stvâr, slov. (s)tvâr, tch. tvâr, pol. twarz, potwarz<br />
« calomnie » ;<br />
vëdï « connaissance », et povëdï, ispo-, propo-, zapo-, provëdï<br />
(Gr. Naz.), suvëdï (§ 747) ; r. zâpoved', s.-cr. zàpovijed, slov.<br />
zapôved, etc. ;<br />
vidï «vue » (Ham.), ailleurs vidu (§ 796) ;<br />
xotï « amant, amante » (§ 172), poxotï « désir », samoxotï « propre<br />
volonté » ; r. pôxot', slov. pohçt, et pol. chçc, tch. chut' (§ 731) ;<br />
zïdï «poterie, brique» (Hés. LXXXVIII, 33, et var. Ps. XXI,<br />
16), ailleurs zïdu (§ 794) ; tch. zed' « mur » ;<br />
zalï « tombeau », et v. r. zalï « (cela fait) peine », en regard de<br />
zelëti « désirer », zelja « douleur, deuil » ; r. zal' « c'est dommage »,<br />
pol. zal, uzal « plainte » (masculin), slovaque zial', s.-cr. zào ; de<br />
zàl mi je « cela me fait de là peine », le slovène tire l'adjectif zàl,<br />
fém. zâla, « qui fait peine ».<br />
Et kapi «réceptacle, fourreau» (J. Ex., Upir'), adj. kapïnu<br />
dans kapïnokrilu KOIBÔTIXEQOÇ (§ 1217), qui est à part de kapi<br />
« image, statue » emprunté au turc, et qui doit s'expliquer par la<br />
racine verbale de kopati « fouir » (§ 573) en apportant l'explication<br />
dont elle a besoin. SI. kopati et lit. kapôti sont des dénominatifs<br />
du postverbal lit. kàpas « fosse », mais le participe passif v. pr.<br />
enkopts « enterré » appartient à la flexion du lette kàmpju, kàmpt<br />
« saisir », à infixe nasal généralisé en lette ; et la racine baltoslave<br />
kap-, au sens plus général d'« enfermer, contenir », rejoint<br />
celle du latin capiô «je prends, je contiens», vraisemblablement<br />
à vocalisme radical -a- dans un verbe expressif, et sans rapport avec<br />
gr. XO7UT
[§ 710] SUFFIXE * -i- 27<br />
R. klep' « traquenard » et v. si. klepïca (Pand. Ant., § 874),<br />
sur klepati (§ 803).<br />
Slov. mlêz «premier lait (de l'accouchée) », voir § 1188.<br />
Y. r. movï « bain » (§ 519) ;<br />
plavï, s.-cr. ancien plâv « bateau », slov. plâv « radeau, train de<br />
bois », sur plove-, itér. plavati (§ 461).<br />
V. r. prçdï, r. prjad' «fil» et èprjad', prlprjad' (§ 808).<br />
R. rez' «tranchées», pol. rzez «massacre» (§ 776).<br />
Y. r. vïrsï « grains battus », r. vers', slov. vrs « céréales », sur<br />
*vïrse- ;<br />
zobl « graines à manger, picotin », r. zob', slov. zçb, s.-cr. zôb<br />
« avoine » ( § 732) ;<br />
zlûdï «désir, plaisir», sur zlûdëti «désirer» (§ 592), en regard du<br />
postverbal v. si. gladû (§ 769).<br />
Et v. r. talï « otage », ukr. tal', sûrement sur tolili « apaiser »<br />
(§ 608) ; slavon russe zelï «herbe», collectif zelije (§ 925), sur le<br />
thème verbal de lit. zélii « verdir », si. zelenû « vert » (§ 409).<br />
Pour granï, r. gran' « pan, facette », voir § 1084.<br />
§ 714. Avec préverbe. — En vieux slave :<br />
pricçstï « participation » ( J. Ex.), sur pricçstiti ( § 808), dénominatif<br />
de cçstï « part » ;<br />
izgrëbi, plur., « étoupe » (J. Ex.) ; r. izgrébi, slov. izgrebî, sont<br />
refaits sur grebe- et ses postverbaux (§ 803) ;<br />
pokonï « commencement », mais voir § 727 ;<br />
okovï « entrave » ; slov. okôvi, plur., et kôv, pôdkov (§ 737) ;<br />
prëlïstï « tromperie », sur prëlïstiti « tromper », lïstiti, dénominatif<br />
du mot d'emprunt lïsli «ruse» (§ 710); r. prel'stit' et prélest'<br />
« charme » ;<br />
ometï « filet » ( J. Ex., Cyr. Jér.), et slavon sûmetï « fumier,<br />
balayures », tch. smet', slov. smçt (§ 804) ;<br />
propadï « précipice », et slavon raspadï, upadï, r. zâpad!, s.-cr.<br />
zâpad et zàpâd (§ 785) ;<br />
opasï « queue » (§ 557), r. ôpas', rôspas' (§ 787) ;<br />
oprostï « accomplissement » (Ephrem) sur oprostiti « accomplir »,<br />
et voir prëprostï (§ 711) ;<br />
ispytï « examen », ailleurs -pgtû ( § 799) ;<br />
ostezï « chlamyde » (Cyr. Jér.), c'est-à-dire «vêtement agrafé»,<br />
en regard du postverbal zastog- « fibule » ( § 733) ;<br />
osibï « queue » (Upir') (§ 796) ;<br />
obuvï «chaussure» (Pand. Ant., Ham.), r. ôbuv', slov. obûv<br />
(§ 760);<br />
obedï « anneau » (Upir'), en regard des postverbaux en -vodu<br />
(§ 724) : la forme à vocalisme -e- disnaraît : r. ôbod « cercle, iante
28 SUFFIXE * -i- [§ 709]<br />
de roue », avec l'accent de fém. ôbod' et pour ôbed' conservé<br />
dialectalement ; bulg. ôbeci « boucles d'oreille », de obedïcï, et<br />
s.-cr. ôboci ; mais, sur -vede-, le russe refait dôvëd' « la dame (au<br />
jeu d'échecs) » ;<br />
suvçzï « lien » (Upir'), et masc. sùvçzu (Gr. Naz.) comme su(V)QZU<br />
( § 762) ; r. svjaz' ;<br />
ozrûcï «aspect» (Upir'), var. ozrëëï, ozriëï, et ozracï comme<br />
le postverbal ozraku(% 771), sur zrëëe-, zrûcati.<br />
En slavon et en vieux russe :<br />
raskosï « délices », r. ràskos (« luxe »), pol. rozkosz, tch. rozkos,<br />
s.-cr. râskos (masc.), en regard du verbe pol. kochac « aimer »,<br />
tch. kochali se « se délecter », avec pol. odkosz « refus d'aimer »<br />
sur odkochac ; et voir pokosï, adv., § 1200.<br />
V. r. pokromï «lisière », r. pôkrom' (§ 741).<br />
ukrçtï « éboulis », de ukrçtiti sç « se détacher, s'ébouler », et r.<br />
pérekrut' « (re)torsion » (§ 762).<br />
V. r. prikupï « achat en supplément » (v. si. -kupu, r. mod.<br />
prikùp, masc., § 759).<br />
V. r. osypï « rempart de terre », r. ôsyp', prisyp', etc. (§ 799).<br />
V. r. p(r)otorzï « déchirement, trouble », r. mod. prôtorz « aiguille<br />
sans chas »(§ 811).<br />
Pour les formes dans les langues slaves, voir § 716.<br />
§ 715. Vocalisme radical. — Les dérivés en -ï prennent en<br />
général le vocalisme des noms ou verbes dont ils sont tirés, mais<br />
dans le cas de vocalismes alternants ils présentent leurs particularités<br />
:<br />
1° A la différence des postverbaux en -û (et -a), dont tout un<br />
type ancien se caractérise par le vocalisme radical -o-, ils ne<br />
recherchent pas ce degré alternant et offrent volontiers le vocalisme<br />
réduit ou le vocalisme -e- : d'où les oppositions relevées de blçdï<br />
et blçdu, oslezï et zastog-, obedl et obodu, sùvçzï et su(v)QZU, ozruëï<br />
et ozraku.<br />
2° Un groupe important de formes présente un vocalisme<br />
long : Ivarï en regard du postverbal tvorû, et kapï, plavï, talï,<br />
zalï ; rëcï en regard de roku, izgrëbi en regard de grobu et -greb-,<br />
et voir vodotëëï, § 717 ; Uni. Et l'on relève dans les substantifs<br />
en -ï masculins navï, usidï, upirï et *nolopirï. Si ces vocalismes<br />
longs ne diffèrent pas dans l'ensemble de ceux des itératifs et<br />
factitifs, celui de rëëï de celui de -rëkali, celui de Ivarï de celui de<br />
-tvarjati, etc., une forme comme usidï « fugitif », sans dérivé verbal<br />
de sïd-, suffit à prouver que le type est, en partie au moins, indépendant<br />
des types verbaux, et qu'il est d'origine nominale,
[§ 710] SUFFIXE * -i- 29<br />
continuant les substantifs athématiques sur racine verbale<br />
(§175).<br />
Ces observations sur le vocalisme caractéristique des dérivés en -ï<br />
doivent aider à interpréter certains substantifs isolés, comme gnïsï,<br />
granï, mëlï (§ 718).<br />
§ 716. Extension du type. — Le type suffixal est devenu un<br />
type de flexion féminine, en concurrence avec la flexion masculine<br />
en -u et féminine en -a des postverbaux, et qui a pu se développer<br />
largement dans plusieurs langues (§ 167), de façons un peu diverses.<br />
C'est le cas en russe, où la flexion en -ï est bien caractérisée par<br />
la mouillure de la consonne finale du thème ou, pour -s et -z, par<br />
l'alternance consonantique, et où ces féminins, dans leurs différents<br />
types, dérivés verbaux et nominaux, composés, sont particulièrement<br />
abondants : ainsi dans les dérivés de pis- « écrire », ôpis',<br />
pôdpis', prâvopis', etc., pour -pis des autres langues (§ 794). En<br />
serbo-croate et en slovène, où les mouillures ont disparu, l'aspect<br />
est d'un flottement, dans les postverbaux, entre la flexion dure des<br />
masculins et la flexion durcie des féminins en -ï, plus un flottement<br />
entre les deux flexions de féminins, et ces flottements sont très<br />
nombreux régionalement en serbo-croate, ainsi sfd masc. et fém.<br />
et sida «colère» (§ 810); en cakavien moderne srâm «honte»,<br />
gén. srâma, masc., et srâmi, fém., stld « pudeur », masc. et fém.,<br />
fém. stên « roche » et stenâ « paroi rocheuse », etc. En tchèque,<br />
le flottement s'accompagne de celui entre les deux flexions en -ï<br />
et en -é de -ja (§ 152).<br />
Ces formes du type en -ï seront indiquées, en partie du moins,<br />
comme variantes dans la formation des postverbaux. Pour v. si.<br />
zulobï à côté de zuloba « méchanceté », voir § 999.<br />
En raison de la grande productivité du type en slave, la comparaison<br />
avec le baltique ne peut rien apporter de net. D'ailleurs<br />
la flexion des féminins en -i- ne s'y conserve que partiellement,<br />
et la productivité du type est passée en lituanien à celle du type<br />
en -ê (§ 167). C'est là qu'il faut chercher les dérivés verbaux,<br />
comme en partie en tchèque dans les féminins en -ë. Il y a des<br />
dérivés d'adjectifs, ainsi plur. mëlys « le bleu, l'indigo » de mêlas<br />
« bleu » : il faut les étudier en lituanien, comme en slave les dérivés<br />
slaves.<br />
Et en slave on doit considérer encore les adjectifs en -ï (§ 277)<br />
et les adverbes en -ï qui n'en sont pas séparables, et dont une liste<br />
sera dressée § 1199. Pour les substantifs en -ï, il reste à examiner<br />
les composés, et à passer en revue les mots isolés qui paraissent<br />
anciens.
30 SUFFIXE * -i- [§ 709]<br />
§ 717. Les composés. — Ils sont nombreux, et l'on n'en signalera<br />
que quelques-uns, du vieux slave, du slavon ou du vieux russe.<br />
En vieux slave :<br />
çdolï « vallée » ; r. udôl, mais r. ancien et slavonisme udôl',<br />
avec l'accent de udôl ( § 1223) ;<br />
vodonosï (Supr.) et vodonosu (Év.) « aiguière », et slov. vodonôs<br />
masc., r. vodonôs « porteur d'eau », et les postverbaux sont en<br />
-nosu (§ 723);<br />
vodotecï et vodotëëï « torrent » (Gr. Naz.), et Supr. -tëcï ou -tëëa<br />
(§ 1022) ; r. vodotéc' avec l'accent de vodotéca, et vôdotôc à côté<br />
de vodotôk à postverbal -toku (§ 726). Une même opposition du<br />
dérivé en -ï et du postverbal se rencontre dans r. vôdovert' « tournant<br />
d'eau, tourbillon » et vodovorôt, comme dans zdverl' « tourbillon »<br />
et zdvorôl « tournant » (§ 770) ;<br />
suvruslï « du même âge » (J. Ex.) (§ 1169) ;<br />
samoxolï, voir xotï, § 713 ;<br />
Et voir nozdri « narines », § 1216.<br />
En slavon : -<br />
bogolisï « stupide », féminin, mais se disant d'un homme ;<br />
ponozï « cnémide, jambart», r. pônozi, plur., «fers aux pieds,<br />
lacets pour oiseaux», et v. r. vûznozï « côté des pieds » (§ 1219) ;<br />
izdrçcï, dans instr. plur. izdrçcïmi « avec des bâtons de mains »,<br />
est l'adverbe izdrçcï fléchi (§ 1200).<br />
En vieux russe :<br />
nedëlï « bien indivis », r. nédel' ;<br />
novodëlï, r. novodél', « ruche nouvelle » ;<br />
povodï « inondation », r. pôvod' et ndpovod' « fil de l'eau, courant »,<br />
izvod' « écoulement d'eau », zdvod' « anse, petite baie », à côté<br />
de izvon' : -vonï (§ 1083) est en regard du verbe -vodïniti (§ 176),<br />
mais -vodï n'est pas en regard d'un verbe -voditi qui est rare (r.<br />
navôdit' « amener l'eau ») et est tiré de locutions po vodé, pô<br />
vodu, etc., tandis que r. suvod' «tourbillon, gouffre» est un composé<br />
à premier terme s g- (§ 1222).<br />
Dans les langues slaves, on notera slov. obîst (et obîstje, § 928)<br />
« ce qui entoure le rein, isto ».<br />
§ 718. Substantifs isolés. — Un bon nombre de féminins en -ï<br />
sont obscurs ou posent des problèmes :<br />
R. cep' « chaîne », voir § 748.<br />
Y. si. cëvï dans cëvïnica « flûte », s.-cr. cïjev « tuyau », slov. cêv<br />
« tuyau, bobine », v. tch. ciev ; et pol. ceva, mais en tchèque cëva
[§ 710] SUFFIXE * -i- 31<br />
et céva sont plus récents. Le rapport est évident avec lit. seivà<br />
(acc. selvq) et saivà « tuyau » (de plume et servant de bobine).<br />
Il suppose un balto-slave saiv-, var. *kaiv-, et une formation<br />
verbale à préverbe en si. -s- (§ 12), disparue, et dont le substantif<br />
était le dérivé» en -â ou -i-. Mais cette forme verbale est sans<br />
v<br />
correspondant sûr.<br />
Y. si. dalï dans la locution po dali « au loin » (Izb. Svjat.), d'après<br />
r. dal' « le lointain », pol. dal, s.-cr. dâlj, mais à côté de dalja<br />
(§ 1022), et surtout dans des locutions adverbiales comme r.<br />
v dali.<br />
V. si. gnïsï « chose dégoûtante » (gnesï Euch.), à côté de gnusû<br />
(§ 756), verbe gngsiti et gnïsiti (Hés. IX, 26 gnçsitu «il souille»,<br />
var. gnïsilû), v. si. gnusali sç et gnçsati sç «être dégoûté » (§ 65).<br />
On restitue une racine verbale *gnûs-, non identifiée et sans doute<br />
expressive, dont gnïsï est le dérivé en -ï, avec -ï- pour -û- par<br />
assimilation vocalique comme dans v. si. trïstï (trestï) pour<br />
trustï (§ 61) ; et un postverbal gnusu, avec un doublet gnçsû qui<br />
paraît supposer une flexion ancienne à infixe nasal *gnûs-, présent<br />
*gngs- (§ 450), mais ici la nasalisation peut être secondaire, expressive<br />
et traduisant un froncement du nez.<br />
Slavon granï « chapitre », r. gran' « pan, facette », voir § 1084.<br />
Y. si. kobï « sort », r. ancien kob' « divination », s.-cr. kôb (§ 739),<br />
verbe kobiti « augurer », s.-cr. kôbiti « présager », et slov. kçbnili<br />
« survenir », prés, kçbne-, qui doit indiquer une racine verbale<br />
kob-, mais sans que cet inchoatif en -nçti justifie un rapport avec<br />
le verbe d'état lit. kabëti « être suspendu » : la comparaison est avec<br />
v. isl. happ « bonheur », norv. heppa « arriver ».<br />
V. si. mëlï « rivage » (Ham.), r. mel' (ukr. mil') « bas-fond, banc<br />
de sable », pol. miel. Un rattachement du mot à melje-, *melti<br />
« moudre » peut se légitimer : -mïlëli « être saillant » et lette mala<br />
« bord » se laissent expliquer par melje- au sens de « raviner »<br />
(§ 591). Alors mëlï est du type de rëcï à allongement vocalique,<br />
sur la forme nouvelle mel- de la racine (§ 535), et identique au<br />
tchèque dialectal mël' « mouture fine, farine, sel fin » ; le slovène<br />
a mlêv «banc de sable», masc., et mlêv «mouture», fém. (§ 727).<br />
On a une variante en -û dans tch. mël «sable», masc., et v. si.<br />
mëlû « chaux », r. mel « craie », et un adjectif dérivé dans mëlûkû<br />
(§ 983), r. mëlkij, aux deux sens de « (moulu) fin, petit » et de « peu<br />
profond ».<br />
V. si. nepûstï, fém., « prétexte » n'est connu que par un exemple<br />
de la traduction d'Athanase, I, 23615, mais il fournit la base du<br />
dénominatif nepuslevali « supposer, estimer ». On a rapproché ce<br />
verbe de pol. niepee « pas pour rire, misère » et de v. tch. z nepty<br />
« à l'improviste ». Le rapprochement plus direct est avec le serbocroate<br />
kaikavien nenca. « susnicion. simnosit/ion » verbe np.nr.ili
32 SUFFIXE * -i- [§ 709]<br />
On a donc affaire à la racine pût- du tchèque ptâti (se) « s'informer »,<br />
dont v. si. pytati « examiner », r. pytât', est l'itératif. Mais tch.<br />
ptâti est isolé, et sa flexion prés, ptâ- doit être secondaire, l'itératif<br />
pytati supposant un autre présent, soit *putje-, soit *pûte-, ce qui<br />
interdit un rapprochement, du moins direct, |?vec lat. putô,<br />
putâre. Sur une racine pût-, un dérivé nepûstï, féminin en -ï, est<br />
insolite : ce ne peut être qu'une variante secondaire de *nepusta,<br />
s.-cr. nepca, refaite sur le dénominatif nepustevati ou s.-cr. nepciti.<br />
Y. SI. prûsi « poitrine », r. pérsi, s.-cr. prsi, slov. prsi. Le mot est<br />
balto-slave : lit. pirsis, zem. pirsys, plur. « poitrail de cheval » ;<br />
l'intonation rude contrarie le rapprochement avec skr. pârçuh<br />
« côte ».<br />
V. r. rûzï « seigle », r. roz (gén. rzi), s.-cr. râz, slov. fz. Les correspondants<br />
sont masculins, avec d'autres suffixes, dans lit. rugys,<br />
plur. rugiaï, et v. sax. roggo (ail. Roggen).<br />
Pour v. si. sënï « ombre », voir § 1084.<br />
Pol. paciep (xvn e siècle) « lieu sombre, fosse obscure » est un<br />
composé nominal (§ 1220) qui présente un thème tep- en regard<br />
de potonqc «sombrer», potop «déluge» (§ 732).<br />
V. si. xlçbï « cataracte », r. xtjab', isolé en slave.<br />
§ 719. Finales -dï, -tï. — Une finale -dï apparaît dans une série<br />
de~mots, sans qu'on ait nettement affaire à un suffixe -dï (§ 1005) :<br />
Slavon grçdi « poitrine (de bélier) », r. grud', tch. hrud', s.-cr.<br />
grûdi, slov. grçd, le mot désignant dans plusieurs langues la poitrine<br />
des bêtes, par opposition à prûsi qui se dit des hommes ; pol.<br />
ancien grçdzi, et mod. grqd, masc., « élévation de terrain dans un<br />
marais, îlot ». Sans étymologie valable.<br />
V. si. mëdï « airain, cuivre », r. med', s.-cr. mjèd, etc., sans<br />
étymologie.<br />
V. si. pçdi « empan », r. pjad', s.-cr. pêd, qui doit se rattacher<br />
à la racine de pïne-, pqti « tendre » (§ 457), lat. pendô, et supposer<br />
en slave le présent suffixal en -de- (§ 444) du latin. Le lituanien a<br />
spéndziu, spçsti « tendre des lacets », qui a pris sûrement son<br />
intonation rude à l'autre racine verbale de spréndziu, sprçsti<br />
« mesurer à l'empan », slave prqde-, prçsti « filer », s.-cr. prësti<br />
(§ 430). Les deux racines se mêlent, et le germanique a got.<br />
spinnan « filer » et ail. spannen « bander » v. h. a. spanna « empan,<br />
Spanne ».<br />
V. si. prazdï «loisir» (Gr. Naz., Pand. Ant.), sur thème *porzd-,<br />
avec adjectif v. si. prazd(ï)nu (§ 1071).<br />
Y. si. *strûdï « miel » (stredï Izb. Svjat.), slov. strd, pol. ancien<br />
stredz (gén. strdzi), v. tch. stred (gén. strdi). On a proposé un<br />
rattachement à la racine *sru- « couler » ( § 462) : ce serait le miel<br />
liquide qui coule de l'arbre ou de la ruche, et l'élément -d- serait<br />
un élargissement, peut-être la trace d'un présent en -de-.
[§ 710] SUFFIXE * -i- 33<br />
V. si. studï « naturel, caractère » (Gyr. Jér.) ne se retrouve de<br />
façon sûre que dans s.-cr. cûd, le slovène cûd étant sans doute<br />
un croatisme.<br />
Y. si. vladï « chevelure » (Virg.), slavon russe volodï, est bâti,<br />
parallèlement à vlasu « cheveu » à suffixe -su (§ 1135), sur le thème<br />
val- de lit. valaï « poils de la queue du cheval », skr. vâlah.<br />
V. si. zrùdï « bâton », r. zerd' « perche, gaule », slov. zfd, tch.<br />
z(e)rd', pol. zerdz, est isolé, et un rapprochement avec gradu<br />
« enceinte » est inacceptable.<br />
Pour *zadï « derrière », sur la préposition za, c'est un mot à emploi<br />
uniquement adverbial, v. si. zadi, suzadi, etc. (§ 1200), comme<br />
prëdï «devant» (§ 1119), sunadï «à la surface», et le substantif<br />
est v. si. zazdï (§ 1019).<br />
La finale -tï, elle, est aussi celle d'un suffixe de large extension,<br />
et c'est à propos de ce suffixe qu'il faut étudier v. si. klëtï « cellule »,<br />
lëlï «(il est) permis» (§ 11.70), plutï «chair», rail «guerre», retï<br />
«rivalité», etc. (§ 11*71).<br />
La finale -vï de v. si. vëtvï « branche », vruvïi corde » est également<br />
un élément suffixal, voir § 1186.<br />
Pour -ëï dans v. si. zluëi « bile », voir § 1041.<br />
§ 720. L'accentuation. —- Dans les substantifs à thème monosyllabique,<br />
on a les types ( § 218) :<br />
1° S.-cr. zôb, gén. zôbi, slov. zôb, gén. zobî, avec brève.<br />
2° S.-cr. rïjec, slov. rêc, tch. reë, avec accent mobile et recul<br />
sur intonation rude aussi bien que douce.<br />
3° S.-cr. mjëd, et slov. mêd, tch. mëd', avec accent immobile et<br />
métatonie sur intonation rude en slovène et en tchèque.<br />
Mais on trouve aussi s.-cr. pêd, slov. pçd, et tch. pid', s.-cr. et<br />
slov. tvâr, et tch. Ivâf, avec une longue en tchèque. Dans le second<br />
cas, le cakavien a slvâr, gén. stvârl, avec une métatonie sur intonation<br />
douce qui est celle de l'imperfectif dérivé tch. -ivâfeti et du type<br />
cak. po-zdrâvljàt, prés, -zdrâvljd-.<br />
Dans les formes dissyllabiques ou polysyllabiques à préverbe,<br />
le recul de l'accent sur le préverbe apparaît régulier, sauf les cas<br />
de flottement avec les postverbaux en -û et -a qui ont volontiers<br />
l'accent sur le thème verbal (§ 829) : r. ûtvar', përekrut', zdvert'<br />
en regard du postverbal zâvorôt, zâpad', s.-cr. zàpâd (et zâpad) ;<br />
s.-cr. sàblâzan, r. zâpoved', s.-cr. zàpovijed, cak. spôvïd, et slov.<br />
zapôved (§ 93).<br />
Dans les composés, q;ûi sont de plusieurs types, les accents<br />
(§ 1232) sont plus variés : r. prâvopis', vôdovert' en regard de vodovorôt<br />
à second terme postverbal ; et novodël', mais nëdel'.
CHAPITRE II<br />
LES POSTVERBAUX<br />
§ 721. Définition des postverbaux. — Le terme « nom postverbal »<br />
remonte à Michel Bréal et à son article « Noms postverbaux en<br />
latin » des Mémoires de la Société de Linguistique, IV, p. 82 : il a<br />
donné l'explication du substantif pugna « bataille » comme formation<br />
postérieure au verbe pugnâre « combattre (à coups de poing) »,<br />
dénominatif de pugnus « poing<br />
Le postverbal est un dérivé nominal déverbatif non suffixal,<br />
tiré directement du radical du verbe : ainsi en français « la trempe »<br />
de « tremper », « la détrempe » de « détremper ». Avec les verbes<br />
simples, le nom sans suffixe qui est en regard du verbe peut être<br />
aussi bien le nom dont le verbe est dérivé que le dérivé nominal<br />
du verbe. On sait que slava « gloire » est, historiquement, le<br />
postverbal de slaviti « glorifier » parce que slaviti est le factitif<br />
régulier de slove-, sluti « être renommé » (§ 613), mais on ne sait pas<br />
si xvala «louange» a précédé ou suivi xvaliti «louer» (§ 615) ;<br />
synchroniquement, slava et xvala sont à la fois les substantifs dont<br />
slaviti et xvaliti sont dénominatifs, et leurs postverbaux. Avec<br />
préverbe, poxvala est nettement postverbal de poxvaliti, comme<br />
proslava de proslaviti.<br />
Les substantifs postverbaux du slave sont des masculins en -û<br />
ou des féminins en -a, à l'exclusion des neutres ; il y a des adjectifs<br />
postverbaux, avec les trois genres naturellement. Il y a des postverbaux<br />
seconds termes de composés, substantifs et adjectifs<br />
(§ 1228). Les composés se distinguent en principe des postverbaux<br />
des verbes à préverbe par la forme du premier terme : su-, pocomme<br />
préverbes, sg-, pa- comme premiers termes de composés<br />
(§ 1220).<br />
Avant de se réduire à des thèmes flexionnels, les finales masc.<br />
-û et fém. -a étaient des suffixes i.-e. -o- et -â-. Il en est de même<br />
pour la finale -ï des thèmes en -i-, et ce type productif de féminins,<br />
qui se tire pour une bonne part de verbes, simples et à préverbe,<br />
est distinct des postverbaux proprement dits, mais il en est proche,
[§ 722] LES POSTVERBAUX 35<br />
et dès le vieux slave il en fournit des variantes, largement dans<br />
les langues ultérieures (§ 716). Il convient de le laisser à part,<br />
mais en en signalant les formes en concurrence avec les postverbaux.<br />
Les autres formations nominales déverbatives sont<br />
nettement sufïixales, y compris celle en -ja (§ 1022), bien qu'elle<br />
puisse se confondre en partie avec le type postverbal en -a, et en<br />
tchèque avec le type en -ï.<br />
§ 722. Plan de l'étude. — La considération du vocalisme radical,<br />
nécessaire pour certaines catégories de verbes, l'est plus encore pour<br />
les postverbaux, parce qu'il y a eu des évolutions du vocalisme.<br />
Un type ancien, d'origine indo-européenne, se caractérise par<br />
le vocalisme radical -o- : gr. Tpéx« « je cours », Tpc^oç « course » ;<br />
et l'on assiste dans les langues slaves à la décadence de ce type<br />
d'alternance et au développement de postverbaux, selon l'âge de<br />
leur création, sur les divers vocalismes des racines verbales.<br />
Car la production de postverbaux a été continue, et elle se<br />
poursuit toujours. Les postverbaux tiennent une place considérable<br />
dans la dérivation en slave, et il convient d'en faire une description<br />
assez complète, pour donner une idée exacte de leur importance ;<br />
et aussi parce que c'est une autre façon de mener l'étude des verbes,<br />
c'en est vraiment un complément. Une excellente monographie<br />
a été donnée pour le tchèque par Yves Millet : Les postverbaux<br />
en tchèque ; il faut l'étendre au vieux slave et aux autres langues<br />
slaves.<br />
Mais on est obligé de se limiter. On le fera ici, en principe, aux<br />
formes de cinq langues modernes, le russe, le polonais, le tchèque,<br />
le serbo-croate, et le slovène instructif à divers points de vue,<br />
pour l'accentuation, et pour le procédé de fabrication récente<br />
d'un vocabulaire abstrait riche en postverbaux, avec des emprunts<br />
au slavon, au russe, etc., et non sans calques de l'allemand. On<br />
prendra les mots des grands dictionnaires couramment utilisés,<br />
en russe celui de Dal', lexicographe et ethnographe, qui abonde<br />
en termes populaires et dialectaux ; et si l'on peut soupçonner<br />
pas mal des postverbaux qu'il signale d'exister plutôt virtuellement<br />
que réellement, il faut penser qu'une langue est riche aussi de ses<br />
virtualités.<br />
Il est beaucoup moins important que pour les présents en -e-<br />
(§ 425) de disposer les thèmes verbaux selon la consonne finale<br />
du radical, mais ce n'est pas inutile, et cette finale n'est pas sans<br />
avoir une certaine influence sur la création des postverbaux.
36 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
VOCALISME RADICAL -O-<br />
§ 723. — Voici les postverbaux des thèmes verbaux à alternances<br />
vocaliques :<br />
nese-, nositi :<br />
V. si. ponosu « affront », prinosu « apport », et nanosu (Pand.<br />
Ant.), iznosu et vûnosu. (J. Ex.), composé vodonosu (et -nosï)<br />
« aiguière ».<br />
R. donôs, iznôs, na-, nad-, ob-, ol-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
raz-, s-, u-, v-, vz-, vfinos, vodonôs.<br />
Pol. donos, przynos ; — tch. ndnos, prenos, prinos, etc. ; —<br />
slov. donàs (gén. donçsa), iznos, etc. ; — s.-cr. donos, ndnos, etc.<br />
Sur nés- : tch. prednes « diction, débit » (xix e s.), de prednésti,<br />
predndseli « dire en public », ail. vortragen.<br />
En baltique, lit. prânasas « prophète », sur pra-nèsli « proclamer ».<br />
veze-, voziti :<br />
V. si. vozu « char », prêvozu « passage, bac » (Ham. 51810, var.).<br />
R. voz, dovôz, iz-, na-, ol-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-,<br />
u-, v-, vz-, za-, vijvoz ; obvôz « action de charrier autour » et obôz<br />
« convoi, train des équipages ».<br />
Pol. wôz, nawôz, obôz « camp », etc., composé wqwôz « chemin<br />
creux, ravin» (§ 1223) ; — tch. vuz, dovoz, ndvoz, etc. ; — slov.<br />
vôz, odvôz, prévoz, etc. ; — s.-cr. vôz, prijèvoz, etc.<br />
Lit. ùzvazas « montée », et pervâzas « bac », mais pour pervâzas,<br />
de r. perevôz ; — grec oyoc, « véhicule », sur dial. Fiyu> « véhiculer».<br />
-nïze-, factitif -nozili ( § 428) :<br />
R. pronôz et pronôza, sur pron(o)zit' «percer», unôz et unôza,<br />
sur unozit' « piquer », zanôz et zanôza « écharde », snôza « bâtonnet ».<br />
Pol. snoza et zanoza « bâtonnet, cheville ».<br />
V. tch. prinoza « couteau de cuisine ».<br />
Et voir -niz, sur -nizali, § 795.<br />
cese-, eesati « peigner », kosnçti « toucher » (§ 500). On distinguera :<br />
1° *kosu «oblique», adj. (§ 820), r. kosil' «mettre de biais» :<br />
r. iskôs, otkôs et skos « pente », pokôs et perekôs « courbure », raskôs<br />
« entretoise », ukôs « boutant, étai », prikôs « le mauvais œil »<br />
(et fém. iskos', adv. ndotkos') ; — pol. ukos « biais » et z ukosa « de<br />
travers », zakos « zigzag » ; — tch. ukosem « de travers ».<br />
2° R. kosd « faux », kosit' « faucher » : dokôs, na-, nad-, ob-, ol-,<br />
po-, pod-, pere-, pri-, pro-, ras-, s-, u-, za-, vykos, composé senokôs<br />
« fenaison » ; — pol. kosa, pokos ; — tch. kosa, dokos, pokos ;
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 37<br />
3° Slavon kosa, r. kosâ « tresse de cheveux », pol. kosa, s.-cr.<br />
kèsa ; — v. tch. kosa « chevelure », slovaque kosa « plume » et tch.<br />
dial. kos « tuyau de plume ».<br />
Et voir -ces, § 803.<br />
Lit. kasà « tresse », et lette kasa « gale » sur kasu, kast « gratter,<br />
ratisser» (§ 548).<br />
§ 724. — Plete- :<br />
V. si. plotu et oploîu « palissade, haie » (pletï « tresse », § 713).<br />
R. plot (gén. plotâ, § 830) « palissade », et « radeau, train de bois »,<br />
se mêlant à *plûtu (§ 1160), oplôt «palissade» et «barrage»,<br />
pereplôt, zaplôl et zaplôla, et sur (prijploiil' « joindre, emboîter »,<br />
priplôt «joint» (adv. vploi' «tout contre», § 1202).<br />
Pol. plot, oplot ; — tch. plot, oplot ; —• slov. plot, oplol ; — s.-cr.<br />
plôt, ancien oplot.<br />
Mais la formation vivante est sur thème plet- (§ 803).<br />
Le verbe plete- étant un ancien présent en -te- de la racine *plek-<br />
(§ 429), le correspondant de si. plotu est gr. uXôxoç «tresse»,<br />
sur TCXSXO). Le russe podoplëka « doublure sous l'épaule » est sans<br />
rapport avec la racine *plek-, voir § 1227.<br />
brede- (bride-), broditi :<br />
V. si. brodu « passage (à gué) » (J. Ex.).<br />
R. brod, nabrôd, o-, pere-, raz-, s-, u-, vybrod ; zabrôd, et fém.<br />
zabrôda « polissonnerie » ; et masc. zabrôda « polisson », nabrôda<br />
« visiteur importun », perebrôda « rôdeur », pribrôda « (animal) qui<br />
vous suit»; composé sumasbrôd «extravagant» (§ 1228).<br />
Pol. brôd, przebrôd : — tch. brod ; — slov. brôd, prebràd.<br />
S.-cr. brôd « gué », et « bateau » (depuis le xiv e siècle) sur broditi<br />
(more) « naviguer », de prebrôditi et par extension de prëbroditi<br />
rëkç à prebrôditi môre ; composé pârobrôd « bateau à vapeur ».<br />
Et sur brïd- : r. bred « délire ».<br />
Lit. bradas « pêche à la traîne », bradà « pataugeage, boue »,<br />
sur bredù, bristi.<br />
ide-, xoditi :<br />
V. si. xodu « marche », isxodu, otûxodu, prixodu « présence » et<br />
«nouveau-venu, prosélyte» (Gr. Naz., Upir'), suxodvi, vuxodu,<br />
vusxodu, et uxodu « fugitif, transfuge » (v. r. uxodû « appartenances<br />
»), fém. poxoda « promenade ».<br />
R. xod et juxtaposé mimoxôd ; doxôd, is-, na-, nad-, ot-, poxôd<br />
(«campagne», fém. pôxod' «démarche»), pod-, p(e)re-, pri-j pro-,<br />
ras-, s-, u-, v-, v(o)s-, za-, vyxod ; obxôd «visite », obixôd «besoin,<br />
usage », dial. ôxod « digestion, intestin ».
38 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
Tch. chod, duchod, etc., ochod « intestin » et obchod « commerce » ;<br />
fém. chûda « échasse », masc. v. tch. prichoda « nouveau venu ».<br />
Slov. hôd et hàd, izhàd, etc. ; — s.-cr. hôd, ishod, etc., et masc.<br />
ûhoda « espion ».<br />
Gr. ôSoç « chemin », fém., s^oSoç, etc. (§ 442).<br />
vede-, voditi :<br />
V. si. izvodu (Virg.), provodu « conduite » (Gr. Naz.), sûvodu<br />
« voûte » (Ham.), composé vojevoda, masc., « conducteur d'armée ».<br />
R. dovôd, iz-, na-, ob-, ot-, pere-, pri-, pro- (et fém. prôvod'),<br />
raz-, s-, u-, v-, v(o)z-, za-, vyvod ; podvôd « trame, mauvais dessein »<br />
et podvôda « charroi » ; pôvod « bride » et « cause, raison » (polonisme,<br />
et accent polonais, § 93) ; obôda « sangle » et ôbod « jante »<br />
(et fém. ôbod') ; et masc. voevôda.<br />
Pol. dowôd, od-, po-, etc.<br />
Tch. vod « conduite », composé vodovod « conduite d'eau » ;<br />
dûvod, nâvod, etc., doprovod « escorte » (xix e s.) ; rozvoda « schisme »<br />
(v. tch.) ; masc. vévoda « duc » (ail. Herzog, § 1230).<br />
Slov. vôd «levier» et vàd «-conduite, section», izvôd, etc.; —<br />
s.-cr. vôd « conduit », pàvod, ûvod, etc. ; et proizvod, slov. proizvôd,<br />
voir § 825.<br />
Pour r. ôbed' et dôved', voir § 714.<br />
Lit. vâdas « guide », pâvadas « guide » et « conduite », fém. vadà<br />
« conduite », etc.<br />
§ 725. — Grebe- :<br />
Y. si. grobu. « tombeau », r. grob, s.-cr. grôb (gén. groba, § 830), etc.<br />
Mais cette forme en -o- est isolée, avec l'adverbe grobijç (§ 712),<br />
et tous les postverbaux de (po-)grebe- sont en greb- (§ 803), sauf<br />
r. sugrôb «tas de neige» (§ 1222); ce qui appuie l'opinion que<br />
grobu serait un emprunt au germanique, v. h. a. grab (§ 432).<br />
Pour izgrëbi « étoupe », voir § 714.<br />
skrebe- « racler » ( § 432) :<br />
Pol. skrob (gén. skrobiu) « amidon », et fém. oskroba « râpe » ;<br />
— tch. skrob « fécule, amidon » ; — slov. skrçb, skrçb et s.-cr.<br />
skrôb ( § 830) « bouillie de farine » et « amidon ».<br />
Sur skreb- :<br />
R. skrëb « action de racler », doskrëb, na-, o-, ot-, po-, pod-, pere-,<br />
pro-, so-, za-, vyskreb, et masc. poskrëba « vilain homme ».<br />
La racine s'est contaminée (§ 592) avec la racine *skurb-(§ 813).<br />
Lit. âtskrabas « raclure ».
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 39<br />
kleplje-, klepati « faire résonner » (§ 548) :<br />
Slavon poklopu et zaklopu « fermeture, couvercle ».<br />
Tch. klop, poklop et priklop « couvercle », zâklop « trappe », et<br />
fém. klopa « revers, ce qui se rabat » ; — slov. zaklôp « couvercle » ;<br />
— s.-cr. zâklop « fermeture », poklop (ancien) « couvercle », ô/c/op<br />
« cuirasse », sMôp « jointure ».<br />
Et postverbaux sur klep-, voir § 803.<br />
treplje-, trepati « taper, piétiner » :<br />
R. Irop « tap », interjection (tropât' « taper »), et fém. tropâ<br />
« sentier » ; — pol. trop « piste, traces » ; — slov. trgp « foulée de<br />
raisin (sous la presse) » ; — s.-cr. trop « marc de raisin ».<br />
Dans une acception différente, trepati « cliqueter » a ses postverbaux<br />
propres, voir § 805.<br />
§ 726. — Bece- (rïce-) :<br />
Y. si. rokû « terme fixé » ( § 434), naroku et priroku « dénomination<br />
», obroku et uroku (Izb. Svjat.) «chose fixée, solde», poroku<br />
«blâme», zaroku «prescription»; proroku «prophète» (et r.,<br />
pol., etc.) ; otroku « enfant » et « serviteur » (gr. TOXÏÇ), en regard de<br />
v. r. ot(u)roku «récusation», v. si. olûrocïnu (Luc, XIV, 18) «qui<br />
se récuse», olrocïnikû (Supr.) «grappillon» (ce que le vendangeur<br />
récuse), ce qui indique pour otroku « enfant » (fém. otrokovica,<br />
§ 880) le sens initial de « récusé », dont le témoignage ne vaut pas,<br />
ou « grappillon » en emploi expressif ; slavon iz(d)roku.<br />
R. rok « destin », izrôk « sentence », narôk « terme, dessein »,<br />
obrôk « redevance », porôk « vice », prirôk « incrimination », srok<br />
« terme, délai », urôk « leçon, tâche », et ôtrok « enfant ».<br />
Pol. rok « année », obrok « ration, fourrage », urok « fascination »,<br />
wyrok « décret », adv. narokiem « à dessein ».<br />
Tch. rok « année », nârok « prétention, droit », obrok « ration »,<br />
porok et prirok « reproche », ûrok « intérêt (d'une somme) » et<br />
« mauvais œil », vyrok « sentence », et otrok « esclave ».<br />
Slov. rôle « terme », izrôk « sentence », nârok « session (de la<br />
diète) », obrok « ration » et « diffamation », srok « rime », urôk<br />
« ensorcellement », uzrôfc « cause », et olrôk « enfant ».<br />
S.-cr. rô/c « terme », nârok « destin », ôôro/c « ration », porok<br />
« vice », prirok « prédicat », srô/c « rime », ùrok « sortilège », ùzrok<br />
«cause», dial. zârok «gageure», et otrok (ancien), cak. mod. otrôk<br />
« enfant ».<br />
Sur thème rek- (et rïk-) :<br />
R. obrék, obrëk « ensorcellement, mauvais œil », porëk « reproche »,<br />
prorék « prédiction », arë/c « reproche » et uréka « ensorcellement »,
40 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
Tch. nâfek « plainte », prirek « promesse », urek « ensorcellement»,<br />
gén. -rku ; v. tch. fek « diction », prorek «prologue», srek « syllabe »,<br />
gén. -reku.<br />
Slov. izrèk et izrçka « expression », nârek « nénie », obrèk et<br />
obrçka « diffamation », odrèk et odrçka « refus », porèk « mineure de<br />
syllogisme » et prorèk « prémisse », prirèk et prirçka « affirmation,<br />
observation », urèk « ensorcellement ».<br />
S.-cr. ïzreka « sentence », ôdreka « renoncement ».<br />
Sur thème rëk- :<br />
S.-cr. (stôno) rïjek « (comme) on dit», adv. ïzrijekom «expressément<br />
», en regard de l'imperfectif dérivé izricati, mais qui doit<br />
garder, non sans rattachement à rïjec « parole », le souvenir de<br />
l'ancien imperfectif dérivé en -rëkali (§ 649) conservé dans slov.<br />
izrékati.<br />
Pour rëëï « parole », voir § 713.<br />
tece-, factitif tociti :<br />
V. si. toku « flux » et « aire à battre », istoku « source » (J. Ex.),<br />
otokû «île», «enflure» (Izb. Svjat.) et «frange» (Ham.), potokû<br />
«rivière», vûstoku «levant, orient»; zatoky (acc. plur.) «franges»<br />
(Ham.).<br />
R. tok « courant », et « aire », composé vodotôk « réservoir » ;<br />
istôk, na-, nad-, o- «île », ol-, pod-, pri-, s-, v-, v(o)s-, za-, potôk et<br />
potôka, protôk et prolôka, rastôk et rastôka ; composé pâloka « sirop,<br />
mélasse » (§ 1220).<br />
Pol. tok « cours, aire », otok « pus », potok « torrent », przytok<br />
« affluent », stok « citerne », wytok « écoulement », roztok « dégel »<br />
et roztoka « bifurcation de rivières », zatoka « golfe », patoka « miel<br />
vierge ».<br />
Tch. tok « flux », nâtok, o-, od-, po-, pri-, prû-, roz-, s-, û-, v-, vy-,<br />
composés krvotok, vodotok, soutok « confluent » et plur. patoky<br />
« piquette, petite bière » (masc. ou fém.), fém. toka « rigole d'écoulement<br />
», od-, roz-, s-, zdtoka « baie ».<br />
Slov. tôk « cours », iztèk « écoulement », obtok « circulation »,<br />
otok « île » et « enflure », odlok et utôk « reflux », potàk « ruisseau »,<br />
viok «embouchure», zatok «baie», stàk «rage» de vztéci (§ 995),<br />
pritok et pritçka, « affluent », composés vinotàk « octobre », pdtoka<br />
« petite bière ».<br />
S.-cr. tôk « cours », istok (Istok) « levant », ôptok « liseré », ôtok<br />
« île », ôtôk « enflure » et ôtoka « écoulement, bras de rivière »,<br />
pritok et prïtoka « affluent », ùfo/c « embouchure, refuge » et ùtoka<br />
« évasion », stôka « bétail » de slèci « amasser, gagner », ustoka<br />
« vent d'est », composés sàmotôk (samôtok) « huile, miel vierge »,<br />
patoka « eau-de-vie faible ».
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 41<br />
Sur thème tek- :<br />
R. tëk « courant, course », dotëk, is-, na-, nad-, ob-, o-, ot-, po-,<br />
pod-, pere-, pri-, pro-, ras-, s-, u-, v-, za-, vytek, et istëka, na-, o-,<br />
po-, pod-, pere-, pro-, ras-, s-, u-, zatëka (et zâtec').<br />
Pol. ciek et wyciek « écoulement », naciek « stalagmite », rozciek<br />
« dégel », sciek « écoulement, canal » et « confluent ».<br />
Tch. tek « flux », roz-, s-, vy-, vz-.<br />
Slov. iztèk, o-, ob-, pri-, u-,'za-, potèk « écoulement » et « rôdeur »,<br />
fém. tçka « courant ».<br />
Sur le thème tëk- de l'imperfectif dérivé -tëkati (§ 649) :<br />
Tch. tëk « course », s-, û-, dial. setëka « rencontre ».<br />
S.-cr. tïjek « cours ».<br />
Lit. tàkas « sentier », Itakas « embouchure », sur tekù, tekëti<br />
« courir, couler » ; — av. laka- « course », de tacaiti « il court, coule ».<br />
leze-, lezali, factitif loziti, imperfectifs lëgati (§ 654) et -lagati<br />
(§ 652) :<br />
Y. si. prëiogu « changement en eau, dysenterie », prilogû « supplément<br />
» et« action d'appliquer », sûlogu« syllabe », zalogua dépôt »,<br />
otùlogû «jachère» (Ham.), podulogû «base» (Hés. LXXIX, 10),<br />
prëdùloyû « préposition » (J. Ex.), vuzlogû « offrande » (Gr. Naz.) ;<br />
slavon nalogu « application », oblogu « ce qu'on met autour ».<br />
R. log « endroit bas, lit de rivière », izlôg « ravin », nalôg « impôt »<br />
et nalôga, oblôg « parement » et oblôga, otlôg et otlôga, polôg « dépôt »<br />
et « rideau », podlôg et podlôga, prelôg « préface », perelôg « jachère »,<br />
predlôg « prétexte » et « préposition », prilôg et prilôga « calcul »<br />
et « addition », prolôg « vallée », razlôg « pente », slog « syllabe »,<br />
vlog « creux », zalôg « dépôt » et « jachère » ; adj. v. r. pologu. « en<br />
pente », mod. polôgij et otlôgij (§ 820).<br />
Pol. naiôg « coutume », odtôg et przyiôg « jachère », roziôg « plaine »,<br />
et podtoga « plancher », wyioga « parement », zatoga « équipage ».<br />
Tch. poloh, pri-, roz-, s-, à-, zd-, et obloha « firmament », po-,<br />
pod-, pred-, pri-, û-, v-, vy-, zd-.<br />
Slov. ndlog, oblàg, od-, po-, pod-, pre-, pri-, raz-, s-, v-, zdlog ;<br />
et nalçga, ob-, po-, pod-, pre-, pri-, raz-, s-, u-, v-, za-,<br />
S.-cr. log « couche », ndlog, ob-, po-, pri-, prijë-, rdzlog « raison »,<br />
slôg, ûlog, zd- ; et nâloga, podloga, sloga et nësloga, zâloga.<br />
Sur thème leg- :<br />
R. oblëg, podlëg et slegâ (slëga), vlegà.<br />
Tch. leh « action de se coucher », spoleh « fait de se reposer sur ».<br />
Sur leg- ou Iqg-, prés. Iqze-, slov. /fie- (§ 447) :<br />
Slov. Içg «couvée», Içga «couche», oblçga, odlëg et odlçga, polèg<br />
et polqga, nadlçga, podlçga, prelëg et prelçga, prilçga, razlëg, ulëg<br />
et ulêqa, zalêaa.
42 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
Sur thème lëg- :<br />
V. r. nocïlëgû «gîte de nuit», composé (§ 1216), r. mod. noclég,<br />
pol. nocleg, tch. nocleh.<br />
Tch. lîha « chantier pour tonneaux », sur l'imperfectif lihati.<br />
Sur thème lag- :<br />
Slov. oblàg « emplâtre » et oblâga, polâga « pose », na-, od-, pre-,<br />
pri-, raz-, slâga.<br />
S.-cr. ancien podlaga.<br />
Et voir tch. dlaha, § 787.<br />
On comparerait à gr. koyoç « embuscade », aXo^oç « épouse »,<br />
sur Xe^-, si la racine verbale du slave ne devait pas sa forme leg-,<br />
pour *lez-, au germanique (§ 447), v. h. a. lâga «position», ail.<br />
Lage en regard de legen. En baltique, des mots comme lit. allagaï<br />
(plur.) « garniture, jachère » sont des emprunts au slave.<br />
§ 727. — Grïmi- :<br />
Y. si. gromu « tonnerre ». „<br />
R. grom, pogrôm et razgrôm « dévastation » (gromW « faire tonner,<br />
foudroyer »), vygrom.<br />
Pol. grom, ogrom « énormité », pogrom « défaite », rozgrom<br />
« déroute ».<br />
Tch. hrom, pohrom « tumulte » et fém. pohroma « désastre ».<br />
Slov. grôm ; —- s.-cr. grôm.<br />
Gr. xpofxoç « une sorte de bruit », et xp£[a(st)^si.v « hennir ».<br />
melje-, et v. si. iz-mïlëti «être saillant» (Ham. 14027, § 591).<br />
Trois groupes de postverbaux selon les sens :<br />
1° R. mol « action de moudre », namôl et pomôl « mouture »,<br />
vijmol « farine produit de mouture ».<br />
2° Tch. podmol «rive ravinée» (podemliti «saper»), vijmol<br />
« ravine, alluvion » ; — et slov. podmol « rive ravinée », izmàl<br />
adapté de tch. vymol.<br />
3° S.-cr. pômôl, nàpomôl « à la vue de », sur iz-màliti « faire saillir »,<br />
pomàliti se « se montrer » ; — slov. pomàl « saillie », sur pomoliti.<br />
Sur thème mel- :<br />
Tch. domel « ce qui est fini de moudre ou reste à moudre » ;<br />
— slov. mçl « mouture » (et fém. mfZ).<br />
Sur thème mël- :<br />
Tch. vijmël, variante de vymol, sur l'imperfectif dérivé -milaii<br />
(et fém. dial. mël' « mouture fine »).
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 43<br />
Et voir v. si. mëlï, fém., «rivage», § 718 ; et slov. mlêv «banc<br />
de sable» (fém. mlêv «mouture»), sur l'imperfectif dérivé -mlévati,<br />
§ 751.<br />
plëve-, r. -pôl, voir § 734.<br />
do-vïlje- (§ 601) :<br />
V. si. dovolu « suffisance » ; _— et r. dovôl.<br />
On n'a ailleurs que des formes adverbiales rattachées à volja<br />
« volonté » : s.-cr. dôvoljë « assez », etc.<br />
Sur thème vel- :<br />
Tch. povel « commandement (militaire) », créé au xix e siècle<br />
sur poveleti « ordonner », de velëti « vouloir, prescrire » (§ 595).<br />
-ëïne-, imperfectif -cinati :<br />
Y. si. zakonu « loi », slavon pokonû « commencement », et fém.<br />
pokonï en vieux slave, Ps. Sin. CX, 10, mais l'exemple est isolé,<br />
confirmé toutefois par l'adverbe v. si. iskoni « dès le début » (et<br />
izdekoni, § 92).<br />
R. kon « commencement, rangée », dokôn « achèvement », nakôn<br />
« fois », pokôn « commencement, coutume ancienne », zakôn.<br />
Pol. skon (zgon) «fin de la vie, décès», zakon «ordre», dial.<br />
pokon « commencement ».<br />
Tch. zakon, skon « décès », ûkon « fonction », vfikon « réalisation » ;<br />
pokon « fin » (v. tch.), adv. dokona « jusqu'au bout ».<br />
Slov. zâkon ; — s.-cr. zàkon, et adv. Iskona « depuis le début »,<br />
ôdkon(a) dàkon(a) «de bout en bout», nàkon «après», nâpokon<br />
« enfin ».<br />
Sur le thème -cin- (et se rencontrant avec les postverbaux de<br />
ëinili, § 798) :<br />
R. naëln, pocin et zacin « commencement ».<br />
Tch. pocin « entreprise ».<br />
pïne-, imperfectif dérivé -pinali :<br />
V. si. rasponu « croix », zaponû « tenture » (Ham.), et fém.opona<br />
« rideau », prëpona « rideau » et « obstacle » (J. Ex.), sûpona<br />
« entrave » (Izb. Svjat.) ; v. r. zapona « rideau ».<br />
R. zdpôn « tablier » et zapôna (zdpon' « barrage »), opôna, popôna<br />
« caparaçon », pere- et pre-, spôna.<br />
Pol. opona, prze-, za-, etc.<br />
Tch. vypon « action de se tendre » (nouveau, xix e s.), et opona,<br />
po-, za-, etc.<br />
Slov. napon, pripon, zapàn «agrafe», etc., et pripçna,<br />
zap§na, etc.
44 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
S.-cr. ndpon « tension », pripon « bride » et sâpon « entrave »,<br />
râspon « écartement, travée », zâpon, et prèpona, spôna.<br />
Sur thème pïn- :<br />
S.-cr. àpona et opna « membrane, cataracte ».<br />
Sur thème pin- :<br />
R. zapln « hésitation, zapinka », et opin, pere-, pro-, ras-,<br />
Pol. wspin « plante grimpante ».<br />
line-, tqti « tendre » et « couper » ( § 457) :<br />
Pol. ancien naton (mod. naton, natonia) « sur quoi on fend le<br />
bois, billot » ; —-et v. tch. nâlon (mod. naton, masc.) ; — slov.<br />
nâton « billot », composé drvotàn « lieu où l'on fend le bois ».<br />
Les autres postverbaux en -ton sont de to(p)nçti (§ 732).<br />
Sur thème tïn- :<br />
Slov. ndten (gén. nâtna), variante de nâton.<br />
Sur thème tin- :<br />
R. tin et potin «coupure», sur l'imperfectif dérivé potinât' de<br />
potnût' ; pour pritin, zatin, voir § 802.<br />
Et v. si. tinï « courroie » (§ 713).<br />
Gr. TO[AOÇ de TS;J.V«, et pour la forme slave TOVOÇ de TSLVW.<br />
zvïni- :<br />
V. si. zvonu (Théod.).<br />
R. zvon « sonnerie » (et verbe zvonit'), nazvôn, ob-, ot-, pere-,<br />
pro-, so-, za-, vyzvon.<br />
Pol. dzwon ; — tch. zvon ; — s.-cr. zvôno «cloche» (§ 827) ;<br />
— slov. zvon, odzvôn, zazvàn.<br />
Parallèlement, skr. svanâh « bruit », lat. sonus (§ 591).<br />
zene-, itératif goniti :<br />
Y. si. pogonu « poursuite » (Ham.).<br />
R. gon « chasse », dogôn, iz-, na-, nad-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-,<br />
pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-, v(o)z-, za-, vygon, et dial. ôgon « queue »,<br />
polonisme et accent polonais.<br />
Pol. gon, ogon « queue », zagon, etc.<br />
Tch. hon, nàhon, etc., v. tch. dopôhon «jugement exécutoire»;<br />
ohon « queue », polonisme » ; et fém. v. tch. uhona « défaut,<br />
dommage ».<br />
Slov. gàn, izgàn, etc.<br />
S.-cr. gon « longueur de sillon », nâgon, etc.<br />
Lit. gânas « pâtre », fém. paganà « pâturage ». — Gr. «pôvoç<br />
« meurtre ». de OSÎVM « ie frappe » ( § 470).
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 45<br />
stenje- :<br />
R. ston « gémissement », zastôn.<br />
Tch. dial. ston.<br />
Gr. GTOVOÇ, de cnrsvox<br />
§ 728. — Bere-, imperfectif dérivé -birati :<br />
V. si. sûboru « réunion » (§-471), izboru « choix » (J. Ex.).<br />
R. bor « prise », dobôr, iz-, na-, nad-, o-, of-, po-, pod-, pere-, pri-,<br />
pro-, raz-, u-, za-, vv/bor, sbor « rassemblement » et sobôr « concile »<br />
(§ 60) ; fém. bord « froncis, pli d'un vêtement » (== sbôrka), podbôra<br />
« corde d'un filet », ubôra « parure, toilette », et masc. pobôra<br />
« mendiant » ; mais pour obéra, voir ci-dessous, sous vire-.<br />
Pol. pobôr, wybôr, etc.<br />
Tch. bor « troupe » (v. tch.) = nàbor, odbôr, etc., et soubor<br />
«ensemble» (§ 1222).<br />
Slov. nabàr, odbàr, etc. ; — s.-cr. ôdbor, etc., zbôr « assemblée »<br />
et sâbor « concile » ; nàbor « pli », et fém. bôra « froncement, pli,<br />
ride », mais récent et peut-être emprunt au russe.<br />
Sur thème bir- :<br />
R. otbir, podbir, probir, sbir, variantes de oibôr, etc. ; zabôr<br />
« cloison » et zabir « action de prendre d'avance ».<br />
Sur thème ber- :<br />
Tch. pobera «voleur», masc. (et poberta, § 1165), composé<br />
darober « qui reçoit des cadeaux ».<br />
Pol. odbiôr, wybiôr, zbiôr « collection » en regard de zbôr « concile »,<br />
mais sur -birac devenu -bierac par passage phonétique (vers le<br />
xvi e siècle) de -ir- à -ier- en polonais.<br />
Sur thème bër- :<br />
Tch. odbër, pre-, s-, vy-, zâ-, sur -birati avec fausse alternance<br />
i : ë.<br />
Les postverbaux de bere- pourraient avoir absorbé des postverbaux<br />
de borje- (§ 742), et la question se pose pour r. zabôr<br />
« cloison » (§ 530).<br />
Lit. bâras « rangée de foin fauché », sur befti « verser, joncher »,<br />
lette uzbars « trop-plein », sur uz-bèrt « répandre dessus » : — gr.<br />
46 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
Pol. dial. dora «trou » (dura, § 761) ; — h. sor. zadora « dissension<br />
», b. sor. rozdora « écartement ».<br />
Tch. nâdor et dial. nâdora, vzdor et ancien vzdora.<br />
Slov. razdor, etc., odor, po-, pre-, u- et fém. odçra, podçra, predçra.<br />
S.-cr. prijèdor, pro-, râz-, àdor « pillage » et « pillard », fém.<br />
ôdora « dépouille, vêtement » ; et ancien udor « coup » (verbe<br />
ùdriti « frapper », § 782).<br />
Et sur r. zadôr « emportement », zadôrit' « irriter » :<br />
R. podzadôr « irritation, agacement », razzadôr « excitation ».<br />
Sur thème dir- :<br />
V. si. dira «déchirure » (et dirja, § 1026).<br />
R. dird, usuellement dyrâ (et v. r. dyrja) par réfection fautive<br />
sur drat' ; nadir, ob-, ol-, pere-, pro-, raz-, s-, u-, vz-, za-, vydir ;<br />
masc. obdira « écorcheur, spoliateur » ; composé pâzdira, voir<br />
ci-dessous pâzder.<br />
Slov. dir « course » (dirjati « courir »), podîr « chute », pridîr<br />
« arrivée impétueuse », pre-, za-,<br />
S.-cr. dira (dira, dîra), dodir «contact » (diraîi «toucher»),<br />
ôdïr (odir) « pillard, spoliateur ».<br />
Sur thème der- :<br />
R. dêr, composés kozedër, zivodër « équarisseur » ; dodër, ob-,<br />
pro-, s-, odër et odëra « rosse, haridelle » et pdder et pddera (§ 1220),<br />
masc. obdëra et sdëra « homme qui vous écorche ».<br />
Pol. dzior, dziôr « peignures (de lin, etc.)», wydzior «dépense<br />
inutile », zadziôr et zadziora « écharde ».<br />
Tch. ûder « choc ».<br />
Slov. kozodèr « écorcheur de chèvres » (nom d'un vent), nâder<br />
« fanon », udçr « coup », fém. podçra « destruction », predçra.<br />
S.-cr. greboder « fossoyeur », proder « hernie », ràzder « déchirure »,<br />
locution na izder, za izder « (vêtement) à tout faire ».<br />
Et le mot slave commun v. r. pazderu « chaume (du lin) », r.<br />
pâzder « étoupe » et pazderâ « partie extérieure de la tille », pol.<br />
pazdzior, slov. pazdçr, s.-cr. pâzder « chènevotte », bulg. pazdér<br />
(§ 1223).<br />
Sur thème dêr- :<br />
Tch. dira « trou », gén. plur. dër, et zâdër et zâdëra « écorchure,<br />
écharde », sur -dirali par fausse alternance i : ë.<br />
Sur thème dïr- :<br />
Pol. odra « rougeole », zadra « écharde ».<br />
Y. tch. konedra « équarrisseur ».<br />
Et sur thème dr-, sûrement *mçzdra « écharnure » (§ 1117),<br />
nozdri «narines» (§ 1118).
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 47<br />
Et voir udaru, § 782.<br />
Lit. nûodaras « rognures, déchets » sur derù, difli ; — gr. Sopà<br />
« peau écorchée », et masc. Sopoç « sac de peau » (§ 832), sur Sépw.<br />
mire-, factitif moriti :<br />
Y. si. moru « peste ».<br />
R. mor, izmôr, na-, pere-, pro-, vymor ; pomôr, u-, za-, et fém.<br />
pomôra, umôra, zamôra.<br />
Pol. môr, pomôr, zamôr, locution na umor « extrêmement ».<br />
Tch. mor, ûmor, et masc. zâmora « homme exténué ».<br />
Slov. môr, composé bratomor « fratricide », umôr, pomôr et fém.<br />
pomçra.<br />
S.-cr. môr, composé kozômor « temps malsain pour le bétail »,<br />
ôdmor, pà-, ù.<br />
Et ukr. môra « cauchemar, incube », r. kikimora, pol. mora et<br />
zmora, tch. mura, slov. môra, s.-cr. môra. On rapproche le mot de<br />
v. h. a. mara, ail. Mahr « incube » (et v. angl., v. nord.), mais en<br />
slave le mot a l'aspect d'un postverbal de moriti.<br />
Sur thème mïr- :<br />
Ukr. et pol. dial. zamra sur ukr. zamré-, zamérty « se mourir » ;<br />
— s.-cr. nëmra, plur. némri, « vieille, vieux qui ne veulent pas<br />
mourir» (§ 826).<br />
Et voir mar-, § 790.<br />
Lit. mâras « peste » ; — skr. marah, mârah « mort, peste », sur<br />
mârate « il meurt ».<br />
nïre-, factitif noriti :<br />
R. nord «trou, terrier» (et fém. nor'), et nyr, nyrâ comme dyrâ<br />
pour dirâ (verbe nyrjdt', § 608) ; podnôr.<br />
Pol. nor, nur de v. pol. nôr « blaireau » et « canard sauvage,<br />
plongeon », nora (nôra, nura) « creux, terrier », ponora (ponura<br />
et ponur).<br />
Tch. nor « plongée » (créé au xx e s.), ponor « plongée, tirant<br />
d'eau », fém. nora « trou, terrier ».<br />
Slov. nora « trou », et pônor, emprunt à s.-cr. ponor « gouffre »<br />
(le terme slovène est ponîkva, § 1185).<br />
Lit. nàras « plongeon (canard) », lette nira, et lette dial. nora<br />
(de *nara) « trou ».<br />
pire- « pousser », pere- « fouler », pïri- « disputer », imperfectif<br />
dérivé -pirati. Les trois verbes sont sur la même racine; verbale<br />
(§ 591), et ils mêlent leurs postverbaux :<br />
V. si. pora «appui, soutien» (J. Ex.), poduporù «soutien»<br />
(Athan.), et v. r. oporu « poussée », pora et suporû, suporû (§ 1222)<br />
« dispute ».
48 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
R. porâ « étai » (dial.), napôr « pression », opôr « poussée, élan »,<br />
otpôr « résistance », pod-, pere-, pri-, pro-, u-, zapôr « verrou »,<br />
vypor « expulsion », et spor « dispute » ; fém. opôra « soutien »,<br />
podpôra « appui », zapôra « verrou ».<br />
Pol. napôr, odpôr, etc., spôr « dispute », et fém. przypora « contrefort<br />
», zapora « obstacle ».<br />
Tch. ndpor, upor, etc., spor « querelle », fém. opora, pod-, etc.<br />
Slov. podpôr et podpçra, razpôr et razpqra, opçra, prépor, etc.<br />
S.-cr. spôr « litige », ôipor, etc., pôtpor « soutien » et pôtpora<br />
« aide, secours », lïpora « traverse, poutre ».<br />
Sur thème pir- :<br />
R. otpir, upir, zapir, masc. upira « homme entêté ».<br />
Sur thème për- :<br />
Tch. odpër « rinçage », vzpër et vzpëra, odpëra « résistance »<br />
(v. tch.), opéra, pod-, roz-, sur -pirati avec alternance i : ë.<br />
Il faut réserver le cas de r. et ukr. porâ « temps (propice), occasion<br />
», qui paraît assez récent (xvi e s.) en russe ; pol. pora qui<br />
semble récent aussi (xviu e . s.) et peut être pris à l'ukrainien ;<br />
bulg. pôra, mais dans des locutions comme moja pora « de mon<br />
temps », et ce n'est probablement qu'un russisme, de même que<br />
s.-cr. u ôvâj pâr, attesté à la fin du xvin e siècle, doit être une<br />
déformation de r. na tu pôru. Si le mot est proprement russe,<br />
comme il diffère de l'ancien pora, on doit penser à i'expliquer par<br />
porit' «être utile», dépréverbé de sporit' (§ 742).<br />
Lit. spâras, âtsparas « soutien, étai », et fém. pasparà, sçspara<br />
(§ 1224), etc., de spiriù, spirti (§ 453).<br />
sere-, sïrati :<br />
R. sor « ordure », dénominatif na-sorit' « remplir d'ordures » ;<br />
zasôr de zasorit' « encombrer d'ordures », fém. zasôra « fosse à<br />
ordures » ; ssor et ssôra « action d'enlever les ordures » et ssôra<br />
«querelle» (§ 471), de ssoril' «enlever les ordures» et «brouiller,<br />
faire se disputer ».<br />
S.-cr. osor (xvn e s.) désignant un animal fabuleux, sûrement<br />
la « harpie », en regard du verbe osôriti se « rabrouer » (adj. ôsôran<br />
« rogue », et v. si. vusorivu « rude de caractère », § 995).<br />
Sur thème ser- :<br />
Pol. dial. osiery « poussières de gruau » ; —- tch. proser, nom de<br />
diverses plantes laxatives, comme la mercuriale, et prùser<br />
« lavasse » et « guigne ».<br />
Sur thème sïr- :<br />
S.-cr. pôsro et ûsro « chieur » ; — slov. pôsra « chieuse ».
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 49<br />
stire-, imperfectif dérivé -stirati :<br />
V. si. prostoru « étendue » (J. Ex.).<br />
R. prostôr ; — pol. przesiwôr, de pro-slorû ; — tch. prosior et<br />
prostora.<br />
Slov. prôstor, zdstor « rideau » ; — s.-cr. prôstor, zâstor, et dial.<br />
prîstor (prestor) « sorte de filet pour la pêche », de prè-strijeti.<br />
Sur thème stir- :<br />
R. nastir, pere-, za- ; ukr. prostijra « couverture, drap de lit »<br />
(d'où le roumain proslire et lit. prastïra) ; — et tch. predstëra,<br />
zâstëra « tablier », sur -stirati avec alternance i : ë.<br />
En baltique, sans verbe (§453), lette stars « branche » et« rayon »,<br />
stara « étendue » ; — skr. starah « couche », de starati « il répand ».<br />
vire-, imperfectif dérivé -virati, itératif -(t)voriti (§ 614) :<br />
V. si. zavoru «verrou» (Ham.), acc. plur. zavory Supr. 3178,<br />
473x ; et voir zatvoru « fermeture » (§ 736).<br />
R. vor « clôture » et vorâ (et v. r. voru, vora), et vor « escroc,<br />
voleur » (depuis le xvi e s.) en regard du nouveau vrat' « mentir »<br />
(§ 473) ; provôr (§ 827) et masc. provôra « homme adroit » ; ob(v)ôra<br />
« lien des chaussettes de paysan », podvôra « semelle des tapti » ;<br />
svôra « laisse », zavôr « enclos » et zavôra « verrou » ; zatvôr « verrou »<br />
et otvôr « ouverture ».<br />
Pol. wôr « grand sac », zawôr et zawora « verrou », dowora, obora,<br />
przewora, roz-, s- ; otwôr « ouverture ».<br />
Tch. vor « grande bâche », razvor, s vor, et razvora, svora, obora,<br />
zâvora.<br />
Slov. navor, obor et obçra, svor et svçra, zâvor et zavçra.<br />
S.-cr. obor, pôvor, zâvor « verrou » et svôra ; zâtvor « prison »,<br />
àtvor « ouverture ».<br />
Et sur r. svôrit' dénominatif de svôra « laisse », vysvorit' « attacher<br />
à la laisse » :<br />
.. R. vysvor.<br />
Sur thème vir- :<br />
R. navir « calomnie », perevir « menterie » et privir, et masc.<br />
perevira « menteur » et privira.<br />
Slov. zavlra, ovira.<br />
Sur thème vër- :<br />
Tch. zâvër, zâvëra, svëra sur -virati, alternance i : ë.<br />
Sur thème ver- :<br />
Slov. ovçra, zavçra, sur -vçrati pour -virati, cf. s.-cr. vërati se<br />
« se glisser » en regard de sâ-vrijeti se.
50 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
Sur thème v(ï)r- :<br />
R. privra « hâbleur », masc., sur privrât'.<br />
Les postverbaux de vire- se rencontrent avec ceux de vïri-,<br />
vïrëti dans s.-cr. izvor « source » (§ 777).<br />
Lit. vâras « perche de la porte d'une clôture », pefvaras « timon »<br />
et pefvara, etc., de veriù, vérli (§ 453).<br />
tïr(j)e-, imperfectif dérivé -tirati :<br />
V. r. istoru et protoru « dépense », et fém. istora, protora (protorï).<br />
R. tor « chemin frayé », islôr et islôra « perte (d'argent, de<br />
temps) », natôr « dressage », pritôr « passage étroit, rive escarpée »,<br />
proiôr «passage à travers» et prôlor «sentier» (§ 829), et protôra<br />
(prôtor', plur. prôtori) «les frais»; utôr «jable» (utorll' «fouler»<br />
et «jabler les douves d'un tonneau») ; vytor «action de frayer»,<br />
zatôr « presse ».<br />
Pol. tor, zator « barrage, encombrement », wqtor « jable » (§ 1223).<br />
Tch. tor, utor « jable ».<br />
Slov. tor « action de frotter », otàr et utor « jable » et utôra, zatàr<br />
« perte, oppression ». - *<br />
S.-cr. tôr « parc à moutons », Mor « jable » et fém. plur. ùtore ;<br />
zâtor « destruction, ruine » sur zàtrti.<br />
Sur thème tir- :<br />
R. zatir « action de gâter en frottant » ; — slov. tir « trace »,<br />
polir « piste » et potira « poursuite ».<br />
Sur thème 1er- :<br />
R. zatëra, masc., «insolent»; —- pol. zacier «jable», wycier<br />
« écouvillon », sur -cierac de -tirati ; — slov. zatçra « oppression »,<br />
de zalçrati pour zatîrati.<br />
Sur thème tër- :<br />
Tch. tër, nâlër, po-, roz-, vy-, potëra « défaite » et masc. dotera<br />
« importun », de -tirati avec alternance i : ë.<br />
Sur thème t(ï)r- :<br />
S.-cr. târ « paille hachée », tara « scorie », nâtra « métier à tisser » ;<br />
— slov. ûter (gén. ûtra) « chemin frayé ».<br />
Pour s.-cr. pôtjera, voir § 753 ; pour v. si. t(ï)ricq « son », s.-cr.<br />
trlce, et slov. t(eJrica « broyeuse », § 878.<br />
Le grec a Topoç « ciseau, burin » de Tsîpco « j'use ».<br />
zïri-, imperfectif dérivé -zirati :<br />
Y. si. pozoru « spectacle », vuzoru « vue », zazoru « suspicion,<br />
blâme », prizoru « vision, imagination » (Cyr. Jér.), prëzoru. « dédain »<br />
(Théod.) ; slavon prozoru. « perspicace ».
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 51<br />
R. dozôr, na-, nad-, o(b)zôr (et fém. ôzor'), pod-, pri-, pro-, u-<br />
(et ûzor') ; pozôr « honte » et fém. pozorâ ; masc. prozôra « perspicace ».<br />
Pol. dozôr, pozôr, etc. ; — tch. zor « coup d'œil », ndzor, obzor,<br />
pozor, etc.<br />
Slov. zor « éclat, aurore », prôzor « aube » et « fenêtre », zazàr<br />
« lever du jour » et « suspicion » ; —- s.-cr. ndzor, pô-, zâ-, prôzor<br />
« fenêtre », ùzor « modèle » ; obzor « horizon, panorama, revue »,<br />
du tchèque.<br />
Sur thème zir- :<br />
R. nazir, ozir, vyzir.<br />
S.-cr. ô(b)zïr « égard, considération », prëzlr « mépris » ; — slov.<br />
o(b)zîr, prezîr, prozîr « dioptre ».<br />
Lit. pazâras « rougeur du ciel », en regard de zèriù, zèrëti « briller »,<br />
mais var. pazâras indiquant une contamination avec le slave<br />
pozoru, et une autre possible avec pozaru «incendie » (§ 736).<br />
En slave, il y a rencontre partielle avec les postverbaux de oriet<br />
de or je- (§ 742), et rencontre complète avec ceux de :<br />
zïrëje-, factitif zoriti ( § 608) :<br />
Slov. zor « mûrissement », dozôr « maturité achevée », pozôr<br />
« achèvement de maturation ».<br />
S.-cr. dial. sazor de sàzreti « parvenir à la maturité ».<br />
§ 729. — Bïje- :<br />
V. si. boi « combat » (Ham.), razboi « brigandage », uboi<br />
« meurtre » ; slavon izboi, poboi « massacre ».<br />
R. boj, dobôj, iz-, na-, nad-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-,<br />
s-, u-, v-, vz-, za-, vyboj.<br />
Pol. bôj, na-, od-, roz-, za-, etc.<br />
Tch. boj, nâ-, od-, pû-, pri-, prâ-, z-, za-, vi/-.<br />
S.-cr. bôj, composé vïnobôj « cochenille », pobôj, pod-, prijè-,<br />
pri-, râzbôj « métier à tisser », sà- et z-, û- («-) ; slov. bôj, nabôj, etc.<br />
Un postverbal différent est :<br />
boi- sg :<br />
Pol. bôj, gén. boja « peur », création expressive, d'où ukr. bij,<br />
gén. bôja.<br />
brïje- (§ 514) :<br />
S.-cr. brôj « nombre », et anciens prebroj, pribroj, razbroj, en regard<br />
de bràjiti « compter », prebràjili, etc.<br />
Avec d'autres sens :<br />
V. tch. broj « multitude » et brojiii së « pulluler, s'agiter », tch.
52 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
broj « agitation, tumulte », et rozbroj de rozbrojiti « agiter » ; vyzbroj<br />
« équipement » et vyzbrojiti « équiper », â côté de (v)zbrojiti « lever<br />
une troupe, armer », sur v. tch. zbrojë « bande, troupe », tch.<br />
zbroj(e), fém. (et masc.) «armure»; — pol. zbroja «armure»<br />
vient du tchèque ainsi que zbroic « armer », mais broie signifie<br />
« faire des folies, de mauvais tours » et « faire, pratiquer ».<br />
On doit penser qu'au sens d'« agiter » brojiti est dépréverbé<br />
(§ 1208) de ob-rojiti, voir ci-dessous sous rëje-.<br />
-cije-, factitif koiti (§ 608) :<br />
V. si. pokoi « repos ».<br />
R. pokôj, et bezpokôj « inquiétude» ; et de pokôit' « faire reposer» :<br />
spokôj, upokôj, uspokôj.<br />
Pol. pokôj « repos » et « chambre », spokôj et uspokôj.<br />
Tch. pokoj, et de kojiti « calmer » ukoj « action de calmer »<br />
(livresque, xix e s.).<br />
S.-cr. pokôj ; — slov. pôkoj, et de kojiti « élever (un enfant) » :<br />
kôj « action d'élever ».<br />
gnïje-, factitif gnoiti :<br />
V. si. gnoi « fumier ».<br />
R. gnoj « pus », dognôj, iz-, na-, o-, po-, pod-, peregnôj « humus »,<br />
pro-, s-, za-, vygnoj.<br />
Pol. gnôj « fumier » ; — tch. hnàj ; — s.-cr. gnôj « fumier » et<br />
« pus » ; — slov. gnçj, et negnôj « cytise, faux ébénier ».<br />
lïje- et lëje-, imperfectif dérivé -livati et -lëvati ( § 525) :<br />
V. si. loi « graisse » (Ham.).<br />
R. loj « suif », nalôj « averse », oblôj « lieu trempé, couvert de<br />
neige » et polôj, zalôj « lieu inondé », perelôj « gonorrhée », prolôj<br />
« chenal », sloj « couche ».<br />
Pol. lôj « suif », slôj « couche, veine du bois » ; — tch. lûj « suif » ;<br />
— s.-cr. lôj « suif », pôlôj « bas-fond » (slôj « couche », du russe) ;<br />
— slov. Içj « suif » et lôj « entonnoir ».<br />
Sur thèmes lïj-, lij- et lëj- :<br />
Slavon vinolii « échanson ».<br />
R. vodoléj « le Verseau » ; — pol. Iej et leja « entonnoir », wodolej ;<br />
— slov. lij « entonnoir », llja « averse » ; — s.-cr. krvolija « homme<br />
sanguinaire », masc.<br />
Sur thème liv- :<br />
Slavon vodolivu « aiguière ».<br />
R. doliv « remplissage », iz-, na-, nad-, ob-, ol-, po-, pod-, pereliv<br />
« chatoiement », pri-, pro-, raz-, sliv « baisse des eaux », u-, v-, vz-,
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 53<br />
zallv « golfe », vyliv, et fém. naliva « infusion », poliva « vernis »,<br />
podliva « sauce », nepereliva « fond qu'on ne transvase pas », «Zî'ua<br />
« flux de sang ».<br />
Tch. odliv, priliv, prûliv, zâliv, et vliv « influence » (xix e s.,<br />
§ 824).<br />
Slov. lîv « flux », izltv, na-, ob-, od-, etc.<br />
S.-cr. ndliv, od-, pré-, pri-, pro-, s-, zâ-.<br />
Sur thème lëv- :<br />
Pol. nalew, odlew, wylew, zalew et wylewa, zalewa, polewa.<br />
Tch. ndlev, vijlev, polev et poleva.<br />
S.-cr. lïjev « versement » et « entonnoir », nâljev, àd-, pré-, pro-,<br />
slïjev, zdljev « baie, zâliv » et zâljeva « petit-lait ».<br />
Et r. nalëv, ob-, raz-, etc., masc. perelëva « qui verse à ras bord »,<br />
avec -lëv pour l'ancien -lëv.<br />
Mais pour slov. lêv « mue », voir lëvi-, § 750.<br />
Lit. âtlajas « déversoir », plur. ilajaï « limon, colle », de lieju,<br />
lieti.<br />
pïje-, imperfectif dérivé -pivali, factitif poili :<br />
R. dopôj, et nedopôj « insuffisance de boisson », ispôj, na-, o-,<br />
ot-, po-, pod-, pere-, pro-, ras-, u-, v-, vs-, za-, vypoj ; et en un sens<br />
spécial pripôj et spoj « soudure ».<br />
Pol. pôj « action d'abreuver », napôj « breuvage », opôj « ivresse »<br />
et « buveur », przepôj (ancien) « excès de boisson », upôj « enivrement<br />
», zapôj « ivrognerie » ; et spôj « soudure » et « union ».<br />
Tch. nâpoj, v. tch. zâpoj.<br />
Slov. napôj, vpàj ; et spôj « union » et fém. spçja.<br />
S.-cr. poj (ancien), composé vodopoj, nâpoj, zâpoj ; et pripôj<br />
« soudure », spôj « soudure » et « union ».<br />
Le sens de « souder », d'où au figuré « unir », est tiré de la forme<br />
à préverbe su-poiti. Ce sens est attesté assez tardivement, en serbocroate<br />
depuis le xvn e siècle seulement, mais « souder » est un terme<br />
technique. Le verbe slave doit être un calque du grec TEOTLÇSW<br />
«imbiber, arroser» : dans le Roman d'Alexandre, III, 29, mmcfaç...<br />
xatjaiTspov « arrosant d'étain » décrit une opération d'étamage.<br />
Le russe étend le sens de « souder » à plusieurs postverbaux en<br />
-pôj : napôj est « action d'abreuver » et « de souder dessus » ; mais<br />
il distingue poil' « abreuver » et pajât' « souder », dépréverbé de<br />
spajât', qui a ses propres postverbaux (§ 791).<br />
Sur thème piv- :<br />
R. dopiv, is-, na-, nad-, o-, ot-, ras-, s-, za-.<br />
Pour l'adjectif v. si. kruvopivu, voir § 995.<br />
Sur thème pij- : s.-cr. vodàpija, masc., « buveur d'eau ».
54 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
Les postverbaux en -poi de pïje- se rencontrent avec celui d'une<br />
autre racine verbale :<br />
poje-, itératif pëvati :<br />
V. si. pësnopoi « le Psalmiste » (Pand. Ant.).<br />
S.-cr. pôj « chant ».<br />
Mais les postverbaux de ce verbe sont normalement tirés du<br />
thème pëv- (§751).<br />
vïje-, imperfectif dérivé -vivati (§ 651), inchoatif *vinçti (§ 490) :<br />
V. si. prëvoi « tiare » (Upir'), zavoi « vrille » (J. Ex.) ; slavon<br />
povoi « bandeau ».<br />
R. dovôj, iz-, na-, nad-, obôj, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-,<br />
u-, vjjvoj et suvôj « rouleau » (§ 1222).<br />
Pol. wôj « filasse », nawôj « ensouple », powôj « liseron », podwôj<br />
« mancheron de la charrue », rozwôj et wywôj « développement »,<br />
uwôj « treillis », zwôj « liasse », zawôj « turban ».<br />
Tch. nâvoj, rozvoj et vyvoj, zâvoj « voile ».<br />
Slov. navàj, obvôj et povôj « bandage », prevàj, razvôj, zavôj<br />
« emballage ».<br />
S.-cr. vôj « osier tressé », nâvoj « fdet de vis », pàvôj, râzvôj,<br />
svôj « tourbillon d'eau », zâvoj « pansement » et « tournant ».<br />
Sur thème viv- :<br />
R. izviv, na-, pod-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, vrjviv ; et masc. obviva<br />
« entortilleur, trompeur », priviva « homme collant, importun ».<br />
Sur thème vin- (§ 824) :<br />
Pol. obwin « enveloppement », sur obwinqc.<br />
Tch. nâvin « ce qui est enroulé », rozvin et vyvin, zâvin « bandage,<br />
spirale », sur vinouli « enrouler ».<br />
Slov. izvin « déboîtement, luxation », sur izviniti « luxer » (prés.<br />
-vîne-), fém. zavîna « spire » et « tour de phrase », sur zaviniti.<br />
Les postverbaux en -vin- se rencontrent avec ceux de -viniti<br />
(§ 798).<br />
Pour v. si. voi « armée », voir § 737 ; et pour r. voj et povôj<br />
« hurlement », § 730.<br />
sïjaje- (§ 526) :<br />
S.-cr. ôsoj « côté à l'ombre, ubac », prisoj « côté au soleil, adret »,<br />
et bulg. osôj, prisôj. Les formes usuelles sont s.-cr. àsoje, prisoje,<br />
bulg. osôe, prisôe, qui peuvent représenter des dérivés en -ïje sur<br />
le thème soj-. Ces postverbaux sont sûrement anciens : prisoj<br />
n'a pas de verbe en regard et doit être un composé nominal, et<br />
osoj est indépendant de o(b)sïjati « envelopper de clarté ».
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 55<br />
rëje-, perfectif rinçti et imperfectif rivati (§ 653) :<br />
V. si. roi « essaim », naroi « élan contre » (Pand. Ant.) ; slavon<br />
izroi « effusion », suroi « ruée ».<br />
R. roj « essaim », pâroj (§ 1220) « second essaim » (sortant après<br />
le premier dans la même année) ; razrôj « débordement, crue ».<br />
Pol. rôj ; zdrôj « source, torrent », et ancien wzdrôj ; urôj et<br />
wyrôj « imagination », sur roic « fourmiller », « s'imaginer ».<br />
Tch. roj et v. tch. et dial. rûj « essaim » ; zdroj « source » est pris<br />
au polonais; et broj «agitation», rozbroj et (vy)zbroj, sûrement<br />
de ob-rojili, comme pol. broie « faire des folies ».<br />
S.-cr. rôj ; — slov. rôj, odrôj « essaim secondaire », paràj « second<br />
essaim ».<br />
Sur thème riv- :<br />
Slov. odriv « répulsion », porlv « poussée, impulsion », pre-, pri- ;<br />
-— s.-cr. (odriv), pôriv.<br />
Skr. rayah « courant », en regard de rinâti « il fait courir, couler ».<br />
zêje-, perfectif zinçti et imperfectif zëvati (§ 525) :<br />
Slov. pozoj «dragon, monstre», en regard de pozéjâti «ouvrir<br />
la gueule pour avaler » ; et s.-cr. kajkavien pôzôj, verbe pozinuti<br />
(ancien) « engloutir ». Avec des sens plus évolués :<br />
R. zoj « bruit, cri », sur dial. (na)zevât' « crier fort, gueuler » ;<br />
nazôj « importunité, insistance » (nazinut' « surgir, tomber sur ») ;<br />
ozôj et masc. zôja, ozôja « homme importun, quémandeur », adv.<br />
ozôem « avec effronterie » (ozijdt' « avaler gueule grande ouverte ») ;<br />
podzôj « incitation ».<br />
Mais des postverbaux plus directs sont sur le thème zëv- :<br />
R. zev « gueule », nazëv « mauvais œil, maléfice », ozëv et ôzev<br />
«grand tas, quantité prodigieuse», comme adj. (o)zôjnyj<br />
« immense » (ozevât' « jeter un sort » et « regarder bouche bée ») ;<br />
masc. razëva « un badaud ».<br />
Pol. ziew « bâillement » et dial. ziewa, poziew, rozziew.<br />
Slov. zëv (et fém.), s.-cr. zïjev « bâillement, hiatus ». Et sur s.-cr.<br />
zijèhati, slov. zéhati (§ 557) :<br />
S.-cr. zïjeh, slov. zêh.<br />
*znëje-, *znïjati «brûler sans flamme» (§ 512), flexion probable<br />
et confirmée par tch. dial. znët et znal :<br />
Y. si. znoi « chaleur brûlante ».<br />
R. znoj ; zaznôj et fém. zaznôja « flamme, passion », sur zaznôit'<br />
« devenir incandescent ».<br />
Pol. znôj « chaleur, travail pénible », uznôj « fatigue, suée ».<br />
Tch. znoj pour v. tch. znôj ; — slov. znôj, s.-cr. znôj « chaleur »<br />
et « sueur ».
56 LES POSTVERBAUX [§ 723]<br />
zive-, factitif goiti (§ 608) :<br />
R. ancien goj « jouissance paisible », izgôj « prince sans apanage » ;<br />
ugôj « arrangement ».<br />
Ukr. hij « remède », gén. hoju, de hojily « guérir ».<br />
V. tch. hoj « abondance ».<br />
S.-cr. ancien gôj ; àdgoj «éducation, élevage», et o(d)yoja, et<br />
var. nagoj.<br />
Slov. goj « soin » et gçja, izgçja, odgoj et odgçja, vzgôj et vzgçja<br />
« élevage », prigoj « gain de l'éleveur », pogdj « réconfort ».<br />
Les autres postverbaux sont sur le thème ziv- (§ 798).<br />
Skr. gàyah « entretien de la maison », en regard de jivati « il vit » ;<br />
— av. gaya- « vie ».<br />
§ 730. — Kryje-, imperfectif dérivé -kryvati.<br />
V. si. krovu « couverture, toit », pokrovu, sukrovu, zakrovù ;<br />
V. r. prikrovu « couverture (de corps) » ; r. krov, nakrôv, skrov,<br />
zakrôv, pokrôv « couverture » et fém. pokràva « protection ».<br />
Pol. pokrôw et fém. pokrowa.<br />
Tch. krov, pokrov, prikroy, zakrov.<br />
Slov. krov « toit », okràv « boîtier », prikrôv « protection, écran »,<br />
zakràv « couverture » ; — s.-cr. krôv, pàkrov.<br />
Sur le thème kryv- :<br />
R. kryv, nakryv, o-, po-, pere-, pri-, pro-, ras-, s-, u-, za-, vykryv.<br />
Pol. pokrywa, nakrywa « couvercle », okryw et okrywa « couverture<br />
», przykrywa, zakrywa.<br />
Tch. pokryv « couche » ; — slov. kriv « toit », zakrîv, pokriv ;<br />
— s.-cr. pôkrîv « couvercle » et « toiture ».<br />
Le russe a d'autre part, sur le thème du présent krôe- :<br />
perekrôj, vskrôj, zakrôj, se confondant avec -krôj de kroiti<br />
(§ 743).<br />
Lette krava (et kr'ava, kruva) «tas », en regard de kr'aût «entasser»<br />
(§519).<br />
myje-, imperfectif dérivé -myvati :<br />
Y. si. rçkomyja «lave-mains » (Théod. LIX, 10, var.).<br />
V. r. pomyjç, fém. plur., « lavures, rinçures », pol. et tch. pomyje,<br />
slov. pomije, s.-cr. pômije.<br />
Sur le thème myv- :<br />
R. neumyva, masc., « homme qui ne se lave pas ».<br />
Et en russe, sur le thème du présent môe- :<br />
V. r. rukomoja « lave-mains » et mod. rukomôja, masc., « homme
[§ 724] VOCALISME RADICAL -O- 57<br />
propre, qui se lave les mains » ; izmôj, pomôj et vymoj « rinçures »,<br />
obmôj « éclaboussures dé vague », masc. neumôj « homme qui ne se<br />
lave pas ».<br />
nyje-, imperfectif dérivé -nyvati :<br />
Sur le thème nyv-, r. zanyv « commencer à avoir mal, à geindre ».<br />
Et en russe, sur le thème du présent nôe- : noj « geignard »,<br />
iznôj « dépérissement » (§ 519).<br />
Factitif naviti, qui a ses postverbaux propres (§ 778).<br />
ryje- :<br />
Y. si. rovu « fosse », prërovû « fossé », obrovu « circonvallation »<br />
(Upir') ; v. r. prorovu « ravine ».<br />
R. rov, et ancien obrôv.<br />
Pol. rôw, parôw « ravin » ( § 1220) ; par déformation narôw<br />
« mauvaise habitude » pour *nrow, et dial. zarôw pour zôraw<br />
«grue» (§ 175).<br />
Tch. rov « tranchée, tombe », v. tch. pfierov « fossé » ; — slov.<br />
ràv, prerov « tunnel », obrôv et obrçva « talus » ;—- s.-cr. rôv, prljerov,<br />
ancien èbrov « fossé, retranchement ».<br />
Sur thème ryj-, dans des composés :<br />
Slavon groboryja « fouilleur de tombes » ; krutoryja « taupe »<br />
dans un exemple unique, mais qui doit être ancien (§ 1161) ;<br />
— v. pol. osoryja « vautour » qui, signifiant « fouilleur (de nids)<br />
de guêpes », désigne spécialement un oiseau de l'espèce des<br />
vautours, la bondrée apivore.<br />
En baltique, lit. râvas « fosse » est sûrement un emprunt au slave :<br />
le verbe baltique est lit. râuti « arracher », postverbal ravà « arrachage<br />
» (§ 465). En slave, ryje- «fouir» et ruve- «arracher» sont<br />
complètement séparés, et ruve- a ses postverbaux en ruv- et ryv-<br />
(§800).<br />
îyje- factitif -taviti :<br />
S.-cr. lôv « graisse, obésité ».<br />
Sur le thème tav- :<br />
R. olâva « regain » ; pol. dial. otawa ; — tch. otava « regain »<br />
(v. tch.) et mod. « fait de reprendre ses forces » ; — s.-cr. 'otava ;<br />
— slov. otâva « regain », otàv « fait de se requinquer », et obolâva<br />
de obotdviti se « enfler, s'enflammer », en parlant d'une plaie, et<br />
botavéli par dépréverbation.<br />
vyje- :<br />
En russe, sur le thème de présent vôe- :<br />
voj et povôj « gémissement, hurlement », rejoignant -vôj de<br />
vue- (S 7291.
58 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
plove-, inchoatif *plynçti (§ 490), imperfectif dérivé -plyvati<br />
(§ 463), itératif plavati et factitif plaviii :<br />
R. plov « bateau », oplôv « navigation autour », pereplôv, vyplov.<br />
S.-cr. ancien naplov « alluvion » et « inondation » ; — slov.<br />
naplôv « alluvion ». En polonais et en tchèque, le thème plova<br />
disparu.<br />
Sur le thème plyv- :<br />
R. doplyv, na-, o-, ot-, pod-, pere-, pri-, pro-, ras- (et fém. rôsplyv'),<br />
s-, vs-, za-, vyplyv, et fém. zaplyva « flotte, bouée » ; adv. vplyv',<br />
voir vplav'.<br />
Pol. plyw « nage » et « courant », dopiyiv, od-, przy-, roz-, s-, u-,<br />
za-, naplyw « affluence » et wplyw «influence» (§ 824); — tch.<br />
ndplyv et vplyv, mais emprunts du xix e siècle au polonais, comme<br />
s.-cr. ùpliv, slov. vpliv.<br />
Un thème pluv- plus ancien que plyv- est supposé en polonais<br />
par l'adjectif v. pol. oplwity, mod. obfity « abondant » en regard de<br />
oplywdc «abonder» (§ 992).<br />
Sur le thème plav- :<br />
En russe, où le factitif - plâvit' mêle les deux sens de « faire<br />
flotter» et «faire fondre» (§ 613) : dopldv «fonte» et nedopldv<br />
« retard ou manque dans le train de bois flotté », de même napldv,<br />
o-, po- (et fém. pôplav' « filet, traîne »), pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
ras- (et fém. rôsplav'), s-, vyplav « fonte » et zdplav (et fém. zdplav')<br />
« navigation » ; sans préverbe plav « lavoir » et « (saison de la)<br />
navigation » ; adv. vplav' (vplyv') « à la nage » et « en bateau ».<br />
Pol. plaw « nage », poplaw « cours » et « prairie basse, inondée »,<br />
upiaw « écoulement », wy-, za- ; splaw « flottage » et fém. spiawa<br />
« flux ».<br />
Tch. ndplav et ndplava « alluvion », pruplav « canal », splav<br />
« barrage, écluse », zdplava « submersion ».<br />
Slov. plâv « flottage, flottaison » (fém. pldv « radeau, train de<br />
bois », § 713), naplàv, od-, pre-, s-, fém. popldva et preplâva<br />
« inondation ».<br />
S.-cr. ndplav « alluvion » et ndplava « inondation », pôplav et<br />
pôplava, prîplava, splâv «radeau» (fém. plâv « vaisseau, ancien<br />
et poétique), composé vôdoplâv « chicorée ».<br />
Sur thème plyn- (§ 824) :<br />
(R. v ûplyn' « en s'en allant par eau, uplffl' », en blanc-russe subst.<br />
plyn' « courant » et locution v plyn', sur l'ancien *plynçti supposé<br />
par plyt', § 463).<br />
Pol. plyn « fluide, liquide », naplyn « affluence », rozplyn « (dis)solution<br />
», spiyn « écoulement ».<br />
Tch. plyn « gaz », d'où slov. et s.-cr. plin.<br />
La forme mal conservée plov- est celle crui répond à gr. iù,ô(F)oc,
CHAPITRE III<br />
VOCALISME RADICAL -o- (suite)<br />
§ 731. Postverbaux à alternances moins claires. — Ces<br />
postverbaux sont ceux où l'alternance joue en slave dans des<br />
conditions plus spéciales, et ceux où elle ne se révèle que par<br />
comparaison avec d'autres langues :<br />
prosi- :<br />
V. si. vûprosu « demande ».<br />
R. voprôs et zaprôs, spros « permission ».<br />
V. pol. wypros « demande » et przepros « excuse ».<br />
S.-cr. dial. ispros « demande en mariage».<br />
Lit. pif sti « proposer en mariage » et itér. prasyti « demander »<br />
(§ 117) ; lat. precor «je prie» et subst. procus «qui demande en<br />
mariage ».<br />
V. si. groza « frisson de peur », o-yroziti sg « frissonner » (Upir').<br />
R. grozâ et ugrôza « menace », prigrôza.<br />
Pol. groza « horreur », ogroza « frissonnement », pogroza.<br />
Tch. hrùza, slov. grôza, s.-cr. grèza.<br />
Lit. grasà « menace, crainte, dégoût », de gristù, gristi « se<br />
dégoûter », grësti « dégoûter » (lit. grazôju, grazôti « menacer » est<br />
un emprunt au blanc-russe -grazâc'). Pour si. -z- en regard de lit.<br />
-s-, cf. *dïrznçti « oser » et lit. dristù, drlsii, § 494 : l'élargissement<br />
en -t- qu'on peut supposer ici aussi se trouve en germanique,<br />
v. h. a. garst « rance », mod. garstig « repoussant, laid ».<br />
motati, r. motât', etc. « enrouler, dévider ».<br />
Slavon omotu, omoia, variantes de omela « bordure d'un vêtement»<br />
(§804).<br />
R. mot « écheveau » et « gaspilleur », de motât' « dévider » et<br />
« gaspiller » ; domôt, iz-, na-, nad-, ob-, ot-, po-, pod-, père-, pri-,<br />
pro-, u-, v-, vz-, vijmot.<br />
Pol. dial. mot, przemot « erreur en enroulant l'écheveau » ; —
60 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
tch. primota « erreur d'enroulement », zâmola « imbroglio » ; — s.-cr.<br />
ômot « paquet », zâmol « enveloppe ».<br />
Et composés motovi(d)lo « dévidoir » (§ 943), *motovçzu « tortis »<br />
(§ 1215).<br />
Le verbe motati est dépréverbé de omotati ou namotati « jeter<br />
autour, sur », dénominatif d'un postverbal comme omota de mete-,<br />
metaii « jeter ». Les postverbaux de motati sont bien distincts de<br />
ceux de mesti et de metaii (§ 804), et le tchèque primota au sens<br />
dialectal de « pustules autour d'une plaie » doit être une variante<br />
secondaire de pfimëty, plur., sur primitati se « former une nouvelle<br />
plaie ».<br />
xotëti, xutëti « vouloir » :<br />
(Y. si. xotï, samoxotï, poxotï, § 713).<br />
R. oxôta « envie, goût » et « chasse », var. oxvôta en vieux russe et<br />
russe dialectal.<br />
Pol. ochota « envie, désir » et polabe ochota ; — tch. ochota<br />
« complaisance, obligeance ».<br />
S.-cr, p'ôhota « convoitise, désir », anciens hot et hota (et fém.<br />
hot, pohot). -<br />
Slov. hot « désir », pohot et pohôta (et fém. pohçt), prihôta.<br />
On a un thème *xgt- dans pol. chec « envie », tch. chut' et prlchut'<br />
« goût », pol. zachçcic « animer », przychçcic « attirer » ; et sur ce<br />
thème :<br />
Pol. zachçt et zachçla « encouragement », przychçta « attrait ».<br />
Et un imperfectif dérivé s.-cr. (za)htijèvati «désirer», slov.<br />
(za)htévati, d'où :<br />
S.-cr. pràhljev « envie », zâhtjev « désir » ; — slov. zahlèv et zahlêva,<br />
et aussi hotêva sur hotéti (§ 818).<br />
Le verbe xotëti est un ancien parfait xot- à forme alternante<br />
xul- (§ 600) ; et le polonais et le tchèque supposent, sur ce thème,<br />
un présent à infixé nasal (§ 450) *xçt-, analogue à sed- sur sëd-,<br />
ancien parfait également (§ 446). La variante r. oxvôta présente<br />
la forme *xvot- qui est à la base du transitif xvaliti (§ 601), non pas<br />
sans doute en la conservant, mais par restauration sur r. o(b)xvatit'<br />
(« embrasser »).<br />
Les verbes xvatiti et xytili « saisir » ont leurs postverbaux en<br />
xvat- et xyt- (§ 778).<br />
bode-, imperfectif dérivé -badati.<br />
Tch. bod « piqûre, point ».<br />
Slov. bçd « point de côté », nabôd et zabôd « piqûre », pobàd<br />
« action d'éperonner », prebàd « percée ».<br />
S.-cr. bôd, oboda « bardane » (à boutons piquants), prôbod « piqûre,<br />
r\ûr«/>ûû A
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 61<br />
Sur le thème bad- :<br />
Slov. nabàd et nabâda « aiguillon, éperon » ; — s.-cr. ancien et<br />
dial. obad « piquant, aiguillon », nabada « pointe » (et fém. prôbâd<br />
« point de côté »).<br />
Le nom du « taon », s.-cr. ôbâd, slov. obàd, obâd, serait un postverbal<br />
régulier de s.-cr. (ancien) obadati et slov. obâdali « piquer »,<br />
si la forme des autres langues n'était pas r. ôvod, ôvad, pol. owad, tch.<br />
ovâd, et v. r. ovadû en regard du slavon serbe obadï. Cette forme<br />
suppose *ob-vadu, mais il peut s'agir d'un remaniement de obadu<br />
dans des langues qui n'ont pas développé de postverbaux de bode-<br />
(tch. bod est récent), tandis qu'elles en ont largement, et anciens,<br />
en -vada (§ 781). D'ailleurs obad peut n'avoir aucun rapport avec<br />
bode-, et un rapprochement avec lit. ûodas « mouche » orienterait<br />
vers une autre étymologie (§ 752).<br />
En baltique, lit. bedù, itér. badi/li, mais le vocalisme radical -edoit<br />
être secondaire pour si. -o-, lat. fodiô (§ 430).<br />
plod- :<br />
V. si. plodu « fruit », priplodu « accroissement » (J. Ex.).<br />
R. plod, et dial. plodd « descendance » (et plod') ; doplôd, na-, o-,<br />
pri-, ras-,<br />
Pol. plôd, przgplôd, et poplôd «arrière-faix», rozplôd «couvée»,<br />
zaplôd « fécondation ».<br />
Tch. plod, vyplod « produit ».<br />
Slov. plôd, oplôd « fécondation », pri-, raz-.<br />
S.-cr. plôd, priplod, rdsplod « propagation ».<br />
Lit. peldù, peldëti « épargner », racine *pel- et thème verbal<br />
*pel-de- (§ 444), et sur *pïld- si. plodu (§ 117).<br />
§ 732. — Kopaje- :<br />
R. (kop' « mine »), dokôp, is-, na-, nad-, ol-, pod-, pere-, pri-,<br />
pro-, ras-, s-, u-, v-, vs-, vykop ; zakôp « tranchée » et masc. zakôpa<br />
« casanier ».<br />
Pol. podkop « sape », przekop « fossé », od-, s-, za- ; okop « retranchement<br />
» et okopa, przykop et roz-, wy- « fossé » et przykopa, roz-, wy-.<br />
Tch. kop « coup (de pied) » de kopnouli « donner un coup (de<br />
pioche) », et comme ail. Haue « coup » ; nàkop, o-, od-, pod-, prâ-,<br />
vif-, zd-, prikop et prikopa.<br />
Slov. kop « houe » (fém. kôp « taille de la vigne »), prokop, zakôp.<br />
S.-cr. {kôp, fém., «piochage»), prokop «canal», ùkop et zdkop<br />
« inhumation ».<br />
Lit. kâpas, lette kaps « fosse, tombe ». ]<br />
Mais le mot v. si. kapï « fourreau » (§ 713) montre que jle sens<br />
« fouir » est secondaire, et que la racine doit être celle du lette
62 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
kàmpt « saisir », lat. capiô, sûrement avec un vocalisme radical -aprimitif<br />
: un vocalisme -ë- dans le prétérit lat. cëpî est analogique,<br />
et le lette kept « agripper » se dénonce par son initiale lie- et non<br />
*ce- (§ 16) comme à part de kàmpt. Avec le vocalisme -a-, l'alternance<br />
était quantitative, a : â, et c'est elle qu'on trouve avec un<br />
autre sens de la racine dans si. kop- « tas » et lit. kôpti « entasser » :<br />
R. kopâ « tas », kopit' « amasser, thésauriser », postverbaux<br />
kop et skop « action d'amasser, épargner », nakôp (et fém. nâkop'),<br />
prikôp, ukôp, qui chevauchent sur les postverbaux de kopât'.<br />
Pol. kopa « meule de foin » et « soixantaine » ; — tch. kopa<br />
« soixantaine » ; — slov. kôpa « meule », s.-cr. dial. kopa « tas (de<br />
foin, de bois)» et slavon croate kopa (Job, XXIV, 11).<br />
Lette kâpa « masse, dune », lit. kôpos (plur.) et verbe kôpti<br />
« entasser ».<br />
V. si. stopa « plante du pied, trace de pas », r. stopâ, s.-cr. stopa, etc.<br />
En regard de stepenï «marche, degré» (§ 450), mais isolé : les<br />
autres postverbaux sont en stgp- sur stçpiti, voir § 764.<br />
to(p)ne-, factitif topiti (§ 500). :<br />
Y. si. potopu « déluge ».<br />
R. potôp, et dotôp, zatôp (et fém. zdtop') « endroit inondé », vtop<br />
« action d'encastrer ».<br />
Pol. potop, zatop « immersion ».<br />
Tch. potopa « déluge », zâtopa « submersion ».<br />
Slov. potop, utôp et zatôp « submersion, inondation » ; — s.-cr.<br />
pôtop.<br />
Sur le thème ton- de tonçti ( § 824) :<br />
R. zatôn « endroit inondé, baie fluviale » (dès le xv e s.) ; pritôn<br />
« retraite, repaire » doit se rattacher à ce thème.<br />
(Pol. ton «grande profondeur, précipice», fém., est nouveau<br />
pour tonia, § 1086).<br />
Tch. vyton (et fém. vyton) « endroit où le bois de flottage est sorti<br />
de l'eau ».<br />
Slov. zatôn « baie, île » et « coucher du soleil ».<br />
S.-cr. ton « submersion », nom verbal dans tonom tonuti ; zâton<br />
« baie » ; ôton comme toponyme, désignant un endroit où la terre<br />
s'est enfoncée (dial. otônina) ; sûton « tombée de la nuit » (depuis<br />
le xvi e s.), comme sûmrâk «crépuscule» (§ 1222), en regard de<br />
stônuti « s'enfoncer ».<br />
Ces postverbaux en -ton se rencontrent avec ceux de tïne-<br />
(§ 727). D'autre part le factitif topiti a les deux sens de «submerger»<br />
et de «chauffer, faire fondre» (§ 608), et sur le second<br />
sens on a les postverbaux, qui peuvent être aussi ceux du premier<br />
sens :
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 63<br />
R. o(b)tôp « chauffage », zatôp « foyer du four », et dotôp, is-,<br />
ot-, pere-, s-, vytop.<br />
Pol. roztop « fonte, dégel », stop « alliage ».<br />
Tch. vytop « chauffage » et « réprimande ».<br />
Slov. prelop, rastàp « fusion ».<br />
S.-cr. prijètop « saindoux », zâiop « rillettes ».<br />
Le degré vocalique iep-, celui de lat. tepëre « être chaud », est<br />
conservé dans l'adjectif teplu. (et toplu) «chaud» (§ 384) ; et dans<br />
le féminin pol. paciep (§ 718).<br />
V. si. drobiti « mettre en morceaux » :<br />
R. (drob', fém., « menus morceaux, menu plomb »), peredrôb<br />
et razdrôb « morcellement ».<br />
Pol. drob « volaille », odrôb, rozdrôb, podrôb et podroba « fressure ».<br />
Tch. drob « miette » et plur. droby « tripes ».<br />
Slov. drôb « petits morceaux », zdrob « gruau ».<br />
S.-cr. drôb « tripes », et anciennement « menu bétail ». Une<br />
forme alternante dreb- est attestée, mais de façon peu sûre, par<br />
bulg. dreb « déchets de laine », adj. drében « menu » pour v. si.<br />
drobïnu, r. drébezgi «petits morceaux, tessons » à côté de drobezgd<br />
(§ 1010). Elle ne l'est pas mieux par les rapprochements avec<br />
d'autres langues, dont le moins douteux est avec got. ya-draban<br />
« tailler la pierre ».<br />
zçbe-, factitif znobiti ( § 608) :<br />
R. znob (et znob'), oznôb et oznôba (et ôznob') « frisson », pereznôb,<br />
zaznôb et zaznôba « engelure » et pop. « brûlure de passion ».<br />
S.-cr. ancien znoba (Marulic, Jud., VI, 392) de znobiti «faire<br />
périr (par la gelée) ».<br />
Pour les postverbaux de zçbe-, voir § 763.<br />
zoblje-, zobati « picorer » ( § 550) :<br />
R. zob « jabot » (fém. zob' « grains pour les chevaux », § 713).<br />
Pol. dziôb «bec», verbe dziobac de zobac, ancien zob «graines<br />
pour les oiseaux », et tch. zob.<br />
(S.-cr. zôb, fém., « avoine ») ; — slov. (zôb, fém.), ozob « avoine ».<br />
Lit. zébiù, zèbti «mâcher, manger lentement», à vocalisme<br />
radical long, mais sûrement par extension de ë au présent, et on<br />
doit restituer une flexion du type srebiù, srëbti (§ 546), avec e<br />
bref conservé dans des verbes dérivés comme zeblénti. Le vocalisme<br />
radical -e- est celui d'un type de présents en -je- productif en<br />
lituanien (§ 548), en sorte qu'il peut être secondaire et que la seule<br />
forme sûre de la racine est un balto-slave *zab-, de *gob- qui doit<br />
se retrouver dans le celtique gob « gueule, bec », d'où fr. « gober ».
64 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
§ 733. — Pece-, *pekti « cuire » :<br />
Slavon opoka « roche ». ou « chaux » ; —- r. opôka « marne » ;<br />
— pol. opoka « roche » et « marne » ; — v. tch. opoka.<br />
Mais on a également tch. mod. opuka « marne » et s.-cr. dial.<br />
opuka, qui se rattachent à pçk- «s'enfler» (§ 767), et le slovène<br />
opqka est à côté du verbe opçkati « se crevasser, se gercer ».<br />
Les postverbaux clairs de pece- sont tous sur le thème pek-<br />
(§ 803), et de même les dérivés de la racine verbale ; toutefois<br />
*pok- se conserve dans le dérivé isolé potù «sueur» (§ 36). Il est<br />
probable que opoka est la forme ancienne du plus récent s.-cr.<br />
ôpeka « brique », slov. opçka, désignant une roche marneuse à<br />
aspect de terre cuite, et que opuka en est l'altération secondaire.<br />
skoëi- :<br />
Y. r. skoku « (cheval) sauteur », r. skok « saut », doskôk, na-, ob-,<br />
ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, so-, u-, vs-, za-, vjjskok.<br />
Pol. skok, podskok « sursaut », uskok « saut de côté », wyskok<br />
« saillie », na-, po-, etc.<br />
Tch. skok, doskok, nad-, 'od-, po-, pod-, pre-, pred-, se-, u-, vy-,<br />
za- ; et v. tch. nâskoka « bosse » à côté de nâskok.<br />
Slov. skok, izskàk, do-, na-, od-, pod-, pre-, pri-, za- ; poskàk « saut »<br />
et « (un lézard) sauteur », plur. poskoki « fantômes, spectres » ;<br />
uskok « ouscoque ».<br />
S.-cr. skôk, ôdskok « rebond », prèskok et pàskok « saut », et<br />
po(d)skok « une vipère, aspic » ; ùskok « fugitif, réfugié, ouscoque ».<br />
Un seul rapprochement avec le germanique : v. h. a. skëhan<br />
« survenir », prêt, skah, mais qui permet de supposer en slave<br />
*stek-, et *stïk- dans za-sticati (§ 607).<br />
V. si. soku « suc, sève », r. sok, s.-cr. sôk, etc., verbe r. socit'<br />
« tirer la sève, soutirer » :<br />
R. dial. osôkà « pus, purin » ; pour osôkd « laîche », voir § 1046.<br />
Pol. posoka « sang répandu », et ancien posok.<br />
S.-cr. ôsoka « jus, ce qui découle, sang, urine, etc. ».<br />
Lit. sakaï «résine », et svek- dans le lette sveki (§ 37) ; et sukdans<br />
lit. sunkti « faire suinter », à quoi doivent se rattacher lit.<br />
sùkti « (re)tourner » et si. sukati «tordre» (§ 544), qui a ses postverbaux<br />
(§ 755).<br />
Une racine verbale différente est :<br />
Y. si. soku « dénonciateur » (Gyr. Jér.).<br />
R. sok « dénonciateur, espion », verbe v. r. soëiti « accuser,<br />
enquêter », mod. socit' « rechercher », osoëit' « traquer », subst.<br />
osôk et osôka « battue avec filets » et dial. posôka « alerte, alarme ».
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 65<br />
V. pol. sok « dénonciateur, calomniateur », soczyc « dresser des<br />
embûches », subst. osoka « traque » ; — tch. sok « persécuteur,<br />
rival ».<br />
S.-cr. dial. sok « dénonciateur », ancien opsok « enquête » ; — slov.<br />
ôbsok « recherche, enquête ».<br />
Le verbe slave sociti répond aussi bien à lit. sakyti « dire » qu'à<br />
sekù, sekti «suivre» (§ 607); postverbal pâsaka «conte», adv.<br />
pâs(a)kui « derrière », composé pëdsakas « recherche de piste »<br />
(§ 1233). Le slave conserve sûrement sek- « suivre » dans l'adjectif<br />
setïnû « dernier » (§ 476).<br />
strëce-, strëkati « piquer », perf. -strïknçti :<br />
V. si. stroka « point » (J. Ex.).<br />
R. strokâ « ligne », et sur strïk-, streknût' : nastrëk « action de<br />
fustiger », podstrëk « instigation ».<br />
Pol. stroka « raie, bande », et strzoka par réfection sur strzekac<br />
« tirailler ».<br />
S.-cr. podstrëk, russisme ; strijèka « raie, rayure (d'une étoffe) »<br />
et « fente », en regard de strëcati « piquer », mais à côté de strlka<br />
(slrika), qui dénonce une contamination avec l'allemand Strich<br />
« trait, raie », sur streichen « frotter, passer en rasant, faire un<br />
trait », auquel répond en slave slrig- (§ 797).<br />
Le verbe strëkati a l'aspect d'un itératif d'une racine *slrekà<br />
degré réduit strïk- (§ 552). Cette racine, isolée en slave, fournit<br />
un des noms du « taon », r. strëk, s.-cr. strk, dont la forme ancienne<br />
a été sûrement r. dial. slrok et fém. strokâ : c'est elle qu'on trouve<br />
en vieux slave (ou plutôt vieux russe) dans le datif stroku Ham. 6425<br />
(Srezn., struku dans la mauvaise édition d'Istrin), qui traduit<br />
xevTociipouç « centaures », avec interprétation par XSVTSÏV « piquer<br />
de l'aiguillon », et suivant osamu « guêpes » qui est tyfi-fyaç<br />
« sphinx », lu CT
66 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Le baltique a lit. treskëli et traskëli « craquer », subst. traskà<br />
« fragilité, fait d'être cassant ». Pour autant qu'on puisse suivre<br />
les formes de verbes expressifs, le slave Irëskati peut être l'itératif<br />
de *lresk- conservé dans troska.<br />
V. si. rozga « sarment », secondairement razga (§ 70).<br />
R. rôzga « verge », pol. rôzga, slov. rôzga « sarment », s.-cr.<br />
r'ôzga « échalas ».<br />
Lit. rezgù, règzti « entrelacer, lier », skr. rdjjuh « cordage », lat.<br />
restis « corde ».<br />
(V. si. ostezï « chlamyde », § 714), slavon russe ostegnuti<br />
« agrafer », r. stegât' « piquer (une étoffe) ».<br />
Slavon stogû « tas de foin, meule », r. siog, s.-cr. stôg, etc.<br />
Slavon zastogy (acc. plur.) « fibules ».<br />
Ailleurs sur thème steg- :<br />
R. stezôk « point (d'aiguille) » et ukr. sleh, nâsteg (nastëg), ôtsteg,<br />
perestëg, pro-, so-, vysteg, ostëg et ostëga, postëg (pôsteg) et postëga,<br />
podstëg et podstëya, pristey et pristëga, razstëg et razstëga, zâsteg<br />
et zastëga.<br />
Pol. écieg « point d'aiguille » ; — tch. steh.<br />
Y. h. a. stëhhan « piquer », stecho « pieu », v. sax. stekan, got.<br />
slaki- « point ». En slave, v. si. stezeru « base, soutien » désigne<br />
proprement le pieu qu'on pique dans le tas de foin, s.-cr. stôzêr<br />
(§ 1119), forme rudimentaire de la meule de foin, et ainsi rejoint-on<br />
stogu « meule ».<br />
Le baltique a des mots qui paraissent d'une autre famille, avec<br />
vocalisme radical long : lit. stôgas « toit », v. pr. stogis, et v. pr.<br />
steege « grange ». Il semble qu'il y ait eu rencontre en balto-slave<br />
de la racine steg- « piquer » et de la racine de gr. crTsyco «je couvre »,<br />
lat. tegô.<br />
§ 734. — Lomiti, itér. lamati (§ 652) :<br />
R. lom « débris » et « levier », dolôm, iz-, na-, nad-, ob-, ot-, po-,<br />
pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-, vz-, za-, vylom.<br />
Pol. lom « bris, fracas », nalorn, nad-, od-, po-, pod-, prze-, roz-,<br />
u-, wy-, z-, za-,<br />
Tch. lom, polom, pod-, pre-, prû-, u-, v-, z-, zd-.<br />
Slov. lom, izlàm, na-, ob-, od-, po-, pod-, pre-, pri-, raz-, u-, v-, z-.<br />
S.-cr. lom, composés kostolom « fracture », vratolom « homme<br />
casse-cou », pàlom, prijè-, prà-, rdz-, û-, slôm.<br />
Sur le thème lam- :<br />
R. lam « ramilles » (dial.), obldm, à côté de oblôm « saillie, corniche ».<br />
Pol. lam « colonne de journal » (lamacz « metteur en pages »,
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 67<br />
ail. brechen « plier une feuille ») ; oblam, et odtam, po-, pod-, prze-,<br />
roz-, u-, w-, z-, za-, variantes de -lom.<br />
En slave, lem- dans lemesï « soc » ; en baltique, lit. lèmezis et<br />
verbe limstù, limti «se briser» (§ 607) ; en germanique, v. angl.<br />
lemian « paralyser » et v. h. a. lam « perclus » (adj.).<br />
Slavon skomulati « geindre », v. si. oskomina « agacement des<br />
dents » (§ 558) :<br />
R. oskôma (et oskomina), sur skomit' « éprouver une douleur<br />
sourde ».<br />
Pol. skoma et oskoma « grand désir » et « agacement des dents ».<br />
Slov. (o)skomina ; — s.-cr. skômine (plur.) et bskomine.<br />
Rattachement vraisemblable à la racine, d'ailleurs isolée, de<br />
r. scem'd' « serrer, pincer », v. pol. szczmic, slov. sceméli et sëmlli<br />
« démanger, cuire ».<br />
Slavon u-slrïmnçti, tch. strmëti « se dresser à pic » (§ 591) :<br />
V. tch. strom « arbre », et pol. stromy « escarpé ».<br />
L'adjectif est ailleurs slavon slrïmu, tch. strmy, etc. (§ 820).<br />
V. si. tomiti « tyranniser » :<br />
R. lom et tôma sur tomll' « accabler », podtôm, pere-, pri-, u-,<br />
za-, vytom, et islôma « fatigue », nad-, pri-, ras-, u-, za-.<br />
Et voir tch. tlumiti, § 760.<br />
Factitif isolé en slave, qu'on compare à skr. lamàyati « il fait<br />
perdre le souffle » en regard de tâmyati « il perd le souffle », et la<br />
racine pourrait être i.-e. *tem- (§ 614) ; mais l'adjectif v. si. tomitu<br />
« dressé » ( § 990) fait supposer un emprunt au germanique tamjan<br />
« dompter », sur la racine de lat. domâre.<br />
§ 735. — Kolje- :<br />
Y. si. kolâ « pieu », raskolu « scission, schisme » (Pand. Ant.).<br />
R. kol ; raskôl « fente » et « schisme », dokôl, ot-, pod- ; prokôl<br />
« piqûre », is-, na-, nad-, ob-, po-, pere-, pri-, s-, u-, vykol ; zakôl<br />
« égorgement » et « barrière de pieux (dans une rivière) ».<br />
Pol. kôi ; — tch. kûl, composé v. tch. slrëlokol « sagittaire » ;<br />
rozkol « dissidence » ; v. tch. prokol « bûche » ; ukol « tâche convenue<br />
», sur uklati « délimiter (par des pieux) ».<br />
Slov. kol ; zâkol « massacre » ; ndkol « action d'échalasser », de<br />
nakôlili « planter des échalas ».<br />
S.-cr. râskol (savant) ; pokolj et zâkolj « massacre », refaits sur<br />
prés, k'ôljë- ; dial. prôkola « tranche (de chou) », qui paraît être<br />
pour une part une adaptation de l'italien broccolo « pousse de<br />
chou ».
68 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
A distinguer des formations sur kolo « cercle » (§ 741).<br />
Lit. priekâlas « enclume », âpkalas « ferrures », sur kâlti « forger »,<br />
et kuôlas «pieu», lat. per-cellô (§ 530).<br />
mo(d)liti :<br />
R. bogomôl et masc. bogomôla « qui prie Dieu, dévot ».<br />
Pol. modla « prière » ; — tch. modla « idole », v. tch. « temple »<br />
et « prière ».<br />
Pour mol de melje-, voir § 727.<br />
Lit. meîsti, itér. maldyti, et subst. maldà «prière » (§ 607).<br />
V. si. plëve-, plëli « sarcler » ( § 437) :<br />
R. propôl, zapôl « sarclage » sur polôt', prés, pôle- ; et upôl « écume<br />
d'un pot », en regard de upolovit' « écumer » (upolôvnik « écumoire »),<br />
qui a l'aspect d'un dénominatif de polôva « balle de blé » (v. si.<br />
plëvy, ancien thème en -û-, § 200), mais dont le sens est proche de<br />
celui d'« écoper », ce qui fait supposer une contamination avec<br />
une autre racine :<br />
Slov. pçlje-, plâli « vanner, écoper », imperfectif dérivé -palali<br />
(§ 530) :<br />
Slavon ispolû « mouchettes ».<br />
Slov. pôl «écope»; — s.-cr. ispô «écope», gén. îspola, dial.,<br />
pour l'usuel ispolac.<br />
Et pol. dial. opaia « van » sur opaiac ( § 779).<br />
Gr. TOCXXW « je secoue », lat. pellô.<br />
Une autre racine encore est celle de :<br />
Y. r. polu « plancher », dérivé polica « planche, tablette, rayon »,<br />
d'où pôlka (§ 886), s.-cr. polica, etc.<br />
Une forme *pel~ apparaît en Scandinave : v. isl. fiçl « planche »,<br />
de *fel-. Mais il doit s'agir de la racine de large extension qu'on a<br />
dans v. si. pol je « espace découvert », adj. r. pôlyj « ouvert, libre »<br />
(§ 1021).<br />
V. si. smola « poix » (Upir'), « bitume, goudron » (Ham.).<br />
R. smolâ « résine, poix », et osmôl, prismôl, de smolii' « goudronner<br />
».<br />
Pol. smola, et osmoi de osmolic.<br />
Lit. smélslu, smélli « se barbouiller », et smélslù smëlli « devenir<br />
mat, terne », subst. smelà « résine ». Racine dédoublée de svilù,<br />
svllli « brûler lentement, roussir », v. angl. svelan et ail. schwelen<br />
qui se dit de la préparation de la poix, et bas-allemand smelen ;<br />
cf. si. svç(d)nçli et smç(d)nçti «se dessécher, roussir», v. h. a.<br />
swëdan (§ 494).
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 69<br />
sielje-, slïlali « étendre » :<br />
V. si. slolu « siège, trône », et prëstolu « trône », qui peut être en<br />
regard du verbe slavon prëstilaii.<br />
R. stol « table » et « siège, trône ».<br />
Slov. stôl « siège, chaise, banc » et « faîtage ».<br />
Ailleurs le sens est «table» : pol. stôi, tch. stâl, s.-cr. stô(l).<br />
R. prestôl « trône » est slavon, comme dans les autres langues.<br />
Lit. slâlas « table » et v. pr. stalla-, mais sans doute emprunt<br />
au slave.<br />
Un lien entre stelje- et stolu, comme entre gr. OTSÀÂOJ « J'équipe » et<br />
OTOXOÇ « action d'équiper, expédition, flotte », est très probable<br />
(§ 540), mais obscurci par une contamination avec les mots du<br />
germanique sur la racine *sl(h)â-, got. stôls «chaise», et v. h. a.<br />
stai « place » de *stadla-.<br />
§ 736. — Gorëli, imperfectif dérivé -garali (§ 649), factitif<br />
zariti (§ 613) :<br />
Pol. ugôr « jachère » et ancien ugora.<br />
Tch. ûhor « jachère », vyhor « endroit brûlé par le soleil ».<br />
Slov. ogor et prigôr « endroit brûlé », pogôr « incendie », ugôr<br />
« friche », zgor « rouille des céréales, nielle ».<br />
S.-cr. sâgor « combustion », et prijègor « sacrifice » au sens de<br />
pregôrjeti « faire son deuil de quelque chose, le sacrifier ».<br />
Sur le thème gar- :<br />
R. gar « action de brûler », dogâr, iz-, nagâr « champignon de<br />
la chandelle », ob-, ot-, peregdr « excès de distillation de l'eau-de-vie »,<br />
pri-, progâr « endroit percé par le feu », razgâr « fort de la chaleur,<br />
ardeur déployée », sgar, ugâr « vapeur de charbon, fumée », vygar<br />
« écume de distillation, force de l'eau-de-vie », zagâr « hâle » ;<br />
et fém. izgâra, ogâra « tison », masc. zagdra « un gaillard » (et fém.<br />
gar' «du brûlé», izgar' «mâchefer», pére-, pri-, pro-, û-, vy-).<br />
Pol. ogar « tison », ancien zagar « intoxication par le charbon ».<br />
S.-cr. ùgâr « jachère » (fém. gâr « suie, couleur de suie »).<br />
Sur le thème zar- du factitif :<br />
Slavon et v. r. pozaru « incendie ».<br />
R. éar « chaleur ardente » et zarâ, pozâr, ob-, pere-, vyzar.<br />
Pol. zar « braise, brasier », pozar, wyzar « endroit brûlé » ; — tch.<br />
zâr, pozâr.<br />
Slov. zâr, pozâr ; — s.-cr. êâr « braise », zâra « ortie », pozâr.<br />
Lit. gorëli « brûler », subst. garas « fumée ».<br />
En slave, gorëti est à côté de grëjali « chauffer » (§ 511). La racine<br />
est celle de gr. ôspouai « ie me chauffa »
70 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
V. r. gvoru « bulle d'eau », et v. si. dans les dérivés gvorïcï (Pand.<br />
Ant.) et gvoratu « en forme de sein » (Ham.).<br />
S.-cr. gùra « bosse ».<br />
Sûrement deux formes parallèles de la racine *gur-, balto-slave<br />
*gaur- et *gvar- (§ 117), de lit. gùrstu, gùrti «se dissoudre,<br />
s'émietter » et gvçrù, gvérti « se disperser », gùras « boule, saillie »,<br />
lette gaurs « poreux ».<br />
Kora, skora (§ 31) « écorce, peau», r. korâ et skorâ, pol. kora<br />
et skôra, etc.<br />
Lit. skarà « lambeau », de skirti « séparer », v. h. a. scëran<br />
« couper », gr. xsîpco.<br />
tvoriti, imperfectif dérivé -tvarjati :<br />
V. si. tvorû « action de créer » (Ps.) et sans doute « maléfice »<br />
(Euch. 41 b ), en regard du féminin tvarï « création » (§ 713) ; potvoru<br />
« maléfice » (Gr. Naz.) et slavon potvora, prëtvoru « changement »<br />
(J. Ex.), pritvoru « portique », rastvoru « mélange », sutvorû. « action »<br />
(J. Ex.), slavon utvoru « apprêt » ; et zalvoru. « fermeture » de<br />
zatvoriti « fermer », mais tiré de ôt-voriti « ouvrir » ( § 614), et relevant<br />
des postverbaux de vire- (§ 728).<br />
R. potvôr et potvôra (et pôtvor') « mélange » et « maléfice, magie »,<br />
rastvôr « mélange » et dial. utvôr, peretvôr « action de remêler,<br />
repétrir », pritvôr « battant de porte » et stvor ; et zatvôr, moins<br />
usuellement otvôr « ouverture ».<br />
Pol. iwôr et ulwôr « création, produit », przetwôr, wytwôr ; polwora<br />
« monstre » (potwarz « calomnie »).<br />
Tch. Ivor « création » et v. tch. stvor, polvor « calomnie », ûtvor<br />
et vytvor « oeuvre » ; fém. tvûra et stvâra « créature », potvora<br />
« monstre », v. tch. prietvora « figure » ; et zdtvor « piège », v. tch.<br />
zatvora « fermeture ».<br />
Slov. tvôr « formation », « fermeture » et « abcès, furoncle » ;<br />
pretvor, stvbr et ulvbr « création, formation », otvor, zatvôr et zatvçra ;<br />
potvgra « monstre », utvçra « spectre ».<br />
S.-cr. tvôr « acte » et dial. tvôr « emplâtre », composés dôbrotvor<br />
« bienfaiteur », zlôtvor « malfaiteur » ; stvôr « œuvre », prijètvor<br />
« transformation », pritvor « incarcération », râstvor « (dis)solution »,<br />
otvor et zdtvor ; potvora « calomnie » ; ùtvor et Mvora « spectre ».<br />
Sur le thème fuar- :<br />
Tch. tvar « forme », ûfuar et vytvar « formation », pretvar « transformation<br />
».<br />
Slov. potvâra « monstre » ; —• s.-cr. utvara « spectre », en regard<br />
de utvârati se « apparaître comme vision », et dial. sûtvar et sûlvara,<br />
qui n'est pas une forme à préfixe nominal sç- (§ 1222), mais qui est<br />
tiré de (sto) se utvara «(ce qui) apparaît», cf. sigrati se (§ 422).
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 71<br />
Le baltique a lit. lurëti « tenir, avoir », tvérti « enclore » et « former »<br />
(§ 614), avec des postverbaux àplvaras «enclos», prîetvaras,<br />
ùztvaras.<br />
§ 737. — Kroiti :<br />
V. si. ukroi « bande (de toile) ».<br />
R. kroj « coupe », dokrôj, na-, ob-, po-, pod-, pere-, pri-, ras-, s-,<br />
u-, vs-, za-, vykroj, et fém. iskrôja.<br />
Pol. krôj, nakrôj, o-, po-, prze-, roz-, s-, u-, w-, wy- ; et dial.<br />
skraw « chiffon » sur l'imperfectif s-krawac variante secondaire de<br />
-krajac.<br />
Tch. kroj « coupe, costume », composé stejnokroj « uniforme »,<br />
et ukroj, zàkroj « (dé)coupure ».<br />
S.-cr. krôj ; — slov. krôj et fém. krôja, izkrôj, pre-, pri-, s-.<br />
On a le degré vocalique -e- dans le lette kreju, kriet « écrémer »<br />
(§ 515) : racine *kri- de lat. cernë «je trie », gr. xptvco.<br />
V. si. voi « armée », plur. (sing. voinû « soldat »), pol. wôj « soldat »<br />
(archaïsme), tch. voj « armée », est isolé en slave, et c'est hypothétiquement<br />
qu'on le rattache à lit. vejù, vyli «poursuivre» (§ 515)<br />
et à la racine i.-e. *wei-,<br />
kove-, kovati :<br />
V. si. kovu « machination, complot » ; plur. fém. okovy « entraves,<br />
fers » (Ham. ; et okovi, Ps. Sin., § 714) ; et masc. v. r. okovû.<br />
R. kovy « embûches » et kov « action de forger », dokôv, na-,<br />
ot-, po-, pere-, pri-, pro-, ras-, u-, v-, za-, vijkov, okôv et fém. okôva<br />
(plur. okôvy « fers »), podkôv et fém. podkôva « fer à cheval ».<br />
Pol. kôw « forgeage », okowy « fers », pokowa « seau, mesure de<br />
miel », podkowa « fer à cheval », przekôw « action de reforger » et<br />
przekowy « fers », zakowa « ferret ».<br />
Tch. kov « métal », okov « seau », podkova, dial. nâkova « enclume ».<br />
Slov. kôv (et fém. kôv), nâkov « enclume », okôv et okôva (et<br />
fém. plur. okôvi), odkôv « déferrage », podkôv et podkôva (et fém.<br />
pôdkov), prikôv.<br />
S.-cr. kôv « forgeage, métal », composé mirokov « pacificateur »,<br />
ôkov « ferrure » et okova (et fém. okov), otkov « marteau pour rebattre<br />
la faux », poïkov et polkova, prikov et prïkova « pièce rivée ».<br />
Lit. kduti «battre», v. h. a. houwan (§ 466). Le degré réduit<br />
dans v. si. kûznï «machination» (§ 1109), mais qui n'indique pas<br />
de façon sûre une racine *kou- : *ku-, et l'alternance vocalique doit<br />
être plutôt un développement du slave sur thème ancien *kau-.<br />
slove- :<br />
S l f l v n n h n n n e l n n i i Jt f onlnm^n 1* .. A 1- - 1J -
72 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
R. bogoslôv, zloslôv de zloslôvit' « médire », zlatoslôv (fém. vyslov'<br />
« parole de trop, qui vous .échappe »).<br />
Pol. bogosiow, btogoslow « bénisseur », wystow « expression ».<br />
Tch. oslov « action d'adresser la parole », proslov « allocution »,<br />
vyslova « expression, prononciation ».<br />
S.-cr. blâgos(l)ôv «bénédiction», bogàslov «séminariste», praznôslov<br />
« bavard » ; prôslov « allocution » et « prologue » ; et nâslov<br />
« titre », qui doit être une adaptation récente du tchèque nâslovi<br />
« initiale », û slov « condition » adapté du russe uslôvie.<br />
Slov. blagoslàv, bogoslàv, naslàv « titre », prislàv « adverbe ».<br />
Ces postverbaux et composés sont en regard des verbes v. si.<br />
blagosloviti, zûlosloviti, bogosloviti, qui, variantes de -sloves(ïs)tviti,<br />
sont des dérivés de slovo « parole ». Mais blagosloviti conserve un<br />
participe passif blagoslovenu « béni », qui se rattache à slove-<br />
(§ 461), à vocalisme ancien -e-, celui de gr. ySkk(F)u>.<br />
Pour les postverbaux en slav-, voir § 779.<br />
Y. si. ostrovu « île ».<br />
R. et bulg. ôstrov, tch. ostrov, slov. ostrov ; pol. ostrôw « îlot,<br />
touffe dans une rivière» («île» est wyspa, § 799); s.-cr. ôstrvo<br />
(§ H84).<br />
D'un balto-slave *sreve-, gr. pé(f)to (§ 462), postverbaux lit.<br />
sravà « écoulement », prâsravas, gr. pooç « courant ».<br />
trove- :<br />
S.-cr. trôv « amorce (qui enivre le poisson) », ôtrov (ôlrôv)<br />
« poison » et dial. ôtrova, en regard de (o)tràvati « empoisonner ».<br />
Slov. trôv (dial.) et ôtrov (otrôv) «poison», et fém. otrçva.<br />
Les autres postverbaux sont sur le thème trav- du factitif traviti<br />
(§ 779). Le verbe trove- est propre au slave ; la forme ancienne<br />
attendue *treve- peut être attestée indirectement par la variante<br />
v. si. trëva de trava « herbe » (§ 461).<br />
zove-, zuvati, imperfectif dérivé -zyvati :<br />
V. si. prizovu « appel » (J. Ex.).<br />
R. zov « appel » (gén. zôva, et aussi zva), nazôv « appellation »<br />
(et fém. nâzov'), bl.-r. zazôv « invitation ».<br />
S.-cr. ôzov « déclaration, publication de bans », pbzov et ùzov<br />
« invitation ».<br />
Slov. zôv, nazôv, o-, od-, po-, pri-, zâzov.<br />
Sur le thème zyv- :<br />
R. nazi/v « appellation », pôzyv « envie (de manger, etc.) », prizijv<br />
« appel », sôzyv (sozyv) « convocation », zazyv « invitation ».<br />
Pol. wyzyw ; — slovaque pozyv ; —• slov. nazlv, od-, pri-, za-,<br />
poziv ; —• s.-cr. dôzïv, nâ-, ôd-, pô-.
[§ 737] VOCALISME RADICAL -O- 73<br />
Et sur le thème zuv- :<br />
Pol. pozew (gén. -zwa), wyzew, ancien wyzwa, nazwa, odezwa, sur<br />
-zwac, présent nouveau -zwie-.<br />
Tch. nâzev « appellation », ozva et odezva « écho », vyzva « appel »,<br />
créations des xix e -xx e siècles sur -zvati, prés, -zve-.<br />
Le verbe est balto-slave et indo-iranien, avec alternances<br />
vocaliques skr. hav-, hva-, huv- (§ 470).
CHAPITRE IV<br />
VOCALISME RADICAL -o- (suite)<br />
§ 738. — Postverbaux sans alternance. — Kotiti « rouler »,<br />
r. katit' pour ukr. kotyty, itératif katati ( § 647) :<br />
R. kôtom, adv., « en roulant » ; — ukr. pôkôt « pente » ; — bl.-r.<br />
pôkotom, adv., « côte à côte », et subst. pokôt « plancher, solives<br />
qu'on met côte à côte ».<br />
Pol. pokotom, adv., « côte à côte ».<br />
Y. tch. kot « renversement », adv. kotem « tout à coup », tch.<br />
mod. o prekoi « à la hâte » (verbe prekotiti « renverser »).<br />
Sur le thème kal- :<br />
R. kâtom « en roulant, en descendant » ; pokât « pente », skat<br />
« descente, glacis », zakàt « coucher (des astres) », nakât « plafond<br />
de solives », et dokât, o-, ot-, pere-, pod-, pri-, pro-, ras-, u-, v-, vs-,<br />
vykat.<br />
La racine slave kot- « rouler » n'a pas d'explication satisfaisante.<br />
On a une autre racine :<br />
kotû « chat » (§ 203), kotiti se « mettre bas » :<br />
R. okôt de okotit'sja ; — pol. wykot de œykocic sie.<br />
S.-cr. kôt « portée », nâkot ; —- slov. kot, pokàt.<br />
V. si. mostû « pont », pomostû « pavé » (Ham.), primostu « échelle,<br />
quai de débarquement » (Ham.).<br />
R. most « pont » et « plancher », pomôst « plancher, estrade »,<br />
namôst (et nâmost') et vymost de namostit', vy- « planchéier, paver »,<br />
podmôsl et primôsl « échaufaudage », peremôsl « action de repaver ».<br />
Pol. most, pomost « plancher, pont d'un navire » ; — s.-cr. môst,<br />
pômost « plancher » ; —• slov. môst, pomôst « échaufaudage » et<br />
« pavage ».<br />
Le sens premier de mostu est sûrement «jetée», ce qu'on jette<br />
sur l'eau pour la traverser. Il doit donc s'agir d'une forme à suffixe<br />
-tu (§ 1160) de la racine met- « jeter » : cf. lit. pâmatas « poutre du<br />
seuil, base», lette pamats «poutre de boisage» (§ 804).
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 75<br />
postili (sç) «jeûner» :<br />
Y. si. postu « jeûne ».<br />
R. et pol. post, tch. pust, s.-cr. pôst.<br />
Slov. post (et fém. pôst), zâpost de zapàstiti « commencer le jeûne ».<br />
Emprunt au germanique, got. fastan ; subst. v. h. a. fasta,<br />
fastô, fém.<br />
prostu (§ 819) «droit, simple» et «libre», adj., prostiti «pardonner<br />
» :<br />
(V. si. oprostï « accomplissement », § 714).<br />
S.-cr. àprosl « dispense, exemption », de opràstiti « excuser,<br />
exempter » ; •— et slov. oprost.<br />
potu « sueur », potëti sg « suer » ( § 584) :<br />
R. pot, potét' « transpirer » et potit' « faire suer » : vypot « exsudât »<br />
(et fém. ôtpot').<br />
V. si. rotiti sg «jurer (avec imprécations) » ; v. r. rota «serment»,<br />
pol. rota, etc. (§ 1166) :<br />
Slov. rota et masc. rôt, porôta « jury ».<br />
S.-cr. pôrota « jury, cour d'assises », ûrota « conjuration, conspiration<br />
».<br />
glodati « ronger » ( § 550) :<br />
R. gtod, doglôd, na-, pod-, pere-, pro-, s-, vygtod, ogtôd et fém.<br />
ogtôda.<br />
Tch. hlod « action de ronger ».<br />
Slov. gtod « mélange de charbon et de cendres pour frotter les<br />
chaudrons ».<br />
Y. si. godù « temps, moment, heure », goditi « s'accommoder à »<br />
(adv. pogodï « d'une façon qui convient », § 1200) :<br />
R. god « année », pogôda « temps », ugôda « satisfaction », vygoda<br />
«avantage», dogôda, pri-, s-,<br />
Pol. gody, plur., « fête, banquet », dogoda, na-, po-, przy-, u-,<br />
wy-, zgoda « concorde ».<br />
Tch. hod « temps, fête », et « le lancer », de hoditi « lancer » ;<br />
rozhod « décision », v. tch. prihod « événement » ; dohoda, nâ-,<br />
po-, pri-, shoda « accord ».<br />
Slov. gôd « temps approprié », pogàd « condition », nagôda,<br />
pri-, z-.<br />
S.-cr. gôd « jour de fête », ndgoda, prïgoda, zgôda, ancien pogoda<br />
(et fém. pogod).<br />
Prmr nnririii of o^c t-v^^-ï--..— 7 * '
76 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Sans correspondant en baltique. On rapproche du moyen basallemand<br />
gaden «convenir», got. gôps «bon»; mais au sens<br />
d'« atteindre », r. ugodil', etc., d'où « viser » et « lancer » en tchèque,<br />
on a aussi bien un rapprochement avec v. isl. gela « atteindre »,<br />
got. bi-gitan « trouver », et avec la racine i-e. *ghed- de lat. praehendô<br />
« je saisis ».<br />
V. si. gvozdii « cheville, clou », pri-gvozditi « clouer » :<br />
R. zagvôzda, masc., « qui distribue des taloches » (zagvôzdka<br />
« taloche »).<br />
Tch. dial. zâvozda « coin (pour fixer la hache) » ; — slov. zag(v)ôzda<br />
« coin » sur zag(v)ozdlti « fixer avec un coin, claveter » ;<br />
— et s.-cr. dial. zàgvozda.<br />
ozditi « faire sécher » ( § 444) :<br />
Pol. ancien ozd et ozda « séchoir pour le malt, touraille » ;<br />
Tch. ancien ozd « touraille », mod. hvozd sur hvozditi de ozditi.<br />
roditi « procréer, produire » :<br />
Y. si. rodu « génération, race, genre », izdrodu. « descendant »<br />
(Pand. Ant.), narodû «foule, peuple», porodu «enfantement»<br />
(Gr. Naz.) ; et adj. çrodu « fou » (§ 1223) ; pour porôda « paradis »,<br />
voir § 824.<br />
R. rod « race, genre », plur. rôdy « les couches », narôd « peuple »,<br />
dorôd et urôd « bonne récolte », nedorôd « mauvaise récolte », prorôd<br />
« récolte manquée », izrôd, ot-, po-, pere-, pri-, za-, vfirod, ûrod<br />
« avorton » et « fou », et fém. porôda « race, sorte », prirôda « naissance<br />
» et « nature », urôda « conformation (de naissance) ».<br />
Pol. rôd, narôd, po-, przy-, wy-, za-, et doroda, od-, po-, przy-, u-.<br />
Tch. rod, nârod, ob-, od-, po-, pre-, pri-, roz-, û-, (v)z-, za-, et<br />
obroda, odrùda, prerùda, priroda, ûroda, zâroda, zruda «monstre ».<br />
S.-cr. rôd, zitôrod « état des blés », ndrod, ôd-, pô-, izrod « dégénéré<br />
», prirod « produit de la terre, rendement », et fém. priroda<br />
(xvm e s.) « nature », emprunt au russe.<br />
Slov. rôd, nârod, prerôd « régénération », iz-, od-, u-, pôrod,<br />
prirod, zârod, et prirçda, emprunt.<br />
En baltique, le lette radît « produire » ressemble trop au slave<br />
pour n'être pas emprunté, et de même raza « riche moisson » à r.<br />
urozâj. Mais on a lit. rasmë « produit abondant », lette rasme,<br />
qui rapproche le slave rod- de lit. randù, ràsti «trouver» (§ 380),<br />
at-si-ràsti « se présenter, se produire ».<br />
Pour pol. et tch. rod- répondant à v. si. rad-, voir § 774.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 77<br />
skoda, de v. h. a. scadô « Schade, dommage » :<br />
Pol. szkoda « dommage, perte », verbe szkodzic, et przeszkoda<br />
« empêchement, obstacle », ancien zaszkoda « préjudice ».<br />
Slov. skçda, skçdili, et oskçda, poskçda, preskçda amplificatif<br />
de skçda.<br />
§ 739. — Kropiti « asperger » :<br />
V. si. pokropu « aspersion » (Gr. Naz.), ukropu « bouillon, soupe ».<br />
R. okrôp et ukrôp « eau bouillante », ukr. krip (gén. krôpu).<br />
Pol. ukrop « eau bouillante », okrop « arrosement », et dans un<br />
sens figuré « horreur ».<br />
Tch. àkrop « soupe (à l'ail) », vykrop « absoute ».<br />
Bulg. ôkrop et ûkrop « vin de noces, eau-de-vie sacrée chaude »,<br />
et au figuré ûkrop « nausée, peine ».<br />
S.-cr. krôp « eau bouillante », ùkrop « eau de cuisson (du chou) »,<br />
pokrop « aspersion ».<br />
Slov. krôp « eau bouillante » et « gouttière », pokràp « aspersion ».<br />
Sur le thème krap- de l'itératif r. krâpat' « moucheter » :<br />
R. krap « moucheture, marbrure », vkrap, dokrdp, na-, ot-, pod-,<br />
ras-.<br />
Il faut mettre à part r. skrop de kropdi' pour korpât', thème<br />
*kurp- (§ 813).<br />
Et r. ukrôp « fenouil » rattaché à ukrôp « bouillon », sans doute<br />
comme plante qui parfume les bouillons, mais pour krop, forme<br />
à métathèse de kopër (gén. koprd), comme s.-cr. dial. krop « carvi »<br />
pour kôpr-, v. si. kopru « fenouil ». Ce nom slave du « fenouil » est<br />
probablement un mot d'emprunt et il pourrait résulter de la<br />
confusion avec un autre condiment, gr. xàTOraptç, lat. capparis<br />
« câpre ».<br />
La racine si. krop- est isolée, mais sûrement comme une racine<br />
expressive à formes et sens variés. Le russe a krop(o)tât' «être<br />
soucieux, grognon», subst. krôpot et kropotâ (§ 816), qui se laisse<br />
rapprocher du lette krepêt « jeter des glaires » et de lat. crepô<br />
« je craque, je crève ».<br />
sope-, soti « jouer de la flûte », itératif sapati « respirer<br />
bruyamment » (§ 431), dérivé v. si. sopli, plur., « morve » (§ 1056) :<br />
R. nasôp « morve des chevaux », et sap.<br />
Pol. sap « haleine » et « morve », sapa « rhume ».<br />
Slov. sôp et sâpa « haleine », odsôp.<br />
S.-cr. dial. sôpa « flûte ».
78 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
xopiti « happer », itér. xapati (§ 652) :<br />
R. xâpat' : xap, substantif et interjection, nedoxâp « fait de ne pas<br />
tout happer», isxôp, nâ-, o(b)~, pod-, ras-, za- ; sxap et sxop.<br />
Pol. chap « happement », et interjection ; pochop « impulsion ».<br />
Tch. pochop « sergent de ville » ; pop. udëlati pochop « ramasser<br />
une pelle », jeu sur l'interjection hop ; et v. pol. et slovaque pochop<br />
« conception, idée », tch. dial. schop « capacité, schopnost ».<br />
dob-, po-dobiti « faire ressembler, comparer » :<br />
Y. si. podoba « convenance, il convient » (adv. udobï « à propos<br />
», etc., § 1200).<br />
R. dôba « temps », nâdoba « besoin », udôba « commodité » (et<br />
udôb'), sdôba, snadôba et spodôba « apprêt, assaisonnement », pour<br />
une part dérivés de locutions adverbiales, et non de verbes ; et<br />
podoba du slavon, ukr. podoba « visage » du polonais.<br />
Pol. doba « temps », nadoba « charme », ozdoba « ornement »,<br />
podoba « ressemblance, figure ».<br />
Tch. doba, ozdoba « ornement », nadoba « ce qui est approprié,<br />
ustensile, récipient ».<br />
S.-cr. dôba (et fém. dôb « âge »), nepodoba «monstre ».<br />
Slov. dôba, podçba « aspect, figure » et spodçba (et fém. spodçb) ;<br />
upodgba «comparaison» adapté du russe upodoblénie (§ 825).<br />
Lit. dabâ « nature, particularité » ; got. ga-daban « convenir ».<br />
Un rapport est douteux avec lat. faber « ouvrier, forgeron ».<br />
Pol. giobic « presser, joindre », au figuré « opprimer », zgiobic<br />
« réunir », zagiobic « clouer, river », imperfectif zaglabiac : zgloba<br />
« empêchement, iniquité », zagioba et dial. zaglaba « empêchement,<br />
affliction, inquiétude ».<br />
Tch. prihloba « manche de rame », verbe v-hlobiti « enfoncer<br />
(un clou, etc.) ».<br />
S.-cr. glôba « amende », zglôb « articulation » (et plur. fém. zglôbi<br />
« agrafes »), verbes o-glôbiti « extorquer, infliger une amende »,<br />
zglôbiti « joindre ».<br />
Bulg. glôba « amende », S^ZOÈ « articulation » et sglab, verbe<br />
sglobî-, imperf. sglâbjam.<br />
On peut rattacher à cette famille r. globâ « traverse, poutre » et<br />
« chemin de forêt ». Mais il faut écarter slov. globe- et glçbati<br />
«creuser, ronger», s.-cr. glâbati (§ 432), et pol. wyglobic « creuser »<br />
qui apparaît variante de wyglçbic, sinon contaminé avec wyziobic<br />
«canneler», de la racine *zelb- (§ 806) ; et d'autre part pol. dial.<br />
ylabac « se saisir de, s'approprier », simple variante de grabac,<br />
comme slov. glâbiti « ravir » de grâbiti.<br />
Le sens de base doit être « presser », d'où « pressurer, extorquer »<br />
et la contamination avec grabiti. On rapproche le slave de lit.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 79<br />
glëbiu, glëbti « embrasser », glabôti « conserver, garder », et le<br />
baltique de l'allemand Klafter « brasse ».<br />
kobiti « augurer », subst. v. si. kobï « sort » (§ 718) :<br />
V. tch. koba « succès », verbe po-kobiti së « réussir ».<br />
Bulg. kôba « mauvais présage », prokôba.<br />
S.-cr. {kôb, fém.) et cak. koba et kob, masc. ; sMtob «rencontre»<br />
et verbe sukàbiti, variantes récentes (xix e s.) de sûsret, sùsresti<br />
(§ 1222).<br />
R. skobd « crampon », verbe skôbit', et :<br />
zaskôb, de zaskôbit' « entourer d'un crochet, mettre entre<br />
parenthèses ».<br />
Tch. s koba « crochet », s.-cr. skoba « crochet, fermoir », slov.<br />
skçba ; et pol. skobel par contamination avec la famille différente<br />
de r. skôbel' « doloire » (§ 1056).<br />
Rattaché à lit. kabù, kabëti « être suspendu », kabë « croc »,<br />
kablys « croc à fermoir ».<br />
Y. si. osobï « en particulier », adv. (§ 1200), osobiti sg « s'isoler »,<br />
posobije «assistance» (§ 249) :<br />
Y. r. posobu (et posobï) « assistance » (verbe posobiti), ukr. et<br />
bl.-r. posôba ; et r. osôba « personne », spôsob « moyen », mais<br />
récents (XVIII® s.) et sûrement emprunts au polonais.<br />
Pol. osoba « personne » (v. pol. osobic sobie « s'approprier »),<br />
sposôb « manière, moyen » (sposobié « préparer, rendre apte »),<br />
zasôb « provisions, réserves » (v. pol. zasobic sie «"faire des<br />
provisions »).<br />
Tch. osoba « personne » et v. tch. « forme, manière », zpûsob<br />
« manière ».<br />
S.-cr. ancien osob « aspect, forme », et nouveau àsoba « personne »,<br />
emprunt ; ancien posoba « propriété » ; sposob « manière », ancien,<br />
puis repris sur le russe au xvm e siècle (mod. spàsoban « apte »).<br />
Slov. osçba « personne », emprunt, et adapté en osqba sur osçbe<br />
« en particulier », adv. (osçbiti « séparer »).<br />
§ 740. — V. si. okrociti « entourer » ; pol. kroczyc « marcher<br />
à grands pas », imperf. dérivé -kraczac :<br />
Pol. krok « pas », pokrok (v. pol.), wykrok, zakrok.<br />
Tch. krok « pas », vykrok, pokrok « progrès », rozkrok « écartement<br />
des jambes », zâkrok « démarche, intervention ».<br />
S.-cr. krôk « pas ».<br />
Sur thème krak- :<br />
Pol. okrak « trépied, chevalet » et adv. okrakiem « en écartant
80 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
les jambes » ; masc. pokraka « un bancroche, un monstre » et dial.<br />
okraka.<br />
Et voir *kark-, korak-, § 775.<br />
loce- :<br />
R. vfilok « action de vider en lapant ».<br />
S.-cr. krvôlok « lèche-sang, sanguinaire », corbôlok « lèche-soupe,<br />
ëôrba, pique-assiette ».<br />
Lit. lakù, làkti «laper» (§ 550).<br />
moknçti « être mouillé », mociti « tremper », imperf. dérivé<br />
-makati (§ 652) :<br />
R. pomôk, pod-, pere-, pri-, vz-, za- ; et pomôka « trempe, pluie »,<br />
pod-, pere-, pri-, pro-, vz-, zamôka (et zâmoc).<br />
Pol. namok et wymok « infusion », zamoka « endroit détrempé ».<br />
Tch. mok « liquide ».<br />
Slov. mok « humidité, ce qui est irrigué », namok « sol humide »<br />
et namçka, pomàk, razmok « teinture », zamàk et zamçka.<br />
S.-cr. ùmoka « sauce ».<br />
Sur thème mak- :<br />
R. obmâk.<br />
S.-cr. omaka, ùmaka et masc. ttmâk, na ùmâk « (œuf) à la coque ».<br />
Slov. v mak « à la coque », namâka, omâka « sauce » et « teinture »,<br />
pomâka, razmâka.<br />
Lit. maknoti et [-maketi « patauger », sans correspondant hors du<br />
balto-slave (§ 500).<br />
Slov. smôk « légumes qu'on mange avec la viande », et « suc »,<br />
s.-cr. smôk « ce qu'on mange avec le pain et la viande » :<br />
S.-cr. prismok et prïsmoka, de prismôeiti, zasmok (zàsmocak)<br />
de zasmociti « assaisonner ».<br />
Un autre mot est :<br />
V. si. smoku « dragon » (J. Ex., Athan.), r. et pol. smok, slovaque<br />
zmok d'après zmija « serpent » (tch. zmek, § 146), slov. smôk, bulg.<br />
smok « couleuvre, orvet ».<br />
Les deux mots peuvent se rattacher à r. dial. smoktâl', ukr.<br />
smoktâty, « sucer, humer, boire avidement », pol. smoknqc, smoktac<br />
« faire claquer la langue ». Le thème smok- peut être celui de<br />
l'allemand sehmeeken « avoir du goût », et smok du serbo-croate<br />
et du slovène peut être un emprunt ancien à m. h. a. smac<br />
« Geschmack, goût, saveur ».
[§' 740]<br />
VOCALISME RADICAL -O-<br />
moze-, imperf. dérivé -magati :<br />
R. môgâ « force » (dial., bl.-r. mogâ), zamôga « fortune, aisance »,<br />
izmôga, nad-, pere-, raz-, spomôga et vspomôga, smogâ ; pomôga<br />
« secours », obmôg et obmôga « suprématie », vymog et vymôga<br />
« exaction ».<br />
Pol. przemoga et v. pol. zmoga « puissance », wspomoga<br />
« assistance », wymôg et wymoga, plur. wymogi « exigences, prétentions<br />
».<br />
Slov. pomçga « secours », zamçga « force ».<br />
Sur le thème mag- :<br />
R. dial. pomâga « secours ».<br />
Tch. nâmaha «effort», de namâhati (se).<br />
Slov. pomâga, omâga et o(b)nemâga « faiblesse », zmâga « victoire »,<br />
premâg et premâga « suprématie ».<br />
R. (pri-)gosit' «préparer» (§ 557) :<br />
prigôxa « apprêt (de nourriture) ».<br />
Y. si. soxa «pieu (faisant étai) » (Pand. Ant.), osositi «(se)<br />
séparer, bifurquer» (Izb. Svjat.) :<br />
Y. si. posoxa « massue, gourdin » (Supr. 1125, gr. Ô7tspoç) ; slavon<br />
rasoxu « fourchu », adj.<br />
V. r. soxa « gourdin » et « araire », r. mod. soxâ « araire » et « étai »<br />
(en forme de fourche), razsôxa « bifurcation, fourche du coutre dans<br />
l'araire » ; pôsox « bâton, crosse », ancien posôxa « équipe pour<br />
divers travaux ».<br />
Pol. socha «pieu fourchu, araire», ro(z)socha «bois fourchu»;<br />
— tch. socha, rozsocha.<br />
Slov. sôha, râzsoha ; —• s.-cr. sàha, rasoha « branche » et plur.<br />
râsohe « fourche, mancheron de la charrue ».<br />
Pour le rapport avec lit. sakà « branche » et avec got. hôha<br />
« araire », voir § 10.<br />
V. si. trositi « dépenser » :<br />
Slavon troxa « miette ».<br />
R. irôxa « un peu » ; pôtrox « tripe » (potrosW « étriper »).<br />
Pol. trocha « un peu » ; plur. patrochy « entrailles » (§ 1220).<br />
Tch. trocha « un peu » et troch.<br />
Slov. trôha « bribe, poussière », potrçha « consommation » (potrosîii<br />
« consommer » ; — s.-cr. tr'ôha « miette, bribe », cak. pôtroha.<br />
Racine voisine irçx- ( § 765) ; pour v. si. truxutï « menue<br />
monnaie », voir § 189.<br />
81
82 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
§ 741. — V. si. kromë « à l'écart », adv., et ukroml(% 1200) :<br />
R. kromit' « séparer » : kromâ et pokromâ (pôkrom') « lisière,<br />
bord d'une étoffe, d'une planche»; sukrôrn (sûkrom, § 1222, et<br />
fém. sukrôm') « séparation dans un grenier », et zâkrom « coffre<br />
à blé » (endroit fermé dans un grenier) ; ukrôm et ukrôma « ce qui<br />
est à part, réduit, retraite ».<br />
Ailleurs seulement des adverbes. : pol. okrom et s.-cr. okrom<br />
« à part », tch. soukromë « en particulier ».<br />
Un rapprochement avec lit. krâmas « escarre, croûte », kremtù,<br />
krimsti « ronger, mordre », ail. schrammen « égratigner, écorcher »,<br />
est aventuré. En slave, pas de rapport avec kremy « silex » (§ 185),<br />
qui semble lié à kresati « battre le briquet » ( § 804).<br />
V. si. bolëti « être malade », masc. bolï « un malade » ( § 709) :<br />
(R. bol' « douleur », fém.).<br />
S.-cr. bôl « mal, douleur » masc. (et fém.), et prèbol « guérison »<br />
de prebàljeti « se remettre d'une maladie », rarement razbol de<br />
razbôljeti se « tomber malade ».<br />
kolo «cercle, roue» (§ 191), okoliti «encercler», adv. okolo<br />
« autour » :<br />
V. si. okolu « circuit, cercle » (Gr. Naz.).<br />
R. okôl « contour » ; — pol. okôl « cercle » ; — tch. okol « tour » ;<br />
— slov. okol « enclos » ; — s.-cr. àko(l) « cercle, camp ».<br />
Ce postverbal se rencontre avec ceux de kolje-, § 735.<br />
solï « sel », osoliti « saler » :<br />
Y. r. prasolû (§ 1221), rosolû, r. prâsol «marchand de viande et<br />
poisson », prosôl « faiseur de salaisons », razsôl, rossôl « saumure » ;<br />
dosôl, et nedosôl « manque de sel », peresôl « excès de sel », prosôl<br />
(et fém. prôsol') « salure légère » ; nasôl, ob-, po-, pod-, pri-, u-, za-,<br />
vysol.<br />
Pol. prasôl « commerçant en sel », rosôl « bouillon » et « saumure ».<br />
Tch. rosol « saumure » et prisol (v. tch. priesol).<br />
S.-cr. râsol- (et fém.), dôsôl « addition de sel », prèsô « excès de<br />
sel » et « saumure » ; — slov. râzsol et fém. râzsola (fém. présol) ;<br />
— bulg. presôlv. saumure, choucroute », ra(z)sôl.<br />
klonili « incliner » :<br />
V. si. poklonu « prosternation ».<br />
R. Mon « inclinaison », poklôn « révérence », doklôn, na-, ol-,<br />
pod-, pere-, pri-, ras-, vs-, za-, sklon et uklôn « versant, pente ».<br />
Pol. naklon « inclinaison », poklon et uklon « révérence », sklon<br />
« pente ».
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 83<br />
Tch. Mon et sMon « inclinaison », od-, pred-, priklon et pHMona<br />
« inclinaison », ûMon et ûMona « révérence », poMona « révérence »<br />
et « cadeau ».<br />
Slov. Mon « inclinaison », odklon et uMàn « déclination », poklôn<br />
« révérence, cadeau », na-, o-, pre-, pri-, sklôn « pente » et « cas de<br />
la déclinaison », zaklon « abri ».<br />
S.-cr. poklôn « cadeau », ndklon « inclinaison », àtklon « refus »,<br />
zâklon « abri ».<br />
Le lituanien klânas « mare », lette klans, qui a sûrement signifié<br />
« lieu bas, en pente », est en regard du lette klanît « incliner », et<br />
donc emprunt au slave.<br />
Et parallèlement (§ 614) :<br />
sloniti « appuyer » :<br />
Y. si. vùslonu « lit » (Gr. Naz.).<br />
R. naslôn, oslôn (ôbslon'), ot-, po-, pod-, pere-, prislôn « accotoir »,<br />
zaslôn « porte du poêle » et zaslôna (zdslon'J.<br />
Pol. oslona et zaslona « abri, protection, voile ».<br />
Tch. os/on « porte du poêle » (dial.) ; clona et zaclona « rideau,<br />
store », du nouveau clonili dépréverbé de od-slonili.<br />
S.-cr. ndslon « appui, accoudoir », ôslon « support », prislon<br />
« rampe, parapet », zdslon « écran ».<br />
Slov. s/ôrc et oslôn « support » et « homme qui aime à s'accouder,<br />
paresseux », poslôn « dossier », podslôn « support », prislôn, zaslôn<br />
et zaslôna.<br />
ronili de sun-oriti « abattre » (§ 608) :<br />
R. izrôn, na-, ob-, pod-, pro-, raz-, s-, urôn «perte, dommage»,<br />
vjjron, zarôn et zarôna, sur ronit' « laisser tomber ».<br />
Pol. ron, uron «perte» (fém. zaron' «friche»).<br />
Tch. vyron « épanchement ».<br />
S.-cr. obron « éboulement » sur obrôniti se «s'ébouler», obronili<br />
« démolir » pour obàriti.<br />
§ 742. — Borje- :<br />
Slov. bôr «combat», de bor'ùi se «se battre» (§ 532). Pour r.<br />
zabôr « cloison », voir § 530.<br />
korili « insulter », pokoriti « soumettre » :<br />
V. si. nepokorû « insoumission », ukoru « insulte » et slavon<br />
koru.<br />
R. pokôr « soumission » et « reproche », pokôra, ukôr et ukôra<br />
« reproche », na perekôr « en dépit de ».
84 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Pol. pokora « humilité », przekôr et przekora « opposition » et<br />
na przekôr « en dépit de », ukor et ukora « humiliation ».<br />
Tch. na ukor « au détriment de », v. tch. ukor et ukora « reproche »,<br />
pokora « humilité », priekora « préjudice ».<br />
Slov. pokçra « pénitence », prekàr « dispute », «/cor « réprimande ».<br />
S.-cr. pàkor « honte » et pokora « pénitence », prijèkor « réprimande<br />
», û/cor « blâme ».<br />
Bulg. /cor et prjâkor « sobriquet ».<br />
Postverbaux en -kar- sur karati, isolé de koriti (§ 652), voir<br />
§ 790.<br />
Sans doute d'une racine i-e. *kar- d'après les rapprochements<br />
les plus plausibles, lat. carinô « j'injurie », etc.<br />
orje- :<br />
R. pereôr, proôra, zaôr et zaôra, dial. obôra « sillon » ; olôra<br />
« battage du blé », de oloràV.<br />
Pol. rozora « sillon » et ancien rozor, dial. zora et przeora « champ<br />
labouré », wyor « sillon », v. pol. wzor « action de retourner la<br />
terre ».<br />
Tch. zùr « labour, parcelle labourée », v. tch. rozor « sillon ».<br />
Slov. (çr, fém.), râzor « sillon », podôr « action de retourner la<br />
terre », preôr « second labour, binage », zaçra « lisière du champ où<br />
l'on commence le sillon », et zâra, vozâra « sillon », de *vz-ora,<br />
*vz-zaora.<br />
S.-cr. râzor (râzor) «sillon», izor «profit du labourage», ùzor<br />
« terre labourée » (distinct de ùzor « modèle », § 728).<br />
Pour r. orâl' « brailler », c'est sûrement une déformation de rvat'<br />
(§ 473), et son postverbal doit être rôzorva « criailleur » (§ 800).<br />
Mais une autre racine présente un postverbal en -or :<br />
oriti « abattre », razoriti « détruire » :<br />
R. razôr « ruine », et masc. razôra « destructeur ».<br />
S.-cr. râzor « destruction ».<br />
Et voir roniii, § 741.<br />
Lit. Irti «se séparer», racine i.-e. *er- (§ 608).<br />
V. si. sporu « abondant » (Cyr. Jér.), adj. (§ 820) :<br />
R. spor et spôra « succès », sur sporlt' « être avantageux », sporit'sja<br />
« avancer ».<br />
Pol. spor « profit, succès », sur sporzyc « accroître ».<br />
Tch. ûspora « économie », v. tch. prispora « accroissement ».<br />
S.-cr. nâspor « accroissement ».<br />
Et sans doute r. porâ « temps (propice) », de porlt' « être utile,<br />
en bon état» (vremjacko porit « c'est du beau temps »), dépréverbé<br />
de sporit', voir § 728.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 85<br />
sûmotriti « considérer » (§ 641) :<br />
(Y. si. sumotrï « considération », § 728).<br />
R. smotr « inspection, revue », dôsmôtr, nasmôtr, nad-, o-, pod-,<br />
pere-, prîsmôir, prosmôir, raz-, za-, vysmoir, usmôtr et predusmôlr.<br />
S.-cr. sm'ôtra « revue », par adaptation de r. smotr.<br />
§ 743. — Doiti « allaiter » :<br />
R. dodôj, iz-, na-, ot-, po-, s-, u-, vydoj, sur doit' « traire ».<br />
Pol. dôj, udôj, wydôj.<br />
Slovaque podoj « une traite » ; — slov. doj et dôja.<br />
duvoj- « deux » :<br />
R. peredvôj, razdvôj, vydvôj, sur dvoît' « partager en deux,<br />
doubler ».<br />
Pol. rozdwôj ; — slov. razdvôj ; — s.-cr. razdvôj « séparation »,<br />
ùdvoj « duel ».<br />
stojati :<br />
V. r. ostoja « siège » sur ostojati « assiéger ».<br />
R. postôj « gîte », nastôj « infusion », zastôj « stagnation », dostôj,<br />
o-, ob-, ot, pod-, pere-, pri-, pro-, u-, vystoj.<br />
Pol. stôj « (signe de) halte », postôj « étape », zastôj « stagnation<br />
», etc.<br />
Tch. s toj « station debout », postoj « attitude », zàstoj « fait de<br />
s'occuper » et pop. « objet, Gegenstand ».<br />
Slov. stôja « station debout », zastôj « repos » ; — s.-cr. stôj « action<br />
de se dresser », zâstoj « arrêt, rétention (d'urine) ».<br />
Pour le thème staj-, voir § 791.<br />
stroiti :<br />
V. si. stroi « arrangement », pristroi et pristroja (Ham.).<br />
R. stroj « organisation, ordre », razstrôj « discordance », dostrôj,<br />
na-, nad-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, u-, za-, vystroj.<br />
Pol. strôj « parure », nastrôj « disposition, harmonie », ustrôj<br />
« organisme », przy-, wy-.<br />
Tch. stroj « machine », strûj et fém. struje « apparat, équipage »,<br />
ndstroj, po-, pri, û-, vy-.<br />
Slov. strôj « machine », et « corrosif » pour apprêter le cuir<br />
(strôjiti « corroyer, tanner »), pristrôj, ustrôj ; — s.-cr. strôj<br />
« machine », ùstroj « structure ».<br />
Parallèlement kroj-, § 737, voir § 608.<br />
Pol. bôj « peur » sur boi- siç, voir § 729.<br />
R. -kroj, -moj, noj, voj, voir § 730.
86 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
loviti, imperf. dérivé -lavljati.<br />
V. si. lovu « chasse », v. r. rybolovu « pêcheur ».<br />
R. lov, rybolôv, dolôv, iz-, ot-, po-, pod-, pere- ; nalôv et ulôv<br />
« pêche d'un coup de fdet »,'et dial. û lova ; oblôv et oblôva « battue ».<br />
Pol. lôw « chasse », polôw « pêche, butin », anciens ulôw et oblowa.<br />
Tch. lov, vylov « pêche ».<br />
Slov. làv, ulàv ; — s.-cr. lôv, ùlov « prise, pêche ».<br />
Sur le thème lav- :<br />
R. oblâva « battue » et pol. oblawa.<br />
On rattache le slave lov-, sans correspondant clair en baltique,<br />
à got. laun « salaire », gr. ôbto-Xouiw « je jouis », kzia. « butin » de<br />
Xô/ïtx.<br />
novu, verbe ob-noviti :<br />
R. (nov', fém.), obnôv et obnôva (et ôbnov') « étrenne, vêtement<br />
neuf », vynov, podnôva, perenôva.<br />
Pol. ponôw et ponowa « renouvellement », odnowa, wznowa<br />
« récidive ».<br />
Tch. obnova « rénovation » et slovaque ponova.<br />
Slov. obnçva, ponôva ; — 1 s.-cr. àbnova, prlnova «innovation,<br />
acquisition nouvelle, nouveau-né ».<br />
snovati « ourdir », snove- et nouveau snuje- (§ 466) :<br />
Slavon. osnova « base, fondement ».<br />
R. osnôv et osnôva « chaîne d'un tissu » et « fondement »,<br />
peresnôva.<br />
Pol. snow « trame, écheveau », osnowa et v. pol. osnow, rozsnowa ;<br />
— tch. osnova.<br />
S.-cr. ôsnov et osnova ; — slov. snôva (et fém. snôv) « chaîne,<br />
tissu », osnôv et osnçva (et fém. osnçv), nasnôva, zasnçva.<br />
Et sur le thème snuj- :<br />
Slov. osnûj, de prés, osnuje-.<br />
sovati «lancer», perf. sunçti (§ 469) :<br />
R. vysov « saillie », zasôv « verrou », dosôv, na-, o-, ot-, pod-, pere-,<br />
pri-, raz-, s-, v-, usôv (et fém. usov') ; prosôv et prosôva « verrou » ;<br />
posôv, et posôva « homme agité », masc., de posovdt' « faire des<br />
poussées ».<br />
Slov. zdsov et zasova « verrou », à côté de zasûva, et les postverbaux<br />
des autres langues sont en suv- et en sun-, voir § 760.<br />
Pol. ehowae « garder, conserver », tch. ehovati « élever » :<br />
Pol. chèw « élevage, soin », pochôw, prze-, wy-, za-, et fém.<br />
sehowa.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 87<br />
Tch. chov « élevage », odchov chûva ; « mère nourricière », vfichova<br />
« éducation », ûschova « garde ».<br />
Seulement polonais, sorabe, tchèque et russe dialectal, sans<br />
étymologie sûre.<br />
§ 744. Divers. — En plus des substantifs qui sont en regard de<br />
thèmes verbaux, d'autres à vocalisme radical -o- présentent un<br />
certain aspect de postverbaux et demandent à être examinés :<br />
dvorû « cour » est un dérivé thématique indo-européen du nom de<br />
la «porte», dvïrï (§ 707), et son accent oxyton (§ 830), r. dvor,<br />
gén. dvorâ, s.-cr. dvôr, gén. dvôra, diffère de l'accent ordinaire des<br />
postverbaux.<br />
Y. si. snopu « gerbe », r. snop (gén. snopâ), s.-cr. snôp (gén.<br />
snopa], également oxyton, est slave commun, mais isolé et sans<br />
rapprochement valable.<br />
V. si. siropu « toit », r. strop « plafond », etc., est isolé aussi.<br />
V. si. xvoslu « queue » (Ham.), r. xvost, slov. hvçst « queue » et<br />
« grappe sans grains », etc., pourrait être un emprunt au germanique,<br />
ail. Qvast « touffe ».<br />
V. si. grozdu et groznu « grappe de raisin », avec une variante<br />
grïznu, grïzno en slavon russe (§ 1072), laisse supposer un thème<br />
alternant groz- : grïz-, mais inexpliqué.<br />
Y. si. rogu « corne », pol. rôg « corne, coin », et narôg « coutre »,<br />
r. dial. nàrog, qui n'est pas un postverbal, mais tiré de la locution<br />
na rogu « au coin (du soc) », a son correspondant exact dans lit.<br />
ràgas, mais le mot est uniquement balto-slave. Le rapprochement<br />
avec ail. ragen « saillir » est à écarter, la forme germanique étant<br />
v. sax. hragian ; celui avec lat. rigëre « être raide » exigerait<br />
l'hypothèse d'une fausse alternance balto-slave *rog- sur rig-,<br />
V. si. loza « vigne », r. lozâ « verge, cep de vigne, sarment », s.-cr.<br />
loza « vigne, ronce, etc. », est rapproché de lit. lazdà « verge,<br />
noisetier », également obscur.<br />
V. si. gora « montagne », r. gorâ, s.-cr. gàra « forêt (de montagne)<br />
», etc., est en regard de v. pr. garian « arbre », lit. girià<br />
« forêt », et skr. girih et av. gairis « montagne », sans qu'on puisse<br />
restituer une forme indo-européenne (§ 175) ; r. dial. prigôr, ukr.<br />
pryhir, bulg. prigor « colline », n'est pas un postverbal, mais est<br />
secondaire de prigorije.<br />
D'autres mots en -a sont des adaptations d'athématiques;(§ 708).<br />
Ainsi v. si. rosa « rosée », d'après lat. rôs, gén. rôris, qui comme lit.<br />
rasà et véd. rasa a pu être refait en postverbal de son dénominatif,<br />
v. si. rositi. Mais cette explication simple ne peut pas valoir pour<br />
voda « eau », dont la transformation en mot du type postverbal<br />
est la plus curieuse (§ 176).<br />
V. si. koza « chèvre » n'est pas séparable de skr. ajâ, masc. ajdh,
88 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
ni de l'athématique gr. oCŒ,, gén.
CHAPITRE Y<br />
VOCALISME RADICAL -ê-<br />
§ 745. Postverbaux à alternances claires. — Kvïte-, imperf.<br />
dérivé -kvitali :<br />
V. si. cvëtu « floraison, fleur ».<br />
R. cvet, rascvét « épanouissement », otcvét « défloraison », docvét,<br />
na-, nad-, o-, pri-, za-, vijcvet.<br />
Pol. kwiat.<br />
Tch. kvët, rozkvët, do-, vy-, (v)z-, za-.<br />
Sîov. cvêt, razcvèt ; — s.-cr. cvîjel.<br />
Sur thème kvit- :<br />
Pol. rozkwit et wykwit « épanouissement », odkwit « refleurissement<br />
», przekwit « défloraison ».<br />
Sur thème cvlt- :<br />
S.-cr. cvdt « floraison », prôcvat (prôcvât).<br />
Parallèlement (§ 12) :<br />
svï(t)nçii, imperfectif svitati (§ 493), factitif svëtiti :<br />
V. si. svëtu « lumière » et svëtû sii « ce monde », posvëtu (Ham.),<br />
prosvëtu (Pand. Ant.).<br />
R. svet « lumière », ôtsvet « reflet », prosvét « rayonnement »,<br />
razsvét « point du jour », o-, po-, u-, za-.<br />
Pol. swiat « monde » et zaswiat « l'autre monde », oswiata et<br />
poéwiata « lumière » et oswiat, poswiat, rozswiata, wyswiata.<br />
Tch. svët « monde », v. tch. osvët « illumination » et mod. osvëta<br />
« lumière de la culture », ancien posvët « lumière, chandelle ».<br />
S.-cr. svîjet « monde », pôsvjet « lumière » ; prôsvjeta « culture,<br />
instruction», du slavon prosvëscenie (§ 825).<br />
Slov. svët « monde », posvët et razsvëta « illumination »,; osvët,<br />
razsvët ; prosvêta « culture », du serbo-croate.<br />
Sur thème suif- :<br />
Pol. swit « point du jour » et oswit, odswit, po-, prze-, roz-, za.
90 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Tch. suit « lueur, aube », dosvit, prû- et pro-, û-, za-.<br />
S.-cr. dsvït et râsvït « aube » ; — slov. svît « éclat » et « aube »,<br />
osvît, razsvit, zasvit.<br />
Lit. svaîtas « phare d'automobile », postverbal tout nouveau en<br />
regard de sviësii « briller », factitif svailyli ; skr. evetdh « brillant »,<br />
adj.<br />
cëditi « filtrer » :<br />
R. cedit', docéd, na-, ot-, pro-, ras-, u-, vyeed.<br />
Slov. precèd, procèd.<br />
Alternant avec eistu «pur» (§ 609).<br />
lïpnçti, factitif lëpiti (§ 609) :<br />
Y. si. lëpu « qui convient, beau », adj.<br />
Ukr. Zip « colle », r. nalép, ob-, ot-, pod-, pri-, s-, v-, za-.<br />
Pol. lep « glu », przylep, zlep, zalep et zalepa, nalepa « maçonnerie<br />
collée au four », oblepa.<br />
Tch. lep « glu, colle » ; ndlep « ce qu'on colle sur quelque chose »,<br />
en vieux tchèque « poison dont on enduisait la pointe d'une<br />
flèche ». . , - *<br />
Slov. lêp « colle », polèp, prilèp « emplâtre ».<br />
S.-cr. lïjep « colle, enduit », poljep, prilijep et priljepa ; nàlijep<br />
« aconit » (qui servait pour empoisonner les flèches).<br />
Sur thème Zip- : v. tch. lep, gén. Ipa (mod. lepu).<br />
blïstati sç, blïs(k)nçti sç, imperfectif bliscati sç (§ 597) :<br />
Y. si. blësku « éclair », et bliskû, et slavon blïsku (§ 118).<br />
R. blesku « éclat », sûrement de blïsku, et ôblesk, ôtblesk « reflet »,<br />
prôblesk « éclair » ; et, par réfection de v. r. blïsci- en blesti- avec<br />
substitution à l'alternance se : sk de l'alternance se : st, plur.<br />
zâblesty « reflets (sur l'eau) ».<br />
Pol. blask « éclat », oblask, odblask « reflet », rozblask.<br />
Tch. blesk « éclat, éclair », gén. blesku et v. tch. bleska et blska,<br />
doblesk, zdblesk, avec confusion de blësk- et blïsk- ; et pablesk<br />
«reflet» (§ 1220).<br />
Slov. blësk, oblèsk, od-, za- ; — s.-cr. blljesak et dial. blijèska,<br />
àdblijesak.<br />
Sur thème blisk- :<br />
V. si. bliskû ; — slov. blîsk, oblisk.<br />
Et en polonais, avec confusion des thèmes blisk- et lysk- (§ 799) :<br />
blysk, odblysk, prze-, roz-, wy-, za-,<br />
tiskati, itératif tëstiti (§ 561) :<br />
V. si. lësku « pressoir » (Upir').
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 91<br />
S.-cr. tïjesak, slov. têsk, et s.-cr. sùtjeska, slov. sotêska, « passage<br />
étroit, défilé »(§ 1222)'.<br />
Tch. soutêska, et ancien patësky, plur., « marc de raisin, piquette »<br />
(§ 1220).<br />
Les autres postverbaux sont sur le thème tisk- (§ 797).<br />
striée-, v. si. po-slrisli et -sirësti ( § 435) :<br />
V. si. strëgu « tonte » (Gr. Naz., Ham.), et slavon strigu.<br />
Y. r. postrëgy, plur., « première coupe des cheveux de l'enfant »,<br />
à côté de postrigy.<br />
Et tous les autres postverbaux sont sur le thème striy- (§ 797).<br />
lixu « calme », adj., tësiti :<br />
V. si. ulëxa « réconfort, consolation ».<br />
V. r. polëxa, r. potéxa « distraction, divertissement » et dial.<br />
spotéxa, utéxa « consolation, délectation ».<br />
Pol. pociecha, uciecha ; — tch. potëcha, ùtëcha.<br />
Slov. utçha ; — s.-cr. utjeha et ancien utjeh.<br />
Sur thème tix- :<br />
R. ulix (et fém. tis' « tranquillité », ôtis', zâtis').<br />
Pol. dial. ucich, ucicha (ucisz) ; — v. tch. odtich « calme » (mod.<br />
ûtis).<br />
Slov. potîh.<br />
§ 746. — Alternances moins claires. — Krïsngti, factitif krësiti :<br />
V. si. krësu « temps du solstice (d'été) » (Théod.).<br />
S.-cr. krljes, slov. krês, « feu de la Saint-Jean ».<br />
Sur thème krïs- :<br />
R. krës, v(o)skrës « action de faire revivre », se confondant avec<br />
les postverbaux de kresdt' « battre le briquet » (§ 804).<br />
S.-cr. Ùskrs « Pâques », vàskrs « résurrection », adaptation en<br />
postverbal (§ 825) du slavon uskrsénje, vas- (§ 60), r. voskrèsénie.<br />
Alternance ë : ï, mais qui pourrait être secondaire (§ 495) ; et<br />
voir kras-, § 783.<br />
mësiii :<br />
V. si. sûmësu «mélange» et razmësu (J. Ex.), primësa (Izb.<br />
Svjat.), slavon primësu.<br />
R. domés, na-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, za-, vymes<br />
(plus usuellement fém. smes', pûmes', et nâ-, pôd-, pére-, pri-, zâ-).<br />
V. pol. smiesa (ou smies'), dial. zamias ; — tch. smes.<br />
S.-cr. smjësa et dial. sùmjesa (§ 1222), prlmjesa ; — slov. primes<br />
et primçsa, zmês et zmêsa, zamêsa. \<br />
s
92 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Alternance en baltique (§ 607) : lit. miësti, itér. maisyli, intrans.<br />
su-misti.<br />
visëti, factitif vësiti :<br />
V. si. prëvësa «tenture, rideau», zavësa (Gr. Naz.), zavësu<br />
(Ham.) ; slavon prëvësa « balance ».<br />
R. ves « poids » et plur. vesy « balance » ; zavës et zavësa (zâves')<br />
« rideau » et zânaves (zânaves'), navés « auvent », provës « saillie »,<br />
sves « avant-toit » ; vzves « pesée », prevës et prëvësa « poids de la<br />
balance » et plur. razvësy, perevës « surpoids, prépondérance » ;<br />
dovës, iz-, ob-, pod- (et pôdves'), pri-, u-, vyves ; et masc. povësa<br />
« pendard, polisson ».<br />
Pol. zawiasa et zawies, zawiesa « gond », zwiasa, nawias « ce qui<br />
pend, ligne courbe, parenthèse » ; masc. obiesa (et obieé) « pendard ».<br />
Tch. ndvës, vyvës, zâvës « ce qui pend », plur. zâvësy « gonds ».<br />
S.-cr. prijëvjes « voile », zâvjes et zâvjesa « rideau ».<br />
Slov. vês (et fém.) « pente, toiture », vésa « balance », prevçsa,<br />
zavçsa, povës et obêsa.<br />
Sur thème vis- :<br />
R. nâvis (nâvis') « partie saillante » ; — pol. nawis ; — tch. vis<br />
« suspension », prévis.<br />
Alternance, mais racine verbale isolée en slave (§ 593).<br />
slëdili « suivre » :<br />
V. si. slëdu « trace » (adv. poslëdï, § 1200).<br />
R. sied, poslëd « reste », nâsled (nâsled ), doslëd, iz-, ob-, pere-,<br />
pro-.<br />
Pol. élad, ancien oélada « trace » et dial. oslad, naslad « imitation »,<br />
poslad « reste, criblure », przeélad et przeélada « reste » et « persécution<br />
».<br />
Tch. sied ; — s.-cr. slïjed ; — slov. sied (et fém.), naslèd, o-, za-,<br />
et masc. dial. naslêda « successeur ».<br />
Seulement slëd- en slave, mais lit. slysti « glisser », lette slidêl,<br />
adj. slaids «glissant», subst. sliede «trace, ornière» de *slaidâ,<br />
avec le traitement ancien ie de ai (§ 50).<br />
slïpnçti, factitif slëpili :<br />
Y. si. slëpu « aveugle », adj.<br />
R. slepôj, postverbal zaslëp de zaslepil' « éblouir ».<br />
Slov. slëp, oslëp de oslepili « aveugler ».<br />
Isolé en slave. Comme dans le cas de krës-, l'alternance ë : ï<br />
peut être secondaire, et la racine pourrait avoir eu la forme *slëp-<br />
(§ 117) ; l'intonation douce, r. slëpo, s.-cr. slïjep, ne prouve rien<br />
dans un adjectif qui peut être un ancien oxyton (§ 298).
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 93<br />
Y. si. otûlëku « reste ».<br />
Vestige isolé en slave (§ 476), avec l'adjectif lixû (§ 1138),<br />
de la racine de lit. liekù, likti « laisser », subst. laïkas « délai, temps »,<br />
âtliekas et âtlaikas (§ 50), pâlaikas «reste»; et gr. XSOTW, adj.<br />
Xoiitoç « de reste », skr. ati-rékah.<br />
trëskati « craquer avec bruit » :<br />
V. r. trëska « éclat de bois », et trësku « coup de foudre » (v. si.<br />
trëskanije) ou « fracas » ; mod. tresk « craquement », treskâ « éclat<br />
de bois », rastrésk, zâiresk.<br />
Pol. trzask « craquement » et trzaska « éclat de bois », roztrzask<br />
« fracas », potrzask « trébuchet », zatrzask et zatrzaska « trappe ».<br />
Tch. tresk « craquement », triska « éclat de bois ».<br />
S.-cr. trljeska (trëska) ; — slov. trçsk et treska (trëska).<br />
Voir § 561, et troska, § 733.<br />
V. si. vëku «âge, siècle», et sûrement composé ë(ï)lovëku<br />
«homme» (§ 1231).<br />
R. vék, s.-cr. vljek, etc.<br />
Slov. vêk, et odvèk « réconfort », en regard de odvékniti « fortifier,<br />
réconforter » (adj. vêcen « fort, fortifiant »).<br />
Lit. i-vykti « devenir fort », ap-velkti « triompher de », subst.<br />
viëkas « force de vie » (§ 450), et vaïkas « enfant » avec ie ancien et<br />
ai nouveau.<br />
V. si. snëgu « neige », s.-cr. snîjeg, etc., verbe snëziti.<br />
Lit. snigti «neiger» et sniëgti (§ 445), subst. sniëgas, v. pr.<br />
snaygis ; v. h. a. snïwit « il neige », subst. got. snaiws, v. h. a.<br />
snëw.<br />
Ce postverbal a pris la place d'un athématique, lat. nix (§ 175).<br />
V. si. tëxa «planche, plate-bande», r. texâ, s.-cr. tijèha, etc.<br />
Isolé en slave, mais répondant à v. pr. lyso « plate-bande »,<br />
lit. lysia, lysë, et à lat. tïra « sillon », v. h. a. -leisa (de *laisâ)<br />
« sillon, ornière ». Sans forme verbale, mais alternance *leis- :<br />
*lois-, et le baltique lis- suppose lis- avec l'allongement vocalique<br />
d'un inchoatif (§ 499), comme dans lit. slypè « cercle de tonneau »<br />
en regard de stimpù, stipti « se raidir » et stypstù, stypti.<br />
V. si. jazva « blessure, plaie », jazviti « blesser ».<br />
R. jâzva « fente » et « plaie », tch. jizva « blessure » de v. tch.<br />
jiezva.<br />
Pour v. si. jazvina « terrier », slov. jâzba « trou », s.-cr. jâzbina<br />
« terrier (de blaireau) », pol. jazwa avec le z de jazwiec « blaireau »,<br />
voir 8 1183.
94 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
De ëzva, en regard de lit. âiza et lette aïza, ieza « crevasse », lit.<br />
izti « se détacher de la cosse », factitif aizyti « écosser », adj. izùs<br />
« qui se détache facilement » (§ 75). En letto-lituanien, l'intonation<br />
rude doit être prise à l'int.ransitif lit. âizëti « s'écaler » (vocalisme<br />
long, § 599). En slave, l'intonation est douce : r. jazvW.<br />
Il faut partir d'un thème en -u-, l'adjectif lit. izùs ; sur cet<br />
adjectif, un factitif slave jazviti parallèle à lit. aizyti, et sur le<br />
factitif un postverbal jazva.<br />
§ 747. Postverbaux sans alternance. — Les formes sont nombreuses,<br />
avec le vocalisme radical ë qui peut représenter *oi ou ë,<br />
ou être d'origine récente (emprunts, etc.).<br />
grëz-, v. si. sugrëziti sg « s'affaisser » et « se mêler » :<br />
V. si. sûgrëzu (J. Ex.) et sugrëza (Cyr. Jér.) « chose pétrie,<br />
mélange, confusion ».<br />
Un lien avec r. grëzit' « rêver, parler en rêve », subst. grëza,<br />
grezâ et grëz « rêve », indiquerait une racine *grïz- : grëz-, mais<br />
inconnue, et douteuse.<br />
g net- :<br />
Y. si. vuzgnëtiti « enflammer » : subst. podugnëtû « allume-feu »<br />
(Izb. Svjat.), et fém. podugnëta en slavon.<br />
R. gnetit' : podgnët « allume-feu, copeaux », zagnët et fém. zagnëta,<br />
par confusion avec les postverbaux de gnete-, gnesti « presser »<br />
(§804).<br />
Pol. niecic : roznieta « attisement », podnieta « amadou, mèche,<br />
stimulant », ancien podniata et masc. podniat.<br />
Tch. nttiti : podnët « impulsion », zânët « inflammation », et dial.<br />
pfihnët avec conservation du thème hnët-,<br />
S.-cr. ancien nijeliti, et podnijel.<br />
Slov. nëiiti : pôdnet (et fém. podnët) « allume, allumette » et<br />
« impulsion » et podnëta « amadou », snët (et fém.) « inflammation ».<br />
(Et slov. snêt « nielle », s.-cr. snîjet, fém. tch. snët' « rouille,<br />
gangrène », pol. sniec « nielle, rouille ») :<br />
Pol. sniecic « se couvrir de rouille », zasniecic « gâter par la<br />
rouille » : postverbal zasniat « avorton ».<br />
Sans étymologie sûre.<br />
Y. si. sû-klëstiti « serrer », slavon klëste « tenailles » (§ 1024), pol.<br />
klescic « émonder, châtrer ».<br />
Tch. klestiti « ébrancher » : klesl « émondes, ramilles ».<br />
Slov. klëstiti : klëst « ébranchage » et « branche coupée », pdklest<br />
(§ 1220, et fém. poklëst, oklêst).<br />
Sur thème klis- d'après lit. klisas « qui a les pieds tordus », klisë
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 95<br />
« pince d'écrevisse », et v. pol. kliszawy « aux jambes torses » sur<br />
*kleisy~. On doit supposer un dérivé en *-to- (§ 1159) sur *kleis-,<br />
et un verbe dénominatif à vocalisme de factitif.<br />
*lëtiti, pol. polecic «recommander», zalecic et zlecic :<br />
Pol. zaleta et zalota « recommandation, qualité excellente »,<br />
et ancien zaloty, plur., « coquetterie ».<br />
Tch. zâlety, plur., « flirt ».<br />
Pol. zalota est secondaire de' zaleta, par rattachement au groupe<br />
des postverbaux de leciec «voler» (§ 804). Le thème est celui de<br />
v. si. lëtï « il est permis » (§ 1170).<br />
R. métit' « marquer, viser », ukr. mityti :<br />
méta « marque » et meta « but », zaméta « mârque, remarque »,<br />
pométa « action de dater », sméla « calcul, devis », na-, ot-, pod-,<br />
pere-, pri- ; et domét, na-, ob-, pod-, pri-, za-.<br />
Le verbe et ses postverbaux ne sont que russes : bulg. sméla<br />
est un emprunt, et s.-cr. zamjeta est donné comme russe.<br />
Il est hâtif de rattacher ce verbe isolé en russe, sans attestation<br />
vieux-russe, à la racine *më- de lat. mëtior «je mesure», et une<br />
influence savante du latin méta « borne, but » n'a pu être que<br />
limitée. Il faut sans doute partir d'un postverbal meta de -mëtati,<br />
imperfectif dérivé de metati « jeter » (§ 804).<br />
Y. si. prëtiti « menacer ».<br />
Slavon prëtu « menaces », et v. si. dans prëtonosïnû « porteur<br />
de menaces » (Ham.) ; zaprëta.<br />
R. zaprét.<br />
S.-cr. poprit (= -ët) dans un exemple du xvn e s. ; dial. prïjet<br />
« douleur, courbature » est obscur.<br />
Verbe isolé, sans étymologie.<br />
sët-, trois groupes de formes sur ce thème :<br />
1° V. si. (po-)sëliti «visiter» : posëtu «visite» en slavon.<br />
R. posetil' n'est plus qu'un slavonisme, et s.-cr. posjetiti, slov.<br />
posétiti des emprunts récents au russe, avec des postverbaux :<br />
s.-cr. posjet et pèsjeta, pôsjeta « visite », slov. posèt, adaptations<br />
du russe posescénie (§ 825).<br />
2° S.-cr. sjëtiti se « s'aviser, se souvenir » (perf.), ôsjetiti\ « percevoir,<br />
sentir », attesté depuis le xvi e siècle, et bulg. séti- (perf.)<br />
« ressentir », séti- se s'aviser » : les postverbaux, s.-cr. sjët, ôsjet<br />
« sensation », bulg. ûset de uséti-, sont récents et livresques.<br />
3° V. si. sëtovati « être triste » : sëta « chagrin, tristesse » (Ham.),<br />
slavon croate et s.-cr. sjëla.
96 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Les trois groupes sont sûrement sur un même thème, se<br />
ramenant à un sens initial de « sensibilité, souci », mais sans<br />
étymologie.<br />
V. si. blagovëstiti « annoncer la bonne nouvelle » :<br />
R. blagovestit', et bldgovestit' « sonner la messe » : bldgovest<br />
« sonnerie ».<br />
Y. si. vëstati « parler », sur thème *vë-t- (§511) :<br />
V. si. vêtu « pacte », izvëiû « explication, raison », obëtu « promesse<br />
», otûvëtu « réponse », povëtu « condition » (J. Ex.), privëtu<br />
« proposition », sûvëtu « conseil », uvëtu « exhortation », zavëlu<br />
« convention, testament ».<br />
V. r. navëlu « instigation », vyvëtu « exclusion », r. î'zuéf, nauéf<br />
« calomnie », o&ef et obvét, otvét, povét « district », perevét « action<br />
de colporter », privét « accueil », sovét (slavon, § 60), uvét, zavét.<br />
Pol. powiat « district », dial. zawiat « engagement », v. pol. obiata<br />
(obieta) et masc. obiet« sacrifice ».<br />
Tch. vëta « proposition, phrase » (création du xix e siècle), zâvël<br />
« testament » (et fém. zàvëV, obël' «"promesse » et « sacrifice »).<br />
Slov. obël, s-, za-, prevèt « duperie ».<br />
S.-cr. svjët et sàvjet, ù-, zâ-, anciens objet, odvjet.<br />
bëditi «contraindre», emprunt au germanique (§ 618) :<br />
V. si. bëda « contrainte », pobëda « victoire ».<br />
R. bedâ, pobëda.<br />
Pol. biada « malheur, hélas », et bieda « misère » refait sur biedzic<br />
(sk).<br />
Tch. bida « misère » et bëda « hélas », v. tch. pobëda.<br />
Slov. bëda ; — s.-cr. bijëda, pôbjeda et ancien pobëd.<br />
rëdukù « rare » ( § 983) :<br />
R. redît' « éclaircir » (fém. pôred', prôred').<br />
S.-cr. pro-rijëditi « éclaircir, interligner » : prôrijed « interligne ».<br />
vëdëti :<br />
V. si. nesuvëda « nombre infini, qu'on ne peut pas savoir » ;<br />
provëdu « prescience » (J. Ex.) (et provëdï, vëdï, etc., § 713).<br />
R. nedovëd, izvëd, ol-, raz-, vyved ; provëd (et fém. prôved'),<br />
zapovëd (et fém. zâpoved', îs-, à-, pro-).<br />
Pol. wiada, niewiada, dowiad, roz-, wy-, plur. zwiady et wzwiady<br />
« découverte » (et fém. opowiedz, prze-, przy-, za-).<br />
Tch. vëda « science » (xix e s.), masc. nevëda « ignorant », nâpovëda<br />
« souffleur », vsevëda « qui sait tout » et vsevëd ; dovëd, zvëd « espion »,
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 97<br />
dozvëd, plur. prezvëdy, vyzvëdy (et fém. dopovëd', na-, o-, od-, pred-,<br />
pri-, prâ-, vy-, z-, zà-).<br />
Slov. izvêda, povêda (et fém. povêd, ispôved et spôved) ; — s.-cr.<br />
(ïspovijed, zâ-, fém.).<br />
§ 748. — V. si. ras-cëpiti « fendre », pricëpiti sç « se greffer »<br />
(Rom. XI, 17), et slave russe et occidental scëpiti ( § 34) :<br />
Slov. cépiti, cêp « fente », ocèp « greffe », od-, raz-, precêp.<br />
S.-cr. cijèpati, cïjep « greffon », prôcijep « fente, bois fendu »<br />
et dial. prâcijep « timon » (§ 1221), râscjep « fente ».<br />
R. scepât', scepd « copeau », isscép, na-, ot-, pere-, pri-, rassëép<br />
et rôsscep.<br />
Pol. szczepac, szczep « greffe », szczepa « bûche », rozszczep,<br />
zaszczep, ancien przeszczep, et oszczep « épieu, lance».<br />
Tch. stipati : stëp « greffe », rozstëp, v. tch. prôstëp et prôstëpa,<br />
dial. stipa « bûche », et ancien ostëp « lance, javelot ».<br />
Rapprochement avec le lette sKèps « épieu, javelot », skëpele<br />
« morceau détaché, tesson », lit. skèpsnè « morceau d'étoffe » :<br />
en baltique skêp- et skep-, et le slave *(s)kêp- doit présenter la<br />
longue généralisée de l'itératif *(s)këpati, la forme cëpiti apparaissant<br />
alors comme secondaire et produit d'une fausse alternance<br />
se : se qui, sur la base sk-, a doublé l'itératif *skêp- d'un factitif<br />
*seëp-, tch. stipati et stëpiti (§ 652).<br />
Les sens d'« épieu », etc. permettent de rattacher à cette racine :<br />
*eëpu « fléau », r. et tch. cep, slov. cêp, s.-cr. cïjep. C'est moins<br />
évident pour :<br />
R. (cep' « chaîne »), cepit', et ocepit' « entourer d'une chaîne,<br />
d'une corde », pricepit' « accrocher » :<br />
ôcep « balancier de puits », pricép « corde du seau du puits »,<br />
zacép « accrochage » et zacépa « crochet », nacép et nacépa, ucép.<br />
Mais le russe ancien a également cep', l'ukrainien a cipaty<br />
« suspendre » et le polonais czepic (siq) : le flottement c : c suppose<br />
le doublet cep- : scëp-, avec pol. przy-czepic' tiré de roszczepic.<br />
On doit donc soupçonner une dépréverbation de pri-cëpiti et<br />
un sens initial voisin de celui de « greffer ».<br />
lëciti « soigner », emprunt au germanique, got. tëkeis « médecin » :<br />
R. dial. tekâ « médecine, guérison », ukr. lik et Uka.<br />
Pol. lek, tch. ték, slov. lék, s.-cr. lïjek (gén. lijèka).<br />
brëzg- de *brëg-ske- (§ 597) :<br />
Y. si. probrëzgu « point du jour ».<br />
R. brezg, verbe brézzit « le jour point ».<br />
Pol. brzask, ancien brzazg, rozbrzask.
98 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Tch. bresk, rozbhsk, zâbresk, v. tch. zàbrësk et zâbrëska.<br />
Slov. dial. brêsk.<br />
De pol. brzask « point du jour » se distingue pol. obrzask « arrièregoût,<br />
mauvaise haleine », verbe obrzaznqc « avoir un arrière-goût ».<br />
Les formes sont ailleurs v. si. obrïzgnçti « s'aigrir » (Pand. Ant.),<br />
r. dial. obréznut' et ukr. zbrésknuty, tch. dial, nabféskly, nabrzgly,<br />
navrzgly « aigri » : il doit s'agir d'un plus ancien thème *vïrsk-,<br />
qu'on retrouve dans lit. virkstu, virksti « se durcir en tige, se figer,<br />
se faner », prêt, virskau.<br />
Slavon nëya « joie, tendresse ».<br />
R. nézit' « choyer », néga « tendresse, mollesse », iznéga, raznéya,<br />
vynega.<br />
S.-cr. njèga « soins, caresses ».<br />
Sans rapprochement sûr.<br />
V. si. grëxû « péché » (au sens religieux), po-grësiti « manquer » :<br />
pogrëxu « fait de manquer, de rater » (Gr. Naz. et slavon russe).<br />
R. grex (gén. grexâ) ; — pol. grzech ; — tch. hrich.<br />
S.-cr. grïjeh (gén. grijèha), ancien pogreha « faute, erreur » (mod.<br />
pogreska) ; — slov. gréh, pjogrêha.<br />
Sans étymologie. L'oxytonaison de grëxû fait penser (§ 830) à<br />
un dérivé suffixal plutôt qu'à un postverbal, mais si smëxu et<br />
spëxu sont en regard de thèmes smë-, spë-, on voit mal quel rapport<br />
imaginer avec grë(ja)li « chauffer ».<br />
Y. si. smëxû « rire » ; pour nasmisati sç, voir § 527.<br />
Slavon podusmëxû, v. r. posmëxu.<br />
R. smex, nasmexât'sja, smesii : nasméx, posméx, razsméx.<br />
Pol. smiech, smieszyc : posmiech, plur. przesmiechy, uêmiech<br />
« sourire », wyémiech.<br />
Tch. smîch, dial. usmichat' se : posmëch et vijsmëch « risée,<br />
moquerie ».<br />
S.-cr. smïjeh, smijèsiti se, osmjehnuli se : 'àsmijeh et pôsmijeh<br />
« sourire », p'àdsmijeh « moquerie ».<br />
Slov. smêh, smésiti, nasméhniti se : nasmêh, o-, po-, pod-, za-.<br />
V. si. spëxu « empressement », spësiti : pospëxu, prëspëxu (Gr.<br />
Naz.), uspëxû ; v. r. dospëxû.<br />
R. spex, dôspéx « équipement », pôspex (et fém. pôspes'), prispéx,<br />
uspëx « progrès, succès », zâspex.<br />
Pol. épiech, pospiech et poépiecha « hâte », dial. uspiech « succès »<br />
(du russe).<br />
Tch. spëch, pospëch « hâte », prospëch « profit », et ûspëch (du<br />
russe).<br />
S.-cr. ancien pospijeh et pospjeha, mod. ùspjeh (du russe).
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 99<br />
Slov. spëh, pospêh, uspêh.<br />
Le verbe de base spë(ja)ti «progresser» a ses postverbaux<br />
sur thème spëv- (§ 751).<br />
V. si. pësï « à pied », adj. (§ 175) :<br />
Slov. pêh « fatigue ».<br />
II faut ici rétablir toute une évolution de sens :<br />
R. pésij « à pied » et dial. péxij, dérivé pexôta « infanterie »,<br />
verbe opésit' « aller à pied » et po-, opësat' « être sans cheval, être<br />
dans l'embarras » et po- ; v. r. opësiti « faire marcher à pied, faire<br />
piéter » (d'un oiseau privé de ses ailes).<br />
Pol. opieszye « priver de cheval », opieszaly « lent, négligent »,<br />
piechota « infanterie ».<br />
Tch. pësi et adv. pëchem « à pied », pëchota.<br />
S.-cr. ancien pjesili « aller à pied, piéter », spjësali « faiblir ».<br />
Slov. pésiti se, pêhati (se), pêsati «se fatiguer, faiblir », izpêhati<br />
et opêhati « fatiguer (par une course) », opêsati « perdre ses forces »,<br />
dérivé pehôta « faiblesse », et « infanterie » d'après les autres langues<br />
slaves.<br />
Ainsi réfection en partant du dénominatif de pësï « à pied », le<br />
verbe pësiti « mettre à pied, faire piéter, démonter (un cavalier) »,<br />
d'où « affaiblir ».<br />
§ 749. — Drëmati « sommeiller » ( § 552) :<br />
R. dremâ et drëma « assoupissement, somnolence », et drëm<br />
« forêt épaisse » ( = dremûëij les avec adj. en -ueij, § 590).<br />
Pol. drzem « assoupissement » ; — slov. drëm (drëm) ; — s.-cr.<br />
drïjem (gén. drijëma).<br />
Le slave n'a que le thème drëm-, avec alternance secondaire<br />
e : ë en russe. Le russe drom « fourré » est d'une autre racine,<br />
*drûm- (§ 815).<br />
V. si. prëmï « droit », r. prjamôj (% 320), prjamlt' « redresser » :<br />
S.-cr. o-prëmiti «équiper» : ôprema « équipement », prïprema<br />
« préparation », s prima « équipement » et râsprema « déséquipement,<br />
désarmement », usprema « disposition ».<br />
Slov. prëmiti se« se préparer » : prêma (et fém. prêm) « le matériel »,<br />
izprêma, o-, pri-, raz-, s-.<br />
V. si. bëlû « blanc », bëliti « blanchir » :<br />
R. podbël, pol. podbial, s.-cr. pddbjel, etc. «tussilage», à feuilles<br />
à dessous blanc, sur r. podbeUt', etc.<br />
Y. r. probëlû et mod. probël « espace blanc, un blanc », sur
100 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
probelit' « couvrir de blanc » ; r. dobél, na-, o-, ot-, pere-, po-, u-,<br />
za-, vybel.<br />
Pol. nabiai et obiai « laitage », zabial « sirop pour blanchir le<br />
sucre ».<br />
Tch. zdbël « blanc pour chaussure » ; ûbël « albâtre » est un mot<br />
artificiel.<br />
Slov. obêla et zabêla « graisse, saindoux », et masc. zâbel.<br />
S.-cr. dial. objela « malheur qui fait blanchir les cheveux »,<br />
ubjela « fil blanchi ».<br />
V. si. cëlu « sain », cëliti « guérir », emprunt possible au germanique<br />
(§ 10) :<br />
R. celit' : iscél « guérison ».<br />
Un autre mot est :<br />
R. cet' « but », emprunt à l'allemand Ziel :<br />
célit' « viser » : nacél, pricél.<br />
dëliti «partager», emprunt au germanique (§ 618) :<br />
V. si. dëlu « part » (Gr. Naz.), prëdëlu « frontière, région », razdëlu<br />
(J. Ex.) ; v. r. otûdëlu, podëlû.<br />
R. del (fém. nédel' «domaine indivis»), nadél, o(b)~, ot-, po-,<br />
pro-, raz-, u-, za-, vijdel ; peredél « action de repartager » et predél<br />
slavon.<br />
Pol. dziat, przedziai « intervalle », rozdzial.<br />
Tch. dit, oddll, po-, pod-, roz-, et récents predël « séparation »,<br />
pridel, et ûdël « part attribuée, apanage », emprunt au russe.<br />
S.-cr. dïo, gén. dïjela, et cak. dél, gén. dëlâ{§ 830), àdjel-, rdzdjel- ;<br />
prédjel- du slavon et du russe, avec adaptation en prijèdjel- ; et fém.<br />
pôdjela.<br />
Slov. dél, oddël, razdël, et predël « séparation » et « région ».<br />
Une racine différente, dont les postverbaux se rencontrent avec<br />
ceux de dëliti, est :<br />
dëlo « œuvre », dëlati « œuvrer » :<br />
R. do dél « achèvement », peredél « réfection », pridel « bas-côté »<br />
(d'une église), zadél « main-d'œuvre », et naddél, pod-, pro-, a-.<br />
Slov. izdeldva « élaboration » sur izdelâvati, et aussi delâva<br />
«façon d'agir» (§ 818).<br />
Y. si. strëla « flèche », verbe u-strëliti :<br />
R. streld (plur. strély), strelit' : composé v. r. samoslrëlû « arbalète »,<br />
r. samostrél, slrel, dostrél, iz-, na-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-,<br />
pro-, raz-, vt/strel.<br />
Pol. strzaia, slrzelic : samostrzai, strzai et wystrzai « coup de feu »,<br />
postrzai « blessure par coup de feu », ustrzai, zastrzal.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 101<br />
Tch. strela, samostril, tch. ancien slfïl « trait » et « douleur vive »,<br />
dostrel « portée d'une arme », nâ-, od-, vy-, zâ-, et aux xix e -<br />
xx e siècles ob-, prû-, v-,<br />
Slov. strela, strël « coup d'une arme (à feu) », nastrël, preslrèl,<br />
ustrël.<br />
S.-cr. strijèla (plur. strijele) ; pràstreo et prôstrel « anthrax »<br />
et « gentiane » est un emprunt à r. prostrél (et postrël) qui désigne<br />
diverses maladies, coup de sang, lumbago, douleur brusque ou<br />
lancinante (cf. pol. zastrzal « panaris »), et la gentiane, qui était<br />
le remède, la « teinture amère », contre les douleurs internes.<br />
Le slave strela n'a de correspondant que v. h. a. strâla (de<br />
*strëlâ) « flèche » et « dard, rayon, éclair », mod. Strahl. L'idée<br />
d'un emprunt s'impose, et l'accent mobile ne garantit nullement<br />
que le mot soit slave, puisque l'oxytonaison, qui entraîne la<br />
mobilité, convient bien à un emprunt (§ 830).<br />
V. si. cëna « prix », suffixe -nâ (§ 1075) ; cëniii « estimer ».<br />
R. cenà, cenit' : océn « évaluation, océnka », pricén, rascén.<br />
Pol. ocena.<br />
Slov. ocêna, precêna ; -— s.-cr. ôcjena, prë-, prô-, ù-, ancien<br />
scjena.<br />
mëna « échange », suffixe -nâ (§ 1075) ; mëniti « échanger » :<br />
V. si. mëna, izmëna, prëmëna.<br />
R. mëna (dial. menâ), izmën, na-, ob-, ot-, pro-, raz-, za-, vymen,<br />
et izmëna, ob-, ot-, pere-, pro-, raz-, za-.<br />
Pol. miana, odmiana, prze-, wy~, z-, zamiana et zamian.<br />
Tch. mëna, obmëna, od-, pre-, pro-, s-, vif-, z-, zâ-.<br />
Slov. mena, izmëna, premëna, odmën et odmêna, zamën et<br />
zamëna.<br />
S.-cr. mijëna, ïzmjena, od-, prë-, pro-, ràz-, zâ-.<br />
Il faut distinguer mëniti « échanger » de :<br />
mëniti « mentionner », sûrement emprunt au germanique (§ 618) :<br />
Slov. mëniti « penser », mena « pensée », namën et namêna<br />
« destination », omën et omëna « mention », primêna « aperception » ;<br />
pomën et pomëna « signification », mais pômen « mémoire » est de<br />
pômneti «se souvenir» (§ 795).<br />
S.-cr. nàmjena «destination»; prïmjena «application» est<br />
adapté de r. primenënie (§ 825).<br />
Y. si. pëny «écume » (plur.) (§ 1075), pëniti « écumer » :<br />
Pol. piana, et, de zapienie, zapian, un des noms savants de la<br />
« saponaire ».<br />
S.-cr. pjëna : opjena de opjeniti, et spjëna de spjënitiï (sans<br />
rnrmnrt. avi>c, la variante i.-e. SD-1.
102 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
V. si. sënï « ombre », o-sëniti « ombrager » :<br />
S.-cr. sjëna et s/en, masc. et fém. ; ôpsjena « illusion, fantasmagorie<br />
», zâsjena « éblouissement, mirage ».<br />
Slov. obsëna « action d'ombrager » et « éblouissement, fantasmagorie<br />
», osêna « nuance ».<br />
Dérivé en -ni (§ 1084), qui s'est rencontré avec :<br />
V. si. stën(j)l « ombre », masc. (§ 169) :<br />
R. zasenît' et zastenit' « ombrager » : zastén (et fém. zâsen',<br />
zâslen') « lieu à l'ombre », et zdsina, zâstina, par contamination<br />
avec -tin- {-tyn-, § 802) ; pastén (§ 1220, et fém. pâsten') «ombre<br />
(de l'homme) », et postén, pâsten, un des noms du lutin familier,<br />
l'esprit de la maison (domovôj).<br />
Tch. zâsiëna « écran, rideau », et sur nasttniti « esquisser » :<br />
nâstin « esquisse », par oubli de l'alternance i : é.<br />
Et stën(j)ï ressemble d'autre part à v. si. stëna «mur», peutêtre<br />
dérivé en -nâ (§ 1076) ; verbe o-stëniti « entourer d'une<br />
muraille », mais r. ôbstén, nom d'un jeu où l'on lance une pierre<br />
contre un mur, est un dérivé de locution et non un postverbal.<br />
V. si. svëniti sç (Gr. Naz,.) « se tenir à l'écart, s'abstenir », osvëniti<br />
sg, sur l'adverbe svënje « à l'écart » (§ 1073) :<br />
Bulg. svenl se « il a honte », svjan « honte ».<br />
S.-cr. svânjili se « avoir honte », svânja « honte » (déformé, par<br />
rattachement à ail. Sehœein?).<br />
§ 750. — Mëra «mesure», dérivé en -râ (§ 1117) ; mëriti<br />
« mesurer » :<br />
V. si. licemëru «hypocrite» (§ 1228) ; sumëra (Vie de Méthode,<br />
chap. IV).<br />
R. mëra, domér, iz-, ob-, ot-, po-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-,<br />
vymer ; namér et naméra « mesurage », zamér et zaméra.<br />
Pol. miara, namiar « mesure additionnelle », nadmiar « excès »,<br />
pomiar et wymiar « mesure, mesurage », zamiar « intention » ;<br />
composé bezmiar « immensité » (et ciepiomierz « thermomètre »).<br />
Tch. mira, pomër, prù-, roz-; smër et soumër (§ 1222) ; primër<br />
« comparaison », du russe ; vymër et vymëra, ûmëra « proportion » ;<br />
composé teptomër « thermomètre ».<br />
Slov. mëra, namër, o(b)-, pre-, raz-, u-, za-, et izmëra, na-, od-,<br />
o-, pre-, raz-, u-, za-, primer « exemple » et primera « comparaison » ;<br />
composés toptomër « thermomètre », vetromër « anémomètre ».<br />
S.-cr. mjëra, rdzmjer « proportion » et razmjera, 'ômjera et<br />
obùmjera, zâmjera « reproche » (et fém. zamjer) ; prtmjer « exemple »,<br />
emprunt au russe (xvin e s.) et primjera ; nâmjer et nâmjera
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 103<br />
« rencontre, hasard », ancien (xvi e s.) et dans la chanson populaire,<br />
et mod. nâmjera « intention », adapté de r. namerénie ( § 825) :<br />
le bulgare a naméra « trouvaille » dans la chanson populaire et<br />
namerénie « intention » ; composés toplomjer, vjèlromjer, pllnomjër<br />
« compteur à gaz, plîn ( § 730) ».<br />
cëriii et scëriti « grincer des dents » (§ 33) :<br />
R. sëéril', oscéra « ricanement ».<br />
Pol. szezerzye, dial. wyszczera, masc., « moqueur ».<br />
vëra « foi », vëriti « croire » :<br />
Y. si. vëra, composé malovërû (§ 1227).<br />
R. véra, navér « prêt », povér « crédit », provér, et izvéra,<br />
Pol : wiara, ancien powiara « superstition, préjugé»; dial. masc.<br />
niedowiara « incrédule ».<br />
Tch. vira, v. tch. dôvëra et mod. dùvëra « confiance », povëra<br />
« superstition », zpronevëra « abus de confiance », ûuér « crédit ».<br />
S.-cr. vjëra, ôvjera « attestation », pàvjera « fidéicommis », prëvjera<br />
« apostasie », zâvjera « conjuration ».<br />
Slov. vëra, povëra (du croate), prevêra « superstition » (à distinguer<br />
de -vçra, § 728).'<br />
V. h. a. wâra «vérité, fidélité», de *wër-, got. tuz-wêrjan<br />
« douter », lat. uërus « vrai ».<br />
*lëviti, ukr. livyty « relâcher » (§ 528) :<br />
Tch. leviti « soulager », ûleva « soulagement » et odleva, obleva<br />
« dégel », sleva « rabais ». Et sûrement aussi :<br />
Slov. leviti se « changer de peau, muer », Zêu « mue ».<br />
§ 751. Postverbaux en -/ et -D. — Dëjati « faire », imperf. dérivé<br />
-dëvati (§511) :<br />
V. si. earodëi, (prë)ljubodëi, zulodëi, composés.<br />
R. dej et déjà « le fait », nadéja « espoir » (nadézda du slavon),<br />
et otdév, pod-, pro-, v-, vz-, razdév et razdëv.<br />
Pol. dzieje «histoire», plur., nadzieja «espoir», dial. odziej<br />
et pol. ancien odziew, odziewa « vêtement » (mod. odziez par extension<br />
du suffixe -iez, § 1017).<br />
Tch. dëj «action» (xix e s.), nadëje «espoir» (et nâ-), et odëv<br />
« vêtement » (et v. tch. odëv fém.).<br />
S.-cr. nâdjev « farcissure », zâdjeva « empêchement », et pridjev<br />
« adjectif », création du xix e siècle.<br />
Slov. odêja et odëv, odêva « vêtement » (et odëv, fém.), nadëv<br />
et nadéva « farce », predêva « transbordement », zadêva (et fém.<br />
zadêv) « empêchement ».
104 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Et s.-cr. nâd et nâda « espoir » (et ancien nad fém.), « espoir »,<br />
verbe nâdati se pour v. si. nadëjati sç, slov. nâdejati se et subst.<br />
nâdeja et nâda, par contraction de -ëja- en -a- (§81).<br />
grë(ja)ti « chauffer », imperf. dérivé -grëvati :<br />
R. gret', na-grevât' : grev « chauffe », nagrév, obo-, oto-, po-, podo-,<br />
pere-, pro-, razo-, uzo-, vygrev ; prigrév et prigréva, zagréva « fortes<br />
chaleurs », sogrév et sugrév (§ 1222) « chaleur (du poêle) », et masc.<br />
sugreva « mon très cher ».<br />
Pol. grzac, roz-grzewac : rozgrzewa « échauffement ».<br />
Tch. hrdti, za-hrivati : zâhrev.<br />
S.-cr. grïjati, o-grijèvati : dgr(j)ev «chauffage».<br />
së(ja)ti « semer », et « cribler » (§ 512), imperf. dérivé -sëvati :<br />
R. sev « ensemencement », posév, zasév « semailles », prosév<br />
« action de cribler », dosév « achèvement des semailles ou du<br />
criblage», nâsev, o(b)sév, ot-, pod-, pere-, pri-, raz-, u-, v-, vjjsev.<br />
Pol. siew, posiew, na-, wy-.<br />
Tch. osev, et osiva avec -i- nouveau sur osivati, rozsev, vi/sev, et<br />
aussi fém. sije « semailles », sur,prés.* seje-.<br />
Slov. séva (et fém. sev), nasèv, zasev, posèv, et sêja, posêja<br />
« ensemencement », et plur. poséje « son », sur sêje-, sejâti « cribler ».<br />
S.-cr. ùsjev, dial. pôsjev, ancien sijev et neutre sijevo (§ 1184) ;<br />
et plur. p'ôsije « son ».<br />
spë(ja)ti « progresser », imperf. dérivé -spëvati :<br />
R. pospév de pospevât' « mûrir », perespév de perespevât' « mûrir<br />
trop ».<br />
A part des postverbaux en -spëxu, § 748.<br />
vëjati «venter, souffler» et (iz-)vëjati «vanner» :<br />
R. dovéj, iz-, na-, ob-, ot-, pere-, pro-, raz-, u-, vyvej, et fém.<br />
zavéja « endroit derrière le vent ».<br />
Pol. wiac et wiewac : wieja « brise », przewieja « courant d'air »,<br />
zawiej et zawieja «tourbillon (de neige)», (rozwiej, fém., «chose<br />
emportée par le vent ») ; — et sur wiewac : przewiew, zawiew et<br />
zawiewa, et wiew, powiew « souffle, brise », wywiew et wywiewa.<br />
Tch. vâti et vanouti (§ 490), imperf. dérivé -vivati : vëje (dial.),<br />
(fém. nâvëj et zavëj), zavëje « tas de neige, congère » ; — et sur<br />
-vivati : vyvëva « machine pneumatique » (xix e s.) ; — sur vanouti :<br />
van et zâvan « souffle, brise », pruvan « courant d'air », créations<br />
du xix e siècle (§ 824).<br />
Slov. zavëj « tourbillon (de neige) ».
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 105<br />
D'autres postverbaux sont tirés d'imperfectif s dérivés en<br />
-ëvati :<br />
S.-cr. (zâ)htjev, slov. (za)htèv,<br />
Slov. mlêv, § 727.<br />
lëv et zëv, à côté de loj et zoj,<br />
« chant » :<br />
731.<br />
729, et de même, à côté de poj<br />
R. dopév, na-, ot-, pod-, pri-, pro-, ras-, s-, za-, vîjpev.<br />
Pol. piew, opiew, spiew, pospiew.<br />
Tch. dopëv, nâpëv, zpëv et dozpëv, predzpëv, et les féminins v.<br />
tch. priezpëva et prozpëva « accent », sezpëva « neume ».<br />
S.-cr. nâpjev « mélodie », otpjev « répons », prépjev « transposition<br />
d'un chant », pripjev « refrain », sp/'ëv « poème ».<br />
Slov. napèv, od-, po-, pri-, s-, zapèv « intonation ».<br />
On ajoutera, en regard de znoj :<br />
V. si. gnëvu « colère », gnëvati s g « s'irriter », gnëvili « irriter ».<br />
R. gnev ; —- pol. gniew, rozgniew, zagniew, composés Zbygniew,<br />
etc., noms de personnes ; — tch. hnëv, pohnëv ; — s.-cr.<br />
gnjëv, razgnjev ; — slov. gnev.<br />
Le mot gnëvu est sûrement un postverbal de gnëvati « irriter »,<br />
qui doit être l'itératif en -vati d'un verbe disparu, mais qu'on peut<br />
retrouver dans *znëje-, znïjati « brûler sans flamme », avec le<br />
doublet k- : s-, g- : z- qui apparaît dans certaines conditions<br />
(§ 12) : znïjati et raz-gnëvati, postverbal ancien znoi et nouveau<br />
gnëvu.<br />
§ 752. Postverbaux avec ou sans alternance ë : a. — Des racines<br />
verbales à vocalisme radical *ë, les postverbaux sont en -a- (§ 776),<br />
et aussi en -ë- :<br />
lëze- : laz-, et aussi lëz-.<br />
rëze- : raz-, et aussi rëz-.<br />
sçde-, sësti : sad-, et aussi sëd-.<br />
Est à part v. si. trëva « herbe » en regard de traviti (§ 737).<br />
On n'a que -ë- avec les verbes :<br />
bëgnçti, bëzati :<br />
V. si. bëgu « fuite » (J. Ex.), ubëgu « fugitif » (Upir'), composé<br />
polï-bëga « femme fugitive » (§ 1231) ; slavon izbëgû, pobëgu, prëbëgu<br />
« transfuge ».<br />
R. beg, dobég, iz-, po-, pere-, pri-, raz-, s-, v-, za-, vybeg, probég<br />
et prôbega, ubég « fuite » et dial. ûbeg « impasse, cul-de-sac ». :<br />
Pol. bieg, przebieg, wybieg, plur. zabiegi « efforts », zbieg « transfuge<br />
».<br />
Tch. bëh, dobëh, nâ-, nad-, o-, od-, po-, pre-, pred-, pri- (v. tch.
106 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
prie-), prû-, roz-, s-, vy-, zâ-, zbëh « déserteur », podbëha, et v. tch.<br />
bëha, masc., prëdbëh « précurseur » et masc. prëdbëha.<br />
Slov. bêg, izbêg et izbêga, pobèg, pre-, u-.<br />
S.-cr. bïjeg, prèbjeg « transfuge », zbjëg.<br />
En baltique, lit. bëgli : bègas (bêgis) « fuite », lette bëga.<br />
jad-, -ëd- :<br />
Y. si. obëdu « repas » (fém. jadï, § 713), composé velijejadu<br />
«gros mangeur» (§ 1228), slavon krûvojadu atfjioSopoç, (masc.<br />
medvëdï, § 169).<br />
R. edâ (et ed'), obéd, snéda (et sned').<br />
Pol. obiad ; — tch. obëd (et v. tch. objëdi « restes d'aliments »,<br />
fém. plur.), composé lidojed « anthropophage ».<br />
S.-cr. àbjed ; — slov. obëd (et fém. jêd, objêd, snêd), ujèd « une<br />
bouchée » (et fém. ujêd), razjêda (et fém. razjêd), masc. snêda<br />
« glouton » et ujêda.<br />
A distinguer de jadu « poison » ( § 785).<br />
En baltique, de lit. ëd-, on a les postverbaux lette ëdas (plur.),<br />
lit. isëdos « restes de manger », et les composés lit. pel-êda « mangesouris,<br />
hibou », zuv-ëda « mange-poisson, mouette ». Il n'est pas<br />
vraisemblable que lit. ûodas « mouche », lette uôds, présente une<br />
forme alternante *ôd- de la racine *ëd- : le mot est nouveau en<br />
regard de si. muxa (§ 175), et il peut être tiré de lit. ûodéiu, ûosli<br />
« sentir » au sens de « qui flaire » (qui est attiré par ce qui sent)<br />
— ce qui inviterait à rattacher le slave obadu «taon» (§ 731) à<br />
ob-adati « chercher » (§ 551).<br />
-rët-, ob-rësti « trouver », sù-rësli « rencontrer » :<br />
Y. si. surëtu « rencontre » (Gr. Naz.).<br />
R. sret dans na srel, v sret, et strëla, vsîrëta, sustrëta (§ 1222).<br />
Tch. slrel, postret, et v ùslrely (du slovaque).<br />
S.-cr. sûsret (sûsret).<br />
Slov. obrêt « découverte ».<br />
sëk- :<br />
V. si. sçsëkû « tas (de blé) » (Ham.), proprement « coffre à blé »,<br />
construction en bois, sur sûsësii « assembler, construire à la hache »<br />
(§ 1221) ; slavon russe osëku. et osëka «abattis», slavon croate osëkï<br />
« tas de fumier » (Job, XX, 7).<br />
R. sek « trouée », osék (ôsek) et osëka, obsëk et obséka, otsëk<br />
« partie coupée », posëk « coupe », posëka, et pôseka, pâseka (§ 1220)<br />
« rucher », peresëk, prosëk et prosëka « percée », susék « coffre à<br />
blé » et susëka, zasëk « abattis » et zaséka.<br />
Pol. siek, pasieka « clairière » et « rucher », sqsiek « grenier »,<br />
zasiek et zasieka.
[§ 753] VOCALISME RADICAL 107<br />
Tch. sek, dosek, od-, pru-, û-, zâsek et zâseka ; paseka et v. tch.<br />
pasëk ; sousek (v. tch. sûsëk) « coffre (pour le grain) ».<br />
S.-cr. sjëk, ôsjek « enclos pour le bétail », àdsjek, posjek et pôsjeka,<br />
pràsjek et prôsjeka, prësjeka, zâsjeka.<br />
Slov. sèk, osèk « claie », odsêk, posèk et posêka, pâseka, presèk<br />
et presêka, préseka ; pour osêka « reflux », voir § 763.<br />
Et de même zar- (§ 736), zas- (§ 783).<br />
§ 753. Divers. — En plus des postverbaux en -eu- (§ 751), on<br />
trouve des formations nouvelles à vocalisme radical -é- pris aux<br />
imperfectifs dérivés. On a vu, sur rek-, tek- et leg-, rëk-, tëk- et<br />
lëg-, § 726 ; sur met-, mël-, § 727 ; en particulier avec des thèmes<br />
terminés par r, § 728 : bër-, dër-, për-, stër-, tër- ; et on verra, sur<br />
tel- et met-, lët- et mët, § 804.<br />
Les thèmes plën-, prëk-, etc., du vieux slave dérivent de<br />
*peln-, etc., et sont à examiner plus loin (§ 806).<br />
On a un thème iërj- dans le slavon serbe tërjati « poursuivre »<br />
(Apostolaire de Sisatovac, Rom. XII, 13), v. serbe tërali, s.-cr.<br />
tjërati et ancien tjeriti :<br />
S.-cr. pètjera « poursuite », et aussi potjer (xvi e s., masc. et<br />
fém.).<br />
Bulg. potîri- : potérja.<br />
Slov. tërjati et tîrjati : polira.<br />
Il s'agit, soit d'un dénominatif de dérivé en -ja (§ 1026), soit<br />
d'un itératif en -jati, et le thème, dont le vocalisme n'est pas clair,<br />
doit être le même (§ 551) que celui de r. et tch. tor « chemin frayé,<br />
piste » (§ 728) : le verbe a signifié « pister ».<br />
Le russe terjât' « perdre » est à part (§ 805).
CHAPITRE VI<br />
VOCALISME RADICAL -u-<br />
§ 754. — Alternances claires. — Slavon brusnçti, imperf. dérivé<br />
-brysati « racler, effacer » ( § 654) :<br />
Y. si. ubrusu « mouchoir, essuie-mains » et slavon obrusu.<br />
R. brus « pierre à aiguiser », ubrûs « mouchoir, bandeau », dial.<br />
obrûs « serviette ».<br />
Pol. brusic « aiguiser », brus, obrus « nappe ».<br />
Tch. brus, obrus et ubrus, vybrus « polissage » et zâbrus « surface<br />
mal polie ».<br />
S.-cr. et slov. brûs, s.-cr. ùbrus et slov. ubrûs « serviette ».<br />
Sur le thème brys- :<br />
S.-cr. brlsali, izbris « radiation », dial. obris « endroit essuyé »<br />
(par le vent), différent de àbris « contour » (§ 796).<br />
Slov. brlsali, brisa « serviette », izbrîs et zbrîs, obrîs.<br />
Sur le thème brûs- « racler » au sens de « peigner, dréger (le<br />
chanvre) », le russe a développé :<br />
brôsit' « jeter », bros « déchets de chanvre » et « jet », nabrôs,<br />
ol-, pod-, pere-, pri-, raz-, s-, v-, vz-, za-, vijbros.<br />
Le baltique a lit. brukù, brùkti « échanvrer » et braukiù, braûkti<br />
« laver, essuyer » : il peut s'agir de deux élargissements parallèles<br />
d'une racine *bru-, celle de v. isl. bryna « aiguiser », brûni « pierre<br />
à aiguiser », v. h. a. brùnen « polir », brun « brun ».<br />
-bû(d)noti « s'éveiller », buditi « éveiller » :<br />
R. bud, razbûd « action d'éveiller ».<br />
Pol. rozbuda.<br />
Slov. probûd.<br />
sty(d)nçti sg «se refroidir», factitif studiti, verbe d'état stydëli<br />
« avoir honte » (§ 496), et trace de slûd- (§ 409) :<br />
Y. si. studu « honte ».<br />
R. stud« honte », slavonisme ; ostûda « refroidissement, fraîcheur »,
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 109<br />
prostùda « refroidissement, rhume », nastùda, ot-, pere-, za-, vystuda.<br />
Pol. ostuda « refroidissement ».<br />
Tch. stud « honte », ostuda « abomination, affront ».<br />
Slov. stûd « dégoût », oslûd (et fém.) et oslûda « abomination » ;<br />
— s.-cr. (stûd, fém., « froid »).<br />
Sur le thème styd- :<br />
R. styd « honte ».<br />
Pol. wstyd « honte » sur wstydzic siç.<br />
Tch. styd « refroidissement » et « honte » (russisme), masc.<br />
nestyda « qui n'a honte de rien ».<br />
S.-cr. stid « honte » (et fém.), et dial. « froid » ; — slov. stîd<br />
« honte », du serbo-croate.<br />
gu(b)ngti «courber», imperf. dérivé -gybati (§494), et gy(b)nçti<br />
«périr», imperf. dérivé -gybati, factitif gubiti. Les deux verbes<br />
sont séparés, mais leurs postverbaux se rencontrent :<br />
I. V. si. su-gub- « double », adj. (§ 317).<br />
R. gubâ « baie » et anciennement « district » (différent de gubâ<br />
«lèvre», de *gçb-, § 767).<br />
Pol. przegub « jointure » et przeguba, kachoube gub « pli » et<br />
slovince guba.<br />
Tch. (*gub- dans v. tch. zâïïubie « giron »).<br />
Slov. guba « pli », pregûba, zgûba, zagûba ; — s.-cr. dvàgub, etc.<br />
(§317).<br />
Sur le thème gub- :<br />
V. si. *sugûbi, variante de sugubï.<br />
Tch. heb « courbure » (v. tch.), oheb, zâheb, v. tch. prieheb et<br />
pfiehba.<br />
Sur le thème gyb- :<br />
R. zagib «pli» et zagiba (et zdgib'), izgib, nagib (nâgib'), pôgib<br />
(pôgib'), prigib, raz-, z-, vygib.<br />
Tch. hyb et pohyb « mouvement », ohyb « courbure, articulation »,<br />
pre-, pro-, s-, zâ-.<br />
S.-cr. gîb « pli », nâgib « pente », prègïb « flexion », zgîb « jointure ».<br />
Slov. gib « mouvement » et gïba, pregib et pregîba (et ; fém.<br />
pregîb), nagib, pogîb, razgib, zgib, zagib, et nagîba, zgiba, zagïba.<br />
Sur thème gyn- (§ 824) :<br />
R. vygin et vygina, sur vygnut' et imperf. vygibât' refait en<br />
vyginât'.<br />
Le baltique a lette gubt « se courber », guba et lit. gubà « tas (de<br />
gerbes) », lit. dvi-gubas « double ».
110 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
II. V. si. paguba « perdition » (§ 1220).<br />
R. gûba «perdition» (et fém. gub'), pâguba (pôguba), izgùba,<br />
sgûba, zagûb et zagûba.<br />
Pol. zaguba et zguba « perdition, ruine », poguba.<br />
Tch. pohuba, zâhuba, zhouba.<br />
Slov. izgûba, pogûba ; — s.-cr. pôguba, et dànguba « perte de<br />
temps » sur dàngubili calquant ail. tagedieben.<br />
Sur le thème gyb- :<br />
Slov. pogîba et s.-cr. ancien pogiba (et fém. pogib).<br />
Sur le thème gyn- de gy(b)nçti :<br />
Ukr. zahyn « mort », de zahynuty.<br />
Tch. zâhyn et zhyn, créations du xix e siècle.<br />
Slov. pogîn.<br />
§ 755. — Smuknçti « faire glisser » et smukati, imperf. dérivé<br />
smykali (§ 493) :<br />
Slov. smùk « glissement » et smûka « glissoire, patin », posmùk<br />
«glissoire»; na osmùk «(filer) trop fin », de osmûkati «passer au<br />
peigne fin » ; prismùk « homme à l'esprit dérangé », de prismûkniii<br />
« donner un coup ».<br />
S.-cr. smûk « couleuvre ».<br />
Dans les autres langues, les postverbaux sont tirés de smykati,<br />
et ils se rencontrent avec ceux de muknçti « mouvoir », mykati<br />
(§ 799) :<br />
R. smyk « archet », osmyk « action d'arracher (les brins qui<br />
dépassent) ».<br />
Pol. smyk « archet », posmyk « poussée », przesmyk « passage<br />
étroit, défilé ».<br />
Tch. smyk « dérapage » et « glissoire », pfesmyk, prûsmyk « défilé ».<br />
suce-, sukati « tordre » (§ 544) :<br />
R. vsuk « entortillement » (vosucit' «entortiller»), prisûka.<br />
Slov. sûk « torsion », posûk, presûk, zasùk.<br />
vykngii « s'accoutumer, apprendre », factitif uciti « enseigner » :<br />
V. si. nauku « coutume » (J. Ex.), composé novouku « nouveau<br />
catéchisé» (Pand. Ant.), adj. (§ 1228); slavon nauku et ukû<br />
« enseignement », neukû « non instruit ».<br />
R. nâuk et naûka « science », néuk « qui n'est pas instruit »,<br />
samouk « autodidacte », nedouk « demi-savant » et nedoàka « demiscience<br />
» (et nédouë, vyuc « qui a achevé ses études », § 824).<br />
Pol. uk « qui sait », nieuk, samouk, nauka, pouka « instruction ».<br />
Tch. uk, nedouk, samouk, prdvouk « juriste ».<br />
Slov. ûk, nâuk et naûka, izûk et izûka, poûk, podûk, odûka.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 111<br />
S.-cr. nèuk, samouk, nâuk, et nâuka « science » (ancien et repris<br />
comme russisme), ôduka, pàuka.<br />
Sur le thème vyk- :<br />
R. nâvyk « habitude » (et v. r.), izvijk, ôbyk.<br />
Pol. nawyk, zwyk ; — et tch. nâvyk, zvyk.<br />
Slov. navîka ; — s.-cr. nàvika, àdvika « désaccoutumance »,<br />
neàbika « fait de ne pas s'accoutumer ».<br />
En baltique, lit. jùnkti, factitif jaukinti (§ 496) : jaûkas « appât ».<br />
struze-, strugati « racler, raboter » ( § 544) :<br />
R. strug « rabot, doloire » et « grande barque plate », zastrug<br />
« rabotage » et « rabot grossier », zastrûga « action d'agacer ».<br />
Pol. strug « plane » ; — tch. struh « racloir », soustruh « tour (de<br />
tourneur) » en regard de v. tch. sestruhati (§ 1222).<br />
Slov. strûg ; — s.-cr. strûg, zastrug et zàstruga « vase de bois ».<br />
Sur le thème strûg- :<br />
R. obstrôg, zastrôg, de strogâï.<br />
En germanique, v. isl. striûka « frotter », de *streug-, et frison<br />
strôk « raie », de *stroug-.<br />
dûxnçti « souffler », itératif dyxati, factitif dusiti :<br />
Y. si. duxu « esprit », vuzduxu « air ».<br />
R. dux, vôzdux, ôtdùx, prôdùx, nadùxa « rhume », zadûxa.<br />
Pol. duch, odduch, przeduch, zaduch « air vicié » et zaducha,<br />
przyducha, uducha « suffocation ».<br />
Tch. duch, vzduch, prùduch, zâduch et zâducha.<br />
Slov. dûh et duha, vzdûh, podûh, oddûha, nadûha et zadûha<br />
« asthme », izdûha et zdûha « senteur » et « inspiration, invention ».<br />
S.-cr. dûh, composé milàduh « hysope », ilzdûh et vâzdûh « air »<br />
( § 60), zâdûh « mauvaise odeur », zâduha « asthme », zduha « démon ».<br />
Sur le thème dux- :<br />
R. dox « souffle », izdôx, na-, ot-, pere-, vz-, vydox.<br />
Pol. dech « souffle, haleine », oddech, prze-, przy-, w-, wy-, z-, za-.<br />
Tch. dech, oddech, v-, vy-, vzdech « soupir », nâdech et nàtcha<br />
« rhume de cerveau ».<br />
Slov. oddàh, zadàh ; — s.-cr. dâh « souffle », uzdâh « soupir »,<br />
zâdâh et zâdaha.<br />
Sur le thème dyx- :<br />
R. dyx, otdyx « repos », nadyx, pere-, s-, v-, vz-, râzdyx, vydyx,<br />
zadyx et zadyxa.<br />
Pol. wzdych ; — tch. dych, oddyx, povzdych.<br />
Slov. izdîh « expiration », vdih « inspiration », vzdih « soupir »,<br />
zadih, oddih et oddîha ; — s.-cr. ancien uzdih.
112 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
En baltique, lit. dvësti (§ 544), dvisti et dial. dùsti (§ 493) : dausas<br />
« air » et dvasas « esprit » (§ 117), et dùsas « soupir, asthme ».<br />
krusiti « briser, émietter » (§ 610) et slavon krusiti :<br />
Y. si. ukruxû « morceau ».<br />
R. krux « morceau, tesson, etc. » (krusit' « briser ») et ukrûx,<br />
sokrûxa « affliction ».<br />
Pol. kruch et krucha, adj. kruchy «fragile», okruch «fragment,<br />
miette », ukruch.<br />
Tch. kruch « miette, grain » et dial. krucha, adj. kruchy « friable,<br />
cassant », v. tch. ukruch.<br />
S.-cr. kruh « pain » et slov. krùh.<br />
Sur thème krux- :<br />
R. kroxâ « miette » (krosW « émietter »), raskrôx.<br />
Pol. dial. krech et adj. krechy.<br />
Les deux vocalismes restituent un thème verbal krux- (adj.<br />
kruxukû, § 984), avec son itératif krusiti. Le baltique a lit. krùsti<br />
« piler, broyer », itér. krausyti et kriausyti, subst. krùsas et kr(i)usà<br />
« grêle », où les variantes kriu- et kfiau- attestent un thème *kreusalternant<br />
avec krus- (§ 55), Hors du balto-slave, les rapprochements<br />
avec lat. crusta « croûte » ou gr. xpoôco «je heurte » ne sont pas sûrs.<br />
Le slave a un autre thème *kurx-, qui doit être en rapport avec<br />
krux-, voir § 814.<br />
slysati (slusati) «entendre», slusati «écouter» (§ 593) :<br />
V. si. sluxu « ouïe », posluxu « témoin (auriculaire) », osluxa<br />
(Pand. Ant.) et prësluxa (J. Ex.) « désobéissance », slavon posluxu<br />
et posluxa « obéissance ».<br />
R. slux « ouïe, ouï-dire », pôslux « rumeur » et « témoin », dôslux,<br />
ndslux, ôslux « fait d'être aux écoutes », pôdslux, prislûx, prôslux,<br />
vyslux, zàslux, et néslux et ôslux « homme désobéissant ».<br />
Pol. stuch, posluch « ouï-dire » et ancien osluch, przesluch, przy-,<br />
za- ; — tch. sluch, posluch.<br />
Slov. slûh, poslûh, pri-, za-, et oslûha « désobéissance ».<br />
S.-cr. slûh, poslûh « audition, obéissance » ; v. s. osluha « amende ».<br />
Sur thème slyx- :<br />
R. dôslyx, adv. nâslyxom.<br />
Pol. slych, rozslych, zasiych.<br />
Sur thème slux- :<br />
Tch. slech, doslech, poslech, vfislech, sur -slechnouti sûrement<br />
nouveau.<br />
Skr. çrôsati « il entend », et subst. av. sraosa- « ouïe, obéissance ».
[§• 756] VOCALISME RADICAL -U- 113<br />
sQxnçti, imperf. dérivé -syxati, factitif susiti :<br />
Y. si. suxu, adj.<br />
R. suxôj ; peresux « bas-fond (desséché) », peresàxa « temps sec »<br />
et ôsuxa, posûxa, zâsûxa ; podsùxa « copeau », prisûxa « sortilège,<br />
charme », prosûxa « premier chemin sec au printemps ».<br />
Pol. suchy ; osuch « chose séchée, bois sec, galette, etc. ».<br />
Tch. suchy ; osuch « gâteau sec », slovaque osuch, posûch.<br />
Slov. sûh ; sûha « ruisseau temporaire » ; — s.-cr. sûh.<br />
Sur thème syx- :<br />
R. nasyx, po-, pere-, s-, zâsyx.<br />
Slov. us ih « dessèchement ».<br />
Sur thème sux- :<br />
R. peresôx « bas-fond », ancien usôx « lit desséché d'une rivière ».<br />
Pol. osech « assèchement », usech « dessèchement, tabès ».<br />
Lit. saùsas, adj. ; skr. çûsyati «il sèche », çosah «le desséché».<br />
§ 756. Alternances moins claires. — Gnusati sg « être dégoûté » :<br />
V. si. ynusu « abomination ».<br />
Pol. g nus (« fainéant »), tch. hnus, hnis, s.-cr. gn(j)ûs, slov. gnûs.<br />
Racine isolée, visiblement expressive, et alternance seulement<br />
à l'intérieur du slave : subst. gnïsï, § 718.<br />
muditi « tarder » :<br />
Pol. zmuda « perte de temps ».<br />
Slov. mûd, pomûda, zmûda, zamûda.<br />
En alternance avec mudïlû « lent », iz-mudëti « se consumer »<br />
(§ 614).<br />
Le sorabe a la forme altérée h . sor. komdzic « retarder » (§ 1219),<br />
avec postverbaux :<br />
komuda et komda, skomuda et skomda.<br />
Le russe altère médlit' « tarder, lambiner » en meledlt', avec<br />
postverbal :<br />
meledâ « travail lent, qui n'en finit pas ».<br />
nuditi « contraindre » :<br />
R. nud « douleurs », nûda « contrainte, nausée, tourment »,<br />
iznûd, ponûda, prinuda, vynuda.<br />
Pol. nuda « ennui » ; — tch. nuda, du polonais.<br />
S.-cr. pônuda « offre », et prinuda « contrainte » (xix e s.), adaptation<br />
de r. prinuzdénie (§ 825).<br />
Slov. nûda « corvée », ponùd et ponûda « offre », pfinûda<br />
« contrainte ».
114 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
En baltique, lit. po-nusti «languir» (§ 444), subst. naudà<br />
« utilité ».<br />
Et voir nçt-, § 766.<br />
rùdëti s g « rougir » :<br />
V. si. rudu «rouge», adj., ruda « minerai ».<br />
R. rudâ « minerai », et pop. « sang ».<br />
Tch. ruda, slov. et s.-cr. ruda.<br />
Pol. ruda « minerai, rouille » ; verbe brudzic « salir », dépréverbé<br />
de ob-rudzic (r. rudit' « barbouiller, salir », ob-) : postverbal brud<br />
« saleté ».<br />
Lit. raûdas « rouge » (lat. rûfus, etc., § 599), subst. raudà « couleur<br />
rouge ».<br />
truditi se « peiner » :<br />
Y. si. trudu « peine ».<br />
R. Irud, potruda « peine ».<br />
Pol. trud, utrud et ulruda « fatigue » ; — tch. trud.<br />
Slov. trûd, potrûd et potrûda ; — s.-cr. trûd.<br />
Lat. trûdô «je pousse», got. *us-priutan «molester», v. h. a.<br />
ar-driozan « contrarier », droz « contrariété » : alternance *treud- :<br />
*troud~.<br />
V. si. krupa (Gr. Naz.) et krupica « miette ».<br />
R. krupâ « gruau, grésil » (krupW « grener, égruger »).<br />
Pol. krupa, tch. kroupa « grêlon » et « orge mondé ».<br />
Slov. krupa « orge mondé » ; — s.-cr. krupa « grésil ».<br />
Le vieux slave, mais en rédaction slavonne, présente les verbes<br />
krupêli « se rapetisser » (Cyr. Jér.), sukrupiti « rapetisser » (Upir'),<br />
adj. krupu dans krupodusïnu «pusillanime, àXiyo^uxoç » (Éphrem) :<br />
le thème en serait *krçp- d'après pol. krçpy « ramassé, trapu »,<br />
et il s'agirait en ce cas d'une forme à infixé nasal.<br />
Lette kr'upt « se ratatiner », kr'aupa « verrue, escarre », lit.<br />
nu-krùpçs « couvert de croûtes », v. isl. krufa « croûte, escarre » :<br />
alternance *kreup- : *krup-.<br />
En slave, on a sûrement une variante phonétique de krup- dans<br />
strupu «blessure», voir § 761.<br />
(su-)kupiti « rassembler » :<br />
V. si. kupu «tas», et voir proskupu « pillard » sûrement de<br />
pro-su-kupiti, § 1028.<br />
R. kûpa (skûpit' « mettre en tas ») ; — pol. et tch. kupa.<br />
Slov. kàp, nakùp, skùp.<br />
S.-cr. kûp, iskup, dkup, anciens nakup, ukup, skûp et skupa.<br />
Lette kupt « se coaguler, se mettre en boule », lit. kaûpti « faire
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 115<br />
un tas » ; subst. lit. kaùpas « tas », et kûopa « groupe, tas », lette<br />
kuops et kuôpa, de *kâup-; v. h. a. hufo «tas», de *kup-; av.<br />
kaofa-, v. perse kaufa- « montagne ».<br />
L'intonation est rude en slave, différant de l'intonation douce<br />
de kupiti « acheter », r. kupit' ; et de même dans lit. kûopa, l'intonation<br />
douce de kaùpli étant secondaire. L'avestique suppose *kaupha-,<br />
le balto-slave pourrait répondre à *kauhp- (§ 98).<br />
Slavon ob-lupiti « piller », lùpati « peler » (§ 652) :<br />
R. lup et lûpa, nadlûp et nadlupa, oblùp et oblûpa, vylup et<br />
vylûpa, zalûp et zalûpa « prépuce », nalûp, ol-, pere-, pod-, s-.<br />
Pol. iup « dépouille, butin » et iupa « pelure » ; odiup, prze-,<br />
wy-, anciens polup, ziup ; roziup et dial. rozîupa « bonnet de<br />
fourrure fendu ».<br />
Tch. lup « pellicule » et « vol à main armée ».<br />
Slov. lûp « pelure », olûp, odlûp.<br />
Lit. lùpti « écorcer, écaler », itér. laupyti.<br />
Le serbo-croate diffère par le sens et l'intonation : lupiti « frapper,<br />
taper » et lûpati, subst. Iupa « battement, coups ».<br />
trupiti :<br />
V. si. irupû « corps, cadavre » ; slavon trupu « tronc (d'arbre) ».<br />
R. et pol. trup « cadavre » (r. trupit' « mettre en morceaux »).<br />
Tch. trup « tronc » ; — slov. et s.-cr. trûp « tronc, carcasse »<br />
(slov. trûpiti et trûpati « frapper, briser »).<br />
Lit. trupëti «s'en aller en morceaux, s'émietter», adj. trupùs,<br />
traupùs « friable » ; v. pr. Irupis « tronc, souche ».<br />
V. si. lubu « crâne » (J. Ex., Pand. Ant.).<br />
R. lob « front, tête » ; lub « tille » (pôlub' « écorce de bouleau »,<br />
polubit' « écorcher une bête »), pdluba « pont d'un navire » et<br />
« toit de planches, cintre », ukr. paluba « voiture couverte (d'écorce,<br />
d'une natte de jonc »).<br />
Pol. lub « écorce », paiub « tronc creux, coque » et « bâche ».<br />
Tch. lub, s.-cr. et slov. lûb (slov. olubiti « écorcer »).<br />
Lit. lûobas, lûoba « écorce », lette luobs et luâbît « écorcer », de<br />
*lôub-, et lit. lubà « planche », plur. lùbos « plafond » ; nordique<br />
laupr « corbeille ».<br />
snubiti «procurer une fiancée» (§ 614) :<br />
Tch. snub « mariage » (dial.), plur. zâsnuby « fiançailles » Isnoubiti<br />
« fiancer »).<br />
Slov. snûba « demande en mariage ».<br />
Lat, nûbere «se marier», nupta «mariée».
116 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
§ 757. — Kuk- :<br />
S.-cr. kuka « crochet » et kvàka, ôkuka et zâkuka « courbe,<br />
méandre » (kvâëiti et zakûëiti « accrocher »).<br />
Slovaque kvaka « bâton recourbé ».<br />
R. kuka « poing ».<br />
Le doublet kuk- : kvak- (§ 778), d'intonation rude, indique deux<br />
formations dérivées d'une même racine kyk-, mais celle qu'on<br />
trouve en slave (§ 802) correspond assez mal pour le sens. Et mal<br />
également les rapprochements proposés avec lit. kaûkas « enflure,<br />
abcès », kaukarà « colline », got. hauhs « haut ». Mais le sanskrit a<br />
kucàti « il se recourbe », kucitah « bouclé » : le slave a dû tirer de<br />
cette racine un thème *kyk- de verbe d'état, comme dans kys- :<br />
kvas- (§ 496).<br />
luëiti sec « avoir lieu », po-luciti « recevoir » :<br />
R. prilûk et prilûka, de priluclt' « attirer » ; dial. slûka « occasion,<br />
slûëaj », de sluëil'sja ; ulûka, de uluëit' « trouver » ; et ukr. polàka,<br />
de poluëyly.<br />
Bulg. slûka, et spolûka de spolûëi- « réussir ».<br />
Cette racine verbale, dont les postverbaux se rencontrent en<br />
russe avec ceux de Içëiti (§ 763), est en rapport avec la racine i.-e.<br />
*leuk- de lat. lùx « lumière », etc., mais elle s'en est isolée, comme<br />
lit. lâukti et lûkëti « attendre ». On a lucï « lumière » et luëa « rayon »<br />
(§ 1019), mais on ne retrouve pas le sens initial dans v. si. luëii<br />
« meilleur » (§ 290), ni dans le verbe, v. si. luëiti sç, et v. tch. luëiti<br />
et slov. luëiti « jeter ».<br />
Y. si. druyû « camarade, ami », podrugû « compagnon, le<br />
prochain ».<br />
R. drug, podrûg et fém. podrûga.<br />
Pol. ancien drug (mod. druh, du tchèque), dial. na podrugu<br />
« en locataire ».<br />
Tch. druh, podruh « locataire », ancien pridruha « étai » ; — slov.<br />
et s.-cr. drûg.<br />
Et adjectif pronominal drugyi « autre » (§ 257).<br />
Thème draug- en baltique : lit. draûgas « compagnon », etc.,<br />
et v. lit. sudrugti « faire ami », mais qui peut être adapté du slave<br />
sûdruziti. En germanique, v. angl. dreôgan « accomplir, supporter »,<br />
verbe fort à alternances *eu : ou : u, got. driugan « faire la guerre »,<br />
gadrauhts « soldat ». On peut supposer un emprunt du slave au<br />
germanique, puis du baltique au slave.<br />
rusiti « détruire, abattre » :<br />
R. rux « mouvement, agitation », obrûx, razrûx, adv. ndruxom<br />
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 117<br />
et prorûxa « faute, bévue », nedorûxa « gruau » et masc. « personne<br />
qu'on ne peut pas émouvoir ».<br />
Pol. ruch « mouvement », odruch « mouvement réflexe », rozruch<br />
« tumulte » ; poruch « mouvement » et porucha « perturbation ».<br />
Tch. ruch (du polonais), rozruch et vzruch « agitation », porucha<br />
« perturbation ».<br />
S.-cr. razruha (xvm e s.) « destruction ».<br />
Alternances en slave dans les adjectifs r. rychlyj « friable », etc.,<br />
et slov. râhel « meuble, tendre » (§ 1049), et voir porusïnjï, § 1091.<br />
En baltique, lit. ruôsti « faire activement », de *raus-, et germ.<br />
rus- (§ 614).<br />
*tuxnçti et *tçxnçti, factitif *tusiti (§ 494) :<br />
R. zâtux de zatuxnut' « se gâter ». • •<br />
Pol. otucha et potucha « bon espoir, bon courage », de o-tuszyc<br />
«donner bon espoir,».<br />
Tch. potucha et predtucha « pressentiment », odtucha « soulagement<br />
», de tusiti « se douter de, pressentir ».<br />
Slov. potûha « recel, dissimulation », de po-tûhniti « (s')éteindre,<br />
étouffer ».<br />
Bulg. ottûha et raztùha « soulagement », mais récents et adaptés<br />
du tchèque.<br />
xylu, factitif xuliti :<br />
Slov. hûla « courbure », sur hûliti « courber ».<br />
Sur thème xyl- :<br />
Slavon poxylu « courbé, incliné », r. poxilyj.<br />
Pol. pochyly « en pente, incliné », nachyi « inclinaison », pochyi<br />
« fait de pencher, pente », v. pol. schyl « déclin, baisse », sur chylic<br />
« incliner ».<br />
La base est l'adjectif xylu, dans slov. hil « courbe », tch. dial.<br />
chyly « incliné », ukr. xylyj « tête courbée, languissant », r. xllyj<br />
«faible, débile », sans doute adjectif en -lu (§ 1048) sur un thème<br />
xy- qu'on ne trouve pas sûrement dans le polonais ancien chynqc<br />
« incliner », r. dial. xinul'sja « s'incliner », le verbe pouvant avoir<br />
été refait sur xylu. Sur l'adjectif le factitif tch. chouliti et chyliti,<br />
slov. hûliti et hiliti, etc.<br />
A distinguer de xuliti «blasphémer» (§ 760).<br />
Y. si. kuriti sg « fumer » :<br />
R. kurit' « fumer » et,'« distiller », dial. kur « fumée », composé<br />
vinokûr « distillateur d'eau-de-vie », dokûr, is-, na-, pere-, pro-,<br />
ras-, pôdkûr, vijkur.
118 LES POSTVERBAUX [§ 749]<br />
Pol. okur, podkur (pour enfumer les abeilles).<br />
Slov. podkûra.<br />
Lit. kuriù, kùrti « allumer le feu », got. hauri « charbon » (de<br />
*kuryo-).<br />
§ 758. Sans alternance. — Kus- :<br />
V. si. iskusû, okusû, vukusû, sur is-kusiti « éprouver », vu-kusiti<br />
« goûter ».<br />
R. iskûs, vkus « goût », pokûs et pokusa.<br />
Pol. zakus et zakusa, pokusa « tentation ».<br />
Tch. kus (v. tch.), okus, pokus, et vkus du russe.<br />
S.-cr. kûs et ôkus (okus) « goût », pokus « épreuve », et ùkûs du<br />
russe.<br />
Slov. kus, okus, pokûs, izkûs et izkûsa, (vkus).<br />
Sur kusiti, emprunt au germanique (§ 618). Les postverbaux se<br />
rencontrent dans plusieurs langues avec ceux de kgs- (§ 766).<br />
V. si. sluzu « humeur, mucosité ».<br />
Bulg. sluz « glaire, salive ».<br />
(S.cr. et slov. slûz, fém., « mucosité »).<br />
R. dial. sluz « eau sur la glace, flaque gelée », nasluz « eau qui<br />
tombe sur les roues du moulin ».<br />
Verbe s.-cr. slùziti « sécréter du mucus », slov. sluzéti « suinter<br />
(d'une plaie) ».<br />
Et pol. sluz, ukr. s Ijuz, tch. s Hz (r. dial. s Hz', fém.), qui indiquent<br />
une contamination avec la racine différente de v. si. sllzukû<br />
«glissant», r. slizkij, pol. êlizki (§ 983). En tchèque, slizky, dial.<br />
slzky, est « gluant », avec un verbe osliznouli « devenir humide »,<br />
dont la variante dialectale oslznouli ne restitue donc pas une<br />
forme alternante *slûz- de sluz- et est tirée de slïz-, mais peut<br />
indiquer la rencontre de slïz- et *sluz- comme point de départ<br />
de la contamination. Le nom du poisson « blennie », la « baveuse »,<br />
r. sliz (mais sllzen' est « limace »), pol. sliz « loche », peut s'expliquer<br />
par sluz- mieux encore que par sliz-.<br />
R. jutit' « accueillir, donner asile », pri- :<br />
prijût « refuge, asile », ujut « commodité, confort » (fait d'être<br />
accueillant).<br />
Verbe isolé en russe, et l'on ne sait pas si le thème était jut- ou<br />
*jçl~. Serait-ce le * jut- antérieur à *tjut- (§ 610)?<br />
V. si. prëkuliti « parer », slavon ukustenie « parure, vêtements » :<br />
R. kutii' « faire bombance », subst. masc. prôkuta « bambocheur ».<br />
V. tch. kutiti « machiner, faire (le mal) » (mod. skutek « acte »).<br />
Thème obscur, non distinct en russe et en tchèque du thème kgt-
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 119<br />
pustiti « lâcher » :<br />
Y, si. puslu «désert», adj. ; composés mçsopustu «jours gras»,<br />
slavon syropustû « dernier jour gras, rj Tupoçocyoç » ; otùpustu<br />
(J. Ex.), slavon zapustu (fém. popustï).<br />
R. pustii', imperf. puskàt' (§ 110) : mjasopùst, syropust ; ôipusl<br />
au sens religieux d'« apolyse, fin de la messe », rôspust « divorce » ;<br />
— et sur puskât' : ôtpusk et rôspusk « congé », pusk, dôpusk et<br />
nedôpusk, nâpusk, po-, pod-, pri-, prô-, s-, u-, vy-, zâ-, ispùsk, ôpùsk,<br />
perépûsk.<br />
Pol. pust « jet (de filet) », miçsopust, dopusi, od-, przy-, s-, u-, w-,<br />
wy-, popust et popusta, przepust et przepusta, rozpusl et rozpusta,<br />
opust « remise, rabais », et opusta « bord du sillon ».<br />
Tch. masopust, dopust, pro-, roz-, vif- (et fém.), et prêpusta<br />
(v. tch.), propusta, rozpusta « exubérance » et masc. « homme<br />
exubérant », spousta.<br />
S.-cr. mësopust, ispusi, ot-, pà-, pri-, pro-, râs-.<br />
Slov. pûst « mardi gras » et mesopùsî, delopùst (délopust) « vigile » ;<br />
dopûst, iz-, o-, od-, po-, pre-, pri-, pro-, raz-, nâpust « avancée du<br />
toit ».<br />
La base est l'adjectif pustu «désert» et «sans maître», qui a<br />
son correspondant en baltique dans v. pr. pausto (fém.) « sauvage »,<br />
et qui doit être un adjectif verbal de la série de cçstù (§ 408), sur<br />
une racine qui peut être celle de pçditi (§ 766).<br />
Slavon -rjuliti et v. si. -rjçtili (§ 614) :<br />
Pol. rzucic «jeter» : rzut «jet», zarzul «reproche, objection»,<br />
wyrzut « exanthème » et plur. -ty « remords », dorzut, na-, ob-, od-,<br />
po-, pod-, prze-, przy-, roz-, w-, z-, et zrzuta, zarzuta, pol. ancien<br />
odrzula, wyrzuta.<br />
Slovaque rûtit' « jeter » : rut (rut) « jet ».<br />
V. si. o-stutiti «sentir» (§ 610) :<br />
Tch. cititi : cit « sentiment », pocit, et masc. necita « homme<br />
insensible ».<br />
S.-cr. cùtiti : (fém. eût, ocut).<br />
Slov. cutiti : eût (et fém.), oeût, po-, pri-, za-,<br />
slutiti :<br />
S.-cr. stûtiti « augurer, pressentir » : stûta « pressentiment,<br />
(mauvais) présage» et mascv« oiseau de mauvais augure», ancien<br />
stut, masc. (et fém.).<br />
Slov. slùtiti « faire prévoir » : stût « soupçon, pressentiment!».<br />
La base est le slavon stutu « qui a entendu », dérivé en -tu<br />
(§ 1160).
120 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
cuditi se « admirer » :<br />
R. cudil' «être bizarre», cùdil'sja «paraître, sembler» (§ 675),<br />
pri- : pricûda « caprice ». •<br />
Slov. cûditi se : zacûd.<br />
kljuditi :<br />
Slavon russe kljuditi (au sens de « dire »), r. dial. ukljùdit'sja<br />
«se calmer» : (kljud' «bon ordre, belle forme», fém., adj. kljùzij<br />
« bien fait », § 956).<br />
Tch. klldiii « ranger » et « apaiser » : klid « calme », poklid « calme »<br />
et « rangement », ûklid.<br />
Bas-sor. klud « articulation ».<br />
Il doit s'agir de l'élargissement en -d-, et peut-être d'un ancien<br />
présent en -de- (§ 444), d'une racine verbale *kleu- : si c'est celle de<br />
lit. kliâutis «s'adapter», factitif kliudijti «accrocher» (§ 441), on<br />
rejoint si. kljuje-, kljûvati « becqueter » (§ 528).<br />
kuditi :<br />
V. si. kuditi « dénigrer », prokuditi « traiter mal, chercher à<br />
perdre » : prokuda « destruction, perte ».<br />
Bulg. kûdi- « gronder, injurier », prokûdi- « chasser » : prokuda<br />
« action de chasser ».<br />
S.-cr. kùditi « réprimander » : p'okuda « blâme ».<br />
Pol. dial. przekuda « opposition, dépit ».<br />
R. prokudit' « jouer un mauvais tour » : prokuda « mauvais tour,<br />
niche », et masc. « espiègle ».<br />
Et r. dial. kud « démon, esprit mauvais », fém. kud' « magie »,<br />
mais en regard du russe ancien kudes « sorcellerie », plur. kudésy,<br />
verbe kùdesit' « ensorceler », kudésnik « sorcier », avec une variante<br />
kudes-, qui n'a évidemment rien à voir avec cudo, et doit être un<br />
mot d'emprunt (au chamanisme?) ; et okûdit', okudésit' « enchanter<br />
par magie », okûdnik et :<br />
masc. okâda « magicien ».<br />
Rapport qui n'a rien d'évident avec ky(d)nçti «(re)jeter»,<br />
également d'intonation rude, r. kinul', s.-cr. kldati, mais également<br />
sans étymologie (§ 496).<br />
R. ludit' « étamer » : lûda « étamage », polûda, pereluda.<br />
Emprunt à ail. lôten « souder », moyen bas-all. loden, comme<br />
pol. lutowac, tch. letovati, slov. Iqlali.<br />
Pour ludu « fou », voir § 768.<br />
S.-cr. prûditi « être profitable » : prûd « profit », et napruda de<br />
napruditi.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 121<br />
En slovène, pridili : prid, et izprîda de izpridili « rendre<br />
impropre ».<br />
La base est prud, emprunt à l'italien prode(% 285), avec déformation<br />
en slov. prid par contamination avec un ancien *pridû,<br />
§ 819.<br />
§ 759. — Kupiti « acheter » :<br />
V. si. kupû (Upir'), prikupû, slavon iskupu.<br />
R. dôkup, nâ-, ô-, ol-, pô-, pôd-, vy-, zâ-, iskûp, pri-, ras-, s-, v-.<br />
Pol. kup, okup, od-, roz-, s-, u-. w-, wy-, za-, pokup et ancien<br />
pokupa, przekup et przekupa.<br />
Tch. kup, soukup « co-acheteur, intermédiaire, garant », dokup,<br />
nâ-, od-, pod-, pre-, pri-, vi]-, zâ.<br />
Slov. kûp, izkûp, na-, po-, pod-, pre-, pri-, za-, odkûp et odkupa.<br />
S.-cr. kûp, iskûp, ôtkup (ôtkûp), prèkup, zâkup.<br />
Emprunt au germanique (§ 618) : verbe *kaupjan, subst. v. h. a.<br />
chouf «achat, Kaufi>; bien distinct par son intonation, s.-cr. kùpili,<br />
de kupiti « assembler », s.-cr. kupiti (§ 756).<br />
Ijubiti « aimer » :<br />
R. ancien izljûb « assentiment ».<br />
Pol. polub « affection », slub « vœu ».<br />
Tch. polib « baiser », slib et prislib « promesse », zâslib et zâsliba<br />
« promesse (de mariage) », obliba et zâliba « plaisir ».<br />
Slov. poljùb « baiser », obljûba, zaljûba.<br />
S.-cr. prèljuba « adultère », anciens obljub et obljuba.<br />
Base Ijubû «cher», adj. ; sans doute du germanique (§ 618,et<br />
cf. § 823).<br />
kljuk- :<br />
V. si. kljuka « tromperie », et slov. kljuka « crochet », etc. (§ 1040).<br />
Slov. okljûciti « couder » : okljûk « coude du chemin ».<br />
Tch. -kliciti : oklik et oklika « détour ».<br />
kukati :<br />
R. dial. kûkat' « grogner », dokucit' « importuner » : dokûka<br />
« importunité », skuka « ennui ».<br />
Pol. dokuczyc : dokuka, comme en russe.<br />
Slovaque skukat' « attendre » : skûta « ennui ».<br />
Et s.-cr. kïikati « crier coucou, se lamenter », slov. kûkati :<br />
Slov. kûk et skûka « crapaud ».<br />
Verbe de la série des nombreux verbes expressifs en -kati (§ 560),<br />
avec leurs postverbaux ou substantifs de base :<br />
Slov. bûkati « mugir », bûkati se « être en rut » : bûk « rut » et
122 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
bûka « tumulte » ; — s.-cr. bûkati et bûcati ( § 596) : bûk « bruit »<br />
et buka.<br />
Pol. burczec« gronder » : burka « semonce ». Etc.<br />
Et verbes en -sk-, -zg- (§ 561) :<br />
pljuskati « éclater, clapoter » :<br />
Y. si. pljusku « éclatement » ; — pol. plusk « clapotis » ; — tch.<br />
plisk « averse » ; — s.-cr. pljûsak « averse » et pljùska « gifle » ;<br />
— slov. pljûsk « bruit de claque » et pljûska « flaque, averse,<br />
gifle ».<br />
R. pljùxat'sja « tomber lourdement » ( § 557) : pljùxa « gifle ».<br />
Pol. bluzgac « clapoter » : bluzg « clapotis » ; — slov. bljûzgati<br />
« barboter » : bljûzga « boue liquide ».<br />
Slov. brljûzgati « patauger » : brjûzga « neige fondante », brljûzga<br />
« bourbier » ; — r. brjuzgâl' « gronder » : masc. brjuzgâ « le grondeur,<br />
grognon ». Etc.<br />
Il faut examiner en particulier les verbes :<br />
R. stûkat' « heurter » : stuk, et pol. stuk « bruit » ; — s.-cr.<br />
stùknuti « dire stu à un bœuf pour le faire reculer », ùstuknuti<br />
« reculer » : ùstuk « riposte, contrecoup, réplique à un sortilège »,<br />
mais voir *tïlk-, § 769.<br />
R. luscit' « écosser » et dial. lûskat' « faire claquer » : luskâ « écaille »<br />
et lusk « claquement », ôblusk « action d'écosser », vylusk « désarticulation<br />
» de vyluscit' « écosser, désarticuler ».<br />
Ukr. lusk et pôlusk « fracas ».<br />
Pol. luska « écaille » ; —• tch. lusk « cosse ».<br />
Slov. lûska « écaille » et lûsk « cosse » et « claquement » ; —<br />
s.-cr. ôdljusak « éclat qui se détache ».<br />
Verbe en -skati vraisemblablement sur le thème lup- (§ 756).<br />
Pol. szukac « chercher », oszukac et bl.-r. osukâc' « tromper,<br />
frauder » : bl.-r. osûka « tromperie ».<br />
Et pol. szuslac « passer rapidement » (onomatopée szust),<br />
oszuslaé « tromper » : oszust « fourbe ».<br />
Pol. luzyc « lessiver » : lug « lessive », plur. wylugi « déchets de<br />
lavage, dépôts non solubles ».<br />
Tch. louziti « lessiver, tanner » : louh « lessive » et « tanin »,<br />
composé kozeluh « tanneur ».<br />
Slov. lùg « lessive », s.-cr. lûg, bulg. lûgâ.<br />
Emprunt à l'allemand Lauge « cendre » et « lessivage », laugen<br />
« lessiver ».
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 123<br />
sluzili « servir » :<br />
V. si. sluga « serviteur », masc.<br />
R. slugâ, poslûga « service », zaslûga « mérite », et doslûga, na-,<br />
ot-, pod-, pri-, pro-, u-, vi/sluga.<br />
Pol. sluga, obsluga, po-, u-, za-, vy-,<br />
Tch. slouha « pâtre » et sluha « serviteur », posluha, usluha,<br />
zâsluha.<br />
S.-cr. sluga ; pôsluga, usluga « service », zâsluga « mérite » sont<br />
récents et pris au russe, et odsluga est un calque de l'allemand<br />
Gegendienst « fait de rendre la pareille ».<br />
Slov. slûga, oslûga et obslûga « célébration d'une fête », uslûga<br />
(du russe), odslûga « service en retour », zaslûga « mérite », et<br />
masc. ôdsluz, zdsluê (§ 824).<br />
Le lituanien a dialectalement, en zemaïtique, slaugyli « aider »,<br />
slaugà « service », pâslauga « aide », mais ces mots doivent être<br />
adaptés du slave. Le mot de base est sluga, et la comparaison se<br />
réduit à l'irlandais sluag « troupe, compagnie » : rapprochement<br />
peu sûr, et il est tentant de voir dans sluga une formation proprement<br />
slave à suffixe -ga sur le thème slu- «écouter» (§ 1010).<br />
njuxati «flairer» (§ 557) :<br />
R. njux « flair », et masc. njuxa « badaud » ; ponjux « prise de<br />
tabac », donjùx, ob-, pere-, pro-, raz-, vfinjux.<br />
Pol. niuchac « priser » : niuch « prise de tabac », et niucha « nez ».<br />
Tch. dial. et slovaque nuch et s.-cr. njûh « flair ».<br />
puxati :<br />
R. puxdt' « s'enfler, se gonfler » : pux « duvet », pripux « enflure,<br />
gonflement », opûx, vspux ; — et pusit' « garnir de duvet, de<br />
fourrure » : opûxa (et ôpus') « bordure, garniture (de fourrure) ».<br />
Pol. puchnqc, puszyc siç « s'enfler » : puch « duvet » et « exhalaison,<br />
souffle, odeur », opuch «enflure», dial. spuch «homme enflé (par<br />
la boisson) », et pucha « visage bouffi », opucha « bordure, garniture<br />
(d'un vêtement) ».<br />
Tch. puchati « souffler » : puch « odeur (mauvaise) ».<br />
S.-cr. pùhati «souffler», pusili « fumer » : pMa «pustule»,<br />
ispuh « (tuyau d') échappement », pràpuh « courant d'air », zâpuh<br />
« congère ».<br />
Slov. pûhali «souffler fortement» : pûh «souffle» et «duvet»,<br />
ispûh « exhalaison », spûh « enflure », napùh « enflure, orgueil »,<br />
propûh et prepûh « courant d'air ».<br />
Et slov. prepih de pyxati, voir § 802. On a deux formations<br />
parallèles, en pyx-, et en bux- : j
124 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Slov. (iz-)bûhnili « s'enfler », bûhati « faire pouf » : bûh « un bruit,<br />
un pouf », izbûh « saillant », obûh « battoir ».<br />
Pol. buchac « jaillir » : buch « pouf », onomatopée, et wybuch<br />
« explosion » ; — tch. bouchati « pousser avec bruit » : vybuch<br />
« explosion ».<br />
R. buxat' « jeter avec bruit » : bux, onomatopée, et bux « rapidité<br />
du courant ».<br />
Racine *bus-, *bous-, voir bystrù «rapide», § 1112.<br />
Et var. brux- dans :<br />
R. bruxât « jeter ».<br />
Slov. (iz-)brûhnili « éclater » : izbrûh « éruption ».<br />
§ 760. — R. dûmat' « penser » : dûma « pensée » et « conseil »<br />
(et v. r., depuis le xn e siècle), nadûma, ob-, raz-, za-, et vydum.<br />
Pol. dumac « rêver » : duma « rêverie, orgueil », et « conseil »<br />
(du russe), « poème, élégie » (de l'ukrainien dûma) ; zaduma« rêverie »<br />
et v. pol. zadum.<br />
Bulg. duma- « parler » : dûma « parole, mot ».<br />
Sans doute postverbal duma d'une forme contracte de do-umëti<br />
(§81).<br />
Y. si. glumiti sg « plaisanter » : glumû « plaisanterie, jeu ».<br />
R. glum, poglùm, oglûm « hébétement » ; — pol. gium ; — slov.<br />
glùm et glûma.<br />
S.-cr. glûmili « jouer une pièce » : glûma « pièce, comédie »,<br />
rarement glum.<br />
V. tch. hluma « histrion, jongleur », emprunt au croate. Le mot<br />
de base est glumû (§ 1066).<br />
Tch. koumaii «méditer», zkoumali «examiner» : kouma (dial.),<br />
zkum, prozkum, vijskum « exploration, découverte ».<br />
Verbe proprement tchèque, qui s'est étendu au polonais et au<br />
blanc-russe. Emprunt au germanique : v. h. a. kauma « attention »,<br />
goumen « faire attention, surveiller », got. gaumjan « observer ».<br />
V. si. sumû « grand bruit, agitation », adj. sumïnû « agité (par<br />
l'ivresse) ».<br />
R. sum, masc. sûma « homme bruyant ».<br />
Pol. szum et dial. szuma, poszum, zaszum, et wyszum de wyszumiac<br />
« cesser de fermenter, se désenivrer ».<br />
S.-cr. sûm, et sûma « bois-taillis, forêt basse » ; — slov. sâm,<br />
posûm « bruit », sûma « taillis, forêt ».<br />
Base sumû, sans doute dérivé en -mû (§ 1066) de la racine<br />
balto-slave *seu-, lit. sduti «pousser», si. sovati «lancer» (§ 469),<br />
qu'on peut retrouver avec un autre élargissement dans lit. siaûsti
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 125<br />
«se déchaîner », voir sçtati ( sç) «s'agiter», § 808, et sutu «bouffon»,<br />
§ 1161.<br />
Tch. tlumiti « étouffer », uilumiti : tlum « foule », ûllum.<br />
Emprunt au polonais tium « foule », ttumic, isolé, avec llu- de<br />
*tïl- ou de *tul- (§ 74). Rattachement possible à v. si. llupa « foule »<br />
(§ 810), et contamination avec tomiti «accabler» (§ 734) d'après<br />
la variante v. pol. tiomic.<br />
V. si. umëti « savoir faire » : umu « intelligence », composé<br />
xudoumû «faible d'esprit», adj., razumu «discernement».<br />
R. um, neûm, nedoum, râzum, vrazûm, nedorôzum ; sûma de<br />
sumét'.<br />
Pol. um (v. pol.), rozum, wyrozum ; — tch. um, rozum.<br />
Slov. um (ùm), izûm, razûm, porazûm.<br />
S.-cr. ûm, ràzum, ïzum « invention », nàum « intention » et aiicien<br />
nauma ; spôrazûm « accord, entente », création nouvelle.<br />
Base umu, avec correspondance dans lit. aumuô « intelligence » :<br />
donc dérivé en si. -mû et en lit. -men- (§ 184) sur un thème audevenu<br />
obscur.<br />
Et voir ci-dessus dum-.<br />
R. mulit' « frotter, blesser » et « remuer, troubler un liquide » :<br />
(mul' « eau trouble », fém.), ndmul « limon ».<br />
Pol. mulic « envaser » : mul « limon », namui, zamul.<br />
Slovaque mûl et mula, namul ; —- slov. et s.-cr. mûlj « sable fin,<br />
limon ».<br />
On compare à lit. mùlti « devenir sale », muîvê « marais », adj.<br />
mulvas « rougeâtre, couleur de limon », mulvyti « couvrir de limon ».<br />
On ne peut guère penser à des formes dérivées du thème réduit<br />
mul-, qui n'est attesté nettement que par le factitif v. lit. sumuldyti<br />
«broyer» (§ 535), de la racine mel- dont les postverbaux sont en<br />
slave en -mol (§ 727) ; toutefois, on a aussi en baltique lit. môlis<br />
« limon », lette mais, sur cette racine, lit. mdlti.<br />
Y. si. sulili si « se trop flatter, s'enfler d'orgueil » (Éphrem), slavon<br />
posulili « être favorable », v. r. (po-)sulili « promettre » :<br />
R. sullt' « promettre » : posûl « promesse », plur. posuly « cadeaux,<br />
pot-de-vin » (dès le xiy e siècle) ; nasûl, zasûl, nedosûl « promesse<br />
insuffisante » et peresûl « fait de trop promettre ».<br />
ukr. posula ; pol. posul et posula « pot-de-vin », de l'ukrainien.<br />
Le verbe sulW est limité au groupe russe, ukrainien, blancrusse,<br />
mais le thème est ancien, et par le comparatif v. si. sulëi<br />
« meilleur » il pourrait se rattacher au nom du « soleil » (§ 290).<br />
V. si. tulu « carquois », r. tul, s.-cr. tûl, etc. :<br />
R. luliï « couvrir, mettre à l'abri » : pritul « lieu de refuge »,<br />
rrAfiil i\iii1 tw'TJT»/
126 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. (przy-jtulic « presser (contre sa poitrine) » : przytui ; et<br />
tulic « apaiser », avec confusion (depuis le xvi e siècle) de tuliti et<br />
toliti « calmer » : pol. ancien .potui dans dac siç w potul « s'assouplir,<br />
devenir accommodant ».<br />
(S.-cr. tûliti « éteindre, étouffer le feu », slov. tuliti « serrer contre,<br />
enrouler »).<br />
Sans étymologie sûre, et lulu « carquois » peut être le postverbal<br />
de tuliti, ou tuliti le dénominatif de lulu.<br />
V. si. xuliti « blasphémer » : xula « blasphème », et slavon poxula.<br />
R. xulit' « blâmer » : xula et xul, doxûl, o-, po-, pere-, ras-, vos-,<br />
za-, vyxul.<br />
S.-cr. hùla ; — bulg. hûla.<br />
Le verbe xuliti, sans rapport avec *xulili «courber» (§ 757),<br />
est sûrement un emprunt au germanique : v. h. a. huolen « décevoir »<br />
(de *hôljan), got. hôlôn « calomnier ».<br />
S.-cr. bûniti « exciter à la révolte, soulever » : bûna « émeute,<br />
révolte», pbbuna, ûzbuna ; zâbuna (zabûna) «trouble, confusion».<br />
Bulg. bùni- : bûna, zabûna « trouble ».<br />
Seulement serbo-croate (depuis Je xvi e siècle) et bulgare, et en<br />
bulgare sans doute par emprunt au serbo-croate.<br />
Un rattachement au russe dialectal bûnit' « résonner (d'un son<br />
sourd) », qui n'est que russe et ukrainien, ne peut pas être justifié<br />
par s.-cr. zâbun, connu par un seul exemple de Vuk Karadzic<br />
qui l'interprète, sûrement à tort, par « murmure, bruissement ».<br />
On doit penser à un dérivé en -na (§ 1076) du thème bux- (§ 759)<br />
de s.-cr. nàbuhnuti « s'enfler », avec la réduction ancienne du groupe<br />
xn à n (§ 39), comme sans doute dans r. kornùt' (§ 814) et s.-cr.<br />
trûn{§ 1073).<br />
Une certaine influence n'est pas exclue de l'emprunt pol. bunt<br />
« union », au xvii e siècle « sédition, révolte », r. bunt (xvn e s., du<br />
polonais), s.-cr. récent bunt (du russe), et bûnta comme bûna.<br />
R. durit' « faire des sottises » : (dur', ôdur', pridur') et pridur<br />
« caprice ».<br />
Pol. durzyc : dur et odur « étourdissement ».<br />
Slov. duriti « détester » : odûra « détestation, dégoût ».<br />
Sur thème dur- (§ 1113).<br />
V. si. iz-nuriti « dépouiller, piller », r. (po-)nûrit' « baisser la tête »<br />
(§614) :<br />
R. ponûryj « penché, abattu », adj., masc. nûra « homme morne »,<br />
ponûra « qui marche tête basse ».<br />
Pol. ponury « morne, sombre ».<br />
Cette racine apparaît en rapport, mais peu clair, avec la racine<br />
nyr- (§ 802).
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 127<br />
R. xmûrit'(sja) «(se) renfrogner» : xmûryj «sombre», adj.,<br />
xmûra « nuage sombre », naxmûra, poxmûra ; et pâsmur et pâsmûra<br />
« homme morose », adj. pàsmurnyj « sombre » (§ 1220).<br />
Pol. et tch. chmura « nuage ».<br />
V. si. ob-uje-, -uti « chausser », imperf. dérivé -uvati : (obuvï<br />
« chaussure », § 714).<br />
(R. ôbuv') ; -—- pol. ancien obuw, masc. (et fém., mod. obuwie) ;<br />
— tch. obuv, masc., populaire, pour fém. obuv (et obuj) ; — slov.<br />
obûva (et fém. obûv).<br />
Slovaque cuv, tch, civ et civa « nerf », création récente sur tch.<br />
citi « sentir », slovaque eut', sur un thème cuv- qui est celui de<br />
l'itératif cuvati des autres langues (§ 523), et de l'élargissement<br />
cuv- dans v. si. cuvïstvo, r. cuvstvo « sens, sensation ».<br />
V. si. sovati « lancer », perfectif sunçti, imperf. dérivé -suvati ;<br />
postverbaux en -sou (§ 743), et sur le thème suv- :<br />
Pol. posuw « poussée », podsuw « substitution », usuw « action<br />
d'éloigner, four où le verre se refroidit » ; przesuw « passage à<br />
travers » et przesuwa « ce qu'on glisse en travers, pédale de<br />
piano, etc. », zasuwa « verrou », wsuwa de wsuwac « s'en fourrer<br />
(dans la bouche), manger ».<br />
Slov. zasûva « verrou ».<br />
Sur le thème suri- (§ 824) :<br />
Tch. posun « déplacement, geste », pr'isun « arrivage (de marchandises)<br />
».<br />
Slov. sûn « coup », sur sûniti « donner un coup » ; — s.-cr. zdsun<br />
« verrou » est régional croate.<br />
§ 761. Formations diverses. — Pol. nur «blaireau», nura<br />
«terrier», ponur et ponura, représentent nôr, etc., sur ner-, et pol.<br />
dziura « trou » et ancien dura représentent dora et dziôra, sur der-<br />
(§ 728).<br />
Pour l'extension de -uv dans r. kljuv « bec » à côté de klêv (et de<br />
kljun), voir § 809 ; et dans r. vyduv pour v. si. -dûmù, § 815.<br />
Le mot juxa «soupe» continue un ancien athématique (§ 708),<br />
et sans doute aussi muxa « mouche » (§ 175). De juxa d'intonation<br />
douce, s.-cr. jùha, r. uxâ, le lituanien jusê diffère par le vocalisme<br />
radical -û et l'intonation rude : ce sont deux dérivés de l'athématique<br />
neutre skr. yuh, lat. iûs, gén. iûris, et le mot slave doit avoir<br />
été un oxyton d'intonation rude donnant une intonation douce<br />
(§522), avec alternance vocalique *yus- : *yôus-.<br />
Avec muxa, c'est l'intonation rude que l'on trouve : s.-cr. muha,<br />
r. muxa, avec diminutif mûsica. Le baltique a lit. muse, lette musa,<br />
mais aussi lette mùsa. Les formes verbales dont muxa pourrait
128 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
être le postverbal ne manquent pas : bulg. mûha- et màsi- « piquer »,<br />
slavon muxati se « s'agiter », s.-cr. mùhati s g « se défendre des mouches<br />
» et « fourrer son nez partout », slov. musiti se « tourner autour,<br />
faire la cour ».<br />
V. si. tuku « graisse », r. tuk, s.-cr. cak. tûk, est un dérivé nominal<br />
en -ku (§ 1037) de la racine de tyti « s'engraisser », mais qui prend<br />
l'aspect d'un postverbal dans lit. tâukas « (morceau de) graisse »<br />
en regard du verbe tunkù, tùkti (§ 519).<br />
Il n'y a pas de raison en slave de considérer comme un postverbal<br />
v. si. udu « membre », r. ud, etc. (§ 191) ; mais si le mot se<br />
rattache à lit. âudziu, âusti « tisser », on a un postverbal dans lit.<br />
ataudal, plur., « trame ».<br />
Le mot suivant apparaît isolé : v. si. strupu « blessure », mais<br />
au sens de « meurtrissure », et l'adjectif strupivu traduit « lépreux »<br />
( § 995) ; r. strup « croûte, escarre », tch. strup « teigne », s.-cr.<br />
strûp « croûtes, dartres », et slov. strûp « poison » au sens d'« empoisonnement<br />
du sang », en regard de ostrupiti « empoisonner » qui est<br />
le slavon ostrupiti « couvrir de meurtrissures, de croûtes ». Une<br />
comparaison s'impose avec lit. nu-krùpçs « couvert de croûtes »,<br />
lette kr'aupa « escarre », dont le correspondant en slave est krupa<br />
«miette, gruau, etc. » (§ 756). On a alors un nouvel exemple de<br />
variante k : s, comme dans kroiti et stroiti (§ 608) : la variante kétait<br />
celle de formes à préverbe (§ 12) comme r. raskrupit', pol.<br />
skrupic de *jïs-, r. iskrupit', vykrupit'.
CHAPITRE VII<br />
VOCALISME RADICAL -g-<br />
§ 762. Alternances claires. — Trçsli « secouer », imperf. dérivé<br />
-trçsati, itératif trçsiti :<br />
V. si. trçsu « tremblement (de terre) ».<br />
R. trus « trembleur, poltron », pôtrus « farceur » et potrûs « secousse,<br />
trouble », otrûs, ottrûs, zatrûs.<br />
Tch. trus « fiente », sirus « poltron », et vytrus « spore » (savant,<br />
xix e s.), sur vytrousiti «répandre en secouant».<br />
Slov. trçs « tremblement (de terre) » et « spore », potros sur<br />
potrçsiti « verser » ; — s.-cr. trûs « tremblement de terre », rarement<br />
pôlrus.<br />
Sur le thème trçs- :<br />
R. potrjds, otrjâs, ottrjâs.<br />
Pol. potrzqs.<br />
Tch. très « tremblement », nâtres, otres, potres «action de secouer»,<br />
et sur -trâsati : otras, potras « épouvante », composé zemëtras<br />
« tremblement de terre » pour l'usuel zemëtfesenî.<br />
Slov. trçs, poirés « tremblement », otres « secouement ».<br />
S.-cr. très et pâtres « secousse » ; zëmljotrës, adaptation de r.<br />
zemletrjasénie (§ 825).<br />
En russe, trjaxât', réfection de trjasât' (cf. § 111), perf. trjaxnût',<br />
et sur le thème trjax- : otrjàx, ottrjâx, vytrjax ; et var. zâtrux de<br />
zatrûs sur zalrusit' « remplir en secouant », se rencontrant: avec<br />
le thème trçx- (§ 765).<br />
(Po-)grçznçti «s'enfoncer (dans l'eau)», factitif (po-)grçziti :<br />
R. gruzii' « enfoncer » et « charger (un bateau) », gruz « poids,<br />
charge d'un bateau, fret » et grûza, dogrûz et dogrûza, nagrùz,<br />
o-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, raz-, s-, vygruz.<br />
Pol. grqz « boue profonde, marécage ».
130 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Tch. ancien et dial. hrouz « goujon » (ail. Grundel, poisson de<br />
fond).<br />
S.-cr. ancien gruz « chute », de gruznuti « se précipiter ».<br />
Sur le thème grçz- :<br />
V. si. grçza « boue ».<br />
R. (grjaz' « boue », rôzgrjaz', § 713).<br />
Tch. hriz « goujon », vyhrez « hernie » sur vyhreznouti « faire<br />
saillie ».<br />
Slov. grçz « limon, marais » et gréza (et fém. grêz), pogrèz « action<br />
de s'enfoncer », zagrÇza « boue profonde ».<br />
Vçze-, vçsti « tresser », vçze-, vqzali « lier » :<br />
Y. si. çza «lien» et su(v)çzu, pri(v)çzu (Éphrem) et privçza<br />
(Virg.), obçzu et slavon naçzu «lien magique, amulette ».<br />
R. ûza « lien » (plur. ûzy) et uzâ « propolis des abeilles » ; nduz<br />
et nâuza et verbe nâiizit' « ensorceler » ; priûz et pri(v)uza, obûza<br />
« charge, embarras », zaùza « rayon de miel superposé » ; et sojuz,<br />
ancien soûz, « union, alliance ».<br />
Pol. wqz et wqza, powqz et pawqz (§ 1220) «perche pour tenir<br />
le foin », v. pol. nawqz « amulette », composé motowqz « lien de<br />
l'écheveau sur le dévidoir» (§ 1215).<br />
Tch. pafvjuz et pa(v)uza, v. tch. nâvuz, motovûz, mod. motouz<br />
« lien ».<br />
Slov. vgza, povàz et povôza, prevQz et pre(v)çza, privçza.<br />
S.-cr. ûza, pouz, prïuza (priuza).<br />
La forme v. si. sû(v)çzu est nouvelle pour sun-çz- (§ 83), qu'on a<br />
sûrement dans le dérivé v. si. sûnuzïnu. «monté en char» (§ 65),<br />
donc au sens d'« attelage ». Ce doublet -çz- : -uz- doit montrer que<br />
la dénasalisation de g en u a bien une origine phonétique, même<br />
s'il s'agit dans une partie des cas de la possibilité d'un flottement<br />
morphologique (§ 444).<br />
Sur le thème vçz- :<br />
V. si. sûvçzu (Gr. Naz.), comme fém. suvçzï ( § 714).<br />
R. navjâz, nad-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pro-, raz-, vyvjaz ;<br />
svjâza « entrave », privjdz et privjâza (et fém. vjaz' « lien », svjaz'<br />
« lien, joint », ôbvjaz', pô-, pôd-, pére-, pri-, prô-, vy-, zâ-, composé<br />
motovjaz' « tortis »).<br />
Pol. wiqz « lien » et « orme », et wiqza, zwiqz et zwiqza, nawiqz,<br />
po-, prze-, roz-, u-, molowiqz.<br />
Tch. vaz « tendon » et « ormeau », ndvaz, ob-, pod-, pre-, s-, û-,<br />
zâ- ; et provaz pour povraz « lien » (§ 770).<br />
Slov. v çz, odvèz et odvéza, navçza, pre-, pri-, za-, podvèz et podvçza<br />
(et fém. vçz, obçz, povçz, pod-, pre-, za-).<br />
S.-cr. vêz « broderie » sur vésti « broder », et sur vézati : vêz « orme »
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 131<br />
et vëza « lien », pôvez « bandage, reliure » et ùvez, sâvez « alliance »<br />
(adapté de r. sojuz), svëz (dial.) et svëza« lien », pôdveza « jarretière »,<br />
ôbveza « engagement, obligation ».<br />
V. si. krçnçti et krçtali «mouvoir, déplacer» (J. Ex.), krçtiti sç<br />
«se tourner, s'incliner» (Gr. Naz.), ukrçtiti sç (Izb. Svjat.) «se<br />
détacher » ; v. r. okrutiti sja « se vêtir » :<br />
Slavon (ukrçtï « éboulis ») ; v. r. krutû « raide, escarpé », adj.<br />
R. krutit' «tordre» et pop. «pousser» : krutôj, adj., «trop tordu,<br />
raide, escarpé » ; krulâ « monture d'icône » et « vêtement » ; dôkrut<br />
de dokrutit' « achever de tordre », nâ-, pô-, pôd-, vy-, okrût, ol-,<br />
pere-, pri-, ras-, s-, u-, za- ; et fém. zakrûla « garrot », o-, ot-, po-,<br />
po-, pere- (et pérekrul'), pri-, ras-, s-, u-,<br />
Pol. krçty « tortueux », krçt « tortillement », skret « tour », zakrçt<br />
« détour », wykrçl « faux-fuyant », et okrçt « vaisseau », pol. ancien<br />
pokrçta « sorte de pâtisserie ».<br />
Tch. kruty « rude, cruel », krai « torsion », zâkrut « tournant »,<br />
vykrut « excuse, faux-fuyant », et v. tch. pokruia « galette ».<br />
Slov. krçt « violent » ; —- s.-cr. krût « raide » ; cak. okrui « récipient<br />
de bois, vase » (cf. pol. okrçt « vaisseau ») ; ôkrul et okruta « vêtement<br />
d'église » est r. okruta « vêtement ».<br />
Sur le thème krçt- :<br />
R. dial. nakrjâl « provisions », sur nakrjâtat' « entasser ».<br />
Pol. krzçt « tour », skrzçla « diligence ».<br />
Slov. krçt « mouvement » et krçta « gouvernail », nakrçta « obstacle »,<br />
okrèt « action de tourner », po-, pre-, zakrèt et zaokrèt.<br />
S.-cr. ôkrêt, pôkrët, prëkrêl et prëokrêt, zâkrët et zàokrët.<br />
Il y a accord pour l'intonation entre r. krutit' et s.-cr. krûtiti,<br />
slov. krotiti, mais désaccord entre r. krjâtat', krjânut' et s.-cr.<br />
krétati, krénuti, slov. kreniti, krçlati (prés, krçta-, § 672) ; la flexion<br />
s.-cr. krétati, prés, krêcë-, doit indiquer un vocalisme radical e,<br />
*krent-, de présent en -je- (§ 548), en regard d'un perfectif en -nçti<br />
à vocalisme réduit, *krint-, ou du type à allongement vocalique<br />
(§496).<br />
Le thème krçt- est la forme à infixé nasal généralisé (§ 450),<br />
sur la base de *krçt-nçti, de la racine kret- qu'on a en baltique dans<br />
lit. kreciù, krêsti (§ 546) « secouer », itér. kratyti, postverbal kratà<br />
« secouement, secousses », dérivé kratëklis « grand crible ». Le<br />
sanskrit a erlâti « il lie » et krnâtti « il file, tord le fil », plur. krntânti.<br />
Les sens apparaissent diversement évolués ; un rapport ancien<br />
avec le tissage peut être indiqué par le dérivé si. krosno (§ 1074),<br />
si on y retrouve *krot-, comme *kret- dans kresati « battre le briquet »<br />
(§804).<br />
En baltique, lit. krantas « rive escarpée », et lette krahls (emprunt
126 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. (przy-)lulic «presser (contre sa poitrine) » : przytul ; et<br />
tulic « apaiser », avec confusion (depuis le xvi e siècle) de tuliti et<br />
toliti « calmer » : pol. ancien potui dans dac siç w potul « s'assouplir,<br />
devenir accommodant ».<br />
(S.-cr. tuliti « éteindre, étouffer le feu », slov. tuliti « serrer contre,<br />
enrouler »).<br />
Sans étymologie sûre, et lulu « carquois » peut être le postverbal<br />
de tuliti, ou tuliti le dénominatif de tulu.<br />
V. si. xuliti « blasphémer » : xula « blasphème », et slavon poxula.<br />
R. xulit' « blâmer » : xula et xul, doxûl, o-, po-, pere-, ras-, vos-,<br />
za-, vyxul.<br />
S.-cr. hMa ; — bulg. hûla.<br />
Le verbe xuliti, sans rapport avec * xuliti «courber» (§ 757),<br />
est sûrement un emprunt au germanique : v. h. a. huolen « décevoir »<br />
(de *hôljan), got. hôlôn « calomnier ».<br />
S.-cr. bûniti « exciter à la révolte, soulever » : bûna « émeute,<br />
révolte », pobuna, ùzbuna ; zâbuna (zabûna) « trouble, confusion ».<br />
Bulg. bùni- : bûna, zabûna « trouble ».<br />
Seulement serbo-croate (depuis le xvi e siècle) et bulgare, et en<br />
bulgare sans doute par emprunt au serbo-croate.<br />
Un rattachement au russe dialectal bûnit' «résonner (d'un son<br />
sourd) », qui n'est que russe et ukrainien, ne peut pas être justifié<br />
par s.-cr. zdbun, connu par un seul exemple de Vuk Karadzic<br />
qui l'interprète, sûrement à tort, par « murmure, bruissement ».<br />
On doit penser à un dérivé en -na (§ 1076) du thème bux- (§ 759)<br />
de s.-cr. nàbuhnuti « s'enfler », avec la réduction ancienne du groupe<br />
xn à n (§ 39), comme sans doute dans r. kornùl' (§ 814) et s.-cr.<br />
?r«n(§ 1073).<br />
Une certaine influence n'est pas exclue de l'emprunt pol. bunt<br />
« union », au xvn e siècle « sédition, révolte », r. bunt (xvn e s., du<br />
polonais), s.-cr. récent bîmt (du russe), et bûnta comme bûna.<br />
R. durit' « faire des sottises » : (dur', ôdur', pridur') et prldur<br />
« caprice ».<br />
Pol. durzyc : dur et odur « étourdissement ».<br />
Slov. duriti « détester » : odûra « détestation, dégoût ».<br />
Sur thème dur- (§ 1113).<br />
V. si. iz-nurili « dépouiller, piller », r. (po-)nûrit' « baisser la tête »<br />
(§614) :<br />
R. ponûryj « penché, abattu », adj., masc. nûra « homme morne »,<br />
ponûra « qui marche tête basse ».<br />
Pol. ponury « morne, sombre ».<br />
Cette racine apparaît en rapport, mais peu clair, avec la racine<br />
nyr- (§ 802).
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 127<br />
R. xmùrit'(sja) «(se) renfrogner» : xmûryj «sombre», adj.,<br />
xmûra « nuage sombre », naxmàra, poxmûra ; et pâsmur et pâsmûra<br />
« homme morose », adj. pâsmurnyj « sombre »•(§ 1220).<br />
Pol. et tch. chmura « nuage ».<br />
V. si. ob-uje-, -uti « chausser », imperf. dérivé -uvati : (obuvï<br />
« chaussure », § 714).<br />
(R. obuv') ; — pol. ancien obuw, masc. (et fém., mod. obuwie) ;<br />
—• tch. obuv, masc., populaire pour fém. obuv (et obuj) ; — slov.<br />
obûva (et fém. obûv).<br />
Slovaque ëuv, tch, civ et ëiva « nerf », création récente sur tch.<br />
ciïi « sentir », slovaque ëut', sur un thème ëuv- qui est celui de<br />
l'itératif ëuvati des autres langues (§ 523), et de l'élargissement<br />
cuv- dans v. si. cuvïstvo, r. cûvsivo « sens, sensation ».<br />
V. si. sovati «lancer», perfectif sunçti, imperf. dérivé -suvati ;<br />
postverbaux en -sov (§ 743), et sur le thème suv- :<br />
Pol. posuw « poussée », podsuw « substitution », usuw « action<br />
d'éloigner, four où le verre se refroidit » ; przesuw « passage à<br />
travers » et przesuwa « ce qu'on glisse en travers, pédale de<br />
piano, etc. », zasuwa « verrou », wsuwa de wsuwac « s'en fourrer<br />
(dans la bouche), manger ».<br />
Slov. zasûva « verrou ».<br />
Sur le thème sun- ( § 824) :<br />
Tch. posun « déplacement, geste », prisun « arrivage (de marchandises)<br />
».<br />
Slov. sûn « coup », sur sàniti « donner un coup » ; —• s.-cr. zâsun<br />
« verrou » est régional croate.<br />
§ 761. Formations diverses. — Pol. nur «blaireau», nura<br />
«terrier», ponur et ponurà, représentent nôr, etc., sur ner-, et pol.<br />
dziura « trou » et ancien dura représentent dora et dziôra, sur der-<br />
(§ 728).<br />
Pour l'extension de -uv dans r. kljuv « bec » à côté de klëv (et de<br />
kljun), voir § 809 ; et dans r. vijduv pour v. si. -dumu, § 815.<br />
Le mot juxa «soupe» continue un ancien athématique (§ 708),<br />
et sans doute aussi muxa « mouche » (§ 175). De juxa d'intonation<br />
douce, s.-cr. jûha, r. uxâ, le lituanien jûsè diffère par le vocalisme<br />
radical -Ci et l'intonation rude : ce sont deux dérivés de l'athématique<br />
neutre skr. yuh, lat. iùs, gén. iûris, et le mot slave doit avoir<br />
été un oxyton d'intonation rude donnant une intonation douce<br />
(§ 522), avec alternance vocâlique *yus- : *yôus-.<br />
Avec muxa, c'est l'intonation rude que l'on trouve : s.-cr. mùha,<br />
r. muxa, avec diminutif mùsica. Le baltique a lit. muse, lette musa,<br />
mais aussi lette mûsa. Les formes verbales dont muxa pourrait
128 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
être le postverbal ne manquent pas : bulg. mûha- et mûëi- « piquer »,<br />
slavon muxati sç « s'agiter », s.-cr. mMiaii sç « se défendre des mouches<br />
» et « fourrer son nez partout », slov. mûsiti se « tourner autour,<br />
faire la cour ».<br />
V. si. tuku « graisse », r. tuk, s.-cr. cak. tûk, est un dérivé nominal<br />
en -ku (§ 1037) de la racine de tyti « s'engraisser », mais qui prend<br />
l'aspect d'un postverbal dans lit. tâukas « (morceau de) graisse »<br />
en regard du verbe tunkù, tùkii (§ 519).<br />
Il n'y a pas de raison en slave de considérer comme un postverbal<br />
v. si. udu, « membre », r. ud, etc. (§ 191) ; mais si le mot se<br />
rattache à lit. dudziu, âusti « tisser », on a un postverbal dans lit.<br />
ataudal, plur., « trame ».<br />
Le mot suivant apparaît isolé : v. si. strupu « blessure », mais<br />
au sens de « meurtrissure », et l'adjectif strupivu traduit « lépreux »<br />
( § 995) ; r. strup « croûte, escarre », tch. strup « teigne », s.-cr.<br />
sirûp « croûtes, dartres », et slov. strûp « poison » au sens d'« empoisonnement<br />
du sang », en regard de ostrûpiti « empoisonner » qui est<br />
le slavon ostrûpiti « couvrir de meurtrissures, de croûtes ». Une<br />
comparaison s'impose avec lit. nu-krùpçs « couvert de croûtes »,<br />
lette kr'aupa « escarre », dont le correspondant en slave est krupa<br />
« mfttte, gruau, etc. » (§ 756). On a alors un nouvel exemple de<br />
variante k : s, comme dans kroiti et stroiti (§ 608) : la variante kétait<br />
celle de formes à préverbe (§ 12) comme r. raskruptt', pol.<br />
skrupic de *jïs-, r. iskrupît', vykrupit'.
CHAPITRE VII<br />
VOCALISME RADICAL -q-<br />
§ 762. Alternances' claires. — Trçsli « secouer », imperf. dérivé<br />
-trçsati, itératif trçsiti :<br />
Y. si. trçsu « tremblement (de terre) ».<br />
R. trus « trembleur, poltron », pôtrus « farceur » et poirés « secousse,<br />
trouble », otrus, ottrûs, zatrus.<br />
Tch. trus « fiente », strus « poltron », et vytrus « spore » (savant,<br />
xix e s.), sur vytrousiti « répandre en secouant ».<br />
Slov. trçs « tremblement (de terre) » et « spore », poiràs sur<br />
potrçsiti « verser » ; — s.-cr. trûs « tremblement de terre », rarement<br />
potrus.<br />
Sur le thème trçs- :<br />
R. potrjâs, otrjâs, oiirjds.<br />
Pol. potrzqs.<br />
Tch. très « tremblement », nâtres, otres, poires «action de secouer»,<br />
et sur -trâsali : alfas, polfas «épouvante», composé zemëtras<br />
« tremblement de terre » pour l'usuel zemëtreseni.<br />
Slov. trçs, potrës « tremblement », otres « secouement ».<br />
S.-cr. très et pâtres « secousse » ; zemljotrës, adaptation de r.<br />
zemletrjasénie (§ 825).<br />
En russe, trjaxât', réfection de trjasât' (cf. § 111), perf. trjaxnût',<br />
et sur le thème trjax- : otrjâx, ottrjâx, vylrjax ; et var. zâlrux de<br />
zatrus sur zatrusit' « remplir en secouant », se rencontrant avec<br />
le thème trçx- (§ 765).<br />
(Po-)grçznçti «s'enfoncer (dans l'eau)», factitif (po-)grgziti :<br />
R. gruzit' « enfoncer » et « charger (un bateau) », gruz « poids,<br />
charge d'un bateau, fret » et gruza, dogruz et dogrùza, nagrûz,<br />
o-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, raz-, s-, vygruz.<br />
Pol. grqz « boue profonde, marécage ».
130 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Tch. ancien et dial. hrouz « goujon » (ail. Grundel, poisson de<br />
fond).<br />
S.-cr. ancien grûz « chute », de gruznuti « se précipiter ».<br />
Sur le thème grqz- :<br />
V. si. grqza « boue ».<br />
R. (grjaz' « boue », rôzgrjaz', § 713).<br />
Tch. hriz « goujon », vyhrez « hernie » sur vyhreznouti « faire<br />
saillie ».<br />
Slov. grfz « limon, marais » et grg'za (et fém. grqz), pogrèz « action<br />
de s'enfoncer », zagrqza « boue profonde ».<br />
Fgze-, vqsti « tresser », ugze-, vqzali « lier » :<br />
Y. si. pza «lien» et sù(v)çzu, pri(v)çzu (Éphrem) et privçza<br />
(Virg.), obçzu et slavon naçzu « lien magique, amulette ».<br />
R. ûza « lien » (plur. ûzy) et uzâ « propolis des abeilles » ; nâuz<br />
et nâuza et verbe nâuzit' « ensorceler » ; priûz et prl(v)uza, obûza<br />
« charge, embarras », zaûza « rayon de miel superposé » ; et sojuz,<br />
ancien soûz, « union, alliance ».<br />
Pol. wqz et wqza, powqz et pawqz ( § 1220) « perche pour tenir<br />
le foin », v. pol. nawqz « amulette », composé motowqz « lien de<br />
l'écheveau sur le dévidoir» (§ 1215).<br />
Tch. pa(v)uz et pa(v)uza, v. tch. nâvuz, motovûz, mod. motouz<br />
« lien ».<br />
Slov. vçza, povdz et povôza, prevQz et prefv)çza, privçza.<br />
S.-cr. uza, pàuz, prluza (priuza).<br />
La forme v. si. su(v)çzû est nouvelle pour sun-çz- (§ 83), qu'on a<br />
sûrement dans le dérivé v. si. sunuzïnû «monté en char» (§ 65),<br />
donc au sens d'« attelage ». Ce doublet -çz- : -uz- doit montrer que<br />
la dénasalisation de ç en u a bien une origine phonétique, même<br />
s'il s'agit dans une partie des cas de la possibilité d'un flottement<br />
morphologique (§ 444).<br />
Sur le thème vqz- :<br />
V. si. sûvqzu (Gr. Naz.), comme fém. suvqzï (§ 714).<br />
R. navjdz, nad-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pro-, raz-, vyvjaz ;<br />
svjdza « entrave », privjdz et privjdza (et fém. vjaz' « lien », svjaz'<br />
« lien, joint », ôbvjaz', pô-, pôd-, pére-, pri-, prô-, vy-, zâ-, composé<br />
motovjaz' « tortis »).<br />
Pol. wiqz « lien » et « orme », et wiqza, zwiqz et zwiqza, nawiqz,<br />
po-, prze-, roz-, u-, motowiqz.<br />
Tch. vaz « tendon » et « ormeau », nâvaz, ob-, pod-, pre-, s-, û-,<br />
zâ- ; et provaz pour povraz « lien » ( § 770).<br />
Slov. vçz, odvèz et odvéza, navqza, pre-, pri-, za-, podvèz et podvçza<br />
(et fém. vçz, obçz, povçz, pod-, pre-, za-).<br />
S.-cr. vêz « broderie » sur vésti « broder », et sur vézati : vêz « orme »
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 131<br />
et vëza « lien », pôvez « bandage, reliure » et ùvez, savez « alliance »<br />
(adapté de r. sojûz), sv'èz (dial.) et svëza « lien », pddveza « jarretière »,<br />
obveza « engagement, obligation ».<br />
Y. si. krçnçti et krçtati « mouvoir, déplacer » (J. Ex.), krçtiti sç<br />
«se tourner, s'incliner» (Gr. Naz.), ukrçtiti sç (Izb. Svjat.) «se<br />
détacher » ; v. r. okrutiti sja « se vêtir » :<br />
Slavon (ukrçtï « éboulis ») ; v. r. krutû « raide, escarpé », adj.<br />
R. krutW «tordre» et pop. «pousser» : krutôj, adj., «trop tordu,<br />
raide, escarpé » ; krutâ « monture d'icône » et « vêtement » ; dôkrut<br />
de dokrutit' « achever de tordre », nâ-, pô-, pôd-, vy-, okrût, ot-,<br />
pere-, pri-, ras-, s-, u-, za- ; et fém. zakrûta « garrot », o-, ot-, po-,<br />
po-, pere- (et pérekrut'), pri-, ras-, s-, u-, ' •<br />
Pol. krçty « tortueux », krçt « tortillement », skrçt « tour », zakrçt<br />
« détour », wykrçt « faux-fuyant », et okrçt « vaisseau », pol. ancien<br />
pokrçta « sorte de pâtisserie ».<br />
Tch. krutij «rude, cruel», krut «torsion», zâkrul «tournant»,<br />
vykrut « excuse, faux-fuyant », et v. tch. pokruta « galette ».<br />
Slov. krçt « violent » ; —• s.-cr. krût « raide » ; cak. okrut « récipient<br />
de bois, vase » (cf. pol. okrçt « vaisseau ») ; okrût et okruta « vêtement<br />
d'église » est r. okrùta « vêtement ».<br />
Sur le thème krçt- :<br />
R. dial. nakrjât « provisions », sur nakrjâtat' « entasser ».<br />
Pol. krzçt « tour », skrzçta « diligence ».<br />
Slov. krçt « mouvement » et krçta « gouvernail », nakrçta « obstacle »,<br />
okrèt « action de tourner », po-, pre-, zakrèt et zaokrèt.<br />
S.-cr. ôkrët, pôkrët, prëkrêt et prëokrët, zâkrêt et zâokrët.<br />
Il y a accord pour l'intonation entre r. krutit' et s.-cr. krûtiti,<br />
slov. krotiti, mais désaccord entre r. krjâtat', krjânut' et s.-cr.<br />
krétati, krénuti, slov. kreniti, krçtati (près, krçta-, § 672) ; la flexion<br />
s.-cr. krétati, prés, krêcë-, doit indiquer un vocalisme radical e,<br />
*krent-, de présent en -je- (§ 548), en regard d'un perfectif en -nçti<br />
à vocalisme réduit, *krint-, ou du type à allongement vocalique<br />
(§496).<br />
Le thème krçt- est la forme à infixe nasal généralisé (§ 450),<br />
sur la base de *krçt-nçti, de la racine kret- qu'on a en baltique dans<br />
lit. kreciù, krësti (§ 546) « secouer », itér. kratyti, postverbal kratà<br />
« secouement, secousses », dérivé kratëktis « grand crible ». Le<br />
sanskrit a ertâti « il lie » et krnâtti « il file, tord le fil », plur. krntânti.<br />
Les sens apparaissent diversement évolués ; un rapport ancien<br />
avec le tissage peut être indiqué par le dérivé si. krosno (§ 1074),<br />
si on y retrouve *krot-, comme *kret- dans kresati « battre le briquet »<br />
(§804).<br />
En baltique, lit. krantas « rive escarpée », et lette krants (emprunt
132 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
à un dialecte conservant -an-, le « cure » disparu), ressemble trop<br />
à v. r. krutu « escarpé » pour qu'on ne suppose pas un vieil emprunt<br />
au slave *krantu.<br />
mçte-, mçsti « troubler, brouiller », itératif mgtiti :<br />
V. si. mgtu (J. Ex.) et vuzmgtû (Ham.) « trouble », slavon omgtu,<br />
sûmgtû.<br />
R. mut, ômut « tourbillon, endroit profond d'une rivière »,<br />
namàt, peremût, vzmut, smut et smûta, masc. zamûta « fauteur de<br />
trouble ».<br />
Pol. mçt « trouble, sédiment », odmçt, rozrnçl, zamçt « tourbillon,<br />
chaos », smçt « tristesse ».<br />
Tch. mut et rmut «dépôt, vase», zâ(r)mul «trouble, chagrin» ;<br />
kolomut et kolomuta « pêle-mêle », et v. tch. kormût qui suppose une<br />
altération précoce, dans un verbe expressif, de *kolomûliti en<br />
*kormûtiti, d'où rmut- (dès le xv e s.).<br />
Slov. mol, zamàl et zamgta « embrouillement », omàt et omgta<br />
« étourdissement, vertige », pomot et pomçta « trouble de l'esprit,<br />
erreur ».<br />
S.-cr. mût « trouble, dépôt, lie » (dial.), smûta « tourmente de<br />
neige ».<br />
Sur le thème mçt- :<br />
Tch. zmët « mélange, confusion » (et fém. zmët').<br />
blçde-, blçsti « s'égarer », itératif blgditi :<br />
V. si. blçdu «fornication» (fém. blçdï «égarement»).<br />
R. blud ; bl.-r. oblûd et oblùda « égarement ».<br />
Pol. blqd « erreur, faute », obiqd (oblçd) et zablqd « égarement » ;<br />
obiçda et usuellement obtuda « dissimulation, hypocrisie », voir<br />
§ 768 ; et masc. obiçda, przy-, za- « vagabond ».<br />
Tch. bloud « niais », blud « erreur », zâblud « errement ».<br />
Slov. blçd et blgda « erreur, faute », razblçda « volupté », zablàd<br />
et zablgda « égarement, erreur », zblod et zblgda « égarement, trouble,<br />
mélange », oblçda « mélange pour la nourriture des bêtes ».<br />
S.-cr. blûd « luxure », râzbluda « volupté », zàbluda « égarement »<br />
et ancien zablud.<br />
Et voir le problème de Igd-, lud-, § 768.<br />
Lit. blendziù, blçsli «dormir», blandyti-s (§ 430) : blandas<br />
« somnolence ».<br />
prç(djngti « se relever, bondir », imperf. prçdati :<br />
R. prud « étang, digue », pol. prqd et tch. proud « courant (d'eau) »,<br />
s.-cr. prûd « banc de sable » et slov. prgd.<br />
Et sur le thème prqd-, se rencontrant avec les postverbaux de<br />
prçsti « fder » ( § 808) :
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 133<br />
R. oiprjâd « rebondissement », sprjad.<br />
Lit. sprçsli «tendre, mesurer à l'empan» (§ 430) : sprândas<br />
« nuque » ; m. h. a. sprinzen « sauter, bondir » : spranz « bondissement<br />
».<br />
svçfdjnçti, smç(d)nçti « se dessécher, se roussir », factitif svçditi,<br />
smçditi (§ 494) :<br />
Pol. swqd « odeur de brûlé », dial. smqd.<br />
Tch. cmoud « fumée », sur cmouditi « fumer » (slovaque smudit',<br />
smudit') : par un croisement avec ëaditi, sur cad « fumée » (v. si.<br />
kaditi, § 615), qui a donné d'autre part za-couditi « enfumer »,<br />
variante de za-ëaditi, avec postverbal ëoud remplaçant ëad ; le<br />
croisement a pu se produire dans une forme à préverbe ' o(tJ-,<br />
oëadili et *ot-smçditi, qui se retrouverait dans v. pr. *at-codis<br />
(écrit accodis) « trou pour la fumée ».<br />
Slov. smqd « le brûlé, le roussi », et smçda ; nasmçd, osmàd et<br />
osmçda, zasmàd et zasmçda, prismod et masc. prismçda « homme<br />
à la tête brûlée » ; — s. cr. smûd.<br />
vç(d)nçti «se faner», factitif *vçditi «fumer (la viande)»<br />
(§ 498) :<br />
Slov. vçd« action de fumer » ; — et s.-cr. û do « morceau de viande »<br />
par contamination avec ûd « membre » (§ 191).<br />
Sur le thème vçd- :<br />
Pol. wiqd et uwiqd « consomption, marasme » ; et smiqd « démangeaison<br />
» en regard de swiçdziec « démanger », tch. svëdëti, qu'il<br />
n'y a pas de raison de rattacher à swçdzic « sentir le brûlé ».<br />
Les deux thèmes vçd- et svçd- sont bien distincts, mais ils sont<br />
si voisins qu'on peut penser que vçd-, isolé en slave, est une<br />
variante secondaire de svçd-.<br />
§ 763. — Zçbe- « déchirer » et « geler » (§ 432) :<br />
V. si. zçbu « dent », r. zub, s.-cr. zûb, etc.<br />
Sur le thème zçb- :<br />
S.-cr. nàzëb et nâzeba « refroidissement, rhume », cak. pôzêb ;<br />
— slov. nazçba, pozèb et pozçba.<br />
Le factitif est znobiti, avec postverbaux en znob- (§ 732).<br />
Lit. zembti « découper » : zambas « arête », et gr. you.
134 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
R. luk, ôblukv. rebord d'un chariot », ulûk« arceau d'un brancard »,<br />
priluk « bord de la courbe d'une rivière » ; lukâ « courbe d'une<br />
rivière, prairie dans la courbe » et « arçon de la selle » ; otlùka<br />
« éloignement » et razlûka « séparation », prilûka et zalûka « appât ».<br />
Pol. iek, obîqk « arceau », palqk « cintre » (§ 1220) ; tqka « prairie »,<br />
rozlqka « séparation », poiqka « réunion », et pol. ancien dolqka<br />
« puissance » sur dolqczyc « adjoindre ».<br />
Tch. luk, oblouk, palouk « prairie » et louka, odluka et rozluka<br />
« séparation », proluka « passe, dépression, bas-fond », vyluka<br />
« exclusion ».<br />
S.-cr. lûk, ôblûk (obluk), lûka «port» et «prairie près d'une<br />
rivière », ôdluka « décision », ancien razluka.<br />
Slov. Içk, oblçk, Içka « prairie (marécageuse), odlôk et odlçka<br />
« décision », razlàk et razlçka « séparation », zalçka « prairie à<br />
l'écart » ; et, sur izlçcili « séparer », masc. izlqc « classe » (§ 824).<br />
Sur le thème Iqk- :<br />
R. Ijâkij «recourbé», adj., Ijâka et pereljâka «chien(ne) à épine<br />
dorsale tordue ».<br />
Tch. kfivolaky « retors, perfide », krivolâk « homme retors, bâton<br />
recourbé ».<br />
Lit. lenkti « courber » (§ 434) : lankas « chose arrondie, arc, anse,<br />
cercle (de tonneau) », âtlankas, /lanka « baie », etc.<br />
mqknçti « s'amollir », factitif mçciti « tourmenter » (et lit. mlnkyti<br />
« pétrir ») :<br />
Sur le thème mçk-, deux sortes de postverbaux, avec une<br />
différence d'intonation (§ 498) :<br />
V. si. mçka « farine », r. mukâ, pol. mqka, tch. mouka, s.-cr.<br />
mûka, slov. mçka.<br />
Y. si. mçka « tourment, martyre ».<br />
R. mûka, peremuka, umûka, vymuka.<br />
Pol. mqka ; — tch. muka et v. tch. mûka.<br />
S.-cr. muka, et zâmuka « profit » de zàmuciti « gagner en peinant » ;<br />
— slov. mûka pour dial. mçka.<br />
De mqknçti, les postverbaux sont en mçk-, voir § 807.<br />
sçknçti « se tarir », factitif sçciti ( § 494) :<br />
Pol. sqczyc « faire suinter » : sqk « tuyau de drainage, sac à<br />
filtrer ».<br />
Sur le thème sqk- :<br />
Pol. przesiqk « tuyau de drainage » et przesiqk « produit de<br />
transsudation», wsiqk (wsiqk) «infiltration», wysiqk (wysiqk)<br />
«exsudât», et nasiqk (nasiqk) «stalagmite».
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 135<br />
S.-cr. o-séknuti « refluer » : ôsëk et ôseka « reflux » ; — slov.<br />
osèk et osêka « reflux », mais emprunt au croate, et pour sçk- par<br />
confusion avec sek- « couper » (§ 752).<br />
Un mot différent est v. si. sçkû « écharde » (§ 768).<br />
Y. si. zvçcati «résonner» (Pand. Ant.), perf. zvçknçli (§ 560) :<br />
zvçku « son » (Gr. Naz.), et slavon prozvçku « répercussion d'un<br />
son ».<br />
R. zvuk, otzvuk.<br />
Tch. zvuk, et dozvuk, ozvuk, zâzvuk, créés au xix e siècle.<br />
Slov. zvçk, odzvok ; — s.-cr. zvûk.<br />
Sur thème zvçk- :<br />
V. si. zvçku (J. Ex.) ; — r. zvjak « bruit » ; — pol. dzwiçk (v.<br />
pol. zwiçk) ; — slov. zvèk ; — s.-cr. zvêk et zvëka.<br />
-prçze- « (dé)tendre », prçziti (§ 435) :<br />
Y. si. prçgu «sauterelle», sçprçgu «attelage» (§ 1222), (fém.<br />
vuprçzï, poduprçzï, § 713).<br />
R. suprug «conjoint, époux» et suprûga «épouse» (§ 708);<br />
podprûga « sous-ventrière, sangle » et podprûg « action de serrer<br />
la sangle, podprûzit'»; oprûga et oprûg, dial. et bl.-r. uprùg « travail<br />
d'une traite»; adj. uprûgij «élastique» (§ 821).<br />
Pol. prçga « raie », et v. pol. prqg et prçga « pilori », mais par<br />
adaptation de l'allemand Pranger (mod. prçgierz) ; poprqg (poprçg)<br />
« sous-ventrière ».<br />
Tch. pruh et prouha « raie, bande », popruh « sangle », vzpruha<br />
« ressort ».<br />
Slov. prçga « raie », po(d)prog «sous-ventrière»; — s.-cr. prûg<br />
« sauterelle », prùga « raie », pàprug, pdiprûg et pôlpruga « sangle » ;<br />
sùprug « époux » et sùpruga « épouse », du russe ; et adj. prûg<br />
« allongé » (pruga zmija, le « serpent tortueux » de Job XXVI, 13).<br />
Bulg. prâg « cadre tendeur », pô(d)prâg « sangle ».<br />
Sur le thème prçg- :<br />
R. (za)prjagdt' «atteler» : dôprjag, nâ-, à-, pôd-, pri-, vy-,<br />
zâ-, oiprjâg, pere-, ras-, s-, v-, ûprjâg (et fém. uprjaz'), et nesprjâga<br />
« cheval qu'on n'attelle pas (avec un autre) ».<br />
Pol. poprzqg et poprzçga, sprzqg (sprzçg) «attelage» et ancien<br />
sprzçga, zaprzqg et zaprzqga (zaprzçga), przyprzqg «(cheval de)<br />
renfort ».<br />
Tch. prîprah « attelage' de renfort », spraha « lien de parenté »,<br />
slovaque zâprah « attelage » (et tch. zâprez, pripfez, s-, fém.).<br />
Slov. zaprèy « barre, verrou », pôpreg et podprèg « sangle », et<br />
prçga « boucle », oprçga « harnais », zaprçga « attelage », iz-, na-,<br />
od-, raz-, s-, v- ; — s.-cr. sprëga et zàprega « attelage », ôprëg<br />
« tablier de femme ».
136 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Sur l'itératif slavon o-prçzali « tendre », s.-cr. prëzati se « sursauter<br />
», prëzati « craindre » (§ 435), on a les postverbaux :<br />
S.-cr. ôprëz « précaution, circonspection ».<br />
Slov. oprçz et oprçza.<br />
rçgngti « montrer les dents » ( § 494) :<br />
Y. si. rçgu « moquerie », d'où rçgali sç « se moquer » ; slavon<br />
russe porugû.<br />
R. rug (ancien), izrûg et izrûga, narùga, obrug, porug et poruga,<br />
razrùga.<br />
Pol. urqg « moquerie » ; — v. tch. ruh « blasphème ».<br />
Slov. porbg et porçga ; — s.-cr. rûg et ruga, poruga et porug,<br />
ancien et dial. naruga.<br />
Sur le thème rçg- :<br />
S.-cr. régnuti « grincer des dents » : rëga « grincement de dents ».<br />
Slov. rçgniti « se fendre » : rçga « fente ».<br />
tçgnçti « tendre, tirer » :<br />
V.. si. tçgu «vif, fougueux» (Gr. Naz.), adj. ; tçga «angoisse»,<br />
et verbe tçziti « être angoissé » ; sulogû (Upir') et slavon sutçga<br />
« charpente de liaison » ; slavon vûstçgû « courroie ».<br />
R. tugôj « bien tendu, raide » ; lugâ « affliction » et istûga, zâluga<br />
« angoisse, premières douleurs de l'enfantement », nâtug et natûga<br />
« tension », pôtûg « poids » et poluga « tension », plur. potûgi<br />
« douleurs de l'enfantement », plur. rastugi « haubans », ottuga<br />
«lien» et sutûga (§ 1222), nadtûga, o-, pod-, pere-, pro-, pritûg et<br />
pritùga.<br />
Pol. tçgi « vigoureux, vif » ; tçga « langueur, peine » (ancien),<br />
potçga « puissance », slçga et wstçga « ruban ».<br />
Tch. tuhy « dur, tenace » ; touha « malaise, désir », stuha (vztuha)<br />
« ruban », ûtuha « durcissement ».<br />
Slov. tçg « raide », tçga « chagrin » ; — s.-cr. tuga, dôtuga « ennui »,<br />
prïtuga « infortune, besoin », dial. poluga « plainte », stùga « cuve<br />
de bois pour le blé ».<br />
Sur le thème tçg- :<br />
Slavon netçgu. «oisif, sans travail», adj. (§ 821), sur tçêati<br />
«travailler» (§ 592).<br />
R. tjâga « action de tirer », nâtjâg « davier », potjâg « tire-pied »,<br />
ottjâg, pod-, pere-, ras- (rôstjag), s-, u-, v-, vs-, ôtjag, pri-, vy-,<br />
ôbtjâg, prôtjâg, zâtjâg ; et dotjâga, is-, na-, nad-, ob-, ot-, pod-, pere-,<br />
pri-, pro-, ras-, s-, u-, v-, za-, vytjaga ; et masc. sutjâga « chicaneur »<br />
(§ 1222)._<br />
Pol. ciqg « suite » et ciega « coup de fouet », poeiqg « trait,
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 137<br />
attraction », przeeiqg « passage, espace », wyciqg « extrait », zaciqg<br />
« recrutement, corvée », do-, na-, ob-, od-, pod-, przy-, roz-, w-,<br />
seiag, wseiqg.<br />
Tch. tah « action de tirer », dotah, ob-, od-, prù-, vy-, vz-, zâ-,<br />
nâtah et nâtëh, poiah et poiëh, et potaha.<br />
S.-cr. têg « trait » et « poids », loc. sàmotêgom « par sa propre<br />
pression», nàlëg (nâlëg), pblëg, zâlëg, et nâtega (nàtega), pôtega,<br />
stëga, Mega.<br />
Slov. tçg, natèg, po-, pre-, pri-, raz-, et iiga, iztçga, na-, od-,<br />
po-, pre-, pri-, raz-, za-. Et en outre, sur l'itératif tçzati :<br />
potèz et potçza, zatçza.<br />
§ 764. Alternances moins claires. — *Xrçs(t)nçti, r. xrjâs(t)nut'<br />
« craquer », pol. ehrzqsnqé « cliqueter » :<br />
V. si. xrçstû (Ham.) « bruche » (le « bruche » de Joël, I, 4).<br />
R. xrusi « ce qui craque, farine sableuse, ramilles ».<br />
V. pol. et dial. ehrqst « hanneton » ; — tch. ehroust « hanneton »<br />
(chrustëti se dit du bruit des élytres).<br />
(Et r. xrusc' « scarabée, hanneton », pol. mod. chrzqszez, slov.<br />
hrçsë, s.-cr. hrûst, § 1020).<br />
Sur le thème xrçst- :<br />
R. xrjast « ce qui craque » ; — pol. ehrzçst « cliquetis ».<br />
slçdëli « épargner » ( § 592) :<br />
Y. si. skçdu « chiche, indigent », adj..<br />
R. skudâ «indigence»; paskûda (§ 1220) «vilenie, dommage»<br />
(v. r. paskudïnu, « piètre », xiv e s.) ; et ukr. pdskud et masc. paskuda<br />
« vilain homme », bl.-r. paskûda « saleté » (et fém. pôskuz') ; d'où<br />
pol. paskuda « saleté », tch. dial. paskuda « chose vilaine ».<br />
(S.-cr. ancien oskud, fém., pour èskudiea « disette »).<br />
Sauf un rapport avec stedrû «miséricordieux» (§ 450), famille<br />
isolée en slave.<br />
Y. si. trçdû (vodïnyi) «flux (d'eau), dysenterie».<br />
Slov. trçd « colique » ; — pol. irqd « lèpre », tch. Irud « bouton<br />
sur le visage ».<br />
Et slavon trçdû « amadou », v. r. trudu (mod. trut), tch. troud,<br />
slov. trçd, s.-cr. trûd. y<br />
Lit. trendëti « être mangé par les vers », trandis « mite », et<br />
*trund- dans lette trûdêt «pourrir», Racine *tr(d)~ de gr. Tsirpà»<br />
«je perce», avec infixe nasal skr. trnatti «il crevasse», parfait<br />
tatârda. En slave, le « flux d'eau » est une pourriture de l'intestin.
138 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Y. si. pçpu « nombril » (Gr. Naz.).<br />
R. pup, pol. ancien pqp, slov. pgp, s.-cr. pûp « bouton ».<br />
Lit. pampstù, pampti « s'enfler », et sans la nasale pâpas « bout<br />
du sein », lat. papula : racine expressive.<br />
stçpiti « marcher » :<br />
V. si. zastçpu « secours, protection », otûstçpu « défection »<br />
(J. Ex.), postçpû « mouvement » (Gr. Naz.), prëstçpu « transgression »<br />
(J. Ex.), rastçpu « écart » (J. Ex.), sûstçpu « rencontre, combat »<br />
(Ham.), vùstçpu « entrée » (Upir') ; slavon istçpu « extase », v. r.<br />
pristupu « accès ».<br />
R. dôstup «abord», nâsiup, ô(b)stup, ôtstup «retraite», pôsiup<br />
« démarche », pôdstup « approche », perestup, pristûp « accès, assaut »,<br />
prostûp, raz-, so-, u-, v-, vystup « saillie » ; zâstup « bêche », et zastup<br />
et zastûpa « protection », masc. naslûpa « homme agressif » (et fém.<br />
ôstup' « faux-pas », pô-, pére-, prô-).<br />
Pol. stqp « amble », dostçp, na-, o(b)-, od-, po-, pod-, prze-, przy-,<br />
roz-, u-, w-, wy-, zastqp « troupe ».<br />
Tch. dostup, nâ-, od-, po-, pre-, pfed-, pri-, roz-, se-, û-, v-, vze-,<br />
vij-, zâ-, et v. tch. pfistupa.<br />
Slov. stàp « marche », dostàp, iz-, na-, ob-, od-, po-, pre-, pri-, raz-,<br />
u-, v-, za-, pristop « accès » et pristçpa « alliance par mariage ».<br />
S.-cr. nogostup (nôyostup) « sentier » (ail. Fussteiy) et « pédale »,<br />
istûp, nâstup, àd-, po-, prijè-, pri-, à-.<br />
Le verbe stçpiti est lié à stopa « plante du pied » (§ 732) et suppose<br />
une forme à infixe nasal *slempe- (§ 450).<br />
Est à part r. stûpa « mortier, pilon », pol. stqpa, tch. stoupa,<br />
s.-cr. stupa, slov. stçpa, avec différence d'accent entre s.-cr. stupati<br />
« piler » et stûpati « marcher » : c'est un emprunt au germanique,<br />
bas-all. slampe, ail. Stampfe « pilon », stampfen « piler ».<br />
V. si. dgbù « arbre, chêne », r. dub, s.-cr. dûb, etc.<br />
La correspondance de v. si. dçbrava « forêt (de chênes) » (§ 1187)<br />
et du lette dumbrava « endroit marécageux », de dumbrs « marécageux<br />
», établit un rapport, en partant du sens d'« arbre des lieux<br />
bas», avec dubrl «vallée, ravin» (§ 1118), duno «fond» (§ 39),<br />
lit. dùbti « se creuser », daubà « vallée ».<br />
Y. si. rçbu « morceau d'étoffe, loque » (Ham.).<br />
R. rubit' « couper » et « ourler » : rub « loque » ; porûb « action<br />
de couper » et pôrub, srub « charpente, cage », narub « entaille »,<br />
dorûb, iz-, nad-, ob-, ot-, pod-, pere-, pro-, raz-, u-, v-, vz-, vyrub,<br />
zarûb et zarùba (et fém. prôrub', plur. ôtrubi « criblures, son »).<br />
Pol. rqb « bordure, ourlet », porqb « coupe de bois », ob-, od-,<br />
na-, prze-, u-, w-, wy-, z- (et porqb, etc.), zarqb et zarqba.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 139<br />
Tch. roub « greffon » et rub « envers, coup », srub (sroub) « construction<br />
en bois », vrub « encoche », obrtzba « bordure, ourlet »,<br />
poruba « clairière », plur. olruby « son ».<br />
Slov. rçb « ourlet » et « arête », obràb et obrçba, porôb « souche<br />
d'arbre », plur. zarçbi « bordure ».<br />
S.-cr. rûb et èbrub (ôbrûb) «ourlet», zârub, pàrub et pôdrub,<br />
dial. ôbruba.<br />
En baltique, lette rùobs « entaille », lit. rumbas « large ourlet »<br />
et « balafre », rémbêti « recevoir des balafres ».<br />
§ 765. •— Y. si. rçka « main », verbes vurçciti « mettre en mains »,<br />
porçciti « confier », obrçëiti « fiancer » ; v. r. poruka. • ,<br />
R. rukà, porûka « garantie » et « garant », zarûka « aide ».<br />
Pol. rçka, porçka « garantie » et zarçka, dial. wyrçka.<br />
Tch. ruka, zâruka « garantie » et anciens zâruk et poruka.<br />
Slov. rôka, porçka et pôrok « garant », zaràk et zarçka « fiançailles »,<br />
izrçka, oporçka « testament » ; et nàroka pour nârokva « bracelet »<br />
(§ 203).<br />
S.-cr. rûka, nërûka « adversité », nâruka et poruka « commission »,<br />
poruk « garant », Mporuka « message de réponse », ôporuka « testament<br />
» ; et prëporuka « recommandation » (dès le xv e siècle),<br />
tiré du substantif verbal v. s.-cr. prëporucenje, r. preporuëénie,<br />
de v. si. prëporçciti (-cati Pand. Ant.).<br />
Tandis qu'en slave rçka est isolé, avec un adjectif *rçcï « rapide »<br />
qui doit être sur le même thème (§ 957), en baltique lit. rankà<br />
« main », lette rùoks, est resté en regard du verbe lit. renkù, rinkti<br />
« ramasser », avec un autre postverbal, parankà « glanage ».<br />
V. si. dçga « arc-en-ciel » (Izb. Svjat.).<br />
R. dugâ «arc (de cercle) », et râduga «arc-en-ciel», à premier<br />
élément ra- obscur.<br />
Pol. dçga « strie », et dial. « arc-en-ciel » et « douve » ; — tch.<br />
duha « arc (-en-ciel) ».<br />
Slov. dial. dçga, s.-cr. dûga « arc-en-ciel » ; mais slov. dçga,<br />
s.-cr. dûga « douve » sont des emprunts à l'italien doga.<br />
D'autre part :<br />
Y. si. nedçgu « maladie ».<br />
R. nédûg et néduga, îznedûg et iznedûga de iznedùzit' « rendre<br />
malade, faible»; et adj. djûzij «fort» pour dial. dûzij (§ 956)<br />
d'après le verbe djâgniXt' « devenir fort » (§ 55).<br />
Tch. neduh « infirmité », et duh « profit », slovaque duh « force ».<br />
Pol. dqzyc « tendre à, aspirer » : dial. dqg « profit » ; et adj. duzy<br />
« fort, grand ».
140 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Thème dçg- dans r. djâgnut', et sur ce thème :<br />
V. si. dçgu « courroie » (Upir'), r. djâga et slov. dçga « sangle »,<br />
Toutes ces formes paraissent s'expliquer par la comparaison<br />
avec le baltique : lit. dengià, dengti « couvrir », ap-dangà « vêtement<br />
», dangùs « ciel », en partant de l'idée de « tendre en arc ».<br />
D'autres rapprochements sont risqués. Le polonais duzy, avec -ucomme<br />
en russe, ukr. du$yj « bien portant, fort », est attesté tôt,<br />
dès le xvi e siècle, mais les exemples de flottement de q et u en<br />
polonais ne sont pas rares, et rien n'oblige à recourir à une autre<br />
racine, celle de lit. daùy « beaucoup », got. daug « c'est bon, utile ».<br />
Y. si. krçgu « cercle », locution adverbiale okrçgû « autour ».<br />
R. krug, okrûg et okrûga « district », zakrûg et zakrûga, adv.<br />
prikrugom.<br />
Pol. krqg, okrqg « globe » et « district », zakrqg « sphère ».<br />
Tch. kruh et okruh « cercle » ; — slov. krçg, okràg ; — s.-cr.<br />
krûg, okrûg « département » et ôkruga « mouchoir de tête ».<br />
Comparaison avec le germanique hring, ail. Ring « rond,<br />
anneau », de *krengh-.<br />
V. si. Iggû «bois», r. lug «prairie», pol. iqg (Içg) «pré marécageux,<br />
saulaie », s.-cr. lûg « prairie » et « marais », etc.<br />
Lit. léngê « petit pré », lingûoti et langôti « se balancer, remuer »,<br />
ce qui s'accorde avec le sens initial du mot slave, qui est sûrement<br />
« petit bois, buissons ».<br />
Ukr. potrûxnuty « pourri » : pôtrux « foin moisi », et r. truxd<br />
« poussier, menu foin », dial. ôtrux « son » ; pour r. zâtrux variante<br />
de zatrûs, voir § 762.<br />
Tch. trouch « terre végétale, humus ».<br />
S.-cr. trûh « moisissure », ancien truha « brin de paille » ; pour<br />
trûn « fétu, brin de paille », voir § 1073.<br />
On a trux- en russe, tchèque et serbo-croate, de *trçx- d'après<br />
slov. trohnéti « pourrir », trôhel « pourri, vermoulu » ; v. pol. truchly<br />
« triste », mod. truchlec « être abattu », est tch. truchlij, truchleti<br />
« s'affliger ».<br />
Le thème trçx- est proche de trox- (§ 740), et les formes ont pu<br />
se confondre quelque peu, mais le baltique atteste trus- dans lit.<br />
traûsti « effriter », trausus et lette trausls, trusls « friable, pourri »,<br />
et l'infixé nasal du slave dans le verbe lette trust « pourrir », prés.<br />
trûstu avec superposition de *-(s)te- à l'infixé nasal (§ 439).<br />
§ 766. Sang alternance. — Kgsati « mordre » :<br />
Slavon kusû « morceau » ; et v. si. kgsû « qui a la queue coupée »,<br />
adj. (Pand. Ant.), ukr. kûsyj, s.-cr. kûs, etc.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 141<br />
R. kus « morceau », ukus « morsure », et dokus, na-, nad-, ob-,<br />
ot-, pod-, pere-, pri-, pro-, ras-, s-, za-, vykus.<br />
Pol. Icçs, wykqs « brèche », przekqs et przykqs « persiflage ».<br />
Tch. kus ; — slov. kçs ; — s.-cr. kûs.<br />
La base est kçsu, dérivé en -su (§ 1135) de la racine de lit. kdndu<br />
« je mords », skr. khadati « il mord » (§ 8).<br />
Y. si. sûkçtati « renfermer, contenir », slavon « ensevelir », r.<br />
kutat' « envelopper » :<br />
R. okût et okùta « enveloppe », zakût et zakûta « endroit retiré,<br />
cabane, hutte », skut et skûta, ukût et ukûta, otkût, pôdkut ; pokùt<br />
« asile, refuge » et « cimetière », pokùta « service pour les défunts » ;<br />
masc. ukûta « homme qui aime à s'emmitoufler ».<br />
Un seul rapprochement, avec v. pr. po-kunst « garder », isolé en<br />
baltique. On a up. autre mot dans :<br />
V. r. kutû « coin, angle », r. kut, pol. kqt, tch. kout, s.-cr. kût,<br />
slov. kçt : c'est un emprunt au bas-latin cant(h)us «bord, coin»,<br />
du grec xavOoç.<br />
Il y a rencontre d'autre part, dans plusieurs langues, avec un<br />
autre thème, kut- (§ 758).<br />
Tch. nutiti « contraindre », pol. nçcic « allécher, séduire » (et v.<br />
pol. nucic) :<br />
Pol. ponçta et przynçta « appât », et plus rares nçt et nçta, wnqt<br />
et wnçta, znçta.<br />
Ce thème *nçt- du polonais et du tchèque n'est sûrement qu'une<br />
variante de nud-, § 756 (nçd-, § 444), mais l'explication n'en<br />
apparaît pas clairement.<br />
V. si. pgto « entrave », dérivé en -to (§ 1164) :<br />
R. (o-)pùtat' « empêtrer » : opût, vput et zaputa.<br />
Pol. opçt « enlacement, ce qui enlace, le diable ».<br />
Slov. napçta « empêchement » ; — s.-cr. oputa « lacet ».<br />
Y. si. pçtï « chemin » : ,<br />
S.-cr. pûtiti « acheminer » : ùput « indication, instruction »<br />
et ïiputa, rare naputa, et ràspût « croisée de chemins, bifurcation ».<br />
Slov. raspgt.<br />
R. trutit' « presser », pol. trqcic' « pousser, heurter » :<br />
Pol. odtrçt « action de repousser », wytrçt « action de faire tomber »,<br />
wstrçt « aversion », otrçt « durillon » (r. natrutit' « blesser, former un<br />
durillon »), natrçt « importun », wtrçt « intrus » ; locution na strçcie<br />
« sous la main ».
142 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Les deux mots suivants sont isolés :<br />
Y. si. trçtu « troupe ».<br />
V. si. (Pand. Ant.) trçtu « faux-bourdon », ukr. trut (r. trûten',<br />
§ 183), pol. trqd, slovaque trût, s.-cr. trûl, slov. trçt.<br />
Il est aisé, mais non sûr, de rattacher ces mots à *trçtiti « presser,<br />
pousser », et les faux-bourdons sont chassés de la ruche (s.-cr. dial.<br />
trutiti « débarrasser la ruche des faux-bourdons).<br />
On compare avec lit. trenkti « pousser bruyamment », itér.<br />
trankyti, got. preihan et v. angl. Ihringan « presser », ail. dringen<br />
et subst. Drang : le slave trçt- serait de *tronk-to- (§ 1160). Quant<br />
au nom du « faux-bourdon », il est en baltique lit. trânas, lette<br />
tranis, proche du bas-allemand drane (ail. Drohne).<br />
Y. si. ras-pçditi « disperser (en effrayant) » :<br />
Pol. pçdzic « chasser, pousser » : pçd « vitesse, course rapide »,<br />
popçd « impulsion », dopçd, na-, od-, prze-, roz-, u-, wy, za-.<br />
Tch. pud « instinct », popud «impulsion»; — s.-cr. pud, emprunt<br />
savant au tchèque.<br />
Et sur l'itératif nouveau r. pugât' « effrayer » (§ 110) :<br />
R. ispûg « effroi » et ispûga, napûg et napûga, pôdpug et podpùga,<br />
spug et spûga, otpûg, pere-, pri-, ras-, vz-, vypug.<br />
On peut penser, comme pour mçditi et nçditi (§ 450), à une<br />
forme verbale à infixe nasal, dont le thème *pud- se retrouverait<br />
dans l'adjectif pustu (§ 758) : le sens «lâché, sans maître»<br />
s'accommode bien avec l'idée d'un animal chassé ou effarouché.<br />
V. si. sçdû « vase » et « jugement » :<br />
Ces deux sens divergents font remonter à un même composé<br />
sç-du et à un type particulier de postverbal (§ 819), et ils donnent<br />
deux thèmes nouveaux avec leurs postverbaux :<br />
V. si. susçditi « préparer » : susçdu « ustensile, vase ».<br />
R. sosûd «vase», posuda et posûd «vaisselle, ustensiles», posûd<br />
« prêt » de posudit' « prêter » et ssûda « prêt » de ssudit'.<br />
Pol. ancien (s)sqd «vase» (mod. sqdek «baril»).<br />
S.-cr. sûd « vase » et sàsud ; posuda « vase » et « prêt ».<br />
Slov. sôd « tonneau », posçda « vase » et « prêt ».<br />
Y. si. sçditi « juger » : osçdu « condamnation » (J. Ex.).<br />
R. sud « jugement », dosûd, nasud et osûd « mauvais œil », o(b)sûd<br />
et osûda « blâme », otsùd, po-, pere-, pri-, pro-, raz-, zasud et zasûda.<br />
Pol. sqd « jugement », osqd « condamnation », posqd « soupçon »,<br />
przesqd « préjugé », przysqd « adjudication », rozsqd « discernement »,<br />
wysqd « détermination (de frais) ».
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 143<br />
Tch. soud, osud et osuda « sentence » et « destin ».<br />
Slov. sçd, o(b)sèd « condamnation », presèd « jugement, critique »,<br />
razsàd « discernement », ûsod et usçda « destin ».<br />
S.-cr. sûd « jugement, tribunal », ôdsuda et ôsuda « sentence,<br />
condamnation », prësuda « sentence ». ràsuda « jugement », ùsud<br />
« destin ».<br />
§ 767. — Spp- :<br />
Y. si. posupiti « renfrogner », en rédaction slavonne (Izb. Svjat.).<br />
R. sup « vautour », sûpit' « renfrogner » : nasûp « froncement<br />
de sourcils », masc. nasupa et posupa « homme morose ».<br />
Pol. sçp, sepic siç : posçp et zasçp « humeur morose ».<br />
Tch. sup, nasupiti se, (posupny « morose »).<br />
La base est *sçpû>, nom du « vautour », inexpliqué.<br />
tçp- :<br />
V. si. tupu « émoussé », adj., en rédaction slavonne (J. Ex.).<br />
R. tupôj, tupW « émousser » : prltûp et zàtup « action d'émousser ».<br />
Pol. tçpy, tçpic « émousser, exterminer » : polçpa « condamnation »<br />
et « damnation », utçpa « peine ».<br />
Tch. tupy, tupiti « outrager » : potupa « outrage ».<br />
Slov. top ; — s.-cr. tûp.<br />
Sans rapprochement sûr.<br />
Y. si. gçba « éponge ».<br />
R. gubd « champignon » (accent ancien gûba).<br />
Tch. houba « champignon, éponge » ; — slov. gçba « amadou,<br />
lèpre, polype, etc. » ; —- s.-cr. gûba « lèpre, teigne » et « champignon,<br />
amadou ».<br />
On a évidemment le même mot dans :<br />
R. gûbâ « lèvre », ukr. hùba « bouche » ; — pol. gçba « bouche,<br />
visage » (depuis le xv e siècle) ; —• tch. huba « lèvre, bouche, gueule »<br />
(après le vieux tchèque).<br />
Lit. gumbas « excroissance, enflure », lette gumba, avec une<br />
différence d'intonation entre le masculin du lituanien et le féminin<br />
du slave (§ 708).<br />
Pol. bqk «toupie, taon,y butor (oiseau), etc. » est ancien (depuis<br />
le xiv e siècle), en regard de bqkac « bourdonner, etc. », qui est<br />
une des nombreuses formations en -kati (§ 560), et voir buk et<br />
bukati, § 759. Le thème suivant a plus d'importance dans les<br />
langues slaves :
144 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
pçk- :<br />
Y. si. pçk- dans pçcina « gouffre » ; slavon puciti sç « s'enfler »,<br />
puknuii « éclater ».<br />
R. puk « faisceau, botte, bouquet », opuk et opuka, vspuk et<br />
vspûka, otpùka, pod-, pere-, ras-.<br />
Pol. pqk (et pqczek) « bouton, bourgeon », pçk « faisceau, botte » ;<br />
et de pukac « heurter » : puk « coup, heurt », wypuk « rupture »<br />
en regard de wypukac et de wypçknqc.<br />
Tch .puk « bourgeon » ; slovaque do popuku et do rozpuku « (rire)<br />
à en crever ».<br />
Slov. pok « éclatement, détonation » et pçka « fente, crevasse »,<br />
izpçka et razpbk, razpçka « fente », napàk, prepok et prepçka,<br />
zapçka ; — s.-cr. pûk « coup de feu, détonation ».<br />
Pour tch. opuka « marne », voir § 733.<br />
V. si. paçku « araignée » dans paçcina « toile d'araignée », r.<br />
pauk, s.-cr. pàûk, a l'aspect d'un composé nominal (§ 1220) à<br />
second terme postverbal : ce second terme, au sens de « à pattes<br />
crochues », peut être çk- de çkutï « crochet » (§ 189).<br />
drçg- :<br />
V. si. sudrçzili « ficher » : drçgu « bâton ».<br />
Pol. drqg « perche » ; — tch. ancien drouh.<br />
Slov. drçg ; — s.-cr. druga « grand fuseau ».<br />
Lit. drangas et fém. drdnga « forte perche » (§ 708) ; v. isl. drangr<br />
« colonne ».<br />
V. si. ob-çxati « sentir » ( § 557) :<br />
Pol. wqchac : wçch « odorat », dial. wqch ; et voir pqchac « flairer »,<br />
pqch, § 787.<br />
Slov. vçhali : vôh « odorat », povdh, zavdh.<br />
Et subst. vonja «odeur» (§ 1022), d'où :<br />
R. vonjdt' : vônja (et fém. von', ôbvon').<br />
Pol. (won, powon).<br />
S.-cr. vônjati : vonja et masc. vônj, slov. vànj.<br />
§ 768. Formations diverses. —• Pour mçd-, nçd-, voir mud-, nud-,<br />
§ 756, et pour krçp- variante de krup-.<br />
Pour pol. sqg, posqg, voir sçg-, § 808, pour *xçt- variante de xot-,<br />
§ 731.-<br />
Pour plusieurs mots, rien n'indique ou n'assure qu'il faille les<br />
considérer comme des postverbaux :
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 145<br />
v. si. prçtu «verge, baguette», s.-cr. prûl, etc., peut être un dérivé<br />
en -tu (§ 1161).<br />
V. si. xlçdu «verge, tige» (Pand. Ant.), r. xlud «perche», pol.<br />
chlçd « tige », etc., n'est pas d'origine claire, et en tout cas n'a pas<br />
de rapport avec v. si. oxlçdanije « fléchissement, négligence »,<br />
oxlçnçti « faiblir » (Pand. Ant.), factitif v. tch. chlûditi « affaiblir ».<br />
V. si. kçp- dans kçpina « buisson », pol. kçpa « touffe », s.-cr.<br />
kupa « pelote », se rattache mal à lit. kumpti « se courber », kampas<br />
« coin », gr. xâ.;j,TtTw, etc.<br />
Y. si. sçku « fétu, écharde », r. sw/c « branche, nœud dans le bois »,<br />
s.-cr. sûk, etc., est sans lien avec le thème sçk- (§ 763), et dans sa<br />
forme à préfixe pol. osçk « bois tortu », osçka « croc », v. si. osçkatu<br />
(§ 987), il faut voir un composé nominal (§ 1219) ; on le rapproche<br />
de skr. çankûh « piquet, cheville ».<br />
Y. si. spçdu « boisseau », slov. spôd, etc., doit être un emprunt<br />
au germanique.<br />
Un problème curieux est celui du doublet lud- : tçd-. Le slavon<br />
ludû « fou » est du slavon serbe du xv e siècle, et c'est le serbo-croate<br />
lûd, usuel depuis le xm e siècle. Il faut établir l'histoire du mot :<br />
R. dial. ludit' « tromper », ludà « éclat qui éblouit, fascination » ;<br />
ukr. ludâ « illusion, fascination », plur. pâludy « écailles sur les<br />
yeux» (§ 1220); et oblûda «hypocrisie», comme en polonais;<br />
bl.-r. lûdzic' « se moquer », qui d'après l'accent est pol. ludzié,<br />
Pol. ludzié « tromper » : ulud et uluda « séduction, illusion »,<br />
et wyluda, zluda ; et obiuda « appât, séduction, hypocrisie », mais<br />
dial. oblçda « séduction ».<br />
Tch. loudili « séduire » : lud « hallucination » (création du<br />
xx e siècle) ; prelud (depuis le vieux tchèque), prilud et préluda,<br />
priluda « hallucination, fantasme », obiuda « fantôme » ; masc.<br />
louda « homme hésitant, lambin », verbe louditi se « aller lentement<br />
en errant ».<br />
S.-cr. lud « fou », lûdili se « faire le fou », et bulg. lud.<br />
Slov. lûd, du croate ; lûditi et Içditi « séduire, amuser », Içda<br />
«jeu ».<br />
D'après ce tableau des formes, il apparaît que lud- s'est étendu<br />
du serbo-croate au bulgare et au slovène, et sûrement du tchèque<br />
ou du russe au polonais, et que la forme ancienne est tçd- conservé<br />
par le slovène. Et que Içd- ne se sépare pas de blçd- (§ 762), s.-cr.<br />
lûd « fou » de tch. bloud « niais », et est issu par dépréverbation<br />
(§ 1208) de o-blçditi « (s')égarer », moyen-bulg. oblçdëti, tch. oblouditi<br />
« tromper », etc.
CHAPITRE VIII<br />
VOCALISMES RADICAUX *-al-, *-arJ<br />
§ 769. Alternances claires. — *Mïlze- « traire » (§ 428) :<br />
S.-cr. mlâz « jet (de lait, d'eau) » (et fém. zâmlaz « sorte de lait<br />
caillé »).<br />
Sur le thème *mîlz7 :<br />
Slov. môlza « traite » ; — tch. dial. mlz « sang caillé d'une volaille ».<br />
(Et slov. mlêz, fém., « premier lait », § 713).<br />
*pïlze- « ramper » :<br />
V. si. is-plaziti, o- (Cyr. Jér.) « tirer (la langue) » (§ 607) : slavon<br />
oplaza « insolence ».<br />
R. pôloz « barre sur laquelle glisse le traîneau », et « boa ».<br />
Pol. pioz « barre du traîneau », dial, splozy « éboulis », plur.,<br />
adv. oplozem.<br />
Tch. plaz « reptile » et composé zemëplaz ; plaz et splaz « glissière »,<br />
uplaz « chemin glissant », dial. oplaz « terre qui reste entre les<br />
sillons ».<br />
Slov. plâz « sep de la charrue, glissière, éboulement, avalanche »,<br />
plâza « rayure », oplaz « sep, (dé)rayure, terre entre les sillons » ;<br />
— s.-cr. plâz, ôplaza.<br />
Sur le thème *pïlz- :<br />
R. nâpolz, ô-, ôl-, s-, v-, vs-, vij-, zâ, adv. ùpolzom.<br />
Slov. pôlza « glissière ».<br />
*zïld- (§ 592) :<br />
V. s.-cr. zlïdëti « désirer » (slavon Zludï « désir », fém., § 713) :<br />
V. si. gladû « faim », r. gôlod, s.-cr. glâd, etc.<br />
(1) Ou *-ol-, '-or-. Dans les formes reconstruites, on emploiera a balto-slave, ou<br />
-o- de l'indo-européen, selon les cas, et surtout pour la clarté.
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 147<br />
Sur thème *zïld- :<br />
S.-cr. pôzuda « désir », sur zûdjeti.<br />
Skr. gfdhyaii « il désire » : gardhah « désir ».<br />
Y. si. slëplje-, slupati «jaillir» (§ 541) :<br />
Slavon slapu « reflux ? ».<br />
Tch. slap « cascade » ; — s.-cr. et slov. slâp « flot, cascade ».<br />
Lit. saïpas et salpà « petite baie ».<br />
*dïlbe- « creuser » :<br />
V. r. nadolobu « abattant (d'une porte de citadelle) » ; — ukr.<br />
prydolob et pridolob « flèche de charrue ».<br />
Tch. dlab « rainure, mortaise », vydlab. ' •<br />
Sur le thème *dïlb- :<br />
R. vijdolb, nâdolba « support creusé d'un montant », dial. podôlba<br />
« batte ».<br />
Pol. dial. wydlub « mangeoire ».<br />
Slov. dôlb « cavité », izdôlba ; — bulg. dâlb « cavité ».<br />
En baltique, lit. -dilbti, et -delbti (§ 432) : dâlba «manche de<br />
fourche », et délba, lette dalbs et dalba.<br />
Y. si. tluce- « cogner, piler », itér. tlaciti « fouler » :<br />
R. tolôc', tolôèit' : tôlôk et tolôka « foulage des champs par le<br />
bétail», lolokâ « corvée », istolôk, nâlolôk, ôtolok, peretolôk, pritolok,<br />
ûtolôk, zâtolok, et dotolôka, is-, o-, pri-, ras-, perétolôka (et perétoloc'),<br />
ûtolôka, zàlolôka ; prôtoloka et pritoloka « linteau de<br />
porte ». Pour le mot potolôk « plafond, plancher », gén. potolkâ,<br />
mais gén. dial. potolôka, et verbe potolôcit' « planchéir », on a<br />
voulu l'expliquer en partant de tïlo « sol » et, sur une locution<br />
v. si. po tïlomu (dat. plur.) «sur le sol», par un dérivé *potulok,<br />
gén. potolkâ ; mais il s'agit sûrement de potolôk « (plancher de)<br />
terre battue », à flexion secondaire en gén. -tolkd.<br />
Pol. tiuc, tioczyc : tlok et nattok « foule, presse », et tlok « piston »,<br />
przellok et przetloka, wytloka « marc de raisin » ; tloka (tlôka,<br />
tluka) « corvée ».<br />
Tch. tlak « pression », nâ-, o-, pre-, pro-, û-, v-, formations<br />
nouvelles du xix e ou du xx e siècle.<br />
Slov. tlàk« pression » et« pavé, carreau, trottoir », llâka « corvée » ;<br />
•— s.-cr. tlâk « pression », tlâka (tlâka) « travail en commun, corvée,<br />
prestation ».<br />
Et sur le thème *tûlk- :<br />
R. tolkât' « heurter » : dôtolk, nâlolk, otiôlk, rastôlk.<br />
Pol. tiuk « pilon » ; tluk, otluk, wytluk « une catin ».
148 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Tch, tlouk « pilon » et tluk « action de battre », do-, pri-, potluk<br />
« vagabond » et masc. potluka.<br />
Slov. tôlk « heurt » et « pilon », potôlk « défaite, pile ».<br />
S.-cr. pdtûk « coin (pour taper) », composé solotûk « pilon à sel » ;<br />
et tùk « coin dur, angle », sutuk et sMuka (sùtuka) « mauvais sort<br />
à conjurer » et « action de le conjurer », ùtuk « réplique, remède<br />
(au mauvais sort)», mais des variantes sulika (§ 799) et ùsluk<br />
(§ 759) indiquent des contaminations avec d'autres thèmes.<br />
Et voir v. si. tlûku « interprète », § 814.<br />
Lit. ieïkli « rassembler la corvée » et talkà « corvée », mais sans<br />
doute adaptés du russe (§ 548).<br />
Y. si. vlëëe- « tirer, traîner », itér. vlaëiti :<br />
V. si. oblaku « nuage », podûvlaku « vêtement de dessous »<br />
(Ham.), sùvlaku « fouloir » (Ham.) ; slavon pavlaka et v. r. pavoloka<br />
«étoffe de prix» (§ 1220), povoloka «enveloppe, couverture»,<br />
poduvoloka, privoloka « vêtement de dessus », otûvoloka « retardement<br />
».<br />
R. vôlok « portage de bateau », « traîne, filet » et volôka, obolôk<br />
«enveloppe», et ôblako «nuage» (slavon ôblak), dial. ôbolok et<br />
ôboloko ( § 826) ; svolôk « action de traîner » et svôlok « ensouple »,<br />
zâvolôk et zdvolôka, et avec divers sens et divers accents dovolôk,<br />
izvolôk, na-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, u-, u-, vz-,<br />
vyvolok, et dovolôka, ndvolôka, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
raz-, u-, vyvoloka ; sùvoloka « mauvais chanvre » (§ 1222), et anciens<br />
pâvolok et pdvoloka.<br />
Pol. wiok « traîne, filet », obiok « nuage », powiok « filet » et<br />
powloka « enveloppe, housse » ; odwlok, prze-, wy-, z(e)-, et nawioka,<br />
o(b)-, od-, pod-, prze-, przy-, roz-, u-, wy-, z-, za-,<br />
Tch. vldk « moyen de traîner » et vlak « train de chemin de fer »<br />
(xix e s.), oblak, povlak, pre, pro-, s-; et vlaka «traîne, filet»,<br />
ndvlaka, po-, pro-, v. tch. povlaka « étoffe précieuse ».<br />
Slov. vldk, obldk, izvlâk, ndvlak, svldk, et vldka, ndvlaka, odvldka,<br />
pod-, pre-, pri-, raz-, za-,<br />
S.-cr. vldk « train », ôblâk, svldk « dépouille de serpent » et<br />
« varlope », provlâk « chandelle de cire », et vldka « (gros arbre)<br />
qu'il faut traîner», ëblaka «vêtement», nàvlaka (nâ-, nâ-)<br />
« housse », povlaka et pàvlaka « housse, taie » et « crème », prëvlaka<br />
« housse » et « isthme », prëoblaka « changement de vêtement,<br />
travestissement ».<br />
Sur les thèmes *velk- et *vïlk-(§ 434) :<br />
R. olvlëk, privlëk et privlëka, razvlék.<br />
Tch. vlek « action de tirer, traîne », oblek « vêtement », povlek,<br />
pre-, prù-.
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 149<br />
Slov. oblêk « vêtement » et oblêka, izvlêka, na-, po-, pod-, pre-,<br />
raz-, za-, preoblêka.<br />
S.-cr. prëobuka, et privùk « mari qui entre dans la maison de<br />
sa femme ».<br />
Lit. velkù, viïkti « tirer » : lette valks « vêtement », lit. âpvalkas<br />
« vêtement de dessus », ùzvalkas « housse, literie ». On trouve dans<br />
d'autres langues la racine *selk- parallèle à *welk- : gr. eXxw<br />
«je tire», ÔÀXOÇ «traction, bride», lat. sulcus «sillon».<br />
Y. si. vlaziti « rendre humide » (Pand. Ant.) :<br />
V. si. vlaga « humidité » (adj. vlûguku, § 983), r. volôga (et vôloz'),<br />
tch. vlâha, s.-cr. vlàga, etc. Et :<br />
R. (na)volôzit' : navolôga «action d'humecter, graissage».<br />
Tch. (za)vlazili : zdvlaha «irrigation».<br />
Lit. vllgyii « humècter », vàlgyti « manger » : pavalgà et lette<br />
pavaîgs « ce qu'on mange avec la viande, légumes ».<br />
§ 770. — V. si. mruznçti « se geler », mruzëîi « être odieux »,<br />
factitif mraziti (§ 498) :<br />
V. si. mrazu « gelée », omraza « aversion » (Pand. Ant.).<br />
R. morôz, zâmoroz et plur. zâmorozy « premières gelées », îzmoroz,<br />
nâmoroz (et fém. îzmoroz', nâ-, nâd-, ob-, ôt-, pô-, pôd-, prî-).<br />
Pol. mrôz, zamrôz, pomrôz et przymrôz « petite gelée ».<br />
Tch. mrâz, omraz « fait d'être gelé », zàmraz « gel ».<br />
Slov. mrâz, zamràz, pomràz « après-gelée », premràz « trop grand<br />
gel », et premrâza « refroidissement », omrâza « aversion » ; —- s.-cr.<br />
mrâz, omraza.<br />
Sur le thème *mïrz- :<br />
(R. pôdmerz', fém.) ,' tch. zâmrz ; slov. omfza et zamrza<br />
« aversion ».<br />
V. si. (po-Jvrûze- « attacher », itér. -vraziti :<br />
V. si. povrazu « lobe (du foie) » (Gr. Naz.).<br />
R. pâvoroz « cordon (de sac) » (§ 1220), et ancien pavoroza « lien ».<br />
P. powrôz « corde » et dial. powroza, v. pol. uwroz.<br />
Tch. ancien povraz « lien » (mod. provaz par rattachement à<br />
vâzati « lier », § 762).<br />
S.-cr. pôvraz « corde » ; — slov. povràz.<br />
Lit. vefzti « lacer » : vârzas « nasse », ïzvarza, ùzvarza.<br />
V. si. crute- « entailler », o-kratiti « abréger » :<br />
Y. si. -kralu « fois » (§ 330), tch. -krât, etc.<br />
R. (okorot' « chose raccourcie »).
150 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. skrôt « abrégé ».<br />
Slov. krât « brièveté », pokrâta « abrègement ».<br />
Sur le thème *ëïrt- :<br />
V. si. eruta « trait », et verbe erutati, qui a ses postverbaux<br />
(§ 809).<br />
Lit. kertù, kifsti « trancher » : kaftas « fois », kartà « couche »,<br />
apykarla « entourage ».<br />
V. si. vrutëti sç « tourner », factitif vratiti :<br />
V. si. vratu « pinacle » et « spirale » (instrument de torture),<br />
izvratu et prëvratu «changement» (J. Ex.), obraiu «tournant»<br />
(Gr. Naz.), sûvratu « détournement » (Gyr. Jér.), vûzvralu « inversion »<br />
(Izb. Svjat.).<br />
R. vôrot « treuil » et « collet, encolure », composés kolovorôt<br />
« tournant (d'eau) » et « vilebrequin », vodovorôt « remous » ; izvorôt<br />
« détour, envers », nâvorôt, privorôt, oborôt, oivorôt, po-, pod-,<br />
pere-, raz-, s-, u-, v-, vz-, vyvorot, zdvorôt (et fém. ôborot', izvorot',<br />
prô-, û-, pô- et pâvorot', § 1220) ; avec la forme slavonne : obrât,<br />
otvrât, raz-r, so-, voz-.<br />
Pol. koiowrôt « treuil, rouet », wrot (ancien) et powrôt « retour »,<br />
nawrôt « détour », obrôl « tour », odwrôt « retraite », prze-, u-, wy-,<br />
za-, wzwrot et zwrot.<br />
Tch. kolovrat « rouet », nâvrat « retour », obrat « tour », odvrat,<br />
pod-, pre-, roz-, vî/-, z-, za- (et fém. ûvrat', vy-, zâ-, et souvrat',<br />
§ 1222).<br />
S.-cr. vrâl « cou », et dial. « ivraie » (plante qui enivre, êbriâea,<br />
et fait tourner la tête) ; composés kôlovrât « rouet », sùnovrât<br />
« casse-cou, précipice » (de sùnuli « se jeter », § 490), et « narcisse »<br />
(synonyme ylavàbôlnîk, fleur qui entête) ; adj. golovrat « cou-nu »,<br />
krivôvrat « cou-tordu » (§ 1227) ; nëvrât «(radeau) qu'on ne ramène<br />
pas », pôvrât « retour » et zâvrat « restitution », nâvrat « reprise,<br />
fois », obrat « tournoiement », prëvrât « révolution » (de r. perevorôï),<br />
râzvrat « dépravation », ùzvrat « revanche », et prëvrala « plat<br />
d'oeufs et de farine ».<br />
Slov. vrâl « cou, gorge » et « retour de sillon », composés kolovrat<br />
et solnovràt « narcisse » (transposition en solno- « soleil » de s.-cr.<br />
sùno-, mais le narcisse n'est pas un « tournesol »), navrât, obrât<br />
et ovrât, po-, pre-, raz- (fém. zvrât).<br />
Sur le thème *vïrt- :<br />
R. dovërt, iz-, na-, nad-, o(b)~, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
raz-, s-, u-, v-, plur. zavërty (et fém. vôdovert', pérevert', zâvert').<br />
Tch. vrt « tour », vyvrt.<br />
S.-cr. ndvrt «greffe», obrt (ôbft) «circulation, trafic».<br />
Slov. vît « foret », zavrt, obrt et obrta (et fém. obrt).<br />
Lit. vefsti, vartyti : isvartas « renversement », prievarta « pression ».
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 151<br />
*skurd- :<br />
R. skorodit' « herser » : skorodâ « herse », zaskorôd et zaskorôda<br />
« action de herser ».<br />
Sur le thème *skurd- :<br />
V. si. oskrudu « outil de tailleur de pierre, pic ».<br />
R. oskôrd et oskôrda « marteau pointu » ; —- pol. oskard (« pioche »)<br />
et oskarda ; —• tch. oskrd ; — slov. oskrd et oskrda.<br />
Lit. skerdziù, skefsti « saigner (les porcs)», lette skèrst «fendre,<br />
ouvrir », v. pr. scurdis « fer de la meule ».<br />
Y. si. smrudëti « puer », factitif smraditi :<br />
V. si. smradu « puanteur », slavon prosmrada « corruption,<br />
destruction ».<br />
R. smôrod et slavon smrad, smorôda « cassis, groseille ».<br />
Pol. smrôd et ancien zasmrôd.<br />
Tch. smrad ; — slov. smrâd ; —• s.-cr. smrâd, et osmrada.<br />
Sur le thème *smird- :<br />
V. si. smrûdû « un vilain, de condition inférieure » ; — r. ancien<br />
smerd « manant ».<br />
Lit. smirdëti : smardas « odeur », smifdas « homme puant, sale ».<br />
V. si. -iru(p)nçti «s'engourdir», trupëli «souffrir» :<br />
V. si. utrapu « engourdissement » (J. Ex.).<br />
R. toropit' «hâter», et loropél' «être intimidé» (§ 612) : lôrop<br />
« hâte » (et tôrop', fém.), tôrôp et masc. torôpa « homme précipité » ;<br />
pôiorop « hâte », istorop, 6-, vy-, zâ-, peretorôp (et fém. pôtorop'<br />
« timidité », is-, ô-).<br />
Tch. trâpiti « tourmenter » : ûtrapa et otrapa « tourment », et<br />
v. tch. otrapa « engourdissement, extase », et masc. otrapa « esprit<br />
malin, polisson » ; — pol. utrapa, du tchèque.<br />
Sur le thème *tïrp- :<br />
R. ôterp «engourdissement», locution v istërp, vystërp (§ 75)<br />
«autant qu'on peut supporter, autant que possible» (et fém. ôterp'<br />
« endurcissement, accoutumance », adv. névterp', sûterp', etc.).<br />
Slov. otrp « engourdissement », potrpa « patience », utrpa « fait<br />
de supporter, de se passer de ».<br />
Le serbo-croate a trâpiti «tourmenter, mortifier (son corps)»,<br />
et trâpiti « creuser profondément, défricher, planter une vigne » :<br />
trâp « fosse, silo » et « vigne nouvellement plantée », pôtrap.<br />
C'est un emprunt, slavon trapu, au grec xdcçpoç, mod. Tpàtpoç<br />
« fosse ».
152 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Slavon russe vïrpe- «enlever» (§ 431) :<br />
Slavon vrapu, voropu(r. vôrop chez Dal' est le mot vieux-russe),<br />
navoropu « coup de main, razzia ».<br />
Slavon -strubnçti «reprendre des forces», factitif -sirabili (§ 498) :<br />
Slavon ustraba « guérison ».<br />
V. tch. ostrabiti : slovaque ostraba « remède ».<br />
V. r. ustorobiti sja, mod. ustrôbii'sja (sans rapport apparent<br />
avec v. pol. po-strobié) : uslrôba « guérison ».<br />
*svïrbëti « démanger » :<br />
Y. si. svrabû « démangeaison » (Ham.).<br />
R. svôrob ; — tch. svrab ; — s.-cr. svrâb ; — slov. srâb. Et sur<br />
le thème *svïrb- :<br />
R. sverb ; — pol. swierzb ; — tch. svrb.<br />
V. h. a. swërban « faire tournoyer » (§ 592) : v. isl. svarf« limaille »<br />
(neutre, § 827).<br />
§ 771. — V. si. mrûknçti «s'assombrir», factitif -mraciti :<br />
V. si. mrakû et primraku « obscurité », slavon omraku, sumrakû<br />
«crépuscule» (§ 1222).<br />
R. môrok et morôka, ôbmorok (« évanouissement »), obmorôk<br />
et obmorôka, pâmorok et pâmoroka (§ 1220), sûmorok (v. r. et dial.),<br />
zamorôka, et slavonismes mrak, pômrak et pômraka, primrak et<br />
primrâka, sûmrak.<br />
Pol. mrok, pomrok, zmrok.<br />
Tch. mrak et dial. mraka, mràka, soumrak.<br />
Slov. mrâk, pomrâk. primrâk, sçmrak et sûmrak.<br />
S.-cr. mrâk, sumrâk, anciens ou dial. omraka, pomrak et pomraka,<br />
primrak.<br />
Et sur le thème *mïrk- :<br />
R. sûmerek, plur. sûmerki « crépuscule ».<br />
Pol. mierzk, et zmierzch de (zJmierzchac siç usuel pour mierzkac<br />
siq.<br />
Tch. smrk ; — slov. mrk « obscurcissement », pomïk ; — s.-cr.<br />
mfk «sombre», adj., à côté de mrkl-, ancien et dial. pomrk et<br />
pomrka.<br />
Lit. mérkli «cligner des yeux», itér. markyti (§ 498) : mirka,<br />
aky-mirka « clin d'œil », et masc. ùzmarka « qui cligne de l'œil » ;<br />
— véd. markâh « obscurcissement (du soleil) ».
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 153<br />
V. si. sû-vraskati «rider» (J. Ex.), slavon su-mrûskati :<br />
Y. si. vraska « ride » (Cyr. Jér.), slavon suvraska.<br />
Tch. vrâska ; — s.-cr. vrâska ; — slov. vrâska et vrâsk.<br />
Et sur le thème *mïrsk- :<br />
Pol. marsk « ride, pli », zmarsk et zmarska (marszczyc « plisser,<br />
rider ») ; — h. sor. zmorsk « ride ».<br />
S.-cr. mrska « ride », dial. smrska « plis d'une manche de chemise »<br />
(smrskati «rider»).<br />
Il s'agit évidemment du même thème verbal, en -(s)kati sur<br />
une racine *vïr(s)~ qui n'est plus identifiable, avec différenciation<br />
secondaire en *s(u)vïr- et *s(u)mïr- comme dans svç(d)ngti et<br />
smç(d)nçti «se roussir» (§ 762), où la forme ancienne est svçd-<br />
(§ 494).<br />
V. si. zrucati « regarder » ( § 542) :<br />
Y. si. zraku «vue, aspect» et prizrakû, ozraku (Upir'), pozrakû<br />
(Hés., XLVII, 12) ; slavon zazraku « reproche ».<br />
R. zôrok « figure », ozorôk (gén. ozorkâ) ; et formes slavonnes zrak,<br />
prizrak, prozrâk.<br />
Pol. wzrok « vue, regard », v. pol. zrok.<br />
Tch. zrak « vue », prizrak « apparition, fantôme », zâzrak « prodige<br />
».<br />
S.-cr. zrâk « air (atmosphère) », zràka « rayon », anciens prizrak<br />
et prozraka ; — slov. zrâk « air », et zrâka du croate.<br />
Sur le thème *zïrk- :<br />
Pol. zerk « action de lorgner, zerkac ».<br />
Le substantif v. si. zraku est en même temps un dérivé en -kû<br />
(§ 1037) : formation parallèle à celle du verbe *zïrcati sur le thème<br />
*zïr-, et qui devient postverbal de *zïrcati.<br />
V. si. brëze-, brësti, « se soucier de », part, passé brûgu :<br />
R. beréc' «garder» (§ 435) : oborôg «meule» (chez Gogol'), qui<br />
est ukr. oborih ; — pol. brôg « meule, grange » ; •—• v. tch. brah,<br />
dial. obrah.<br />
Et sur le thème *bïrg- :<br />
V. tch. brh « hutte, tente ».<br />
Y. si. strëze-, strësti, «garder» :<br />
V. pol. nastroga « appât », mod. przeslroga « avertissement » et<br />
ostroga.<br />
Tch. ndstraha « piège tendu, appâts », ostraha « soin, garde »,<br />
vystraha « mise en garde, avertissement ».
154 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Sur le thème *sterg- :<br />
R. sterëga « garde », ôslereg et osterëga « mise en garde », pôdsiereg,<br />
posterëg, pri-, u-, et posterëga, pod-, u-,<br />
Pol. zastrzeg « réserve ».<br />
Tch. streh « garde », vystreha.<br />
Slob. postrêga, ustrêga, sur postréci « avoir soin », ustréëi<br />
« acquiescer » ; — s.-cr. ancien strijega.<br />
Sont à part v. si. oslrogu « enceinte de pierre, palissade,<br />
palanque », et r. ostrogà « harpon » et « éperon », s.-cr. àstroga, etc.,<br />
qui sont (de quelque façon) en rapport avec l'adjectif ostru « aigu »<br />
(§ ion).<br />
Pour l'adjectif v. si. sragu « rigoureux », voir § 775.<br />
Lit. sérgêti « garder » (§ 435) : sârgas « gardien », sargà « garde »,<br />
âpsarga, atsargà.<br />
V. si. vrûze-, vrësti « jeter » :<br />
V. si. izvragu. « avorton » (Pand. Ant., I Cor., XV, 8).<br />
Slov. izvrâg, mais slavonisme.<br />
Sur le thème *vïrg- :<br />
Slavon izvrugu.<br />
R. izverg « avorton », privérg « attaque de maladie ».<br />
Tch. vrh «jet», nâvrh «projet, plan», podvrh «substitution,<br />
falsification », vyvrh « action d'étriper, tripes ».<br />
S.-cr. izvrg « ce qu'on rejette », podvrg ; — slov. izvrg et izvrga,<br />
podvrga.<br />
D'autre part, de l'expression v. si. metaii (perf. vrësti) zrëbijç<br />
«jeter les sorts» se tire v. si. vrazenije « divination », r. vorozit'<br />
« dire la bonne aventure », et de là :<br />
r. dial. vôrog « devin » (vorozejâ, § 1033) ;<br />
pol. ancien wrôg « sort, divination », mod. wrôz sur wrôzyc « faire<br />
le devin ».<br />
Mais v. si. vrayu « ennemi », r. vôroy, etc., est un emprunt au<br />
germanique d'après son dérivé vrazïda (§ 1007).<br />
*pïrsati « s'éparpiller », factitif v. si. ras-prasili « disperser »<br />
(§ 592) :<br />
Y. si. praxu « poussière ».<br />
R. pôrox, et porôxa « première neige ».<br />
Pol. proch, rozproch ; — tch. prach, slov. et s.-cr. prâh, « poussière »<br />
et « poudre ».<br />
Sur le thème *pïrx- :<br />
Pol. rozpierzch.
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 155<br />
Tch. prch « fuite », prch et prcha « pluie », sprcha « douche ».<br />
S.-cr. ôprha « légère couche de neige ».<br />
Slov. oprh «moisissure», sprh «muguet (maladie), aphte».<br />
R. sporx, vsporx sur (s-)porxnût' «s'envoler», et vsparx sur<br />
l'imperfectif vspàrxival' «prendre son essor» (§ 657).<br />
V. si. -srùxnçti dans vûsrùxlu «rugueux» (§ 1048), factitif<br />
vusrasiti « rendre inégal » (Gr. Naz.) :<br />
R. sôrox « bruit par frottement » et « surface inégale, aiguille<br />
de glace », en regard de sôrxnut', sorosit' « bruire, crépiter » et<br />
« rendre rugueux », avec sors- pour sors- comme dans sérsen'<br />
« frelon » pour *sïrsen- (§ 183), et voir sersl' « laine », § 1169.<br />
Sur le thème *sïrx- :<br />
Slov. sfh « frisson », (sfhati « hérisser les cheveux »).<br />
S.-cr. sfh « angle saillant, arête », anciennement « âpreté »,<br />
plur. srsi « frissons, chair de poule », cak. strh « épouvante » (strsiti<br />
« se hérisser, saillir »).<br />
En baltique, lit. sefsas « frisson ».<br />
V. si. vrùse- « battre sur l'aire» :<br />
Slavon vraxu « battage- tas de blé ».<br />
R. vôrox «tas (de blé)»; perevorôx et perevorôxa «remueménage<br />
», razvorôx « éparpillement », zâvoroxa (et zâvoros') « tourbillon<br />
» (voros'û' « remuer, fouiller »).<br />
Bulg. vrah « blé à battre », macéd. vrav et composé zimovrav<br />
« buttage de la vigne à l'automne ».<br />
Sur le thème *vïrx- :<br />
Bulg. vrâh sur vârsé<br />
(Et r. vers' « grains battus », slov. vrs « céréale », § 713).<br />
§ 772. Alternances moins claires, ou sans alternance. — V. si.<br />
glasiti « appeler » :<br />
Y. si. glasu «voix», nevëglasu «ignorant» (§ 1225), razglasu.<br />
« désaccord » (Cosmas), slavon priglasu.<br />
R. gôlos et glas, oglâs « publication », podglâs, proglâs, soglâs,<br />
vôzglâs « exclamation », et ôtgolos « résonnance », prigolos, pôgolos<br />
et pâgolos « écho » (§ 1220).<br />
Pol. nagios « son initial », odglos « écho », ogios et rozglos<br />
« écho, retentissement », przeglos « métaphonie, inflexion », przyglos<br />
« accent », wyglos « prononciation ».<br />
Tch. ohlas « écho », rozhlas « diffusion ».<br />
S.-cr. ôglâs, prijèglas, prôylâs et naylas.
156 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Slov. naglàs, o-, od-, pre-, pri-, pro-, raz-.<br />
Base glasu, dérivé en -su (§ 1135) du thème *gal- de glagolati<br />
« parler » (§ 555).<br />
V. si. klatiti « secouer » :<br />
R. kôlot « pilon (de mortier) », dôkolot, pôkolot (et fém. pôkolot'),<br />
nakolôi, pod-, pere-, pri-, pro-, ras-, s-, u-, vîjkolot, zâ- ; — ukr.<br />
kôlot « tumulte ».<br />
Pol. dial. klot «billot» et «gerbe battue»; oklot (oklôt) «gerbe<br />
légèrement battue », przyklôta « paille pour litière ».<br />
V. tch. et slovaque klât « billot ».<br />
S.-cr. klâto « joug, collier » ; — slov. klâto et klâta.<br />
Base *kal-ta-, lit. kâltas «ciseau», dérivé en *-to- (§ 1160).<br />
Slavon mlatiti « battre au fléau » :<br />
V. si. mlalu. « marteau ».<br />
R. môlot « marteau » ; nâmolôl « produit du battage », o(b)molôt,<br />
ûmolot, vy-, zâ- (et zâmolol').<br />
Pol. miôt, umlôt, wymlôt.<br />
Tch. mlat « gros marteau » et « aire à battre », wymlat « grain<br />
battu ».<br />
S.-cr. mlât « marteau » et « fléau », ômlât « gaule ».<br />
Slov. mlât « marteau », omlât « dépiquage » (et fém. mlât).<br />
Il est net que mlalu a désigné un marteau, une mailloche, une<br />
batte, avant que mlatiti ne se soit spécialisé au sens de « battre<br />
au fléau ». Il s'agit vraisemblablement d'un dérivé sufïixal en -tu<br />
(§ 1160), mais non sur la racine si. mel- « moudre », car il n y a pas<br />
de rapport entre la mouture et le dépiquage. On a pensé à la racine<br />
de lat. malleus et marculus « maillet, marteau ».<br />
V. si. mladu «tendre, jeune» :<br />
R. molodiï « rajeunir » : pôdmolod (et fém. pôdmolod', primolod')<br />
« kvas de repasse qu'on renforce ».<br />
Pol. podmloda « levain renforcé ».<br />
Slov. omlàd et omlâda « pousse, rejeton » (et fém. omlâd<br />
«rajeunissement», pomlâd «printemps»); — s.-cr. omlada (et<br />
fém. ômlâd) « jeunes pousses ».<br />
En baltique, v. pr. malda- «jeune»; skr. mrdûh «tendre»,<br />
gr. à[xaX8iSvw «j'affaiblis», lat. mollis (de *moldw~) : élargissement en<br />
-d(h)- (§ 1001) de la racine de gr. àjzaXoç « tendre ».<br />
V. si. -sladiti :<br />
R. sladit' « rendre doux » : uslâda « délectation » ; et solodit'<br />
« malter » : sôlod « malt », nâsolod et nâsolôda, osolôd, perésolod et<br />
peresolôda, usolôd.
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 157<br />
Pol. siodzic « sucrer » et « malter » : slôd « malt », osioda « adoucissement<br />
», przyslod «douceur qui s'ajoute», wyslôd «extrait de<br />
macération » ; —• tch. slad « malt ».<br />
S.-cr. nâslada « délices », zàslada « sucreries », ôslâd « polypode »<br />
(fougère à racine sucrée).<br />
Slov. slâd « malt » et « douceur » (et fém. slâd), naslâda, zaslâda<br />
« dessert sucré » (du serbo-croate), poslàd et poslâda « adoucissement<br />
» ; oslâda « douceur » et oslàd « délices, condiment » et<br />
« polypode ».<br />
Thème *sald-, voir v. si. slastï «délectation», § 1169.<br />
Y. si. vlade-, vlasti « gouverner » :<br />
R. vladét', slavonisme : ovlâd et ovlâda, zavlâda.<br />
Pol. wiadac pour v. pol. wiodac : wtada ; — tch. vldda « gouvernement,<br />
règne ». ,<br />
S.-cr. vldda, et nouveaux nadvlada, etc., comme en slovène.<br />
Slov. vldda et nadvldda, obldda, prevlâda, zavlâda.<br />
Lit. veldëti, etc. ; mais probablement emprunté et adapté du<br />
germanique (§ 430).<br />
V. si. -xladili « rafraîchir » :<br />
V. si. xladu « froid, fraîcheur ».<br />
R. xôlod et xlad, proxlâd et proxlâda « fraîcheur (du temps »),<br />
oxlâda (et fém. prôxolod', ôxolod').<br />
Pol. chiôd, ochlôd et ochioda ; — tch. chlad, ochlad et ochlada.<br />
S.-cr. hlâd, nâhlada et nâ- « refroidissement, rhume », ràshlada<br />
« rafraîchissement », et russismes ohlada, prohlada.<br />
Slov. hlâd, ohlâd et ohlâda.<br />
Base v. si. xladu, mot isolé, sans rapport avec lit. sâllas dont<br />
le thème sal- apparaît en slave dans v. si. slana « gelée blanche »<br />
(§ 1075) ; mais si proche de v. si. kladedzï « puits », dérivé en -çdzï<br />
(§ 1015) sur got. kalds «froid», qu'il faut supposer un emprunt<br />
au germanique avec substitution de x-kk-: un « hypergermanisme »,<br />
si. k et germ. x se répondant clairement dans un bon nombre de<br />
cas, ainsi si. cëlû et got. hails «sain» (§ 10).<br />
V. si. place-, plakali « laver, rincer » :<br />
Pol. plôk « rinçage », plôka « bassin pour laver le minerai »,<br />
oplôk « cuvette des cabinets », wyplôk « rinçures ».<br />
Tch. dial. splak « égouts d'un toit », slovaque poplaky « rinçures ».<br />
S.-cr. splàka « flaque cj'eau » ; — slov. oplâk, poplàk, splâk et<br />
oplâka, poplâka « rinçurés ».<br />
Et russe poloskâl' (§ 561) : dôpoloski (plur.), ispolosk, nâ-, pré-,<br />
vy-, perepolôsk, pri-, s-, vs-, zapolôsk et plur. zâpoloski, ôpolosk et<br />
opolôska, plur. opolôski, « rinçures ».
158 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Slavon plasiti « effrayer » :<br />
V. si. plaxu «inquiet, agité» (Pand. Ant.), adj. ; slavon plaxu.<br />
« alarme ».<br />
R. polox « alarme », perepolôx, vspolôx.<br />
Pol. plochy « étourdi », popioch « terreur » et przepioch.<br />
Tch. plachî) « peureux, ombrageux », vëlroplach « étourdi »,<br />
poplach « alarme », v. tch. prieplacha « frayeur ».<br />
S.-cr. plàh « ombrageux », poplaha.<br />
Base v. si. plaxû, peut-être adjectif à suffixe -xu (§ 1138).<br />
V. si. o-glaviti (Pand. Ant.) «définir sommairement, xeçaAaioov» :<br />
R. oglâvil', et ogolovil' « mettre une tête » : slavon (oglavï « licou »,<br />
r. ôgolov').<br />
Pol. (oglôw « licou », fém. et masc., gén. oglowi et -wia, § 1020).<br />
Slov. ogldviti : oglàv «dessus de soulier, empeigne» et «licou».<br />
S.-cr. glâviii « fixer, stipuler », tiré de uglâvili : ôglâv « licou »,<br />
ôglava « empeigne », prêglava « barre du joug», ùglava «stipulation ».<br />
Base v. si. glava « tête », balto-slave *gâl-va (§ 1185).<br />
§ ,773. — V. si. brazda « sillon » :<br />
Et pol. brôzda, tch., s.-cr. et slov. brâzda.<br />
R. borozdâ, borozdW « tracer un sillon » : proborôzd (et fém.<br />
prôborozd'), vyborozd.<br />
Mot à finale -da sur thème peu clair (§ 1003).<br />
V. si. yraditi « bâtir » :<br />
V. si. gradu « enceinte, jardin, ville », composés vinogradu<br />
«vignoble», vrutogradu «jardin» (§ 1230) ; ograda «enclos, parc»<br />
et ogradu «jardin» (Upir'), prëgradu (J. Ex.) et prëyrada (Gr.<br />
Naz.) « mur de séparation », prigradu « vestibule » ; slavon zagrada<br />
« enceinte », et v. si. dans adj. zayradïnu.<br />
R. gôrod et grad, vinogrâd ; izgorôd, nad— o-, ot-, pod-, pere-,<br />
raz-, u-, v-, vygorod, zâgorod ; prigorôd « ajout à un enclos », mais<br />
prigorôd «faubourg» est un composé prépositionnel (§ 1219);<br />
et fém. (i)zgorôda, o-, ot-, raz-, perégorôda, prigorôda, zâgorôda<br />
(et izgorod', ô-, pri-, roz-, zà-) ; slavon ogrdda «clôture, protection»<br />
et ogrâd (ôgrad'), zagrâda.<br />
Pol. grôd, ogrôd « jardin » et ogroda, nadgroda, od-, po-, prze-,<br />
za-, et wqgroda (§ 1223) ; przygrôd « faubourg ».<br />
Tch. hrad. ohrada « enceinte », prihrada et pre- « cloison », zahrada<br />
«jardin»; ûhrada «couverture, garantie de paiement», vyhrada<br />
« réserve, restriction ».<br />
S.-cr. grâd, ograda et ancien ograd, prëgrada, dégrada et prlgrada
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 159<br />
« annexe d'un bâtiment », zàgrada « clôture, parenthèse » et zâgrad,<br />
zgràda « édifice ».<br />
Slov. grâd, ogrâd, prégrad, prîgrad, zagràd, et ogrâda, pre-, pri-,<br />
za-.<br />
Il faut mettre à part :<br />
R. nagradit' « récompenser, rémunérer », nagrâda « récompense »,<br />
ukr. nahorôda ; — pol. nagrodzic « récompenser, indemniser »,<br />
nagroda « récompense » ; — tch. nahraditi « remplacer, indemniser »,<br />
nâhrada « dédommagement ». Pour s.-cr. nàgrada et slov. nagrâda,<br />
ce sont des emprunts du xix e siècle au russe, et le russe, avec sa<br />
forme slavonne sans aucune justification en slavon, est un emprunt<br />
au polonais avec adaptation de -groda en -grada. Le vieux-tchèque<br />
nahraditi signifie « compenser, rembourser (des dépenses) » ; il<br />
peut s'expliquer par « restaurer (une clôture, un bâtiment) », et<br />
il est hardi d'y voir avec Y. Machek une conservation avec altération<br />
du thème v. si. êlëd-, zlad- « compenser » (§ 430). Le tchèque ûhrada<br />
« garantie d'une traite » est en regard de uhraditi « rembourser<br />
(une traite) », qui peut rendre ail. bûrgen « cautionner » avec<br />
rattachement (fautif) à Burg « château ».<br />
Le mot v. si. gradû, lit. gardas, est un emprunt au germanique,<br />
et la forme balto-slave, lit. zdrdas (§ 12), est en slave :<br />
R. zorôd « enclos d'une meule », ozorôd « séchoir pour la paille »,<br />
et ukr. et bl.-r.<br />
V. si. sramiti « faire honte » :<br />
Y. si. sramu « honte », osrama (J. Ex.).<br />
R. sramit' et (o)sorômit' : sram (ukr. sèrom), ôsorôm, bl.-r.<br />
pôsorom.<br />
Slov. osrâmiti (savant) : osrâma.<br />
Le mot v. si. sramu n'a de correspondance que dans av. fsardma-<br />
« honte » (de *psormo-), persan sarm, et il est si proche du mot<br />
iranien qu'il suggère l'idée d'un emprunt.<br />
V. si. branï « lutte », branili « défendre » :<br />
R. oborôna « défense, soutien », otborôn.<br />
Pol. obrona et v. pol. zabrona.<br />
Tch. obrana, ùbrana, zâbrana ; composé domobrana « milice<br />
territoriale ».<br />
Slov. brâna, obràn et obrâna, zabrâna.<br />
S.-cr. brâna « défense, protection », obrana, ôdbrana, zâbrana,<br />
et zâbran « bois protégéj interdit ».<br />
On a un autre mot dans :<br />
R. boronâ « herse », boronit' « herser » : pereborôn de pereboronit'<br />
« herser de nouveau ».
160 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. brona ; — tch. brâny, plur. ; —• slov. et s.-cr. brâna.<br />
V. si. branï est un dérivé en -ni (§ 1083) de la racine du verbe<br />
borje-, brati « lutter ». Le mot *barnâ est d'origine moins claire,<br />
mais ce peut être un dérivé en -na (§ 1075) de la même racine<br />
ou d'une racine voisine : si l'on compare borje- à lat. feriô «je<br />
frappe» (§ 530), on peut comparer *barnâ à lat. forô «je perce»,<br />
gr. cpocpô « je laboure », (pàpoç «terre labourée » ; et voir *bûrtï « ruche<br />
(arbre creux)», § 1170.<br />
V. si. xraniti « garder » :<br />
V. si. xrana dans l'adverbe xranïno « avec sûreté ».<br />
R. xoronit' « cacher, enterrer », slavon xranit' « garder » : xorôna<br />
et xrâna, action de ces verbes ; oxrâna « garde, protection », ukr.<br />
et bl.-r. oxorôna ; soxrân et bl.-r. soxrâna ; uxorôn, zaxorôn ; plur.<br />
pôxorony « funérailles ».<br />
Pol. chronic « abriter, protéger » : v. pol. chrona ; ochrona « protection<br />
», uchrona « asile, refuge » et ancien uchron ; pochrona,<br />
zachrona, schrona et schron.<br />
Tch. chrdniti « préserver » : chrana et ochrana, ûchrana « protection<br />
schràna « abri », zachrana « sauvetage ».<br />
S.-cr. hrâniti « nourrir » et « garder » : hrâna « nourriture »,<br />
ïshrana, nâhrana, ôthrana, prëhrana « nourriture, élevage » ; pôhrana<br />
« dépôt, consigne », sàhrana « inhumation ».<br />
Slov. hrâniti « garder » et « nourrir » : hrâna « nourriture »,<br />
ohrâna « conservation », shrâna « dépôt ».<br />
Base v. si. xrana, dérivé en -na (§ 1075).<br />
V. si. podrayù « bordure de vêtement, frange » ; — v. tch. podrahy<br />
« franges » ; — h. sor. podrohi « ourlets ».<br />
Slavon nadragy « caleçon » (le cache-sexe du prêtre prescrit<br />
par Ex., XXVIII, 42) ; — r. nadrâgi, slavonisme (chez les vieuxcroyants)<br />
; — pol. ancien nadragi « culotte », par le hongrois<br />
nâdrâg.<br />
R. sûdoroga «crampe» (§ 1222); — slov. sçdrag et sçdraga<br />
« grésil, grêle » et « ravin » (et sçdrga « grêle ») (§ 809).<br />
Ces mots se rattachent sans difficulté au thème *dïrg- de *dïrgngti<br />
«tirer, etc. », qui a ses postverbaux (§ 809). Et le slovène sçdraga<br />
« ravin » est lié à un autre mot, qui s'explique moins clairement par<br />
le thème *dïrg- :<br />
Slov. drâga « ravin, baie, canal (d'irrigation, de moulin) » ;<br />
— r. dorôga « chemin » et pol. droga, tch. drâha, avec des composés<br />
r. zâdoroga « bas-côté de la route, du poêle », ûdoroga (et ùdoroz')<br />
« endroit près de la route » tirés de locutions prépositionnelles,<br />
et non de verbes.<br />
L'adjectif dragu « cher » est à part (§ 821).
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 161<br />
V. si. sûdravu « en bonne santé », r. zdorôvyj, s.-cr. zdràv, etc. :<br />
Pol. ancien zdrowic « saluer » : pozdrowa « salut ».<br />
Tch. zdravili : pozdrav (récent).<br />
S.-cr. zdràvili « recouvrer la santé » et « saluer » : pôzdrâv (depuis<br />
le xvn e siècle), et ôdzdrâv « réponse à un salut », rarement pozdrava,<br />
et rarement ozdrav et ozdrava « rétablissement de la santé ».<br />
Slov. zdraviti : pozdràv, ozdràv et pozdrava, ozdrâva.<br />
Le mot de base, v. si. sû-dravu, est isolé, mais peut être un ancien<br />
postverbal (§1182).<br />
Y. si. nravu « mœurs, caractère » :<br />
R. nôrov « usage, habitude ». et nrav « caractère », plur. nrdvy<br />
« mœurs », nrâvit'sja « plaire » et norovit' « chercher l'occasion » :<br />
Iznorôv « savoir-faire », pônrav et pônorôv « habitude », prinorôv,<br />
snôrov, unorôv.<br />
Tch. mrav « habitude », nemrav « mauvaise habitude », et masc.<br />
nemrava « homme immoral ».<br />
Dérivée en -vu (§ 1183), isolé en slave, d'une racine *nerlargement<br />
représentée ailleurs : lit. nôras « volonté », nafsas<br />
« vivacité », v. pr. nerti « colère », skr. nar- et gr. àvvjp « homme ».<br />
§ 11 A. Groupe *ar- initial. — V. si. raste-, rasti « croître » :<br />
V. si. raslu et vùzrastu « croissance, âge ».<br />
R. rosi « taille, stature », vôzrast (slavon) « âge » et vzrosl, dorôsl,<br />
iz-, na-, nad-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-,<br />
za-, vyrost et vyrasl (et fém. ndrost', pô-, prô-, zd-).<br />
Pol. rost, narost, nad-, ob-, od-, po-, pod-, prze-, przy-, roz-, u-,<br />
wy-, wz-, z-, za-.<br />
Tch. rost et rùst, nerost « minéral », dorost, po-, pod-, (v)zrûst.<br />
S.-cr. rdst, brzorâst« (maïs) hâtif », sàmordsta plantes qui poussent<br />
d'elles-mêmes », pordsl et prlrast et ancien narast « accroissement »<br />
fozrâst « taille » (et fém. pôdrâst, prôrdst).<br />
Slov. rdst, dorâst, iz-, vz-, naràst, ob-, po-, pri- (et fém. rdst,<br />
nardst, ob-, pod-, raz-, vz-, z-, za-).<br />
Est à part s.-cr. nërâst « verrat » (et fém. nârast « accouplement<br />
du coq »), en regard de (na)rdstiti se « s'accoupler », sur un thème<br />
*ners- (§ 1160), comme slov. merjdsee «verrat» en regard de<br />
mrêst « rut ».<br />
/<br />
Y. si. (ne) roditi, (ne) raditi (§ 70) «(ne pas) se soucier» :<br />
V. si. oturaditi « remettre, pardonner » : oiurada « rémission ».<br />
R. radét' « avoir soin, avoir du zèle », pour v. r. raditi ( § 595) :
162 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
pordda « secours, aide », et otrâda « soulagement, consolation »,<br />
du slavon.<br />
H. sor. njerodzic « ne pas se soucier » : njeroda « négligence,<br />
désordre ».<br />
V. tch. neroditi « ne pas vouloir » : neroda « non-vouloir, dégoût » ;<br />
et tch. mod. neruda, masc., « homme maussade, désagréable »,<br />
qui rejoint zrûda « dégénéré, monstre », de rod (§ 738).<br />
S.-cr. rdditi « travailler » : rdd « travail », nërâd « inaction »,<br />
ïzrada « exécution », ôbrada « élaboration », prërada « remaniement<br />
», zârada « profit ».<br />
Ces formes dérivent sûrement d'un thème *ard- d'intonation<br />
douce, tandis que l'adjectif v. si. radu « disposé à, content »,<br />
d'intonation rude, r. rad, fém. rdda, s.-cr. ràd, doit dériver de<br />
*râd-, et que la préposition (postposée) v. si. radi « à cause de », r.<br />
rddi, s.-cr. ràdi (râdi), répond au vieux-perse -râdiy. Si l'adjectif<br />
radu se laisse rattacher à skr. râdhnôli « il vient à point, il réussit »,<br />
got. garëdan « prendre soin », prêt, -rairôp, il ne peut pas en être<br />
de même du thème *ard-, qui reste inexpliqué.<br />
On retrouve par une autre voie le thème *râd- dans pol. rada<br />
« conseil », etc., voir § 785.<br />
Y. si. rabu, robu, «esclave» et «serviteur» (§ 70) :<br />
Pol. robic « faire », wyrobic « produire » : wyrôb et wyroba « production,<br />
produit manufacturé » ; et zarobic « pétrir » : zaroba<br />
« mortier ».<br />
Tch. porobiti « asservir », vyrobiti « fabriquer » : poroba « servitude »,<br />
vyroba et vyrob « production ».<br />
S.-cr. porabiti (ancien) et upordbiti « faire usage de » : poraba et<br />
foporaba « usage, emploi ».<br />
Slov. râbili « employer » : raba « emploi » et zlordba « abus »,<br />
porâba, uporâba, izrâba, obrâba.<br />
Si v. si. rabu « esclave » a un rapport un peu lointain avec<br />
le groupe de lat. orbus « privé de, orphelin », le verbe, dans tout<br />
le domaine slave occidental, répond directement par son sens<br />
au germanique, got. arbaips « travail », ail. Arbeit, et l'hypothèse<br />
d'un emprunt doit être envisagée : d'un emprunt du germanique<br />
au slave, puisque les Germains prenaient leurs esclaves chez les<br />
Slaves.<br />
§ 775. — Divers. — Beaucoup de mots à vocalisme radical *-alou<br />
*-ar- ne paraissent pas avoir de rapport avec les postverbaux.<br />
Ainsi v. si. klasu « épi », r. kôlos, qui peut être un dérivé en -su<br />
(§ 1135) ; tch. prâm «bac», r. porôm, dérivé en -mû (§ 1066) ;<br />
brada « barbe », r. borodd (lat. barba), qui est inanalysable, de
[§ 769] VOCALISMES RADICAUX * -al-, * -ar- 163<br />
même que xlapû « serviteur, valet », r. xolôp ; prazû « verrat,<br />
bélier », r. pôroz, sans doute altération de *pars-, lit. parsas<br />
« porcelet », v. r. porosç ; etc.<br />
Y. si. pragu « seuil », r. porôg, s.-cr. pràg, d'intonation rude,<br />
doit être sur le thème *perg- qu'indique le rapprochement avec<br />
lit. pérgas « pirogue », lat. pergûla « construction en saillie », v. isl.<br />
forkr « rondin ».<br />
V. si. xvrastu « buisson » (Upir'), r. xvôrosl « broussailles », s.-cr.<br />
hrâst « chêne », etc., a l'aspect d'un postverbal de verbe onomatopéique<br />
en -iati, -tëti, et le tchèque a chrastëti « bruire » ; le<br />
germanique *xurst-, v. h. a. hursl « buisson », mod. Horsl, doit<br />
être de même origine.<br />
Y. si. klada « bloc de bois », d'où « carcan », r. kolôda « tronc<br />
d'arbre, billot », pol. kloda, tch. klâda « poutre », s.-cr. klada<br />
« bûche » et slov. klâda, d'intonation rude, est isolé, et il faut en<br />
séparer v. si. prëklada « traverse », postverbal du thème klad-<br />
(§ 785). On en a rapproché v. h. a. holz « bois », mais le mot germanique,<br />
v. angl. holt, désigne le « bois » au sens de « forêt ». On doit<br />
penser à un dérivé en -da de la racine de v. si. kolje-, klati, ou<br />
plutôt, comme pour une partie des mots en -da (§ 1003), un<br />
postverbal d'un présent suffixal en -de- de la racine balto-slave<br />
kal-, lat. -cello de *kel-de- (§ 530). L'intonation rude se trouve dans<br />
l'infinitif, lit. kâlti, s.-cr. klàli (§ 687).<br />
L'adjectif v. si. sragû «terrible, redoutable» (Gyr. Jér., Hés.,<br />
II, 5) a connu une grande extension sous sa forme polonaise srogi<br />
« sévère », transmise au russe strôgij et de là à tch. strohy, s.-cr.<br />
strôg, slov. strôg. Un rattachement à la racine *slerg- de v. si.<br />
strësti «garder», serg- du baltique (§ 435), n'est pas impossible, et<br />
doit aider à l'explication de la divergence entre le slave et le<br />
baltique. Il suffit de partir d'un degré réduit *srg-, avec développement<br />
parallèle de degré plein *serg- et *sreg- (§ 117), et généralisation<br />
en slave de la forme nouvelle st- prise à *sireg-, sauf la<br />
conservation isolée de *serg- dans l'adjectif *sarga- répondant<br />
au substantif lit. sargà «garde» (§ 771). Le rapprochement est<br />
alors avec le germanique qui offre le degré réduit : got. saurga<br />
« préoccupation, souci » ; de l'idée de souci, le passage est aisé à<br />
celle de surveillance sévère.<br />
On a un thème krok- «marcher» (§ 770), et un thème *karkdans<br />
:<br />
V. si. iskracilo « instrument de torture », du slavon iskraciti<br />
«tordre les jambes»; et f okorokû «jarret (de cheval)» (Ham.),<br />
en slavon russe pour okraku.<br />
R. ôkorok « jambon ».<br />
Bulg. krak « jambe », krâëi- « enjamber, marcher ».
164 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
S.-cr. krâk « jambe », composés dvôkrak « à deux pattes », golàkrak<br />
« aux jambes nues ». v. serbe dlgokrak « aux longues jambes » ;<br />
ancien et dial. okrak « pied (de porc) », cak. ôkrak « tibia ».<br />
Slov. krâk « cuisse », krâka et okrâk « pied de porc », s krâk « pied<br />
de derrière ».<br />
Et un thème korak- :<br />
R. korâëit' « faire reculer » et ras-korjâcit' « écarter les jambes »,<br />
subst. masc. korjâka et raskorjâka « homme qui marche les jambes<br />
écartées ».<br />
S.-cr. korâëili « marcher », perf., imperf. koràëali, korâk « pas »,<br />
râskorâk et locution ù raskorâk « en écartant les jambes ».<br />
Slov. korâëili, imperf., et korâkali « marcher», korâk « pas ».<br />
La comparaison est seulement avec lit. kârka « pied de devant<br />
du porc avec l'épaule » et dial. kirkâlis « croupion » ; elle autorise<br />
à poser une racine balto-slave kirk-, analogue à celle de lat. circus<br />
« cercle », gr. xipxoç « anneau », qui est une racine expressive à<br />
redoublement « brisé ». Sur cette racine kirk- à degré réduit, le<br />
jeu des alternances a pu donner deux thèmes *kark- et *krak-,<br />
qui se sont spécialisés sans s'écarter complètement : *karku<br />
« jambe », avec r. ôkorok « jambon », slov. s krâk « pied de derrière »<br />
qui paraissent plutôt des composés nominaux, tirés de locutions,<br />
que des postverbaux; kroku «pas», avec une forme krak- dans<br />
l'itératif ; et la valeur expressive de l'idée de marcher à grandes<br />
enjambées ou les jambes écartées a dû amener le recours au<br />
pseudo-préfixe ko- (§ 1219) et transformer kraciti en koraëiti.
CHAPITRE IX<br />
VOCALISME RADICAL -a-<br />
§ 776. Alternance ë : a. — V. si. -lëze- « grimper », itér. -laziti :<br />
V. si. sùlazù, vûlazu, zalazu, izlazu (J. Ex.), slavon polazû.<br />
R. laz « passage, coulée de gibier » et lâza, dolàz, iz-, ob-, ot-,<br />
po-, pod-, pere-, pro-, s-, u-, v-, vz-, za-, vylaz (et fém. s laz', zâlaz') ;<br />
masc. lâza « homme insinuant », et oblâza, pod-, pere-, pro-.<br />
Pol laz « essart » et « passage (de l'ours) », oblaz « chemin<br />
détourné, sentier » et oblaza, przelaz « passage », przylaz ; et wlaz<br />
« homme qui se glisse, intrus » et masc. wlaza.<br />
Y. tch. laz, lâz « essart », prielaz et mod. pri-,<br />
S.-cr. lâz « passage » et « essart », dolaz, iz-, nâ-, prijè-, pri-,<br />
prà-, râz-, ù-, zâ-, slâz et silaz.<br />
Slov. lâz, lâz « espace vide, essart », oblâz, prélaz.<br />
Et sur le thème lëz- :<br />
R. priléza « homme importun ».<br />
Tch. nâlez « trouvaillè », vynâlez « invention ».<br />
Slov. zlêz « descente », 1 zalèz « coucher du soleil », et zalêza et<br />
podlêza « surprise », nalêza « fait d'attraper une maladie ».<br />
V. si. rëze-, rëzati « entailler », -raziti « frapper » :<br />
V. si. obrazu « figure », locution sa razu « tout d'un coup » (J. Ex.).<br />
R. raz « coup » et « fois » (§ 330), izrâz « modèle, patron », urâz<br />
« coupe », zarâza « contagion » ; obrâz « image » et obrâza « pudeur »,<br />
bezobrâza « laideur, indécence » de bezobrâzit' « défigurer, enlaidir ».<br />
Pol. raz « coup, fois », naraz, obraz « image », od-, po-, pod-, prze-,<br />
u-, w-, wz-, z-, wyraz « expression », et doraza, obraza « offense »,<br />
od-, nad-, pod-, prze-, u-, pa-,<br />
Tch. râz « coup coin d'une monnaie, caractère », obraz, doraz<br />
(duraz), nâ-, od-, roz-, û-, sraz (srâz), vyraz «expression» (du<br />
polonais ».<br />
S.-cr. râz « racloire. versoir ». àbraz « face ». ddraz « reflet ».
166 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
pôrâz « désastre », srâz « collision » ; ïzrâz « expression » (xix e s.),<br />
comme pol. wyraz et tch., et adapté de r. vyrazénie (§ 825) ; fém.<br />
zàraza « infection ».<br />
Slov. râz « encoche » et râza « fente », izràz « expression », ob-,<br />
od-, po-, preràz « action de biffer », uràz « blessure » et urâza.<br />
Sur le thème rëz- :<br />
R. rez « tranche » (fém. rez' « tranchées, colique»), doréz, iz-, na-,<br />
nad-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-, vz-, za-,<br />
vyrez (fém. ndrez', ndd-, ôt-, pod-, prô-, s-, û-, vy-).<br />
Pol. rzaz « coup » (fém. rzez' « massacre »), narzaz, od-, wy-, z-,<br />
dial. porzez « couteau, plane ».<br />
Tch. fez « coup, tranche » et riz « le tranchant », ndrez, o-, prâ-,<br />
s-, v-, vy-, za-, v. tch. obrëz « circoncision » ; parez « souche » (§ 1220),<br />
et fém. riza « coupure ».<br />
S.-cr. rïjez « coupe » (et fém.), novôrez « porc nouvellement<br />
châtré», ndrez «entaille» et prôrez (prô-), rdz-, ù-, zâ-; srëz<br />
« district » ; pôrez et pôreza « impôt » (cf. ital. taglia « taille ») et<br />
prirez « surtaxe ».<br />
Slov. rêz (et fém.), izrèz, na-, od-, pod-, pre-, u-, v-, za-, et izrêza,<br />
na-, od-, po-, pre-, pri-, raz-, u-, za-.<br />
Et en polonais, sur zrzynae, imperfectif de ze-rznqe « découper »<br />
(§ 495) : zrzyn et zrzyna (§ 824) «planche coupée d'un tronc<br />
d'arbre ».<br />
En baltique, lit. rëzti, subst. ruozas « trait » (de *rôz-, § 49) et<br />
rézas, alrèzal (plur.) « rognures ».<br />
Y. si. sësti, sëdati « s'asseoir >>, factitif saditi «asseoir» et<br />
« planter » :<br />
V. si. sadu « plantation, plant », osadu et osada (Ham.) « investissement<br />
» et « place investie » ; slavon et v. r. nasadu « embarcation »<br />
et nasada « batellerie », dosada « outrage, sévice », zasada « garnison »<br />
et « embuscade ».<br />
R. sad « jardin » et sâda « plantation », dosdd « achèvement de<br />
planter », iz-, na-, nad-, ob-, ot-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-,<br />
u-, v-, za-, posâd « faubourg », vysad (et vysad') ; dosdda « dépit »,<br />
iz-, nad-, ob-, ot-, pere-, pri-, raz-, s-, u-, v-, osâda « siège », zasâda<br />
« embuscade ».<br />
Pol. sad « verger », nasad, o-, od-, po-, pod-, prze-, przy-, roz-,<br />
wy-, za- ; et dosada « expression, énergie de caractère », na-, o(b)~,<br />
od-, po-, pod-, prze-, przy-, roz-, wy-, za-.<br />
Tch. sad « verger », nâsad, posad, et sada « série » (ail. Satz),<br />
ndsada, osada « agglomération » et obsada « garnison », po-, pod-,<br />
pri-, vy-, zâ-,<br />
S.-cr. sâd « plantation », rukosâd « plantation à la main », nâsad,
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 167<br />
pàd-, prijè-, pri-, râsad, zâ-, et dôsada « ennui », ôpsada « siège »,<br />
p'ôsada « garnison », pôd-, prë-, ràsada.<br />
Slov. sâd « fruit, produit », nasàd, o-, u-, v-, pôsad, pré-, pri-,<br />
et nasâda, posâda.<br />
Sur le thème sëd- :<br />
Y. si. sçsëdu «voisin» (§ 1222) et fém. sçsëda (§ 708); pour<br />
besëda « entretien », voir § 1231 ; prësëda « embuscade » (Théod.)<br />
et v. r. prësëdu.<br />
R. soséd, soséda ; naséd, o(b)~, ol-, po-, pod-, pere-, pro-, raz-, s-,<br />
za-.<br />
Pol. siad « mouvement assis », nasiad « nid de conveuse », po-,<br />
przy-, roz-, usiada, zasiad et zasiada. ' •<br />
Tch. domased « homme casanier », posed « siège, fait d'être<br />
assis », vysed « façon {le s'asseoir » ; masc. neposeda « (enfant) qui<br />
ne reste pas tranquille », predseda « président ».<br />
S.-cr. pàsjed « possession, domaine », prijèsjed « essaim d'abeilles<br />
pour la propagation », zàsjeda « embuscade ».<br />
Slov. sëd « siège » (et fém. sêd), posed « propriété », podsèd<br />
« affaissement de terrain » et « ecchymose », presèd, obsèd et obséda,<br />
usèd et usêda, zasèd et zasêda, et masc. posêda « personne toujours<br />
assise ».<br />
Sur le thème de slov. -sàjati, imperfectif de -sâditi : nasâj,<br />
razsâj (§ 824).<br />
Et sur le thème sid- de r. sidét' pour v. r. sëdëti : dosid, et masc.<br />
dosida « assis jusqu'au bout (à son travail) », nasid, o(b)~, ot-, pod-,<br />
pere-, pro-, u-, za-, vijsid.<br />
La forme sêd- de la racine *sed- est proprement balto-slave<br />
(§ 446), et les postverbaux du slave sont sa création. Il n'y a<br />
aucune raison de considérer v. si. sadu comme un thème en *-«-,<br />
qui expliquerait, par la mobilité de l'accent et la métatonie, son<br />
intonation douce, s.-cr. et slov. sâd : cette intonation est celle du<br />
verbe saditi, r. sadit', etc. (§ 613). On doit penser, comme dans<br />
le cas de variti, r. varit', que le factitif saditi a été mis particulièrement<br />
en rapport avec le verbe d'état sëdëti, dans un type verbal qui,<br />
fixant l'accent sur l'élément thématique -e-, r. sidét', etc. (§ 674),<br />
fait disparaître l'intonation rude à l'initiale.<br />
Le degré alternant -a- n'apparaît pas avec les thèmes bëg-,<br />
ëd-, etc., voir § 752.<br />
§ 777. Alternances ï : af e : a. — V. si. vïlati sç « être ballotté »,<br />
factitif valiti (sç) « rouler » :<br />
R. val « vague » et « rouleau », obvâl (ôbval') et provâl « éboulement<br />
», zavâl (zavâV) «obstruction, barricade», dovâl, iz-, na-,
168 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
ot-, po-, pod-, (pôdval'), pri-, s-, u-, razvâl et rôzval (rôzval'),<br />
perevdl et perevdla.<br />
Pol. mal « rouleau », obwal « renversement » et « tourbillon de<br />
neige », zawai « monceau de ruines », nawal et nawaia « avalanche,<br />
foule », odwal, prze-, roz-, u-, wy-, z-, powai « renversement, défaite »<br />
et powaia « plafond », podwai et podwaia.<br />
Tch. vâl « rouleau » et valem « en masse », hovnival « bousier »,<br />
naval «afflux», pri-, roz-, s-, zâ-, uval «ravin» (§ 1223) ; et voir<br />
bal-, § 788.<br />
S.-cr. vâl « vague » et vâlom « en masse », kàmivâl- « sommet<br />
d'une montagne (d'où roulent les pierres) », vâla et uvala « vallée,<br />
baie », ôbala « rive », ïzvala, od-, pô-, pôd-, pro-, zà-, nâval et nàvala<br />
( nâ-).<br />
Slov. vâl « vague » et « rouleau », et vâlj « rouleau, cylindre »<br />
de l'itératif vâljali (§ 824), izvâl, po-, pod-, pre-, pri-, raz-, za-,<br />
navâl et navâla, obâl et obâla, provâla.<br />
Sur le degré réduit ancien vît-, on a l'adjectif v. si. obïlu « sphérique,<br />
rond » (J. Ex.), r. ôblyj, pol. obly « cylindrique, rond », tch.<br />
obly, s.-cr. ôbao, slov. çbel.<br />
En baltique, lit. vélti « fouler », itér. vôlioti «rouler », adj. apvalùs<br />
« rond ».<br />
V. si. skvïre-, skvrëti « faire fondre (la graisse) », itér. skvariti<br />
« faire frire » :<br />
V. si. skvara « odeur (de graisse) ».<br />
R. skvâra et skvâra « cretons » (et skvar').<br />
Pol. skwar « chaleur étouffante », v. pol. skwara, przyskwara.<br />
Tch. skvâr et skvâra « scorie ».<br />
Slov. skvâra « graisse, yeux du bouillon », ocvâra « mets cuit à<br />
la graisse ».<br />
S.-cr. skvâra et ckvâra « sorte de pommade » ; pour skvar, ckvâr<br />
« dégât », voir § 790.<br />
V. si. vïrëti « bouillir », factitif variti :<br />
V. si. varu « forte chaleur » ; povaru « cuisinier » Ham. est<br />
sûrement vieux-russe, pour v. si. sokacii (§ 864).<br />
R. var « eau bouillante, poix » ; composés kasevâr « cuistot »,<br />
pivovâr « brasseur », samovâr « bouilloire » ; pôvar « cuisinier »<br />
dovâr, iz-, na-, ob-, ot-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, u-, vz-, za-,<br />
vtjvar, et navâra, ob-, pere-, raz-, za-,<br />
Pol. war « eau chaude », odwar et wywara « décoction » ; przywar<br />
et przywara, przewara « reste qui s'attache », d'où « défaut » ;<br />
obar et obara « endroit du pin où coule la résine » ; dowar, na-, ob-,<br />
z-, za-, et nawara, zwara.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 169<br />
Tch. var « ébullition », pivovar « brasserie », solivar « saunerie »<br />
(§ 1216), odvar, û-, vy-, et nâvara, vyvara.<br />
S.-cr. vâr « chaleur » (et fém. vâr), vàra « plat de légumes », svâr,<br />
ôbara, prôvara.<br />
Slov. vâr « soudure », râzvar et razvâra, zvâr et zvâra, obâra,<br />
zavâra.<br />
On a d'autre part un thème vir- :<br />
R. vir « tourbillon », pol. wir, tch. vir ; s.-cr. vîr « tourbillon »,<br />
et « gouffre » en slavon croate (Job), et izvir « source », usuellement<br />
izvor ; slov. vîr et izvir. Ce sont des postverbaux tirés de l'imperfectif<br />
dérivé de vïrëti « bouillonner » : pol. wywierac « faire jaillir »<br />
d'un plus ancien -wirac, tch. vyvërati et vyvirati, s.-cr. izvirati<br />
« jaillir, sourdre », slov. izvîrati ; le mot vir, qui est slave commun<br />
el n'est sûrement pas un dérivé suffixal en -riz (§ 1114), suppose un<br />
itératif ancien virati. Cet imperfectif dérivé -virati se confond avec<br />
celui des formes à préverbe de vire-, v. si. -vrëti « glisser », et le<br />
serbo-croate a fait passer (dès le xiv e siècle) izvir à izvor et aux<br />
postverbaux en -vor (§ 728).<br />
Le baltique a lit. virii « bouillir, bouillonner », atvyrs « contrecourant<br />
» et lette atvars « tourbillon ».<br />
Pour un autre thème var-, voir § 790.<br />
V. si. zeze- et zïze- « brûler », imperfectifs dérivés -zagati et<br />
-zidzati :<br />
Sur thème gag- :<br />
R. izgâga « brûlure d'estomac », pol. zgaga, v. tch. zhâha, slov.<br />
( ijzgâga.<br />
Ce postverbal est une survivance : le tchèque moderne le remanie<br />
en zaha sur l'itératif zâhali, et h. sor. zâha, slov. uzâga « aigreur<br />
d'estomac » et ozâga « four à potier », et les autres formations<br />
sont :<br />
Sur le thème zig- :<br />
R. ziga « remontrance », dozig, na-, nad-, o-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
raz-, s(o)-, u-, za-, ôbzig, ôtzig, vyzig, et o(b)ziga, po-, pod-, pri-,<br />
raz-, za-, vyziya, masc. naziga « instigateur », prôziga « aigrefin ».<br />
S.-cr. zîg « marque, cachet ».<br />
Slov. zîg « cuite (des briques) » et « marque », ozlg, po-, pod-,<br />
pre-, pri-, se-, v-, za-, et podzîga, vzîga « incendie ».<br />
Sur le thème zeg- : f<br />
V. si. izdegu « combustion » (Izb. Svjat.), slavon ozegû « tisonnier ».<br />
R. zég « chaleur brûlante » et zôga « remontrance », dozôg, iz-,<br />
na-, nad-, o-, ob-, ol-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, so-, u-, voz-,
170 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
za-, vyzeg ; et izzôga, nad-, ob-, ot-, pro-, raz-, u-, vyzega, masc.<br />
zazôga « instigateur ».<br />
Pol. zog « feu, flamme », ozeg et ozôg (ozog) « tison, tire-braise » ;<br />
pozog, pozoga, pozega « incendie », podzeg, podzega, podzoga, uzeg,<br />
zazoga, zazega.<br />
Tch. zeh « crémation », dozeh, o-, û-, vy-, za-,<br />
S.-cr. zëga « chaleur brûlante », àzeg « brûlure » et « tisonnier,<br />
pelle à four », pàzeg, ùzeg, zdzeg « inflammation », et pozega, prizega,<br />
Mega « amadou ».<br />
Slov. zçga, ozèg « rouille des céréales » et « pelle à four », pôéeg<br />
« endroit incendié ».<br />
Et sur le thème zïg- :<br />
Y. si. zïgu « fer rouge » (Virg.).<br />
Pol. ozga « incendie » ; — v. tch. ozha « maladie qui brûle » ;<br />
— slov. çzga « four à potier », variante de ozâga.<br />
En baltique, lit. dègti « brûler », dâgas « brûlure, chaleur de l'été »<br />
et dagà « moisson » ; skr. dâhati « il brûle » et dâhah « embrasement,<br />
forte chaleur ».<br />
§ 778. Alternances y : av et y : va. — V. si. kysnçti « s'aigrir,<br />
fermenter », factitif kvasiti :<br />
Y. si. kvasu « levain ».<br />
R. kvas, dokvds, is-, na- (et ndkvas'), o-, ot-, pod-, pere-, pri-,<br />
pro-, s-, u-, vykvas, (pôkvas ), zakvds et zakvdsa.<br />
Pol. kwas, okwas, pod-, prze-, przy-, wy-, za-.<br />
Tch. kvas, ndkvas et ndkvasa.<br />
Slov. kvds, zakvds, ndkvasa ; — s.-cr. kvds.<br />
Et sur le thème kys- :<br />
V. tch. kys « ferment ».<br />
Slov. kîs, nakîs, okîs « oxyde », odkîs et razkïs « désoxydation »,<br />
prekîs.<br />
V. si. xotëti « vouloir », factitif xvatiti et xytiti « saisir » (§ 613) :<br />
R. xvat « action de saisir », adv. xvdtom « tout d'un coup », et<br />
xvat «homme hardi, gaillard» ; doxvdt, na-, o(b)-, ot-, pod-, pere-,<br />
pri-, pro-, ras-, s-, spo-, u-, za-, vyxvat (et fém. spôxvat', ûxvat').<br />
Pol. ehwat « un gaillard », oehwat « fourbure », uehwat « pelle pour<br />
tirer les marmites du feu », ancien zaehwat « ravissement ».<br />
Tch. chvai « hâte », obehvat, û-, zâ-,<br />
S.-cr. hvdt « prise » et « toise, brasse, corde de bois » ; dôhvât,<br />
prïhvât, ôbuhvât « circuit », zàhvat « prise » et fém. zâhvata, prlhvata ;<br />
— slov. hvdt « prise, brasse ».
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 171<br />
Et sur le thème xyt- :<br />
R. uxit de uxitit' « arranger, garnir (de paille) ».<br />
Tch. chyt « poignée », zachyt.<br />
S.-cr. hit « jet », ùshïi « ravissement, extase », et slov. hit, vzhit.<br />
En polonais sur chwytac : zachwyt pour l'ancien zachwal « ravissement<br />
», nachwyl, pochwyt.<br />
Le serbo-croate ùshït, régional pour ushicénje, et le slovène<br />
vzhit sont des adaptations (§ 825) de r. vosxiscénie, qui en vieux<br />
serbe signifiait « rapt ».<br />
R. gvâzda « saleté, crotte », verbe gvâzdal' « salir », pol. ywazdzic<br />
et gwazdac « barbouiller ». Et sur thème gyzd- :<br />
Pol. dial. gizd « Ordure ».<br />
Tch. ohyzda « dégoût, chose ou personne hideuse », verbe hyzditi<br />
« repousser, critiquer », ohyzditi « enlaidir ».<br />
S.-cr. gizda « parure, élégance », et aussi « pompe, superbe,<br />
vanité », gizdati se « faire le fier », montrant que le sens originel<br />
du mot était dépréciatif. Mot étendu au bulgare et au slovène.<br />
Le thème de base est gyd- : r. dial. gidkij « dégoûtant », ukr.<br />
hyd « dégoût », pol. ancien yid « ordure », et slovaque ohyda, variante<br />
de tch. ohyzda « dégoût », d'où pol. ohyda « ignominie ».<br />
Ce thème gyd-, sans rapport possible avec gad- (§ 781), est isolé<br />
et inexpliqué. Mais on reconnaît son dérivé en -da (§ 1003) dans<br />
gyzda, d'où les verbes gyzditi, gvazditi, gvazdali :<br />
Y. si. kypëti « bouillonner » :<br />
Pol. kwapic siç « se hâter », factitif : ukwap « grande hâte »,<br />
et pol. ancien pokwap et pokwapa, d'où ukr. pôkvap.<br />
Tch. kvapiti se « se hâter » : kvap « hâte », prekvap, ûkvap.<br />
Mais au sens de « bouillonner » les postverbaux sont en kyp- :<br />
R. kip, dôkip, nâkip, perekip, pri-, pro-, s-, u-, vs-, vykip, zâkip<br />
(et fém. kip', nâkip', pô-, pére-, pri-, û-).<br />
Tch. kypëti « bouillir, enfler, déborder » : nâkyp, prekyp.<br />
Slov. vzkip.<br />
Et sur ky(p)n- (§ 824) : tch. vykyn « action de lever », de kynouti<br />
« lever » (en parlant de la pâte).<br />
Sauf tch. dial. kvap « duvet », dérivé du sens « enfler », mais le<br />
polonais a kwap, gén. kwapiu, masculin en -jï (§ 1019).<br />
En baltique, lit. kûpëli^ kvèpti : kvâpas « haleine ».<br />
S.-cr. kvâka « crochet », kvàciti « accrocher » (et kùka, -kûciti).<br />
Slovaque kvaka « bâton recourbé ».<br />
Voir kuk-, § 757.
172 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Y. si. byti, factitif -baviti :<br />
V. si. izbava « délivrance » (Gr. Naz.).<br />
R. izbâva, bava et zabâva « divertissement », pribâv et pribâva<br />
« addition », otbâv et sbav, sbâva « diminution ».<br />
Pol. zabawa et ubawa « divertissement », pobawa « passe-temps »,<br />
wybawa « délivrance », zbaw (dial.) « privation, perte ».<br />
Tch. vybava « trousseau », zâbava « empêchement, confiscation »,<br />
et « divertissement » (du polonais), dial. pobava « passe-temps ».<br />
S.-cr.dôbava«approvisionnement», nàbava «acquisition», prôbava<br />
« digestion » ; zâbava « divertissement », anciennement « empêchement<br />
».<br />
Slov. dobâva, iz~, na-, pri-, zabâva « empêchement », prebâva<br />
« digestion ».<br />
Est à part tch. obava « crainte », postverbal de obâvati se<br />
«craindre» (§ 792); et pol. obawa «appréhension, crainte», en<br />
regard de obawiac siq refait sur obawac sig sur le modèle de<br />
zabawiac, zabawa.<br />
V. si. u-nyti, factitif naviti :<br />
R. onâva « fatigue ».<br />
Tch. unava « fatigue », et v. tch. nâva « empire des morts »,<br />
slovaque nava (slavon navï, § 171).<br />
Voir nyje-, § 730, et sur tyje- :<br />
R. otâva, etc.<br />
§ 779. Alternance o : a. — V. si. polëti « flamber », factitif<br />
paliti :<br />
R. pal, dopâl, na-, nad-, o-, ot-, pod-, pere-, pri-, ras-, s-, za-,<br />
vypal (et fém. ôpal', pôdpal') ; — et opâla « colère », mod. « disgrâce<br />
», de v. r. opolëti sg, imperf. opalati sg.<br />
Pol. pal, opal « chauffage », pod-, roz-, u-, wy-, za-, et opala<br />
« disgrâce », du russe.<br />
Tch. pal « brûlure » (v)zpâla « forte chaleur, inflammation »,<br />
mod. « scarlatine ».<br />
S.-cr. pôlpala « fagotin », upala « inflammation ».<br />
Slov. popàl « rouille des céréales », podpàl « mèche » et podpâla<br />
« bois d'allumage », razpàl.<br />
De l'autre racine pol- « écoper, vanner », on a des postverbaux en<br />
-pol, mais pol. dial. opala sur opalac (§ 735).<br />
V. si. slove-, factitif slaviti :<br />
Y. si. slava « gloire ».<br />
R. slâva, oslâva, po-, raz-.
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 173<br />
Pol. slawa ; oslawa « célébration », et « décri » de osiawicn décrier » ;<br />
rozslawa « renommée ».<br />
Tch. slâva, oslava « glorification », proslava (xix e s.) « célébrité ».<br />
S.-cr. slàva, proslava, dial. prlslava ; et vàslava tiré de la locution<br />
slavonne va slavu — ù slavu « à la gloire de ».<br />
Slov. slâva, oslâva, proslâva.<br />
Pour les postverbaux de slove-, voir § 737.<br />
trove-, factitif traviti :<br />
V. si. trava (trëva, § 461) «herbe»; otrava (Ham.) et otravu<br />
« breuvage magique, poison ».<br />
R. trâva ; Iravlt' «faire brouter» et «graver» (§ 613) : otrâva<br />
«poison», istrâva «perte», potrâva «dégât dans un champ »,<br />
pritrâva « leurre », protrâva « corrosion », strâva et strav « le manger » ;<br />
et travît' « chasser à 'courre » : nâtrava, zâlrâv et zâlrava « chasse<br />
à courre » ; zatravit' « allumer la poudre » : zâlrava « lumière du<br />
canon d'une arme à feu ».<br />
Pol. trawa, slrawa et zaslrawa « nourriture », potrawa « mets » ;<br />
mais potraw «regain» est un composé nominal à préfixe (§ 1219)<br />
sur trawa « herbe ».<br />
Tch. trâva, otrava « poison », potrava « nourriture », strava<br />
« consommation d'aliments ».<br />
Slov. trâva ; dial. otrâva pour otrôv « poison » (§ 737).<br />
S.-cr. frdua ; ancien otrava « philtre » (mod. àlrov « poison »),<br />
strava « incantation, magie » ; stràva « épouvante » est nouveau<br />
pour slrâha (§ 787), mais il y a eu contamination de slrâvili<br />
« fasciner, égarer par des breuvages magiques », et de stràsiti<br />
« effrayer », d'où strâviti se « être épouvanté », preslrâviti se<br />
« tomber malade de peur », d'où : prèstrava « réveil en sursaut » et<br />
« convulsions ».<br />
§ 780. Formations sur imperfectifs dérivés. — De loziti, on a<br />
des postverbaux en -log, et en -lag sur l'imperfectif dérivé -lagati<br />
(§ 726). On a vu de même :<br />
bod, et -bad sur -badati (§ 731).<br />
lom, et lam sur lamaii (§ 734).<br />
pol, et pol. -pala sur -palac (§ 735).<br />
-gor et -gar sur -garati, tvor et tvar sur -tvarjati (§ 736).<br />
kroj, et pol. -kraw sur -krawac (§ 737).<br />
krop et r. krap sur krâpal', sop et sap sur sapati, -glob et -glab<br />
sur -glabljati (§ 739).<br />
krok et pol. -krak sur -kraczac, mok et -mak sur -makati, -mog et<br />
-mag sur -magati (§ 740).<br />
lov, et -lava sur -lavljati (§ 743).
174 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
r. -porx, et -parx sur -pârxivat' (§ 771).<br />
Et l'on va voir poj et r. -paj sur pajât' (§ 791).<br />
Dans le cas de plav à côté de plov, le vocalisme radical -a- est<br />
celui du factitif plaviti bien plutôt que de l'itératif plavati (§ 730),<br />
comme -lava à côté de lov est sur -lavill, nava sur naviti (§ 778), etc.<br />
§ 781. Alternances moins claires. — V. si. u-gasngti « s'éteindre »,<br />
factitif gasiti :<br />
R. zagasit' : zagâs.<br />
Pol. ugasic : ugas.<br />
Slov. ugasiti : ugâs.<br />
Alternance en balto-slave, perdue en slave, et perdue en baltique,<br />
lit. gèsli, factitif gesyti (§ 500).<br />
kazili « gâter, endommager » :<br />
V. si. prokaza « lèpre » ; kazu « altération » (Const. Pr.).<br />
R. prokaza « lèpre » et v. r. « perversité », mod. prokdzy « espiègleries<br />
».<br />
Pol. kaz, skaz et skaza « tache », nakaza, prze-, za-.<br />
Tçh. kaz « défaut », composé drevokaz « champignon parasite<br />
du bois », zkaz et (v)zkâza « perte », nakaza « contagion », v. tch.<br />
priekaz et priekaza « empêchement, obstacle ».<br />
S.-cr. prokaza « hydropisie, lèpre » ; mais pour nàkaz et nakaza<br />
« monstre » et anciens skaz et skaza, voir § 1083.<br />
Slov. kàz « défaut », izkâza, skâza et pokâza « altération » ;<br />
nakaza « altération » et « monstre ».<br />
Le verbe kazili, qui confond ses postverbaux avec ceux de kazati<br />
« montrer » (§ 783), apparaît comme un factitif en regard de cezngti<br />
« défaillir » (§ 500), mais il n'y a plus de lien entre les deux thèmes.<br />
Slavon gaditi « avoir dégoût de » :<br />
V. si. gadu « chose répugnante, vermine » ; et verbe gaditi, Vie<br />
de Méthode, VIII, dont le sens est sûrement « souiller », et non<br />
« diffamer » comme en tchèque.<br />
R. gâdit' « souiller » et « dégoûter » : gad « reptile ».<br />
Pol. gad « reptile » ; — tch. had « serpent » ; v. tch. haditi<br />
« condamner, diffamer ».<br />
S.-cr. gaditi « souiller » : gàd « reptile, vermine, chose répugnante »<br />
(fém. zgdd « personne ou chose dégoûtante »).<br />
Slov. gaditi « dégoûter de, blâmer, reprocher » : gàd « vipère »<br />
et gdda « reproche, défaut », ogdda « dégoût ».<br />
En alternance ancienne avec v. pol. zadac stç, zadzic siç « être<br />
dégoûté », bas-sor. zadas se ; en baltique lit. gëda « honte, ce qui<br />
fait honte », gëdinti « faire honte », avec un correspondant dans
[§ 749] VOCALISME RADICAL "é" 175<br />
m. h. a. quât «ordure, Kot», de *g w êd(h)- : donc balto-slave gêdet<br />
factitif si. gaditi d'intonation rude.<br />
Il n'y a pas de rapport possible entre gaditi et le tchèque haniti<br />
« critiquer, blâmer » (§ 789). Et on a un autre verbe encore dans :<br />
Slavon gadati « conjecturer, deviner » :<br />
R. gadâl' « penser, présumer » et « dire la bonne aventure » :<br />
gadn devin» (dial.), dogâd «fait de s'aviser» (et dôgad'), otgâd et<br />
razgâd « conjecture », peregâd, s-, u- (na ugâd « à l'aventure »),<br />
zagâd « énigme, zagâdka », v$gad.<br />
Pol. gadac « parler », anciennement « présumer, prévoir » :<br />
ugad, zagad « action d'apaiser, de convaincre ».<br />
Tch. hâdati « conjecturer » : odhad « estimation » ; dohad « conjecture<br />
», du russe, et zdhada « énigme » adapté de r. zagâdka. • •<br />
Le verbe gadati a l'aspect d'un itératif qui s'est isolé de goditi<br />
(§ 738), imperfectif dérivé v. si. -gazdati : tch. uhodnouti « deviner »<br />
et hâdati, d'où uhâdnouti. Mais la question est compliquée par<br />
l'existence de deux formes parallèles :<br />
V. si. gâlati (Izb. Svjat.), bulg.-macéd. gâtam, gatâe-, s.-cr.<br />
gàlali « prédire, dire la bonne aventure », et :<br />
v. si. gananije (Ps., Ham., etc.) « problème, énigme », avec<br />
flottement de gananije, gatanije et gadanije dans les manuscrits<br />
slavons ; slov. gâdati « deviner » et gânati, perf. ugâniti, prés.<br />
ugâne-.<br />
On voit que gadati a eu un perfectif *gançti, d'après le slovène<br />
et le russe ancien zaganuti et dial. zagonût', otganùi', ugonut',<br />
ukr. nahanûty ; et on peut admettre que sur *gançti a été refait<br />
ganati. Et aussi gatati par faux jeu d'alternance, à moins que le mot<br />
slave n'ait subi l'influence du germanique, v. isl. gâta « conjecture,<br />
énigme ».<br />
Pour s.-cr. gonétati « deviner », voir § 817.<br />
Y. si. kaditi « encenser » :<br />
S.-cr. kâditi : kâd « fumigation », prëkada.<br />
Slov. kaditi : kâd, pokâd.<br />
En alternance en slave avec r. cad « vapeur (de charbon) », etc.<br />
(§ 615).<br />
V. si. vaditi « accuser, exciter contre » :<br />
V. si. suvada « dispute » et vada (Théod.) ; v. r. obada « calomnie ».<br />
R. vâdit' « attirer, leurrer » et « accoutumer » : vâda « accoutumance<br />
», navâda « incitation », privdda « leurre », iz-, ob-, ot-, po-,<br />
u-, v-, za-, et otvâd, po-, za- ; provâd et sprovâd, de (s)provâdit'<br />
« éconduire » ; svâda « dispute », du slavon.
176 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. wadzic « quereller, brouiller » : ivada « défaut, vice », zwada<br />
« querelle », zawada et uwada « obstacle », odwada « ce qui écarte<br />
l'obstacle ».<br />
Tch. vaditi « gêner », vaditi se « se quereller » : vada « défaut »<br />
et vàda, svâda « querelle », zâvada et v. tch. prievada « obstacle ».<br />
Slov. vaditi « habituer » : vâda et navâda, privâda « habitude »,<br />
odvâda « désaccoutumance », razvâda « mauvaises habitudes, gâterie<br />
», svâda « dispute », posvâda « brouille », zavâda « discorde »,<br />
ovâda « dénonciation ».<br />
S.-cr. vaditi « extraire » : nâvada « coutume » et ancien uvada,<br />
zâvada « discorde » et ancien svada, osvada « imputation, calomnie ».<br />
Pour obadu, ovadu « taon », voir § 731 ; pour pol. swada « verve »,<br />
c'est un mot latin, suâda, réel ou inventé (§ 822).<br />
Cette racine verbale importante en slave, et aux sens variés<br />
selon les formes à préverbe, n'a pas d'explication tout à fait claire,<br />
mais elle est sûrement en rapport avec la racine de vede-, voditi<br />
(§ 615). Un rattachement à la racine de skr. vâdati «il parle»,<br />
vâdah «discours, discussion», résulte d'un rapprochement hâtif<br />
avec v. si. suvada « dispute », qui ne tient pas compte des sens<br />
multiples de vaditi.<br />
§ 782. — Y. si. grabiti « saisir, ravir » :<br />
R. grâbit' « piller » et « râteler » : razgrâb, et locution nagrûbom<br />
« de vive force ».<br />
Tch. hrabati « râteler » : slovaque pahraba « tas de braise qu'on<br />
rassemble en ratissant » (et pahreb, pahreba sur thème greb-, § 803).<br />
Slov. grâbiti « saisir, rafler » : ogràb, zagràb.<br />
Le baltique a lit. grëbti « saisir » et grôbti, lette grâbt et itér.<br />
grâbât. En slave, en regard de grebe- (§ 432) dont l'imperfectif<br />
dérivé est v. si. -grëbati (§ 649), grabiti a l'aspect d'un itératif sur<br />
la base d'une racine « dissyllabique », à côté de pol. grabaé, tch.<br />
hrabati, qui peut en être un doublet ancien (§ 652), ou bien être<br />
l'imperfectif tiré du perfectif pol. grabnqc, tch. hrâbnouti.<br />
V. si. slabu « faible », stabiti « affaiblir » : ostaba « affaiblissement,<br />
soulagement ».<br />
R. ostâba (et ôstab', pôstab').<br />
Slov. ostâba ; — s.-cr. ostaba, slavon, et repris au xix e siècle.<br />
L'adjectif slabu. se compare à v. h. a. slaf «lâche, flasque»,<br />
got. slëpan « dormir », slëps « sommeil » ; les formes baltiques,<br />
lit. slàbti, etc., doivent être empruntées au slave (§ 445). On<br />
reconnaît un jeu alternant *slëb- : *slôb-, avec intonation rude en<br />
slave, r. slâbit', s.-cr. slàbiti.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 177<br />
Y. si. oxabiti (Ham.) «négliger», uxabljati (Ham.) «décroître»,<br />
poxabljenù « à l'esprit dérangé » (Athan., Cosmas) ; slavon xabiti sç<br />
« se retenir, s'abstenir » :<br />
Y. r. poxabiti « gâter », mod. poxâbii' « gâter (les enfants) » :<br />
v. r. poxabu « égaré, fou », var. isxabû (Fl. Josèphe) ; r. mod.<br />
uxâb « creux, ornière », et masc. uxdba « filou ».<br />
Ukr. oxâbyty « gâter », oxâbyiysja « se garder de, perdre, oublier » :<br />
oxàb « terre abandonnée, inutilisable », oxâba « femme perdue ».<br />
Pol. ochab « marais » est ukr. oxâb.<br />
Tch. (o)chabnouti «s'affaiblir» : chaby «faible, abattu», adj.,<br />
ochaba « affaiblissement ».<br />
Slov. (po)hâbiti «endommager» : pohâba «difformité».<br />
S.-cr. ancien (po)habiti : haba « dommage » dans un exemple du<br />
xm e siècle, et ohaba « pleine propriété » dans un exemple douteux,<br />
mais qui peut s'expliquer par « propriété abandonnée (à un<br />
autre) ».<br />
Comme son initiale x- le fait supposer, ce verbe est un emprunt<br />
au germanique : got. haban « tenir, avoir », gahaban « retenir »,<br />
gahaban sik « se contenir, avec forme en -hôb- dans fém. gahôbains<br />
« continence ». Le slave restitue, dans un emprunt sûrement très<br />
ancien, une forme *hôbjan qui devait être celle du factitif de haban,<br />
d'après la correspondance got. hlahjan « rire », factitif uf-hlôhjan<br />
« faire rire ».<br />
Slavon praziti «griller» (§ 615) :<br />
R. prjâzit' ( § 435) : ancien praga, prjaga « grains de blé grillés ».<br />
Pol. prazyc « griller », pragnqc « avoir soif » : praga « soif » et<br />
« mets qui donne soif » ; et Praga (faubourg de Varsovie), tch.<br />
Praha « Prague », originellement « endroit grillé, forêt brûlée ».<br />
Mais le postverbal praga est nouveau : la forme ancienne est<br />
*pïrga, v. r. perga, pol. piarg, piarga « gravier » et pierzga « propolis » ;<br />
s.-cr. prga « grains grillés », slov. prya « gravier », d'où s.-cr. prziti<br />
« griller » à côté de pràziti.<br />
En baltique, lit. sprayëti « craquer », sprôgti « éclater », spùrgas<br />
et spùrga « bouton, œil de plante » ; skr. sphurjati « il éclate » :<br />
racine « dissyllabique », d'intonation rude en balto-slave.<br />
V. si. posagati « se marier » (en parlant d'une femme) :<br />
V. si. posagu « mariage ».<br />
R. posâg « mariage » et « dot », et posdga, et posjâg par rattachement<br />
à la racine sçg-. ^<br />
Pol. posag « dot », verbe posazyc et œyposazyc « doter » ; — tch.<br />
posah.<br />
Ce thème posag- est isolé, mais en rapport évident avec la racine<br />
sçg- (§ 808).
178 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
V. si. carovati « ensorceler » :<br />
Y. si. cari, masc. plur., « charmes, sortilèges » ; slavon cara.<br />
R. câry, plur., ukr. cara.<br />
Pol. czary, plur. masc., oczarzyc «ensorceler» : oczar « hamamélis<br />
», l'« arbuste magique », ail. Zauberslrauch.<br />
Tch. câr et fém. cdra.<br />
Slov. cdra, ocârali : ocâra « enchantement » ; — s.-cr. (câr, fém.).<br />
De *kër-, en regard de lit. kerëti « ensorceler », këras « sorcier » :<br />
la forme ëaru doit être celle du postverbal d'un itératif *kër-,<br />
s.-cr. ëârati. La racine est celle de skr. krnôti « il fait », krtyâ « action »<br />
et « magie », kariram « sortilège ».<br />
V. si. udariti « frapper » :<br />
V. si. udaru « attaque » (Gr. Naz.).<br />
R. udâr « coup » ; — pol. udar « coup, attaque ».<br />
Slov. udâr ; — s.-cr. udâr ; — bulg. udar.<br />
Et slov. udçr « coup », distinct de udor « irruption », verbe udârili<br />
et ûdriti ; — s.-cr. ancien udor, verbe ùdariti et ùdriti ; — et tch.<br />
ûder « choc », de uderiti.<br />
A part parmi les diverses formes des postverbaux de dere- et<br />
dire-, -doru, etc. (§ 728).<br />
La racine *der-, devenue d'intonation douce en balto-slave,<br />
était d'intonation rude : skr. drniti «il fend», dîryale (§ 471),<br />
et le baltique a l'intonation rude dans lit. dùrti « piquer », lette<br />
duft. On doit supposer un itératif -dariti, r. -dàrit', sur racine<br />
d'intonation rude, du type de grabiii, r. grâbit' (§ 607), avec son<br />
postverbal daru, et une contamination en -driti avec (u-Jdïre-.<br />
Slavon pariti « échauffer » :<br />
V. si. para «vapeur» (Gr. Naz.).<br />
R. par «vapeur» et «jachère»; dopâr, popâr «jachère», o-,<br />
oî-, pod-, pere-, pro-, u-, vs-, za-, vijpar ; et opâra « pâte pour<br />
pâtisserie », napâra, pod-, u-, za-.<br />
Pol. par « chaleur étouffante » et para « vapeur », napar « infusion<br />
», opar « légère vapeur, fumées », od-, po-, pod-, roz-, s-, wy-,<br />
za- ; et opara « eau-de-vie (qui donne des fumées) ».<br />
Tch. para « vapeur », composé suchopâr « aridité », opar « éruption<br />
de la peau », vypar « émanation », zâpar « échauffement » ; v. tch.<br />
zpâra « forte chaleur ».<br />
S.-cr. para « vapeur », opara, popara « panade », râspara, zâpara<br />
« chaleur étouffante ».<br />
Slov. para et par, spâr « vapeur », spâra « chaleur brûlante »,<br />
ispâr et ispâra, opâra, popâra ; sopâr et sopâra « vapeur » (§ 1222).<br />
Le verbe pariti est un factitif en regard de r. prée-, prêt'
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 179<br />
«s'échauffer», pol. przec «être étouffant» (§ 512), comme zariti,<br />
subst. -gar ( § 736), en regard de grëjati « chauffer ».<br />
V. si. ogavljâti « importuner » (Pand. Ant.) :<br />
Tch. ohaviti « défigurer » : ohava « horreur, monstre ».<br />
En slovène, forme gab- : gâbiti (se) « avoir dégoût », gàb « dégoût »<br />
et ogâba.<br />
Factitif ou itératif, d'intonation rude d'après slov. gâbiti,<br />
prés, gâbi- (§ 675), sur la racine du slavon govïno (§ 1079), r. govnô<br />
« merde », etc. Le serbo-croate a gûviti se « donner le dégoût »,<br />
sur une forme *gou- qui peut garder la trace d'un verbe antérieur<br />
à flexion alternante *guv- : *gou- ou *geu-. On trouve en effet en<br />
regard skr. guvâii « il fait caca », gùtha- « ordure ».<br />
§ 783. Sans alternance. — V. si. po-jasati « ceindre » :<br />
V. si. pojasu « ceinture » ; et slavon ostasu « queue », de *ot-jasû<br />
(§83).<br />
R. pôjas, opojâs, prépojas.<br />
Pol. pas (§ 81), przepas ; dial. ocas, oczas (du tchèque).<br />
Tch. pâs, ocas.<br />
S.-cr. pôjâs et pâs, ôpas, adj. raspôjas « qui est sans ceinture » ;<br />
et dial. ocas.<br />
Slov. pojâs et pâs, opâs, prepâs, pripâs.<br />
V. si. krasiti « parer, embellir » :<br />
Y. si. krasa « beauté, parure ».<br />
R. krâsit' « orner » et « peindre, teindre » : krasâ « ornement »,<br />
et amplificatif prekrâsa ; prikrâs, vskras, zakrâs, et fém. prikrâsa,<br />
o-, po-, u-, za-,<br />
Pol. krasic « colorier, graisser » : okrasa « ornement » et « graisse »,<br />
przykrasa.<br />
Tch. krâsa « beauté », okrasa.<br />
Slov. krâs, okrâs et okrâsa, nakrâs, ukrâs ; — s.-cr. krâs, ùkrâs.<br />
Et aussi adj. *krasu « beau » dans v. pol. krasy, comparatif<br />
r. krâse (§ 289). Rapport possible, mais conjectural, avec le thème<br />
krïs-, krës- (§ 495), subst. krësu (§ 746).<br />
V. si. pase-, pasti «faire paître» (§ 428) :<br />
y<br />
Y. si. opasu « sollicitude » ; supasu « sauveur » et « salut » (§ 847) ;<br />
v. r. zapasu « réserves, provisions ».<br />
R. Spas « le Sauveur », du slavon ; opâs « prudence », pripâs et<br />
zapâs « provisions », napâs « pâture », po-, pro-, u-, ôtpâs, vijpas.
180 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. wypas « pâture », opas et odpas « engraissement », popas et<br />
podpas « relais, halte », zapas « provisions ».<br />
V. tch. Spas, spas et spâsa « salut », composé ritopas « parasite »<br />
(§ 1225).<br />
S.-cr. Spàs, spâs « salut », ancien opas « soin », popas « pâture » ;<br />
adv. pâsom « en paissant », composé sàmpas « pâture sans gardien » ;<br />
— slov. spàs « salut », popâs « pâture ».<br />
V. si. zasiti (Éphrem), uzasiti et prëzasiti « épouvanter » :<br />
V. si. uzasû « épouvante » et prëzasû (Upir').<br />
R. uzasnûl'(sja), imperf. uzasàl'(sja) « (s')effrayer », et uzâxnut'sja,<br />
uzaxâl'sja, sur -sdt' par faux jeu d'alternance et parallèlement<br />
à slraxât'sja «avoir peur» refait sur straxu (§ 787) pour<br />
strasit'sja, de même perezâxnut', perezaxât' : ûzas et ukr. uzâx,<br />
et prézas (slavon), dial. perezâx ; et dialectalement zax, de zaxât'-<br />
(sja) sans préverbe.<br />
Y. tch. zësili, et zzësiii donnant zdësiti, mod. zdësili se « s'efïrayer »<br />
et dësiti « effrayer » : dës « effroi », et ûzas du vieux tchèque, mais<br />
repris du russe.<br />
S.-cr. uzàsnuti (se), mais la forme populaire est dzàsnuti :<br />
ûzâs (ûzas), et pop. ùdzas, (d)zàs.<br />
Le thème zas-, de *gës-, est isolé. Si l'on accepte le rattachement<br />
à gas- (§ 781) en admettant un développement sémantique<br />
d'« éteindre » à « glacer d'effroi », on partira de zasati, itératif du<br />
balto-slave ges- qui en slave a été éliminé par gas- (§ 500).<br />
S.-cr. gàziti « piétiner, patauger » : gâz « gué », nàgaza « ce sur<br />
quoi on piétine ».<br />
Slov. gàziti : gâz « sentier dans la neige » et gâza (et fém. gâz),<br />
pregàz « gué ».<br />
Isolé, seulement bulgare, serbo-croate et slovène, sans étymologie.<br />
R. glaz « œil », glazét' « zyeuter », glâzit' « regarder avec le mauvais<br />
œil », sglâzit' « jeter un sort » : sglaz « le mauvais œil, sort qu'on<br />
jette ».<br />
Mot proprement russe en ce sens, mais identique à pol. glaz<br />
« pierre, roche », et qui, attesté en vieux russe, paraît avoir signifié<br />
« pierre brillante, cristal ».<br />
Slavon jazû « canal », v. r. ëzû « barrage (pour la pêche) » :<br />
R. jaz « claie qui arrête le poisson » (et fém. zâjaz'), ukr. zâjiz<br />
« barrage, écluse ».<br />
Pol. jaz « barrage » ; dial. zajazic siç « se barrer, s'entasser » :<br />
zajaz et zajaza « barrage, vanne ».<br />
Tch. jez, v. tch. jëz et slovaque jaz, « barrage, digue ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 181<br />
S.-cr. jâz « digue, barrage, canal ».<br />
Slov. jêz, jeziti : prejèz, zajèz et zajêza (zâjeza) « barrage, digue ».<br />
En rapport probable avec jezeru «lac» (§ 1119).<br />
V. si. kaze-, kazati « montrer » :<br />
V. si. ukazu «indication», pokazu (Izb. Svjat.), sûkazu (Gonst.<br />
Pr., Ham.) ; v. r. nakazu, prikazû.<br />
R. kaz, dokâz, na-, o-, ot-, po-, pere-, pri-, s-, u-, za-, razskâz (v. r.<br />
rozkazû), vykaz.<br />
Pol. dokaz et okaz « montre, échantillon », odkaz, na-, po-, prze-,<br />
przy-, roz-, s-, u-, ws-, wy-, za-,<br />
Tch. dukaz « preuve », od-, po-, prâ-, pri-, roz-, ùkaz et poukaz,<br />
vy-, (v)*-, zà-,<br />
S.-cr. dokaz, is-, dl-, ù-, prikaz « représentation » et prïkaza<br />
« apparition, spectre », anciens skaz et skaza « indication, règle »<br />
(et « monstre », et voir -kaznï, nâkaz et nâkaza, § 1083).<br />
Slov. dokâz, iz-, na-, od-, po-, pri-, raz-, u-, et izkâza, pokâza,<br />
prikâza (et fém. prikâz « offrande »).<br />
Racine verbale isolée en slave, un rapport avec ceznçti, kaziti,<br />
étant conjectural (§ 551).<br />
V. si. maze-, mazati « enduire » :<br />
(V. si. mazï « onguent », § 713).<br />
R. maz « craie (pour queue de billard) » et dial. « amoureux »<br />
(maz' « graisse ») ; domâz, ob-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, v-, pômâz,<br />
pôdmâz, vymaz (et pomaz', smaz') ; zamâza « souillon », masc.<br />
razmâza « qui parle abondamment ».<br />
Pol. maza « tache » et zmaza, przemaz et przemaza, omaza.<br />
Tch. maz « enduit, graisse », composé kolomaz (et fém.) « graisse<br />
pour les roues », vymaz.<br />
S.-cr. mâz « graisse », kôlomâz, nâmâz « enduit », pômâz « empois »,<br />
prèmaz « crépi » ; et mâza « gâterie » et « enfant gâté ».<br />
Slov. mdza (et mâz, fém.), kolomâz, nâmaz, omâz, po-, pod-,<br />
zamâz et zamâza, zmâza (et fém. zmâz), umâza ; razmâz « enfant<br />
gâté ».<br />
V. si. paziti (§ 615) :<br />
V. si. pazove (KOASOCI Ham. 49429, « degrés, plancher (de l'autel) ».<br />
R. pazit' « assembler par mortaise » : paz « joint, mortaise »,<br />
nadpâz, propâz, vypaz.<br />
Pol. paz et paza « cannelure ».<br />
Tch. paz « mortaise », du russe : le verbe est pre-paziti « cloisonner<br />
», avec paz- pris sûrement au substantif verbal pazeni<br />
« boiserie, cloison ».
182 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
S.-cr. pâzili « faire attention » : ôpâz « circonspection » et ancien<br />
opaza.<br />
Slov. pâziti « faire attention » : pâz « attention », opàz, pripàz<br />
« contrôle » ; et pâz « mortaise », sûrement d'emprunt : le verbe est,<br />
comme en tchèque, pâziti « cloisonner, planchéier », dont les postverbaux<br />
sont opâz « cloison » et prepâz, zapâz (§ 824).<br />
En germanique, v. sax. fôgian « adapter » : v. h. a. fuoga « mortaise,<br />
Fuge ».<br />
§ 784. — R. galit' « combler avec des fascines » (gai' « chemin<br />
de fascines, jetée ») : nagât, podgât, zagât et zagâta.<br />
Pol. gacic (gac « fascinage ») : zagata, sur zagacic « couvrir de<br />
paille les murs d'une maison (pour se protéger du froid) ».<br />
Tch. hatiti (fém. hat « fascine ») : dial. zahata « espace qu'on<br />
comble entre deux maisons ».<br />
S.-cr. gâtiti « endiguer » : gât « barrage, jetée », ancien gala<br />
« petit pont de fascines ».<br />
Slov. gâtiti « boucher, obstruer » : gât « barrage » (masc. et fém.)<br />
et gâta « obstruction », zagât « barrage » . et zagata « bouchage »,<br />
et « petit espace entre deux maisons ».<br />
On doit partir de gatï, et on peut y voir un dérivé en -tï (§ 1170),<br />
au sens de « chaussée (dans les marécages) », du thème gâ- du<br />
baltique, lit. gôti « aller » (§ 442).<br />
Y. si. mastiti « graisser » :<br />
Pol. mastic : omasta «graisse», remplaçant omaza (§ 783). •<br />
Tch. mastiti : slovaque omasta.<br />
Slov. mastiti : (fém. mâsl et omâst).<br />
De mastï « graisse », dériv. en -tï (§ 1169).<br />
R. pjâtil' « faire reculer » : popjât « recul », et locution na popjât.<br />
Le verbe est dépréverbé (§ 1208) de opjâtit', v(o)spjatit', dérivés<br />
des adverbes opjat', vspjat', v. si. vus-pçtï « en arrière » (§ 320).<br />
R. plastât' « couper en tranches » : naplâst, rasplâst, vsplast.<br />
Sur v. r. plastû, mod. plast « couche », dérivé en -tu. (§ 1161).<br />
V. si. platu « pièce de linge » :<br />
R. platit' « rapiécer » : plat « pièce de linge, mouchoir », zaplâta<br />
(et v. r.) « pièce de rapiéçage », et naplâla, pod-, pere-, pri-,<br />
Pol. plat « pièce de linge », nadplat « ressemelage ».<br />
Tch. zâplata « pièce, reprise ».<br />
S.-cr. poplat et pàtplat « semelle » et « plante du pied », nâplal<br />
« dessus du pied, empeigne », ôplata « revêtement, lambris » ;<br />
polplala « doublure » et pàdoplata, poduplata.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 183<br />
Slov. plât (et fém. plât) « morceau (de quelque chose de fendu) »<br />
et « côté », oplâta (et fém. optât) « côté, jante, plat de la semelle » ;<br />
poplàt et podplàt « plante du pied, semelle », nadplàl « empeigne »,<br />
priplat « ferrure du bois de l'araire », zâplata « pièce de rapiéçage.<br />
Et d'autre part :<br />
Y. si. otuplatiti « rétribuer » :<br />
R. platit' « payer » : plât a. « paiement », doplâla, o-, ot-, po-,<br />
pere-, pri-, ras-, u-, za-, vyplata, négatifs neplâta, nedo-, neras-,<br />
neu- ; et optât, ot-, po-, pere-,<br />
Pol. plat « paie » (ancien, mod. plaça), doplata, nad-, o-, od-,<br />
roz-, s-, w-, wy-, za-, et opiat, od-, po-, s-, za-.<br />
Tch. plat « paie »,, odplata et oplata « rétribution », ùplaian remboursement<br />
», vyplata « rachat, rançon », zaplata « paiement ».<br />
S.-cr. plâta, dôplatfl, ïs-, nà-, pô-,<br />
Slov. plât, odplâta.<br />
Le passage du sens de platù « pièce de linge », avec za- « pièce<br />
à rapiécer », à celui de platiti « payer » est expliqué par des données<br />
historiques : les pièces de linge servaient de monnaie. Pour platu,<br />
à distinguer du slavon platïno «toile», r. polotnô (§ 1079), il se<br />
retrouve en germanique dans got. plats, et avec correspondance<br />
exacte dans la traduction de l'Évangile, Mat., IX, 16, got. plata<br />
(dat.) et v. si. plata (gén.). Mais les mots gotiques à p- initial sont<br />
des mots d'emprunt, et on pense que got. plat- est un emprunt<br />
au slave, un témoin des trocs entre les troupes slaves et gotiques.<br />
En slave même, le mot, qui est sans explication satisfaisante,<br />
peut être un emprunt, comme c'est le cas nettement pour le mot<br />
de sens différent :<br />
V. si. platu «lame (métallique)» (Ham.), tch. plât «plaque,<br />
lame », s.-cr. ancien et dial. plât « plaque », qui vient du roman<br />
plat-, lat. vulg. plaltus « plat », ail. Plalte « plaque, lame ».<br />
R. trâtit' « dépenser, perdre » : trâta « dépense inutile, perte »,<br />
dotrâta, is-, po-, pere-, ras-, s-, u-, za-.<br />
Pol. trata, potrata, s-, u-, za-.<br />
Tch. ûtrata « perte, dépense », ztrata, zâlrata, et potrat « avortement<br />
» (xx e s.), masc. ûtrata « prodigue ».<br />
Slov. trâta, potrâta, u-, za-, strâta et strât ; — s.-cr. ancien trata,<br />
strata.<br />
En baltique, lit. trôtinti « exciter, agacer », subst. trûotas et<br />
lette truôts « pierre à aijguiser ». Le slave trat- peut s'expliquer<br />
comme dérivé en *-to- ou' *-tâ- (§ 1165) sur un thème *trô- d'intonation<br />
rude, qui doit se rattacher à la racine *ter- (§ 551), racine<br />
« dissyllabique »( § 531) à forme trë- dans gr. tp7)Toç «percé», et sur<br />
un dérivé de cette sorte on conçoit bien un factitif tratiti.
184 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
R. xvdstai' « hâbler » : naxvâst « fanfaron » (et fém. xvast',<br />
ndxvast', pô-, pri-, zd-).<br />
S.-cr. hvàstaii (se) « se vanter » : hvàsta « vanterie ».<br />
Verbe expressif sans étymologie précise.<br />
§ 785. — V. si. gladiti « lisser » :<br />
R. glddit' : (fém. izglad', pô-, û-).<br />
Pol. giada « mer lisse », ogiada « politesse », poglada « caresse »,<br />
zagiada et wygiada « extermination ».<br />
; Voir l'adjectif gladukû « lisse », § 983.<br />
Pol. jadzic siç « s'envenimer » et « enrager » : rozjad « ressentiment<br />
».<br />
Sur pol. jad « poison, venin, rage », v. si. jadu « poison » et<br />
otûjadu. « contre-poison » (composé nominal, § 1219), r. jad et slavon<br />
russe ëdu, tch. jed, slov. jâd ; et s.-cr. dial. jâd, usuellement jêd<br />
« colère » et anciennement « venin, bile » verbe jéditi « irriter »,<br />
adj. jédak (§ 983), ce thème jêd- (d'intonation douce) résultant<br />
visiblement d'une contamination avec l'autre racine jad-, ëd-<br />
« manger » ; pour s.-cr. jad « peine, malheur », il vient sûrement<br />
de v. si. adu « enfer, géhenne ».<br />
Origine incertaine, l'initiale ja-, ë- étant ambiguë (§ 75) —<br />
à l'écart en tout cas de ëd- « manger ». En supposant *aid-, comme<br />
dans jadra «sein» (§ 1116), on rapproche le mot du lette idra<br />
« moelle pourrie d'arbre », v. h. a. eiz « abcès », gr. oïSoç « enflure ».<br />
jazditi « aller en véhicule » :<br />
Slavon jazda, projazda, v. r. ëzdû, pri-, pro-, u-,<br />
R. ezdâ et ezd, doézd, iz'-, na-, nad'-, ob'-, ot'-, pod'-, pere-, pri-,<br />
pro-, raz'-, s'-, u-, v', vz'-, za-, vyezd, poêzd « action d'aller, de<br />
partir » et pôezd « train, convoi ».<br />
Pol. jazda et najazd, od-, po-, przy-, u-, za-, zjazd.<br />
Tch. jézda et jezd, ndjezd, nad-, ob-, od-, po-, pod-, pru-, pre-,<br />
pri-, roz-, s-, û-, v-, vy-, zâ-, et v. tch. prijëzda, vynëzda (vyezda).<br />
Slov. jézda et jezd, izjêzd, odjèzd, po-, pri- ; — s.-cr. ancien jezda<br />
et jezd.<br />
Base jazda (§ 443), dérivé en -da (§ 1003) du thème jad-.<br />
klade-, klasti « poser, charger » ( § 430) :<br />
V. si. prikladû « exemple, symbole », sùkladù (J. Ex.) « combinaison<br />
», zakladu (Ham.) « pari » ; et fém. prëklada « poutre transversale,<br />
traverse », de klad- et non *kald- (§ 775), cf. r. pereklâdina<br />
« poutre transversale, linteau » ; slavon pokladu « dépôt », v. r.<br />
nakladu « intérêts ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 185<br />
R. klad «trésor» (fém. klad' «charge»), doklâd, na-, o(b)-, ot-,<br />
pod-, pere-, pri-, ras-, s-, u-, v-, vs-, za- ; poklâd «action de poser,<br />
dépôt, gage » et poklâda « ce qu'on pose sur le sol (pavage), sur<br />
l'aire », proklâd et proklâda.<br />
Pol. klad « couche » et Mada « plan de projection », doklad, na-,<br />
nad-, o- et ob-, od-, po-, pod-, prze-, przy-, roz-, s-, u-, w-, wy-, za-.<br />
Tch. klad « position, thèse », dùklad et doklad, nâ-, ob-, od-,<br />
po- et predpo-, pod-, pre-, pri-, roz-, s-, ù-, v-, vy-, zâ-.<br />
Slov. klâd « étage » et klâda, preklàd « surcharge » et preklâda<br />
(et fém. preklâd) « poutre transversale », naklàd, oklàd et obklàd,<br />
od-, po-, pod-, s-, v-, za-, et doklâda, na-, o(b)-, od-, po-, pod-, s-,<br />
za-, vklâda (et vklâd, fém.).<br />
S.-cr. oklad et ôklada, ôpklada « pari », plur. pàkladi et fém.<br />
pèklade « carnaval », prijèklad, sklàd, zàklad et zàklada, nâklada,<br />
ôklada.<br />
krade-, krasti « voler » :<br />
Y. si. kradu « vol ».<br />
R. okrâd, raskrdd, skrad, vijkrad, adv. ôkradom (et fém. ôkrad'ju),<br />
pokrâdom, pod-, u-.<br />
Pol. przekrad, zakrad.<br />
Tch. kradem et ùkradem, adv. ; — s.-cr. krâdom, et slov. krâdoma<br />
(§ 321).<br />
Au thème krad-, mais au sens plus ancien « entasser », doit se<br />
rattacher v. si. krada « bûcher », slov. krâda « pile de bois », v. tch.<br />
krada « ce qui enflamme ».<br />
R. lâdit' « accorder, arranger » : lad « accord » et dial. lâda ;<br />
dolâd, iz-, pod-, pere-, pri-, raz-, s-, u-.<br />
Pol. ladzic « mettre en ordre » : lad « ordre ».<br />
Tch. laditi « accorder » : lad « accord », mais le verbe et ses<br />
postverbaux sont pris au russe ou en sont adaptés, soulad « harmonie<br />
» (§ 1222) de r. slâdit', nâlada « humeur » de nalâdit' :<br />
Le russe a l'adjectif lâdyj « cher, aimé », et l'on trouve dans<br />
plusieurs langues slaves le substantif lada « bien-aimée, épouse »,<br />
r. lâda, s.-cr. lâda, surtout vocatif lado dans des refrains de chants<br />
populaires.<br />
Thème obscur, où l'on ne sait pas s'il s'agit d'une initiale taon<br />
*ât- (§ 189). Et l'on ignore le rapport de laditi avec le verbe de<br />
sens voisin :<br />
Slavon lagodili « s'accorder », subst. lagoda, adj. v. si. lagodïnu<br />
« s'accordant, proportionné » (Pand. Ant., Théod.) ; r. lâgoda<br />
« harmonie » et tch. lahoda « douceur », pol. lagodie « adoucir ».<br />
On peut seulement supposer un croisement expressif entre laditi<br />
et goditi (§ 738).
186 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
pade-, pasli « tomber » :<br />
V. si. zapadu « occident », sûpadu « coïncidence » (J. Ex.) (et fém.<br />
propadï, etc., § 714).<br />
R. pâdy, plur., « banc de poissons » (et pad'), dopdd, is-, na-,<br />
o-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, ras-, s-, upâd (et upad'), vî/pad, prôpad,<br />
zapâd « fait de (commencer à) tomber » et zâpad « occident ».<br />
Pol. pad « chute », dopad, na-, o-, od-, po-, prze-, przy-, roz-,<br />
s-, u-, w-, wy-, za-,<br />
Tch. pad, composé listopad « novembre », dopad, nâ-, od-, pre-,<br />
pri-, roz-, û-, vy-, zâ-, spâd, vpâd.<br />
S.-cr. pâd, lïstopad « chute des feuilles » et « octobre », ispad,<br />
nâpad, ôpâd, ôtpâd, prépad, adv. prïpâdom, prôpâd, râspad, spâd,<br />
ùpad, zâpad (et fém. zâpâd).<br />
Slov. pâd, dopàd, iz-, na-, o-, od-, po-, pre- (et fém. prépad),<br />
pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-, za-, et fém. podpâda « maladie des<br />
chevaux ».<br />
Pol. radzie « conseiller » : rada « conseil », dorada et porada<br />
« consultation », narada « délibération », plur. obrady « débuts »,<br />
urada « décision », zdrada « trahison » (ail. Verrai).<br />
Tch"raditi : rada, porada, prorada et z(d)rada, vyzrada «trahison<br />
», et emprunt urada au polonais.<br />
R. râda et ukr. râda « assemblée (des cosaques) », du polonais,<br />
comme bl.-r. izrâda et zdrâda.<br />
De l'allemand, v. h. a. râlan « conseiller », rât « conseil », v. sax.<br />
râd. A distinguer de r. radit' « avoir soin », etc. (§ 774).<br />
V. si. sirazde-, stradati « souffrir » :<br />
R. stradât' : slavon russe sirada « peine, travail », et mod. strâdâ<br />
« corvée, dur travail, temps de la moisson », poslrâda « temps après<br />
la moisson, début du battage » (et fém. pôstrad'), perestrâda<br />
« temps de la récolte, rentrée du blé ».<br />
Slov. strâdati « être dans l'indigence, mourir de faim » : strâd<br />
dans glâd in strâd « faim et indigence ».<br />
§ 786. — R. dial. câpaï « attraper », eâpal'sja « pencher, basculer<br />
», perecâpit' « faire basculer » : pereeâp « action de basculer ».<br />
Racine expressive.<br />
Slavon za(j)apëti «soupçonner» (§ 583) :<br />
V. si. -(j)apa dans vunezaapç « à l'improviste » (§ 323), et slavon<br />
zajapu « soupçon ».<br />
Tch. jâpati « observer » : masc. nejapa « homme maladroit ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 187<br />
kaplje-, kapati « dégoutter » :<br />
R. kap, onomatopée ; kapâ, nakàp, o-, pro-, za-.<br />
Pol. kap, onomatopée ; nakap « stalagmite », okap et odkap<br />
« gouttière », dial. wykap ; — tch. okap et odkap « gouttière ».<br />
S.-cr. (kâp, fém., § 713), ïskâp dans la locution na iskâp «jusqu'à<br />
la dernière goutte ».<br />
Slov. kâp «goutte» (et fém. kâp), (na) iskâp, okap «gouttière»,<br />
odkàp et prekàp « distillation ».<br />
Et sur le perfectif kançti (§ 491), slov. kâniti :<br />
Slov. kân « goutte » (§ 824).<br />
Y. si. vabiii « leurrer » :<br />
Slavon vinovabu et zitovabu « qui attire (par sortilège) la récolte<br />
(du voisin) ».<br />
R. vâbii' « attirer, leurrer » : privdba.<br />
Pol. wab «appât, appeau», powab «attrait» et powaba, ancien<br />
zwab ; — tch. pûvab « attrait », du polonais.<br />
S.-cr. vâbiti : vâb « appel (par appeau) ».<br />
Slov. vâb et vâba, privàb et privâba, navâba, povâba.<br />
On compare à got. wôpjan « crier fort », v. angl. wëpan « pleurer »,<br />
subst. v. sax. wôp « cri, plainte ». Mais le sens du verbe slave est<br />
différent : « attirer (par un appeau) », et il doit plutôt s'agir de<br />
formations parallèles sur la base d'onomatopées semblables.<br />
Le verbe slave, avec désaccord pour l'intonation entre le russe et<br />
le serbo-croate, peut être l'itératif ou factitif d'un thème *ûb-,<br />
un cri d'appel d'oiseau, qu'on a sous des formes variées dans<br />
v.h. a. ùwo « hibou » et lat. bubô, etc.<br />
Pol. trafic « atteindre » et ancien trefic : traf « accident, hasard »<br />
et trafa, trefa, natraf, potraf, utraf.<br />
Tch. trefiti : trefa « coup au but ».<br />
Emprunt à ail. treffen (§ 568).<br />
§ 787. — Slavon cakati « attendre » (§ 559) :<br />
Tch. cekati, ancien ëakati : çâka « espoir », dial. ceka.<br />
Slov. ëâkati : cdk et poëâk « attente ».<br />
S.-cr. ëëkati : cek (rare), dàcek «accueil» et dàceka, (na) pàëek<br />
« (à) crédit », priëek « réception » ; — et dial. dàcka « poste de chasse »<br />
sur l'ancien doëkati.<br />
Élargissement de caje-, cajati, et voir ëaj-, § 791.
188 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
V. si. laskati « flatter » :<br />
R. laskât' « caresser, cajoler » : lâska « cajolerie », obldska. Et<br />
pol. iaska « faveur », tch. lâska « affection, amour », s.-cr. lâska<br />
« flatterie, adulation ».<br />
Formation en -kati ou -skali sur un thème las- conservé dans<br />
pol. lasic siç «remuer la queue, flagorner», adj. iasy «friand», et<br />
en vieux slave dans le composé laskrûdu « gourmand », littéralement<br />
« qui flatte son cœur » (§ 12).<br />
Ukr. prâskaty « claquer » : r. et ukr. prask « claquement ».<br />
S.-cr. prâskali « craquer » : prâsak et prâska « craquement,<br />
éclatement ».<br />
Slov. prâskati « crépiter » et « gratter », oprâskali « égratigner » :<br />
prâsk et prâska « craquement » et « égratignure », opràsk et oprâska.<br />
Verbe expressif, à côté de *purskati « éclater » (§ 561).<br />
R. laskât', lascif « tirer, traîner » et « voler » : lâska « action<br />
de tirer », dotâsk, is-, ob-, ot-, pod-, pere-, pri-, pro-, ras-, s-, u-, v-,<br />
vs-, nâtâsk, pôlâsk, zâtâsk, vylask ; et fém. natâska, ot-, po-, pod-,<br />
pere-, s^, vs-, vylaska.<br />
Ce verbe n'est que russe et ukrainien, et polonais dialectal ;<br />
en -(s)kali sur une racine qui peut être celle du verbe tch. lasili<br />
« tirer, dégaîner », également isolé.<br />
V. si. znaku « connaissance » :<br />
S.-cr. znâëiti « signifier » : znâk « signe », naznaka, ôznaka.<br />
Slov. (o-)znâciti : znâk, oznâk et oznâka.<br />
Dérivé en -ku (§ 1037).<br />
zvakati « mâcher » :<br />
R. zvâkat' « mâcher, ruminer » : zvak « masticatoire, résine (de<br />
mélèze) à mâcher, mastic », et zvâka « rumination », et masc.<br />
« homme qui mastique continuellement ».<br />
S.-cr. zvâkati : zvâk « ce qu'on mâche ».<br />
Slov. zvekâli « mâcher », et « bavarder » : zvçka « femme bavarde »,<br />
prezvèk « rumination ».<br />
Le verbe s'altère en slov. dvekâti, bulg. dâvkâm, par dépréverbation<br />
(§ 1208) de raz-zïvati> razdlvali et raz-zvakati > razdvakati,<br />
et l'on a :<br />
Slavon (xi e s.) dveka « rumination » ; —• s.-cr. dvëka « goudron » ;<br />
— bulg. dâvka « mastic (gomme de lentisque) ».<br />
Élargissement en -kati (§ 559) de zïvati, r. zevât', qui a ses<br />
postverbaux en zev- (§ 809). Sur zwac et zuc (§ 519), le polonais<br />
a l'élargissement zuchac, avec postverbal zucha « mâchoire » en
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 189<br />
vieux polonais, et mod. zuchwa qui n'est pas un dérivé en -va<br />
(§ 1185), mais le produit d'une contamination des thèmes zuchet<br />
zw-.<br />
Ukr. baêâty, za- : bahâ « envie, désir », plur. zâbahy « lubies ».<br />
Verbe r. bazât', bazW « avoir envie », non expliqué.<br />
Tch. dlâzili « daller, planchéier », po- : dldha « lame de plancher »,<br />
podlaha « pavé, dallage, plancher ».<br />
Le polonais ancien a dlazyc « presser, fouler », qui est un emprunt<br />
au tchèque, et « plancher » est podioga ; le serbo-croate dialectal<br />
dlaga « attelle » est sûrement aussi un emprunt au tchèque. Il<br />
s'agit donc d'une formation dépréverbée de podloziti, dont l'imperfectif<br />
dérivé podlagali est perdu en tchèque où les imperfectifs de<br />
(na-Jloziti sont (na-jklâdati.<br />
Slavon posmagnçtije « fait d'être grillé », v. si. (J. Ex.) smaglù<br />
« brun, de couleur foncée » (§ 1048) :<br />
V. si. posmagu « biscuit » (Ham. 40024, et Supr. en rédaction<br />
slavonne).<br />
R. smdgnut' « se dessécher, s'enflammer » : smâga « ardeur,<br />
flamme » et « soif » ; ancien posmâg et posmàga « galette de farine<br />
de blé ».<br />
Pol. smazyc « faire frire » : smaya « sécheresse des lèvres, soif ».<br />
Tch. smaziti « faire frire » : slovaque smah et smaha « brûlure,<br />
marque au fer rouge ».<br />
S.-cr. smùgnuli « brunir, se bronzer » et « sécher d'envie » : smâga<br />
« désir dont on sèche », et ancien smâg, presmaga et presmag, dial.<br />
prïsmâg « grain de blé séché ».<br />
Sans étymologie ; le vieux-slave posmagû pourrait être une<br />
adaptation, transmise au russe, du grec •KC/L,C/.\J,V.C1 « biscuit », mod.<br />
Tca^Tj^dcSi.<br />
S.-cr. trâziti « chercher, poursuivre » : trâg « trace » et dial.<br />
Iràga « race (d'animaux) », locutions adverbiales nâirâg « en arrière »,<br />
àtrâg et strâga « de derrière » ; istraga « enquête » et « anéantissement<br />
», sur istrâziti « enquêter » et « supprimer les traces » ; pôlraga<br />
« recherche, poursuite », prltraga « perquisition ».<br />
Seulement serbo-croate, le bulgare Irâzi- étant un serbisme<br />
dialectal. Le substantif trag est attesté depuis le début du xv e siècle,<br />
le verbe depuis le xvi e siècle. On suppose un lien avec ital. traccia<br />
« trace, piste », ce qui signifierait un emprunt à une forme dialectale<br />
de l'italien, mais la finale en z:g du slave reste à justifier. Vu<br />
l'isolement du mot en slave, on ne peut guère penser à un dérivé<br />
suffixal en -g- (§ 1009) sur le thème tra- de tratiti (§ 784).
190 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. wazyc « peser, estimer » : waga « balance, poids, importance »,<br />
odwaga, uwaga, powaga, przewaga, rozwaga « réflexion ».<br />
R. vdga « balance », et otvdzit'sja « se risquer », uvdzit' « prendre<br />
en considération » : olvâga « hardiesse », uvdga « considération »<br />
(usuellement uvazénie) ; et dial. povdga « dignité » p(e)revdga<br />
« prépondérance », du polonais.<br />
Tch. vdziti « peser » : vdha, odvaha, po-, pre-, roz-,<br />
S.-cr. vdziti « valoir » et vdgati « peser » : vdga « balance », et<br />
vâg « levier », prëvaga « surpoids, prépondérance », prîvaga « ce qu'on<br />
ajoute en pesant, ail. Zuwage ».<br />
Slov. vâgati « peser » : vâga, odvâga « contrepoids », prevâga<br />
« surpoids », et razvâga « considération ».<br />
Emprunt à l'allemand, v. h. a. wâga « balance », qui s'est étendu<br />
aux langues slaves par le polonais, et les formes du russe sont des<br />
polonismes, celles des autres langues des polonismes ou des<br />
russismes.<br />
Slavon maxati « agiter le bras » :<br />
R. max « geste, coup », domdx, na-, ob-, pod-, pere-, raz-, s-, vz-,<br />
za-, Ôtmâx, pômâx, prômdx, vymax.<br />
Pol. maeh dans jednym machem « d'un seul coup », odmaeh, roz-,<br />
za- ; — tch. machem « d'un coup », rozmach.<br />
S.-cr. màh (mâh) « coup », domâh, rdzmah, et prômaha « courant<br />
d'air ».<br />
Slov. màh « coup », namàh, o-, po-, pre-, zamàh « élan » et zamâha<br />
« bouchon ».<br />
Élargissement de v. si. maje-, majati (§ 557).<br />
V. si. paxati « souffler », et sens divers ( § 557) :<br />
R. paxdl' « souffler, ventiler » : pax, ôpdx, otpdx, pod-, ras-, s-,<br />
vs-, za- ; — pdxnut' « sentir » : pax, otpdx, zàpax « odeur » ; — paxât'<br />
« labourer » : napdx, spax, vypax (et rôspas').<br />
Pol. spachac « épousseter, balayer » : spach « balle du blé (qui<br />
tombe au vannage) » ; — pachnqc « sentir » : pach « odeur », zapach ;<br />
— et pqchac «flairer» par contamination avec wqchaé (§ 767) :<br />
pqch et pçch « flair », comme wqch et wçch.<br />
Tch. pdchnouti « sentir » : pach, zdpach.<br />
S.-cr. zàpaha (dial.) de zàpahali « souffler (à la figure de quelqu'un)<br />
» ; et sans doute de opdhati « vanner » : dpah et opaha<br />
« épeautre », dont le grain est adhérent à la balle et qu'il faut vanner<br />
fortement.<br />
Slov. pdh « vapeur, fumée », et sans doute pâha « ray-grass »<br />
mais se rencontrant avec les postverbaux de p(e)hâti «pousser»<br />
(§ 795).
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 191<br />
strasiti « faire peur » :<br />
Y. si. straxu « peur ».<br />
R. strax, et ostrâx « menace ».<br />
Pol. et tch. strach, postrach.<br />
S.-cr. strâh et ancien et dial. strâha, anciens preslrah et prestraha<br />
(pri-) ; et stràva par contamination avec strâviti (§ 779).<br />
La base est straxu, dérivé en -xu (§ 1137).<br />
§ 788. — mamiti « attirer » :<br />
R. manit' « attirer, leurrer » : mand, obmân « tromperie », otmdn,<br />
pod-, pere-, pri-;raz-, v-, vz-, za-, vyman ; pomdn « action d'attirer »<br />
et fém. dial. pomdna « leurre, appât » ; — ukr. omâma et omàna ;<br />
bl.-r. o(b)mâna «tromperie», verbe omâmic' (accent polonais) et<br />
omanic' (accent russe).<br />
Pol. mamic « séduire » et manié « tromper, duper », zamamic<br />
et zamanic, etc. ; dial. man « tromperie », wyman ; oman et omam,<br />
omama et dial. omana.<br />
Tch. mâmiti « tromper » : mam « illusion », composé slavomam<br />
« mégalomane », dial. omama.<br />
Bulg. mdmi- : izmdma.<br />
S.-cr. mâmiti : mdma « appât » ; màma et p'ômama « furie, rage » ;<br />
ïsmama, nâmama (nâ-), prïmama, zàmama ; ômâm « appât » et<br />
omama.<br />
Slov. mâmiti : omâma, po-, pre-, za-, zmâma, et zmàm « le visionnaire<br />
» et « le monstre ».<br />
Le russe man- apparaît secondaire, par rattachement à mançti<br />
« faire signe », r. mânûï (§ 490), et le polonais flotte comme l'ukrainien<br />
entre mam- ancien et man- russe. On reconnaît dans mamiti<br />
une formation expressive à redoublement, sur le thème ma- de<br />
majati, mançti, et ce doit être l'origine même de cette racine<br />
isolée en balto-slave (§ 508) : une onomatopée, s.-cr. mâ ma, pour<br />
appeler les animaux.<br />
On rattache à mamiti, avec passage ancien de -m à -n en finale,<br />
le nom de l'« aunée », r. umân et omân, pol. et tch. oman, s.-cr.<br />
àman, slov. çman : cette plante au parfum fort servait contre<br />
les mites, et en médecine contre la toux, l'oppression, et son autre<br />
nom, *devç(tï) situ (§ 305), indique son importance dans les usages<br />
populaires.<br />
Mais il faut écarter l'adverbe tch. mané, mani « au hasard »,<br />
s.-cr. màn(i) «en vain»yet usuellement zàman ; slov. zamàn «en<br />
vain » et zahmàn, et adjectif indéclinable hmân « mauvais », qui<br />
est la locution *k man « pour rien », pendant de v. si. ni ku eemuze<br />
« bon à rien ». C'est à cet adverbe d'origine inconnue que doit se<br />
rattacher s.-cr. mànen «égaré, fou», et mà(h)nil avec le h de<br />
mâhnuti pour mançti (§ 557).
192 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
R. dial. tjâmit' « comprendre, s'aviser, se souvenir » et bl.-r.<br />
c'âmic', pritjâmit' « observer » : Ijam, vzjat' v Ijam (et vtjam')<br />
« concevoir » et bl.-r. vc'am, v pritjdm « en mémoire » et bl.-r.<br />
pric'âm.<br />
Déformation du russe ancien pamjalil' « se souvenir, pâmjatovat'<br />
» en potjdmit', d'où tjâmit' (§ 1208), plus une contamination<br />
avec primétit' «observer» (§ 747).<br />
Tch. baliti « emballer, faire des paquets » : obal « emballage,<br />
enveloppe », zabal « emballage, bandage ».<br />
Dépréverbé de obaliti, § 777.<br />
R. câlit' « amarrer » : cal « amarre », nacâl, ot-, pod-, pere-, pri-,<br />
ras-, s-, za-.<br />
Origine non déterminée.<br />
R. pro-gâlit' « dégager, rendre libre » : progâl « clairière » (et fém.<br />
prôgâl') ; na-gâlit' « badiner » et « chanter, crier en mesure » :<br />
nagâl « chant, cri en mesure » (dans un travail en commun) ; — et<br />
ukr. zahalôm « tous ensemble », adv.<br />
Tch? za-haliti « couvrir » : zâhala « couverture ».<br />
Et slov. raz-gâliti « découvrir », s.-cr. raz-gâliti « découvrir,<br />
dénuder, éclaircir (une forêt) » : sur l'adjectif golu « nu, dénudé ».<br />
Y. si. kaljati « souiller » :<br />
V. si. kalu « boue ».<br />
R. kâlit'sja (dial.) « fienter » : kal «fiente».<br />
Pol. kalac et ancien kalic « souiller » : kal « boue, fiente », zakai<br />
et zakala « souillure ».<br />
Tch. kaliti « troubler » : kal « dépôt dans un liquide », vykal<br />
« excréments », zâkal « cataracte » (qui trouble la vue).<br />
Slov. kaliti « troubler » : kal « boue, dépôt » ; — s.-cr. kâl « boue ».<br />
On a un autre verbe, v. si. kaliti (Gr. Naz.) «tremper (le fer) » :<br />
R. kalit' « tremper » et « sécher au four » : dokâl, is-, na-, o-,<br />
ot-, pod-, pere-, pro-, ras-, u-, za-, vijkal.<br />
Et tch. kaliti « tremper », dès le vieux tchèque ; — s.-cr. kdliti,<br />
pre-, etc., à quoi se rattache sans doute dial. prèkala « givre » ;<br />
— slov. kaliti : (kâl « trempe », fém.).<br />
Il s'agit sûrement du même verbe, sur la même base kalu. « boue » :<br />
on peut supposer, pour la « trempe », l'idée de durcir avec de la<br />
boue, comme dans pol. kalenica, tch. kalenec, « toit de paille enduite<br />
d'argile ».<br />
La base kalu n'a pas d'étyniologie sûre, mais on peut accepter<br />
le rapprochement avec lat. squâlus, adj., «couvert de plaques<br />
(de boue) ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 193<br />
V. si. u-maliti « diminuer » :<br />
R. mâlii', u- : umâl « diminution ».<br />
Sur malû « petit ».<br />
R. pj'âlii' « étendre » : raspjàl « forme pour tendre les gants »,<br />
dopjâl, na-, o-, ot-, pere-, pri-, pro-, s-, u-, v-, vz-, za-, vypjal.<br />
Sur pjâlo «châssis pour étendre», dérivé en -(d)lo (§ 943).<br />
R. salit' « folâtrer » : sâlyj « fou » (sal' « caprice, folie »).<br />
Pol. szalic « faire extravaguer » : szal « frénésie ».<br />
Tch. saliti « tromper » : dial. sal « tromperie », et masc. osala<br />
« homme toqué ».<br />
S.-cr. sàlili se « plaisanter » : sala « plaisanterie » ; — et slov.<br />
sala.<br />
La base salu doit être l'adjectif verbal (§ 1048) du thème saqu'on<br />
a dans v. si. o-sajaii s g « s'abstenir », imperfectif dérivé<br />
osavati sg (Pand. Ant.), bulg. sàva- «remuer» (§ 508). Et sur le<br />
thème sav- on a :<br />
R. sâvit' « plaisanter, blaguer » : sav « tromperie » et masc. sâva<br />
« farceur ».<br />
xvaliti « louer » :<br />
Y. si. xvala « louange », poxvala.<br />
R. xvalâ, poxvalâ, proxvald, et poxvâl, proxvâl, doxvâl, na-, o-,<br />
pere-, pri-, ras-, za-, vyxval.<br />
Pol. chwala, pochwala, prze-, roz-, za-, uehwala « résolution,<br />
arrêté » ; et ancien schwala et schwal « grande louange », adv. na<br />
schwal « pour la montre, pour .l'œil », et pochwal, wychwal.<br />
Tch. ehvâla, poehvala, et ûxvala « résolution », du polonais ;<br />
adv. naschvâl « à dessein ».<br />
Slov. hvâla, pohvâla, prehvâla, zahvâla ; locution dial. na hvalo<br />
et adv. nahval « à propos ».<br />
S.-cr. hvâla, pohvala, zàhvala, ancien nahvala et adv. nahval<br />
(nahvao) « à dessein » et « par complaisance ».<br />
Racine isolée en slave. Des rapprochements proposés, le moins<br />
inacceptable est avec r. xôlit' « parer, choyer », s.-cr. ohol « fier »,<br />
et sans doute pol. pacholç « garçon » (§ 1220) : comme dans le cas<br />
de xvatili «saisir» en regard de xotëti, xûtëti «vouloir» (§ 613),<br />
xvaliti serait le factitif ou itératif (§ 615) d'un thème *x(v)ol-,<br />
*xul-. Cette racine *xul- ne peut évidemment pas être celle de<br />
xuliti « courber » (§ 757), mais elle s'accorderait avec celle de suliti si<br />
«s'enfler d'orgueil» (§ 760), en admettant, comme pour xot-,<br />
une substitution de x- à s- pour une raison qui n'est plus<br />
reconnaissable.
194 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
zaliti « avoir de la peine » :<br />
Pol. zalic siç : zal « douleur » et uzal « lamentation », masculins,<br />
mais du type mouillé (§ 824).<br />
Slov. zâla « peine » (et fém. zàl), ozala « regret », razzâla<br />
« affliction ».<br />
Sur zalï «peine» (§ 713). On a un autre verbe, sur r. zdlo<br />
«aiguillon», dérivé en -(d)lo (§ 943), dans :<br />
R. zâlit' « piquer » : uzâl « piqûre ».<br />
§ 789. —• Blaznili « égarer » :<br />
Y. si. blaznu « erreur, scandale » et blazna (et blaznï, Ham.),<br />
sùblaznu (et slavon sublaznï), slavon oblaznu.<br />
R. blaznit' « égarer » et « apparaître en songe » : blazn (et blazn')<br />
et soblàzn, mais qui viennent du slavon, comme s.-cr. blâzan (fém.)<br />
et sàblâzan (fém.), slov. blâzen, masc. (et fém.).<br />
Les langues septentrionales ont pol. biaznic siç « faire des folies » :<br />
blazen «fou», tch. blazen, sor. blaz(a)n (§ 141), mais ce nom du<br />
« fou » peut être l'abstrait v. si. blaznu, comme s.-cr. lûd est v. si.<br />
blçdu (§ 768).<br />
La base doit être blaznu, dérivé en -nu (§ 1073).<br />
Pol. ganic' « blâmer » : gana, nagana, pogana, przygana.<br />
Tch. hanili, hanëti « critiquer, blâmer » ' : hana « reproche »,<br />
pohana « outrage » de pohanëti « insulter, outrager ».<br />
Le verbe polonais, avec des formes en han- au xvi e siècle, est<br />
un emprunt au tchèque, qui s'est étendu au sorabe, h.-sor. hanic,<br />
b.-sor. hanis, et jusqu'à l'ukrainien et au blanc-russe.<br />
Le verbe tchèque, dont les formes remontent au vieux tchèque,<br />
est sans rapport avec v. si. gadili « dégoûter, souiller », v. tch.<br />
haditi «diffamer» (§ 781). Il a une ressemblance avec v. h. a.<br />
hôna « affront, dédain », mais sûrement trompeuse. Une autre<br />
explication proposée est la bonne : une dépréverbation de pohaniti,<br />
dénominatif de pohan « païen » : cf. s.-cr. pàgan « païen » et<br />
«immonde», poganiti «souiller» (fém. pôgân « immondice »), slov.<br />
pogân « païen, impur ».<br />
R. granit' « tailler à facettes », o- : ogrân « taille ».<br />
S.-cr. razgrànati se « se ramifier » : ràzgrana « ramification »<br />
dans la langue technique récente.<br />
Sur r. gran' «facette», s.-cr. grâna «rameau» (§ 1084). Et sur<br />
s.-cr. grànuli « se mettre à luire » ( § 500) :<br />
ogran « lever du soleil » (§ 824), mais forme rare pour ôgranak.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 195<br />
S.-cr. kàniti « avoir l'intention, se proposer » : kâna et nâkana<br />
« intention »,et ancien kan, adj. nâkan « prêt à ».<br />
Bulg. kâni- « proposer » : nâkan « intention », pokâna « proposition<br />
».<br />
Slov. kâniti « avoir l'intention », et « tromper » de prekâniti :<br />
kân «intention», nakàn et nakâna «projet», okâna (ukâna) et<br />
prekâna « tromperie ».<br />
Le vieux tchèque a kaniti së « caresser, flatter ». En serbo-croate,<br />
kâniti est attesté dès le xiv e siècle. Non expliqué, de même que<br />
tch. kaniti « baver » (§ 1132).<br />
siane-, stati :<br />
V. si. stanu « camp », pristanu « refuge, port » (Pand. Ant.),<br />
vûstanû «soulèvement» (J. Ex.). (Et fém. prëstanï dans bes<br />
prëstani « sans cesse », /slavon pristanï, vuslanï ; adv. inostanï<br />
«continuellement», § 1201).<br />
R. stan « taille, camp, logement », composé podstân « sous-taille<br />
(de la chemise) » ; postân « socle » (et pôstan', pristan' « quai,<br />
refuge », ôtstan', peré-, rôz-, û-, v- et vô- ; adv. sôvstani « dès le<br />
lever, de bon matin » et sôstani, sôstari).<br />
Pol. stan « état, condition ».<br />
Tch. stan « tente ».<br />
S.-cr. et slov. stân « habitation, logement » ; et s.-cr. pristan<br />
« port », slov. pristân, mais de r. pristan'.<br />
Le mot stanu est un dérivé en *-no- ou *-nu- (§ 1072). Les formes<br />
à préverbe sont des postverbaux, parallèles aux postverbaux en<br />
-stav- et staj- (§ 791), sur le thème stan- (§ 824) de prés, stane-,<br />
mais surtout sur le modèle de la forme simple stanu, à sufïixe -nu,<br />
et parallèlement -ni (§ 1083).<br />
Et voir stanov-, § 818.<br />
§ 790. — Y. si. dariti « faire don » :<br />
Y. si. daru « don » ; un féminin dara est invraisemblable, et<br />
dara Bozija Supr. 4201S est un génitif « du don de Dieu ».<br />
R. darit' : dar, naddr, ob-, ot-, po-, raz-.<br />
Pol. ancien podar « présent » ; — tch. zdar « prospérité, bonne<br />
chance ».<br />
Slov. podâr ; — vieux serbo-croate podarï.<br />
Sur daru, dérivé suffixal en -ru (§ 1114).<br />
Et voir s.-cr. darov, dàrïv, 1818.<br />
V. si. jariti sç « s'irriter » :<br />
V. si. jaru, adj., « rude, coléreux ».<br />
R. jarii' : jâryj, pod'jâr « irritation » (et fém. pôd'jar').
196 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
S.-cr. jâriti « échauffer » : jâra « chaleur ».<br />
Base jaru, dont l'explication n'est pas sûre (§ 1112).<br />
R. karât' « punir » : kâra « punition, châtiment » ; — pol. kara.<br />
Tch. karati « faire reproche » : kâra « reproche » et dial. « punition<br />
».<br />
S.-cr. kârati « réprimander » : kâr et ancien kara ; — slov. kâr<br />
« dispute, querelle », pokâra « réprimande ».<br />
Le verbe karati (§ 652) s'est isolé de koriti (§ 742).<br />
Slov. kvâriti « gâter » : kvâr « dommage » et kvàra (et fém. kvâr),<br />
izkvâra, pokvâra.<br />
S.-cr. kvâriti : kvâr (et fém. kvar), pokvara, et dial. skvar, ckvâr,<br />
de s kvâriti.<br />
Bulg. pokvâri- : pokvâra.<br />
Le verbe, et ukr. kvâryty, slovaque kvârit', est isolé ; sa forme<br />
à préverbe s- se rencontre avec skvariti « faire frire » (§ 777), et il<br />
est sûrement dépréverbé d'un autre *skvariti en rapport avec<br />
v. si. skvrûna «souillure» (§ 1075), et de même origine.<br />
rriar- :<br />
Thème de plusieurs verbes distincts :<br />
1° R. mârit «le soleil accable » : mar (et fém. mar') «chaleur<br />
brûlante, brouillard de chaleur ».<br />
Tch. mariti (cas) « perdre son temps », zmariti « anéantir » :<br />
zmar « anéantissement ».<br />
S.-cr. ômara et àmar « temps chaud, chaleur suffocante ». Et<br />
également :<br />
Slavon mara « égarement de l'esprit ».<br />
R. mard « rêverie, vision ».<br />
Pol. marzyc « rêver » : mara « rêve, spectre », et zamar « monstre »,<br />
zamara « chrysalide, nymphe ». Et :<br />
Pol. omar, omor (omôr) « rouille des céréales » et « épine-vinette »,<br />
l'arbuste qui donne la rouille.<br />
S.-cr. omara, omora (usuellement omàrika, § 1045), désignant<br />
une espèce de pin et aussi le génévrier, et qui a pu désigner<br />
antérieurement l'épine-vinette.<br />
Toutes ces formes sont en rapport évident avec moriti « faire<br />
mourir» (§ 728).<br />
2° R. marâï « salir, barbouiller » : podmâr. Ce verbe est russe,<br />
blanc-russe et ukrainien, et il n'apparaît dans pol. dial. zamara c<br />
et slov. zamârati que comme russisme. Le haut-sorabe a môrac<br />
« graisser, frotter ».<br />
Il est inutile de chercher un rapprochement avec gr. [xopûcaw
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 197<br />
« je tache, je noircis » : il s'agit visiblement d'une forme sur un<br />
des sens spécialisés de moriti, comme tch. moriti « mordancer,<br />
tanner ».<br />
3° S.-cr. mâriti « s'intéresser à, se soucier » : mâr « sollicitude »,<br />
et mara (et fém. mar), nèmâr « négligence ».<br />
Slov. mârali : mâr, nçmar.<br />
Miklosich y a reconnu un emprunt à v. h. a. mâri « célèbre »,<br />
mâren « faire connaître », et unmâri « peu estimé, indifférent » ;<br />
l'emprunt est plus net dans slov. mârenj « bruit, racontar » (§ 1092)<br />
et dans les noms propres en -mar (§ 1230).<br />
Pol. patrzyc, patrzec (§ 595), «regarder, avoir soin de» : patra<br />
(dial.) « lieu d'observation », plur. patry « yeux, lunettes », opalry<br />
et przypatry « inspection ».<br />
Tch. patfiti « regarder, concerner », opatriti « pourvoir » : slovaque<br />
opatera « soins ».<br />
Seulement polonais et tchèque, le croate pàtriîi « appartenir,<br />
concerner » étant pris au tchèque. Non expliqué.<br />
S.-cr. zàstarjeti « tomber en désuétude » : zâslara « prescription ».<br />
Slov. zaslârali se : zastâra.<br />
Sur starû « vieux ».<br />
Y. si. svariti « injurier » :<br />
V. si. svaru « lutte, querelle ».<br />
R. svârit'sja « se quereller » : svâra, posvâra, et bl.-r. svar.<br />
Pol. swar, poswar.<br />
Tch. svâr « querelle » ; et nesvâr « désaccord », mais en regard<br />
de (ne)svorny «en (dés)accord », et en contact avec svor «ce qui<br />
sert à assembler », de vire- (§ 728).<br />
Slov. svariti « remontrer, mettre en garde » : svâr « blâme »,<br />
posvâr et posvâra « mise en garde » ; —• s.-cr. svar, svara (et fém.<br />
svar), slavonisme ou russisme.<br />
Sur svariti, voir § 615.<br />
Slavon varovati « garder » :<br />
Pol. warowae « garantir » : wara « gare ! ».<br />
S.-cr. varovati, vârati « garder » : ancien var « circonspection,<br />
attention », adv. iznevar « inopinément » ; et prèvariti « tromper » :<br />
prijèvara « tromperie » (et ancien prëvar, fém.).<br />
Slov. prevâriti : prevârâ.<br />
Emprunt au germanique, v. h. a. wara « garde » (§ 568).<br />
S.-cr. h&rati « ravager » : har, pohara « dévastation ».<br />
Du germanique, v. h. a. harjôn (ail. verheeren « ravager »).
198 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
V. si. o-zariti « illuminer » :<br />
R. ozarit' : ozâr (et fém. ôzar') « illumination ». Et zârit' « suivre<br />
des yeux » et « enflammer de désir », zàrii'sja « convoiter » :<br />
prizâr, razzâr (fém. plur. zâri « désir ardent »).<br />
Factitif de zïrëti « regarder ».<br />
§ 791. Y. si. bajati (J. Ex.) « raconter des fables », imperf. dérivé<br />
obavati « ensorceler par incantation » : slavon obava « incantation ».<br />
Tch. ancien baje-, bâti (§ 508) : bâje « fable, mythe ».<br />
R. obâjat' « amuser par de belles paroles » : obâj « beau parleur,<br />
imposteur ».<br />
V. si. cajati « attendre, espérer », otuëajati « désespérer » :<br />
Ukr. otëâj « désespoir ».<br />
Et voir cak-, § 787.<br />
dati, imperf. dajati et -davati :<br />
Pol. dial. wydaj, et oddaw « épousailles », ancien przedaj « vente »<br />
(mod. przedaz, § 1017).<br />
Tch. podaj « tradition » et podej « remise », prodaj et prodej<br />
« vente », rozprodej, v y prodej, ûdaj « indication », vdaj « mariage<br />
(de la fille) », vydaj et vydej « dépense » et « distribution » (passage<br />
de -aj à -ej en tchèque, ainsi daj « donne », mod. dej, § 628).<br />
S.-cr. ïzdaja, ôdaja, prôdaja et ràsprodaja, udaja.<br />
Slov. izdâja et izdâva, od(d)âja, predâja, pridâja et pridàv,<br />
pridâva, prôdaj et prodâja, razprôdaj et razprodâja, vdâja.<br />
Sur dati, on a des postverbaux en -d, voir § 819.<br />
grajati « croasser » ( § 508) :<br />
R. grâjat' : graj « croassement », et slavon grai.<br />
Y. pol. graja, mod. zgraja, « foule, multitude », cf. (z)iaja<br />
« meute ».<br />
S.-cr. grâja « cris ».<br />
Slov. grâjati « réprimander », grâjati se « se chamailler » : grâja<br />
« reproche ».<br />
lajati « aboyer » :<br />
R. lâjat' : laj et lâja, oblâj, vzlaj.<br />
Pol. iaja et ziaja « meute ».<br />
Tch. laje « aboiement » et « meute ».<br />
Slov. lâj et lâja.<br />
S.-cr. laj, et lâva « aboiement » (lâvez, § 1017), sur un imperfectif<br />
*lavati qui peut avoir été tiré du perfectif lànuti (§ 490), à côté de<br />
l'imperfectif dérivé ob-lajâvati de àb-lajati.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 199<br />
R. pajât' «souder» (§ 729) : nedopâj «mauvaise soudure»,<br />
napâj, nad-, o-, ol-, pod-, pere-, pri-, ras-, s-, v-, za-.<br />
stati, imperf. stajati :<br />
V. si. prëstai dans bez prëstaja « sans arrêt » (Ûpir'), slavon<br />
pristai « nouveau venu ».<br />
(Tch. hranostaj « hermine » et pol. gronostaj, à aspect de composé,<br />
mais sûrement altéré).<br />
S.-cr. pôstaja « station ».<br />
Slov. dostâja, o(b)stâja, po-, pri-, v-, za-.<br />
Et v. si. staja « lieu de station, logis, étable », r. stâja, etc., dérivé<br />
suffixal ancien en -ja (§ 1025) qui se confond avec le postverbal<br />
de stajati.<br />
Isolément, on trouve stad- dans la locution s.-cr. stade stâdom<br />
«il s'arrêta », sur le jJième de l'aoriste stàdoh de stàti (§ 636).<br />
Les postverbaux les plus nombreux sont sur le thème stav- du<br />
factitif staviti, voir § 792.<br />
taje-, tajati « se fondre » :<br />
R. tâjat' : natâj, obtâj et otdj, ottâj.<br />
Pol. tajec (§ 595) : dial. roztaj « dégel ».<br />
Sur thème ta- (§ 508), se rencontrant avec un autre thème :<br />
laiti « tenir secret » :<br />
V. si. tai, otai « en secret », adv.<br />
R. taj, otdj, potâj, adv., et subst. potàj, pritdj, utâj.<br />
Tch. taj « mystère ».<br />
S.-cr. pôtaja « secret », ùtaja et zâtaja « recel ».<br />
Slov. tajiti « mentir » : tâj et tâja « mensonge », potâja « secret »,<br />
utâja et zatâja « démenti, reniement ».<br />
V. si. tatï « voleur » (§ 169), élargissement en -g- dans adv. tâya-<br />
« vol » et skr. tâguh « voleur ».<br />
R. xâjat' « blâmer » ( § 508) : obxâj « blâme, critique ».<br />
S.-cr. hàjati « se soucier » : haj « souci » (ancien), nèhâj « insouciance<br />
», ohaja de ohajati « laisser aller ».<br />
Et sur nexa- :<br />
Pol. niechac « laisser », poniechac « renoncer » : poniecha.<br />
Slov. nehâti « laisser, cesser » : nçh.<br />
§ 792. — Pol. obawiac/siç, pour obawac siç, « craindre » : obawa<br />
« appréhension, crainte ».'<br />
Tch. obâvati se : obava.<br />
Imperfectif dérivé de v. si. bojati sç, pol. bac siç et tch. bâti se<br />
(§ 590), confondant son postverbal avec ceux de baviti (§ 778).
200 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
daviti «oppresser, étrangler» (§ 613) :<br />
Y. si. udavû (Ham.) « étranglement » ou « lacet pour étrangler ».<br />
R. davit' : dodâv, na-, ob-, ot-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, za- ;<br />
udâv « action d'étrangler » et udav « boa, python », udâva « nœud<br />
coulant ».<br />
Tch. dav « foule » et anciennement « oppression », v. tch. nâdav<br />
« oppression ».<br />
S.-cr. dav a (ancien) « étranglement », ùddv « boa » ; — slov.<br />
udav « boa », zaddva « étranglement ».<br />
Rencontre avec les postverbaux de -davati (§ 791).<br />
(jjaviti « manifester » :<br />
V. si. (jjavë « manifestement », adv.<br />
R. javit' « montrer » : jdva « montre, exhibition », et locution<br />
na javû « en état de veille, en réalité », adv. v'jdve (v'jâv' ) « ouvertement<br />
» ; iz'jdv, ob'-, ot'-, pere-, pro-, za-, pôjâv, vyjav, et najdva,<br />
ob'jdva, po-, projdva (et prôjav').<br />
Pol. jaw et jawa « état de veille », objaw, po-, prze-, wy-, z-, et<br />
objawa, pojawa, zjawa.<br />
Tch. jev « fait, phénomène », objev, pro-, vy-, z-.<br />
S.-cr. jâv « action de se manifester, réponse à un appel », et jdva<br />
« état de veille, réalité », locution na jdvi « éveillé » ; ïzjava, ob-, po-,<br />
pri-,<br />
Slov. pojàv, et izjâva, ob-, pri-.<br />
Base ave, adv., skr. âvîh « manifestement ».<br />
praviti « diriger » :<br />
V. r. isprava, na-, o-, pri-, u- : développement de postverbaux<br />
attesté depuis le début du xiv e siècle.<br />
R. prdvit' : poprdv, uprâv, vprav, zaprdv, et doprdva, is-, na-,<br />
o-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, rasprâva « redressement, châtiment »,<br />
s-, u-, za-.<br />
Pol. prawic « discourir, dire » : naprawa « réparation », oprawa<br />
« reliure », poprawa « réforme », przyprawa « apposition, assaisonnement<br />
», rozprawa « discussion, dissertation », sprawa « affaire »,<br />
uprawa « apprêt, culture », zaprawa « assaisonnement ».<br />
Tch. ndprava, o-, po-, pri-, û-, vij-, sprdva et zprdva ; et nouveaux,<br />
créés au xix e siècle : doprava, prû-, pre-, roz- ; et souprava « garniture<br />
» (§ 1222).<br />
S.-cr. Isprava, nàprava (nâ-), o-, ôt-, prï-, spràva ; et ràsprava,<br />
d'abord au sens de « diffamation, médisance », et depuis le xix e siècle<br />
au sens de « débats, dissertation » du polonais et du tchèque ;<br />
ûprava «administration», adapté du russe upravlénie (§ 825), et
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 201<br />
de même sûrement poprava « réparation, rectification », de r.<br />
popravlénie (et fém. naprav, pri-, s- en cakavien).<br />
Slov. naprâva, iz-, o-, od-, po-, pri-, raz-, s-, u-, en partie emprunts,<br />
comme en serbo-croate.<br />
Base pravu « droit », adj., dérivé à suffixe -vu (§ 1182).<br />
staviii « placer » et « arrêter » :<br />
Y. si. sûstavu « substance », ustavu « détermination, statut »,<br />
postavu « trame, pièce de tissu » (Gr. Naz.), zastavu « camp »<br />
(Ham.) ; slavon stavu « élément », nastavu « prix ajouté ».<br />
R. stav, dosiâv, na-, ot-, po-, pod-, pere-, so-, u-, za-, vystav,<br />
ôstâv, pristâv « addition » et prislav « le préposé » (et v. r. pristavu) ;<br />
et podstâva, zastâva,.<br />
Pol. staw « jointure » et « étang », postaw « pièce de drap » et<br />
postawa « stature », çastaw « gage » et zastawa « vanne » ; podstaw,<br />
przy-, roz-, u-, w-, ze-, et nastawa, nad-, o-, od-, pod-, przy-, u-, w-,<br />
wy-.<br />
Tch. stav « état, barrage, métier à tisser », odstav, po-, pred-,<br />
pri-, û-, vy-, za-, et postava, pre-, pred-, ù-, vy-, zâ-, sestava et<br />
soustava « composition, système ».<br />
Bulg. stâva « jointure » et « tas de gerbes ».<br />
S.-cr. stàv « attitude, pose » et stâva (et fém. stâv), pàstav « toile »<br />
et po(d)stava «doublure», ùstav «statut» et ûstava «écluse»,<br />
pristâv «adjoint, valet», sâstav, et dôstava, ndstava (nâ-), ôstava,<br />
prëdstava « représentation » de r. predstavténie, zâstava « place au<br />
bas bout » et « étendard », et dial. zâstava « embuscade ».<br />
Slov. stàv « état, thème » et « proposition, phrase » (ail. Satz),<br />
et stâva (et fém. stâv) ; postâv, pod-, pre-, se-, u-, pristâv, et dostâva,<br />
ostâva et obstâva, na-, od-, po-, pod-, pre-, pred-, pri-, raz-, se-, u-, v-,<br />
za-.<br />
Factitif staviii de stati, stajati, et voir les postverbaux en -staj-,<br />
§ 791.<br />
§ 793. Isolés. — Si des mots comme v. si. jama « fosse » n'ont<br />
aucun rapport visible avec les postverbaux, le mot v. si. casu<br />
« moment », s.-cr. ëâs, etc., possède son verbe dénominatif, r. dial.<br />
ëasit' « sonner les heures » et « attendre », perf. pocasW, s.-cr. ëâsiti,<br />
po-, « attendre », tch. casiti se « avoir lieu à temps », et avec un<br />
postverbal :<br />
tch. vycasiti se : vycas.<br />
On penserait à un dérivé suffixal en -su (§ 1135) sur le thème de<br />
ëajati «attendre», si le vieux-prussien kïsman «temps» (§ 184)<br />
ne faisait pas supposer un thème verbal *kës-, comme *ver- ou *vertdans<br />
v. si. vrëmç « temps » (§ 186).
202 LES POSTVERBAUX [§ 793]<br />
V. si. vapù « couleur » (Ham.) est en regard du verbe vapiti dans<br />
vapljenije « teinture », et le russe a vap et vdpa, verbe vdpit', po-.<br />
C'est évidemment un emprunt au grec pacpr) « teinture, couleur »,<br />
(ïà7mo et mod. pàçco « je teins » ; les mots baltiques, v. pr. woapis<br />
« couleur », etc., sont pris au slave.<br />
On notera le postverbal r. dial. vap de vopit' « crier » (§ 813).
CHAPITRE X<br />
VOCALISME RADICAL -i-<br />
§ 794. Alternance ï : i. — Cette alternance se rencontre dans<br />
des verbes à présent en -je- ( § 543) :<br />
pise-, pïsati :<br />
R. pisâl' : ôpis, ôtpis, pôdpis, propis, vpis. Ces postverbaux<br />
masculins sont des archaïsmes, et les formes ordinaires sont des<br />
féminins, à côté des dérivés en -ka (§ 826) : dôpis' et nédopis', nâ-,<br />
nâd-, ô-, ôt-, pôd-, père-, prt-, prô-, rôs-, vy-, zâ-, composés prdvopis'<br />
« orthographe », zivopis' « peinture ». Le type féminin s'est développé<br />
vers le xiv e siçcle, remplaçant un type masculin du vieux russe :<br />
otùpisu (xn e s.), puis otupisï (xiv e -xv e s.), qui se continue avec<br />
élargissement en -ùku (§ 838) : sûpisûku, mod. spisok.<br />
Pol. rymopis et wierszopis « rimeur, versificateur»; dopis, na-,<br />
nad-, o-, od-, po-, pod-, prze-, przy-, roz-, s-, w-, wy-, za-.<br />
Tch. pis « écriture » (ancien, rare), composés mistopis, pravopis ;<br />
dopis, nâ-, nad-, o-, od-,, po-, pod-, pre-, pred-, pri-, roz-, û-, v-,<br />
vy-, zâ- ; spis et soupis (§ 1222) de sepsati.<br />
S.-cr. pràvopïs ; dopis, is-, nà-, nàt-, à-, ôt-, pà-, pôt-, prépis et<br />
prijèpis, pri-, prô-, râs-, ù-, zâ-, spïs.<br />
Slov. pisati « écrire » et « colorier, bigarrer » (§ 543) : pis « écrit »<br />
et pisa « rayure, tache de la robe du cheval » ; dopis, iz-, na-, nad-,<br />
o-, od-, po-, pod-, pre-, pri-, pro-, raz-, s-, v-, za-,<br />
lize-, lïzati :<br />
R. lizât' : liz, doliz, na-, nad-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
raz-, s-, u-, vyliz ; et masc.ydoliza, ob-, pod-, pere-, pri-, s-, u-, za-,<br />
« personne qui lèche, qui flatte ».<br />
Pol. dial. obliz ; — tch. liz et dial. liza « ce qu'on lèche », v. tch.<br />
poliz.<br />
Slov. liza, masc., « lécheur ».
204 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Y. si. zizde-, zïdati :<br />
S.-cr. zidati : zîd « mur », composé sûhozïd « mur de pierres<br />
sèches » ; prëzïd « mur de séparation », anciens obzid et obzida,<br />
prizida.<br />
Slov. zîd « mur », obzîd, prizld, et pozid « foyer ».<br />
Ces formations sont nouvelles, et les anciennes sont sur le thème<br />
zîd- :<br />
V. si. zïdu « maçonnerie », et « poterie » (Upir') ; et fém. zïdï,<br />
§ 713.<br />
Tch. (zed' «mur», gén. zdi), zdlti «maçonner» : v. tch. prizda<br />
« mansarde, alcôve ».<br />
S.-cr. dial. zâd « mur » ; — slov. pôzad « foyer » à côté de pozid.<br />
En baltique, lit. ziësti « bâtir » : zaïdas « foyer », et v. pr. seydis<br />
«paroi» sur *zeid-, La racine primitive est *dheigh- (§ 543) : gr.<br />
T£IX W et TOÏ/OÇ « mur », av. -daeza-,<br />
§ 795. Alternance des imperïectiîs dérivés. — Beaucoup de<br />
postverbàux sont bâtis sur la forme à alternance ï : i (§ 649) de<br />
l'imperfectif dérivé. On a déjà vu :<br />
-cm- sur -ëinati pour -kon-, -pin- pour -pon-, -tin- pour -ton-,<br />
§ 727;<br />
-bir-, -dir-, -pir-, -stir-, -tir-, -vir-, -zir- pour -bor-, -dor-, -por-,<br />
-stor-, -tor-, -vor-, -zor-, § 728.<br />
-liv-, -piv-, -riv-, -viv- pour -loj-, -poj-, -roj-, -voj-, § 729.<br />
-kvit-, -svit-, -blisk-, -tix- pour -kvët-, -svët-, -blësk-, -tëx-, § 745.<br />
-vir- pour -var-, -zig- pour -gag-, § 777.<br />
Et pol. rzyn- sur rznqc, § 776, et l'on verra -im-, § 811, et slov.<br />
trip pour trep, § 805. On ajoutera ici :<br />
-nïze-, nizati (§ 428) :<br />
R. nizdt' « enfiler » : doniz, na-, ob-, ot-, pod-, pere-, pri-, pro-, s-,<br />
u-, vyniz (et fém. niz', nâniz', pôd-, prô-, s-, vy-, zâ-).<br />
Slovaque nanizany « froncé, plissé » : niz « pli ».<br />
S.-cr. nizati « enfiler, aligner » : nîz « file », nâniz et niza « rangée,<br />
collier » ; — slov. nîz « rangée, collier ».<br />
Et voir -nïze-, -noz-, § 723. On a un autre thème niz-, § 796.<br />
Slavon zïme-, zçti « presser » ( § 458) :<br />
R. zmë-, imperfectif dérivé -zimât' : dozim, iz-, na-, nad-, o-, ob-,<br />
ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-, za-, vyzim, masc.<br />
uzima « grimacier ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 205<br />
Et sur le thème zïm- :<br />
éom « presse, pressoir » (plur. zômy), izzôm, na-, nad-, s-, pod-,<br />
raz-, v-, vyzem ; et bl.-r. nâzma « lieu marécageux », en regard de<br />
r. nazim, naêôm « pression », et « lieu sous une montagne où l'eau<br />
des sources se rassemble ».<br />
sïcati «pisser», itér. *sicati (§ 602) :<br />
R. sikat' : bl.-r. siki (plur.) « urine », r. dial. sîka, masc., « pisseur »,<br />
pôsik « verge d'un animal ».<br />
Pol. dial. siki et posiki « urine ».<br />
Et sur le thème sic- :<br />
Tch. poscaîi se « pisser » : posek « pénis du taureau ».<br />
mïgnçti, na-mi(d)zati «cligner de l'œil» :<br />
R. migât' : mig « clin d'œil », peremig, masc. podmiga « qui fait<br />
des clins d'œil ».<br />
Pol. mig ; — tch. mih.<br />
S.-cr. mig, et namig « œillade », création éphémère du xix e siècle.<br />
Slov. mig, composé okomlg « clin d'œil », namig, et dial. miga<br />
« cil ».<br />
En baltique, lit. migti « s'endormir » (§ 493) : miêgas « sommeil »,<br />
lette miegs.<br />
pïxati «pousser (du pied), concasser», pixati (§ 468) :<br />
R. p(e)xât', pixât' : pix, napix, o-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
ras-, u-, za-, vypix.<br />
Pol. pchae « pousser, fourrer », imperf. dérivé -pychae pour dial.<br />
-piehae, par confusion avec le thème pyx- (§ 802) : zapyeh « bâillon »,<br />
ancien popyeh « poussée, impulsion ».<br />
Tch. pehâti « piquer », piehati : pieh « piqûre, point » ; et pieh<br />
« battoir, piston », en tchèque ancien pieh et piech, par rapprochement<br />
du thème pïx- et de son dérivé *pëstu « pilon » (§ 1160), tch.<br />
pist, v. tch. piest.<br />
Et sur le thème pïx- :<br />
R. pëx, napëx, o-, po-, pod-, pri-, pro-, ras-, u-, v-.<br />
Pol. ancien zapech « action d'enfoncer, écharde qui s'est<br />
enfoncée ».<br />
Slov. p(e)hâti «pousser», avec postverbaux uniquement sur<br />
le thème pïx-, mais se rencontrant quelque peu avec ceux du<br />
thème pax- « souffler » ( § 787) : pàh et pçh « poussée », et « verrou »,<br />
composé samopàh, -peh
206 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
mïnëti « penser », pomënçti, pomengti « se souvenir », imperf.<br />
dérivé pominati (§ 490) :<br />
R. pùminât' « faire mention » : pomin « souvenir, commémoration<br />
des morts», napomin, otpomin, pripomin, v(o)spomin, zapomin.<br />
Slov. pomin, spomîn.<br />
Et sur le thème pomçn- :<br />
S.-cr. pomènuli : pômën, spômên et spômena, uspomena.<br />
Slov. pômen « souvenir » (distinct de pomèn « signification »,<br />
§ 749), spomçn.<br />
Avec un thème min- différent :<br />
Y. r. mine-, mçti «fouler» (§ 457) :<br />
R. mjat', itér. minât' : domin, iz-, na-, nad-, ob-, ot-, po-, pod-,<br />
pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-, za-, vymin.<br />
zïnje-, zçti « moissonner », -zinati :<br />
R. za?, zind? : dozin et nedozin, na-, nad-, obzin et ozin, otzin,<br />
pozin et spozin, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, za-, vyzin.<br />
Roi. dial. dozyn et pozyna «moisson».<br />
Sur le thème zïn)j)-, on trouve s.-cr. nâzanj et slov. ndzenj<br />
(gén. nâznja), s.-cr. zâzanj, mais le vieux-tchèque zen (gén. zni)<br />
est féminin.<br />
A côté de r. uzin « ce qu'on lève en moissonnant », on a ûzin<br />
« souper », v. r. et dial. Mina, s.-cr. Mina « collation, goûter »,<br />
slov. jùzina. Il est arbitraire d'expliquer le mot par jugu « sud »,<br />
qui n'a jamais le sens de « midi, milieu du jour », et on peut penser<br />
à un postverbal ancien de u-zinati, qui aurait désigné la collation<br />
due aux moissonneurs.<br />
V. si. -zïre-, -zrëti «avaler, dévorer», -zirati (§ 453) :<br />
R. zira (dial.) « abondance, contentement », obzira « voracité »,<br />
masc. proèira « goinfre ».<br />
Slov. pozîr « gorgée ».<br />
Sur thème zïr- ou zer- :<br />
R. zôrom « goulûment », adv., nazôr « voracité », pozôr, prozôr,<br />
masc. zôra « goinfre » et obzôra, prozôra.<br />
Pol. pozer « pâture », dial. pozera « appât », plur. wyzery « mangeaille<br />
», et savant wyzer « gangrène », sur -zerac qui peut continuer<br />
-zirati.<br />
Tch. pozer « nourriture (des animaux) ».<br />
S.-cr. zdéra, masc., « goinfre » et prozdor, sur zdërë-, et sur<br />
prôzdrë- avec jeu secondaire d'alternance à l'imitation de prôdrë- :<br />
pràdor (§ 728).
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 207<br />
Sans préverbe, on a le masculin v. si. ziru « pâture » (Pand. Ant.,<br />
Upir'), r. zir, gén. zira « graisse (des animaux), lard», pol. zyr<br />
« pâture, mangeaille », et zer qui peut résulter du passage phonétique<br />
de yr à er, tch. zir « nourriture pour les animaux », slov. zîr « nourriture,<br />
gland », s.-cr. zîr, gén. zîra « glandée, gland ». Le mot a pu<br />
être mis en rapport avec -zirati, mais originellement ce doit être<br />
un dérivé sufïixal en -ru (§ 1114) du thème de ëiti «vivre», qui<br />
apparaît avec le sens de « paître » en slavon, et dans le dérivé v. si.<br />
pazitï «pâture, prairie» (§ 1168).<br />
L'intonation douce du serbo-croate et du slovène, en regard<br />
de l'intonation rude de s.-cr. zlti, slov. ziti, s'explique par une<br />
métatonie qui convient à un dérivé en -ru, ancien oxyton (§ 1115).<br />
sïje-, siti « coudre » :<br />
R. sit', itér. sivât' '. dosiv et nedosiv, is-, na-, nad-, ob-, ot-, po-,<br />
pere-, pri-, pro-, ras-, s-, u-, v-, za-, fém. rassiva.<br />
S.-cr. sïti, -sivati : podsîv « talon (de botte) ».<br />
Slov. siv, nasiv, o(b)siv et obsîva, podsiv et podsîva, presiv,<br />
prisiv.<br />
Et sur le thème sïv- (§ 514) :<br />
Y. si. sïvu « couture ».<br />
R. sov (gén. sva), pôsev et posôv, podsôv, prôsev, usôv ; dôsva et<br />
nedôsva, plur. ndsvy, obôsva, pôsva, podôsva « semelle » et « plante<br />
des pieds », perésva, prisva « liseré », prôsva « passepoil ».<br />
Pol. szew, przyszew et przyszœa « empeigne », podeszwa « semelle,<br />
plante des pieds », poszwa « fourreau, taie d'oreiller ».<br />
Tch. sev, pod(e)sev et podesva (mod. podesev, fém.).<br />
S.-cr. sàv, àbasav et àpsav « liseré, passepoil », pàsav, fém. nàsva<br />
« suture » et « périnée », plur. ôsve « ourlets, rubans de chemise »,<br />
pôdsav « ourlet, volant ».<br />
Slov. sèv, ndsev, o(b)sèv, pôdsev, presèv, prisèv, fém. ôsva<br />
« garniture cousue ».<br />
§ 796. Alternances moins claires ou sans alternance. — R.<br />
risovât' « dessiner » :<br />
Pol. rysowac : rys « dessin », narys, zarys, obrys « contour », et<br />
abrys « plan », qui est ail. Abriss.<br />
Tch. rys, nârys, obrys.<br />
Slov. risati : ris, nafîs, obrîs, zarîs ; — s.-cr. naris, àbris<br />
(emprunts).<br />
De l'allemand Riss « plan, dessin ».
208 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Y. si. niziti « abaisser » :<br />
R. niz « le bas », obniz (et pôniz', fém.).<br />
Pol. dial. niz et niza « bas-fond ».<br />
Slov. ponîz « abaissement » : — s.-cr. [niz, fém., « bas-fond »).<br />
Sur l'adverbe nizu «en bas» (§ 275), substantivé dans niz<br />
« le bas ».<br />
V. si. cistiti « nettoyer » :<br />
R. (prôëist', rôs-, zâ-, fém.).<br />
Tch. ocisla « épuration », v. tch. « ordalie ».<br />
Slov. oëist, nom de diverses plantes, pôëist « balsamine », et<br />
ocîsta « purification ».<br />
S.-cr. : anciens ocist « purgatoire », poëist « euphorbe, épurge »<br />
(et poëïst, fém.).<br />
Sur ëistu « pur » (§ 616).<br />
S.-cr. ancien militi se « changer », presamititi et presumititi<br />
«plier en deux, doubler» : sùmit (§ 1222) dans la locution u sùmit<br />
« tête-bêche » (et adv. sûmitice, § 322).<br />
V^ si. mite, adv., «alternativement», et v. r. mitusï (§ 1157),<br />
sur la racine * mil- du lette mitêi « changer », miêtus « échange »,<br />
skr. mithâh «en alternance avec», lat. mûlô, et si. mïstï (§ 1169),<br />
élargissement en -i- de la racine *mei- (§ 490).<br />
V. si. svistati « siffler » :<br />
R. svist « sifflement », nâsvist, osvist, pôsvisl, pôdsvist, peresvisl,<br />
pro-, za-, prisvist, v^svist.<br />
Pol. swist, poswist, wyswist ; — tch. svist.<br />
Et voir zvizd-.<br />
Y. si. za-slilili « protéger » :<br />
V. si. stitiï « bouclier ».<br />
R. sëit (gén. scitâ), zasèiia et zasëit « protection ».<br />
Pol. szczyt, zaszczyt « honneur ».<br />
Tch. stit, zâstita ; —- slov. scit, zasëîta ; — s.-cr. Mit (gén. stita),<br />
zâstita, et fém. dial. scita « ombrelle ».<br />
Le mot de base *scitu est sûrement un mot d'emprunt : irl.<br />
sciath de *skeit-, et lat. scûtum qui peut représenter *skoit-.<br />
Pol. brzydzic « inspirer de l'aversion » : brzyd « aversion, dégoût »,<br />
pol. ancien obrzyd et obrzyda.<br />
Tch. ancien briditi « gâter, bousiller », slovaque bridit' sa<br />
«dégoûter» : (slovaque brid', fém., «dégoût»).<br />
Sur v. si. bridukû « piquant » (§ 983), pol. brzydki « laid, vilain ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 209<br />
vidëti :<br />
Y. si. vidû « vue », obida « déni de justice, tort », zavida « envie ».<br />
R. vid « aspect, visage » ; locutions v povidu « de loin », v perevid<br />
« quelque part, quelquefois », plur. prividy « visions, apparitions » ;<br />
obida, zavida savant, et pop. nâvida « visite » (ôvid' « horizon »).<br />
Pol. wid dans ni widu (ni siychu) « sans nouvelles », dial. przywid<br />
« chimère », v. pol. obida.<br />
Tch. vid «vue, aspect», savant, et pop. ani vidu (ani slechu) ;<br />
composé oslrovid « lynx, basilic » ; vida « idée », v. tch. obida<br />
« opprobre ».<br />
S.-cr. vîd « vue », nêvïd « être invisible, mouche de la dingue »<br />
et locution u nêvïd « complètement » ; Izvïd « examen », privid<br />
« apparition, spectre ».<br />
Slov. vid, nevid « infusoire », zavid « envie », povid, pre-, pri-,<br />
raz-.<br />
En baltique, lette viedêt : veïds « vue », lit. véidas (§ 593).<br />
Le verbe n'a plus en slave aucun rapport avec vëdëti (§ 747).<br />
Slavon zvizdati « siffler » :<br />
V. si. zvizdu « sifflement, bourdonnement d'oreille » (Ham.).<br />
R. dial. zviznut' : bl.-r. zvizd.<br />
Pol. gwizdaé : gwizd, dial. pogwizd ; — tch. hvizd.<br />
Slov. zvizdati et zvizgati : zvizd et zvizg, zazvîzy.<br />
S.-cr. zvizdati : zvizd et zvizd, fém. zvlzda et zvlzga.<br />
Et voir svist-,<br />
R. sciple-, scipdt' « pincer » : scip, dosëip, na-, u-, pere-, pro-,<br />
ras-, u-, za-, ôtsëip, v y scip, et fém. priscipa.<br />
Pol. ancien wyszczyp.<br />
S.-cr. ùstip « pinçon » (ùstipak « beignet », allemand d'Autriche<br />
Zwiekkrapfen sur zwicken « pincer ») ; —- slov. uscip.<br />
Le vocalisme radical et la flexion du verbe indiquent un itératif<br />
(§ 551). Le degré vocalique sëïp- se trouve dans r. scépot' «prise,<br />
pincée » et dans le slavon russe sëîpu. « éclipse, décroissance de<br />
la lune », verbe sëïnuti sç, s.-cr. ùstap et slov. ûsëep « pleine lune »<br />
(au sens de commencement du dernier quartier), verbe s.-cr.<br />
ustàpnuti se « décroître ».<br />
Tch. vtipiti se, dovtipiti se « deviner » : vtip « esprit », dùvtip<br />
« pénétration d'esprit », dès le vieux-tchèque dùvtip.<br />
Pol. dowcip « esprit, saillie », dial. wcip.<br />
Évidemment d'une locution v tip, mais à second terme non<br />
identifié.
210 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
R. xlipat' « sangloter » : xlip, zaxlip, vsxlip, et masc. vsxlipa<br />
« pleurnicheur ».<br />
Slov. hlipati « sangloter, haleter, siroter » : hlîp et hlipa. Contamination<br />
en slovène avec hlikati, de Ujk- (§800).<br />
Slavon sibe-, sibati «cingler» (§ 432) :<br />
(Y. si. osibï « queue », § 714.)<br />
R. sibât' : adv. slbom « en cinglant », nâsibom ; dosib, pro-, u-,<br />
za-, vysib ; pôsîb « manière, style » ; ôsib « coup » et o(bJsib, et<br />
ôsib « queue » (avec l'accent du féminin v. r. osibï).<br />
Pol. szyb « cerf-volant (des enfants) », adv. szybem « rapidement,<br />
comme une flèche ».<br />
S.-cr. sîb (gén. siba) « buisson, broussailles », et sïba « verge,<br />
baguette » ; — slov. siba.<br />
§ 797. V. si. iste-, iskati « chercher » :<br />
R. iskdt' « rechercher, requérir » : isk « plainte en justice, poursuite<br />
» ; dôisk, nâ-, pô-, peré-, pri-, prô-, vy-, zâ-, izysk, ôbysk, ôt-,<br />
pôd-, s-, vz-, razysk et rôzysk.<br />
Pol. zysk « profit », et dial. isk « quête (des abeilles qui cherchent<br />
où essaimer) ».<br />
Tch. zisk (v. tch. zjisk) « gain ».<br />
Slov. obîsk (et obiskâva, iskâva, iz-, pre-, § 818).<br />
V. si. vûs-klikngti « crier » :<br />
R. kliknut' : klik « cri », dôkiik, nâ-, ô-, pô-, vîj-, zâ-, pereklik,<br />
sklik, vs klik, ôtklik.<br />
S.-cr. klik, pôklïk ; — slov. klik, odklîk.<br />
V. si. kricati « crier » :<br />
R. kricât', kriknut' : krik « cri », dôkrik, nâ-, ô-, ôt-, pô-, zâ-,<br />
perekrik, s-, vs-,<br />
Pol. krzyk, okrzyk, po-, wy- ; -— tch. krik, pokfik, vy-.<br />
S.-cr. krik et krïka ; — slov. krik, krika.<br />
lice «visage», du germanique (§ 191) :<br />
V. si. liciti sç « faire semblant» (Athan.), obliciti «dénoncer».<br />
R. oblicW, dial. Vieil' « ressembler » : lik « face », adv. nâlik « en<br />
face », ôblik « figure », prilik et prilika « convenance », slik et slika<br />
« comparaison », dolika, oblika, polika et ulika « action de convaincre,<br />
pièce à conviction », izlika « la face, l'endroit », oblika<br />
« distinction », razlika « différence ».<br />
V. pol. dolik « démonstration », oblik « forme » ; le verbe liczyc
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 211<br />
est passé aux xv e -xvi e siècles, du sens de tch. liciti « décrire,<br />
raconter », au sens de « compter », d'où lik « nombre, quantité »,<br />
et par emprunt au polonais r. dial. liki « compte » (plur.) et ukr.<br />
et bl.-r. lik, r. dial. perelika « action de recompter » et bl.-r. perelik,<br />
ukr. perelyka « décompte, bilan ».<br />
Tch. lie « l'endroit (d'une étoffe) », qui est l'adverbe v. tch. lie<br />
« face à » (§ 1199) ; odlika « copie, moulage ».<br />
S.-cr. liÉili « ressembler à » et « peindre » : lik et ôblîk « figure »,<br />
adj. jednàlik « uniforme », locution nâlik « semblable » ; slik « rime »<br />
et slïka « image, portrait », ïzlika « prétexte », prilika « occasion »,<br />
râzlika « différence », odlika « distinction, décoration » (du russe)<br />
et dial. « renonciation ».<br />
Slov. lik, na izlik « pour l'apparence », oblîk et oblîka, slik et<br />
slïka, prilika, razlîka, nalîka « analogie », odlika « fait de se débarrasser<br />
» et « distinction ».<br />
V. si. -nikngli « pencher », etc. ( § 497) :<br />
H. niknul', -nikâl' : nik « nuque », adv. nik, nanik, nika « tête<br />
baissée » (§ 1199), subst. nika «tête vers le bas », côté de l'osselet<br />
qui ne tombe pas sur le côté plat ; obnik, vnik, vznik, vijnik, iznik<br />
et iznika, ponik et ponika, prinik et prinika.<br />
Pol. nik (v. pol.) et wnik « filet (pour les oiseaux) », ponik « trou<br />
d'eau », wynik « résultat », znik et zanik « dépérissement ».<br />
Tch. prunik « percée », unik « fuite », (v)znik « apparition »,<br />
znik « perte », et nouveaux (xix e siècle) zânik « disparition, perte »<br />
et podnik « entreprise ».<br />
S.-cr. nikom « tête baissée », adv.<br />
Slov. nikniti «germer» : (v)znîka «vigne qui pousse d'ellemême<br />
».<br />
On a un autre thème dans :<br />
Slov. nikali « nier », zanikali : zanîk « négation ».<br />
S.-cr. pricati « raconter », ispricali « excuser » : ïsprika « excuse »<br />
(dès le xvi e siècle).<br />
Sur prîca « conte », de v. si. prituca « parabole ».<br />
liskali « presser » :<br />
R. tisk, plur. iiski, « presse, étau », ndtisk « pression, empreinte »,<br />
vytisk « épreuve, tirage », dôlisk, pô-, pod-, rds-, û-, zâ-, isiisk, s-,<br />
v-, protisk et néprotisk « presse qu'on ne peut pas traverser »,<br />
prilisk ; ôtisk et oliska, ôfiisk et oltiska « impression, tirage ».<br />
Pol. cisk et scisk « presse, foule », uscisk « serrement, embrassement<br />
», ocisk et odeisk « impression, empreinte », pocisk « projectile »,<br />
przycisk « pression, vigueur », ucisk « oppression », do-, na-, prze-,<br />
wy-, za- ; et fém. podeiska « matrice ».
212 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Tch. tisk, do-, nâ-, o(b)-, pre-, s-, û-, v-, vij-.<br />
S.-cr. ôtîsak « empreinte, impression, tirage », pôtïsak « pression,<br />
force» et prïtîsak (pri-), dial. prôtïsci, plur., «point de côté»,<br />
prëtïsak «réimpression» et pàtïsak «contrefaçon» (§ 1220), Mïsak<br />
(ùiisak) « impression (morale) » (§ 824), zàtisak « tampon » ; stîsak<br />
« serrement » et stïska « presse, foule ».<br />
Slov. tisk « pression » et natisk, otisk « impression, tirage »,<br />
iztîsk et odtisk « exemplaire », potîsk et pritîsk « (im)pression » ;<br />
patîsk « contrefaçon », pretisk « réimpression », protîsk, vtîsk<br />
« empreinte » et « impression (morale) » ; tiska et stïska « presse,<br />
foule », otîska, pritîska et utiska « contusion, plaie contuse ».<br />
Et voir tësk-, § 745.<br />
dvignçîi « mouvoir » :<br />
Y. si. podvigu « lutte, exploit », vûzdvigu « élévation, Exaltation<br />
de la Croix ».<br />
R. dôdvig, pôd-, prô-, vy-, nadvig, ot-, pere-, raz-, s-, v- ; podvig<br />
« action d'avancer » et pôdvig « exploit », vzdvig « action de lever »<br />
(vozdvizenie « érection, Exaltation de la Croix », § 826).<br />
PQI. dzwig (dial.), podzwig « action de soulever ».<br />
Tch. dvih et zdvih « action de lever » et « arsis » (fém. zdviz<br />
« ascenseur »).<br />
Slov. dvîg, podvig, pri-, vzdig ; — s.-cr. dîgnuti « lever » (§ 497) :<br />
pôdvïg, slavonisme, et podig, mot de lexique.<br />
S.-cr. frïgati, prïgati «frire» : pàtprig (potprïg) et zdfrïg «roux<br />
(de cuisinière) », et podpriga.<br />
Et slov. frïgati, emprunt à l'italien friggere, pour s.-cr. prâziti,<br />
prziti « griller, frire » (§ 782).<br />
V. si. strize-, stristi « tondre » :<br />
Slavon strigu «tonte» (v. si. sirëgû, § 745), v. r. postrigy (et<br />
-strëgy) « première coupe des cheveux de l'enfant ».<br />
R. strig et fém. striga ; dôstrig, ô-, ôt-, po-, pôd-, vy-, zâ-, nastrig,<br />
nad-, pere-, pri-, pro-, so-, razstrig « dégradation d'un prêtre, d'un<br />
moine » ; masc. o(b)striga et postriga « le tondu, tonsuré », perestriga<br />
« qui a changé de religion, schismatique », razstriga et slavon<br />
russe rostriga « prêtre déposé, moine défroqué ».<br />
Pol. rozstrzyg « fait de trancher, décision », zastrzyg « coupe de<br />
travers ».<br />
Tch. stfih « coupe, tonte », sestf'ih, vij-, zâ-,<br />
S.-cr. strîg « tonte » et strïga, nom de brebis, postrig et pàdstrig<br />
« tonsure », râstrïg « action de défroquer ».<br />
Et s.-cr. strïza « retaille, chute (d'étoffe) », sur l'imperfectif<br />
dérivé (pod-)strizati ( § 650) et le récent strizati « découper ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 213<br />
(po-Jstigngii « atteindre » :<br />
R. nâslig.<br />
Pol. doscig, poscig « poursuite », wyscig « course (de chevaux) », et<br />
locution na wysciyi « à qui mieux mieux ».<br />
Tch. dostihy «courses», dial. na pristihy (chodiî) «(couper) au<br />
plus court ».<br />
S.-cr. dôstïg, sûslîg en regard de sùstignuti « rejoindre ».<br />
Racine i.-e. *steigh- (§ 497), dont le degré réduit se conserve en<br />
slave dans le substantif v. si. stïdza « sentier », r. stezjâ ( § 22) et<br />
stegâ, s.-cr. stàza, etc., qui n'a plus de rapport avec le thème verbal<br />
stig-. Le postverbal ancien était lit. staigà « subitement », adv.,<br />
de fém. staigg., instr. sing., got. staigs « chemin », et gr. azoZyoç,<br />
« rangée », de a-csi/M « je m'avance », à côté de cmxoç« ligne, vers ».<br />
§ 798, — Slov. kimati « hocher la tête », perf. -kimniti : kîm<br />
« hochement de tête ».<br />
Ce verbe est slovène, serbo-croate : kimati, kimnuli, et bulgare :<br />
kim(v)am, kimne-. C'est la continuation de ky(v)nçti, imperfectif<br />
dérivé -kyvati (§ 802) : le serbo-croate faisait passer vn à mn,<br />
davïno à damno, avant sa restauration en dâvno « (il y a) longtemps »,<br />
et v. si. zvïnëti « retentir » ( § 591 ) est en serbo-croate ancien zamnjeti.<br />
Il a donc eu kimnuti pour kyvnçti, et kimati pour kyvati dès le<br />
xv e siècle. C'est du serbo-croate que la forme est passée au slovène,<br />
qui garde dialectalement kivati, perf. kiniti.<br />
Y. si. cviliti « se lamenter » :<br />
S.-cr. cviljeti : cvîla lamentation », et slov. cviliti : cvll.<br />
Tch. kvileti « gémir » : kvil « gémissement ».<br />
Emprunt au germanique, avec développement d'un factitif<br />
v. si. -cvëliti (§ 616). Le tchèque kvil peut être tiré de v. tch. kvieliti,<br />
mais un substantif kvël est mal attesté en vieux tchèque, et pol.<br />
kwiel «appeau» est un masculin en -jt (§ 1019).<br />
V. si. okriliti « couvrir de ses ailes » :<br />
V. si. okrilû « manteau » (Gr. Naz.), et oskrilu (Ham.) ; dérivé<br />
okrilije (Ham.) «rebord du toit, pinacle», et oskrilije (Ham.)<br />
« bord d'un vêtement ».<br />
Sur v. si. krilo «aile», dérivé en -(d)lo (§ 943). Les formes<br />
d'Hamartole montrent la conservation, en vieux slave ou en vieux<br />
russe, de l'initiale skr- à côté de kr-, de pol. skrzydio.<br />
y<br />
V. si. na-siliti « faire violence » :<br />
V. si. sila « force », composé xudosilu « faible ».<br />
R. sila, nasil, osil, adv. peresilôm.
214 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Pol. wysit « épuisement des forces », v. pol. przesii « supériorité ».<br />
Tch. posila « réconfort », presila « prépondérance » ; — slov.<br />
presila.<br />
En baltique, lit. siela, et v. pr. seili- « conscience, application ».<br />
Non analysable (§1051).<br />
Un autre thème est :<br />
Slavon osiliti « prendre dans les filets » :<br />
R. osllit' : ôsil « filet ».<br />
Le vieux slave a osil-, sans attestation nette d'un neutre osilo,<br />
et avec un exemple isolé de vocatif : osile Supr. 31317, qui peut à<br />
la rigueur s'expliquer comme vocatif de neutre personnifié, mais<br />
qu'il paraît plus simple de rattacher à un masculin osilu.<br />
Base v. si. silo « lacet », dérivé en -(d)lo (§ 943).<br />
ëiniti « mettre en ordre, arranger » :<br />
V. si. èinu « ordre ».<br />
R. 6in.it' « opérer, faire » : ëin « ordre, rang », doëin, o-, pod-,<br />
pere-, ras-, v-, za-, vyëin ; pricin et pricina « cause, raison ».<br />
Pol. czynic « agir » : czyn « acte », odczyn, uczyn ; rozczyn et<br />
rozczyna, zaczyn et zaczyna ; naczyna, przyczyna « addition, contribution<br />
» et « cause ».<br />
Tch. ëin « acte », et v. tch. « ordre », ûcin « acte, effet », pricina<br />
« addition », dial. « ingrédient », et « cause ».<br />
S.-cr. cîn « acte », nâëin « manière », ùcin « acte » et « tannage »,<br />
zàëin et zâcina « assaisonnement, condiment ».<br />
Slov. ëln, nacin, ucin, zacln et zaëîna.<br />
Les postverbaux de ëiniti se rencontrent avec ceux de -ëinati<br />
(§ 727), et on peut douter que priëina au sens de «cause» ait la<br />
même origine qu'au sens d'« addition », le verbe r. priëinit' « causer »<br />
n'étant que le dénominatif de pricina.<br />
La base est cinû, dérivé en *-no-, et pas nécessairement en<br />
*-nu- (§ 1072), de la racine de skr. cinôti et cdyati «il rassemble,<br />
met en ordre », gr. noi(F)éo> « je fais ».<br />
viniti :<br />
Y. si. vina « cause, grief ».<br />
R. vinit' « accuser » : vind « cause, faute », izvin « excuse », obvin<br />
« accusation », povin « aveu ».<br />
Pol. obwin, et przewina « faute ».<br />
Tch. obvina, récent, et v. tch. zâvina « faute ».<br />
Base vina, d'origine peu claire (§ 1076).
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 215<br />
miriti « apaiser » :<br />
V. si. mirû « paix » ; — r. mir.<br />
Tch. mir, smir « réconciliation ».<br />
S.-cr. mir, nèmïr, ùmir « apaisement » ; fém. mira (dans un<br />
dicton), nâmira (nâ-) «satisfaction, quittance», podmira «acquit»;<br />
razmir « discorde, rupture de la paix », rare, mais également bulg.macéd.<br />
razmir ; — slov. mir, nemîr.<br />
Des formes pol. mier et s.-cr. dial. mijer résultent de développements<br />
secondaires, et v. tch. et slovaque mier d'une confusion<br />
entre miriti et mëriti « mesurer ».<br />
Base miru, dérivé suffixal en *-ro- (§ 1114).<br />
On a un autre mot dans s.-cr. mir en regard de miriti « sentir »,<br />
qui apparaît uniquement dans mirom mirisati de la chanson<br />
populaire, pour l'usuel mïrîs «senteur, parfum» (§ 217) : la base<br />
est l'emprunt au grec [AtSpov « huile parfumée ».<br />
Y. si. ra(z)-siriti «élargir» :<br />
Slov. siriti : (sir « largeur », fém.), razsir « élargissement ».<br />
Base sir- (§ 1113).<br />
V. si. diviti sg « admirer » :<br />
V. si. divu « merveille ».<br />
Pol. dziw, podziw « étonnement », zadziw.<br />
Tch. div, odiv et odiva, obdiv « admiration » et obdiva, podiv, et<br />
masc. podiva « homme bizarre ».<br />
Voir v. si. divo, § 191.<br />
V. si. ras-kriviti « tordre » :<br />
Slavon krivu « courbe », adj.<br />
R. krivôj (adv. vkriv'\ ôkriv').<br />
Slov. kriv « courbe » et « coupable », nâkriv « un peu tordu »<br />
(§ 1219), okriva «inculpation» sur okriviti «inculper».<br />
Base krivû, dérivé en -vû (§ 1182).<br />
V. si. zivili « faire vivre » :<br />
V. si. zivû « vivant ».<br />
R. zivôj, naziv, ot-, po-, pere-, raz-, s-, za-, ôziv (et fém. ôziv'),<br />
ôbztv, vyziv, et fém. razziva « gain », naziva, po-, pod-, pri-, za-.<br />
Pol. pozyw « vie » et pozywa « nourriture », uzyw et uzyœa<br />
« jouissance », ancien ozyiva « (ré)animation ».<br />
Tch. oziva « fait de revivre » (xx e s.), obziva et vyziva « entretien,<br />
subsistance », poziva « jouissance » et « consommation ».<br />
Slov. oziva « renaissance », preziva « subsistance ».<br />
Base zivû (§ 1182).
CHAPITRE XI<br />
VOCALISME RADICAL -y-<br />
§ 799. Avec alternances. — On a vu les alternances stud- et<br />
styd-, § 754, uk- et vyk-, slux- et slyx-, § 755, xul- et xyl-, § 757 ;<br />
kvas- et kys-, xvat- et xyl-, yvazd- et gyzd-, kvap- et kyp-, § 778 ;<br />
et les altérations de dir-, nir- en r. dyr-, nyr-, § 728, de blisk- en<br />
pol. blysk-, § 745.<br />
Et particulièrement l'alternance û : y- des imperfectifs dérivés :<br />
-kryv- sur -kryvati, -myv- sur -myvati, -nyv- sur -nyvati, -plyvsur<br />
-plyvati, § 739 ; -zyv- sur -zyvati, § 737 ; -brys- sur -brysali,<br />
-gyb- sur -gybati, § 754 ; -smyk- sur -smykati, -dyx- sur -dyxati,<br />
-syx- sur -syxati, § 755. Voici les autres exemples de cette<br />
alternance.<br />
V. si. susati « sucer », itér. sysati :<br />
Pol. sys (et sys) « mamelon » et « nourrisson », wysys « succion ».<br />
S.-cr. sïsa « mamelle » ; — slov. dial. sisa.<br />
Sur le thème sus- :<br />
V. si. su.su « mamelle téton ».<br />
R. sosdi', imperfectifs dérivés en -sdsyvat' : sos « action de sucer »,<br />
et sôsa « vache, jument qui nourrit » ; nasôs « pompe », osôs « ce<br />
qu'on suce » et « animal qui tète, porcelet », zasôs « marais où l'on<br />
s'enlise », dosés, iz-, nad-, ob-, ot-, pod-, pere-, pri-, pro-, s-, u-, v-,<br />
vysos ; composé medosôs (§ 1227).<br />
Tch. oses « cochon de lait ».<br />
Slov. sès « mamelle » et « dragon » ; — s.-cr. ancien sas « mamelle ».<br />
Thème sus- à redoublement expressif (§ 465).<br />
V. si. pytati « rechercher, s'informer » :<br />
V. si. (ispyti « examen », § 714) ; v. r. ispytu.<br />
R. pylât' « essayer » et « donner la question, torturer » : pyt,<br />
ispyt, ôpyl, popyt, ras-, s-, za-, vypyt.<br />
Pol. pytae « interroger » : pyta « mouchoir roulé pour frapper »,<br />
dopyt, o-, po-, wy-, za-.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 217<br />
Tch. dial. pyta « mendicité » ; zpytati (zpytovali) « examiner » :<br />
composés dëjezpyt « recherches historiques », jazykozpyt « linguistique<br />
», etc., récents (xix e s.) et calquant l'allemand (Spraeh-)<br />
forschung.<br />
S.-cr. ispit « examen » (du russe ispytdnie, § 825), àpiî « essai »<br />
(du russe), pripit, ùpit ; — slov. izpit.<br />
Sur le thème pût- :<br />
Tch. ptâti (se) « s'informer » : v. tch. z nepty « à l'improviste ».<br />
Le verbe pytati est l'itératif du thème verbal pût- que conserve<br />
le tchèque, et qu'on retrouve dans v. si. nepûslï « prétexte »,<br />
s.-cr. kajkavien nepéa «suspicion» (§ 718), peut-être aussi dans<br />
pol. wqtpic « douter » (§ 1223).<br />
Y. si. sûpe-, itér. sypati « répandre, verser » :<br />
Slavon russe prosypû « action de répandre, dispersion » (et fém.<br />
osypi « rempart de terre », § 714).<br />
R. dôsyp, izsyp, na-, nad-, o(b)~, ot-, pere-, po-, pod-, pri-, pro-,<br />
raz-, s-, u-, v-, za-, vysyp (et fém. syp' « éruption cutanée », ôsyp',<br />
pô-, pôd-, pére-, pri-, roz-, zâ-).<br />
Pol. nasyp, przy-, u-, w-, za-, fém. wsypa « taie », zasypa.<br />
Tch. nâsyp, o-, pre-, roz-, zâ-, composé jehlosyp « chute des<br />
aiguilles (des conifères) ».<br />
S.-cr. nâsip, ôsip, zâsip ; •—• slov. posip, raz-, za-, nasip et fém.<br />
nasîpa.<br />
Sur le thème sûp- :<br />
Y. si. osûpy, fém. plur., « maladie pestilentielle, pustules »,<br />
prisupa « rempart » (Ham.) ; — slavon russe sûpû « remblai,<br />
rempart » et nasûpû, nasûpa, prisupû, posûpa « blé en grains (qu'on<br />
verse) », prosûpû « ce qu'on verse en plus ».<br />
R. sop « rempart de terre », nâsop et nasp « action de remplir en<br />
versant », posôp « impôt en grains », prisôp « intérêts de l'emprunt<br />
de blé », prisp et prispa « grains qu'on verse (dans la soupe) »,<br />
ôspa « variole ».<br />
Pol. nasep « remblai », od-, przy-, za-, naspa, przyspa, ospa<br />
« variole », zaspa « dune, tas de neige », wyspa « île ».<br />
Th. nâsep, o-, vy-, zâ-, nâspa « remblai », ospa « variole », et<br />
vtjspa «île », du polonais (et fém. nâsep, zâsep).<br />
S.-cr. sap (ancien) et nâsap « digue », râsap « écroulement,<br />
débâcle », àspa « éruption, rougeole, érysipèle » ; — slov. sèp,<br />
zâsep. f<br />
Les postverbaux de sypati « verser » se rencontrent en russe avec<br />
ceux de :<br />
V. si. sûpati « dormir » :<br />
R. spat', imperfectif dérivé (za-)sypât' : usyp, zasyp, prôsyp,
218 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
vysyp ; nedosyp « fait de ne pas dormir tout son soûl », et son<br />
contraire peresyp.<br />
Et sur le thème sup- :<br />
Masc. zâspa « l'endormi », peréspa « grand dormeur ».<br />
§ 800. — Pol. ikac et iykac « avaler » : lyk « gorgée », poiyk<br />
« action d'avaler », et poiyk et przeiyk « œsophage ».<br />
Tch. polknouti « avaler », imperfectif polykati, et Ikati « gémir »,<br />
imperfectif vz-lykati « sangloter » : vzlyk « sanglot », et dial. /y/c<br />
« gorgée ».<br />
Slov. lîkati et hlikati «siroter», zâlkniti (zalékniti) et zahlikniti<br />
« étouffer de chaleur » : hlîk « air étouffant ».<br />
Contamination en slovène avec hlipati « sangloter, haleter »<br />
(§ 796).<br />
Sans rapprochement sûr.<br />
V. si. lustati sg «briller» (§ 597) :<br />
Pol. Iszczec siç (v. pol.), itér. iyskac : iysk « éclair, lumière<br />
brillante », se confondant avec biysk de bleszczee, btyskac (§ 745).<br />
Ailleurs, les substantifs sont sur le thème lusk- :<br />
Slov. lèsk (lêsk) «éclat».<br />
Tch. lesk « éclat, lustre », d'où lestiti « lustrer, cirer, polir », et :<br />
R. losk « éclat, lustre », d'où loscit' « lustrer » : nâlôsk, perelôsk,<br />
vylosk.<br />
Y. si. muknçti « mouvoir », itér. mykati :<br />
R. -mknut', imperf. dérivé -mykdt' : domyk, ôbmyk « action de<br />
barricader », olmyk et otmyka, pomyk, pere-, pri-, u-, vymyk, et<br />
smyk et smyka « assemblage » ; — et itératif mykat' « sérancer<br />
(le lin) », mykat'sja « traîner partout » : namyk « action de peigner<br />
la fdasse » et namyka « filasse, quenouille », obmyk « action de traîner<br />
partout », pere-, raz-.<br />
Pol. pomyk « filet, lacet », przemyk « culbute », przy-, wy-, plur.<br />
zmyki « poudre d'escampette » ; odmyka « embranchement » ; omyk<br />
et osmyk « queue (de lièvre) ».<br />
Tch. premyk « culbute », vymyk « rétablissement » (en gymnastique).<br />
Slov. mekniti, mikati : namik, pre-, pri-, u-, z-, za-, pomîk, smik,<br />
et odmlka, o-, u-, za-:<br />
S.-cr. màknuti, imperf. mïcati : plur. fém. miee « marelle » (jeu).<br />
Sur le thème muk- :<br />
V. si. zamukù « serrure », slavon primûku « lacet ».<br />
R. zamôk « serrure » (gén. zamkà, distinct de zamôk sur zamoeit',<br />
§ 740), et zâmok « château », du polonais.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 219<br />
Pol. pomek « avancée » et « filet », locution na pomku « sous la<br />
main », zamek « serrure », et « château » (du tchèque), zamka<br />
« cordage de filet ».<br />
Tch. zamek « serrure », et « château » d'après ail. Schloss.<br />
Slov. razmàk « distance », zamâk « bout du monde », zâmka<br />
(zânka) «lacet».<br />
S.-cr. na dàmak « à peu de distance , râzmak « écart, distance »,<br />
ïzmak « fin, terme », smàk « action de supprimer », ùzmak « recul ».<br />
On doit supposer une contamination de muk- et smuk- (§ 755)<br />
dans pol. osmyk « queue » à côté de omyk, et il y a rencontre des<br />
postverbaux, sans confusion, dans r. smyk « assemblage », de<br />
smykât' « emboîter », et smyk « archet », de *smuknçti « faire<br />
glisser» (§ 493).<br />
tuknçti « heurter », 'imperf. tykati :<br />
R. tknut', tykat' « ficher, piquer » : tyk, adv., istyk (adv. istyc'),<br />
ob-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, ras-, u-, dôtyk, nâ-, ôt-, zd-, styk,<br />
vtyk, et dotyka, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, nâlyka « bâton fiché » ;<br />
nedotyka « personne trop susceptible », et nom de la « balsamine »,<br />
appelée aussi « noli mé tangere » et « impatiente ».<br />
Pol. dotyk, na-, przy-, s-, u-, za-, et tyka « perche », v. pol. potyka<br />
« combat » et dial. spotyka « (mauvaise) rencontre », wy-, za-, paiyk<br />
et patyka « bâton ».<br />
Tch. tyk « contact », dotyk, styk, récents ; et sur tyëiti « dresser »,<br />
dénominatif de tye « pieu » : vztyk « action de se dresser ».<br />
Slov. tîk « contact », et « tout contre », adv., natlk, po-, pod-,<br />
pri-, s-, v-, za-, dotlk, et dotîka, po-, pri-, s-,<br />
S.-cr. tlk « tout contre », adv. ; ôtîk « racloir (de la charrue) »,<br />
zàtïk « filet (d'une vis) »,; sûtika (§ 1222) « événement » (et sûtuka,<br />
sur tùcê-, § 769).<br />
Sur le thème tuk- :<br />
Y. si. pritukû « anneau », potûku « obstacle » (Ham. bes potoka),<br />
sùlùkù «heurt, rencontre» (J. Ex.).<br />
R. pritok « chose inattendue, malheur » et pritka ; plur. sùtki<br />
« lieu de rencontre (de frontières), angle » et « un jour plein, jour<br />
et nuit » ; nedôtka, variante de nedotyka.<br />
V. pol. potka « rencontre ».<br />
Tch. dotek « contact » (xix e s.), dùtka, pu.-, pri-, vy-, zd-.<br />
Slov. zâtek « bouchon, verrou », et zâtka « cheville du joug »,<br />
çlka « racloir ». /<br />
S.-cr. zâtak « tampon », ôtka « racloir », prîtka « échalas », zâtka<br />
« défi, provocation ».<br />
Les postverbaux en -tuk- se rencontrent avec ceux de tukati<br />
«Lisser» (§ 814).
220 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Y. si. lugati « mentir », (ob-Jtygati :<br />
R. Igat', lygdt' : otlyg, et masc. lyga « menteur », dolijga, ot-, pere-,<br />
pro-, za-.<br />
Sur le thème lûg- :<br />
Pol. iga « mensonge », zeiga ; — tch, lha.<br />
Slavon kuxnçti « éternuer » :<br />
Pol. kichac : kich « éternuement ».<br />
Tch. kychati : kych.<br />
Slov. kihati : kîh.<br />
Et sur le thème kux- :<br />
Slov. kéhniii : kèh.<br />
R. podnjât' «lever », imperf. podymât', d'où v(o)zdymdt' (§ 487) :<br />
pod(d)ym, nad(d)ym, vzdym, et déjà slavon vozdymu. (xv e s.).<br />
Les postverbaux sont ordinairement en -ëm et -im, voir § 811.<br />
V. -si. sûlati « envoyer », imperf. dérivé (po-)sylati :<br />
R. (po-)syldt' : posyl « envoi », dosyl et nedosijl, izsyl, na-, nad-,<br />
ob-, ot-, pod-, pere-, pri-, raz-, s-, u-, voz-, za-, vysyl.<br />
Sur le thème sut- :<br />
V. si. sùlu « envoyé », posulù « mission ».<br />
R. posât « ambassadeur ».<br />
Pol. posei « messager » ; — tch. posel.<br />
Slov. sèl « envoyé », pôset « envoyé » et « affaire » ; — s.-cr. pôsao<br />
« affaire ».<br />
La base doit être sulû (§ 549), qu'il est risqué d'analyser (§ 1050).<br />
V. si. rûvati « arracher », imperf. dérivé -ryvati :<br />
R. narfiv « abcès », nadryv « déchirure, tour de rein », doryv, iz-,<br />
ob-, ot-, po-, pod-, p(e)re-, pro-, raz-, s-, u-, v-, vz-, za-, vyryv, et<br />
masc. vzryva « homme explosif ».<br />
Pol. poryw «entraînement», et na-, ob-, pod-, prze-, u-, za-,<br />
Tch. poryv « coup (de vent) » et vzryv « explosion (d'un sentiment)<br />
», emprunt au russe.<br />
Slov. odriv, porîv, et s.-cr. pôriv, également empruntés.<br />
Sur le thème ruv- :<br />
R. otôrva « partie ravinée d'une rive », prôrva « abîme » ; et masc.<br />
izôrva, obôrva, razôrva « déguenillé », razôrva et rôzorva « criailleur »<br />
(en regard de ordt' «brailler», § 473), nadôrva « pleureur », prôrva<br />
« glouton », ûrva « garnement ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 221<br />
Pol. urwa « précipice », wyrwa « brèche », et na-, obe-, ode-, po-,<br />
pode-, prze-, przy-, za-.<br />
Tch. prùrva « creux, abîme », dial. vyrva « terre arrachée par<br />
l'eau », et zârva « ravin ».<br />
En baltique, lit. râuju, rduti « arracher » : ravà « arrachage »<br />
(§ 466).<br />
En slave, séparation complète d'avec ryti « fouir », postverbal<br />
rovu (§ 730).<br />
§ 801. Sans alternance. — R. lysyj «chauve», slov. lis, et s.-cr.<br />
Usa « tache blanche ou claire sur le front (d'une bête) », slov.<br />
Usa.<br />
R. lysit', lysit's ja « devenir chauve », vzlysit' « enlever les poils » :<br />
slavon vùzlysu « chauve », r. vzlijsyj.<br />
Le sens « tache blanche » est secondaire, et il s'agit d'endroit<br />
pelé. Un rattachement' à gr. Xeuxoç « blanc » convient à lit. laûkas<br />
« qui a une tache pâle sur le front », mais est exclu pour si. lysu.<br />
On peut penser à un adjectif dérivé en -su (§ 1136) sur un thème<br />
mutilé, qui pourrait être celui de lubiti « écorcer, écorcher » (§ 756).<br />
Y. si. gryze-, grysti « ronger » :<br />
R. gryz et gryza « douleur, hernie, etc. », dogryz, iz-, na-, nad-,<br />
o(b)-, ot-, pere-, pro-, raz-, s-, u-, za-, vjjgryz, fém. nagryiza, et masc.<br />
ogryza « rustre », peregryza « celui qui mord ».<br />
Pol. gryz « action de ronger » et « chagrin », zgryz et dial. zagryz ;<br />
— tch. hryz « action de rongër » et « mal qui ronge ».<br />
S.-cr. grlz « sciure, morsure, mal au ventre ».<br />
Slov. grlz et griza « morsure », izgrlz, na-, o-, pre-, u-, za-, odgriz.<br />
R. kita « tige, bouquet », pol. kita « faisceau, botte », v. tch.<br />
kyta « bouquet, gerbe », s.-cr. kita « bouquet, houppe, natte », slov.<br />
kita.<br />
Ukr. nakytyty « orner, parer (de houppes, etc.) » : r. dial. nakita<br />
« parure derrière la tête des femmes ».<br />
Slov. kititi « parer, lier en bouquet » : nakit, okit.<br />
S.-cr. kititi « parer » : ndkit, pôtkita.<br />
Sans étymologie sûre, et voir *kystï, § 1191.<br />
ky(d)nçti «enlever, jeter», imperf. kydati :<br />
R. kinut', kiddt' «jeter» : dokid, na-, o(b)-, ot-, po-, pere-, pri-,<br />
pro-, ras-, s-, v-, vs-, za-, vijkid (et fém. nâkid', ôkid').<br />
Tch. kydati «sortir (le fumier)» : composé hnojokyd «valet<br />
d'écurie»; populaire kejda (§ 53) «fumier (d'écurie)», et de là<br />
« sauce, soupe trop épaisse » (fém. dial. okyd', vyskyd').<br />
S.-cr. kldati « enlever, rompre » : prëkîd « interruption », râskid<br />
« déchirement, rupture » et fém. râskida.
222 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Y. si. rydati « pleurer, sangloter » :<br />
R. rydâV : vzryd «sanglot» (et fém. vzryd'), zaryd, et adv. nâryd,<br />
ndrydom, navzryd, vzrydom (zryd'ju).<br />
En baltique, lit. dial. rdudu, raudôti « gémir », inchoatif rûsti,<br />
prêt, râdau ( § 475) : raudà (râuda) « plainte ».<br />
En slave, l'accent r. rydât' est secondaire, pour s.-cr. rïdati<br />
(cf. §660); la racine était «dissyllabique» : véd. roditi « il gémit»,<br />
présent athématique que conserve le vieux lituanien, l re pers.<br />
sing. râumi,. 3 e pers. rausti.<br />
R. dial. xibât' « faire chanceler » : masc. xlba « homme qui<br />
balance, qui flotte ».<br />
Pol. chybac « balancer », chybic « manquer le but, rater » : chyba<br />
« manque, défaut » et ancien pôchyba, ochyba « hésitation, doute »,<br />
uchyba « fait de manquer, faute », et ancien uchyb.<br />
Tch. chyba « doute » et « faute », pochyba « doute ».<br />
S.-cr. ancien pothiba « tromperie », en écriture slavonne poduxyba.<br />
Slov. hibati « relever un défaut, critiquer », sur hiba « faute,<br />
défaut», et podhlba «ironie».<br />
Comparaison avec skr. ksubhyati «il est agité» (§ 10) : xybati<br />
serait un itératif sur ce thème.<br />
V. si. zybati sç « vaciller » ( § 556) :<br />
R. zybât' : (fém. zyb' « houle » et « terrain mouvant »).<br />
S.-cr. zïbati : ôzïb « bras de levier ».<br />
Slov. zibali : ziba « berceau », et masc. plur. ozîbi « terrain<br />
mouvant ».<br />
§ 802. — R. brykât' « ruer, regimber » : bryk.<br />
Pol. brykac : bryk, et wybryk « écart, extravagance », d'où ukr.<br />
vybryk.<br />
V. si. kyciti sç « faire le fier » : kyka « touffe de cheveux ».<br />
R. kika « sorte de coiffure féminine ».<br />
S.-cr. kïka « tresse, natte ».<br />
Variante kùku en slavon serbe, et slov. kçka « cheveux abondants ».<br />
Formation expressive : kyka « toupet » dans les deux sens du<br />
français ; rapport douteux avec le thème alternant kuk-, kvak-,<br />
§ 757.<br />
R. rysce-, rfiskat' « courir » : rysk, izrysk, nârysk, pôrysk.<br />
Altération de ristâl', v. si. riste-, ristati (§ 654), avec passage en<br />
russe de rist- à rysk- par confusion des alternances si : se et sk : se<br />
(§ 110), et de ri- à ry- par attraction d'autres thèmes expressifs,<br />
par exemple pryskat' «faire jaillir» (§ 561).
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 223<br />
S.-cr. vikati « crier » : vïka « cri », pôvïk et pôvika, pôdvïk, ùzvïk.<br />
Slov. vikati : vîk et vika.<br />
Élargissement de vyje-, vyti (§ 559).<br />
R. bryzyat' « jaillir, éclabousser » : bryzy, nâbryzy, ôbryzg.<br />
S.-cr. brïzgati « jaillir » : brïzak (gén. brïzga) « jet ».<br />
Slavon otu-rygati « éructer » ( § 496) :<br />
R. rygàl' : izrgg, et masc. naryga, surnom (d'un chameau).<br />
Pol. rzygac (var. v. si. -rig-) : plur. wyrzygi « vomissures », v. pol.<br />
odrzyg.<br />
S.-cr. pôdrïg « renvois » ; — slov. rig et riga.<br />
Slavon pyxati « souffler » ( § 557) :<br />
R. pyxâl' : pyx, ôtpyx, popyx, pere-, ras-, zapyx et zapyxa<br />
« essoufflement ».<br />
Pol. pycha « orgueil » et pych.<br />
Tch. pycha « orgueil », et pych « délit (d'orgueil), braconnage,<br />
maraude », prëpych « pompe, luxe ».<br />
Slov. pîh « courant d'air, vent », odpih, popîh, podpih, spih,<br />
zâpih, prepih.<br />
Et slov. prepûh, de puxati (§ 759).<br />
R. mylit' « savonner » : domyl, na-, ob-, vz-, za-.<br />
Sur mylo «savon», dérivé en -(d)lo (§ 943).<br />
Pol. mylic « induire en erreur, tromper » : v. pol. omyla.<br />
Tch. myliti : omyl « erreur ».<br />
Origine non reconnue.<br />
mysliti « penser » (myslï « pensée ») :<br />
V. si. (myslï), pomyslu « pensée », promyslu « prévoyance,<br />
Providence », sumyslû « intelligence, bon sens », zamyslu, domyslu<br />
(Ham.), razmyslû (Gr. Naz.) ; prëmyslu (Éph., IV, 14) de prëmysliti<br />
(Gr. Naz.) « penser de travers, sophistiquer ».<br />
R. dômysl, izmysel, pômys(e)l, primys(e)l, razmysl et rôzmysl,<br />
smysl «sens», ûmys(e)l, vymys(e)l, zâmys(e)l ; Prômysl «Providence<br />
», et prômysel « profession, branche d'industrie », développement<br />
en russe et en polonais sur le latin industria au sens nouveau<br />
« industrie » du xvm e siècle.<br />
Pol. pomysl « idée, conception », umysl « esprit », zamysl « dessein<br />
», zmysi « sens, bon sens », przemysl « industrie ».<br />
Tch. domysl et dùmysl( ob-, po-, pre-, roz-, û-, vy-, zâ-, smysl<br />
« sens, bon sens », et prûmysl « industrie », du russe.<br />
S.-cr. Prômïsao « Providence » ; smîsao « intelligence, raison »<br />
en serbo-croate ancien, et « sens » depuis le xix e siècle par<br />
emprunt au russe ; (fém. ddmîsao, nâ-, pô-, û-, zâ-).
224 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Slov. zamîsel « idée, conception », smîsel et zmîsel « sens » (et<br />
fém. smîsel, domîsel, po-, u-).<br />
Base myslî, dérivé en -lï (§ 1056).<br />
kynçti, imperf. kyvati, «hocher la tête» (§ 490) :<br />
R. kivdl', kivnût' : kiv « hochement de tête ».<br />
Pol. ki(w)nqc, skinqc : skin (§ 824).<br />
Tch. kyvati, kyvnouti : kyv, pokyv, pri-, roz-, vy- ; et kinouti :<br />
kyn « signe », pokyn, se rencontrant avec -kyn de ky(pJnçti<br />
(§ 778).<br />
Et voir slov. kîm de kimniti, § 798.<br />
Y. r. tynû « enceinte, mur », r. tyn « palissade », pritynit' « abriter<br />
par une palissade » : prityn « abri, asile », plus ou moins rapproché<br />
de pritin « lieu d'attache » sur -tinât' (§ 727), et les adjectifs dérivés<br />
priiynnyj et pritinnyj paraissent se confondre ; de même zatin<br />
« auvent » et « lieu à l'ombre » semble proche de zatynit' « entourer<br />
d'une palissade », v. r. et mod. zatyn'e « endroit derrière la<br />
palissade ».<br />
S.-cr. tin « cloison, mur mitoyen », tiniti « cloisonner » et pretiniti :<br />
prètin.<br />
Emprunt en slave commun au germanique tun, antérieur à v. si.<br />
synu, sunu « tour », de v. h. a. zun (§ 34).<br />
S.-cr. hiniti « tromper » : anciens hin et hina (et fém. hin) « fraude,<br />
tromperie », prehina, plus tard (xvn e s.) hinja et hinjiti, d'où dial.<br />
obinja « tromperie, simulation ».<br />
Le verbe se rencontre également en slovène : hiniti « tromper »<br />
(subst. hinja), et en russe dialectal : xiniï, oxinit' « blâmer<br />
sévèrement ».<br />
La base est sûrement xy(b)na, dérivé suffixal en -na (§ 1075)<br />
du thème xyb- ( § 801 ), avec lequel se rencontrent les sens « tromper »<br />
et « critiquer ». Un rattachement à un thème xy- de xyl- « incliner »<br />
(§ 757) ne paraît pas justifié.<br />
V. si. pro-nyriti, pronyrïslvo « perversité » :<br />
Y. si. nyru « saltimbanque », pronyru « pervers ».<br />
R. pronyra, masc., «intrigant».<br />
Rapport probable avec le thème nur- (§ 760), voir § 614.<br />
V. si. vysiti « élever » :<br />
R. (vys' «hauteur»), povys «exhaussement, avancement» (povysénie).<br />
S.-cr. vis « hauteur », povis (du russe) « avancement ». Thème<br />
vys-, adj. vysoku (§v985).
CHAPITRE XII<br />
VOCALISME RADICAL -e-<br />
§ 803. Avec alternance. — On a vu les alternances :<br />
-nos- et -nés-, § 723.<br />
-skrob- et -skreb-, § 725.<br />
-rok- et -rek-, -tok- et -tek-, -log- et -leg-, § 726.<br />
-mol- et -mel-, -vol- et -vel-, § 727.<br />
-bor- et -ber-, -dor- et -der-, -sor- et -ser-, -tor- et -ter-, § 728.<br />
-toj- et -lev- (de -lëv-), § 729.<br />
-stog- et -steg-, § 733.<br />
-sob- et slov. -seb-, § 739.<br />
*-valk- et *-velk-, § 769.<br />
* -starg- et *-slerg-, § 771.<br />
-gag- et -zeg-, § 777.<br />
-zir- et -zer-, § 795.<br />
On ajoutera :<br />
ëese-, ëesati « peigner » :<br />
R. doëôs et nedoëôs, iscôs, na-, nad-, o-, ot-, po-, pod-, pere-,<br />
pri-, pro-, ras-, u-, za-, scos, vyëos, masc. neeôsa et neraseôsa « le<br />
mal peigné » (et fém. néees' « lin non cardé », ndees', pôëes', plur.<br />
ôtcesi).<br />
Ukr. pâëosy « étoupe » (§ 1220).<br />
Pol. przeezos « excoriation » (paezeê « étoupe »).<br />
Tch. paees « démêlure », priëes « croûtes quand on se gratte »,<br />
ûces « coiffure ».<br />
Slov. razëës « fente de la plume à écrire ».<br />
Et -kos-, § 723.<br />
plete-, plesti « tresser » /<br />
R. plël (et plet'), doplët, na-, o-, ot-, pod-, pereplët «reliure»,<br />
pri-, pro-, ras-, s-, u-, v-, za-, vyplet.<br />
Pol. (plee), oplot « enlacement », splol et zaplot « tresse ».
226 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Tch. rosplet et vyplet « action de démêler », pruplet « entrelacs »,<br />
ûplet « tresse », zâplet (et fém. zâplet') ; opleta « démêlés », masc.<br />
popleta « homme brouillon ».<br />
S.-cr. ôplet, prijèplet et zâplet « entrelacement », nâplel et pàplet<br />
« tricot », splët « tresse », râsplet « dénouement ».<br />
Slov. plçt « brin d'une corde » et plçta « fronce », oplèt, pri-, s-, v-,<br />
zaplèt et zaplçta.<br />
Et -plot-, § 724.<br />
kleplje-, klepati « faire résonner » :<br />
Y. si. (klepï « piège, traquenard » dans klepïca, § 874), zaklepu<br />
« fermeture » (Cant. VI, 7) ; v. r. poklepu « calomnie ».<br />
R. klepàt' « battre, river » et « calomnier » : klëp « rivet » (et<br />
klep' « piège »), doklëp, na-, nad-, o-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
ras-, s-, v-, vs-, vyklep ; zaklëp et zaklèpa, masc. naklëpa « calomniateur<br />
».<br />
Pol. oklep, sklep, zaklep.<br />
Tch. klep « frappe », oklep (et fém.), po-, pri-, prit- ; et de<br />
(s)klenouti « voûter » : sklep « voûte, cave », et klen, zâklen (§ 824).<br />
-S.-cr. studènklep «mauvais forgeron» (qui martelle à froid),<br />
klëpa « chiquenaude ».<br />
Slov. klëp « frappe », izklèp, na-, o-, od-, pri-, s-, raz-, klëp et<br />
razklçpa, plur. fém. vklçpe « chaînes, fers ».<br />
Et -klop-, § 725.<br />
yrebe-, yreti « râcler », pogreti « ensevelir » :<br />
Slavon pogrebu « ensevelissement ».<br />
R. grebàl' « ramer, râteler » : grëb, dogrëb, na-, o-, ot-, pod-, pere-,<br />
pri-, pro-, raz-, s-, v-, vz-, za-, vîjyreb ; pogrëb « enterrement » et<br />
pôgreb « cave », ugrèb « action de s'en aller en ramant » et ugreb<br />
« râtelures » (et fém. greb', plur. zâgrebi) ; sugréb « mesure de sel »,<br />
un tas de sel raclé dans une saunerie (§ 1222).<br />
Pol. pogrzeb « enterrement ».<br />
Tch. pohreb (et fém. en v. tch.) ; et slovaque pahreb « ce qu'on<br />
ratisse » (§ 1220) et pahreba, à côté de pahraba (§ 782).<br />
S.-cr. grëb «tombe» (et fém. grëb en cakavien, § 716), variante<br />
régionale de grôb ; pôgreb, et sûgreb « terre fouillée », et Zâgreb.<br />
Slov. pogrëb, et zagrëb « entassement, rempart ».<br />
Et grobu, § 725, forme isolée sauf r. sugrôb « tas de neige ».<br />
V. si. peëe-, pesti « cuire » :<br />
Slavon peku et peka « chaleur brûlante ».<br />
R. pek (slavon) et solnopëk « endroit exposé au soleil » et « coup<br />
de soleil » ; dopëk, po-, pere-, pro-, u-, za-, vypek, et popëka, pere-<br />
(et përepeë'), pro-, u-, za- ; nedopëk et nedopëka (et nëdôpeë') «pain
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 227<br />
pas assez cuit », pripëk « endroit au soleil » et pripëka « partie<br />
brûlée d'un pain » ; opèka et opéka « tutelle » (accent slavon ou<br />
polonais) ; — et sur bezpëënyj « sans souci », obezpëëit' « assurer,<br />
garantir » : ukr. bezpéka, obezpéka.<br />
Pol. przypiek, upiek, spiek et spieka « chaleur brûlante », wypiek<br />
et wypieka ; opiek (v. pol.) et opieka « protection », zapieka « désagrément,<br />
vexation » ; — et sur bezpieczyc « assurer » : bezpiek.<br />
Tch. rozpek « pomme de terre cuite au four », slovaque ûpek<br />
« chaleur brûlante ».<br />
S.-cr. pëka « tourtière » ; ispek « gain pour la distillation de l'eaude-vie<br />
», ôpeka « brique », prëpeka « eau-de-vie redistillée », prîpeka<br />
et upeka « chaleur brûlante », zâpek et zàpeka « échaufîement,<br />
constipation ».<br />
Slov. pçka « cuisson, fournée » ; prepèk et prepçka, pripëk et pripçka,<br />
opèk « ardeur brûlante » et opçka « brique », zapçka « du trop<br />
cuit » et « constipation ».<br />
Et -pok-, § 733.<br />
§ 804. Sans alternance. — V. si. desiti « attraper, atteindre » :<br />
S.-cr. dësiti « rencontrer, tomber sur » : ùdes « ce qui vous frappe,<br />
sort ».<br />
Rapport hypothétique avec l'adjectif desnu « à droite » (§ 1071).<br />
R. kresât' « battre le briquet » : kres, vykres.<br />
Pol. krzos, okrzos ; — tch. kres.<br />
S.-cr. krês (krës), composé samôkres « pistolet ».<br />
Slov. krës, odkrës, ukrës.<br />
Un rapport avec kremen- « silex », c'est-à-dire « pierre à briquet »,<br />
lette krems (§ 185), paraît s'imposer, et il s'explique en partant de<br />
la racine *kret- de lit. krësti « secouer », si. krçlali « mouvoir »<br />
(§ 762) : *krei-m-, apportant un exemple attendu de la réduction<br />
de /m à m en slave et en baltique (§ 39), et *kret-s-, avec un type<br />
dérivé en -sati peu attesté (§ 556), mais un type en -se- de présent<br />
suffixal qui a été important (§ 436).<br />
Un autre thème est :<br />
Pol. kresie (kreslic) « tracer une ligne » : kres « limite, frontière »,<br />
kresa « raie, ligne », okres « période », zakres « sphère, domaine »,<br />
wykres « dessin ». f<br />
Tch. okres « district » (ail. Umkreis « cercle »), nâkres et vykres<br />
« dessin » : emprunts, directs ou adaptés, au polonais.<br />
Emprunt au moyen bas-allemand krës « cercle, Kreis ».
228 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Y. si. tese-, tesati (Ham.) «tailler à la hache» (§ 548) :<br />
V. r. tesu « planche », et r. mod. tës « planches (minces), solives »,<br />
dotés, is-, na-, nad-, o(b)~, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, ras-, s-,<br />
ut'ès «rocher escarpé, falaise», za-, vytes (et fém. ndtes', pô-, pére-,<br />
prô-, rôs-, zâ-).<br />
Pol. cios «coup» et «pierre de taille», nacios, o(b)-, po-, pod-,<br />
prze-, écios, u-, wy-, za- (et fém. podeies, przycies).<br />
Tch. tes « bois de charpente », et Mes « roche » (du russe).<br />
S.-cr. ôtes (de otïtesï, xiv e s.) et pâtes « section d'un village ».<br />
Slov. otès « équarrissage, dégrossissement, formation ».<br />
V. si. gnete-, gnesti « presser » :<br />
R. gnët « presse, poids », izgnët, na-, o-, pere-, pri-, raz-, s-, u-,<br />
v-, vygnet ; et podgnët, zagnët de gnetit', v. si. -gnëtiti (§ 747).<br />
Pol. gniot.<br />
Slov. gnët, ognèt.<br />
V. si. letëti « voler », imperf. dérivé -tëtati ( § 649) :<br />
R. lët « vol », dotët, iz-, na-, ob-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
raz-, s-, u-, v-, vz-, za-, vylet.<br />
Pol. lot, dolot, na-, ob-, od-, po-, prze-, przy-, roz-, wy-, wz-, za-.<br />
Tch. let, dolet, nâ-, od-, po-, pre-, pri-, prû-, roz-, vy-, vz-, zâ-, et<br />
slet « rassemblement », en particulier des Sokols.<br />
S.-cr. lët, ïzlêt, nâlet, pôlët, ùlet, wzlët, zâlet, et slët (de Sokols, du<br />
tchèque).<br />
Slov. lët, izlèt, na-, ob-, od-, po-, pre-, pri-, raz-, v-, za-, zlët —<br />
vzlèt.<br />
Sur le thème lët- :<br />
Pol. ancien przylat, de przylataé.<br />
S.-cr. prôlijet « étourdi, écervelé », de prolijëtati.<br />
Confusion avec le thème de *lëtiti dans pol. zalota (§ 747).<br />
Le verbe letëti étant bâti sur un présent en -te- (§ 595), les<br />
formations nominales sont nouvelles.<br />
mete-, mesti «balayer», et mete-, metati «jeter», imperf. dérivé<br />
-mëtati :<br />
V. si. podmetû « frange », ometa « bordure d'un vêtement » (fém.<br />
ometï «filet», § 714) ; slavon izmetû «rejet» (sûmetï «fumier»).<br />
R. mesti « balayer » et mêlât' « jeter », mêlant leurs postverbaux :<br />
met «jet (et fém. met' «galop »), domët, iz-, na-, o- et ob-, ot-, po-,<br />
pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, v-, vz-, za-, vijmet (et fém. vymel'),<br />
predmét « objet ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 229<br />
Pol. miot « jet », namiol, od-, po-, przy-, roz-, u-, wy-, z-, podmioi<br />
«sujet», przedmiot et obmiot «objet»; smiol et sumiot (§ 1222)<br />
« amas de neige, congère » ; zamiot et zamiota (et zamieé) « tourbillons<br />
de neige », de zamiese « balayer ».<br />
Tch. kulomet « lance-balles, mitrailleuse » ; premet, pri-, roz-<br />
(fém. smet' « balayure »).<br />
S.-cr. mêt «endroit où on jette le filet», composé pùskomët<br />
« portée de fusil » ; démet, iz-, nâ-, od-, po-, ràz- ; podmët « sujet »<br />
et prèdmet «objet», promet « circulation, trafic»; smët «amas de<br />
neige » et « dépôt de fumier », de smèsti « entasser en balayant » ;<br />
omet et fém. ômeta «torchon», de omèsti « balayer, nettoyer»;<br />
premet « culbute » et premeta (dial.) « perche ».<br />
Slov. met « jet », domet, iz-, na-, o-, od-, po-, pre-, pri-, raz-, v-,<br />
vz-, z-, (fém. smçt «balayure»), zamèt (et fém. zâmet) «congère»;<br />
podmët «litière» (pop.) et (savant) «sujet», predmèt «objet»,<br />
promet « trafic » (du croate).<br />
Sur le thème met- (§ 753) :<br />
Slavon izmêtù « rejet ».<br />
Pol. zamiat, de zamiatac « balayer ».<br />
Tch. nâmët, pri-, pru-, vy- (et fém. podmët', pri-, vy-, zâ-) ;<br />
podmët « sujet » et predmët « objet » (xix e s.), calques de lat. subjeetum<br />
et objeetum.<br />
S.-cr. prijèmet (dial.) « perche ».<br />
Et voir r. métit' « marquer, viser », § 747.<br />
Le lituanien a mèsti (§ 429) : mâtas « mesure » et pâmatas « poutre<br />
de base », lette pamats « poutre de boisage ».<br />
§ 805. Y. si. tepe-, teti « battre » :<br />
Tch. tepati : tep « battement, pulsation, pouls », création du<br />
xix e siècle (fém. otep « gerbe, botte de paille »).<br />
Slov. tépsti (se) « rôder » : tèp « vagabondage », potèp et tçpa<br />
« vagabondage » et « vagabond, vagabonde » ; otèp « botte de paille »<br />
(et fém. plur. istepî) ; — s.-cr. potep (rare).<br />
S.-cr. trèpati (trèptati), trënuti « clignoter » : trën « clin d'œil,<br />
instant» (§ 824).<br />
Slov. tréniti, imperf. trépati (répondant à trëp- nouveau pour<br />
trep-) et tripati : trëp « clin d'œil » et trîp, et trën.<br />
Séparé de trepati « ta,per, piétiner », à postverbal trop, voir<br />
§ 725.<br />
R. xtebât' « avaler un liquide » : doxtëb, is-, o-, ot-, pri-, ras-, za-,<br />
vyxteb, et masc. oxtëba « écornifleur ».
230 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
Verbe propre au russe, remplaçant r. dial. serbât' (§542), et ayant<br />
visiblement substitué la finale de serbât' à celle d'un thème expressif<br />
comme xlep-.<br />
S.-cr. békati et blékati « bêler » ( § 559) : bêka « brebis », blêk et<br />
blêka « bêlement », et bléka « sot, niais ».<br />
R. brexât' « aboyer, clabauder » ( § 557) : v. r. brexu « calomniateur<br />
», mod. brëx « clabaudage », nabrëx, masc. zabrëxa « menteur ».<br />
S.-cr. brèhati « haleter, tousser fort », et slov. brçhati : slov. brèh<br />
et brçha, et croate breha.<br />
R. verstâl' « aligner », sur verslâ « rangée » (§ 1165) : vërst « alignement<br />
», svërst « égalisation ».<br />
V. si. reve-, rjuti « mugir, rugir » :<br />
Slavon russe zarevu « août » (époque du rut des cerfs).<br />
R. revêt' : rëv, vzrëv, zarëv, et ancien zârev « août » ; masc. rêva<br />
« celui qui hurle », izrëva, zarëva.<br />
Tch. rev « rugissement ».<br />
Deux thèmes verbaux sont terminés par -/-, et leurs postverbaux<br />
féminins ne diffèrent pas des dérivés suffixaux en -ja (§ 1026) :<br />
S.-cr. régional (cakavien et kajkavien) peljati « conduire,<br />
charrier » : pëlja « charroi ».<br />
Slov. péljali : pçlja ; et sur les imperfectifs dérivés en -peljâvati :<br />
izpeljâva, napeljâva, od-, pre-, pri-, v-, za- (§ 818).<br />
Origine non déterminée, qui paraît romane : on pense au latin<br />
pellere, conservé en italien dans une série d'emprunts à la langue<br />
savante : espéllere, impéllere, repéllere.<br />
R. terjât' « perdre » (§ 551) : potérja « perte », et istérja, ras-, u-,<br />
za-.<br />
Et voir -tërja-, § 753.<br />
On a vu les doublets tref- et traf-, § 786, ëek- et ëak-, zvek- et<br />
zvak-, § 787. On restitue *-el- et *-er- dans les verbes suivants :<br />
§ 806. Vocalismes radicaux *-el-, *-er~. — R. zelobit' « canneler » :<br />
zôlob « rigole » (§ 68), vyzelob « cannelure ».<br />
S.-cr. zlijèbiti : zlîjeb, ùzljeb.<br />
Base *zelbù, sans explication sûre.<br />
V. si. plëniti « faire prisonnier » :<br />
V. si. plënu « butin ».<br />
R. plen (slavon) et polôn, zapolôn.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 231<br />
Pol. plenic « produire, multiplier » : pion « récolte, moisson »,<br />
poplon « supplément de culture, légumes cultivés avec d'autres ».<br />
Slov. plën, zaplën.<br />
Base pelnû, dérivé en -nu (§ 1072).<br />
V. si. vrëdili « endommager, nuire » :<br />
V. si. vrëdu « lésion, dommage » ; slavon prëvrëdu « fait de faire<br />
obstacle ».<br />
R. veredit' « gâter, envenimer » et slavon vredît' « nuire » : véred<br />
« furoncle » et vred « dommage », et vredâ, veredà ; povréda « dégât,<br />
lésion » ; privered « clou, escarre » et priveréd, priverëda (privered')<br />
« fait d'être trop exigeant, capricieux ».<br />
Pol. wrzedzie (wrzo-) « ulcérer » : wrzôd « abcès » et dial. owrzôd ;<br />
-— tch. vred « abcès ».<br />
S.-cr. (dial.) vrïjeâ « bouton, pustule », iivreda « offense » ; ancien<br />
povrëd « dommage », et mod. pôvreda « lésion » adapté de r. povrezdénie<br />
(§ 825).<br />
Slov. vrèd, navrêda « fait de gâter (sa santé) », uvrêda (du croate).<br />
Le tchèque vred a une variante dialectale bred, et on trouve en<br />
sorabe b. sor. rjod, de *vred, mais h. sor. brjôd, en russe razberedit'<br />
à côté de razveredit' « envenimer (une plaie) » : ce qui restitue une<br />
forme à préverbe *oberd-, de *verd- (§ 1208) restauré dans pol.<br />
dial. owrzôd.<br />
En baltique, lette apvifde, de ap-vift «bouillir autour» (§ 444).<br />
Un mot tout différent est :<br />
V. si. vrëdu dans l'expression ne vrëdu sutvoriti « ne pas juger<br />
digne, rejeter » de Ps. CYII, 22 et sa citation dans les Évangiles.<br />
Terme du vieux slave occidental, puisqu'on ne le retrouve qu'en<br />
serbo-croate et en slovène :<br />
S.-cr. vrijëditi «valoir», adj. vrijëdan «digne» : prlvreda «gain,<br />
revenu, économie ».<br />
Slov. vrëden : vred dans za vred imeti « estimer digne ».<br />
A la base, emprunt à v. h. a. wërd « digne ».<br />
Y. si. trëbiti « nettoyer » ( J. Ex.) :<br />
V. si. otrëbi «balayures», nom. plur. (masc. ou fém.), dans<br />
I Cor., IV, 13 (et cité Pand. Ant., etc.).<br />
R. terebW « arracher, tirer » et « essarter, nettoyer » : terëb<br />
« nettoyage » et tëreb « lieu débroussaillé, essart » ; doterëb, is-, na-,<br />
pere-, pro-, ras-, vytereb, pritereb (et fém. pritereb'), ôtereb et oterëb,<br />
zdtereb et zaterëb.<br />
Pol. irzebic « extirper, essarter » : wytrzeba « terrain défriché ».<br />
Slov. trëbiti « émonder » : trëba, iztrëb et izlrëba (et iztrebî, fém.
232 LES POST VERBAUX [§ 778]<br />
plur.) « nettoyage, curage » et « délivre, arrière-faix », otrêba,<br />
potrêba (et fém. plur. potrêbi).<br />
On peut supposer un élargissement en -b- de la racine *ter-<br />
« frotter », cf. gr. Tpfooi, sinon un dérivé suffixal en -ba (§ 999).<br />
Mais on a un autre thèrne dans :<br />
Y. si. trëbovati « avoir besoin » :<br />
V. si. trëbë (byti) «(être) nécessaire», compar. trëbljii (Cyr. Jér.) ;<br />
potrëba « besoin ».<br />
R. trébovat' « réclamer, exiger » et trébit' « avoir besoin » : polréba<br />
« besoin » et potréb ; upotréba « emploi » (usuellement upotreblénié)<br />
de upotrebit' « employer ».<br />
Pol. trzeba « il est besoin, il faut », polrzeba.<br />
Tch. treba, potreba, et spotreba « consommation ».<br />
S.-cr. trëbati « avoir besoin, falloir » : trijèba « besoin » et usuellement<br />
potreba ; ùpotreba « emploi », zlàupolreba « abus », adaptés<br />
de r. upotreblénie, zloupotreblénie.<br />
Slov. tréba, potrêba, upotréba.<br />
Un autre mot encore est :<br />
V. si. trëba « sacrifice, cérémonie religieuse » ; r. tréba, slavonisme,<br />
pour v. r. tereba. On ignore si ce mot se rattachait à trëbiti « nettoyer »<br />
ou à trëb- « besoin ».<br />
Pour trëb- « besoin », il y a deux rapprochements qui paraissent<br />
également s'imposer : d'une part v. pr. enter po « il est utile », adj.<br />
enterpon « utile », lit. tarpstù, tarpti « profiter », tarpà « prospérité,<br />
profit » ; — d'autre part got. paurban « avoir besoin », prétéritoprésent<br />
parf, plur. paurbum. Le baltique et le germanique remontent<br />
à une même racine *terp-, skr. tfpyati « il se rassasie », gr. Tsp7tco<br />
« je rassasie », TépTOjxai « je me réjouis ». Le slave doit représenter<br />
un balto-slave terp- recouvert par un emprunt au germanique<br />
parf, *purb-.<br />
V. si. vù-prëeati « embarrasser, empêcher » :<br />
V. si. prëky (Ham.), adv., et locution adverbiale vu prëky<br />
« en travers, contre ».<br />
R. peréëit' « contrecarrer » : adv. voprekt « contre, en dépit de »,<br />
slavonisme, et poperëk « en travers », d'où dial. poperëk « les reins »,<br />
subst.<br />
Ukr. peréka « contradiction ».<br />
Pol. przeczyc « contester » : poprzeka « contradiction, inconséquence<br />
», dial, zaprzeka « contradiction, négation », sprzeka « dispute<br />
» et « homme querelleur ».<br />
S.-cr. prijëëiti « empêcher » : prëpreka et zâpreka « empêchement,<br />
obstacle ».
[§ 806] VOCALISME RADICAL -e- 233<br />
Slov. zaprêka, et poprêka « traverse, barre ».<br />
La base est l'adjectif *per-ku «qui est en travers» (§ 1038).<br />
Le russe merëga « filet à mailles larges » doit être un postverbal<br />
de merezlt' « faire du filet », dénominatif de merëza, plutôt que le<br />
reste du thème de base *merg- (§ 1026).<br />
Mais il n'y a pas lieu de voir un postverbal dans v. si. srëda<br />
« milieu » et « mercredi » (ail. Mittwoeh), qui est un dérivé en -a<br />
du nom athématique du « cœur », v. pr. seyr, v. si. srudïce (§ 174) ;<br />
et r. seredâ, pol. srzoda, tch. streda « mercredi » et slrlda « mie »,<br />
s.-cr. srijèda, slov. srëda, avec verbes r. dial. oscredît' « atteindre<br />
le milieu», tch. soustrediti (§ 1222) «concentrer». V. tch. stred<br />
« centre, milieu » est tiré de l'adverbe prostred « au milieu », v. tch.<br />
poslrëd, de v. si. po srëdë, de même que slov. srêd, fém.
CHAPITRE XIII<br />
VOCALISME RADICAL -g-<br />
§ 807. Avec alternance. — On a vu les alternances -trçs- et<br />
-trçs-, -grçz- et -grçz-, -(v)çz- et -vçz-, -krçt- et -krçt-, -mçt- et -met-,<br />
-prçd- et -prçd-, -(v)çd- et -vçd-, § 762 ; -zçb- et -zçb-, -Içk- et -Içk-,<br />
-sçk- et -sçk-, -zvçk- et -zvçk-, -prgg- et -preg-, -rçg- et -rçg-, -tçget<br />
-tqg-, § 763 ; -xrçst- et -xrçst-, § 764 ; -dog- et -deg-, § 765 ; et<br />
-min- et -mgn-, § 795. On ajoutera :<br />
Y. si. mçknçti « s'amollir » :<br />
R. mjâknut' : composé kozemjâka et kozemjâk < corroyeur » ;<br />
— et omjâgnut' « s'affaiblir, être épuisé » : omjâga « fatigue, épuisement<br />
». Cette forme omjâgnut' est évidemment une variante secondaire<br />
de obmjâknul' « s'amollir », avec le thème mjag- pour mjakqu'on<br />
a dans mjâgkij « mou », indéterminé mjâgok, et umjâglyj<br />
« amolli » en regard de umjâknut'.<br />
Pol. zmiçk « dégel » et zmiçka, odmiqka ; — tch. odmëk « dégel ».<br />
S.-cr. méka « amorce, appât », dial. ôdmeka « temps où l'hiver<br />
se relâche ».<br />
Slov. omçka « amollissement », odmçk et odmçka, primçka.<br />
Et voir mçk-, § 763.<br />
§ 808. Sans alternance. — Y. si. rçsa «frange, collier» (Ham.),<br />
r. rjâsâ « cordon, frange », pol. rzçsa et tch. râsa « cil », slov. rçsa<br />
« frange, barbe d'épi ».<br />
S.-cr. résa « frange » et « chaton, barbe, etc. », résiti « parer » :<br />
ftrës « parure », dial. uzrëse, fém. plur., « parure de tête » ; et cak.<br />
resili, par réfection sur na-resa, dérivé en -ja : nareha, ureha.<br />
Thème isolé, sans étymologie valable.<br />
S.-cr. priëéstiti « communier » : pricest « communion », masc.<br />
(et fém.), réfection du xvm e siècle sur pricescënje du slavon (et<br />
pricescénje, du russe).
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 235<br />
Sur v. si. ëçstï «part» (§ 1170), et priëçstï «participation, lot»<br />
(J. Ex.), r. ûcast' « destin », tch. ûcast (fém.) «participation».<br />
Y. si. prçlati « comprimer, réprimer » ( § 553) :<br />
R. prjdtat' « cacher » : oprjdt, sprjat, uprjât, zaprjdt.<br />
Pol. sprzqtac « ranger » et « faire la récolte » : sprzçi « meuble »<br />
et « récolte ».<br />
S.-cr. prètati « couvrir de cendres » : pàpret « braise sous la<br />
cendre », sùpret, ùpret, zdpret.<br />
Slov. nesprèt « homme maladroit, nesprçten ».<br />
Sans étymologie sûre, mais voir § 36. Le substantif v. si. prçtu<br />
« verge » ne peut pas avoir de rapport direct avec prçlati, mais il<br />
pourrait être une formation parallèle sur même racine (§ 1161).<br />
V. si. svçtiti « sanctifier » :<br />
R. osvjât « consécration ».<br />
Pol. dial. poswiqt « consécration » ; mais poswiçta « l'après-fête »<br />
est tiré de po swiçcie et na odswiçt (dial.) « pour la fête » de od swiçla<br />
(swiçto « jour de fête »).<br />
Tch. osvat (dial.) et posvëta pour posvëceni « consécration,<br />
inauguration ».<br />
S.-cr. pôsvela « dédicace » (xix e s.), du russe posvjasëénie (§ 825) ;<br />
et ôsvela « vengeance », de osvétiti « consacrer » et « venger ».<br />
Slov. posvçta ; et osvçta, du serbo-croate.<br />
Sur svçtû « saint ».<br />
V. si. sçtati sç « être arrogant » :<br />
R. satât' « secouer », satât'sja « vaciller » et « rôder » : nasât, ot-,<br />
pere-, pri-, pro-, ras-, za-, et nedosât « homme qui n'arrête pas de<br />
rôder, batteur de pavé».<br />
S.-cr. sétati (se) « se promener » : sëla « promenade » (usuellement<br />
sélnja, § 1090).<br />
Slov. sçtati se : posèt, presèl et prosèl.<br />
Peut être rapproché de lit. siaùsli « se déchaîner », siùsti « devenir<br />
fou » (§ 79) ; et voir v. r. sulû « bouffon », § 1161.<br />
Y. si. glçdati « regarder », r. gljadél' ( § 592) :<br />
R. gljad « vue », dogljâd, na-, nad-, o-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-,<br />
raz-, u-, vz-, za-, vygljad.<br />
Pol. doglqd, na-, o-, po-^prze-, roz-, w-, wy-, wz-, za-.<br />
Tch. hled, dohled, na-, o-, po-, pod-, pre-, prù-, raz-, v-, vy-, vz-,<br />
S.-cr. glêd, ïzglëd, ô-, pô-, prë-, û-, zâ-, râzgled.<br />
Slov. glèd (et fém. glçd), doglèd, iz-, na-, nad-, o-, po-, pre-, pri-,<br />
raz-, u-, za-, zglèd et vzglèd, et masc. oglçda « inspecteur ».
236 LES POSTVERBAUX [§ 808]<br />
V. si. grede- « il vient » ( § 430) :<br />
S.-cr. grédë- « il va » : adv. grêdom « en passant » et uzgrëdom,<br />
mais mlmogrëd et ûzgrëd présentent -grëd réduction du gérondif<br />
ancien grede (§ 281).<br />
Y. si. prçde-, prçsti « filer » :<br />
R. doprjâd, na-, o-, pri-, v-, za-, vpprjad (et fém. prjad', ôprjad',<br />
pripjad'), se rencontrant avec les postverbaux de prç(d)nçti<br />
(§ 762) ; et néprja, nedôprja «mauvaise fileuse » (§ 824) à côté de<br />
neprjdxa (§ 1140).<br />
Pol. oprzçd « cocon », et v. pol. przçda « fîleur ».<br />
S.-cr. prëda «fileuse» (pour prêlja, § 1058), et dial. zâpreda sur<br />
zaprédati « entortiller, importuner ».<br />
Slov. zaprçda « entortillement ».<br />
V. si. vu-rçditi « ranger » :<br />
V. si. rçdu « ordre, rang » ; slavon russe narçdu, ob-, po-, u-.<br />
R. rjadit' « engager, parer » : rjad « rang » et rjdda « contrat »,<br />
dorjdd et dorjdda, narjdd « ajustement, parure » et prinarjdd,<br />
prirjdda, vyrjad et vyrjada, pererjâd « changement de parure »,<br />
izrjdd et izrjdda « équipement », srjad et srjdda, iznarjdd, snarjdd<br />
et snarjdda « appareil, instruments » ; obrjdd et obrjdda « rite,<br />
cérémonie», porjdd et porjdda «règle, usage», rasporjdd «disposition,<br />
arrangement », urjdd « ordre » et neurjdd « désordre » ; otrjdd<br />
« détachement », podrjdd « entreprise », razrjdd « catégorie, classe »,<br />
zarjdd « charge, cartouche ».<br />
Pol. rzqd « ordre, accord, régime », przerzqd, przy-, roz-, wy-, z-,<br />
za- ; et zrzçdzic « devenir bizarre, grogner » : zrzçda et wzrzeda<br />
« humeur grondeuse », masc. zrzçda « grondeur ».<br />
Tch. fdd « ordre » et fada « rangée », obrad, pofad et pofada, ûfad<br />
« office », vyfad.<br />
S.-cr. rêd et ancien rëda, ndred, obrëd, rdzred « classe » et pôdrëd<br />
« sous-classe », ràsporëd (du russe), ûred « office, bureau » (du<br />
tchèque).<br />
Slov. rçd, ndred (et fém.), obrëd, od-, pod-, pri-, raz-, u- (et fém.<br />
zdred).<br />
Le thème rçd- est isolé, sauf des rapprochements peu clairs en<br />
baltique.<br />
Slavon jçëati « gémir » ( § 596) :<br />
Pol. jqk « gémissement », et odjçk de odjçknqc « répondre en<br />
gémissant » ; — tch. jek.<br />
S.-cr. jëëati « gémir » et « résonner » : jêk et jëka « gémissement »<br />
et « résonnance », ôdjek et odjeka « écho ».<br />
Slov. jèk et jçka, odjêka.<br />
0
[§ 800]<br />
V. si. pri-sqsti « toucher » :<br />
VOCALISME RADICAL -tj- 237<br />
V. si. prisqga « serment ».<br />
R. sjâgnut' « atteindre » : sjag, ssjag et sjdga, ssjâga, dosjâg ;<br />
prisjâga « serment », et posjâg pour posâg « mariage » (§ 782).<br />
Pol. siqg et siqga « envergure, toise », dosiqg, zasiqg, przysiçga.<br />
Tch. sdh «toise, brasse» et dial. sâha (siha), dosah (dûsah)<br />
« portée », obsah « ce qu'on embrasse, contenu, volume », presah,<br />
roz-, zd-, prisaha.<br />
S.-cr. ségnuti « étendre le bras » : seg (mot de lexique), dôseg,<br />
ôpsëg, prlsega (pri-), et dial. prësega «distension, hernie».<br />
Slov. dosèg, ob-, po-, pre-, za-, et dosqga, ob-, pri-, za-.<br />
Une forme *sçgu de postverbal, dans pol. sqg «corde de bois »<br />
et posqg « statue », est d'ancienneté douteuse, et il doit plutôt<br />
s'agir d'une altération de sqg-, siqg, comme dans le nom de la<br />
«brasse», slavon sqzènï et r. sazén' (§ 183) ; la statue devait être<br />
à l'origine un poteau de bois, un élément d'une corde de bois.<br />
Le thème sag- de v. si. posagu « mariage » ( § 782) est isolé, mais<br />
il doit avoir un lien avec sqg- : le thème sqg- est celui de lit. sègti<br />
«attacher» (§ 435), et il est aisé de supposer que, du balto-slave<br />
seg-, si. sqg- à infixe nasal, il a existé un factitif en *sog- dont sort<br />
posagati, imperfectif dérivé, comme de lesli « se coucher », prés.<br />
Içze-, un factitif loziti, imperfectif dérivé -lagati et postverbal -lag-<br />
(§ 726).<br />
On ajoutera :<br />
S.-cr. hlépjeti « désirer ardemment » : pohlepa « désir » et anciens<br />
hlepa, hlep et pohlep (masc. et fém.).<br />
La forme cakavienne hljepili indique un ancien *xlqp-, avec le<br />
traitement cakavien ja de q dont les restes se conservent à l'initiale<br />
et après chuintante ( § 66) : une trace en subsiste aussi dans la<br />
mouillure de /, avec passage de Ija à Ije, ainsi s.-cr. kléti « maudire »,<br />
v. cak. klja- et mod. kljét (depuis le xv e siècle).<br />
Le verbe est sans rapport avec v. si. xlçpati « mendier », dont<br />
la variante vus-xlqp- n'est qu'une altération, et qui doit être bâti<br />
sur un emprunt au germanique (h)lump-, ail. Lump «vaurien,<br />
gueux ».<br />
Le mot v. si. jqdza « maladie », pol. jqdza « furie » et dial. jqdzababa<br />
«sorcière», r. bdba-jagd avec perte du degré alternant (d)z<br />
(§ 111), est isolé en slave, mais son thème jqdz- de *irtg- (§ 19)<br />
apparaît en baltique : lit. éngiu, éngti « tracasser » et « faire de<br />
mauvaise grâce », lette îkstu, îki « être de mauvaise humeur » ;<br />
avec rapprochement en germanique ; v. angl. inca « contrecœur,<br />
doute, soupçon ».
CHAPITRE XIV<br />
VOCALISME RADICAL -ï-<br />
§ 809. Avec alternance. — On a vu les alternances :<br />
brod et brïd, § 724.<br />
rok et rïk, § 726.<br />
pon et pïn, ton et tïn, § 727.<br />
dor et dïr, mor et mïr, sor et sïr, tor et lïr, vor et vir, § 728.<br />
strok et strlk, § 733.<br />
cvët et cvït, lëp et lïp, blësk et blïsk, § 745.<br />
krës et krïs, § 746.<br />
*malz et *mïlz, *palz et *pïlz, *gald et *zïld, *dalb- et *dïlb,<br />
*valk et *oïlk, § 769.<br />
*marz et *mïrz, *varl et *inrl, *skard et *skïrd, *smard et *smïrd,<br />
*tarp et *tïrp, *svarb et *svïrb, § 770.<br />
*mark et *mïrk-, *varsk et *mïrsk, *zark et *zïrk, *barg et *bïrg,<br />
*varg et *vïrg, *parx et *pïrx, *sarx et *sïrx, *varx et *vïrx, § 771.<br />
gag et zlg, val et vil, § 777.<br />
prag et pirg, § 782.<br />
zîd et zîd, § 794.<br />
sik et sïc, pix et pïx, zim et zïm, zin et zïn(j), zir et zïr, siv et<br />
sïv, § 795.<br />
slip et slip, § 796.<br />
On ajoutera :<br />
Y. si. ërutati « tracer » :<br />
V. si. ëruta « trait ».<br />
R. (na-)ëertâl' et ëertW «tracer» : ceriâ (et fém. sëerl' dans dial.<br />
v sëert' « à mesure rase ») ; et ëerkdl' « griffonner » ( § 429) : dôëerk,<br />
nâ-, ô-, 61-, pô-, père-, prô-, vy-, zâcerk et zacërk. r<br />
Tch. crtati : ërta, et cri nouveau ; pour skrt « trait, coupure »,<br />
voir § 813.<br />
S.-cr. cria, et nâcrt« ébauche, esquisse », ôcrt « contour», nouveaux<br />
(xix e s.) et adaptés de r. naëertânie, oëerlânie (§ 825).
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 239<br />
Slov. ertdti « dessiner » (savant), et erlali « essarter », cftiti<br />
« essarter » et « inciser, graver » : cria « trait » (savant) et ert « limite<br />
entre deux champs en montagne » et « essarts » ; et nacrt « plan »,<br />
ocrt « contour », nouveaux comme en serbo-croate.<br />
Voir erute-, § 770.<br />
V. si. sû-drûgnçti «retenir», druzati «tenir» (§ 498) :<br />
R. dërgai' « tirer » : dërg, izdërg, o/-, poef-, pere-, pro-, raz-, s-, vz-,<br />
pôderg, vyderg « action d'arracher, d'extraire » et fém. vyderya<br />
«lame de fer pour arracher les clous», masc. izdërya «qui souffre<br />
de crampes », poddërga « qui va en retroussé, en vêtement court ».<br />
Pol. dziergae : zadzierg et zadzierga « lien, nœud » et ancien dzierg.<br />
Tch. drhati : drh « nœud », odrh « réprimande, savon », zâdrh et<br />
zâdrha « nœud, obstacle ».<br />
Slov. drzali « gratter » et drgati « frotter » : drza « lisière de<br />
champ » et « femme de mauvaise vie, traînée » ; odrga « écorchure »,<br />
zadrg et zadrga « lien, lacet » ; sçdrga « choses inutiles (qu'on<br />
entasse) », sur zdrgniti « ramasser en grattant », et « grêle », variante<br />
de sçdraga (§ 773).<br />
Et sur r. derzât' : ùderz « rétention, retenue », et sderz, zdderz<br />
(§ 824, et fém. -derz').<br />
V. si. kljuje-, kljïvati « becqueter » :<br />
R. kljuë-, klevât', perf. kljànul' : kljuv « bec », et klëv « action de<br />
becqueter », doklëv, is-, ot-, po-, pere-, pro-, ras-, s-, za-, vyklev.<br />
Dans les langues méridionales, le substantif est sur le thème<br />
kljun- :<br />
Moyen-bulg. kljunu « bec » (xiv e s.), bulg. mod. kljun.<br />
S.-cr. kljunuti : kljûn (dès le xv e siècle).<br />
Slov. kljûniti : kljûn.<br />
Ces formations de postverbaux en -n sur verbes en -ngti sont<br />
plus ou moins récentes (§ 825), et il n'est pas vraisemblable que<br />
le mot klinû « coin, cheville » (§ 1073), qui est vieux-slave (Méthode<br />
d'Olympe) et slave commun, puisse avoir été tiré d'un perfectif<br />
*klinçti antérieur à kljunçti (§ 528).<br />
V. si. zïvati «mâcher» (§ 519) :<br />
R. zuë-, zevdt' : zov, dozôv, iz-, na-, pere-, pro-, raz-, masc. zôva<br />
« homme qui mastique lentement ».<br />
Et voir zvakati, § 787.
240 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
§ 810. Sans alternance. — S.-cr. mrsiti « faire gras » et<br />
« brouiller » : mrs « aliment gras », râzmrs « débrouillage ».<br />
Slov. mrsiti : mrs.<br />
Thème isolé.<br />
V. si. ëïsliti « honorer » :<br />
Pol. czcic : uczla « banquet, festin » et ancien czta, ancien poczta<br />
« honnêteté » et « pourboire ».<br />
Tch. (po-)cUti (v. tch. po-ëstiti) : pocla «honneur», ucta<br />
« respect ».<br />
Base eïstï «honneur» (§ 1169).<br />
Y. si. ëïte-, ëisti « estimer, compter » :<br />
V. si. poëïtû « compte » (J. Ex.), priëïtu « attribution, lot » et<br />
« clergé » (J. Ex.) ; slavon russe sûëïtu « calcul ».<br />
R. cet i néëet « pair et impair » ; doëël, na-, ot-, po-, pere-, pri-,<br />
ras-, s-, u-, za-, vîjëei ; procët « mécompte » et aussi « lecture,<br />
proëténie ».<br />
Pol. poczet « nombre, suite ».<br />
Tch. poëet et odpoëel, rozpocet, vypoëet, zâpoëet ; souëel (§ 1222),<br />
ûëet, vycet.<br />
S.-cr. posta « respect ».<br />
En baltique, lette sk'ist « penser », itér. skàitît « compter »<br />
(§ 429) : skàits « nombre ».<br />
Y. si. mïstiti «venger» :<br />
R. msta « vengeance » (et mest'), pomstâ, otmésl (et fém. ôtmest').<br />
Pol. pomsta, zemsta, et anciens msta, odemsta.<br />
Tch. msta, odemsta, pomsta.<br />
Sur mïstï «vengeance» (§ 1169).<br />
ide-, iti « aller » :<br />
R. masc. nâjda « qui a trouvé », prôjda « intrigant » ; — bl.-r.<br />
peréjd « passage », rozyjd « sortie ».<br />
Pol. najda « trouvaille ».<br />
Tch. masc. obejda « vagabond ».<br />
*pïrdëti «péter» (§ 592) :<br />
Pol. plerdziec : piard (pierd) «pet».<br />
Tch. prd, poprda.<br />
S.-cr. prda « pet » et masc. « péteur », pôprd « bagatelle », pôtprd<br />
« raillerie ».<br />
Slov. prd, prda «derrière», pçdprda (podprda) «caille».<br />
Ail. fur zen : Furz ; gr. TOpSoixca : TOpS-rj.
§ sio] VOCALISME RADICAL -l" 241<br />
*pïzdëti «vesser» (§ 591) :<br />
Pol. bzdziec : bzda « vesse ».<br />
Tch. bzed, gén. bzdu.<br />
Lit. bezdëii : bizdas « derrière ».<br />
*sïrditi « mettre en colère » :<br />
S.-cr. sfdiîi : srd « colère », masc. (et fém.), et ancien srda, et<br />
masc. srda « le coléreux », fém. srda « la furie ».<br />
Slov. srdiii : srd « colère », masc. (et fém.), odsrd « vengeance ».<br />
Sur v. si. srùdïce « cœur », srudo- (§ 1216) ; pour usrudû « zélé »,<br />
voir § 1219.<br />
Y. si. u-tvruditi « affermir » :<br />
S.-cr. tvrditi : p'otvrda « certificat », utvrda « place forte », crées<br />
(depuis le xvn e siècle) comme doublets de sens concret (§ 825)<br />
des abstraits polvrdénje « affirmation, confirmation», utvrdénje<br />
« fortification ».<br />
Slov. trditi : potrda.<br />
Sur v. si. tvrûdu « ferme » (§ 1001).<br />
V. si. -crupe-, itératif crupati « puiser » :<br />
Slavon vodocrupu « puisette ».<br />
R. cerpdt' : vodoëérpa, isëérp, nâëerp, ôt-, pô-, vy-, zâ-, sëerp.<br />
Pol. czerp « épuisette », wyczerp.<br />
V. si. tlupa « foule ».<br />
R. tolpâ, tolpît'sja « s'attrouper » : ukr. natolp, potolp.<br />
Lit. telpù, tiîpli « se faire place », factitif lalpinti « faire place,<br />
faire entrer, fourrer » : talpà « capacité ».<br />
Le mot v. si. tlupa est sûrement en rapport avec vus-tlapili<br />
« réfréner » (§ 612), et il peut l'être avec pol. tium « foule » (§ 760).<br />
Pour tch. tlapa « patte », c'est une altération de lapa d'après<br />
tlapati, slapati « fouler (aux pieds) ».<br />
R. dial. serbdt' « avaler un liquide, humer » (§ 542), bl.-r. serbâc' :<br />
sërb.<br />
Et voir le slavon pasrubu. « beau-fils », § 1220. Et ci-dessous<br />
pol. sarkac, etc.<br />
Slavon strubû « amputé », adj. ; slavon russe uscïrbnuti sg<br />
« décroître » (en parlant de la lune) : usëïrbu « décroissance de<br />
la lune ».<br />
R. scerbii' « ébrécher » : scerbâ « brèche, fente », vyscerb « action<br />
d'ébrécher », usëérb « décroit, perte ».
242 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
Pol. szczerb et szczerba « brèche », uszczerb, wyszczerba ; — slovaque<br />
strba.<br />
S.-cr. skrb « brèche-dent », d'un plus ancien strb, bulg. stârb ;<br />
skfbo et fem. skfba « bec-de-lièvre » ; skrba « brèche ».<br />
Slov. sôrb « ébréché », scfba et skfba.<br />
Lette sk'ifba « fente », v. h. a. scirbi « chose fendue », ail. Scherbe,<br />
v. angl. sceorfan « ronger, mordre ».<br />
Et voir *skûrb-, § 813.<br />
§ 811. V. si. mluknçli « se taire » (§ 498) :<br />
R. molôât' : molk dans adv. môlkom, tixomôlkom ; zamôlk ;<br />
ûmolk « silence », de umôlknut', intrans., et umôlk « action de<br />
taire », de umolcât', trans.<br />
Pol. milczec : adv. v. pol. milczem.<br />
S.-cr. mûcati : mûk « silence », ancien et régional, et adv. mûkom.<br />
Slov. môlk, pornôlk « pause », zamôlk « réticence, élision ».<br />
Pol. sarkac « renifler, se plaindre » : ancien sark « plainte ».<br />
Tch. srkati, slovaque osfkat' « sangloter » : osrk.<br />
Slov. sfkali « humer, siroter » : srk « gorgée », posrk, et masc.<br />
sfka « qui aime siroter » ; — s.-cr. srk.<br />
Verbe expressif en -kati sur *sïrbati (§ 559).<br />
Pol. polzyc « alléger », ulzyc « soulager » : ulga « allégement,<br />
soulagement » ; — ukr. pil'zyty : pil'ha « adoucissement » (à côté<br />
de pil'ha « profit », r. dial. pôl'ga pour pôl'za).<br />
Et pol. zelzec «diminuer» (intrans.), zelzyc, obelzyc «outrager»<br />
(d'où liyc, § 1208) : obelga « outrage ».<br />
Sur lïyûku «léger» (§ 983). Et sur (ne) lïdzë «(il n'est pas)<br />
permis » (§ 19) :<br />
V. si. polïdzevali et polïziti (J. Ex.) « profiter », polïziti (Constantin<br />
le Prêtre) « faire profiter » sans alternance consonantique comme<br />
dans -gobïdziii (§ 603) : polïdza «avantage, profit», r. pôl'za,<br />
vypol'za « profit (tiré d'une aide) » sur vypol'zovat' (passé au sens de<br />
«rendre la santé»).<br />
Les verbes en regard de polïdza ne sont plus que ses dénominatifs.<br />
V. si. is-trûynçti « arracher » :<br />
R. lorgâl' : vostôrg « transport, extase » est le slavon russe<br />
vùstùrgù ; prôtorg (et prôtorz') « aiguille sans chas », de protorgât'<br />
« percer avec effort ».<br />
Pol. targac « tirailler » : rozlarga « distraction », zatarg et zalarga<br />
« fait de houspiller, querelle ».<br />
Tch. strha « ouragan, pluie diluvienne ».
[§811] VOCALISME RADICAL 243<br />
Slov. potrga et rastrga « déchirure », pretrg et pretrga « déchirement,<br />
interruption » ; — s.-cr. pretrg dans bez pretrga « sans<br />
interruption ».<br />
Racine *terg-, *tïrg- (§ 498), à distinguer de *tûrgu «marché»<br />
(§ 814).<br />
Y. si. sû-vrusiti « accomplir » :<br />
V. si. vruxu « sommet ».<br />
R. versil' « accomplir » et « mettre le faîtage » : verx ; nâverx<br />
« le haut » est la locution adverbiale naverxû « en haut » et navérx<br />
(avec mouvement) substantivée, de même ôverx et plur. pôverxi.<br />
Tch. vrch, et povreh « surface » de po vrhu.<br />
S.-cr. vrh, vrsiti : svrha « fin, but, intention » (depuis le xv e siècle),<br />
remplaçant svrsenje, v. si. sûvrûsenije ; ôvrha « exécution (par<br />
huissier), exploit, saisie » ; povrha « superficie » est de pàvrh,<br />
préposition, et l'ancien obrh «sommet» de obrh(u), préposition;<br />
— slov. ôbrh est préposition.<br />
Base v. si. vruxu (§ 160).<br />
V. si. ime-, jçti, imperf. imati :<br />
V. si. sunïmù « assemblée », zaimu « emprunt », naimu « salaire »<br />
(Pand. Ant.), acc. plur. poimy (tvoriti) «(faire) grief» (Gr. Naz.) ;<br />
adj. neimu (animal) « sauvage, qui ne se laisse pas prendre » (Ham.,<br />
v. si. ou v. r.) ; v. r. suimû « engagement, mêlée (de combattants) » ;<br />
composé slavon lixoimu « cupide ».<br />
R. doëm, iz'ëm, na-, nad'-, ot'-, pod'-, pri-, pro-, raz'-, s'-, vz'-,<br />
za-, vyem, et dojm, etc., et vojm; oV'èm «volume» et obôjma<br />
« crampon », poëm « débordement » et pôjma « terrain couvert<br />
d'eau», uëm «action d'ôter» et ûjma «quantité innombrable»<br />
(en vieux russe « pénurie, disette ») ; s'ëm « entreprise », et sôjma<br />
« assemblée » à côté de sonm, du slavon, et de sejm « diète », du<br />
polonais ; suëm « assemblée » et sûjma ; peréjma « douille », prôjma<br />
« ouverture » ; masc. razôjma « celui qui défait, démonte ».<br />
Pol. najem, objem (obejm), rozejm (rozjem), sejm (ancien sjem),<br />
zajem, przejem et przejma, pojma, podejma, ujma, wyjma, zejma.<br />
Tch. jem « sensation » (nouveau) et jem « réservoir », composés<br />
vodojem, etc. ; dojem, nâ- et pronâ-, ob-, po-, prû-, v. tch. prie-,<br />
pri-, û-, zâ-, snëm, vnëm, et fém. ujma (ûjma).<br />
Slov. dojem, pô-, ù-, zâ-, najèm, ob-, pre-, pri-, sèjem et senjèm,<br />
et fém. prejçma, pri-, u-.<br />
S.-cr. dôjam, nâjam, pbjam et obujam, pôjam, sâjam, ûjam ;<br />
fém. pop. ùzma « maladie qui vous prend », mais dial. pôjma est<br />
une altération de pàmnja « soin ». Est à part le régional vâzam<br />
« Pâques » (des catholiques), et uzam avec le flottement de ùskrs<br />
et vàskrs slavon (§ 746), rattaché secondairement à ùzêti, cak.
244 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
ancien vazeti, vazme- (zàme-), et qui est un emprunt au roman,<br />
ital. azzim'o de dies azymorum « jour des azymes ».<br />
Sur le thème im- :<br />
R. doim, nâim, otnim, po(n)im, perefnjim, proim, raznim,<br />
izym (§ 75), nadijm, obijm, vzym, podym (et fém. pôdym'), avec<br />
extension de -dym (§ 800) ; néim (néim') «(animal, cheval) qui ne<br />
se laisse pas attraper ».<br />
Pol. podym, podyma « support, cou-de-pied », mais sûrement<br />
emprunt à r. pod(d)ym.<br />
Slov. obîm.<br />
V. si. o-tïmiti « enténébrer » :<br />
Y. si. lima « ténèbres » ; — r. t'ma (et tem'), etc.<br />
Pol. cmic : ema et oema « ténèbres », zacma « cataracte (des<br />
yeux) ».<br />
Base lima, qui a l'aspect d'un postverbal en regard de lit. lémsta<br />
« cela s'assombrit », lémli, lette tumsla, lumt ; sur cette racine, lit.<br />
tamsà « obscurité », skr. tdmah (gén. tâmasah), et voir r. dial.<br />
témrivo, § 1124.<br />
V. si. na-pluniti « emplir » :<br />
R. pôlnit' : pripôln.<br />
Pol. pelnic : (fém. dopeln) ; •—• tch. (nâpln, vypln, fém.).<br />
S.-cr. pùnili : dopuna, pôpuna, récents, adaptés de r. dopolnénie,<br />
popolnénie (§ 825) ; — slov. dôpoln.<br />
Base v. si. plunu « plein » (§ 1070).<br />
V. si. skvruniti « souiller » :<br />
V. si. skvrùna « souillure ».<br />
V. tch. skvrnili : skvrna « tache », poskvrna.<br />
Slov. skrûnili : skvrna et skrûna, oskrûna.<br />
Base v. si. skvruna, dérivé en -na (§ 1075).<br />
V. si. igrati « jouer » :<br />
V. si. igrï «jeu» et iyra (Pand. Ant..)<br />
R. igrâ, et plur. dôigry, nâigry, peréiyry, prôiyry, rôzigry, zâigry.<br />
Pol. (i)grac (§ 63) : gra, dial. wygra « gain au jeu » ; przegra, qui<br />
se dit des faux-bourdons sortant de la ruche pour suivre la reine<br />
des abeilles.<br />
Tch. (jjhrâti : (j)hra, dohra, prohra « perte au jeu », vyhra<br />
« gain » ; et v. tch. priejhrav « prélude », sur l'itératif (j)hravaii.<br />
S.-cr. igrati « danser » et « jouer » : igra « danse » et « jeu ».<br />
Slov. igra, poigra « après-jeu », zaigra « perte au jeu ».<br />
Base igr-, dérivé en -r- (§ 1117).
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 245<br />
On examinera deux mots isolés :<br />
V. si. slïza « larme », slïziti « pleurer », r. slezâ, slezît'sja, etc.<br />
C'est sûrement une formation nouvelle du slave, substituée au<br />
mot indo-européen que conserve le baltique : lit. âsara, lette asara,<br />
comme skr. âçru, açrâm, av. asru-, gr. Sàxpu, lat. lacrima de<br />
dacruma, got. tagr. On peut penser à un dérivé de la racine de v. si.<br />
slïzuku «glissant», r. o-slznouti, r. s(k)liznut', etc., qui s'est<br />
contaminée avec celle de v. si. sluzû « mucosité » (§ 758).<br />
V. si. srûpu « faucille », r. serp, etc., isolé en slave, l'existence d'un<br />
verbe s.-cr. srpsti « faucher à la faucille » ( § 431) étant fort douteuse ;<br />
ailleurs lette sïrps et sirpe, gr. àp^ï), et lat. sarpere « tailler la<br />
vigne ».
CHAPITRE XV<br />
VOCALISME RADICAL -u-<br />
§ 812. Avec alternance. — On a vu les alternances :<br />
zov et zuv, § 737.<br />
brus et brûs, gub et gûb, § 754.<br />
strug et strûg, dux et dùx, krux et krûx, slux et slux, sux et sûx,<br />
§ 755.<br />
*talk et *tulk, § 769.<br />
*skard et *skurd, § 770.<br />
sys et sûs, pyt et pût, § 799.<br />
syp et sup, lysk et lusk, myk et mûk, tyk et tûk, lyg et lûy, syl<br />
et sûl, ryv et ruv, § 800.<br />
kyk et kûk, § 802.<br />
§ 813. Sans alternance. — R. glotâï « avaler » : glot « gorgée »,<br />
poglôt, proglôt.<br />
Tch. hltati : hit « gorgée » (v. tch. hlet, gén. hlla).<br />
Slov. goltàli : gôlt et gôlla « gosier » et « croup », pogoll.<br />
S.-cr. gùtati : gût « gosier » et « gorgée ».<br />
Formation expressive, cf. lat. glut(t)us «gosier», glutglut<br />
« glouglou ».<br />
R. pôrtit' « gâter » : dial. popôrta « action de gâter ».<br />
Pol. parciec « se gâter » : dial. zaparta « morceau de vieux cuir,<br />
vieux cheval ».<br />
A ce thème *pûrt- se rattache v. si. zaprutûkû « œuf gâté », r.<br />
zâportok, etc. (§ 839). En partant du sens de «fausse couche»,<br />
on rejoint lat. parere « enfanter ». Le baltique a lit. periù, perëti<br />
« couver », subst. përas « larve ». Le slave *pûrt- suppose une<br />
alternance du type dur *-or- : -r-. Le sens « enfanter » du latin<br />
dérive d'un plus ancien « procurer », gr. sTropov et skr. pûrtâm<br />
« salaire », dérivé en -t- comme en slave, et sur racine « dissyllabique<br />
», ce qui s'accorde avec l'intonation rude du slave.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 247<br />
V. si. ob-ruliti « museler » :<br />
V. si. rûtù « museau, groin » (Gosmas) et « partie saillante, bec,<br />
du navire » (Supr. *40016) ; slavon russe obrûtu « licou ».<br />
R. rot « bouche », obrolâl' « mettre un licou » : obrôt « licou »<br />
(dial., variante de ôbrot', fém.).<br />
Slov. rt « pointe », sftiti se « se hérisser » : srt « arête (de poisson) ».<br />
S.-cr. rt, rât « pointe, promontoire » ; dial. rtiti « pointer » (en<br />
parlant du blé), srtiti « saillir », srtati, na-srnuti « se précipiter » :<br />
srt « crête », ndsrZ « assaut » et nasrla, posrt (et fém. prësrt) « crête ».<br />
Base rutû, sans doute dérivé en -Zâ (§ 1161) ; et voir tch. oprat'<br />
« longe », slovaque oprata, § 1172.<br />
A rutû se rattache :<br />
V. si. brûzda « bride, frein », obrûzditi « museler » (Hés. XXXI, 9),<br />
r. brozdâ, slov. brzda.<br />
Dérivé suffixal en -da (§ 1003) sur ob-rûtiti, dépréverbé en r.<br />
brotât' (§ 1208).<br />
Tch. skrtiti « étrangler » et « lésiner », zaskrtiti : zâskrt « croup » ;<br />
et skrtati « rayer, biffer » : skrt « trait, coupure », à côté de crtati<br />
« rayer », crta « trait » (§ 809).<br />
S.-cr. skrt «avare», et slov. skrt, adjectif.<br />
Origine obscure.<br />
Slavon is-krûpiti « mettre en loques » :<br />
Slavon krupa « chiffon ».<br />
R. korpât' «ravauder», s'altérant en kropât' (§ 739) : skrop<br />
« fagotage, bousillage ».<br />
S.-cr. krpiti : krpa « chiffon », ô/crp « raccommodage », et pôtkrpa,<br />
prïkrpa, zâkrpa.<br />
Slov. krpati : krpa, et podkrpa « interpolation ».<br />
Le sens premier était celui de v. tch. krpati « coudre une<br />
chaussure », tch. mod. krpec « sandale de cuir », s.-cr. krplje<br />
« chaussures de neige, raquettes faites de chiffons ». En baltique,<br />
lit. kùrpè « chaussure », lette kufpe, v. pr. kurpe. Rapport plus<br />
lointain avec gr. xpvjraç, etc.<br />
V. si. vupiti «clamer» (§ 514) :<br />
R. voplt', vopijât' : vop et vôpa, et vap sur vopit' dans l'aire de<br />
Vakanie. f<br />
Tch. ûpiti : v. tch. vep, puis ûp (gén. ûpu).<br />
S.-cr. ûpiti, vàpiti : vap, pour l'usuel vàpâj (§ 1031).<br />
Slov. vpi(ja)ti : vpîj.
248 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
Y. si. skrubëti « être affligé » ( § 592) :<br />
(V. si. skrubï « affliction », r. skorb', § 713).<br />
S.-cr. skfbiti « prendre soin » : (skrb « soin », fém.) ; opskrbiti<br />
« fournir, approvisionner » : ôpskrba et oskrba, calques du xix e siècle<br />
de ail. versorgen, Versorgung.<br />
Slov. skrbéti «avoir soin» : o(b)skrba, et priskfba «action de<br />
procurer ».<br />
Rapport probable avec le thème *sëïrb-, slavon strub-, § 810.<br />
§ 814. Slavon russe gulku et gûlka « tumulte ».<br />
R. golcâl' « faire du tapage » : golk et gôlka.<br />
Pol. dial. gieiczec : ancien gieik et mod. zgietk « tumulte ».<br />
Tch. hluëeti : hluk « tumulte » et shluk « foule ».<br />
Slov. gôlcati : gôlk.<br />
V. si. smrûkati «aspirer l'eau, renifler» (§ 542) :<br />
Y. si. smruku « siphon » (Ham.).<br />
R. smorkât'(sja) « se moucher » : smork « action de se moucher »,<br />
nàsmôrk et nasmôrka « rhume de cerveau », zasmôrk « action de<br />
salir de morve ».<br />
Pol. smarkac « être morveux » : smark « morve » ; — tch. smrkati<br />
« se moucher » : smrk « morve ».<br />
S.-cr. smfkati « aspirer » et « priser » : smrk « pompe » et « prise<br />
de tabac », ôsmrk « typhon ».<br />
Slov. smrkati : smrk « pompe, trombe d'eau, morve, prise de<br />
tabac », et smrka « morve du cheval ».<br />
En baltique, lit. smùrgas « morve », lette smufga « saleté ».<br />
*stûrk- et *tûrk- (§ 595) :<br />
On distingue :<br />
1° R. torcât' « se dresser, être saillant » et ukr. storcâty, factitif<br />
storëyty « mettre debout ».<br />
Pol. (sJterczec « faire saillie, avancer » : siark (sterk) « branche,<br />
tronc » ; -— tch. trëeti « se dresser, être fiché » ; — s.-cr. dial. et slov.<br />
strëati « être saillant ».<br />
2° R. tôrkat' «heurter» : tork «heurt», pôtorok (gén. pôtorka),<br />
viflorok.<br />
Pol. usterknqc' siç « trébucher » : usterk et usterka « ce sur quoi<br />
on trébuche, contrariété ».<br />
Tch. strëiti, strkati « pousser » : postrk « poussée », ûstrk « tracasserie,<br />
contrariété ».<br />
Slov. tfkali, trciti « pousser, heurter » : trk « choc, coup ».
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 249<br />
3° S.-cr. trcï-, trcali « courir » : trk et trka « course », pblrk, s/r&a<br />
« attroupement », Mrka « course sportive », zâlrka « élan, essor ».<br />
Le verbe ne se trouve qu'en serbo-croate et dans bulg. târël-,<br />
avec s.-cr. trcë-, tfkati « courir » et « faire courir », qui doit être un<br />
dénominatif de trk.<br />
Ces trois verbes se réduisent aisément à un seul, un verbe d'état<br />
*sturcati « être dressé, être saillant, avancer », d'où *turcati par<br />
réfection sur *istûrëati, avec un inchoatif * (s)tùrknçti, imperf.<br />
*(s)turkati «se dresser, pousser», le serbo-croate trcali «courir»<br />
dérivant de l'idée d'« avancer » ou « pousser ». Avec un sens initial<br />
« se dresser », le rapport paraît clair avec le nom de la « cigogne »,<br />
v. si. slruku.<br />
V. si. tlûkovati « interpréter » :<br />
V. si. tlûku. « interprète ».<br />
R. tolkovât' : lolk « sens », peretôlk, plur. rastôlki ; locution bez<br />
ûlolku « sans interruption » en regard de bezûtoloë', béztoloc' « ce<br />
qui n'a pas de sens, désordre ».<br />
Seulement vieux-slave et russe. Rapprochements vagues avec<br />
skr. tarkah « présomption », etc. Est-ce que v. si. tlûku ne serait pas<br />
un nom d'agent tiré du thème de llûëe- «piler, concasser» (§ 769)<br />
dans un sens figuré, comme prituca « comparaison, parabole » est<br />
tiré de tuk- «heurter» ? Cf. r. béztoloc', bezûtoloë' «ce qui n'a pas de<br />
sens, désordre » en regard de bez ûtolku « sans interruption ».<br />
tukati « tisser » :<br />
Slavon *çtuku, utùku «trame» (§ 1223).<br />
R. utôk « trame », et dotôk, is-, na-, pro-, vytok, zâiok, fém. dôlka<br />
et nedôlka, izôtka (istka), peré-, prô-, vô-, zâ-.<br />
Pol. wqtek, tch. ûtek, slov. vçtek et çtek.<br />
S.-cr. ûtak et polka, pôutka « trame », et adj. otak « facile à tisser »<br />
(§ 1219).<br />
Les postverbaux de tukati se rencontrent avec ceux de luknçti<br />
« heurter » (§ 800), les deux verbes étant sûrement de même origine<br />
(§ 465).<br />
V. si. tustali sg « se hâter » ( § 597) :<br />
Slavon russe (su-)tusnuii « être pénible » : v. r. tùska « anxiété »,<br />
r. toskà.<br />
Pol. tçskny « qui se languit » pour l'ancien teskny ; — tch.<br />
stesknouti si : stesk « chagrin, douleur », et leskny « triste », se<br />
rencontrant avec tës(k)nij «étroit» (§ 1070).
250 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
V. si. dlugu « dette » :<br />
S.-cr. dûg, odûziti « payer une dette » : locution za à(b)dugu,<br />
(Mugu) « à crédit ».<br />
Emprunt au germanique, got. dulgs (§ 73).<br />
V. si. trûgû « marché » :<br />
R. torg « marché, commerce », torgovdt' « commercer » : vytorg,<br />
de vfitorgovat' « gagner par le commerce ».<br />
Pol. larg, targowac' : przetarg « licitation ».<br />
Le mot *tûrgu est probablement un mot d'emprunt. A distinguer<br />
de *tïrg- «arracher» (§ 811).<br />
R. dial. korx « poing fermé » et « mesure de deux versok », en<br />
regard de v. si. krûs(ï)nja «poing» (§ 1087), et du verbe ukr.<br />
prykôrxnutysja « s'accroupir », bl.-r. prikorxnùc' « s'assoupir », qui<br />
répond à r. kornùt', prikornût' « s'accroupir pour faire un petit<br />
somme ».<br />
Il est aisé, pour la forme, de réunir les deux thèmes *kûrx- et<br />
krux- (§. 755), comme représentant le même degré réduit d'une<br />
racine unique (§ 117) ; et pour le sens s.-cr. krsiti « briser » signifie<br />
« crisper » dans krsiti ruke « tordre ses mains », comme lomili ruke,<br />
r. lomal' sebe ruki, et le dérivé s.-cr. krsnja est à la fois « bruit de<br />
brisure » et « crispation de la main ». Alors *kùrxu a signifié « main<br />
crispée », et *pri-kurxnçti « se recroqueviller » d'où « s'accroupir » ;<br />
et la forme r. pri-kornût' est un exemple du traitement ancien du<br />
groupe xn (§ 39), comme s.-cr. bûna sur bux- (§ 760) et trûn sur<br />
Irux- (§ 765).<br />
§ 815. S.-cr. drmati, drmnuti « secouer » ; — slov. dfmati, et<br />
drâmiti «secouer (du sommeil), éveiller» : drma «pâtée pour<br />
les bêtes ».<br />
A ce thème *drûm- doit se rattacher le slavon drûmû dans un<br />
exemple isolé (Mikl.), mais confirmé par bulg. dial. drâm et dârma,<br />
drâmka « fourré, buisson », et r. dial. drom « fourré », différent de<br />
drëm « forêt épaisse » (§ 749) et associé à burelôm pour désigner un<br />
fourré d'arbres abattus par la tempête ; voir § 1066.<br />
Racine isolée, d'intonation rude avec itératif à vocalisme radical<br />
-a- (§ 607).<br />
Y. si. dùme-, duti « souffler », imperfectif dérivé na-dymali :<br />
V. si. vûdumû « insufflation » (J. Ex.).<br />
R. vyduv sur vyduvât' (§ 761).<br />
Pol. dma « souffle du vent » et plur. dial. dmy « dunes », odma et<br />
rozedma « emphysème », vydma « gonflement » et « dune », de là<br />
ukr. vijdma.
[§ 800] VOCALISME RADICAL -tj- 251<br />
Tch. rozedma « emphysème ».<br />
S.-cr. nâdam « souffle ».<br />
Le tchèque podym et fém. podyma « fin brouillard, vapeur (après<br />
la pluie) » est, comme dymati « souffler sur le feu », rattaché à d^m<br />
« fumée », qui est indépendant de dume- (§ 433).<br />
Tch. hrnouti « amasser » : uhrn « somme, total », adv. ûhrnem.<br />
Thème *gurî-, v. si. grusiï « poignée » (§ 1169).<br />
V. si. krumiti « nourrir » :<br />
V. si. kruma « nourriture ».<br />
Y. r. kûrmu, prokormu ; r. mod. korm « nourriture, pâture »<br />
et kormâ « pâturage » (§ 826) ; dokôrm, is-, na-, o(b)-, ot-, po-, pere-,<br />
pri-, pro-, ras-, u-, vo-, za-, vykorm.<br />
Pol. karm (v. pol.,'et karm fém.), pokarm, przekarm, dial. ukarm<br />
« engraissement (du bétail) ».<br />
Tch. krm, pokrm, pred-, pri-, vy-.<br />
S.-cr. et slov. krma.<br />
Base *kurma, dérivé en -ma (§ 1067) sur la racine verbale de lit.<br />
seriù, sérti « donner à manger (aux bêtes), affourager », postverbal<br />
pâsaras « fourrage », et gr. xopoç « satiété », xopsvvujju « je rassasie ».<br />
Cette racine se rencontrait en slave avec celle de sere-, sïrati<br />
« cacare » (.§ 728), et le slave l'en a différenciée en recourant à la<br />
variante k- après s- (§ 12) de v. si. vùs-krumiti, tandis que le<br />
baltique qui a ser- « nourrir » n'atteste l'autre racine que dans le<br />
lette sàrni, masc. plur., « scories, saletés ».<br />
Un mot tout différent est v. si. kruma « poupe, gouvernail »,<br />
verbe krùmiii « gouverner, diriger » : r. kormâ, s.-cr. krma, et<br />
zâkrma « planche qu'on met sous la poupe », qui est un composé<br />
nominal et non un postverbal. Il est difficile de ne pas y voir un<br />
emprunt au grec 7rp6|j,v7), vulg. 7tptijj,7), avec déformation de prim-,<br />
*prïm- en *kûrm- par étymologie populaire.<br />
Pol. sionic' siç « se griller au soleil », slov. dial. solnéti « faire<br />
soleil, rayonner » : slov. soin « rayon dans l'œil ».<br />
V. si. mluviti « faire du bruit » :<br />
Y. si. mluva « bruit, tumulte ».<br />
R. môlvit' « parler » : molvâ « bruit, renommée » et dial. môlva<br />
« voix, parole » (et molvj) ; obmôlv, smolv, vymolv ; et smôlva<br />
« accord », v. r. sùmulva.'<br />
Pol. môwic « parler » (v. pol. molwic) : mowa « langage, parole »<br />
(v. pol. moiwa) ; namowa, nad-, ob-, od-, po-, pod-, prze-, przed-,<br />
przy-, roz-, u-, tv-, wy-, z-, za-.
252 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
Tch. mluviti « parler » : mluva « langage » et v. tch. mluv « parole » ;<br />
domluva, nâ-, o-, od-, po-, pred-, pH- et v. tch. prie-, pro-, roz-, s-,<br />
û-, vy-, za-, et masc. nemluva « celui qui ne parle pas ».<br />
Slov. môlviti« grogner, bruire », dial. muviti : mûv « mugissement »,<br />
mais rejoignant l'onomatopée.<br />
Inexpliqué.<br />
Y. si. puvaii « avoir confiance, espérer » :<br />
V. pol. pwac (mod. ufac) : pwa « espoir ».<br />
Slov. ûpati ( § 37) : ûp, zaûp.<br />
Inexpliqué.
CHAPITRE XVI<br />
POSTVERBAUX À THÈME DISSYLLABIQUE<br />
§ 816. Postverbaux des verbes en -tali. — Les verbes à<br />
redoublement en -tali (§ 562) sont sur thème dissyllabique, et de<br />
même leurs postverbaux.<br />
Voici ceux des verbes en -otati attestés directement ou indirectement<br />
en vieux slave :<br />
gogotati « caqueter, cacarder » : r. gôgot, slov. gogot.<br />
groxotati « gronder » : v. si. groxotu (Pand. Ant.) « bruit », r.<br />
grôxot « fracas », s.-cr. grôhot, slov. grohôt.<br />
klokotati « bouillonner » : slavon klokotû, r. klôkot, s.-cr. klôkôt,<br />
slov. klokôt.<br />
klopotati « faire du bruit » : v. si. klopotû « fracas », s.-cr. kVôpôt,<br />
slov. klopàt.<br />
kokotali « caqueter » : v. si. kokotu « coq », r. kôkot, s.-cr. kôkôt<br />
« coq » et kôkot « caquetage », slov. kokôt.<br />
lopotali « balbutier » : slavon lopotu, slov. lopôt, pol. iopot « bruit<br />
de battement d'ailes » (voir lepet-).<br />
r. troskotati « crépiter » : Irôskot « crépitement », et v. si. troskotu<br />
«une sorte d'herbe» (Upir', Cant. II, 2), s.-cr. trôskôt «renouée,<br />
chiendent ».<br />
slov. hobotâti « sonner creux » : hobôt « fruit creux », v. pol. chobot<br />
« culotte bouffante », et v. si. xobotu « queue », r. xôbot.<br />
En slavon :<br />
Tch. loskotati « craquer » : slavon loskotû « craquement », pol.<br />
ioskot, slov. loskàt « clapotis », etc.<br />
Slov. skrobolàti « bruire, froufrouter » : slavon skrobotu « bruit » ;<br />
et slov. skrobôt « clématite », § 1178.<br />
En russe :<br />
bormotât' « marmonner » : bôrmot et bormotâ.<br />
krop(o)tât' « être grognon » : krôpot et kropotd (§ 739).
254 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
rokotàt' « gronder » : rôkot.<br />
xoxotât' « rire aux éclats » : xôxot, slov. hohàt.<br />
En polonais : belkot « bredouillement », chichot « rire étouffé »,<br />
chrobot « craquement », furkot « frémissement », grzmol « bruit (de<br />
tonnerre) », hurkot « cliquetis », iomol « fracas », stukot « pétillement »,<br />
/upof « trépignement », turkot « bruit de roulement », warkot<br />
« grondement », etc.<br />
En tchèque : jâsot « cris de joie », rachot « bruit de roulement »,<br />
skripol « grincement ».<br />
En serbo-croate : glomot et sirbpot « bruit, tapage », sôpôf « bruit<br />
de source, chute d'eau », tôpët « piétinement », etc.<br />
En slovène : brbot « bouillonnement », éofô/ « flac (dans l'eau) »,<br />
fofôt « coup d'aile », hropàt « râle », ropot « tapage », etc.<br />
Pour les postverbaux féminins en -ota, ils se rencontrent avec<br />
les dérivés suffixaux en -ola, mais le russe maintient plus ou moins<br />
entre les deux types une différence d'accent (§ 900).<br />
Verbes en -eïati, en vieux slave :<br />
svepetali sç « s'agiter en tremblant », slov. svepetâti : svepèt<br />
« scintillement », et v. r. svepetu « miel » ou « ruche sauvage », v. pol.<br />
swiepiot, qui a dû désigner une ruche en forêt, suspendue et non<br />
dans un creux d'arbre.<br />
trepetati « trembler » : v. si. irepetû « tremblement », r. et bulg.<br />
irépet, s.-cr. trëpêt, slov. trepèt ; et ukr. trépet « tremblement » et<br />
trepéta «le tremble» (§ 827).<br />
xrepetali « hennir », slov. hrepeîâti « être enroué, toussoter » :<br />
hrepôta « toussottement » et r. xrepôta « toux », avec passage au<br />
type en -ota.<br />
Et kl(jjevetati « calomnier » ( § 563) : v. si. kl(jjeveta « calomnie »,<br />
r. klevetâ, s.-cr. klèveta.<br />
Dans les autres langues :<br />
Slavon russe krecetù « cigale », r. krécet « gerfaut », pol. krzeczot.<br />
Russe lepetât' « balbutier » : lé pet (voir lopot-) ; — strepetdt'<br />
« criailler » : slrépel « cannepetière ».<br />
Ukr. skverescâty « pousser des cris perçants », et bl.-r. : ukr. et<br />
bl.-r. skvéret «cris perçants», sur bl.-r. skvercîsja «crépiter» (§ 453),<br />
r. skvoréc « étourneau », § 835).<br />
S.-cr. lepètati « battre des ailes » : lëpël, klepètali « faire du bruit » :<br />
klëpët ; zvekètati « cliqueter » : zvëkët ; et trësët « sol spongieux,<br />
mousse, tourbe» (masc. et fém.), sur trésti se «s'agiter, trembloter».<br />
Slov. blebetâti « bavarder » : blebèt ; et ëekèt « gazouillis », pekèt<br />
« piétinement du cheval ».
[§ 817] POSTVERBAUX À THÈME DISSYLLABIQUE 255<br />
Verbes en -ïiaii et -utati, en vieux slave :<br />
klïcïtati « cliqueter » : v. si. klïëïtu « cliquetis ».<br />
mïcïlali « avoir des visions » : v. si. mïcïlû « vision », r. meclâ.<br />
sïpïtati « chuchoter » : r. sëpot, pol. szept, s.-cr. sapât, slov. sepèt.<br />
stïbïtati « gazouiller » et r. scebetâl' : r. sëébet, slov. sëebèt.<br />
skrïzïtati et skrûgulati « grincer » : v. si. skrïzïtû et r. skrézet,<br />
mais slov. skrgèt.<br />
V. si. xrïbïtu. « échine du dos » est d'autre origine (§ 1176).<br />
drugutati « frissonner » : s.-cr. drhat, slov. drgèt.<br />
rupûtati « murmurer » : v. si. rupûlu, r. rôpot.<br />
tùpûtati «piétiner» (Ham.) : v. si. tûpulû (Ham. 1814), r. tôpot.<br />
struputati « ne pas aller droit » : v. si. strùputû « difficulté »<br />
(Upir', Ham.).<br />
Dans les autres langues :<br />
R. klektât' « trompeter » : klëkt.<br />
S.-cr. bàhat « piétinement ».<br />
Slov. ihtati « sangloter » : ihet.<br />
On a aussi des postverbaux en -il :<br />
Pol. zgrzyt « grincement », de skrzyt, sur zgrzytac, pour v. si.<br />
skrïzïtati.<br />
S.-cr. gùrït « grognement du porc», sur guritati (et gurikati).<br />
Et en -ut :<br />
S.-cr. gûgût « roucoulement », sur gugutati (et gûkati) ; —- skàmût<br />
« jappement », sur skamùtati ; — skrgût « grincement », sur skrgutati<br />
(v. si. skrugûtati) ; —sàpûtn chuchotement », sur sapùtati, variantes<br />
de sapât, sâptati.<br />
§ 817. Autres formations. — Avec les autres verbes à redoublement<br />
(§ 555), on trouve les postverbaux :<br />
Y. si. plapolati « flamboyer » : tch. plâpol ; et v. si. klakolu<br />
« clochette », r. kôtokol ; v. r. poroporu et mod. prâpor « étendard ».<br />
V. si. -tçtunati « résonner » : tQlûnû « son », pol. ancien, tçten, r.<br />
tûten ; — v. si. bçbiïnû « tambour », pol. bçben, r. buben.<br />
V. si. glagolati « parler » : v. si. glagolû « parole », tch. hlahol.<br />
Ailleurs le verbe est un slavonisme, à accent altéré dans r. glagèlat'<br />
(§ 668) : glagôl « verbe »; mieux accentué dans s.-cr. glagàljati :<br />
glâgol « verbe », du slavon, puis du russe.<br />
Le nom de la « cendre », v. si. peptu, popelû (§ 80), r. pépel, s.-cr.<br />
pëpeo, slov. pepçl, doit être, sur un thème *pel- en rapport possible
256 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
avec polëti «flamber» (§ 1085), un ancien mot à redoublement,<br />
mais rien n'indique qu'il soit un postverbal, et c'est le verbe, r.<br />
pepel'd', etc., qui en est le dérivé.<br />
Avec des verbes suffixaux en -sati (§ 556), on a :<br />
Y, si. koposaii «exciter» (Yirg.) : koposu «prurit» (Virg.), et<br />
r. dial. kôpys « démangeaison, chatouillement » en regard du<br />
slavon kopysati « gratter (du sabot) ».<br />
Dans des emprunts au grec (§ 575) ; s.-cr. pàtosati « parqueter » :<br />
pàïos « plancher » ; pedepsati « châtier » : pèdepsa « châtiment »<br />
et ancien pedëps ; mirisali « sentir (bon) » : mïrïs « senteur, parfum »<br />
et bulg. miris, à côté de s.-cr. miriti : mîr (§ 798).<br />
De même avec d'autres verbes d'emprunt : vieux-serbe metehaii<br />
« avoir une participation » (gr. [xext/siv) : mèteh « terrain attenant,<br />
dépendance » (gr. ^STOXWV). Et en vieux slave le traducteur<br />
d'Hamartole rend xà xaT7jxoù|Asva « la catéchuménie » (galerie<br />
supérieure dans l'église) par katixa 513u, tiré directement du<br />
thème du verbe XOCTTJXSÏV.<br />
V. si. svoboda « liberté » est secondaire de svobodiïi « libérer »,<br />
dérivé de l'adjectif invariable svobodï « libre », sûrement emprunt<br />
au germanique (§ 277) : r. (o-)svobodit', svobôda, dial. et adv.<br />
svôbod', s.-cr. slobàditi, slobôda, slov. svobôda et fém. svobçd.<br />
V. si. kotora « dispute », r. kotorâ, est de même secondaire de<br />
kotorati sç « se disputer », tiré du pronom kotoryi « lequel » (§ 573).<br />
V. si. besëda « entretien, parole », verbe besëdovati, r. beséda,<br />
besédovat', s.-cr. bèsjeda, bèsjediti, slov. besëda, beséditi, est un composé<br />
obscurci (§ 1231), mais avec un postverbal dans :<br />
R. pobesédovat' : pobeséda.<br />
Le substantif v. si. rabota « servitude », r. rabota, s.-cr. rabota,<br />
présente l'accent d'un postverbal de rabotati (§ 900) ; et de même<br />
r. et ukr. zabôta « souci » en regard de. zabôtit' « inquiéter », mais<br />
c'est un ancien zobota, dérivé en -ota de zobati « picorer », r. dial.<br />
zobdt'sja « se ronger, se soucier ».<br />
Le serbo-croate dialectal gônëta « devinette » (usuellement zagônëtka)<br />
est en regard du verbe gonétati « deviner », perf. od-gonénuti,<br />
za-gonénuti ; un rattachement à gadati, ganati (§ 781) est difficile<br />
à expliquer, mais paraît pourtant s'imposer.<br />
De protiviti se «s'opposer» et suprotiviti se (§ 1222), le serbocroate<br />
ancien a les postverbaux protiva « opposition, chose<br />
contraire » et suprotiva.<br />
De v. si. peëalï « souci, peine », le bulgare tire le dénominatif<br />
peëéti- au sens de « gagner, amasser », et de là le postverbal peëdta<br />
« gain ».<br />
Pour le pseudo-postverbal v. si. poroda « paradis », voir § 824.
[§ 818] POSTVERBAUX À THEME DISSYLLABIQUE 257<br />
§ 818. Y. si. govoriti « faire du bruit » :<br />
V. si. govorû « rumeur ».<br />
R. govorll' « parler » : gôvor « bruit de paroles » et « parler, dialecte »,<br />
et dogovôr, na-, o-, ot-, po-, pod-, pere-, pri-, pro-, raz-, s-, u-, za-,<br />
vygovor.<br />
Tch. hovoriti « causer » : hovor et razhovor « conversation », et<br />
ancien masc. hovora « le bavard ».<br />
S.-cr. govoriti « parler » : gôvôr « parole » et dogovôr, ïz-, nà-,<br />
ôd-, pô-, prë-, pred-, prï-, prô-, raz-, u-, zâ-.<br />
Slov. gôvor et dogôvor, iz-, na-, o-, od-, po-, pre-, pred-, pri-, raz-,<br />
u-, z-, za-.<br />
En polonais, gwarzyc « causer » : g mar et rozgwar « bruit confus,<br />
brouhaha, bagarre », et gwara « dialecte ».<br />
La racine doit être *gu- (§ 430), d'où gov- et *guv-, avec élargissement<br />
en -or- et -ar- (§ 1123).<br />
S.-cr. tôvariti « charger » : tôvar « charge », utovâr « chargement,<br />
cargaison », islovâr, ôtovâr et stôvâr « déchargement », prelovâr<br />
« transbordement ».<br />
Base v. r. tovaru «bagages», emprunt au turc (§ 1128).<br />
S.-cr. zabôraviti «oublier», bulg. zab(o)râvi- : s.-cr. zàborâv<br />
« oubli » et bulg. zabrâva.<br />
Le verbe simple est s.-cr. boraviti « demeurer, séjourner », attesté<br />
depuis le xvi e siècle, qu'on retrouve dans bulg. borâvi- « s'occuper » ;<br />
on pense à une déformation expressive de bàviti se « demeurer,<br />
s'occuper » (§ 613), et il doit y avoir en effet quelque rapport avec<br />
byti « être » et son factitif bavili, puisque zabôraviti remplace v. si.<br />
zabyti « oublier ».<br />
Le moyen serbo-croate avait refait v. si. znamenije « signe »<br />
en postverbal znamen, zlamen, de znamenati «signifier» (§ 186).<br />
Allant plus loin, le slovène tire de znâmenje, znâmenjali un<br />
postverbal znâm, verbe znâmiti, et de zaznâmiti « marquer » les<br />
postverbaux zaznàm et zaznâma « marque, notation ».<br />
Sur le thème korak- déformé de krak- (§ 775), on a : r. korjâeit'<br />
et masc. korjâka, raskorjâka « qui marche les jambes écartées » ;<br />
s.-cr. korâciti et kôrâk « pas », ràskorâk « écartement des jambes » ;<br />
slov. korâëiti et korâk « pas ».<br />
De r. xrobostât' « résonner fortement » : xrôbost ; — et pol. szelest<br />
« bruissement » de szeleseicf szelesnqe.<br />
En regard des verbes en -kati, des formes nominales en -k- sont<br />
d'autant plus courantes qu'on doit les supposer pour une part<br />
à la base même des formes verbales (§ 560) : ainsi avec ëakati,
258 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
zvakati (§ 787), s.-cr. maùkati « miauler » et màûk « miaulement » ;<br />
de même s.-cr. jàukati « gémir » et jàuk « gémissement », slov.<br />
jâvkali et jâvk et jâvka, jçkali « pleurer » et jçk. Pour v. si. bykû<br />
« taureau », voir § 1037.<br />
Avec élargissement en -ov-, on a :<br />
R. stanovit' «mettre en place» : prislanôv «suspension» (priostanôvka).<br />
Tch. stanoviti « régler » : plur. stanovy « statuts ».<br />
S.-cr. ustanàviti « instituer » (ancien, puis russisme) : ustanova<br />
« institution », adapté de r. ustanovlénie ( § 825) ; — slov. ustanoviti :<br />
ustanôva. Voir stanu, § 789.<br />
Le serbo-croate, de daràvati, darivati «faire don» (§ 655), tire<br />
darov (ancien) et dàrïv, et de cjelàvati, cjelivati « donner des baisers »<br />
( § 656) il tire cjëlôv et cjèlïv « baiser », tandis que le russe fait<br />
pocelûj sur le présent pocelûe- de pocelovât'.<br />
Le polonais, de budowac « bâtir », dérivé de buda « baraque »,<br />
emprunt à ail. Bude, a budowa, obudowa, odbudowa, przebudowa,<br />
zabudowa.<br />
Des postverbaux se tirent d'itératifs ou imperfectifs dérivés en<br />
-liait. Mais le slovène, qui a normalement zahiçva de zahtévati<br />
(§ 731), reporte -va sur le postverbal du verbe simple : hotêva en<br />
regard de hotéti. Il a izpeljdva, na-, etc., de (iz-)peljâvati (§ 805),<br />
et izdeldva « élaboration » de izdeldvati, mais aussi délava « façon<br />
d'agir» en regard de délati (§ 749) ; iziskâva, obiskâva, preiskâva<br />
de (iz-)iskdvali, mais aussi iskâva en regard de iskati (§ 797);<br />
izmenjâva « échange » de izmenjâvali, et menjâva « change » de<br />
ménjati ; également izgovarjâva « prononciation » de izgovârjati,<br />
et -va se transforme ainsi en suffixe de dérivation -ava (§ 1187),<br />
qui apparaît comme pur suffixe dans izkusnjâva « tentation »,<br />
élargissement de izkûsnja «expérience» (§ 1090) —• mais avec<br />
variante izkusâva de izkusdvati.<br />
§ 819. Postverbaux sur thème réduit. — Le verbe skr. dâdhâti<br />
« il pose », aor. ddhât, si. dëti, lit. dëti, apparaît, comme second<br />
terme de composé, réduit à -dh- dans diverses formations, comme<br />
samdhih « jonction » et samdhâ « convention ». On trouve également<br />
en baltique lit. indas et indà « vase », samdas « location, bail »,<br />
izdas « trésor », dial. nuodaï, plur., « poison », et ancien nuodzia<br />
« péché » en regard de nusidëti « pécher ».<br />
Le slave a de même v. si. sgdu «vase» et «jugement» (§ 766),<br />
composé nominal (§ 1222), et aussi l'adjectif tch. sudy «pair»,<br />
slov. sçd (et sçdev), qui a signifié «apparié, accouplé» (§ 1182) ;<br />
— çda (Ham.) et çdica «hameçon», r. udà, pol. wçda ; — obïdo<br />
« trésor, richesse », et « riche vêtement » (Ham.), exceptionnel
[§ 819] SUR THÈME RÉDUIT 259<br />
par son genre neutre (§ 826) et par la conservation de la forme<br />
ancienne obï- du préfixe (§ 89).<br />
On pourrait penser à joindre à ces mots l'adverbe v. si. jçdë<br />
« se tenant, tout près », et « du dedans, de la maison » dans le slavon<br />
jçdëcçdïnu (§ 1215), en y voyant le locatif fixé d'un composé<br />
répondant à lit. ihdas, de même que le latin archaïque endo<br />
« dedans » pourrait être une forme nominale fixée en regard de<br />
indô, indere « mettre dedans » : ce serait un composé antérieur<br />
au passage slave de in- à vun-, d'où g- ; mais une hypothèse<br />
différente est possible (§ 1003).<br />
Un postverbal v. si. prinada « adjonction » (Izb. Svjat.), avec<br />
verbe prinaditi, apparaît clair à côté de pridëti « appliquer,<br />
apporter ». On a également :<br />
S.-cr. nâda (et usuellement nàdo, § 1002) « acier », verbe nâditi,<br />
slov. nâd « acier » et nâda, nâdo « couche aciérée » ; et d'autre part :<br />
S.-cr. nâd et nâda (et ancien nad, fém.) «espoir», verbe nâdatise,<br />
pour v. si. nadëjaii sç, slov. nâdejati se et subst. nâda et nâdeja<br />
(§ 751).<br />
Tch. vnad et vnada « amorce », verbe vnaditi « amorcer », et<br />
ndvnada sur navnaditi.<br />
Une autre réduction de dëti à d- est supposée par pol. (nie)<br />
dbaé, tch. nedbati « négliger », tirés de nedba, et ned-ba de v. si. ne<br />
dëjali (§ 573).<br />
Cet élément réduit d- pourrait venir de dati aussi bien que de<br />
dëti, et en baltique on ne peut pas reconnaître si nuodal « poison »<br />
est tiré de -duoti ou de -dëti, si prièdas « supplément » est pour cette<br />
raison à séparer de indas, etc. Mais dans v. tch. duchoprod« simonie »<br />
on reconnaît à coup sûr prodati « vendre », et pridati dans s.-cr.<br />
prid et prîda « ce qu'on donne en plus, agio ». Par contre, slov.<br />
prid «profit» n'est pas séparable de s.-cr. prûd (§ 758), qui est<br />
un emprunt à l'italien prode.<br />
La racine i.-e. *st(h)â- a aussi ses dérivés sur thème réduit :<br />
skr. antara-sihah « qui se tient à l'intérieur » ; lit. âpstas « abondance<br />
», apstùs « vaste, riche » de apstôti « se tenir autour, entourer »,<br />
atstùs « éloigné ».<br />
En slave prostu « qui se tient droit ». Le verbe r. zâstit' « ôter<br />
le jour », dial. zâstovat', et bl.-r. zâscic', qui n'a évidemment aucun<br />
rapport avec v. si. siënï « ombre », suppose un adjectif semblable,<br />
*zastu « qui se tient en travers » (zastati). Et v. si. prisnu « légitime,<br />
proche » doit représenter *prist-nu, sur un composé *pri-stu « qui<br />
se tient près » (§ 1071) ; e£ voir v. si. prustu « doigt », § 1161.
260 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
LES ADJECTIFS<br />
§ 820. — L'adjectif, à l'origine, ne se distinguait pas pour<br />
la forme du substantif (§ 273). On trouve des adjectifs tirés de<br />
thèmes verbaux, comme des substantifs postverbaux.<br />
Vocalisme radical -o- :<br />
R. kosôj « oblique », pol. kosy, etc., est sur le thème de cesati<br />
« peigner » (§ 723), en partant de l'idée de prendre de biais, effleurer,<br />
toucher (kosnçti) ; pour r. kôsvennyj, voir § 1097.<br />
V. r. pologu « en pente », r. polôgij et otlôyij, est sur le thème ley-<br />
(§ 726).<br />
Le polonais a stromy « escarpé », et cf. r. strômkij « haut, escarpé »,<br />
en regard du slavon u-strïmnçti « s'élever à pic », v. si. u-strïmiti sq<br />
« se précipiter » (§ 734) ; l'adjectif est ailleurs s.-cr. strm, etc., v. si.<br />
slrïmï, adv. (§ 1199).<br />
Y. si. xromu « boiteux », xromiti « faire boiter », offre avec<br />
l'inchoatif xrumnçli « devenir boiteux » une alternance qui prouve<br />
peu (§ 616) ; l'adjectif peut être tiré du verbe factitif, et celui-ci<br />
emprunté au germanique, got. us-hramjan «crucifier» (§ 37).<br />
Un jeu d'alternances apparaît avec skoru « rapide » en regard de<br />
lit. skêrys «sauterelle» et de gr. crxatpco «je saute».<br />
Moins clairement avec v. si. sporu « abondant », r. spôryj<br />
«avantageux» (§ 742), dont le lien avec skr. sphirâh «riche» et<br />
avec le thème de spë(ja)ti «prospérer», skr. sphâyati «il profite»<br />
(§511), n'est qu'une possibilité (§ 1112).<br />
Pour v. si. golû « dénudé », avec son dérivé golutï « glace » (§ 189),<br />
son rattachement, et celui de v. si. glava « tête » (§ 1185), au lette<br />
gala « verglas », gàle « couche de glace », et à v. h. a. kalo « chauve »<br />
(de *kalwa-) est assuré.<br />
R. pôlyj « ouvert, libre », à côté de v. si. polje « espace découvert,<br />
plaine », peut remonter à un thème *pal(h)~, voir § 1021.<br />
Quant à l'adjectif bosu « pieds nus », il est ancien, lit. basas,<br />
v. h. a. bar (de *bhosô~), mais isolé.<br />
Et novu « nouveau » est i.-e. *newo- (§ 48), hitt. newas, gr. véoç,<br />
et sûrement un dérivé thématique en -o- de l'adverbe *nû « maintenant<br />
» (§231).<br />
Pour plosku « large, plat », voir § 1065 ; et pour prostu, § 819.<br />
Il y a deux types d'accent (§ 298) : cak. bôs, neutre bôso, et gôl,<br />
neutre golô.<br />
Vocalisme radical -ë- :<br />
L'alternance est claire dans lëpu « qui convient, beau », verbes<br />
lëpili «coller» et pri-lï(p)nçti «se coller» (§ 745).
[§ 820] LES ADJECTIFS 261<br />
Elle peut être secondaire et analogique dans slëpu « aveugle »,<br />
verbes slëpiti et o-slïpnçti, et le thème pourrait avoir été *slëp-<br />
(§ H7).<br />
La comparaison la restitue dans le slavon (d)zëlu « violent »,<br />
v. si. dzëlo « fortement » : lit. gailas « violent », v. h. a. geil « exubérant<br />
» de g ail-, et g il- en nordique.<br />
Et dans le slavon pëgu « tacheté », r. pégij « (cheval) pie », et le<br />
substantif s.-cr. pjëga « tache de rousseur », slov. pèga, tch. pïha<br />
d'intonation rude (§ 708), en regard de lat. pingere «colorer,<br />
peindre », sur racine *peig- d'intonation douce.<br />
La comparaison restitue seulement le vocalisme radical *-aidans<br />
blëdu « pâle, blême », d'après v. angl. blât de *blaita-, et dans<br />
v. si. sëdu « grisonnant », sëru « gris », d'après les formes tch.<br />
sedy, sery du groupe slave septentrional (§ 1113).<br />
L'adjectif sëdu peut être un dérivé suffixal en -d- (§ 1001),<br />
l'adjectif sëru un emprunt au germanique *haira~.<br />
L'adjectif cëlu « sain » peut être aussi un emprunt au germanique<br />
*haila- (§ 10).<br />
On ne connaît pas exactement l'origine de v. si. krëpu « ferme »<br />
(et krëpuku, § 983), ni celle de *gnëdu « de couleur brune » et du<br />
slavon smëdù «brun, basané » (§ 1001).<br />
Dans bëlû « blanc », on peut reconnaître un dérivé suffixal *bhë-lo-<br />
(§ 298), et dans lënu «paresseux» un dérivé en *-no- (§ 1071).<br />
Pour nëmu « muet », voir § 118.<br />
Vocalisme radical -u- :<br />
On a plusieurs formes à alternance :<br />
suxu « sec » et suxnçti, lit. saùsas (§ 755).<br />
rudu « ronge » et rudëli sg, lit. raûdas (§ 756).<br />
gluxu « sourd » (§ 1138) et o-gluxnçli (§ 495).<br />
Tch. kruchy « friable » et thème krux- (§ 755).<br />
Et xudu « petit, chétif », rattaché à skr. ksôdaii, ksudrdh (§ 10).<br />
L'adjectif rusu «blond» est un dérivé en -su (§ 1136) ; puslu<br />
« désert » est sûrement un dérivé en -lu ( § 758) ; et de même sans<br />
doute Ijutu «violent» (§ 468); bui «exubérant» peut être un<br />
dérivé en *-yo- (§ 957) ; junu « jeune », lit. jdunas, est une formation<br />
ancienne qui suppose un élargissement en -n- (§ 1070).<br />
On n'analyse pas *sutu «sans corne» (§ 1159); r. xmûryj<br />
« sombre » est isolé ( § 760) ; Ijubu « aimé » doit être un emprunt<br />
au germanique (§ 759). '<br />
Pour l'adjectif pronominal drugyi, voir § 257 ; et pour ludu<br />
« fou », § 768.
262 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
§ 821. Vocalisme radical Q :<br />
*Krçtû « raide » est sur le thème krçt- (§ 762) ; Içku « tortueux »<br />
sur le thème Içk-, tçgu « bien tendu, vif » sur le thème tçg-, et s.-cr.<br />
prûg « allongé », r. uprûgij « élastique », sur le thème preg- (§ 763).<br />
Skçdu « indigent » est en alternance avec stqdëti « épargner »<br />
(§ 764).<br />
*Krçpu, pol. krçpy « ramassé, trapu », paraît inséparable du<br />
thème krup- (§ 756).<br />
V. si. grçbu « grossier », r. grûbyj, etc., est tiré d'une forme à<br />
infixe nasal, lit. grumbù, grùbti «devenir raboteux», adj. grubùs<br />
« rude »(§ 450).<br />
Avec *tçpù « émoussé », r. tupôj, etc., on n'a pas de rapprochement<br />
sûr ; skçpu « avare, mesquin », v. si. skgpë (Pand. Ant.), adv., est<br />
isolé; et de même s.-cr. rûd «crépu», slov. rçd (§1001), est<br />
inexpliqué.<br />
Pour kçsu « qui a la queue coupée », c'est un dérivé en -sû<br />
(§ 766).<br />
Vocalisme radical *-al-, *-ar- :<br />
V. si. sragu « terrible, sévère » peut se rattacher au thème *sterg-<br />
(§ 775) ; sudravu « en bonne santé » est sans doute un postverbal<br />
de su-dravili (§ 1182).<br />
Y. si. blagu « bon » et dragu « cher » doivent être des dérivés en<br />
-gu. (§ 289) ; mladu « tendre, jeune » est une forme à élargissement<br />
en -d- ( § 772) ; plaxù « inquiet, peureux » pourrait être un dérivé<br />
en -xû, mais on ne reconnaît pas le thème de base (§ 1138) ; vranu,<br />
adjectif « noir » et substantif « corbeau », ne s'analyse pas (§ 1071).<br />
Vocalisme radical -a- :<br />
Slabu « faible », s.-cr. slàb, est comparé à got. slëpan « dormir »,<br />
ce qui indique une alternance ë : ô, à côté de -o- dans v. h. a. slaf<br />
«flasque » (§ 782).<br />
Radu « disposé à, content », s.-cr. ràd, doit répondre au gotique<br />
ga-rëdan «prendre soin» (§ 774).<br />
*Krasu « beau » (§ 289) pourrait être en rapport avec un thème<br />
*krës- (§ 783).<br />
Nagu «nu» est un adjectif d'origine indo-européenne, à thème<br />
*neg- dans hitt. neku-, *nog- dans skr. nagnâh, got. naqaps, et<br />
*nôg- dans lit. nûogas, lette nuôgs ; la forme balto-slave est *nôgd-,<br />
ancien oxyton avec métatonie sur intonation rude (§ 298), s.-cr.<br />
et slov. ndg, tch. nahy.<br />
L'adjectif pronominal samu « (lui-)même », s.-cr. sâm, sâmo,<br />
r. samô, oxyton, doit être à l'origine un premier terme de composé<br />
(§ 256) à allongement (§ 1220).
[§ 820] LES ADJECTIFS 263<br />
Slaru. « vieux » doit être un dérivé en -ru (§ 1112) ; malu « petit »<br />
pourrait être un dérivé en -lu (§ 1048), et ranû «de bon matin»<br />
un dérivé en -nû (§ 1071).<br />
Tch. chaby « abattu », v. r. poxabû « égaré », est sûrement un<br />
emprunt au germanique» (§ 782).<br />
Vocalisme radical -i- :<br />
Blizû « près », adv., est un ancien adjectif en *-u- qui se rattache<br />
au thème du lette bliêzt (§ 275).<br />
Lixû « de reste » est un dérivé en *-so- (§ 1138) ; milu « digne<br />
de pitié » et « cher », un dérivé en *-lo- (§ 1048) ; zivû « vif » un très<br />
ancien dérivé indo-européen en *-wo- (§ 1182).<br />
Tixu « calme » est inexpliqué ( § 609) ; sirû « orphelin » ne s'analyse<br />
pas (§ 1112).<br />
Vocalisme radical -y- :<br />
Pronyrû « pervers » est sur un thème nyr- qui peut être en rapport<br />
d'alternance avec le thème nur- (§ 802).<br />
*Xylu, slavon poxylû « courbé », doit être un dérivé en -lu<br />
(§ 757) ; et *lysu, slavon vûzlysù « chauve », pourrait être un dérivé<br />
en *-so- (§801).<br />
Syrû « vert, cru » ne s'analyse pas sûrement (§ 1112).<br />
Sytu « rassasié » est postverbal de na-sytiti, emprunt au germanique<br />
(§ 618).<br />
Vocalisme radical -ç- :<br />
R. Ijdkij « recourbé » est une variante secondaire de Içku, et<br />
le slavon netçgû « sans travail, oisif », sur lezali « travailler », est<br />
à côté de tçgu « tendu >>.(§ 763).<br />
Svçtù « saint » a l'aspect d'un adjectif verbal en -lû (§ 1159).<br />
R. rjabôj « tacheté » est une réduction de *jarçbû (§ 999).<br />
Vocalismes radicaux -ï- et -û- :<br />
Pour *dïrzu « hardi » en regard de *dïrznçti « oser », voir § 494 ;<br />
pour s.-cr. mrk « sombre », § 771 ; pour *scïrbû « amputé », § 810 ;<br />
pour strïmû « escarpé », et sa variante pol. stromy, § 820.<br />
*Dïlgû «long» apparaît comme mot à suffixe -gû (§ 289) ; et<br />
*skvïrnu « sale » comme dérivé en -nu (§ 1071).<br />
Zûlu « mauvais » offre le degré réduit d'une racine représentée<br />
en baltique par le letteszvel'u, zveît «rouler, déplacer», zvaîns<br />
« chancelant », lit. pazvilo « il s'est incliné », pazùlnus « incliné »<br />
et zùlas « rude, grossier », en indo-iranien par skr. hvdrate « il se<br />
courbe, il dévie », av. zurah- « injustice, tromperie ».<br />
V. si. grûdû «^arrogant », r. gôrdyj, etc., est inexpliqué.
264 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
Thèmes dissyllabiques. L'adjectif gotovu « prêt » est le postverbal<br />
du verbe gotoviti, emprunté au germanique (§ 573).<br />
Le serbo-croate dialectal stàmen « stable » peut être secondaire<br />
du verbe u-slameniti, et ce verbe être le dérivé d'un substantif en<br />
-men- (§ 186) ; et le russe dialectal stdmo «qui se tient droit»,<br />
subst. stamik « montant », pourrait être une réduction de ce thème<br />
slarnen-.<br />
L'adjectif *jarçbu « moucheté » (§ 1156) est à côté du substantif<br />
jarçbï « perdrix » (§ 999), comme r. golubôj « bleu » à côté de golçbï<br />
« pigeon » (§ 169).<br />
Pour v. r. pelesu, r. pelësyj « tacheté », voir § 1136.<br />
Les nombres collectifs duvoje, cetvoro, etc., qui sont des adjectifs<br />
neutres, sont des dérivés thématiques en -o- des noms de nombre<br />
(§315).<br />
Avec obïlû « rond » ( § 777), çtïlû « percé » (§ 1223), on entre dans<br />
les types d'adjectifs composés, formations à préfixe (§ 1219) et<br />
composés possessifs (§ 1227).
CHAPITRE XVII<br />
LES POSTVERBAUX. VUE GÉNÉRALE<br />
§ 822. Le postverbal. — Le postverbal est une formation<br />
nominale bâtie directement sur un thème verbal, sans dérivé<br />
suffixal : en français « taper » et « la tape », en latin pugnâre et<br />
pugna (§ 721).<br />
De la même façon, en latin, lucta « lutte », qui est tardif pour<br />
luciâtiô du latin classique, sort de ludârï « lutter », et *fatïga<br />
« fatigue » du bas-latin des langues romanes sort de fatïgâre en se<br />
substituant à fatîgâliô. Le polonais swada « facilité de langage,<br />
verve » est le latin suâda dont Ennius avait fait le nom de la déesse<br />
« Persuasion », mais qui a dû être recréé librement comme postverbal<br />
de suâdere. Le bas-latin se prête à ce genre de formation, et<br />
le glossateur tchèque qui veut rendre ztrâta « perte » n'hésite pas<br />
à créer perda directement sur perdere, pour ital. perdita, etc.<br />
Aussi les langues romanes sont pleines de postverbaux : en<br />
français « casse » sur « casser », « pile » (rossée) sur « piler », « réforme »<br />
sur « réformer », « passe » et « repasse » sur « (re)passer », etc. La<br />
langue des sports d'hiver a apporté « la glisse » pour dire comment<br />
les skis glissent sur la neige : n'est-ce pas aussi bien que<br />
« glissance » ? Les langues germaniques abondent également en<br />
postverbaux : en allemand Schlag, Ausschlag, Einschlag, Vorschlag,<br />
Zuschlag sur schlagen « frapper ». En anglais, avec la réduction des<br />
finales, couramment nom et verbe ne se distinguent plus que par<br />
leurs emplois : drink « boisson » et io drink « boire » ; il y a simple<br />
« conversion » du verbe en nom, et inversement.<br />
§ 823. Origine et développement des postverbaux. — Ce sont<br />
initialement des dérivés sufïïxaux en *-o- et en *-â- sur des thèmes<br />
aussi bien nominaux que verbaux. Les dérivés thématiques de<br />
l'indo-européen présentaient des vocalismes radicaux divers :<br />
vocalisme -e-, ainsi gr. TOSOV « sol », (^SPYOV « travail » ; vocalisme<br />
réduit, ainsi gr. Çuyov « joug »,
266 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
a le masculin podû (§ 744), il a gardé le neutre igo isolé du verbe<br />
lit. jàngti « atteler » sur lequel est refait jùngas (§ 445), et il répond<br />
à skr. sphurâti « il pousse du pied » par pire-, pere- à postverbaux<br />
en -porû (§ 728).<br />
L'importance du vocalisme -e- à date ancienne se reconnaît<br />
en particulier dans les dérivés thématiques en -ero- et -lero- de<br />
thèmes en -r- (§ 1119). Il y a un petit groupe d'adjectifs de date<br />
indo-européenne à vocalisme radical -e- : gr. véoç « nouveau »,<br />
evoç « vieux », Asuxoç « brillant, blanc », etc. Ce type est représenté<br />
en germanique : got. liuts « hypocrite » en regard de lulôn « tromper »,<br />
diups « profond » en regard de daupjan « immerger, baptiser »,<br />
liufs « cher » en regard de ga-laubjan « croire ». En baltique, le<br />
lituanien laûkas « qui a une tache sur le front » peut répondre à gr.<br />
Xsuxoç (§ 801), mais sans conservation du vocalisme radical -eu-.<br />
En slave, en dehors de l'ancien *newo- passé à novii (§ 820), le<br />
vocalisme radical -e- ne se rencontre pas dans les adjectifs, ce qui<br />
est une preuve de plus que Ijubù est un emprunt au germanique<br />
(§618).<br />
Entre nom et verbe, des rapports se sont établis avec différenciation<br />
des thèmes : gr. Xsyco « je dis » et Àoyoç « parole », avec préverbe<br />
SraXéyw et StàXoyoç, èmXéycù et STOAOYOÇ, etc. Le vocalisme radical<br />
-o-, en alternance avec -e- ou le degré réduit, est devenu une<br />
caractéristique du type des postverbaux : gr. Tpé^o «je tremble »<br />
et Tpofxoç « tremblement », àsiSo) « je chante » et àotSoç « aède »,<br />
7tvso> «je souffle» et TCVOT) «souffle», cnrsôSw «je me hâte» et OTTOOST)<br />
« hâte », etc.<br />
En latin, l'alternance est mal conservée, mais elle est également<br />
attestée : tegô « je couvre », et toga « vêtement, toge ». Elle est vivace<br />
en germanique, encore vivante en allemand, du moins dans les<br />
formations à préverbe : got. siggwan « chanter » et saggws « chant »,<br />
ail. singen et Sang, dringen « presser » et Drang « presse », andringen<br />
« affluer » et Andrang « affluence » ; got. steigan « monter » et staiga<br />
« sentier, chemin », ail. spreehen « parler » et Spraehe « parole »<br />
(v. h. a. sprâhha), auspreehen « prononcer » et Ausspraehe « prononciation<br />
».<br />
En balto-slave, elle a été largement productive, et elle apparaît<br />
en slave, ainsi que dans les langues baltiques, dans des formations<br />
très nombreuses, comme l'a montré l'étude de détail des<br />
postverbaux.<br />
§ 824. Évolution et extention des postverbaux. — Mais si représentée<br />
qu'elle soit encore sous les différentes formes qu'elle a prise,<br />
e : o, ï : ë, û : u, ç : ç, *ïl : *al et *ïr : *ar, ë : a, l'alternance a cessé<br />
de jouer, ou ne joue plus dans des formes à préverbe nouvelles que<br />
par imitation des formes anciennes, par exemple en tchèque dans
[§ 824] VUE GÉNÉRALE 267<br />
vzpor « redressement » créé au xix e siècle sur vzepriti se « se dresser »<br />
d'après opor, odpor, v. si. poduporû « soutien » (§ 728). Comme dans<br />
le cas des factitifs en -iti (§ 616), le vocalisme radical -o- se perd,<br />
et le postverbal se tire de n'importe quel thème verbal : de dere-,<br />
dïrati et dire-, *derti «déchirer», ou a -dorû ancien, lit. -doras, et<br />
-dir- sur l'imperfectif dérivé -diraii, tch. -dër- sur -dirati (de v.<br />
tch. -ie-), et -der-, -dïr- (§ 728). Ces formes à vocalisme nouveau<br />
sont naturellement les plus nombreuses, et elles représentent le<br />
type vivant et toujours très productif.<br />
De la productivité du type ancien, on trouve des exemples, et<br />
abondants, comme les 18 postverbaux en -nos du russe, autant que<br />
de formes à préverbe de nesti «porter» (§ 723); et du type<br />
nouveau, sur r. lésât' « tailler à la hache », 16 postverbaux en<br />
-tes, -tes (§ 804) ; sur r. govorît', 14 postverbaux en -govor, et 13<br />
en slovène, 12 en serbo-croate (§ 818), tous postérieurs au vieux<br />
slave et au passage de govoriti « faire du bruit » au sens de « parler ».<br />
Un thème leg- est un emprunt au germanique ; il a été aussitôt<br />
pourvu de postverbaux et n'a pas cessé de s'en enrichir, en -log-,<br />
puis en -leg-, en -lag-, en -lëg-, même en -Iqg- (§ 726).<br />
Les postverbaux se créent quand la langue en a besoin, langue de<br />
la culture, des techniques, des sports, et les sens sont comme les<br />
formes d'époques différentes. Ainsi pour les postverbaux de reëe-<br />
(§ 726), et le slovène, que ses grammairiens et lexicographes ont<br />
richement doté de postverbaux, n'a eu aucune peine à se procurer<br />
prorèk et porèk, « majeure » et « mineure » de syllogisme.<br />
Et les postverbaux se calquent : l'allemand Einfluss « influence »<br />
est transposé en pol. wplyw, s.-cr. ùpliv, slov. vpliv (§ 730), et tch.<br />
vplyv supplanté par vliv (§ 729) d'après r. vlijânie calqué de façon<br />
indépendante sur le français. De même s.-cr. ûlïsak « impression »<br />
(§ 797), qui est nouveau (xix e siècle), est avec slov. vtisk un calque<br />
de lat. impressiô, fr. « impression », ail. Eindruek, et c'est en même<br />
temps une adaptation en postverbal (§ 826) du russe vpecatlénie,<br />
par substitution de liskati « imprimer » à l'emprunt désuet pèëatati ;<br />
le mot russe, lui, est comme lat. impressiô un calque du grec<br />
êvi;ii7rcùcriç.<br />
Antérieurement, en slave commun, le type des postverbaux<br />
avait fourni un modèle pour l'adaptation de substantifs athématiques<br />
ou de forme anomale : on voit l'ancien thème en -r : -nlit.<br />
vanduô aboutir en slave à voda (§ 176). Mais il ne s'agit pas<br />
d'une transformation simple de ces substantifs en postverbaux,<br />
et pour une partie d'entre eux des dérivés en -â- sont attestés<br />
dans d'autres langues (§/708). Plus tard, à l'époque des emprunts<br />
chrétiens, le grec TOxpctSsicroç, lat. paradisus, se trouve par étymologie<br />
populaire ou semi-savante adapté en v. si. poroda et,<br />
rejoignant les postverbaux de roditi (§ 738), le «paradis» devient<br />
« (re)naissance ».
268 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
§ 825. Forme des postverbaux. — Le vocalisme radical -o- est<br />
caractéristique des postverbaux anciens, mais également des<br />
itératifs et des factitifs : v. si. nesti, itératif nositi, pri-nositi, etc.,<br />
et postverbaux pri-nosû, etc. Il en résulte que pri-nosu est à la<br />
fois le postverbal de pri-nesti et celui de pri-nositi, et c'est dans<br />
le rapport nouveau entre le postverbal et l'itératif ou factitif<br />
que le type des postverbaux à vocalisme radical -o- a poursuivi<br />
sa vitalité.<br />
Mais en même temps pri-nositi est dénominatif de pri-nosu.<br />
Un verbe peut être à la fois, simultanément ou successivement dans<br />
le temps, la base d'un postverbal et le dénominatif d'une forme<br />
nominale (§ 721). S'il y a préverbe, c'est qu'il y a intervention<br />
d'un verbe, et qu'il y a ou qu'il y a eu postverbal. Ce n'est pas<br />
absolument sûr, puisqu'au lieu d'un préverbe on peut avoir affaire<br />
à un premier terme de composé nominal (§ 1219), mais ordinairement<br />
on reconnaît sans difficulté le préverbe, donc le postverbal<br />
de la forme à préverbe.<br />
Le postverbal se tire librement du thème verbal, monosyllabique,<br />
dissyllabique ou même polysyllabique : s.-cr. zàborâv « oubli »,<br />
de^zabàraviti «oublier» devenu indépendant de boraviti (§ 818).<br />
Il suit la modification du thème : le russe donnant à pùdit' « effrayer »<br />
un itératif nouveau pugdt', il lui donne en même temps 10 postverbaux<br />
sur thème pug- pour pçd- des autres langues (§ 766) ;<br />
et à pustit' « laisser aller », imperf. puskât', 16 postverbaux sur<br />
thème pusk- à côté de pust- slavon (§ 758). Le serbo-croate fait<br />
sur v. si. pritûca « parabole » un verbe priëati « raconter », comme<br />
l'italien et le français « parler » de parabolâre, et sur ispricati<br />
«excuser» un postverbal Isprika «excuse» (§ 797).<br />
Les postverbaux nouveaux se tirent de tous les thèmes verbaux :<br />
de thèmes d'itératifs ou imperfectifs dérivés en -vati, mais également<br />
de thèmes en -jati, et alors, dans des cas comme v. si. staja « lieu<br />
de stationnement», slov. do-stâja, etc. (§ 791), on peut aussi bien<br />
parler de dérivés sufFixaux en -ja que de postverbaux sur -jati.<br />
On a de même r. (po-)terja dont on peut seulement dire qu'il est<br />
en regard de terjât', et slov. et s.-cr. pelja en regard de petjati<br />
(§ 805).<br />
On a slov. -sâj de -sâjati, v. si. -sazdati, s.-cr. sâdati (§ 776) ;<br />
vâtj de vâljati (§ 777), et pol. zal, uzal, masculins du type mouillé,<br />
sur zatic siç, remplaçant au féminin zatï (§ 788). Et aussi bien slov.<br />
osnûj « trame » sur le présent osnùje- de osnovâti (§ 743), r. pocelûj<br />
«baiser» sur le présent pocetûe- de pocetovdt' (§ 818).<br />
On ne cherchera pas dans r. (vy-)uc (§ 755) le suffixe i.-e. *-yo- :<br />
c'est une forme toute récente, pour -uk, sur ucit', et (û-)derz sur<br />
derzât' (§ 809), slov. (zd-)sluz sur slûziti (§ 759), izlgc sur -Içciti<br />
(§ 763), (o-)pâz sur pâziti (§ 783) ; avec l'alternance c, z dans les
[§ 824] VUE GÉNÉRALE 269<br />
itératifs, s.-cr. mïce (plur.) sur mïcati (§ 800), slov. drza sur drzati<br />
(§ 809), potèz et potçza sur Içzati (§ 763).<br />
Le postverbal, qui altère si complètement le thème verbal dans<br />
s.-cr. isprika sur v. si. prilùëa, peut même le mutiler : r. nèprja<br />
de prjad- (§ 808).<br />
Il y a tout un groupe de postverbaux nouveaux qui sont refaits<br />
sur le thème en -n- des Verbes en -nçti :<br />
r. vygin, vygina pour -gib-, sur -ginât' pour -yibât', et d'autre part<br />
ukr. zahyn, tch. (zâ-)hyn, slov. poyîn sur gynçti pour -gyb- (§ 754) ;<br />
tch. ûhrn, sur hrnouti, thème *gurt- (§ 815) ;<br />
pol. skin, tch. (po-)kyn, de -kynçti, pour -kyv (§ 802), et d'autre<br />
part tch. vykyn, de kynouti, pour -kyp•(§ 778) ;<br />
pol. obwin, tch. (nd-)vin, slov. izvîn, izvîna, sur -vinçti, pour -voj<br />
(§ 729);tch.<br />
(po-)sun, s.-pr. zâsun, slov. sûn, sur sunçti, pour -sov-,<br />
-suv- (§ 760) ;<br />
pol. plyn sur plynqc, pour piyw (§ 730), et zrzyn, zrzyna, sur<br />
zrzynqc ( § 776) ;<br />
tch. (zâ-)klen, sur klenouti, pour -klep (§ 803), et (zâ-)van, sur<br />
vanouti, pour -vëj (§ 751) ;<br />
s.-cr. o-yran « lever du soleil » sur o-grànuti (§ 789), et s.-cr. Irën,<br />
slov. trèn, sur s.-cr. trënuti, pour trep (§ 805) ;<br />
slov. kân pour kâp, sur kàniti (§ 786).<br />
Ces formations sont récentes ; d'autres sont plus anciennes,<br />
mais il peut s'agir de dérivés suffixaux en -nu (§ 1073) :<br />
r. (za-)tôn, et tch., s.-cr., slov., à côté de -top et en regard de<br />
tonçti (§ 732), est attesté depuis le xv e siècle ;<br />
slavon kljunu « bec », bulg. kljun, s.-cr. et slov. kljûn, en regard<br />
de kljunçti (§ 809), l'est depuis le xiv e siècle; mais pour s.-cr.<br />
trûn, à côté de trûh et de tru(h)nuti (§ 765), depuis le xvi e siècle,<br />
voir § 1073.<br />
On ajoutera s.-cr. pômën, slov. spomqn, sur pomqnçti (§ 795) ;<br />
et le cas spécial des formes en -sianu sur le thème sia-, § 789.<br />
§ 826. Postverbaux et dérivés verbaux. — La formation des<br />
postverbaux non suffixaux est concurrencée par d'autres formations<br />
déverbatives : ainsi, en vieux slave, sur le thème pad- « tomber ».<br />
on trouve supadu. et zapadu (§ 785), et également le féminin<br />
propadï (§ 714), les dérivés en -lï dopastï, napastï et propastï<br />
(§ 1169), et les substantifs verbaux padenije et padanije.<br />
Le postverbal peut nef se rencontrer que comme adverbe ou<br />
dans une locution adverbiale : r. sibom, nâsibom (§ 796), na srei,<br />
v srel (§ 752), v ïsïèrp (§ 770), s.-cr. grêdom (§ 808), mûkom (§ 811) ;<br />
ou dans des tours stéréotypés : s.-cr. tonom tonuti (§ 732), mirom
270 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
mirisali (§ 798), prèbol (§ 741) dans des locutions bez prebola « sans<br />
guérison », rana od prebola « blessure dont on peut guérir ».<br />
Des dérivés suffixaux apparaissent avec les formes verbales<br />
à préverbe dans les mêmes conditions que les postverbaux. En<br />
mettant à part les féminins en -ï, qui ne sont plus des formations<br />
dérivées, mais des variantes des postverbaux masculins et féminins<br />
(§ 716), on relèvera particulièrement en russe les emplois du<br />
suffixe -ka (§ 886) : sur le thème pis- « écrire », le russe a 5 postverbaux<br />
masculins en -pis, 12 postverbaux féminins en -pis'<br />
(§ 794), et 18 dérivés en -ka : otpls, ôtpis' et otpiska, et dopiska,<br />
is-, na-, nad-, o-, po-, pod-, pere-, pred-, pri-, pro-, ras- (ros-), su-,<br />
v-, za-, vypiska. En slovène, avec une extension moindre,, c'est<br />
le suffixe -ba (§ 912) qu'a adopté la langue, du moins la langue<br />
savante : sur le thème leg- (§ 726), à côté de -log et fém. -lôga, on<br />
trouve izlgzba, na-, po-, pre-, raz-, v-, z-, za-.<br />
Mais la concurrence est surtout entre le postverbal et le substantif<br />
verbal, le postverbal relevant en principe de la langue concrète<br />
et populaire, le substantif verbal de la langue abstraite et savante,<br />
comme en français « estime » et « estimation », « casse » et<br />
« cassation ». En vieux slave, langue de traduction, le substantif<br />
verbal est préféré, mais le postverbal a aussi sa place. Le nom de<br />
la fête de l'Exaltation de la Croix est vuzdvizenije krïsta, gr. y U^WCTIÇ<br />
TOU CTTOCOPOO, mais le terme populaire est également attesté dans le<br />
Ménologe : vùzdvigu (§ 797). Voici dans un texte vieux-slave,<br />
l'Eucologe du Sinaï, la liste des formes qui sont en concurrence :<br />
vûprosu « question », 9 ex., et vuprosenie (4 ex.) ; — skrûzetu<br />
« grincement (de dents) », 1 ex., et skrûzûtanie (1 ex.) ; — zastçpu<br />
« soutien », 1 ex., et zaslçplenie, 2 ex. ; — utëxa « réconfort », 1 ex.,<br />
et utësenie, 4 ex. ; — vuxodu « entrée », 2 ex., et vuxozdenie, 4 ex.,<br />
et isxodu « sortie », 2 ex., et isxozdenie, 2 ex. ; — xula « blasphème »,<br />
1 ex., et xulenie, 1 ex. ; — et rasponu « croix », 11 ex., plus ou moins<br />
distinct de raspçtie « crucifixion », 6 ex. ; — outre supasù « sauveur »,<br />
16 ex., bien à part à date ancienne (§ 847) de supasenie « salut ».<br />
Comme le russe est pénétré de slavon autant que le français l'est<br />
de latin, on s'attend à ce que le substantif verbal domine. Mais le<br />
postverbal est fréquent dans la langue commune, et le dictionnaire<br />
de Dal' en révèle une quantité inattendue dans la langue populaire<br />
et dans les dialectes, où il apparaît sensiblement à égalité avec le<br />
substantif verbal : c'est une question de niveau de langue. Les<br />
emprunts au russe des autres langues slaves, particulièrement du<br />
bulgare et du serbo-croate, ont porté surtout sur le vocabulaire<br />
abstrait, donc sur les substantifs verbaux. Le bulgare garde<br />
d'ordinaire le substantif verbal ; le serbo-croate tend à l'adapter<br />
en postverbal, imité en cela par le slovène.
[§ 824] VUE GÉNÉRALE 271<br />
Le serbo-croate avait dès le début le verbe prosvijètiti « éclairer »<br />
et son substantif verbal prosvjecenje. Mais à la fin du xvm e siècle<br />
ce verbe est repris avec le sens nouveau d'« éclairer par la culture » :<br />
au russe prosvetit', qui est slavon (§ 609), et le substantif verbal<br />
prosvescënie «instruction », est transposé en prôsvjeta (§ 745), d'où<br />
slov. prosvêta, tandis que le bulgare hésite encore entre prosvestënie<br />
et prosvêta.<br />
On a de même en serbo-croate, et de là, dans une partie des cas,<br />
en slovène : nâcri « esquisse » et ocrt « contour », de r. nacertdnie,<br />
oceriânie (§ 809) ; — prlmjenan application », de primenénie (§ 749) ;<br />
•— ndmjera « intention », de rtamerénie (§ 750) ; — prïnuda «contrainte»,<br />
de prinuzdënie (§ 756) ; — ïspit «examen», de ispytdnie<br />
{§ 799) ; — uprava «administration» et pôprava «rectification»,<br />
de upravlénie, popravlénie (§ 792) ; — dôpuna et p'àpuna « complément<br />
», de dopolnénie, popolnénie (§ 811); — pàsjet et pôsjeta<br />
«visite», de posesëënie (§ 747); — pôsveta «dédicace», de posvjascénie<br />
(§ 808); — prëdstava «représentation», de predstavlénie<br />
(§ 792); — ustanova «institution», de ustanovlénie (§ 818);<br />
— podstrëk « incitation », de podstrekdnie ( § 733) ; — upotréba<br />
« emploi » et ztàupotreba « abus », de upotrebténie, ztoupotrebténie,<br />
et pôvreda «lésion», de povrezdénie (§ 806) ; — ùshît, slov. vzhit<br />
«ravissement», de vosxisëénie (§ 778); — proizvod «produit»,<br />
slov. proizvôd, de proizvedénie (§ 724). On ajoutera en slovène<br />
upodçba « comparaison », de upodobténie (§ 739). Sans doute le russe<br />
connaît aussi des postverbaux prinùda, podstrëk, povréda, mais les<br />
formes de la langue littéraire sont des substantifs verbaux, et les<br />
sens abstraits indiquent que ce sont ces formes qui ont été<br />
empruntées.<br />
Ces adaptations du russe et du slavon russe ont été précédées<br />
en serbo-croate d'adaptations semblables dans la langue même<br />
ou son slavon : prëporuka « recommandation », de preporucenje,<br />
est attesté dès le xv e siècle ( § 765), de même btâgoslëv « bénédiction »,<br />
de btagostovenie (§ 737), et svrha «fin, but», de svrsenje (§ 811) ;<br />
— pôtvrda « certificat » et ûtvrda « place forte » sont depuis le<br />
xvn e siècle des doublets à sens plus concret des abstraits potvrdënje,<br />
utvrdënje (§ 810); — pôzdrâv «salutation» a remplacé au<br />
xvn e siècle pozdravtjenje ( § 773) ; — pricest « communion » a été<br />
refait au xvin e siècle sur pricéscënje (§ 808) ; —- Uskrs « Pâques »<br />
et vàskrs « résurrection » l'ont été de uskrsénje, vaskrsënje (§ 746).<br />
Les autres langues slaves connaissent également ces adaptations :<br />
s.-cr. ïzrâz « expression », slov. izràz, est transposé de r. vyrazënie,<br />
mais c'est en même temps pol. wyraz, d'où tch. vyraz (§ 776) ;<br />
— s.-cr. zêmtjotrës « tremblement de terre » est pris à r. zemtetrjasënie,<br />
mais le tchèque a aussi zemëtras à côté de zemëtreseni (§ 762) ;
272 LES POSTVERBAUX [§ 810]<br />
— tch. vliv « influence » succède à vplyv par adaptation de r.<br />
vlijânie (§ 824).<br />
Un autre cas de substitution d'un postverbal à un abstrait est<br />
s.-cr. ùslov « condition », de r. uslôvie (§ 737).<br />
§ 827. Postverbaux masculins et féminins. — Il n'y a pas en<br />
principe de postverbaux neutres (§ 125). En grec, on trouve quelques<br />
rares neutres en -o- se rattachant à un thème verbal, mais OTJ|A6OXOV<br />
« signe de reconnaissance » n'est que l'adjectif aûfxêoXoç substantivé.<br />
Le germanique a quelques postverbaux du genre neutre, flottant<br />
avec le genre masculin : got. dragk « breuvage » de drigkan « boire »,<br />
v. h. a. tranc masc. et neutre, mais mod. der Trank, masc. ;<br />
v. h. a. giwant « vêtement » et mod. das Gewand, de (bi-)wintan<br />
« envelopper ».<br />
En slave, le neutre est exceptionnel, en dehors des adjectifs<br />
substantivés : v. si. obïdo «trésor» (§ 819), peut-être trace d'un<br />
adjectif en *-dho- comme les adjectifs en *-sl(h)o-, v. si. prostu, etc. ;<br />
gnëzdo «nid », n'est plus reconnaissable comme postverbal (§ 117).<br />
En russe, ôblako « nuage » ( § 769) est seulement du xvm e siècle et<br />
fait sur le pluriel oblakd de ôblak. Le serbo-croate a nàdo « acier »<br />
(§ 1002), zvôno «cloche» (§ 727), ôstrvo «île» (§ 737), toutes formes<br />
secondaires, et l'ancien sijevo « semis » traité comme adjectif<br />
(§ 1184) ; pour ûdo « bande de viande fumée », voir § 191.<br />
Le français avait développé des postverbaux masculins et<br />
féminins, mais seul le type féminin est resté vivant : de « relever »,<br />
« relief » est ancien, « relève » est nouveau, et de même, de « tourner »,<br />
« tour », « détour », « retour », puis « retourne ». En slave, comme en<br />
baltique, les postverbaux masculins et féminins sont à égalité,<br />
et quand ils sont en concurrence sur un même thème, on doit<br />
penser à une différence de valeur.<br />
En français, de « traîner », les postverbaux « train » et « traîne »<br />
sont également du xn e siècle, et « traîne » désigne dès le début la<br />
chose qu'on traîne, la traîne d'une robe, tandis que « train » marque<br />
plutôt l'action ou la manière de traîner. De même en baltique, lit.<br />
isvartas est « renversement », et isvarta est ce qui est renversé, un<br />
tronc d'arbre tombé. Dans les langues slaves, les exemples sont<br />
nombreux où le postverbal masculin marque l'action verbale, sens<br />
abstrait, et le postverbal féminin la chose ou le résultat de l'action,<br />
sens concret :<br />
r. korm «pâture» et kormâ «pâturage» (§ 815); — namyk<br />
«action de peigner la filasse » et namyka «filasse, quenouille»<br />
(§ 800) ; — ob'ëm « volume » et obôjmcm crampon », poèm « débordement<br />
» et pôjma «terrain couvert par le débordement» (§ 811) ;<br />
•— podprùg « action de serrer la sangle » et podprûga « sangle »
[§ 824] vue générale 273<br />
(§ 763); — podsôv «action de coudre par-dessous» et podôsva<br />
«semelle» (§ 795); — pomân «action d'attirer» et pomâna<br />
«leurre, appât» (§ 788) ; — tresk «craquement» et treskâ «éclat<br />
de bois » (§ 746) ; — uyderg « action d'arracher» et vyderga « lame<br />
pour arracher » (§ 809) ; — zàcép « accrochage » et zacépa « crochet »<br />
(§748);<br />
ukr. trépel «tremblement» et trepéta «le tremble» (§ 816);<br />
pol. opust « rabais » et opasta « bord du sillon » (§ 7a8) ; — przesuw<br />
« passage à travers » et przesuwa « ce qu'on glisse en travers »<br />
(§ 760) ; — et cf. (od)cisk « (im)pression » et podciska «matrice»<br />
(§ 797);<br />
tch. tvor « création » et tvûra « créature » (§ 736) ;<br />
s.-cr. pàtkov « ferrage » et pdtkova « fer à cheval » (§ 737) ; — stîsak<br />
« serrement » et stïska « presse, foule » ( § 797) ; — zàhvat « prise »<br />
et zâhvata «ce qu'on prend d'un terrain» (§ 778) ;<br />
slov. krçt « mouvement » et krçta « gouvernail » (§ 762) ; — opèk<br />
« ardeur brûlante » et opçka « brique » (§ 803) ; — prepàh « action<br />
de biffer » et prepâha « glissière » ( § 795) ; — smùk « glissement » et<br />
smûka « glissoire » (§ 755).<br />
Mais l'abondance de ces exemples ne doit pas faire illusion :<br />
il est courant qu'une différence de valeur n'apparaisse pas, ainsi<br />
dans r. zânaves et zavésa « rideau » (§ 746), naliv et naliva « infusion »<br />
(§ 729), ôbod « jante » et obôda « sangle » (§ 724), etc. C'est aussi bien<br />
la consonne finale du thème qui règle le choix, et ceci de façon<br />
différente selon les langues.<br />
Les postverbaux masculins ne fournissent pas seulement des<br />
noms d'action, mais aussi des noms d'agents, et c'est la continuation<br />
d'un type ancien (§ 830). Ainsi en vieux slave olroku « enfant » et<br />
proroku «prophète» (§ 726), posluxu «témoin» (§ 755), soku<br />
« dénonciateur » (§ 733), sûpasu « sauveur » (§ 783), uxodu « fugitif »<br />
(§ 724) ; — en vieux russe skokiï «sauteur» (§ 733), en russe mot<br />
«gaspilleur» (§ 731), neumôj « qui ne se lave pas » (§ 730), pôvar<br />
«cuisinier» (§ 777), pristâv «préposé» (§ 792), prosôl «faiseur de<br />
salaisons » (§ 741), trus « trembleur » (§ 762), vor « voleur » et provôr<br />
« homme adroit » ( § 728) ; — en polonais nalrçt « importun » et<br />
volrçt «intrus» (§ 766), opôj «buveur» (§ 729); — en tchèque<br />
soukup « co-acheteur » (§ 759), zvëd « espion » (§ 747) ; — en serbocroate<br />
àdor et ôdïr « pillard » (§ 728), ùskok « fugitif » (§ 733), némri,<br />
fém. nëmra, « les vieux, la vieille qui ne veulent pas mourir »<br />
(§ 728) ; — en slovène potèk « rôdeur » (§ 726). Etc.<br />
Un même postverbsfl est v. si. susù « mamelle », pol. sys « nourrisson<br />
» et slov. ses «dragon» (§ 799). Des noms d'agents ne se<br />
séparent pas les noms d'animaux : v. si. kokotu «coq» (§ 816),<br />
slavon stroku «taon» (§ 733), pol. nor «blaireau» et «canard
274 les postverbaux [§ 810]<br />
plongeon» (§ 728) ; —• ni les noms d'instruments : v. si. oskrudû<br />
« pic » (§ 776), slavon ozegu « tisonnier » (§ 777), r. lom « levier ».<br />
Il en est de même en baltique : lit. gânas «pâtre» (§ 727),<br />
prânasas «prophète» (§ 723), nàras «canard plongeon» (§ 728).<br />
Quant au type des postverbaux " en -a, il fournit aussi des<br />
masculins (§ 208), largement dans toutes les langues, et surtout<br />
en russe populaire. Ainsi r. pobôra « mendiant » et uplra « homme<br />
entêté » (§ 728), pol. niedowiara « incrédule » et œyszczera « ricaneur »<br />
(§ 750), tch. dotera «importun» et zàmora «homme exténué»<br />
(§ 728), s.-cr. èptrka « qui court çà et là » (§ 814) et prda « péteur »,<br />
slov. naslêda « successeur » ( § 746) et prismçda « tête brûlée »<br />
(§ 762).
CHAPITRE XVIII<br />
ACCENTUATION DES POSTVERBAUX<br />
§ 828. Postverbaux masculins. — Pour se rendre compte de la<br />
façon dont se pose le problème de l'accentuation des postverbaux,<br />
on examinera d'abord celle des postverbaux masculins à voyelle<br />
radicale brève. On peut dégager un système dominant :<br />
Sans préverbe : r. boj, gén. bôja ; s.-cr. bôj, gén. bôja ; slov.<br />
gnôj, gén. gnojâ, et bôj, gén. bôja ; pol. bôj, gén. boju, tch. hnùj,<br />
gén. hnoju, et boj, gén. boje (§ 106).<br />
Avec préverbe : r. razbôj ; s.-cr. pôbôj, râzbôj, gén. pôboja, râzboja ;<br />
slov. razbôj, gén razbôja ; pol. rozbôj, gén. rozboju ; tch. odboj,<br />
nâboj.<br />
De même : r. lët, s.-cr. lêt (gén. lêta), slov. lët, gén. Içta, pol. lot,<br />
tch. let ; — r. dolël, s.-cr. ùlet, slov. izlèt, tch. dolet.<br />
Avec voyelle radicale au degré réduit : r. naëm, gén. nâjma ;<br />
s.-cr. nâjam, gén. nâjma ; slov. najèm, gén. najçma, et nâjem, gén.<br />
nâjma ; tch. nâjem, gén. nâjmu.<br />
Mais déjà, dans ce tableau, des variantes d'accent apparaissent,<br />
et elles sont fréquentes." En slovène, l'accent dominant est bôj,<br />
gén. bôja, qui est celui des formes à préverbe. En russe, on a deux<br />
types avec préverbe : zamôlk et ûmolk, et des flottements zapôn et<br />
zâpon, zacërk et zâëerk, etc. En serbo-croate, deux types également :<br />
istok et ïstok, ùlet et ïzlêt, prôcvat et prôcvât, ôbrov et prïjerov ;<br />
en slovène urod et zârod, mais avec même accent aux cas obliques,<br />
gén. urçda et zarçda.<br />
Les faits ne peuvent être que plus compliqués avec les postverbaux<br />
à voyelle radicale longue, où interviennent les intonations.<br />
Avec intonation douce : r. svet, gén. svéta, s.-cr. svïjei, gén.<br />
svïjeta, slov. svët, gén. svetâ, tch. svët ; — r. prosvët et ôtsvet, s.-cr.<br />
pôsvjet, slov. posvët, tch. posvët ;<br />
T. dux, s.-cr. et slov. dûh, kûp (de kupiti «acheter», § 759),<br />
tch. duch, kup ; —• r. otdûx, et ôldux, iskûp et dôkup, s.-cr. ôtkup<br />
et ôtkup, zàdûh, slov. podûh, izkûp, tch. zâduch, prekup ;
276 les postverbaux [§ 810]<br />
r. luk, s.-cr. lûk, slov. Içk, tch. luk, pol. Içk ; — r. uluk et ôbluk.<br />
s.-cr. àbluk et ôblûk, slov. odlôk et oblçk, tch. oblouk, pol. oblqk ;<br />
r. vôlok, s.-cr. et slov. vlâk, tch. vlak (et vlâk) ; — r. izvolôk et<br />
izvolok, s.-cr. ôblâk, ôglâs, mais prijèglas, slov. oblâk et preglàs,<br />
tch. oblak ;<br />
r. sad, s.-cr. et slov. sâd, tch. sad ; — r. nasâd, s.-cr. nâsad, slov.<br />
nasàd, tch. nâsad ;<br />
T. ëin, s.-cr. et slov. 6în, tch. ëin ; — r. docin, s.-cr. nâëin, slov.<br />
naëin et uëîn, tch. ûcin.<br />
Avec intonation rude : r. sek, s.-cr. sjëk, slov. sèk, tch. sek ;<br />
—• r. osék et ôsek, s.-cr. osjek, slov. osèk, tch. dosek ;<br />
s.-cr. kûp (de kupili «rassembler», § 756) et àkup, slov. kùp<br />
et nakùp ;<br />
r. morôz, s.-cr. mrâz, slov. mrâz, tch. mrâz ; — r. zâmoroz, slov.<br />
zamràz, tch. zâmraz ;<br />
r. laz, s.-cr. lâz, slov. lâz et làz, tch. laz et lâz ; — r. dolâz, s.-cr.<br />
dolaz, slov. oblâz, tch. prïlaz ;<br />
r. klik, s.-cr. klik, slov. klik, dvîg, tch. dvih ; —• r. nadvig et<br />
dôdvig, dôklik, s.-cr. pôklïk, pôdvïg, slov. podvlg et odklik, tch.<br />
zdvih.<br />
Avec double préverbe, on notera r. zânaves, de zanavésit', en<br />
regard de zavés, de zavésit'. Avec des postverbaux à thème dissyllabique,<br />
on a le type r. klôkot, s.-cr. klôkôt (§ 816) ; mais slov. klokôt,<br />
gén. klokàta, avec accent nouveau pris au verbe klokçëe-, klokotâti,<br />
l'accent ancien sur l'initiale étant conservé dans l'isolé kokôt<br />
«coq», gén. kokôia, de *kôkot- (§ 93) ; — le type à redoublement<br />
(§ 817) r. kôlokol, et pépel, s.-cr. pëpeo, slov. pepçl, gén. pepçla ;<br />
— et r. gôvor, mais avec préverbe dogovôr (§ 818) ; s.-cr. gôvôr,<br />
et avec préverbe dôgovôr ; et slov. gôvor avec l'accent des formes<br />
à préverbe, dogôvor de *dôgovor-. Mais s.-cr. pàios, sur pàîose-,<br />
pâtosaii, dans un postverbal nouveau tiré d'un emprunt.<br />
L'accentuation sur thème dissyllabique apparaît donc régulière.<br />
Mais sur thème monosyllabique il n'y a pas de correspondances bien<br />
rigoureuses, et des accents différents sont possibles. Il faut examiner<br />
les cas où les différences d'accent répondent à des différences<br />
de sens.<br />
§ 829. Accent sur le préverbe et accent sur le thème. — De ces<br />
différences, on trouve un bon nombre en russe :<br />
noms d'action et noms d'agents : poirûs « secousse » et pôtrus<br />
«farceur» (§ 762); udâv «action d'étrangler» et udav «boa»,<br />
prislâv « addition » et pristav « préposé » ( § 792) ;<br />
termes abstraits et termes concrets : poézd « action d'aller »<br />
et pôezd « train, convoi » ( § 785) ; pogrëb « enterrement », ugrëb
[§ 830] L'accentuation 277<br />
« action de s'en aller en ramant », et pôgreb « cave », ûgreb<br />
« râtelures » (§ 803) ; porûb « action de couper » et pôrub « charpente,<br />
cage », zastup « protection » et zdstup « bêche » ( § 764) ; prolôr<br />
« action de frayer » et prôior « chemin frayé » ( § 728) ; lerëb<br />
« nettoyage » et téreb « lieu débroussaillé » (§ 806) ; aôey « fuite » et<br />
ubeg « impasse » (§ 752).<br />
Mais ces oppositions n'ont rien de régulier, et avec les noms<br />
d'agents il n'y a pas de type pôvar « cuisinier » ( § 827). On a<br />
pôslux au sens de « rumeur » aussi bien qu'au sens de « témoin »,<br />
et comme dans les abstraits dôslux à côté de prislux (§ 755). Ce<br />
qui pourrait jouer ici, c'est la recherche d'un équilibre entre une<br />
deuxième syllabe longue et une première syllabe brève et qu'on<br />
allonge par l'accent' : de même pour ôt-blesk (§ 745), dô-tisk (§ 797),<br />
dô-ëerk (§ 809).<br />
Dans pôdvig « exploit » et podvig « action d'avancer », on aurait<br />
la différence entre l'accent d'un mot ancien, d'époque vieux-slave,<br />
et celui d'un postverbal refait sur le verbe, si l'on n'avait pas aussi<br />
bien dôdvig, etc. (§ 797) ; et dans zâpad « occident » et zapâd « action<br />
de tomber » (§ 785), si un accent primitif sur le préverbe n'était pas<br />
contredit par s.-cr. zâpad. Il faut plus largement dire qu'il y a<br />
des postverbaux plus ou moins détachés des verbes et d'autres qui,<br />
quelle que soit la date de leur création, sont toujours liés aux verbes<br />
et en gardent l'accent. Le maintien du lien avec le verbe est évident<br />
dans les séries de postverbaux comme ceux du verbe nesti ( § 723) :<br />
l'accent est donôs, etc., mais vynos sur vynesti. Le postverbal<br />
ûrnolk « silence » est sur umôlknut' « se taire », et umôlk « action<br />
de taire» sur le transitif umolcât' «taire» (§ 811). D'après Dal',<br />
dans les postverbaux de travit' «chasser à courre» (§ 779), zâtrav<br />
désignerait le commencement, et zalrâv l'achèvement de la chasse.<br />
Dans le cas de urôd « bonne récolte » et de ûrod « avorton, fou »<br />
(§ 738), c'est une autre chose, et qui a son importance pour l'origine<br />
de l'accent sur le préverbe : l'opposition entre un postverbal et<br />
un composé nominal, v. si. grodu (§ 1223).<br />
§ 830. Les postverbaux oxytons. — En indo-européen, une<br />
opposition existait entre les noms abstraits paroxytons et les<br />
noms d'agents et de sens concret oxytons : gr. TOJXOÇ « coupure » et<br />
to[x6ç « qui coupe », Tpo« course » et Tpoxoç « roue », skr. vâdhah<br />
« meurtre » et vadhâh « meurtrier ». On a pensé à retrouver en slave<br />
des traces de cette opposition, et il faut examiner les cas d'oxytonaison<br />
des postverbaux. '<br />
On écartera les accents nouveaux, ou d'ancienneté trop douteuse.<br />
En russe, mosï « pont », gén. moslâ, est récent pour most, môsta<br />
s.-cr. môst, môsta, slov. môst, mostâ (§ 738) ; — plot «palissade»,
278 les postverbaux [§ 810]<br />
gén. plolâ, a une variante plot, plôta comme s.-cr. plôt, plôta, et<br />
il doit s'agir d'une confusion avec plot « radeau » de *plûtu (§ 724) ;<br />
— puk «faisceau, botte», gén. pukâ (§ 767), a de même une<br />
variante puk, pûka comme s.-cr. pûk, pûka, et pol. pçk et tch.<br />
puk sont sans métatonie sur intonation douce (§ 102) ; — et de<br />
même plod « fruit », gén. plodd, et plôda comme ukr. plid, plodu, etc.<br />
(§ 731) ; — styd « honte », gén. stydd, est nouveau pour v. si. studu<br />
(§ 754) ; — serp « faucille », gén. serpd, est contredit par s.-cr. srp<br />
et éak. srp, gén. srpa, slov. srp (§ 811) ; — kol «pieu », gén. kold<br />
(§ 735), est d'ancienneté douteuse, et qui n'est pas confirmée<br />
par slov. kàl, gén. kôla, en raison des flottements d'accent en<br />
slovène ; — xvost « queue », gén. xvostd, diffère de cak. host, hôsla<br />
et slov. hvçst (§ 744) ; — et ukr. kin, gén. konà, de r. kon « commencement<br />
», gén. kôna (§ 727), et d'ailleurs le mot est sûrement<br />
tiré de locutions adverbiales.<br />
En serbo-croate, skrob « amidon », gén. skrèba, ne s'accorde pas<br />
avec slov. skrçb, ni trop « marc de raisin », gén. Irôpa, avec slov.<br />
trçp (§ 725), et cak. rôv « fossé », gén. rovà, est contredit par s.-cr.<br />
rôv, rôva ( § 730) et r. rov, rôva (mod. rva) ; zglôb « articulation »,<br />
gén. zglôba, est à préverbe s- (§ 739), ainsi que smët «amas de<br />
neige », gén. smèta (§ 804), et slôm «rupture», gén. sloma, diffère<br />
de lôm, lôma sans préverbe (§ 734) ; grôm « tonnerre », gén. grôma,<br />
mais cak. grôm, grôma, r. grom, grôma (§ 727), et stôg «meule de<br />
foin », gén. stôga, mais cak. stôg, stôga, r. stog, stôga (§ 733), relèvent<br />
d'un type d'accent nouveau (§ 221), de même que slrôp « plafond »,<br />
gén. strèpa (§ 744), et que vêz «orme», gén. vèza, mais vêz «broderie»,<br />
gén. vêza (§ 762) ; — drijem «somnolence», gén. drijèma,<br />
est en regard de slov. drêm, et aussi drëm (r. drëm), avec<br />
l'accent du verbe drémati (§ 749) ; cak. dêl «part», gén. delà,<br />
est en accord avec slov. dêl, mais en désaccord avec s.-cr. dlo,<br />
dljela, r. ,del, delà (§ 749) ; s.-cr. mîr « paix », gén. mira, l'est avec<br />
cak. et slov. mîr, mira, r. mir, mira (§ 798), et vîr «tourbillon»,<br />
gén. vira, avec slov. vîr (§ 777), sîb «buisson», gén. siba, avec r.<br />
sïbom, adv. (§ 796), tûl «carquois», gén. lùla, avec slov. tût, lûla<br />
(§ 760). Et hrâst «chêne», gén. hrdsta, cak. hrdst, hrâstà, a son<br />
correspondant dans slov. hrdst, mais avec variante hrâst, et non<br />
dans r. xvôrost, xvôrosta (§ 775), où la variante ukr. xvorôst semble<br />
pouvoir s'expliquer comme r. polôn par réfection sur un thème<br />
verbal (§ 832) et confirmer que le mot est le postverbal d'un verbe<br />
en -tati ou -tëti.<br />
On ne voit dans tous ces exemples que la preuve d'une extension<br />
sensible du type oxyton. Des oxytons d'ancienneté plus sûre sont :<br />
r. dvor « cour », gén. dvorâ, s.-cr. dvôr, dvôra, slov. dvor, dvôra, et<br />
grozd « grappe de raisin », gén. grozdâ, s.-cr. grôzd, yrôzda, slov.<br />
yrôzd, grôzda, et snop « gerbe », gén. snopâ, s.-cr. snôp, snôpa, slov.
[§ 830] l'accentuation 279<br />
snàp, snôpa (§ 744) ; greh « péché », gén. grexâ, s.-cr. grïjeh, grijèha,<br />
slov. gréh, tch. hfich (§ 748); prud «étang», gén. prudâ, s.-cr.<br />
prûd, pruda, slov. prgd, et tch. proud, pol. prqd, à métatonie sur<br />
intonation douce (§ 762) ; pup «nombril», gén. pupâ, s.-cr. pûp,<br />
pûpa (§ 764) ; sud «jugement », gén. sudâ, cak. sûd, sudà et s.-cr.<br />
sûd, sûda, slov. sçd, et tch. soud, pol. sqd, distinct de s.-cr. sûd<br />
« vase », sûda, slov. spd, de sûsgdu (§ 766) ; suk « branche, nœud »,<br />
gén. sukd, s.-cr. sûk, sûka (§ 768) ; trud «peine », gén. trudâ, cak.<br />
trûd, trudâ et s.-cr. trûd, trùda (§ 756) ; um «esprit» gén. umà,<br />
s.-cr. ûm, uma, slov. ûm (et ùm), ûma.<br />
Mais dvorû n'est pas un postverbal, snopu et sçku ne sont pas<br />
en regard de verbes, grozdu, grëxû et umu doivent être des dérivés<br />
suffixaux, sçdu est, un composé nominal (§ 819). Il reste pçpu<br />
d'une racine expressive sans alternance vocalique, trudû dont<br />
le verbe doit être çherché en germanique et en latin, et prçdu<br />
qui présente une intonation douce en opposition avec l'intonation<br />
rude dans le verbe (§ 498). Il n'y a rien là qui réponde au type des<br />
noms d'agents oxytons du grec.<br />
Il y aurait grobu « tombe », où Meillet a pensé reconnaître un<br />
postverbal oxyton du type des noms concrets à valeur passive,<br />
comme gr. ôXxôç « chose tirée, trace » : s.-cr. grbb, gén. grôba et<br />
grëb, grèba (§ 803), cak. grbb, grobà et slov. grob, grôba, mais r. grob,<br />
grôba et ukr. hrôbu (§ 725). Or le mot ne paraît pas en rapport en<br />
slave avec le verbe grebe- « racler » et doit être, plus probablement,<br />
un emprunt au germanique. De même r. stol « siège, table », gén.<br />
stolâ, s.-cr. stô(l), stàla, slov. stol, stôla (§ 735), peut être, pour une<br />
part au moins, un emprunt. Ceci oriente dans une autre direction<br />
que l'oxytonaison des noms d'agent : celle des noms d'emprunt.<br />
R. post «jeûne», gén. posta, cak. pôst, posta (mais s.-cr. pôst,<br />
posta), slov. pôst, posta (§ 738), est un emprunt ; et r. kut « coin »,<br />
gén. kutâ, s.-cr. kût, Uûta, slov. kçt, tch. kout, pol. kqt (§ 102),<br />
l'est également (§ 766) ; vraisemblablement aussi r. rab « serviteur »,<br />
gén. rabâ, s.-cr. rôb, rôba, slov. rôb, rôba(% 774), et r. sëit « bouclier »,<br />
gén. scitâ, s.-cr. stît, stita, slov. sëit, scita, tch. stit (§ 796) ; et s.-cr.<br />
tïjek « remède », gén. tijèka, slov. lék, sur un thème pris au germanique<br />
(§ 748).<br />
Ces oxytons remontent à l'époque des emprunts au germanique :<br />
r. korôl' « roi », gén. koroljâ, s.-cr. krâlj, krâlja, slov. krâlj, krâlja,<br />
tch. krâl, krâte (§ 3) ; r. potk « troupe », gén. potkâ, s.-cr. pûk, gén.<br />
pûka mais dial. puka, de v. h. a. folk (§ 74) ; r. pop «prêtre»,<br />
gén. popâ, s.-cr. pôp, pfypa, slov. pop, pôpa, du grec TOOTTTOÇ par<br />
l'intermédiaire de v. h. 'a. pfaffo. Et l'on a ensuite s.-cr. grès « le<br />
gros (monnaie) », gén. grosa, slov. gros, grgsa (r. gros, grosâ, du<br />
polonais), du bas-latin grossus, m. h. a. gros, grosch ; s.-cr. lûg<br />
«lessive», gén. lûga, slov. lùg, lûga, de l'allemand (§ 759); s.-cr.
280 les postverbaux [§ 810]<br />
drùm « grand-route » (xm e siècle), gén. drùma, de gr. Spoixoç tràp<br />
« fosse », gén. iràpa, de gr. Tpàtpoç (§ 770), et top « canon », gén. topa,<br />
du turc.<br />
L'oxytonaison n'est pas une règle pour tous les emprunts<br />
postérieurs au slave commun au point qu'on puisse se servir<br />
pour les dater d'une différence comme celle de r. dolg « dette »,<br />
gén. dôlga, s.-cr. dûg, dûga, du gotique dulgs (§ 814), et de polk,<br />
gén. polkd, du vieux haut allemand. Mais les emprunts, quand ils<br />
entrent dans la langue, doivent choisir un type d'accent, ainsi<br />
les neutres, r. licô, vino (§ 191), et le choix du type oxyton souligne<br />
sa productivité.<br />
§ 831. Postverbaux îémiixins. — Avec voyelle radicale brève,<br />
le type normal, sans préverbe, est r. kosd « tresse » et « faux »,<br />
s.-cr. kôsa, slov. kôsa. Mais on trouve r. dôba « temps », s.-cr. dôba<br />
(§ 739) ; r. rôzga «verge », s.-cr. rôzga, mais dial. ràzga, slov. rçzga<br />
(§ 733) ; s.-cr. skôba « fermoir », slov. skçba, mais r. skobâ (§ 739) ;<br />
s.-cr. kôra « écorce », mais r. (s)korâ et slov. (s)kôra (§ 736).<br />
L'accent ç du slovène n'est pas celui de métatonie sur brève<br />
(§ 104), mais analogue à celui des formes à préverbe.<br />
Avec préverbe : r. podôba, pogôda, ordinairement (et vygoda,<br />
comme vykos et vykoska) ; mais aussi nddoba, et pddora ( § 728)<br />
qui est un composé nominal (§ 1220) ;<br />
s.-cr. pàdoba, osnova, potkova et aussi prïkova, et ordinairement<br />
prlgoda, prëpona, etc. ; — slov. podôba, prigôda, etc., régulièrement,<br />
sauf rdzsoha, rdznoga, du type des composés nominaux d'après<br />
pdnoga (§ 744).<br />
Avec voyelle radicale longue : r. bedd, s.-cr. bijèda, slov. béda ;<br />
— r. pobéda, izména ; s.-cr. pôbjeda, ïzmjena, ùpolreba ; — slov.<br />
izmêna. avec accent originellement sur le préverbe comme en<br />
serbo-croate, et upotréba, zajêza et zdjeza (§ 783) ;<br />
r. gubd, krupd, s.-cr. krupa, slov. guba ; — r. zagûba, zastûga<br />
(et vysluga), mais pdguba, composé nominal ; s.-cr. pôguba, zâstuga,<br />
slov. pogûba, zastûga ;<br />
r. rukâ, tukd, s.-cr. rûka, lûka, slov. rôka, Içka ; — r. porûka,<br />
raztûka ; s.-cr. pôruka et ôporuka, ôdtuka, slov. porçka et oporçka,<br />
odtçka, mais aussi s.-cr. ndruka et slov. ndroka (§ 765) ;<br />
r. totokd et totôka, et morôka, porôxa, votôka, xorôna, avec l'accent<br />
des formes à préverbe ; s.-cr. tiàka et ttàka, zràka ; — r. obmorôka,<br />
oxrâna et oxorôna ; zatotôka, zavolôka et zâtoloka, zàvotoka, perevorôxa<br />
et zdvoroxa, peregorôda et perégoroda, nasotôda et ndsotoda ;<br />
zddoroga, et sûdoroga, pdmoroka, composés nominaux ; — s.-cr.<br />
prëvtaka et prëobtaka, ïshrana, ôgrada, nàstada, etc. ; et pôraba,<br />
mais uporaba, ndhlada et ndhtada, mais râshtada, ndvlaka et
[§ 830] l'accentuation 281<br />
nâvlaka, mais aussi nàvlaka ; — slov. ohlâda, prevlâda, ohrâna,<br />
porâba et uporâba, etc. ;<br />
r. xvalâ, s.-cr. et slov. hvâla ; —• r. poxvalâ, mais dosâda,<br />
pokrâsa, etc. ; s.-cr. pôhvala, dôsada, et nâkana ; slov. pohvâla,<br />
nasâda, nakâna ;<br />
r. vinâ, zasciia, mais zâs(l)ina (§ 749), comme zâs(t)en' ; s.-cr.<br />
zâstita, slov. zavîna, zasëîta.<br />
Avec intonation rude : r. méra, s.-cr. mjëra, slov. méra ; —• r.<br />
naméra, zaméra et zâmera, poséka et pôseka comme pâseka (§ 752) ;<br />
s.-cr. ômjera et ndmjera ; slov. naméra ;<br />
r. gûba (et gubâ), mùka, s.-cr. gûba, mûka, slov. g$ba, mçka, et<br />
r. ùza, s.-cr. ûza, slov. vçza, avec l'intonation rude de vçznçti<br />
(§ 498) ; — r. umûka (et vîjmuka), obûza et priuza; s.-cr. zâmuka,<br />
prïuza et priuza ; slov. povçza ;<br />
r. volôga, navolôga, s.-cr. omraza, slov. omraza ;<br />
r. slâva, s.-cr. slàva, slov. slâva ; —- r. oslâva, zavâda, zabâva ;<br />
s.-cr. pr'ôslava, dôbava et nàbava, zâbava, zâvada ; slov. proslâva,<br />
zavâda, dobâva ;<br />
r. kita, s.-cr. klta, slov. kita, giba ; — r. nakita, zagiba ; s.-cr.<br />
pôtkita, et râzkida ; slov. pogîba.<br />
Ainsi, dans les formes à préverbe, le slovène a généralisé l'accent<br />
sur le préverbe, devenu accent sur le thème avec l'avancée générale<br />
de l'accent, sauf dans un type de composés nominaux comme<br />
pânoga ; le serbo-croate présente le plus ordinairement l'accent<br />
sur le préverbe, mais il connaît aussi l'accent sur le thème, avec des<br />
traces, semble-t-il, d'une fixation ancienne sur le thème dans le cas<br />
d'intonation rude, ndmjera, zâmuka, nàbava, zâvada, râskida.<br />
Le russe, au contraire, a le plus souvent l'accent sur le thème, et<br />
le type à accent sur le préverbe paraît être surtout celui des<br />
composés nominaux. On comparera avec l'accent paroxyton d'une<br />
partie des dérivés en -ota de thèmes verbaux, dremôta de dremât', etc.<br />
(§ 900), qui doit être pris au type des postverbaux de verbes en<br />
-olàï. Et on a de même un accent de postverbal dans r. svobôda<br />
de svobodît' (§ 817), tandis que le plus ancien slobodâ au sens de<br />
« faubourg » garde l'oxytonaison de s.-cr. slobôda, slov. svobôda,<br />
conforme à la loi de Saussure.<br />
§ 832. Origine des accents. — Le grec a, sans préverbe, les deux<br />
types masculins TOUOÇ « coupure » et TO|A6Ç « qui coupe » et le type<br />
féminin TOJAY) « coupure », lé type masculin oxyton à sens concret<br />
pouvant avoir aussi une valeur passive, ainsi Sopoç « sac de peau »<br />
(qui a été écorché) comme Sop« «peau écorchée » (§ 728). Avec<br />
préverbe, l'accent recule sur le préverbe dans les thèmes en -o- :
282 les postverbaux [§ 810]<br />
ôSoç « chemin » et sfooSoç, crûvoSoç ; il se maintient final dans les<br />
thèmes en -â- : èmzo[vq.<br />
En baltique, l'accentuation des postverbaux du lituanien<br />
apparaît aussi compliquée qu'en slave. Le type à accent sur le<br />
préverbe domine de beaucoup avec les masculins : isdagas de<br />
is-dègii « brûler » ( § 435) ; il domine aussi avec les féminins : isdaga,<br />
mais flottant avec l'accentuation finale, qui est celle des formes<br />
sans préverbe en dehors du type vdrna d'intonation rude (§ 216) :<br />
kalbà « parole », iskalba et iskalbà de kalbëti « parler », ùzkanda et<br />
uzkandà de kându, kçsti « mordre », etc.<br />
Mais on trouve aussi l'accent sur le thème verbal, et ce type<br />
moins représenté paraît, du point de vue du lituanien, la conservation<br />
d'un type plus ancien que l'accent sur le préverbe : pagâlba<br />
de gélbêti « aider », apskàlba de skaïbii « lessiver » ; âpsarga, atsargà<br />
et pasârga de sérgêti « garder », àpkalas, prlekalas et priekâlas<br />
de kâlti « forger » ; sçsuka et prisûkas de sùkli « tordre ».<br />
Ces exemples montrent que l'accent n'est pas lié à l'intonation,<br />
mais il a pu l'être ; qu'il n'est pas lié non plus à la forme du premier<br />
terme, préverbe ou préfixe nommai, mais il l'a sûrement été en<br />
partie, et le préfixe nominal, à forme prie-, nûo-, sân-, etc. (§ 1224),<br />
attire normalement l'accent : nûolaida de léisti « laisser », nuléisii,<br />
priekaba de pri-kabëti « être suspendu », etc.<br />
En slave, les deux tendances se sont affrontées, avec un succès<br />
différent selon les langues : de recul de l'accent sur le préverbe, et<br />
de fixation de l'accent sur le thème verbal, comme dans le verbe<br />
lui-même (§ 699). Des raisons variées expliquent, en slave comme<br />
en lituanien, l'état de grande confusion du système général :<br />
le fait que les postverbaux ont été formés à des époques différentes,<br />
qu'il y en a de très anciens et de tout récents ; les chevauchements<br />
possibles entre les types d'accent, le russe ayant zapôn comme<br />
fém. zapôna, et zâpon comme fém. zâpon' (§ 720) ; l'attraction de<br />
l'accentuation du verbe, et l'attraction du type important des<br />
composés nominaux.<br />
La question de la quantité dans les préverbes du tchèque se<br />
pose d'une façon différente de celle de la quantité dans les préverbes<br />
du serbo-croate. Le serbo-croate, couramment mais non régulièrement,<br />
a zdkon, cak. zâkôn, zâkdn-, slov. zdkon, et nârod de naràditi,<br />
pristup de prisiûpiti, et, sur le thème leg-, nâlog, prilog, prijèlog,<br />
rdzlog, ûlog, zâlog (§ 726) : il s'agit de la longue avant l'accent, avec<br />
confusion des deux intonations douce et rude (§ 100). En tchèque,<br />
on a régulièrement, dès le vieux tchèque, nâ-, prie- (v. tch.) et<br />
pri-, û-, vy-, zd-. Et la quantité longue se retrouve en polonais,<br />
avec sq- (§ 1222) et wq- (§ 1223) dans les composés nominaux, et<br />
avec des exemples de préverbes nâ- et zâ-, le â long ayant été noté<br />
en polonais jusqu'au début du xix e siècle (§ 90) ; de même en
[§ 830] l'accentuation 283<br />
kachoube, et le slovince présente les équivalents de pol. nâmysl<br />
«réflexion» et zâmysi «projet». Or, en polonais, la longue n'est<br />
conservée que comme longue de métatonie (§ 105). Il y a donc eu<br />
en tchèque et en polonais métatonie, par recul de l'accent sur le<br />
préfixe.<br />
D'autres métatonies se sont certainement produites, mais<br />
il est difficile de les reconnaître sûrement. On peut admettre une<br />
métatonie sur intonation rude dans le cas de s.-cr. et slov. kvâs,<br />
tch. kvas (§ 778), en regard de r. kvâsit', s.-cr. kvàsiti (§ 613). On a<br />
l'équivalent d'une métatonie sur intonation douce dans r. polôn<br />
«captivité» en face de s.-cr. pli jen, slov. plên, tch. plen (§ 806),<br />
mais il s'agit d'une réfection sur le dénominatif polonit', et l'on<br />
peut supposer une niême explication pour ukr. xvorôst (§ 830).
Les chiffres renvoient aux pages.<br />
*arb-, 162.<br />
*ard-, 162.<br />
*arst-, 161,<br />
bag-, 189.<br />
baj-, bav-, 198.<br />
bal-, 192.<br />
'barri- « lutter », 159.<br />
* barri- « herser », 159.<br />
*barzd-, 158.<br />
bav-, 172.<br />
-bav- « craindre », 199.<br />
bek-, blek-, 230.<br />
ber-, bor-, bir-, bër-, 45.<br />
besëd-, 256.<br />
bëd-, 96.<br />
bëg-, 105.<br />
bël-, 99.<br />
bïj-, boj-, 51.<br />
*bïrg-, * bar g-, 153.<br />
blagovëst-, 96.<br />
blazn-, 194.<br />
blïsk-, blësk-, blisk-, 90.<br />
blçd-, 132.<br />
bod-, bad-, 60.<br />
boj- « craindre », 51.<br />
bol-, 82.<br />
bor-, 83.<br />
borav-, 257.<br />
bçk-, 143.<br />
bred-, brïd-, brod-, 37.<br />
brex-, 230.<br />
brëzg-, 97.<br />
brid-, 208.<br />
brîj-, broj-, 51.<br />
brud-, 114.<br />
brux-, 124.<br />
brus-, brus-, brys-, 108.<br />
brùzd-, 247.<br />
brgk-, 222.<br />
brijzg-, 223.<br />
bud-, 108.<br />
INDEX DES POSTYERBAUX<br />
budov-, 258.<br />
bun-, 126.<br />
bux-, 124.<br />
ce/-, r., 100.<br />
cëd-, 90.<br />
cël-, 100.<br />
cëlov-, cëliv-, cëluj-, 258.<br />
cën-, 101.<br />
cëp-, scëp-, 97.<br />
cvil-, kvil-, 213.<br />
cvït-, cvët, kvït-, 89.<br />
âaj-, 198.<br />
éak-, ëek-, 187.<br />
cal-, r., 192.<br />
£ap-, 186.<br />
car-, 178.<br />
cas-, 201.<br />
cerk-, r., 238.<br />
ces-, 225.<br />
£çst-, 234.<br />
cin-, 214.<br />
iist-, 208.<br />
âïn-, kon-, ëin-, 43.<br />
*eïrp-, 241.<br />
*£irt-, 238.<br />
iist-, 240.<br />
Ht-, 240.<br />
tud-, 120.<br />
éuv-, 127.<br />
daj-, dav-, 198.<br />
dar-, 195.<br />
*darg-, 160.<br />
darov-, dariv-, 258.<br />
dav- « oppresser », 200.<br />
der., dïr-, dor-, dir-, dër-, dyr-, dr-, 45.<br />
des-, 227.<br />
dçg-, dqg-, 140.<br />
dëj-, dëv-, 103.<br />
dël- « part », 100.<br />
dël- « œuvre », 100.
286 index des postverbaux<br />
aiu-, 215.<br />
*dïlb-, *dalb-, 147.<br />
'dïrg-, 239.<br />
dlag-, 189.<br />
dob-, 78.<br />
doj-, 85.<br />
dgb-, 138.<br />
drëm-, 99.<br />
drob-, 63.<br />
drçg-, 144.<br />
drug-, 116.<br />
drûm-, 250.<br />
dum-, 124.<br />
'dûlg-, 250.<br />
dum-, duv-, 250.<br />
dûvoj-, 85.<br />
dûx-, dux-, dgx-, 111.<br />
dvek-, 'dïvk-, 188.<br />
dvig-, 212.<br />
dym-, tch., 251.<br />
dgm-, T., 220.<br />
frig-, prig-, 212.<br />
gab-, gav-, 179.<br />
gad- « dégoûter », 174.<br />
gad- « deviner », 175.<br />
gag-, voit zeg-, 169.<br />
gai-, 192.<br />
*gald-, 146.<br />
*gais-, 155.<br />
*galv-, 158.<br />
gan- « deviner », 175.<br />
gan- « blâmer », 194.<br />
*gard-, 158.<br />
gas-, 174.<br />
gat- « chaussée », 182.<br />
gat- « prédire », 175.<br />
gaz-, 180.<br />
glad-, 184.<br />
glaz-, 180.<br />
gl
klëst-, 94.<br />
klik-, 210.<br />
kljïv-, kljav-, kljun-, 239.<br />
kljud-, 120.<br />
kljuk-, 121.<br />
klon-, 82.<br />
klop-, 39.<br />
kob-, 79.<br />
koj-, 52.<br />
kol- « fendre », 67.<br />
kol- « cercle », 82.<br />
kon-, voir éïn-, 43.<br />
kop-, 61.<br />
kor-, 83.<br />
korak-, 164, 257.<br />
kos-, 36.<br />
kol-, kat-, 74.<br />
kot- « mettre bas », 74.<br />
kotor-, 256.<br />
kov-, 71. '<br />
kqs-, 140.<br />
kçt-, 141.<br />
krad-, 185.<br />
kras-, 179.<br />
kres- « battre le briquet », 227.<br />
kres- « limite », 227.<br />
krçt-, krçt-, 131.<br />
krik-, 210.<br />
kril-, 213.<br />
kriv-, 215.<br />
krîs-, krës-, 91.<br />
kroj-, krav-, 71.<br />
krok-, krak-, 79.<br />
krom-, 82.<br />
krop-, krap-, 77.<br />
krov-, krgv-, kroj-, 56.<br />
krçg-, 140.<br />
krup-, 114.<br />
krux-, krux-, 112.<br />
kud-, 120.<br />
kuk- « grogner », 121.<br />
kuk-, kvak-, 116, 171.<br />
kum-, tch., 124.<br />
kup- « rassembler », 114.<br />
kup- « acheter », 121.<br />
kur-, 117.<br />
kus-, 118.<br />
kut-, 118.<br />
kuk-, kgk-, 222.<br />
kùrm-, 251.<br />
"kùrp-, 247.<br />
kùx-, kyx-, 220. 'f<br />
kvar-, 196.<br />
kvil-, œil-, 213.<br />
kvït-, kvii-, cvït-, 89.<br />
INDEX DBS POSTVERBAUX 287<br />
kgd-, 221.<br />
kyn-, kgv-, 224.<br />
kyp-, kvap-, 171.<br />
kys-, kvas-, 170.<br />
kyt-, 221.<br />
lad-, 185.<br />
laj-, lav-, 198.<br />
lask-, 188.<br />
leg-, log-, lëg-, lag-, 41.<br />
let-, lët-, 228.<br />
lëk-, 97.<br />
-lëk- « reste », 93.<br />
lët-, 95.<br />
lëv-, 105.<br />
lëx-, 93.<br />
lëz-, laz-, 165.<br />
lik-, Igk-, 133.<br />
lik-, 210.<br />
liz-, 203.<br />
lïg-, 242.<br />
lïj-, lëj-, loj-, liv-, lëv-, 52.<br />
lïp-, lëp-, 90.<br />
Ijub-, 121.<br />
lok-, 80.<br />
lom-, lam-, 66.<br />
lov-, lav-, 86.<br />
lud- « étamer », 120.<br />
tud-, Içd- « fou », 145.<br />
lug-, 122.<br />
luk-, 116.<br />
lup-, 115.<br />
lusk-, 122.<br />
lûb-, lub-, 115.<br />
lug-, lyg-, 220.<br />
lusk-, lysk-, 218.<br />
lyk-, 218.<br />
lys-, 221.<br />
mal-, 193.<br />
*mald-, 156.<br />
*malt-, 156.<br />
mam-, 191.<br />
mar- « accabler », 196.<br />
mar- « se soucier », 197.<br />
mast-, 182.<br />
max-, 190.<br />
maz-, 181.<br />
mel-, mol-, mël-, 42.<br />
meled-, r., 113.<br />
mereg-, r., 233.<br />
met-, mël-, 228.<br />
mën- « changer », 101.<br />
mën- « mentionner », 101.<br />
mër-, 102.<br />
mës-, 91.
288 INDEX DES POSTVERBAUX<br />
mët-, 95.<br />
mçk-, 234.<br />
mçt-, mgt-, 132.<br />
mig-, 205.<br />
min- « fouler », 206.<br />
min-, mçn-, 206.<br />
mir-, 215.<br />
mil-, 208.<br />
*mïlk-, 242.<br />
*mïlz-, *malz-, 146.<br />
mîr-, mor-, 47.<br />
*mïrk-, *mark-, 152.<br />
*mïrs-, 240.<br />
*mïrsk-, 153.<br />
'mïrz-, *marz-, 149.<br />
mist-, 240.<br />
mo(d)l-, 68.<br />
mog-, mag-, 81.<br />
mok-, mak-, 80.<br />
most-, 74.<br />
mot-, 59.<br />
mgk-, 134.<br />
mad-, 113.<br />
mut-, 125.<br />
mûk-, mgk-, 218.<br />
"mitil)-, 251.<br />
mg(d)l-, 223.<br />
mgj-, mgv-, moj-, 56.<br />
mgl-, 223.<br />
mgsl-, 223.<br />
nag-, 262.<br />
*narv-, 161.<br />
nav-, 172.<br />
nés-, nos-, 36.<br />
nex-, 199.<br />
nëg-, 98.<br />
nik- « pencher », 211.<br />
nik- « nier », 211.<br />
niz- « enfiler », 204.<br />
niz- « abaisser », 208.<br />
nïr-, nor-, ngr-, 47.<br />
niz-, noz-, 36.<br />
njux-, 123.<br />
nog-, 88.<br />
nov-, 86.<br />
ngt-, 141.<br />
nud-, 113.<br />
nur-, 127.<br />
ngj-, ngv-, noj-, 57.<br />
ngr-, 224.<br />
oftuw-, 127.<br />
or- « abattre », 84.<br />
or- « labourer », 84.<br />
ostrov-, 72.<br />
o.zd-, 76.<br />
(v)gx-, 144.<br />
(V)QZ-, voir v%z-,<br />
pad-, 186.<br />
paj-, r., 199.<br />
pal-, 172.<br />
*palk-, *palsk-, 157.<br />
*palx-, 158.<br />
par-, 178.<br />
pas-, 179.<br />
pair-, 197.<br />
pax-, 190.<br />
paz-, 181.<br />
pek-, 226.<br />
*pel- « sarcler », pol-, 68.<br />
pelj-, 230.<br />
*peln-, 230.<br />
"perk-, 232.<br />
pën-, 101.<br />
pëv-, 105.<br />
pëx-, 99.<br />
pis-, 203.<br />
ptj-, poj-, piv-, 53.<br />
*ptln-, 244.<br />
*pïlz-, *palz-, 146.<br />
pïn-, pon-, pin-, 43.<br />
pïr-, por-, pir-, 47.<br />
*pïrd-, 240.<br />
"pïr g-, 177.<br />
*pïrx-, *parx-, 154.<br />
pïx-, pix-, 205.<br />
*pïzd-, 241.<br />
pjal-, r., 193.<br />
pjat-, r., 182.<br />
plast-, 182.<br />
plat-, 182.<br />
plet-, 225.<br />
pljusk-, 122.<br />
plod-, 61.<br />
plot-, 37.<br />
plov-, plav-, plyv-, plgn-, 58.<br />
poj- « chanter », 54.<br />
pok-, 64.<br />
pol-
prask-, 188.<br />
prav-, 200.<br />
prëtn-, 99.<br />
prël-, 95.<br />
prçd- « filer », 236.<br />
prçd-, prçd-, 132.<br />
prçg-, prQg-, 135.<br />
; pr^t-, 235.<br />
prçz-, 136.<br />
prid-, 121, 259.<br />
prik-, s.-cr., 211.<br />
prod-, 259.<br />
pros-, 59.<br />
prost-, 75.<br />
protiv-, 256.<br />
prad-, 120.<br />
pust-, 119.<br />
pux-, 123.<br />
*pûrt-, 246.<br />
piïl-, pgl-, 217.<br />
pûv-, 252.<br />
pyx-, 223.<br />
rab-, etc., voir *arb-, etc.<br />
rad- « content », 162.<br />
rad- « conseil », 186.<br />
rek-, rok-, rëk-, 39.<br />
rev-, 230.<br />
rëd-, 96.<br />
-rit-, 106.<br />
rëz-, raz-, 165.<br />
nd-, 236.<br />
m-, m-, 136.<br />
ns-, 234.<br />
ris-, rgs-, 207.<br />
riu-, 55.<br />
rjut-, 119,<br />
rod-, 76.<br />
roj-, 55.<br />
ron-, 83.<br />
roi-, 75.<br />
rov-, 57.<br />
rozg-, 66.<br />
rçb-, 138.<br />
rok-, 139.<br />
rud-, 114.<br />
rux-, 116.<br />
fût-, 247.<br />
rùv-, rgv-, 220.<br />
rgd-, 222.<br />
rgg-, rig-, 223.<br />
m-, 57.<br />
rgslc-, T., 222.<br />
sad-, sëd-, 166.<br />
sag-, 177.<br />
289 INDEX DES POSTVERBAUX<br />
"sald-, 156.<br />
*salp-, 147.<br />
*sarg-, 163.<br />
'sarm-, 159.<br />
ser-, sïr-, sor-, 48.<br />
'serd-, 233.<br />
sëj-, sëv-, 104.<br />
sïk-, 106.<br />
sën-, 102.<br />
sët-, 95.<br />
m-, 237.<br />
sgfc-, SQk-, 134.<br />
sid-, T., 167.<br />
sil- « force », 213.<br />
sil- « filet », 214.<br />
sïk-, sik-, 205.<br />
*sïrb-, 241.<br />
*sïrd-, 241.<br />
*sîrk-, 242.<br />
*slrx-, 'sarx-, 155.<br />
skob-, 79.<br />
skok-, 64.<br />
skom-, 67.<br />
skgd-, 137.<br />
skreb-, skrob-, 38.<br />
'skùrb-, 248.<br />
*skurd-, "skard-, 151.<br />
skvïr-, skvar-, 168.<br />
*skvïrn-, 244.<br />
slab-, 176.<br />
slav-, 172.<br />
slëd-, 92.<br />
slëp-, 92.<br />
slon-, 83.<br />
slov-, 71.<br />
slug-, 123.<br />
slut-, 119.<br />
sluz-, 118.<br />
slûx-, slux-, slyx-, 112.<br />
smag-, 189.<br />
smëx-, 98.<br />
*smïrd-, *smard-, 151.<br />
smok-, 80.<br />
smol-, 68.<br />
smçd-, svçd-, 133.<br />
smuk-, smyk-, 110.<br />
*smurk-, 248.<br />
snëg-, 93.<br />
snov-, snuj-, 86.<br />
snub-, 115.<br />
sob-, 79.<br />
soj-, 54.<br />
sok- « sève », 64.<br />
sok- « dénoncer », 64.<br />
sol-, 82.
g»<br />
III<br />
• S<br />
290<br />
sop-, sap-, 77.<br />
sov-, 86.<br />
sox-, 81.<br />
sgd-, 142.<br />
SQp-, 143.<br />
spëv-, 104.<br />
spor-, 84.<br />
staj-, 199.<br />
stan-, 195.<br />
stanov-, 258.<br />
star-, 197.<br />
stav-, 201.<br />
steg-, stog-, 66.<br />
stel-, stol-, 69.<br />
sien-, ston-, 45.<br />
*sterg-, *starg-, 153.<br />
stën-, 102.<br />
slig-, 213.<br />
stïr-, stor-, stir-, 49.<br />
*stïrb-, *starb-, 152.<br />
stoj-, 85.<br />
stop-, 62.<br />
stgp-, 138.<br />
sirad-, 186.<br />
slrax-, 191.<br />
sirëg-, 91.<br />
strèk-, slrïk-, sirok-, 65.<br />
strël-, 100.<br />
strig-, striz-, 212.<br />
strïm-, strom-, 67.<br />
slroj-, 85.<br />
strup-, 128.<br />
strûg-, strug-, 111.<br />
stud-, stgd-, 108.<br />
stuk-, 122.<br />
*sturk-, 248.<br />
suk-, 110.<br />
sul-, 125.<br />
suv-, sun-, 127.<br />
*sùdarv-, 161.<br />
sût-, sgl-, 220.<br />
"sûin-, 251.<br />
sùmotr-, 85.<br />
sùp- « verser », sgp-, 217.<br />
sâp- « dormir », sgp-, 217.<br />
sûs-, sgs-, 216.<br />
sûsgd-, 142.<br />
sûx-, sux-, syx-, 113.<br />
svar-, 197.<br />
svën-, 102.<br />
suçi-, 235.<br />
svist-, 208.<br />
*svïrb-, *svarb-, 152.<br />
suit-, svët-, s vit-, 89.<br />
svobod-, 256.<br />
ëal-, ëav-, 193.<br />
INDEX DES POSTVERBAUX<br />
sâep-, 97.<br />
séer-, 103.<br />
ëêit-, 208.<br />
ëôïp-, ëâip-, 209.<br />
"ëëïrb-, 241.<br />
s^t-, 235.<br />
Mb-, 210.<br />
ëir-, 215.<br />
ëïv-, siv-, 207.<br />
skod-, 77.<br />
*skûrt-, 247.<br />
suk-, sust-, 122.<br />
sum-, 124.<br />
taj- « fondre », 199.<br />
taj- « secret », 199.<br />
*talk-, 147.<br />
task-, 188.<br />
tek-, tok-, tëk-, 40.<br />
tep-, 229.<br />
*terb- « nettoyer », 231.<br />
terj-, T., 230.<br />
tes-, 228.<br />
tërj-, 107.<br />
tësk-, 90.<br />
tëx-, tix-, 91.<br />
tçg-, tçg-, 136.<br />
tisk-, 211.<br />
*tïtp-, 241.<br />
tïm-, 244.<br />
tïn-, ton-, tin-, 44.<br />
tïr-, tor-, tir-, ter-, tër-, 50.<br />
*tïrg- (*tùrg-), 242.<br />
tïrp-, *tarp-, 151.<br />
tjam-, r., 192.<br />
*tjul-, 119.<br />
Hum-, 125.<br />
lom-, 67.<br />
top-, ton-, 62.<br />
tov-, tav-, 57.<br />
tovar-, 257.<br />
tQp-, 143.<br />
traf-, tref-, 187.<br />
trag-, 189.<br />
trap- i creuser », 151.<br />
frai-, 183.<br />
trav-, 173.<br />
trep-, tren-, 229.<br />
trëb-, 231.<br />
trësk-, 93.<br />
trçs-, trçs-, 129.<br />
trop-, 39.<br />
trosk-, 65.<br />
trov-, 72.<br />
trox-, 81.<br />
trçd-, 137.<br />
trçt-, 141.
irçx- (trux-), 140.<br />
Irud-, 114.<br />
trup-, 115.<br />
lui-, 125.<br />
iuïB-, 117.<br />
tûk- « tisser », 249.<br />
tùk-, lyk-, 219.<br />
*tûlk- « interpréter », 249.<br />
•fô/fc-, *talk-, 148.<br />
•iûrs-, 250.<br />
•fôrfc-, 248.<br />
tûsk-, 249.<br />
• 'rfrd-, 241.<br />
'vor-, tvar-, 70.<br />
tgn-, 224.<br />
«eta/ 1 -, uder-, 178.<br />
«fe-, vgk-, 110.<br />
am-, 125.<br />
vab-, 187.<br />
vad-, 175.<br />
vag-, 190.<br />
'vald-, 157.<br />
'valg-, 149.<br />
vap-, 202.<br />
var-, 197.<br />
'oarp-, 152.<br />
*ilarsk-, 153.<br />
*varz-, 149.<br />
ned-, vod-, 38.<br />
*velk-, 'vïlk-, *valk-, 148.<br />
'verd- « nuire », 231.<br />
'verd- « valoir », 231.<br />
verst-, 230.<br />
vez-, voz-, 36.<br />
vëd-, 96.<br />
vëj-, vëv-, 104.<br />
vëk-, 93.<br />
vër-, 103.<br />
vës-, vis-, 92.<br />
vët-, 96.<br />
uçd-, (v)çd-, 133.<br />
v?z-, (V)QZ-, 130.<br />
vid-, 209,<br />
vin-, 214.<br />
vïj-, voj-, viv-, vin-, 54.<br />
vtt- « vouloir », vol-, vel-, 43.<br />
vïl- « rouler », val-, 167.<br />
VÎT- « glisser », vor-, vir-, vër-, 49.<br />
vïr- « bouillir », var-, vir-, 168.<br />
vïrg-, *varg-, 154. /<br />
vïrt-, *vart-, 150.<br />
vïrx- « accomplir », 243.<br />
vïrx-, "varx-, 155.<br />
voj- « armée », 71.<br />
voj-, r. « gémir », 57.<br />
INDEX DES POSTVERBAOX<br />
vlip-, tch., 209.<br />
vùp-, 247.<br />
*vgk- « crier », 223.<br />
vgs-, 224.<br />
xab-, 177.<br />
xaj-, 199.<br />
"xald-, 157.<br />
har-, s.-cr., 197.<br />
*xarn-, 160.<br />
xleb-, T., 229.<br />
xlçp-, 237.<br />
xlip-, 210.<br />
xmur-, 127.<br />
xod-, 37.<br />
xop-, xap-, 78.<br />
xot-, XQl-, x(o)tëv-, 60.<br />
xov-, 86.<br />
xrçsl-, xrçst-, 137.<br />
xul- « blasphémer », 126.<br />
xul- « courber », xgl-, 117.<br />
xgb-, 222.<br />
xgn-, 224.<br />
xgt-, xvat-, 170.<br />
xvat-, 193.<br />
xvast-, 184.<br />
zar-, 198.<br />
zëj-, zoj-, zëv-, zëh-, 55.<br />
zçb-, zçb-, 133.<br />
zïd-, zid-, 204.<br />
zîr- « regarder », zor-, zir-,<br />
zîr- « mûrir », zor-, 51.<br />
*zirk-, *zark-, 153.<br />
znak-, 188.<br />
znamen-, znam-, 257.<br />
znëj-, znoj-, 55.<br />
znob-, 63.<br />
zob-, 63.<br />
zov-, zûv-, zgv-, 72.<br />
zvçk-, zvçk-, 135.<br />
zvizd-, 209.<br />
zvïn-, zvon-, 44.<br />
zgb-, 222.<br />
zal-, 194.<br />
zal-, r. «piquer», 194.<br />
Zar-, 69.<br />
zas-, 180.<br />
zeg-, zïg-, zig-, gag-, 169.<br />
'Mb-, 230.<br />
iiv-, 215.<br />
•zïld-, 146.<br />
zïm-, ïim-, 204.<br />
zïn-, Un-, 206.<br />
zîr-, ier-, zir-, 206.<br />
iïv-, iev-, 239.<br />
ivak-, zvek-, 188.
DEUXIÈME PARTIE<br />
LES SUFFIXES PRODUCTIFS
CHAPITRE XIX<br />
LES SUFFIXES PRODUCTIFS<br />
§ 833. Groupement des suffixes. — Il convient de les classer<br />
d'après leur forme et non d'après leur valeur, car plusieurs suffixes<br />
présentent des valeurs diverses, qui sont à préciser. On distinguera<br />
les suffixes qui forment des substantifs et ceux qui forment des<br />
adjectifs, et parmi les suffixes de substantifs ceux de masculins,<br />
ceux de neutres, et ceux de féminins ou à flexion de féminins.<br />
La productivité des suffixes est établie principalement sur la<br />
base du vieux slave, comme représentant le plus approché de l'état<br />
commun des langues slaves, mais il faut également tenir compte des<br />
suffixes qui ont acquis ultérieurement une productivité notable<br />
dans les diverses langues slaves, et qui pouvaient l'avoir possédée<br />
de bonne heure sans que le vieux slave renseigne suffisamment<br />
à ce sujet.<br />
SUFFIXES MASCULINS<br />
§ 834. Sufîixe -ici. — Ce suffixe apparaît avec plusieurs valeurs :<br />
1. Il fournit des noms d'agents tirés de thèmes verbaux. En vieux<br />
slave :<br />
blaznïcï « trompeur » (Ham. 263), de blazniti « égarer » ; — borïcï<br />
« lutteur » ; — cïtïcï « lecteur » ; — crupïcï « qui puise, échanson »<br />
(Ham.) ; — davïcï « donneur » ; —- gçdïcï « musicien » ; — jazdïcï<br />
« chevaucheur » (Hés., Cant. I, 19) ; — kupïcï « marchand », de<br />
kupiti « acheter » ; — lïstïcï « trompeur » ; — Ijubïcï « amateur »<br />
(Pand. Ant., Athan.) ; — lovïcï « chasseur, pêcheur » ; — pëvïcï<br />
«chanteur»; — pisïcï «peintre» (Yirg.) : — plçsïcï «danseur»;<br />
— sëcïcï « qui tranche, bourreau » ; — sopïcï et svirïcï « joueur de<br />
flûte » ; — sïvïcï « tailleur, cordonnier » (J. Ex.) ; — tvorïcï « faiseur,<br />
créateur » ; — vidïcï « spectateur » ; — zïrïcï « sacrificateur ».<br />
Avec préverbe : unurïcï «voleur, perce-muraille» (Ham. 7518),
296 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
de -nuriti «piller» (§ 614); — provëdïcï «qui sait à l'avance»<br />
(Hés. LXXXIX, 3). Et avec de nombreux composés :<br />
bogocïtïcî ; — blago-, mïzdo- et mïzdootu-, zaimo-, zakono- et<br />
zizno-davïcï ; — bogo-, cedo- (Pand. Ant.), cisto-, clovëko-, dobrodëlële-<br />
(Athan.), kroto-, niste-, sïrebro-, slovo- et xrïsto-ljubïcï ; —• jçdro-,<br />
skoro- et zivoto-pisïcï (Virg.) : — drëvosëcïcï (Ham.) ; — ëudo-,<br />
miro-, pobëdo-, rodo- et zivo-tvorïcï ; — bogoubiicï ; — bogo- et<br />
samo-vidïcï. Et avec des dérivés attestés seulement en composition :<br />
divobljudïcî (A. Test.) ; — jedino- (Ham.) et samo-drûzïcï ;<br />
— lixo- (Izb. Svjat.), mïzdo-, myto-imïcï, et bogo-, stranïno-priimïcï<br />
; — ëuêde- (Ham. 41 x) et suxo-jadïcï ; — bogo- et slraslonosïcï<br />
; — slraslolrupïcï ; —- srudïcevëdïcï ; — nevëstovodïcï (Gr.<br />
Naz.) ; — zvëzdozïrïcï.<br />
2. Le suffixe fournit des diminutifs :<br />
domïcï « petite maison » (Ham.) ; —- gradïcï « bourg » et « jardinet » ;<br />
-— kovïëezïcï « petite caisse, cassette » ; — oblaëïcï « petit nuage » ;<br />
— odrïcï «petit chevalet, gril» (§ 1114) ; — pïsïcï «petit chien»<br />
(Ham.); — rozïcï « xspdcTiov, petite corne, caroube»; — sçcïcï<br />
« brindille » : — susïcï « mamelon, bout de sein ».<br />
"3. Il sert à substantiver des adjectifs :<br />
bradatïcï « le barbu » (Ham.) ; — laskavïcï « le flatteur » (Athan.) ;<br />
— Ijutïcl «le violent»; — mçdrïcï «le sophiste» (Athan.) et<br />
prëmçdrïcï «le sage » (Gr. Naz., Athan.) ; — mrutvïcï «le mort» ;<br />
— pamçtivïcï «celui qui se souvient» (Athan.). — pësnivïcï «le<br />
chanteur d'hymnes » (Gr. Naz.) ; — slëpïcï « l'aveugle » ; — starïcï<br />
« le vieillard » ; — svetïcï « le saint » ; — xromîcï « le boiteux » ;<br />
— xytrïcï « l'habile ». En composition :<br />
sesiokrilatïcï « le (Séraphin) à six ailes » ; — bëlorizïcï « le (prêtre<br />
séculier) à vêtemeiit blanc, gr. Xeu^sqxwv » et crunorizïcï « le (moine)<br />
à vêtement noir, gr. ^sXavstfAcov », abrégés en bëlïcï (Gosmas) et<br />
crûnïcl ; — pruvorodïcï « le premier-né » ; — bogoslovîcï « le<br />
théologien » et pravoslovïcï « l'orthodoxe ».<br />
Et désignant des choses : studenïcï « puits, source », trïzçbïcï<br />
« trident ».<br />
Il faut noter en particulier des dérivés du participe parfait en<br />
-lu, qui est originellement un adjectif verbal (§ 384) : prisïlicï<br />
« le (nouveau-)venu », otùsïlïcï « celui qui s'est retiré, l'anachorète » ;<br />
stradalïcï (Pant. Ant.) « celui qui a souffert, le martyr », et chez<br />
Hamartole Bogostradalïci 47610, « ceux qui ont fait souffrir Dieu »,<br />
les ®soK
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 297<br />
composés possessifs (§ 1227), peuvent être en même temps<br />
substantifs, ainsi bogoslovu. « théologien » et r. bogoslôv, subst.<br />
Et il peut même se tirer de purs substantifs : samovlastïcï « l'autocrate<br />
» comme samodruzicl, cetvrutovlastïcï « le tétrarque », chez<br />
Hamartole jedinovlastïcï « le monarque », et même jedinovojevodïcï<br />
52223 « le général en chef », dans une glose à jedinosiratigu<br />
[AOVOCTTP
298 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
On doit rattacher aussi aux singulatifs les noms en -ïcï qui<br />
désignent les originaires d'une région, comme les singulatifs en<br />
-janinu. Le type apparaît récent dans l'ensemble, mais on trouve<br />
déjà chez Hamartole Vlukogradïci 716 calquant AUXOTOXÏTOCI, et<br />
Lïvogradïci AsovTora>XÎTai, variante de Leontograzane. L'interprétation<br />
par « le muet, nëmu », du nom Nëmïcï de « l'Allemand » est<br />
traditionnelle, mais n'est pas satisfaisante, même si un thème nëmde<br />
nom de région n'est plus identifiable.<br />
Le suffixe -ïcï prenait la forme -ici (§ 1044) dans les dérivés de<br />
thèmes en *-yo- : korab(l)icï «petit bateau » de korabljï. Dans les<br />
dérivés de thèmes verbaux, il est à côté de masc. -ïca (§ 876) :<br />
ubiicï et ubiica, etc. C'est exceptionnellement qu'on trouve chez<br />
Hamartole basnozizdïcï « bâtisseur de fables, fAuOoTCXacrnjç » sur le<br />
thème de présent ziède- de zïdali ; pour ëuzexystïcï 2006, c'est une<br />
variante de -xystïniku (§ 843). On lit jçdropisïca, gén., Ps. XLIV, 2<br />
dans le Psautier du Sinaï, mais les autres manuscrits portent<br />
jçdro pisçsta (Bon.), bruzo pisçsta (Théod.), skoropisïca (Pog., etc.) :<br />
il ne s'agit donc que d'une confusion entre le participe présent<br />
pisçst- et le substantif -pisïcï.<br />
Les formations dérivées en -ïcï sont ordinairement claires,<br />
mais tous les mots à finale -ïcï ne le sont pas, et un certain nombre<br />
appellerait des explications. On notera :<br />
synovïcï « fils du frère, neveu » : c'est une substantivation de<br />
l'adjectif *synovu, ou un élargissement de synovï du vieux serbe<br />
(§171);<br />
otïcï « père » est, lui, visiblement un diminutif sur le thème<br />
ot- (§ 34) ;<br />
vluëïcï « plante à piquants », r. volëéc « chardon », l'est sans doute<br />
de vlùku. « loup » ;<br />
konïcï « bout, fin » doit être simplement le diminutif du postverbal<br />
*konu (§ 727), et le sens «fil» des langues méridionales, s.-cr.<br />
kdnac, etc., se comprend comme « bout » du fil qui sort de la<br />
quenouille ;<br />
v. si. gostinïcï « place », pol. gosciniec « chaussée, grand-route »<br />
et « auberge », tch. hostinec « hôtellerie », est substantivé de l'adjectif<br />
gostinu (§ 966) de gostï « hôte » et doit avoir signifié la place réseryée<br />
aux hôtes ou étrangers, aux marchands, la place du marché ;<br />
kuznïcï « forgeron » (Pand. Ant., Ham.), r. kuznéc, est dérivé de<br />
v. r. kuznï « travail de forge » ( § 1109) et indique une extension<br />
du type en -ïcï de noms d'agents dérivés de thèmes verbaux,<br />
kupïcï, etc., à des dérivés de thèmes de substantifs ;<br />
r. skvoréc « étourneau », s.-cr. skvôrac (ëvôrak), etc., est sur la<br />
base expressive *skvïr- au sens de «crépiter» (§ 453), ukr. skvéret<br />
» cri perçant» (§ 816).
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 299<br />
Si *lonïcï « pot (de terre) », limité aux langues méridionales,<br />
n'est pas expliqué, son synonyme v. si. grunïcï est un dérivé de<br />
*gùrnu «four» (§ 1072) et pourrait en être le singulatif, un pot<br />
d'une fournée, car le bulgare a gârné, plur. grânci, et le serbo-croate<br />
grne à côté de grnac.<br />
Le slavon zelçdïcï « estomac », s.-cr. zèludac, slov. zelçdec, r.<br />
zelûdok, pol. zoiqdek, n'est pas séparable du nom du « gland »,<br />
zelçdï, et il pourrait en être une sorte de singulatif, en regard de<br />
« gland » au sens collectif de « glandée » qu'il a en slovène, comme<br />
zîr (§ 795) en serbo-croate ; mais il faut observer que l'emploi<br />
figuré d'un mot peut utiliser un suffixe de diminutif pour indiquer<br />
la ressemblance, ainsi en français « chevalet », de « cheval ».<br />
Le mot *lïtvïcï Hés. XCVII, 5 (lûtvecu Bon., letvecï Sof.) est un<br />
hapax qui rend 7tÀîjxTpov « plectre » ; — palïcï « (gros) doigt, pouce »,<br />
r. pâlec, lié vraisemblablement à palica «bâton» (§ 881), n'a pas<br />
d'explication satisfaisante ; — korïcï n'est dans l'Évangile vieuxslave<br />
qu'une altération de koru « xopoç, mesure (de blé) », mais<br />
par substitution à ce mot grec du mot slave qui signifie « puisoir »,<br />
r. koréc « godet » et « boisseau », et dont le rattachement à kora<br />
« écorce » n'est pas plus assuré que pour koryto « auge » (§ 1177).<br />
Le mot vënïcï « couronne » est mal appuyé par un simple *vënu<br />
faiblement attesté (§ 1073), et la correspondance avec lit. vainikas<br />
de même sens est trop belle pour ne pas être le résultat d'un<br />
emprunt du lituanien au slave, d'une adaptation de pol. wianek,<br />
comme le lette vainaks de r. venôk. Mais ce n'est pas une raison<br />
pour rejeter avec Meillet (Études, p. 447) l'appartenance à la<br />
racine *vej~ «tresser» de vëja «branche» (§ 1026) vëtvï, confirmée<br />
par v. r. vëniku « faisceau, botte » (§ 1043).<br />
§ 836. Le suffixe dans les langues slaves. — Il se maintient<br />
largement, mais inégalement productif dans ses diverses valeurs,<br />
et le détail des faits est à préciser dans chaque langue.<br />
En russe, le type des noms d'agents et celui des adjectifs substantivés<br />
sont toujours représentés : kupéc, slepéc, etc., mais ils ne<br />
sont plus productifs ; le type des diminutifs l'est resté : kapitâlec<br />
« petit capital », zavôdec « petite manufacture », doxôdec « petit<br />
revenu », mais il est concurrencé par le type en -ok ( § 840) ; est<br />
vivant l'emploi du suffixe pour la formation des noms d'habitants :<br />
Novgorôdec, Kavkâzec, et dans les types nouveaux de komsomôlec<br />
et prosvescénec.<br />
En polonais, -iec subsiste, abondant en vieux polonais, mais se<br />
restreignant ensuite et surtout traditionnel : chiopiec « garçon ><br />
de chiop, mais les diminutifs sont en -ek, -ik (§ 1042), et de stôi<br />
« table » le diminutif n'est plus stolec, mais stolik ; les noms d'agents,<br />
type peu développé dès le vieux polonais, sont limités aux dérivés
300 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
de verbes en -ic : lowiec « chasseur », mais plus usuellement iowca<br />
(§ 876) ; les adjectifs substantivés se maintiennent : starzec, et<br />
mçdrzec, mais à côté de mçdrek (§ 840), et slepiec est couramment<br />
remplacé par slepak (§ 862).<br />
En tchèque : type chlapec, mais surtout vieux-tchèque, et<br />
stolec est mod. stolek ; starec, bohatec ; Moravec ; lovec, zlocinec ;<br />
— en serbo-croate : bddac « piquant », stôlac, slârac, Biàgradac.<br />
Le sorabe se distingue par la suppression de l'alternance de la<br />
voyelle «mobile» (§ 119) : krawc «tailleur» pour pol. krawiec,<br />
siarc.<br />
La règle ancienne du vieux slave de répartition de -ici et -nikû<br />
ne joue plus régulièrement en russe et dans les langues du nordouest<br />
: r. urozénec « natif » à côté du participe passif urozdënnyj ;<br />
privéréenec « partisan », part, passif privérzennyj ; pol. posianiec<br />
«messager» d'un plus ancien posian(n)ik, et r. poslânec, tch.<br />
poslanec.<br />
En serbo-croate, le type productif des noms d'agents apparaît<br />
élargi en -lac : prélac « fileur » de prédë-, dâvalac « donneur »,<br />
vlâdalac « qui gouverne, souverain », hvàlilac « louangeur », màlilac<br />
« solliciteur ».<br />
En Slovène, on a un élargissement en -vec : délavée « travailleur »,<br />
delîvec « diviseur » ; cette formation, qui paraît continuer celle<br />
du type v. si. pëvïcï « chanteur », mais avec rattachement à -avu,<br />
-ivu du participe passé parallèle à -alu, -ilu de participe parfait,<br />
est celle du slovène ancien, mais au milieu du xix e siècle elle a été<br />
concurrencée par -alec, -ilec pris au croate -alac, -ilac, et dans la<br />
langue actuelle des formes igrâvec « joueur », noslvec « porteur »,<br />
maintenues dans le dictionnaire de Pletersnik, sont remplacées<br />
par igrâlec, nosîlec. En réalité, il s'agit d'un flottement de l et v,<br />
avec l prononcé m devant consonne (§ 15) : délahc, gén. délawea.<br />
L'accent est en russe sur la finale dans les dérivés de thèmes<br />
monosyllabiques : kupéc, gén. kupcâ, mudréc, gén. mudrecâ, et<br />
prodavéc « vendeur » ; et il est sur la base dans le cas des thèmes<br />
polysyllabiques : lenivec, ëudotvôrec, privérzenec comme privérzennyj.<br />
Semblablement en serbo-croate : bddac, stôlac, slijèpac,<br />
et donosac, izvorac, ùdarac, mais sludènac, et l'intonation rude fixe<br />
l'accent sur l'initiale : hïlac, hljëbac, stârac, lâkomac. En slovène,<br />
on trouve l'accent final : kupèc, gén. kupcà, mais ordinairement<br />
les accents intérieurs avec ou sans métatonie : lôvec, bôdec, brâlec,<br />
bêlec, sludénec.<br />
§ 837. Origine du suffixe. — C'est l'élargissement en *-ko- de<br />
thèmes en -i-, à côté d'autres élargissements, en *-u-ko-, etc. Ce<br />
suffixe élargi apparaît tout constitué dans les langues indo-
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 301<br />
européennes, mais avec des valeurs diverses, et le balto-slave<br />
occupe une place à part.<br />
En grec, -ixôç est très productif, mais comme formation<br />
d'adjectifs dérivés de substantifs du type wnuxoç de ÏTZT:OÇ « cheval »,<br />
comme en sanskrit açvikdh de âçvah, en latin modictts de modus,<br />
en vieux haut allemand kreftig «fort» de kraft « force ». Pour la<br />
base, les thèmes en -i-, le grec a quelques adjectifs en -iç (§ 276),<br />
surtout en composition : a^aptç « ingrat » ; il a des substantifs en<br />
-iç, masculins ou féminins, qui ont valeur de noms d'action plus<br />
fréquemment que de noms d'agents, et qui peuvent être en regard<br />
de thèmes verbaux, ainsi xpo^iç « coureur » de rps^w. C'est surtout<br />
en sanskrit qu'on trouve des thèmes en -i- à valeur verbale :<br />
jaghnih « qui tue »,. saho-bhdri- « portant la force » ; on y trouve<br />
aussi, mais rarement, des diminutifs en -ika- : usrikâh de usrdh<br />
« taureau », à côté dp -aka- : maryakah de mâryah « homme », fém.<br />
ajikâ et ajakâ de ajâ « chèvre ».<br />
En germanique, le suffixe de substantivation n'est pas v. h. a.<br />
-ig, mais -ing (§ 1008).<br />
En balto-slave, le type des adjectifs en -i- n'est plus reconnaissable<br />
en baltique, et il n'a laissé en slave que des traces, d'ailleurs<br />
abondantes. L'élargissement lit. -ikas fournit au baltique, comme<br />
au slave, des substantifs dérivés, et les valeurs en sont les mêmes<br />
qu'en slave, si ce n'est que les langues baltiques sont évoluées<br />
et que certaines valeurs se sont estompées. Pour la formation des<br />
noms d'agents, le type reste usuel : lit. arlkas « laboureur » de ariù,<br />
ârti « labourer », minikas « fouleur » de minù, minti « fouler », et<br />
v. pr. mynixn tanneur » ; siuvikas (et -kis) « tailleur », v. pr. schuwikis<br />
« cordonnier », comme si. sïvïcï. Dans la substantivation d'adjectifs,<br />
on a lit. naujikas « le novice » de naùjas, couramment -ikis, ainsi<br />
jaunlkis « jeune gars, fiancé » de jàunas, et v. pr. swintick- « le<br />
saint » de swints. La formation des diminutifs est mal conservée en<br />
lituanien : isolément zirnis « pois » et zirnikas « gesse » (pour<br />
vainikas « couronne », voir § 835), et elle ne se maintient qu'avec<br />
les féminins en -iki, mais elle était vivante encore en vieux<br />
prussien : malnijkiks « petit enfant » de malnijks « enfant »,<br />
wijrika- « petit homme » de wijrs.<br />
L'accent du balto-slave, lit. -ikas, r. -éc, gén. -câ, s'accorde<br />
avec l'accent -ikâh du sanskrit, -ixoç du grec.<br />
y SUFFIXE -ukÙ<br />
§ 838. En regard de thèmes verbaux. — Le vieux slave présente<br />
une série de substantifs en -tuku dérivés de thèmes verbaux terminés<br />
par voyelle, diphtongue nasale ou r :
302 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
izbylukù « abondance, superflu », prïbylukû « gain », et v. r.<br />
dobytûku, ubytuku. ;<br />
naëçtukû « commencement » ;<br />
nedostatûkû « manque » et nestatùku (Gr. Naz.), ostatûku « reste »,<br />
et v. r. statuku, sûstatukû ;<br />
usituku (Éphrem) « chaussure cousue » ;<br />
sûvitukû « rouleau (de livre) ».<br />
Et en slavon oîûdaiûku et pridatuku ; prijçtûku « ce qu'on<br />
accepte », de pri-jçti ; — poziiûku « ressources », de po-ziti ; — isporoiokû<br />
(slavon russe) « produit d'incision, d'opération césarienne »,<br />
dans une glose d'Hamartole, 2054, de v. si. -porje-, -prati<br />
« éventrer », et r. vyporotek « avorton », etc. (§ 839).<br />
Dans les langues slaves : r. doddtok, napitok « breuvage », slov.<br />
izlîlek « déversement », nalîtek « infusion », etc. ; s.-cr. dobitak,<br />
poëétak et zacétak, dodâtak, napllak, navitak, povitak et zavîtak,<br />
uzitak, et gubilak « perte », vezîtak « broderie », et également osnûtak<br />
« ourdissage, fondation », sur la base snu- du présent àsnujë- de<br />
osndvati « ourdir ».<br />
Parallèlement à -tukû, on a -nûkû dans v. si. ostanâku « reste »,<br />
slavpn stanukû, nedostanuku, sûstanùku, et danuku « don », bulg.<br />
dânâk, s.-cr. dânak, sor. dank.<br />
Des thèmes verbaux terminés par consonne, les dérivés sont<br />
en -ûku ; en vieux slave :<br />
ulomùkû «fragment» (Ham.), slavon izlomukû, prëlomukû ;<br />
sûpletûku « entrelacement » ;<br />
urëzuku « tranche » (Virg.).<br />
Et en slavon : uimukû « ce qu'on enlève » ;—primësukû « mélange » ;<br />
— upaduku « ce qui tombe » (Hénoch) ; — priplodukû « gain de<br />
fruit, supplément de récolte » ; — usëdûku « émigré » ; — sûvrûtukû<br />
« rouleau » ; — doxodûku « rentrée, revenu » ; — et opïnukû<br />
« chaussure », de o-pçti, qui est s.-cr. àpanak « sandale de cuir »,<br />
slov. opânek ; — v. r. uëastuku « part », vykupukû « rachat ».<br />
Dans les langues slaves : r. uëâstok, oblômok, upâdok « décadence »,<br />
oirézok « segment, retaille », postupok « démarche », svërtok ; — pol.<br />
ancien zamçtek « trouble », odslçpek « cession » ; — tch. zàmotek<br />
«cocon», smuiek «tristesse» et zâ(r)mutek (§ 762), podvazek<br />
« jarretière » de vçz- ; — s.-cr. zàgrizak « morceau arraché par<br />
morsure », izlazak « sortie », nàmetak « supplément », dàhodak. Etc.<br />
§ 839. En regard de noms. — Beaucoup de dérivés de thèmes<br />
verbaux le sont aussi bien de thèmes nominaux. Le serbo-croate<br />
a izlazak en regard du postverbal izlaz, et il distingue assez nette-
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 303<br />
ment les deux formes, Izlaz au sens concret d'« issue » et Izlazak<br />
au sens abstrait de « sortie », de même ùlaz et ùlazak « entrée », etc.<br />
Comme purs dérivés de noms, on trouve en vieux slave :<br />
des dérivés de nombreux ordinaux (§ 317), cetvrùlùkû «jeudi»,<br />
pçluku « vendredi », slavon desçlùkû « la dîme » ; et sur ce modèle<br />
v. r. polutùku « la moitié », s.-cr. ancien polulak ;<br />
slanutûku « pois chiche », mot qui appartient probablement<br />
au groupe des dérivés en -tuku de participes présents, slavon<br />
vrçtukû « source », dont le suffixe sera étudié § 1178 ;<br />
sipùku « rosier » et « grenadier », s.-cr. sîpak, dérivé de *sipû,<br />
r. sip « piquant, épine », s.-cr. slp ;<br />
xrçstûku « cartilage » (J. Ex.), pol. chrzqstek (usuellement<br />
chrzqstka), de *xrçstu « ce qui craque » (§ 764).<br />
pësûku « sable », r, pesôk, etc., qui répond à skr. pâmsûh « poussière,<br />
sable » avec dérivé pâmsukah : ce qui permet de supposer<br />
qu'en slave un groupe ms a pu connaître un autre traitement que<br />
dans mçso « chair », skr. mâmsdm, got. mimz, et donner *ps, d'où s,<br />
comme le groupe mt a donné (p)t (§ 41) ;<br />
lixotûkû «abondance», élargissement de lixot- (§ 1174);<br />
cesnovitùku « ail » (Éphrem, Ham.), sur l'adjectif cesnovitu<br />
(§ 990), paraît être un croisement de la variante slavonne cesnovitïcï<br />
avec *cesnùku, r. cesnôk, dérivé de *ëesnu (§ 1072).<br />
En slavon :<br />
ëlënuku, clanûku « articulation », v. r. celenùku, pol. czionek,<br />
s.-cr. clânak, sur clënu, clanu (§ 1073) ;<br />
darûku, sur daru « don », est diminutif dans r. darôk, s.-cr.<br />
ddrak ;<br />
lisiûku « feuillet », r. listôk, s.-cr. listak, est diminutif de listu.<br />
« feuille », qui paraît avoir été un thème en -u- (§ 1161) ;<br />
pçpûkû « nombril » et « bourgeon », r. pupôk, s.-cr. pûpak<br />
« nombril » et pûpak « bourgeon », peut être un diminutif de pgpû<br />
(§ 764), ou tiré de son verbe dénominatif, r. pupit' « faire gonfler »,<br />
s.-cr. pùpaii « bourgeonner ».<br />
pamqlûku. « un mémoire, registre » (et v. si. pamçtuka, § 885),<br />
r. pamjatôk, doit être le dérivé d'un verbe dénominatif de pamçtï,<br />
v. r. pamjatiti, pamjatovali.<br />
Pour v. r. zeralûkû « cendre », voir § 1178.<br />
Le vieux-russe synukU, et vieux-serbe, vieux-slovène, r. mod.<br />
synôk, etc., sur synu « fils », est le seul exemple net à date ancienne<br />
de diminutif d'un thème en -u-. De domu (§ 160), le diminutif<br />
attesté en vieux slave est domïcï (§ 834), et la forme r. domôk,<br />
s.-cr. dàmak, apparaît postérieure.
304 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Dans les composés nominaux, on trouve en vieux slave :<br />
bezdomuku « qui est sans maison » (Izb. Svjat.), besramûku<br />
« l'éhonté », et il faut donc rattacher voc. bestudïce Supr. 41516<br />
à bestudûkû, et non -dïcï. Ce sont des substantifs dérivés d'adjectifs,<br />
slavon bestudu « éhonté », pol. bezsromy, composés possessifs<br />
(§ 1227) à premier terme bez- (§ 1219).<br />
pabirùku. « grappillon », parodukû «fruit non mûr» (§ 1220);<br />
et slavon pabradûku « menton », pasiorûku « fils d'un premier lit »)<br />
que le vieux russe remplace par pasynuku, v. r. parobukû « garçon ».<br />
Comme formes à préverbe ou préfixe, on a en vieux slave :<br />
oprësnûku « azyme », r. opresnôk, v. pol. oprzasnek, sur l'adjectif<br />
slavon prësnu, r. présnyi (§ 1070), mais différant de r. presnôk<br />
« pain sans levain », variante de presnéc, par son préfixe, qui est<br />
le préverbe de r. opresnît' «dessaler».<br />
zaprùtûku « œuf couvi » (Cosmas), pol. zapartek (puis zaparstek),<br />
tch. zâprtek, dérivé du thème verbal de r. pôrtit' « gâter », pol.<br />
zaparciec «devenir couvi» (§ 813); et r. zâporlok et zâporotok,<br />
par confusion avec le thème por- du slavon isporotoku « produit<br />
d'opération césarienne» (§ 838), auquel se rattache r. vyporotok<br />
« avorton », pol. wyprôtek et vyporek, tch. spralek.<br />
Et des dérivés de locutions nominales :<br />
podolukû « bord du vêtement » (Gr. Naz.), sur dolu « le bas » ;<br />
naprûsùku (Pand. Ant.) « qui est sur la poitrine, favori » ;<br />
poslëduku «extrémité, fin» (J. Ex.), s.-cr. posljedak «résultat».<br />
Et slavon naslëdûku « héritage », r. naslédok ; — obirukû<br />
« glanes », comme v. si. pabîrûku. « grappillon » ; — poëinûku.<br />
« commencement », r. pocinok « champ défriché » à côté du postverbal<br />
pocln ( § 727) ; — utinukù « partie tranchée », de v. si.<br />
u-tïne-, -tçti (§ 457), postverbal r. (po)tin (§ 727) ; — v. r. zautrukû<br />
« déjeuner » sur v. si. za ulra « au matin » (§ 76), r. mod. zâvtrak,<br />
slov. zâjutrek (zâjtrk), pol. ancien zajutr(z)ek « lendemain » et tch.<br />
zitrek.<br />
Et dans les langues slaves : r. napërstok « dé » sur perst « doigt »,<br />
zatylok « occiput », ozâdok « arrière » ; pol. podnozek « tabouret »,<br />
pogiôwek « chevet » et tch. pohlavek « soufflet, taloche » ; s.-cr.<br />
nàpredak « progrès » et nàzadak « régression », osvîtak « aube »<br />
à côté de ôsvït (§ 745). Etc.<br />
§ 840. Dans les langues slaves. — La productivité du suffixe<br />
s'est continuée, avec certains changements selon les valeurs,<br />
des limitations, et une grande extension surtout par substitution<br />
à -ïcï : tendance qu'on retrouve avec les féminins en -ka pour
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 305<br />
-ica et -ica (§ 886) et avec les neutres en -ko pour -ïce (§ 924),<br />
et qui rejoint la décadence de l'alternance k : c (§ 111) ; les deux<br />
formes se rencontraient dans le nominatif pluriel en -ici et -iïci,<br />
dans le vocatif en -ïëe et -uce, et elles pouvaient se confondre dans<br />
les locatifs pluriels en -icixu et -ûcëxu.<br />
En russe, on a des noms d'agents ezdôk « cavalier », gén. ezdokâ,<br />
pour le plus ancien ezdéc, strelôk « tirailleur », gén. strelkd, à côté<br />
de streléc « archer » ; le type oblômok « fragment », et sans préfixe<br />
skacôk « saut », de skakdt' ; et tout un type de diminutifs, golosôk,<br />
listôcek de listôk, ucdstocek de uëdslok « part ». De -ici antérieur,<br />
l'alternance k : c se maintient : zuëôk de zuk « scarabée », druéôk<br />
et druzôcek de drug « ami ».<br />
En polonais, on a le type oblomek, okrqzek « ce qui entoure »<br />
sur okrqzyc ; celui des adjectifs substantivés : slepek à côté de<br />
slepiec, rnedrek « faux sage » différencié de mçdrzec « sage » ; des<br />
diminutifs, bratek de brat, baranek « agneau » de baran « bélier »,<br />
woiek « bouvillon » de wôl.<br />
En tchèque, le type ûlomek ; stdrek « (contre)maître » à côté de<br />
slarec « vieillard » ; domek et domecek, chlapecek de chlapec « garçon ».<br />
En serbo-croate, ùlomak, et sans préverbe lïjevak « entonnoir »,<br />
tàcak « roue » ; diminutifs bàjak de bôj « combat », zalogdjak de<br />
zàlogdj « bouchée ».<br />
En slovène, ulçmek, dohçdek « revenu » en regard de dohôd<br />
« arrivée » ; diminutifs cvêtek de cvêt, grâsek (grâhek) à côté de<br />
grâsec (grâhec), de grâh «pois».<br />
Le sorabe se distingue, comme pour -ici, pour la perte de<br />
l'alternance de la voyelle « mobile » : h. sor. dôstatk, diminutifs<br />
synk, mudrack de mudrak « faux sage », et domck, gén. domcka,<br />
de dom. Il en est de même en kachoube : potômk, pour pol. potomek.<br />
L'accent est généralement des types r. domôk, gén. domkâ,<br />
golosôk, sans préfixe, mais listôëek de listôk ; et avec préfixe postûpok,<br />
otgolôsok.<br />
§ 841. Origine. — C'est à la base un élargissement en *-kode<br />
thème en -u-, comme -ici de thème en -i-, et -nuku et -tûku de<br />
thèmes en *-nu- et *-tu-. Cet élargissement apparaît le plus<br />
clairement dans le type d'adjectifs en -ûku en regard de -us du<br />
baltique (§ 983).<br />
Un suffixe -uka- existe en sanskrit, mais peu fréquent : ainsi<br />
pâmsukah de pàmsûh «poussière»; en grec, -uxoç, adj., est très<br />
rare. En balto-slave, le suffixe avait de l'importance, et les langues<br />
baltiques l'attestent, mais avec une extension moindre qu'en slave :<br />
en lituanien, dans quelques noms d'agents ou d'instruments,<br />
dans des adjectifs substantivés : raudùkas « étalon roux », de<br />
raûdas « roux » ; et -ùkas, -iùkas comme formation de diminutifs :
306 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
pars(ijùkas de pafsas « goret », îiltùkas de tiltas « pont » ; —• en<br />
lette bèrnuks de bèrns « enfant » ; — en vieux prussien gaylux<br />
« hermine » de gaylis « blanc ».<br />
SUFFIXE -niku.<br />
§ 842. Suffixe -eniku. — Le suffixe -nikù apparaît sous deux<br />
formes, -eniku et -ïniku. La forme -eniku est celle des dérivés de<br />
participes passifs en -(jjenu. En voici la liste en vieux slave :<br />
blazenikû « le bienheureux », de blazenu « bienheureux », blazili<br />
« faire, estimer bienheureux », et oblazeniku de oblazenu, oblaziti ;<br />
kazenikd « eunuque », de kaziti « endommager » (§ 781) ;<br />
krûmljeniku « nourrisson », et r. kôrmlenik : Supr. 3841S krumïjenici<br />
o i ... ÇÊXTOCTOI TOXLSSÇ, supposant une leçon meilleure ot ...<br />
Tpôçtfxot. TOXÏSSÇ ;<br />
Ijubljeniku «l'aimé» (Izb. Svjat., Éphrem), et vuzljubljeniku ;<br />
dans Supr. 5i Ijubïjenici tvoi, 2191B Ijubïjenici svçtyixu, le mot rend<br />
oi èpaaral et paraît signifier « ceux qui aiment », mais ce doit être<br />
par confusion de spxazai et de spxaroi ;<br />
mçceniku « martyr » ;<br />
svçsteniku « prêtre » (gr. îspcojjivoç) ;<br />
uceniku « élève ».<br />
Et rûveniku « puits », Euch., Ps. LXVIII, 16 dans tous les<br />
manuscrits, sauf Ps. Sin. rovïniku, et Hés. L, 2 (2 ex.), à côté du<br />
féminin ruvenica «fosse» (§ 880), d'un participe passif *ruvenu de<br />
ryli « creuser » (§ 519).<br />
Dans les autres langues, où l'on trouve r. -enec pour -eniku<br />
(§ 836), et qui ne distinguent plus -eniku de -enïniku, on peut<br />
considérer comme anciens le slavon russe stavleniku « l'ordonné<br />
prêtre », mod. stâvlennik de stâvlennyj, et le vieux-polonais zlorzeczenik<br />
« le maudit » (W. Doroszewski, Monoyrafje stowotwôreze,<br />
p. 169) de ziorzeczyc « maudire », tch. zloreëeny « maudit ».<br />
Il n'y a pas d'exemple valable d'un suffixe -aniku parallèle<br />
à -(j)eniku : le vieux slave a pomazanïniku «l'oint» (Ps. Sin.,<br />
Pand. Ant.), et une graphie pomazaniku (J. Ex.) est secondaire,<br />
comme izûbranici « les élus » Hés. XVII, 27 Bon. pour izbran'nioi<br />
des autres manuscrits, et comme la forme isolée izàrëzanïkû Athan.<br />
« le castrat ».<br />
§ 843. Suffixe -ïniku. — Les exemples en sont innombrables,<br />
et il faut s'en tenir à ceux des textes vieux-slaves, une partie<br />
seulement.<br />
On a un groupe important de mots qui ont l'aspect de noms
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS<br />
d'agents tirés de thèmes verbaux : blçdïniku « radoteur », blçdïnikû<br />
,i fornicateur », grësïniku « pécheur », postïniku « jeûneur » ; bogosvarîniku<br />
« lutteur contre Dieu » ; ispovëdïniku, « confesseur », naslëdïnikû<br />
•i successeur », nastavïniku « directeur » et pristavïniku « administrateur<br />
», poklonïniku « adorateur », prëstgpïniku « transgresseur »,<br />
priëçstïnikù. « participant », zasëdïniku « tendeur de pièges ». Le<br />
suffixe -ïniku se rencontre avec le suffixe -leljï qui est spécifiquement<br />
suffixe de noms d'agents déverbatifs : iskusïniku et iskusiteljï<br />
«qui éprouve, tentateur» (§ 848).<br />
Cet aspect de suffixe de noms d'agents n'est qu'une apparence,<br />
mais qui tend à devenir réalité. On trouve aussi bien des dérivés<br />
en -ïniku de sens passif : plënïniku « le captif », çzïniku et çzïniku<br />
« l'enchaîné », naimïnikû « le salarié, pris à gages », skvrùnïniku<br />
308 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Le sufflxe peut, comme -ïnu (§ 977), se tirer du thème en -endu<br />
participe passif et du substantif verbal : neizdrecenïnikû<br />
« l'ineffable », et se superposer à un autre suffixe : sur -leljïnû<br />
(§ 848), obrëteljïniku «inventeur», priobrëteljïnikû «fournisseur»<br />
et adj. ubiteljïnicïskû « des meurtriers » dans le Suprasliensis,<br />
dans la traduction d'Athanase izobrëieljïniku, sûdëteljïnikû « celui<br />
qui fabrique», vlasteljîniku «celui qui a le pouvoir»; sur -(d)lo,<br />
-(d)lïnu, pocrùpalïniku «seau pour puiser», svëtilïniku «lampe».<br />
L'emprunt klirikû « membre du clergé » est concurrencé par<br />
klirosïnikû, dérivé de klirosû «clergé» (§ 1197).<br />
On notera xystïnikû «ravisseur» et vùsxystïniku (Supr.) à côté<br />
de vûsxytïniku. (Pand. Ant.) : ce mot suppose, comme svëstïnikù<br />
« chandelier » de svësta « chandelle », un dérivé nominal sur le<br />
thème verbal xyl- ; le serbo-croate hica « hâte » est récent et<br />
dialectal, mais le russe a l'adjectif xîscnyj « rapace ». Une forme<br />
obaédïniku (Athan.) «calomniateur», à côté du slavon obadïniku,<br />
est isolée : le dérivé nominal de obaditi est obada, et le serbo-croate<br />
svâda «dispute» est nouveau pour s(u)vada (§ 781), mais obazda<br />
paraît supposé par le verbe dénominatif obaziti du russe ancien,<br />
dial. obazit'.<br />
§ 844. Dans les langues slaves. — Le suffixe -(j)enik se conserve<br />
dans des formes traditionnelles, et en s'altérant en tchèque dans<br />
muëednîk « martyr », ucednik « élève », de v. tch. mucedlnîk,<br />
ucedlnik. Ces formes résultent d'une extension du thème -dldu<br />
suffixe -dlo, qui a un grand développement en tchèque (§ 948).<br />
Le vieux tchèque a aussi citedlnik « lecteur », sûrement analogique<br />
de uëedlnik.<br />
Pour -ïniku, ce suffixe est partout très largement productif.<br />
En russe, il forme des noms de personnes tirés d'adjectifs ou de<br />
substantifs : izbrânnik « l'élu », vospîtannik « celui qu'on éduque »,<br />
grimâsnik « le grimacier » ; et de thèmes verbaux qui peuvent être<br />
aussi nominaux : rabôtnik « travailleur », reznik « boucher », suinlk<br />
« le farceur » ; plus rarement de noms de choses : syrnik et tvorôznik<br />
« beignet au fromage », sosnîk « coutre ».<br />
Le polonais a des dérivés de noms : kamiennikn carrier », sluzebnik<br />
« domestique », naplecznik « sangle » ; et des élargissements en<br />
-ownik : bojownik « guerrier » de bojowac, kamienownik « qui lapide »<br />
de kamienowac, nozownik « coutelier », lodownik « marchand de<br />
glace ».<br />
En tchèque : dëlnïk « ouvrier », zimnik « pardessus d'hiver » ;<br />
— en serbo-croate : cëlnïk « membre d'une bande, ëëta », stanàvnïk<br />
« habitant » ; kànjanïk « cavalier » d'un plus ancien kdnjîk, slavon<br />
konïniku ; — en slovène : govçrnik « orateur », cenovnik « liste des<br />
prix », avec grand développement de -Inik : cesâlnik « peigne »,
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 309<br />
umivâlnik « lavabo », gladîlnik « fer à repasser », pravîlnik « règlement<br />
».<br />
L'accent est en russe des types véstnik, rabôtnik, reznik et<br />
klevetnik de klevetd ; immobile, sauf dans les dérivés en -nik<br />
d'adjectifs en -nôj : ozornik « l'insolent » de ozornôj, vypusknik<br />
« ce qui permet la sortie, cathéter, sonde », de vypusknôj, gén.<br />
-nikâ.<br />
§ 845. Origine.— Les suffixes -enikù et -ïniku sont des dérivés<br />
en -iku de participes passifs en -enu et d'adjectifs en -ïnû, et<br />
la question est de savoir pourquoi, dans ces deux cas, le slave a<br />
eu recours au suffixe -iku (§ 1042) et non à -ici. On trouve aussi<br />
-iku dans un dérivé de participe présent passif : Ijubimiku « l'aimé »<br />
(Pand. Ant., Éphrem), que le russe a remplacé par Ijubimec, de là<br />
s.-cr. Ijùbimac (réceùt) et slov. Ijubimec.<br />
Il est sûr que cette répartition de -Ici et de -iku dans les substantifs<br />
dérivés d'adjectifs, si nette et si régulière en slave, est très<br />
ancienne. Elle doit donc remonter à l'époque où -Ici était senti<br />
comme élargissement en *-i-ko- de thème en -i-, et où un thème<br />
adjectival en -i- était exclu dans le cas des adjectifs en *-ino- et<br />
des participes passifs en *-eno-.<br />
Les langues baltiques présentent des suffixes productifs qui<br />
répondent au slave -Inikti, mais qui ne sont d'aucun secours pour<br />
éclairer les faits slaves, car ils sont sûrement empruntés au slave,<br />
sous des formes différentes selon les langues et les époques.<br />
Le vieux prussien offre des exemples abondants, en -inik-,<br />
-enik- et -nik, dans des mots baltiques comme laukinikis « campagnard<br />
» de lauks « campagne », et dans des mots d'emprunt :<br />
dïlnika- « travailleur », de r. dél'nik, bl.-r. dzél'nik, lûbeniks<br />
« marieur » de pol. slubnik. Le lituanien a -ininkas : laukininkas<br />
de laûkas, adj. laukinis « agreste, sauvage » ; et -eninkas : simleninkas<br />
« centurion » ; en lituanien ancien -inikas, -enikas :<br />
simienikas. Le lette a -iniëks, -eniëks, -niëks : lauciniëks et laûceniëks<br />
de laûks, krâpniëks « trompeur » de krâpt « tromper ».<br />
La variante en -enik- doit représenter la forme -nik- plus récente<br />
que -inik-, avec insertion d'un e d'épenthèse, comme dans v. pr.<br />
karczemo et lit. karcemà « cabaret » de pol. karczma, bl.-r. karcmâ.<br />
Le lituanien -ninkas doit n'être qu'une graphie pour *-nïkas à<br />
ï long, du fait de la dénasalisation des groupes à nasale et du<br />
passage de in à y, comme de an à à (§ 66). En vieux prussien<br />
la longueur est notée ï,/-ij- dans trois mots en -nik-, et si elle ne<br />
l'est pas ailleurs, ce peut être parce que le suffixe n'était pas<br />
ordinairement accentué, ou bien parce qu'il présente la forme<br />
brève plus récente du russe et du polonais : en kachoube, -nik
310 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
est régulièrement bref, sans la longue (de métatonie) de tch. -nik<br />
et s.-cr. -nik.<br />
Dans -nièks du lette, la diphtongue ie paraît répondre à *ei<br />
(§ 52), et le lette conserverait ainsi une forme balto-slave *-in-ei-ka-,<br />
celle que suppose le slave -unikû (§ 19). Ce qui indiquerait que les<br />
emprunts les plus anciens du suffixe slave en baltique remontent<br />
à l'époque, celle du développement des faits de seconde palatalisation,<br />
où le slave distinguait encore *ei diphtongue et ï. Puis les<br />
emprunts se sont poursuivis, à des dates plus récentes.<br />
SUFFIXE -teljï<br />
§ 846. Voici une liste à peu près complète des formes attestées<br />
en vieux slave, avec quelques formes des textes slavons où le<br />
suffixe, devenu artificiel, sert à volonté à créer des mots :<br />
1. — teljï :<br />
bljusteljï «gardien» (Gr. Naz., Pand. Ant., Athan.), de bljude-,<br />
bljasti ; subljusteljï (Izb. Svjat.), et en slavon des composés domo-,<br />
xlëbo-, zvëzdo-bljusteljï ;<br />
suvësteljï «qui a la science» (Const. Pr.), de su-vëd-, sû-vëdëti,<br />
rare pour suvëdëleljï, et en slavon povësteljï « qui indique » ;<br />
vlasteljï « qui a le pouvoir, maître », de vlade-, vlasii ;<br />
en slavon jasteljï « mangeur », de jad-, jasti.<br />
dateljï « donneur », podateljï, prë-, vuz-, blago- (et -dëteljï), zakono-<br />
(Cosmas), en slavon pro- ;<br />
lateljï « tendeur de pièges » Luc, XX, 20 Zogr. (écrit dëlatel-),<br />
Ps. IX, 29 (var. lajatel-), de laje-, lajati (§ 508) ;<br />
prëdûstateljï « qui préside » (Ham.), r. predstâtel' ;<br />
su-dëteljï « créateur », blagodëteljï « bienfaiteur », en slavon vïse-,<br />
zlato- ; le simple dëteljï, qui se confond en slavon avec le féminin<br />
dëtëlï «action» (§ 1057), est faiblement attesté dans le dérivé<br />
dëlelïnû Svjfxioupyôç (Athan.) ;<br />
sëleljï «semeur» (Izb. Svjat.) ;<br />
izobrëteljï « inventeur » (Athan.) est bâti sur le thème obrëv<br />
du participe parfait obrëlu de ob-rçste-, -rësti ; on a obrëteljï dans<br />
les dérivés obrëtelïnikù « trouveur » et priobrëïeljïniku « qui procure »<br />
du Suprasliensis, s'il ne s'agit pas d'une confusion avec le féminin<br />
(pri)obrëtëlï à suffixe -ëlï (§ 1057) ;<br />
ubiteljï « meurtrier » (Hom. Mih.) et dérivé ubiteljïniëïsku « des<br />
meurtriers » (Supr.) ;<br />
ziteljï «habitant» (et singulatif zitelinu, § 870), mladoziteljï
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 311<br />
« qui vit dans la mollesse » (Athan.), et slavon jedino-, sù- et sç-<br />
(§ 1222);<br />
su-kryteljï, en slavon, mal attesté, voir -kruviteljï, § 847 ;<br />
ryteljï « fouilleur » en slavon ;<br />
podu-jçteljï « qui soutient, appui », prë~ (Ham.), et en slavon<br />
rçko-za-jçteljl, putice-jçteljï ;<br />
êçtelji « moissonneur ».<br />
Sur thème kol-, za-klateljï « égorgeur » est r. zaklâtel', slavonisme.<br />
Sur thème zïr-, le slavon russe a zrïtelï, puis r. zritel', pour v. si.<br />
zlrlcl « sacrificateur ».<br />
2. -ateljï :<br />
su-bïrateljï (Ham., rendant « Ecclésiaste ») et slavon subirateljï,<br />
qui est r. sobirâtel' « ramasseur » ;<br />
dëlaieljï « travailleur », korable-délateljï (Athan.) ;<br />
otu-dïrateljï « schismatique » (Athan.) ;<br />
druzateljï « qui tient, maître » (Gr. Naz., Hés.), vise- (Upir'),<br />
su- (Hom. Mih.), vûz- (Izb. Svjat.), slavon u- ;<br />
vuz-iskateljl « qui recherche », iz- (Ham.) ;<br />
kazaieljl « qui montre », na- (Ham.), su- ;<br />
pisaleljl « peintre » (Virg.), slovo-, saro-, podu- (Virg.), su- et<br />
su-na- (Ham.) ;<br />
niste-pitateljï « qui nourrit les pauvres » (Ham.) ;<br />
prijateljï « ami » ;<br />
is-pytateljl « critique » (Ham.) ;<br />
rçgatelji « qui se moque » (Athan.) ;<br />
slysateljï « auditeur » en slavon ;<br />
Içzaleljï « travailleur (agricole) » ;<br />
pro-zirateljl « qui prévoit » (Ham.) ;<br />
zldateljl « créateur », su-.<br />
Et extension de -ateljl :<br />
po-grebatelji « ensevelisseur » (Hom. Mih.), sur le thème nouveau<br />
greba- (pol. grzebac, bulg. grebd-, § 473) de grebe-, et slavon -grëbateljï,<br />
-gribateljï sur l'imperfectif dérivé -grëbati, -gribati (§ 649) ;<br />
lajateljl (Athan.), variante de lateljï ;<br />
sëjateljl (Athan.), variante de sëteljl ;<br />
na-stojateljï (r. -slojàlel') et prëdù- en slavon, pour -stateljï ;<br />
et r. déjatel' pour dëteljl ;<br />
podrazatelji « imitateur » sur l'imperfectif podrazati, à côté de<br />
podraziteljï (Athan.) sur podraziti ;<br />
obrëtateljï sur obrëlattf à côté de obrëteljï ;<br />
propovëdati sur -vëdati, à côté de -vësteljï et -vëdëteljl ;<br />
priimateljl « qui accueille » (Ham., r. prinimâtel') et slranïno-<br />
(Ham.), à côté de -jçteljl ;
312 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Et en slavon povelëvateljî « qui commande » sur l'imperfectif<br />
dérivé -velëvati (§ 653), à côté de poveliteljï.<br />
3. -ëteljï, -gteljï :<br />
odolëteljï « vainqueur » en slavon (r. odolétel' et odolevâtel') ;<br />
umëteljï « qui sait » (Pand. Ant.) et neumëteljï (Ham.), munogoumëieljï<br />
(Ham.), slavon razumëteljï ;<br />
su-vëdëteljï « témoin » (et -vësteljï) ;<br />
vidëteljï «voyant, spectateur» (Gr. Naz., Athan.) ;<br />
xolëteljï « qui veut » (Athan.) ;<br />
otu-rinçteljï « qui repousse » (Ham.) sur rinçti ;<br />
et en slavon *druznçleljï « l'audacieux », altéré en druz-, sur<br />
druznçti, et mogçteljï « le puissant » parmi les élargissements<br />
divers de mogçtï (§ 171), r. mogûtnik, etc.<br />
§ 847, — 4. -iteljï, et c'est la forme du grand développement<br />
du suffixe :<br />
iz-baviteljï ; po-bëdileljï ; blazniteljï (Ham.) ; vuz-branileljï (Ham.) ;<br />
cëliteljl et is- ; cistiteljï ; dëlitelj ; u-goditeljï (Ham.) ; goriiteljï ;<br />
grabiteljï (Gr. Naz.) ; gubiteljï, kazniieljï (Ham.) ; krïstiteljï ; iskusiteljï,<br />
prëis- (Ham.) ; ob-liciteljï ; Ijubiteljï (Pand. Ant.) ;<br />
mïstiteljï (Ham., Cosmas) ; mçëiteljï ; obaditeljï ; raz-oriteljï en<br />
slavon du xi e siècle, et dans razoriteliste (Athan.) ; podraziteljï<br />
(Athan.) ; praviteljï, is-, Ijubo- (Ham.) ; prositeljï ; raciteljï (Zlatostruj)<br />
; po-razileljï (Ham.) ; rçditeljï (Ham.) ; roditeljï ; dosaditeljï<br />
; skvruniteljï (Cosmas) ; sluzileljï, idolo- ; sçditeljï ; pospësiteljï<br />
(Ham.); vû(z)-staviteljï ; stroiteljï ; sumoiriteljï (Ham.),<br />
raz- (Hés.) ; susgditeljï (Ham.) ; svëtiteljï ; svçtiteljï ; svobodileljï ;<br />
za-slititeljï ; u-tësiteljï « Paraclet » (Cosmas) ; lïliteljî ; tomiteljï ;<br />
o-traviteljï (Ham. 118) ; po-trëbiteljï (Ham.); tvoriîeljï (J. Ex.);<br />
uciteljï, zakono- ; voditeljï (Ham.), do- ; sû-vrùsileljï ; xraniieljï ;<br />
vus-xyliteljï (Hés.).<br />
D'autres mots en -iteljï sont ou peuvent être des dérivés de verbes<br />
en -iti :<br />
likustviteljï « choreute » (Hés.) en regard du slavon likustviti,<br />
mais le vieux slave n'a que likùstvovati (§ 111) ;<br />
rïvïnileljï « zélateur » sur rïvïniti peu attesté en slavon : le vieux<br />
slave a rïvïnovaii, et aussi un adjectif rïvïnivu (§ 995) ;<br />
supasiteljï « sauveur », qui se substitue au postverbal supasù<br />
(§ 783) quand ce postverbal passe du sens actif de «sauveur»<br />
au sens abstrait de « salut », et également upasiteljï « pasteur,<br />
gardien » en slavon : un dénominatif *-pasiti a pu être tiré de -pasu,
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 313<br />
et le serbo-croate remplace dialectalement spàsti « sauver » par<br />
spàsiti.<br />
Mais il est inutile de supposer l'existence de *supasiti en vieux<br />
slave, car on voit l'extension de la forme -iteljï à des thèmes verbaux<br />
autres que ceux en -iti :<br />
po-grebiteljï de grebe-, à côté de -grebateljï. -grëbateljï, -gribateljï ;<br />
po-daditeljï, pre- (Hom. Mih., et dans prëdaditeljevu), pro-<br />
(Gr. Naz.), sur le thème de présent dad-, pour -dateljï ;<br />
pri-imiteljï (Hom. Mih.), slavon ot- (Hénoch), pour -jçteljï et<br />
à côté de -imateljï ;<br />
po-kroviteljï et var. pokruviteljï (Ps. Sin.), pokryviteljï (Cant. I, 2),<br />
et en slavon su-kroviteljï, sans doute pour un plus ancien -kryteljï,<br />
sur le thème krûv- de kryje-, kryti (§ 519), et non sur un dénominatif<br />
pokroviti qui n'est attesté que très tardivement ;<br />
miro-druèiteljï, samo-, vise-, su- (J. Ex.), et en slavon u-, pour<br />
-druzateljï ;<br />
slysiteljï (Gr. Naz.), pour slysateljï ;<br />
zizdileljï pour zïdateljï, sur le thème de présent zizde- de zïdaii ;<br />
sû-na-buditeljï (J. Ex.) en regard de sû-na-budëti ;<br />
strasto-trupiteljï (Ham.) en regard de trupëti ;<br />
poveliteljï (Gai., IV, 2) de -velëti ;<br />
pro-po-vëditeljï (Ham.) pour -vëdëteljï ;<br />
pro-viditeljï (Ham.) pour -vidëleljï.<br />
Et en slavon su-bljuditeljï de bljude- ; boriteljï(r. borltel') de borje- ;<br />
nebrëziteljï de brëze- ; zakoliteljï de kolje- ; zïriteljï (r. zriiel') de<br />
zïrëti ; izdivileljï « qui dépense » (r. izdivitel'), de èive- et pour<br />
-ziteljï. Etc.<br />
On trouve même des dérivés du thème d'infinitif : zvezdo-bljustileljï<br />
(r. bljustitel') et -bljuditeljï, pour bljusteljï ; jastiteljï pour<br />
jasteljï ; vlastiteljï (r. vlaslitel') pour vlasteljï.<br />
§ 848. Extension du Suffixe -teljï. — Il est encore attesté par<br />
des formes dérivées comme razoriteliste (Athan.), en particulier<br />
par un type d'adjectifs en -tel(j)ïnu (§ 975) : daditelïnu (Pand.<br />
Ant.), priimitelïnu (J. Ex.), otûlçeitelïnu (Athan.), en slavon<br />
neiskonïcatelïnu «infini» (Eccl., I, 15), etc. Et de ce type se tirent<br />
des substantifs en -tel(j)ïniku (§ 843).<br />
On a d'autre part des formes en -inu de singulatifs, vlastelinù,<br />
zitelinû (§ 870) ; et des élargissements en -janinu : vlasteljaninu<br />
(Izb. Svjat.), zçieljaninuf (§ 872).<br />
Le suffixe est en concurrence avec d'autres suffixes :<br />
-ïeï (§ 834) : dateljï et davïeï, samo-drûziteljï et -druzïeï, strasto-
314 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Irùpileljï et -trupïcï, tvoriteljï et tvorïcï, -pisaleljï et -pisïcï.<br />
Particulièrement avec :<br />
-ïniku : blagodaleljï et -dalïniku, prëdafdijteljï et prëdanïniku,<br />
prëdavïniku ; prijqieljï, priimiteljï et priimïniku (J. Ex., Gr. Naz.),<br />
prëimïnikû ; podrazateljï et podrazïniku ; izbaviteljï et izbavïniku ;<br />
-druziteljï et suvûzdrûzïnikû ; ugoditeljï et ugodïniku ; iskusiteljï<br />
et iskusïnikû ; vu(z)stavileljï et na-stavïniku, pri-, su- ; sumotriteljï<br />
et rasumotrïniku (Gr. Naz.) ; zastitileljï et zastitïniku ; vusxytiteljï<br />
et vûsxy(s)tïniku.<br />
Le russe kopâtel' « qui bêche » succède à v. si. kopacï (Upir').<br />
Le suffixe -teljï est très productif en vieux slave, et il jouait<br />
sûrement un rôle notable dans la langue réelle, mais on n'en peut<br />
pas mesurer exactement l'importance, car il sert dans la langue<br />
écrite, langue de traduction, à rendre les noms d'agents que le<br />
grec forme librement : vidëteljï est Osonrrjç, xotëteljï Qe/sr^rfi, olurinçteljï<br />
etc. En slavon, la productivité de -teljï ne fait que<br />
s'accroître, avec les calques du grec.<br />
§ 849. Dans les langues slaves. — Mais les langues slaves<br />
montrent que le suffixe est tombé bientôt en décadence : dans<br />
certaines il apparaît réduit à quelques restes, dans d'autres sa<br />
survie est artificielle.<br />
En russe, avec la forte influence du slavon, il continue de<br />
s'étendre, limité aux formes en -atel' et -ilel' : ukryvâtel' « recéleur »,<br />
vymogâtel' « extorqueur », rasprostranitel' « propagateur », vdoxnovitel'<br />
« inspirateur » sur vdoxnovit' tiré du thème de vdoxnovénie « inspiration<br />
» (§ 493), et, avec l'extension de -iteljï, pokrovitel' « protecteur »,<br />
popeëitel' « curateur » sur peëë-sja « avoir soin ».<br />
En ukrainien, les formes en -tel', upravytel', etc., sont dans<br />
l'ensemble des slavonismes, et les suffixes de noms d'agents sont<br />
autres, -nyk (-al'nyk, etc.), -aë, -ëyk.<br />
En polonais, les formes étaient nombreuses dans la langue<br />
ancienne, mais il en reste peu dans la langue moderne : przyjaciel,<br />
nauczyciel « maître enseignant », et surtout du vocabulaire de la<br />
langue religieuse ou savante : zbawiciel « le Sauveur », czciciel<br />
« adorateur », burzyciel « dévastateur », mscieiel « vengeur », et avec<br />
développement de -iciel : okaziciel « porteur (d'une lettre) » de<br />
okazac, posiedziciel « possesseur » de posiedac ; et -tel dans un<br />
emprunt : obywatel « citoyen », de tch. obyvatel « habitant », r.<br />
obyvâteV.<br />
Le kachoube paraît avoir mieux conservé l'état du polonais<br />
ancien : kupicél en regard de pol. kuplec « marchand ».<br />
En tchèque littéraire, -tel reste productif : kazatel, vykupitel<br />
« rédempteur », dohlizilel « surveillant » sur dohlizeii.
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 315<br />
En Slovène, une seule forme est populaire : prijâtelj ; mais -tel]<br />
connaît dans la langue littéraire moderne un développement que les<br />
puristes jugent excessif : budîtelj à côté des plus anciens budîlec<br />
(-vec, § 836) et budnik, hranîtelj à côté de hranîlec et hranik,<br />
poznavâtelj et poznavâlec, upravltelj et uprâvnik, etc. ; des différences<br />
de sens se sont introduites entre ces doublets : izdajâlelj<br />
« éditeur » et izdajâlec « traître », ravnâielj « directeur, proviseur »<br />
et ravnâlec « régulateur ».<br />
En serbo-croate, la langue populaire ne connaît qu'une huitaine<br />
de formes, et en partie semi-savantes : prïjatelj, rôditelj, ùcilelj,<br />
hrànitelj, upràvitelj, ou de la langue religieuse : krstitelj, spàsitelj,<br />
stvdriîelj ; et la langue littéraire n'en accueille guère plus : citatelj,<br />
pisatelj, mais usuellement cltalac, pisac.<br />
En bulgare, les emprunts au russe ne manquent pas : pisâtel,<br />
izsledovâtel, svidétel. Mais en macédonien on n'a, comme populaires,<br />
que prljatel, rôdilel, ûcitel ; la langue littéraire reçoit èitatel, plsatel,<br />
slûsalel, mais le suffixe productif de noms d'agents est -ac :<br />
cîtac, etc.<br />
L'accent, en russe, est fixe, et toujours sur la voyelle qui porte<br />
le suffixe dans les formes en -étel' et -Itel' ; mais le type en -alel'<br />
a l'accent des verbes de base, plàvatel' de plâvat', isslédovatel'<br />
de isslédoval'. Le serbo-croate a de même l'accent (ancien) sur la<br />
voyelle désinencielle : ùcitelj, l'accent de prïjatelj étant spécial<br />
dans un mot à initiale prija- restaurée (§ 81). Le slovène, où le<br />
développement de -telj est nouveau' et artificiel, a généralisé<br />
l'accentuation -âtelj, -îtelj, qui est celle du type antérieur en<br />
-âlec, -îlec.<br />
§ 850. Origine du suffixe. — Le problème, qui est des plus obscurs,<br />
a déjà été examiné § 188. Les désinences de flexion athématique<br />
invitent à rapprocher le suffixe slave -tel- du suffixe indo-européen<br />
*-ter- de noms d'agents. Mais on ne peut pas se contenter de<br />
l'explication trop facile par un flottement de -r- et -l- en indoeuropéen<br />
; et quant à l'idée d'une dissimilation de *-îer- en -telaprès<br />
un r précédent (Brugmann, Vondrâk), elle se heurte au fait<br />
que les exemples péniblement cherchés ne sont pas d'époque<br />
vieux-slave et sont même à peine attestés en slavon : zruteljï<br />
est rare pour v. si. zïrïcï, et orateljï, pour v. si. ratai, n'est que le<br />
russe orâtel'.<br />
Le baltique ignore le suffixe slave, mais il présente un suffixe de<br />
nom d'agent en lit. -élis, et lette -élis à e bref (§ 1063), la longue ê<br />
du lituanien pouvant êtré' secondaire ; et ce suffixe répond, non pas<br />
exactement, mais d'assez près, au suffixe productif -il (qui est<br />
thème en *-
316 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
particulière entre le slave et le germanique dans si. prijateljï<br />
« ami » et v. sax. friuth.il « bien-aimé ».<br />
On est donc amené, comme hypothèse la plus plausible, à celle<br />
d'un suffixe balto-slave -el- se développant au contact du suffixe<br />
germanique -il-, qui vient vraisemblablement de *-el-, et s'élargissant<br />
en slave en -tel- ; et le slave -tel- se serait combiné avec des<br />
restes du suffixe i.-e. *-ter-, en lui empruntant des désinences<br />
athématiques.<br />
Mais il faut observer que ces désinences, uniquement de pluriel,<br />
étaient bien représentées en slave dans des athématiques d'origine<br />
ancienne, en nom. plur. -jane,v. si. -(ç)ste, -use et -(j)ïse ; et qu'une<br />
extension des désinences de type athématique est attestée en slave<br />
à diverses époques (§ 206), et en particulier dans la flexion de pluriel<br />
du suffixe -arjï, parallèle à -teljï. Ce qui, somme toute, rend inutile<br />
le recours à l'indo-européen *-ter-, dont les vestiges sûrs sont tout<br />
autres en slave (§ 198), et ramène la question à celle, plus satisfaisante,<br />
d'un développement slave sur une base balto-slave et<br />
germanique.<br />
SUFFIXE -arjï<br />
§ 851. Ce suffixe désigne particulièrement l'homme qui exerce<br />
une profession, et s'il apparaît relativement rare dans les textes<br />
de rédaction vieux-slave, c'est qu'ils n'ont l'occasion de s'intéresser<br />
qu'à quelques professions :<br />
grunïcarjï « potier » ;<br />
kljucarjï « porte-clefs » (Ass. 141 r ) ;<br />
mytarjï « publicain » ;<br />
rybarjï « pêcheur » ;<br />
vinarjï « vigneron » ;<br />
vratarjï « portier » ;<br />
vrutogradarjï «jardinier».<br />
Et en dehors des noms de profession : klevetarjï « calomniateur ».<br />
Mais on trouve en plus dans des textes vieux-slaves en rédaction<br />
slavonne :<br />
bukarjï « lettré » (Chrabr) ;<br />
krueïmarjï « aubergiste » (Ham.) ;<br />
mëdarjï « travailleur du cuivre » (Cyr. Jér.) ;<br />
mçkarjï « homme qui châtie, tyran » (Ham., gr. xôAaE, rattaché<br />
à xoXocÇw) ;<br />
njivarjï « agriculteur » (Cyr. Jér.) ;<br />
tezarjï « travailleur de la terre » (Cyr. Jér.) ;<br />
usmarjï « corroyeur » (J. Ex.) ;<br />
1
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 317<br />
vladarjï « maître » (Pand. Ant.) ;<br />
zidarjï « bâtisseur, maçon » (Hés.) ;<br />
zlatarjï « orfèvre » (Upir'), et zallarinu Athan., 1047 (§ 70).<br />
Et en slavon ancien : kravarjï «vacher»; sadarï «jardinier»;<br />
skotarjï « éleveur de troupeaux » ; tlukarjï « interprète » ; xlëbarjï<br />
« boulanger » ; zitarjï « préposé au blé ».<br />
D'autres mots attestés dans les langues slaves sont évidemment<br />
anciens : le vieux-slave kovarïstvo « machination » suppose un<br />
kovarjï qu'on trouve dans tch. kovar « forgeron ». Gospodarjï<br />
est attesté en slavon depuis le xi e siècle ; il signifie «maître,<br />
seigneur » dans r. gospodâr' (puis gosudâr', depuis le xiv e siècle),<br />
s.-cr. gospàdâr, mais « maître de maison, économe » dans pol.<br />
gospodarz, tch. hospoddr : ce n'est donc pas un simple élargissement<br />
de gospodï, mais sûrement un dérivé de v. si. gospoda « auberge »<br />
(§ 211), c'est-à-dire ihaison du maître qui reçoit.<br />
Constituant un type spécial de flexion (§ 188), la formation en<br />
-arjï attire des mots d'autre origine : césarjï «empereur» (§ 295)<br />
et K'esarï « César », Lazarï « Lazare » ; boljarinu « boïar », plur.<br />
boljare ( § 206) ; et al(u)tarjï et ol(u)tarjï « autel », de lat. altâre,<br />
mais la fusion avec le type des noms de profession est déjà dans<br />
v. h. a. altâri.<br />
On voit les deux caractères spécifiques du suffixe -arjï : il désigne<br />
une profession, et il est tiré de substantifs. L'idée de « faire métier<br />
de » peut être étendue, en valeur expressive, au-delà de son sens<br />
concret : * kovarjï « forgeur de machinations », klevetarjï, mçkarjï.<br />
Il n'y a pas en vieux slave d'exemple net de forme qui ne soit pas<br />
dérivée de substantif, mais les thèmes nominaux et verbaux<br />
peuvent se confondre : klevetarjï est en regard de kl(j)evelati<br />
«calomnier» (§ 563) aussi bien que de klfjjeveta «calomnie»,<br />
* kovarjï est en regard de kovû « machination » et de kovati « forger »,<br />
et pour vladarjï et zidarjï des thèmes nominaux vlad- (§ 772)<br />
et zid- (§ 794) ne font pas défaut.<br />
Ce suffixe restreint en principe aux noms de métiers se rencontre<br />
avec les suffixes de noms d'agents : zidarjï au sens concret de<br />
« maçon » et zïdateljï, zizditeljï au sens abstrait de « modeleur,<br />
créateur », mçkarjï et usuellement mçëiteljï, tçzarjï et tçzateljï ;<br />
klevetarjï et klevetïnikû, vratarjï et vratïniku ; *kovarjï et kovaëï<br />
(Ham.).<br />
On note en vieux slave grunïëarjï dérivé de grunïcï « pot », et<br />
dans les langues slaves *ovïëarjï « berger » de ovïca « brebis », pol.<br />
owczarz, s.-cr. ovcâr, sloy>. ovëdr, et cette alternance c : c qu'on<br />
trouve dans les verbes konïcali et vënïëati (§ 573), tout secondaire<br />
qu'elle est, apparaît régulière : s.-cr. loncâr « potier » de lànac<br />
« pot » et slov. loncdr de lônec, s.-cr. dèsnicâr « homme de droite »<br />
et Ijèviëdr « homme de gauche » de dèsnica et Ijèvica, gàstioniëâr
318 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
« hôtelier », knjïzniëâr « bibliothécaire », de gostionica, knjïznica,<br />
et slov. gostilnicar, knjlznicâr, kljucâf v)nicar « serrurier » de<br />
kljuëâfv)nica, etc. On a même une alternance k : ë dans s.-cr.<br />
klobàcâr « chapelier » (depuis les xin e -xiv e siècles) de klùbûk<br />
« chapeau », slov. klobuëâr de klobûk. L'alternance c : c se retrouve<br />
avec le suffixe -aku (§ 862) dans tch. ovëâk, leviëâk et pol. lewiczak,<br />
§ 852. Dans les langues slaves. — Le suffixe a connu partout une<br />
large productivité, en développant ses emplois : pour le slovène,<br />
A. Bajec a dressé une liste de plus de 160 formes.<br />
Le russe a des dérivés de substantifs : kobzâr' « joueur de la<br />
kôbza ukrainienne », psar' « valet de chien » ; — des dérivés de<br />
verbes : pdxar' « laboureur » de paxât', tôkâr' « tourneur » de toëit' ;<br />
pisar' « scribe, copiste », plus récent que piséc et v. r. pisïëii<br />
(§ 864), et différent, comme nom de métier, du plus savant<br />
pisâlel' «écrivain» (§ 849) ; — et aussi des dérivés d'adjectifs :<br />
dikdr' « sauvage », gluxâr' « coq de bruyère ».<br />
Les formes en -ar' peuvent être d'origines diverses : piskâr'<br />
« goujon » présente dans les autres langues le suffixe -orjï, et znâxar'<br />
«charlatan, sorcier » est pour v. r. znaxorï (§ 1126). Un mot glavâr'<br />
« chef, meneur », slavonisme, et qu'on ne retrouve que dans les<br />
langues méridionales, s.-cr. glavâr (depuis le xvi e siècle), slov.<br />
glavâr, doit être analogique du slavon gospodarjï et de v. si.<br />
vladarjï, r. volodâr' « souverain », tch. vladar, etc.<br />
On trouve quelques mots en -ar à finale dure, évidemment<br />
empruntés : gusljâr « joueur de gûsli » comme s.-cr. gûslâr, etc.<br />
(§ 1122). Et il y a les mots d'emprunt récents en -ar' : aplékar'<br />
« apothicaire », bibliotékar', sekrelâr' ; et les mots qui, bâtis sur<br />
thème slave, calquent des mots savants en lat. -ârium : bukvàr'<br />
d'après lat. abecedârium, slovâr' d'après le latin médiéval<br />
diclionarium.<br />
Le polonais a des dérivés de substantifs : szafarz « intendant,<br />
sommelier » de szafa « armoire » ; et de verbes : igarz « menteur »,<br />
pisarz « copiste, clerc », qui peut être la source de r. pisar'. Une<br />
particularité du polonais est de présenter des formes en -iarz,<br />
en dehors des dérivés de thèmes nominaux mouillés comme<br />
swiniarz « porcher » de swinia « porc » : lichwiarz « usurier » (depuis<br />
le xvi e siècle) refait, pour lichwarz de lichwa « usure », sur le verbe<br />
lichwic ; et de même golarz « barbier » de golic « raser », kpiarz<br />
« moqueur » de kpic « railler », etc. ; ces formes mouillées sont<br />
par ailleurs parallèles aux formes en -ierz (§ 853).<br />
En kachoube, on observe une extension du suffixe -arz par<br />
substitution à -acz (§ 855) : dôwôr «donneur» pour pol. dawacz<br />
(et dawca, § 876), tch. dâvaë.<br />
Le sorabe a h. sor. rybar, gén. rybarja, thar, gén. iharja, etc.<br />
Le tchèque a -àr et -ar : kolâr « charron », bednâr « tonnelier », et
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 319<br />
rnlékar « laitier », tesar « charpentier » ; et des emprunts savants<br />
comme funkcionâr.<br />
Le slovène a -ar, gén. -arja : ribâr, gén. ribdrja, cuoâr « gardien »,<br />
gén. cuvârja, de cûvali « garder » ( § 523) ; — le serbo-croate a -âr,<br />
gén. -âra : cùvâr, gén. cuvâra, resètâr « fabriquant de cribles », gén.<br />
resetâra ; — et le bulgare vratâr, déterminé vratârjat, cas oblique<br />
vratârja.<br />
Des noms en -arjï se tirent des verbes en -ariii : r. kljuëâr'<br />
« sacristain » et kljucâril' « exercer la fonction de sacristain », slov.<br />
klobuëâr « chapelier » et klobucâriti « faire le métier de chapelier ».<br />
Le suffixe verbal -ariti présente un petit développement en serbocroate<br />
et en slovène : s.-cr. et slov. zivâriti et zivotâriti «vivoter»,<br />
sans rapport avec la forme nominale slov. zivotâr « garde du corps » ;<br />
s.-cr. et slov. klatâriii se « vagabonder », élargissement de klâtiti<br />
se sans intermédiaire, nominal en -ar ; et s.-cr. irzàriti « trafiquer,<br />
vendre au détail », élargissement de Ifziti, ici avec substantif slov.<br />
Irzâr « petit commerçant, détaillant ».<br />
L'accent est en russe généralement des types vralâr', gén.<br />
vratarjâ, dans les dérivés de substantifs, vinogrâdar' dans les polysyllabes,<br />
et dans les dérivés de verbes pâxar' de pâse-, paxât',<br />
lokàr' et tôkar' de tôëi-, tocit'.<br />
En serbo-croate, l'accent dominant est du type vràtâr, gén.<br />
vratdra, de vrâla « porte », klopètâr « cliqueteur » de klopàtati ;<br />
mais on trouve d'autres accents : pëkâr « boulanger », gén. pëkâra,<br />
rïbâr de rïba « poisson », novinâr « journaliste » de nôvine « journal ».<br />
En bulgare, l'accent est ribâr, bibliotekâr, déterm. -ârjai, et de<br />
même -âr en macédonien dans les parlers qui conservent des<br />
oxytons.<br />
En slovène, l'accent ordinaire est pekâr, gén. pekârja, avec<br />
généralisation du type qui répond à r. -âr', gén. -arjâ (§ 93), mais<br />
on trouve aussi mllnar « meunier » de mlîn « moulin », kûhar<br />
« cuisinier » de kùhati « cuisiner », mûhar « gobe-mouches » de<br />
mûha « mouche ».<br />
En kachoube, l'accent est d'un type mobile piékôrzn boulanger »,<br />
gén. piékarza, et dat. piekàrzowi, etc. : type évolué qui peut<br />
dérivèr d'un type oxyton.<br />
En tchèque, les formes en -âr paraissent répondre au type r.<br />
-âr', gén. -arjâ, et les formes en -ar, d'après pekar, au type r.<br />
pélcar', s.-cr. pëkâr.<br />
y<br />
§ 853. Origine. — Le suffixe -arjï, dont la flexion est de thème<br />
en *-yo- avec une petite extension secondaire de désinences<br />
athématiques (§ 188), est un suffixe d'emprunt, à lat. -ârius,<br />
mais pour une part au moins par l'intermédiaire du germanique,<br />
got. -areis, v. h. a. -âri : car des mots v. si. bukarjï «lettré» et
320 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
mytarjï « publicain » sont pris au gotique, bokareis, motareis,<br />
comme leurs thèmes buky et myto (§ 54). Le suffixe -arjî n'est pas<br />
balto-slave : le suffixe lit. -orius, ainsi dans dainôrius « chanteur<br />
de chant populaire, dainà », est pris au slave.<br />
Les emprunts se sont continués dans les langues slaves :<br />
tch. hudlar « bousilleur » est ail. Hud(e)ler sur hudeln « bousiller ».<br />
Et des imitations : *pekarjï « boulanger », dans r. pékar', pol.<br />
piekarz, tch. pekaf, s.-cr. pèkâr, est un dérivé du thème slave pek-,<br />
mais il calque l'allemand Bâcker, m. h. a. becker, de backen « faire<br />
cuire » ; et si *kuxarjï « cuisinier », pol. kucharz, tch. kuchar,<br />
s.-cr. kuhâr, est indépendant de l'allemand Koch, le verbe dont<br />
il est tiré, s.-cr. kuhati, etc., répond à v. h. a. kochôn (§ 575).<br />
Ces emprunts au germanique et ces calques ont sûrement joué<br />
un rôle important dans le développement des dérivés slaves en<br />
-arjï tirés de thèmes verbaux, et avec accent sur l'initiale. Car<br />
la situation est en germanique, au début, la même qu'en slave :<br />
le gotique ne présente que des dérivés de substantifs, sans exemple<br />
sûr de dérivé de verbe, tandis que le vieux haut allemand a des<br />
déverbatifs, du type jagari « chasseur, Jàger », de jagôn « chasser »,<br />
aussi bien que des dénominatifs.<br />
Le roman a fourni aussi des mots, ainsi s.-cr. môrnâr « marin »,<br />
slov. mornâr, de l'italien marinaio, fr. «marinier» ; le grec également,<br />
qui a emprunté au latin le suffixe -àpioç, mod. -àpiç : v. si.<br />
drçgarjï « drongaire » du grec byzantin Spouyyàpioç ; ceci avant<br />
les emprunts savants au latin comme tch. notâr « notaire » (r.<br />
notârius).<br />
Le suffixe subissait des transformations en allemand comme en<br />
roman : v. h. a. -âri (-ari), puis -aere et -er. Ces changements ont<br />
été suivis dans les langues slaves :<br />
v. tch. -ier, mod. îr, pour -ar, ainsi tch. hrncir « potier », et v.<br />
tch. bradier « barbier », mod. bradyr avec substitution de suffixe<br />
(§ 1131) ; et dérivés en -irna, § 1090 ;<br />
h. sor. horncer, et wowcer pour ovcar ;<br />
pol. -ierz dans des emprunts : v. pol. barwierz, puis farbierz,<br />
mod. farbiarz « teinturier, Fàrber » ; v. pol. morderz « meurtrier,<br />
Môrder » ; zolnierz « soldat » de Sôldner « mercenaire », m. h. a.<br />
soldenaere ; et de même mozdzierz « mortier » de lat. mortârium ;<br />
— et sur base slave v. pol. walczerz « guerrier » sur walka « combat »,<br />
walczyc « lutter » ; bluznierz « diffamateur » (mod. bluznierca) sur<br />
bluznic' ; oblçgierz «assiégeant» sur oblçg- «assiéger» (§ 447).<br />
En serbo-croate de Dalmatie, c'est la forme ital. -iere que<br />
l'on trouve : bàrbijer « barbier », cak. barbir, de barbiere (et aussi<br />
croate bàrbïr, de l'allemand Barbier). D'où une substitution<br />
dialectale de la finale -ier à -ir : pàstijer pour pàstîr « pâtre »,<br />
(p)sàltijer pour psàltïr « psautier », et même mïjer pour mîr « paix »<br />
(qui est aussi un hyperjékavisme).
CHAPITRE XX<br />
SUFFIXES MASCULINS (suite)<br />
§ 854. Suffixe -aëï. — U est curieux que ce suffixe, important<br />
dans les langues slaves, soit complètement absent des textes en<br />
rédaction vieux-slave, et soit très rare dans les textes vieux-slaves<br />
en rédaction slavonne :<br />
kopacï « bêcheur » chez Upir', dans dat. plur. kopaëïmï [i]<br />
vinogradomï àuTîsXoupYoûç Jér., LU, 16 ;<br />
kovaëï « forgeron, xaAxsôç », II Tim., IY, 14 ;<br />
et d(ï)racï « épine » dans le collectif d(ï)racije (Upir', § 925),<br />
s.-cr. dràë, drâcje, slov. drâc, drâcje, sur dïrati « déchirer ».<br />
La traduction d'â[Z7TeXoupYoç est vinarjï dans l'Évangile, celle de<br />
X«Xxsiiç est kuznïcï dans des textes vieux-slaves (§ 835). Certains<br />
mots en -aëï attestés en slavon sont sûrement anciens : ainsi oraëï<br />
« laboureur » qu'on trouve dans toutes les langues slaves, r. orâë,<br />
pol. oracz, s.-cr. orâë, etc., mais qui n'apparaît qu'au xiv e siècle en<br />
moyen bulgare et en slavon, et le vieux slave a ratai.<br />
Des exemples de la traduction d'Hamartole, qui doivent<br />
appartenir au texte initial en vieux slave tardif, apportent<br />
l'explication de cette anomalie. On y trouve trois formes en -acï,<br />
dans des surnoms :<br />
govïnacï dans Koslçniinu Govïnacï 2036 « Constantin Copronyme,<br />
ô Ko7tp«vufAoç » ;<br />
uzdacï 52425 ô SaXiêapaç «le fabricant de freins», surnom de<br />
Léon le Sage, et 5272, mais ici addition au grec et var. premudryi ;<br />
et kovacï 468lg (var. kovalï et kuznecï) dans zamocnyi kovacï<br />
«le serrurier», surnom de/Léon ô pàvooKroç : le mot grec signifie<br />
« artisan, ouvrier », et péjorativement « rustre ». On peut supposer<br />
aussi un surnom avec nuance dépréciative dans Aleksandru kovaëï<br />
Il Tim., IV, 14, car il s'agit d'Alexandre le forgeron, un adversaire<br />
de saint Paul.
322 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Ainsi les mots en -aëï existaient bien à l'époque du vieux slave,<br />
mais ils appartenaient à la langue familière et devaient avoir une<br />
valeur expressive ou péjorative. Cette valeur qui en limitait<br />
l'emploi, ils l'ont perdue dans la suite, mais pas complètement.<br />
§ 855. Dans les langues slaves. — Le mot govïnacï réapparaît<br />
dans le slovène govnâë qui désigne le « bousier », à côté de govnâr,<br />
mais ce doit être une création savante sur le terme latin stercorarius,<br />
comme s.-cr. govnaë ; uzdaëï a disparu, et l'on n'a que pol. uzdarz,<br />
s.-cr. ùzdâr « fabricant de harnais », etc. ; kopaël et kovaëï se sont<br />
maintenus dans plusieurs langues, pol. kopacz, tch. kopâc, s.-cr.<br />
kàpâc, kàvâc, à côté d'autres formes, pol. kowal, tch. kovdf, en<br />
s'incorporant à la masse des formations nouvelles.<br />
En russe, on trouve des dérivés de verbes à thème en -a- : tkaë<br />
« tisserand », migâc « qui clignote », tolkâc « pilon » ; aussi bien sur<br />
d'autres thèmes, verbaux ou nominaux : skripdc « violoniste »<br />
sur skripël', lixâc « le brave » de l'adjectif lixôj ; et tout un type<br />
borodâc « le barbu », gorbâë « le bossu », nosâc « qui a un grand<br />
nez », etc., mots qui sont les substantifs d'adjectifs borodâtyj,<br />
gorbâtyj, nosâ(s)tyj. Les formations sont nombreuses, mais surtout<br />
de la langue parlée, et la langue littéraire n'en accueille que<br />
quelques-unes, skripâë, trubâë « le trompette », sildc « l'athlète », etc.<br />
En polonais, les exemples sont abondants dès le xiv e siècle dans<br />
des dérivés de verbes : yadacz « parleur », igracz « joueur », kopacz<br />
et wykopacz, etc. : le dictionnaire de Linde en compte plus de 400 ;<br />
sans valeur expressive, mais il y a un type plus limité de dérivés<br />
de noms augmentatifs ou péjoratifs : brodacz « à grande barbe »,<br />
brzuchacz « à gros ventre », gardiacz « à grosse gorge », etc., et bogacz<br />
« richard » en regard de bogalyj « riche », srokacz « cheval pie » en<br />
regard de srokaty.<br />
Le tchèque a des déverbatifs en -de : hràë, sekdë « faucheur », et<br />
en -ac : vazaë « botteleur » de vâzati, et dans les polysyllabes<br />
nakladaë « chargeur », pokryvac « couvreur » ; et des dénominatifs :<br />
bradâë, brichâë, rohâc « cerf-volant », en regard de bradaty, brichaty,<br />
rohaly « cornu », bohâë de bohaly, etc.<br />
Le serbo-croate a des dérivés de verbes : krojâë « tailleur »,<br />
pomàgâc « auxiliaire », dobàvljâë « fournisseur », kàtâc « roue » sur<br />
kot-« rouler »(§ 738), upïjâë« buvard », zavijâë« bande (molletière) »,<br />
ogrnâë « tablier » et ogrtâc « manteau », sur o-grnuti, à-grtati (thème<br />
*gurt-, v. si. grustï «poignée », § 1169) ; et des dérivés de noms :<br />
bàkrâc « chaudron (de cuivre) » de bàkar « cuivre », biihâë « pyrèthre »<br />
de bùha « puce », et rèpâc « qui a une queue », ràgâë « caroube » en<br />
regard de rèpat, royal « cornu ».<br />
En slovène, le suffixe -àë est également très productif : berdë<br />
« vendangeur » et « quêteur, mendiant », sekdë « bûcheron » et
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 323<br />
« couperet » ; et bradée, glavàc « qui a une grosse tête », zobdc « qui<br />
a de grandes dents », adj. bradât, glavàl, zobàl ; govnâc « bousier »,<br />
adj. gçvnat « merdeux ».<br />
Le bulgare et le macédonien ont ~aë : bulg. kradàc « voleur »,<br />
rogâc « cerf », adj. rogât « cornu ».<br />
L'accent est d'un seul type : r. trubâë, gén. trubacd, s.-cr. àrâc,<br />
gén. orâëa, slov. ordë, gén. ordea : kachoube worôc avec le même<br />
accent mobile que dans le type en -ôrz (-arjï, § 852).<br />
§ 856. Suffixe -aca. — Ce suffixe est complètement inconnu du<br />
vieux slave et aussi du slavon, et du russe, du polonais, du tchèque,<br />
du bulgare, où les féminins des noms en -aë sont en -acka (§ 886).<br />
Mais le serbo-croate a un type productif de féminins en -aëa :<br />
rèpaëa « comète » (usuellement rèpatica), de rèpâë « qui a une<br />
queue », adj. rèpat ; narïkaca « pleureuse, vocératrice », en face de<br />
naricati « pleurer (un mort) » ; udàvaca « fille à marier » ; et surtout<br />
des noms d'instruments et de choses : drijaca « herse » en face de<br />
drljâc « herseur », de drljati « herser » ; pokrivaca « couverture de lit »<br />
et masc. pokrivâc ; povèzaca « fichu », vecérnjaëa « étoile du soir »<br />
de vëcërnjX « du soir » ; vèljaëa, ovèljaëa « février » sur l'ancien et<br />
dialectal vêljï « grand » (§ 276), ovelji, verbe oveljiti se « s'allonger » ;<br />
et -ovaëa : bûkovaca « bâton de hêtre ».<br />
Le slovène a de même berâëa féminin de berâc, et surtout des<br />
noms d'instruments : orâca « soc de charrue », brisâëa « serviette »,<br />
olirâca « torchon », etc.<br />
§ 857. Origines du suffixe. — L'origine, ou les origines, d'un<br />
suffixe expressif peuvent être difficilement identifiables. Le<br />
baltique ignore le suffixe slave -acï. Une comparaison avec le suffixe<br />
de substantifs -âÇ, du grec, ou d'adjectifs -âx du latin, ne<br />
saurait satisfaire.<br />
On ne peut pas penser à une simple addition à des thèmes en<br />
-a- du suffixe rare -cï (§ 1041). Et l'on ne voit pas de rapport entre<br />
-acï et le suffixe -aku dont les emplois sont différents (§ 861) :<br />
c'est le suffixe -ici qui, dans son développement, fournit un<br />
parallèle (§ 859). Mais c'est surtout avec le suffixe -arjï qu'on trouve<br />
des contacts : -acï pourrait avoir été une variante plus populaire<br />
de -arjï, un suffixe d'emprunt d'origine plus vulgaire.<br />
On soupçonne que *kolacï « galette, gâteau », qui est attesté<br />
d'assez bonne heure et apparaît dans toutes les langues slaves,<br />
r. et tch. kolâë, s.-cr. kolâc, $te., n'a été rattaché que secondairement<br />
à kolo « roue » en devenant (pas partout) une galette ronde, et<br />
qu'il est un mot d'emprunt. On penserait au latin -deem, -âcea,<br />
ital. -accio, fr. -asse, à très grande extension dans la langue vulgaire,
324 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
lat. vînâcea « marc de raisin », et indépendamment fr. « vinasse » ;<br />
et cette origine est probablement celle de -aëa du serbo-croate et<br />
du slovène.<br />
Mais on trouve un mot en -aëï pris au turc : r. tolmâc « interprète »,<br />
pol. tiumacz, s.-cr. tùmâc, etc. ; et une variante sokacï, slov. sokâë,<br />
de v. si. sokaëii «cuisinier» (§ 155). Il n'est donc pas impossible<br />
que -aëï ait son point de départ dans l'adaptation du suffixe turc<br />
-ci qui a donné -en en vieux slave. Ceci indépendamment de la<br />
vaste extension de -ëii, qui se joint à des thèmes terminés par<br />
consonne (§ 864) ; mais en turc l'addition de -ëi à un thème en -an'est<br />
pas rare, ainsi en turc osmanli boyaci (= -dzy) «teinturier»<br />
de boya « couleur », kiraci « loueur de chevaux » de kira « location »,<br />
d'où dans les langues balkaniques s.-cr. bôjadzija, kirâdzija<br />
« locataire » ; et sur -ëi ( § 864) le russe kaznacéj « caissier » de kaznâ<br />
« caisse (publique) », ancien nakraëej « timbalier » de nakra, et de<br />
surnà, zurnâ « clarinette », surnâëéj, zurnaëéj, et zurnâë comme<br />
trubâc « trompette ».<br />
SUFFIXE -ici<br />
858. De ce suffixe, on trouve un exemple unique en rédaction<br />
vieux-slave : kotoriëï «batailleur» (Supr.). En vieux slave de<br />
rédaction slavonne, on a pogonicï (Gr. Naz.) « qui pousse » (les<br />
travailleurs, comme un conducteur de bestiaux), zazoricï (Izb.<br />
Svjat.) «qui blâme»; et en slavon ot(u)vëtiëï «répondant (à la<br />
messe ) », en vieux russe (xm e siècle) nevodiëi « pêcheur au filet<br />
nevodu ».<br />
Mais il y a en outre une petite série d'adjectifs dérivés en -iëïnu<br />
qui n'ont rien à voir avec les substantifs en -ica ou en -iku : v. si.<br />
nekoloriëïnu «non batailleur», razumiëïno « avec réflexion», adv.,<br />
et nerazumicïnu « irréfléchi », blagopriimiëïnu « favorable, sÙTcpoaSsx-<br />
TOÇ » dans le Suprasliensis ; en rédaction slavonne priimiëïnu<br />
« accueillant » (Éphrem), sûtvoricïnu « qui peut faire, productif »<br />
(Athan.) ; en slavon kramoliëïnu « séditieux » (xi e siècle », ustaviëïnë<br />
«de façon stable», adv., doxodicïnù «(patrimoine) à revenir»,<br />
jazdiëïnu « (cheval) qu'on peut monter ».<br />
Un substantif pogonicï est en regard du verbe pogonili, et<br />
l'adjectif sûtvoriëïnu en regard de sûtvoriii ; mais kotoriëï est à<br />
part de kotorati sç « se quereller », zazoricï se rattache à zazoru<br />
«blâme» (§ 728) et un verbe zazoriii est tardif en slavon; de<br />
même v. r. nevodiëi est tiré de nevodu indépendamment du dénominatif<br />
postérieur r. nevodW « pêcher au filet ». C'est à des adjectifs<br />
en -ivu (§ 995) que s'apparentent le plus nettement les substantifs<br />
en -iëï : kotoriëï à koiorivu ; razumiëïnu à razumivu, et razumiëivu
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 325<br />
(J. Ex.), plus qu'au verbe vu-razumiti ; kramolicïnu à kramolivû,<br />
slavon, ou vieux-slave d'après kramolivyi Srezn. chez Hamartole,<br />
17617, mais l'édition peu sûre d'Istrin donne kramolnyi sans<br />
variante ; otuvëticï au slavon otuvëtivQ, jazdiëïnu, à s.-cr. jèzdiv.<br />
§ 859. Dans les langues slaves. — Le russe ignore le suffixe,<br />
mais parce qu'il l'a perdu en lui substituant d'autres suffixes,<br />
comme l'atteste v. r. nevodiëï, mod. nevodcik. De même le polonais,<br />
et le bulgare.<br />
Mais le tchèque présente toute une série de dérivés en -ic de<br />
verbes en -iti : bëlië « blanchisseur » de biliti « blanchir », burië<br />
« rebelle » de bouriti, hojic « guérisseur » et ranhojic « rebouteur »<br />
de hojiti, et holic« coiffeur », palic« incendiaire », ridic« conducteur»,<br />
varië « brasseur », etc. ; tous noms d'agents, pouvant désigner<br />
un animal dans honic « chien de chasse », ou un instrument dans<br />
vodië « conducteur (d'électricité) ».<br />
En slovène, les dérivés en -ië, de *-ikyo- se confondent avec<br />
la masse des dérivés en -ië de *-ityo- (§ 868) : kolic « échalasseur »<br />
de kôliti « planter des pieux, échalasser » avec kolic « petit pieu »<br />
diminutif de kol. Mais on reconnaît une petite série de noms<br />
d'agents tirés de verbes en -iti : mlatië, gén. mlatiëa, « batteur »,<br />
de mlatiti « battre le blé », pogonic « conducteur de bestiaux »,<br />
ribic «pêcheur» de ribiti, snubië «intermédiaire dans le mariage»<br />
de snûbiti « faire la demande en mariage », vâbic et povâbië « inviteur »<br />
de (po)vâbiti ; et aussi bien de verbes en -ati : podâjic (et podajâë)<br />
« manœuvre, aide-maçon » de podâjati, pokôpic « fossoyeur » de<br />
pokôpati ; et pozôvië « qui convie aux noces » de pozvdti, prés.<br />
pozôve-, subst. pozov « invitation ».<br />
En serbo-croate, les mots en -ic ne sont connus qu'au xix e siècle<br />
et en partie dialectaux, d'où une confusion de -ic et -ic (§ 26) :<br />
ainsi le plus ancien, du xvin e siècle, est attesté en Dalmatie sous<br />
les formes tèk(l)îc et tëklic «courrier, précurseur»; le nom du<br />
« bouton-d'or » est tjùtic ou tjùtic, ce qui rend douteux d'autres<br />
noms de plantes en -ic. Il reste quelques noms d'agents : brànïc,<br />
gén. branica, « protecteur », de brâniti, mais accentué aussi brànië,<br />
gén. brànica, et sa réplique hrànië « nourrisseur » dans un proverbe ;<br />
gonïc « conducteur de bestiaux » ; kàlïc « échalasseur » et pogonïc<br />
« rabatteur », qui sont des parlers de l'ouest au contact du slovène ;<br />
un nom de plante, qui est un nom d'agent, vràtic et pôvratic<br />
« tanaisie », vermifuge qu'on donne aux vaches pour faire revenir<br />
leur lait ; et des noms d'instruments, povàzîë « cheville dans les<br />
roues de la charrue », et vfidîë « conducteur d'électricité », sûrement<br />
pris au tchèque.
326 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
§ 860. Origine. —• Les suffixes -iëï et -acï sont parallèles, et ils<br />
ont le même aspect de formations en -ëï sur des thèmes de verbes<br />
en -iti et -ali. Pour -iëï, un point de départ peut avoir été fourni<br />
par les dérivés v. si. biëï « fouet » et briëï « rasoir » des thèmes biet<br />
bri- (§ 1041). Mais il apparaît, pour -ici comme pour -acï, que<br />
le rattachement à un thème verbal est secondaire, ou indirect,<br />
avec -iëï formant les substantifs d'adjectifs en -ivu comme -aëï<br />
d'adjectifs en -alu.<br />
On peut penser que le suffixe -iëï s'est développé à l'imitation<br />
de -aëï dès que -acï a été conçu, dans kopaëï, kovaëï, etc., comme<br />
formant des dérivés de thèmes verbaux en -a-.<br />
SUFFIXE -aku<br />
§ 861. — Pas d'exemple en rédaction vieux-slave de ce suffixe<br />
productif dans les langues slaves. En rédaction slavonne :<br />
bujakiï (Izb. Svjat.) « le furieux » ;<br />
novaku « le nouveau(-venu) » (Cyr. Jér.) ;<br />
prisnakû « le proche (parent) » (Gyr. Jér.).<br />
Et cruvjakû (Gyr. Jér.) donné comme traduisant àxptç « sauterelle<br />
», mais qui ne peut être qu'un dérivé de cruvï « ver », comme<br />
r. ëervjâk.<br />
Un masculin mçzaku « homme viril » se restitue d'après le<br />
féminin mçzaky (Cyr. Jér.) «virago » (§ 203), et le mot est en effet<br />
ancien, puisqu'on le trouve dans toutes les langues, r. muzâk,<br />
slov. mozâk, tch. muzâk « homme marié », etc. Sont sûrement<br />
anciens aussi :<br />
v. r. junakû « (vaillant) jeune homme », ukr. junâk, s.-cr. jùnâk<br />
(xiv e siècle), etc. ;<br />
v. r. svojaku « parent (par alliance) », r. svojâk « beau-frère »,<br />
s.-cr. svâk (xv e s.) et récent svojâk (§ 81), pol. ancien swak «beaufrère<br />
» et récent swojak « compatriote », slovaque svâk, etc.<br />
Ce sont des dérivés d'adjectifs, bui, svoi, etc. Et également de<br />
substantifs : mçzï est aussi un qualificatif, « mâle, viril », avec un<br />
comparatif mçzai (§ 288), mais ërûvï n'a rien d'un adjectif, et son<br />
dérivé, qu'il faut nécessairement lire ëruvïjaku, apparaît bâti<br />
sur le pluriel cruvïje, comme bulg. ëérvej (§ 169).<br />
On ajoutera pol. et sor. ptak «oiseau », tch. ptâk, sur le thème<br />
pût- de puta, putica (§ 878), qui fait supposer un *putû masculin<br />
comme lat. putus « petit garçon » : le mot a pu être adjectif et<br />
substantif. Et r. gusâk «jars », slov. gosâk (§ 1121).
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 327<br />
Ces substantifs sont à part des adjectifs pronominaux en -aku,<br />
mais il convient de souligner ici l'importance et l'extension de ce<br />
type de dérivés pronominaux qui indiquent la qualité (§ 259) :<br />
v. si. kaku, jaku, taku, (sicï), onakù, slavon ovaku ; vïsëku «de<br />
toute sorte » et slavon vïsjakojaku, inaku « d'autre sorte » et slavon<br />
drugojaku, jeterako « de quelque sorte » ; jedinaku, dùvaku et dûvojaku,<br />
obojaku, trojaku, et slavon ëetveraku (r. ëetverojdkij), sesleraku,<br />
etc. (§317).<br />
Un de ces adjectifs est également substantif : jedinaku « solitaire,<br />
jxovaxéç » (Pand. Ant.), r. odindkij, adj., et subst. odinâk « solitaire »<br />
et « fils unique », pol. jedynak. Et le slavon tretijakù « de trois ans »<br />
est substantif dans r. tret'jâk, s.-cr. Irècâk « animal de trois ans »<br />
et « élève de troisième année », avec un féminin tretijaky (Izb.<br />
Svjat.) en vieux slave (§ 203).<br />
On peut rattacher à ce type d'adjectifs v. si. vuznaku « à la<br />
renverse », pol. (na) wznak, v. tch. vznak et mod. naznak, slov.<br />
(v)znâk, et r. ndvznic, navznik « sur le dos » modifié d'après son<br />
contraire nie « face contre terre », v. si. nicï ( § 275) : il doit s'agir<br />
d'une forme en -aku sur un dérivé en -nu de vuz- « en arrière »,<br />
*vuznu comme raznû sur raz- (§ 1071).<br />
§ 862. Dans les langues slaves. — Le russe a des dérivés<br />
d'adjectifs : prostâk « le simplet, le benêt », rusdk « le lièvre »,<br />
ëuzâk « l'étranger », bol'sâk « le chef (de famille), l'aîné », surtout en<br />
-jâk : bednjâk « le misérable », goljâk « le gueux », posljâk « le plat<br />
personnage », tolstjâk « le gros » ; en -ëdk dans smel'câk « homme<br />
hardi », vesel'ëâk « homme réjoui, bon vivant », sur élargissement en<br />
-ïcï, cf. pol. smiaiak « le hardi » ; en -njâk désignant des choses :<br />
molodnjdk «jeune bois», bereznjdk « boulaie », zeleznjâk « minerai<br />
de fer » ; — des dérivés de noms de nombre : pjatdk « pièce de cinq<br />
(copecks) ; — des dérivés de substantifs : rybâk « pêcheur »,<br />
zemljâk « compatriote » ; et des noms d'habitants : Tuljâk «habitant<br />
de Toula » ; et désignant des choses : medjdk « chaudron », kostjâk<br />
« squelette » ; — des dérivés de verbes : si ëudâk « l'excentrique »<br />
peut être tiré de cûdo aussi bien que de cudit' « faire l'excentrique »,<br />
et si vozâk «guide» est un élargissement de voz(d)', on a des<br />
exemples nets avec des noms d'instruments : rezâk « couperet »,<br />
iesâk « briquet (du soldat), coupe-choux » ; — et d'autre part des<br />
noms de personnes en -àka du type expressif des masculins en -a<br />
(§ 208): yuljâka «fainéant», rezâka «coupeur, bretteur », zevâka<br />
« qui baye aux corneilles/ badaud ». Sans oublier la finale -dk des<br />
mots d'emprunt : ëerddk « mansarde », gajdamdk « brigand », etc.<br />
En polonais, on a des dérivés d'adjectifs : prostak « le rustre »,<br />
slepak « l'aveugle » ; et de numératifs : dziesiqtak « pièce de dix
328 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
(kreutzers) » ; — de substantifs : rybak, zçbak « le poisson dentex »,<br />
wialrak «moulin à vent», lewiczak «homme de gauche» (§ 851) ;<br />
et de noms de lieux : Krakowiak « habitant de Cracovie » ; — de<br />
verbes : spiewak « chanteur », zebrak « mendiant » sur zebrac «mendier<br />
», bujak « fauteuil à bascule » sur bujac siç « se balancer ».<br />
Le suffixe est productif dans la langue populaire : Krakowiak,<br />
Warszawiak sont en regard des plus solennels Krakowianin,<br />
Warszawianin ; sur l'ancien adjectif wiesny « villageois », on n'a<br />
que wieéniak « le villageois », avec la trace de -nianin dans le<br />
féminin wiesnianka (usuellement wiesniaczka). Si l'on trouve un<br />
sens diminutif dans oslak « ânon » de osiei « âne », c'est parce que<br />
le mot est comme oslqlko fait sur oslç.<br />
En tchèque, on a des dérivés d'adjectifs : chytrâk « un malin » ;<br />
— de substantifs : lesâk « forestier », et de noms de lieux : Prazâk<br />
« Pragois » à côté de Prazan, et l'opposition de la forme nouvelle<br />
en ~âk plus familière à -an (pour -aninû, § 212) ancien et plus<br />
littéraire peut créer des différences de sens : mësl'an « citadin »<br />
et mësi'âk « bourgeois », dvofan « courtisan » et dvorâk « intendant »<br />
ou «paysan libre»; — des hypocoristiques du type de Barlâk<br />
sur Barîolomëj « Barthélémy » ; — des dérivés de verbes : kurâk<br />
« fumeur », zpëvdk « chanteur », pijâk « buveur » et « buvard ».<br />
En slovène, dérivés d'adjectifs : gluh.dk « le sourd », golobinjâk<br />
«pigeonnier» sur adj. golobinji, pomorscâk «marin»; et de noms<br />
de nombres : stotdk « billet de cent (dinars) » ; — de substantifs :<br />
deëâk « garçon », bojâk « guerrier » ; — de verbes : vijdk « vis »<br />
pozirâk « gosier ».<br />
En serbo-croate : brzâk « le rapide (d'une rivière) », gàdisnjâk<br />
« annuaire », pètâk « élève de cinquième » ; —• poljâk « gardechampêtre<br />
», sèljâk « villageois », Bôsnjâk « Bosniaque » ; nëcâk<br />
«neveu», r'ôdâk «parent» (§ 146); — lèzâk «fainéant», tèzâk<br />
« agriculteur » ; prosjâk « mendiant » (depuis le xv e siècle) n'est pas<br />
tiré directement de prôsiti « mendier », mais représente une réfection<br />
de v. si. prositeljï par élimination du suffixe -teljï (§ 849).<br />
En bulgare : slabâk « gringalet », morjâk, et dérivés de noms<br />
d'arbres et de plantes : bukdk « hêtraie », dâbdk « chênaie », trevdk<br />
et trevol(j)âk «lieu plein d'herbes».<br />
L'accent est régulièrement ou ordinairement du type r. prostdk,<br />
gén. prostakd, s.-cr. prôstâk, gén. prostdka, slov. prostdk, gén.<br />
proslâka, bulg. prostdk, plur. prostâci ; et tch. prost'àk.<br />
§ 863. Origine. — Le lituanien a des substantifs en -okas tirés<br />
d'adjectifs, ainsi naujôkas «novice» de naûjas «nouveau»; et<br />
de noms de nombres, treciôkas de trëcias ; mais ils sont imités du<br />
slave. Ce qui est proprement baltique, c'est une série d'adjectifs
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 329<br />
pronominaux indiquant la qualité, kôks « quel », tôks « tel », anôks<br />
« de cette sorte-là », si(t)ôks « cette sorte-ci », kiiôks « d'autre sorte »,<br />
visôks « de toute sorte », et de noms de nombre vienôks « d'une<br />
seule sorte», etc. (§ 259). Et la formation s'étend aux adjectifs<br />
ordinaires en indiquant une sorte de qualité, une qualité atténuée,<br />
ainsi silpnôkas «assez faible» de silpnas « faible »; ce qui fournit<br />
au lette son comparatif en -âks (§ 286).<br />
L'accord est complet entre le slave et le baltique dans le point<br />
de départ, un type de dérivés pronominaux en *-âka-, paroxytons<br />
d'intonation rude (§ 260), avec des développements ultérieurs<br />
divergents, mais assez semblables. II s'agit à la base de l'élargissement<br />
en *-ko- (§ 259) d'une forme d'instrumental en i.-e. *-â, si.<br />
kaku et lit. kôk- de */c w â-, lat. qaà, d'où quâlis. D'autres rapprochements,<br />
comme avec le type d'adjectifs en lat. -âx, ne peuvent être<br />
qu'indirects.<br />
SUFFIXE -cïi<br />
§ 864. Le suffixe v. si. -cii, de masculins à flexion de féminins<br />
en -i, puis -ja (§ 155), est pris au turc -ci qui désigne des gens<br />
exerçant un métier. On le trouve en rédaction vieux-slave dans<br />
deux emprunts au turc :<br />
samûëii « dignitaire » ;<br />
sokaëii « cuisinier ».<br />
Et dans quatre dérivés de mots slaves, qui sont d'ailleurs sûrement<br />
ou probablement des mots d'emprunt :<br />
korabïcii « batelier » ;<br />
krumïcii « pilote » sur kruma « poupe » ( § 815) ;<br />
kûnjigucii « scribe » ;<br />
sarùcii « peintre » sur sarii « couleur » (§ 1114).<br />
De ces six formes, une seule est dans l'Évangile, les autres sont<br />
dans le Suprasliensis, et à côté de kûnjizïnikû qui est le terme usuel,<br />
korabïniku, krumïnikû (§ 843).<br />
Mais les exemples en rédaction slavonne sont plus nombreux :<br />
banïcii « patron de bains » (Éphrem) ;<br />
bëlïcii « blanchisseur, foulon » (Pand. Ant.) ;<br />
blûgucii, bluxucii « architecte, maître maçon » (Athan. 1006,<br />
1046), qui est le turc bilgudzi « savant, habile » ;<br />
cïvanïcii et vinocïvanïëij « échanson » (Éphrem), de v. si. cïvanu<br />
« pot, cruche » ( § 1094)<br />
ërûpïcii (Zlatostruj) et vinocrupïëii (Éphrem) « échanson » ;
330 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
dumïcii « souffleur » (Gr. Naz.) ;<br />
grabïcii « ravisseur » (Hom. Mih. 160 vb , 1. 34), comme v. si.<br />
grab iteljï (§ 847) ;<br />
sïrebroklepïcii «batteur d'argent» (Gr. Naz.), sur le thème klep-<br />
(§ 803);<br />
krûcagûcii « potier » (Athan.), sur krùcagù. « pot » (§ 1014) ;<br />
krucii « forgeron » (J. Ex.) de *kur(ï)cii, slavon russe korci,<br />
qui paraît se rattacher au thème kur- de lit. kùrti « allumer », si.<br />
kurili « fumer » ( § 757) ;<br />
prëlaguëii « interprète » (Cyr. Jér.) ;<br />
laskuëii « flatteur » (Izb. Svjat.) ;<br />
pisïcii « scribe » en slavon du xi e siècle, et pamçlopisïcii « annaliste,<br />
wtojAVT^aToypàtpoç » (Upir') ;<br />
prëpïn(u)ôii «qui fait obstacle, sjATtoSitTTvjç» (Hom. Mih. 187 vb ,<br />
1. 4);<br />
xlçpuëii « mendiant » (Hés., CVIII, 10, var. xlçp-, § 808) ;<br />
zïdùëii « bâtisseur » (Cyr. Jér.).<br />
On trouve d'autres mots encore en slavon, dont plusieurs<br />
peuvent remonter au vieux slave, comme prodavucii « vendeur »<br />
et s(ï)rebroprodavïci « àpyupoTCpav/)ç, changeur» (xi e siècle), vuspominùci<br />
« qui fait souvenir » (xn e siècle), piskuëii «joueur de flûte ».<br />
Le vieux serbe a tepïcii, nom d'un dignitaire.<br />
Le mot lovïcii «chasseur» est attesté un peu tard en vieux<br />
russe, r. mod. lôvcij « (grand) veneur », mais il se retrouve dans<br />
pol. lowczg, tch. lovci, s.-cr. lôvdzija. Toutefois, sauf en serbocroate,<br />
l'aspect est d'un adjectif substantivé, de flexion adjectivale,<br />
tch. lovëi, gén.-acc. lovëiho, et ne différant pas de l'adjectif dérivé<br />
de lovïcï, r. lôvëaja sobâka « chien de chasse ».<br />
§ 865. Dans les langues slaves. — Le serbo-croate a un suffixe<br />
productif -dzija, adaptation de la forme -dzi prise par -ci en turc<br />
osmanli : dans des mots d'emprunt, bôjadzija « teinturier » de bàja<br />
«couleur», turc boya et boyaci ( = -dzy) ; bostàndzija «jardinier»<br />
de bostan « jardin », turc bostan et bostanci ; kavèdzija « cafetier »,<br />
turc kahve-ci ; et dans des dérivés de mots slaves ou d'autre origine,<br />
sapùndzija « fabricant de savon, sàpûn », govordzija « homme<br />
loquace », hvdldzija « vantard ». Le suffixe peut avoir la forme<br />
-ëija après thème en consonne sourde : dumrùkëija « douanier »<br />
de âùmruk « douane », et ëifcija « paysan d'un ëifiluk, ferme,<br />
domaine turc », du turc cift « paire » et « attelage » ; mais ordinairement<br />
il y a assimilation de sourde à sonore : sahàdzija, sâdzija<br />
« horloger » de sàhat, sâl « heure », comme le turc saatci de saat.<br />
Le bulgare a de même -dzija : kafedzija, skembedzija « tripier »<br />
de skembë «tripes»; et -cija : gjumrukclja, cifcija et ciflikëija,<br />
e>
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 331<br />
et kebapëija « rôtisseur ». en regard de s.-cr. cevàbdzija, de kebâp<br />
« petite saucisse », s.-cr. cèvâp.<br />
Le slovène ignore le suffixe balkanique -dzija, et il ne conserve<br />
pas de trace reconnaissable du suffixe v. si. -ëii. Mais le tchèque<br />
présente une petite série de substantifs en -ëi, à flexion d'adjectifs,<br />
qui désignent des personnes exerçant un métier ou une fonction :<br />
lovci « chasseur » (mod. lovec), krejëi « tailleur » de v. tch. krajci,<br />
mluvci « celui qui parle, porte-parole, orateur », vybërëi « percepteur<br />
» et v. tch. berëi, nâhonci « rabatteur », vypravci « expéditeur ».<br />
Sans doute les mots en -ci peuvent être pour une part des adjectifs<br />
dérivés de substantifs en -ec, plavëi de plavec « nageur, navigateur » ;<br />
et koci « cocher », v. tch. kol ci, est l'adjectif substantivé en regard<br />
de kotëi vùz (d'où ail. Kutsche, fr. « coche »), « grande voiture<br />
couverte, voiture à, kotec», de kot «baraque», emprunt au germanique,<br />
v. angl. cot « cabane » (d'où « cottage »). Mais krejëi<br />
apparaît tiré directement de krajeti « couper », mluvëi a son<br />
parallèle dans s.-cr. govàrdzija, et le type est sûrement ancien et<br />
continue le type v. si. -ëii.<br />
Le polonais a de la même façon lowczy « grand veneur » distinct<br />
de iowca « chasseur », krajczy « écuyer tranchant » de krajac<br />
« couper ».<br />
Le russe a d'une part quelques mots en -ëej comme kaznaëéj<br />
«caissier», gén. -ëéja (§ 857), dans des emprunts au turc plus<br />
récents que ceux en v. si. -cii, mais qui correspondent à ces<br />
emprunts plus anciens, surnacéj «joueur de flûte» au slavon<br />
piskucii ; et d'autre part lôvcij, krâjcij (krâvcij), mais sûrement<br />
du polonais, et pévcij «chantre» et gùnëij «chien courant» ne<br />
sont que des adjectifs substantivés. Le type russe productif de<br />
noms d'hommes exerçant une fonction, et plus généralement de<br />
noms d'agents, est en -sëik ou -cik.<br />
§ 866. Suffixes -cik et -scik. — Il faut distinguer en russe deux<br />
suffixes :<br />
l'un en -cik qui fournit des diminutifs, bokdl'cik de bokdl<br />
« gobelet », divdncik de divan « divan », forme élargie de -ik (§ 1042)<br />
qui apparaît surtout après n, m, l, r, v ;<br />
l'autre en -scfk de noms d'agents, avec forme -cik après t, d, s, z :<br />
barabûnscik «joueur de tambour » (barabdnëik «petit tambour»),<br />
garderôbsëik « préposé au vestiaire », et bufétëik « sommelier »,<br />
zavôdëik « usinier », podpisëik « souscripteur » ; ovsëik : polirôvsëik<br />
« polisseur » sur ypolirovdt', grobovscik « croque-mort » en<br />
regard de l'adjectif grobovôj ; l'scik : belil'scik « blanchisseur »,<br />
locil'scik « rémouleur », bâtis non directement sur les verbes belil',<br />
loëit', mais sur les dérivés nominaux, belilo « du blanc », tocilo
332 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
« meule ». Le nom d'agent peut être nom d'instrument : sëëtëik<br />
« compteur ». L'accent est immobile, ordinairement sur la syllabe<br />
avant le suffixe, rarement sur le suffixe : buntovscik « le rebelle »,<br />
adj. bunlovskôj.<br />
De ce suffixe -(s)ëik si productif, le développement date du<br />
début du xiv e siècle : on trouve poborsëiku « collecteur d'impôt »<br />
en 1315. Or les mots en -(s)ëik succèdent pour une bonne part<br />
à des mots en -ëii du vieux slave ou du slavon : poborsëiku à<br />
(po)birïcii, bânscik à banïcii, belil'scik à bëlïcii, korabél'scik à<br />
korabïëii, kôrmsëik est une variante du slavonisme kormëij, subst.<br />
et adj., etc. On doit penser que le vieux-russe -cii, forme à la fois<br />
de substantif et d'adjectif, a été comme substantif élargi en -ëik,<br />
de même que le vieux-slave ërëvii « soulier », masculin en *-iyo-,<br />
est passé à r. ëerevik (§ 146). Et -ëik devenait -sëik dans le type<br />
-pisëik, écrit za-pisëik « enregistreur », de -pisïëii, mais cela semble<br />
insuffisant pour expliquer la généralisation de -sëik.<br />
En polonais, -czyk (§ 1042) est un suffixe de diminutifs de noms<br />
en -iec : miodzieniec « jeune homme » et mlodzienczyk, proporzec<br />
« étendard » et proporczyk ; et en -ek : bratcyk de bralek. Il fournit<br />
également des noms d'habitants de régions : Afrykanin et Afrykanczyk<br />
« Africain », Portugalczyk « Portugais », Poznanczyk « Posna-nien<br />
», et alors il est en regard d'adjectifs en -ski, afrikanski,<br />
portugalski, poznanski. C'est de la même façon qu'il donne des<br />
noms de personnes exerçant des métiers, comme stolarczyk qui<br />
n'est pas « menuisier, stolarz », mais « ouvrier menuisier », de<br />
slolarski « de menuisier » ; de même ciesla « charpentier », ciesielski<br />
et ciesielczyk « ouvrier charpentier », drukarz « imprimeur » et<br />
drukarczyk « apprenti imprimeur », garncarczyk « ouvrier potier »,<br />
ksiçgarczyk « commis de librairie », etc.<br />
Cette correspondance en polonais entre les suffixes -czyk et -ski<br />
permet de supposer pour le russe, entre bdnsëik « étuviste » et<br />
v. si. banïcii, korabél'sëik « patron de navire » et v. si. korabïëii,<br />
des intermédiaires slavons banïsku, korablïsku disparus (r. mod.<br />
bânnyj, korabël'nyj), et une substantivation de -ëii en -ëik devenue<br />
substantivation de -skij en -sëik.<br />
SUFFIXE -*ïtyo-, V. SL. -istï<br />
§ 867. — Ce suffixe sert en vieux slave à former des noms<br />
d'êtres jeunes :<br />
dëlisiï « enfant », qui fournit à côté de dëlç un singulatif au<br />
collectif dëti (§ 194) ;<br />
mladënistï, mladenistï « petit enfant », en regard de mladënïcï,<br />
mladenïcï «jeune enfant» (§ 183);
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 333<br />
otrocistï « petit enfant », de otroku ;<br />
robiëistï «petit serviteur», sur rabu, robu (§ 70) ;<br />
grûliëistï « petit de tourterelle », de grulica « tourterelle » ;<br />
kozïlistï « chevreau », à côté de kozïlç, de kozïlu « bouc » ;<br />
putistï « petit d'oiseau », et plus généralement « petit d'animal »<br />
(J. Ex.), en regard de pula (pûtica) «oiseau» (§ 878) et à côté<br />
de putënïcï, putenïcï.<br />
En rédaction slavonne, on trouve également :<br />
mladistï « petit enfant » (Gyr. Jér.) à côté de mlade (Upir') ;<br />
Ijubodëicistï « bâtard » (Pand. Ant.) ;<br />
tektonistï « fils de charpentier » (Pand. Ant.) ;<br />
tïvovistï « lionceau » (Gyr. Jér.) ;<br />
chez Cosmas bogatiëistï « fils de riche » (et Vie de Constantin,<br />
chap. III), diavoliëistï « fils du diable », Mamoniëistï « fils de<br />
Mammon ».<br />
La traduction d'Hamartole, d'origine vieux-slave, mais qui a subi<br />
un remaniement vieux-russe, présente toute une série de patronymiques<br />
en -iëï, avec la forme russe du suffixe :<br />
Gavriliëï 5426, 545u et Gavriloviëï 5412 ô raêpirjXÔTrouXoç ;<br />
Siraxoviëï 20418,29922 ô TOU Sipocx ; Ananiniëï 15327 ô TOU 'Avavvj, etc.,<br />
qui sont sans doute pour une part des remaniements russes<br />
d'adjectifs possessifs en -ovu et -inu, mais dont plusieurs doivent<br />
remonter à l'original vieux-slave ; et sur thème slave :<br />
Rataicicï 544u ô TOU 'ApoTpa ; Zajaciëï 5027, 29 9 4,18 ô Aaycùou et<br />
glose à Lagojeviëï 1992 ; et Taimiëiëï 19821, 2996 ô N66oç qui est<br />
le substantif d'emploi libre taimicicï 134u « bâtard » ;<br />
dans la traduction de Malalas taimiëistï, avec des patronymiques<br />
en -islï du type de Priamovisti « Ilpia^Sca, descendants de<br />
Priam ».<br />
A côté des formes en -ovislï tirées des adjectifs possessifs en<br />
-ouu, on remarque la fréquence des formes en -icistï qui, gruliëistï<br />
le montre, sont à l'origine bâties sur des féminins en -ica : robicistï<br />
est « petit, fils de servante », d'un rabica qui existait en vieux slave<br />
au moins virtuellement, et qui est r. rabica, à côté des usuels raba<br />
(§ 708) et rabynji (§ 919), d'où r. rabynië ; Ijubodëicistï est de<br />
Ijubodëica « courtisane », et taimiëistï est sur un dérivé *taimica<br />
du participe présent passif taimu « caché, secret » qu'on trouve dans<br />
l'adjectif taimëïnu «bâtard» Ham. 49128. On a de même<br />
le slavon zenimislï et zenimiëistï « fils de la concubine », v. si.<br />
zenima (§ 1069). <<br />
On a encore en slavon russe gospodiciëï « petit seigneur », puis
334 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
r. gospôdic ; v. r. sestriëiëï « fils de la sœur, neveu », puis sestriëï,<br />
et kunçzicï et kunçziëiëï « fils de prince », de kùnçzï et sans rapport<br />
avec kunçgynji « princesse ».<br />
§ 868. Dans les langues slaves. — Le russe a des noms désignant<br />
des descendants : korolévic « fils de roi », carèvic « fils de tsar »,<br />
popôvic « fils de pope » ; et ôtëic « descendant du père, héritier du<br />
patrimoine », dédië « héritier du domaine ancestral », rodovië<br />
(gén. -viëd) « allié » et rôdië « parent », v. r. rodiëï, de rod ou peut-être<br />
de *rodïjï (§ 146) ; — des patronymiques : Petrôvië, Alekséevië,<br />
sur masculins en -a Fomic (gén. -iëd) de Fomâ « Thomas », Nikilië<br />
de Nikita ; — des noms de tribus : v. r. Radimiëi, Dregoviëi ; et<br />
d'habitants de villes : Kostromic « de Koslromd », Moskvië « Moscovite<br />
», dont la forme ancienne était v. r. Moskvitinù, plur. Moskvici<br />
(§ 212). Accent mobile s'il porte sur la finale -ië.<br />
Le polonais a -ic devenu -icz au xvn e siècle par emprunt au russe,<br />
grand-russe et ukrainien : kroleœic (depuis le xiv e siècle), puis<br />
krôlewicz, panic « jeune seigneur », puis paniez ; des patronymiques<br />
et noms de familles, Szymonowic, puis -orniez, Nikolajewicz,<br />
Mickiewicz ; avec des développements expressifs de -owiez : balowiez<br />
« qui court les bals », cylindrowicz « dandy en haut de forme »,<br />
dorobkiewicz « parvenu ». La forme ancienne en -ic est conservée<br />
dans quelques mots : dziedzic « héritier d'un patrimoine », szlachcic<br />
« noble, membre de la szlachta », rodzic « père », et ksiçzyc « lune »,<br />
dont on explique le sens, proprement « petit prince », de ksiqdz,<br />
par opposition au soleil, grand roi.<br />
Le tchèque a krdlevic, panic « damoiseau », dëdic « héritier » ;<br />
des noms anciens de tribus comme v. tch. Ljulomërici d'un<br />
patronyme Ljutomër, qui ont donné de nombreux noms de lieux<br />
en -ice, Litomërice, Lobkovice, etc. ; et il y a eu des patronymiques en<br />
-ovic d'où est sorti un type en -ovic, abrégé ou bien génitif de plur.<br />
-ovici, désignant une famille : mlynârovic « la famille du meunier,<br />
les Meunier », pekafovic « la famille du boulanger ».<br />
En slovène, où les dérivés en -ic de *-ityo- se confondent avec<br />
ceux de *-ikyo- (§ 859), on a krdljevië, cesdrië, dêdië, bratlc «fils<br />
du frère » et « cousin », pile « oiseau » comme v. si. pûtistï ; des<br />
patronymiques, Lukië, Mlinarië ; et des diminutifs, kraljië « petit<br />
roi », psië « chiot », brezic « petite colline », et srnic « petit chevreuil »<br />
de fém. srna, jâmië « petite fosse » de jdma ; deklië « fillette», à côté<br />
de deklè « jeune fille » et dékla, dial. déëla, dans des dérivés remaniés<br />
de déte « enfant », dêca, dêëek, etc. ; konjië « petit cheval », et konjîc<br />
comme s.-cr. konjîc, voir ci-dessous. L'accent est immobile et,<br />
quand il porte sur la désinence, du type bralië, gén. bratiëa.<br />
En serbo-croate, on trouve krdljevic, càrevic, bràtic, slricevic<br />
« fils de l'oncle paternel » ; et plèmic « noble » de plëme « tribu,
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 335<br />
lignée », kucic et kMevic « de (bonne) maison, kuca, de bonne<br />
famille », et inversement rdâkovic de Ma « rouille » et « canaille »,<br />
objesenjâkovic « gibier de potence » de àbjesenjâk « pendard » ;<br />
kdzlic à côté de kôzle « chevreau », et plur. pïlici de pïle « poulet »<br />
(§ 195) ; — des noms de famille, îlic, Milovânovic ; —• des diminutifs,<br />
kràljic « roitelet », zùbic « quenotte », sesiric « petit chapeau »,<br />
et aussi de féminins, jàmic, jèlic « petit sapin » ; avec élargissement<br />
en -cic : sincic de slnak, sînko « fils, garçon », âavàlcic « diablotin ».<br />
L'accent est régulièrement fixe : kràljic, gén. kràljica.<br />
Mais on a un type kànjïc « petit cheval », gén. konjica, par<br />
réfection depuis le xvin e siècle de konjïc (§. 63), comme dgnjïc<br />
« petit feu », et aussi vjètrïc à côté de vjètric « petit vent, brise » ;<br />
et un type oxyton en -le, gén. -ica, de dérivés d'adjectifs : mlàdïc<br />
« jeune homme », gàlïc « gueux », sljèplc « orvet ». Il y a eu des<br />
confusions et flottements de suffixes, et la longue de -le, puis -Té,<br />
gén. -ica, ne doit pas' être celle d'un dérivé en *-jïcï, mais plutôt<br />
d'un dérivé en *-ïjïcï sur *-ïjï, comme dans s.-cr. dial. slàvïc (et<br />
slâvic), ancien slavic, de *slavïjï « rossignol » (§ 146).<br />
En bulgare et en macédonien, le suffixe a complètement disparu :<br />
mlâdic «jeune marié» est pris à s.-cr. mlàdïc. Les noms d'êtres<br />
jeunes sont en -e : kozlé ; les patronymiques sont en -ov, -in :<br />
Stojânov, Andréjcin. Le moyen bulgare avait sestricist « neveu »<br />
(mod. sésirinik), orlicist « aiglon » (mod. orlé, dim. orlénce).<br />
§ 869. Origine. — Le baltique a des diminutifs en lit. -îjlis :<br />
brolytis de brôlis « frère », vilkylis de viïkas « loup » ; et lette -ïtis :<br />
brâlîtis, vilcïlis ; et des patronymiques en lit. -îjlis : Kumulytis<br />
« fils de Kumut- » ; — des noms d'origine, patronymiques et dérivés<br />
de noms de lieux, en lit. -âiiis : Povilâitis de Pôvilas « Paul »,<br />
giminàitis « parent » de giminê « race, parenté », zemâitis « zémaïtique,<br />
du bas pays » de zëmas « bas » ; et en lette -ailis : dial. taulaitis<br />
« qui vient de l'étranger, tàuta (§ 263) », surtout noms de lieux en<br />
plur. -aisi : Tillaisi de sing. Tiltailis, etc. ; et des diminutifs en<br />
lit. -âiiis : jaunikâilis « jeune homme » de jaunikis ; — des dérivés<br />
de noms de pays et de lieux en lette -iëtis : latviëtis « lette », daugaviëtis<br />
« qui habite sur la Dvina, Dàugava », et lauliëtis en regard<br />
de dial. laulailis.<br />
Les trois formes -ylis, -ailis et -ielis du baltique indiquent<br />
que le suffixe est *-lyo- (§ 958), s'ajoutant à divers thèmes. Les<br />
formes du letto-lituanien en lit. -âiiis et lette -iëtis sont nettement<br />
bâties sur des locatifs anciens en masc. *-oi, -ai, -ie (lit. namië « à la<br />
maison », § 131) et en /îém. *-âi (§ 150) : c'est pourquoi elles<br />
indiquent l'origine.<br />
Les formes en *-ïtyo- du balto-slave sont plus difficiles à expliquer.<br />
Mais l'élargissement en v. si. -icistï marque une certaine tendance
336 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
à tirer les noms d'êtres jeunes en -istï de féminins, et donc un<br />
certain contact entre -(ic)isiï et le suffixe féminin -ica. Et comme<br />
-ica est bâti sur un thème en *-F (§ 884), on peut supposer que les<br />
mots en *-îtyo- sont pour une part des dérivés de féminins en<br />
*-F, lit. vilkytis « louveteau » et v. si. *vluëistï, s.-cr. vùëic, slov.<br />
vôlëië, de si. *vïlèi-ca, skr. vrkt « louve ». D'où le développement<br />
des sens « être jeune » et « descendant », et de là la valeur de<br />
diminutif.<br />
L'intonation de -F- était rude, l'accent était donc fixe, et l'accent<br />
mobile des types r. -ic, gén. -iëà et s.-cr. -Fc, gén. -ica doit s'expliquer<br />
par un développement secondaire de l'oxytonaison d'après d'autres<br />
types de dérivés, comme -aëï (§ 855).<br />
SUFFIXES -inu ET -janinu<br />
§ 870. Suffixe -inu. — Les suffixes -inu (§ 212) et plur. -(j)ane<br />
(§ 187) ont été étudiés comme suffixes flexionnels, avec recherche<br />
de leurs origines. Il reste à examiner leur extension comme suffixes<br />
de dérivation.<br />
En vieux slave, on trouve le singulatif -inu dans :<br />
gospodinu «seigneur», plur. gospodije (§ 170) ;<br />
boljarinu «magnat, boïar », plur. boljare (§ 206) ;<br />
Ijudinu « homme du peuple, laïc », sur Ijudije ;<br />
ëlovëëinû « homme, un des humains » (Supr., J. Ex.), sur plur.<br />
clovëci ;<br />
krïstijaninu, xristijaninu « chrétien », à côté de krïslijanu,<br />
xristijanû, adj. et subst. (§ 274) ;<br />
poganinu « païen », à côté de poganu ;<br />
oiminu « guerrier » (Gr. Naz.), plur. oimi, sans doute mot<br />
d'emprunt ;<br />
voinu «soldat», sur voi «armée» (§ 737), mais avec un pluriel<br />
voini ;<br />
spolinu « géant » (r. ispolin, § 109), plur. spoli ; — et gigantinu<br />
(Ham.), studovinu (Théod.) et studu (§ 263), plur. studove (Pand.<br />
Ant.).<br />
Et superposé à d'autres suffixes :<br />
vlastelinu « maître », zilelinu « habitant » ( § 848) ; en slavon<br />
dëlalelinu. «travailleur» (I Tim., Y, 18), variante de dëlateljï, et<br />
pëlelinû « coq », slov. petélin, s.-cr. cak. petelin, qui paraît être<br />
une déformation de *pëtïlû (§ 1055) par imitation de vlastelinu ;<br />
zaltarinu « orfèvre » (§ 851), en slavon rybarinu « pêcheur ».
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 337<br />
Du collectif cçdï (§ 211), on a le singulatif dans le juxtaposé<br />
jçdëcçdinù oî>coyev7)ç (§ 1215), attesté tardivement en slavon comme<br />
son féminin jçdëëçdyni (§ 919), mais qui est sûrement ancien.<br />
Chez Hamartole, surinu « frère de la femme » peut être la forme<br />
vieux-russe de *surïjï que continue r. surin, plur. sur'jâ (§ 146).<br />
Le vieux russe a sëminû « esclave » en regard de sëmïja « gens de<br />
la maison » (§ 1028), r. mod. sem'jd « famille » et sem'janin.<br />
Le singulatif en -inu se rencontre particulièrement avec des<br />
noms de peuples et d'habitants de villes : v. si. Ruminû « Romain »,<br />
Zidovinu « Juif », Iskariotinu « (Judas) Iscariote », Svrinu « Syrien »<br />
(var. Svrëninu), Pentapolitinû «de Pentapolis» (Athan.), chez<br />
Hamartole Armeninu « Arménien », Blugarinu, Turëinu, Gotfinu<br />
« Goth », Murinu « Éthiopien », en vieux russe Aravinù« Arabe », etc.<br />
Le vieux russe a connu un type en -itinu, plur. -iëi, de dérivés en<br />
*-ityo- (§ 868).<br />
§ 871. Dans les langues slaves. — Le russe a gospodîn, bojârin<br />
et bârin, surin, xozjâin « maître de maison », plur. xozjâeva (§211),<br />
musul'mânin « musulman » ; et des noms de peuples, Bolgârin,<br />
Tatdrin, etc., formation actuellement restreinte.<br />
Le polonais a connu v. pol. Gospodzyn « le Seigneur », bojarzyn<br />
(mod. bojar), et un type Turczyn, Wçgrzyn « Hongrois », qui est<br />
sorti d'usage au xvm e siècle (mod. Turek, Wçgier), et dont il ne<br />
subsiste que Tatarzyn à côté de Talar,<br />
En tchèque, il ne reste que Hospodin « le Seigneur » et ëeledin<br />
« valet de ferme », de ëeled' « gens de la maison » (§ 1006).<br />
En slovène, le singulatif -in a complètement disparu : petélin<br />
« coq » a un pluriel -Uni, gospodîn est dialectal pour gospçd, et<br />
vlastelîn « propriétaire » est pris au croate.<br />
En serbo-croate, au contraire, on a gospodin, vlastèlin «noble»,<br />
et vàrvarin « le barbare », tiranin « le tyran », horjatin « le manant »<br />
(du grec), muslimanin
338 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
localité », vïsjaninu « villageois » ne sont attestés qu'en slavon,<br />
et de même seljaninu, mais on a le féminin seljanyni (§ 919) chez<br />
Hamartole, et l'extension de -janinu devait être assez grande,<br />
puisqu'on trouve pozorjan- « spectateurs » Virg. 1180 et les élargissements<br />
vlasteljan-, zqtelën- de vlasteljï, zçleljï (§ 848).<br />
Pour les dérivés de noms propres de lieux, villes, pays, ils sont<br />
très nombreux, et la question est de répartir les formations, en<br />
-en-, -jan-, -an-, selon les consonnes finales des thèmes, en négligeant<br />
les graphies altérées qui ne sont pas rares avec les noms propres<br />
étrangers :<br />
après voyelle : Galilëaninu, Idumëanlnû, Nazarëan-, Zefean- ;<br />
après l : Izdrailëninù et Italjan- (Ham.), comme zçtelën- (Ass.,<br />
Supr.) et seljan- (Ham.), vlasteljan- (Izb. Svjat.) ;<br />
après r : Agarën-, Gomorën-, Samarën-, Svrën- et Nazarë(a)n-,<br />
et chez Hamartole Iverjan-, Isavrjan-, etc. ;<br />
après m, p, v : Jerusalimlën-, Rimlën- (Rimïjan- Supr.), Sodomlën-,<br />
[I]samljaninu « de Samos » Ham. 1441S ; — Etiopën- Ps. Sin.,<br />
mais var. -plën-, et -pljan- Ham. ; — Moravljan- (Vie de Constantin)<br />
et Ham. Jesëovljan-, Jesejevljan- 'Etreraïoi ;<br />
après n : Solunjan- « de Salonique », Xersonën-, -njan-, Kvrinën-,<br />
Ham. Paleslinjan-, etc. ;<br />
après l : Eg'vptën-, Izdraililën-, Izmailitën-, Moavitën- (Hés.),<br />
Korvndën-, chez Ham. régulièrement Amaniijan-, etc., et Parfjan-<br />
I7àp6o!, Golf jan- TOTOOI ;<br />
après d : Ham. Indjan-, Lvdjan-, Midjan-, sans trace de l'alternance<br />
consonantique de grazdan- ;<br />
après s, z : Persëninu, et Ham. Kolosjan-, Sirakusjan-, mais<br />
avec alternance consonantique Peloponisan-, Samosatevsan- 3225<br />
sur SoqjiocrotTeùç, Frakisjan- 4114 et Frakisan- 11326 sur plur.<br />
Qpxxeç ; — Gazjane Ta^aïoi, ;<br />
après k : Ham. Afrikjan-, Kapadokjan-, Finikjan-, etc., mais avec<br />
alternance consonantique Fraëaninû « Thrace » 177 ;<br />
après g, x : Frugëne pL>ysç (Athan.), Ham. Frjug(i)jane ;<br />
•—- Anliox(i)an- 'AVTLOXSÏÇ (Ham.).<br />
Il y a des flottements de suffixes, et extension aux noms grecs en<br />
-avoî, ainsi Markionëne (Athan.) de Mapjawvavoi « disciples de<br />
Marcion ». <<br />
Est à part Slovëninu « Slave » (§ 187), Ham. Slovën- et Slovjan-.<br />
§ 873. Dans les langues slaves. — Le russe a grazdanin « citoyen »<br />
et gorozdnin « citadin », mesëanin « bourgeois », seljanln « villageois »,<br />
dvorjanin « noble », sem'janln « père de famille », kresl'jdnin « paysan »<br />
et xrislijanîn «chrétien», plur. oblastjâne «habitants d'une pro-
[§ 835] SUFFIXES MASCULINS 339<br />
vince, ôblast' » ; — et un type productif de dérivés de noms de<br />
lieux et de pays, anciens comme Rimljanin, Egiptjanin, et les<br />
noms de tribus de la vieille Russie, les Poljane, Buzane, Drëvljane,<br />
Poloëane « de la Polota », etc. ; ou plus récents comme Angliëânin,<br />
Datcânin « Danois », et Kievljânin, Vitebljânin « de Yitebsk »,<br />
PariMnin « de Paris, Pariz » ; Moskvitjânin « Moscovite » distinct<br />
du populaire Moskvic « habitant de Moscou » ; avec un élargissement<br />
en -canin de -ec (§ 836) : Rostovcânin «de Rostov », Xar'kovëânin<br />
« de Char'kov ». Dans les formations nouvelles, l'accent est<br />
régulièrement sur le suffixe -(j)ân-.<br />
Le polonais a dworzanin « courtisan », mieszczanin « citadin »,<br />
ziemianin « propriétaire terrien », wioscianin « paysan », même<br />
wegietarjanin « végétarien », et le type Krakowianin.<br />
Le tchèque, où le, singulatif en -in a à peu près complètement<br />
disparu (§ 2X2), a dvoran, mëst'an, zeman de v. tch. dvorenin,<br />
zemënin, le type Praxan « Pragois » de Prazenin, et de nombreux<br />
noms de lieux en -any, Brozany, Hradcany, etc.<br />
Le slovène a de même -(j)an, et largement étendu, mescàn<br />
« citadin », oiocàn « insulaire », okoljàn et okôlican « habitant des<br />
environs », trzàn « habitant d'un marché, d'un bourg », dezelàn<br />
« campagnard » de dezéla « région, campagne » (§ 1054) ; — le type<br />
Norvezan, Ljubljancan « de Ljubljana », et des noms de lieux en<br />
-ane, Borovljane, Goricane (loc. Goricah, § 179).<br />
Le serbo-croate a gràdanin, sèljanin, dvôranin, àtoëanin et<br />
ôstrvljanin, et Beègraâanin, Zàdranin, Norvézanin ; en -ëanin,<br />
Dùbrôvcanin de Dùbrôvnik, Zâgrepëanin de Zâgreb.<br />
En bulgare, au contraire, et malgré la productivité du singulatif<br />
en -in, le type grâzdanin, sèljanin est limité, et les noms d'habitants<br />
de villes et de pays sont en -ec, Sofijânec, Vârnenec « de Varna »,<br />
Amerikànec. En macédonien grag'anin est à côté de grag'anec et<br />
apparaît remanié dialeetalement en gradjânin.
CHAPITRE XXI<br />
SUFFIXES FÉMININS<br />
§ 874. Suffixe -Ica. — Le suffixe -ica a deux emplois tout à fait<br />
différents : il forme des diminutifs féminins et des noms d'agents<br />
masculins.<br />
Diminutifs. — En vieux slave, en dehors de ovïca « brebis »<br />
et mysîca « bras » qui ne sont pas des diminutifs, on trouve<br />
seulement :<br />
dvïrïcç, plur., « petite porte », du pluriel usuel dvïri « porte »<br />
(§ 174);<br />
jadïca « petite nourriture » (Éphrem), de jadï ;<br />
kiepïca « petit piège, traquenard » (Pand. Ant.), de *klepï<br />
(§ 713).<br />
Mais en slavon une série d'exemples, dont plusieurs doivent<br />
remonter au vieux slave :<br />
crukûvïca « petite église », v. r. cerkovca (mod. cérkovka), en<br />
regard de v. si. crukùvica (Supr.) ;<br />
klëtïca «petite cellule» (xi e s.), de klëtï (§ 1170), en regard de<br />
v. si. klëtûka (Supr.) ;<br />
cëvïca (Hés. XCVII, 5) de cëvï «tuyau» (§ 718), variante de<br />
lïtvïcï « plectre » (§ 835) ;<br />
kadïca de kadl « cuve » (gr. xocSiov) ;<br />
plutïca de plûtï « chair » ;<br />
rëëïca de rëëï « parole » ;<br />
trustïca de trusti « roseau » ;<br />
vïsïca de vïsï « village » ;<br />
vlasiïca de vlaslï « domaine » ;<br />
vrûvïca de vruvï « corde » ;<br />
vusïca au sens de « tumeur », de vusï « pou ».<br />
Et bratiica diminutif du collectif bratija « frères » ;<br />
*dëtïca « petits enfants », diminutif du collectif dëtï (v. si. deti,<br />
§ 211)-<br />
g*
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 341<br />
§ 875. Dans les langues slaves. — La finale -ïca se maintient<br />
partout dans ovïca, r. ovcâ, s.-cr. ôvca, etc. On voit -ïca remplacé<br />
dès le vieux slave par -ica dans crûkuvica, et par -iïka dans klëtuka.<br />
Et *dëtïca conservé dans les langues méridionales est devenu en<br />
russe déliti.<br />
Le bulgare n'a plus que decd, pluriel de deté ; ailleurs -ka, dans<br />
dâstérka de dâsterjâ «fille» (§ 199), et macéd. k'érka, kôska de<br />
kostï, sénka de sënï ; bulg. misca « bras » est un russisme pour<br />
misnica et dial. mîska.<br />
En serbo-croate, au contraire, le suffixe -(ï)ca est fréquent :<br />
en dehors de djèca « enfants », et de kàca « cuve », vrvca et vrpca<br />
« cordon » qui ne sont plus des diminutifs du fait de la perte de v. si.<br />
kadï et vruvï, on a kfvca de krv « sang », ndcca de nôc « nuit »,<br />
rijècca « particule » de rïjec « mot », smrca de smrt « mort », stvdrca<br />
de stvâr « chose », zôpca de zôb « avoine », êé(c)ca de zêd « soif », etc.,<br />
et pamé(t)ca (depuis le xvi e siècle) de pàmët « intelligence », ancien<br />
pomocca de pômôc « secours » ; — mais aussi kcérka à côté de<br />
kcérca, de kcî « fille », sjênka qui a remplacé sjenca, de sjën « ombre »,<br />
au xvrn e siècle, kôska « osselet » et kôcka « dé », mlska et mïsica<br />
« bras ».<br />
De même en slovène : déca, et kâdca, vrvca toujours à côté de<br />
kàd, vrv, rêëca, stvdrca, dûrce, plur. (v. si. dvïrïcq) de dûri « porte »,<br />
bfvca de brv «passerelle» (§ 202), klçpca de klçp «banc», lûëca<br />
de lue « lumière », sênea « ombre », postrvea de poslrv « truite », etc.,<br />
mîsca « muscle » ; — mais aussi misica, vrvica, klopica, postrvica,<br />
etc., avec flottements fréquents et extension actuelle de -ica :<br />
bukevea « faîne » de bukev « hêtre », pêsemca de pêsem « chant »,<br />
remplacés par bûkvica, pêsmica, etc.<br />
En tchèque, il n'y a plus de trace de diminutifs en -ïca, ovee<br />
« mouton » étant à part : v. tch. siencë de sien, mod. sin « vestibule »,<br />
vlaslcë de vlast « domaine, patrie », zedcë de zed' « mur » (§ 713), sont<br />
devenus sinka, zidka et vlaslice.<br />
Le polonais n'a, des diminutifs, que les vestiges v. pol. sienca<br />
de sien « vestibule », et uiirzbca « ceinture », wierzbca « corde »<br />
(mesure de longueur), de *vïrvï.<br />
Le russe a mysca et myska « muscle », il a conservé plur. klepcy<br />
de klep' « traquenard » à côté de klëpka au sens de « douve », et il a<br />
des diminutifs krepostcâ « fortin » de krépost' « forteresse », pyl'cd<br />
« pollen » de pyl' « poussière », grjazcd de grjaz' « boue », lencd de<br />
len' « paresse », même de féminins en -ota : grjaznotcd de grjaznotd<br />
« saleté », krasnotcd de krasnotd « rougeur », xripotcd de xripotd<br />
« enrouement » : petite productivité, mais surtout dans la langue<br />
familière. Un diminutif' pamjatcd «mémorandum, registre obituaire<br />
» est attesté dès le xvi e siècle (Srezn., Supplément), et<br />
pamçluka dès le vieux slave (§ 885) ; il répond au grec 6TO[AV7)[j.dcTiov<br />
et diffère du serbo-croate pamé(t)ca «jugeotte».
342 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
§ 876. Noms d'agents. — Le vieux slave a :<br />
jadïca « mangeur », masculin, différent du diminutif fém. jadïca<br />
« petite nourriture » ;<br />
ubiica « meurtrier » et uboica, èlovëkoubiica et -uboica, à côté de<br />
bogoubiicï et clovëkoubiicï Athan. ;<br />
vinopiica « buveur de vin » et vinopivïca, vodopiica, kruvopiica<br />
(Ham.) ;<br />
sëëïca « bourreau », et sëcïcï.<br />
En slavon, un assez grand nombre de formes sont signalées,<br />
dont certaines doivent être d'origine vieux-slave :<br />
biica «batailleur» (I Tim., III, 3), ikonorazbiica et -razbiicï<br />
«iconoclaste» (Kormcaja, éd. Benesevic, p. 704) ;<br />
grabïca « homme rapace » ;<br />
grebïca « rameur, matelot ».<br />
Le slavon russe (i)zradïca « traître » (xv e siècle) est pris au<br />
polonais zdradzca (mod. zdrajca).<br />
Cette formation de masculins en -Ica a complètement disparu<br />
en bulgare, en serbo-croate et en slovène. Elle existait en vieux<br />
serbe, où l'on trouve jemïca « garant » (mod. jëmac, jàmac), suvëdïca<br />
« connaisseur ». Dans la langue moderne, un mot en ~ca dérivé de<br />
thème verbal comme bôca « plante à piquants, glouteron » est<br />
féminin et a l'aspect d'un postverbal de bàcati « piquer » ; de même<br />
glôca « prune ou pêche duracine » de glôcati « ronger ».<br />
Le russe a également perdu le type : le vieux-russe dumïca<br />
« conseiller » se conserve dans le pluriel usuel dûmcy, mais le<br />
singulier est dû mec.<br />
Ce n'est qu'en polonais et en tchèque que la formation a persisté,<br />
et en se développant considérablement.<br />
En tchèque : strâjce « instigateur » de strojiti, tvûrce « créateur »<br />
de tvorili, vùdce « guide » de voditi, skûdce « homme malfaisant »<br />
de skodiii « nuire » ; zhoubce « destructeur » de hubiti « détruire »,<br />
soudce « juge » de souditi (ancien suditi, prés, soudi-, § 102) ; ddrce<br />
« donateur » de dariti, sprdvce « administrateur » de spraviti, rddce<br />
« conseiller » de raditi et zrâdce « traître » de zraditi, vlddce « souverain<br />
» de vlddnouli (v. tch. vlade-), ochrdnce «protecteur» de<br />
ochrâniti, etc. ; et des formations récentes comme obrdnce « défenseur<br />
» de obrdniti, zdjemce « l'intéressé » tiré directement de zdjem<br />
« intérêt », et poradce « conseiller » de poraditi sans alternance de<br />
quantité, tandis que dans les formations anciennes il y a régulièrement<br />
allongement de la voyelle du thème.<br />
En polonais : twôrca « créateur » de tworzyc, wôdca, wôjca « guide »<br />
de wodzié et przy wôdca «chef» de przy wodzic «commanderY;<br />
dawca « donateur » de dawac, sprawca « auteur » de sprawic
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 343<br />
« effectuer », zdrajca « traître » de zdradzic, znawca « connaisseur »<br />
et rzeczoznawca « expert », pol. ancien przyjemca « celui qui<br />
accueille », etc. ; pour une large part avec substitution de -ca<br />
au type plus ancien de noms d'agents en -teljï, ainsi skazca « corrupteur<br />
» pour v. pol. skaziciel de skazic « corrompre ». Il y a une<br />
autre extension, surtout récente, de -ca pour -iec dans les<br />
substantifs dérivés d'adjectifs : winowajca « malfaiteur », nettement<br />
secondaire de winowaciec sur winowaty « coupable » ; wiadomca et<br />
swiadomca « connaisseur » à côté de (sJwiadomiec sur (sJwiadomy,<br />
znajomca pour znawca sur znajomy « connu » ; iakomca et lakomiec<br />
« homme avide », skqpca et skqpiec « l'avare », osobca « le solitaire »<br />
à côté de osobnik sur osobny « isolé », ospalca et ospalec « l'endormi »,<br />
zuchwalca et zuchwalec « l'insolent », etc.<br />
§ 877. Les origines. — Les noms d'agents en -ica sont des<br />
variantes des noms en -ici, avec le développement des masculins en<br />
-a dont la valeur originelle était expressive et familière (§ 208).<br />
Comme formation diminutive, -ica est le féminin du suffixe<br />
-ïcï, mais avec limitation aux dérivés de féminins en -ï, anciens<br />
thèmes en -i- ou remplaçant des athématiques.<br />
En baltique, le lituanien a des diminutifs en -ikè, mais aussi<br />
bien de féminins en -à- qu'en -i-, c'est-à-dire correspondant à la<br />
fois à -ica et à -ica du slave : antikè de ântis « cane » (§ 175) et<br />
galvikè de galvà « tête ». Le sanskrit a quelques diminutifs en -ika-,<br />
fém. -ikâ (§ 837), ainsi ajiki de ajd « chèvre ».<br />
Est ancien et isolé en slave ovïca « brebis, mouton », sur i.-e.<br />
*oui-, gr. o(F)iç, lit. avis ; en sanskrit, aviki est un élargissement<br />
de âvih désignant la femelle, et le balto-slave paraît avoir connu<br />
cette valeur non diminutive du suffixe, d'après l'opposition de si.<br />
ovïca et ovïnû « bélier », lit. avis et âvinas.<br />
Pour mysïca « bras », c'est originellement un diminutif de mysï<br />
« souris » comme lat. mûsculus « muscle » de mus (en français<br />
« souris » muscle du gigot), et le sanskrit a musikâ élargissement de<br />
mûh. La valeur diminutive s'est estompée en slave, et le diminutif<br />
de mysï est refait en r. myska, s.-cr. mlsica.<br />
L'accent est oxyton dans le sanskrit -ikâ, paroxyton dans le<br />
lituanien -ikè. En russe, l'accent des diminutifs est en -câ, et le<br />
serbo-croate atteste de même normalement d'anciens oxytons,<br />
djèca, rijècca. En slovène, l'accent des diminutifs est ordinairement<br />
du type rêcca, et en tchèque les noms d'agents présentent l'allongement<br />
de la syllabe présuffixale : tvûrce, dârce, à quoi répond le<br />
polonais ïwôrca et le kachoube sçdca «juge» (== sq-), rmdca<br />
«conseiller» (= râ-) : cet allongement est celui d'une syllabe<br />
devenue fermée du fait de la chute d'un jer (§ 106).
344 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
SUFFIXE -ica<br />
§ 878. — Ce suffixe est des plus productifs, avec des valeurs<br />
différentes qu'il faut distinguer autant qu'il est possible.<br />
Diminutifs. — Répondant à masc. -ïcï sur des féminins en -a,<br />
et parallèlement à -ïca sur des féminins en -ï. En vieux slave :<br />
besëdica « petit mot » (Athan.), de besëda ;<br />
dustica « planchette », de dûska ;<br />
krabiica (Hés. CIY, 26), de krabii « corbeille » (§ 155) ;<br />
krupica « miette », de krupa ;<br />
kunjizicç, plur., « lettre », de kunjigy ;<br />
ladiica « petit bateau », de ladii ;<br />
çdica, de çda « hameçon » (Ham.) ;<br />
paniëica, de panica «bassin, citerne» (§ 881) ;<br />
rybica « petit poisson », de ryba ;<br />
skrinica « coffret, cassette », de skrinja « coffre, arche » ; — et<br />
vaT. racica (Ostr.), de raka (§ 205).<br />
Et diminutifs de mots attestés dans les autres langues slaves :<br />
kasica « bouillie », du slavon russe kasa, r. kàs a « gruau » ;<br />
lëstvica « échelle », de *lëstva dans slov. lêslva, s.-cr. plur. Ijëstve ;<br />
man(ï)liica «manteau», du slavon man(ï)tija.<br />
Un nom de rivière : Strumica (Ass. 152 a 29) « la Strumica, la petite<br />
Struma ».<br />
Appellent des observations :<br />
musica « moucheron, moustique », en regard de muxa « mouche »<br />
(§ 175), avec une alternance vocalique exceptionnelle (§ 177) ;<br />
sracica « vêtement de dessous » (r. sorôcka « chemise » et slov.<br />
srâjca de srâëica, srâkica), du slavon sraka « un vêtement »,<br />
emprunt au bas-latin *sarica pour sérica « de soie » (fr. « serge »<br />
de « sarge ») ;<br />
krinica « cruche » et r. krinica « source », en regard du slavon<br />
krina « boisseau » ( § 1076) ;<br />
pùlica « oiseau », s'appliquant à des oiseaux petits ou grands,<br />
des moineaux dans l'Évangile, mais des aigles dans Supr. 233 22,<br />
à côté de pol. et tch. ptâk (§ 861), r. ptâxa (§ 1140), a perdu la<br />
valeur de diminutif de pûta qui n'est conservé que chez Hamartole<br />
(63fl, u, 14028, 17918, 36420) ; le thème pût-, qui se retrouve en<br />
baltique dans le lette putns « oiseau », désigne un petit d'animal<br />
dans v. si. pûtistï (§ 867).<br />
rçëica (Cyr. Jér.), de rçka, mais au sens de « vrille (de la vigne) »,<br />
et voir r. rûcka « anse », § 885 ;
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 345<br />
tricç (Gr. Naz.), plur., «son», s.-cr. trïce «son» et «vétilles»,<br />
est *tïrica diminutif de *tira, s.-cr. tara « scorie » et târ « menue<br />
paille» (§ 728), en slovène terica, trica « broyeuse de lin», nom<br />
d'agent féminin (§ 879).<br />
Pour ponjavica « linge », voir § 880.<br />
On a -ica diminutif par substitution de suffixe dans v. si. crukuvica,<br />
de crukuv- «église», pour le slavon crukûvïca (§874), et dans<br />
le slavon russe utica pour *çtuka de *çt- « cane » (§ 885).<br />
§ 879. Formation de féminins. — Noms de personnes :<br />
cësarica « impératrice », de cësarjï ;<br />
prorocica « prophétesse » de prorokû ;<br />
vladycica « maîtresse » de vladyka ;<br />
vratarica de vratarjï « portier » ;<br />
slavon m(u)nisica « moniale » (et mnixynji, § 919), de m(ù)nixû.<br />
« moine », emprunt à v. h. a. munih du bas-latin monicus pour<br />
monachus.<br />
De otroku «enfant», le féminin est otrokovica (§ 880).<br />
Noms d'animaux :<br />
golçbica (Athan.) de golçbï « pigeon » ;<br />
komonica (Ham.) de komonï « cheval » ;<br />
lisica (Ostr.) de lisu « renard » ;<br />
pardusica (Ham. 4912â) de pardusû « panthère » ;<br />
*xurtica de *xûrtu « lévrier », dans Ham. 5422 ideze sç psi slenelï<br />
u xorticë « où la femelle du lévrier met bas ses chiens », interprétation<br />
fantaisiste de sv TOLÇ ÛTÎO xôvcc xaûjxacri « dans les ardeurs de la<br />
canicule ».<br />
Et en slavon lïvica, orïlica de lïvû « lion », orïlu « aigle ».<br />
En regard de noms d'agents en -ici :<br />
Ijubodëica « femme débauchée » de Ijubodëi et Ijubodëici ;<br />
pëvica (Ham.) de pëvlcl « chanteur » ;<br />
Bogorodica « Mère de Dieu » sans possibilité d'un masculin<br />
correspondant, mais le slavon bogonosica est en regard de<br />
bogonoslcl ;<br />
kruvotocica « l'hémorrhoïsse » ;<br />
cudotvorica (var. -tvorïcica Ham. 53ï18) de cudotvorïcï « thaumaturge<br />
» ; y<br />
chez Cosmas cçdoljubica et mçzeljubica de -Ijublcl, domodruzica<br />
de -drûzlcï; en slavon cçtoimica «qui prend de l'argent», de -imlcï;<br />
et cf. slov. tfejrica « broyeuse », § 878.
346 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
En regard de noms d'agents en -niku :<br />
mçcenica de mçëenikû « martyr » ;<br />
ucenica de uëeniku « disciple » ;<br />
pustenica « femme répudiée » sans masculin correspondant ;<br />
dvïrïnica de dvïrïniku « portier » ;<br />
blçdïnica de blodïniku, grësinica, ispovëdïnica, obïstïnica (Virg.),<br />
plënïnica, postïnica, (dobro)pomostïnica, tvmpanïnica (Ps. LXVII,<br />
26), zaslçpïnica (Gosmas) ;<br />
rodiieljïnica, sluziteljïnica, rïvïniieljïnica (Ham.).<br />
En regard d'adjectifs substantivés en -ici :<br />
slarica de starïcï « vieillard » ;<br />
ërunica « nonne » de ërunïcl « moine » ;<br />
junica « génisse » de junïcï « (jeune) taureau » ; — et telica,<br />
r. telica, tëlka « génisse » de lelïcî « veau », mais traduisant « agnelle<br />
Supr. 35928, 360 6,13 : le thème si. tel-, qui n'a de correspondant qu'en<br />
baltique, lit. dial. tëlias, a pu désigner le petit de divers animaux,<br />
comme lat. uitulus « veau » et got. wiprus « agneau ».<br />
§~ 880. Substantivation d'adjectifs. — Gomme masc. -ïcï et<br />
comme dans le type slarica :<br />
crunica « mûre », et « nonne » comme féminin de crûnïcï ;<br />
desnica « main droite », et suica « main gauche », slavon lëvica ;<br />
dëvica «jeune fille, vierge », de dëva(ja) subst. et adj. (§ 273) ;<br />
vïdovica « veuve » (et masc. *vïdovïcï, r. vdovéc, s.-cr. udàvac) ;<br />
zlatica « pièce d'or ».<br />
Sur des formes à suffixe :<br />
-ov- : ôtrokovica, féminin de otroku «enfant» (§ 726), qui doit<br />
avoir désigné ce qui appartient à l'« enfant », sa femme ou sa fille,<br />
en indiquant que cet « enfant » était un homme et non un jeune<br />
enfant ;<br />
nezitovica (Ham.) « maladie infectieuse », et tch. nestovice, v.<br />
pol. niesztowica « éruption pustuleuse », sur tch. nezit « abcès »,<br />
pol. niezyt, r. ancien nézid ;<br />
soëevicaa lentille »(Ham.), r. socevica (ceëevica), etc., en regard de<br />
socivo «purée de légumes» (§ 1188), paraît supposer un mot de<br />
base *socï à côté de soku « suc, jus » : formation proprement slave<br />
concurrencée par l'emprunt au latin v. si. Içsta (Upir') ;<br />
laslovica « hirondelle » (J. Ex., Gr. Naz.), à côté de lastuna<br />
(J. Ex.) « martinet » (§ 1105), est inexpliqué.<br />
-in- : gostinica «hôtellerie» sur goslinu «de l'hôte» (§ 294)7"<br />
-ïsk- : konïstica (Ham.) « hippodrome ».<br />
-al- : mçzatica « femme mariée » (Gosmas) ;
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 347<br />
slavon glavalica « coupole ? », s.-cr. glùvatica « laitue pommée », etc.,<br />
sur glavatû « à grosse tête ».<br />
~av~ (§ 993) : kruvavica (Ham.) « artère », slov. krvavica « hémorragie<br />
» et « boudin », sur krûvavu « sanglant » ;<br />
pijavica « sangsue » (Gr. Naz.) ;<br />
trçsavica «fièvre» (§ 1187) ;<br />
ponjavica « pièce de toile, linge » est en regard de ponjava<br />
(§ 1187), mais ne doit pas en être le diminutif. Et en slavon :<br />
kyxavica « éternuement », pol. kichawka, s.-cr. kihavica « rhume<br />
de cerveau », de kuxnçti, imperf. kyxati ;<br />
plçsavica « danseuse » ;<br />
praskavica « éclatement », s.-cr. pràskavica « pétard » ;<br />
rgkavica «gant» en regard de rçkavu «manche» (§ 1187), et<br />
parallèlement nogavica «jambière», s.-cr. nàgavica «jambe de<br />
pantalon » ;<br />
vonjavica « aromate », va r. vonjalica. Et dans les langues slaves :<br />
s.-cr. bràdavica «verrue (poilue) », r. boroddvka (§ 886), etc., sur<br />
v. si. brada « barbe » ;<br />
s.-cr. zèravica « braise », slov. zerjâvica, sur le slavon zeraviï<br />
(§ 993).<br />
-nu (§ 1070) : kolesnica «char»; —• plenica «tresse» (§ 39),<br />
refait après le vieux slave en pletenica.<br />
-ïn-, voir ci-dessous, § 882.<br />
-en- : bagurënica « (étoffe) pourpre » ;<br />
(g)çsënica «chenille» (§ 77);<br />
plaslanica « tissu de lin », en regard de plaslï « casaque »<br />
(§ 1020);<br />
siïklënica, var. stïklïnica, « (coupe de) verre » ;<br />
zlatënica (Upir') « jaunisse » ;<br />
zlulënica (Izb. Svjat.) « safran » ;<br />
slavon vlasënica « sac de poil, cilice ».<br />
Sur le participe passé passif :<br />
pïsenica « froment », sur *pisenu (§ 409) ;<br />
ruvenica « fosse » (Upir') à côté de rûveniku « puits » (§ 842) ;<br />
et slavon plelenica « tresse » par réfection de v. si. plenica.<br />
Sur le participe présent passif : slavon nebrëgomica « la négligée,<br />
qui n'est pas aimée ».<br />
Sur le participe parfait^en -l- (cf. -lïcï, § 834) :<br />
doilica « nourrice » ;<br />
vonjalica « aromate », variante de vonjavica ;<br />
vijalica « tempête (de neige) », r. v'jdlica (vi-, ve-), bulg. viélica,<br />
s.-cr. vljavica, sur le thème vi- de vije-, viti « tordre », itératif r.
348 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
v'jde-, v'jat' «se tordre, flotter», s.-cr. vijati (se), comme vijalï<br />
(Pand. Ant., § 1057) et r. v'jûga ( § 1013), et voir vixurû « tourbillon »,<br />
§ 1127.<br />
§ 881. Divers. — On a en outre des dérivés en -ica en regard de<br />
substantifs :<br />
granica « frontière » sur granï (§ 1084) ;<br />
grulica « tourterelle » sur griïlo « gorge », qui est le féminin d'un<br />
dérivé suffixal de grulo d'après pol. gardlica, femelle du « pigeon<br />
à jabot », gardlacz ;<br />
slavon prçslica «quenouille» sur prqslo, et tch. tr(d)lice, pol.<br />
tarlica sur tch. trdlo « pilon » (§ 943).<br />
Des dérivés de composés, d'adverbes et locutions :<br />
çsobica « sédition », proprement « (lutte) intestine », sur l'adverbe<br />
çsobï (§ 1200) ;<br />
beslinica « désordre », de bez cina ;<br />
Pqtogradica « Pentapole » (Ham. 4229).<br />
Des dérivés de numératifs :<br />
troica « triade, Trinité », duvoica « les deux » et adv. dùvoicejg<br />
(Pand. Ant.) « deux fois », adv. vuloricejç « pour la deuxième fois » ;<br />
sedmica et sedmorica « groupe de sept, semaine » (J. Ex.), sutorica<br />
« centaine » (Ham.) et adv. sûloricejç, celvoricejç, sedmïkraticejç,<br />
sedmogubicejç, etc. (§331). S'y joignent :<br />
malica «petit nombre» (Ham. 42124), et adv. mûnoUcejç<br />
« souvent ».<br />
Pour matica et zica, voir § 1040. Sont masculins, comme les<br />
masculins en -ïca (§ 876) :<br />
pijanica «ivrogne», de pijanu «ivre» (§ 514) ; slavon naçsica,<br />
de l'adjectif naçsû « qui commence à avoir de la barbe » (§ 1219),<br />
et strasivica « poltron », de sIrasivù,<br />
Du juxtaposé onûsi «tel et tel» (§ 1229) se tire le dérivé masc.<br />
onûsica (Supr.).<br />
Naturellement, certains mots en -ica posent des problèmes. On<br />
signalera :<br />
palica « bâton », qui peut être rattaché au masculin palîcï<br />
«gros doigt» (§ 835), sur un thème pal- d'intonation rude (s.-cr,<br />
pàlac et pàlica) qu'on trouve sans suffixe dans le composé r.<br />
bezpâlyj «sans doigt» (§ 1227), mais non identifié : un rapprochement<br />
avec lat. pollex « pouce » est hypothétique ;<br />
panica « bassin, citerne » est à côté de *pany et sur un emprunt
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 349<br />
au bas latin panna, mais sa variante opanica en slavon est à<br />
expliquer (§ 204) ;<br />
polica « planche » est lié à r. pol « plancher », mais sans doute<br />
comme dérivé de l'adjectif *polu (§ 735) ;<br />
zënica « prunelle » est rattaché au thème verbal de zëje-, zïjali<br />
« être béant », et en effet la forme primitive balto-slave du thème<br />
si. zïja- était *zjâ- (§ 525), le développement du degré réduit est<br />
nouveau comme dans le cas de *kilâ- pour klâ- (§ 72), et -ë- était<br />
la forme régulière de ja après consonne (§ 78) ; l'intonation rude<br />
de s.-cr. zjënica est celle de l'ancien *èjâ-, et elle se retrouve dans<br />
le perfectif zinçii (§ 490). Ainsi zënica apparaît comme un dérivé<br />
de l'adjectif verbal et participe médio-passif *zënu antérieur à<br />
zïjan- du substantif verbal zijanije.<br />
§ 882. Suffixe -ïnica. — Avec l'énorme extension du suffixe<br />
-ïnu d'adjectif, celle du dérivé -ïnica ne peut qu'être considérable.<br />
On a vu le type -ïnica féminin de -ïniku (§ 879), et on a de même,<br />
en se limitant aux très nombreux exemples vieux-slaves :<br />
dïnïnica « étoile du matin », de dïnïnu « de jour », et prëxodïnica<br />
(J. Ex.) « étoile du soir » ; — obnoslïnica « garde de nuit » ; — utrïnica<br />
« matines » ; — vrubïnica « les Rameaux » ;<br />
pçtïnica (Ham.) «vendredi»; — pçtïdesçtïnica «Pentecôte»;<br />
— pçtïlakùtïnica (-lokotnica, Ham. 13922) « (plaque) de cinq<br />
coudées » ;<br />
maslïnica (Athan.) et maslinïnica (Ham.) « olivier » ; — smokuvïnica<br />
« figuier » ;<br />
cëvïnica «flûte»; — jarïmïnica (Ham.) «bête de somme»;<br />
— kosïnica « corbeille », élargissement de kosï ; — mëdïnica<br />
«monnaie de cuivre»; — munogokandilïnica (Ham.) «lampadaire<br />
à plusieurs lampes » ; —- naplestïnica (Ham.) « éphod » ; — nozïnica<br />
« fourreau » ; — pojasïnica (Ham.) « ceinture » ; — prëgçdïnica<br />
« psaltérion » ; — stïklïnica « (coupe de) verre », variante de<br />
stïklënica; — susçdïnica «(petit) vase» (Ham.); — dvmijanïnica<br />
« encensoir » ; — usçcalïnica (Upir') « mouchette » (§ 494) ; — vuzglavïnica<br />
« oreiller ».<br />
Un dérivé comme pestïnica « fourneau » peut être conçu comme<br />
élargissement de pestï « four » ou comme indiquant l'endroit où<br />
se trouve le four. C'est ici la grande productivité du suffixe -ïnica,<br />
pour désigner le lieu où se trouve ou se fait quelque chose :<br />
dëlïnica « atelier » et dëlateljïnica (Gr. Naz.) ; — gorïnica « étage<br />
supérieur, chambre du ha'ut » ; — gostinïnica « hôtellerie », variante<br />
de gostinica (§ 880) ; — kapistïnica et kumirïnica « temple à idole » ;<br />
— lozïnica (Pand. Ant.) et ërutozïnica (Gr. Naz.) « chambre à
350 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
coucher » ; — mytïnica et mïzdïnica « bureau de publicain » ;<br />
-— plëvïnica « grenier à paille » ; — rizïnica « vestiaire » ; — sënïnica<br />
« fenil » ; — sûvëtïnica (Gr. Naz.) « salle du conseil » ; —• stuzdekrûmïnica<br />
« hôtellerie » ; — tïmïnica « prison » ; — umyvalïnica « bassin<br />
pour laver » ; — xraniteljïnica« cellier »(Ps. CXLIII, 13) ; —zitïnica<br />
« grenier à céréales ». — Et jatuxulïnica dans le Suprasliensis, dont<br />
on vient tout récemment de trouver l'explication : « cuisine d'une<br />
hôtellerie (de monastère) », sur un emprunt au protobulgare.<br />
Et chez Hamartole toute une série de dérivés, krïstiteljïnica<br />
« baptistère », pitateljïnica « asile », uciteljïnica « école », etc.<br />
§ 883. Dans les langues slaves. —• La productivité se maintient<br />
partout, mais non dans tous les types.<br />
Le russe a des féminins : carica « impératrice, tsarine », masterica<br />
« maîtresse ouvrière » de mâster « maître, patron », fel'dserica de<br />
fél'dser « chirurgien militaire » ; — ëlica « lectrice » sur ëtec, pevîca<br />
« chanteuse » sur pevéc, krasâvica « belle femme » et masc. krasâvec,<br />
kormilica « nourrice » et masc. kormilec « père nourricier » ; type<br />
surtout productif avec divers suffixes : rabôlnica de rabôtnik<br />
« ouvrier », basmdënica de basmâcnik « cordonnier », pisdtel'nica<br />
sur pisàtel' « écrivain », vospitâtel'nica « éducatrice » sur vospitâiel',<br />
bdnscica sur bânscik « garçon de bain », beUl'scica « blanchisseuse »<br />
et masc. belîl'sëik, bufétcica de bufétëik « sommelier » ;<br />
et dans les noms d'animaux : bûjvolica de bujvol « buffle », orlîca<br />
de orël « aigle », verbljûdica « chamelle » ;<br />
des dérivés d'adjectifs et de locutions prépositionnelles : nebylica<br />
« fiction », nelépica « absurdité », bezgolôsica « aphonie » de bezgolôsyj,<br />
bezrabôtica « morte-saison » ; en particulier des dérivés en -nica :<br />
bôl'nica « hôpital », ëdjnica « boîte à thé », péreënica « poivrier »,<br />
pépel'nica « cendrier ».<br />
Mais la productivité a complètement cessé dans le type des<br />
diminutifs ; les formes en -ica comme zemlica « petite terre »,<br />
krupica « petit morceau, miette », sestrica « petite sœur », ne sont<br />
plus que traditionnelles et sont devenues assez rares, le type<br />
productif étant en -ka (§ 886).<br />
Le polonais a des féminins : Iwica « lionne », oslica « ânesse » ;<br />
pomocnica « assistante », mais -nica est concurrencé par -niczka<br />
plus usuel : dluznica « débitrice » et dluzniczka, przeciwnica « une<br />
adversaire » et przcciwniczka ;<br />
des dérivés d'adjectifs : lewica, prawica ; biyskawica « éclair »,<br />
mais -awka à côté de -awica : pijawica « sangsue », zegawica « ortie »<br />
et pijawka, zegawka ; naboznica « une dévote », zimnica « fièvre »,<br />
et biolnica « terre marécageuse », bôznica « temple non chrétien,
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 351<br />
synagogue, etc. », ancien modlitewnica « oratoire » ; gwintownica<br />
« machine à fileter », szatkownica « coupe-légumes » ;<br />
des diminutifs, mais le type productif est en -ka, et przepierzyca<br />
« caille » est remplacé par przepiôrka, wçdzica « hameçon » par<br />
wçdka.<br />
Le tchèque a Ivice, hrebice « pouliche » sur hrebec « étalon »,<br />
d'âblice « diablesse » sur d'âbel, dëlnice « ouvrière » sur dëlnik ;<br />
veprovice « peau de porc » de vepr « porc », koslnice « ossuaire »,<br />
stëpnice « verger » de stëp « greffe, (pommier) greffé », vesnice<br />
« village » ; mais -ice diminutif ne se maintient que dans des mots<br />
qui n'ont plus valeur de diminutifs, comme krupice « semoule »,<br />
et v. tch. hlavicë, conservé dans hlavice « chapiteau », est remplacé<br />
par hlavicka « petite,tête » à côté de hlâvka « tête de chou », nozicë<br />
par nozicka « petit pied » et nozka « pied de tabouret », etc.<br />
Le slovène a des féminins, druzica « compagne », mlêkarica<br />
« laitière », uëlteljica « institutrice », pomocnica « assistante » ; des<br />
dérivés d'adjectifs, golica « ce qui est nu », jdlovica « (vache) stérile »,<br />
kihavica « rhume de cerveau », repatîca « comète » sur rèp « queue »,<br />
ovsenica « paille d'avoine », mlînscica « chenal de moulin », et le<br />
type knjîznica « bibliothèque », knjigârnica « librairie » (et knjigârna,<br />
§ 1082), smeîîsënica « poubelle » ; — et en outre le type des diminutifs<br />
toujours productif : hisica de hisa « maison », kolibica de koliba<br />
« cabane », fizolica « haricot nain » de flzçl (masc., mais ail. Fisole,<br />
fém.).<br />
Le serbo-croate a les féminins : vùcica « louve » et kurjàcica de<br />
kur'jâk « loup » ; prôfesorica, mnogoznalica « érudite », cïnôvnica<br />
« employée », kapetànica « femme de capitaine » et kapetânouica,<br />
pùkôvnikovica « femme de colonel, pùkôvnlk », et le type populaire<br />
Lâzdrovica « femme de Lazare » ; — les dérivés d'adjectifs : bïstrica<br />
« eau limpide », kïselica « (vin) aigrelet » ; et de locutions : bèsposlica<br />
« chômage », nïzbrdica « déclivité » ; — les indications de lieux :<br />
mèsârnica « boucherie », et surtout -onica : ràdionica « atelier »<br />
en regard de ràdilac « ouvrier », citaonica « salle de lecture »,<br />
stèdionica « caisse d'épargne » ; — et les diminutifs : glàvica, dùsica<br />
de dûsa « âme », kàsuljica de kàsulja « chemise ».<br />
Il en est de même en bulgare : magarica « ânesse », de magâre<br />
« âne », slepica de slepéc « aveugle », bégovica « femme de bey,<br />
beg » et type Slâvkovica « femme de Slavko » ; podvôdnica « sousmarin<br />
» de podvéden « qui est sous l'eau » ; knizârnica « librairie »,<br />
krâcmârnica « cabaret » sur krâcmâr « cabaretier » et pour le plus<br />
ancien krâcma ; — et les/diminutifs : zvezdica de zvezdâ « étoile » ;<br />
râëîca « menotte » et aussi râcicka, à côté de râcka « main, poignée,<br />
anse » ; et de bûla « femme (turque) », bûlka « jeune femme » et<br />
dim. bûlcica.
352 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
§ 884. Origine. — Le slave a des dérivés en -uka, en -ïca et en<br />
-ica, le baltique n'a que des dérivés en -ukê et -ikè. La forme -ica<br />
est une création du slave : c'est un élargissement en *-kâ du type<br />
féminin en *-f (§ 155), qui s'est étendu à la place de *-i-kâ, -ïca,<br />
dans les dérivés de féminins en *-à. Le suffixe *-ikâ fournissait des<br />
diminutifs, et aussi des noms de femelles ; il est conservé avec<br />
cette valeur dans ovïca « brebis » (§ 877), et il se continue dans -ica<br />
formation de féminins.<br />
L'accent est ordinairement du type r. carica, s.-cr. càrica, fixe<br />
sur *-ï d'intonation rude ; sauf dans les radicaux d'intonation rude<br />
comme r. rybica de ryba, s.-cr. rïbica de rïba, et en dehors du<br />
cas fréquent où l'accent du dérivé en -ica conserve celui du thème<br />
de base.<br />
SUFFIXE -uka<br />
§ 885. En vieux slave. — De ce suffixe qui, sous la forme -ka,<br />
va connaître une grande productivité dans les langues slaves, les<br />
exemples sont très rares en rédaction vieux-slave : seulement trois<br />
mots dans le Suprasliensis, klëtuka «cellule», kotuka «ancre»,<br />
ietuka « tante ». La forme klëtuka du diminutif de klëtï est secondaire<br />
pour klëlïca conservé en slavon (§ 874). Mais kotuka est le diminutif<br />
de *koty « chatte » et « ancre » (§ 203), sur la base, dans la flexion<br />
des féminins en -y, d'un thème en -û- antérieur à -uv- (§ 200).<br />
En rédaction slavonne et dans les slavons, plusieurs exemples<br />
confirment ce lien avec le type féminin en -y. Si pastorûka (et<br />
pastoruky, § 203) n'est que le féminin en -a de pastorukû « fils d'un<br />
premier lit» (§ 839), on trouve latùka de *laly«. marmite », buëïka<br />
de buëïv- « cuve » (§ 204), neljubuky (plur.) « hostilité » en regard de<br />
neljuby ; *çtuka de *çty «cane» à côté de *çlica (§ 878), r. mod.<br />
ûtka et ûtica ; et nevëstuka « bru », r. nevéstka, v. pol. niewiastka<br />
sur nevësty attesté dans un seul exemple tardif, mais explicable<br />
comme réfection, d'après svekry « belle-mère », sur nevësta pour<br />
remédier à la confusion des deux sens « jeune mariée » et « bru »<br />
de ce mot. Le vieux-slave Ietuka « tante » apparaît analogique<br />
de ces diminutifs en -uka en regard des noms de parenté en -y.<br />
En face du masculin slavon pamçtûkû (§ 839), le féminin<br />
pamçiuka, dont on trouve un exemple vieux-slave dans plur.<br />
pamçtuky « mémoires » (Athan.), est pour *-tïca conservé en russe<br />
(§ 875). Mais plur. nacçtuky (Athan., II, § 45, § 49) qui traduit<br />
àpyai « Principautés » (dans la hiérarchie des anges) atteste<br />
l'existence d'une forme féminine du suffixe -uku fournissant des<br />
dérivés de thèmes verbaux (§ 838) ; et l'on a galuka « divination »<br />
en slavon (xn e s.) sur gatati « deviner » (§ 781).<br />
De r. et tch. lytka « jambe, mollet », slov. lîtka, à côté du slavon
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 353<br />
lystu (§ 1161), le thème est lyd- d'après pol. iyda, mais inexpliqué.<br />
Le vieux-slave poslïka « petit caillou » (Gr. Naz., en rédaction<br />
slavonne), v. r. poëïka « (poids d'un) grain » et mod. pôcka « bourgeon,<br />
bouton », pol. et tch. pecka « noyau », slov. peckà « pépin »,<br />
se ramène à *pûtjïka, pour *putjïca, diminutif d'un mot *pùtjï,<br />
ou *puktï, comme r. nôëka, s.-cr. nôcca, de *noktï « nuit ». On peut<br />
supposer un dérivé en -ti- de la racine expressive *puk- « éclater »,<br />
avec infixe nasal si. pçk-, pol. pqk « bouton » (§ 767).<br />
Le mot *rçëïka (Gosmas ruckà) « vase à anse », r. rùcka « menotte,<br />
anse », pol. rqczka, ne doit être que pour une part la forme nouvelle<br />
de v. si. rçcica (§ 878), s.-cr. rùcica et rùcka, et il peut aussi s'agir<br />
d'une forme abrégée de composé en rçko- ou de locution à premier<br />
terme rçëïnu. Car c'est sûrement une forme abrégée qu'on a dans<br />
meëïka « ourse » en slavon (xn e s.), r. méëka, s.-cr. méëka, féminin<br />
de medvëdï « ours » : elle paraît supposer, avec superposition de<br />
-ïka à -k- comme dans les diminutifs en -(ï)ka des langues slaves,<br />
r. stréloëka « fléchette » de streld et strélka, un hypocoristique de<br />
medvëdica, d'un type *med-ka analogue à celui de s.-cr. Slânka<br />
de Stànis(l)ava.<br />
On est incomplètement renseigné, pour l'époque du vieux<br />
slave, sur l'extension du suffixe -uka, mais on reconnaît son point<br />
de départ, élargissement en -ka de thème en. -u-, et celui de ses<br />
développements ultérieurs, substitution à -ïca et -ica, v. si. klëtuka<br />
pour klëtïca, v. r. nituka, r. mod. nitka de nitï « fil » pour *nitïca<br />
conservé en serbo-croate ancien dans le pluriel dial. nici et sa<br />
réfection en masc. nitac.<br />
§ 886. Dans les langues slaves. — Le fait dominant est cette<br />
substitution de -ka à -ïca et -ica, du type r. lâvka « banc » à v. r.<br />
lavica. On peut en reconnaître deux causes successives : d'abord<br />
la restauration du thème des dérivés en -ïca qui s'altérait avec la<br />
chute du jer, *nitïca en s.-cr. nica ; puis l'alignement sur le suffixe<br />
masc. -ici du suffixe féminin -ica, en -ïca qui donnait -(u)ka.<br />
En russe, on a -ka, et avec grande productivité, dans la formation<br />
des féminins : akusérka « sage-femme » sur akusër « accoucheur »,<br />
gorozânka « citadine » sur gorozânin, inostrdnka « étrangère » sur<br />
inosirânec, torgôvkaa marchande » sur torgôvec ;<br />
des diminutifs : nôïka « petit pied », zemêl'ka de zemljâ « terre »,<br />
sneéinka de snezina « flocon de neige », sestriëka « sœurette » sur<br />
sestrica de sestrâ ; et types divers en -en'ka : dorôêka et dorôzen'ka<br />
de dorôga « chemin » ; en -ënka (dépréciatif) : losâdka, losâdoëka<br />
« petit cheval » et losadënka « rosse » ; en -uska : golôvka et golôvuska<br />
de golovâ, et masc. et fém. : boltuska « le bavard, la bavarde » en<br />
regard de boltûn ; etc. ;
354 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
des adjectifs substantivés : visnëvka « liqueur de cerise » sur<br />
visnëvyj, vodjânka « hydropisie » de vodjanâja bolézn', belorûcka<br />
(masc. et fém.) « aux mains blanches, qui évite le travail » sur<br />
belorûkij, pjatidnévka « la semaine de cinq jours » sur pjatidnévnyj ;<br />
et sur participe vjazànka « botte » sur vjâzanyj « lié », véjalka<br />
« van », molotilka « batteuse » ;<br />
des abstraits tirés de verbes : vârka « coction » de varit' « faire<br />
bouillir », vôzka « charriage » de vozW, zakûska « hors-d'œuvre »<br />
de zakusit' « commencer à manger », brakôvka « triage » de brakovât',<br />
grimirôvka « maquillage » de grimirovât' ; dërka « verges » sur derë-,<br />
dral' « écorcher, fustiger », et drâka « rixe » sur drât'sja « se battre ».<br />
En polonais, on a de même les féminins : aklorka « actrice »,<br />
przyjaczôika « amie », cudzoziemka « étrangère » sur cudzoziemiec ;<br />
les diminutifs : rqczka « menotte » et « manche », nôzka « petit<br />
pied », glôwka ; les adjectifs substantivés : puslka « solitude »,<br />
czerwonka « rubrique », oiowianka « fil à plomb », czarnoglôwka<br />
« mésange » de czarnoghwy ; les dérivés de thèmes verbaux :<br />
przydawka « complément », et przykladka, nasiadka « poule couveuse<br />
», opaska « ceinture ».<br />
En tchèque, les féminins : pekarka « boulangère », sousedka<br />
« voisine », ucitelka « institutrice » ; les diminutifs : ruëka, hlâvka<br />
«tête de chou» et hlaoiëka «petite tête» (§ 883), kostka «dé»,<br />
kùstka et kostiëka « osselet », chvilka et chvileëka de chvile « moment » ;<br />
les dérivés de verbes : slâvka «grève» de staviii (se) «s'arrêter»,<br />
nabîdka « offre » de nabîzeti « offrir », povîdka « conte » de povidati<br />
« raconter », agitka « tract de propagande » de agitovati, et masc.<br />
mluvka « parleur » de mluviti, vozka « charretier ».<br />
§ 887. — En slovène, les féminins : ëuvâjka « gardienne » de<br />
ëuvâj « gardien », et ëuvârka, à côté de ëuvarica, de ëuvâr, cigânka<br />
de cigàn « tsigane » ; des diminutifs, mais à côté de -ica : rçëka et<br />
roëica, zénka « petite femme » ; des adjectifs substantivés : stvka<br />
« bête, chose grise », edinka « le un » et « fille unique », dvçjka « le<br />
deux », pokrivâlka « couvercle » ; des dérivés de thèmes verbaux :<br />
dçjka « nourrice », splçlka « intrigue », zbîrka « recueil », resétka<br />
« grillage », sur reselâti « tamiser ».<br />
En serbo-croate, des féminins : prôfesôrka, ùcitëljka, pèkârka,<br />
et type Bàsânka (masc. Bosânac) « Bosniaque », Beàgradqnka<br />
« Belgradoise » (masc. Beàgradanin) ; des adjectifs substantivés :<br />
bïjelka « bête blanche », jàlôvka (et jàlovicà) « femelle stérile »,<br />
mirisâvka « raisin muscat », crnôglâvka « (oiseau) à tête noire,<br />
mésange charbonnière », dvôjka « jumelle », dèsëtka (et desètica)<br />
« billet de dix (dinars) » ; des dérivés de verbes : kvôcka « poule<br />
couveuse » de kvôcati « caqueter », blljeska « note » de biljeziti
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 355<br />
« noter », plëtka « intrigue », pdgr(j)eska « faute », pôpifevka « eantilène<br />
», misàlôvka « souricière ».<br />
Mais les diminutifs sont en -ica, et -ka est rare : kcérka pour<br />
l'ancien kcérca n'est plus un diminutif, mais un élargissement de<br />
kci « fille », comme mâjka « mère » est la forme courante pour<br />
màti (§ 199) ; kokôska n'est de même qu'un élargissement de kôkôs<br />
« poule », et pëcka de pêc « four ». La valeur la plus nette de -ka<br />
est celle de singulatif (§ 212) : bîljka « une plante» de bllje «les<br />
plantes », gràska « un grain de pois » de gràh « pois », slâmka « un<br />
brin de paille », trâvka « un brin d'herbe », les diminutifs étant<br />
slàmica « petite paille » et sldmcica « petit fétu », tràvica « herbette »<br />
et Irdvëica ; vôcka «arbre fruitier», de voce «fruit» (§ 1021).<br />
En bulgare, diminutifs : knizka « petit livre », ribka « petit poisson<br />
», gradinka «jardinet», kutijka «petit boîte» de kutija;<br />
féminins : kûcka « chienne », goveddrka « vachère », planinka<br />
« montagnarde » (masc'. planinec), Bâlgarka de Bâlgarin « Bulgare » ;<br />
dérivés de verbes : celùvka « baiser », pridobivka « acquisition » ;<br />
et noms d'instruments en -Ika, -cka : grebâlka « puisette », ieglilka<br />
« balance », et sejdëka « semoir », qui est comme le féminin de<br />
sejâët semeur ».<br />
§ 888. Origine. — Le suffixe -uka est la forme féminine de -uku<br />
et représente donc *-u-kâ. Le sanskrit a quelques élargissements<br />
en -ukâ- de -u- : dhénukâ- de dhenûh « vache », isukd- de isuh<br />
« flèche ». Le baltique a des féminins en lit. -ukè de -ukas, donnant<br />
des adjectifs substantivés, et des diminutifs en -(i)ukè : dukriùkè<br />
de dûkrà « fille », sirdziùkê de sir dis « cœur ».<br />
En slave, l'extension de -uka doit avoir accompagné celle du<br />
duffixe -y, -uv- (§ 202-204), puis elle s'est produite par substitution<br />
à -ïca et -ica.<br />
Cette extension étant nouvelle, l'accent en diffère de celui de<br />
-ïca (§ 877) : il n'y a pas d'oxytonaison, et -ka atone apparaît<br />
accolé au thème accentué, avec recul de l'accent sur le thème dans<br />
r. golôvka de golovd, et allongement de syllabe fermée (§ 106) dans<br />
pol. giôwka, tch. hldvka, kâstka, slov. rçcka.<br />
SUFFIXE -ina<br />
§ 889. De ce suffixe très productif, les valeurs sont diverses,<br />
et certaines difficiles à préciser. Il faut les distinguer autant que<br />
possible, et une distinction au moins est nette, par l'accentuation,<br />
entre des types paroxytons et un type oxyton d'abstraits tirés<br />
d'adjectifs.
356 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
I. Abstraits d'adjectifs.<br />
En vieux slave, on en trouve une liste abondante :<br />
bruzina (Gr. Naz.) « rapidité » sur bruzu « rapide », bulg. bârzinâ,<br />
s.-cr. brzina ;<br />
bystrina (Ham.) « courant rapide » sur bystru, r. bystrind, bulg.<br />
bistrind, s.-cr. bistrina « limpidité » ;<br />
ëistina « pureté », s.-cr. cistina ;<br />
gtçbina « profondeur », r. gtubind, bulg. gtâbind et dâtbinâ<br />
(dâtbocind), s.-cr. dubina (§ 289) ;<br />
golina « calvitie » (Hés., Ps. XLVII, titre), r. et bulg. gotind<br />
« lieu dénudé » ;<br />
istina « vérité », voir § 891 ;<br />
krivina « état de travers, à tort » (Virg.), r. krivind « courbure »,<br />
s.-cr. krivina ;<br />
prëmina (J. Ex.) « droiture, rectitude », r. prjamind ;<br />
sëdina « blancheur des cheveux », r. sedind, s.-cr. sjedina ;<br />
sirina « largeur » (Hés., Ps. CXVIII, 32), r. sirinà, s.-cr. sirina ;<br />
tësnina « étroitesse » (Éphrem) et « pression » (Hés., Ps. XXXV, 9)<br />
sur tësnu (§ 1070) ; pour bulg. tesnind et r. tesnina « défilé », voir<br />
§ 891.<br />
Usina « calme », r. Usina, s.-cr. Usina ;<br />
tlûstina « grosseur, épaisseur », s.-cr. tustina « obésité », et r.<br />
totscind refait sur le comparatif lois ce.<br />
Et en slavon et dans les langues slaves :<br />
cëlina, s.-cr. cjelina « intégrité », r. et bulg. celind « terre en<br />
friche » ;<br />
ëçstina « épaisseur », s.-cr. ëestina « densité » ;<br />
ërunina « noirceur », s.-cr. crnina ;<br />
ërustvina sur crûstvu « solide », s.-cr. ëvrstina « fermeté, solidité »<br />
(§ 1182), bulg. cevrastind ;<br />
dïljina et dtuzina « longueur », r. d(o)linâ et dial. dolzinâ, bulg.<br />
dâtzind, s.-cr. dljina (ditjina), duljina et duzina (§ 289) ;<br />
jasnina « clarté », r. jasnind ;<br />
tjutina « aigreur, fureur », bulg. tjutind, s.-cr. tjutina ;<br />
mëtina « ténuité », r. metind (« banc de sable », et metiznd, § 1108),<br />
sur r. mélkij « ténu » ;<br />
mokrina « humidité », r. mokrinâ, s.-cr. mokrina ;<br />
nizina « bassesse, lieu bas », r. nizind, s.-cr. nizina ;<br />
novina « nouveauté », r. novind (« novale »), s.-cr. novina ;<br />
osirina « finesse, tranchant », r. ostrind, s.-cr. ostrina (§ 29) ;<br />
çzina « étroitesse », r. uzind, s.-cr. uzina, et uêina « passage<br />
étroit » sur le comparatif Mï ;
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 357<br />
plstrina « bariolage », r. pestrinâ, bulg. pâslrinâ ;<br />
starina « ancienneté », r. et bulg. siarinâ, s.-cr. slarlna ;<br />
t^iina « pesanteur », bulg. tezinâ, s.-cr. tezïna ;<br />
tvrudina « dureté », bulg. tvârdinâ, s.-cr. tvrdïna ;<br />
vedrina « sérénité », bulg. vedrind, s.-cr. vedrina ;<br />
vëstina « habileté », bulg. vestind, s.-cr. vjestina ;<br />
vysina « hauteur », bulg. visinâ, s.-cr. visina, et r. vysinâ sur le<br />
comparatif ;<br />
xytrina « habileté », bulg. hitrinâ, s.-cr. hiîrina.<br />
§ 890. Sur thème dissyllabique, en vieux slave :<br />
gorçstina (J. Ex.) « chaleur brûlante », bulg. gorestinâ ;<br />
ravïnina « égalité » (ravïniny « équinoxe » Athan.), r. ravninâ,<br />
s.-cr. ravnina ;<br />
mtnjïsina (Athan., 'Théod.) « l'inférieur », r. men'sinâ « infériorité,<br />
minorité », et slavon mïnjina, s.-cr. manjina ;<br />
unjïsina « le meilleur », et izunsina (Supr.) « amélioration »,<br />
vuzunisina « utilité » (Théod.), sur le comparatif unjii ;<br />
vçstïsina « excellence » (Gyr. Jér.), s.-cr. vecina « majorité » ;<br />
starëisina « l'ancien, le chef », masculin, a l'accent du comparatif<br />
starëi dans r. et bulg. staréjsina, et un accent nouveau de paroxyton<br />
dans s.-cr. starjèsina, mais le russe populaire refait slarsinâ sur<br />
star si j (§ 291).<br />
Et en slavon :<br />
debelina « grosseur », bulg. debelind, s.-cr. debelina et debljina<br />
sur le comparatif dëbljï ;<br />
golëmina « énormité », bulg. goleminâ ;<br />
gorïcina « amertume », s.-cr. gorcina et grcïna (§ 290) ;<br />
lïgucina « légèreté », s.-cr. lakcina ;<br />
mracïnina « obscurité », et bulg. mraëinâ sur mrak ;<br />
munozina «multitude», s.-cr. mnozina («pluriel»), mais bulg.<br />
mnoztna de la série des dérivés en -ina de numératifs (§ 317) ;<br />
çtïlina sur çtïlu « percé », s.-cr. uilina « cavité » ;<br />
tïmïnina « obscurité », bulg. tâmnind, s.-cr. tamnina, et tmïna<br />
sur le substantif tmâ, r. dial. teminâ ;<br />
velicina « grandeur », r. et bulg. velicind, s.-cr. velicina ;<br />
vetùsina « vétusté », r. vetcind (« jambon », depuis le xvn e siècle,<br />
par opposition à svezinâ « viande fraîche ») ;<br />
vïrçtina « chaleur brûlante » sur le thème ancien vïrçt-, s.-cr.<br />
vrucina sur vrûc (§ 588).<br />
§ 891. Dans les langues slaves. — Ce type d'abstraits dérivés<br />
d'adjectifs a un large développement à côté des types en -ota et<br />
en -ostï : on trouve en vieux slave à la fois ëislina, cislota et cislostî.
358 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Sa caractéristique est l'oxytonaison, comme dans le type en<br />
-ota (§ 900) : r. et bulg. -inâ, s.-cr. -ina ; même dans le cas du<br />
thème d'intonation rude : r. bystrind, starinâ, vysind. L'accent est<br />
mobile en russe, du type nouveau de kolbasâ, plur. kolbâsy : glubind,<br />
veliëind, plur. glubiny, veliëiny — les pluriels d'abstraits étant<br />
d'ailleurs assez rares. Le serbo-croate a sa mobilité du type planina,<br />
acc. plàninu, plur. plànine, et dial. veliëina, acc. vëliëinu. En<br />
slovène, avec le recul de l'accent (§ 93), le type oxyton se confond<br />
avec le type paroxyton : brzina, ëistina. Le tchèque et le polonais<br />
ont -ina avec, en kachoube, une mobilité d'accent du même genre<br />
que dans les dérivés en -arz (§ 852), mais avec confusion des<br />
anciens oxytons et des anciens paroxytons.<br />
Le type reste plus ou moins productif dans les langues slaves,<br />
mais il est remplacé, en partie en russe et en tchèque, très largement<br />
en polonais, par un autre type, en -izna (§ 1108). Les longues listes<br />
des formes attestées en vieux slave et en slavon n'épuisent pas<br />
les effectifs des langues modernes, ainsi r. belinâ « blancheur »<br />
(usuellement beliznà), s.-cr. bjelina ; bulg. dobrinâ « bonté », s.-cr.<br />
dobrina ; bulg. edrinâ, s.-cr. jedrina « compacité, robustesse », sur<br />
bulg. édâr, s.-cr. jédar « compact ». Le bulgare en particulier<br />
développe le type en -ind, ou son accentuation : il refait gorïëina<br />
« amertume » en gorëivinâ sur gorëiv ; il tire pârgavinâ de son<br />
adjectif pârgav « leste, actif » (§ 994), et ludind « folie » de lud « fou »<br />
emprunt à s.-cr. lûd (§ 768), et il accentue mezdind pour r. mezina<br />
« place médiane », obstind « commune » pour r. ôbsëina, s.-cr.<br />
ôpcina (§ 892).<br />
Mais à côté de -ina oxyton, formant des abstraits d'adjectifs,<br />
il y a tout le suffixe -ina non oxytoné, qui présente des valeurs<br />
diverses, et qui en particulier, dans des dérivés de noms, substantifs<br />
et adjectifs, désigne des objets comme r. pruzina « ressort » sur<br />
prçg- (§ 763), ou plus généralement des choses concrètes. On trouve<br />
en conséquence, côte à côte, des abstraits oxytons et des mots<br />
de sens concret non oxytons : r. ostrind « finesse de tranchant » et<br />
oslrina « le tranchant », ravnind « égalité » et ravnina « plaine »,<br />
svezina « fraîcheur » (et s.-cr. svezina, emprunt au russe) et svezina<br />
« viande fraîche », s.-cr. ëvrstina « solidité » et r. ëerstvina « du<br />
rassis ». Le passage est d'ailleurs des plus aisés du sens abstrait<br />
au sens concret, et l'on a r. nizind et nizina « bassesse » et « lieu<br />
bas », s.-cr. nizina « bas-fond », s.-cr. cjelina « intégrité » et « terre<br />
en friche », r. celind, v. si. tësnina « étroitesse » et r. tesnina « passage<br />
étroit, défilé », etc.<br />
On notera bulg. planind « montagne », s.-cr. planina, slov.<br />
planina «alpage», dérivé d'un adjectif *pol-nû (§ 1070). Mais le<br />
vieux-slave istina « vérité », en regard de islu « véritable, (lui-)<br />
même », n'est pas un oxyton : r. et bulg. istina, s.-cr. îstina, slov.
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 359<br />
Istina ; il porte l'accent de l'adjectif, r. istyj, s.-cr. ïstï, qui d'après<br />
la métatonie de slov. îsti (§ 299) représente *ïst- d'intonation<br />
rude (§ 1159). Ceci est contraire à l'accentuation ordinaire du<br />
type starinâ, mais istyi, ordinairement déterminé comme drugyi<br />
« autre », est une sorte d'adjectif pronominal, et les dérivés de<br />
pronoms ne sont pas oxytonés (§ 894).<br />
Sur base terminée par -/-, dans laina « secret », r. tdjna, etc.<br />
(§ 1081), on distingue mal le suffixe -ina de la forme substantivée<br />
d'adjectif en -ïnu.<br />
§ 892. II. Dérivés de noms.<br />
En vieux slave : ,<br />
crëpina «tesson» (Hés., Ps. XXI, 16) sur le substantif crëpu<br />
(Upir'), r. cerepina « un tesson, une tuile » ;<br />
dolina (Ham.) «vallée » sur dolu, r. dolina, s.-cr. dôlina ;<br />
druzina « compagnie » sur drugu « compagnon », r. et bulg.<br />
druzina, s.-cr. druzina ;<br />
dupina « cavité, trou » (Supr.) et var. duplina (Hés., Ps. GUI,<br />
12) sur dupljï « creux » (§ 956), r. duplina ;<br />
godina « moment du temps » sur godû, r. et bulg. godina, et s.-cr.<br />
godina sur god ;<br />
gradina (Upir') «jardin » sur gradû, bulg. gradina, s.-cr. gràdina,<br />
r. gorodina « partie cloisonnée de l'étable » ;<br />
jazvina « terrier, tanière » sur jazva (« plaie », § 1185), r. jdzvina<br />
sur jdzva et s.-cr. jàzvina ;<br />
kçpina « buisson » sur *kçpa, pol. kçpa, r. kupina (et kupinâ),<br />
bulg. kâpina, s.-cr. kàpina ;<br />
maslina « olivier » sur maslo « huile », bulg. maslina, et s.-cr.<br />
màslina sur màslo ;<br />
mezdina (Cyr. Jér.) « partie médiane » sur mezda, r. meiina<br />
« place vide entre deux maisons », et bulg. mezdinâ par extension<br />
de l'oxytonaison ;<br />
odrina (Pand. Ant.) « étable », r. dial. odrina « grande étable »,<br />
et s.-cr. ôdrina « construction à claire-voie, tonnelle », sur odru<br />
dont le sens premier était « treillis » (§ 1114) ;<br />
pastvina « pacage, pâturage » sur pastva (r. pdstva) ;<br />
pçcina «gouffre» sur thème pçk~ ($ 767), r. pucina, et s.-cr.<br />
pûcina ;<br />
skotina « (tête de) bétail » (Ham.) sur skotu « bétail », r. skotina<br />
« une bête », s.-cr. skàtinq, « grosse bête » et « fumier de bétail »,<br />
slov. skotina « fumier » ;<br />
slatina « terre salée, un salant », r. solôtina sur sôlot' « source<br />
marécageuse» (§ 1170), bulg. slâtina, s.-cr. slâtina et slov. slâtina<br />
« source d'eau minérale » ;
360 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
xlëvina « chambre, cellule » sur xlëvu « étable », r. xlevlna<br />
« étable » ;<br />
xramina « maison » sur xramu, r. xrâmina et xorômina « chambre,<br />
appartement » sur xorômy (plur.) « grande maison » ;<br />
xyzina « cellule » sur xyzu « cabane, maison », r. xièina sur xiza,<br />
slov. hislna « grande maison » sur hisa ;<br />
et *gostina, pol. goécina « séjour d'un hôte » dans gostinïniku<br />
«hôtelier» (§ 843).<br />
Et les polysyllabes :<br />
konïëina « achèvement, fin » sur konïcï, r. et bulg. koncina<br />
« décès », s.-cr. ancien kànëina « fin » et mod. « gros fil », de kônac<br />
«fil» (§ 835);<br />
obïstina « communauté » sur l'adjectif obïstï, r. ôbscina « commune<br />
», s.-cr. opcina, et bulg. obstina oxytoné ;<br />
oskomina (Upir') « agacement des dents », r. oskôma et oskômina,<br />
s.-cr. skàmine (plur.) et àskomine (§ 734) ;<br />
otïcina « patrie » sur otïcï, r. (vJôtëina « patrimoine » ;<br />
otroëina « enfance » sur otroku, slov. otroëina, mais sans doute<br />
artificiel, et s.-cr. dial. otroëina (masc.) est un augmentatif ;<br />
paçcina «toile d'araignée» sur paçku, r. paucina (pavëina) et<br />
pautlna refait sur l'adjectif paûcij de paûk avec une fausse alternance,<br />
celle, t : c, de rabota « travail » et slavon rabotina en regard<br />
de rabôëij « de travail » ; s.-cr. pàuëina sur pàuk, et bulg. pâjazina<br />
sur pajâk avec une autre alternance secondaire k : g (§ 85) ;<br />
ptadïnina (Upir') et poludïnina (Gr. Naz., Hés. XG, 6) «(temps<br />
de) midi », bulg. ptâdnina « le midi » ;<br />
raspalina « crevasse, fente », s.-cr. ancien raspatina dont l'accent<br />
devait être celui de son synonyme ràsjelina (ràsjetina) ;<br />
rogozina « natte de jonc » sur rogozu, r. et bulg. rogôzina sur r.<br />
rogôz « une sorte de jonc » (rogôèa « natte ») ;<br />
susçdina (Ham.) « vase » sur sûsgdu, bulg. sâdina, et r. posùdina<br />
sur posûda « vaisselle » ;<br />
tatïbina « larcin » sur tatïba, r. tat'bina (slavonisme) sur tat'bâ,<br />
s.-cr. tâdbina ;<br />
zapletina (Ham.) « tresse », en slavon piétina, r. piétina (« vrille »,<br />
sur plet' « fouet » et « vrille », § 713) ;<br />
zautrina «le matin » (J. Ex., Upir') sur za utra « au matin », et<br />
bulg. sûtrina sur sûtre (sûlra) ;<br />
zivotina (Ham.) « animal » sur zivotu, r. zivolina ; r<br />
agodicina (Gr. Naz.) « mûrier », r. jâgodiëina (slavonisme),<br />
sur jâgodica (« fesse ») au sens premier de diminutif de jàgoda<br />
« baie, mûre » ;<br />
ëetveronozina «quadrupède» (Ham. 314, 4819, 63u), sur cetveronogu,<br />
adj. et subst. ;<br />
udavljenina « viande de bête étouffée, étranglée », r. udâvlenina.
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 361<br />
§ 893. En slavon. — Il convient d'ajouter, parmi les très<br />
nombreux autres dérivés en -ina qui sont attestés en slavon et<br />
dans les langues slaves :<br />
dëdina « héritage » sur dëdu, r. dédina, s.-cr. djêdina ;<br />
dïnina « longueur du jour », r. dnina, et s.-cr. dnïna « travail<br />
d'une journée, arpent », et voir ci-dessus pladïnina ;<br />
jarina « laine », r. jarina, bulg. jarina, s.-cr. jàrina « laine<br />
d'agneau » et « peau de chèvre », sur le thème jar- de s.-cr. jârac<br />
« bouc », lit. (j)ëras « agneau » et ërienà «viande d'agneau », v. pr.<br />
aristian (§ 954), thème qui est celui, ambigu, de jaru « rude, furieux »<br />
(§ 1112) et de jar- «printemps» (§ 1118), sans supposer un lien<br />
avec lat. ariës « bélier,», qu'on retrouve plutôt dans or(j)i « cheval<br />
(étalon) » (§ 1020).<br />
koprina « soie », r. ancien koprina, bulg. koprlna, et var. s.-cr.<br />
koprëna (§ 1099), sur thème *kopr- comme kopriva « ortie » (§ 1189) ;<br />
kraina « région frontière » sur krai « bord », ukr. krajina, s.-cr.<br />
kràjina (§ 1081) ;<br />
lésina « bois, arbre », r. lésina « tronc d'un arbre », sur lësu<br />
« forêt » ;<br />
r. lysina «place chauve» et vzlysina sur (vz)lysyj «chauve»<br />
(§ 801), bulg. lisinâ oxyton, mais s.-cr. Lïsina comme nom de<br />
lieu ;<br />
r. osina « tremble », pol. osina sur pol. dial. osa (§ 1045) ;<br />
plësina « calvitie » sur v. si. plësï (§ 711), r. pleslna « place pelée »<br />
et slov. plesina.<br />
srëdina « milieu » sur srëda, r. seredina, bulg. sredîna, s.-cr.<br />
srèdina (et sredina) ;<br />
strubina « brèche » sur *scïrb-(§ 820), r. scerbina « fente, crevasse »<br />
sur sëerba, s.-cr. skrbina « brèche entre les dents » ;<br />
dçielina « trèfle », s.-cr. dëtelina, pol. dziçcielina, en regard de<br />
dçtelu («pivert», § 1053), et r. djâtlina comme djâtel «pivert»,<br />
gén. djdtla ;<br />
nedgzina « maladie » sur nedçgu, r. nedûzina « forte maladie » ;<br />
obrazina « figure » sur obrazu, s.-cr. obrazina « grand et vilain<br />
visage » et « masque ».<br />
Mais pour uzina « goûter », s.-cr. Mina, voir § 795.<br />
§ 894. Types particuliers de dérivés. — Comme dérivés de pronoms,<br />
on note :<br />
t<br />
slavon vïsjaëina « toutes choses » (Srezn., Suppl.), r. vsjâëina ;<br />
— nikuëina « chose de rien », sur ni ku cemu « bon à rien » (r.<br />
nikëémnost') ; — r. (o)sôbina «les biens», s.-cr. osobina «qualité<br />
propre », sur o sobë, adv. osobï.
362 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Il y a toute une série de dérivés de numératifs (§ 316-317) :<br />
tretina «tiers» (Izb. Svjat.), r. et bulg. tretina, s.-cr. trècina ;<br />
sedmina (Upir') « septième », r. sedmina, s.-cr. sèdmina ; desçtina<br />
« dixième, dîme », r. desjalina, s.-cr. desèlina ; sutorina (Virg.)<br />
« le centuple » ; et en slavon ëetvrutina « quart », r. cetvertina,<br />
pçtina « cinquième », r. pjatina, devçtina « neuvième », bulg. devetina ;<br />
celvorina « le quadruple », r. ëetverina « groupe de quatre ».<br />
On a des élargissements en -ovina :<br />
istovina « ce qui est véritable » (Hés. CXLVII, 2, var. de istina)<br />
sur istovû, r. istovina ;<br />
olovina (Upir') « bière » sur olû, r. olovina. Et en slavon :<br />
polovina « moitié », r. polovina ;<br />
rakovina « nacre », r. râkovina « coquille », bulg. rakovina « carapace,<br />
coquille » (d'écrevisse, de moule, etc.). Le russe râkovina<br />
n'a rien à voir avec râka « châsse » (§ 205) : c'est un dérivé de raku,<br />
adj. râkovyj, au sens premier de « carapace d'écrevisse ».<br />
Sur -ïba, on trouve -ïbina dans tatïbina, qui, apparaissant au<br />
pluriel dans Supr., diffère de taiïba « vol » par son sens de « produit<br />
du vol, larcin », de même en russe dans le slavonisme tat'bîna en<br />
regard de tat'bâ ; et voir le suffixe s.-cr. -bina, § 911.<br />
Sur -ota, des formes en -olina sont nombreuses, en vieux slave :<br />
bljïvotiny (plur.) «vomissures» (§ 528), et r. blevôtina, s.-cr.<br />
bljùvotina, de r. blevôta « vomissement, nausée » ;<br />
pïstrotina (Upir', Izb. Svjat.) « bariolage » sur pïstrota, à côté<br />
de pïstrina ;<br />
xrakotina (Ham.) « chose expectorée », s.-cr. hràkotina « crachat »,<br />
et r. xarkôtina sur xarkôta «expectoration», de xrakati (§ 560),<br />
r. xràkal' et xârkal'. Et en slavon :<br />
rabotina « service » sur rabota « servitude », s.-cr. rabolina « petit<br />
travail » ;<br />
strugotina et strugotina « raclure », bulg. stârgotini (plur.) « raclures,<br />
déchets de rabotage » ;<br />
tustetina « chose vaine » sur tûslela, « vanité » ;<br />
vruxotina «sommet, élévation de terrain» (Sreznevskij, Suppl.),<br />
r. verxôtina, sur verxôta « région et gens du haut (d'une rivière) »,<br />
à côté de versina « faîte ».<br />
Et r. perxôtina « crachat » sur perxôta « envie de tousser », rvôtina<br />
« vomissure sur rvôta « vomissement » ; et voir slov. et s.-cr. -otina,<br />
§ 903.<br />
Sur des adjectifs en -ïskâ, on a v. si. -istina :<br />
polïstina (Izb. Svjat.), masc., «homme des champs, campagnard<br />
». Et une série d'exemples en slavon, qui se retrouvent dans<br />
lgs langues modernes avec beaucoup d'autres encore :
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 363<br />
dvorïstina « service », r. dvôrsëina « valetaille » ;<br />
v. r. golovïsëina, golôvsëina « prix pour un meurtre » et « eapitation<br />
» ;<br />
v. r. lonïsëina, lon(' )sëina « temps de l'année passée, lonl » ;<br />
plemenïstina, s.-cr. pleménslina « noblesse » et « terre noble,<br />
héritage » ;<br />
svobodïstina, s.-cr. slobàslina « liberté » et « franchise, privilège » ;<br />
svoistina, bulg. svôjstina « particularité », s.-cr. (ancien et dial.)<br />
« parenté ».<br />
Plusieurs mots désignent des personnes et sont traités comme<br />
des masculins en -a, ou sont des deux genres ; en vieux slave :<br />
starëisina «l'ancien» et mïn(j)ïsina «l'inférieur»;<br />
bogatina (Upir') « un riche », r. bogdttna. En slavon :<br />
bolëdina et bolëznina « un malade » ;<br />
bësenina « un démoniaque » ;<br />
dëtina « jeune enfant », r. detina « garçon robuste », et s.-cr.<br />
djèlicina sur djèlic, augmentatif ; et de même s.-cr. dial. otroëina,<br />
masc., et fém. otroëiëina sur otroëica «jeune fille, servante»;<br />
kupïcina « marchand », en vieux russe du xn e siècle, à côté de<br />
singulatifs en -inu et donc singulatif du pluriel kupïci, r. mod.<br />
kupcina augmentatif de kupéc ;<br />
skopïcina « eunuque » en vieux russe (xi e s.).<br />
§ 895. Valeurs du suffixe. — Il désigne en principe une chose<br />
concrète, par opposition à -ina oxyton qui forme des abstraits.<br />
Il s'oppose de même nettement à -ota dans le type bljïvotina<br />
« chose vomie » et à -ïba dans iatïbina « chose volée ».<br />
Dérivant d'un substantif, il indique une chose qui est en rapport<br />
avec ce substantif, rapport qui peut être de diverses sortes. Il<br />
peut s'agir d'un produit, ce qui est particulièrement clair dans<br />
les mots qui désignent la chair d'un animal, ou sa peau :<br />
v. si. udavljenina « viande de bête étouffée » ; konina et mustina<br />
(Ham. 363,) «viande de cheval, de mulet», r. konina, et s.-cr.<br />
kdnjina « peau de cheval » (et augmentatif de kônj, comme mazgina<br />
de màzga «mule»); mruivïëina «chair de cadavre» (Izb. Svjat.,<br />
Cosmas), r. mertvêëina « charogne » ; svinina « viande de porc »<br />
et zajçcina « viande de lièvre » (Vie de Constantin, chap. X) ; en<br />
slavon zvërojadina « chair de bête mangée par un fauve », r. zverojddina<br />
; vluëina « viande de loup », et vlûkojadina, idolozïrenina<br />
« viande de sacrifice », etc. (<br />
v. si. ovïëina (Izb. Svjat.) «peau de mouton»; slavon teîïcina<br />
«viande de veau» et lelçlina «peau de veau, parchemin » ; v. r.<br />
medvëdina « viande d'ours » et mod. medvédina « peau d'ours ».
364 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Y. si. pagcina « toile d'araignée » est du même type, et s.-cr.<br />
skàtina « fumier de bétail ».<br />
D'autres valeurs, qui sont claires et vivantes dans les langues<br />
slaves, apparaissent moins nettement en vieux slave :<br />
de singulatif, dans skotina « tête de bétail » ; douteusement dans<br />
crëpina « tesson », mais plus sûrement dans r. ëerepina, lésina,<br />
posudina, et déjà sans doute dans v. r. kupïëina « marchand » ;<br />
d'augmentatif, mais c'est en russe que le slavon nedgzina affirme<br />
le sens de « forte maladie », en serbo-croate que ôbrazina est « grand<br />
(et vilain) visage », de même pour r. detina, s.-cr. skotina, kànëina,<br />
slov. hisina, etc.<br />
Ces distinctions de sens se sont développées après coup, et elles<br />
ne sont bien reconnaissables que dans les langues vivantes, non<br />
sans flottements d'ailleurs entre elles, car un augmentatif, par<br />
exemple, peut être aussi bien un péjoratif. Sur un slave commun<br />
*(s)ëeiï «soie de porc» (r. scëtka «brosse»), on a r. sëetina «des<br />
soies » qui paraît collectif, et s.-cr. ëètina « aiguille de conifère »<br />
qui paraît singulatif.<br />
§ 896. Dans les langues slaves. — Le russe a des abstraits<br />
oxytons en -inâ, à côté de -izna, type qui a cessé d'être productif ;<br />
— des dérivés variés de noms, dont les désignations de viandes,<br />
barâninan de mouton », verbljûzina« de chameau », oselrina « d'esturgeon<br />
» ; et ieljâiina « de veau », avec extension de la forme élargie<br />
-jdtina : doxljâtina « charogne », kisljâlina « fruit, boisson aigre » ;<br />
et d'autres formes élargies, en -ovina : gorlovina « bouche, cratère »,<br />
kotlovina « bassin », moxovina « endroit moussu » ; en -sëina :<br />
bârsëina « corvée » de bdrskij « seigneurial », obyvâlel'sëina « caractère<br />
du propriétaire », oblômovsëina « caractère d'Oblomov » ; — des<br />
singulatifs : grâdina « un grêlon », vinogrâdina « un grain de raisin »,<br />
kartôfelina « une pomme de terre » ; — des augmentatifs ,: domina<br />
« grande maison », masc. duracina « grand sot ».<br />
Le polonais, avec grand développement du suffixe -izna (§ 1108),<br />
présente -ina dans des noms de produits, siekanina « hachis »,<br />
tkanina « tissu » ; de viandes, baranina « de mouton », wieprzowina<br />
« de porc » ; d'arbres : brzezina « bois de bouleau », dçbina « bois de<br />
chêne » et « chênaie » ; — des singulatifs : sniezyna « flocon de neige »,<br />
dial. drzewina « un arbre » ; — des diminutifs et dépréciatifs :<br />
dziecina « petit enfant », babina « pauvre vieille », kobiecina « pauvre<br />
femme ».<br />
Le tchèque a des dérivés d'adjectifs : blbina « idiotie » de blby<br />
« idiot », pahorkatina « région montagneuse » de pahorkaty, qui<br />
peuvent prendre un sens concret : cizina « l'étranger », chudina
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 365<br />
« les pauvres » ; des dérivés de substantifs : teletina « viande, peau<br />
de veau », konina « viande, peau, odeur de cheval », medovina<br />
«hydromel»; des diminutifs : dlvcina «jeune fille».<br />
Le slovène a des abstraits d'adjectifs : topllna « chaleur » ;<br />
des dérivés concrets : govçdina « viande de bœuf », kozina « peau<br />
de chèvre », bobouîna « paille de fèves », hraslovina « bois de chêne »<br />
et « chênaie », brodnlna « prix de passage en bateau », hranarina<br />
« frais de pension » ; des collectifs : druzina « la famille, les domestiques<br />
», âjdovscina « les païens », brâtovsëina « confrérie » ; des<br />
augmentatifs : deklina « grande jeune fille », mozina « homme fort »,<br />
lonëina « grand pot ».<br />
Le serbo-croate a des abstraits d'adjectifs : bjelina « blancheur » ;<br />
— des dérivés divers de noms : zècina « peau de lièvre », tèletina<br />
(tèlecina) « viande, cuir de veau», avec extension de -etina à<br />
kànjetina « viande de cheval » ; pûtnina « prix du voyage », krvnina<br />
« prix du sang », rukètvorina « ouvrage fait à la main », hajdùcina<br />
« brigandage » ; en -otina, voir § 903 ; en -ovina : dàrovina, dàmovina,<br />
hladovina « lieu de fraîcheur, ombre » ; en -stina : siràmastina<br />
« pauvreté » sur sirdmah « pauvre », siràmaskï « des pauvres », et<br />
de là budaldstina « imbécilité » sur budàla, budàlast « imbécile » ;<br />
— des augmentatifs (et dépréciatifs) variés, en -ina : brdina<br />
« grande colline », nbsina « grand nez » ; en -etina : bradètina<br />
« grande barbe », kucètina « grande maison » ; en -urina : glavùrina<br />
« grosse tête », kravùrina « grosse vache » ; en -ustina : maglùstina<br />
« brouillard épais », zemljûstina et zemljùrina « vaste terrain<br />
(incultivable) ».<br />
Le bulgare a des augmentatifs : junaëina « preux » ; mais le type<br />
svinina « viande de porc » est un russisme, tandis que slanina<br />
« lard », formé autrement, est populaire.<br />
§ 897. Les origines. — L'accentuation indique deux formes<br />
différentes du suffixe -ina : dans les oxytons un -i- d'intonation<br />
douce qui permet à l'accent d'avancer sur la finale d'intonation<br />
rude, donc une forme *-einâ ; dans le type non oxyton, avec<br />
l'accent paroxyton quand il ne porte pas sur le thème, un -id'intonation<br />
rude, donc une forme *-ïnd.<br />
Le baltique a en effet deux suffixes, en lit. -ienà : mênesienà<br />
« clair de lune » sur mënuo « lune », arklienà « viande de cheval »,<br />
sur arklys «cheval», avienà «viande de mouton» sur avis, et -ienè,<br />
forme substantivée d'adjectifs en -iënas, fém. -iënè : obuoliênèn marmelade<br />
de pommes» sur ofiuolys ; — et en lit. -ynè à côté d'adjectifs<br />
en -ynas, fém. -ynè : kankynè « tourment » sur kankà « souffrance »,<br />
akmenynè «région pierreuse» sur akmuô « pierre », berzynè «bois<br />
de bouleaux » sur bérzas « bouleau », saldynè « gâteau au miel,
366 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 897]<br />
pain d'épice » sur saldùs « doux », rûgstyné « oseille » sur rûyslas<br />
« aigre ».<br />
Le grec a un suffixe -ïvoç, fém. -vrrh et le latin un suffixe productif<br />
-ïnus qui sert à former des adjectifs tirés de substantifs :<br />
bouînus « bovin », canïnus, uicînus, etc. Des féminins comme<br />
rëgïna « reine », gallïna « poule » peuvent être tirés de féminins<br />
en *-ï. Mais c'est sans rapport avec le slave et ses féminins en<br />
-ica (§ 884), et en slave, dans la masse des dérivés divers en *-no-,<br />
c'est en slave même qu'on doit chercher des rapprochements, avec<br />
les singulatifs en -inu (§ 212) et avec les adjectifs possessifs en<br />
-inu (§ 295).<br />
Pour les oxytons en -ina, sans doute aussi formes substantivées<br />
d'adjectifs en -inu, on peut comparer leur forme *-ei-no- à la<br />
forme *-ei-ko- des dérivés en -ikix (§ 1143).
CHAPITRE XXII<br />
SUFFIXES FÉMININS (suite)<br />
§ 898. Suffixe -ola. — Le suffixe est très productif en vieux<br />
slave, à côté de -ina et -ostï :<br />
cislota « propreté », et ëislina, cistostï, de ëistu ;<br />
bëlota (Izb. Svjat.), blagota (J. Ex.), bruzota (Gr. Naz.), ëçstota<br />
(Éphrem), crunota (Izb. Svjat.), dlugota, dobrota, drçxlota (Gr.<br />
Naz.), istota, klosnota (Théod.), krasota, lëpola, malota (Hés.<br />
CXVIII, 84, Ham.), mçkota (Gr. Naz.), mokrota, nagota, nëmota<br />
(Upir'), pëgota, pïslrola (Cyr. Jér.), pravota, prisnota (Gr. Naz.),<br />
prostoia (Cosmas, et Éph. VI, 5, var. de prëprostynji), pustota,<br />
rësnota, skôrola, skçdota (Gr. Naz.), slëpota, suxota, svëtïlota, sarota<br />
(Gr. Naz., Théod.), stçdrota, tixota, tluslota (Gr. Naz., Ham.), toplola,<br />
velikota.<br />
Sur thème mouillé : dobljeta (Pand. Ant.), nisteta, sinjeta, sujeta,<br />
tusteta.<br />
D'adjectifs en -uku et -oku, directement sur le thème : gladota<br />
(Gr. Naz.), ligota (II Cor., I, 17, Izb. Svjat.), nizota (Upir'), çzota<br />
(Const. Pr.), sirota, vysota, zestota (Pand. Ant.) ; et tçgota en regard<br />
de tçzïkû substitué à *tçguku (§ 289), une variante tçzeta II Cor.,<br />
IV, 17 représentant un croisement de ligota et de tqieslï.<br />
Le dérivé en -ola se tire d'adjectifs à suffixe soudé au thème,<br />
-lu, -nu, -rû : drçxlota, klosnota, mokrota, et l'on a aussi svëtïlota,<br />
velikota. Mais il n'y a pas d'exemple ancien avec le suffixe -ïnu,<br />
et -ola apparaît joint directement au thème, qui est un thème de<br />
substantif :<br />
sramola « honte », de sramù et adj. sramïnu ; mrakota « obscurité »<br />
(Ham.) de mrakû et myaëïnu ; snagota (Gr. Naz.) «impulsion,<br />
force », du slavon snaga (§ 1010).<br />
Pour krasota « beauté », le mot est en vieux slave en regard<br />
de krasa, krasïnu, mais l'adjectif ancien est *krasû (§ 289) ; sarota
368 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
« couleur, décoration », et slov. sarôta est en regard de v. si. saru<br />
«couleur» (§ 1114), mais il s'agit d'un ancien adjectif, slov. sâr<br />
« de couleurs variées », s.-cr. cak. sâr et sâran, remplacé par s.-cr.<br />
sàren, neutre sarèno, d'après zèlen, crven (§ 409) ; et rabota «servitude<br />
», qui paraît un dérivé de rabix « serviteur », est à part du fait<br />
de son accentuation, r. rabota (§ 900).<br />
Deux substantifs en ~ota, dérivés réguliers d'adjectifs, désignent<br />
des personnes mâles : junota «jeune homme», et «vierge » (Ham.)<br />
en parlant d'un homme ; sirota « orphelin ».<br />
Y. si. kt(j)eveta « calomnie » est un postverbal (§ 816).<br />
§ 899. En slavon. —- Les formes sont aussi nombreuses en slavon,<br />
ancien ou plus récent :<br />
bosota, bystrola, dragota, gtuxota, gotota, krivota, tixota, tçkota,<br />
ostrota, ptavota, pturiota, stabota, tësnota, xromota.<br />
Sur thème mouillé : bûzdrjeta de bûzdrjï (§ 556).<br />
Sur forme à suffixe : krçglota, kyslota.<br />
Et lïgukota pour v. si. ligota, gorïkota, lînûkota, trupûkota.<br />
Et aussi sur suffixe -inu : ravïnota. Mais toujours, couramment,<br />
sur le thème du substantif-:<br />
blgdota de blçdu, adj. blçdïnu ; gnusota de gnusû, gnusïnu ;<br />
tukota de tuku, tuëïnu ; vlagota de vlaga, vlaèïnu ; xladota de xladu,<br />
xladïnu ; et alkota, lakota en regard de alëinû.<br />
Le mot skvrunota doit être, comme v. si. skvrùnostï (§ 905),<br />
un dérivé de l'adjectif skvrûnu (§ 1071) antérieur à skvrunïnù<br />
de skvruna. Pour pëxota en regard de pësï, voir § 748 ; pour<br />
ox(v)ota, qui est un postverbal, § 731 ; et trëskota est également<br />
un postverbal, voir ci-dessous, § 900.<br />
Un dérivé direct de substantif est mastrota « maîtrise », de<br />
masteru « maître », en slavon russe tardif (xvn e s.).<br />
§ 900. Dans les langues slaves. — En russe, le suffixe -ota a<br />
cessé d'être productif, mais il se conserve dans des formes nombreuses<br />
d'époques diverses : bystrotâ « célérité », gluxotâ « surdité »,<br />
kruglotâ «rondeur» de krûglyj, melkotâ «exiguïté» de mélkij, etc.,<br />
et niscetâ « pauvreté ».<br />
Sur adjectif en -ïnu, on a librement : bednotâ « misère », dlinnbtâ<br />
« longueur », dur nota « laideur », grjaznotâ « saleté », temnotâ «obscurité<br />
». Mais aussi, sur le thème du substantif de base, à sramotâ<br />
« honte » se joignent smexotâ « amusement, choses amusantes »<br />
en regard de smex et smesnôj, et skukotâ en regard de skûka « ennui »<br />
et skûcnyj.
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 369<br />
Et en regard de thèmes à la fois verbaux et nominaux : duxoid<br />
«chaleur étouffante» sur dusii' «étouffer» (§ 610), postverbal<br />
za-dûxa (§ 755), adj. dusnyj ; paxotâ « forte odeur », sur pax, zâpax,<br />
pâxnut' (§ 557) ; sipotâ et xripotd « enrouement » sur siplyj, xriplyj<br />
« enroué », sipnul', xripnul' « s'enrouer » ; et aussi maelâ « accablement<br />
», sur mâe-, mâjat' « exténuer », noetâ sur nôe-, nyt' « faire<br />
mal ».<br />
Des abstraits peuvent prendre un sens de collectifs : pexôta<br />
« piétaille, infanterie », bednotâ « pauvres gens ».<br />
L'accent est sur la finale, ordinairement immobile, mais les<br />
mots qui s'emploient au pluriel connaissent le mouvement d'accent<br />
nouveau du type kolbasâ, plur. kolbdsy (§ 220) : dlinnotâ, krasnotd,<br />
plur. dlinnôty, krasnôly. Il y a alors tendance à différencier la forme<br />
du pluriel en lui donnant un sens moins abstrait : ostrotd « acuité »<br />
et plur. ostrôty « traits d'esprit ». Et il peut y avoir extension de<br />
l'accent paroxyton avec un sens concret : mokrotâ « humidité »<br />
et mokrôta « humeur, glaire » ; l'géta n'est plus « légèreté », mais<br />
« allégement, franchise, exemption d'impôt ».<br />
Du type oxyton se distingue le type paroxyton de :<br />
blevôta « vomissement » de blevdt' « vomir » ; ëixôta « éternuement<br />
» de cixàt' ; dremôla « assoupissement » de dremdt' « sommeiller<br />
» ; ikôta « hoquet » de ikdt' ; lomôta « rhumatisme » de lomât'<br />
« briser, tordre » ; perxôta et xarkôta « crachement » de perxdt' et<br />
xdrkat' ; zevôta « bâillement » de zevât'. Pour zabôta « souci » en<br />
regard de zabôtit', voir § 817.<br />
Cet accent paroxyton se trouve également dans rabota « travail »,<br />
qui est en regard du verbe rabotât' « travailler ». Et comme l'accent<br />
paroxyton est au russe un accent typique de postverbal (au moins<br />
dans les formes à préverbe, § 831), il convient de voir dans rabota<br />
un postverbal nouveau de son dénominatif rabotât', comme dans<br />
s.-cr. rabota de rabolati. De toute façon, l'accent, contraire à la loi<br />
de Saussure, est nouveau, et l'accent oxyton ancien est conservé<br />
dans des dérivés de verbes en -otât' : klevetâ « calomnie », treskotâ<br />
« craquement » de treskotât', bormotâ de bormotât' (§ 816). Les mots<br />
du type dremôla, dérivés de verbes en -àl', sont analogiques de ces<br />
postverbaux anciens, mais nouveaux et présentant l'accent<br />
nouveau -ôia.<br />
Le paroxyton pexôta est sur thème pëx-, et non sur l'adjectif<br />
pësï. Pour rabota, dont l'accent se retrouve dans s.-cr. ràbota, il<br />
est en regard du substantif rabu, et l'histoire de ces deux mots<br />
n'est pas entièrement claire : rabota pourrait être une adaptation<br />
slave en -ota du germanique, got. arbaips « travail », dont la finale
370 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
-aips, -aid-, est isolée et différente du suffixe usuel -ipa, -ida,<br />
auquel répond si. -ota (§ 904).<br />
Dans pâxola « terre de labour », on a l'accent du verbe pdxat',<br />
à côté de paxotâ « labourage », et de l'autre paxoiâ « odeur forte ».<br />
§ 901. — Le polonais a dobrota, tçpota «fait d'être obtus»,<br />
ancien jednota « unité », etc., et spiekota « chaleur excessive » de<br />
spiec « brûler », adj. spiekly, zgryzota « chagrin » de zgryzc siç<br />
« s'affliger » ; et en vieux polonais des appellatifs Duigota,<br />
Prusota, etc.<br />
En kachoube, l'accent est mobile, du type robôla « travail »,<br />
acc. sing. rôbotq et nom.-acc. plur. rôboly.<br />
Le tchèque a jednota, drahota « cherté », mrâkota « évanouissement<br />
», etc. ; des mots à sens de collectifs, holota « les gueux,<br />
la canaille », pëchota « l'infanterie » ; et dans la langue ancienne des<br />
appellatifs Mladola, Radota, etc.<br />
Le Slovène a celôta « intégrité », debelôta « grosseur, corpulence »,<br />
enôta « unité », pianota « pays plat, plateau » sur plan « plat »<br />
(§ 1070), ravnôla, gorkôta «chaleur» de gôrek «chaud», grenkôta<br />
«amertume» de grenèk (§ 290), sibkôta «flexibilité», volhkôta<br />
« humidité » de vôlhek (v. si. vlugûkû), etc., et sur thème mouillé<br />
divjôta de dîvji « sauvage » ; dremôta, làkota « faim », grehôta,<br />
grozôta «horreur» de grôza, adj. grôzen, mrakôta et temôta «obscurité<br />
» de temà, temèn, togôta « irritation » de tgga « affliction », tçzen,<br />
zlobôta « méchanceté » de zlôba, zlôben, etc. ; et grmôta « fort<br />
bourdonnement » en regard du verbe grmotdti « faire un bruit<br />
sourd » sur grméti « tonner ». Il y a deux types d'accent, et flottement<br />
entre les deux : toplôta et toplôta.<br />
Le serbo-croate a dobrota, jakota « force » de jâk « fort », jasnàta<br />
de jâsan « clair », etc., et stèta « dommage » de v. si. tusteta ; grehàta,<br />
divôta « merveille » en regard de divan « merveilleux », strahàta<br />
« horreur » de strâh « peur », adj. strdsan, tegàta « peine » en regard<br />
de tézak « lourd, pénible », etc. ; et des appellatifs Blàgota, Vukota,<br />
et noms de bœufs mrkola « bœuf brun », vrànola « bœuf noir », de<br />
là bikola « taureau », élargissement de bîk. L'accent est d'un ancien<br />
oxyton dans les dérivés abstraits avec, pour quelques mots, une<br />
mobilité qui tend à disparaître : Ijepàta, acc. Ijëpotu, voc. sing.<br />
Ijëpoto, nom.-acc. plur. Ijëpote, de même sramota, acc. srâmoiu,<br />
et cak. lipotà, acc. lipotu.<br />
En bulgare, on a prostotd, visotd, lekotd de lek « léger » (v. si.<br />
lïgùku), etc. et nistetd, suetd, qui sont des slavonismes russes.<br />
§ 902. Suffixe *-otja. — Pour le suffixe -otï, voir § 1174.<br />
L'élargissement *-otja de -ota ne se rencontre qu'en slovène et<br />
en serbo-croate.
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 371<br />
En slovène : bridkçëa « amertume » à côté de bridkôta, debelçca,<br />
dolgçca, gostçca « densité », samçca « solitude », etc. Ce suffixe a un<br />
large développement surtout dans les parlera de l'est.<br />
En serbo-croate : sljepôca et sljepôta, bljedôca « pâleur », cvrstôca<br />
« solidité », gnjilôca « pourriture », hladnôca, kratkôca, skupôca<br />
« cherté » et jevtinôca « bon marché », etc. L'accent est le même<br />
que pour -ota et mobile dans les mêmes conditions : stidnôca<br />
« pudeur », acc. stïdnocu.<br />
Le suffixe est ancien, si son grand développement est en partie<br />
nouveau : on en trouve en slovène un exemple dans les Feuilles<br />
de Freising des x e -xi e siècles, lepoca, à lire lepoca, mod. lepQca<br />
(§ 26) ; dans la glagolite croate llslosta Job, XV, 27, variante de<br />
tlstota, mod. tustoca « graisse, obésité » ; en serbo-croate, cistoca<br />
est attesté depuis le xv e siècle.<br />
Les deux formes -ota et s.-cr. -oca sont concurrentes sans différence<br />
bien sensible de valeur. Une distinction qu'on cherche<br />
à établir dans certaines est celle entre la forme plus populaire et<br />
la forme plus savante : sljepôca « cécité » et sljepôta « aveuglement »,<br />
cistoca « propreté (de la maison) » et cistôta « pureté (de l'âme) ».<br />
En slovène, on s'applique de même à distinguer cistçca« propreté,<br />
hygiène », cistôta « pureté (d'un métal) », et ëlstosl « pureté » au sens<br />
moral.<br />
En bulgare, l'élargissement est en -otija, avec le suffixe -ija<br />
(§ 1194): bârkotija «confusion, désordre» sur bârka- «mêler,<br />
brouiller », losotija « méchanceté » sur los « mauvais », maënotija<br />
« difficulté », sur macen « pénible, difficile » ; et macéd. arnotija<br />
sur aren « bon » (de xarï « grâce », § 710), gnasotija et gnasota sur<br />
gnasen « dégoûtant, sale », etc.<br />
§ 903. Sufiixe -olina. — Un autre élargissement de -ota est<br />
-otina, déjà examiné § 894, et qui fournit un véritable suffixe en<br />
slovène et en serbo-croate.<br />
En slovène : dragotina « objet précieux » (dragôta « cherté »),<br />
lepotina « parure » (lepôta « beauté »), raznotina « variante », strugotina<br />
« raclure, copeau » (strûgati « raboter »), suholina « endroit<br />
sec, sol aride » (suhôta « sécheresse ») ; et brazgotina « cicatrice »<br />
comme en serbo-croate.<br />
En serbo-croate : bljùvolina, strùgotina, bùsotina « trou » (busiti<br />
«trouer»), crkotina «charogne» (crknuti «crever»), mrèzotina<br />
« ride » (mrêza « filet, résille »), pùkotina « fissure » (pùknuli « éclater »),<br />
skrbotina « brèche dans lés dents » (skfba « brèche, ébrèchement »),<br />
obrèzolina «tranche (de porc)» et zarèzotina « entaillure », izmisljotina<br />
« invention », etc. ; et bràzgotina « cicatrice » sur brâzda<br />
« sillon », brâzditi « sillonner », subst. verbal brâzdênje, avec fausse
372 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
alternance zd : zg pour zd : zd. Ainsi l'élargissement en -ina ajoute<br />
un sens concret à -ota abstrait.<br />
Le serbo-croate a aussi un suffixe -otinja à côté de -olina, comme<br />
-oca à côté de -ota :<br />
golôtinja « nudité » et golota, golèca ; bosàtinja et bosôca, hromàtinja<br />
et hromàca, samàtinja et samôca ; sirôtinja « pauvreté » (siràta<br />
« orphelin ») ; suhôtinja « dessèchement, jeûne » et suhôca « sécheresse<br />
» ; slabàtinja « homme faible » (slaboca « faiblesse ») ; strahàtinja<br />
« spectre » (strahôta « horreur ») ; zivàtinja « animal » ; et dial.<br />
hropôtinja «râle», élargissement de hrdpnja (§ 1090) comme<br />
hropotati de hrôpiti « râler, ronfler ».<br />
§ 904. Origine. — Un suffixe i.-e. *-td a laissé en latin des traces,<br />
iuuenta « jeunesse » et senecta « vieillesse » sur des thèmes consonantiques,<br />
et uïia « vie » qui peut être sur le thème en -o- de uïuus,<br />
d'après le parallélisme de lit. gyvatà de g y vas. Le grec a un petit<br />
groupe de formes en -TT) sur divers thèmes, en particulier -STY; dans<br />
KPSTT) « vertu », YSVSTY) « naissance », etc., exceptionnellement -OTTJ<br />
dans fîioTY) « vie ».<br />
Le sanskrit a -atd, fournissant des dérivés d'adjectifs : dïrghatâ<br />
« longueur » de dïrghdh « long » comme v. si. dlugota de dlûgu,<br />
nagndlâ « nudité » de nagndh « nu » comme parallèlement si. nagota<br />
de nagu et lit. nuogatà de nuogas ; et aussi de substantifs : devdtâ<br />
« divinité » de devdh « dieu ».<br />
Le germanique a got. -ipa, v. h. a. -ida (qui a donné si. -ïda,<br />
§ 1007), de *-étâ, avec grande extension dans les dérivés d'adjectifs :<br />
got. hauhipa « hauteur » de hauhs « haut », v. h. a. hôhida de hô(h),<br />
et got. armahairtipa de armahairts « compatissant ».<br />
Le baltique a des suffixes en -ata- et -eia- (§ 1173), et le lituanien<br />
des dérivés d'adjectifs en -ala, mais en très petit nombre, sans rien<br />
de comparable à l'extension de -ota en slave : gyvatà (si. zivotu),<br />
nuogatà, et sveikatà « santé » de sveïkas « bien portant ».<br />
En slave, où les dérivés de substantifs apparaissent secondaires,<br />
on a un seul type de dérivés d'adjectifs, en -ota, étendu aux anciens<br />
thèmes en -u- : ligota de lïgukù ; il en est de même en germanique<br />
pour got. -ipa : aggwipa de aggwus « étroit », comme si. çzota de<br />
çzùkù.<br />
Est isolé un masculin zivotu (§ 1174). Pour le suffixe -ta, voir<br />
§ 1165.<br />
L'accent est en védique -âtâ, le germanique suppose *-étâ, et<br />
le lituanien a le mouvement d'accent nuogatà, gén. nuogàtos, des<br />
anciens paroxytons (§ 216). En slave, l'accent r. -ôta est nouveau<br />
et du type r. svobôda des postverbaux (§ 831). L'accent baltoslave<br />
était *-àtâ qui, devenu oxyton au nominatif singulier, devait
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 373<br />
donner en slave un accent mobile et, à la différence du lituanien,<br />
une mobilité entre la finale et l'initiale : s.-cr. Ijepàta, acc. Ijëpolu,<br />
et slov. toplôta de -otâ et toplôta sur acc. *tôplotg (§ 93). L'accent du<br />
kachoube, robôta, acc. rôbotq, est évolué et se prête à des interprétations<br />
diverses ; comme il est du type de niedziéla, acc. niédzielq<br />
en regard de r. nedélja, s.-cr. nèdjelja, on doit penser à l'accent<br />
nouveau -ôta.<br />
Quant au suffixe *-otja du serbo-croate et du slovène, il résulte<br />
évidemment d'une combinaison entre les deux suffixes *-ja et<br />
-ota, la forme en *-otja succédant à une forme en *-ja : le slavon<br />
croate tlstosta au slavon tlusta, slov. tôlsëa, s.-cr. lus la, le slovène<br />
cistgca, s.-cr. cistôca, au slavon cista, slov. ëisca.<br />
On trouve également un élargissement *-ostja du suffixe -ostï.<br />
SUFFIXE -OStï<br />
§ 905. En vieux slave. —- Ce suffixe, qui donne des abstraits<br />
dérivés d'adjectifs, est d'une telle productivité, à l'époque du vieux<br />
slave comme à l'époque moderne, qu'on peut se limiter à la liste,<br />
déjà très longue, des formes attestées en rédaction vieux-slave :<br />
cistostï « pureté », de cistû, à côté de cistina et cistota ; bëlostï,<br />
blagosiï, bûdrostï, dobrostï, druzostï, grudoslï, jarostï, junosiï, lënostï,<br />
Ijutostï, milostï, mçdrostï, mrutvostï, nagostï, nëmostï, ostrostï,<br />
pravostï, prisnostï, prostostï, radostï, skorostï, skçdostï, skçpostï,<br />
slabostï, sladostï, siarostï, svçtostï, sytostï, teplostï, tixostï, tvrudostï,<br />
xudoslï, xytrostï.<br />
Sur thème mouillé : bujestï, dobljestï ; et en rédaction slavonne<br />
*dupljestï (Gr. Naz.) « légèreté » sur dupljï « creux, léger » ; en vieux<br />
tchèque ruëest «rapidité» sur *rgëï «rapide» (§ 957).<br />
En regard d'adjectifs en -ûkû : krotostï, mrûzostï, stydostï, zeslostï,<br />
et krëpostï de krëpu et krëpûku (§ 983), en rédaction slavonne<br />
mçkoslï de mçkiïku « mou » (Virg., et slavon mçgkostï), trûpostï<br />
(J. Ex., Hés. CXVII, 6) de trûpûku « âpre », vysostï (J. Ex.) ; sur<br />
thème mouillé gorestï de gorïku, et tçgoslï et lezestï de içïlkû.<br />
Sur thème dissyllabique : mùd(ï)lostï, svëtïlostï, inokostï« solitude,<br />
séjour à l'étranger » ; rïvïnosiï « émulation », et en rédaction<br />
slavonne ravïnostï «égalité» (Ham.), bëdïnoslï «le pénible» (Hés.<br />
CXLYII, 7).<br />
Les dérivés d'adjectif^en -ïnû apparaissent assez rares en vieux<br />
slave, et c'est tukostï (J. Ex., Virg.) qu'on trouve comme tukota<br />
(§ 899) en regard du substantif tuku et de l'adjectif tuëïnu, et en<br />
glagolite croate bezumostï (Eecl., II, 3) en regard de v. si. bezumïnu
374 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
et de s.-cr. bèzumnôst. Pour skvrunostï, ce peut être, comme<br />
skvrunota, un dérivé de l'adjectif ancien skvrûnu.<br />
Le vieux-slave pakosiï « tort, injustice » n'est plus qu'à côté de<br />
l'adverbe paky « de nouveau », mais qui dérive d'un adjectif qu'on<br />
doit retrouver dans s.-cr. ôpâk «méchant» (§ 322).<br />
Sur substantif, un dérivé zvërostï est du slavon russe tardif,<br />
pour r. zvérskost' « bestialité ». En regard du substantif masc. bolï<br />
« malade » (§ 169), adj. bolïnû, un dérivé bolestï « maladie, douleur »<br />
apparaît dans toutes les langues slaves, v. r. bolestï et r. pop.<br />
bôlest', pol. bolesc, v. tch. et mod. bolest, s.-cr. bôlêst et dial. bôlijest<br />
refait sur bàljeti, mais la forme vieux-slave est bolëznï (§ 1109),<br />
slov. bolêzen et bolêst sur boléti.<br />
On a v. si. zalostï « chagrin, peine » (Izb. Svjat., Gr. Naz.) en<br />
face de zalï (§ 713) et du verbe zalili (§ 584), et r. Mlost' «compassion<br />
», pol. zaiosc, tch. zalost : un thème dur zal- apparaît<br />
également, non seulement dans le verbe v. si. zalovati qui ne prouve<br />
rien (§ 567), mais aussi dans le slavon zaloba(% 913). En vieux slave,<br />
zalostï Ps. LXVIII, 10, CXVIII, 139 rend le grec ÇvjAoç dans<br />
« le zèle de ta maison », où il a été sûrement suggéré par le mot grec,<br />
mais en donnant la traduction possible « le souci pour ta maison ».<br />
§ 906. Élargissements du suffixe. — Un élargissement en *-ostja,<br />
comme de -ota en *-otja, est conservé dans des formes d'instrumental<br />
pluriel devenues adverbiales (§ 321) : v. si. radostami « avec joie »,<br />
slavon rïvïnostami « par rivalité », zavidostami « par envie », v. r.<br />
lënoscami « par paresse », pakoscami « par méchanceté », zalosëami<br />
« par pitié », et v. tch. radosëëmi, êaloscëmi, miloscëmi « par faveur »,<br />
zadoscëmi « par désir », staroscëmi « par vieillesse », etc.<br />
On trouve, peut-être par développement secondaire, ces mots<br />
à d'autres cas en vieux tchèque : acc. plur. mudrosëë « sagesse », etc.,<br />
et dans le russe dialectal na râdosëax. Un mot se maintient jusqu'à<br />
l'époque actuelle avec flexion complète : s.-cr. milosta « tendresse »,<br />
slov. dial. milosëa, et s.-cr. ancien nemilosta. On signale aussi<br />
radosëa dialectalement en slovène. Le cakavien ancien a des<br />
formes en -osé tirées de -osëa- : nenavidosc, zavidosc, slavon croate<br />
zavidostï Job, V, 2.<br />
Un autre élargissement est en -ostynji, et il remonte au vieux<br />
slave : blagostynji combinant blagostï et blagynji (§ 919), milostynji<br />
à côté de milostï (sans forme *milynji), lïgostynji (Ham.) et pravostynji<br />
(Ephrem) à côté de lïgostï, pravostï et lïgynji, pravynji.<br />
§ 907. Dans les langues slaves. — Dans toutes, le suffixe est<br />
abondamment productif, mais toujours limité aux dérivés d'adjectifs.<br />
Ainsi en russe :
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 375<br />
delovîfost' « habitude des affaires », de delovîtyj, obldëivosl'<br />
« susceptibilité » de obldcivyj, uglovâtost' de uglovâlyj « anguleux »,<br />
vozmuzâlost' « virilité » de vozmuzâlyj ; en particulier dans les<br />
dérivés de participes : vozbuMënnost' « exaltation » de vozbuzdënnyj,<br />
vîdimost' « visibilité » de vidimyj, osjazâemost' « palpabilité »<br />
de osjazâemy.<br />
Le type en -estï de gôrest', IjâzesV n'est plus productif, sauf une<br />
extension limitée à quelques adjectifs en -èij : svézest' « fraîcheur »,<br />
dosùzest' de dosûzij « qui a le loisir », vsxôzest' de vsxôzij' « qui peut<br />
bien pousser » ; et surtout en -ûcij (§ 281) : dremùëest' de dremùcij<br />
(les) «(forêt) épaisse», pevûëest' de pevùëij «chantant», Ijagûëesl'<br />
de tjagûëij « ductile », etc.<br />
En regard d'adjectifs à suffixe v. si. -ùlcù, on a nizost', ûzost',<br />
mais à côté de nlzkosl', ûzkost', et régulièrement gïbkosl' de gîbkij<br />
« flexible », lômkost' ' de lômkij « cassant », vjdzkost' de vjdzkij<br />
« visqueux », etc.<br />
Les dérivés d'adjectifs en v. si. -ïnu sont librement en -nosl',<br />
et par conséquent très nombreux : dôlznost' « devoir » de dôlznyj,<br />
intimnost' de inlimny « intime » ( § 274) ; si nombreux qu'ils ont<br />
fourni un suffixe autonome -nosl' : bûduscnost' « l'avenir » sur<br />
bùdusëij « futur », gorjdënost' sur gorjdcij « ardent », gotôvnost'<br />
« disposition, empressement » sur gotôvyj «disposé», vseôbscnost'<br />
sur vseôbsëij « général ».<br />
Le polonais a les types czystoéc, tozsamosc « identité » de tozsamy<br />
« identique », glqbokosc « profondeur », de gîéboki, dziuinosc « étrangeté<br />
» de dziwny, ludnosc « population » de ludny « populeux »,<br />
konslruktywnoêc de konstruklywny.<br />
Et le tchèque vëdeckost de vëdecky « scientifique », hlubokost,<br />
nicotnost « futilité » de nicolny, taktnost de taklnl « plein de tact » ;<br />
la forme mouillée dans svëèest « fraîcheur » est prise au russe, comme<br />
l'adjectif svëzi, tandis que le polonais a swiezosc de swiezy ; le<br />
tchèque ancien avait rucest de ruci « rapide ».<br />
Le slovène a rnladôst de mlâd et starôst de stàr, edinost « unité »,<br />
enâkosl « parité » de endk « pareil », bldznost « folie » de bldzen<br />
« fou », podjçtnost « esprit d'entreprise » de podjqten « entreprenant ».<br />
Une forme du type mouillé gorêst « amertume » est un russisme,<br />
et de svêz, également pris au russe, on a svezôsl. Un dérivé de<br />
substantif cesarôst « Majesté » n'est qu'une curiosité de chant<br />
populaire, et psôst « insulte » n'est en regard de pès « chien » que<br />
par l'intermédiaire du^ verbe psovdti « insulter ».<br />
Le serbo-croate a bldgôst, drdgôst et ràdôst, slàbôst, slàdôst sur<br />
slàdak et blïskôst sur blïzak, dùznosi sur dûzan, bezàzlenôst « innocence<br />
» sur bezàzlen, produkttvnôsi sur prôduktïvan ; bôlëst, mais
376 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
dràzêst « charme » est un élargissement récent de drâz sur le modèle<br />
des formes russes en -est'.<br />
Le bulgare a mlâdosl', râdost', konslrukl'wnosl ; bôlest, et les<br />
russismes gôrest, tézest.<br />
§ 908. Accentuation. — L'accent est en russe régulièrement<br />
sur la première syllabe avec les thèmes monosyllabiques, et il est<br />
celui de l'adjectif de base dans les polysyllabes. Il est ordinairement<br />
immobile, mais on trouve aussi un type krépost', plur. kréposti et<br />
gén. krepostéj, etc.<br />
En serbo-croate, l'accent des polysyllabes est aussi celui de<br />
l'adjectif, mais avec les thèmes monosyllabiques il y a distinction<br />
entre les thèmes d'intonation douce, drâgôst, gén. drâgosii, de<br />
drâg, cak. drâgôst, gén. drâgôsti, et les thèmes d'intonation rude,<br />
mïlôst, gén. mïlosti, de mil- ; avec extension de l'accentuation<br />
initiale dans mlàdôst, lûdôst « folie » de mlâd, lûd. Un mouvement<br />
d'accent apparaît au locatif singulier : milosti, cak. milostï.<br />
Le slovène, avec thème monosyllabique, a généralisé l'accent<br />
starôst, de *stârostï. Les dérivés d'adjectifs en v. si. -inu ont<br />
l'accent de l'adjectif, blâznost de blâzen, vêcnost « éternité » de<br />
vêcen, avec extension de l'accent des adjectifs à thème monosyllabique<br />
dans dolznôsl « devoir », skrivnôsl « secret », de dôlzen,<br />
skriven.<br />
Le kachoube accentue miôdosc, loc. sing. miodôsci.<br />
Le bulgare n'a de notable que ses formes articulées de singulier,<br />
râdost, déterm. radostlâ.<br />
Dans l'ensemble, ces accentuations, diverses mais assez semblables,<br />
se ramènent à celle des polysyllabes balto-slaves en -i-,<br />
oxytons à accent mobile, lit. gyvastls, acc. gyvasli (§ 218), avec<br />
la distinction slave des types à intonation douce et à intonation<br />
rude.<br />
§ 909. Origine. — Le hittite a des dérivés en -asli(s), et une<br />
correspondance curieuse entre dalugasti « longueur » et v. si.<br />
dlugostï ; mais le suffixe est à expliquer en hittite, de même qu'un<br />
suffixe -sti- en arménien.<br />
La comparaison avec le baltique n'apporte rien de clair. Le<br />
lituanien a des formes en -astis : gyvastls et gijvastis « vie » de gyvas,<br />
mais des mots comme kytrastis de kylras «rusé», qui sont r. xilryj<br />
et xitrost', montrent que le suffixe est emprunté au slave. Il a des<br />
dérivés en -eslis, d'adjectifs, yalleslis « compassion » de gailùs,<br />
mais aussi de verbes, augestis « croissance » de âugti, et rùpeslis<br />
« souci » aussi bien en regard du verbe rûpëti « avoir du souci » que<br />
de l'adjectif rûpùs « soucieux ». Et le lette a des formes en -asis,
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 377<br />
-ests, particulièrement en -estïba avec la grande productivité de<br />
son suffixe -ïba (§ 914).<br />
Une explication de si. -ostï et de lit. -estis par addition du suffixe<br />
-fi- à un thème en -es- n'est pas satisfaisante, le suffixe -ti- étant un<br />
suffixe « primaire », c'est-à-dire qui se joint directement à la racine.<br />
Mais une donnée du slave oriente vers une autre interprétation :<br />
l'élargissement de -ostï en -ostynji est ancien, et comme -ynji<br />
donne des dérivés d'adjectifs en -û (§ 919), cet élargissement<br />
suppose un adjectif en *-ostu, dont -ostï serait l'abstrait en -ï.<br />
Ici, on peut admettre la suffixation de *-to- à un thème en -es- :<br />
le latin a les types onustus « chargé » de onus « charge », gén. oneris,<br />
fûnestus de fûnus « funérailles », gén. funeris.<br />
Mais la disparition complète en slave de cet adjectif de base pose<br />
un problème, alors qu'il y a eu création et développement de<br />
suffixes d'adjectifs en -astii (§ 989) et -istû (§ 991). D'où l'hypothèse<br />
présentée § 293 de la disparition, non seulement d'un suffixe, mais<br />
d'une catégorie morphologique, celle du superlatif, avec seul vestige<br />
dans le substantif masculin r. stârosta « l'ancien ».<br />
En baltique, il n'y a pas non plus de suffixe -esta- d'adjectif,<br />
et lit. -estis, du fait qu'il est à côté de -astis, peut n'être qu'une<br />
adaptation du slave -ostï.<br />
s UFFIXE -ïba<br />
§ 910. En vieux Slave. — Le suffixe apparaît productif e*<br />
fournissant des dérivés de noms et de thèmes verbaux :<br />
alëïba (Supr.) «jeûne » et laëïba (Izb. Svjat.), en regard de alkati<br />
et subst. aie ï « faim » (§1019) ;<br />
eëtïba « guérison » de cëlû et eëliti (lire i cëtïba Supr. 3086 et non<br />
ieëtïba) ;<br />
druzïba « société » de drugiï ;<br />
tëëïba « médication » de lëku et lëëiti ;<br />
molïba « prière » de rnoliti ;<br />
praz(dï)nïba (Gr. Naz.) «oisiveté» de praz(dï)nu (§ 1071);<br />
sluzïba « service » de stuga et sluziti ;<br />
sçdïba « jugement » de sçdu et sçditi ;<br />
stradïba « souffrance » de stradati ;<br />
strazïba « garde » de strazï et straza ;<br />
strëlïba (Gr. Naz.) « tir à la flèche » de strëta et strëliti ;<br />
sulïba (Ham.) de sulu é^ sutati ;<br />
svçtïba « sanctification » de svçtu et svçtiti ;<br />
taiba (Gr. Naz.) « mystère » de tai et taiti ;<br />
tatïba « larcin » de tatï ;
378 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
tçzïba (J. Ex.) « conflit » de tçza et ledzati (§ 1022) ;<br />
tun(j)iba «donation (gratuite)» (Gyr. Jér., voir Srezn., Suppl.)<br />
de tunje « gratuitement », adj. tunjï (§ 957) ;<br />
tvorïba (Ham.) « création » de tvoriti et subst. Ivoru ;<br />
vlusïba « magie » de vlùxvu, avec réduction du groupe alternant<br />
xv : sv : sv (§ 20) à s comme dans vlûsïsku, vlusïstvo ;<br />
vraëïba « guérison » de vracï ;<br />
xlaëïba (Gr. Naz.) « célibat » de xlaku (§ 1038) ;<br />
zladïba «compensation» de ilëde-, zlade- (§ 430).<br />
De nombreux autres mots, en slavon, vieux russe et vieux serbe,<br />
confirment la productivité du suffixe, et on les retrouve dans les<br />
langues modernes. Ainsi, parmi les plus anciennement attestés :<br />
borïba « lutte » de borje-, brali ;<br />
gostïba « réception, festin » de gosiï et gosiiti ;<br />
prosïba « demande » de prositi ;<br />
soëïba « dénonciation » de soku et soëiti ( § 607) ;<br />
svatïba «noces » de svatu et svatiti sç (§ 601) ;<br />
*vra%ïba « divination », r. vorozbâ, pol. wrôzba, à côté de vraza<br />
(§ 1022);<br />
xvalïba « louange », de xvala et xvaliti.<br />
Le vieux russe a talïba « mise en otage » de talï, et sur druzïba<br />
« compagnie, druzina », il fabrique gridïba « gens de la maison du<br />
prince » de gridï « compagnon du prince », mot Scandinave.<br />
Un élargissement de -iba en -ïbina se rencontre en vieux slave<br />
dans tatïbina (§ 894), et il donne un suffixe en serbo-croate. On<br />
trouve aussi -îbizna dans v. r. tunïbizna (§ 1108).<br />
Un autre élargissement, en -tïba, résulte d'une contamination<br />
avec le suffixe -Iva : voir 5 917.<br />
§ 911. Dans les langues slaves. — En russe, la productivité<br />
du suffixe a cessé, mais les traces en sont nombreuses :<br />
bor'bd, mol'bd, strel'bd ; boron'bâ «hersage» de borond, boronit' ;<br />
bozbâ « jurement » de bozit'sja ; gorod'bd « clôture » de gorodit' ;<br />
gul'bâ « fainéantise » de guljât' ; kos'bâ « fauchage » de kosâ, kosit' ;<br />
molot'bd « battage » de molotit' ; pal'bd « décharge d'arme à feu »<br />
de pâlit' ; rez'bd « gravure » de rézat' ; vorozbâ « divination » dé<br />
vorozit' ; xod'bd « marche » de xodit' ; poxval'bâ « vantardise » de<br />
poxvalii'(sja) ; etc.<br />
L'accent est sur la finale, sauf dans des formations anciennes :<br />
drMba, slûzba, prôs'ba et svâd'ba ; usdd'ba « manoir, métairie »,<br />
de usadit', a l'accent des postverbaux à préverbe (§ 831).
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 379<br />
Le polonais a sluzba, prosba, rzezba « sculpture » ; liczba<br />
«. nombre » de liczyc « compter », grozba « menace » de grozic, siejba<br />
« semailles » de sieje-, siac, wrôzba « divination », et wieszczba de<br />
wieszcz « celui qui sait, prophète ». Mais d'autres mots ne sont<br />
que dialectaux : raczba de raczyc « régaler », rqczba « garantie »<br />
de rçczyc, uczba « enseignement », zenba « mariage » ; et d'autres<br />
mots sont du polonais ancien : ganba «blâme» de ganic (§ 789),<br />
kradzba « larcin », wozba « charriage », remplacés par ganienie,<br />
kradzenie, wozenie, et kolba « joute » que garde le tchèque.<br />
Le tchèque atteste une vitalité plus grande du suffixe : dëlba<br />
« division », drazba « vente aux enchères » (draziti « enchérir »),<br />
hariba «honte» (hanëti «blâmer»), chodba «passage», malba<br />
« peinture » (malovati « peindre »), plavba « navigation », sazba<br />
« tarif » (sâzeti « mettre, miser ») ; kolba « joute, tournoi » sur kùle-,<br />
klâti « piquer » ( § 5.32) ; nadslavba « superstructure », ûdrzba<br />
« entretien », etc. ; et v. tch. jescba « être, substance » sur un thème<br />
*jestj- qui paraît être celui de l'adverbe v. si. jeste « encore »<br />
(§ 958).<br />
§ 912. Le slovène présente abondamment le suffixe :<br />
bêrba « vendange », gôdba « musique », brâmba « garde, défense »<br />
(brâniti). gçnba et yçmba «battue», sprêmba «accompagnement»<br />
(sprémiti), enacba « équation », dolçcba « décision », iznâjdba « invention<br />
», postrêzba « service, soins », premêmba « changement » (premeniti),<br />
urçdba «règlement», zasêdba «occupation» (zasedéti),<br />
zaznâmba «notation» (zazndmiti, § 818), udelçêba «participation»<br />
(udelçziti de dêlez « part », § 1017), etc. ; outre les mots en -tba<br />
(§ 917).<br />
Le slovène a généralisé l'accent " sur la syllabe précédant le<br />
suffixe, qui est comme en russe l'accent des postverbaux à préverbe.<br />
Le serbo-croate a, comme le slovène, abondamment :<br />
bérba, borba, diàba (dijèliti), dvàjba «doute» (dvèjiti), mèlba<br />
« demande » et môba « travail collectif sur demande », seàba<br />
« déménagement, migration », srdzba « colère » (srditi « mettre en<br />
colère » et sfciti de srce « cœur »), lùzba et zàlba « plainte », zùrba<br />
«hâte» (zûriti), nâyodba et pogodba «accord», nâredba et ùredba<br />
« ordonnance, règlement », pôredba « comparaison », svjëdodzba<br />
« attestation » (svjedàciti « témoigner »), etc. ; outre les mots en<br />
-dba, § 917.<br />
L'accent est d'un ancien oxyton avec les formes dissyllabiques,<br />
sauf dans svâdba « noce » qtfi a l'accent rude de svât ; et sur le thème<br />
avec les formes à préverbe.<br />
Le serbo-croate a en outre tout un type de dérivés à élargissement<br />
en -bina :
380 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
rodbina (rôdbina) « parenté », sudblna « destin », càzbina « réception,<br />
festin» (ëàstili), tàzbina «famille des beaux-parents (t&st),<br />
sôdzbina « récompense pour découverte » (sôciti), àtadzbina « patrie »,<br />
pôstôjbina « payd'origine, patrie », pôsaobina « ambassade »,<br />
nârudzbina et porudzbina « commande », zàduzbina « fondation<br />
pieuse (pour le repos de l'âme) », etc.<br />
Le bulgare a borbâ, gôzba (gôstba) «mets, plat (d'un festin)»,<br />
liëba « signe, présage », rôzba « progéniture » (v. si. rozdïstvo, § 937),<br />
veselbd « réjouissance », berbd « récolte, vendange » (et beriiba,<br />
§ 917), etc. ; et macéd. ëùdba « émerveillement », mirba « pacification<br />
», même mlrizba « senteur » de mîrisa- ( § 575) pour bulg.<br />
mirizmd (du grec).<br />
§ 913. Suffixe -oba. On trouve une réfection de -ha en -iba dans<br />
ukr. sadyba pour sad'bâ sur le verbe sadyiy « planter », et bl.-r.<br />
sadzlba « maison, demeure » (r. usâd'ba) sur sadzic, d'où pol.<br />
sadyba, dial. sadziba, et siedziba « domicile » sur siedziec. Mais<br />
c'est autre chose que -oba, qui est un véritable suffixe.<br />
Ce suffixe n'apparaît en vieux slave que dans zuloba « méchanceté<br />
», de zulû (et zulobï, § 999), et çtroba « entrailles », de *çtrù,<br />
adv. -çirï (§ 1113). Il est rare en slavon, où des mots xudoba « état<br />
inférieur, misère », de xudu, et zaloba « deuil », en regard de zalï<br />
(§ 713), zaliii (§ 584), zalovali, sont anciens. Les langues slaves<br />
apportent des formes plus nombreuses.<br />
Le russe a zlôba, ulrôba, zdloba, xudoba « maigreur » ; le dialectal<br />
uëëba « instruction » est à côté de uëbd, pol. dial. uczba, et est donc<br />
refait sur les dérivés ucébnyj, uëébnik ; ëisëëba « terrain nettoyé (pour<br />
la culture) », qui est également en regard de ëisëëbnyj, est un<br />
élargissement de cisca (§ 1024) et doit être une réfection du slavon<br />
( ne Jëistïba.<br />
Le polonais a chudoba, choroba « maladie » de chory.<br />
Le tchèque a hniloba « pourriture », siroba « état d'orphelin »,<br />
staroba «vieillesse»; et hanoba «insulte, outrage», sûrement<br />
secondaire de hanba « honte », adj. hanebny.<br />
Le slovène a, en abondance :<br />
gnilôba, grdôba « laideur », hudôba « malignité », lenôba « paresse » ;<br />
grenôba et grenkôba « aigreur, amertume » (§ 290), tegôba et tezkôba<br />
« difficulté », mehkôba « mollesse », sladkôba « douceur », volhkôba<br />
« humidité » ; gnusôba « dégoût » et gnusnôba, trdôba et trdnôba<br />
« fermeté » de trd, trden, lemnôba « obscurité » ; mascôba « graisse »<br />
en regard de mdsten « gras » et mâsëen « graissé » de mastiti, pusëôba<br />
« solitude » en regard de pûst et pustiti « laisser, abandonner »,<br />
part, passif pusëen ; etc., et ërvôba « vermoulure » tiré du substantif<br />
ërv, adj. ërvlv «vermoulu».
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 381<br />
En serbo-croate : gnusoba, grdoba, hudoba, rugàba « laideur » sur<br />
rMan « laid », tegôba « difficulté, fardeau », tjeskôba « angoisse », etc.<br />
En bulgare : zlôba, tegobâ « fardeau, imposition ».<br />
§ 914. Origine. — Les suffixes -oba et -ïba sont des élargissements<br />
du suffixe -ba (§ 999) sur la base de noms, et spécialement d'adjectifs,<br />
en *-o- et *-£-. Ils n'ont pas de correspondants en dehors du<br />
balto-slave, où si. -ïba se retrouve en letto-lituanien sous la forme<br />
lit. -yba, -ybé, lette -ïba : lit. zvejyba « pêcherie » su r zvejys « pêcheur ».<br />
et surtout -ybé : didybê « grosseur » de didis « gros », baisybè « épouvante<br />
» de baisùs « affreux », aukstybê « hauteur » de âukstas<br />
« haut », sur verbe galybè « pouvoir » de galëti, etc. ; lette patiesïba<br />
« vérité » de paties « vrai », ticïba « croyance » de ticêt « croire », etc.,<br />
et -estïba (§ 909) : zvêrïba et zvêresiïba « bestialité » de zvêrs, brïvïba<br />
et brïvestïba de brïve « liberté ».<br />
Cette forme en lit. '-yba est celle des dérivés d'adjectifs en -iavec<br />
la confusion baltique des types en -i- et *-yo-, d'où -y- (§ 276).<br />
SUFFIXE -tva<br />
§ 915. Vieux Slave et Slavon. — Ce suffixe est représenté en<br />
vieux slave par les mots :<br />
britva « rasoir » sur briti « raser » ; klçtva « serment » ; sëtva<br />
«semailles» (Gr. Naz., Pand. Ant.) ; êçtva «moisson»; zrutva<br />
« sacrifice, victime » ; pastva « pâturage, troupeau », et *sùpastva<br />
« salut, wcoTYjpta » dans Supr. 5035 altéré ;<br />
oratva « labourage » (Gr. Naz.) ; ruvatva « déchirure » ; zelëtva<br />
« deuil, peine » ; lovitva « chasse » ; molitva « prière » ; zenitva<br />
«mariage» (J. Ex., Gr. Naz.). Mais ëuvitva Pand. Ant. doit n'être<br />
qu'une faute pour ëuvitvo « organe des sens » (§ 942).<br />
En slavon, vieux russe et vieux serbe :<br />
vûzdatva « récompense » ; jçlva « captivité », v. r. njatva ; mytva<br />
« lavage » ; pitva « beuverie, festin » ; jastva « nourriture » ;<br />
cëlitva « guérison » ; gonitva « poursuite » ; gostitva « réception,<br />
festin » ; prositva « demande » ; selitva « habitation, installation » ;<br />
xranitva « phylactère » ;<br />
et sëjatva, variante de sëtva ; *zelatva dans zelalvïnikù « amoureux,<br />
passionné », variante de zplëtva ;<br />
piritva « festin », variante de pitva, sur un dérivé peu attesté<br />
piriti de pirû ;<br />
tocitva en glagolite croate, Joël, I, 11, qui rend r. Tpuy/jTÔç en
382 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
désignant, non pas la vendange, mais la « récolte de vin », sur s.-cr.<br />
tociti « verser, tirer le vin du fût » ;<br />
kolitva en slavon russe (xm e s.), qui signifie « colique », peut être<br />
un remaniement du mot d'emprunt kolika par rattachement<br />
à kolje-, klati, r. kolèl' « avoir un élancement, une douleur », kolôt'e<br />
« tranchée, colique ».<br />
Pour tvoritva (Mikl.), c'est une altération de tvoritvo (§ 942).<br />
Mais tatva « larcin » qu'on lit en vieux slovène dans les Feuilles de<br />
Freising, II, 22, à côté de tatba I, 15, sur tati « voleur », peut être<br />
un dérivé tiré directement du thème ta- (§ 1167), ou l'attestation<br />
de l'ancienneté du flottement entre les suffixes -tva et -lïba dans<br />
slov. mod. tâtva et tâtba (§ 917).<br />
D'autres mots des langues slaves sont sûrement anciens :<br />
bitva « bataille », r. bitva, pol. bitwa, v. tch. et tch. mod. bitva,<br />
mais s.-cr. bitva est récent et sans doute un russisme, de même slov.<br />
bitva ;<br />
lëstva « échelle », slov. lêstva, s.-cr. Ijëstve (plur.), ailleurs le dérivé<br />
v. si. lëstvica, r. léstvica, sur lëze-, lësti « grimper » ;<br />
*plytva sur plove-, ply- « voguer, flotter », dans slov. plîtva et<br />
plûtva « radeau », v. pol. plylwa « nageoire » (mod. pletwa) et v. tch.<br />
plytva (mod. ploutev) ;<br />
* pràstva sur prede-, prçsti « filer », dans tch. pràstva « veillée<br />
de fileuse » ;<br />
sans doute aussi pol. warstwa « couche, lit », et tch. vrstva attesté<br />
depuis le xiv e siècle, en regard de v. si. vrusta «(rang d')âge », r.<br />
verstd, etc. (§ 1165), sur la racine *vïrt-.<br />
§ 916. Dans les langues slaves. — Le suffixe n'est plus ordinairement<br />
productif, et on n'a plus affaire, sauf en slovène, qu'à des<br />
restes de sa productivité ancienne.<br />
En russe : bitva, britva, kljdtva, pdstva, zâtva, zérstva, et jâstva<br />
slavon pour éstva et traité comme neutre pluriel ; séjatva, molitva,<br />
selitva, zenitva ; pour detvâ « couvain » à accent spécial, voir<br />
§ 1185.<br />
En polonais : bitwa, brzytwa, klqtwa, paslwa, warstwa, et de<br />
même gçstwa « foule » (§ 1185) ; lowitwa, modlitwa, gonitwa « course,<br />
carrousel » (et gontwa d'après gonba) ; et dial. rybitwa « aigle<br />
pêcheur, sterne » pour v. si. rybitvu « pêcheur ».<br />
En tchèque : bitva, britva, pastva, pràstva, vrstva, zatva, et v.<br />
tch. kletva, modlitva.<br />
Le bulgare n'a que quelques formes traditionnelles ou russismes,<br />
comme klétva, zâtva et zétva, molitva.<br />
Le serbo-croate conserve mieux le suffixe : britva, klêtva, sjëtva,<br />
zëtva, zrtva, Ijëstve « échelle », màlilva, et également pljëtva « sar-
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 383<br />
clage » de pljëti, jèmatva « vendange » de jëmati ; kôlitva « échalassage<br />
» est dialectal, kajkavien et slovène, sur kôliti « planter des<br />
pieux, des échalas ». Pour stàtva « chevalet du métier à tisser », et<br />
slov. stâtva, c'est une forme réduite de stâtiva, slov. stâtiva (§ 1189) ;<br />
ôsive « harpon » et d'autres mots en -tva ont une origine différente<br />
(§ 205).<br />
Mais c'est surtout le slovène qui présente le suffixe, sous deux<br />
formes -tva et ~tev, et qui le garde productif, et de grande productivité<br />
dans la langue actuelle pour la formation d'abstraits tirés<br />
de verbes :<br />
brîtva et brîtev, jÇstva, klçtva et klçtev, pâstva, pîtva, sêtva (-tev),<br />
zçlva (-tev), zrlva (-tev) ; lêstva, bîtva (-tev) sans doute russisme ;<br />
et brâtva (-tev) « cueillette », plêtva (-tev) « sarclage », ptûtva<br />
et plîtva «radeau, flotteur», odêtva (-tev) «couverture», obûtva<br />
(-tev) « chaussure » ; stâtva pour stâtiva ; mlâtva (-tev) pour mtâtba,<br />
lâlva à côté de tâtba (§ 917) ; bêtva « tige, fétu » et bêtvo (§ 942) ;<br />
orâtva (-tev), sejâtev à côté de sêtva ; et berâtva à côté de brâtva,<br />
dajâtva (-tev) « don, prestation », trgâtva (-tev) « vendange »,<br />
vezâtva (-tev) « action de lier », posiljâtev « envoi, colis » ;<br />
gonitva (-tev), gostîtva (-tev), hranîtev «nourriture», lovîtva<br />
(-tev), toeîtev « action de verser, débit de boisson », zenîtva (-tev) ;<br />
et cenitva (-tev) «estimation», kolitev « échalassage », mlatîtva<br />
«battage (au fléau)», ptovîtva «navigation», resîtva (-tev) «délivrance<br />
», tvorîtev « formation », vrstîtev « rangement, succession »,<br />
et vezitev variante de vezâtev ; izkljueitev « exclusion », dotoeîtev<br />
« détermination », prirnozîtva (-tev) « acquisition (de la femme) par<br />
mariage », poostrîtev « aggravation », nasetîtev « établissement, colonisation<br />
», izvotîtev «choix», povrnltev «retour, restitution»; etc.<br />
§ 917. Suffixe -tïba. — Mais la productivité du suffixe -tva se<br />
manifeste encore sous une autre forme : -tïba, élargissement du<br />
suffixe -ïba, par substitution à -tva.<br />
Une finale -tïba est régulière dans des cas comme svçtïba<br />
« sanctification » de svçtiti. Mais on trouve en slavon serbe du<br />
xiv e siècle (Apostolaire de Sisatovac) svqtitïba I Cor., I, 30, Thess.,<br />
IV, 7, variante de svçtïba. Et en slavon, vieux russe et vieux<br />
serbe :<br />
znatïba « signe », oratïba pour oratva, gostitïba pour gostitva ;<br />
mlatitïba « battage (au fléau) » en regard de slov. mlatîtva ; et<br />
vrusitïba «battage (sur l'aire)».sur *vïrse-, en regard de slov.<br />
vrsîtev sur vrsi- (§ 435).
384 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
En russe : znat'bd « signe », myt'bâ pour v. r. mylva, pastbd,<br />
pust'bâ pour pûstva, sellt'ba pour selllva, zenit'ba pour zenitva.<br />
En tchèque : kletba, klatba pour v. tch. kletva, modlitba pour v.<br />
tch. modlitva, et zenitba comme svatba « noces ».<br />
En bulgare : berbâ et beritba « récolte », seitba « semailles ».<br />
En slovène : brâlba pour brâtva, zaklçtba pour zaklçtva, hranîtba<br />
et hranîtev, mlatîtba et mlatîtva pour mlâtba, svetîtba et svetîtva,<br />
vezîtba et vezîtev, zenitba et zenîtva ; et inversement mlâiva pour<br />
mlâtba, de mlâtiti. Le flottement de tâtva et tâtba « larcin » paraît<br />
remonter au vieux slovène du xi e siècle, d'après la graphie tatua<br />
à côté de tatba des Feuilles de Freising (§ 915).<br />
Mais c'est surtout en serbo-croate qu'on voit s'étendre le suffixe<br />
-tïba, -dba, avec une productivité assez comparable à celle de<br />
-tva, -tev en slovène :<br />
sjèdba (depuis le xvi e siècle) pour sjetva, et bjèlidba « blanchiment<br />
» (slov. belîlev), gôstidba pour gostitva, gùlidba « décorticage »<br />
de yùlili, hranidba (ancien et slov.), kàmidba « épluchage » de<br />
kàmiii, kHidba « essartage » (slov. kreîtev), mlàtidba (et slov.),<br />
plàvidba « navigation » (slov. plovîtva), pràsidba « ameublissement »<br />
de prâsili, pràsidba « demande (en mariage) » (slov. prosîtva),<br />
rèzidba « émondage » (slov. rezâtva), sèlidba « déménagement »<br />
(v. s. selilva), tvdridba « fabrication » (slov. tvorîtev), vrsidba (slov.<br />
vrsîtev) ; etc.<br />
§ 918. Origine. — La forme en -tev du slovène est une variante<br />
secondaire de -tva, qui apparaît uniquement au nominatif-accusatif<br />
singulier, le reste de la flexion étant gén. -tve, instr. -tvo, etc. On<br />
la trouve dès le xvi e siècle : molitva et molitev (et aussi -tvo, § 942) ;<br />
et elle est devenue la forme dominante dans les parlers et dans la<br />
langue littéraire. L'origine en est dans le flottement de flexion des<br />
nombreux thèmes en -y-, -uv- du type eérkev et cérkva, gén. eérkve,<br />
parmi lesquels les mots en -tev, -tva ne manquaient pas : blîlva<br />
« bette », lêiev et lêtva « latte », etc. (§ 205).<br />
Cette altération de -tva en *-tuv- se rencontre sporadiquement<br />
ailleurs : cak. ancien molitav pour molitva ; s.-cr. dial. klétav<br />
« serment », gén. klétvi, pour klêtva, et aussi proklétav « malédiction,<br />
proklétslvo » ; pol. klqtew pour klqtwa, tch. ploulev pour v. tch.<br />
plytva, prâslev pour prâstva et vrstev pour vrstva.<br />
Le suffixe -tva fournit des dérivés de verbes désignant l'action<br />
verbale, mais il pouvait présenter aussi au sens concret : britva<br />
« rasoir », v. pol. ptylwa et v. tch. plytva « nageoire », et slov. plûtva<br />
« radeau » en regard de plovîtva « navigation ». Les formes rares<br />
en lit. -tva, -Ivè du baltique n'apportent rien de clair, mais en slave
[§ 920] SUFFIXES FÉMININS<br />
385<br />
-tva est la substantivation en féminin d'un suffixe thématique<br />
*-two-, qui a donné également un masculin -tvu, un neutre -tvo,<br />
et de là -stvo, -ïstvo (§ 942).<br />
SUFFIXE -ynji<br />
§ 919. In vieux slave. — Le suffixe -ynji, gén. -ynjç (§ 154),<br />
a deux emplois différents. Il forme :<br />
I. Des abstraits d'adjectifs :<br />
blagynji « bonté », de blagu ; cçstynji (J. Ex.) ; dobrynji (J. Ex.,<br />
Pand. Ant.) ; glçbynji (Izb. Svjat.), de glçboku ; grçbynji (J. Ex.) ;<br />
grudynji ; llgynji, de lïgukû ; pravynji ; prostynji ; pustynji ;<br />
sporynji (Cyr. Jér.), detsporû« abondant » ; svçtynji ; sirynji (Ham.),<br />
de siroku ; tvrudynji (Hés. XVII, 30, Ham.).<br />
Et les élargissements de -osit en -ostynji (§ 906) :<br />
blagostynji, lïgostynji, milostynji, pravostynji.<br />
En slavon : gçstynji, Ijutynji, xudynji.<br />
II. Des noms désignant des femmes :<br />
rabynji « servante », de rabu, et :<br />
bogynji « déesse » ; kûnçgynji, de kunedzï ; sçsëdynji, de sçsëdû ;<br />
gospodynji, de gospodinu ; krïstijanynji, de krïstijan(in)u (§ 870) ;<br />
poganynji, de pogan(in)u ; seljanynji (Ham.), de seljaninu.<br />
Et avec des noms de peuples ou de villes :<br />
Egvptënynji, Elinynji, Samarjanynji, Solunjanynji, Somanitënynji,<br />
Svrofinikissanynji, Xanaanynji, Zidovynji (Upir') de<br />
Zidovinu, à quoi se joint Magdalynji « de Magdala, Marie-<br />
Madeleine » ; et chez Hamartole : Jediopljanynji, Jevrejanynji,<br />
Ijudëjanynji, Kozarynji, Manikëanynji, etc.<br />
Le slavon ajoute inokynji de inoku «solitaire, moine», m(u)nixynji<br />
et m(u)nisica «moniale» (§ 879), pokrutarynji «femme de<br />
boulanger, pokrutarï » sur *pokrçla «galette» (§ 762), jçdëcçdynji<br />
sur jçdëcçdinu «enfant de la maison» (§ 1215) ; le vieux russe<br />
bo(l)jaryni de bo(l)jarinù, gospodaryni, etc.<br />
Pour prëgynji « région montagneuse », opynji « singe », drënynji<br />
« cornouiller », voir plus loin, § 921.<br />
§ 920. Dans les langues slaves. — Le russe a, comme dérivés<br />
d'adjectifs, puslynja« désert » et« ermitage », tverdynja « forteresse »,<br />
kosynja (masc. et fém.) «louche, bigle», prostynja («masc. et fém.)<br />
13
386 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
« simple d'esprit, bêta » (pour prostynjâ « drap de lit », voir § 1089),<br />
et des slavonismes, gordynja « présomption », svjalynja « sainteté,<br />
choses saintes » ; et le vieux russe connaît un appellatif Dobrynja.<br />
Comme formation de féminins, le suffixe est toujours bien représenté<br />
: rabynja, bârynja, bojârynja, knjagînja, grafinja « comtesse »,<br />
inokinja et monâxinja, geroinja « héroïne », mais la forme productive<br />
est en -ka, -anka de -anin (§ 886).<br />
Le polonais garde pustynia « désert », swiatynia « sanctuaire » ;<br />
— comme féminins bogini « déesse », gospodyni « maîtresse de<br />
maison », mislrzyni « maîtresse », prorokini « prophétesse », et le<br />
suffixe reste productif en regard de masculins en -ca (§ 876) :<br />
dozorczyni « surveillante » de dozorca, radczyni « conseillère » de<br />
radca, wiadczyni « souveraine » de wiadca, wychowawczyni « mère<br />
nourricière » de wychowawca ; mais v. pol. cesarkini « impératrice »<br />
a été remplacé par cesarzowa, iotryni « coquine », féminin de iotr,<br />
par iotrzyca, et poseikini « messagère », przezdziatkini « femme sans<br />
enfant », smokini « hydre » de smok « dragon », sont de la langue<br />
ancienne. De Niemiec « Allemand », le féminin est Niemkini,<br />
mais à côté de Niemka, et l'on a régulièrement Angielka<br />
« Anglaise », mieszczanka « citadine » de mieszczanin, etc.<br />
Le tchèque a svalynë « sanctuaire », auquel est venu s'adjoindre<br />
kuchynë «cuisine» (§ 575), mais «désert» est pustina ; — les<br />
formations de féminins bohynë, hospodynë, ministrynë de ministr,<br />
rekynë de rek «héros» (ail. Recke), tchynë «belle-mère» en regard<br />
de tchân « beau-père » (§ 1094) ; et toute une série en -kynë : dârkynë<br />
de dârce « donateur », dozorkynë de dozorce « surveillant », jezdkynë<br />
de jezdec « cavalier », sprâvkynë (et sprâvcovâ) de sprdvce « administrateur<br />
», jmenovkynë de jmenovec « qui porte le même prénom »,<br />
ctitelkynë (et clitelka) de clilel « admirateur » ; et Rekynë « une<br />
Grecque », Nëmkynë, mais à côté de Nëmka, et couramment sousedka,<br />
Moravanka, etc.<br />
Le slovène a blaginja « bien-être », dragînja « cherté », pustînja<br />
« désert », et milostinja « aumône » ; — boginja, gospodînja, kneginja,<br />
prorgkinja, et un type toujours vivant de féminins : Içvinja<br />
« lionne », svâtinja de svât « invité à la noce », slûginja et slûzkinja<br />
« servante », boirînja (et bçtra) de bgtr « parrain », Zîdinja « Juive »,<br />
neëâkinja « nièce », vôjvodinja « duchesse », jundkinja « héroine »,<br />
mozâkinja « virago » de mozâk « homme fort », lenûhinja de lenûh<br />
« fainéant », rojdkinja « compatriote », brezotrôkinja « femme sans<br />
enfant », etc.<br />
Le serbo-croate a pûstinja, svétinja, grdinja « laideur, difformité »,<br />
et des dérivés nouveaux d'adjectifs, proklétinja « malédiction »,<br />
mèkinje (plur.) « son » sur mëk « mou », brïtkinja et brlckinja « sabre<br />
tranchant » sur brïtka, brlcka (sâblja) ; des appellatifs féminins,<br />
Dràginja, Krstinja, etc., anciennement des masculins Draginja,
[§ 875] SUFFIXES FÉMININS 387<br />
Mekinja ; — bàginja, etc., et un type productif en -inja et surtout<br />
-kinja : dôjkinja « nourrice », dvôrkinja « femme de ménage »,<br />
sluskinja « servante », junàkinja « héroine », vrsnjàkinja « femme<br />
du même âge », zemljàkinja « compatriote », jednàljetkinja «(rejeton,<br />
animal) d'un an », gimnàzistkinja « lycéenne » ; Ûëhinja « une<br />
Tchèque », Vlàhinja « une Yalaque », Bêckinja « une femme de<br />
Vienne, Bêë », Grkinja, Srpkinja, Àrapkinja, Fràncuskinja, etc.<br />
Le suffixe s.-cr. -otinja est à part (§ 903).<br />
Le bulgare a puslinja, svetinja ; — et boginja, robinja, Vlahinja,<br />
Pomakinja « femme de Pomdk » ; mais normalement -ka : Bâlgarka<br />
de Bâlgarin, etc.<br />
§ 921. Origine. — On admet que le suffixe -ynji résulterait<br />
d'une superposition de -nji à -y, qui forme des noms de femmes et<br />
aussi des abstraits (§,203). Mais cette explication se heurte à une<br />
difficulté : le slave ignore un suffixe -nji à flexion spéciale, et<br />
reconnaissable, de thème féminin en -ï : -jâ- ; le baltique ne le<br />
connaît que dans v. lit. viespatni « maîtresse de maison », féminin<br />
de viespatis, et mod. viesni, de viesis «hôte », lette viesis (§ 155) ;<br />
et dans les langues indo-européennes il est attesté : skr. pàtnï,<br />
gr. 7TOTvia, mais sans jouer un rôle bien important.<br />
Il n'y a pas d'exemple valable en slave d'un élargissement de<br />
-y en -ynji : dans un cas comme pastoruky « belle-fille, fille d'un<br />
premier lit » en slavon et s.-cr. ancien pastorkinja, on a deux<br />
formations d'époque différente, l'une en -y sur pastorùku (§ 35),<br />
l'autre sur pâstorak avec le suffixe productif -(k)inja du serbocroate,<br />
et à côté de pàstôrka.<br />
On a dans les langues slaves un petit type en -ynji qui sert à<br />
désigner les fruits de certains arbres : v. si. drënynji « cornouille »<br />
de drënu « cornouiller »,, qu'on retrouve sous des formes un peu<br />
évoluées dans s.-cr. drènjina (depuis le xvi e siècle) et slov. drenina ;<br />
v. tch. hlohyni (xiv e s.), slov. et bulg. gloginja, s.-cr. gloginja, « fruit<br />
de l'aubépine, giogû » ; v. tch. brëkynë et mod. brekynë, s.-cr. brèkinja<br />
« corme », de tch. brek, etc. ; tch. mukynë, s.-cr. mùkinja « alise »,<br />
s.-cr. dùdinja « mûre », smrèkinja « genièvre ». Ce n'est qu'une<br />
extension du suffixe de féminins -ynji à des arbres portant des fruits<br />
et conçus comme êtres femelles. Mais trois formes isolées appellent<br />
des explications :<br />
Pol. jaskinia et tch. jeskynë « antre, grotte », où il est tentant,<br />
mais conjectural, de voir une variante de v. si. jazvina « trou,<br />
terrier» (§ 892) qui se ramènerait à un passage de jazv- à jaskpar<br />
contamination des thèmes *aiz- et *aisk- d'origines différentes<br />
(§ 75).<br />
V. si. prëgynja-, mot qui dans tous les exemples en vieux slave
388 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
(Supr. 2619, Ham. 3638, Hom. Mih. 192 r f, 1. 23) et en slavon est<br />
associé à gora « montagne » et a nettement le sens de « région<br />
montagneuse : il n'a donc rien à voir avec un *prë-gyb-nja supposé<br />
d'après s.-cr. prèginjati qui signifie « plier, courber » et qui est<br />
l'imperfectif de prègnuti secondaire pour pregibati. Le mot se<br />
retrouve en vieux polonais dans la toponymie : Pregini dans la<br />
bulle de 1136, Przeginia en 1273. Le rapprochement s'impose avec<br />
got. fairguni « montagne » (neutre en *-yo-), et il ne peut s'agir<br />
que d'un emprunt au germanique. On a un autre emprunt dans :<br />
V. si. opynji (Gr. Naz.) « singe », qui est v. h. a. affo, fém. affin<br />
(mod. Affe, Âffîn), v. isl. apynja, avec adaptations en slave -ynji<br />
du suffixe de féminin got. -ini, v. h. v. -in et -un, v. isl. -ynja de<br />
*-unjâ.<br />
Ces deux emprunts doivent suffire pour montrer que le suffixe<br />
slave -ynji, qui ne s'explique pas en slave, est pris au germanique,<br />
où divers suffixes en -n- sont productifs pour la formation d'êtres<br />
féminins d'une part, d'abstraits d'adjectifs d'autre part : v. h. a.<br />
kuning « roi », fém. kuningin, got. Saur « Syrien », fém. Saurini,<br />
fullô « plénitude » de fulls « plein ». Les féminins en v. h. a. -in ont<br />
la flexion en *-injâ-, et got. Saurini conserve le nominatif singulier<br />
en *-m qui est si caractéristique pour le slave. Comme en d'autres<br />
cas, ainsi pour le suffixe turc -lik, -liik, etc., ramené à s.-cr. -luk<br />
(§ 1195), le slave a réduit à une forme unique les formes diverses<br />
du germanique : du rapport v. h. a. affo, fém. affin, de *-o(n),<br />
*-ôn- et -en-, fém. *-enjâ, il a tiré un féminin *-onja-, d'où -ynja-<br />
(§ 54), qu'il a généralisé.<br />
Ainsi v. si. kûnçdzï, fém. kûnçgynji, conserve exactement,<br />
à l'adaptation près du suffixe féminin, le vieux-haut-allemand<br />
kuning, fém. kuningin ; et le rapport tch. jezdec, fém. jezdkynë,<br />
de -ïcï, -ïky-, continue à sa façon l'opposition du type v. si. -lïdza :<br />
lïgùku (§ 19).<br />
L'accent, dans les formes anciennes, est paroxyton sur le suffixe :<br />
r. svjatynja, s.-cr. svétinja.
CHAPITRE XXIII<br />
SUFFIXES NEUTRES<br />
§ 922. Suffixe -ïce: — C'est la forme neutre en regard de masc.<br />
-ïcï et fém. -ïca, -ica, et qui donne des diminutifs de neutres.<br />
En vieux slave :<br />
cçdïce de cedo « enfant » ;<br />
vratïca (Ham.) de plur. vrata « porte » ;<br />
brasïnïce « viatique, hostie » de brasïno « farine, provisions de<br />
route » (§ 1079);<br />
ok(u)riïce (Pand. Ant.) de okno «fenêtre» (§ 1074);<br />
slovïce et slovesïce (Athan.) de slovo ;<br />
imenïce (Athan.) de imç ;<br />
mladçtïce « petit enfant » de mlade ;<br />
imëniice « le pécule » de imënije « l'avoir, les biens » (r. imén'ice<br />
« petit bien », s.-cr. imanjice).<br />
plesnïci (duel) « sandales » de plesnë « plantes du pied » (§ 1074).<br />
Le mot kolïce Ham. 14026, de kolo « cercle », est sûrement le russe<br />
kol'cô « anneau » substitué à okolije (§ 925).<br />
Dans slunïce « soleil » et srudïce « cœur », . -ïce n'est qu'un<br />
élargissement ; et aice est la forme du nom de l'« œuf », sans valeur<br />
diminutive, en vieux slave (deux ex. en rédaction vieux-slave) et<br />
dans bulg. jajcé, r. jajcô, slov. jdjce, tch. vejce (§ 77), mais le mot<br />
de base aje (§ 1021) se conserve dans s.-cr. jdje, pol. jaje, sor. jajo,<br />
jéjo, et il est attesté aussi en vieux slave dans plur. *aja Athan.<br />
(IV, § 2).<br />
Les textes slavons et vieux-russes sont plus riches en diminutifs,<br />
et les formes en -ïce y sojit nombreuses. On citera seulement :<br />
mëslïce, selïce, sladïce, vinïce, kopylïce, olovïce, zelëzïce, pokryvalïce,<br />
pïsçtïce de pïsu « chien » et pïsç « chiot », kameniice de<br />
kamenije « pierres », vuzglaviice de vuzglavije « oreiller », potruz-<br />
(d)eniice de polruz(d)enije «effort, travail».
390 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
§ 923. Dans les langues slaves. — En russe, le type des diminutifs<br />
en -ïce est toujours vivant :<br />
kol'cô de l'ancien kolo, kryl'cô de krylô, vincô de vinô, bolôtco<br />
de bolôlo, kolescô de kolesô, korytce de korylo, sedél'ce de sedlô,<br />
zérkal'ce de zérkalo, vereténce de veretenô ; pis'mecô de pis'mô,<br />
ruz'ecô de ruz'ë, et pal'tecô de l'emprunt pal'tô « paletot » ; pldt'ice<br />
de plât'e, et mâslice de mdslo, kréslice et krésel'ce de kréslo.<br />
L'accent du diminutif est ordinairement celui du mot de base,<br />
mais non toujours : derevcô de dérevo (plur. derév'ja et derevâ).<br />
En slovène, le type est également productif :<br />
kçlce de kolô, krilce de krllo, zrnce de zrno, kolénce de koléno, kopltce<br />
de kopito, ogleddlce de ogleddlo ; ôkence de 6k no, pisemce de plsmo,<br />
véselce de véslo ; méstece et méslce de mësto, gnézdece de ynézdo ;<br />
jdjëece de jdjce, sô(l)ncece de sô(l)nce, srëece et srëce de srcq ;<br />
bremçnce et brémce de brème, gén. bremçna ; detç(t)ce (et detçsce,<br />
comme en serbo-croate) de déte, gén. detçta ; oëçsce et ôëce de okô,<br />
gén. oëçsa ; etc.<br />
En serbo-croate, même productivité :<br />
dfvce de drvo, pérce de pèro, vinee de vino, zrnce de zrno ; zvônce<br />
de zvôno «cloche» (§ 727), plur. zvàna ; krilce et kriàce de krllo,<br />
groce de grlo ; puce « bouton », isolé de pulo « entrave, fers » ; lisce,<br />
ancien liëce, de lice, osce de ôko ; vrelénce de vretèno, ôstrvce de<br />
ôstrvo, pisàmce de plsmo, rebàrce de rèbro ; brasànce de bràsno, et<br />
de là blâtânce de blàto, vratdnca de plur. vrdta, psetance de psëlo ;<br />
sjeménce de sjëme, et de là staklénce de stàklo, djeténce de dijèie,<br />
jarénce, prasénce, etc. ; srdâsce de srce, sûnâsce de sûnce, et de là<br />
brdâsce de brdo, psëtâsce de psëto, ustàsca de plur. ûsta, vratàsca<br />
de vrdta ; djètesce, ancien djele(t)ce, de dijète, gén. djèleta, jàresce<br />
de jàre, gén. jàreta, et de là tjëmesce de tjëme, gén. tjëmena, vïmesce<br />
de vïme — le serbo-croate du xvi e siècle a les trois formes djetece,<br />
djeteëce et djetence ; zdrdvljice de zdrdvlje, anciens zdravje, zdrav-<br />
(j)ice (§ 63) ; cvïjecïce de cvïjece, collectif de cvljet, anciens cvëtje,<br />
cvët(j)ice; et prûcice du collectif prûce de prût, de là poljice de<br />
p'ôlje.<br />
Le bulgare a selcé, vince, brasâncé de brasnô, slânëice de slânce,<br />
brdtence et brd(t)ëence, deténce, momiëence « fillette » de momlëe; etc.<br />
Mais dans les langues du groupe du nord-ouest le suffixe -ïce<br />
a plus ou moins complètement disparu devant -(û)ko nouveau.<br />
§ 924. Suffixe -uko. — Ce suffixe, sur thème en *-«-, est parallèle<br />
à -ïce sur thème en *-i-, mais il apparaît très rare au début, parce<br />
que les substantifs neutres en *-u- étaient passés en slave au genre<br />
masculin (§ 159). On le trouve en vieux slave uniquement dans :
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 391<br />
(j)abluko «pomme» (Gr. Naz.), r. jâbloko, slov. jâbolko, etc.,<br />
secondairement s.-cr. jàbuka avec traces de l'ancien jàbuko, qui<br />
suppose un neutre *âblu- (§ 174). Et en slavon tardif dans :<br />
klçbuko « pelote », qui est s.-cr. klùpko, slov. klobkô, v. tch.<br />
et mod. klubko, évidemment primitif pour le masculin r. klubôk,<br />
pol. klçbek ; le substantif de base est en slavon klçbo, faiblement<br />
attesté, mais confirmé par bulg. klâbô, ailleurs r. klub, gén. kluba,<br />
pol. kiqb, tch. kloub, mot d'intonation rude sans étymologie.<br />
En bulgare, -ko forme des hypocoristiques de noms de parenté,<br />
qui servent comme vocatifs : s'inko de s in, brâiko, bâïko « frère<br />
aîné », tdtko « père » ; et masc. lâzko « menteur ».<br />
Le serbo-croate, qutre klùpko, a de même des hypocoristiques<br />
sinko (vocatif), câcko « papa », brâjko « frère », ùjko « oncle maternel<br />
», etc., et debéljko,
392 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
et dial. serdeczko de serce, jabiuszko de jabtko, dzieciqtko de dzieciç,<br />
jagniqïko de jagniq., niemowlqtko de niemowlç « nourrisson », etc. ;<br />
et des hypocoristiques : bralenko, bralunko, bratulenko de brat,<br />
ojczenko de ojciec « père », v. pol. Siawko, Swiçtko.<br />
L'état du tchèque est le même : en dehors de slunce et srdce,<br />
drevce est à côté de drivko, slovce et stâdce sont livresques pour<br />
slûvko, slovicko et stâdeëko, et l'on a mësteëko de mësto « ville »<br />
et misteëko de misto «place» (§ 103) pour v. tch. mëstce, tilko et<br />
iëliëko pour v. tch. tëlce de tëlo, okénko et okéneëko pour v. tch.<br />
okénce de okno, bidélko pour bidélce de bidlo « perche », zeliëko pour<br />
zelice de zell « chou » ; et oëko, vinko, lûzko de loze, zrcddko de zrcadlo,<br />
vëdérko de vëdro, kurâtko de kure, holoubâtko de holoubë, etc.<br />
Le sorabe a également h. sor. drjewko, winko, sydlesko de sydio<br />
«siège», siow(i)cko de siowo, sionëko de sionco, etc.<br />
En polabe, on reconnaît -ïce conservé dans *korytce en regard de<br />
*jabluko.<br />
Dans les hypocoristiques, le développement de -(u)ko peut<br />
avoir son point de départ dans syn(û)ko pour synukù (§ 839), avec<br />
la substitution expressive au masculin du genre neutre ou féminin<br />
(§ 208). Dans les diminutifs, il s'agit d'un fait parallèle, et pour<br />
les mêmes causes, à la substitution du masculin -ùku à -ïcï ( § 840)<br />
et du féminin -uka à -Ica, -ica (§ 886).<br />
SUFFIXE -ïje<br />
§ 925. Vieux Slave. — De la masse des formations en v. si. -ije,<br />
-ïje se dégagent quelques types.<br />
I. Collectifs (§211) :<br />
agnçdije (J. Ex.) de *agnçdu (§ 1005), s.-cr. jàgnjed «peuplier<br />
noir » ;<br />
agodiëije (Gr. Naz., Théod., Ps. LXXVII, 47) de agodica « mûre »<br />
(agodiëina « mûrier », § 892) ;<br />
borije ( J. Ex.) de borû « pin » ;<br />
brëstije (J. Ex.) de brëstu « orme » ;<br />
d(ï)racije « épines » (Upir') de d(ï)raëï (§ 854) ;<br />
dçbije de dçbu « arbre » ;<br />
groznovije (Supr.) et grozdije, groznije (Cosmas) de grozdù, groznu<br />
«raisin» (§ 1072) ;<br />
- jelije (J. Ex.) de jela « sapin » ;<br />
kamenije « pierres » ;<br />
korenije « racines » ;<br />
kçpinije de kçpina « (buisson de) ronces » ;<br />
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 393<br />
kremenije (Izb. Svjat.) de kremenï « silex » ;<br />
listvije «feuilles» (§ 160) ;<br />
lozije de loza « sarment de vigne » ;<br />
mladicije (J. Ex.) « pousses » de mladica, s.-cr. mlàdica, mlàdika<br />
(§ 1045);<br />
mramorije (Izb. Svjat.) de mramorû «marbre»;<br />
perije de pero « plume » en slavon et dans le dérivé v. si. perijatu<br />
(§ 987) ;<br />
plodovije (Hom. Mih. 218 va ) de plodu « fruit » ;<br />
prçtije de prçlu « baguette » ;<br />
rabije (Athan., I, 23020, etc.) de rabu « serviteur » ;<br />
razdije, rozdije, de razga, rozga ( § 70) « sarment » ;<br />
remenije (Ham.) de remeni « courroie » ;<br />
sadovije (J. Ex.) de sadu « plant » ;<br />
siiije (Gr. Naz., Hçim.) de situ «jonc » (§ 1160) ;<br />
smokuvinije (Ps.) « figuiers » de smokuvina, et smokùvicije (Upir')<br />
de smokuvica ;<br />
smrëcije (Théodoret) de smrëëï« conifère, cèdre » ;<br />
sosnije (J. Ex.) de sosna «pin » ;<br />
stïblije de stïblo « tige » ;<br />
sutije (Hom. Mih. 147 vb ) de sutû « rayon de miel » ;<br />
sïpucije (Upir') de sïpùku « grenadier » ;<br />
tisije (J. Ex., Théod.) de tisu « if » ;<br />
topolije (J. Ex.) de topol- (§ 1062) « peuplier blanc » ;<br />
trepeticije (J. Ex.) de *trepetica «tremble», s.-cr. trepèî(lj)ika<br />
(§ 1045) ;<br />
trlstije de trïstï « roseau » ;<br />
trupije de trupu « cadavre » ;<br />
trunije de trunu « épine » ;<br />
vëije de vëja et vëtvije de vëtvï (§ 160) « rameau » ;<br />
viniëije (Izb. Svjat.) « sarments de vigne» de " vinica, slov.<br />
vinîka « vigne sauvage » ;<br />
vrubije de vruba « saule » ;<br />
xvrastije (Upir') de xvrastu « menu bois, branches sèches »<br />
(§ 775) ;<br />
zelenicije (Upir') de zelenika «buis» (§ 1045) ;<br />
zïzlije de zïzlu « baguette, bâton ».<br />
On ajoutera :<br />
bylije « plante(s), herbe(s) », qui a un sens assez net de collectif<br />
en regard de bylï (§ 712)', avec un singulatif (§ 887) s.-cr. bîljka<br />
!< une plante, une herbe », slov. bîlka « une tige d'herbe » ;<br />
zelije « légumes (verts) », et r. zélie « herbes », zél'e « herbe vénéneuse,<br />
poison », s.-cr. zêlje « légumes, chou », etc., bulg. zélé « chou »<br />
et singulatif zélka « tête de chou », en regard de zelï attesté en<br />
slavon russe ( § 713), r. dial. zel' « blé en herbe », slov. zçl « herbe ».
394 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Et voir brlselije, § 931, et usnije « cuir », § 980. On doit supposer<br />
que okolije Ham. 14026, variante de kolïce (§ 922), est la leçon<br />
primitive traduisant le grec potaxoi « glands » (garniture de<br />
manteau, Ex. XXVIII, 33) et le collectif de okolu « cercle, bordure,<br />
r. okôlys » (§ 741). Mais ovostije Hés. LXXVII, 47 n'est qu'une<br />
altération de ovoste « fruit » (§ 1021), qui a par lui-même un sens de<br />
collectif.<br />
En slavon, on trouve beaucoup d'autres formes : drëvije de<br />
drëvo « arbre », perije de pero « plume », stoborije « colonnade »<br />
de stoboru. (§ 1123), keramidije de keramida «terre cuite, tuile»,<br />
svkaminije de svkamina « mûrier » (Ps. LXXVII, 47, var.), etc.<br />
Un collectif cvëtije est tardif, sur cvëtu « floraison, fleur », lui-même<br />
à valeur de collectif avec un singulatif cvëtïcï (§ 835).<br />
§ 926. — II. Abstraits d'adjectifs :<br />
bezgodïnije (Gr. Naz.) àxoupia, de bezgodïnu. « inopportun » ;<br />
gobïdzije « opulence » de gobïdzï ;<br />
izuëstije «connaissance exacte» (Izb. Svjat., Hés. XXVI, 1),<br />
de izvëslu « bien connu » ( § 408) ;<br />
laskrûdije (Gr. Naz.) «gourmandise» (et laskrudï, § 711) de<br />
laskrudû ;<br />
licemërije « hypocrisie » de licemëru ;<br />
naprasnije « soudaineté » de naprasnû (§ 1071) ;<br />
neëïstivije « impiété » (Ham.) de necïstivu (et neëïstije) ;<br />
neistovije (Izb. Svjat.) « furie » de neislovû ;<br />
obilije « abondance » de obilu ; et izobilije (Gr. Naz., Izb. Svjat.)<br />
de iz obila, adj. izobilïnu (§ 1219) ;<br />
ostrije « le tranchant » de ostru ;<br />
posivije (Ham.) de posivu « convenable » (§ 1182) ;<br />
pravïdivije (Ham.) « justice » de pravïdivu ;<br />
prëmije « rectitude » (Athan., V, 1) de prëmu ;<br />
pronyrije « perversité » de pronyru ( § 802) ;<br />
prostranije « latitude » de prostranu ;<br />
rïvïnije « jalousie » de rïvïnu ;<br />
sùdravije « santé » ;<br />
svçlije « sanctuaire » (Ham.) ;<br />
timënije «limon» de l'adjectif timënu (Ps., voir § 980) ;<br />
ubozije (Pand. Ant.) « pauvreté » ;<br />
veliëije « grandeur » ;<br />
veselije « joie ».<br />
Et sur composés possessifs (§ 1227) : milosrudije « miséricorde »,<br />
usrudije « empressement ».<br />
Sur adjectifs invariables en -ï (§ 277) : razliëije «diversité» de
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 395<br />
razlicï ; udobije (Athan.) « ce qui est approprié » de udobï « facile,<br />
approprié », et voir podobije, § 930.<br />
En regard d'adverbes en -ï (§ 1200) : oblisije (J. Ex.) « superflu »,<br />
sur oblisï ; pogodije (Athan., I, 2604, etc.) «conséquence logique»<br />
sur pogodï ; ukromije (J. Ex.) « ce qui est à part », na ukromije<br />
(Ham.) « à l'extrême », sur ukromï, na ukromï ; sçprotivije « opposition,<br />
révolte» (J. Ex., et Supr. 30412, lire sçprotivi imû<br />
TT]V àvTt0£
396 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 927]<br />
lixoimije « cupidité, •Kheove.fya. » ;<br />
velïjadife (Ham.) «Sr/payla ;<br />
velikolëpotije « magnificence, jAsyaXoTCpsTcsia » ;<br />
blçdoljubije « amour de la luxure », bratroljubije «piXaSsXçia,<br />
ëçdoljubije (Gr. Naz.) quXoTsxvtoc, et ëlovëko-, mçze- (Athan.), niste-,<br />
skvrunïno-, slavo-, slastoljubije (Pand. Ant., Virg.) YJSOTOXQSIOC,<br />
stranïnoljubije et Ijubostranïnije çnXoÇsvia, vluxvoljubije « amour de<br />
la magie » ;<br />
cëlomçdrije trwçpocjiSvv) ;<br />
jedinomyslije (Pand. Ant.) TO ôp:5cppov ;<br />
cçdonenavistije (Hom. Mih. 221 va ) « haine des enfants, [xiooTexvta »,<br />
ëlovëkonenavistije (Virg.) jAKTavOpwraa ;<br />
blagonravije (Gr. Naz.) « bonnes mœurs, àpsTT) » ;<br />
blagorodije et dobrorodije sôyéveia ;<br />
munogorazliëije « grande diversité, 7toixiXia » ;<br />
bogorazumije 0soyvco
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 397<br />
§ 928. — IV. Composés à préposition comme premier terme. Ces<br />
composés sont tirés de locutions prépositionnelles, bezvodije<br />
« manque d'eau » de bez vody « sans eau », podûnozije « marchepied »<br />
de podu nogojç « sous le pied ». Le type est vivant dans les langues<br />
slaves, mais dans les exemples des textes vieux-slaves les calques<br />
du grec ne manquent pas :<br />
bez- : bezblaznije (Izb. Svjat.) «absence d'erreur», bezbojaznije<br />
« absence de crainte », besëinije xxxrxarxmx, XTX^LX, bezdunije<br />
« abîme, afiuo-cxoç », beskvasije (I Cor., V, 8) rà x^up.x, bespeëalije<br />
(Izb. Svjat.) à^spifxvta, besùmrutije xQxvxoix, etc. ; une cinquantaine<br />
de composés, et l'on ajoutera des formes négatives en bez- de<br />
substantifs verbaux : bezimënije àvu~ap|toc (Hés. LXXVII, 48),<br />
àKT7)[xocT(iv7) (Pand. Ant.), bezistïlënije à
398 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
et « pan d'un vêtement » (pour okrilije, voir § 930) ; vûzmïzdije<br />
« rétribution », de vuz et mizda ; et slavon vuzglavije TtpocrxsçdcXai.ov<br />
« oreiller », r. v(o jzgolôv'e (v. si. vûzglavïnica).<br />
za- : en slavon zagorije « ce qui est derrière les montagnes »,<br />
et abondamment dans les langues slaves, r. zdgor'e, zdberez'e,<br />
zâgorod'e, zamôr'e, etc.<br />
mezdu- : mezdumërije « intervalle » ; mezdupleslije (Hés. XC, 4)<br />
et mezduramije (Ps.) xà [xs-ràçpsva « le haut du dos » ; Mezdurëëije<br />
« Mésopotamie, MsowtoTocfjia ».<br />
Et srëdu- pour srëdo- (§ 1219) sur le modèle de mezdu- : srëdudvorije<br />
TO [xécrauXov « cour intérieure ».<br />
Et voir les autres composés à premier terme préposition, § 1219.<br />
§ 929. Autres formations. — Sur substantif :<br />
sunije èvô7mov « songe » sur sunû UTCVOÇ « sommeil » ;<br />
ustije (Upir') « embouchure » sur usta « bouche » ;<br />
utrije sur (j)utro « matin » dans la locution na utrija « au matin,<br />
le lendemain », exceptionnellement utrije Supr. 34819, plur. utrija<br />
348-,. 8, mais par reprise de na utrija 34817 ; bien distinct de l'adjectif<br />
dérivé qui est utrëi (§ 957), et ce peut être un ancien dérivé<br />
d'adjectif, si jutro a son origine dans un dérivé en -ru du thème<br />
jut- (§ il 16) ;<br />
brïnije «boue », sur brlna (§ 1075), peut être interprété comme<br />
un collectif, comme bylije et zetije ( § 925) ;<br />
razumije (Pand. Ant., Ham.) sur razumû «intelligence», et<br />
nerazumije, bogorazumije (§ 927) ;<br />
pravïdije (Ham. 30022) et nepravïdije, de (ne)pravïda, à côté de<br />
pravïdivije (§ 926) ;<br />
sujetije (Pand. Ant., Hés. IX, 4) de sujeta « vanité » ;<br />
tûstetije (Pand. Ant.) de tusteta ;<br />
zulobije (Upir', Ham.) sur zuloba et zûlobï (§ 913) « méchanceté » ;<br />
çdolije « creux, vallée » de çdolï (§ 717) ;<br />
pomostije « secours » dans la locution na pomostija Supr. 1519,<br />
15113, sur pomostï ;<br />
pustosije (Ham.) «vanité» sur pustosï, locution vu pustosï «en<br />
vain » ;<br />
vuzvitije « profit, gain » à côté de vuzvitï (§ 1168) ;<br />
zavistije (Ham.) de zavistï « envie » ;<br />
btagodëtije (Ham.) et blagodatije (J. Ex.) sur blagodëtï, -datï<br />
« grâce » ;<br />
pogybëtije et prëpogybëlije (Ham.), sur pogybëtï et prëpogybëlï<br />
TOxvwXsOpia ;<br />
izgrëbije (Virg.) de izgrëbi (plur., § 714) « étoupe », où l'on peut<br />
voir un collectif ;
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 399<br />
znamenije « signe » sur *znamç ( § 186) ;<br />
pladïnije sur pladïne « midi » (§ 189), et prëpladïnije qui suppose<br />
un verbe comme le slavon pladïnovati, s.-cr. plândovati « faire la<br />
sieste » et une forme à préverbe pré- comme r. perenoëevâl' « passer<br />
la nuit » ;<br />
polùspçdije « demi-boisseau » (Ostr., variante de salu, gr. OTCTOV),<br />
de polu et spçdu ;<br />
sûvrùstije « ce qui est de même sorte » (Vie de Constantin,<br />
chap. X), interprétation de X
400 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
s.-cr. ancien raspuliti « mettre sur des chemins différents », postverbal<br />
ràspût ( § 766) ;<br />
nasilije «violence» et usilije «effort» (Pand. Ant.), sur nasiliti<br />
« faire violence » et le slavon usiliti « donner la force » ;<br />
otisije « calme » sur otisiti, v. si. otisati « calmer » ;<br />
vuzakonije de vuzakoniti « mettre en loi » ;<br />
navodije «inondation» est à part du verbe navodïniti (§ 176),<br />
et de même le slavon povodije à côté de v. r. povodï et pol. powôdz<br />
« inondation, torrent », s.-cr. pàvodanj, n'est pas en regard d'un<br />
verbe. Mais voda a pris l'aspect de postverbal d'un verbe -voditi<br />
qui, pouvant difficilement se maintenir devant voditi itératif<br />
de vesti, se rencontre rarement : r. dial. navôdit' « verser de l'eau »,<br />
slov. povodîti se « devenir eau ». Pour tch. povodi « bassin d'un<br />
fleuve », slov. povôdje, c'est un dérivé de locution du type de<br />
pomorije (§ 928).<br />
§ 931. Mots isolés :<br />
kopije « lance » est sur un thème kop- qui doit être celui du verbe<br />
kopati, lette kàmpt « saisir », lat. capiô (§ 713), et le mot peut être<br />
rapproché du grec XCÛTCY) « ce qu'on saisit, manche », en écartant<br />
XOTOXVOV « épée » sur XOTCTSIV « frapper, couper ».<br />
brïselije « tessons, briques » a l'aspect d'un collectif en regard<br />
de bruselï (Théodoret) « plaque (de pierre), dalle » ; très mal expliqué<br />
par rattachement à la racine brûs- (§ 754), ce doit être un mot<br />
d'emprunt.<br />
orçdije « affaire », r. orûdie (« instrument »), l'est sûrement :<br />
sans rapport acceptable avec le thème rçd- (§ 808), c'est le vieuxhaut-allemand<br />
ârundi « message », neutre en *-(i)yo-, v. angl.<br />
cêrende et mod. errand. Le mot signifie en vieux russe « affaire de<br />
justice », avec verbe orudovati « avoir affaire avec », et en vieux<br />
slave « réponse (à porter) » dans na orçdije sic, ùnoxpiGiv Supr.<br />
29622, verbe *orçdujçste (altéré en çrod-) èra unoxplasi « pour<br />
(donner) une réponse » Supr. 14527.<br />
orçzije « arme », qui apparaît avec un sens collectif, mais tout en<br />
possédant un pluriel, ce qui indique un abstrait plutôt qu'un<br />
collectif, serait comparable à lit. ap-rehgti « équiper », postverbal<br />
âpranga « équipement », si le préverbe o- ne gardait pas régulièrement<br />
la forme ob- devant r (§ 83). C'est donc sûrement aussi un<br />
emprunt, de source inconnue ; pour orgie- en composition, voir<br />
§ 1216.<br />
usnije « cuir » (Éphrem), voir usmënu, § 980.<br />
zaskopije « soupçon », avec un adjectif zaskopivû « astucieux »<br />
(§ 995), peut s'expliquer par rapprochement avec gr. axéirrsadou<br />
« examiner », OXOTOÇ « surveillant », mais on peut aussi le rattacher<br />
au thème si. (s)cëp- «fendre», baltique skep- (§ 748), d'après r.<br />
zaceDit' « accrocher », zacépka « chicane ».
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 401<br />
§ 932. Formes élargies. — On trouve -ovije sur thème de pluriel<br />
en -ov-, ainsi sadovije, -ivije sur adjectif en -ivû, ainsi pravïdivije.<br />
Trois élargissements du suffixe sont importants : en -ïstvije, voir<br />
§ 939, et en -nije et -tije.<br />
L'élargissement en -nije est celui des substantifs verbaux en<br />
-anije et -enije (§ 413), catégorie morphologique régulière, où il<br />
n'y a à signaler que l'anomal unynije « abattement » de unyti (§ 519).<br />
L'élargissement en -iije a l'extension plus réduite du participe<br />
passé passif en -tu (§ 408), et on peut dresser la liste de ses formes<br />
en vieux slave :<br />
-ëçtije, -jçtije, -klçtije, -pçlije ;<br />
u-bitije, vizz-litije-, sun-itije, pitije, zitije ; est à part vuzvitije<br />
(§ 929);<br />
pëtije, sëtije ; '<br />
cuti je (J. Ex.), slutije, et slavon rjutije ;<br />
bytije ;<br />
u-mrûtije, avec réfection en umrutvije sur l'adjectif mrûtvu,<br />
zrutije ;<br />
otvrustije ; sïstije, passant à sïstvije du type en -ïstuije ; en slavon<br />
jastije (§ 959).<br />
On trouve un petit développement de -tije sur thème verbal<br />
sans participe en -tu en regard :<br />
vinodatije (Supr.) oîvoSocrla « don du vin » ;<br />
suvëdëtije (J. Ex.) « ce qui fait connaître » ;<br />
et chez Hamartole xranitije cpuXaxY) (var. xranenije), upoluëatije<br />
6720 TU'/jj (var. -ëenije), dobroupolucitije suSai^ovioc (var. -ëenije).<br />
Mais tvoritïe Cloz. 2 a , 2o n'est qu'une faute pour tvoriti e.<br />
Un cas spécial est s celui du substantif verbal substitut de<br />
l'infinitif fléchi (§ 413) : po ostatii (Supr.) «après être resté», po<br />
upraznitija (sic, Athan.) jxstk to xaTapyvpar, « après avoir aboli ».<br />
§ 933. Le suffixe dans les langues slaves. — Sa productivité<br />
se maintient, à ce point qu'en rédaction slavonne on rencontre<br />
filosofije de gr. (piXoaocpiat. et fisiologije de fvcnoXoyia, mais seulement<br />
dans les instrumentaux fitosofïjemï Ham. 37725 comme bogoëïstïjemï<br />
qui précède, fisi logijemï Ham. 14414 comme rodoslovijemï<br />
qui suit.<br />
En russe, on a les collectifs : dub'ë « gourdins » de dub « (bois<br />
de) chêne» (dubina «gourdin»), loskût'ë «chiffons» de tôskut,<br />
et sur noms de personnes, dans la langue populaire, un petit type<br />
bab'ë « les femmes », soldat'è « les soldats », duraë'ë « tas d'imbéciles »,<br />
les collectifs ayant par ailleurs donné un type de pluriels masculins
402 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
en -'ja : prut «verge», plur, prût'ja (§ 138) ; — les dérivés de<br />
composés et de locutions : dolgolëtie « longévité », kosnojazyëie<br />
« bégaiement », vol'nodûmie « libre-pensée », izobilie « abondance »<br />
de v. si. izù obila « en abondance », bezdénez'e « pénurie d'argent » ;<br />
pomôrie, -r'e et poberéz'e « littoral », zabolôt'e « région de l'autre<br />
côté d'un marais », zaozér'e « de l'autre côté d'un lac », Zakavkâz'e<br />
« de derrière le Caucase », vzgôr'e « colline en pente douce », type<br />
productif à accent sur la syllabe prédésinentielle ; — et les<br />
substantifs verbaux en -nie, -lie et -n'ë, -t'ë (§ 698) : bit'ë « action<br />
de frapper », bril'ë « de raser », vzjâlie, naêâtie de nazâl' « moissonner<br />
» et naêât' « presser », vzdûtie « gonflement », zakrytie, etc. ;<br />
l'accent final -'ë, dans les formations surtout de la langue populaire,<br />
représente le traitement spécial de -ïje donnant une diphtongue -ie<br />
(§ 62), sous l'accent, donc restituant une accentuation *-iyo-.<br />
En polonais, on a les collectifs kamienie, pierze « plumage »,<br />
wiosie « crins », pqkowie « boutons de fleurs » de pqk « bourgeon,<br />
bouton », sitowie « joues » ; •— les dérivés de locutions, podstupie<br />
« socle » de siup « colonne », nabrzeze « mur de pierre le long d'une<br />
rive », Podyôrze, Zalesie, etc. ; — les substantifs verbaux, ukrycie,<br />
wziçcie, rozdçcie « gonflement », przyjscie « venue » de v. pol. przyszcie<br />
sur *sïstu, szto (§ 408), etc.<br />
En tchèque, les collectifs : kameni, siromovi de strom « arbre »,<br />
vrbi et vrbovi « saulaie » de vrba, uhli « charbon » de uhel ; — les<br />
abstraits d'adjectifs : zdravi, veseli ; — les dérivés de locutions :<br />
primofi, poriëi, Polabi, etc.<br />
En slovène, les collectifs : cvçije « fleurs », bregçvje « collines »,<br />
brëstje et brestôvje « bois d'ormes », dçbje et dçbovje « chênaie » ;<br />
— les dérivés de locutions : oglâvje « chapiteau », okôstje « ossature »,<br />
podrQëje «rayon d'action»; — les substantifs verbaux : piije,<br />
cvrtjë « friture, œufs sur le plat » de cvréti « frire », razdrtje « déchirement<br />
», vnçtje « inflammation » de vnçti « prendre feu », razodélje'<br />
« dévoilement, révélation » sur le participe passif (raz)odët (§ 411),<br />
prisestjë « venue » et, avec extension de -tje, imêtje « avoir, bien »<br />
de imëti, comme imêtek, réfection de "imçtûku, s.-cr. imûtak<br />
{§ 279)'.<br />
En serbo-croate, les collectifs : cvïjece, grôblje « cimetière »<br />
de grob « tombe », grôzâe « du raisin » de grozd « grappe de raisin »,<br />
këstênje «marrons, marroniers », orâsje « noyers», drvëce « arbres »<br />
de drvo, gén. drveta (§ 192) ; — les abstraits d'adjectifs ; vesëlje,<br />
mîlje « délices » ; — les dérivés de locutions : pribrëzje, zdgôrje,<br />
zdbrde et prekobrde sur brdo « peigne » (§ 73) et « mont », Prekàdrïnje<br />
« région de l'autre côté de la Drina », pàprsje « buste » sur prsi<br />
« poitrine », ùzglâvlje « tête de lit, chevet » ; — et voir le type<br />
d'hypocoristiques Blâgoje de Blàgomïr, § 208.
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 403<br />
En cakavien, zeli et zéljï, trni et trnjî, drvjï, veséljï, Zâgôrï<br />
(§ 62).<br />
En bulgare, cvéte, grôzde, trâne « épines », zagôre, et des russismes<br />
et slavonismes podvôrie, etc.<br />
§ 934. Origine du suffixe. — C'est la forme neutre du suffixe<br />
i.-e. *-iyo-, parallèlement au masculin v. si. -ii et au féminin -ija<br />
(§ 1028). Le dérivé si. sunije «songe» de sunu «sommeil», lit.<br />
sâpriis, sapnys de sâpnas (§ 37), a ses correspondants exacts dans<br />
lat. somnium de somnus, skr. svdpn(i)yam de svdpnah.<br />
Le latin a studium, fudicium, consilium, etc. ; le grec jAapTtSpiov,<br />
CU[A7TO(TIOV, etc. Le suffixe est particulièrement productif avec les<br />
composés, lat. aequinociium, pâr(r)icîdium, gr. éviSîmov, mxpajj.u0i.ov,<br />
sôaYYéAiov.<br />
En germanique, on trouve des abstraits d'adjectifs : got. biûhti<br />
« coutume » de biuhts « accoutumé », galeiki « ressemblance » de<br />
galeiks ; et de substantifs : reiki « royaume » de reiks « souverain » ;<br />
de composés : fauradauri « vestibule », de faura « devant » et daur<br />
« place » ; spécialement avec préverbe got. ga-, et en vieux haut<br />
allemand, avec gi-, tout un type productif : gibirgi « montagnes »<br />
sur bërg, gibeini « les os », mod. Gebein, sur bein « os ».<br />
En baltique, avec perte du neutre en letto-lituanien, on a des<br />
masculins en lit. -is et -ys (§ 146) : pastôgis «espace sous le toit,<br />
stôgas, pàkrantis « rivage » sur krantas « rive », pagirys et uzgirys<br />
sur girià « forêt », pavandenys « bord de l'eau », pavakarys « le temps<br />
vers le soir, vâkaras ». Le vieux prussien a quelques neutres en<br />
-ian, mais médian « forêt » doit présenter le suffixe *-yo- d'après<br />
lit. dial. mëdzias.<br />
Le suffixe i.-e. *-iyo- indiquait d'une façon générale ce qui<br />
appartient au mot de base. Les spécialisations de sens de sa forme<br />
neutre se sont opérées , dans les diverses langues. En grec, parmi<br />
des valeurs diverses, -IOV donne des diminutifs : TOXISIOV « petit<br />
enfant » de mxïç. En slave, la formation de collectifs n'est pas à<br />
comparer aux collectifs germaniques en v. h. a. gi-, qui doivent<br />
leur sens au préverbe got. ga- correspondant, pour sa valeur du<br />
moins, à lat. cum « avec ». Les flottements de formes en -i et -ije,<br />
du type vûzviiï et vuzvitije (§ 929), surtout ceux, qui apparaissent<br />
du fonds le plus ancien, de byli, zelï et bylije, zelije (§ 925), laissent<br />
apercevoir que -ije en valeur de collectif est un élargissement de -ï<br />
du type ëçdï, dëtï (§ 211) ; de même qu'il faut voir dans le substantif<br />
verbal en -nije, -tije, qui est propre au slave, un élargissement du<br />
suffixe -U, infinitif -ti, avéc le rattachement secondaire au participe<br />
passif en -lu qui, par substitution de -nu à -tu, a développé -nije<br />
parallèle à -tije.<br />
En contraste avec l'énorme extension du suffixe -ije, celle du
404 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
suffixe -je apparaît très réduite (§ 1021); On peut penser que -je<br />
a été éliminé par -ije en ne subsistant que dans un nombre restreint<br />
de formes anciennes ; mais aussi dans tout un grand type, celui du<br />
suffixe -iste (§ 954), s'il est tiré du suffixe d'adjectifs en -isïu, ce<br />
qui alors attesterait que -ije dans la formation d'abstraits d'adjectifs<br />
a pris la place de -je.<br />
SUFFIXE -ïslvO<br />
§ 935. En vieux slave. — Ce suffixe, qui forme des abstraits,<br />
connaît une productivité si luxuriante qu'il faut se limiter à la<br />
liste des seules formes attestées en rédaction vieux-slave.<br />
Dérivés d'adj/ectifs :<br />
blazenïstvo « béatitude », bogatïstvo « richesse », buislvo « folie »,<br />
debelïstvo « grosseur », dobljïstvo « valeur », drçxlïstvo « tristesse »,<br />
jedinïstvo « unité », Içkavïstvo « malignité », materïstvo « vieillesse »,<br />
mçdrïstvo « habileté », munozïstvo «multitude», obistïstvo «communauté<br />
», çrodïstvo « folie », pijanïstvo « ivresse », prazdïnïstvo<br />
« oisiveté, fête », pronyrïslvo « méchanceté », prostranïstvo « latitude »,<br />
protivïstvo « antagonisme », raznïstvo « diversité », sverëpïstvo « cruauté<br />
», svëtïlïstvo « luminosité », ubozïstvo « pauvreté », veliistvo<br />
et veliëïsîvo « grandeur », xçdozïstvo « habileté, adresse ».<br />
Et dostoinïstvo « dignité », govëinïstvo « pitié », obidïlivïsîvo « fait<br />
d'être offensant », prisïlïstvo « situation de nouveau-venu », et<br />
négatifs neistovïstvo « égarement de l'esprit », neljubïstvo « inimitié »,<br />
nesytïstvo « insatiabilité ».<br />
§ 936. — Dérivés de substantifs, noms de personnes ou adjectifs<br />
substantivés :<br />
balïstvo «médication», bozïstvo «divinité», brat(r)ïstvo «fraternité<br />
», cësarïstvo « empire », ëlovëëïstvo « humanité », ërunorizïstvo<br />
« état du moine, ërunorizïcï ( § 834 ) », dëvïstvo « virginité », dijakonïstvo<br />
« diaconat », epikupïstvo « épiscopat », gospodïstvo « seigneurie<br />
», inoëïstvo « monachisme », kovarïslvo « machination »,<br />
krïstijanïstvo « christianisme », mladenïstvo « enfance » (sur mldden-,<br />
§ 183), mçzïstvo «virilité», neprijaznïstvo «malice diabolique»,<br />
nevëstïstvo «état de jeune mariée», nevëzdïslvo «ignorance»,<br />
oimïstvo « état militaire », otïëïstvo « patrie », çziëïstvo « parenté »,<br />
patriarsïstvo « patriarcat », popïsivo « prêtrise », poslusïstvo « témoignage<br />
», prezvvterïstvo « prêtrise », proroëïstvo « prophétie », proskupïstvo<br />
«pillage», sur proskup- (§ 1028), ritorïstvo «rhétorique»,<br />
sirotïstvo « situation d'orphelin », starëisinïstvo « pouvoir du chef »,
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 405<br />
synovïstvo « filiation », vladyëïstvo « domination », vlûsïstvo « magie »<br />
(et vlusïba, § 910), voinïstvo « état militaire », vojevodlstvo « commandement<br />
d'armée », xodataistvo « entremise », zenïstvo « féminité<br />
».<br />
Et les dérivés de noms d'agents en -teljï :<br />
cistiteljïstvo « sacerdoce », gubiteljïstvo « perdition », mçciteljïstvo<br />
« tyrannie », roditeljïstvo « parenté », stroiteljïstvo « service d'économe<br />
», suvëdëleljïstvo « témoignage », uëiteljïstvo « enseignement »,<br />
vïsedruziteljïstvo « toute-puissance ».<br />
Et blçdïnitïstvo (Supr.), sûrement simple faute pour blçdïniëïstvo<br />
« prostitution » sur blçdïnica « prostituée ».<br />
§ 937. Dérivés de substantifs noms de choses ou de thèmes<br />
verbaux :<br />
ëuistvo et ëuvïstvo « sensation », dëistvo « action », dovïlïstvo « fait<br />
de (se) suffire » ; jeslïslvo et sçstïstvo « nature, cpàcriç » et « essence,<br />
oùoia » ; prëzorïstvo « dédain », prokazïstvo « perversité, imposture » ;<br />
razboistvo « brigandage », ubiistvo et uboistvo « meurtre » ; rodïstvo<br />
« génération » et porodïslvo « régénération » ; rozdïstvo « naissance »<br />
et porozdïstvo (porozïstvo, § 26) « renaissance » ; truzïstvo « assemblée<br />
(de marché), fête solennelle », rendant gr. TOxv-rçyupiç ; vestïstvo<br />
« les choses, les réalités ».<br />
Et les négatifs :<br />
neplodïstvo « stérilité », nesuvëtïstvo « irréflexion », nevëdïstvo et<br />
nevëzdïstvo (nevëzïstvo) « ignorance », nevërïstvo « manque de foi ».<br />
Le mot remïstvo « art, habileté » est sur une base rem-.<br />
Il signifie « art » en vieux slave, et le sens « métier » est postérieur :<br />
c'est celui du dérivé r. remeslô, etc. (§ 1052). La racine *rem- doit<br />
se retrouver dans remenï «courroie» (§ 185) et être celle de skr.<br />
râmati « il fait reposer, il charme ».<br />
La distinction entre rodïstvo « génération », sur rodu et rozdïstvo<br />
« naissance », refait sur rozdenu et rozdenje, s'observe en vieux slave,<br />
sans rigueur, et se continue en slavon jusqu'au russe rodstvô<br />
« parenté » et rozdestvô « nativité ». Il peut s'agir en vieux slave,<br />
à l'origine, d'une différence dialectale, la forme rozdïstvo venant<br />
du vieux slave occidental d'après les moravismes rozïstvo (Cloz.,<br />
Mar.), porozïstvo (Cloz.) ; on ne la retrouve pas en tchèque, mais<br />
c'est celle du slovène rojstvo « naissance » et du cakavien ancien<br />
rojstvo, tandis que le serbo-croate ancien n'a que rodstvo « naissance »<br />
et « génération ».
406 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
§ 938. Dérivés de composés :<br />
bezbozïstvo àôsta, mûnogobozïstvo noXvdsta ;<br />
Ijubodëistvo et prëljubodëistvo « adultère », zulodëistvo xaxoopyloc,<br />
et sûdëistvo « coopération, assistance, mivocpcyiç » avec six- répondant<br />
à gr.
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 407<br />
bescïstvije àTijjia, refait sur beseïstije ;<br />
blagodarïstvije eù^apiatia (et blagodarije) ;<br />
bezmluvïstvije « absence de trouble » (et bezmluvije) ;<br />
cëlomçdrïstvije CTtoopomWj (et cëlomçdrije) ;<br />
slavoslovïstvije SoÇoAoyCa (et slavoslovije) ;<br />
et pçtïsïstvije «marche sur route, voyage, ôSoi7ropî« » (§ 1216)<br />
avec sïstvije pour sïstije.<br />
Par comparaison avec la liste des formes en -ïstvo, on voit que<br />
les formes en -ïstvije sont bien moins nombreuses dans les dérivés<br />
d'adjectifs (9 exemples contre 32 de -ïstvo) et moins encore dans<br />
les dérivés de substantifs, mais au contraire presque à égalité<br />
(12 ex. contre 16) dans les composés.<br />
Ces chiffres sont donnés en se limitant aux textes de rédaction<br />
vieux-slave, et l'on trouve d'autres formes encore en -ïstvije<br />
dans les textes vieux-slaves en rédaction slavonne, ainsi ërësujestïstvije<br />
(J. Ex.) « ce qui est supersubstantiel, TÔ wrspoûcriov »,<br />
mûnogokljucavïstvije (Éphrem), TO ~oÀu[j,v)%avov « ce qui est fertile<br />
en machinations ». Mais on voit qu'on tombe dans l'artificiel,<br />
et davantage encore en slavon où les dérivés en -ïstvije pullulent,<br />
où prisçtïstvije «présence», pour v. si. prisïst(v)ije, est créé pour<br />
calquer gr. raxpoucria, et otusçtïstvije ànouaiv., tvrudïstvije « firmament<br />
» (v. si. tvrudï, tvrudëtï, § 1057) pour (iTspscofAa.<br />
En vieux slave, les formes en -ïstvo et en -ïstvije sont en concurrence<br />
dans tous les textes, sans qu'on puisse leur reconnaître une<br />
différence de sens : ce sont deux dérivés donnant également des<br />
abstraits, et à côté de -ije. Mais une autre différence s'accuse :<br />
-ïstvije apparaît savant, par opposition à -ïstvo de la langue<br />
courante. Il semble que -ïstvije, s'il était connu des parlers bulgaromacédoniens,<br />
y était rare, et qu'il s'est introduit en vieux slave<br />
avec les premiers textes, Évangile et Psautier, et comme trait du<br />
vieux slave occidental de Moravie et de Pannonie. Le nom<br />
particulièrement fréquent de l'« empire » est surtout, dans ces<br />
textes, celui de l'empire des cieux : on trouve dans l'Évangile<br />
plus de 100 exemples de eësarïstvije, contre 17 exemples (dans le<br />
Marianus) de eësarïstvo, avec des flottements dans les manuscrits,<br />
et aussi bien, rarement, eësarïstvo nebesïskoje. Dans le Clozianus<br />
à traits occidentaux, seulement eësarïstvije (12 ex.) ; dans le<br />
Suprasliensis à traits vieux-bulgares, 29 exemples de eësarïstvije<br />
et 41 exemples de eësarïstvo. C'est la preuve que -ïstvije, conservé<br />
à l'ouest en tchèque et à l'état de traces en serbo-croate cakavien,<br />
ne relevait pas en Macédoine et en Bulgarie de la langue parlée,<br />
mais qu'il se développait comme forme religieuse et savante,<br />
jusqu'au slavon russe et au russe moderne.
408 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
§ 940. Dans les langues slaves. — En russe, les formes en -stvie<br />
sont des slavonismes : cârstvie (nebésnoe) «royaume (des cieux) »<br />
en regard de cârsivo « empire », déjstvie « action » et cudodéjstvie<br />
« action merveilleuse », prisûtstvie « présence » et otsûtstvie « absence »,<br />
puteséstvije « voyage » ; trait slavon du russe littéraire qui accompagne<br />
son affection pour les verbes dérivés en -stvovat' (§ 567) :<br />
zlôbstvovat' « être fâché », zitel'stvovat' « demeurer », sposôbstvoval'<br />
« donner moyen, favoriser », diréktorstvovat' « diriger comme directeur<br />
», bogatyrstvovat' « se conduire en preux ».<br />
Le type en -stvo est en pleine productivité : bogdtstvo, dvtorstvo<br />
« profession d'auteur », aklërstvo « profession d'acteur », diletântstvo<br />
« dilettantisme » ; avec la forme -estvo après c, z, s, se : veliëestvo<br />
« majesté », mùéestvo « âge viril », mondsestvo « monachisme » ;<br />
— et des élargissements en -ovstvo : balovslvô « gâterie », vorovstvô<br />
« volerie » en regard de balovât' « gâter », vorovàt' « voler », avec<br />
extension : motovstvô « gaspillage », sur motdt', sutovstvô « plaisanterie<br />
» sur s util', et tolstôvstvo « tolstoïsme » sur Tolstôj ; et en -enstvo,<br />
élargissement limité et sans productivité, qui est pris à des thèmes<br />
en -en- : blazénstvo de blazénnyj, pérvenstvo « primauté » comme<br />
pérvenec « premier-né », nisëenstvo « mendicité » en rapport avec<br />
l'adje„ctif nisëenskij « de mendiant ». Pour l'accentuation, il y a<br />
lien entre les substantifs en -stvo et les adjectifs en -skij (§ 974) :<br />
l'accent final de vorovstvô, scegot'stvô « élégance », est celui des<br />
adjectifs vorovskôj, sëegol'skôj.<br />
En polonais, on a les dérivés d'adjectifs : bogaetwo, glapstwo<br />
« sottise » ; de substantifs et de thèmes verbaux : chiopstwo « les<br />
paysans », zabôjstwo « meurtre », ustçpstwo « concession » en regard<br />
de ustçpowac « se retirer, céder » ; — avec des réductions dans les<br />
groupes de consonnes nouveaux (§ 43), ës donnant c et ss donnant<br />
s : zebradwo « mendicité », v. pol. -czstwo, de zebrak « mendiant »,<br />
ubôstwo « pauvreté » de ubogi, ptactwo « oiseaux » et plus ancien<br />
ptastwo, de ptak et ancien ptaeh(§ 1139) ; — avec des élargissements,<br />
en -owstwo : ojcowstwo « paternité », prononcé et écrit ojcostwo,<br />
szelmostwo « coquinerie » de szelma « coquin » ; et en -ienstwo :<br />
podobienstwo « ressemblance » de podobny « semblable », et czlowieczenstwo<br />
« humanité », duchowienstwo « clergé », avec extension<br />
à przeklenstwo « malédiction » pour v. pol. przeklçctwo. Le sens est<br />
d'abstraits, et fréquemment de collectifs : chiopstwo, braetwo<br />
« confrérie », mieszczanstwo « la bourgeoisie », zoinierstœo « le service<br />
militaire » et « les soldats ».<br />
En kachoube, l'accent est fixe sur la syllabe présuffixale.<br />
Le tchèque conserve le suffixe v. si. -ïstvije, v. tch. -stvie, mod.<br />
-stvi. Il indique une qualité, une profession, un métier : bohatstvî<br />
« richesse »,- lakomstvi « avarice », bohatyrstvi « héroïsme », zemëdëlstvi<br />
« agriculture », zedndrstvi « (franc-)maçonnerie » ; tandis que
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 409<br />
-sivo a un sens collectif : lidstvo « genre humain », pansivo « les<br />
nobles», ptadvo «les oiseaux». D'où des doublets avec opposition<br />
de sens : zedndrstvi « maçonnerie » et zednârstvo « les maçons »,<br />
bratrslvi « fraternité » et bratrstvo « confrérie », krest'anstvi « christianisme<br />
» et krest'anstvo « les chrétiens », knëzstvi « prêtrise » et<br />
knëzstvo « clergé ». Cette distinction de deux valeurs n'apparaît<br />
pas nettement en vieux tchèque, mais la langue moderne s'applique<br />
à l'observer. Le groupe de consonnes es s'est réduit à c : ëlovëctvl<br />
(et ëlovëëenstvi comme pol. eziowieezenstwo) « humanité », de v.<br />
tch. elovëcstvie ; le groupe zs se réduisait à s, miis il a été restauré :<br />
bozstvi « divinité », v. tch. bostvie et bozstvie, druzstvo « compagnie ».<br />
§ 941. En slovène, sans trace de -ïstvije, on a edînstvo, cesârslvo,<br />
slçvstvo « littérature; les lettres », avec large productivité. Le i<br />
tombe devant -stvo : bogâstvo, bîstvo « l'être, l'essence » (slavon<br />
bytïstvo), gospôstvo, 'posêstvo « possession, bien » en regard de<br />
posedovâti « posséder » ; le v disparaît plus ou moins : kraljçfv)stvo,<br />
cû(v)stvo. Les groupes es, ss (zs) se réduisent à s : ëlovêstvo, bçstvo<br />
« divinité », mnôstvo « multitude », avec des réfections en cloveëâ(n)stvo,<br />
bozâ(n)stvo. L'abstrait devient collectif quand le sens du mot<br />
s'y prête : tjûdstvo « les hommes », zqnstvo « les femmes », et<br />
ëlovêstvo « le genre humain » qui se distingue de ëlovecânstvo<br />
« l'humanité » ; potçmstvo « la descendance » est un emprunt à r.<br />
potômstvo « postérité », comme s.-cr. potômstvo.<br />
En serbo-croate, on a les accents bràtstvo, vôjvodstvo de vôjvoda,<br />
bàgatstvo de bdgat, tvrdàglâvstvo « opiniâtreté » de tvrdàglav ; et<br />
mogùestvo « possibilité » de mogûc, neutre mogûce « possible »,<br />
poglavârstvo « siège du chef » de poglàvâr, gén. poglavâra, avec<br />
extension : mnôstvo pour mnôstvo, de mn&go, etc. Le groupe sst<br />
s'est réduit à st : drustvo de drûg, sirômastvo de siromah « pauvre » ;<br />
et est à ët, puis st : jùnâstvo « héroïsme », de jànâk « un brave » ;<br />
le thème de base était maintenu dans les mots slavons par conservation<br />
du jer (§ 60), en serbo-croate a, et -astvo a donné -anstvo par<br />
extension du type dostojânstvo « dignité » de dostôjan « digne »,<br />
parallèlement à -askï donnant -anskï ( § 974) : covjestvo et ëovjecànstvo<br />
«humanité», bozànstvo «divinité». Un groupe tst, passant à<br />
et, se réduisait à st, mais il a été restauré : bogâstvo, bràstvo, et<br />
bàgatstvo, bràtstvo dans la langue actuelle.<br />
Le suffixe -ïstvije a laissé des traces en cakavien septentrional,<br />
sous la forme -stvî (§ 62) : bogàstvï, surtout à l'instrumental singulier,<br />
bogàstvïn, drustvïn, siromàstvïn, et surtout dans la longue<br />
finale -stvô, analogique^ de -slvï : bogàstvô, bozanstvô, trôjstvô<br />
« trinité ». Le slavon croate glagolitique usait du suffixe -ïstvije,<br />
et l'on relève bogatstvie, velië(a)stvie, bezgodstvie àtopia Sophonias,<br />
I, 15, vëëanstvie « éternité » Ecclésiaste, XII, 5 sur l'adjectif<br />
vëëan.
410 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Le bulgare a -stvo : bogdtstvo, lekârstvo « médicament », rôbstvo<br />
« servitude » ; et -estvo du russe : drûzestvo, mnôzestvo. En macédonien,<br />
le suffixe est conservé dans la langue littéraire, mais il<br />
disparaît dans les parlers, où junastvo s'altère en junastvo, junasvo,<br />
junasto.<br />
§ 942. Origine. — La forme -ïstvije est un dérivé en -ije de<br />
-ïstvo, et l'on trouve un flottement entre ces trois suffixes : licemërije,<br />
licemërïstvo, licemërïslvije ; clovëkoljubije, -Ijubïstvo, -tjubïslvije.<br />
Pour -ïslvo, c'est l'élargissement du suffixe *-two- d'adjectifs<br />
et de substantifs, en slave masc. -tvu et neutres -tvo dans de rares<br />
exemples, et fém. -tva grand suffixe productif (§ 918). Le neutre<br />
apparaît dans les abstraits sanskrits en -tvâm : devatvàm « divinité »<br />
sur devâh, comme v. si. bozïstvo (oxyton, r. bozestvô, s.-cr. cak.<br />
bozanstvô) sur bogû ; mahitvdm « grandeur » sur mah- comme v. si.<br />
veliistvo sur velii. En germanique, c'est plus isolément qu'on a les<br />
neutres got. piwadw « servitude » sur pius « serviteur », et waurstw<br />
« œuvre » de * wurh-s-twan en regard de waurkjan « opérer » et de<br />
v. h.^a. wërk, qui fournit un exemple d'élargissement de *-twoen<br />
*-stwo-.<br />
On trouve en vieux slave un exemple, unique, du masculin<br />
-tvû dans rybitvu « pêcheur » (pol. dial. rgbitwa « aigle pêcheur,<br />
§ 916), et deux exemples du neutre -tvo :<br />
ëuvitvo «organe des sens, aîa07)T^piov » (J. Ex., Gr. Naz., Gyr.<br />
Jér.);_<br />
tvoritvo (J. Ex., 4 ex. Srezn.) rendant •JTOMSTTJÇ, interprété «vertu<br />
de faire, créatrice » à côté de kacïstvo « qualité », et adj. tvoritvïnu<br />
to>w)tix6ç « qui a la vertu créatrice » (J. Ex., Cyr. Jér., Izb. Svjat.).<br />
Les exemples de -tvo sont assez nombreux dans les langues slaves,<br />
mais aucun ne présente de garantie d'ancienneté :<br />
r. dial. jâtvo « essaim (de poissons) » est une altération de jâto<br />
(§ 1164) ; r. pop. sitvô, cri des vendeurs d'habit, l'est sûrement de<br />
sit'ë « du cousu » ; znitvô « moisson » est pour dial. znitva, réfection<br />
de zâtva ;<br />
slov. sêtvo est pour sêtva « semailles », avec tout un petit type<br />
en slovène dialectal : (d)létvo pour dléto «ciseau», brîtvo pour<br />
brîtva, lêtvo pour lêtva « latte », branltvo pour branîtva, vraëîtvo<br />
pour vraëîtev ; et aussi en slovène ancien du xvi e siècle, mais en<br />
même temps qu'apparaît la forme nouvelle -tev de -tva : loëîtvo,<br />
mlatîtvo, odrçsitvo pour -tva, -tev, et preklçtvo «malédiction» par<br />
croisement de preklçtstvo et preklçtev ;<br />
slov. bêtvo et bêtva, bitèv « tige, fétu », s.-cr. bàtvo, est d'origine<br />
obscure.
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 411<br />
On a un exemple sûr de -stvo dans v. si. bëstvo « fuite », refait en<br />
bëzïstvo et bëgïstvo en slavon, r. bégstvo. On rencontre aussi mnostoo<br />
en serbo-croate cakavien (depuis le xv e siècle), mais c'est pour<br />
s.-cr. mnôstvo, slov. mnçstvo, et à l'imitation de mnokral(i)<br />
« souvent » qui continue v. si. mùnogûkraty (§ 1204), de même que<br />
mnostruk pour mnogdstruk « multiple », mnoglav pour mnogoglav, etc.<br />
Même unique, l'exemple v. si. bëstvo atteste que le suffixe a eu<br />
un moment la forme -stvo, et il indique en même temps la raison<br />
de sa disparition au profit de -ïstvo. L'élargissement par -s- d'un<br />
suffixe, de -t-, -m- en -si-, -sm- (§ 31), de -Ii en -sti (§ 419), du présent<br />
-te- en -ste- du baltique (§ 439), résulte de la rencontre du suffixe<br />
avec un thème terminé par consonne, comme de -tva avec jad-,<br />
prçd- dans jastva, *prestva (§ 915). Et l'insertion d'un -ï- pour<br />
remédier aux résultats de cette rencontre apparaît avec les<br />
désinences de la flexion athématique (§ 173), avec le suffixe -nu<br />
élargi en -ïnu (§ 1070), etc. Dans le cas de -ïstvo, pour mieux<br />
expliquer la généralisation de cette lourde désinence, on a pensé<br />
au parallélisme entre les substantifs en -ïstvo et les adjectifs en<br />
-ïskû, qui se manifeste dans des faits d'accentuation : bozïstvo<br />
comme bozïskù, r. sutovstvô comme sutovskôj « bouffon ».<br />
La formation en -ïstvo est une création du slave, et il n'y a<br />
pas à en chercher le correspondant en baltique, où l'on ne trouve<br />
que des représentants du suffixe de base *-two- dans le type féminin<br />
en -tuvâ-, -luvè (§ 205), avec un petit type masculin en lit. -tuvas,<br />
sans doute ancien neutre : pidutuvas « faucille » sur piâuju, piduti<br />
«couper, faucher» (§ 522), etc.
CHAPITRE XXIV<br />
SUFFIXES NEUTRES (suite)<br />
§ 943. Suffixe -(d)lo. — Ce suffixe fournit des dérivés de verbes<br />
qui indiquent l'instrument ou le moyen d'une action. La forme<br />
-dlo est passée à -lo dans les langues méridionales et du groupe<br />
russe (§ 38), mais est conservée dans les langues septentrionales,<br />
du polonais au tchèque, et aussi en slovène dialectal (-dlo, -dwo) :<br />
ce qui est fort utile pour distinguer, par les formes plus nettement<br />
que par le sens, les dérivés en -(d)lo des dérivés en -lo (§ 1052).<br />
Voici les exemples vieux-slaves ou qui paraissent assez anciens<br />
pour remonter à l'époque du vieux slave :<br />
Slavon bilo «battoir», r. bilo, slov. bilo et dial. bidlo (bidwo),<br />
tch. bidlo « perche », sur bije-, biti.<br />
V. si. za-bralo (Upir', Gr. Naz.) «rempart», v. r. zaborolo, tch.<br />
bradlo « rocher » et zdbradlo « palissade », v. pol. et dial. brodlo<br />
« planches au-dessus de l'aire, meule », sur v. si. borje-, brati<br />
(§ 530).<br />
Tch. bydlo «logement» (et byl), sor. bydlo, pol. bydlo «bétail»<br />
(et dobytek), sur byti.<br />
V. si. grulo « gorge », r. gôrlo, s.-cr. grlo, tch. hrdlo, h. sor. hordlo,<br />
pol. gardlo, sur thème *gûr- (§ 73) ; et voir zrëlo.<br />
V. si. krilo « aile », r. krylô (v. r. krilo), s.-cr. krilo, slov. krilo<br />
et dial. kridlo (kridwo), tch. kridlo, h. sor. kridio, pol. skrzydlo<br />
(ancien et dial. krzydlo), sur thème *(s)krei- (§ 515).<br />
V. si. mylo (Upir', Gr. Naz.) « savon », r. mylo, tch. mydlo, sor.<br />
et pol. mydlo, sur myti.<br />
V. si. pro-pçlo (Cyr. Jér.) et ras-pçlo (J. Ex.) « croix », s.-cr.<br />
propélo et raspélo « crucifix », slov. razpçlo ; r. pjâlo « châssis pour<br />
tendre » et postverbaux en -pjal (§ 788); v. tch. pddla (plur.)<br />
« instrument de torture », dial. padlo et piadlo « tendeur, cadre,<br />
châssis pour tendre », et pol. dial. piçdlic « tendre une peau ».<br />
V. tch. p'idlo, pol. dial. pidlo «trou d'eau, conduite d'eau»;
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 413<br />
s.-cr. dial. pïlo « abreuvoir, pôjilo », et « cuve de pierre » (pour l'eau<br />
de cuisine) par adaptation d'ital. pila ; mais pour s.-cr. pïlo<br />
« boisson », slov. pilo, voir § 1052.<br />
Y. si. ralo « charrue », r. et slov. râlo, s.-cr. ràlo, tch. radio, sor.<br />
et pol. radio, sur thème *or- (§ 70), et voir oralo, § 946.<br />
V. si. rylo « houe », r. rylo « museau », s.-cr. rïlo « groin », tch.<br />
rydlo « burin » (pol. rydel « bêche », § 1056), sur ryti. ,<br />
V. si. silo « lacet », r. silo, pol. sidlo et tch. osidlo « piège » (sor.<br />
kosydlo), sur la racine *sei- « lier » (§ 515).<br />
Slov. stdlo « base, fondement », s.-cr. ancien stalo « base » et dial.<br />
« cuissot », v. tch. slâdlo « état », slovaque stadlo « station », pol.<br />
sladlo «couple» de v. pol. «état» et «état des mariés», et voir<br />
stojalo, § 946, dont c'est pour une part au moins la forme contracte.<br />
Slavon silo « alêne », r. silo, slov. silo et dial. sidlo, tch. sidlo,<br />
pol. szydlo, sur siti.<br />
Tch. trdlo « instrument pour broyer, pilon », dérivé irdlice « broie<br />
(pour broyer le lin) », mais aussi Irlo, irlice, pol. larlica, par<br />
contamination avec *tïrlo, dérivé en -lo (§ 1052).<br />
Tch. povidla (plur.) et pol. powidla « marmelade, gelée de fruits »,<br />
dont il n'y a pas lieu, semble-t-il, de séparer s.-cr. dial. povilo<br />
« route en lacets », malgré la différence de sens ; et le composé :<br />
R. molovilo « dévidoir », s.-cr. molovilo, slov. molovilo et dial.<br />
-vidlo, tch. molovidlo, pol. molowidlo, sur viti, avec le premier terme<br />
moto- de motu « écheveau » (§ 731) qu'on a aussi dans r. motovjâz, etc.<br />
(§ 1215). Mais pour r. vila « fourche », tch. vidle, voir § 1051.<br />
Y. si. zçlo « dard, aiguillon », r. zdlo, slov. zélo et dial. zedlo, pol.<br />
zqdlo, polabe *zçdlù : dérivé ancien, répondant à lit. gihklas<br />
« arme » (§ 949), du thème zen- de zene-, gunati qui combine le sens<br />
primitif « frapper » et le sens nouveau « chasser » (§ 470), et il n'y a<br />
pas de raison de supposer une dissimilation *gendlo de *geldlo sur<br />
*gel-, lit. gélti « faire mal » et secondairement « piquer », racine<br />
représentée en slave par zalï, zelja, etc. (§ 584).<br />
V. si. zrëlo (Upir', Gr. Naz.) « organe de la voix, gosier », r.<br />
zerelô « orifice, bouche » et zerlô, s.-cf. zdrijèlo « gosier, gorge (de<br />
montagne) » et dial. zdflo, slov. zrélo, tch. zridlo et pol. zrôdio<br />
«source», sur le thème zer- (et iïr-) de v. si. zïre-, zrëli «avaler», et<br />
à côté de *gurdlo, voir ci-dessus ; et tch. zrddlo « mangeaille »,<br />
voir § 946.<br />
Pol. ancien zydlo « vie, le vivre », mais qui peut être analogique<br />
de jadlo « le manger » (§ 945).<br />
Pour r. sverlô « tarière »fvoir § 1055. Un mot pose un problème :<br />
Slavon salo «,graisse, panne », r. et slov. sdlo, s.-cr. sàlo, tch.<br />
sâdlo, sor. et pol. sadlo. On a proposé de l'expliquer comme dérivé<br />
de saditi « asseoir », d'après ail. selzen « produire », Fleisch ansetzen
414 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
« prendre de l'embonpoint », mais c'est aussi inacceptable que<br />
laborieux, les dérivés de verbes en -ili étant en -i(d)lo (§ 947),<br />
et ceux sur thème en -d- étant en -slo (§ 944). L'aspect invite à y<br />
voir le dérivé d'une racine *sâ- : ce serait la racine i.-e. *sa- et<br />
sâ-, gr. a-airoç « insatiable », OISTJV « à satiété », lat. satis « assez »,<br />
qui, perdue en slave où sylû « rassasié » est pris au germanique, est<br />
conservée en baltique, lit. sotùs (§ 618). Le sens premier de salo<br />
serait alors « ce qui sature (les tissus) », la graisse. Et le mot serait<br />
parallèle à lat. sabulum « sable », qu'on rapproche péniblement<br />
de gr. afAjxoç, t|;à[A[xoç, etc., et qui peut être plus simplement un dérivé<br />
en -bulum, de *-dhlo-, le correspondant de si. -dlo (§ 949), sur sade<br />
satur, comme terme technique désignant le sable dont les<br />
maçons se servent dans la fabrication du mortier pour « saturer »<br />
la chaux et le ciment.<br />
§ 944. Formes en -slo. — Les formes en -(d)lo sont sur thème<br />
terminé par voyelle ou sonante, et bâties directement sur le<br />
thème : *or(d)lo antérieur à oralo, de or je-, orati. Il faut voir quels<br />
sont les dérivés de thèmes terminés par occlusive ou sifflante.<br />
Dans le cas de sifflante ou dentale, on trouve des dérivés en -slo<br />
qui sont nettement des noms d'instruments du type en -(d)lo :<br />
Y. si. maslo « huile », r. mâslo, s.-cr. mâslo, ce qui sert à graisser,<br />
sur mazali.<br />
V. si. veslo « rame », r. veslô, s.-cr. vèslo, sur veze-, vesti.<br />
Slavon u-vçslo « bandeau, diadème », su-vçslo « lien », r. vjdslo<br />
« lien (de paille d'une gerbe) », povjâslo, perevjâslo « lien, ceinture »,<br />
svjdslo (et uvjâslo slavon), pol. obwiqslo « bandeau », powiqslo,<br />
przewiqslo, v. tch. obâslo « lin sur la quenouille », slov. povçslo,<br />
sur vçze-, vçsti ; et voir obçzalo sur vezaii, § 946.<br />
V. si. povrëslo (Théod.) « balance » apparaît contaminé avec<br />
povësiti « suspendre », mais on a s.-cr. vrijèslo « anse » (de chaudron,<br />
faite d'une corde enroulée), povrijèslo «lien, anse», slov. povrëslo,<br />
tch. povrislo, et pol. powrôslo (pour -wrzo- par réfection sur powrôz),<br />
sur *verz-, v. si. vruze-, vrësti.<br />
Y. si. ëislo « nombre », r. ëislô, s.-cr. et tch. ëislo, v. pol. czyslo,<br />
à côté de cismg (§ 186), sur ëïte-, cisti.<br />
R. dial. ëereslô « coutre de charrue », bulg. ëerjâslo, slovaque<br />
crieslo (tch. ëertadlo, § 948), h. sor. crjôslo, pol. trzoslo, sur *cïrte-,<br />
v. si. crësti « entailler » (§ 429). On a un autre mot dans v. si. crësla<br />
« hanches » et dans slov. ëréslo « écorce, tan » (§ 1052).<br />
Slavon prçslo (prçslica «quenouille»), slov. dial. prçslo «quenouille<br />
», r. prjdslo « peson de la quenouille, fusaïole » (v. si.<br />
prçslenï, § 183) et « traverse, partie de clôture entre deux pieux »,
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 415<br />
s.-cr. prèslo « passage entre deux montagnes », v. tch. prdslo<br />
« bande de terre », pol. przçsto « travée », sur prçde-, presli « filer ».<br />
Le développement de sens de « quenouille » à « travée » s'explique<br />
en partant de l'idée de « fuseau » et a son parallèle dans si. pasmo<br />
« écheveau » et lette puôsms « intervalle entre deux montants »<br />
(§ 1068), et la supposition d'une racine différente, celle de prçtali<br />
« comprimer » ( § 553), est inutile.<br />
Le russe dialectal uslô « tissage » et « tissu commencé » est bien<br />
isolé pour qu'on l'explique par la racine *aud- de lit. dudziu, dusti<br />
«tisser», dudeklas «tissu» (§ 949, et peut-être si. udu, § 191), et<br />
son sens indiquerait plutôt une formation secondaire tirée de r.<br />
usnovdt' « ourdir », supposant un dialectal *usnut', pol. usnuc<br />
(§ 466) avec contamination des flexions *usnut', prés, usnuë-, et<br />
usnût' « s'endormir », prés. usnë-.<br />
Du thème gçd- dy verbe ggde- et de gçslï «cithare» (§ 1056),<br />
on trouve un exemple isolé de s.-cr. poguslo (xiv e s.) au sens<br />
probable de « surnom dans la chanson », mais ce doit être une<br />
formation secondaire sur gusli parallèle à poreklo « surnom »<br />
(§ 1052).<br />
Pour krëslo « fauteuil » et remeslo « métier », voir § 1052 ; pol.<br />
dziqslo «gencive» est une altération de dziqsno, -sna (§ 1079),<br />
pol. et h. sor. jasia « crèche » (plur.), slov. jdsla, est secondaire de<br />
jasli (§ 1056), et r. teslô « herminette » l'est de tesld (§ 1051).<br />
§ 945. Formes en -lo. — Dans le cas de thèmes terminés par<br />
labiale ou gutturale, on rencontre quelques noms d'instruments<br />
en -lo :<br />
Slavon greblo « rame >>, r. greblô « râcloire », bulg. greblô « râteau »<br />
et « rame », tch. treblo « râcle, tire-braise », pol. grzeblo, sur grebe-<br />
(et s.-cr. grèbalo « râteau » et « tisonnier », slov. grebdlo, sur grebati).<br />
V. si. prçglo (Gr. Naz., Upir') «lacet, trébuchet », r. pruglo<br />
«ressort», s.-cr. pruglo «lacet (pour prendre les oiseaux)», slov.<br />
prçglo, tch. pruhlo, sur prçze- avec le vocalisme de l'itératif prçziti,<br />
postverbal prçgu (§ 763). ,,<br />
Slavon oblëklo « vêtement », bulg. obleklè et s.-cr. oriental,<br />
attesté depuis le moyen bulgare, sur ob-(vJlëce-, et cf. odëjalo.<br />
On doit donc admettre une réduction de groupes *-bdlo, *-gdlo<br />
à -bio, -glo (et -klo) parallèle à l'altération de *-zdlo, etc. en -slo, etc.<br />
— ceci en simplifiant des Jaits qui ont été plus complexes (§ 949).<br />
Mais seul le sens de nom' d'instrument permet de le reconnaître,<br />
et dans les autres cas de finale -lo, v. si. stïblo « tige », s.-cr. poréklo<br />
« origine », etc., il n'y a pas de raison de voir autre chose que le<br />
suffixe -lo (§ 1052). C'est sûr en tout cas après dentale, dans *jëdlo
416 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
« le manger », en regard de -dl- dans jasli « mangeoire ». Pol. siadlo<br />
« siège » est secondaire de sëdalo, et pour se(d)lo « domaine, champ »<br />
et sed(û)lo « selle », voir § 38.<br />
§ 946. Suffixe -a(d)lo. — Sur thème verbal en -a-, on a la forme<br />
~a(d)lo, dont voici les exemples vieux-slaves :<br />
brysalo « torchon pour essuyer i, slov. brisâlo, sur brysati imperfectif<br />
de *brûsnçti (§ 654) ;<br />
po-crupalo « puisoir », r. cerpâlo, pol. czerpadlo, tch. cerpadlo<br />
« pompe aspirante », sur v. si. crupati itératif de crùpe- ;<br />
o-dëjalo « vêtement », r. odejâlo « couverture », sur -dëjati, et<br />
s.-cr. odijèlo, slov. odélo avec contraction de -ëja-, pol. dial. odziewadio<br />
sur -dëvati ;<br />
jasalo (Cyr. Jér.) « ceinture » dans un exemple isolé (§ 551) ;<br />
na-kovalo « enclume », tch. kovadlo, pol. kowadio ;<br />
po-kryvalo (Pand. Ant.) « couverture », r. pokryvâlo, slov. zakrivâlo,<br />
pol. zakrywadlo, et v. tch. koprvadlo « couvercle » qui est<br />
*pokryvadlo déformé d'après lat. cooperculum, roman copercl- :<br />
otalo, r. ordlo, réfection de ra(d)lo sur orati ;<br />
pisalo (Gr. Naz., Upir') « stylet pour écrire », r. pisdlo, v. pol.<br />
pisadio « tablettes » ;<br />
sëdalo « siège », r. séddlo, s.-cr. sjêdalo (« perchoir des poules »),<br />
slov. seddlo, tch. sedadlo, et pol. siadlo « siège, perchoir » par<br />
réfection sur siadac ;<br />
pro-sliralo (Upir') « étendoir », endroit où étendre (les filets),<br />
traduisant Ézéchiel, XXYI, 14 iuyuôç siccaiio, endroit où sécher<br />
les filets ; r. prostirdlo « tapis », slov. prôstiralo, prestirdlo « drap<br />
de lit », pol. przescieradlo ;<br />
stojalo (Upir') « base, fondement », r. stojâlo, s.-cr. stèjalo « manche<br />
de fléau», pol. stojadio « pilier, montant », slov. slojdlo «base» et<br />
stdlo, voir sta(d)lo, § 943 ;<br />
strëkalo « aiguillon », r. strekdlo, sur strëkati ;<br />
sibalo (Gr. Naz., Hom. Mih. 206 ra ) « fouet », s.-cr. sïbalo « baguette<br />
de tambour», sur sibati ;<br />
zrucalo « miroir », s.-cr. zrcalo, slov. zrcdlo, tch. zrcadlo, sur<br />
zrucati, r. zérkalo sur zérkal' (§ 542), et pol. zwierciadio.<br />
On trouve en slavon de nombreuses autres formes, comme<br />
dans les langues slaves, par exemple :<br />
u-myvalo « bassin pour laver », et v. ,sl. dans le dérivé umyvalïnica,<br />
slov. umivdlo, tch. umyvadlo « cuvette, lavabo », v. pol. umywadlo<br />
et mod. pomywadio ;<br />
u-sçcalo « mouchette », et v. si. dans usçcalïnica (Upir', § 882),<br />
slov. usekdlo, sur l'imperfectif dérivé de sçknçti (§ 494) ;
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 417<br />
ëesalo « peigne », s.-cr. cèsalo « étrille », slov. ëesdlo, tch. ëesadlo,<br />
pol. czesadto ;<br />
strugalo « râcloir », r. strogdlo, s.-cr. ancien slrugalo, slov. strgâlo<br />
et strugâlo, tch. ancien strhadlo et mod. struhadlo « râpe », sur<br />
slruze-, strugati (§ 544) ;<br />
vësalo « potence », r. vésalo « échafaudage pour suspendre »,<br />
s.-cr. vjësala (plur.), slov. vésalo, tch. vësadlo, pol. wieszadlo « patère,<br />
portemanteau », sur vësati, et voir vësilo sur vësiti ;<br />
obçzalo « lien », r. objazdlo, slov. vezâlo, tch. vazadlo, pol. wiazadio,<br />
sur vçzati, à côté de vçslo sur vçsti, § 944.<br />
Et *pïra(d)lo, s.-cr. pràlo « lavoir », tch. prddlo « lessive, linge »,<br />
pol. dial. pradlo « lessive » et « escabeau de la femme qui lave »,<br />
sur pïrati (§ 471) ;<br />
s.-cr. grèbalo à côté de greblô, § 945 ;<br />
r. pûgalo « épouvantail » pour v. si. pçdilo sur le nouveau pugdt'<br />
(§ 766) ;<br />
tch. zrâdlo « mangeaille (des bêtes » sur zrâli, h. sor. zradio<br />
sur zrac (§ 453) en regard de tch. zridlo (§ 943). Etc.<br />
§ 947. Suffixe -i(d)lo. — Sur thème verbal en -i-, on a en vieux<br />
slave :<br />
cëlilo (Gr. Naz.) « remède », slov. cèlilo ;<br />
cëslilo (Upir') «table propitiatoire» et ocëstilo (J. Ex., Gr. Naz.)<br />
sur cëstiti, et sur cistiti (§ 616) :<br />
cistilo (J. Ex.) « moyen de nettoyage », s.-cr. ëlstilo « purgatoire »,<br />
pol. czyscidio ;<br />
ërunilo « encre », r. ëernila (plur.), tch. ëernidlo « du noir », pol.<br />
czernidlo ;<br />
kadilo « moyen d'encenser, encens », r. kadilo, slov. kadilo et<br />
dial. kadidwo, tch. kadidlo, pol. kadzidio ;<br />
is-kraëilo « instrument de torture », sur le slavon iskraëiti « tordre<br />
les jambes » (§ 775) ;<br />
krumilo « gouvernail » (Act. Ap., XXVII, 40), r. kormilo, s.-cr.<br />
krmilo ;<br />
mërilo « balance », r. merilo « mesure », tch. mëridlo, pol.<br />
mierzydlo ;<br />
nosila (plur.) « civière », r. nosila, tch. nosidla (nositka, § 924),<br />
pol. nosidla ;<br />
pçdilo « épouvantail », s.-cr. ancien pudilo (et r. pûgalo) ;<br />
pravilo « règle », r. prdvllo « règle » et « gouvernail », tch. pravidlo,<br />
pol. prawidto ; /<br />
solilo « (bol) à sel, salière », r. solilo, s.-cr. sàlilo ;<br />
slavilo «ce qui fixe, ancre» (Pand. Ant.), slavila «balances»<br />
(Hés. LXI, 10), r. slavilo « régulateur (de machine) », tch. stavidlo<br />
et pol. slawidto « vanne » ;
418 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
susilo « bois sec » (Ps. CI, 4, var. sûxlï, § 1056), r. susilo « séchoir »,<br />
s.-cr. sùsilo et slov. susilo « séchoir » et « séchage », tch. susidlo.<br />
svëtilo « luminaire », r. svetilo « flambeau, astre », s.-cr. svjètilo,<br />
slov. svetilo « lumière, lanterne », pol. swiecidio « clinquant » ; — et<br />
svëstilo « lampe » (Supr. 40216), « chandelier » (Athan.), par rattache<br />
ment à svësta « chandelle » ; s.-cr. svjèstilo « mèche » est un slavonisme,<br />
tandis que le dialectal svjècalo « feu allumé pour la pêche<br />
de nuit » est tiré de svijèca par l'intermédiaire d'un verbe « éclairer<br />
à la chandelle » ;<br />
svçtilo « sanctuaire », s.-cr. ancien svetilo, slov. svetilo « tabernacle »<br />
(v. pol. swiçcidlnia, § 1089) ;<br />
toëilo « pressoir », r. toëilo « pressoir » et « pierre à aiguiser »,<br />
tch. toëidlo, pol. toezydio ;<br />
prëvësilo (Théod.) «balance» sur prëvësiti «peser», et *vësilo<br />
dans l'adjectif slavon vësilïnu « de potence », sur vësiti, et sur<br />
obësiti s.-cr. objesilo « potence », slov. obesilo, et bulg. besilo comme<br />
bési- «pendre » dépréverbé (§ 1208) de obési-, à côté de vësalo sur<br />
vësati ;<br />
vratilo (Ham. 12525, 131J6) « ensouple », s.-cr. vràtilo, slov.<br />
vratilo, r. vorotilo « pivot », tch. vratidlo « treuil » ;<br />
xmnilo « garde », slov. hranilo « garde » et « entretien, nourriture »<br />
tch. chranidlo « ce qui protège » (chrânitko « cache-col »), pol.<br />
chronidlo « écarteur » (dans une opération).<br />
Et beaucoup d'autres formes en slavon, comme dans les langues<br />
slaves, par exemple :<br />
ëruvilo « du rouge », et dans v. si. ëruvilïniku (Gr. Naz.) « teinturier<br />
», bulg. ëervilo, sur ëruviti, et sur ëruvenu (§ 409), ëruveniti,<br />
s.-cr. crvènilo, pol. czerwienidio ;<br />
grunilo « fourneau de forge », et dans v. si. grunilïstvovati « fondre<br />
à la forge » (Ham. 29412), r. gornilo, sur un dérivé *gurniti de<br />
*gurnû « fourneau » (§ 1072) ;<br />
cëdilo « passoire », r. cedilo, s.-cr. cjèdilo, tch. cedidlo (et ceditko),<br />
pol. cedzidio, sur cëdili ;<br />
krïstilo « baptistère », et dans v. tch. krstidlnicë « fonts baptismaux<br />
» ;<br />
strasilo « épouvantail », s.-cr. stràsilo, tch. strasidlo, pol. straszydlo,<br />
sur strasiti, comme pçdilo sur pçditi ;<br />
vëtrilo « voile de navire », r. vetrilo, et slov. vetrilo « ventilateur »,<br />
sur vëtriti. Etc.<br />
Si les formations en -a(d)lo et -i(d)lo sont nombreuses et<br />
constituent des types toujours productifs, il n'y a pas de forme<br />
ancienne en -ë(d)lo, en dehors peut-être de s.-cr. vrëlo «source»<br />
sur vrëti (slov. vrêl), tch. vridlo sur vriii, v. si. vïrëli « bouillonner ».
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 419<br />
C'est parce que les verbes en -ëti sont en principe des verbes d'état,<br />
et qu'ils excluent des dérivés qui fournissent les moyens des actions.<br />
C'est très secondairement qu'on trouve :<br />
Slavon sëdëlo « siège », macéd. sedelo, slov. sedélo, par réfection<br />
sur sëdëti, pour sëdalo, bulg.-macéd. sedâlo, etc., et voir v. si.<br />
sëdilïno, § 1080.<br />
D'autres formes en -ëlo, bulg. videlo « lumière », etc., et slov.<br />
imélo « avoir, biens », sont des dérivés en -lo (§ 1052).<br />
§ 948. Dans les langues slaves. — En russe, le suffixe est toujours<br />
vivant : derzdlo « manche », gruzilo « sonde » de gruzit' « enfoncer »,<br />
molotilo « fléau » de molotil' « battre au fléau ».<br />
Sa productivité est particulièrement grande en polonais : dierzadio<br />
« manche », brzqkadio « crincrin » de brzqkac « faire sonner »,<br />
klepadh « batte » de klepac « marteler », zegadlo « cautère », sznurowadio<br />
« lacet » de sznurowac, v. pol. wieczerzadio « (salle du) dîner » ;<br />
— gasidio « éteignoir », moczydlo « mouilloir », wçdzidlo « mors »<br />
de wçdzic « prendre à l'hameçon, wqda », ancien zçbidlo « curedent<br />
» ; etc. Le suffixe cesse d'être uniquement déverbatif :<br />
mokradio (et mokrzydio) «marécage» sur mokry ; et il prend des<br />
valeurs expressives : piescidlo « chose mignonne » sur piescic<br />
«caresser», dramidio «mauvais drame» sur drama(t) «drame»,<br />
et sztuczydio « mauvaise pièce » sur sztuka.<br />
En polabe, la productivité devait être semblable à celle du<br />
polonais : outre radly = radio « charrue », kreidele = kridlo « aile »,<br />
on y trouve des formes répondant à mocidlo, vralidlo, et *nitidlo<br />
« peigne de tisserand » sur nititi, r. nitit', s.-cr. nîtiti « ranger les<br />
fils, niti, sur le métier à tisser ».<br />
En tchèque, même : productivité : certadlo « coutre » (v. tch.<br />
ërtadlo) pour l'ancien *cerslo (§ 944), divadlo «théâtre » de divati se<br />
« regarder », kupadlo « bains », vahadlo « balancier », rysovadlo<br />
« boîte à dessin », napajedlo « abreuvoir » ; — drazdidlo « excitant »<br />
de drazditi, kruzidlo « compas », liëidlo « fard », misidlo « mélangeur »<br />
de misiti, pour mësidlo, avec l'abrègement sur le dérivé et perte de<br />
l'alternance ë : i. Avec plusieurs mots, ainsi kruzidlo et kruzitko, le<br />
suffixe -dlo est concurrencé par -Iko qui en est le diminutif en<br />
-dlko (§ 924).<br />
Même productivité en slovène : gnëtalo « machine à presser » de<br />
gnëlati, grebendlo « machine à carder », piskdlo « sifflet, flûte »,<br />
snovdlo « ourdissoir » ; — barvilo « matière colorante », bodrilo<br />
« ce qui encourage », gnojilo « engrais », slepilo « ce qui aveugle,<br />
phantasme », placilo « paiement » et dial. pwaëidwo. Et le suffixe<br />
déborde au-delà du type déverbatif : ognjilo « briquet » directement<br />
sur ôgenj « feu », racilo « balance à écrevisses » sur ràk.
420 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
Et en serbo-croate : drndalo « carde » de drndati « carder »,<br />
kùsalo « creux de la cuiller », kljukalo et muljalo « pelle pour remuer<br />
le marc », de kljùkati et mMjati « fouler le raisin » ; pj'èvalo « gosier »<br />
par plaisanterie pour grlo, et zvàlo « gosier » sur zïvati « mâcher » ;<br />
•—• jàgnjilo « lieu où les brebis agnellent » de jàgnjiti, kvâsilo<br />
« patte-mouille» de kvàsiti «tremper», làzila (plur.) «échafaudage»,<br />
preoblàcilo « linge de rechange ». Et dérivés de substantifs : brdila<br />
(plur.) « battant de métier à tisser » sur brdo « peigne de tisserand »,<br />
prùtilo « canne à pêche » sur prût.<br />
En bulgare : grebàlo « puisoir » sur grebé-, aor. grebd- (§ 432), etc.,<br />
et bodllo « piquant, épieu » à côté de bodél(% 1059).<br />
§ 949. Origine. — Les langues indo-européennes présentent<br />
quatre suffixes de noms d'instruments : *-tro-, gr. aporpov « araire »,<br />
lat. arâlrum ; *-tlo-, lat. ferculum « civière » de *-tlom ; *-dhro-,<br />
lat. crïbrum « crible » ; *-dhlo-, gr. ysveOXov « descendance », lat.<br />
stabulum « lieu d'arrêt, étable ».<br />
Le sanskrit, qui confond r et l, a -tram : âritram « rame » (lit.<br />
Irti « ramer »). Le germanique, qui confond t et dh, présente des<br />
exemples de -tlo-l-dhlo- : v. isl. stallr « étable » et v. h. a. stadal<br />
« grange » (qui sont masculins) ; et surtout de -tro-j-dhro- : got.<br />
maurpr « meurtre » sur thème *mr- « mourir » ; v. h. a. flôdar<br />
« écoulement » sur flô(w)- de *plu-. Avec thème terminé par<br />
dentale, on a *blôstr « sacrifice », v. h. a. bluoslar (got. blôstreis<br />
« sacrificateur ») sur got. blôtan « adorer », got. gilstr « impôt »,<br />
v. h. a. gëlstar « rétribution » sur got. -gildan « payer en compensation<br />
» (v. si. zlëde-, § 430), avec développement du type en -str-,<br />
de *-ssr- (§34), *-sr- (§32).<br />
En baltique, le suffixe était -tlan, conservé en vieux prussien,<br />
de façon douteuse, dans spertlan « saillie du gros orteil » sur le thème<br />
de lit. spirti « pousser du pied » (si. pire-, § 453), et plus sûrement<br />
dans le dérivé ebsentli- « marquer », lit. apzénklinti, de lit. zénklas<br />
« signe ». Ailleurs, avec le passage de il à kl comme en latin (§ 38),<br />
piuclan « faucile » sur lit. piduti « couper », et avec la perte du neutre<br />
en letto-lituanien (§ 125), lit. piuklas « scie » (piâutuvas « faucille »,<br />
§ 942), etc.<br />
Le lituanien a ârklas «araire» (lette arklis) pour si. *ôr(d)lo,<br />
irklas « rame » (lette ifklis) sur irti « ramer », ginklas « arme » sur<br />
ginti «protéger, défendre» (si. *zçdlo, § 943), dôklas (dûoklas)<br />
« corbeille (pour donner le foin) » sur duoti « donner », tinklas<br />
«filet», lette tikls, sur le lette tinu, tît «tresser» (si. Une-, § 457),<br />
zénklas «signe» sur zinti «connaître» (§ 508), etc. A côté des<br />
masculins en -klas, on a des masculins en -klis et des féminins en<br />
-klê.<br />
Avec thème terminé par consonne, on trouve lit. pirklas « paie-<br />
as*
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 421<br />
ment», âtpirklas «rançon», sur pifkti « acheter », et avec dentale lit.<br />
kefslas « lancette », v. pr. kersle «hache, houe», comme si. *cerslo,<br />
sur racine *kert-. Mais la rencontre de consonnes est évitée par<br />
recours à une forme élargie en -eklas : lit. ker(sJlëklis « lancette »<br />
pour le plus ancien kefslas, âudeklas « tissu », lette aûdekls, sur lit.<br />
âudziu, âusti « tisser », kabëklis « crochet » sur kabëti « être suspendu<br />
», etc. Avec élément thématique en -ï-, on a lit. vystyklas<br />
« maillot sur vystyti « emmaillotter », et lette vîstîkls ; avec thème<br />
en -â-, lit. kapôklis « hachoir » sur kapôti « fouir » (si. kopati) et<br />
« hacher », lette sûpâkles (plur.) « berceau, balançoire » sur sùpât ;<br />
avec thème en -uo- (§ 570) lit. supuoklês « balançoire » sur sûpûoti,<br />
lette màjuôklis « habitation » sur mâjuôl ; avec thème en -ë-,<br />
lette biêdêklis « épouvantail » sur biêdêt « effrayer » (factitif, § 585).<br />
Et le lituanien a un type en -uklas qui est dénominatif : stebùklas<br />
« miracle » sur stèbti «'être étonné » par l'intermédiaire de l'adjectif<br />
stèbus « merveilleux ».<br />
La divergence entre le baltique, qui développe le suffixe *-tlo-,<br />
et le slave, qui développe *-dhlo, indique sûrement que le baltoslave<br />
connaissait les deux suffixes, comme le latin. Et il est<br />
vraisemblable que *-llo est conservé en slave dans le type en -slo :<br />
c'est du moins, sans être évident, la façon la plus simple d'expliquer<br />
qu'on ait -slo sur des thèmes en -z- et -d-, et l'on peut admettre<br />
que le slave, possédant -dlo et *-tlo, a généralisé -dlo après voyelle<br />
et *-tlo dans les groupes plus complexes *-zdlo, et *-ztlo. Avec<br />
labiale et gutturale, des groupes *-bdlo et *-bllo, etc., devaient<br />
se réduire à -lo, et il y a eu sûrement restauration de la consonne<br />
finale du thème, comme dans v. si. bë-slvo et slavon bëg-stvo<br />
(§ 942).<br />
L'accent devait être, en partie au moins, oxyton comme celui<br />
des adjectifs en -lo- (§690) et -ro- (§ 1112), et l'oxytonaison est<br />
attestée en sanskrit : slolrdm « (formule de) louange », plus exceptionnellement<br />
en grec : XouTpov « ce qui baigne, bains » ; mais plus<br />
ordinairement c'est le radical qui impose son accent.<br />
En slave, avec les formes sans élément thématique, la répartition<br />
des oxytons et des paroxytons est réglée par l'intonation du<br />
radical, comme à l'infinitif : du jeu de la loi de Saussure qui<br />
retenait l'accent sur intonation rude a été tiré le principe plus<br />
large que l'intonation rude retient , et également attire l'accent<br />
(recul morphologique et non phonétique, § 99). On a ainsi r.<br />
krylô (de krilo) et s.-cr. krtio sur intonation douce, r. veslô et s.-cr.<br />
vèslo comme r. veztl ; et r. gôrlo, rdlo, s.-cr. grlo, ràlo sur intonation<br />
rude, r. rylo et s.-cr. rllo comme rlti.<br />
Avec les éléments thématiques -a- et -i- qui attirent l'accent<br />
quand la racine n'est pas d'intonation rude, on a r. stojâlo et
422 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
susilo, s.-cr. stàjalo et sùsilo, comme r. stojât', susit', mais r. vésalo<br />
et prâvilo, s.-cr. vjësala et pràvilo, comme r. vésat', prévit', avec<br />
une tendance à l'extension de la paroxytonaison plus courante,<br />
ainsi dans r. pravilo au sens « gouvernail » de kormilo.<br />
Pour le sens, le suffixe indique ce qui est en rapport avec l'action<br />
verbale comme moyen, instrument de l'action, et de là on peut<br />
passer à l'idée du lieu de l'action, ou de son résultat.<br />
SUFFIXE V. SL. -iste<br />
§ 950. En vieux slave. —• Ce suffixe se tire en principe de<br />
substantifs et fournit des noms qui indiquent le lieu.<br />
Voici les exemples vieux-slaves :<br />
pri-bëziste «lieu de refuge», ubëziste, podûbëzisie (Izb. Svjat.),<br />
sur la racine bëg-, verbale mais à formes nominales, bëgu « fuite », etc.<br />
(§ 752) ;<br />
suboriste « lieu d'assemblée » (Ostr., Pand. Ant.), variante de<br />
sûnïmiste, sur suborû « assemblée » ;<br />
crukuviste « temple païen », un lieu d'église qui n'est pas l'église,<br />
cruky ;<br />
gnoiste « fumier », de gnoi ;<br />
grebiste et grobiste (§ 80) «monument funéraire», de grobu,<br />
« tombe » ;<br />
igrist (Izb. Svjat., Ham.) «lieu et objet de jeu» de igrï, igra<br />
(§1117);<br />
sûnïmiste « lieu de réunion », de sunïmû ;<br />
kaliste (Izb. Svjat.) « bourbier », de kalû « boue » ;<br />
kapiste « idole », de kapï « image, statue » (§ 713) ;<br />
pokoiste (Ham.) «lieu de repos, pokoi»;<br />
kopiiste (Ham.) « bois de la lance », de kopije ;<br />
kroviste (J. Ex.) «lieu d'abri, de dépôt», pokroviste, sukroviste,<br />
de krovû ;<br />
kumirisle (Ham. 18223) « temple à idole », de kumirï ;<br />
loviste (Gr. Naz., Ham.) «lieu et objet de chasse », de lovu ;<br />
sûmetiste (Pand. Ant.) «fumier», de sûmetï (§ 714) ;<br />
ismoliste (Ham.l5023) « endroit de saillie », sur le postverbal<br />
-molu de izmïlëti « être saillant » ( § 727) ;<br />
nyriste «endroit d'une muraille, d'une tour», de nyrï (§ 53),<br />
slov. mirisëe « ruine de muraille » et s.-cr. ancien miriste ;<br />
ognisle « foyer, bûcher » (Upir', Ham.), de ognï ;<br />
popïriste « stade », proprement « terrain foulé, de course », de<br />
po-pïrati, sans doute sur une forme nominale pïr- qu'on n'a pas dans<br />
les postverbaux (§ 720), mais qu'on trouve au moins dans pïrja
[§ 924] SUFFIXES NEUTRES 423<br />
«dispute» (§ 1022) en regard de pïrëti «contester» (§ 591), de la<br />
même famille que pire-, *perti et pere-, pïrati ;<br />
pruliste, au pluriel « haillons » (Supr. 1922), v. r. « vêtement »<br />
et r. mod. porlisëe, s.-cr. prtlste « toile » : le sens doit avoir été<br />
«morceau de toile», comme celui de prutu (§ 1161) ;<br />
seliste « lieu d'habitation », de selo ;<br />
soliste « saline » (Ps. LIX, 2 Cud., adj. solistïskù Ps. Sin., etc.),<br />
de solï ;<br />
sçdiste « tribunal », de sçdu, et sçdiiste sur sçdii « juge » ;<br />
sramiste (Ham.) « parties honteuses », de sramu ;<br />
stanisie «étape» (Athan.) et «stabilité» (Hés. XVII, 39 Bon.),<br />
pristaniste « port », de stanu, et slavon stanoviste ;<br />
straziste (Pand. Ant., Gr. Naz.) «lieu de garde », de slraza ;<br />
syrisle (Izb. Svjat., Cosmas) « estomac », proprement « caillette »,<br />
endroit de la présure^ de syru « fromage » ;<br />
tëliste (Cyr. Jér., Hés. LXXVII, 58) « statue, idole », de tëlo<br />
« image, corps » ;<br />
potoëiste (J. Ex.) « gouffre », de potoku « courant, torrent » ;<br />
trëbiste « lieu de sacrifices, autel », de trëba, et otrëbiste (Ham.)<br />
« objet de purification » ;<br />
trizniste (Hom. Mih.) « lieu de jeux, stade », de trizna ;<br />
iruzisle « lieu de marché », de trugù ;<br />
vrëtiste «sac», du slavon vrësta, voir § 1026.<br />
isxodiste « lieu de sortie, issu e », suxodiste «descente» (Hom.<br />
Mih. 240^), de xodu ;<br />
pozoriste « théâtre », de pozoru ;<br />
pozraëisle « observatoire » (Hés. XLVII, 3, LXIV, 2, etc.), de<br />
pozraku ;<br />
ziste «lieu d'habitation», seulement dans deux exemples du<br />
Suprasliensis, 5179 corrigé en ziliste, et 27217 qui paraît être une<br />
faute pour zitije 34924 et Philipp., III, 20 dont c'est une citation :<br />
ailleurs ziliste ;<br />
zupiste «sépulture » apparaît dérivé de zupa « district» (§ 1094)<br />
et doit avoir désigné la tombe collective, le cimetière d'une<br />
agglomération.<br />
§ 951. Formes en -liste. — En -aliste :<br />
prëbyvaliste (Hom. Mih.) « lieu de séjour » ;<br />
prodaliste « lieu de vente » (Hom. Mih., en regard de prodanije<br />
Supr. 331 27 7ÇpO«Tc!>pl,OV, lu/TCpaTTjplOv) ;<br />
vûlagaliste « bourse », de vulagati « mettre dans » ;<br />
sëdaliste « siège ».
424 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 834]<br />
En -iliste :<br />
blçdiliste « lupanar » ;<br />
jçtiliste (Hom. Mih.) « prison », prijçtiliste (Athan.) « réceptacle,<br />
hr/zïov » ;<br />
çziliste « prison » ;<br />
popçdiliste (Athan.) « lieu de repoussement, dbroTpômxiov » ;<br />
sçdilisie « tribunal », à côté de sçdi(i)ste ;<br />
strasiliste (Éphrem) « épouvantail,
[§ 924] suffixes neutres 425<br />
aux diverses langues slaves, r. et slov. toporisëe, tch. lopofistë,<br />
pol. toporzysko, et dans toute une série de dérivés semblables :<br />
s.-cr. kàsïste « manche de la faux », slov. kosisëe, pol. kosisko et<br />
kachoube kosiszcze, polabe *kosisce ;<br />
r. knutovisëe « manche du fouet, knul », mololovisce « manche<br />
du marteau, môlot » ;<br />
pol. wçdzisko « canne à pêche », de la ligne à hameçon, wçda ;<br />
tch. biëistë « manche du fouet, bië », lucisië « bois de l'arc, luk » ;<br />
slov. klâd(i)visce « manche du marteau, klâdivo » ;<br />
s.-cr. gràbljïste « manche du râteau, gràblje », grebènlste « manche<br />
du peigne à carder, grëbën », ostvïste « manche du harpon, ôstve »,<br />
sjèkirïste « manche de la cognée, sjèkira », et ojïsie « mancheron<br />
de la charrue », élargissement de àje « timon » (§ 191).<br />
Avec les dérivés en -al- et -il-, le rapport est plus étroit avec<br />
les thèmes verbaux, mais toujours par l'intermédiaire d'une forme<br />
nominale. Cette forme en -/- est celle du participe parfait ou d'autres<br />
suffixes en -l-, mais non du suffixe -(d)lo, comme on le voit par<br />
plusieurs dérivés en -lisko du polonais. Il y a eu extension de<br />
-iliste, et (pri)jçtiliste présente -iliste superposé à une forme en<br />
-t- comme le participe passif jqtû, substantif verbal jçtije.<br />
§ 953. Dans les langues slaves. — En russe, on a -isëe formant<br />
des noms de lieux : ognisce, tôréisëe, perevésisëe « endroit où l'on<br />
place des perevésy, grands filets pour attraper des oiseaux » ;<br />
-ovisce : letovisëe « lieu de séjour d'été, letovdnie », moxuvîsce « endroit<br />
couvert de mousse » ; -bisëe : gùl'bisce « lieu de promenade, gul'bâ »,<br />
sirél'bisëe « lieu de tir, strel'bâ » et « espace d'un tir, portée d'une<br />
flèche ». En ce sens, le suffixe est peu productif, et le type en<br />
-lisëe, zrëlisëe « spectacle », vmestilisëe « réceptacle », ucilisce « école »,<br />
a un caractère livresque. L'indication du lieu peut être celle d'un<br />
lieu du passé : gorodisëe « emplacement d'une ville ancienne ».<br />
C'est surtout comme suffixe d'augmentatif que -isëe est vivant :<br />
arbûzisëe « grosse pastèque, arbûz », byëisëe « grand taureau »,<br />
velikdnisëe « grand géant, velikân » ; avec des féminins secondaires<br />
en -isca : bâbisëa « grosse femme, baba », ruëisca « grosse main ».<br />
En polonais, c'est un suffixe -isko que l'on trouve : ognisko,<br />
pastwisko « pâturage » de pastwa « pâture », klepisko « aire de<br />
grange » sur klepac « battre », grodzisko « emplacement d'un ancien<br />
château », cmenlarzysko « ancien cimetière, cmentarz », sciernisko<br />
« chaumes » (slavon struniste, § 1084) ; -owisko : grochowisko<br />
« champ de pois, groch » ; -lisko : zawalisko «tas d'éboulis » sur<br />
zawal(a), pogorzelisko «lieu d'un incendie» sur pogorzaty<br />
« incendié ».
426 les suffixes productifs [§ 834]<br />
Et le suffixe est surtout productif pour la formation d'augmentatifs,<br />
qui peuvent être des péjoratifs : pokoisko « grande chambre,<br />
pokôj », zçbisko « grande dent », chlopisko « grand gaillard », konisko<br />
«grand cheval, haridelle», bab(i)sko «vilaine vieille femme»,<br />
piaszczysko « mauvais manteau, piaszcz » ; topielisko « grand gouffre,<br />
topiel », d'où giçbielisko « marais profond » sur le thème gleb-.<br />
Mais -isko est nouveau en polonais, et n'a commencé qu'au<br />
xiv e siècle à se substituer au plus ancien -isëe : ogniszcze, pastwiszcze.<br />
La forme -iszcze subsiste dans des noms de lieux :<br />
Targowiszcze, en regard de targowisko «place du marché»; et<br />
dans l'isolé zgliszcze « lieu d'un incendie », pour zgliszcze, sur<br />
l'ancien zec, prés. zg, part, parfait zegi, zgi- (§ 435), en dehors<br />
d'emprunts à l'ukrainien comme dworzyszcze « métairie ».<br />
Le kachoube conserve -iszcze : cerkwiszcze « emplacement d'une<br />
ancienne église », bojowiszcze en face de pol. boisko « endroit où l'on<br />
bat, aire », sur boj « batterie ».<br />
Le polabe atteste de même -isëe, ainsi tyisseiste — kosisce<br />
« manche de faux », *gordisce, pol. grodzisko.<br />
Le sorabe a également -isce : h. sor. hrodzisco, stanisco « campement-».<br />
Le tchèque a -isko comme le polonais, mais en maintenant<br />
largement dans les noms de lieux la forme antérieure v. tch. -isce,<br />
mod. -istë : bahnisko « marécage » de bahno, letovisko « villégiature »,<br />
et bojistë « champ de bataille », hnojistë « fosse à fumier », trzistë<br />
« (place du) marché ». Il y a répartition dialectale, -istë en Bohême<br />
et -isko en Moravie, et répartition selon le sens, -istë en valeur<br />
concrète, -isko en valeur abstraite : ohnistë « foyer, âtre » et ohnisko<br />
« foyer de troubles, foyer de la lentille », et seulement hledisko<br />
« point de vue ». Pour la formation des augmentatifs et dépréciatifs,<br />
on a -isko : dubisko « grand chêne » en regard de dubistë<br />
« chênaie », chlapisko « gros gaillard », babisko « vieille et mauvaise<br />
femme ».<br />
En slovène, on a grobisce, ognjisce, besedisëe « parloir », brodisëe<br />
« lieu de passage en bac » ; des dérivés, surtout récents, de verbes :<br />
stojisce « place debout », susisëe « séchoir » ; de nombreux dérivés<br />
en -alisëe : prebivâlisce « résidence », gledalisëe « théâtre », zimovalisëe<br />
« quartiers d f hiver » ; plus rarement en -ilisce : susilisce,<br />
uëilisëe ; —• et des formations péjoratives et diminutives : bâbisëe,<br />
krâvisce « vache chétive », qui usuellement s'abrègent en babsè,<br />
gén. babséta, krâvse, gén. krâvseta, avec passage au type en -qlde<br />
noms de petits animaux.<br />
Le serbo-croate a -ïste, plus rarement -iste : noms de lieux,<br />
lovïste « terrain de chasse », nàclste « gîte de nuit », plândïste « lieu<br />
du repas de midi, plddnê ( § 189) », vasàrTste « champ de foire,<br />
vdsar », et sétalïste « promenade », trkalïste « champ de courses »,
[§ 954] suffixes neutres 427<br />
Ijëtovalïste « lieu de villégiature » ; noms de lieux anciens : gràdïste<br />
« ruines d'un château-fort », manastirïste « emplacement d'un ancien<br />
monastère » ; et aussi espace de temps dans le régional gôdïste<br />
« année », doublet de gôdina depuis le vieux serbo-croate, qui peut<br />
avoir désigné le calendrier des temps de l'année (gôd « jour de<br />
fête », § 738) ; — et, rarement, augmentatifs et péjoratifs ; blâtïste<br />
« grand marais », tjùdiste et dial. co(vj)ecisle « monstre d'homme ».<br />
Le cakavien a dvorlsce, gnojïsce, montrant que la longue du<br />
stokavien -ïste est secondaire.<br />
Le bulgare a des noms de lieux : ogniste, uëiliste ; des augmentatifs<br />
: ëovéëiste « colosse », detiste « gros enfant », glaviste « grosse<br />
tête », vétrtste « grand vent ». La particularité du bulgare est d'avoir<br />
tiré de -iste un pluriel -isîa (§ 145) de masculins à thème monosyllabique,<br />
désignant surtout des lieux : grad, plur. gradové et<br />
gradtstd ; drum « grand-route », plur. drûmove et drumista ; hati<br />
« auberge », plur. hdnove et hdnista ; pal « chemin », plur. pâtista, etc.<br />
De même le macédonien : drum, plur. drumje (collectif) et drumista ;<br />
pat, plur. patovi et patista.<br />
§ 954. Origine. — Le suffixe forme des noms de lieux, mais non<br />
uniquement (§ 952). On trouve des augmentatifs (ou péjoratifs)<br />
dans toutes les langues slaves, sauf en vieux slave, du moins sans<br />
exemple net, mais prutiste au sens de « haillon » pourrait être un<br />
augmentatif ; comme ces augmentatifs sont des formations expressives,<br />
il n'est pas surprenant que les textes vieux-slaves les<br />
ignorent.<br />
Ce suffixe complexe est proprement slave. En baltique, on<br />
trouve v. pr. -istian et lit. -ykstis de *-ys(k)tis donnant des<br />
diminutifs de noms d'animaux : v. pr. eristian « agneau » sur lit.<br />
ëras « mouton », wosistian « chevreau » de wosee « chèvre », gertistian<br />
« poussin » de gertis « coq », lit. sunykstis « petit chien » de suô, etc. :<br />
c'est sûrement un emprunt au slave -isce qui, en vieux polonais,<br />
comme « augmentatif », est surtout dépréciatif et proche des<br />
diminutifs. On a si. -isce dans v. pr. suiristio « petit-lait » de syrisëe<br />
« présure », v. pol. syrzysko, et la finale v. pr. -tian qui apparaît<br />
dans werstian « veau » sur lit. vefsis « bœuf », et dans swinlian<br />
« porc » qui est le polonais dialectal éwinczç, kach. svincq, indique<br />
une contamination avec l'autre suffixe slave -et-, comme en<br />
slovène.<br />
La forme en -isko du polonais, et de là du tchèque, est nouvelle,<br />
et elle s'explique par un fajix jeu d'alternances (§ 110). On peut<br />
donc restituer une forme originelle *-istje aussi bien que *-iskje.<br />
Un rattachement au suffixe adjectival -ïskû ne rend pas compte du<br />
premier élément -i- de -isëe, et on peut seulement penser à une<br />
attraction de -ïskû, neutre -ïsko, favorisant en polonais la substitu-
428 les suffixes productifs [§ 954]<br />
tion de -isko à -iszcze. La meilleure explication proposée est celle<br />
d'un dérivé du suffixe d'adjectifs -istu : le polonais a topielisko<br />
«grand gouffre» en regard de l'adjectif topielisty «plein de<br />
gouffres», de topiel «gouffre» (§ 1057), et l'on conçoit que du<br />
slavon mravistu « plein de fourmis », pol. mrowisty, r. murav'lstyj<br />
sur muravéj (§ 146), ait été tiré le slavon mraviiste « fourmilière »,<br />
pol. mrowisko, r. mur au'isëe, v. tch. mravisëe, slov. mravisëe. On<br />
conçoit bien aussi que le suffixe -islû, qui indique une qualité,<br />
plestistù « large d'épaules », de pleste, ait fourni des augmentatifs.<br />
Mais ce n'est pas si simple, et il faut justifier la forme -istu, que<br />
le vieux slave atteste peu, du suffixe -iiû (§ 991), et la dérivation<br />
en -je (§ 934).
CHAPITRE XXV<br />
SUFFIXES D'ADJECTIFS<br />
§ 955. Suffixe ~(j)ï• — Le type des adjectifs possessifs et<br />
d'appartenance est ' productif en vieux slave (§ 295), de façon<br />
limitée et déjà en voie de disparition dans les adjectifs possessifs<br />
de noms propres, mais toujours vivant avec les autres noms de<br />
personnes :<br />
cësarjï « de l'empereur, cësarï », ëlovëëï « de l'homme », kunçzï<br />
« du prince, kunçdzï », otïcï « du père », prorocï « du prophète », etc. ;<br />
et gospodinjï « du maître » (Supr. 36524), de gospodinu, diffèrent de<br />
Gospodïnjï (§ 968) de Gospodï «Seigneur» (§ 212) ; zenisï (Pand.<br />
Ant.) « du jeune époux, zenixu » ; sçpostastï (Pand. Ant.) « de<br />
l'adversaire, sçpostatu » comme protivïniëï de proliviniku ; également<br />
avec des féminins : materjï « de la mère », dëvicï « de la vierge »,<br />
vïdoviëï « de la veuve ».<br />
Et surtout avec les noms d'animaux, comme type d'adjectifs<br />
d'appartenance à une espèce, et non à un individu comme avec<br />
les noms de personnes :<br />
govçzdï « de bœuf, govçdo », inorozï « de licorne », jarïmïnicï<br />
« de la bête de somme », jelenjï « du cerf » (Supr. 224la), junïëï<br />
« de taureau », kozïljï « de bouc », medvëzdï (écrit medvëëï J. Ex.)<br />
« d'ours », orïljï « d'aigle », osïljï « d'âne », ovïëï « de brebis » (et<br />
ovïcii, § 959), ovïnjï « de bélier », telïëï (Hébr. IX, 19) « de veau »,<br />
velïbçzdï « de chameau ».<br />
Et aussi bien avec les noms de petits animaux : putiëï « d'oiseau »<br />
(Gr. Naz., Hés. 14813), paçëï « d'araignée » (Pand. Ant.). Et également<br />
mësqëï et slunïëï (Upir') « de la lune, du soleil », s.-cr. ancien<br />
sunac, slov. sôlnë(j)i. ,<br />
La liste s'accroît en slavon, où l'on notera un type osïlçstï, mais<br />
nouveau pour osïlçtinû (§ 966), « d'ânon, osïlç ».<br />
D'un thème en on a volui (Izb. Svjat., Ham.) « de bœuf»,<br />
en regard de volovïnu en rédaction vieux-slave : dérivé qui se
430 les suffixes productifs [§ 954]<br />
conserve dans s.-cr. vàlûjskï et dans le nom ancien et régional de<br />
la « langue-de-bœuf », voluj jezik, champignon, qu'on retrouve<br />
dans r. volûj désignant une variété d'agaric ; d'où s.-cr. orlujï<br />
et àrlûjskî « d'aigle », ovnùjskl « de mouton ». Mais pour v. pol.<br />
wieku(j)i «éternel», voir § 957.<br />
Une particularité des adjectifs possessifs, de flexion indéterminée,<br />
est d'employer la forme déterminée pour indiquer le nom<br />
de la femme : v. si. Pilastaja « la (femme) de Pilate », slavon russe<br />
ëïtïëaja « la femme de l'anagnoste, ctlïcï », krucïmiëaja « la femme<br />
du cabaretier, krûëïmitu (§ 1175) », et couramment en vieux russe,<br />
ainsi dans la Chronique de Kiev Vsevolozaja « la femme de Vsevolod »<br />
(année 1097), dans la Chronique de Novgorod Vsevolozaja (année<br />
1205), Mïstislavljaja « la femme de Mstislav » (année 1122), Svjaloslavljaja<br />
« de Svjatoslav » (année 1138), Zavizaja « de Zavid » (année<br />
1199) ; et de même -ovaja (§ 961), -inaja (§ 966).<br />
§ 956. Les autres adjectifs en -(j)ï. — Les emplois du suffixe<br />
~(j)ï, qui est l'indo-européen *-yo-, étaient beaucoup plus variés,<br />
et les restes ne manquent pas de sa productivité ancienne en dehors<br />
des adjectifs possessifs et d'appartenance, de même que de celle<br />
des "types de substantifs en masc. -(j)ï, neutre -(j)e, fém. ~(j)a<br />
(§ 1019). La liste en est longue, mais composite :<br />
dobljï « valeureux », à côté de dobru « bon », sur le thème dob-<br />
(§ 739) ;<br />
dupljï (Gr. Naz., Upir') « creux », sur un thème dup-, comme<br />
dupina « cavité » (§ 892) et duplja (§ 1062), qui a la forme *dub- en<br />
baltique, et en slave dans dubrï(% 1118) ;<br />
negubljï « non fléchi », et Hés. XCIV, 10 avec variante negybljï,<br />
sur gub- (§ 494);<br />
luzï « mensonger », neluzï (Hés. CXXIX, 5), sur lug- ;<br />
ryzdï (Ham.) « roux », sur le thème rud- (§ 759), et sur une forme<br />
*rûd- qu'on trouve dans lit. rudis « rouille », avec un allongement<br />
vocalique qui apparaît dans les inchoatifs en si. -nçti (§ 496) et<br />
balt. *-ste- (§ 499) ;<br />
nevëzdï (Cosmas) « ignorant » et slavon vëzdï « qui sait, expérimenté<br />
», sur vëd-, mais mal distinct du substantif masc. nevëzda<br />
(§ 1024) ; pol. wiedz est substantif (§ 1019) ; et voir vëstï, § 958.<br />
Et brëzda «(femme) qui porte, enceinte» (Théod. LXXVII, 7),<br />
r. berëzaja «(femelle) pleine», tch. brezi, s.-cr. brëda, slov. bréja,<br />
sur un élargissement en -d- de la racine *bher- «porter» (§ 471)<br />
qui a son correspondant dans lat. forda ;<br />
buzdrjï « alerte » (Supr., Gr. Naz.), élargissement de bûdru dont<br />
la cause apparaît mal, mais qui a son parallèle dans budrlnu<br />
(§ 978);
[§ 957] suffixes d'adjectifs 431<br />
-gozdï, de god- et en regard de v. si. -godînu, dans le slavon<br />
russe pogozdï, pri-, « qui convient », r. pogôzij« beau, de beau temps »,<br />
prigôzij « joli », dial. gôzij ;<br />
-xozdï, de xod-, v. si. -xodïnu, dans le slavon prixozdï et le slavon<br />
russe mimoxozii, na-, prë-, pri-, pro-, su-, r. prixôzij « nouveau<br />
venu », proxôzij « de passage », sxôzij « semblable » ;<br />
*-jazdjï, de jazd- (§ 785), dans le slavon russe priëzzij, pro-, r.<br />
priézzij « nouveau venu », mimoézzij et proézzij « de passage » ;<br />
stuzdï, (s)luzdï «étranger», dérivé slave en -(j)ï de l'emprunt<br />
au germanique got. piud- (§ 263) ;<br />
r. d(j)ûzij « fort », pol. duzy, sur le thème dçg- (§ 765) ;<br />
r. kljuzij « bien fait », sur le thème kljud- ( § 758) ;<br />
bolëzdi (Gr. Naz.) «malade» à-côté de bolëdïnu (J. Ex.), sur<br />
le thème élargi bolëd- ( § 1005) de bolë-ti ;<br />
poludînjï « de midi » (Ps. XG, 6, var. poludïnïnû) sur poludïne<br />
«à midi» (§ 1214),'et s.-cr. ancien poludnji, v. pol. potudni, tch.<br />
poledni sur poledne ;<br />
v. r. polësï «couvert de buissons», r. polésij (polésnyj), de<br />
lësu ;<br />
bestuzdï (Pand. Ant.) « éhonté », à côté de bestudu et bestudïnu<br />
(§ 1227), comme dérivé parallèle de la locution be(z) studa, et r.<br />
bezstûzij refait en bezstyzij sur styd remplaçant stud (§ 754).<br />
Mais bezumljï est à lire bezumïljï, et d'un type différent (§ 1059).<br />
§ 957. Formations moins claires. — Si sui « qui est à gauche »<br />
a un correspondant indo-iranien skr. savydh, av. havya-, et restitue<br />
une forme originelle *seu-yo-, sur thème inconnu, sont moins<br />
analysables :<br />
bui « fou, exubérant », dont l'initiale bu- ne s'identifie pas<br />
sûrement ;<br />
sui « vain » et dans les mêmes conditions :<br />
svëzï « frais, récent » en slavon et dans r. svézij, pol. swiezy, est<br />
isolé, le lette swaigs paraissant adapté du slave ;<br />
iunjï « gratuit », très rare comme adjectif (Théod.), mais usuel<br />
dans l'adverbe tunje, se retrouve en sorabe, h. sor. tuni, b. sor.<br />
tuny, avec le sens de « bon marché », mais est d'autant plus obscur<br />
que la forme polonaise est tani ;<br />
sinjï (Izb. Svjat., Pand. Ant.) « bleu foncé », r. sinij, s.-cr. sînjî,<br />
présente la même initiale que sivu «gris» (§ 1182), et pol. siny,<br />
tch. siny du type dur sqnt sûrement analogiques de pol. siwy, tch.<br />
sivy, mais cela n'explique pas la finale -njï, et un rattachement<br />
à la racine de sïjati « briller », qui a un dérivé sënï « ombre » à<br />
suffixe -ni (§ 1084), n'est pas plus satisfaisant ;
432 les suffixes productifs [§ 954]<br />
pësï «à pied» est une forme abrégée (§ 1142) du balto-slave<br />
lit. pësëias (§ 175), de *pëd-tyo- ;<br />
r. xorôsij « bon » l'est de v. r. xorobru « brave » (§ 10) ;<br />
losï « mauvais », qui n'apparaît qu'en serbo-croate, Vos, depuis<br />
le xvi e siècle, et en bulgare, l'est sûrement aussi, et sûrement du<br />
mot s.-cr. Vàlar « paresseux », anciennement « vaurien », slov.<br />
Içter « vaurien », tch. loir, pol. iotr, emprunt à m. h. a. loter, mod.<br />
Lotter(bube) ;<br />
oblasï « laïc » n'est que vieux-slave, passé de là au vieux russe<br />
comme slavonisme : l'interprétation proposée par ob-Vlasi « les<br />
Vlasi (§ 70) d'alentour» (s.-cr. mod. Vlàh « Morlaque », Serbe<br />
orthodoxe) n'est qu'ingénieuse, et il faut penser à l'abrègement<br />
familier d'un mot comme oblaslinu (§ 966) «qui relève d'une<br />
oblastï, province » (et aussi « paroisse ») ;<br />
pol. rqczy « leste, rapide », v. tch. rue et adv. slovaque et h. sor.<br />
ruëe « rapidement », subst. v. tch. ruëest « rapidité » ( § 905) et<br />
locution naruëest « rapidement », doit être sur le thème rçk- de<br />
rçka « main », lit. rinkti « ramasser » (§ 765).<br />
On a l'adjectif i.-e. *medhyo- « du milieu » substantivé dans v. si.<br />
mezda « limite » ( § 1027) ; — prëzdï « le devant » et zazdï « le derrière »<br />
sont substantifs (§ 1019), avec adverbes prëzde (§ 322) et naprëzdï<br />
(§ 1200).<br />
Et voir v. si. vëzda « paupière », § 1026, et l'adverbe v. si. svënje,<br />
§ 1073.<br />
Le vieux-slave proëii « tous les autres » est sur proku « le reste »,<br />
prokyi, adjectif et substantif (§ 1038), mais ce pourrait être la<br />
forme à article postposé de l'adverbe proëï (§ 272) ; — et ce doit<br />
être le cas pour l'adjectif v. si. utrëi « du lendemain » (§ 245), bien<br />
distinct du substantif utrije «le lendemain » (§ 929). — Quant au<br />
vieux-polonais wieku(j)i «éternel» (mod. wickuisty, § 992), qui<br />
est différent de wiekowy « séculaire » et qui n'a pas de raison d'être<br />
un dérivé d'appartenance en *-ujï du type de *volujï (§ 955), il<br />
est sûrement bâti aussi sur un adverbe ou locution adverbiale<br />
comme (w) wieku : le serbo-croate ancien a un adverbe vëku<br />
« à jamais » et en tire un adjectif à finale slavonne vëkusl « éternel ».<br />
§ 958. Suffixe *-tjï. — Une finale *-tjï se rencontre dans plusieurs<br />
adjectifs :<br />
kosëï « osseux », sur kostï, en slavon russe (kosëïnu, Fl. Josèphe,<br />
1953), et voir le substantif r. kosëëj « squelette ambulant, homme<br />
avare », § 1034 ; s.-cr. kôstan « osseux », et àkost « maigre » refait<br />
sur okostiti « devenir osseux » ;<br />
slastï (Pand. Ant.) «voluptueux» (Prov. XII, 11), de slastï<br />
« volupté, délices » ;
[§ 957] suffixes d'adjectifs 433<br />
slavon vlastï « propre » et locution na vlastï « en propre », v. tch.<br />
vlasc(i) et tch. mod. zvldstë «particulièrement», pol. zwlaszcza ;<br />
s.-cr. ancien navlastn propre, spécial », adj., et mod. nàvlas « exprès,<br />
à dessein », adv. ; slov. nalàsë« à dessein », adv., d'où un substantif<br />
lâsc dans na vso lasc « proprement » ; en regard du substantif vlastï<br />
« pouvoir », dont il est visiblement le dérivé ;<br />
slavon vëstï « qui sait, habile », s.-cr. vjëst et slov. vêsc « habile »,<br />
v. r. vëscï « magique » et mod. véscij « prophétique », pol. wieszczy<br />
et subst. wieszcz « prophète », tch. ancien vësti : sur l'adjectif verbal<br />
-vëstu ( § 408) ou sur le substantif vëstï « connaissance » ;<br />
slov. jêsc « qui est gros mangeur, goulu », et s.-cr. cak. jêsc,<br />
également en regard, comme jêsca «nourriture» (§ 1181), du<br />
substantif slov. jêst «le manger» (§ 1169) ;<br />
slov. râsc « qui pousse bien, luxuriant », et s.-cr. ràstan, sur le<br />
thème rast-.<br />
Avec d'autres adjectifs, c'est bien à un suffixe *-tyo- qu'on<br />
a affaire, en regard du suffixe *-tja de substantifs (§ 1181) :<br />
v. si. obïstï « commun », s.-cr. ôpcï, tch. vùbec « en général », sur<br />
obi- (§ 89) ;<br />
*doma-tji « de chez soi » dans s.-cr. domâcî, slov. domàë, tch.<br />
domâcî (v. si. domastïnjii, § 970), sur l'adverbe doma « à la maison » ;<br />
nistï « pauvre », r. nîscij, etc., sûrement sur le thème niz- de<br />
l'adverbe nizù « vers le bas » (§ 273) ;<br />
tustï « vide, vain », r. tôscij, s.-cr. tâst, etc., avec un correspondant<br />
baltique, lit. tùscias, donc balto-slave *ius-lyo- qui se laisse rattacher<br />
à la racine *tus- «se calmer» (§ 494), et a un parallèle dans skr.<br />
tucchyâh de *tus-kyo-.<br />
Et *izçstï supposé par izeslïnu (Gr. Naz.) «excellent», izçstïnicïsku<br />
(Supr.) « des excellents », qui est attesté en effet dans le<br />
serbo-croate ancien iztic, avec la substitution de -uc à -ec qui<br />
apparaît dans les participes présents devenus adjectifs (§ 281),<br />
bjègûc «fuyant» (§ 590), substitution qui donnait au xvi e siècle<br />
des formes comme stojuci pour stojeci : donc dérivé en *-tjï du thème<br />
de izçli « extraire », parallèle à lat. eximius « qu'on tire à part,<br />
excellent ».<br />
C'est ce suffixe *-ijï qu'il faut supposer dans la finale du suffixe<br />
*-itjï (§ 869), et qu'on doit retrouver dans v. si. ovosle « fruit » et<br />
plusta « poumon » (§ 1021), et dans l'adverbe v. si. /este « encore »<br />
(§ 322), avec dérivé v. tch. jescba « être, substance » (§ 911).<br />
Le suffixe est d'époque indo-européenne. Si en grec ferIOÇ,<br />
« renversé en arrière », sur Û7RO, lat. sub, est isolé, le sanskrit a une<br />
série d'adjectifs en -tya- tirés d'adverbes : nî-tyah « propre,<br />
constant » de ni- « vers le bas, en dedans » (si. nicï, § 275), sânu-tyah
434 les suffixes productifs [§ 954]<br />
« étranger » en face de l'adverbe sanu-tdr « au loin », amâ-tyah<br />
« conseiller, ministre » de amâ « chez soi ». Parallèlement, le hittite<br />
a des adjectifs dérivés en -zis de *-lis : hantezis « premier » de hanti,<br />
gr. avTt, lat. ante « devant », apezis « dernier » de apa « en arrière »,<br />
sarazis « le plus haut » de sara « en haut ». En baltique, le suffixe<br />
apparaît dans lit. apacià « partie d'en dessous » sur apa- (si. opaky,<br />
§ 322), comme skr. âpa-tyam « descendance », et dans les adjectifs<br />
yscias « véritable, manifeste » en regard du lette ïsl « véritable »,<br />
si. islu (§ 1159), pesetas «à pied», plôkscias «plat» sur *plâsk-<br />
(§ 1065), siâëias « qui se tient debout », et fém. nésëià « qui porte,<br />
enceinte » (v. si. brëzda, § 956) sur le thème nés-, et nés- dans<br />
l'itératif lette nësât.<br />
§ 959. Suffixe *-ïjï. — L'indo-européen avait des suffixes *-yoet<br />
*-iyo-. En baltique, ils se confondent plus ou moins (§ 146),<br />
mais en slave ils sont bien distincts : le slave présente des substantifs<br />
en masc. *-ïjï et fém. -ïja (§ 1028), neutre -ïje (§ 925), et des<br />
adjectifs en -ïjï.<br />
Diabord tout un type d'adjectifs d'appartenance, parallèle<br />
aux adjectifs en -/T, et à peu près sans flottement avec eux ;<br />
de noms de personnes :<br />
Bozii « de Dieu », qui sert d'adjectif possessif à Bogu ; vrazii<br />
« de l'ennemi, vragu » ; rabii « de serviteur », et en slavon russe<br />
ancien xlapii, de xlapu « esclave » ; et babii « de vieille femme »,<br />
I Tim., IV, 7, variante de stariëïsku.<br />
Mais surtout de noms d'animaux :<br />
kozii « de chèvre » (Pand. Ant., Ham. 28123) ; kurii « de coq » ;<br />
lisii « de renard » ; lïvii « de lion » ; ovïëii (et ov ïcï) « de brebis »<br />
pïsii « de chien » ; rybii « de poisson » (Ham. 160J2, etc.) ; skotii<br />
« de bétail » ; struëii « de cigogne » ( J. Ex.) ; vranii « de corbeau »<br />
(Ham. 17922).<br />
Et de nombreuses autres formes en slavon. On a ensuite un<br />
petit groupe de dérivés de verbes :<br />
pitii « potable, 7T6TIÎJ.OÇ » (Supr., Gr. Naz.) ;<br />
nesûtrûpëtii « insupportable, àçop^Toç » (Supr.), à côté de l'usuel<br />
nesûtrupimû (§ 404) ;<br />
Ijutovodilii (§ 1213) «difficile à conduire, Sucraycoyoç» (Ham.<br />
105ai);<br />
zobatii «(raisin) mangeable» traduisant rrpocKpaToç «nouveau»,<br />
Nombres, VI, 3 et XIII, 20 (21) ;<br />
jastii (Pand. Ant.) signifiant « (l'heure) de manger, v/jç semàcrscoç<br />
» ;
[§ 957] suffixes d'adjectifs 435<br />
xoditii (J. Ex. chez Miklosich) paraît de même signifier « de<br />
l'aller » plutôt que « praticable » ;<br />
oralii « arable » (Mikl.) est vieux-serbe, mod. oracT.<br />
Ces dérivés ont été tirés à l'origine de participes passifs et<br />
adjectifs verbaux en -lu : pitii de l'ancien *pitu comme sa forme<br />
neutre le substantif verbal pitije ; et jastii également, qui est en<br />
regard du substantif verbal jastije (v. si. jadenije, § 625) attesté<br />
en slavon russe (§ 932) et en serbo-croate ancien : jestje, jesce, et<br />
on trouve en serbo-croate un exemple de l'adjectif jesei (stol)<br />
« (table) à manger » de la série de oraéï.<br />
Le slavon russe celij « à lire », dans céi'ja minéja « ménologe »,<br />
est une formation à part, sur le postverbal *cïtu, r. -êët (§ 810).<br />
Il y a enfin des formes isolées : l'ordinal tretii « troisième »,<br />
lit. trêcias, qui continue i.-e. *trtiyo- (§312); velii «grand», qui<br />
conserve avec adaptation en *-ïjï un adjectif en -ï (§ 276). Mais<br />
bezuratii Supr. 32422 « le sans guerre, ty]v à7toXép)Tov », est à interpréter<br />
bez-rati-i, forme déterminée du groupe bez rati comme<br />
bez-uma-i « le sans esprit » de bez uma (§ 245).<br />
Un mot est intéressant, mais de formation obscure : *divïjï,<br />
v. si. divii « sauvage », s.-cr. divljï, slov. divji, tch. divij pour v.<br />
tch. et dial. divi, avec variante *diku dans r. dtkij, depuis le début<br />
du vieux russe, et pol. dziki, subst. dzik « bête sauvage, sanglier »,<br />
mais à côté de v. pol. dziwy, et dziwoki comme v. tch. et mod.<br />
divoky. On rapproche si. *diku de lit. dykas « désœuvré » et « pétulant<br />
», lette dïks « libre de travail », qui est isolé de son côté. Pour<br />
*divïjï, il ne paraît pas séparable de v. si. divo « miracle » et divu,<br />
diviti sç « admirer » (§ 798) ; et le thème div- est celui de l'ancien<br />
nom balto-slave du « dieu », lit. dièvas (§ 191).<br />
On peut donc voir dans *divïjî une formation d'adjectif d'appartenance<br />
parallèle à *bozïjï sur le nom nouveau bogu ; et sa variante<br />
*divokû est semblable à velikû en regard de velii « grand », si ce<br />
n'est que velikû est l'élargissement d'un thème en *-i- (§ 276),<br />
tandis que *divokù confirme que son thème de base était en *-o-.<br />
Et si bogû, au sens de « dieu », est un emprunt à l'iranien (§ 3), le<br />
mot *deiwo- qu'il a remplacé a dû devenir comme l'avestique daëvô<br />
le nom du mauvais dieu, du démon ; être surnaturel hostile, et<br />
« sauvage » comme les bêtes fauves.<br />
La forme *dikû, à finale -ku (§ 1038), peut être une variante<br />
abrégée de *divoku, les mots relatifs aux êtres maléfiques étant<br />
volontiers déformés, sans qu'il soit nécessaire de recourir à une<br />
autre racine, di-, mal identifiable. Quant à lit. dykas, on a pensé,<br />
non sans raison, à y voir un emprunt ancien au slave, avec évolution<br />
facile du sens de « sauvage, non domestiqué », à celui d'« affranchi,<br />
libre de travail ».
436 les suffixes productifs [§ 954]<br />
§ 960. Dans les langues slaves. — En russe, la productivité<br />
se continue des adjectifs d'appartenance, avec fusion des adjectifs<br />
en ~(j)ï et en *-ïjï en une même flexion à nominatif de forme<br />
indéterminée et cas obliques à désinences déterminées (§ 270) :<br />
nom. vôlëij, vôlë'e, vôlë'ja, plur. vôlë'i, et aussi acc. fém. sing.<br />
vôlë'ju, et gén. sing. vôlë'ego, etc. De noms de personnes : bâbij<br />
« de (bonne) femme », patridrsij « de patriarche », rybâëij « de<br />
pêcheur », izvôzëiëij « de cocher, izvôzëik », avec la différence entre<br />
les adjectifs possessifs en -ov, -in et les adjectifs d'appartenance :<br />
pasïuxôv « du berger, pastùx » et pastûsij « de berger », starûxin<br />
« du vieillard, starûxa » et starûsij « de vieillard », starûseëij « de<br />
vieille femme, starûska » ; — de noms d'animaux : zâbij « de<br />
crapaud », fazânij « de faisan », teljâëij « de veau ». La forme en<br />
~(j)ï se maintient dans les noms de lieux : Jaroslâvl' (§ 296) ; et<br />
dans l'archaïque knjaz « de prince » remplacé par knjdzij.<br />
Le polonais n'a plus que des formes déterminées : babi, niewiesci<br />
« de femme, niewiasta », ksiçzy « de prêtre, ksiqdz », strusi<br />
« d'autruche, strus », jagniçcy « d'agneau », zwierzqcy « bestial » ;<br />
twôrczy « productif », de twôrca, et substantifs lesniczy « forestier »,<br />
iowczy « veneur », piwniczy « sommelier » en regard de piwnica<br />
« cave ». Formes indéterminées dans des noms de lieux : Przemysl,<br />
Kazimierz, Radom, gén. Radomia.<br />
Le tchèque aussi n'a plus que des formes déterminées : babi,<br />
knëzi, bazanti « de faisan-, bazant », teleci « de veau » ; et indéterminées<br />
dans des noms de lieux : Bobeslav, gén. -vë, Jaromër de<br />
Jaromir, Olomouc de v. tch. Olomût.<br />
Le slovène, qui garde la flexion indéterminée, n'a plus que<br />
quelques formes indéterminées répondant à l'ancien -(j)ï, dans des<br />
adjectifs isolés comme domàc « domestique » et des noms de lieux<br />
comme Martinj ; dans les adjectifs d'appartenance, ëlovêë est rare<br />
pour ëlovéëji, et l'on ne trouve normalement que la forme déterminée<br />
devenue le développement régulier du type en *-ïjï, ainsi<br />
govçji « de bœuf » comme divji « sauvage », avec extension du type<br />
en *-ïjï à la place de ~(j)ï : medvêdji «d'ours» pour l'ancien<br />
medvêji, jdgnjeëji « d'agneau » pour jagn(j)eëi, d'où un flottement<br />
skçflji et skgfji de skof « évêque » ; et avec extension illimitée de<br />
-ji : bâbji, knçzji, golçbji « de pigeon », jegûlji « d'anguille »,<br />
antilopji « d'antilope ».<br />
En serbo-croate, la forme indéterminée ne se maintient que dans<br />
des noms de fêtes hérités du slavon, comme Ivanj dân « la Saint-<br />
Jean (Baptiste) », et dans des noms de lieux, l'ancien knêê (mod.<br />
knèzev) s'étant conservé jusqu'au xvi e siècle ; et l'on a par ailleurs<br />
gàvedl, tèlecï, zâbljl de zàbjî, gMëjï de guska « oie » ; et des formes<br />
en -ovljï, sinàvljl « du fils », muzèvljï « du mari », et aussi kosàvljï
[§ 957] suffixes d'adjectifs 437<br />
« de merle, kôs », cvorkàvljï « de sansonnet, cvôrak », type succédant<br />
à -ovnjï (§ 969), à côté de àrlujl « d'aigle » et du plus ancien voluj<br />
(§ 955).<br />
Le plus notable en serbo-croate est le développement des<br />
adjectifs en -acï du type de ôracï« arable », vieux-serbe oratii :<br />
brijacï « (savon) à raser, à barbe » ;<br />
cjelivacï « (icône) à baiser » ;<br />
jàhacl « (cheval) à monter, de selle » ;<br />
obùvacî « (lacet) à chausser, de chaussure » ;<br />
pàsacî « (prairie) à paître », et « (lanière) de ceinture » sur pas<br />
(§ 783), ôpasati «ceindre»;<br />
pisacl « (machine) à écrire » ;<br />
poljèvacï « (serviètte) à arroser » ;<br />
spàvacï « (chambre) à coucher » ;<br />
sivacl « (aiguille) 'à coudre » ;<br />
et siàjacl « stagnant, permanent ».<br />
En bulgare, le type des adjectifs d'appartenance continue d'être<br />
représenté : krâvi « de vache », ôvëi, vâlci.<br />
SUFFIXE -OVÛ<br />
§ 961. Adjectifs possessifs. — C'est le suffixe le plus vivant,<br />
et qui commence en vieux slave à évincer le suffixe ~(j)ï, pour<br />
la formation des adjectifs possessifs (§ 295). Avec les noms propres<br />
masculins de la flexion en -o- (qui dans les textes vieux-slaves<br />
sont des noms étrangers, il apparaît librement après toute finale<br />
de thème, sans les limitations que connaît le suffixe ~(j)ï • Isusovu,<br />
Xrïstovu, Davydovu, Iosifovù TOU 'ICOCWJCP, Lamexovû TOU AÀFZSX,<br />
Ragavovu TOU 'Payau, etc. ; mais Ëkovovû TOU 'Iaxwê est exceptionnel<br />
pour l'usuel Iëkovljï ; sur thème mouillé Izdrailjevù, Zorovaveljevu<br />
TOU ZopoêàësA.<br />
Avec radical terminé par voyelle, il y a des arrangements :<br />
Timeovu. TOU Tqxatou, Anïdrëovu et Anïdrëevu TOU 'AvSpéou, Ieseovû<br />
TOU 'Iscrom, mais Iannaevu, var. Ian'nëevu, TOU 'Iavvaî, Noevu<br />
TOU NWS, Ilievu TOU "HXst, etc.<br />
Des masculins en -a, l'adjectif possessif est ordinairement en<br />
-inû (§ 966), mais on a aussi, de Kleopa, Kleopovu TOU KASOTOX, et<br />
Ijudovu (Év.) TOU 'IO6S« à côté de Ijudinu (Supr.). On trouve<br />
même, d'un substantif féminin à thème terminé par consonne dure,<br />
Artemidovu (Supr.) Tvjç 'ApTéfAiSoç, bien que le nom soit fléchi<br />
comme féminin en -a, acc. Artemidç, etc.<br />
Mais c'est par confusion du nom, féminin, de la déesse avec
438 les suffixes productifs [§ 954]<br />
les noms propres de lieux, qui sont traités comme des noms de<br />
personnes : Ierudanovu « du Jourdain », et les noms de villes<br />
comme des masculins : Damaskovu « de Damas, rj Aoc[i.ac7x6ç »,<br />
Ierusalimovu (et -limljï) « de Jérusalem », Sionovu (et Sionjï)<br />
« de Sion, y] 2«î>v ».<br />
Avec les noms de personnes autres que des noms propres, on a :<br />
Supasovu « du Sauveur », Duxovu (Athan.) « de l'Esprit », et :<br />
adovu « de l'enfer, Hadès, adu » ; arxaggelovu « de l'archange » ;<br />
arxiereovu «du grand-prêtre»; ëlovëkovu (Athan.) «de l'homme»<br />
(ailleurs ëlovëëï) ; dijavolovu « du diable » (et dijavoljï) ; duÇovu<br />
« du duc, Soiil; » ; ig'emonovu « du gouverneur, ^ys^côv » ; pastuxovu<br />
« du berger » ; patriarxovu « du patriarche » ; skQdûlïnikovu « du<br />
potier » (et skçdulïniëï) ; tektonovu « du charpentier, TSXTCOV » ;<br />
zenixovu « du jeune époux » (et zenisï). Et sur thème mouillé :<br />
cësarevu « de l'empereur » (et cësarjï) ; prëdadileljevu « du traître » ;<br />
roditeljevù « du (premier) père » ; sûpasiteljevu « du Sauveur » ;<br />
uciteljevû « du maître enseignant » ; vraëevu « du médecin ».<br />
Et., d'un masculin en -a : prëduteëevu (Ham. 48030) «du précurseur,<br />
prëduleëa » (et prëdûleëinu).<br />
En slavon : evangelistovu « de l'évangéliste », popovu « du<br />
prêtre », etc.<br />
La flexion est normalement indéterminée, avec forme déterminée<br />
pour indiquer le nom de la femme, comme -(j)aja avec ~(j)ï<br />
(§ 955) : slavon popovaja «la femme du prêtre», tch. krâlovâ, etc.<br />
(§ 965).<br />
§ 962. De noms d'animaux et de choses, — De noms d'animaux :<br />
bykovu (Ham. 3384) « du taureau » ; erodovu. « du héron, èp
[§ 957] suffixes d'adjectifs 439<br />
nord » ; slonouû « d'ivoire » (Ham. 14315, et « des éléphants ») ;<br />
vûzduxovu « d'air », et svëtovû « de lumière » » (J. Ex., voir Srezn.).<br />
Et trugovu « du marché », Ham. 565u, qui peut être vieux-russe,<br />
r. mod. iorgôvyj, pour trùgovïnu Ham. 529x.<br />
D'un neutre : evag'gelievu (Athan.) « de l'Évangile, evang'elije ».<br />
En slavon : ilovu. « d'argile », Obrazovu (dïnï) « (fête) de la Sainte<br />
Face », etc.<br />
De noms d'arbres :<br />
avorovu « de platane » ; orëxovu (Upir') « de noyer » ; tisovu (Cyr.<br />
Jér.) « de cèdre » ; trunovû « d'épine ». Et en slavon, sur des féminins<br />
en -a : jelovu « de sapin, jela », sosnovu « de pin, sosna », vrùbovu<br />
« de saule, vruba ».<br />
§ 963. Origine. — Le suffixe -ovu, qui est en pleine extension<br />
en vieux slave, n'est à l'origine que le dérivé en -o- de thèmes en<br />
*-u- (§ 295). Il apparaît également en regard de thèmes en *-«- :<br />
zrûnovu, subst., sur zrunuv-, et en vieux russe Turovû, Gudovu,<br />
adjectifs possessifs de Tury, Gudy (§ 204). On ajoutera, en serbocroate,<br />
l'adjectif bùkov de bukva « hêtre », v. si. buky, attesté dès<br />
le xiv e siècle, et smôkov de smôkva « figuier » qui est ancien aussi,<br />
en glagolite croate smokovo listie « feuilles de figuier», Gen., III, 7.<br />
Le suffixe, en indo-iranien, appelle un allongement ou degré<br />
fort dans le radical, la vrddhi : skr. mânuh « homme » et mânavâh<br />
« de l'homme ». La vgddhi est attestée en balto-slave dans les<br />
dérivés en -â : lit. vârna, r. vorôna, etc. (§ 708). Il est hasardé de<br />
la retrouver dans la variante duzdevu Supr. 30119 de duzdevu « de<br />
pluie », qui peut n'être qu'une graphie fautive, mais qui pourtant<br />
paraît se rencontrer également dans naduzdeviti « faire pleuvoir »<br />
Isaïe, Y, 6 (Mikl.) en regard de l'usuel naduzditi. Le substantif<br />
duzdï doit être un composé à premier terme * dus- « mauvais »<br />
(§ 1231), et avec le terme contraire *su- « bon » on a la vrddhi dans<br />
skr. saumanasam « bienveillance » de su-mdnas- « bienveillant ».<br />
§ 964. Autres mots en -ovu. —• Postérieurement au vieux slave,<br />
le suffixe -ovu des adjectifs possessifs a servi dans les langues slaves<br />
méridionales à la formation de possessifs des pronoms de la<br />
3 e personne et des démonstratifs : s.-cr. njègov, njïhov, moyen-bulg.<br />
egovu, togovu, etc., voir § 255.<br />
En vieux slave, les ^pronoms de la série de kaku présentent<br />
des formes élargies en ! -ovu : kaku et kakovu, takovu, jakovuze,<br />
sicï et sicevû, et s.-cr. onàkov de v. si. onako (Gr. Naz.), ovàkov, slavon<br />
inakovu, jedinakovu. Ils sont tirés des adverbes, kako, etc. (§ 259).<br />
On doit sûrement leur joindre :
440 les suffixes productifs [§ 954]<br />
v. si. istovû « véritable, réel », et neislovu « qui n'est pas lui-même,<br />
insensé», de istu (§ 1159) qui a un emploi d'adjectif pronominal<br />
dans des tours sï istu «celui-ci même» (Supr.), istaja delà «les<br />
œuvres mêmes » (Sav.). Cet élargissement en -ovu est particulier<br />
au vieux slave, car le russe istovyj n'est vraisemblablement qu'un<br />
slavonisme, comme l'est nettement le vieux-serbe istov.<br />
L'adjectif gotovu «prêt» est un postverbal de gotoviti (§ 573).<br />
Mais on trouve encore deux adjectifs en -ovu, dont la désinence est<br />
à expliquer :<br />
jalovu « stérile » en slavon, r. jâlovyj, s.-cr. jàlov, etc., en regard<br />
de r. dial. jâlaja « génisse », avec correspondance en baltique dans<br />
le lette jêls « cru, qui n'est pas mûr ». L'intonation du lette, qui est<br />
celle de dzîvs « vivant » (§ 103), doit restituer un balto-slave * jëlâ-,<br />
dont on n'a pas l'étymologie. On peut penser que sur cet adjectif,<br />
qui s'appliquait à une femelle jeune et encore stérile, a été bâti<br />
un substantif si. *jaly, comme neplody (§ 203), et que jalovu est<br />
l'adjectif tiré de ce thème en *-û~.<br />
Y. si. surovu « cru, vert » et « cruel », à côté de syru « vert, qui<br />
n'est, pas sec » (§ 1112), r. surôvyj « écru, rude » et syrôj « cru, vert,<br />
humide », pol. surowy, tch. surovij (syrovy) et syrj), etc. ; et subst.<br />
syru «fromage» (§ 1114). En baltique, le lituanien a sûras «salé,<br />
amer » et sûris « fromage », et l'adjectif balto-slave a son correspondant<br />
en germanique : v. nord, sûrr, v. h. a. sûr- (mod. sauer)<br />
« sûr », L'alternance vocalique de si. surovu se retrouve dans v.<br />
nord, saurr «terre humide », et l'adjectif en -ovû pourrait être ùn<br />
dérivé ancien de ce substantif masculin * saura- disparu en slave ;<br />
on a bien s.-cr. et slov. sûr « gris », mais pour sërû (§ 1113), et ce sûr<br />
doit être tiré de surovu comme s.-cr. slrov et tch. syrovy de syrû.<br />
§ 965. Dans les langues slaves. — En russe, l'adjectif possessif,<br />
dédov « de l'aïeul », carëv « du tsar », est en pleine décadence (§ 296),<br />
mais par contre le suffixe -ovyj est en pleine productivité : de noms<br />
d'animaux, bobrôvyj « de castor », barsukôvyj « de blaireau » ;<br />
surtout de noms de choses, et d'abstraits, àklovyj « des actes »,<br />
ametistovyj « d'améthyste », mirovôj « de paix », belovôj « mis au<br />
net » sur belô « en blanc » et ëernovôj « en brouillon » sur cernô ;<br />
et de noms d'arbres, abrikôsovyj « d'abricot(ier) », berëzovyj « de<br />
bouleau », oréxovyj « de noix, de noyer ».<br />
En polonais, l'adjectif possessif indéterminé n'a laissé des traces<br />
que dans des noms de lieux comme Krakôw « Gracovie », mais le<br />
suffixe -owy est vivant : woiouiy « de bœuf », wieprzowy « de porc »,<br />
grzybowy « de champignon » », domowy « domestique », handlowy<br />
« de commerce, handel », kapeluszowy « de chapeau », dçbowy « de
[§ 957] suffixes d'adjectifs 441<br />
chêne », pomaranczowy « d'orange, d'oranger » ; avec noms d'épouses<br />
en -owa : Pielrowa « femme de Pierre ».<br />
Le tchèque conserve l'adjectif possessif, bratrûv « du frère »,<br />
otcâv « du père », avec la forme féminine déterminée pour indiquer<br />
une épouse : dokîorovd « madame la femme du docteur », krâlovâ<br />
«la femme du roi» (krdlovna «reine»), krejcovâ «la femme du<br />
tailleur » et « la couturière » ; •— et il développe le type des dérivés<br />
en -ovij de noms de choses et d'abstraits : cukrovy «de sucre,<br />
à sucre, cukr », mâjovy « de mai », celkovy « d'ensemble, celek »,<br />
hodinovy « de l'heure, à l'heure, hodina » et « de l'horloge, hodiny »,<br />
jedlovy « de sapin », dubovy « de chêne », dubënkovy « gallique » de<br />
dubënka « (noix de) galle ».<br />
Le slovène a des adjectifs possessifs, oëçtov et ôcev « du père,<br />
ôce », stricev « de l'oncle » ; des dérivés de noms d'animaux, blvolov<br />
« de buffle », krtov « de taupe » ; et abondamment des dérivés de<br />
noms d'arbres, borçv « de pin », bréstov « d'orme », hrâstov « de chêne »,<br />
bambusov « de bambou », crésnjev « de cerise » et visnjev « de griotte ».<br />
En serbo-croate, le type des adjectifs possessifs est d'emploi<br />
régulier : bràtov, cârev, Mârkov «de Marc », Dànicicev « de Danicié »,<br />
stvdriteljev « du créateur » ; et jugov « du vent du sud », mjësêcev<br />
« de la lune », et de neutres sûncev « du soleil », jâgnjetov « de<br />
l'Agneau (de l'Apocalypse) », ancien djeteiov « de l'enfant » ; et<br />
des dérivés de noms de choses, bïserov « de perle », bàbov « de fève »,<br />
grâhov « de pois », surtout de noms d'arbres, dùbov, jèlov, topolov<br />
« de peuplier », lovàrikov « de laurier ».<br />
L'état est le même en bulgare : brâtov, Mârkov, lôev « de suif,<br />
loj », dabov, krûsov (krùsev) «de poirier, krusa ».<br />
SUFFIXE -inu<br />
§ 966. En vieux slave. — Le suffixe forme des singulatifs ( § 870)<br />
et des adjectifs possessifs et d'appartenance (§ 295). On trouve en<br />
vieux slave :<br />
Les adjectifs possessifs des féminins en -a et ~(j)i : An(ïn)inu<br />
« d'Anne » (Gant. IY, titre) ; Bogorodicinu « de la Mère de Dieu,<br />
Bogorodica » ; I(jJulijaninû « de Julienne » ; Irodijadinu « d'Hérodiade<br />
» ; Mariinù «de Marie»; rabyn(j)inu «de la servante,<br />
rabynji» (Galat., IY, 30, Ham.) ; et en slavon Ev(û)éinû « d'Ève,<br />
Evuga » (gr. Etfa prononcé Euya comme Asuyi, § 155), maslesinu<br />
« de la marâtre, mastexa », etc.<br />
Les adjectifs possessifs des masculins en -a et -i(i) : Azari(i)nu<br />
« d'Azarias » (Cant. XI, 49) ; Ijudinu « de Judas » (et Ijudovu,<br />
§ 961) ; Iliinû « d'Élie » ; Ioninu « de Jonas » ; Isaiinû « d'ïsaïe »
442 les suffixes productifs [§ 954]<br />
(et Isaijevu) ; Kaijafinu « de Caïphe » ; Levïg'iinu « de Lévi,<br />
Levïg'ii » ; Lucinu « de Luc, Luka » (Cant. YII et VIII, titres) ;<br />
Mamoninu « de Mammon, Mamona » ; Movsiinû « de Moïse » ;<br />
Oominu « de Thomas » ; etc., et GolïgoOinu « du Golgotha », Sotoninu<br />
« de Satan », vojevodinu « du conducteur d'armée », prëdûtecinu<br />
(Pand. Ant.) « du précurseur, prëdûteëa » (et prëdûtecevu) ; et aussi<br />
adinu «de l'Hadès » Hés., Cant. VI, 3 dans le commentaire, mais<br />
l'usuel adovu, de adu, dans le texte, qui représente adiinû de "ALST^<br />
comme Movsiinû de Mcouaîjç.<br />
Et forme déterminée Uriinaja « la femme d'Urie », comme<br />
Pilastaja (§ 955), popovaja (§ 961).<br />
Des adjectifs d'appartenance de substantifs en -a, noms d'animaux<br />
: exidïninu (J. Ex., Pand. Ant.) « de vipère » (et exidunovù) ;<br />
zmiinu «de serpent, zmija», distinct en principe de zmievu «du<br />
dragon, zmii » ; pûtiëinu « d'oiseau » Ham. 42830, avec une variante<br />
putinu (Srezn.), de puta (§ 878) ;<br />
noms d'inanimés : druzïbinu (Théod.) « de l'amitié » ; igulinû<br />
« de l'aiguille » ; penïiikostiinû (Sav.) « de la Pentecôte, pentikosti(i)<br />
».<br />
Des adjectifs possessifs et d'appartenance de masculins et<br />
féminins en -ï : golçbinu « de colombe » ; gostinu (J. Ex.) « de<br />
l'hôte » ; neprijazninu « du Malin » ; tatinu (Upir', Pand. Ant.)<br />
« du voleur » ; zvërinu « de bête fauve » ; et en slavon Jelisavedinû<br />
« d'Élisabeth, JelisaveOï », etc.<br />
Et aussi bien de thèmes consonantiques : smokûvinû « de figuier »,<br />
et d'un neutre osïlçtinu «d'âne»; en slavon neploduvinù «de la<br />
femme stérile », dusterinu « de la fille », etc.<br />
L'adjectif svinu « de porc » est tiré de l'ancien thème consonantique<br />
lat. sûs, etc. (§ 202).<br />
On notera, d'un pronom, le dérivé onûsinu (Théod.) du juxtaposé<br />
onùsï «tel et tel» (§ 1229). Les langues slaves méridionales ont<br />
développé des possessifs en -in, comme en -ov (§ 964) de pronoms<br />
de la 3 e personne, féminins : s.-cr. njézin, bulg. néin, et du duel :<br />
slov. nâjin, vâjin, njîjin (§ 255).<br />
Deux mots isolés doivent être des adjectifs en -inû substantivés :<br />
oblastinû (Izb. Svjat.) « l'assujetti », qui paraît s'expliquer comme<br />
dérivé possessif de oblastï « province », avec forme abrégée oblasï<br />
«laïc » (§ 957) ;<br />
v. r. ovinu, mod. ovin « grange pour sécher les gerbes de blé »,<br />
où l'on peut reconnaître un dérivé *jevinû (§ 75) de *jeva, lit.<br />
javaï « blé » et javienà « champ de blé », skr. yâvah « céréale », av.<br />
gava- et ydvln- « champ de blé », gr. Çsial « épeautre ».<br />
Une contamination entre les adjectifs possessifs en -inû, en<br />
~(j)ï et en -ïnjï fait apparaître une forme secondaire -injï, attestée<br />
en vieux slave par deux exemples de golçbinjï « de colombe », et<br />
qu'on retrouve en serbo-croate.<br />
* i0
[§ 957] suffixes d'adjectifs 443<br />
§ 967. Dans les langues slaves. — En russe, l'adjectif possessif<br />
en -in se maintient mieux que la forme en -ov : séstrin « de la sœur »,<br />
djâdin « de l'oncle, djâdja », Lukin « de Luc » (pour Lucinu),<br />
bdbuskin « de la grand-mère, bâbuska », dôëerin « de la fille », caricyn<br />
« de la tsarine » ; — et -inyj de noms d'animaux : golubinyj, gusinyj<br />
« de l'oie, yus' », solov'inyj « de rossignol, solovéj », et de là l'vinyj<br />
« de lion, lev », orlinyj « d'aigle, orël ».<br />
Le polonais garde quelques adjectifs possessifs : siostrzyn,<br />
matczyn de matka « mère », et v. pol. macierzyn (mod. macierzynski)<br />
de mac, et dans des noms de lieux, Lubin, Strzelin ; et fém.<br />
wojewodzina « femme du palatin, princesse palatine », qui continue<br />
le type déterminé de v. si. Uriinaja, tch. krâlovâ.<br />
Le tchèque a un type régulier d'adjectifs possessifs de féminins<br />
en -a : séstrin, matëin, macesin de macecha « marâtre », et des noms<br />
de lieux à finale longue -in : Libusin ; mais avec les masculins en<br />
-a les adjectifs possessifs sont en -ûv : v. tch. vëvodin de vëvoda<br />
« duc » (ail. Herzog), mod. vëvodûv, nom de lieu Radotin de Radota,<br />
mais adj. poss. Radotùv.<br />
Le slovène a de même régulièrement de féminins en -a : séstrin,<br />
mâëehin de mâëeha, mâterin, hëçrin « de la fille » ; mais de masculins<br />
: Lukov de Lûka, slûyov, vôjvodov. II a également des adjectifs<br />
en -in d'inanimés : lunin de luna « lune », pûskin de pûska « fusil »,<br />
sivânkin de sivânka « aiguille à coudre », strânkin de strânka<br />
« parti ». On trouve un suffixe -inji par combinaison de -in et -ji :<br />
golobinji, hëçrji et hëerinji « des filles ».<br />
En serbo-croate, l'adjectif possessif en -in est régulier avec<br />
les masculins en -a comme avec les féminins : slugin, vôjvodin,<br />
vlàdiëin, de l'évêque, vlàdika » comme zènin, gôspodin « de la dame,<br />
gôspoda », djèvôjëin « de la jeune fille, djèvôjka » et tëtkin « de la<br />
tante, tëtka ». On a aussi, avec des noms d'animaux, krâvin « de<br />
la vache», kôbilin « de la jument», kôrnjacin «de la tortue, kôrnjaëa<br />
», zvïjerin « de la bête fauve » ; et avec des inanimés dàniëin<br />
« de l'étoile du matin, dànica », ràzin « de la rose, ràza », ëàrapin<br />
« du bas, de la chaussette, ëàrapa ». Le suffixe -injï connaît un<br />
certain développement : golùbinjî, gûjin et gùjinjï « du serpent,<br />
gûja », kôkosjï et kokôsinjï « de poule, kôkôs », mràvljï et mràvinjï<br />
« de fourmi, mrâv », bùhinjï « de puce, bàha ».<br />
Le bulgare a mâjëin, bâbin, et d'un masculin en -a bâstin « du<br />
père, bastâ », mais pasôv, de pasâ « pacha », macéd. pasov et pasin<br />
comme s.-cr. pàsin, vladikov de vladika, agov de aga (s.-cr. âyin).<br />
Il y a une limitation sensible, en bulgare-macédonien, de l'emploi<br />
du suffixe -in d'adjectif pôssessif.
444 les suffixes productifs [§ 954]<br />
SUFFIXE -ïnjï<br />
§ 968. — En vieux slave. —• Le suffixe -ïnjï est un élargissement<br />
du suffixe -(j)ï au moyen d'un -n- de liaison, et il apparaît dans une<br />
série d'adjectifs possessifs, surtout dérivés de noms de parenté,<br />
avec la flexion indéterminée des adjectifs possessifs qui le distingue<br />
du suffixe -ïnjii, toujours déterminé, des dérivés d'adverbes. Voici<br />
les exemples en vieux slave :<br />
brat(r)ïnjï « du frère » ;<br />
pradëdïnjï (Izb. Svjat., Gr. Naz.) «de l'ancêtre», et slavon<br />
dëdïnjï « de l'aïeul » ;<br />
druzïnjï « de l'ami, du prochain », et drugu druzïnjï (J. Ex.) « de<br />
l'un l'autre » sur drugu druga ( § 257) ;<br />
dusterïnjï (Izb. Svjat., Ham.) « de la fille » ;<br />
Gospodïnjï « du Seigneur » ;<br />
materïnjï (Virg., Ham.) « de la mère » (et materjï), pramalerïnjï<br />
(J. Ex.) « de la première mère » ;<br />
mçzïnjï « du mari » (Virg., Ham.) ;<br />
sestrïnjï (Ham. 104lfi) « de la sœur » ;<br />
synovïnjï « du fils » (Athan., I, 4021, etc., Izb. Svjat.) ;<br />
vladyëïnjï « du maître, du seigneur » ;<br />
zenïnjï « de l'épouse » (Virg., Cosmas).<br />
Un adjectif olïnjï « du père » est fréquent chez Hamartole, mais<br />
est sûrement un russisme pour v. si. olïcï.<br />
On trouve un dérivé vëtrïnjï « du vent » (Ps., Euch.) dans<br />
l'expression na krilu vëlrïnju « sur les ailes du vent », donc avec<br />
le vent conçu comme être animé, et de même dans le Livre des<br />
secrets d'Hénoch vëtrenjaja loznica « les chambres (à coucher)<br />
des vents », mais en emploi plus libre Ham. 182x, 30320 : on voit<br />
que -ïnjï est ici une substitution de -(j)ï qui aurait entraîné une<br />
alternance consonantique complexe.<br />
Les textes slavons ajoutent les formes :<br />
prababïnjï « de l'arrière-grand-mère » ;<br />
inocïnjï (slavon russe) de inoëï « mère d'enfants d'un premier<br />
lit» (§ 1047);<br />
otïnjï (et otïëïnjï), qui est vieux-russe ;<br />
sluzïnjï « du serviteur » ;<br />
sçsëdïnjï « du voisin » ;<br />
tïstïnjï « du beau-père » ;<br />
zçtïnjï « du gendre ».<br />
§ 969. Dans les langues slaves. — Le russe garde comme forme<br />
indéterminée Gospôden' de la langue religieuse, mais l'ancien
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 445<br />
ôten' a été remplacé par ôtnij, et ôtnij par ôtëij. Les formes en -nij<br />
restent assez nombreuses, populaires ou livresques, avec des<br />
réfections en -nin : prabâbnij, slûznij, sosédnij, sgnôvnij, brdtnij<br />
et brâtnin, doëérnij et doëérnin, mûznij et mûznin, fém. zamûznjaja<br />
« femme mariée », zjâtnij et zjâtnin, zénnij et zénnin ; mais Vladycnii<br />
« de Notre Seigneur » est devenu Vladyënyj.<br />
En polonais et en tchèque, la confusion est complète entre les<br />
anciens indéterminés, devenus déterminés, et les anciens adjectifs<br />
en -ïnjii, et pol. bratni, sqsiedni, tch. sousedni ne s'en distinguent<br />
plus.<br />
Le Slovène confond de même en -nji les adjectifs possessifs et<br />
les autres : Gospôdnji « du Seigneur », et sur ôce « père » oëçtnji à côté<br />
de ocg'fen, ocgfoo.<br />
En serbo-croate, l'ancien Gospodanj est devenu Gôspodnjl,<br />
et l'ancien bratnji a disparu devant bràtov ; sinovnji et muzevnji<br />
sont passés à sindvljï, muzèvljï (§ 960).<br />
Le bulgare garde Gospôden comme forme savante.<br />
SUFFIXE -ïnjii<br />
§ 970. En vieux slave. — Ce suffixe, toujours déterminé (§ 245),<br />
forme des dérivés d'adverbes. La liste en est longue en vieux<br />
slave :<br />
blizïnjii « qui est (plus) près, ô rcX-rçaiov », sur blize ;<br />
daljïnjii « qui est (plus) loin », sur dalje ;<br />
doljïnjii ô X
446 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
srëdïnjii « qui est au centre », et posrëdïnjii ;<br />
veëerïnjii « qui est au soir » (Ps. GXL, 2, Euch.) ; et sur veëerïnjaja,<br />
(za)utrïnjaja « (l'office) du soir, de matines», le vieux russe fait<br />
obëdïnjaja « du repas de midi » (§ 1087) ;<br />
vuskrainjii 6 TcX-rçaiov, et slavon krainjii ;<br />
vysprïnjii o avco, et prëvysprïnjii ;<br />
vysïnjii ôàvco, et prëvysïnjii ôûtopàvto, suvysïnjii ô avcoOsv ;<br />
zadïnjii ô ômcrw (Ham.), ô oracr0ev (Pand. Ant.).<br />
On trouve vruxovïnjii « qui est au sommet » (Supr., Euch.)<br />
sur l'adverbe vruxu (§ 321), mais vrûxunjii « qui est dessus » (Izb.<br />
Svjat.) directement sur vruxu, et r. vérxnij, v. pol. wirzchni, slov.<br />
vrhnji ; •— et de même okrçgunjii « qui est autour » sur la locution<br />
adverbiale okrçgû xùxXco.<br />
De dïnïsï « aujourd'hui », l'adjectif est dïnïsïnjii ô
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 447<br />
zâvtrasnij « de demain, zâvtra », togdâsnij, vsegdâsnij, segôdnjasnij,<br />
tâmosnij, zdésnij de zdes, létosnij.<br />
Le polonais a blizni sur v. pol. bliz (mod. blizko), lelni, wschodni<br />
« de l'orient », zachodni « de l'occident », v. pol. jutrzni « du matin » ;<br />
mais la série des dérivés d'adverbes est en -jszy : jutrzejszy « de<br />
demain », wczorajszy sur wczoraj « hier », dzisiejszy, dzisiajszy sur<br />
dzis, dzisiej «aujourd'hui» (§ 322), niniejszy «actuel», et terazniejszy<br />
« de maintenant », sur leraz, iutejszy « d'ici » sur tutaj,<br />
tamtejszy « de là ».<br />
Le tchèque a blizni « le prochain », jilrni « matutinal », dnesni<br />
« d'aujourd'hui », letni « d'été » et letosni « de cette année », zimni,<br />
podzemni « souterrain », avec un large flottement entre les adjectifs<br />
en -ni et en -ny et des efforts pour les distinguer : zâbavni (park)<br />
« (parc) à attractions » et zdbavny (pribëh) « (histoire) amusante »,<br />
de zâbava « amusement » ; — et des dérivés d'adverbes en -jsi :<br />
nynëjsi, vcerejsi, tehdejsi, dolni et dolejsi, vedlejsi sur vedle « à côté ».<br />
Le slovène a blîznji, dôljnji, etc., et une série productive en<br />
-snji : dâljnji et dâljsnji, domânji et domâsnji, danâsnji, jûtrosnji,<br />
lêtosnji, jesenâsnji de jesçnes «cet automne», vëçra(j)snji et, vëqranji<br />
sur vëçra(j), tedâ(s)nji, nekdâ(s)nji sur nêkda(j) «autrefois»,<br />
tâmosnji.<br />
Le serbo-croate a de même dônjï, gôrnjï, jùtârnjî, et domâsnji,<br />
dànasnjl, noéasnjï sur nàéas « cette nuit », Ijëtosnjï, zimûsnjï sur<br />
zimûs « cet hiver », sàdasnjï, ondasnjï, nèkadasnjî, svàgdasnjï,<br />
onàmad(n)asnjï sur ondmad(ne) « l'autre jour ».<br />
Et le bulgare a léten (fém. Ijâtna) « de l'été », et Ijâtosen « de cet<br />
été (passé) » sur Ijâlos, dnésen, domâsen, vëérasen, vânsen et vânkasen<br />
sur vdn(ka) « dehors », vâlresen sur vâire « dedans », podiren<br />
et podiresen sur podirf e) « derrière ».<br />
Le bulgare n'a qu'un type dur en -en, fém. -na. Le serbo-croate,<br />
qui distingue -an et -njî, présente un flottement fréquent de -ni<br />
et -njï : nârodan « national », déterm. nârodnî et ndrodnjï, Ijëtnï<br />
et Ijëtnjï, ùskrsnï et ùskrsnjî de Uskrs « Pâques ». En dehors<br />
d'accidents phonétiques, comme dans le cas de srëcan « heureux »<br />
sur srëca « bonheur », déterm. srëcnï et srëlnjî, srëtnï, le point de<br />
départ de ces flottements est dans la coexistence de deux dérivés<br />
différents, lëtïnu sur lëto et lëtïnjii sur l'adverbe lëtë.<br />
§ 972. Origine. — Le suffixe -ïnjii, création du slave, apparaît<br />
comme étant initialement un dérivé en ~(j)ï d'adverbes en -ï,<br />
avec un -n- de liaison (§ 320), peut-être même une forme à article<br />
postposé de ces adverbes (§ 245).<br />
L'élargissement en -stïnjii est propre au vieux slave ancien, et<br />
il disparaît ensuite en vieux slave. Comme on ne le retrouve pas<br />
dans les autres langues slaves, et qu'on ne peut pas faire état de
448 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
la forme domacïnjii du slavon russe, qui est rare et tardive, on ne<br />
connaît pas sûrement la nature du -st- de liaison, mais il n'est pas<br />
douteux qu'il s'agit du -st- du suffixe *-tyo- (§ 958), qui fournissait<br />
des dérivés d'adverbes. Le point de départ de la série vieux-slave<br />
en -stïnjii serait alors domastïnjii, sur *doma-tjï, forme isolée,<br />
et la variante en -sïnjï résulterait de la réduction de -stinj- à -snjaprès<br />
la chute du jer (§ 43). Mais l'explication ne vaut pas pour<br />
le russe, le serbo-croate et le slovène, où il faut admettre un autre<br />
point de départ, la série de dïnïsïnjii donnant dïnïs(ï)njii par<br />
assimilation de mouillure (§ 45).<br />
SUFFIXE -ïskû<br />
§ 973. Vieux Slave. — Ce suffixe, qui est un emprunt au germanique<br />
(§ 319), comme il est dans les langues baltiques un emprunt<br />
au slave et à l'allemand, a une telle productivité qu'il est inutile<br />
d'en détailler les exemples.<br />
Il se tire de substantifs indiquant une collectivité ou une<br />
pluralité (§ 295). Il est abondant avec les noms de pays, de régions,<br />
de villes : rimlskû «romain», grïcïskù «grec», Patestinïsku «de<br />
la Palestine », Efesïsku « d'Éphèse ». Avec les noms de personnes,<br />
il s'oppose aux adjectifs possessifs qui indiquent la propriété d'une<br />
seule personne : prorocï « du prophète » et prorocïskû « des prophètes<br />
», clovëcï «de l'homme» et clovècïskû «des hommes», otïcï<br />
« du père » et otïcïsku (Ostromir, Athan.) « des pères », Bozii « de<br />
Dieu » et bozïskû « des dieux ».<br />
On notera en particulier la différence entre Gospodïnjï « du<br />
Seigneur, qui appartient au Seigneur » et Gospodïsku « relatif au<br />
Seigneur » : prazdïniky Gospodïsky Ass. 158 r «les fêtes du Seigneur»,<br />
ang'eti Gospodïscii Euch. 59 b s «les anges du Seigneur», les grands<br />
archanges ; de même Vtadycïnjï « du Maître » et Vtadycïskç stavç<br />
« la gloire du Maître » Supr. 32224. Indiquant une relation plus<br />
vague que celle de la propriété personnelle, l'adjectif en -ïskû<br />
devient qualificatif, et gospodïskû est « seigneurial, SSCTTOTIXOÇ »,<br />
vtadycïskû est « de maître, SECJ7TOTIXOÇ », otïcïskû « de père, TCATPIxoç<br />
», etc. Le traducteur d'Athanase pousse même la conscience<br />
jusqu'à transformer dûsterï Avramtjç Luc, XIII, 16 « la fille<br />
d'Abraham, Quyarépa 'Aêpaàjx » en Avramïskya dûstere, parce que<br />
la citation devient dans son texte TÎjç 'ASpaa^iaiocç OuyaTpoç « de<br />
la fille Abrahamienne ».<br />
La dérivation est dès lors libre, et l'on trouve, de noms de<br />
choses et d'abstraits : ban(j)ïsku «de bain», branïskû «des<br />
guerres» et po-branïskû (§ 1219), evanggetïskû (-tiiskû) « évangélique,<br />
dkyyeXixoç », zitiiskû « vital, fkomxoç » ; outre les dérivés
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 449<br />
de noms de lieux, morïsku « de la mer, marin », poljïsku « des<br />
champs », nebesïsku « des cieux ».<br />
Mais il y a alors rencontre avec le suffixe -ïnu, lui-même qualificatif,<br />
et plus productif encore que -ïsku : zemïsku et zemïnu,<br />
gradïsku et gradïnu, konjïskû et konjïnu, pustynjïsku et pustynjïnû<br />
« du désert », vracevïsku et vracevïnu. On peut reconnaître une<br />
différence entre vracevïsku Supr. 43014 « (les enfants) des médecins»<br />
et vracevïnu Supr. 55626 « (traitement) médical » ; de même entre<br />
gradïsku « (les gens) de la ville » et gradïnu « (les portes) de la ville »,<br />
-ïsku s'appliquant ici à des hommes et -ïnu à des choses. Dans<br />
le cas de nebesïsku et nebesïnu « des cieux », la forme -ïsku est celle<br />
de l'Évangile, tandis que dans le Suprasliensis -sïnù (47 ex.) devient<br />
plus fréquent que -sïsku (42 ex.) : ce qui doit s'expliquer, après<br />
la chute du jer, par une préférence accordée à nebesn- plus clair que<br />
nebe(s)sk- ; le russe ,a adopté nebésnyj, d'où bulg. nebésen, mais<br />
ailleurs on a pol. niebieski, tch. nebesky, s.-cr. nèbeskï (et nèbesnï).<br />
De pronoms, on a les dérivés vïsëcïsku (§ 259) et vïselicïsku<br />
(§ 261), et nasïsku « de chez nous » (Izb. Svjat., Ham.), r. nds(in)skij,<br />
s.-cr. nàskï.<br />
De v. si. voi « armée » (plur., § 737), l'adjectif voisku apparaît<br />
substantivé en v. si. et v. r. voiska, s.-cr. et slov. vôjska, et r.<br />
vôjsko, pol. wojsko.<br />
On trouve des élargissements en -ovïsku et -inïsku : adïsku et<br />
adovïsku «de l'enfer», cësarïsku et cësarevïsku (Ham. 3856)<br />
« d'empereur, pacriXixoç », bësovïsku « des démons », vracevïsku<br />
« des médecins » ; — sotoninïsku SiaêoÂixéç (Supr.), (TOCTOCVIXOÇ<br />
(Ham. 306 12, etc.), zvërinïsku « de bête fauve ».<br />
§ 974. Dans les langues slaves. — La productivité se continue<br />
partout, avec perte des formes indéterminées (§ 272). Il n'y a à<br />
observer que les diverses adaptations aux thèmes.<br />
Le russe a -skij : sovétskij, césskij « tchèque », varjdzskij « des<br />
Yarègues », arméjskij « d'armée, drmija », et rybdckij de rybdk<br />
«pêcheur» (§ 43), durdckij de durdk «sot», tkâckij de tkac «tisserand<br />
» ; -eskij savant : prorôceskij, politiceskij, suprûzeskij de<br />
suprûg « conjoint » ; -ovskij : dédovskij « des aïeux », korolévskij<br />
« royal », bjurokrdtovskij « des bureaucrates » ; -inskij : saianinskij,<br />
ekaterininskij « relatif à Catherine II ». L'accent est ordinairement<br />
sur le thème, plus rarement sur la finale : gorodskôj « de ville,<br />
urbain » (et gorodovôj) sur gôrod, plur. gorodâ, scegol'skôj « élégant »<br />
de scëgol', xutorskôj « de métairie » sur xûtor.<br />
Le polonais a -ski : panski « du seigneur, pan », ludzki de ludzie<br />
« hommes », prorocki de prorok, boski « divin » de Bôg, mçski « mâle,<br />
masculin » de mqz ; -owski : ojcowski « paternel » de ojciec « père »,<br />
sgnowski, marksistowski.
450 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
Le tchèque a -sky : muzsktj, prorocky, otcovsky, mâchovsky « (à la<br />
manière) de Mâcha ».<br />
Le slovène a -ski : Ijûdski, zivljénski « vital » de zivljènje, stanovânjski<br />
« de logement, stanovânje » ; -ski : prorçski de prôrok,<br />
ëlovéski, bolnîski « de malade », bolnik » ; -ovski : brâtski et brâtovski,<br />
oslçvski « d'âne, ôsel ».<br />
Le serbo-croate a -skï : cârskï, prôrockï, jùnâckî de jùnâk « le<br />
brave », istdrïjskï et istdriëkï « historique », mûskï de mûz, vlâskï<br />
de Vlâh « Valaque » ; -anskï : boïànskï « divin », poslanskï « de la<br />
poste, pôsta », vladiëànskl « épiscopal », d'après le type gràdânskT<br />
de gràâanin, et parallèlement à bozànstvo (§ 941) ; -inskï : kàmsîjskl<br />
et kàmsïfjjnskî de kàmsija «voisin», adj. poss. kàmsijin, àvlïjskï<br />
et àvlï(j)nskï de àvlija « cour » ; -ûjskl : vàlûjskl, àrlûjskï, àvnûjskï<br />
Le bulgare a -ski : zériski ; -ski : junâski de junâk, d'où téléski de<br />
lelé « veau » ; -eski : politiëeski, avec opposition de ce type savant<br />
au type populaire, ëovéëeski et ëovéski, geografiëeski et geogrdfski.
CHAPITRE XXVI<br />
SUFFIXES D'ADJECTIFS (suite)<br />
§ 975. Suffixe -ïm1. — Ce suffixe est un élargissement du suffixe<br />
-nû dont il reste dps exemples nombreux (§ 1070). Il apparaît<br />
donc originellement tiré de thèmes en *-i-, mais devenu suffixe<br />
tout constitué et bâti sur tous les thèmes : en grec xsSptvoç « de<br />
cèdre, xsSpoç », L/OOIVOÇ « de poisson, lybûç », en latin fâginus<br />
« de hêtre, fâgus ». Le baltique a lit. -inas : krùvinas « sanglant »<br />
(kraûjas « sang », § 202), âuksinas « d'or, âuksas », purvinas<br />
« crotté » de purvas « boue, saleté », et v. pr. deinina- « journalier »<br />
de deina- « jour ».<br />
En slave, le suffixe, d'une productivité illimitée, forme les<br />
adjectifs dérivés de noms de choses et d'abstraits, et aussi de noms<br />
d'êtres animés : zakonïnû de zakonu, vëcïnù de vëku, bëdïnu de<br />
bëda, vërïnu de vëra, ëistïnu de ëïstï, uëiteljïnu de uëiteljï. On le<br />
trouve sur tous les thèmes :<br />
medvïnu « de miel » (Gr. Naz., Hés. XVIII, 11), cëluvinû « de<br />
guérison », crûkùvïnu «de l'église» (et cirkûnu en slavon morave,<br />
§ 74), smokuvïnu « du figuier » ;<br />
nebesïnù (et nebesïsku), oëesïnu «de l'œil» (et oëïnu Pand. Ant.),<br />
slovesïnu « de raison » et neslovesïnu, be-slovesïnu (et beslovïnu),<br />
tëlesïnu «corporel»; celesïnû (§ 191) «de front, principal» (Pand.<br />
Ant., Hés. CIV, 36) ; ëudesïnu « merveilleux » (Ps. CXXXVIII,<br />
14, Supr.) sur le thème ëudes-, plus ou moins distinct de l'usuel<br />
ëudïnu « étonnant », sur le thème ëud- ; avec extension de -esïnu<br />
au slavon rodesïnû « de la géhenne (rodu avec confusion de ysveà<br />
et yésvva), sûrement par opposition à nebesïnù ; pour r. rovésnyj<br />
« du même âge », voir § 1070 ;<br />
kamenïnû (Supr. 3448) « des pierres, TÔV XIGCOV » différent de<br />
kamënù «de pierre, XiOivoÇ » (§ 980); brëmenïnû «qui porte une<br />
charge» (Supr. 1447), pismenïnû «de l'écriture», plamenïnû «de<br />
flamme » (et plamënû), plemenïnu « de la race » (Gr. Naz., et Supr.<br />
36718, mais altéré de plamen-), vrëmenïnu, be-ëismenïnù « innom-
452 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
brable » ; et znamenïnu « des signes » (Virg.), mais qui se rattache<br />
en vieux slave à znamenije (§ 186).<br />
Est surtout abondante la série des formes en -ovïnu, soit sur<br />
thème ancien en *-u- : domovinù « de la maison », volovïnu « de<br />
bœuf » ; soit plus largement sur élargissement de thème en -ov-,<br />
ou d'adjectifs possessifs en -ovu, en partie avec un sens différent de<br />
celui de l'adjectif simple en -ïnu :<br />
adovïnû « de l'enfer » ; bësovïnu (Ham.) « des démons, démoniaque<br />
» (et bësïnu) ; ëarovïnu (Gr. Naz.) « de divination » ; cinovïnu<br />
« de l'ordre, en ordre » (Pand. Ant., Gr. Naz.) ; ërënovïnu « molaire »<br />
sur *ëernu (§ 1072); dëlovïnu «de travail» (Pand. Ant., Hés.<br />
LXVI, 7) ; dïnevïnu « du jour » (et dïnïnu) ; dusevïnu « de l'âme »<br />
(et dusïnû), comme duxovïnu « de l'esprit » ; dùzdevïnu « de pluie »<br />
à côté de duzdevu ; grëxovïnu « du péché » (grësïnu « pécheur ») ;<br />
mëstovïnu (Hés., Cant. XI, 38) « du lieu » (et mëstïnu J. Ex.) ;<br />
placevïnu « de pleurs » ; plodovïnu (Virg.) « de la semence » (plodïnu<br />
« à fruits, fertile ») ; sanovïnu « de la fonction, dignité » (J. Ex.,<br />
Virg.) ; slaslovïnu (J. Ex.) « de la volupté » (slastïnu « voluptueux ») ;<br />
slïzovïnû (Pand. Ant.) « de larme » (slïzïnu « de larme » et « en<br />
larmes ») ; slonovïnu « d'ivoire » ; sramovïnu (Pand. Ant.) et studovïnu<br />
« de la honte » (sramïnu et studïnâ « honteux ») ; straslovïnu<br />
(Pand. Ant.) « d'épreuve » (et slrastïnu) ; svëtovïnu « de la lumière » ;<br />
trudovïnu (Izb. Svjat.) « de la peine, des travaux » (trudïnu<br />
« pénible ») ; trugovïnû (Ham. 529x) « du marché, du forum » ;<br />
irunovïnu (Pand. Ant.) « d'épines » (et trunovu) ; umovïnu (Rom.<br />
VII, 23) « de l'intelligence » (et umïnû) ; vestevïnu (Ham. 3978,<br />
40326) « de la chose » (et vestïnu) ; vërovïnu « de la foi » (vërïnu<br />
« fidèle ») ; vinovïnu « responsable » (et vinïnu) ; vlûxvovïnu « de<br />
mage » ; vraëevïnu « de médecin » (vraëevù « du médecin ») ; vragovïnû<br />
« des ennemis » (Hés., Cant. XI, 44) ; vrëdovïnu (Pand. Ant.,<br />
Gr. Naz.) « nuisible » (et vrëdïnu) ; xrçstovïnu (Ham. 2979) « du<br />
bruche, Ppouxoç, xrçstu ».<br />
Et Xrïslovïnu « du Christ », sur Xrïstovu, adj. poss. ; pour le<br />
type féminin en -ovïna chez Hamartole, voir § 979. Sur -inu, on<br />
trouve zvërinïnu « des fauves » (et zvërïnu, zvërinïsku).<br />
§ 976. Sur composés, etc. — Le suffixe -ïnu fournit en grande<br />
abondance des dérivés de locutions à préposition (§ 1219) et de<br />
composés :<br />
be(s)ëismenïnu « innombrable », bespecalïnu « sans souci », bezumïnu<br />
« sans intelligence », iskonïnu « du début » et izdekonïnu (J.<br />
Ex.) sur izdekoni (§ 92), nanebesïnu et podûnebesïnu, sûsadovïnu<br />
(Cyr. Jér.) « de même plantation, OTJ^ÇUTOÇ », etc. ;
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 453<br />
blagovërïnu « de bonne croyance », bogoborïnu « qui combat<br />
Dieu », dusegubïnu « qui perd l'âme », munogocënïnû « de grand<br />
prix », podobïnostrastïnu « de même affectivité », etc. Miklosich<br />
signale en slavon obûonûpolïnu « de l'autre côté », sur obu onu<br />
polû, podrugûdruzïnu « l'un après l'autre » sur drugû druga.<br />
On a des dérivés de noms de nombres, les ordinaux de la série<br />
de dùvodesqtïnu, et sûtïnu, tysçstïnu (§ 311).<br />
Et d'adverbes :<br />
busïnu « complet » (Athan., I, 50x, Théod. LXVIII, 27, LXXIII,<br />
1), sur le thème bux- de bûxuma et busijç «tout à fait » (§ 321) ;<br />
otïnçdïnû de otïnçdï « tout à fait », Euch. 64 a 14, à corriger en<br />
otuonçdïn- ô sxsïôsv « de là-bas » ;<br />
vûinïnu « continuel », de vuinç « continuellement » ; vïlovïnu,<br />
sur vïly «lentement» (§ 1203).<br />
§ 977. Sur thème verbal. — Un adjectif strastovïnu se tire de<br />
strastï, mais par l'intermédiaire de strastovati (J. Ex.), et slastovïnû<br />
de slastovati (Gr. Naz.), avec -ov- en regard d'un thème nominal<br />
en -ï (§ 567).<br />
Des dérivés en -ïnu apparaissent en rapport avec des thèmes<br />
verbaux, mais qui sont ou peuvent être aussi bien nominaux :<br />
raspustïnû « de répudiation » sur raspusliti et son postverbal<br />
raspustu (§ 758) ; zakonoprëstçpïniï «de transgression de la loi»,<br />
nepozybïnu « sans vacillement », sûnëdïnu « qui se mange » ;<br />
et prilezïnu « assidu », plus spécialement lié à prilezali « s'appliquer<br />
» ; vuzmozïnû « possible » à vuzmosti, dosioinu « digne » à<br />
dostojati « convenir », neposloinû « irrésistible » à postojati « tenir<br />
bon » ; govëinu « de pieux respect », et zagovëino en slavon russe<br />
(§ 1080), à govëti « révérer », prés, govi- et govëje- (§ 584) ;<br />
et en regard de jçti « prendre », jemïnu dans vutainoemïn- Euch.<br />
45 a 4 « qui prend en secret », et qu'on doit restituer dans ëaemûnaago<br />
Euch 49 b 19, à lire ëa emïnaago «de l'heure de prise (de la<br />
fièvre) ». Miklosich donne un exemple de jemïnu au sens de « pris<br />
en location » (par des svoixoi, locataires à location, Ivoixiov).<br />
On a tout un type de formes en -tïnu et en -nïnu, mais il ne s'agit<br />
pas en slave de « participes d'obligation » comme le participe en<br />
-tinas du lituanien (§ 414), et ce sont en slave des dérivés en<br />
rapport avec les substantifs verbaux, non directement avec les<br />
participes passifs en -lu et -nu :<br />
prijçtïnu « recevable », obujçtïnù (Pand. Ant.) « qui embrasse »,<br />
vërojçtïnu «digne de foi» (Izb. Svjat., Athan.), slavon pojçlïnu
454 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
« compréhensible » (r. ponjâtnyj), en regard de -jçtije, et ne différant<br />
pas de zitïnu (Supr. 39329) 1% izohi-vs'iaç « de la vie, zitije » ;<br />
nedocajanïnu « du désespoir » (Supr. 50522 1% dcracmocç, lire T%<br />
àvsXmcmaç) ; Ijubodëjanïnû « de faire l'amour » ; drùznovenïnû<br />
(Ham. 3223s, etc.) « d'audace » ; vuzdrûzanïnu « de l'ascèse »,<br />
neudrûzanïnu « sans retenue » ; neizglagolanïnû et neizdrecenïnu<br />
« indicible » ; imënïnu « des biens, imënie », Ijuboimënïnu ; neraskajanlnû<br />
« qui n'a pas de regret » ; mlûëanïnu « du silence » ; neispisanïnu<br />
« non décrit, non circonscrit » ; prërëkanïnu « de contradiction<br />
» ; vûstanïnu « du lever » ; nepostradanïnu « qui ne connaît<br />
pas la souffrance » ; tïlënïnu « de corruption », nef is Jtïlënïnu,<br />
bestïlëninu « de l'incorruptibilité ». Etc.<br />
§ 978. Élargissements d'adjectifs. —• Les élargissements sont<br />
divers, et pour des causes différentes.<br />
Les adjectifs invariables en -ï sont doublés d'adjectifs à flexion<br />
normale : razliëï, svobodï, sugubï, udobï, et razliëïnu, svobodïnu,<br />
sugubïnu, udobïnû (§ 277).<br />
En regard d'adjectifs possessifs en -ovu, on a des adjectifs en<br />
-ovïnû, avec des sens qui peuvent être autres (§ 975) : adovu « de<br />
l'Hadès, de l'enfer » et adovïnu « infernal », etc.<br />
On trouve également toute une série d'adjectifs en -ivïnu à<br />
côté d'adjectifs en -ivu (§ 995), outre posivïnù à côté de posivû<br />
« convenable », qui est à part (§ 1182) :<br />
milostivu « compatissant » et milostivïnu (Gr. Naz., Pand. Ant.),<br />
chez Hamartole nemilostivïnu, bezmilostivïnu ;<br />
necïstivu « impie » et neëïslivïnu (Athan.), besëïstivïnu. (Ham.) ;<br />
nerodivïnu « négligent » (Hés. LXXXV, 6) ;<br />
prijçtivïnù «réceptif» (Athan., I, 1227, 18422, etc.) ;<br />
rësnotivïnu «véritable» (Ps., et var. Hés. L, 8, LXIII, 9 dans<br />
le manuscrit Tolst.) ;<br />
sumotrïlivû (Pand. Ant., Ham.) « qui observe » et sûmolrïlivïnu<br />
(Supr.) « de l'économie (du salut) ».<br />
Des adjectifs en -ïnu peuvent être refaits sur des substantifs :<br />
luzï « mensonger », et luzïnû sur lûza « mensonge » ;<br />
izvëstu. «bien connu, assuré», et izvëstïnû sur izvëstï (§ 711) et<br />
izvëslije ( § 926) « connaissance » ;<br />
nesytu « insatiable », et nesytïnu sur sytï « satiété » ;<br />
obilu « abondant », et obilïnu sur obilije « abondance », à côté de<br />
izobilïnu sur la locution iz obila (§ 1048) ;<br />
obïstï « commun », et obïstïnu « en communauté », neobïstïnu<br />
(Athan.) àxoivcovvjToç, sur obïstije ;
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 455<br />
velïlëpu « magnifique », et velïlëpïnu (Pand, Ant., Hés. XXVIII,<br />
4) sur velïlëpije (slavon) ;<br />
veselu « joyeux », et avec un autre sens veselïnu (Théod.)<br />
« réjouissant » sur veselije (slov. vesçlen, s.-cr. veselan chez Stulli).<br />
Et en regard du type des composés possessifs (§ 1227), besiçdu<br />
« sans enfants » et bestçdïnû sur besiçdije ;<br />
cëlomçdru (Izb. Svjat., Pand. Ant.) « de sagesse intacte, chaste »<br />
et cëlomçdrïnu sur cëlomçdrije, velemçdru (Ham. 22712) « aux grandes<br />
pensées, ambitieux» et velemçdrlnû (Ham. 5581S, etc.) sur velïmçdrije,<br />
etc.<br />
Plus isolément, on trouve :<br />
budru « vigilant, empressé », et bûdrïnu (et buzdrjï, § 956) :<br />
adv. budrïno Hés. CXVIII, 17, et bedruno Euch. 58 a 3 (§ 61), mais<br />
sûrement par altération, peut-être de jçdrïn- « consistant », et en<br />
ce cas élargissement de jçdrû (§ 1112) ;<br />
dobljï « valeureux », et dobljïnu (adv. -no Supr.) ;<br />
drùzu «hardi », et drùzïnu (Upir', Athan. I, 887), slov. dfzen;<br />
mladû « tendre, jeune », et mladïnu Supr. 3979, avec le sens «de<br />
l'âge tendre », et « de jeune pousse, %XOTJCpopov » à restituer Supr.<br />
24928 (écrit mladu. onu) : ce peut être un dérivé de l'abstrait ou<br />
collectif *mladï, v. r. molodï et mod. môlod' «jeune pousse», slov.<br />
mlâd et adj. mldden « tendre » ;<br />
mrûtvu « mort », et mrutvïnù « mortel, OVTJTOÇ », fréquent chez<br />
Hés., XXI, 22, XXX, 13, etc. ;<br />
prisnû «propre, légitime» (§ 1071), et prisnïnu fréquent chez<br />
Athan., I, 4021, 443, etc., qui résulte visiblement de la nécessité<br />
de bien distinguer l'adjectif de l'adverbe prisno « toujours » ;<br />
skçdu « déficient », et skgdïnu (J. Ex., Pand. Ant., Gr. Naz.),<br />
qui peut être refait sur un substantif postverbal comme r. skudd<br />
« indigence » ( § 764) ;<br />
trëzvù « sobre », et trëzvïnu (Pand. Ant., Ham.), s.-cr. trëzven et<br />
trijèzan (§ 1182) ;<br />
zavoitu (J. Ex.) « tortueux », et adv. nezavoitïno (Athan.) « sans<br />
détour ».<br />
Est à part blazenïna, plur. neutre, dérivé de blazenu, mais au<br />
sens spécial de « macarismes » (§ 1080).<br />
§ 979. Dans les langues .slaves. — La formation des adjectifs en<br />
-ïnu continue partout d'être libre, et il est inutile d'en suivre le<br />
détail dans chaque langue. En russe, par exemple, on a des<br />
adjectifs oxytons et non oxytons, ëûdnyj « merveilleux » et cudnôj<br />
« baroque », et des dérivés des divers suffixes de substantifs, avec
456 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
productivité liée à celle de ces suffixes : ëinôvnyj, sudébngj, sôbstvennyj,<br />
gravirovâl'nyj, pilâlel'nyj, analogicnyj, etc.<br />
On notera l'utilisation du suffixe dans l'adaptation d'adjectifs<br />
d'emprunt (§ 274) : r. progressivnyj, pol. regularny, slov. individuâlen,<br />
s.-cr. interesàntan, irelevàntan d'ail, irrelevant, et tch.<br />
imagindrni avec -ni (§ 971). Ces adjectifs sont en fait tirés de<br />
substantifs empruntés réellement ou virtuels : r. radikâl'nyj<br />
« radical » de radikâl « le radical », pol. romantyczny de romantyk.<br />
Dans les élargissements d'adjectifs, l'alternance des gutturales<br />
ne joue plus : v. tch. tësknij réfection de iësnu (§ 1070), v. pol.<br />
prokny « chaque, tout » et v. tch. prokni sur v. si. proku (§ 1038), v.<br />
pol. wszelkny élargissement de wszelki « tout ».<br />
En russe et en polonais, le suffixe -ovïna, à forme indéterminée,<br />
sert à désigner la fille de « quelqu'un » : r. Ivdnovna « fille d'Ivan »<br />
comme Ivdnovië «fils d'Ivan», pol. Piotrowna «fille de Pierre ».<br />
Cet usage remonte au moins au vieux russe ; chez Hamartole,<br />
des formes (Evdokija) Dekapolitovna 5043O TJ TOU ASKOOTOALTOO « la<br />
fille du Décapolite », Ierosovna 50429 et Inerovuna 51820 'h TOU<br />
"IYÏ £ P°Ç) sont sûrement du réviseur vieux-russe, mais l'emploi<br />
en çe sens du suffixe -ïna est vieux-slave (§ 1081).<br />
SUFFIXE -ènu<br />
§ 980. Vieux Slave. — On trouve en vieux slave les adjectifs :<br />
(j)az(î)nënu (Izb. Svjat.) «de peau, az(ï)no»;<br />
bagûrënu « de pourpre, bagurù » ;<br />
bisîrënu (Izb. Svjat.) « de perle, bisïru » ;<br />
brïselënû (Gr. Naz.) « de briques, brïselije » (§ 931) ;<br />
cvëticanu « de fleur, en fleur, cvëtïcï » ;<br />
drëvënu « d'arbre, drëvo » ;<br />
glinënu (Ham.) « d'argile, glina » (et glinïnu) ;<br />
jçëïnënu « d'orge », à côté de jçëïnû, sur jçëïmen- « orge » (§ 185),<br />
et conservant la trace d'une flexion à vocalisme alternant jçcïmen- :<br />
* jecïmn- > /gcin- ;<br />
kamënu « de pierre, kamen- » (et kamenïnu, § 975) ;<br />
kozanu (Ham.) « de peau, koza » (et koêïnu) ;<br />
lïnënu « de lin » (slavon lïnu) ;<br />
mëdënu « d'airain, mëdï » (et mëdïnu) ;<br />
mozdanu « de moelle, mozgu » ;<br />
mramorënu (Ham. 52329, etc.) « de marbre, mramorû (J. Ex.) » ;<br />
ocïtënu « de vinaigre, ocïtû » (et ocïtïnû) ;<br />
olovënu « de plomb, olovo » ;
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 457<br />
otrçbënu « de son, otrçbi » dans otrubjan- Ham. 16723, var.<br />
otrubn- (r. ôtrubnyj et otrubjanôj) ;<br />
pësûcanu (J. Ex.) « de sable, pësûku » ;<br />
plamënu « de flamme, plamen- », et plamenïnû ;<br />
plûtënu « de chair, plutï » ;<br />
praxnënu (Mat. XII, 33 Sav.) « moisi, pourri », r. poroxnjânyi<br />
« en poussière, pourri » sur poroxnô « poussière », etc. (§ 1074) ;<br />
prosënu « de millet, proso » ;<br />
ramënu « puissant » (Izb. Svjat., Gr. Naz.), proprement « à fortes<br />
épaules », sur ramen- « épaule » (§ 186) ;<br />
rozanu « de corne, rogu » ;<br />
rumënu « rouge » de * rumen- (§ 186) ;<br />
snëzanû (Pand. Ant.) « de neige, snëgù » ;<br />
stïklënu (Ham.) « de verre, stïklo (Izb. Svjat., Ham.) » ;<br />
svilënu (Cosmas 14,918) « de soie, svila (J. Ex.) » ;<br />
sipûëanu « de grenadier », sur sipuku « arbuste épineux, rosier,<br />
grenadier » ;<br />
timënu «de boue, *timen-» (§ 186), et dérivé iimënije «limon»<br />
(§926);<br />
trunënû « d'épine, trûnu » ;<br />
irustënû (Pand. Ant.) « de roseau, trustï » ;<br />
usmënu « de cuir, usmu » (J. Ex.), variante de usnijanu sur<br />
usnije (Éphrem), qui doit s'expliquer comme jçcïnu par un<br />
substantif *usmen- : *usmn- > usn- ;<br />
vlasënu « de poil, vlasu. » ;<br />
vostanû (Virg.) « de cire, voskù » ;<br />
zïdënu «de poterie, nkivQiwç », sur zïdu (§ 794), variante de<br />
glinënu Ham. 3328 signalée chez Sreznevskij, doit être slavon.<br />
On a d'autre part des dérivés en -ënica d'adjectifs en -ënu :<br />
bagurënica « étoffe de pourpre », mëdënica (Ham.) « vase de<br />
cuivre» (et mëdïnica « monnaie de cuivr e»), stïklënica «vase de<br />
verre », vlasënica (Athan., Ham.) « sac de crin, cilice » ;<br />
ou qui supposent des adjectifs en -ënu :<br />
gçsënica « chenille », sur (V)QSU « poil (de barbe) » (§ 77) ;<br />
plastanica « tissu de lin » en regard de plastï « manteau » (§ 1020) ;<br />
zlatënica (Upir') « jaunisse » sur *zlatënu, slov. zlatçn « d'or,<br />
zlaio » ;<br />
zlulënica (Izb. Svjat.), traduisant mxpiç « laitue amère » ou<br />
xp6xoç « safran », sur *zlû!iënu, pol. zôiciany « de fiel », et èlutï<br />
« le jaune » (§ 711).<br />
Le verbe ocëpënëti « devenir raide » restitue un adjectif cëpënu<br />
«raide », sur cëp- (§ 748), dont on a un exemple en slavon. Et le
458 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
slavon atteste beaucoup d'autres formes, qui se retrouvent<br />
généralement dans les langues slaves : kosiënû « d'os, kostï »,<br />
ledënu « de glace, ledû », plalënû « de toile, plalu », rùzanû « de seigle,<br />
ruzï », vlûnënû « de laine, vluna », etc.<br />
§ 981. Dans les langues slaves. — En regard de v. si. -ënû,<br />
et -anû après chuintante ou consonne mouillée, le vieux russe<br />
a -janû, de *-gnû, dès l'Évangile d'Ostromir du xi e siècle : bagûrjanu,<br />
jacïnjanû, trïnjanù ; et le russe moderne a -janyj, -janôj :<br />
kostjanôj, vosëanôj, derevjânnyj « de bois, dérevo » et drovjanôj<br />
« de bois à brûler, drovâ », krovjanôj « de sang, krov' », lubjanôj<br />
« de tille, lub », polotnjânyj « de toile, polotnô », ovsjdnyj « d'avoine,<br />
ovës », etc.<br />
Le polonais a -iany, de -ënû : weiniany « de laine, wèina », slomiany<br />
« de paille, sloma », blaszany « de fer-blanc, blacha », herbaciany<br />
«de thé, herbata», rôzdzany «de baguette, scion, rôzga».<br />
Le kachoube a de même -jany, avec accent sur la finale : nedvab'antf<br />
« de soie, pol. jedwab ».<br />
Le polabe présente -en-, de -ënû, mais confondu avec l'autre<br />
suffixe -enu : gleinêna = pol. gliniany « d'argile ».<br />
Le sorabe a -iany, qui ne représente pas -çnu, puisque c'est la<br />
forme du bas-sorabe où g a donné ë (§ 66), comme celle du hautsorabe,<br />
et qui sûrement continue -ënû, avec généralisation de la<br />
forme après chuintante, -anû : h.-sor. et b.-sor. suknjany « de drap,<br />
sukno », comme kozany « de cuir ».<br />
Le tchèque a -ëny : hlinëny, koslëny, slamëny, et -eny : kozeny<br />
(v. tch. kozëny), slovaque kozeny, kosteny, slameny.<br />
Le slovène a -|n, de -ç_nu : glinçn, kozên, bakrçn « de cuivre,<br />
bâker », zveplçn « de soufre, zvëplo », konopljçn « de chanvre,<br />
konôplja », zemljçn « de terre » ; non sans flottements avec le suffixe<br />
-en de -ïnu : lojçn « de suif, lôj » et lôjen, fém. lôjna.<br />
Le serbo-croate a -en, également de -gnu : glinen, bâkren, gvôzden<br />
« de fer, gvôzd », mjëden « de cuivre », vunen « de laine, vuna » ;<br />
et -anû après consonne mouillée : zëmljan « de terre », déterminé<br />
zemljànï, vostan « de cire », et snjëzan « de neige », déterm. snjezànï,<br />
à côté de snjëzan « de la neige », déterm. snjëênï, à suffixe -ïnû.<br />
La forme -en- de -çnu se confond avec -en de *-enû (§ 1097), et il<br />
y a une grande extension de -en : vôden « d'eau », déterm. vodënï,<br />
marvènï « du bétail, mârva », zèlvenï « de la moisson, zëtva ».<br />
Le moyen bulgare, prolongeant le vieux slave, avait -ënû, avec<br />
ë, qui hors de l'accent passait à -e-, d'où un flottement entre<br />
-ënû et -enû : drëvënû et drëvenû « de bois, d'arbre » ; et après<br />
consonne mouillée -ënû se substituait à -anû : ognënû et ognenû<br />
« de feu ». Le bulgare moderne a -en : ôgnen, fém. ôgnena, slâmen,<br />
fém. slâmena, vâlnen, brasnén « de farine, brasnô » ; et zëmlen « de
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 459<br />
terre », qui est r. zemljanôj en regard de zémen « de la terre », fém.<br />
zémna, et il distingue de même kôzen « de peau », fém. kôzena, et<br />
kôzen « de la peau », fém. kôzna, kâlen « de boue, de torchis »<br />
(moyen-bulg. kalënu), fém. kâlena, et kâlen, îbm.kàlna, «boueux».<br />
Les parlers qui gardent é (§ 51) attestent -ënu : à Suho vâln'an,<br />
à Boboscica kal'àn- « boueux, trouble ».<br />
§ 982. Origine. — Le suffixe i.-e. *-no- pouvait, parmi d'autres<br />
valeurs, indiquer la matière : lat. afhjënus «d'airain», de *ayesnos,<br />
sur aes « airain ». Le slave a ielëznu « de fer, zelëzo », v. si.<br />
slanu « salé » sur solï. Mais il a remplacé -nu par des élargissements :<br />
par -ïnu, ainsi sïrebrïnu « d'argent » ; et, avec des noms de matière,<br />
par *-en-no-, qui a donné -ënu, et *-çnù, -janû en vieux russe<br />
(§ 65).<br />
Ce suffixe nouveau -ënu manifeste en vieux slave une grande<br />
productivité, qui s'est continuée dans les langues slaves. Mais le<br />
point de départ en est restreint : des dérivés de substantifs athématiques<br />
en -en- et -men-. On a clairement kamënu de kamen-<br />
« pierre », plamën- de plamen- « flamme », et on reconnaît l'origine<br />
de timënû « de boue », jçcïnënu « d'orge », et rumënù « rouge »,<br />
ramënu, « puissant » de *ramen- « épaule », qui montrent que le<br />
suffixe -ënu ne servait pas uniquement à indiquer la matière.<br />
Il y a eu évidemment d'autres formations encore sur thème<br />
en -en- (§ 183), qu'il est devenu plus difficile de retrouver : v. si.<br />
mozdanu « de moelle », est tiré de mozgu, mais est lié aussi au<br />
slavon mozdenl « cervelle » ; v. si. vlasënû « de poil » doit avoir un<br />
rapport avec pol. wtosien « crin », et l'adjectif peut être postérieur<br />
au substantif en -en- ; et *vodënu « d'eau », dans r. vodjanôj, slov.<br />
vodçn, qui est sûrement ancien bien que le vieux slave n'atteste<br />
que vodïnu, et le vieux serbo-croate présente en effet vodënica<br />
« moulin à eau » (mod. vodënica), peut être fait sur le thème *vodnqu'a<br />
connu voda (§ 176).<br />
SUFFIXE -uku<br />
§ 983. Comme dans les substantifs (§ 841), c'est un élargissement<br />
de thème en *-u- avec l'élément *-ko-, qu'on trouve en sanskrit<br />
dans des formes d'adjectifs comme tanûh et tânukah « mince »,<br />
mais qui a pris une telle çxtension et est devenu si régulier en<br />
slave qu'il a complètement' éliminé les adjectifs en *-«-, dont il ne<br />
subsiste que quelques traces adverbiales (§ 275). On trouve en<br />
vieux slave, et répondant pour une part à des adjectifs en -us du<br />
baltique ou d'autres langues :
460 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
bridukû « piquant », s.-cr. brïdak « tranchant », etc., qui se<br />
rattache au thème bri- de brije-, briti « tailler, raser » (§ 514) ;<br />
gladukù « lisse », lit. glodùs : dérivé d'un thème *glâd- d'intonation<br />
rude, s.-cr. glàdak, qui est verbal dans lit. glôdziu, glôsii « lisser,<br />
polir», à vocalisme long (§ 551) en regard du vocalisme bref de<br />
v. h. a. glat, lat. glaber ;<br />
jaduku (Éphrem) « mangeable », sur jad-, et r. édkij « mordant,<br />
corrosif » sur est' « manger » au sens de « ronger, corroder » (v. si.<br />
jadïno « cautère », § 1079) ; le sens différent de s.-cr. jédak « irrité »<br />
(jëdak « mordant » et slov. jédek sont des russismes) est lié à jéditi<br />
« irriter » ( § 785) ;<br />
kratûku « court », lit. kartùs « amer », sur la racine de cïrte-,<br />
*ëerstl « entailler » (§ 429) ;<br />
krëpuku « solide », à côté de krëpu (§ 820) ;<br />
krotùku « doux, bénin », sans rapprochement sûr ;<br />
lïgûku « léger », gr. zlc/.yûc, « petit, court », et avec un autre<br />
vocalisme lit. lengvàs (§ 275) ;<br />
mëlûkû est altéré chez J. Ex., mais se trouve en slavon et dans<br />
r. mélkij « peu profond » et « fin », en regard du substantif v. si.<br />
mëlï (§ 718) ;<br />
nïçkûkù «mou», verbe rnejcnçli «s'amollir», lit. minkyti « pétrir»,<br />
minkstas « mou » ( § 498) ;<br />
mrûzûku « odieux », verbes mrûznçti et mrùzëti ;<br />
nizûkû « bas » (Gr. Naz., Ham., Hés. GUI, 25, Gant. IV, 8),<br />
élargissement de nizû (§ 275) ;<br />
çzûkû « étroit », skr. amhûh, got. aggwus (lit. ankstas), sur la<br />
racine de si. vez- « lier » ( § 428) ;<br />
pluzûkû «glissant», sur le thème verbal *pïlz- (§ 428) ;<br />
rëdùku « rare, clairsemé », thème rëd- dans l'adverbe porëdy<br />
(Izb. Svjat.) « rarement » (§ 1203), verbe r. redit' « éclaircir (§ 747) :<br />
sûrement de *erd-, et rëdûkû répond à lit. erdvas « spacieux »<br />
(§ 275), ce qui ramène à lit. irti «se séparer», factitif ardyti<br />
«séparer» et si. oriti «abattre» (§ 608), et à la racine i.-e. *er-,<br />
*r-, qui a pu être élargie en râ- et rë- dans lat. rârus « rare » et dans<br />
rëte « filet », cf. s.-cr. rje(d)cina « fait d'être clairsemé, non serré »<br />
et macéd. recina « tamis (de toile) » ;<br />
sladûkû « doux », lit. saldùs, verbe sqlù, sdlti « devenir doux » ;<br />
slïzûkû « glissant », et slavon slizùkù, r. sltzkij « glissant » et<br />
« visqueux » (§ 758), sur une racine slïz- qu'on rapproche de v. h. a.<br />
slîchan « (se) glisser », v. angl. slic « pierre à aiguiser » ;<br />
srùxukù « rugueux » (Izb. Svjat., Hom. Mih. 219 va ), tch. dial.<br />
srhky « rude, brut », thème *sïrx- (§ 771) ;<br />
stydûkû « honteux, impudent », sur styd- ( § 754) ;<br />
lïnûkû « mince », sur le degré réduit tïn- comme gr. Tavu-, en<br />
regard du degré plein de skr. tanûh et tànukah, lat. tenuis, le
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 461<br />
correspondant baltique du slave étant lit. Iqvas de *tenu- (§ 275) :<br />
racine verbale *ten- (§ 457) ;<br />
trûpùku (Pand. Ant., Gr. Naz.) « âpre », r. térpkij, pol. cierpki, etc.,<br />
sur *tïrp- (§ 770) ;<br />
vlûgûku (J. Ex.) « humide », sur *vïlg- (§ 769) ;<br />
vratûku « facile à retourner », tch. vratky « instable », mais v.<br />
tch. et dial. vrlkij, r. vërtkif, pol. wartki « agile », sur le thème de<br />
v. si. vralili et sur *vïrt- de vïr(t)nçti (§ 494) ;<br />
zidûku (Pand. Ant.) « fluide », r. zidkij « liquide » et « flexible »,<br />
verbe éidét' « se liquéfier » : en partant du sens de « flexible », un<br />
rattachement serait possible au thème zi- de zica «fil» (§ 1040),<br />
zila «nerf» (§ 1051).<br />
§ 984. Sur thème mouillé, on a :<br />
gorïku « amer », r! gôr'kij, secondairement s.-cr. grk et slov.<br />
grenèk, sur le thème du comparatif gorjii, ce qui autorise à voir dans<br />
l'adjectif slave un remaniement de gr. jîapiSç, lat. gravis (§ 290) ;<br />
tçzïku «lourd», pour *tçgûku. lit. tingùs (§ 289), refait sur son<br />
comparatif (§ 289).<br />
D'autres adjectifs en -ùku ne sont attestés qu'en slavon, mais<br />
plusieurs sont sûrement anciens :<br />
blizukù « proche », r. blizkij, pol. blizki, tch. blizky, qui paraît<br />
être l'élargissement régulier de blizu resté comme adverbe (§ 275),<br />
supplanté en vieux slave et dans les langues méridionales par<br />
blizïnjii, dérivé du comparatif adverbial blize, mais voir blizoku,<br />
§ 1046 ;<br />
drûzûku « hardi », r. dérzkij, pol. dziarski et v. pol. darski ( § 74) ;<br />
le vieux slave a drûzu, le tchèque drzy et drzky dès le vieux tchèque :<br />
thème verbal *dïrz-, mais le thème balto-slave était *dirs-, et si.<br />
*dïrzûku correspond ainsi à gr. 0paaùç, (§ 494) ;<br />
krùxukû « friable », v. pol. krechki, slovaque krehky (tch. krehky),<br />
slov. krhek, s.-cr. krhak, sur thème krux- (§ 755) ;<br />
plylùku « plat, peu profond, guéable », pol. ptytki, tch. plytky,<br />
slov. plitek (et plitev, § 1182), s.-cr. plitak : le rattachement au<br />
thème ply- de plynçti « voguer, flotter » n'est satisfaisant ni pour<br />
le sens ni pour la forme, un élargissement en -lùku, n'étant pas<br />
ancien, et l'on doit penser à une altération, par rattachement à<br />
plove- et slov. plîtva «radeau », etc. (§ 915), de *plotuku, lit. platùs<br />
« large, plat », gr. TTXKTÛÇ, skr. prthùh, verbe lit. (is-)-plësti « élargir »,<br />
et voir v. si. pleste « épaul^ », § 1021.<br />
Ces adjectifs en -uku dérivent, du moins pour la plupart, de<br />
thèmes verbaux : ils se forment et se reforment sur eux, krëpuku<br />
pour krëpu sur le dénominatif krëpiti « rendre solide », v. si.
462 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
vratùku pour *vïrtûku sur vratiti ; et c'est comme déverbatifs<br />
qu'ils se développent ensuite dans les langues slaves.<br />
Quelques-uns, en -dukû, sont sur des élargissements en -d-<br />
(§ 444) de thèmes verbaux : nettement bridukâ sur bri-, sûrement<br />
*saldukû sur un balto-slave sal-, lit. sâlti, et rëduku sur *er-, peutêtre<br />
aussi ziduku sur zi-. Un élargissement en -tùku, qu'on peut<br />
difficilement admettre dans plytûku, est récent dans s.-cr. vltak<br />
«flexible, élancé», fait sur vît (§ 514), et dans pïtak «buvable»<br />
qui remplace v. si. pitii (§ 959), le russe pitkij n'étant signalé<br />
que dans une opposition à édkij.<br />
§ 985. Suffixe -oku. — Il y avait également des élargissements<br />
en *-ko- de thèmes en *-o- : skr. nagndh «nu» et nâgnaka-. Ce<br />
type n'est représenté en slave que par quelques formes et n'a pas<br />
été productif :<br />
glçboku « profond », r. glubôkij, etc., sur Un thème glçb- isolé en<br />
slave, peut-être forme à infixe nasal de la racine *glubh- de gr.<br />
yAiiqxo «je grave », lat. glûbô « j'écorce », v. h. a. klioban «fendre»,<br />
représentée en baltique par v. pr. gleuptene « versoir de charrue » ;<br />
grçstoku « pénible », et subst. grçstostï (Pand. Ant.) « infortune » ;<br />
verbe sûgrustiti si (Ham.) « être peiné », r. grustii' « s'affliger » et<br />
grust' « chagrin », s.-cr. grustiti se « être dégoûté », et aussi slov.<br />
grustiti (se), subst. grust (masc.) «dégoût» : le slovène grustdoit<br />
indiquer que grçst- est le dérivé d'une forme à infixe nasal, et<br />
il invite à remonter à la racine grud- de lit. grûsti « perler l'orge »,<br />
si. gruda et grumen- « motte » (§ 185), slov. gràditi « briser, gruger »,<br />
grudi me « cela m'afflige », et à retrouver sur cette racine un<br />
inchoatif *grçd- à adjectif verbal *grçstu (§ 1159) ;<br />
inoku « solitaire » et r. odinôkij, sur inu, comme got. ainaha sur<br />
ains, lat. ûnicus sur ûnus (§ 257) ;<br />
siroku « large », sur thème sir- sans étymologie (§ 1113) ;<br />
zestoku « rude, violent », à thème zest- dans ozesliti « rendre dur »,<br />
et à aspect d'adjectif verbal en -lu (§ 408) comme forme de base,<br />
mais la racine, qui pourrait être *ged- de lit. gedëti, si. zçdati<br />
« désirer vivement » (§ 553), ne se laisse pas reconnaître sûrement ;<br />
vysoku « haut », sur un thème vys- qu'il est tentant d'expliquer<br />
par *ûpso- d'après gr. ôt|n «en haut», wj^Aoç sur *ups-, mais qui<br />
d'autre part doit se retrouver dans le composé adverbial vysprï<br />
«en haut» comme forme à degré long du préverbe vuz- (§ 1223).<br />
Pour vuz-, il répond à lit. uz-, avec forme longue ûz- dans des<br />
composés comme ûzvalkas « garniture de lit », mais on a aussi en<br />
germanique up dans v. sax. up et v. h. a. ùf« en haut », *eup- dans<br />
got. iupa. Compte tenu des altérations dans les proclitiques, il ne<br />
paraît pas impossible d'expliquer si. vuz- par *ups-, et de même
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 463<br />
lit. uz-, lette uz- et dial iz-, avec la finale de lit. is- (iz-), lette iz<br />
« hors de » et une réduction exceptionnelle du groupe ps (§ 35).<br />
On a encore v. tch. et mod. divoky, v. pol. dziwoki, variante de<br />
tch. divi) et v. si. divii (§ 959). Le vieux-russe blizokû «parent<br />
proche » est substantif (§ 1046) et différent de l'adjectif blizuku.<br />
Sur thème mouillé, on a daleku «lointain» (§ 289) en vieux<br />
russe, et r. mod. dalëkij, pol. daleki, v. tch. dalek et mod. daleky,<br />
slov. dâlek, s.-cr. dàlek, en vieux slave seulement l'adverbe daleëe,<br />
en bulgare daléë(e) et l'adjectif dalécen.<br />
Avec les thèmes en *-i-, l'élargissement est en -ikû (§ 1043).<br />
§ 986. Dans les langues slaves. — Le suffixe continue, et<br />
largement dans plusieurs langues, dé fournir des adjectifs sur<br />
thèmes verbaux.<br />
En russe : brôskij' « qui lance bien » sur brosât' ; ëëtkij « lisible »<br />
sur l'ancien ëte-, ëest' ; gibkij « flexible » sur s-gibâi' « courber » ;<br />
jârkij «éclatant, lumineux» sur jariti (§ 790) au sens spécial de<br />
jâryj «brûlant, brillant» (§ 1112); ëmkij «de grande capacité»,<br />
sur *jïme-, imperf. jemlje- ; kléjkij «collant» sur kleit' «coller»;<br />
kôvkij « malléable » sur kovât' ; nôskij « qui se porte longtemps »<br />
et « qui pond » sur nosit' ; plâvkij « fusible » sur plâvii' ; sâtkij<br />
« branlant » sur satât' ; vâlkij « qui verse facilement, vacillant »<br />
sur valit' ; vjâzkij « bourbeux » sur vjâznut' « s'embourber » ;<br />
xôdkij « qui marche bien » sur xodii' » ; etc.<br />
Ces dérivés peuvent être aussi en regard de substantifs, mais dans<br />
le cas de thèmes à la fois verbaux et nominaux : grômkij « bruyant,<br />
retentissant » sur grom « tonnerre » et gromit' « tonner, foudroyer »,<br />
comme zvônkij' « sonore » sur zvon « son » et zvonit' « sonner ».<br />
En polonais : gibki « flexible » sur gibac « balancer », anciennement<br />
« courber », et giçlki refait sur le participe passif giçty de giqc<br />
«courber» (§ 459), sûrement par substitution à *gûbûku, tch.<br />
hebky ; lepki « gluant » sur lepnqc ; sypki « friable, meuble » sur<br />
sypac « répandre, éparpiller », et tch. sypky, slov. sipek, s.-cr.<br />
slpak ; etc.<br />
En tchèque : hebky « souple » et v. tch. « flexible », vlhky<br />
« humide » ; prudky « rapide, impétueux » sur prouditi « affluer »<br />
de proud « courant » (§ 762) ; etc., et brzky « rapide » pour v. tch.<br />
brzy, qui peut avoir été refait sur le comparatif brze.<br />
En slovène : grenèk «amer» sur grenëii (§ 290); lâhk-, d'où<br />
lâhek « léger » ; pfhek « (fruit) tendre, (terre) meuble » sur le thème<br />
*pïrx- (§ 592); rézek «tranchant» sur rézati ; sibek «flexible»<br />
sur sibiti « plier », de siba « verge » ; zôlhk- « amer », s.-cr. zu(h)k-,<br />
voir § 1041. A. Bajec a dressé une liste d'une cinquantaine de<br />
formes slovènes, avec des flottements et des substitutions de<br />
suffixes, ainsi tréz(v)ek pour trézen et trêzev «sobre» (§ 1182).
464 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
En serbo-croate : gïbak, lâk de lahk-, lïgûkû, mëk de mçkûku,<br />
ëïtak « lisible » de citati, Ijubak « aimable » de Ijubiti, jârkî « ardent »<br />
(§ 790) et zârki de Mriti (§ 594) ; etc.<br />
En bulgare : krôtâk, lek (moyen-bulg. lekukû, lekoku), mek, etc.<br />
SUFFIXE -atu<br />
§ 987. — C'est le suffixe *4o- ajouté à des thèmes en *-â- et<br />
en *-5- : lat. barbâtus de barbu, gr. (^UYWTÔÇ de Çoyôv « attelage », et<br />
ti[A7)to
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 465<br />
zenatu (Izb. Svjat.) « qui a femme », et zenatïcï (Ham.).<br />
Et voir lopata « pelle », § 1172, en regard de lit. lapas « feuille »<br />
et lapôtas « feuillu ».<br />
On trouve des élargissements en -ovalu :<br />
podlûgovatû (Ham. 1914) « oblong », slov. podolgovàl, r. prodolgovâtyj<br />
;<br />
grùbovatu (Ham. 41012) « courbé, voûté » (r. gorbâtyj « bossu ») ;<br />
rësnovatu (Éphrem) dans un exemple isolé, sans doute sur rësnu<br />
« vrai », cf. slov. resnovît « sérieux » ;<br />
rosoxovatu (Ham. 54416), variante de rasoxatu ;<br />
vinovatu (Ham.) «coupable» et nevinovatu «innocent», r.<br />
vinovâlyj. Mais les textes en rédaction vieux-slave ne connaissent<br />
que vinovïnu, nevinïnu, et ces formes en -ovatu fournies surtout<br />
par Hamartole, et qu'on trouve largement en slavon, peuvent<br />
être du vieux russe plus que du vieux slave.<br />
Ce type au moins d'élargissement existait déjà, puisqu'il a<br />
fructifié de bonne heure.<br />
Pour le type en -ïnatu, il se rencontre très tôt, listvïnatû « feuillu »<br />
dès le slavon russe du xi e siècle, et le slavon ustïnatu « lippu » en<br />
indique l'origine : c'est un dérivé, non pas du suffixe -ïnu d'adjectif,<br />
mais de substantifs à suffixe -mo.ou -i'.na (§ 1080). L'exemple unique<br />
du vieux slave, perïnatu à côté de perijatu sur le collectif perije,<br />
doit restituer une forme *perïno en regard de pero « plume », dont<br />
la formation n'est pas claire (§ 191), et dont le thème apparaît<br />
à finale -n- dans lit. spafnas « aile » et skr. parndm « aile, plume ».<br />
§ 988. Dans les langues slaves. —• Les textes slavons apportent<br />
de nombreux adjectifs en -atu : kosmatu «velu» de kosmu «poil»<br />
(§ 1066), ustïnatu de ustïna « lèvre », listvïnatû en regard du collectif<br />
listvije (§ 160) ; en -ovalû : krçgovatu sur krçgû ; et en slavon russe<br />
particulièrement en -ïëatû : kolïcatû « à anneaux » sur kolïce,<br />
klinïëatû « à forme de clou » sur klinïcï, avec l'alternance c : c<br />
qu'on a dans les verbes dénominatifs en -ïcati (§ 573), et par<br />
extension k : c : pësûcatû « sablonneux » de pësûkû, dûsëatû « de<br />
planches » (r. dosëâtyj) de dûska.<br />
Le russe a borodâtyj, kosmâtyj, xvostâtyj «à (longue) queue,<br />
xvost » ; — molodcovâtyj « qui est un luron, molodéc » ; uglovâtyj<br />
« anguleux » sur ûgol « angle », adj. uglovôj « d'angle, angulaire »,<br />
dubovdtyj «raide» sur dub «chêne», adj. dubôvyj «de (bois de)<br />
chêne », et cette opposition entre l'adjectif d'appartenance en<br />
-ovyj et son élargissement en -ovdtyj donne à -ovàtyj une valeur<br />
diminutive : gorbâtyj « bossu » et dim. gorbovdtyj, belovâtyj « blanchâtre<br />
», dorogovdtyj « un peu cher » ; — borodâvcatyj « à verrues »
466 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
de borodâvka, pâl'ëatyj « à doigts » de pâlec, peretivcatyj « chatoyant »<br />
de perelîv (§ 729), razsypëatyj «friable» de razsypka «fait de se<br />
répandre ».<br />
Ces formations de dérivés en -atyj sont productives en russe,<br />
celles en -âtyj et -ovâtyj avec l'accent sur l'élément suffixal -ad'intonation<br />
rude, celles en -ëatyj sur le thème nominal de base.<br />
En polonais : brzuchaiy « ventru » de brzuch, wqsaty « moustachu<br />
» de wqs, dziobaty « grêlé » de dziôb « becquetage, piquetage,<br />
marque de petite vérole », srokaty « de couleur pie » sur sroka<br />
« pie », popielaty « couleur de cendre » sur popiôi « cendre » ; kopulowaty<br />
« en forme de coupole, kopula ».<br />
En sorabe : h. sor. kamjenjaty « de pierre », piomjenjaty « à<br />
flammes » et piomjeskaty « à petites flammes », pjerséenjaty « à<br />
bague », woiojaty « riche en plomb, woioj ».<br />
En tchèque : hranaty « anguleux » de hrana « angle », kolenatij<br />
« qui a de grands genoux », nestydaty « éhonté » ; sur thème verbal<br />
lezaty « couché », slojaty « qui se tient » ; sur adjectif dlouhaiy<br />
« très long », amplificatif de dlouhy, nahaty « tout nu » de riahy<br />
« nu » ; -natyf : dfevnaty « ligneux », lesnaty « boisé », hvëzdnaty<br />
« étoilé », srdnaty « courageux » ; -ovaty : jedovaty « vénéneux »,<br />
sukovatyf « noueux » de suk « nœud ».<br />
En slovène : brkàt « moustachu » de bfk « moustache », glinàt<br />
« argileux », nogàt « à pieds », ramùt et ramenât « aux larges<br />
épaules » ; et grand développement de -nat : krvàt et krvnàt<br />
« sanguin », ribàt et ribnàt « poissonneux », zilàt et zllnat « veiné »<br />
et « veineux », avec différence ou essai de distinction de sens :<br />
ylavàt « à grosse tête » et glâvnal « en forme de tête, pommé ».<br />
En serbo-croate : bfkat, àkal « qui a de bons ou grands yeux »,<br />
plècat « large d'épaules » de pièce, rèpal « à queue, rêp », trbusat<br />
« qui a du ventre, trbuh » ; rarement -nat : brsnat « feuillu » de<br />
brsl « feuillage », ëvôrnat « noueux » de cuôr « nœud », rësnat « couvert<br />
de chatons » de résa « chaton » ( § 808) ; exceptionnellement -ovat :<br />
cudnovat « étrange », sûrement par croisement de ëûdan et de<br />
ëudàvii (r. ëudovâtyj).<br />
En bulgare : bradât, kosmât, zâbât « à dents », etc.<br />
§ 989. Suffixe -astu. •— Cette variante du suffixe -atu est inconnue<br />
des textes vieux-slaves et rare dans les textes slavons postérieurs :<br />
russe ancien yolënastu « à longues jambes » (xv e s., Srezn., Supplément).<br />
Mais elle apparaît dans les langues slaves, et elle abonde<br />
dans plusieurs. C'est dire qu'elle présentait ou qu'elle a pris un<br />
caractère populaire et expressif ; son développement, sinon son<br />
origine, est sûrement en rapport avec la variante -islu de -itu<br />
{§ 991). On la trouve :
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 467<br />
En russe : brjuxatyj et brjuxâslyj « ventru » de brjuxo, nosâtyj<br />
et nosâstyj « à grand nez », zubdtyj et zubdstyj « à (longues) dents »,<br />
krugljâstyj « arrondi » (krugljds « chose ronde, rondin »), lobâstyj<br />
« à grand front, lob », glazâstyj « à grands yeux » de glaz ( § 783), etc. ;<br />
le type en -âstyj est un peu plus familier, et il est plus productif<br />
encore, que le type en -âtyj, avec des nuances de sens plus ou<br />
moins nettes : rogâtyj « cornu » et rogdstyj « à grandes cornes ».<br />
En polonais, le suffixe est -(j)asty, sur thème mouillé : baniasty<br />
« pansu », de bania « vase à grosse panse », iopaciasly « en forme<br />
de pelle, lopala », gqbczasty de gqbka « éponge », ceglasty « (couleur)<br />
de brique, cegla », etc. ; lisciaty et lisciasty « feuillu », et flottements<br />
entre la langue commune et les dialectes, où l'on trouve baniaty,<br />
ceglaty, etc.<br />
Le polabe atteste -at- et -(j)asi : teypost = *dupast, sur pol.<br />
dupa «derrière» et dupla «creux (dans le bois)», dziupla, adj.<br />
dziuplasty.<br />
En tchèque, -asl paraît manquer complètement, en sorabe de<br />
même.<br />
En slovène, au contraire, -asl est très fréquent :<br />
kçtast « à angles » de kgt « angle », kotlinast « encaissé » de kolllna<br />
« bassin, vallée encaissée » ; indiquant la matière, glinast « argileux »,<br />
kremqnast « siliceux », porcelânast « de porcelaine », ou la forme,<br />
kolçnast « en forme de genou, coudé », méëast « en forme de glaive »,<br />
mizasl « en forme de table, miza », pogdëasl « en forme de galette,<br />
pogdëa ».<br />
En serbo-croate : budàlast « imbécile » de budàla, cvjëtast « fleuri,<br />
semblable à une fleur », golùbast « couleur de pigeon », grïvast « à<br />
crinière », golàbradast « imberbe », suhôvrhast « à la cime desséchée<br />
», etc.<br />
En bulgare, le sufïixè -asl paraît rare, mais il est fréquent, en<br />
macédonien surtout, sous la forme -est : bulg. krdëast « à longues<br />
jambes» et macéd. kracest, de krak «jambe», macéd. valë(ev)est<br />
« arrondi », volnest « laineux », etc. C'est donc que le bulgaromacédonien<br />
avait développé une forme -jastu, mouillée probablement<br />
sur le modèle de -istu : on trouve en moyen bulgare plavogrivëstu<br />
«à crinière fauve », avec *grivjastu, grivëstu comme en<br />
bulgare moderne et en macédonien grivest de griva ; et peut-être<br />
même dès le vieux slave, d'après jçzëstivu «malade», voir § 1180.
468 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
SUFFIXE -itu<br />
§ 990. — Ce suffixe, parallèle à -atu, est le suffixe *-to- ajouté<br />
à un *-f- qui est une forme de dérivé de thème en *-i- : lat. pellïtus<br />
« couvert de peau » de pellis « peau ». Le baltique a lit. -ytas, rare<br />
comme dérivé de substantif, et mal distinct du participe passé<br />
passif -ytas : akytas « qui a des yeux », de akis « œil », verbe akyli<br />
« avoir des yeux, être poreux » ; danlytas « qui a des dents », de<br />
dantis, verbe daniyli « denter ». En slave, où le suffixe dénominatif<br />
est distinct du participe passif des verbes en -iti, la formation est<br />
productive. On trouve en vieux slave :<br />
ërëvitu (Malalas) « ventru », de ërëvo ;<br />
dolitu (J. Ex.) « à creux », de dolû, et voir çdoliiû ;<br />
golënitu (Ham.) « (bouc) à grandes jambes » rendant TpocYoexxeXTjç ;<br />
imenitu « qui a un nom, renommé », luzeimenilû « faussement<br />
renommé » et luzivoimenitû (Athan.), tïzoimeniîu (Ham.) « du<br />
même (tïzû, § 233) nom » ;<br />
koreniiu « à racines », s.-cr. korjènit, dans korenitïcï « magicien »<br />
(Actes Ap., XIII, 8, etc.), slavon serbe korënilïcï, sur korenï, s.-cr.<br />
korënï ( § 183) et le collectif korenije « racines (magiques) », korenije<br />
tvoriti (Actes Ap., VIII, 9) « pratiquer la magie » ;<br />
sukrovitû (Gr. Naz.) « qui a un trésor, sûkroviste » ;<br />
oblomitû Hom. Mih. 213 rb , sûrement sur un postverbal oblomu<br />
{§ 734), et probablement au sens de «bien détaché, (cœur) bien<br />
ouvert » ;<br />
mastitu « gras » de mastï ;<br />
dùvopomostitu « à deux planchers, SKTTSYy\ç », de pomostû (§ 738) ;<br />
naimitu (Gr. Naz.) «mercenaire», de naimu «salaire»;<br />
naroëitu « remarquable » de narokû ;<br />
munogooëitu « à beaucoup d'yeux », et oëitu « patent » en glagolite<br />
croate, Eccl., IV, 4, s.-cr. ôëit ;<br />
ostroviiu (Ham.) « en forme d'île, ostrovu » ;<br />
çdolitû (J. Ex.) «vallonné », de çdolï (§ 717) ;<br />
podobitù (Pand. Ant., I Cor., IV, 16, XI, 1) « qui a la ressemblance,<br />
podobije » ;<br />
srûditu (Pand. Ant.) « en colère », sur le verbe *sruditi, postverbal<br />
*srûdu « colère » (§ 810) ;<br />
sugubitû (Izb. Svjat.) « double », de sugubï (SOTXOUÇ Gen.<br />
XXIII, 9) ;<br />
tomitu. « (cheval) dressé » Ham. 50510, dans xytru konemï tomitom<br />
byli « habile à dresser les chevaux », gr. 7REPISS^ioç E7ÎTOKOJJI.OÇ :<br />
mot isolé, peut-être d'un postverbal *iomu du verbe tomili « tour-
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 469<br />
menter » (§ 734), mais dont le sens fait supposer un emprunt au<br />
germanique, got. (ga)tamjan « dompter » ;<br />
vënïëitû (Pand. Ant.) «à couronne, vënïcï » ;<br />
zavoitu (J. Ex., Izb. Svjat.) « sinueux », s.-cr. zâvojit, de zavoi<br />
«vrille » (§ 729) ;<br />
znamenilu « remarquable ».<br />
Et des adjectifs en -ovitu :<br />
ëesnovitu « alliacé » en slavon et dans v. si. cesnovituku « ail »<br />
(§ 839), de ëesnû (§ 1072) ;<br />
ërënovitu (Joël, I, 6), variante en glagolite croate de ërënovitïcï<br />
« (dent) molaire », et adj. crënovïnû (Ps.), tch. trenovij, pol. trzonowy,<br />
dérivés de *ëernu (§ 1072) ;<br />
domovitu « qui a sa maison, qui est maître de maison » ;<br />
imovitu (Gr. Naz., Ham.) « qui a des biens, imënije », neimovitu<br />
(Ham.) àvÛTïap/.Toç {« sans existence, ûna.pÇiç », compris « sans<br />
fortune ») ;<br />
jadovitu « empoisonné, venimeux », de jadu ;<br />
orjevitu (Athan.) « en rut », de orï (Ham.) « cheval (étalon) »<br />
(§ 1020);<br />
plodovitu « fertile », neplodovitu, dobroplodovitu (Ham.), sëmenoplodovilu<br />
(Ham., § 1212) ;<br />
sadovitu (Ham. 56823) « bien planté », de sadu « plantation » ;<br />
sanovitû « qui a une dignité, sanu » ;<br />
trçdovitû (Euch.) « hydropique » (ou « dysentérique »), vodïnotrgdovitu<br />
(Index de Luc, III, 1. 1), de trçdu (§ 764).<br />
On trouve beaucoup d'autres formes en -itu et -ovitû dans les<br />
textes slavons : plemenitu « noble », darovitû « généreux », trësnovitù<br />
« à franges » de trësnû (§ 1072), etc.<br />
§ 991. Suffixe -istû. — Les variantes -astû de -atû et -istu de -itû<br />
sont parallèles et doivent s'expliquer de la même façon, par une<br />
contamination de suffixes d'adjectifs en -t- et en -st-, où la forme en<br />
-st-, qu'on retrouve dans le suffixe -ostï (§ 909), apparaît en rapport<br />
avec l'ancien suffixe de superlatif (§ 293) et le continuer sous des<br />
aspects évolués.<br />
Le baltique a quelques formes en lit. -ysta, -ystë qui donnent des<br />
abstraits d'adjectifs ou de substantifs : jaunystà «jeunesse» de<br />
jdunas, draugystà et draugystè « camaraderie » sur draûgas « compagnon<br />
». En slave, le suffixe -iste doit être un dérivé en -je du<br />
type des adjectifs en -istû (§ 954). Ces adjectifs sont attestés dès<br />
le vieux slave, mais seulement dans des textes en rédaction<br />
slavonne :
470 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
brunistû dans brunistïcï (Ham.) « cuirassé », de brunja « cuirasse » ;<br />
bruvistû « sourcilleux » (Ham., Malalas), de bruvï ;<br />
grulistû (Malalas) « à grande gorge » ;<br />
plestistu (Ham.) « large d'épaule, pleste » ;<br />
rëëistu. Malalas, Ham. 39228 « fort en paroles », 526 13 SUSXTIXOÇ<br />
lu e5 ASXTIXOÇ.<br />
Sans doute ces exemples ne sont que chez Hamartole et Malalas<br />
dont les textes ont subi des remaniements, mais le type est<br />
sûrement ancien, le dérivé en -iste doit le prouver. Il est bien<br />
attesté en slavon et en vieux russe, où kamenistu « pierreux »<br />
est sans doute du xn e siècle.<br />
§ 992. Dans les langues slaves. — En russe, -ilyj n'est plus que<br />
traditionnel : mastityj, serdîtyj, znamenityj ; mais -ovityj a gardé<br />
une certaine productivité : darovîtyj « doué, talentueux », delovityj<br />
« rompu aux affaires », gljancovityj « lustré » de yljdnec « lustre »<br />
(ail. Glanz), ledovityj «glacial ». Le suffixe vivant est -istyj, comme<br />
-astyj :<br />
bugristyj « à collines, accidenté », de bûgor « colline », vetvistyj<br />
« branchu », voloknîsiyj « fibreux » de voloknô, zemlistyj « terreux »,<br />
avec deux types d'accent, volnistyj « ondulé » de volnâ, et glinistyj<br />
« argileux » de ylina ; sur thème de base dissyllabique azôtistyj<br />
« azoteux » de azôt, raskdtistyj « en pente » de raskât.<br />
Des adjectifs sont en rapport avec des verbes, mais par l'intermédiaire<br />
de postverbaux existants ou virtuels : podzâristyj « roussi »<br />
en regard de podzdrit', mais zâril' a ses postverbaux en -zar (§ 736) ;<br />
prizimistyj « serré, avare » de prizimât' « presser », subst. prizim<br />
(§ 795). On a des élargissements en -nislyj : masljanîstyj « huileux »<br />
de mâslo et adj. mâsljanyj ; et en -ovistyj : selkovîstyj « soyeux »<br />
de sëlk et adj. sëlkovyj.<br />
En polonais, -ily n'est plus, comme en russe, que traditionnel :<br />
naroczyty « considérable », znamienity « excellent », pospolity « commun,<br />
ordinaire » sur l'adverbe ( po ) s polu « ensemble » (originellement<br />
« en moitié, en métayage ») ; obfity « abondant », v. pol. oplwity,<br />
en regard de oplywaca abonder », mais sur le thème *plûv- antérieur<br />
à piyw-($ 730), v. tch. plvëti« couler » (§ 591). La forme se maintient<br />
davantage dans les dialectes : mqczyty « farineux » de mqka,<br />
wodnity « aqueux », pour mqczysty, wodnisty de la langue commune.<br />
C'est -isty, parallèlement à -(j)asty, qui est le suffixe productif :<br />
cienisty « ombreux » de cien, dzdzysty « pluvieux » de deszcz, gén.<br />
dzdzu, jedwabisty « soyeux » de jedwab, perlisty « perlé » de perla ;<br />
et ojczysty, macierzysty « (pays) paternel, maternel », wiekuisty<br />
«éternel » élargissement de v. pol. wieku(j)i (§ 957) ; en regard de
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 471<br />
thèmes verbaux : posuwisty « à (pas) poussé, à grand pas » de<br />
posuwac « pousser, avancer », zawiesisty « pendant » de zawiesic.<br />
En sorabe, -ist- manque, et l'on n'a que -ity : h, sor. kamjenity<br />
« pierreux, rocailleux », différent de kamjenjaty « en pierre »,<br />
piomienity « flambant, enflammé » et. piomjenjaty « à flammes »,<br />
znamjenily «célèbre» et znamjenjaty «à signes»; et -o(w)ity :<br />
wolojty « semblable à un bœuf », zemjojty « terreux ».<br />
En tchèque, où -asl- manque, -isly est très rare, et zlatistij<br />
« contenant de l'or », à côté de zlatity, est sûrement pris à r. zolotistyj,<br />
pol. zlocisty. Le suffixe est -ity : hlinity, kamenity, hrotity<br />
« à pointe, hrot», vejëity « en forme d'œuf, vejce », rozpacity<br />
« embarrassé, perplexe » de rozpaky (plur.) « embarras » ; et -ovit(j :<br />
pracovity « laborieux » de prâce « travail », vzdorovity « récalcitrant »<br />
de vzdor « résistance », vëjirovity « en éventail, vëjif ».<br />
En slovène, où -al et -asl sont productifs, -ist manque, et -it<br />
est assez rare, soit ancien ou dialectal, soit moderne comme<br />
croatisme : ëastît «vénérable», kam(e)nît (s.-cr. kamènit) et<br />
kâmena(s)t, kâmenjast ; avec élargissement fréquent en -iten :<br />
barvit et barviten « de couleur, bârva », slavît et slaviten « glorieux »,<br />
imenît et imeniten « renommé », vremenît et vremeniten « temporel »<br />
(s.-cr. vremènit) ; et -ovit, mais surtout comme croatisme : bakrovîi<br />
« de cuivre, bâker », zirovlt « abondant en glands, ztr », bregovît<br />
et bregoviten « montagneux, à collines» (s.-cr. bregovil), darovit<br />
et daroviten « doué » (s.-cr. darèvit), duhovît « spirituel » (s.-cr.<br />
duhàvit).<br />
En serbo-croate, -ist manque, -it est productif : brëmenita<br />
« (femme) enceinte », busènit « couvert de gazon, busën », istinit<br />
« vrai », temèljit « à bon fondement, tèmelj », ùgasit « de couleur<br />
éteinte» en regard de ugdsiti et du postverbal en -gas (§ 781) ;<br />
et -ovit : glasàvit « renommé », maglàvit « brumeux », pjeskàvit<br />
« sablonneux », zmajèvit « semblable à un dragon, zmâj », etc.<br />
En bulgare, -it apparaît traditionnel, et à sens abstrait : imenit,<br />
znamenit, naroëit « spécial » (moyen-bulg. narocitu « notable ») ;<br />
-ovit est plus concret : dâzdovit « pluvieux », varovit « calcaire » de<br />
var « chaux » ; -ist est un russisme : blalist « marécageux » est r.<br />
bolôtistyj, gorist « boisé » est r. goristyj, en face du macédonien<br />
gorovit qui est s.-cr. gorovil.<br />
SUFFIXE -avu<br />
§ 993. — C'est le suffixe i.-e. *-wo-, si. -vu (§ 1182), sur thème en<br />
*-â-, parallèlement à -ivu sur thème en *-ï-. Le lituanien a quelques<br />
mots en -ovas, mais substantifs : zinôvas « connaisseur » de zinôti<br />
« connaître », valdôvas « possesseur » en regard de valdôti (§ 577) sur
472 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
valdtjli (§ 430), vadôvas «conducteur» en regard de vèsti, itératif<br />
lette vadât. Il peut s'agir d'anciens adjectifs substantivés, et l'on<br />
trouve un adjectif, tiré de nom, qui doit conserver le type antérieur<br />
correspondant au type slave en -avu : iygôvas « prêt au voyage »<br />
sur zygis « voyage ».<br />
Les exemples vieux-slaves sont :<br />
cçtavu (J. Ex.) « orné de pièces d'argent », de cçta (§ 19) ;<br />
dëlavu, « agissant » Hébr., IV, 12, var. de dëistvïnu confirmée<br />
par le dérivé dëlavïstvo Hés. CXL, 4, sur dëlo ou le verbe dëlati ;<br />
et dëlivu (§ 995) ;<br />
kljukavù «trompeur» (Ham., et var. I Tim., III, 8), de kljuka<br />
« tromperie » (§ 1040), et kljuëivû (§ 995) ;<br />
kçdrjavu (Ham., Malalas) « frisé, bouclé », sur *kçdrï « boucle »<br />
(§1113);<br />
krastavu (Pand. Ant.) « galeux », sur krasta « croûte » ;<br />
kruvavù « sanglant » ;<br />
laskavû (Pand. Ant.) « qui flatte », sur laska « flatterie » (Gr.<br />
Naz.), et le verbe laskati ;<br />
Içkavu « perfide » sur Içka ( § 763) ;<br />
ostrogavu « épineux » (Hés. LVII, 10), sur ostrogu, ostroga « pointe,<br />
éperon » (§ 1011) ;<br />
plistavu (Gr. Naz.) « qui comporte du trouble, plistï » ;<br />
ranavu (Cyr. Jér.) « qui a des plaies », de rana ;<br />
ruzdavu en slavon et dans v. si. obrû&davëti (Izb. Svjat.) « se<br />
rouiller », de ruzda « rouille » ;<br />
sazdavu « plein de suie » dans osazdavëti « devenir noir de suie »<br />
Ps. VII, titre (Bon.), osazdaviti «noircir de suie» (Izb. Svjat.),<br />
de sazda « suie » (§ 1022) ;<br />
sëdinavu « grisonnant » de sëdiny (plur.) « cheveux gris » ;<br />
skvrûnavu « sale », de skvrûna ;<br />
suniëavu «curieux, intrigant» (I Tim., V, 13, Sirach, IX, 3),<br />
sur sû-nicati « être penché », su-niknçti « se pencher (pour regarder) »<br />
(§ 497) ; slov. snîcav «curieux, indiscret», et v. slov. des Feuilles<br />
de Freising vzinistve I, 16, uznicistve III, 34, lire v sniëïstvë «dans<br />
la curiosité indiscrète » ;<br />
tinavu « boueux », de tina ;<br />
zarjavù « incandescent » ( J. Ex. citant Isaïe, VI, 5) et slavon<br />
zeravu (§ 594), sur le thème zer- et le factitif zariti, postverbal<br />
zaru (§ 736).<br />
Et bujavu (Ham.) « fou », élargissement de bui sur le dérivé bujati<br />
(Gr. Naz.), o-bujati «être fougueux»;<br />
veliëavu « qui se grandit, fait le glorieux », sur velicati sg ;<br />
xçdozavu (Mikl.), altéré chez Sreznevskij en xûzavu (Gr. Naz.)<br />
et xuzdavu (Actes Ap., XIX, 38) «habile», sur xçdogu (§ 1011) et<br />
sans doute sur un dérivé *xçdozati « être habile ».
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 473<br />
Un adjectif *dçbravû, sur dçbru, est supposé par dçbrava « forêt »<br />
(§ 1187).<br />
Le slavon fournit un grand nombre d'autres adjectifs, dont<br />
plusieurs sont sûrement anciens, ainsi :<br />
grudavu « à mottes, raboteux », slov. grûdav, et v. si. grudivû<br />
(§ 995), de gruda « motte (de terre) » ;<br />
grùbavù « bossu », s.-cr. grbav, de *gûrbû « bosse » ;<br />
kokoravû « hérissé », s.-cr. kokorav « crépu », de kokora « touffe<br />
(de cheveux) » (§ 1125), var. kokorjavu comme kçdrjavû « bouclé » ;<br />
Igkorjavu « tortueux » à côté de v. si. Içku et Içkavu (§ 1126) ;<br />
xupavu « fier » (xi e siècle) sur v. r. xupe- sç (§ 431).<br />
Outre les adjectifs en -avû, on a un groupe de substantifs en<br />
-avica (§ 880), dont quelques-uns sont nettement des dérivés de<br />
ces adjectifs : kruvavica « artère », trçsavica « fièvre » de *trçsavû,<br />
tch. tresavy « tremblant », pol. trzçsawy, mais dont plusieurs<br />
apparaissent d'origine différente : le suffixe -avica s'est développé<br />
à part de -avu, et bradavica « verrue » n'est pas ou n'est plus en<br />
rapport avec l'adjectif tiré de brada « barbe », qui est bradatu.<br />
Les adjectifs en -avû sont dérivés, soit de substantifs, soit de<br />
verbes en -(j)ati. Les dénominatifs sortent en majorité de thèmes<br />
en *-â-, mais -avû a été étendu à d'autres thèmes, avec une forme<br />
-javû sur thème mouillé : kçdrjavû, etc. Le nom du « sang », v. si.<br />
krûvï, n'est pas seulement traité en composition comme thème<br />
dur, kruvo-, ce qui est un fait général (§ 1216), mais aussi dans son<br />
dérivé krûvavu : c'est un ancien kry, qui conserve un génitif pluriel<br />
kruvû, et les féminins en -y ont des désinences de pluriel dures,<br />
-ûvu, -ûvaxû (§ 200).<br />
§ 994. Dans les langues slaves. — En russe, -dvyj est toujours<br />
bien représenté, mais n'est plus actuellement productif : krovdvyj,<br />
gnusdvyj « nasillard » en regard de gnusil' « nasiller », pljugdvyj<br />
« chétif, vilain », et pol. plugawy « sordide », slovaque pl'uhavy<br />
« crotté » sur pl'uhat' sa « se traîner dans la boue », pl'uha « saleté » ;<br />
kudrjdvyj, dyrjdvyj et dyrdvyj « percé, troué » sur dyrd « trou » et<br />
v. r. dyrja (§ 728) ; sljunjdvyj « baveux » sur sljunâ « bave » et plur.<br />
sljûni, verbe sljûnit', de v. si. slina par contamination avec pljûnut'<br />
« cracher » ; velicdvyj, molozâvyj « qui fait jeune » sur le comparatif<br />
molôze « plus jeune », slascdvyj « doucereux » sur sldsce « plus<br />
doux » ; suxoscavyj et xudoscdvyj « maigre » sur sûxost', xudost' ;<br />
— et -Ijdvyj : kostljdvyj «osseux» et kostlivyj, mozgljâvyj «chétif,<br />
maladif» et mozglivyj sur mozgnût' «se gâter, dépérir» (§ 597),<br />
piskljdvyj et pisklivyj « glapissant » sur piskat' « glapir », vertljdvyj<br />
et vertlivyj « qui tourne, qui remue », truxljdvyj « pourri » sur
474 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
trûxnut', adj. trûxlyj (§ 1048) : cette forme élargie est donc<br />
secondaire de -livyj (§ 998) et de l'adjectif verbal en -lyj.<br />
En polonais : rdzawy « rouillé », mgiawy « brumeux », dziurawy<br />
« troué » de dziura « trou », kçdzierzawy « crépu, frisé » de kçdzior<br />
« boucle de cheveux », wszawy « pouilleux » de wesz « pou » ; et<br />
formant des diminutifs d'adjectifs : biaiawy « blanchâtre », siwawy<br />
« grisâtre », mdiawy « un peu faible, rndly », giupawy « un peu sot,<br />
ytupi », zimnawy « un peu froid, zimny ».<br />
En polabe, strâuppowe = *strupavy, pour tch. slrupaty et pol,<br />
strupiasiy « couvert de croûtes », de strup « croûte ».<br />
En sorabe, h. sor. dzëiawy « qui travaille, actif », suskawy<br />
« inconstant, écervelé » sur suskac « courir çà et là » ; sëlhawy « qui<br />
louche » sur sëlhac, et tch. silhavy sur silhati, du moyen-hautallemand<br />
schilhen, mod. schielen « loucher » ; et kr(w)awny « sanglant<br />
» avec élargissement en -ny.<br />
En tchèque, ëervavy (et usuellement ëervivij) « vermoulu » de<br />
ëerv « ver », kuceravy « bouclé, frisé » de kuëera « boucle » ; ëpavy<br />
« qui sent fort, aigre, piquant » sur ëpiti « sentir fort », et slipavy,<br />
stiplavy sur stipati, slipnouli (§ 591), zhavy « brûlant » sur zhnouti<br />
(§ 435); bëlavy «blanchâtre» et verbe bëlati (se) «blanchir»,<br />
modravy « bleuâtre » et modrati se « bleuir ».<br />
En slovène, gnidav « couvert de lentes » de gnida, gçbav « lépreux »<br />
de gçba, smfkav «morveux» de smrk, smrka (§ 814) ; mfhav et<br />
mrsav «maigre» (§ 1140); kricàv «criard» de krlëali «crier» et<br />
subst. krîk, krîë, kîsav « renfrogné » de kîsati se « s'aigrir, se renfrogner<br />
» et subst. kîs (§ 778), sanjàv « rêveur » de sânjati et subst.<br />
sânja ( § 1024) ; brbljàv « bavard » sur brbljâti « bavarder », domisljàv<br />
« suffisant, présomptueux » sur domisljati si « s'en faire accroire,<br />
avoir de soi une opinion exagérée » ; très rarement sur adjectif :<br />
bélav « blanchâtre » ; — et élargissement en -aven : klepelàv et<br />
klepetâven « bavard » sur klepetdli « claqueter, bavarder », subst.<br />
klepèl ; polizaven «friand, gourmand» sur polizali «lécher ».<br />
En serbo-croate, bàlav « baveux » de bàle (plur.) « bave », ëv'ôrav<br />
« noueux » de ëvôr « nœud », mrsav « maigre » de mrsa « maigreur »,<br />
kàsljav (et kàsljiv) « qui tousse » sur kâsljali et subst. kàsalj, bodljikav<br />
« épineux » sur bàdljika « épine, piquant », gràzniëav « fiévreux »<br />
sur grèzniea « fièvre » : l'accent est sur le thème, avec recul dans<br />
smôlav « résineux » de smàla ; — et ëltav « tout entier », élargissement<br />
de cïtï (§ 1159), diminutif suhonjav «un peu sec, fluet» sur -onja<br />
(§ HOl).<br />
En bulgare, krdstav « galeux » de krâsta, kéljav « teigneux » de<br />
kel, déterm. kéljat, mârsav, pârgav « leste » sur prâg « tendeur », v. si.<br />
prçgu (§ 763), lâskav « caressant » et verbe laskde- « caresser », etc.<br />
En macédonien, -av, qui est productif, passe dialectalement à -ev,<br />
de -javû, comme -ast à -est (§ 989), ainsi régulièrement dans le<br />
dialecte d'Albanie : bolmcef « maladif » pour bolniëav, dôzdzef<br />
// l^lmnûnv W ûf 7/»/-»*>»i nntiw In-nnnix
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 475<br />
SUFFIXE -ivu<br />
§ 995. — Le suffixe -T-wo- apparaît en latin : nocïuus de nocëre<br />
« nuire », statîuus « stationnaire » en regard de status, statiô, etc.<br />
En baltique, on le trouve en lituanien, mais il est rare, et suspect<br />
d'être pris au slave -ivu : dalyvas « participant » de dalis « part »,<br />
mais de akis « œil » akyvas n'est qu'une variante de l'usuel akijlas<br />
« qui a l'œil, attentif » ; et la forme -lyvas est sûrement une imitation<br />
du slave : protlyvas « intelligent » sur prôias « intelligence » comme<br />
r. ponjâtlivyj sur ponjâtie.<br />
En slave, le suffixe est d'emploi très étendu, et les exemples<br />
vieux-slaves en sont si nombreux qu'il n'est pas inutile d'en<br />
dresser la longue liste pour s'en rendre compte :<br />
bezoëivû (Pand. Ant.) « éhonté », et bezoku, bezoëïnu, voir bezoëïstvo,<br />
§ 938 ;<br />
bëgunivu (Pand. Ant.) « fugitif », de bëgunï (§ 1102) ;<br />
blçdivu (Ham., I Tim. Y, 13) « plein d'égarement », de blçdï<br />
(§ 713) ;<br />
bogoboivu (Pand. Ant., Hés. XCIII, 15) « qui craint Dieu »,<br />
et bogoboiëivu Ham. de -boicï, var. -bojaznivû de bojaznï ;<br />
ëïstivu «qui honore, pieux», ne-, be(s)- (Gr. Naz.), blago-, bogo-,<br />
dobro-, zulo- (Athan.), sur ëïstï et -cïstije ; et :<br />
ëltivu (Luc, II, 25 Zogr.), bogocïtivû (Pand. Ant.), sur le thème<br />
ëït- de bogoëïtïcï, -ëïtije (Gr. Naz., Pand. Ant.) ;<br />
blagodarivu (Izb. Svjat., Pand. Ant.) «généreux», sur darû, et :<br />
dativu « apte à donner » (J. Ex.), blagopodalivu (Pand. Ant.)<br />
« qui partage volontiers, eùfxsTaSoToç », sur datï « don » (§ 1168) ;<br />
dëlivu « actif » (J. Ex., Srezn., Supplément), et voir dëlavû,<br />
§ 993 ;<br />
nevûzdruzivù (Pand. Ant.) « qu'on ne peut pas retenir » ;<br />
duvodusivu (Pand. Ant.) «à âme double, irrésolu,<br />
duvoivû (Hés. XVI, 1) « qui a de la duplicité » ;<br />
gladivu « qui a toujours faim, vorace », plus ou moins différent<br />
de gladïnu « affamé » ;<br />
glagolivû (Gr. Naz.) « loquace », vuz- (Pand. Ant.) « médisant »,<br />
bogo- (Ham.) « qui parle divinement, OsYjyopoç » ;<br />
gnïsivu (Pand. Ant.) «souillé », de gnïsï (§ 718) ;<br />
gçgunivû « qui parle difficilement », en regard du verbe gçgunati<br />
(§555);<br />
grïmëzdivu (Izb. Svjat.) « chassieux », de grïmëzdï (§ 1020) ;<br />
grudivu (J. Ex.) « raboteux », voir grudavu, § 993 ;<br />
istivu (Ham. 1713) « exact » est faiblement attesté, mais peut
476 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
n'être pas une faute pour l'usuel istovu «véritable» (§ 964) et en<br />
différer pour le sens ;<br />
jçzëstivu (Izb. Svjat., Hom. Mih.) «malade» (§ 1180) ;<br />
krûvojadivu « sanguinaire », plùtojadivu « carnassier » ;<br />
klevetivu « qui aime calomnier » (Hés. GXIX, 2) ;<br />
kljuëivu (Ham.) « trompeur », et kljukavu (§ 993) ;<br />
kotorivu (Izb. Svjat., Gr. Naz.) «querelleur», de kotora ;<br />
kramolivu Ham. 17617, voir § 858 ;<br />
lënivu « paresseux », élargissement de lënû sur lënï « paresse »<br />
(§711);<br />
lisaivu (Pand. Ant.) « qui a des dartres », de Usai (§ 1033) ;<br />
lïstivu « trompeur », prë- (Ham. 45121), sur lïstï, prë- ;<br />
Ijubivu « qui aime », bogo-, brato- (Pand. Ant.), ëçdo-, ëlovëko-,<br />
pluto-, xrïsto-, xulo-, sur Ijubu (§ 759), et voir ëçdoljubu, § 1227 ;<br />
prëljubodëivu (Ham.) « qui aime l'adultère » ;<br />
lomivu (Ham.) « d'allure brisée » ;<br />
lopotivû «qui bégaie», sur le verbe lopotati (§ 562), postverbal<br />
lopotû ;<br />
lùzivu «menteur», élargissement de luzï (§ 956) sur luza<br />
« mensonge » ;<br />
milostivù « miséricordieux », bez-, ne-, prë-, munogo-, sur milostï ;<br />
dûvomyslivu (Jacques, I, 8) « irrésolu », voir duvodusivu ;<br />
naprasnivu «brusque» (J. Ex.), «irascible» (Pand. Ant.),<br />
élargissement de naprasnu «soudain» (§ 1071), subst. naprasnije<br />
(§ 926);<br />
nedçziv « malade », de nedçgu ;<br />
bogonosivu « qui porte Dieu », zlatonosivu « qui porte de l'or » ;<br />
obidivu « offensant, arrogant » (Hés. IX, 23), variante de<br />
obidïlivû (§ 996) ;<br />
oboitivu (Pand. Ant.) « plein de duplicité », var. oboitïniku en<br />
slavon, traduisant SlyXcùocroç Prov. XI, 13, et Gosmas 1113 Sikoyoç,<br />
répondant à dûvojeslovïnu de l'Apostolaire, I Tim. III, 8 : l'aspect<br />
est d'un élargissement en -ivu d'un adjectif *oboitu parallèle à<br />
*dûvoitû « double », tch. dvojity, pol. dwoisty ;<br />
opasivu «attentif, curieux», sur opasu «sollicitude» (§ 783);<br />
çrodivu « fou », élargissement de çrodu, subst. çrozda « folie »<br />
(§ 1023);<br />
pakostivu (Gr. Naz.) « qui fait du mal », de pakostï ;<br />
pamçtivû « qui se souvient », de pamçtï ;<br />
vysokoparivu « qui veut voler haut, U^LTCÉTTQÇ » (Pand. Ant.) ;<br />
doluperivu (J. Ex.) « qui tend vers le bas », sur pire-, *perli<br />
« pousser » ;<br />
pëgotivu « lépreux », de pëgota ;<br />
pësnivu « (oiseau) chanteur » (J. Ex.), sur pësnï ;<br />
pïrivu (Gr. Naz.) « querelleur », Ijubo-, munogo-, neprë-, sur pirja<br />
« dispute » ;
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 477<br />
plazivu « glissant » (J. Ex.), sur plaziti et le postverbal *plazu<br />
(§ 769);<br />
plësivu (Upir') « chauve », sur plësï « calvitie » (§ 1138) ;<br />
pokorivu (Pand. Ant.) «soumis, docile», ne- (Hés. XXVIII, 1,<br />
LVII, 6), de (ne)pokoru (§ 742) ;<br />
poluëivu (Supr.) au sens probable de « chanceux, heureux »<br />
d'après un autre exemple de l'adjectif en slavon, en regard de<br />
poluëiti « obtenir », polucai « sort » (§ 1030) ;<br />
vû(s)porivu « qui aime la dispute » (I Cor. XI, 16, var. vûspïrivû),<br />
sur -poru (§ 728) ;<br />
pravïdivu « juste », sur pravïda ;<br />
prëkostivu (Ham.) « qui aime à s'opposer », de prëkoslï ;<br />
prëmïdivu (Supr.) «juste» supposerait *prëmïda (§ 1007), mais<br />
doit n'être qu'une altération de pravïdivu ;<br />
prëzorivu (Pand. Ant., Hés. LXXXI, 7, etc.) « méprisant »,<br />
de prëzoru (§ 728) ;<br />
prijaznivu « bienveillant », ne- (Ham.) « méchant », de prijaznï<br />
;<br />
prijçtivu (Pand. Ant.) « qui peut accueillir », sur prijçtïje ;<br />
prilezivu (Pand. Ant.) «qui s'applique, soigneux», en regard de<br />
prilezati « s'appliquer » ;<br />
privlaëivu (Virg.) «attirant», sur -vlaku (§ 769) ;<br />
prokazivu « qui veut nuire », de kazu « altération, dommage »,<br />
prokaza (§ 781) ;<br />
prokudivu (Gr. Naz.) « qui cherche à perdre », de prokuda (§ 758) ;<br />
pronyrivu «méchant», élargissement de pronyru (§ 614) ;<br />
blagorasçdivu (Pand. Ant.) «qui discerne bien, sùStàxpiToç » ;<br />
razumivu (J. Ex.) «doué d'intelligence», ne-, dobro-, sur razumu,<br />
et razumiëivu (J. Ex.) supposant *razumicï (§ 858) ;<br />
rëëivu « loquace », vele-, prëko- (Cosmas 13214, etc.) « contredisant<br />
», zlato- « qui parle d'or » (Cosmas 12028) ;<br />
rësnotivû « véritable » (Éphrem, Hés. CVII, 2 Soi), sur rësnota ;<br />
rïvïnivu « qui rivalise », sur rïvïnu, rïvïnije, etc.<br />
nerodivu « négligent » (Athan.), sur ne roditi « ne pas se soucier » ;<br />
blagorodivu (Pand. Ant.) « de bonne naissance » ;<br />
rûpûtivu (Izb. Svjat., etc.) « qui murmure », bezdrûpûtivu «sans<br />
murmure », de ruputati, subst. ruputû ;<br />
skrënivu (Pand. Ant.) « frivole », de skrënja « bouffonnerie »<br />
(§ 1026);<br />
skvrunivu (Pand. Ant.) « souillé », variante (ou altération) de<br />
skvrunavu (§ 993) ;<br />
duvoslovivu (Pand. Ant.-) « à deux paroles, SiXoyoç » ;<br />
oslusivu (J. Ex., Hés. XLVIII, 5, etc.) « désobéissant », poslusivu<br />
(J. Ex.) « obéissant », blago- (Pand. Ant.), et voir -slusïlivû ;<br />
vusorivû (Gr. Naz., Éphrem) « rude, dur de caractère », sur un<br />
thème sor- (§ 728), cf. s.-cr. osôran « bourru » ;
478 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
sramçzivu (Pand. Ant.) « qui a honte, timide », et :<br />
nesumçzivu (Cyr. Jér.) « qui ne doute pas, sans retenue », voir<br />
§ 1015 ;<br />
zestosrûdivu « au cœur dur », élargissement de zestosrûdu (§ 1227)<br />
sur subst. zestosrudije ;<br />
vustanivu « réveillé », de vustanije « le lever, réveil » ;<br />
strasivu « peureux », de straxu ;<br />
strupivu. « lépreux », de strupu « meurtrissure » (§ 761) ;<br />
strûpùtivu « qui ne marche pas droit, fourbe », de struputati<br />
(§ 562), subst. strûpùtu ;<br />
krûvoîoëiva « qui a un flux de sang », prëtocivu (Ham.) « coulant<br />
abondamment », et vûstoëivu « enragé », cf. vusteklu en slavon, et<br />
slov. vztéci « devenir furieux », vztçkel « furieux, enragé », stàk<br />
« rage » (§ 726);<br />
prëtrëbivu « indiscret », en regard de prëtrëbovali (Gr. Naz.)<br />
« prendre trop de soin » sur trëbovati « avoir besoin » ;<br />
blagotvorivu «bienfaisant», zivo- «vivifiant», tïl(j)e- (Virg.)<br />
« corrompant » ;<br />
tustivû « zélé », en regard de tustati sç « se hâter » ; et :<br />
tustivù « vain, pusillanime » (Gr. Naz., Pand. Ant.), élargissement<br />
de tûstl (§ 958), verbe is-tustiti ;<br />
vysokoumivu (Cosmas 10225) « orgueilleux », variante de vysokoumu<br />
; et voir razumivu ;<br />
sùvadivu (Tite, II, 3) « médisant », de suvada (§ 781) ;<br />
vaznivu (Gr. Naz.) « qui a de la chance », sur vaznï (§ 1109) ;<br />
vëdivu (Pand. Ant.) « qui est savant » ;<br />
blagovolivu (Gr. Naz.) « longanime, bienveillant » ;<br />
vrazïdivu (Pand. Ant.) « porté à l'inimitié », de vrazïda ;<br />
vrûtûpivu « qui a des cavernes », de vrutûpû ;<br />
xulivu « blasphémateur » (Hés. LXXII, 25 et var. LXV, 12),<br />
de xula ;<br />
zabytivu « oublieux » (Jacques, I, 25), voir -tïlivu ;<br />
nezajapëivu (Gr. Naz.) «inattendu», en regard de za(j)apëti<br />
(Pand. Ant.) «soupçonner» (§ 583) ;<br />
zaskopivu (Vie de Constantin, IX) « astucieux », de zaskopije<br />
(§931);<br />
zavidivu (Gr. Naz.) « envieux », et :<br />
zavistivu (Gr. Naz., Pand. Ant.), voir zavidïlivu, zavistïlivu ;<br />
zulobivù «méchant», be(z)-, ne- sur zuloba, zûlobi.<br />
Mais podraziv- dans Supr. 90n kamenije podrazivo prëtvori sq<br />
traduisant --poç TTJV TWV XlOwv ÀVTIIRUMAV [i.ETS7I:oi7)07] «(la nature de<br />
l'eau) se changea en (copie de la) résistance des pierres » (aux deux<br />
sens possibles de àvTiTuuta) n'est pas un adjectif « imitatif » :<br />
c'est, en le corrigeant en podrazivu, le participe passif de podraziti :<br />
« ayant imité les pierres ».
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 479<br />
Sont à part : krûvopivu « buveur de sang », parallèle à krûvojadivu,<br />
mais sur le thème piv- de pivo « boisson », pivïca<br />
« buveur », etc., et qui de ce fait a l'aspect d'un postverbal (§ 729) ;<br />
— et protiv- dans les adverbes protivç, sçprotivï (§ 1182).<br />
Des adjectifs en -ivu sont élargis en -ivïnu : milostivu et milostivïnu,<br />
etc. (§ 978). Le suffixe -ivu présente lui-même l'aspect<br />
d'un élargissement d'adjectif dans des cas assez nombreux :<br />
lënû et lënivu, etc. Il se construit sur divers types de substantifs,<br />
largement au-delà des thèmes originels en -ï, et sur des formes<br />
nominales de thèmes verbaux, et l'on a en particulier un type en<br />
-livu sur participe parfait :<br />
druzalivù (Izb. Svjat.) «qui tient en son pouvoir» sur drûzaii ;<br />
mluëalivû « qui garde le silence », sur mluëati ;<br />
poslusalivu (Gr. Naz.) « qui peut faire entendre », différent de<br />
poslus(ïl)ivu « obéissant » ;<br />
trupëlivû « qui supporte, longanime », dlugo-, vele- (Ham.) ;<br />
pouëalivu « qui peut enseigner ».<br />
§ 996. Suffixe -ïlivu. — Mais c'est vraiment un autre suffixe qu'on<br />
a dans -ïlivu, -ulivu, élargissement de -ivu qui est fréquent en<br />
vieux slave, et davantage encore en slavon, donc en pleine voie<br />
d'extension. Voici les exemples vieux-slaves, ceux des textes en<br />
rédaction slavonne étant d'une ancienneté moins assurée et<br />
pouvant résulter de la substitution de -(ï)livu à -ivu dans les<br />
manuscrits :<br />
besëdïlivu (Gr. Naz.) « (beau) parleur », prë- (Gr. Naz.), sur<br />
besëda ;<br />
bivïlivû (Pand. Ant.) « batailleur », sur biti, et boilivu (Pand.<br />
Ant.), sur boi ;<br />
blçdïlivû, variante de blçdivu, I Tim. V, 13 ;<br />
bodïlivu (Izb. Svjat., Virg.) « cornupète », sur bode- ;<br />
poëuvïlivu (Gr. Naz.) « qui peut (res)sentir », sur le thème ëuvde<br />
ëuvïstvo, etc. ;<br />
otûdalïlivu (Pand. Ant., I Pierre, III, 8) « capable de rendre, de<br />
compatir », et voir dativu ;<br />
vûzdruzïlivû « qui peut se retenir » (Pand. Ant.), et voir -druzivû ;<br />
naduglçdïlivû (Gr. Naz.) « qui surveille » ;<br />
gnëvïlivu « coléreux », sur gnëvu ;<br />
negovorïlivu (Ham.) « non tapageur », sur govoru « bruit, tapage » ;<br />
groxotïlivu (Gr. Naz.) «i (d'un rire) aux éclats », de groxotati,<br />
subst. groxotû ; '<br />
iskusilivu (Hés. LXXVII, 56) « qui met à l'épreuve », de iskusu ;<br />
jarïlivu (Pand. Ant.) « irascible », élargissement de jaru, verbe<br />
jariti « irriter » ( § 790) ;
480 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
kotorïlivu (Gr. Naz.) « querelleur », sur kotora ;<br />
namig(u)livû (Izb. Svjat.) «qui lance des œillades», s.-cr.<br />
namigljiv, sur na-midzati, postverbal *migu (§ 795) ;<br />
nedçzïlivù (Pand. Ant.), et voir nedçzivû, sur nedçgu ;<br />
nemostïlivû (Hés. LXXXVIII, 8, var. Tolst.) « faible », sur<br />
nemostï ;<br />
vûznosïlivu (Pand. Ant.) « exalté, altier », et voir -nosivu. et<br />
ponosïlivu ;<br />
obadïlivu (Pand. Ant.) « calomniateur », sur obada ;<br />
obidïlivû « qui offense », sur obida, et voir obidivu ;<br />
opytïlivu (Pand. Ant.) « curieux, indiscret», sur -pglu (§ 799) ;<br />
pakostïlivu (Cosmas lllx) « qui fait du mal », et voir pakostivû ;<br />
pïx(û)livu (Virg.) «qui rue», sur pïxati, postverbal *pïxu<br />
(§795);<br />
placïlivu (Hés. CI, 7) « pleureur, plaintif », de placï ;<br />
poplazïlivu (Izb. Svjat.) « glissant », et voir plazivu ;<br />
pobëdïlivu « qui rend victorieux », sur pobëda ;<br />
ponosïlivu (Pand. Ant.) « qui fait affront, qui outrage », sur<br />
ponosu, et voir -nosivu ;<br />
potakfuJlivu « complaisant » (Const. Pr., Pand. Ant.), sur *potaky<br />
(§ 263);<br />
potyk(û)livu (Hés. LXXXVIII, 48) «qui achoppe, trébuche<br />
facilement », sur po-iykati ( § 800) ;<br />
poxotïlivû (Cyr. Jér.) « plein de désir, poxotï » ;<br />
prëmetïlivu (Gr. Naz.) «(regard) qu'on promène », sur prëmetati ;<br />
proxranïlivu (Pand. Ant.) « qui préserve, prophylactique » ;<br />
prozorïlivu « prévoyant, perspicace » et prozïrïlivu (Pand. Ant.),<br />
sur prozïrëti, prozoru ;<br />
rasëdïlivu (J. Ex.) « qui peut se séparer, se fendre », sur rasëdali<br />
sç ;<br />
nerazumïlivu «inintelligent», Gr. Naz., et Marc., VII, 18 Zogr.,<br />
variante de nerazumivu ;<br />
sëk(u)livu (Cyr. Jér.) « qu'on peut trancher » ;<br />
skrûbïlivu (Pand. Ant.) «plein d'affliction», de skrubï ;<br />
slëpïlivu (Cyr. Jér.) « qui peut aveugler » ;<br />
poslusïlivu « obéissant », ne-, oslusïlivu « désobéissant », beslusïlivù<br />
(Hés. LVII, 6) « qui n'entend pas », et voir -slusivu ;<br />
osmëx(û)livu (Izb. Svjat., Gr. Naz.) «porté à rire», vusmëx(u)livû<br />
(Izb. Svjat.) ;<br />
sramïlivû (Ham.) « qui a honte » et ne- « éhonté » ;<br />
stydïlivû (Pand. Ant.) «pudique»;<br />
sûmolrïlivu (Ham.) « qui observe », rasùmolrïlivù « qui discerne »,<br />
et voir ci-dessous sûmolrïlivinu ;<br />
svarïlivu (Ham., Cosmas 11^) «querelleur», sur svariti, subst.<br />
svaru (§ 790) ;
[§ 998] SUFFIXES D'ADJECTIFS 481<br />
uëïlivu (Gr. Naz.) « instructif » ;<br />
ukorïlivu (Gr. Naz.) «qui insulte», sur ukoru (§ 742), et voir<br />
po-korivu ;<br />
varïlivû (Pand. Ant.) « précipité, emporté », sur variti « devancer »<br />
(§615);<br />
dusevrëdïlivu (Pand. Ant.) « nuisible à l'âme » ;<br />
vûmëstïlivu (Cyr. Jér.) « qui peut contenir », sur vumëstiti ;<br />
zabytïlivu «oublieux» Gr. Naz., Ham., Jacques, I, 25 (var.<br />
-tivu), ne- (J. Ex.), sur zabytï « oubli » ;<br />
zavidïlivu « envieux », ne-, de zavida, et :<br />
zavistïlivu, de zavistï, et voir zavidivu, zavistivu.<br />
On trouve un élargissement en -ïlivïnû, comme de -ivu en -ivïnu,<br />
dans sûmotrïlivïniï Supr. 44921 « de l'économie (du salut) », avec un<br />
sens différent de sûmolrïlivû « qui observe ».<br />
§ 997. Origine de -ïlivu. — En regard de nerazumïlivu, on a un<br />
substantif v. si. bezumïljï « l'insensé », et en rédaction slavonne<br />
obidïljï « l'offenseur » en regard de obidïlivu. Il apparaît donc que<br />
le point de départ de l'adjectif,- avec un large développement<br />
indépendant dans la suite, est dans un type de substantifs en<br />
-ïljï, peu représenté, mais bien attesté (§ 1059). De -Ijï, l'élargissement<br />
par -ivu donnait phonétiquement -livu (§ 63), et c'est -livu<br />
qu'on trouve régulièrement dans les manuscrits vieux-slaves qui<br />
distinguent li et Iji, le Suprasliensis et le Zographensis ; mais<br />
-Ijiv a été ensuite restauré sur le substantif dans les deux langues<br />
qui conservent //, le serbo-croate et le slovène (§ 25).<br />
Les gutturales des thèmes sont maintenues sans alternance de<br />
palatalisation devant le suffixe : potakfu)livu, potyk(u)livu,<br />
sëk(u)livu, namigf u)livu, pïx(ûJlivu, -smëxûlivu, et de même dans<br />
les exemples plus nombreux qu'apportent les textes slavons. Si<br />
l'on a eu rédaction slavonne nedçzïlivû de nedçgu, c'est parce que<br />
la forme a remplacé nedçzivù en rédaction vieux-slave ; inversement,<br />
on trouve en slavon plakulivu snr plakati, pour placïlivû<br />
sur plaëï.<br />
Que le suffixe soit écrit -ïlivu ou -ulivu. est sans intérêt, et le jer<br />
est toujours en position faible. C'est plutôt l'indice que le jer est<br />
secondaire ou n'est que graphique, comme dans le cas de likûstvovati<br />
sur un emprunt au germanique (§ 111) : ce qui vient à l'appui<br />
de l'hypothèse que dans le type bezumïljï des substantifs de base<br />
le suffixe -Ijï est d'origine étrangère (§ 1063).<br />
Y<br />
§ 998. Dans les langues slaves. —• En russe : igrivyj « enjoué »<br />
de igrâ, vsivyj « pouilleux » de vos, plaksivyj de plâksa « le pleurard »<br />
(§ 1142), krasnoreëivyj «éloquent» en regard de krasnoréëie « élo-<br />
16
482 LES SUFFIXES PRODUCTIFS [§ 954]<br />
quence ». Mais les suffixes productifs sont les élargissements<br />
-civyj : pereîmcivyj «qui sait imiter, intelligent» sur perenimât'<br />
« attraper, imiter », subst. pereimka, sgovôrcivyj « accommodant »<br />
sur sgovortt'sja « s'entendre », subst. sgovôrka, zanôsëivyj « hautain »<br />
sur zanoslt'sja « s'élever trop, être hautain », subst. zanôska ;<br />
— et -livyj : bodhvyj « cornupète », berezlîvyj « économe » sur beréc'<br />
« épargner », subst. bérez « épargne », vorclivyj « grondeur » sur<br />
vorëât' « gronder », izvorôtlivyj « qui sait se retourner, adroit » sur<br />
izvorôt « détour, expédient », uslûzlivyj « serviable » sur usluzit',<br />
subst. uslûga. L'accent est fixe, sur le suffixe ou sur le thème de<br />
base.<br />
En polonais : chciwy « avide » sur chciec « vouloir », bolesciwy<br />
« douloureux » sur bolesc, urodziwy « de belle taille » sur uroda<br />
« taille » ; et robaczywy « vermoulu » sur robak « ver », iapczywy<br />
« rapace », sur iapac « attraper », lapka « petite patte », et de là<br />
uporczywy « opiniâtre » sur upôr « obstination ». Mais la forme -iwy<br />
est en décadence : gwaiciwy « violent », de gwait « violence », a été<br />
remplacé par gwaitowny, et zazdroéciwy « envieux », de zazdrosc<br />
« envie », par zazdrosny. Le suffixe productif est -liwy : straszliwy<br />
« horrible » substitué à straszywy, gniewliwy « coléreux », Ichôrzliwy<br />
« poltron » de tchôrz « putois » et « pleutre », popqdliwy « emporté »<br />
sur popçd « impulsion », dotkliwy « sensible » sur dotknqc « toucher »,<br />
powsciqgliwy « réservé, continent » sur powsciqgac « retenir ».<br />
Le polabe atteste -t'y-, sans exemple de -liv-, mais les formes<br />
relevées sont rares.<br />
Le sorabe a h. sor. miiosciwy, hnëwiwy et hnëwniwy par croisement<br />
avec hnëœny ; et darliwy « généreux », jednotliwy « isolé,<br />
particulier » sur jednota « unité », prijimliwy « admissible » sur<br />
prijimac, subst. prijima, etc.<br />
En tchèque : blâtivy « boueux », ohnivy « de feu, ardent », chtivy<br />
« avide », dobrotivy « plein de bonté, dobrota » ; — zahdlcivy « oisif »<br />
de zahdlka « oisiveté », povërcivy « superstitieux » en regard de<br />
povëra « superstition » et v. tch. povërek, et de là palcivy « ardent »<br />
sur pâliti, uhranëivy « qui a le mauvais œil » sur uhranouti « jeter<br />
un sort » ; — ciilivy « sensible » sur ciiiti « sentir », horlivy « fervent »<br />
sur horeli, jîzlivy « mordant, malicieux » sur v. tch. jëzë « furie »<br />
(§ 1010), bdzlivy « peureux » sur le thème bâz- de bâzen « crainte »,<br />
v. si. bojaznï, nakazlivij « contagieux » sur nakazenî « contagion »<br />
de nakaziti ; et aussi mlëenlivij « silencieux » sur mlëeni « silence »,<br />
secondaire de mlcelivy sur mlëeli « se taire » ; slflzlivy « sobre », de<br />
v. tch. siriezvy (§ 1182).<br />
En slovène : zlobiv « mauvais, furieux », plésniv « moisi » sur<br />
plêsen «moisissure» (§ 1085), lazniv «mensonger» sur lâz et adj.<br />
lâzen ; mais le suffixe productif est -Ijiv : hotiv et hotljlv « qui désire,<br />
lascif», sumn(j)iv et sumljiv «suspect», sur sûmnja, marljiv
[§ 957] SUFFIXES D'ADJECTIFS 483<br />
« assidu » sur mârati « s'intéresser à » et subst. mâr (§ 790), plasljlv<br />
« craintif », dopustljiv « admissible », neizbegljiv « inévitable », etc.<br />
En serbo-croate : mllostiv « clément », pljësniv « moisi », krtnèljiv<br />
« chassieux » de krrnëlj « chassie » ; làziv et làzljiv, plâsiv et<br />
plàsljiv, dimljiv « fumeux », govàrljiv « loquace », dosjèîljiv « qui<br />
s'avise, ingénieux », doëèkljiv « hospitalier » de docek « accueil »,<br />
nepokolèbiv et -bljiv « inébranlable », etc.<br />
En bulgare : gorc.lv « amer » à côté de gôrâk, pesâcliv « sableux »,<br />
plasliv « craintif » et strahliv, dial. strasliv « peureux » ; avec même<br />
développement en macédonien : mirizliv « parfumé » comme bulg.<br />
mirizliv, et même, en macédonien d'Albanie, l'ânlif pour bulg.<br />
leniv « paresseux ».<br />
Mais des observations de A. Sojat dans la revue de Zagreb,<br />
Filologija (2, 1959, p. 93-110) sont à retenir pour toute l'histoire<br />
du suffixe -ivu et de sâ forme élargie -ïlivu dans les langues slaves :<br />
en serbo-croate, -iv, très productif, et surtout -Ijiv, dans la langue<br />
littéraire, est peu représenté dans la langue populaire. En vieux<br />
slave, le suffixe apparaît abondant principalement dans des<br />
textes à vocabulaire abstrait, les Pandectes d'Antiochus, Grégoire<br />
de Nazianze, et il s'agit donc, sur une base plus restreinte dans<br />
la langue réelle, de développements savants.<br />
L'adjectif pol. falszywy « faux », passé en russe, fal'sivyj, dès<br />
le russe occidental du xiv e siècle, n'a pas de rapport direct avec<br />
lat. falsus : il est fait sur l'emprunt v. tch. fales, pol. faisz, au<br />
substantif masculin valsch du moyen haut allemand, mod. Falsch.<br />
Il n'en a pas moins, en raison de son thème qui est latin, une<br />
curieuse apparence d'adjectif d'emprunt à suffixe lat. -Tvus, et le<br />
fait de la ressemblance des deux suffixes, lat. -ïvus et si. -ivu, n'a<br />
pas dû échapper aux Slaves qui créaient leur vocabulaire abstrait ;<br />
au moins chez ceux d'entre eux qui étaient de culture latine, mais<br />
les suffixes s'étendent, et la forme -livu jusqu'au lituanien -lyvas.<br />
On peut dès lors penser que si le suffixe -ivu est bien d'origine<br />
purement slave, son succès exceptionnel en slave, très supérieur<br />
à celui de -avu, est dû à une imitation plus ou moins consciente<br />
du latin, où -ïvus, développé dans la langue écrite, et aussi dans<br />
la langue vulgaire, a donné la masse des formations en -if du<br />
français, populaires et plus encore savantes, plaintif, agressif,<br />
compétitif, etc.
TROISIÈME PARTIE<br />
LES AUTRES SUFFIXES<br />
LA COMPOSITION
CHAPITRE XXYII<br />
SUFFIXES EN -b-, -d-, -g-<br />
§ 999. Suffixes eiï -b-. — Sont productifs les suffixes -ïba<br />
(§ 910) et -oba (§ 913'), avec variante -obï de -oba dans v. si. zùlobï<br />
à côté de zuloba, par réfection en postverbal en -ï sur le verbe<br />
zulobiti.<br />
Ces suffixes élargis supposent l'existence d'un suffixe -ba,<br />
répondant à *-bhâ de gr. xopu
488 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
et dans si. golçbï « pigeon » qui a l'aspect d'un mot d'emprunt<br />
adapté (§ 169) ; peut-être aussi dans s.-cr. gâlëb «mouette», mais<br />
*jastrçbu « autour » est de flexion dure.<br />
SUFFIXES EN -d-<br />
§ 1000. — Un *-d(h)~ sufïixal d'époque indo-européenne est<br />
plus difficile à reconnaître qu'un *-b(h)~. Le suffixe athématique<br />
de gr. Aapràç « brillant » et « flambeau », gén. XauTcàSoç sur Aàptsiv<br />
« briller », est propre au grec, le participe en -ndus propre au latin,<br />
où la finale de nudus « nu » est isolée en regard de si. nagû, skr.<br />
nagnâh, etc. (§ 821). Mais, à la différence de *-b(h)- qui n'apparaît<br />
guère comme élargissement de thème verbal, et il n'y a pas en<br />
slave de type verbal en -bati (§ 556), il existe un type important<br />
de présents suffixaux en *-d(h)e- (§ 441), qui peuvent avoir été<br />
bâtis sur un ancien suffixe nominal, et qui en tout cas ont ensuite<br />
développé leurs postverbaux. Le grec, en regard de présents en<br />
-Gw, offre un petit suffixe -Goç : [ASYSÔOÇ « grandeur » de y.èfa.ç,<br />
« grand », 7tXîj0oç « foule » de ni^nlrniL « je remplis » et TÎXTJGW «je suis<br />
plein ».<br />
Le baltique a des mots en lit. -das, fém. -da (-dê), qui sont des<br />
postverbaux de verbes suffixaux en *-de-, inf. -dèii (§ 598) et de<br />
factitifs en -dgti, -dinti ( § 620) : lit. baïdas « fantôme, croquemitaine<br />
» et lette baïda « crainte » sur lit. baidyti « effrayer », lette<br />
baïdît (§ 594), lette atbilda «réponse» de atbildêt «répondre», sur<br />
bil- de lit. billi « parler ».<br />
La série pronominale en -âd- du lette kâds « de quelle sorte »<br />
est d'origine spéciale (§ 259), et lit. vienôdas «uniforme» comme<br />
lette viênâds répond à v. pr. ainawïd- et est d'ailleurs à côté de<br />
lit. vienôkas (§ 317) et vienôpas (§ 315).<br />
Une finale -anda n'est pas claire, mais on doit reconnaître un<br />
suffixe masculin -andis dans quelques mots comme lit. balândis<br />
« pigeon sauvage », skilândis à côté de skilvis « estomac de porc<br />
farci », suffixe que le slave présente dans *albandï « cygne » et qui<br />
est sûrement pris au germanique (§ 69).<br />
§ 1001. Finale -dû. — En slave, sçdu «vase» et «jugement»<br />
est un postverbal (§ 766), -kladu (§ 785) l'est de klade-, présent<br />
sufïixal en -de- (§ 430), v. si. vrëdu (§ 806) doit l'être de *ver-de-<br />
(§ 444), et plodu. (§ 731) de *pïl-de-\ l'adverbe s.-cr. stâdom «en<br />
arrêt» est fait sur l'aoriste stâdoh (§ 791). Le mot grozdu, à côté<br />
de groznu, est sans explication (§ 744), et de même xlçdû (§ 768),<br />
et *svidu «cornouiller» en regard de s.-cr. svïba (§ 999); pour<br />
udu « membre », voir § 191.
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 489<br />
On trouve toute une série d'adjectifs en -dû, mais d'origines<br />
variées : blëdu (§ 820), radu (§ 774), rudû (§ 756), skçdu (§ 762),<br />
xudû (§ 10) sont sur des thèmes terminés par -d- ; *gurdu «fier»<br />
(§ 821) est inexpliqué, et également *gnëdu, tch. hnëdjj « de couleur<br />
brune », r. gnedôj « bai », smëdu « brun, basané », *rçdû, s.-cr. rûd<br />
« crépu, frisé », slov. rôd ; — v. si. mladû « tendre » est sur une racine<br />
qui se laisse analyser en *mel-d- (§ 772), v. si. sëdû «grisonnant»<br />
peut être de même sur un élargissement en -d- de la racine *skei-<br />
(§ 18) ; v. si. tvrûdu « ferme » est en regard de lit. tvlrtas, qui est un<br />
adjectif verbal de la racine de lit. tvérti «saisir, tenir», si. tvoriii<br />
« former, faire » (§ 614), mais il doit en être indépendant, le slave<br />
conservant bien ses anciens adjectifs verbaux en -tû (§ 408).<br />
On a d'autre part -dû comme élargissement de prépositions et<br />
préverbes : nadû « dessus » et v. si. prëdû « devant » de na, prë-,<br />
et le slavon zadu « derrière », qui est substantif, de za, avec adverbes<br />
sû-nadï (§ 1200), prëdï, zadi ; et adv. pozdë «tard» sur lit. pàs<br />
« auprès, derrière », lat. post « après » (et si. paz-, § 1223), avec<br />
l'adjectif r. pôzdyj, mais secondaire de pôzdnij et adv. pôzdno,<br />
v. si. pozdïnû. Le point de départ de ces élargissements paraît<br />
être podû « sous », préposition, et adv. is-podi (Pand. Ant.), qui se<br />
trouve être en regard de po, mais qui est originellement substantif<br />
(§ 744).<br />
On a un petit groupe d'adjectifs en -dûkû sur -dû-, thème en<br />
*-u- : bridukû, rëdûkû, *saldûku, zidûku (§ 984). V. si. brëzda<br />
« (femme) enceinte » est le dérivé en -(j)ï (§ 956) d'un élargissement<br />
en -d- de la racine *bher-, et a son parallèle dans lat. farda.<br />
Pour skarëdû « répugnant », voir § 176. Le vieux-slave (ou vieuxrusse)<br />
gorazdû (Ham.) «habile, fort», r. gordzdo «beaucoup », etc.,<br />
se dénonce par son aspect comme emprunt au germanique : on<br />
restitue d'après lui un gotique *ga-razds sur got. razda «parole,<br />
langue », et un sens premier « habile à parler », le vocalisme long<br />
du slave étant celui d'un itératif ou factitif gorazditi, r. gordzdit'<br />
« imaginer, arranger ».<br />
§ 1002. Finale -do. — Dans obïdo « trésor », on a un postverbal<br />
exceptionnel comme neutre (§ 819), dans gnëzdo «nid» un postverbal<br />
du thème *sed-, *zd- très ancien et très déformé (§ 39), et<br />
dans s.-cr. nàdo « acier », pour nâda, un neutre secondaire par<br />
alignement sur zelëzo « fer », sïrebro « argent », zlato « or », olovo<br />
« plomb » (§ 1191). Si ëudo peut s'expliquer par un présent suffixal<br />
en -de- de la racine ëu-, ce n'est pas comme postverbal de ce<br />
présent, et udo est pour uâu (§ 191). Un neutre ëçdo « enfant » est<br />
sûrement un emprunt au germanique (§ 19) ; et de même stado<br />
« troupeau », r. slâdo, s.-cr. slàdo, est pris au germanique *stôda-,<br />
v. norr. stôd « troupeau (de chevaux) », neutre, le lituanien stôdas
490 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
étant, lui, pris au slave, et différent du postverbai stodas «jeune<br />
plant », lette stàds de stâdît « planter ».<br />
La formation en -çdo de govçdo « tête de bétail, bœuf » (Upir',<br />
et adj. govçzdï, § 955), r. govjâdo, s.-cr. gôvedo, est isolée. Le thème<br />
est celui de skr. gav-, gr. $o{F)~, lette gùovs «vache » (§ 159), avec<br />
un élargissement en *-ên- (§ 183) : on peut supposer, sur *-ën-,<br />
un suffixe -dï donnant un collectif s.-cr. gôvëd, et sur ce<br />
collectif -çdï un singulatif neutre en -edo comme cçdo en regard de<br />
cqdï « gens ».<br />
§ 1003. Finale -da. — Un mot gruda « motte », à côté de grumen-,<br />
est sur un thème inanalysable grud-, lit. grûd- (§ 185), comme pol.<br />
iyda «mollet» sur le thème lyd~ du slavon lystû (§ 1161) ; s.-cr.<br />
rùda « laine crépue » est une forme substantivée de l'adjectif<br />
*rçdu (§ 1001), et stïgda Supr. 37912 n'est qu'une faute pour stïgna<br />
«place» (§ 1075). On a des postverbaux dans çda et (pri-)nada<br />
(§ 819), et sûrement sur présent suffixal en -de- dans klada sur<br />
*kel-de- (§ 775), sans doute aussi dans krada «bûcher» de kra-de-<br />
(§ 430), peut-être dans strada (§ 785) de stradati (§ 551). Le russe<br />
sndda « assemblage » est le postverbal de snddit', mais il peut en<br />
avoir été la base et dériver d'un présent *sna-de- du thème *snâ-<br />
(§444).<br />
Sur ce type de postverbal a pu se développer un véritable<br />
suffixe en -da. Il paraît net dans jazda(% 785), d'où jazditi, en regard<br />
de jaxati, et dans bruzda «muserolle» (§ 813) de ob-rutiti (§ 443).<br />
On peut le retrouver dans uzda « bride » qu'il est difficile de<br />
rattacher à us- de usla « bouche », mais qui a comme verbe uzdali<br />
à variante nuzdati dans ukr. nuzddty, bl.-r. nuzdac', r. pop.<br />
obnuzddt' « brider » distinct du russe littéraire obuzddi' « réfréner »,<br />
ce qui dénonce une dépréverbation de su-nuz-, sans doute de<br />
*sûn-çz- (§ 762) dans v. si. sûnuzïnu « monté en char » (§ 65).<br />
Le rapport de v. si. skovrada « poêle à frire », r. skovorodd, avec<br />
le thème verbal skvïre- « faire frire » n'est pas net (§ 453), mais une<br />
formation en -da apparaît dans gvazda et gyzda en regard du thème<br />
gyd- (§ 778). On peut la supposer dans v. si. brazda « sillon » (§ 773),<br />
sur racine *bhers-, skr. bhrstih « pointe », ou bien sur racine *bhergh-,<br />
skr. brhàrd- « haut », av. bardzah- « hauteur, montagne », avec le<br />
sillon désigné non pas par son creux, mais par sa bosse, comme<br />
dans lat. porca « partie proéminente du sillon » et dans le français<br />
dialectal «sillon » au sens de «ados, talus » — ce qui aurait pour<br />
conséquence de restituer une forme slave *berz- recouverte par<br />
l'emprunt au germanique *berg-, v. si. brëgu « rive, colline », comme<br />
*zord- par gradu (§ 12).<br />
C'est -da encore qu'on pourrait supposer dans l'adverbe v. si.<br />
jçdë, s'il n'est pas fait sur un postverbal ancien en -dû (§ 819) :
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 491<br />
il traduit le grec Ixojxsvoç « s'attachant à, se tenant à » Ps. LXVII,<br />
26, XCIII, 15), et le verbe ëxscrôai est rendu en vieux slave par<br />
jçti s g (Supr. 2774, 53017, 5486), si bien qu'on peut imaginer un<br />
dérivé *jç-da.<br />
§ 1004. Finales -oda, etc. — Une finale -oda apparaît dans<br />
quelques mots :<br />
lagoda « paix, accord, commodité », r. Idgoda, etc., qui est sûrement<br />
le postverbal de lagoditi « s'accorder », et lagodili peut<br />
s'expliquer par croisement de laditi et goditi (§ 785) ;<br />
agoda « baie », r. jdgoda, etc., sur le thème *ôg- de lit. ûoga,<br />
lette uôga, qu'on doit retrouver dans jagla « grain (de millet) »<br />
(§ 1051), mais qu'il n'est pas légitime de reconnaître dans s.-cr.<br />
vinjaga, slov. dial. vinjaga, qui désigne la vigne vierge et ses baies :<br />
le slavon croate vinjaga Gant. I, 14 (13) traduit (ioTpuç «grappe»,<br />
mais non de raisin, et ce n'est pas un composé comme lit. vynuogê<br />
« grain de raisin », mais un mot à suffixe -jaga (§ 1014), variante de<br />
s.-cr. vlnika, slov. vinîka (§ 1045) ;<br />
loboda et lebada « arroche », mot slave commun, mais inexpliqué ;<br />
et svoboda « liberté » postverbal de svoboditi dérivé de svobodï,<br />
emprunt au germanique (§ 817).<br />
On a -ada dans v. si. gramada (Pand. Ant.) « tas », r. gromdda, etc.,<br />
et lit. grâmatas, qu'on rapproche de skr. grâmah « tas, groupe<br />
d'hommes », et qui peut, par réfection sur le verbe gromaditi,<br />
présenter -ada pour -adï de même que le collectif r. goljadd<br />
« misérables » (§ 1006) ;<br />
-ëda dans besëda, sûrement composé obscurci (§ 1231) ;<br />
-anda dans tch. svanda et junda « farce, bouffonnerie » très mal<br />
expliqués, et r. dikanda, masc., « qui regarde en ouvrant de grands<br />
yeux », sur dikij. On retrouve un suffixe reconnaissable dans :<br />
pol. bajçda « fable, bajka », gawçda « causerie » sur gaworzyc<br />
« causer », qui est le latin -enda de legienda « légende ».<br />
Et slov. metûda « babeurre » vient du vénitien battuda par<br />
substitution à (di)battere «baratter» du slave mçle- (§ 429);<br />
bakl(j)dda «retraite aux flambeaux» joint à bâkla «flambeau»,<br />
pris à ail. Fackel de lat. facula, le suffixe de l'italien fiaccolala.<br />
§ 1005. Finale -dï. — On a pu dresser toute une liste de mots<br />
à finale -dï (§ 719), analysables ou non.<br />
Une finale -qdï dans éelçdï A gland » est celle d'un ancien athématique<br />
(§ 171), mais elle apparaît suffixale dans *labçdï « cygne »<br />
de *âlbandï, et répondant à lit. -andis (§ 1000).<br />
On a -çdï dans le vieux-russe oslçdï « poutre », mod. ôsljad',<br />
ôsled' ; ce doit être le même mot que l'isolé oslëd-, plur. oslëdi, qui
492 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
traduit « onagre » dans l'Ancien Testament, Sirach, XIII, 19 (23),<br />
avec emploi métaphorique comme dans « chevalet » de « cheval » :<br />
donc un dérivé en -çdï à côté de osïlç « ânon », comme *govçdï<br />
(§ 1002). On n'en séparera pas le masculin (j)agnçdu «peuplier<br />
noir», collectif agnçdije (§ 925), s.-cr. jàgnjëd, et tch. jehnëd<br />
« chaton » et fém. jehnëda : il s'agit en effet d'un arbre notable par<br />
ses chatons ; le rapport avec agnç « agneau » est évident, et on a<br />
donc affaire ici aussi à un dérivé en -çdï, collectif, devenu<br />
masculin -çdu dans le nom d'arbre.<br />
On trouve un suffixe d'abstraits -ëdï dans le slavon zulëdï<br />
« mal », vieux-serbe zïlëdï et mod. zlïjed, et slov. dial. zlêd (masc.)<br />
à côté de zlég tiré secondairement du génitif zlega de zèl « mauvais » ;<br />
dans *bolëdï « maladie » que restituent v. si. bolëdïnu « malade »<br />
et bolëzdï (§ 956) ; et dans r. dial. gdved' « (objet d')horreur », bulg.<br />
gâved « bête sauvage », pol. gawiedz « vermine, marmaille », tch.<br />
havëd' «vermine, racaille, volaille» (v. tch. havët', § 1173), sur<br />
le thème gav- (§ 782).<br />
Mais c'est -(j)adï qu'on trouve nettement comme suffixe, et<br />
qui doit s'expliquer comme élargissement en -dï, à sens collectif,<br />
d'abstraits en -a et ~(j)a (-ë).<br />
§ 1006. Suffixe -(j)adï. — Le vieux slave ne connaît qu'une<br />
forme, ëeljadï « les gens de la maison », r. ëéljad', s.-cr. ëëljâd,<br />
où l'on peut voir un dérivé du thème *kel- de lit. kiltis «racine,<br />
lignée», kelys et si. kolëno «genou» et «génération» (§ 1099).<br />
Mais le slavon atteste que la formation avait son extension dans<br />
la langue, sans doute familière : le slavon russe starjadï « les vieux »<br />
est attesté au xi e siècle et se retrouve dans slov. star jâd « vieilles<br />
choses ».<br />
On a en vieux russe mokrjadï «lieu humide», adj. mokrëdivu<br />
« humide », et pol. dial. mokradz, slovaque mokrad', slov. mokrâd ;<br />
pïstrjadï « étoffe bariolée », r. mod. péstrjad' « coutil » ; ruxljadï<br />
«les meubles» sur ruxlo (§ 1052), mod. rûxljad' «les nippes»;<br />
plosëadï « lieu plat », mod. plôsëad' « place », sur plosku « plat »<br />
(§ 1065) ; — et en russe moderne ëérned' « le noir » et « canard noir »,<br />
môkred' « temps humide », tépled' « chaleur », témned' « obscurité »<br />
(et ëérnet', môkret', etc., § 1173) ; lésëad' «dalle», sans doute sur<br />
le thème de lëskat' « claquer », cf. pol. leszczotka « planchette » ;<br />
outre lôsad' « cheval » pour ukr. losâ, emprunt au turc ; et slérljad'<br />
« sterlet » pour l'ancien sterljag- (xv e s.), de l'allemand Stôrling<br />
« petit esturgeon », qui peut avoir pris sa finale à des noms de<br />
poissons comme sel'd' « hareng ».<br />
Le slavon croate a lïsëadl « vanité » (Eccl. VII, 16, IX, 9),<br />
cakavien ancien tascad. Le serbo-croate a son type productif en<br />
-âd de collectifs (§211) : tëlâd de tèle « veau », nâzimâd de nàzimac,
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 493<br />
nâzime « cochon d'un an » (né l'hiver, na zimï), mdmëâd « jeunes<br />
garçons » de màmak, mdmce, vàroscâd « enfants de la ville, vâros »<br />
de vàrosce ; et sur nom de chose dfvljâd « tas de bois » sur drva<br />
(plur.) « bois » et drvlje « du bois » ; sur adjectifs zïvâd « volaille »,<br />
bûjâd « fougère » de bûjan « luxuriant », v. si. bui ; et gàmâd<br />
« vermine » (dès le xvi e siècle) déformé de *gùmuzû (§ 556).<br />
Le suffixe est absent du bulgaro-macédomen, qui use d'autres<br />
formes de collectifs (§ 195), mais il se retrouve en slovène : crvâd<br />
« des vers », divjâd « du gibier », drobâd « petits êtres, menu bétail »<br />
et drobnjâd sur drôben « menu », gnilâd « du pourri », suhljâd « du<br />
bois sec» sur sûh et sehljâd sur sehniti «sécher» (§ 493), zivâd<br />
« les bêtes », druzincâd « les domestiques » sur druzinëe, otrocâd<br />
« les enfants » sur otrocè ; et svojâd « parenté » à côté de svojât<br />
(§ 1175).<br />
§ 1007. Suffixe -Ida. — Ce suffixe apparaît dans v. si. vrazïda<br />
« hostilité » sur vragu « ennemi », dans pravïda « justice » et nepravïda<br />
« injustice », et en slavon dans krivïda « injustice » opposé à<br />
pravïda ; et dans napïda (Const. Pr., Izb. Svjat.) « salaire, situation<br />
de salarié », sur napu « salarié » (Gr. Naz., Pand. Ant.). Une forme<br />
*prëmïda serait supposée par prëmïdivu « juste » Supr. 395s, mais<br />
cet adjectif est si isolé qu'il faut sûrement n'y voir qu'une altération<br />
de pravïdivû, du fait d'un copiste qui visiblement avait lu pravï,<br />
adv., et l'avait remplacé par son synonyme prëmï « droit » (§ 320) ;<br />
une forme strazda « garde » Supr. 9129 n'est également qu'une<br />
mauvaise graphie pour straza ou slraz(ï)ba.<br />
Les langues slaves n'attestent aucune autre forme en -Ida, et<br />
ne font que conserver r. prâvda, pol. krzywda, et vrazïda, mais<br />
comme slavonisme dans r. vrazdâ en regard de vôrog, et comme<br />
terme de coutume, sûrement slavonisme aussi, dans s.-cr. vràzda<br />
« vengeance, prix du sang » : ce sont des mots de la langue savante<br />
et religieuse plus que de la langue populaire.<br />
Il semblerait, à première vue, que le suffixe -Ida soit un élargissement<br />
de -da comme -ïba l'est de -ba. Mais napïda est un dérivé de<br />
napû qui est un emprunt au germanique, v. h. a. knappo « valet »,<br />
mod. Knappe ; et v. si. vrazïda est tout entier un emprunt dont on<br />
a retrouvé l'origine dans le vieux saxon wargida « insécurité »,<br />
de v. h. a. warg « banni, bandit » — ce qui montre que si. *vargu est<br />
lui-même emprunté au germanique, et le baltique varg-, v. pr.<br />
wargs « mauvais », au slave.<br />
Ainsi le suffixe si. -ïda e§t pris au germanique, got. -ipa, v. h. a.<br />
-ida, et pravïda, sur pravu et adv. pravï, imite got. ga-raihtipa<br />
«justice» de ga-raihts «juste». Quant au germanique -ipa, -ida,<br />
c'est le suffixe i.-e. *-etâ, à variante si. -ota (§ 904).
494 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
SUFFIXES EN -g-<br />
§ 1008. — En slave, g répond à i.-e. *g w (h), et aussi à *g(h),<br />
comme k à */c w et à *k (§ 8). Les langues indo-européennes<br />
présentent divers élargissements avec ces éléments, mais sans<br />
formations suffixales nettes : lat. -gô, gén. -ginis, est propre au<br />
latin, et gr. -y/j du type àXXayyj « changement » est propre au grec.<br />
En baltique, un suffixe -ga est faiblement attesté par lit. eigà<br />
« marche » et is-eiga « sortie », at-eigà « arrivée », etc., sur eïti<br />
« aller », is-imga « réserves, somme réservée » sur is-imti « retirer »,<br />
paliaugà sur -liâuti «cesser» (§ 999), lette dial. dzîga «vie» sur<br />
dzîl (« se guérir », § 437). Un type d'origine indo-européenne est<br />
celui des dérivés en lit. -gis de noms de nombres, dveigys « de deux<br />
ans », ketvérgis « de quatre ans » (§ 317).<br />
Le suffixe le plus productif, et qui l'est largement, est -ingas,<br />
qui fournit des dérivés de substantifs et surtout des élargissements<br />
d'adjectifs : lit. teisingas « juste, véridique », lette tiesîgs, v. pr.<br />
teising- « décent » de lit. teisùs « juste » ou de v. pr. teisi « honneur »,<br />
lit. vertingas « digne », lette vërtîgs, v. pr. wertïngs, de l'adjectif<br />
lit. vertas, lette verts, v. pr. werls, emprunt à ail. wert. Il est<br />
difficile de ne pas reconnaître dans ce suffixe baltique le suffixe<br />
-ing- du germanique, qui forme des substantifs : v. h. a. kuning<br />
«roi», d'où si. kunçdzï (§ 1015), mais qui est productif en vieux<br />
haut allemand surtout pour la substantivation d'adjectifs : arm<br />
« pauvre » et arming « homme pauvre ». Ainsi les adjectifs en -ingas<br />
du baltique sont originellement des substantifs passés à la fonction<br />
d'adjectifs, comme -nie en roumain (§ 273), et c'est pourquoi le<br />
suffixe apparaît surtout comme élargissement d'adjectifs. Le vieuxprussien<br />
naunïngs « novice », sur nauns « nouveau », est substantif<br />
comme Neuling qu'il traduit, où -ling, sur neu, est la forme sous<br />
laquelle v. h. a. -ing s'est maintenu productif en allemand.<br />
§ 1009. Finale -giï. Cette finale apparaît dans plusieurs adjectifs<br />
(§ 289) : *dïlgu «long», lit. ilgas, skr. dîrghâh, etc., avec un<br />
comparatif *dïljii qui montre que -gu. a été traité comme suffixe<br />
ou au moins comme élargissement de thème ; v. si. dragu « cher »,<br />
qui peut être le dérivé d'une racine balto-slave der- ; et blagû<br />
« bon », dont boljii « plus grand » doit avoir été le comparatif.<br />
Le slave a par ailleurs le correspondant des dérivés de numératifs<br />
en -gis du lituanien : v. si. trizû (Izb. Svjat.) « de trois ans »,<br />
s.-cr. ancien dviz « de deux ans », de *dvidzï, *lridzï (§ 317) ; et v. r.<br />
cetvergu, mod. cetvérg «jeudi», qui est substantif, et qui doit
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 495<br />
restituer un type expliquant la flexion czworo, gén. czworga, des<br />
collectifs du polonais.<br />
Il n'y a pas d'autre attestation claire d'un substantif à suffixe<br />
-gu : v. si. pragu « seuil » peut se ramener à un thème *perg-, mais<br />
inanalysable (§ 775) ; s.-cr. trâg «trace» est isolé (§ 787). V. si.<br />
pro-brëzgu « point du jour » est le postverbal d'un verbe *brêg-zge-<br />
(§ 748). Y. si. çzgû « coin (de la bouche) » (Cant. III, 14 Bon.), r.<br />
uzg « coin, pointe (d'une pièce d'étoffe) » et avec déformation de<br />
l'initiale luzg « coin de l'œil », pol. dial. wqzg « pan (d'un habit) »,<br />
qui est tout différent de çgûlù « angle », peut être aussi le postverbal<br />
d'un présent suffixal en -zge- (§ 597) sur un thème comme çzde<br />
çzûkû « étroit ».<br />
En dehors des postverbaux, en logû (§ 726), prçgu (§ 763), etc.,<br />
ou d'isolés comme mozgu «moelle » (§ 183), une finale -gu est celle<br />
de mots d'emprunt : v. si. vragu « ennemi » au germanique ( § 1007)<br />
et plugu « charrue » à l'allemand, bëlëgu « signe, marque » et bubrëgu<br />
« rein, rognon » au turc, et voir -ogu, -(j)ugu.<br />
§ 1010. Finale -ga. — Il n'y a qu'un exemple sûr de -ga suffixal,<br />
mais il est net : struga « courant », à côté de struja et strumen-,<br />
sur la racine *sru- (§ 462). Le mot sluga « serviteur » pourrait être<br />
un dérivé du thème verbal slu- «écouter» (§ 759). Le mot s.-cr.<br />
snâga «vigueur, force», tch. snaha «efforts, tendance» etc., et<br />
v. si. dans snagota (§ 898), pourrait l'être du thème sna- de r.<br />
snasl' «agrès», snâdit' «assembler» (§ 444). Le slavon nëga<br />
«tendresse» n'est pas expliqué (§ 748) ; didraga «membrane»<br />
(Gr. Naz., Virg.) a l'aspect d'une forme à redoublement (§ 555)<br />
et fait naturellement penser à la racine *der- (§ 471). Le nom du<br />
« loriot », r. ivolga, pol. wilga, wywilga, v. tch. et slovaque vlha,<br />
s.-cr. vùga, est sans rapprochement valable.<br />
V. si. jt'dza « maladie », pol. jçdza « furie » et v. tch. jëzë, est sur<br />
un thème ing- balto-slave, lit. ingas « indolent », éngti « harasser »<br />
et « être indolent », mais inanalysable. Et voir nesumçzivù, § 1015.<br />
Des mots en -zga peuvent être, Comme ceux en -zgû, des postverbaux<br />
de verbes à présent suffixal -zge- : v. si. muzga « lieu<br />
humide » (Théod., Upir'), slov. mûzga « limon », et r. mzga « moisissure<br />
», verbe m(ô)zgnul' «se gâter» (§ 597) ; slavon mëzga «sève,<br />
pulpe, aubier », r. mezgâ, pol. miazga, etc., auquel conviendrait<br />
comme thème de base mïz- de mïzëti «suinter» (§ 543). V. si.<br />
drçzga « bois », et r. drjazg « menu bois, broutilles » (et plur. drjâzgi<br />
« cancan » qui est évidemment le même mot), est inexpliqué. Le<br />
russe luzgâ « écale » est une variante de luskâ, v. si. luska (J. Ex.),<br />
avec verbe slov. luzgali et lûskati « écosser », slavon luzgati<br />
« mâcher », sans thème initial reconnaissable ; r. drobezgd, drobizgâ,
496 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
plur. drébezgi « petits tessons » est à côté de drebezzât' « rendre<br />
un son de fêlé », subst. drébezg.<br />
On trouve dans les langues slaves d'autres mots à finale -ga,<br />
ainsi en russe s'émga « saumon » et d'assez nombreux noms de<br />
poissons en -ga, -(j)uga (§ 1013), etc., qui paraissent dans<br />
l'ensemble d'origine étrangère ; pour r. ser'gâ « boucle d'oreille »,<br />
voir § 1015.<br />
§ 1011. Finale -og-. — La finale -ogu est une finale de mots<br />
d'emprunt :<br />
v. si. ërùtogu « chambre (à coucher) », du turco-persan (§ 263) ;<br />
slavon pasenogu « mari de la sœur de la femme », s.-cr. pasènog,<br />
du turc (osmanli badzanak).<br />
Dans le slavon kolimogu (et -magu) « tente », ukr. kolymdx,<br />
v. tch. kolimah « char », V. Machek reconnaît le nom des Kalmouks,<br />
avec leurs tentes et leurs chars à bâches de nomades.<br />
On reconnaîtrait de même dans le slavon Svarogu, r. Svarôg,<br />
nom du dieu du soleil dans le paganisme slave, le sanskrit svar<br />
«soleil» (§ 175) par intermédiaire turc, si un contact avec l'Inde<br />
ne surprenait pas et si la forme iranienne n'était pas xvar-.<br />
Le vieux-slave sapogu « chaussure », r. sapôg « botte », n'est pas<br />
expliqué ; le vieux-russe pirogu (xn e s.), mod. pirôg, tch. piroh,<br />
qui désigne une sorte de gâteau, une boulette de pâte levée, ne<br />
l'est évidemment pas par rattachement à piru « festin » ; le vieuxrusse<br />
batogu (xi e s.), r. batôg «bâton», pol. batog «fouet», ne l'est<br />
qu'incomplètement et douteusement comme dérivé de pol. bat<br />
« bâton, fouet », s.-cr. bal « masse (d'armes) », qui pourrait être<br />
postérieur (du xv e siècle en serbo-croate), et quant au tchèque<br />
batoh, il signifie « havresac » et Machek y voit l'allemand Weidtasche<br />
« gibecière ».<br />
Si le slave commun *tvarogu « caillebotte, fromage blanc », r.<br />
tvorôg, pol. Iwarôg, etc., avait un rapport avec tvorili « former,<br />
faire » comme le français « fromage » avec « forme », ce ne pourrait<br />
être que par étymologie populaire, puisque la finale resterait<br />
inexpliquée.<br />
Pour le slavon russe bïrlogu « tanière », mod. berlôga, tch. brloh,<br />
etc., il faut naturellement renoncer à la vieille explication par<br />
« tanière d'ours » et par un composé à second terme -logu « gîte »<br />
avec comme premier terme un correspondant slave de v. h. a.<br />
bëro (« le brun ») antérieur à medvëdï.<br />
En serbo-croate, tâlog « dépôt, sédiment » est récent et a été<br />
attiré par les postverbaux en -log, dont pàlog «dépôt» (§ 726),<br />
sûrement par altération de talov (§ 1191) conservé dans l'adjectif<br />
dial. tàlôvan « gras, mou » ; de vrtlog « tourbillon », on voit seulement
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 497<br />
qu'il est sur le thème de vrtjeti se et vHljati « tourner » ; et kftog<br />
« ordures » est isolé. En slovène, bâlog « (bœuf) de couleur blanche »<br />
est pour bâleh, de l'allemand dialectal falch.<br />
Le vieux-slave kovïcegu « coffre » (kovïcezïcï « cassette ») et<br />
« arche (de Noé) », aux deux sens du grec XI6COT6Ç, est sûrement<br />
d'origine turque, et on peut y reconnaître le suffixe diminutif<br />
-dzek, -dzik du turc ; on penserait alors à un hybride romano-turc,<br />
avec comme premier terme le latin capsa « caisse ».<br />
Chez les adjectifs, le vieux-slave xçdogu (Gr. Naz.) « habile »<br />
est le germanique *handaga-, got. handugs « savant » avec variante<br />
*-uga- ; munogû « nombreux » est sûrement un emprunt au gotique<br />
manags (§ 263), et il a entraîné son contraire inogu «solitaire»<br />
pour inoku (§ 257).<br />
Dans ces conditions, il est difficile de voir des formations slaves<br />
dans les deux mots<br />
pol. rarôg « laneret, faucon de chasse », h. sor. et tch. raroh,<br />
dont il est arbitraire de faire un dérivé du slavon raru « bruit »<br />
(§ 1115) sur ra- (§ 508) ; en serbo-croate rarov, hongrois rârô, et<br />
rarog, var. ralog, désigne la « langouste » et n'a sûrement rien à voir,<br />
lui, avec le thème ra- ;<br />
v. si. ostrogu « enceinte de pieux, palanque », verbe ostroèiti<br />
« entourer d'une palissade » (Upir'), et adj. oslrogavû « épineux »<br />
(§ 993) ; r. ancien osirôg, pol. ancien ostroza « palanque » de ostrozyc ;<br />
et r. oslrogâ « harpon » et « éperon », pol. ostroga « éperon, ergot »<br />
(ostrqg et ostrçga « ronce »), v. tch. ostroha « éperon » et mod. ostruha,<br />
et ostroh « éperon de terre » à la rencontre de deux cours d'eau ;<br />
s.-cr. ôstroga, èslruga et ancien ostrog « éperon », dial. èstroga<br />
« échalas » et ôslruga « ronce » ; slov. ostrçga « éperon ». Un rapport<br />
direct n'est pas possible avec la racine *sterg- «garder» (§ 771),<br />
mais une influence sémantique de *o-sterze-, r. osteregât', etc.<br />
sur ostrogu « enceinte fortifiée » se conçoit aisément. L'aspect du<br />
mot, sous ses deux sens, est d'un dérivé de ostru « pointu », mais<br />
la finale est bien plutôt turco-iranienne que slave : elle orienterait<br />
vers une forme iranienne parallèle à si. ostru, comme le pehlvi<br />
astr « pointe ».<br />
Une finale -oga apparaît dans ostroga variante de ostrogu ; dans<br />
pol. matoga « spectre, larbe », tch. mâtoha « spectre, chimère »,<br />
sur tch. mâtati « effrayer par un spectre » et sûrement pol. maiac<br />
« duper », itératif de motati « entortiller » (§ 731) ; dans pol. trwoga<br />
« alarme » et r. trevôga « tfouble » sans doute pris au polonais, qui<br />
n'est pas expliqué ; dans tch. dëtoha « matrice » qu'on suppose abrégé<br />
de *dëto-loha, cf. v. si. loze (J. Ex.) et lozesno « matrice » ; et en<br />
slovène, où -oga ne se distingue de *-çga que par les variantes
498 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
dialectales, dans zatloga à côté de zatloka et zdtlaka « hache à<br />
manche court », sûrement composé où l'on aperçoit dans le second<br />
terme l'allemand Hacke.<br />
§ 1012. Finales -ig-, -yg-- — On reconnaît -ig- dans :<br />
v. si. kunjigy, plur., « livre », emprunt à une langue turque<br />
(§ 204);<br />
v. si. verigy « chaînes », r. verlga, s.-cr. vèriga, slov. verîga et<br />
verûga « chaîne » et « verrou », qui n'est pas séparable de verëja<br />
« verrou » (§ 1032), et verëja ne l'est pas de *vïre-, *verti (§ 453) ;<br />
v. si. jarigu (Upir', Gr. Naz.) « sac », r. jariga « étoffe grossière »,<br />
qu'il est difficile de rattacher au thème jar- de r. jarina « laine »<br />
(§ 893), et qui est bien plutôt un emprunt ;<br />
v. si. kovrig- (Ham. 40024, glosé par posmagy « biscuits »), slavon<br />
russe kovrigu et kovriga, r. kovrlga « pain rond », bulg. kovrig « petit<br />
gâteau », sans doute mot d'emprunt également ;<br />
v. si. ërëmiga (Éphrem) « poterie », ërëmizïniku « potier », qui est<br />
gr. xspajxixôç « d'argile » par un intermédiaire roman *ceramïca ;<br />
slavon jeretigu « hérétique » à côté de jeretiku, et slavon serbe<br />
jeretizica, jeretiz(ï)ka «femme hérétique»;<br />
v. tch. koblih, mod. kobliha « beignet », non expliqué.<br />
On a la forme -yg- dans :<br />
v. si. kotyga « tunique » et var. kotuga (Éphrem), du bas-latin<br />
*cotûca ;<br />
v. si. krukyga « litière », altération de lat. carrûca « sorte de<br />
voiture » ;<br />
slavon solyga « bâton » et selyga « fouet », r. selyga « longue<br />
baguette, fouet » ;<br />
slavon russe (xn e s.) temlyga, lomlyga « licou », qui est sûrement<br />
le même mot que r. temljak (xvi e s.) « courroie de l'arme », emprunt<br />
au tchouvache tâmlik ;<br />
v. r. lodyga (xn e s.) « osselet », r. lodijga « cheville du pied », pol.<br />
iodyga « tige », non expliqué ;<br />
pol. dziadyga « grand-papa », de dziad ; iandyga « fainéant »,<br />
et verbe iandykowac (xvi e s.), qui doit être fait sur ail. Landslreicher<br />
« vagabond » ; iocyga et loczyga « laitue », de lat. laciûca,<br />
s.-cr. locika ; ostryga « huître », s.-cr. dial. et slov. oslriga, de l'italien<br />
ostrica.<br />
En russe, -yga est un suffixe de la langue familière, dépréciatif,<br />
donnant surtout des masculins ou mots des deux genres :<br />
buzyga « buveur, ivrogne », sur buzâ « sorte de cidre » ; kosyga<br />
«louche», sur kosôj ; kostyga «ivraie», à côté de koslér' (§ 1118) ;
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 499<br />
lovyga et lovûga « homme adroit, lôvkij » ; malyga « jeune garçon » ;<br />
skvalyga « ladre, grippe-sou », non expliqué ; sel'myga « fripon »<br />
sur sél'ma, ancien sel'm, de l'allemand Schelm ; bosomyga « va-nupieds<br />
», sur boséj, et cf. adv. boskôm ; grexomyga « homme qui vit<br />
dans le péché », sur instr. grexôm ; prosëelyga « fripon », renforcement<br />
de prolâza « homme qui se faufile », sur scel' « fente » ; toropyga<br />
« qui a l'habitude de se presser », sur toropit'sja ; zabuldyga<br />
« bambocheur » ; etc.<br />
Sans distinction de -ig- et -yg- :<br />
bulg. et slov. taliga, s.-cr. tàljige, plur., « charrette », qui est le<br />
slavon telëga, r. teléga, sûrement emprunt au turc ;<br />
s.-cr. kèciga « sterlet », slov. keëiga, voir pol. czeczuga, § 1013 ;<br />
slov. cesmiga « épine-vinette », et -ka, -na, pour r. ëesmina, etc. ;<br />
kodriga « femme à cheveux crépus », sur kçder « bouclé » ; çdriga<br />
« lit suspendu », sur' çder « échafaudage » ; ovsiga (et -ka, -na)<br />
« mélange d'avoine et de vesce », sur ôves ; repiga « colza » de repica,<br />
s.-cr. repica « petite rave, rëpa » ; seriga « crottin de cheval » et<br />
« homme importun », sur sir je-, srâti ; poscaniga « pisse-au-lit », sur<br />
poscâti.<br />
§ 1013. Finales -çg-, -ug-. — On reconnaît la forme -çg~ dans :<br />
v. si. xalçga « haie », slov. halçga et dial. halûga « broussailles,<br />
varech », s.-cr. hàluga « taillis, mauvaises herbes », etc. ;<br />
pol. pslrqg « truite », et slov. pestrçga et dial. pestrûga, tch.<br />
pstruh, variante de *pïstry (§ 203) ;<br />
pol. dial. ostrqg et ostrçga « ronce », slov. ostrçga et s.-cr. dstruga<br />
« ronce » et « éperon », variantes de ostrogu, ostroga ;<br />
pol. morqg « raie, zébrure » et slov. marçga « raie, tache », qui se<br />
laisse rattacher à r. mardi' « barbouiller » ( § 790) ;<br />
pol. bzdqga « mauvaise boisson » et « bateau à aubes », en regard<br />
de bzdziec « vesser » (§ 591) ; iazçga et iazeka «traînard, espion»,<br />
sur lazic « se traîner » ; wlôczçga « vagabond » sur wiôczic siç (mais<br />
slov. vlacûga) ; ciemiqga « casse-tête » et masc. « imbécile », sur<br />
ciemiç « sommet de la tête », w ciemiç bity « frappé sur la tête,<br />
à l'esprit engourdi », et voir -içga, § 1014 ; niedoiqga « impuissant »,<br />
sur l'ancien dotçka « puissance », postverbal de doiqczyc « adjoindre »<br />
(§ 763); wardçga «bête de somme» et «évaluation», qui est le<br />
bas-allemand werdunge, ail. Wertung « l'avoir », sur werten « évaluer<br />
» ; mitrçga « perte de temps » et masc. « lambin », expliqué<br />
de même par v. h. a. miftarunga « entreprise, intervention » ;<br />
slov. béloga «animal blanc», mais voir belûg(a) ; lisçga et<br />
kajkavien lisûga « truie avec une tache sur le front », sur lis « qui<br />
a une tache » (§ 801) ; medlçga « langueur », mais à côté de medlôba
500 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
(§ 913), medlôta, sur medèl «maigre, languissant» (§ 614) ; rdeëçga<br />
et rdecuga « porc rouge », « poire rouge », sur rdèc ; trnqga « verge<br />
d'épine ».<br />
On reconnaît -ug- dans :<br />
slavon (xn e s.) bëlïëugù « anneau », bulg. belcûg, s.-cr. biàcug,<br />
sûrement d'origine turque ;<br />
pol. dial. jaruga « ravin marécageux », slov. jarûga « fosse<br />
profonde, ravin », s.-cr. jàruga, r. dial. jarûga, et pol. jar, s.-cr.<br />
jârak, slov. jârek, du turc jar « rive escarpée », jarug « crevasse » ;<br />
pol. kolczuga « cotte de mailles » (xv e -xvi e s.) et r. kol'ëûga<br />
(xvi e s.), sur v. pol. kolce « anneau », r. kol'cô ;<br />
pol. czeczuga « sterlet », r. dial. ëeëûga, ùkr. ceëuha, et roumain<br />
câciugâ, hongrois kecsege (s.-cr. kèciga) ;<br />
pol. ancien kaluga « mare » (mod. kaluza) sur kal « boue », et<br />
s.-cr. kàljuga (et kàljuza) « bourbier » ;<br />
pol. kanczuga « lanière de cuir, martinet », de r. et ukr. kanëûk,<br />
et bulg. kamcik, s.-cr. kàmdzija, du turc kamce ; maczuga « massue »,<br />
du roumain mâciucâ (lat. vulg. *mattiûca) ; jarczuga « avoine<br />
hâtive », sur jar, jarz « printemps », jarka « blé de mars » ; pleciuga,<br />
masc.? « babillard », et pleciuch(a), sur plesc « tresser, radoter»;<br />
szaruga « vilain temps », sur szary « gris, sombre », et parallèlement<br />
slov. sarûga « animal pie » et « tache d'érysipèle », sur sâr « bariolé » ;<br />
paszluga « tablier », comme farluch de l'allemand Vortuch, où l'on<br />
peut supposer une substitution à far- de pas- « ceinture », zapaska<br />
« tablier » ;<br />
slovène belûg et béluga « animal blanc », s.-cr. bjëlùg et bjèluga,<br />
r. béluga « grand esturgeon » ; branjug « grive », s.-cr. brànjûg (et<br />
bravènjâk), peut-être déformation, sur brânje «vendange», de<br />
borovnjâk, s.-cr. bordvnjâk, « qui se nourrit de myrtille, borovnica » ;<br />
pepelùga (et -luha), nom de plante, s.-cr. pepèljuga, nom de plante<br />
et « Cendrillon », sur pepçl « cendre » ; pleëûga « femme large<br />
d'épaules », sur pléëe ; vlaëûga « traînée, coureuse » et « bateau<br />
remorqueur » (mais pol. wlôczçga).<br />
On ne distingue pas -qg- et -ug- dans :<br />
r. derjûga « toile d'étoupe » (dès le xm e s.), sur derû, drat' ;<br />
dial. lancûg, ukr. lancûh « chaîne », mais voir pol. lancuch (§ 1154) ;•<br />
sevrjûga « variété d'esturgeon », sans doute mot d'emprunt ; v'uga<br />
« tourbillon de neige », comme v'jdlica (§ 880) ; zverjûga et zverjâga<br />
« bête brute », élargissement de zver' ; et tout un type de masculins<br />
ou noms des deux genres, familiers et dépréciatifs, type plus<br />
développé dans les dialectes que dans la langue littéraire :<br />
bezdeljàga et bezdeljâ « fainéant », sur bezdél'nyj « oisif », bezdél'e<br />
«oisiveté»; branëûga «grondeur, querelleur», sur branil'(sja),
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 501<br />
brânka « querelle » ; drjanëùga et drjanjûga sur drjannôj « vilain,<br />
vaurien », drjan' « saleté, rebut » ; mal'ëûga « mioche », sur mâlec<br />
« garçon » ; ob'eduga « glouton, écornifleur », et ob'edâlo, sur ob'edât' ;<br />
p'janëùga et p'janjùga « ivrogne », sur p'jânyj ; podljûga sur pôdlyj<br />
« lâche » ; vorjûga et vorjâga, sur vor « voleur » ; xapûga « agrippeur »,<br />
sur xâpat' ; xitrjûga sur xitryj « rusé » ; zidjûga « sale Juif » ; etc.<br />
s.-cr. cvoruga, augmentatif de ëvôr « nœud » ; obrljuga « salope,<br />
souillon », sur obrljati « salir » de brljati « mêler, souiller », et voir<br />
brljaga ; piljug et piljuga (et pîljuh, etc.), désignant un rapace,<br />
milan, épervier, qui peut être mis en serbo-croate en rapport avec<br />
pîljiti « regarder fixement », mais qui se retrouve dans bulg. piljak<br />
« épervier », ici en rapport avec pile « poulet », et dans ukr. pyl'ûk<br />
« sorte de vautour », r. pil'ûk « chouette » ; zëljùg « porc de couleur<br />
grise », sur zèlen « vert, gris ».<br />
§ 1014. Finale -(j)ag-. — En vieux slave :<br />
krûëagu « pot », s.-cr. krëâg « cruche », r. korëàga « pot de terre »,<br />
emprunt au turc ;<br />
vostaga « fouet », v. r. vosëaga « boule attachée à un bâton pour<br />
battre le tambour », sans doute aussi emprunt au turc ;<br />
lezaga (J. Ex.) et lezaxu (§ 1144), traduisant XT)TOC «baleine» :<br />
ce qu'on explique par une interprétation fantaisiste du grec d'après<br />
xeÏTai « il est couché », mais le mot était un nom de poisson<br />
rendant en slavon aékayor «raie», et cf. lézen' «lotte» en russe<br />
dialectal (§ 1091).<br />
Pour didraga « membrane », voir § 1010, et pour posmagu<br />
« biscuit », qui pourrait être une adaptation de gr. TcaÇa-fiâç, voir<br />
§ 787.<br />
En slavon russe (xn e s.) : tojaga « bâton », bulg. tojâga, s.-cr.<br />
tô(l)jaga, du turc tajak ; et en russe ancien (xv e s.) : sosnjag « bois<br />
de pins », sur sosnâ, mod. sosnjag, sosnjûg, et sosnjâk (§ 862).<br />
Le slovène ne présente que quelques mots à finale -aga : poscâga<br />
et poscâga «variété de grenouille», sur posci-, poscâti (§ 602);<br />
vorljâga « flaque d'eau, bourbier », qui est s.-cr. brljaga.<br />
En serbo-croate, la finale est assez fréquente et constitue une<br />
sorte de suffixe expressif en -ag(a) et -ljag(a) :<br />
brljaga « bourbier », sur brljati « mêler, souiller », et voir obHjuga ;<br />
(h)ïnjaga « grand tas », qui doit être réduit de (h)rp- dans (h)rpa<br />
« tas », (hJrpnjâk « mesure pour le grain » ; mùtljâg « trouble », et<br />
masc. mùtljaga « bavard », sur mûtiti « troubler » ; prèëaga « traverse<br />
» et prïjecka, sur prîjek « qui est en travers », prijèciti « mettre<br />
en travers, empêcher » ; prljaga « terrain en pente, versant », et<br />
pHjuza ; prtljâg et prtjâga « bagage », sur prtiti et pHljati « charger » ;
502 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
rùpcaga et rupètina, augmentatifs de rupa « trou, fosse » ; sovùljaga<br />
« hibou », augmentatif de sôva ; slprâg « broussailles » en regard de<br />
slpak « arbuste épineux » ; et voir vinjaga « vigne vierge », § 1004.<br />
C'est en russe que -jaga constitue un suffixe d'une certaine<br />
productivité, expressif et familier, masculin ou des deux genres :<br />
bednjàga « un malheureux », de bédnyj ; brodjdga « un rôdeur »,<br />
sur brodit' « rôder » ; deljâga « un homme d'affaires, de métier »,<br />
sur délo, adj. delovôj ; dobrjdga et dobrjdk « un brave homme »,<br />
de débryj ; miljâga « une personne charmante », de milyj ; pluijâga<br />
« un coquin », sur plut ; skupjâga « un ladre », de skupôj ; xitrjàga<br />
« un homme adroit », de xitryj ; etc.<br />
Et fém. dvornjâga « chien de basse-cour », sur dvornâja (sobdka),<br />
sotnjdga « une centaine », élargissement de sôtnja ; masc. stormjâga<br />
« grande tempête » et vetrjdga « grand vent », sur storm et vêler ;<br />
mocâg et mocâga « marécage », pour *moôarû des autres langues<br />
(§ 1128) ; sutjâga « chicaneur », continuant v. r. sutçza « plaignant »<br />
( § 763) ; rabotjdga « grand travailleur » sur rabota, continuant v. r.<br />
rabotjagu « esclave », voir § 1015.<br />
En polonais, la forme est -içga, dans :<br />
komiçga «chaland», et r. komjdga «barque faite d'un tronc<br />
d'arbre », qu'on explique par le bas-allemand kommeken « terrine,<br />
bassin » ;<br />
siermiçga « souquenille, casaque de drap », et r. sermjâga (depuis<br />
le xv e siècle) « casaque de paysan », dont l'origine n'est pas établie.<br />
Mais wlôczçga « vagabond » est du groupe des mots à suffixe<br />
-çga, et ciemiçga « casse-tête » est un dérivé en -ga de ciemiç (§ 1013).<br />
§ 1015. Finale -çdzï. — En vieux slave :<br />
kladçdzï « puits », r. kolôdjaz' et kolôdjaz' et kolôdec, s.-cr. klàdenac<br />
avec la finale de studénac, emprunt à un dérivé germanique<br />
*kalding- de got. kalds « froid », à côté du calque studenïcï (§ 834) ;<br />
kunçdzï « prince », r. knjaz', s.-cr. knêz, de v. h. a. kuning ;<br />
pênçdzi « pièce de monnaie, denier », r. pénjaz', pol. pieniqdz,<br />
s.-cr. pjënëz, de v. h. a. phenning (§ 65) ;<br />
skulçdzl « pièce de monnaie » et slavon stïljazï, skljazï, v. r.<br />
scïljagû, de v. h. a. scilling ;<br />
userq(d)zï (Gr. Naz., Izb. Svjat.) «boucle d'oreille», d'un<br />
germanique *ausa-hring- (§ 3) ; et r. serjaz' au xvi e siècle, en regard<br />
de serïga (xiv e s.), mod. ser'gd, qui peut être un emprunt au turc,<br />
mais qui peut aussi s'expliquer en russe par une forme populaire<br />
*sérjag (§ 19), *séreg, plur. sér'gi.
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 503<br />
En slavon :<br />
*retç(d)zï « chaîne », r. réijaz', tch. relëz, pol. (w)rzeciqdz, et v. pr.<br />
ratinsis du slave, sûrement emprunt au germanique, où l'on a<br />
v. norr. rekk « lien », rekend- « chaîne », v. h. a. rahhinza, avec<br />
même substitution de -tçdzï à *-king- que dans :<br />
* vite. (d)zl «héros», r. vitjaz', tch. vitêz, s.-cr. vïtêz, de v. norr.<br />
vikingr « le Viking », une finale -king- devant donner en slave<br />
*-cçdzï qui a été dissimilé en -içdzï.<br />
Et toute une série de noms de peuples, en vieux russe et ailleurs :<br />
r. Varjâg « Yarègue », de v. norr. *vâringr ;<br />
v. r. Korljazi, sûrement de Karling « Carolingien » ;<br />
v. pol. Jacwing, r. Jatvjdg, nom de la tribu balte des Jatvings ;<br />
*Sïlçdzï« Silésien », tch. Slezy, pol. Slçzany et adj. (gôra) Slçza ;<br />
v. r. Kùlbjagu, r. Kolbjâgi, nom d'une confédération nordique,<br />
de v. norr. kylfingr ;<br />
r. Burjagi, Burezi dans la toponymie, comme le suédois Byringe ;<br />
slov. Kosêze et Kdsaze dans la toponymie, avec féminin kasêginja<br />
comme v. si. kunçgynji de kunçdzï, nom propre KoffévrÇyjç chez<br />
Constantin Porphyrogénète, que Ramovs rattache à un lombard<br />
Gausing.<br />
Dans les langues slaves, on a les substantifs :<br />
v. r. rabotjagu « esclave » (xv e s.), plur. robotjazi dans la traduction<br />
de Flavius Josèphe, et v. pol. robociqdz, v. tch. robotëz, sur robota<br />
« esclavage » ;<br />
r. ancien (xv e s.) sterljag- « sterlet », dont stérljad' est la déformation<br />
(§ 1006), de l'allemand Stôrling ;<br />
pol. mosiqdz « laiton », et tch. mosaz, de l'allemand Messing ;<br />
r. gavjdz, tch. havez, s.-cr. gàvëz et slov. gâvez, nom de plante,<br />
consoude, etc. ; et divers mots à finale obscure, s.-cr. brgljëz et<br />
brglijez, slov. bfglez, nom d'oiseau ; s.-cr. Ijëmëz, slov. Iqmez « chevron,<br />
perche pour maintenir le toit de chaume » ; slov. vêdez « savoir »<br />
et videz « vue », sûrement simples variantes de vêdez, videz ; etc.<br />
Des dérivés vieux-slaves en -giiuu (§ 995) doivent restituer<br />
des formes en -çdz- :<br />
sramçzivû (Pand. Ant.) « honteux, timide », slavon russe soromçèivu<br />
(Sbornik de 1076), et sramçzïlivù, soromçzïlivu, v. pol.<br />
sromiçzliwy (xv e -xvi e s., mod. sromiez-), et pol. wstrzemiçzliwy<br />
« sobre, abstinent » par croisement de wstrzymac « retenir » et<br />
de sromiçz-, avec la forme de base conservée dans le blanc-russe<br />
soromjdga « un(e) timide », masc. et fém.<br />
nesumçzivu (Cyr. Jér.) àSudwu^Toç « sans doute de soi, sans fausse<br />
honte », etc. », slov. sumezljiv « soupçonneux », et sumnezllv refait
504 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
sur sûmnez « soupçon », dérivé en -ez sur le thème sumn- de<br />
sumn(j)iv. Le lien avec SQmïnëti sç, su- (§ 65) « douter » est évident,<br />
mais difficile à préciser. Ce verbe est un dénominatif de *sçmïnja<br />
(§ 1024), qui restitue un thème sç-mïn- de composé ; la forme sumçz-<br />
fait supposer un dérivé en -g- de ce composé, "sç-min-g-,<br />
avec le même traitement de * ïng- que dans jçdza « maladie »<br />
(§ 1010), adj. tch. jîzlivfi (§ 998) refait, pour *jçz-, sur jëzë.<br />
§ 1016. Origines des suffixes en -g-. — Les formes en -g- sont<br />
pour une grande part des finales de mots d'emprunt ou servant<br />
à leur adaptation, de diverses origines, du turc, du roman, du<br />
germanique, etc. Les finales sont bien accueillies par la langue<br />
populaire, et elles connaissent de ce fait une certaine extension.<br />
Plusieurs d'entre elles peuvent devenir de véritables suffixes,<br />
qui s'ajoutent aux mots de la langue même : c'est la forme populaire<br />
et expressive de la productivité des suffixes d'emprunt,<br />
parallèlement à leur productivité dans la langue savante (§ 1193).<br />
Ainsi le français a une série de suffixes expressifs, en -asse, -ache,<br />
-oche, ital. -accio, -occio, etc., et l'argot ses suffixes déformants,<br />
« fortiche >>, ital. -iccio, de « fort », etc.<br />
Du suffixe expressif -jaga, productif en russe, une donnée permet<br />
de suivre l'histoire : rabotjâga « grand travailleur, bûcheur »<br />
succède à v. r. robotjaz-, rabotjagu « esclave » ; et de même le blancrusse<br />
soromjâga « timide » continue v. si. sramçz-. C'est l'indication<br />
que le suffixe -jaga — pour une part, car les origines des suffixes<br />
peuvent être diverses — est une adaptation populaire de l'ancienne<br />
finale -çdzï des emprunts au germanique. Mais ce n'en est pas la<br />
continuation simple : c'en est une adaptation, et rabotjâga est<br />
refait sur rabota, avec un sens nouveau, et avec un accent nouveau<br />
qui n'est pas celui du germanique et des emprunts r. pénjaz', etc.<br />
L'accent est celui de r. dial. rabotjâscij, et ainsi -jaga, de -edzï,<br />
-jagu, est devenu un élargissement en -ga du gérondif en -jâ.<br />
La même explication convient au suffixe r. -(j)ûga, et placûga<br />
« un pleurard » apparaît comme une déformation du gérondif<br />
placûci.<br />
Ces formations expressives sont plus ou moins nouvelles, et bien<br />
postérieures à la période d'unité balto-slave : ce qu'il y a de<br />
comparable en baltique et en slave, c'est l'utilisation d'un même<br />
suffixe germanique -ing- (§ 1008), mais de deux façons tout à fait<br />
différentes.<br />
§ 1017. Suffixe -ezï. — On mettra à part le mot d'emprunt<br />
v. si. papezï « pape », pol. papiez, tch. papez, slov. pâpez, du latin<br />
pappas par l'intermédiaire de v. h. a. papes, avec -es de -as en<br />
syllabe fermée inaccentuée.
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 505<br />
On a un suffixe -ezï en vieux slave dans :<br />
mçtezï « trouble », r. mjaléz, tch. mêlez, s.-cr. mêlez, sur mçte-,<br />
mçsti « mêler, troubler » ;<br />
platezï (Ham.) « amende » et v. r., r. mod. plalëz « paiement »,<br />
v. pol. placiez, sur platiti «payer» (§ 784).<br />
En slavon et vieux russe :<br />
grabezï « rapine », r. grabéz, pol. grabiez, s.-cr. grâbez, sur grabiti<br />
«ravir» (§ 782) ;<br />
lupezï « pillage », r. lupëz, pol. lupiez, tch. loupez, et s.-cr. lûpez<br />
au sens de «voleur», sur lupili «piller» (§ 756) ;<br />
gradezï « enceinte» (v. r., xm e s.), et comme slavonisme r. mod.<br />
gradéé, vieux s.-cr. gradez ;<br />
gubezï « courbure » (v. r., xm e s.), r. mod. gibëz ;<br />
padeêï « chute », r. pddëz « chute » et « épizootie », et slavon<br />
padéz « cas » (gr. •n.x&mç, lat. casus), s.-cr. pàdëê « chute » (dial.)<br />
et pâdez « cas » ;<br />
palezï « bûcher, incendie », r. palëz, s.-cr. pdlez, slov. pâlez ;<br />
pravezï « exaction » (v. r., xv e s.), r. pravëz « recouvrement forcé<br />
d'une dette », sur prâvit' « exécuter un jugement » ;<br />
rubezï « pillage » (v. r., xn e -xin e s.), sur rube- « piller » (§ 432) ;<br />
rubezï « entaille, bordure » (v. r., xiv e s.), r. rubéz « borne, limite »<br />
et rubëz « coupe », sur le thème rçb- (§ 764) ;<br />
vrulezï «vis» (v. r.), r. vertëz «rotation», bulg. (vodo-)vârléz<br />
« tourbillon (d'eau) », s.-cr. vrtez « vertige » ;<br />
zybezl « vacillement » (v. r., xv e s.), slov. zîbez.<br />
D'autres mots sont attestés également à date ancienne ou se<br />
retrouvent dans plusieurs langues :<br />
v. r. cerlezï (xiv e s.) «trait», r. ëerlëz «tracé, plan», sur *ëïrte-,<br />
et s.-cr. criez, mais comme russisme ;<br />
r. mâdez « tache sur la peau », s.-cr. mâdez, slov. mâdez, sur un<br />
thème mad- non identifié, mais qui pourrait être la forme à allongement<br />
vocalique du thème mod- de l'adjectif *modru « bleu foncé,<br />
livide» (§ 1113) ;<br />
r. molodëz « jeunesse », pol. mlodziez, et tch. et s.-cr. mlâdez,<br />
slov. mlâdez, mais sans doute par extension du mot russe ou<br />
polonais, car il n'est pas vieux-tchèque, et en serbo-croate il n'est<br />
que de la seconde moitié du xvin e siècle ;<br />
r. sverbëz «démangeaison», sur sverbét', et s.-cr. s(v)rbeé;<br />
slavon serbo-bulgare lukumezï, bulg. lâkméz « arrangement,<br />
convention », sur tûkûmu « égal » ( § 1065) ;<br />
pol. kradziez « vol », tch. krâdei, s.-cr. ancien kradez ;<br />
s.-cr. ancien prateé « marchandise », sur prâiiti « expédier,<br />
accompagner » (§ 1026), et slov. prâiez « bagage » ;
506 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
s.-cr. ancien skubeé « arrachement des cheveux », et slov. skûbez,<br />
sur skube-.<br />
Dans les langues slaves :<br />
tch. drubez « volaille », sur drob- ( § 732) ;<br />
pol. drapiez (ancien) « brigandage », sur drapac « gratter, piller » ;<br />
lubiez « volupté », sur lubie ; et avec extension de -z dans odziez<br />
«vêtement» pour dial. odziej (§ 751), et dans przedaz, sprzedaz<br />
«vente» pour l'ancien przedaj (§ 791).<br />
Le suffixe est largement représenté en serbo-croate : bàdez<br />
« point de côté, poignard », drijèmez « somnolence », krpez « raccommodage<br />
», lavez « aboiement » ; mutez « trouble », sur mûtiti,<br />
à côté de l'ancien mêlez « confusion » ; prdez « pet », sràmez « honte,<br />
vergogne », stârez « vieilles choses » et lûpez au sens de « voleur ».<br />
De même en bulgare : kipéz « effervescence », kopnéz « aspiration,<br />
désir » sur kopnée- « se languir », sitnéz « broutilles », etc.<br />
Et particulièrement en slovène : dêlez « (cote-) part » sur deliti<br />
« partager », gnêtez « presse » sur gnéte- « presser », Irpez « patience »,<br />
lrù(h)lez «pourriture»; pilez «volaille», ribez «râpe» sur ribati<br />
« frotter, râper » (§ 575), stdlez« état, classe sociale » d'un plus ancien<br />
stâlis (§ 1153) ; mûdez «retard» et «homme qui se retarde, temporiseur<br />
», et tout un type de noms de personnes : silez « tyran »,<br />
et sur adjectif dôlgez « homme en longueur », pobôznez « (faux)<br />
dévôt » sur pobçzen, malomârnez « un indifférent » et maloprîdnêz<br />
« mauvais sujet » sur malomâren, malopriden, nesianovîlnez « un<br />
inconstant » sur neslanovilen, etc.<br />
En russe, le suffixe garde une petite productivité : galdëz<br />
« criaillerie » sur galdét' « brailler », kutëz « bamboche » sur kutit',<br />
terpëz « patience » dans v terpëz « ce qu'on peut supporter » et<br />
nevterpëz « à n'y pas tenir » (et névlerp', § 770) ; avec féminin en -ka :<br />
delëz « partage » et delëzka, kormëz et kormëzka « action de nourrir »,<br />
dolbëz « entaillure, mortaise » et v dolbëzku « par cœur » de dolbit'<br />
« entailler » et « approfondir, apprendre par cœur », v zubrëz et<br />
v zubrëzku « par routine » sur zubrit'. La forme du suffixe est -éz<br />
dans les mots slavons : mjaléz, gradéz, padëz et padéz, rubëz et<br />
rubéz.<br />
§ 1018. Origine de -ezï. — Les mots en -ezï sont normalement<br />
masculins : en vieux slave, le Suprasliensis a 12 exemples de<br />
mqtezï masculin, et il faut donc, dans mçtez' straslii dëistvujQstija<br />
54427 « le trouble des passions qui opère », voir un accord fautif<br />
d'après le féminin Tapa/j] du grec. Mais des mots à sens de collectifs<br />
sont traités comme féminins : r. molodëz « jeunesse, les jeunes gens »<br />
et pol. miodziez, tch. mlâdez, s.-cr. mlâdez (sûrement russisme),
[§ 1002] SUFFIXES EN -b-, -d-, -g- 507<br />
le bulgare distinguant mladéz «jeunesse», fém., et mladéz «jeune<br />
homme », masc. ; r. xolosïèz « les célibataires » sur xolostôj, tch.<br />
drûbeé « volaille », s.-cr. sldrez « vieilleries ». En polonais, grabiez,<br />
lubiez, lupiez, kradziez sont actuellement féminins, mais étaient<br />
masculins en vieux polonais, de même en tchèque krâdei, loupez.<br />
Le suffixe -eïl pourrait dériver de *-ez-go- aussi bien que de<br />
*-eg-yo-, mais dans aucun des deux cas il ne s'explique par le slave,<br />
et il n'est pas analysable. Il faut y reconnaître un suffixe<br />
d'emprunt : à la forme romane du latin -aticum, ital. viaggio et<br />
fr. « voyage » de viaticum, ital. selvaggio et fr. « sauvage » de silvaticum.<br />
En français, le suffixe -âge se présente dès le début avec une<br />
très grande extension, qui atteste un fort développement dès<br />
le latin vulgaire de Gaule, et particulièrement avec des mots de<br />
la civilisation franque et qui indiquent des droits et des redevances :<br />
féage, péage, affouage, etc. Il apparaît que le slave a reçu ce suffixe<br />
roman par l'intermédiaire de l'allemand, avec l'inflexion a : e<br />
du vieux haut allemand. D'abord limité à la langue vulgaire, et<br />
rare pour cette raison dans les textes vieux-slaves, il a pénétré<br />
rapidement dans la langue littéraire, et il a pu prendre des valeurs<br />
abstraites, donner des slavonismes en russe, des russismes en serbocroate.
CHAPITRE XXVIII<br />
SUFFIXES EN -/-<br />
§ 1019. Suffixe ~(j)ï. — Ce suffixe, i.-e. *-yo-, était originellement<br />
d'emploi trop étendu pour qu'une comparaison avec les autres<br />
langues indo-européennes soit utile, et celle avec le baltique est<br />
brouillée du fait de la confusion en baltique des thèmes en -yoet<br />
des thèmes en -i- (§ 136). En slave, le type des adjectifs en ~(j)ï<br />
n'est plus productif, à l'époque du vieux slave, et de façon déjà<br />
limitée, que dans la formation d'adjectifs possessifs (§ 955). Dans<br />
la formation des substantifs, on n'a plus que les vestiges, mais<br />
nombreux, d'une productivité ancienne.<br />
On trouve en vieux slave :<br />
alucï (II Cor. XI, 27, Pand. Ant.) « faim », sur al(u)kati ;<br />
grazdï « étable », bulg. dial. grazd « enclos », sur graditi ;<br />
klicï « cri », sur kliknçti ;<br />
kricï « cri », sur kriëali, kriknçti (§ 596) ;<br />
nozï « couteau », sur -noziti ( § 608) ;<br />
placï « pleurs », sur plakati ;<br />
plistï « bruit, tumulte », sûrement sur un verbe en -skati parallèle<br />
à pljuskati « éclater » (§ 561), mais sur un thème sans rapport avec<br />
*pleusk-, car le Supratliensir a toujours pli- sans signe de<br />
mouillure ;<br />
pluzï « ce qui glisse », reptile (Virg.), anguille (Athan.), limace,<br />
escargot, tch. pliz, slov. pôlz, s.-cr. pûz, sur *pïlznQti (§ 498) ;<br />
pozdï (Upir') « le dessous », sur podu ;<br />
prëzdï « le devant » (Gr. Naz.), locution su prëzda (Upir') « par<br />
devant », sur prëdu ;<br />
prystï (Gr. Naz., Izb. Svjat.) « enflure, pustule », pol. pryszcz,<br />
s.-cr. prîst, sur pryskali (§ 561) ;<br />
sëcï « massacre, combat » (Ps. CY, 30 et CLI, titre), sur sëk-,<br />
masculin dans J. Ex., Upir', etc., puis féminin dans ukr. sic, tch.<br />
seë, slov. sêë, s.-cr. ancien sjec (et sëca, § 1022) ; en slavon, les
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 509<br />
composés druvosëëï « coupeur de bois » et sënosëcï « prairie » sont<br />
masculins ;<br />
smruëï « siphon, typhon » (J. Ex.), r. smerë, sur smrukati « aspirer<br />
l'eau», postverbal smrûkû (§ 814) ;<br />
strazï «gardien», r. stôroz, en regard de *sterie- (§ 771), et le<br />
vocalisme est celui de r. storozit', v. pol. strôzyc siç, s.-cr. strdziti<br />
(depuis le xiv e siècle), qui a dû être itératif avant de devenir<br />
dénominatif ;<br />
vozdï « guide », sur voditi ;<br />
vupljï « clameur », sur vupiti ;<br />
zazdï « le derrière », chez Upir' et dans Supr. 911S ne dadimû<br />
zazdç [j,-/] S«(i.£v verra « ne présentons pas le dos », acc. plur. masc.<br />
avec le pluriel du grec, et non gén. sing. fém. (pour slov. zâje,<br />
plur., voir § 1024), locutions sû zazda « de derrière » à côté de su<br />
zadi (§ 719), o zaédi (Athan.) «par-derrière», sur l'élargissement<br />
zad- de za-.<br />
Avec préfixe :<br />
otudazdï (Cyr. Jér.) « rétribution », sur le thème de présent dadde<br />
dati ;<br />
razdëljï « division, frontière » (J. Ex., Izb. Svjat.), à côté du<br />
postverbal razdëlu (§ 749) ;<br />
sçdluzï (Gr. Naz.) «débiteur», proprement «qui a dette avec»<br />
(§ 1222);<br />
sçlozï et sulozï (Michée, VII, 5, Izb. Svjat.) « qui partage la<br />
couche » ;<br />
obrçëï (Ham.) « bracelet », et en slavon « brassard (de l'armure) »,<br />
r. ôbruë « cercle de tonneau, cerceau », pol. obrçcz « cercle, bandage<br />
de roue, pneu », s.-cr. ôbruë, slov. obrôë, masculin, sauf tch. obruë,<br />
fém., mais à côté de obrouëek : le mot désignait le grand bracelet<br />
entourant le haut du bras comme un brassard, cf. lit. apirankê<br />
« bracelet » ;<br />
sçpïrjï « qui dispute avec, adversaire », v. pol. sqpierz, tch.<br />
souper ; et slov. sôper, mod. zôper « contre », devenu adverbe et<br />
préposition.<br />
On trouve d'autres mots en slavon et dans les langues slaves :<br />
luëï « lumière », r. luë « rayon » ; s.-cr. lûë « torche, éclat de bois<br />
résineux », masculin, et aussi féminin, de même que slov. lue,<br />
v. tch. lue « torche » et mod. louë « copeau de résineux » ; sur la<br />
racine i.-e. *leuk « briller » qu'on retrouve sans doute dans le<br />
comparatif luëii (§ 290), ; et il peut, lui et le féminin v. si. luca<br />
« rayon » (1022), continuer l'athématique de base de cette racine,<br />
lat. lux (fém.) ;<br />
sïëï «urine», sur sîcati (§ 602) ;
510 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
sçvrazï « ennemi » (§ 1222) ;<br />
pol. kurz « poussière (épaisse) », tch. kour « fumée », en regard de<br />
kuriti ( § 757) ;<br />
pol. kwap «duvet», gén. kwapiu (§ 778), est isolé; de même<br />
kwiel « appeau » sur kwilic (v. pol. kwielic) « se lamenter, piauler »<br />
(§ 798) ; et widz «spectateur», mais wiedz «connaisseur», subst.,<br />
est l'adjectif v. si. vëzdï « qui sait » (§ 956) ;<br />
slov. vodotàc « canal », masc., mais fém. dans r. vôdotôë (§ 717).<br />
Pour skob(ï)ljï et sopl(j)ï, voir § 1056.<br />
§ 1020. — Beaucoup d'autres mots de la flexion mouillée en<br />
*-yo- sont moins clairement des dérivés en -(j)l.<br />
Des mots *bljusëï « lierre », pol. bluszcz, etc., konjï « cheval »,<br />
slavon brostï «garance», s.-cr. broc, etc., lun(j)ï «vautour», r.<br />
lun' «busard» (§ 1083), sont inexpliqués» — (ëaro-)dëi est un<br />
postverbal (§ 751), de même (prë-)siai et le slavon grai «chant<br />
d'oiseau» en regard de grajati «croasser» (§ 791) ; — v. si. rai<br />
« paradis » est un emprunt à l'iranien, av. rây- « richesse », comme<br />
bogu « dieu » (§ 3).<br />
V. si.Jtljuëï « clé » est un dérivé à suffixe -ci (§ 1041), mais non<br />
vraëï « médecin », qui n'a évidemment rien à faire avec r. vrai'<br />
«dire des menteries » (§ 473): le mot apparaît en vieux slave,<br />
dans les langues méridionales, s.-cr. vrac « magicien, devin » et<br />
anciennement « médecin », etc., et en russe, mais visiblement comme<br />
slavonisme ; on ne sait pas quel était son thème de base, *vrâ- ou<br />
*var-, et le rattachement à *vurëati « grommeler » (§ 596) ne peut<br />
s'accepter que faute de mieux.<br />
V. si. stryi (Ham.) «oncle paternel » vient de i.-e. *pturyo- (§ 35),<br />
et ui (Ham.) « oncle maternel » de *auyo-, v. pr. awis, lat. auus<br />
« grand-père » et auia « grand-mère » ; — tch. kyj « massue », etc.,<br />
se retrouve dans lit. kûjis « battoir », v. pr. cugis « marteau », et<br />
c'est donc le dérivé d'une forme *kû- du thème du verbe kove-<br />
« forger », lit. kâuti « battre ». Pour krai « bord », voir § 42.<br />
Et pour mçzï « homme », § 40 ; pour duzdï « pluie », § 159 ; pour<br />
upirïa. revenant », netopirï« papillon », § 171. Le mot *çzï « serpent »,<br />
lit. angïs, lat. anguis (§ 77), doit être un ancien thème en -i-, et il<br />
peut en être de même pour le slavon jezï « hérisson », r. ëz, s.-cr.<br />
jêz, lit. ezys, ëzis, sur thème i.-e. *egh-, gr. t/Zvoç, v. h. a. igil ;<br />
et pour molï (Pand. Ant., Izb. Svjat.) «mite, teigne», pol. môl,<br />
gén. môla, tch. mol, s.-cr. môlj, slov. mdlj (r. mol', fém.), sur le<br />
thème ancien mol- de melje- «moudre» (§ 535), cf. got. malô «mite »<br />
(fém.).<br />
Le mot kosï « corbeille » ne bénéficie que d'un rapprochement<br />
avec lat. quâlum « panier tressé », de * quasi-, diminutif quasillus.<br />
Y. si. or(j)ï (Ham.) «cheval», adj. orjevitu «en rut» (§ 990),
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 511<br />
tch. or, v. pol. (h)orz, qui ne peut pas être un emprunt au moyen<br />
haut-allemand ors, ros (mod. Ross), a sûrement désigné l'étalon et<br />
doit être apparenté à lat. ariës « bélier », arm. aru « mâle ».<br />
Y. si. pïnjï (Virg.) « souche, tronc d'arbre » se rattache mal à<br />
pïne-, pçti « tendre » et est pour cette raison comparé à skr. plnâkam<br />
« bâton », gr. TUW.H, « planche », etc.<br />
V. si. plastï « casaque, manteau », r. plasc, etc., a un dérivé<br />
plastanica « tissu de lin » qui paraît indiquer une matière ( § 880) ;<br />
il ne peut pas avoir de rapport avec platu « pièce de linge » (§ 1162),<br />
et il n'en aurait que de vague et peu satisfaisant avec le thème<br />
plask- « plat » (§ 1065) ou le thème de plastu « couche » (§ 1161) :<br />
il convient mieux d'y voir un dérivé de plaxta « grosse toile »,<br />
emprunt au germanique (§ 1166).<br />
Le mot rubl(j)ï est uniquement vieux-russe, et mod. rubl',<br />
et il désigne le « rouble » depuis le xiv e siècle, mais dans un exemple<br />
de la Chronique de Kiev (année 1071) il indique un garrot qui doit<br />
être fait d'un tronçon de bois : c'est donc un dérivé de rubit'<br />
« couper »(§ 764).<br />
Slavon visï « sparte », masc., et pol. wisz « jonc », slov. vîs (masc.<br />
et fém.), r. vis (fém.), est *weis-yo-, lit. viksvà « plante des marais »,<br />
germ. weis-, wis-, v. h. a. wisa « prairie, Wiese ».<br />
R. xrusc « hanneton », slov. hrçsë, pol. chrçsc («râle des genêts »),<br />
et r. xrjasc « cartilage », est sur *xrqs(l)nçli et à côté du postverbal<br />
xrçstu (§ 764).<br />
Un substantif netçzï, ou netçza (§ 1022), «l'oisif, le paresseux »,<br />
sur l'adjectif slavon netçgu (§ 821), paraît attesté comme génitif<br />
pluriel dans pçtïje netçzï ôSol àspyôv Pand. Ant., citant Prov.<br />
XV, 19.<br />
Le slavon russe suxolapljl « mouette » est à lire plutôt suxolaplja<br />
(§ 1026). Pour pol. oglôw «licou», masc., gén. oglowia, et fém.,<br />
voir § 772 ; pour le slavon ovostï, voir § 1021.<br />
Deux mots obscurs appellent des commentaires :<br />
*vygn(j)ï, dans slov. vîgenj, gén. vîgnja, «forge» et «marteau<br />
de forge », s.-cr. vîganj « forge », tch. vyhen « cheminée » et « forge »<br />
(slovaque vyhna, fém.), h. sor. wuhen «cheminée», gén. -h(e)nja,<br />
avec -u- de -y- après labiale comme dans wudra « loutre » de vydra.<br />
Un thème ug- dans lit. ûgys « croissance » ne convient pas pour le<br />
sens, et il faut admettre un lien avec ogni « feu ». La divergence<br />
à l'initiale entre si. ognï, lit. ugnis et lat. ignis (§ 39) se justifie mal<br />
par la phonétique et peut être d'origine morphologique, en s'expliquant<br />
par la normalisation d'une ancienne flexion à degrés vocaliques<br />
alternants de la racine, *en-, *on-, *çi- et balto-slave un-<br />
(§73), avec réduction à u-. Le degré long de si. *ugn- pourrait alors
512 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
se comparer de quelque façon à celui de *ûdrâ « loutre » sur thème<br />
ud- (§ 1117).<br />
V. si. grïmëzdï « chassie », adj. grïmëzdivu (§ 995). Le mot ne se<br />
retrouve que dans slov. krmézelj et krrnélj, s.-cr. k'rmëlj (§ 1060).<br />
L'altération de la finale résulte visiblement d'une réfection sur<br />
l'adjectif, plus usuel que le substantif, slov. krmezljiv avec la<br />
substitution courante de -l(j)iv- à -ivu- ; et elle laisse subsister<br />
en slovène l'élément -z- qui ne peut venir que de *-zdy- ou *-zgy-<br />
(§ 29). C'en est assez, semble-t-il, pour reconnaître un composé<br />
dont le second terme était mëzga « sève, suc qui suinte » (§ 1010),<br />
verbe *mëzdziti, pol. miazdzyc « réduite en pulpe », slov. méziti se<br />
« prendre de la sève », le premier terme, v. si. grï- ou grû-, n'étant<br />
plus identifiable.<br />
§ 1021. Suffixe ~(j)e. — Tous les exemples sont d'époque<br />
vieux-slave :<br />
*aje «œuf», s.-cr. jâje, etc. (§ 922), en regard de lat. ôuum,<br />
gr. àAov, o)6v, et germ. *ayya-, v. norr. egg, v. h. a. ei. Le slave<br />
répond le mieux au germanique, et il pourrait aussi représenter<br />
*oyyo- avec allongement de o devant // (§ 42). Le baltique a des<br />
mots nouveaux : lit. paùtas, v. pr. pawtte, et lit. kiausinis, lette<br />
uôla.<br />
gor(j)e «malheur à, oùod », adverbe, mais le mot est également<br />
substantif dans v. r. et mod. gôre « malheur, chagrin », gén. gôrja,<br />
tch. hore, v. pol. gorze, slov. gorjê. Ce n'est sûrement que le neutre<br />
gorje du comparatif gorjii « pire » devenu adverbe, et le passage de<br />
l'adverbe à une forme fléchie apparaît dès le vieux slave dans<br />
Hés. CXLIII, 14 ni gorë ni vuplë bë « il n'y avait ni hélas ni<br />
gémissement », gr. otks oùal OUTS XOTOTOÇ fjv.<br />
loze « couche », sur leg-, loziti « coucher ».<br />
mor je « mer », voir § 166.<br />
çze « lien », sur vçze- « lier », postverbal çza ( § 762).<br />
pleste « épaule », r. pleëô, etc. La forme baltique est lit. petys,<br />
gén. pëeio, et petis, gén. peiiës (§ 169), v. pr. pette, sur la racine<br />
* pet- de lat. patëre «être ouvert», gr. TOTavvô|u «j'étends»; la<br />
forme slave doit en être l'altération par rattachement à la racine<br />
*plel- de lit. (is-)plësti «élargir», que le slave conserve sûrement<br />
avec un remaniement dans l'adjectif plytùkû «plat» (§ 984).<br />
polje « espace découvert, champ, plaine », avec les adjectifs<br />
r. pôlyj «ouvert, libre» (§ 820) et *polnu, slov. plân, sor. piony<br />
(§ 1070), en regard de lat. palam «ouvertement», et hitt. palhis<br />
« large » dont le thème palh- peut rendre compte, par *plah- (§ 98),<br />
de la forme plâ- de lat. plânus « plat, plan », lit. plôti « aplatir »<br />
(§ 509). Et voir r. pol « plancher », § 736.
[§ 1022] SUFFIXES EN -j- 513<br />
plusta, plur. neutre, « poumon », pol. ptuca, s.-cr. plûca,<br />
secondairement plju- dans tch. plice, slovaque pl'uca ; et lit.<br />
plaûëiai, v. pr. plauti. La comparaison avec lat. pulmô, gr.<br />
TÎXE!JIJ,C.)V, fait penser à une forme substantivée d'un adjectif<br />
en *-tyo- (§ 958), sur un thème *pleu- qui ne peut guère être celui<br />
de *plewe- « voguer, flotter », mais qui pourrait être celui du grec<br />
TTXSUOK « flanc ».<br />
veste « conseil, assemblée », r. véce, etc., sur le thème vël- (§ 747).<br />
ocruste est connu par un exemple unique, Ps. LXXVII, 28,<br />
où le mot traduit axvjvcopxToc au sens de « campements » : c'est un<br />
dérivé de o-crute- « tracer » ( § 429) indiquant un camp tracé,<br />
délimité.<br />
ovoste « fruit », bulg. ovôste, tch. ovoee, s.-cr. voce, et ovostï en<br />
rédaction slavonne, pol. owoc, ukr. ôvoc (r. ôvosc, slavonisme).<br />
Le mot est senti comme collectif en serbo-croate et en bulgare,<br />
avec singulatif en s.-cr. vëcka (§ 887), bulg. ovôska, et des altérations<br />
en ovostije (Hés., § 925), bulg. ovôstija, slov. ovôcje. Le flottement<br />
du masculin et du neutre s'accorde avec l'hypothèse qu'il s'agirait<br />
d'un adjectif substantivé, et l'on pense alors, aucun rapport<br />
n'étant possible avec le germanique, v. h. a. obaz, mod. Obst,<br />
à un adjectif en *-tyo- ; et comme ces adjectifs sont bâtis sur des<br />
formes adverbiales (§ 958), à un dérivé indiquant «ce qui se<br />
détache, descend (de l'arbre) » de l'adverbe av. avâ, skr. ava « de »,<br />
compar. avara- et superl. avama- «(le) plus dessous», adj. avânë-<br />
« dirigé vers le bas » (si. ovu, § 231).<br />
Ces exemples attestent une productivité du suffixe -fj)e, mais<br />
ancienne. Si elle a cessé, c'est parce que ~(j)e a été entièrement<br />
supplanté par son élargissement -ije (§ 934). Mais elle s'est continuée<br />
dans un autre élargissement, en -iste (§ 954).<br />
SUFFIXE ~(j)a<br />
§ 1022. — Les formations, ici, sont très nombreuses, et la<br />
productivité du suffixe s'est maintenue à peu près jusqu'à l'époque<br />
moderne, sous la forme de développements parallèles, comme<br />
ceux en -ï, aux postverbaux en -a et d'une confusion partielle<br />
avec eux (§ 721).<br />
Sur thème terminé par consonne, on a en vieux slave :<br />
dalja «le lointain» dans/la locution vu daljç «au loin», tch.<br />
date surtout dans des locutions adverbiales, slov. ddlja, sur le<br />
thème dal- du comparatif dalje, verbe u-daliti (§ 289), et voir dalï,<br />
§ 718 ;<br />
17
514 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
duplja (Gyr. Jér.) « creux, cavité », s.-cr. dûplja, slov. dûplja,<br />
tch. doupë « tanière », sur le thème dup- de l'adjectif dupljï (§ 956) ;<br />
dusa « âme » à côté du postverbal duxu (§ 755) ;<br />
*gnesta «presse» dans l'adjectif gn(j)estïnu (Gr. Naz.), slov.<br />
gnçëa, de gnete- (§ 804) ;<br />
groblja (J. Ex., Ham.) « fosse », russe ancien grôblja, pol. grobla<br />
« digue », slov. grôblja « tas de pierres, ruines » ; et slavon greblja,<br />
r. gréblja « râtelage, action de ramer » et « digue », slov. grçblja<br />
« racloir, tire-braise » : il est probable que groblja est un remaniement<br />
de greblja, sur grebe-, par réfection sur grobu (nouveau, § 725) ;<br />
kaplja « goutte », r. kâplja, sur kapali ;<br />
koza « peau », de koza « chèvre », plus récent que azlno (§ 1079) ;<br />
kçsta « hutte », ukr. kûëa « étable », slov. kçëa « cabane », s.-cr.<br />
kïlca « maison », sur kçt- (§ 766) ;<br />
kroplja « goutte », v. tch. krôpë, v. pol. kropia (mod. kropla,<br />
§ 28), r. kràplja d'après kâplja, sur kropiti « asperger» (§ 739) ;<br />
krumlja « nourriture », r. kôrmlja, pol. karmia, sur *kurm-<br />
(§815);<br />
kuplja « achat, commerce », r. kuplja, prikûplja, sur kupili ;<br />
luca «rayon», s.-cr. luca (semi-slavon), et r. lucâ «copeau de<br />
résineux », voir luëï, § 1019 ;<br />
luza « mensonge », sur lûgali, à côté de lu&ï « mensonger » (§ 956),<br />
et s.-cr. làza « un menteur » (§ 1027) ;<br />
moëa (Gr. Naz., Upur') « trempée, pluie », s.-cr. môëa « temps<br />
pluvieux », r. moëâ « urine », sur mok- ( § 740) ;<br />
nçzda, nuzda « contrainte » sur nuditi ;<br />
pista « nourriture », s.-cr. pïca, tch. pice « fourrage », sur pit-<br />
(§ 440);<br />
pïrja «dispute», raspïrja « dissension », prëpïrja (I Cor. II, 4)<br />
« persuasion », et slavon ispïrja « excuse », sçpïrja « litige », sur<br />
pirëti (§ 591) ;<br />
pusta (Hés. LVII, 10) « lieu inculte », r. pûsëa, pol. puszcza<br />
« désert, grande forêt », composé mçsopusta (Izb. Svjat.) « carême »,<br />
sur pustû et pusiiti ;<br />
ruzda « rouille », r. rza, s.-cr. Ma, en regard de rudëti sç « rougir »<br />
(§ 599);<br />
sazda (Upir') « suie », r. sâza, pol. sadza « suie » et « dépôt, vivier »,<br />
slov. sâja « suie » et « plantation » et plur. sâje « blessure de la<br />
selle », sur saditi ; ailleurs lit. sûodzios, fém. plur., « suie », avec uo<br />
ancien en regard de sodinti « asseoir, planter » à o nouveau (§ 49),<br />
et v. norr. sôt (neutre), angl. sooi ;<br />
sëëa (Izb. Svjat., Ham.) «massacre, combat» (et masc. sëcï,<br />
§ 1019), r. séca « coupe, percée dans une forêt », s.-cr. sjëca « abattage<br />
», sur sëk-, composés zmijesëëa (Izb. Svjat.) en face de Sir.
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 515<br />
XII, 13 (17) èfioSyxToç «mordu par un serpent», slov. senoséca<br />
« fenaison » ;<br />
stelja « plafond, toit » et postelja « literie », s.-cr. stelja « litière »<br />
et postelja « literie », r. postélja, sur stelje-, voir § 540 ;<br />
slraza « garde », r. storôza, na-, etc., et v. r. prostoroza « mégarde »,<br />
pol. strôza, sur *sterg- ;<br />
susa « terre ferme » (gr. tj £y)pâ), r. sûsa « sécheresse », s.-cr. sûsa<br />
« sécheresse » et sftsa « grange », sur suxû et susili ;<br />
îeca (Pand. Ant.) «coureur», masc., prëduteëa «précurseur»,<br />
masc. (et fém., Athan. 2012), ediroteëa (Const. Pr.) « (Élie) qui court<br />
dans les airs, odôepoSpofAoç », r. skorotéca « courrier rapide », et<br />
fém. utéca « fuite, coulage », sur tek- ; et Supr. 3496 vodotëëç, acc.<br />
plur., de -tëëa ou masc. -tëëï, à côté de fém. vodotëëï « torrent (§717),<br />
r. vodotéëa ;<br />
tçza « litige » et slavon sutçza, russe ancien ijâza, v. r. sulçza<br />
« plaignant », sur tçdzat'i « contester », sutçdzati sç, itératif de legnçii<br />
«tendre» (§ 494) ; slov. raztçza «grande ouverture» sur raztçgnili<br />
« étendre » ; pol. ciqza « grossesse », tch. tize « poids », s.-cr. téza<br />
« gravitation » sur tqgnçti « être lourd, peser » ; et netçza, ou netçzï<br />
(§ 1020), « oisif » sur tçzati « travailler » (§ 763) ;<br />
tïlja « corruption » et « mite », sur tïlëti ( § 583) ;<br />
tïljç, plur., dans les locutions na tïljç, na tïljaxu (Pand. Ant.,<br />
Théod.) « sur le sol ». Le nom du « sol » n'est attesté en rédaction<br />
vieux-slave que dans na tïlëxu Supr. 8410, et l'on n'a ailleurs que<br />
le pluriel tïla (Upir', Const. Pr.), un singulier r. tlo, pol. tio « fondement<br />
» n'étant attesté que plus tard, et surtout dans des locutions<br />
comme r. do lia, de même que tch. tla « plancher », fém. sing., s.-cr.<br />
ilë, fém. plur. Thème *tel-, *tol- dàns skr. talam « sol », v. pr. talus<br />
« plancher d'une chambre », et til- dans lit. tilés « plancher du fond<br />
d'un canot », lette tilât « étendre » ; et voir v. si. gtïlu « troué »,<br />
§ 1223 ;<br />
tlusta (Ps. CXL, 7, Ham.) «épaisseur», r. tôlsëa «masse», slov.<br />
tôlsca « graisse », s.-cr. tûsta « grande quantité », pol. ttuszcza<br />
« foule », sur *tùlstu « gros » (§ 408) ;<br />
tçëa « pluie d'orage », r. tûëa « nuages orageux », pol. tçcza « arcen-ciel<br />
», s.-cr. IMa « grêle » et slov. tçëa, rapproché de lit. lânkus<br />
« épais » ;<br />
veëerja « dîner, souper », r. vécerja, et verbe veëerjati, sur veëeriï<br />
« soir » ;<br />
volja « volonté », r. vôlja, s.-cr. vôlja, et slov. izvôlja « choix »,<br />
en regard de voliti « préférer » ( § 614) ;<br />
vonja « odeur », s.-cr. vonjp., slov. vçnja, tch. vùnë, sur la racine<br />
i.-e. *an-, si. gxati et thème vonj- (§ 767) ;<br />
vraza (Ham.) « divination », bl.-r. vorôza, v. tch. vrâzë, slov.<br />
vrâza « superstition », à côté de vrazïba (§ 910), sur *vïrg- (§ 771) ;
516 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
zarja « éclat », r. zarjâ, tch. zâre, sur le factitif o-zariti « illuminer »<br />
de zïrëti « regarder » ( § 790) ;<br />
zemlja « terre », voir § 175 ;<br />
zorjç « aurore », pluriel en vieux slave, puis pol. zorza, s.-cr.<br />
zdra, sing., à côté du postverbal -zoru (§ 728) ;<br />
zelja « deuil », s.-cr. zèlja « désir », sur zel- (§ 584) ;<br />
zqida « soif », r. zâzda pour v. r. zaza, s.-cr. zêda, zêd (v. tch.<br />
ziezn, § 1090), sur zqdali (§ 553).<br />
§ 1023. Formes à préfixe et composés. — En vieux slave :<br />
srudobolja « parenté », s.-cr. srdôbolja « dysenterie » et srcàbolja<br />
« affection cardiaque », sur boljii et bolëti, voir § 290 ;<br />
nabudja ( J. Ex.) « sollicitude, soin », sur na-budëli « veiller sur »,<br />
voir § 1027 ;<br />
prëdazda (Cyr. Jér.) « trahison », prodazda (Ham. 36519) « vente »,<br />
r. proddza, vuzdazda (Pand. Ant.) « rétribution », et slavon dazda<br />
« donation », razdazda « distribution », composé rçkodazda (Mikl.)<br />
« dispensateur » (gr. xsipoSôxyç ou -Soaix ?) ; sur le thème daddu<br />
présent de dati, puis -daja, § 1025 ;<br />
nadezda « espoir », odezda « vêtement », sur le thème ded- du<br />
présent *dedje- de dëti (§ 533) ; r. nadézda et pop. nadëza, et<br />
réfection sur le thème dë- dans pol. nadzieja, tch. nadëje, slov.<br />
nâdeja (s.-cr. nâda et nâd, § 819) ; r. odézda et pop. odëza, s.-cr.<br />
ancien odezda et odeda, remanié en slov. odêja (s.-cr. àdjeca, § 1181) ;<br />
et razdëja (J. Ex.), voir § 1025 ;<br />
nedëlja « dimanche », r. nedëlja, etc., sur dëlati « œuvrer » ;<br />
prëgrusta « creux de la main » dans Hom. Mih., 3 ex., d'après<br />
Miklosich (mais Hom. Mih. 178 est écrit prïgrïsta 260 vb ) ; slavon<br />
russe prigursca « poignée », r. prigôrsni « les mains pleines », fém.<br />
plur., dérivé en -nja (§ 1089), slov. prgisca «poignée» altéré de<br />
*prigrsca ; s.-cr. ancien pregrsta, d'où mod. prëgrst ; sur *gursiî<br />
«poignée» (§ 1169) et un verbe *gûrsliii, slavon obugrustiti, r.<br />
sgorstit' ;<br />
rçkoimlja (Hom. Mih. 204 va ), masc., « qui prend la main, guide»,<br />
s.-cr. ancien rukoimlja « manche », sur *jïm- ;<br />
sçmïnja dans v. si. sçmïnëti se « douter », voir pomïnja, § 1024 ;<br />
vellmoza « magnat », masc., r. vel'môza, sur mog- ;<br />
obrçsla (Hom. Mih. 186 ra ) « acquisition », priobresta (Gr. Naz.,<br />
Hés. IX, 28) « gain », surçsta (Euch., Supr.) « rencontre » et usurçsta<br />
(Pand. Ant.), sur le thème du présent -rçt- (§ 449), slov. srçëa,<br />
et par réfection sur -rët- (§ 752), r. vstrëëa, sustrëca, s.-cr. srëca<br />
(dial. srïca), sùsreca ;<br />
çrozda (Cyr. Jér., Pand. Ant.) « folie », sur çrodu « fou » (§ 1223) ;<br />
priiuëa «comparaison, parabole», r. pritca, s.-cr. prîëa (§ 797),<br />
sur tuk- ;
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 517<br />
vodovazda (Théod.) « conduite d'eau », slov. vodovâja, sur vod-,<br />
et voir *vodja, § 1024 ; et slov. vdja « habitude, exercice », razvâja<br />
« action de gâter (un enfant) », svâja (et svâda) « querelle », s.-cr.<br />
svàda, ràzvada « séparation des adversaires », sur le thème vadet<br />
ses divers sens (§ 781).<br />
Et mçzdra (J. Ex.) « membrane » à côté de *mçzdra, voir § 1117.<br />
§ 1024. Eu slavon et dans les langues slaves. — La liste des<br />
formes s'allonge ; et de beaucoup :<br />
s.-cr. càda « suie », remplaçant l'ancien et dial. sàda, sur le thème<br />
cad- en regard de kaditi (§ 615) ; et slov. kdja «action de fumer»,<br />
sur kaditi (§ 781) ;<br />
slavon ëçsta (xi e s.) « fourré », r. ëâsëa, sur l'adjectif ëqstu (et<br />
s.-cr. cësta, § 1165) ; (<br />
slavon cista, r. dial. ëtsëa « terrain nettoyé, essart », et slov.<br />
ëisca « purification », sur ëistu. et ëislili ;<br />
v. r. dolja «part», r. dôlja, pol. dola «sort, destin», en regard<br />
de -dolëti, -delëti (§ 584) ;<br />
v. r. vododïrza « réservoir » et mod. vododérza, et v. tch. hradodrzë,<br />
v. pol. grododzirza, masc., « châtelain d'un château-fort »,<br />
sur *dïrz- ;<br />
slavon gazda « honte, blâme », sur gaditi (§ 781) ;<br />
slov. gçnja « chasse, poursuite », v. r. pogonja et mod. pogônja,<br />
v. pol. pogonia (mod. pogon), et s.-cr. vjetrogonja « tête à l'évent,<br />
étourdi », masc., sur gon- ;<br />
r. gusca « marc, lie », slov. ggsëa « densité » et « taillis, fourré »,<br />
s.-cr. gusta, sur ggstû « dense » ;<br />
slavon grablja « rapine », et plur. s.-cr. grâblje « râteau », tch.<br />
hrdbë, pol. grabie (et grable, § 28), sur grab- (§ 782) ;<br />
slavon grazda pour grazdi « étable » (§ 1019), r. gorôza « enclos »,<br />
pol. grodza et tch. hrdze « mur de clôture, digue », s.-cr. grâda<br />
« construction », ô-, zà-, slov. grâja, zagrâja, ogrâja (et ogrâda),<br />
sur *gard- ;<br />
tch. dial. et slovaque hrca « tumeur », slov. grëa « nœud », sur<br />
le thème *gurk- ou *gruk- du slavon su-gruëiti sç « se contracter »,<br />
s.-cr. grciti et gfc « crampe » ;<br />
slavon gryza « souci (qui ronge) », bulg. griza, s.-cr. grlza « colique »,<br />
et anciennement « souci », r. gryza « hernie », sur gryz- ;<br />
slavon jazda « nourriture », r. ézâ, v. pol. jedza, s.-cr. jëda, slov.<br />
jéja, et v. r. zuboëza « morsure », sur jad-, comme lit. ëdzios, fém.<br />
plur., « crèche », sur ëd- ; '<br />
slavon jaéda «action de véhiculer», s.-cr. jezda «chevauchée»,<br />
slov. jéza « équitation », sur jazd- ;<br />
slavon poklaz(d)a « dépôt », r. klâza et poklâza « action de placer,<br />
charge », slov. klâja « fourrage » et poklâja, sur klad- ;
518 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
slavon klëstç, plur., «tenailles, pinces», r. klésëi, pol. kleszcze<br />
et tch. klestë, s.-cr. klijèste et slov. klésëe, sur v. si. su-klëstiti<br />
«serrer» (§ 747) ;<br />
slavon krazda « larcin », r. krâza, s.-cr. krâda, slov. krâja, sur<br />
krad-;<br />
slavon krovlja « toiture », r. krôvlja, ukr. pokrîvlja, avec le<br />
vocalisme de krovû (§ 730) ;<br />
slavon prikuz(d)a « dévastation », sur kud- (§ 758) ;<br />
s.-cr. kïsa « trempe, pluie », r. kisa « levain » et kisâ « grouillement<br />
», sur kys- ( § 496) ;<br />
slavon prëkylaza «crabe, cancer» (§ 1215) et moyen-bulg.<br />
(Manassès) prëkolaza, bulg. dial. prikolâs ; xudolaza (xn e s.)<br />
« homme de rien », s.-cr. ùholaza, fém., « perce-oreille », sur laz- ;<br />
s.-cr. ancien naljeza « récompense pour trouvaille, nâlaz », sur<br />
lëz- (§ 776) ;<br />
slov. Içza « le coucher », nadlçza (et nadlçga) « importunité »,<br />
sur leg-, Içg- (§ 725) ;<br />
slavon lovlja « chasse », r. lôvlja, slov. lôvlja, sur lov- ;<br />
slavon maza, slov. mâza « enduit », sur maz- ;<br />
r. dial. mjdëa « temps mou », slov. mg'ca « le mou » et « le mollet »,<br />
sur mg/c- ;<br />
s.-cr. ancien smeca « confusion, trouble », sur mçl- ;<br />
s.-cr. pômnja « attention, soin », slov. pômnja, sur po-mïnëti<br />
( § 490) ; s.-cr. sûmnja « doute » en regard de v. si. sçmïnëli sg et<br />
su-, qui est lui-même dénominatif ( § 1222) ;<br />
v. r. merza « gelée, glace », sur *mïrz- ;<br />
s.-cr. bogomolja « service divin » et « maison de Dieu », slov.<br />
bogomçlja, sur mol- ;<br />
slavon pomuëa, r. dial. pômëa « piège, trappe », v. tch. pomëë<br />
« filet », et s.-cr. ômëa « nœud coulant, lacet », sur muk- ( § 800) ;<br />
tch. nuse « charge » et mod. « hotte », slov. nçsa « action de porter,<br />
costume » ; slavon mïëenosa « porte-glaive », masc., mëxonosa<br />
« porte-besace », slëgonosa « porte-étendard », r. meëenôsa, mexonôsa,<br />
v. tch. listonosë « porte-lettre » (mod. listonos « facteur »), s.-cr.<br />
bremènosa « portefaix », pismonosa « facteur », vodônosa « porteur<br />
d'eau », etc., sur nos- ;<br />
r. pâza « épizootie, padëz », propâza « chose perdue », s.-cr.<br />
ziràpada « chute du gland, zîr, glandée », sur pad- ;<br />
slavon pasa (Job, XXXIX, 4) « pâture, pacage », pol. pasza,<br />
s.-cr. pâsa, slov. pâsa, sur pas- ;<br />
pol. piecza « souci, soin », tch. péce, slov. pçëa, en regard de<br />
v. si. pesti sç «prendre soin», pecalï (§ 1057) ;<br />
slov. plânja «espace découvert, plaine» (et fém. plan), pol.<br />
plonia « pré dans une forêt » (h. sor. pion), sur l'adjectif *palnu,
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 519<br />
slov. plan (§ 1070) ; le slavon russe paraît présenter le mot dans la<br />
variante acc. polonju à poljanu « vallée », Osée, II, 15 ;<br />
slavon plasta « paie », pol. plaça, s.-cr. plaça et slov. plaça, sur<br />
plaliti (§ 784) ;<br />
slavon prçzda « fil » et isprçzda, r. prjâza, tch. prize, s.-cr. prëâa,<br />
slov. prçja, sur prçde- ;<br />
slavon prosta « rémission (des péchés) », r. prôsca, sur prostiti ;<br />
r. réza « filet à mailles larges », slov. réja « éclaircie », sur rëd-<br />
(§ 747) ;<br />
s.-cr. dial. reda « règlement d'entretien », slov. rçja « entretien,<br />
alimentation », ponarçja « imitation, contrefaçon », sur rçd- ;<br />
s.-cr. r&nja « poil, pilosité », slov. rûnja « quenouillée, touffe<br />
de cheveux», sur runo (§ 1074), comme suknja (§ 1086) sur<br />
sukno ;<br />
slov. sgr/a « diarrhée »„ s.-cr. dial. séra, et r. zasérja, masc., « qui<br />
a la diarrhée », sur ser- ;<br />
slov. séja « séance », prisêja « assistance », sur sëd- ;<br />
slavon serbe prisçza «serment» et s.-cr. ancien priseza, pour<br />
l'usuel v. si. prisçga (§ 808), sur sçg- ;<br />
v. pol. slusza « ce qui convient, raison », sur slux-, mais en<br />
même temps postverbal de sluszaé « écouter, être raisonnable » ;<br />
slavon (xi e s.) besruzda « le sans-cœur », masc., sur l'adjectif<br />
besrûdû, r. bezsérdyj (§ 1227) ;<br />
s.-cr. sânja « rêve », slov. sânja, sur s.-cr. snïti «rêver», slov.<br />
snivati, de sûnû «sommeil» ; r. sônja, masc., «le dormeur»;<br />
v. r. turgovlja « commerce » et r. mod. torgôvlja, adapté par le<br />
bulgare en târgovija à suffixe -ija (§ 1194), sur r. torgovât' ;<br />
slavon tvruzda « forteresse », r. tvérza, s.-cr. tvrda « dureté,<br />
garantie » et « forteresse, tvrdava (§ 1187) », sur *tvïrd- ;<br />
slavon povelja « édit », s.-cr. pdvelja «charte», slov. povélja<br />
« ordre », sur vel- ;<br />
slavon nevëzda «ignorant», masc., r. nevéz(d)a et ancien véza<br />
« qui sait », à côté de (neJvëzdï, adj. ( § 956) ; et pol. wiedza « science »,<br />
pour v. si. vëdï (§ 713) ;<br />
slov. véca « impôt », forme devenue isolée sur le thème vët-<br />
( § 747) ; et obêca « promesse pour obèt sur le verbe obéëati ;<br />
slavon oblaca « vêture » (un ex. Mikl., entraîné par pista « nourriture<br />
»), slov. vldca « traîneau », sur vlak-, vlaciti ;<br />
pol. wodza « bride, guide », r. vozzâ par réfection en voz-za sur<br />
vozît', slov. vçja « conduite » et « longe » ; s.-cr. vôda « guide, chef »,<br />
masc., et cëtovoâa « chef de bande, cëta », kôlovoâa « qui mène la<br />
ronde, kôlo », etc. ; sur vod-, et voir -vazda, § 1023 ;<br />
pol. wysza « hauteur », slov. visa, sur vys- ;<br />
v. pol. chodza « marche », tch. chûze, slov. hçja, obhôja, sur xod- ;<br />
slov. hinja « tromperie », s.-cr. hinja, ôbinja, sur xyn- (§ 802) ;
520 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
slov. zâje, plur., « les derrières (de la maison) », sur zad-, mais en<br />
vieux slave il faut reconnaître zazdï, masc., dans Supr. 91lg ( § 1019) ;<br />
slavon ëasozvonja « horloge sonnant les heures », sur zvon- ;<br />
r. zlza « humidité, jus », sur le thème zid- de zidukû « fluide »<br />
(§ 983);<br />
r. pôznja « prairie », sur éïnje- « moissonner ».<br />
§ 1025. Sur thème vocalique. — Les exemples nets sont rares :<br />
v. si. slruja « courant », r. strujd, s.-cr. strûja, sur *sreu-, voir<br />
struga, § 1010 ;<br />
pol. ruja « brame, rut du cerf », tch. rije, sur r(j)uti « bramer »,<br />
prés, reve- (§ 461) ;<br />
v. si. staja « lieu de station, logis, étable » dans Gr. Naz., Ham.<br />
481 26, et sûrement Supr. 2152 : konju otulçci stajati, à corriger en<br />
stai byti, gr. slç ÇOCTVYJV à-SVSIJI.SV ; r. stâja « bande, harde » et dial.<br />
« basse-cour », v. tch. stâjë « étable » et mod. stâj, s.-cr. stâja.<br />
Mais staja est en même temps postverbal de stajati (§ 791), et<br />
il en est de même pour graja, laja, taja, -xaja, et pour -daja qui<br />
remplace comme postverbal de dajati la forme v. si. -dazda sur<br />
dad- (§.1023) ; également pour v. si. razdëja «séparation» remplaçant<br />
v. si. -dezda sur *dedje-, et pour sëja, vëja (§ 751), tija,<br />
-pija (§ 729), -myja, -ryja ( § 730).<br />
§ 1026. Formations moins claires. —• On mettra à part les mots<br />
d'emprunt ou qui sont suspects d'être des emprunts : v. si. brunjq,<br />
plur., « cuirasse », r. brânjâ, du germanique ; casa « coupe », r.<br />
câsa, sûrement emprunt à une langue orientale, comme sablja<br />
«sabre » (Gr. Naz., Upir'), r. sâblja. Il faut examiner :<br />
V. si. burja « tempête », r. bûrja, qui est rapproché du lette<br />
baùruôt « mugir » et de lat. furô, mais on peut plutôt penser à un<br />
emprunt au gréco-roman, gr. (3opéaç « vent du nord », lat. boreas<br />
et ital. bora (burrasca) : le serbo-croate bûra, depuis le xm e siècle,<br />
est « tempête », « nord » et « vent du nord », la bora.<br />
R. câplja « héron », pol. czapla, s.-cr. ëàplja, est sans doute autre<br />
chose qu'un dérivé du verbe expressif slov. câpati « attraper,<br />
happer », etc. ; mais il a été mis en rapport avec lui, puisqu'en<br />
russe câplja est devenu câplja comme câpat' est passé à câpat'.<br />
Y. si. cësta « à cause de » (J. Ex., Const. Pr.), s.-cr. cljeca, qui<br />
suppose *koit-, et son synonyme dëlja n'ont de clair ni leurs thèmes,<br />
ni leur finale adverbiale -a (§ 322) qui les met à part des dérivés<br />
en ~(j)a.<br />
dirja «déchirure» est une variante de dira (§ 728), qui n'est<br />
attestée en vieux slave que par un exemple, Marc, II, 21 Zogr.,<br />
mais qui est confirmée par bulg. dirja « trace de pas, de roues » :
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 521<br />
ce doit être un dérivé nouveau sur l'itératif dirati, et en bulgare<br />
sur le dénominatif diri- « suivre la piste, chercher ».<br />
Y. si. gasta (Upir') « caleçon », plur. r. gdëi, s.-cr. gâce, est sans<br />
étymologie.<br />
Pour slov. gçza « courroie », à côté de gçz, et v. tch. hûzë, voir<br />
§ 204.<br />
Le slavon kasa « bouillie de grains, de farine », r. kâsa, s.-cr.<br />
kâsa, est isolé en slave, comme le verbe lit. kôsiu, kôsli « filtrer,<br />
passer », l'est en baltique.<br />
Pour kros(ï)nja, sur krosno, voir § 1086.<br />
Le slavon russe suxolaplja « mouette » (plutôt que -lapljï, masc.,<br />
§ 1020) est en regard de r. suxolâpgj « à la patte, lapa, sèche », qui<br />
se dit de la grue.<br />
Y. si. luéa (J. Ex.) « mare », r. et slov. lûza, tch. louée, a un<br />
correspondant en baltiq,ue, lit. liûgas « marais », adj. liugus « marécageux<br />
», et Lug- dans l'onomastique ; ce qui suppose une racine<br />
à vocalisme alternant *leug-, *loug-, *lug-, d'où lug- avec allongement<br />
vocalique, racine qui pourrait être aussi celle de lit. lùgnas<br />
« flexible », et avec infixe nasal celle de v. si. Içgu « forêt, bois »,<br />
r. lug « prairie », pol. Iqg « prairie marécageuse ».<br />
V. si. mrëza « filet », r. merëza « filet, tissu à mailles larges », s.-cr.<br />
mrëza, sur un thème *mërg- qu'on aurait dans r. merèga «filet à<br />
mailles larges », si ce n'était pas plutôt un postverbal de merézil'<br />
«faire du filet» (§ 806), mais qu'on trouve en baltique dans le<br />
lette mefga, mafga « galerie, rampe », dont le sens premier doit<br />
avoir été « treillis », et lit. mârska « pièce de drap, filet » ; un<br />
rapprochement avec gr. (3pôjoc, « lacet, maille de filet » est plausible.<br />
Pour le slavon mrusa «charogne», voir § 1140; et pour s.-cr.<br />
nepca « supposition », voir v, si. nepuslï « prétexte », § 718 ; pour<br />
slov. pçlja « charroi », § 805.<br />
V. si. ploëa (Gr. Naz.) «place, marché» est visiblement un<br />
emprunt au roman, lat. platea, vulg. *platlea ; le mot apparaît<br />
avec d'autres sens, r. ancien ploëa « stylet » (sans doute « lame »),<br />
bulg. plôëa et s.-cr. ploca « plaque, dalle », slov. plgca « plaque,<br />
lame », où l'on doit également reconnaître le dérivé *plattea du<br />
latin vulgaire platlus «plat» ; substitué au slave plosku (§ 1065),<br />
qui est conservé, ou restauré, dans :<br />
slov. plçsëa « plaque, dalle », et v. r. plosëadï, r. plôsëad' « place »<br />
(§ 1006).<br />
V. si. prasta (Upir') « fronde » et dérivé praslïniku (Supr.)<br />
« frondeur », pol. proca, s.-cr. pràca, slov. prâëa ; et tch. prâce<br />
« travail », pol. praca (du tchè ; que) pour v. pol. proca, h. sor. prôca ;<br />
en regard de bulg. prâti- « expédier, envoyer », s.-cr. pràlili<br />
« envoyer » et « escorter, accompagner », is-, àd-, slov. prâtili se<br />
«se mettre en route» avec dérivé prâtez «bagage» (§ 1017), la
522 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
différence des sens étant comme celle de posulù « envoyé » et<br />
posiïlu «mission, affaire» (§ 800). Mais on a un autre nom de la<br />
« fronde », tch. prak, v. pol. prok, v. r. poroku et mod. pôrok<br />
« baliste » : ce qui fait supposer deux dérivés, en -kû (§ 1037) et<br />
en *-tja (§ 1181) sur thème *por-, peut-être de pire-, per- « pousser,<br />
fouler» (§ 471), ou bien un seul thème *pork- qui pourrait bien<br />
être, comme nom d'arme, un mot d'emprunt.<br />
Y. si. skrënja (Pand. Ant.) «plaisanterie», adj. skrënivu (§ 995),<br />
est uniquement vieux-slave et slavon, et doit être un emprunt<br />
à v. h. a. scërn, masc., « plaisanterie », avec passage au type en<br />
~(j)a peut-être par l'intermédiaire d'un verbe disparu.<br />
V. si. sija « cou », pol. szyja, s.-cr. sïja, r. séja, de st/-, est obscur<br />
et isolé, le verbe s.-cr. osijali « tourner », qui est récent, pouvant<br />
en être le dénominatif au sens premier de « tourner le cou ».<br />
Pour -tërja et le verbe tërjali, voir § 753.<br />
Slavon linja «boue» pour l'usuel tina (§ 1079), avec trace en<br />
vieux slave dans tin(j)emç>tïnû Hés. GXXXV, 13 «aux flots de<br />
boue, (iopëop6xu[i.ov » (mais var. tino-), sans doute par substitution<br />
à -na du suffixe -nja (§ 1086).<br />
Y. si. vëja « branche, rameau », slov. oêja, à côté de vëtvï (§ 160),<br />
peut-être de *vej-ja (§ 42), sur *vej-, vi- « tresser ».<br />
Y. r. vëza « tente, chariot couvert », pol. wieza « tour », tch.<br />
vëz « tour » de *-zë, slovaque veza, et slovène vëza « vestibule » avec<br />
-e- et non -e-. Il s'agit à l'origine du chariot à bâches des nomades,<br />
qui pouvait servir de retranchement comme la carrâgo du latin<br />
tardif, et l'on suppose un dérivé de veze- « charrier ». Mais le degré<br />
vocalique vëz-, à côté de vez-, fait difficulté, et si le lituanien a<br />
vézë« ornière de char », c'est en regard du factitif vëzinti et d'allongements<br />
dans les inchoatifs et les verbes d'état (§ 499) ; on peut donc<br />
soupçonner une autre origine, un emprunt.<br />
V. si. vëzda « paupière » et r. vëzda, bulg. vëzda « sourcil », s.-cr.<br />
vjëda et slov. vëja « sourcil » et « paupière ». Un autre nom de la<br />
«paupière» est v. si. vëko (§ 1039), mais aucun rapport n'est<br />
possible entre les deux mots. Pour vëzda, dont le sens premier est<br />
«paupière», le «sourcil» étant briïvï (§ 202), le rattachement<br />
proposé au thème vid- « voir » suppose une formation ancienne,<br />
les dérivés des deux thèmes vid- « voir » et vëd- « savoir » étant<br />
rigoureusement distingués à l'époque historique (§ 796) ; il devrait<br />
s'agir d'un adjectif substantivé en *-yo- (§ 957) signifiant «de la<br />
vue », comme dans tch. oëni vicko « couvercle de l'œil, paupière »,<br />
s.-cr. ôcnï kàpak.<br />
R. vërsa « nasse », pol. wiersza, s.-cr. vrsa, slov. vrsa, en regard<br />
de lit. varias, lette vafza, de lit. verziù, vefzti «lacer», si. *vïrze-<br />
« attacher, lier» (§ 428). En slave, le thème *vïrs- pour vïrz- peut
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 523<br />
avoir été tiré secondairement du participe passif -vïrslu (§ 408)<br />
qui s'isolait du verbe.<br />
Slavon vrësta «sac», s.-cr. vrëca, etc., et v. si. vrëtiste (§ 950),<br />
doit être le dérivé d'une forme *ver-t- (§ 1159) de la racine de vïre-<br />
« fourrer » (§ 453) au sens de « fourre-tout ».<br />
Y. si. vyja « cou, nuque », r. vyja et zavôek, ne se retrouve ailleurs<br />
qu'en polabe, et est aussi obscur que son synonyme sija.<br />
§ 1027. Extension du type. — Au suffixe ~(j)a s'ajoutent ses<br />
formes élargies -//a(§ 1062),-n/a(§ 1086), -sa{% 1141), *-tja{% 1181).<br />
On mettra à part les féminins en ~(j)a (§ 708) de masculins en<br />
-ï : v. si. gospozda « maîtresse », r. gospozâ, s.-cr. gôspoâa, de gospodï ;<br />
v. si. tïsta « belle-mère », r. tësca, s.-cr. tâsta, de tïstï « père de la<br />
femme » ; — et les hypocoristiques comme v. r. batja « père » et<br />
bulg. bastâ, tch. bâV'a « frère » et s.-cr. bâca.<br />
V. si. mezda « limite », r. mezd, s.-cr. mèâa, est l'adjectif i.-e.<br />
*medhyo- « du milieu », lat. médius, etc., substantivé, et avec<br />
la forme fixée mezdu «entre» (§ 321). De même tch. obec «commune<br />
», de *obcë, slovaque obca, est une forme substantivée de<br />
l'adjectif *obïtjï «commun» (§ 958).<br />
Les dérivés en ~(j)a sont tirés de substantifs : vecerja «dîner»<br />
de veceru « soir » ; d'adjectifs : çrozda « folie » de çrodu, besruzda<br />
« le sans-cœur » de besrudù ; mais particulièrement de thèmes<br />
verbaux. Ainsi ils représentent une formation parallèle à celle des<br />
postverbaux, et les deux formations se confondent dans le cas de<br />
postverbaux terminés par voyelle, comme staja. On observe alors<br />
deux types : *-dad-ja, *-dedja, *-rçtja avec recours au thème du<br />
présent terminé par consonne, et ultérieurement -daja, -dëja.<br />
Ce qui caractérise la formation en ~(j)a sur thème terminé par<br />
consonne, c'est l'alternance consonantique ; une forme sans<br />
alternance nabudja (§ 1Ô23) dans un exemple unique de Jean<br />
l'Exarque est inattendue, mais la langue de Jean l'Exarque se<br />
révèle assez artificielle. Le type en ~(j)a apparaît ainsi comme une<br />
forme renforcée par l'alternance consonantique du type des<br />
postverbaux en -a, et c'est comme tel qu'il se montre productif<br />
en slovène, langue pour laquelle Â. Bajec a dressé une liste d'environ<br />
150 formes en ~(j)a. Voici, en plus des nombreux exemples déjà<br />
cités comme se retrouvant dans d'autres langues slaves, des<br />
particularités du slovène :<br />
cfëa « prairie défrichée » sur criati « défricher » ; drca « glissoire »<br />
sur dfkati « glisser » ; gosëa « façon de traiter un hôte, gosiiti » ;<br />
klgca « poule glousse » sur klçkati ; kçsa « fauchage » sur kositi ;<br />
kvâsa «marinade» sur kvâsiti, nâkvasa et ndkvasa (§ 778) ; rnçlja<br />
« mouture » sur mg'//e- ; ménja « échange » (et mena, § 749) sur
524 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
menili ; oblçja (et oblôda, § 762) sur oblçditi « mélanger, délayer » ;<br />
pçja « action de pousser, chasser » sur poditi, thème pçd- ; prislônja<br />
« étai d'une treille » sur prislôniti ; probûja « réveil » sur bud- ;<br />
râsca « croissance » sur râsle- ; rçza « fente » (et rçga, § 763) sur rqg- ;<br />
skrûnja « tache » (et skrûna, v. si. skvruna) sur skrûniti ; smrâja<br />
« puanteur » sur smrâditi ; etc.<br />
En serbo-croate, avec une réfection en -ja dans dial. trûblja<br />
« trompette » pour trùba sur trùbili, c'est le type des composés de<br />
v. si. rçkoimlja qui apparaît particulièrement développé, féminins :<br />
vodàjaza et vodàvalja «fossé d'écoulement d'eau», sur jaz- (§ 783)<br />
et val- (§ 777), et surtout masculins : làza « menteur », -nosa, -voda,<br />
vjetrogonja, mladôzenja «jeune marié», slelocinja «qui cause du<br />
dommage, siëta », etc.<br />
L'accent des dérivés en ~(j)a était sur le thème, comme en<br />
témoigne le grec : q>6Çoc « fuite » en regard de cpuyyj, ixâÇoc « galette »<br />
sur (xào-c7o> « je pétris ». On avait donc régulièrement, selon la loi<br />
de Saussure, r. dusd, s.-cr. dûsa de cak. dusà, r. mocâ, strujd et<br />
s.-cr. màca, strûja, avec intonation radicale douce, et r. grtyza,<br />
krdza, séëa, s.-cr. grïza, kràda, sjëca, avec intonation rude, s.-cr.<br />
grlslt, krâsti, sjëci. Mais le type d'accentuation le plus ordinaire<br />
apparaît paroxyton : s.-cr. stëlja, r. postélja sur stelje-, r. kûplja<br />
sur kupit', etc. C'est parce que la formation en -(j)a est devenue<br />
en grande partie dérivé de verbe, et qu'elle a pris l'accentuation<br />
des verbes, avec la métatonie des présents à accent mobile : sur<br />
intonation douce (§ 102) par substitution au type r. dusd, acc.<br />
dûsu, r. sûsa, cak. et slov. sûsa, de r. susiï, prés, sûsi- ; r. gorôza,<br />
cak. et slov. grdja, sur r. gorodll', gorôdi-, cak. grâdït, grddi- ; r.<br />
storôza, cak. et slov. strdza, sur r. storozil', storôzi- ; cak. pldca,<br />
slov. plaça, sur cak. plâtït, pldli- ; cak. zéja, et r. zdzda sur r.<br />
(ancien) zaddt', zdzde- (§ 553). Et sur brève (§ 104) r. vôlja, slov.<br />
vçlja, tch. vâle, sur slov. vôliti, vçli- (§614), tch. nuse sur r. noslt',<br />
nôsi-, chùze sur r. xodlt', xôdi-. Les accents de métatonie, qui sont<br />
nouveaux, n'apparaissent pas régulièrement, mais ils peuvent aussi<br />
s'étendre à des formes qui ne dépendent pas de verbes : ainsi, avec<br />
la métatonie sur brève qui est secondaire, r. koza « peau », slov.<br />
kçza, tch. kûze, et tch. vùnë « odeur » pour s.-cr. vànja.<br />
Le point de départ de cette transformation de l'accent est dans<br />
le rattachement des dérivés en -ja aux présents en -je- qui s'est<br />
opéré dans les formes ambiguës du type de slaja (§ 1025), à la fois<br />
dérivé du thème s ia- et postverbal de stajati. Le dérivé suffixal en<br />
-ja devient ainsi postverbal en -a de présent en -je- : *-dedja de<br />
*-dedje-, *-rçija de *-rqtje-, avec extension à -dadja d'après -dedja,<br />
et aux verbes en -iti d'après les verbes en -ati à présent en -je- et<br />
à métatonie.
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 525<br />
SUFFIXES EN -y-, -ëj-, ETC.<br />
§ 1028. Suffixes eu -ïj-. — Les neutres en -ïje ont été étudiés<br />
§ 925, et les adjectifs en *-ïjï § 959.<br />
A la liste assez longue des substantifs en *-ïjï (§ 146), on ajoutera<br />
*kulïjï « germe » d'après v. tch. kli, élargissement de *kùlu, pol.<br />
kiel (§ 517), dont le rapport avec la racine de kolje- (§ 530) est loin<br />
d'être évident.<br />
Le russe a vinoëérpij « échanson », peut-être croisement de vinoëérpec<br />
et de v. si. vinoërupïëii (§ 864). Le mot trubii dans un exemple<br />
unique en slavon russe du xiv e siècle peut être de même une altération<br />
de *trçbïcii « joueur de trompette », non attesté mais qui se<br />
suppose d'après piskuëii « joueur de flûte ».<br />
Au petit groupe des masculins en -ii à flexion féminine, sçdii, etc.<br />
(§ 155), on doit joindre v. si. proskupii «pillard» (Gr. Naz., nom.<br />
plur. -pia = -pijç) à côté de proskupu en slavon (xn e s.) et du<br />
féminin proskupica (Gr. Naz., Hom. Mih. 146 rb ), dérivé v. si.<br />
proskupïstvo (§ 936) : le thème proskup- s'analyse sûrement en<br />
pro-su-kup-, de sû-kupiti « rassembler » avec le préverbe de<br />
pronyrïstvo « perversité ».<br />
Les suffixes importants sont -ëii (§ 864) et -lii (§ 1058).<br />
Le suffixe -ïja donne des collectifs : bral(r)ïja «frères», sans<br />
doute aussi, à l'origine, svinïja «porc» (§ 153), slavon rabija<br />
« esclaves » dans l'expression vu rabijç ; et :<br />
v. si. sëmija (Upir') « gens de la maison », r. sem'jâ « famille »,<br />
à singulatif v. r. sëminu, mod. sem'janin « membre de la famille »<br />
(§ 870). Le correspondant baltique est lette sàime «domestiques,<br />
famille», lit. seimà (§ 1067); et le mot est en rapport avec le<br />
germanique, got. haims « village », dont v. pr. caymis et lit. kiëmas<br />
sont sûrement des emprunts, qui désigne proprement le « chez soi »<br />
ail. Heim, angl. home.<br />
Ce type de collectifs s'est étendu en russe et en polonais ancien<br />
et dialectal (§ 211) : r. knjaz'â, muz'jâ, zjat'jâ, svat'jâ, sur'jâ<br />
« beaux-frères », pol. dial. svacia, etc.<br />
Un autre type est celui des féminins :<br />
v. si. vozdija « conductrice » (Hom. Mih. 112 yb ), de masc. vozdï ;<br />
slavon gostija, r. gôst'jfl, pol. goscia, v. tch. hosti, s.-cr. gosca,<br />
slov. gôstja, de gostï « hôte » ;<br />
slavon svalija « parente par alliance », r. svâl'ja « mère du gendre<br />
ou de la belle-fille », de svatu ;<br />
v. r. kurmilïcija « gouvernante », de krumilïcï ;
526 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
v. r. dijacija « femme du diacre », dijaku » ;<br />
v. r. popadija « femme de prêtre », s.-cr. popàdija, mais c'est le<br />
grec TcoTtaSiâ, et v. si. igumenïja (Supr.) « abbesse », est 7]you(xÉvY],<br />
avec le passage de -ii à -ija en vieux slave tardif (§ 156).<br />
Et voir le type de féminins r. boltûn'ja « bavarde » sur masc.<br />
boltàn, § 1103.<br />
Est à part le suffixe d'emprunt -ija, avec large développement<br />
dans les langues slaves sous la forme savante -ija (§ 1194) ; rarement<br />
-ïja, r. kut'jâ, mais stal'jà « article » est pour v. r. statïje « station,<br />
division du psautier, CTTOCO-LÇ ».<br />
R. litijâ « litanie », s.-cr. litija « procession », est v. si. lilija-,<br />
de *litii adapté du grec AITY) « prière ».<br />
Y. si. zmija « serpent » est sûrement un adjectif substantivé<br />
(§ 31), à masculin zmii « dragon » (§ 146).<br />
V. si. drozdijç, plur., « lie », pol. drozdze «lie» et «levain», r.<br />
drozzâ, s.-cr. drozda, slov. drozjç « lie » et drçzga « moût », a en<br />
baltique le correspondant v. pr. dragios, fém. plur., « lie », v. lit.<br />
dragès, et en germanique v. norr. dreggiar, fém. plur. Le thème<br />
est donc *drag-, avec passage en slave à drozga en regard du verbe<br />
slov. drôzgati « écraser », qui est du type des verbes en -zgati<br />
(§ 561, § 597) et peut s'expliquer par *drag-ske-.<br />
V. si. ledvije « reins », r. Ijâdveja « hanche », pol. Içdzwie, tch.<br />
ledvi, est un dérivé en -ïja du thème *londhwo-, *lndhwo- de lat.<br />
lumbï, v. isl. lend et lund, v. h. a. lentï (fém.), mod. Lende. Et sur<br />
le modèle de slov. Içdje (dial. ledevjè), s.-cr. ancien ledje (mod.<br />
léda « dos », plur. neutre) :<br />
slov. dîmlje «aine », s.-cr. ancien dimje (§ 186).<br />
Slavon skranija « tempe », et v. si. skranije, sans doute fém.<br />
plur., dans J. Ex., tch. skrdnë (skrdn), pol. skron et dial. skronia,<br />
kachoube skarnia (§ 70), et slov. skrânja «menton, mâchoire»,<br />
sur un thème *skarn- non identifié.<br />
§ 1029. Finale -uj-, — Isolément, le vieux slave a cesuja<br />
«écaille», r. cesujd, pol. (sz)czeszuja, qui paraît être un dérivé<br />
du thème de cese-, cesati « gratter, peigner », mais la finale est<br />
obscure.<br />
Elle est claire dans r. poceluj « baiser », postverbal de pocelûe-<br />
(§ 818). On a encore :<br />
r. zolvûj « meurtrissure, bosse », élargissement de zolv' « tortue » ;<br />
r, valuj « homme vautré, mou » et « variété de bolet », qui se<br />
rattache à valit'sja « se laisser tomber » ;<br />
slavon kragui « épervier », s.-cr. kràgûj, pol. krogulec, emprunt<br />
au turc (§ 3) ;<br />
pol. niechluj « saligaud », qui n'est pas clair.
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 527<br />
Dans les adjectifs, pour v. si. volui « de bœuf », s.-cr. drlujî<br />
« d'aigle », voir § 955 ; v. tch. hoduji « convenable, à propos » doit<br />
être comme v. pol. wieku(j)i « éternel » (§ 957) un dérivé de locution<br />
adverbiale, et il supposerait alors une forme fixée *hodu pour<br />
hodë, v. si. godë (byti) « (être) à propos ».<br />
§ 1030. Suffixe *-(j)ajï. — Les formations en -(j)aj-, -ëj-,<br />
relèvent de plusieurs types qui peuvent se confondre, mais qu'il<br />
faut distinguer. L'un est particulièrement net : c'est celui d'abstraits<br />
masculins en *-(j)ajï sur thème verbal. En vieux slave :<br />
prikljucai « ce qui arrive, hasard », sur prikljuëiti sg « arriver » ;<br />
et slov. nakljûcljaj (§ 1031) sur nakljûciti se ;<br />
lucai (J. Ex., Izb. Svjat.) « accident, occurrence », polucai,<br />
prilucai, suluëai, r. slûôaj et ancien prilùëàj, ukr. lucâj, s.-cr.<br />
slucâj, sur luëiti sç « avoir lieu » ;<br />
mysljai (J. Ex.) « pensée », pomysljai (J. Ex.), pri-, pro-, raz-,<br />
u-, s.-cr. pômisljâj, ù-, slov. pômisljâj, pri-, raz-, et pre- « réflexion »,<br />
za- « conception », sur mysl- ;<br />
obycai « habitude », slavon (xn e s.) suvycai, v. r. privyëai, r.<br />
obycaj, pol. obyczaj et zwyczaj, tch. obyëej, slov. obiëâj, s.-cr. ôbicâj,<br />
nàvicâj, zàvicâj « pays natal », sur vyk-.<br />
En slavon et vieux russe :<br />
v. r. prigozai « agrément », ugozai « (biens en) jouissance », s.-cr.<br />
ancien pogodaj « accord », prigodaj, et mod. ugodâj « complaisance »,<br />
slov. pogojâj « condition », sur god- ;<br />
v. r. poklazai « dépôt », sur klad- ;<br />
oblicai « figure, visage », v. pol. obliczaj, tch. obliëej, s.-cr. ancien<br />
oblicaj, slov. obliëâj, sur lik- ;<br />
v. r. rozai « naissance, production », pol. rodzaj « genre », s.-cr.<br />
rodâj « naissance, lever (du soleil) » et pôrodâj « enfantement », slov.<br />
porojâj ;<br />
slrëljai « tir, portée de flèche » et dostrëljai, slov. strçljâj « coup<br />
de feu » et « portée » ;<br />
velicai « orgueil, superbe », sur velicati sç ;<br />
v. r. uxozai « appartenances (d'un domaine) », comme uxodu<br />
( § 724) et comme ugozai.<br />
§ 1031. Dans les langues slayes. — Le type, qui a eu sa<br />
productivité en vieux russe, ne se conserve en russe moderne que<br />
dans deux ou trois formes traditionnelles. Il en est de même en<br />
tchèque, et en polonais, où l'on note en vieux polonais w posrzac(i)aj<br />
« à la rencontre de » sur posrzesc, posrzatnqc, et kraczaj « pas »
528 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
(§ 1032). Mais il présente une grande extension en serbo-croate<br />
et en slovène.<br />
En serbo-croate, assez rarement sur thème verbal sans préverbe :<br />
mjêsâj « quantité de farine pour une fournée », sur mijèsiti<br />
«pétrir» (§ 607); nôsâj «ce qu'on porte» (fardeau, vêtement) ;<br />
vrsâj « gerbe d'épis à dépiquer », sur vfse- ; mais très largement<br />
avec préverbe :<br />
dogadâj « événement », sur dogâdati se ; zàmasâj « mouvement<br />
(du bras) », d'où « portée, importance », sur zamâhnuti « lever le<br />
bras » ; nàmjestâj« ameublement », sur nàmjestili « placer, meubler » ;<br />
ôprostâj « rémission », sur oprosliti ; nàrastâj « génération », sur<br />
narâsti ; pôvracâj « restitution, retour », sur povrâîiti, pôvracati ; etc.,<br />
et nàruëâj « brassée », qui a perdu contact avec narûëiti « mettre<br />
en mains, donner commission ».<br />
Sur des dérivés comme pômisljâj, le suffixe s'est élargi en -Ijâj :<br />
guiljâj « gorgée », de gùtali « avaler » ; râstegljâj « longueur des<br />
bras étendus », sur raslégnuti « étendre » ; zàvezljâj « liasse », sur<br />
zavézati ; pôtprasljâj « charge de poudre », sur potprâsiti « garnir<br />
de poudrerie bassinet du fusil) » ; etc.<br />
On a à l'inverse des formes simplifiées en -âj sans alternance<br />
consonantique :<br />
ancien dihaj « souffle », uzdihaj « soupir », sur dihati, mod.<br />
ùzdisâj, sur ùzdisati ; stupa j « pas », sur stùpiti, stùpati « marcher » ;<br />
zàlogâj « morceau, bouchée » (depuis le xvi e siècle) et zàlagâj,<br />
sur zalôziti, zalâgati « mettre dans la bouche ». Ce dérivé en -âj<br />
présente un sens plus concret que les postverbaux, zâlog et zâloga<br />
« dépôt, gage » (§ 726), et il en est de même pour une partie des<br />
dérivés en -(j)âj, qui ont cessé d'être des abstraits.<br />
Et vàpâj «clameur» sur le slavonisme vàpiti (§ 514), par<br />
adaptation de v. si. vûpljï.<br />
En slovène :<br />
koraëâj « enjambée », sur korâëili ; luëâj « jet », sur luëiti, lûëati<br />
«jeter» (§ 757) ; izpusëâj «éruption (de la peau)», sur iz-pustiti,<br />
-pûscali ; doskoëâj «longueur de saut», comme doskàk (§ 733);<br />
pospesâj « accélération », sur pospésiti ; pôvracâj, néologisme au<br />
sens de « période » en mathématique, sur povrâëati « retourner » ; etc.<br />
Et élargissement en -Ijaj ;<br />
dosezâj et dosçgljaj « ce qu'on peut atteindre, portée », sur<br />
dosçze-, dosée i et doségali ;<br />
grîzljaj « une bouchée », sur grize- ; nakljûëljaj « événement<br />
fortuit », sur nakljûëiti se ; etc.
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 529<br />
Et sans alternance consonantique :<br />
zalçzaj et zalogâj ; mahâj et mâhljaj « mouvement, geste » ;<br />
brcâj « ruade », de bfcali « ruer » ; nihâj « mouvement d'oscillation »,<br />
de nihati ; stresâj « secousse », de strçsti, strçsati ; poëivâj « lieu de<br />
repos », de pocivati ; etc.<br />
Des mots comme povracâj, nihâj, sont des créations de la langue<br />
savante, qui a utilisé le suffixe également dans klicâj « point<br />
d'exclamation », vprasâj « point d'interrogation », etc.<br />
§ 1032. Suffixe -ëja. — Ce type de féminins se dégage bien, avec<br />
une certaine extension. En vieux slave :<br />
verëja « verrou », r. verejâ « montant de porte, gond », v. pol.<br />
wierzaja et tch. vereje « battant de porte, vantail », slov. verëja,<br />
à côté de veriga « chaîne » (§ 1012), sur vire- ;<br />
viizmërëja «contrepoids» (Hés., Gant. X, 10), sur vûz-mëriti ;<br />
bruzëja Actes, XXVII, 17, rendant cràpTiç « Syrte, banc de<br />
sable », mais compris « rapide (d'une rivière) », bulg. bârzej, et<br />
bruzaj (Mikl.) en slavon serbe, mot qu'on retrouve en onomastique<br />
dans s.-cr. Bhaja, nom de rivière ;<br />
jaëaja Éph. IV, 16, Col. II, 19, rendant KÇY) «(point de) contact,<br />
jointure », et diminutif jaëaica (Upir', Zach. IV, 2, 12), rendant<br />
smxpocrrpL;, lat. infusorium « (bec) qui sert à verser (l'huile dans<br />
la lampe) » ; r. jaëejâ « petite ouverture ronde, alvéole », dim.<br />
jaëéjka, et altéré en veëejâ « trou de la meule ». Le mot vieux-slave<br />
n'est attesté qu'en rédaction slavonne, et serait à lire jçë-, d'après<br />
un exemple unique de l'Apostolaire de Slëpce (xn e siècle) ; mais<br />
cette graphie est contredite par d'autres manuscrits, et le rapprochement<br />
proposé avec çkutï «crochet» (§ 189) ne saurait<br />
satisfaire. Il faut sûrement comprendre (j)aëaja, sur *aëiti<br />
«regarder» (§ 615), avec le sens de «regard», ouverture pour<br />
regarder, cf. okno « fenêtre » (§ 1074).<br />
Dans les autres langues : J<br />
b.-sor. jëscejë, fém. plur., « gueule du four », v. tch. niestëjë, puis<br />
nistëj, avec le -n- de liaison (§ 83), slov. istéje et mestëje (pour<br />
-n-ëst-) : sur la racine i.-e. *aidh- « brûler », gr. aïOw, lat. aedês<br />
« maison » (c'est-à-dire « foyer »), avec élargissement en *-s-todans<br />
lat. aestus « chaleur brûlante », ou en slave directement<br />
en * -to- ;<br />
r. kolejâ « ornière », ukr. kôlija, slov. kolëja, v. tch. kolejë et<br />
mod. kolej, pol. kolej, fém., « rail, suite, tour », anciennement<br />
« ornière » : dérivé de kolo « roue » ;<br />
v. r. mlatëja « cheville, talon, acpupôv », élargissement de mlaiù<br />
« marteau » (§ 1160), cf. gr. cripupov et
530 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
v. r. lolceja, mod. tolëejâ « pilon », sur tolkâl' ;<br />
v. pol. sciezeja, -zaja « gond, pivot », d'où pol. mod. na sciezaj<br />
« tout grand ouvert » ; v. tch. slezejë, mod. stëzejfe) « gond » ; slov.<br />
na slezâj, mais sans doute polonisme ; stozaj « gond » en glagolite<br />
croate d'après Stulli, mais plus sûrement s.-cr. stezà(j)ica : sur<br />
le thème sîeg- de slezerû « soutien, pieu qu'on pique » (§ 1120) ;<br />
v. pol. pierzej(a), mod. pierzaja «rangée de maisons, rue», et<br />
tch. perej, fém., «rapide (de rivière)»; et sûrement aussi s.-cr.<br />
perâja « nageoire » et « soies du porc sur le dos », en regard de<br />
peràjica « carde », pèrjati « carder » : sur le thème per- polyvalent,<br />
ici avec idée de « traverser, passer sur » ;<br />
pol. knieja (depuis le xiv e siècle) « rayon de chasse à courre dans<br />
une forêt, varenne », r. dial. knejâ, et nom de lieu, v. tch. Kniejë :<br />
dérivé *kunëja du polonais ancien kien « souche » (et kien d'après<br />
pien), locution do kna « à fond », verbe knuc « arranger » (§ 523) ;<br />
v. tch. krocëjë « pas », mod. krocej, fém. et masc., et pol. dial.<br />
kroczaj, masc., v. pol. kraczaj sur kroczyé, kraczaé ;<br />
tch. krùpëj, fém., «goutte», v. tch. krôpë (§ 1022) et krôpëjë,<br />
et krâpëj, v, tch. krâpë et krapëjë, sur kropili « goutter », v. tch.<br />
krdpëli et mod. krâpati ;<br />
r. âolzejd « cannelure, rainure en longueur », sur dolzâl'<br />
« s'allonger » ;<br />
r. lazejâ « trou étroit (où l'on se glisse) », sur lâzii'.<br />
Et s.-cr. prèkaja « moulin à eau dont les aubes sont en travers,<br />
prëko », sùvaja « moulin à chevaux » (à sec, suh-, suv-), en toponymie<br />
Sùvaja « source, rivière à sec », Krivaja, nom de rivière et<br />
de monastère, qui peuvent s'expliquer soit par une finale slavonne<br />
-aja, soit comme Brzaja par un ancien -ëja.<br />
Ces formes attestent l'extension du suffixe -ëja. Le vieuxtchèque<br />
ducëjë qui traduit « cataracte » est pol. ducza « canal »<br />
et duczaj(a), d'où r. dial. duëâj, emprunt à l'italien doccio « conduit,<br />
tuyau », d'où fr. « douche ».<br />
§ 1033. Autres formations. — Une finale *-ëjï apparaît isolément<br />
dans le slavon k(u)lëi «colle», masc., r. et pol. klej, slov. klej<br />
« colle » et « bitume ». Le serbo-croate dialectal klïja est sur klijati<br />
« coller », sans doute de *klëjati dont o-klijèvati « tarder, temporiser<br />
» doit être l'imperfectif dérivé. Le vieux-tchèque kli « ce qui<br />
colle, résine, bitume » (gén. klé), puis klij, klej, indiquerait une<br />
variante *kùlïjï. Le slovène keliti « coller » est une forme dialectale<br />
de klejiti, comme s.-cr. kalj (« glu ») et këlj de l'ancien *klëj.<br />
L'origine du mot n'est pas claire, et un rapprochement avec gr.<br />
xoXXa, lat. vulg. colla, n'est pas acceptable.
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 531<br />
Sont à part également :<br />
v. si. lisai «dartre» dans l'adjectif lisaivu (§ 995), r. lisâj, pol.<br />
liszaj, tch. lisej, slov. lisâj, s.-cr. lïsâj « lichen » et « dartre ». Le<br />
mot a dû subir l'influence du grec Ast^v et de son double sens,<br />
mais il n'en est pas l'emprunt ; l'aspect est d'un dérivé de lixû<br />
« de reste », pol. lichy « chétif, en mauvaise santé », etc. (§ 1138).<br />
Y. r. ruëai « ruisseau, torrent » (mod. rucéj, gén. ruë'jâ), pol.<br />
ruczaj, tch. ruëej, sur un thème ruk- qu'on ne trouve en ce sens<br />
que dans bulg. rûkne-, rûkva- « couler avec force, jaillir », mais<br />
qui peut être le même que celui de slov. rûkati « mugir », verbe<br />
expressif comme v. si. rykati « rugir ».<br />
On a aussi des dérivés en -ëj-, -(j)aj-, désignant des êtres<br />
animés :<br />
v. si. Içzaja « poule '(qui couve) », sur lç£e- « couver » (§ 447) ;<br />
v. pol. kurzeja « poule qui glousse et ne pond pas », masc. kurzejec<br />
« chapon », et r. dial. kurejâ « castrat, hermaphrodite », ukr. kurij<br />
« chapon », sur kurû « coq » (§ 1114).<br />
Le vieux russe présente tout un type de noms d'agents :<br />
mlëja « femme qui moud », mod. melejâ (et « manivelle de<br />
moulin »), sur mêle- ;<br />
s(ï)vëi « tailleur » et zolotosveja, masc., mod. svejâ, fém., zolotosvéj<br />
« brodeur », masc., et fém. zolotosvéja ;<br />
lûcaja « tisseuse », mod. t(o)cejâ, et Ikejâ sur Ikal' ;<br />
isëeja « demandeur, plaignant », mod. isëeja, et isëeja, isëéjka,<br />
fém., «chien (sobâka) limier», sur isce-, iskdt' ;<br />
promuzai « qui tarde (à payer) », sur muditi ;<br />
poprasai « quêteur, collecteur », sur -prasati ;<br />
vorozeja « diseuse de bonne aventure », mod. vorozéj, masc., et<br />
vorozejâ, masc. et fém., sur vorozit' (§ 771).<br />
§ 1034. Dans les langues modernes. — Le russe moderne a<br />
toute une série de ces noms d'agents :<br />
berejd « femme qui cueille (les baies) », sur berë-, brat' ; peëejâ<br />
« cuisinière » ; pisejâ « femme qui sait écrire » et « écrivassière » ;<br />
plaëejâ « pleureuse » ; pletejâ « dentellière », pljasejd « danseuse » ;<br />
vjazejâ, masc., « lieur », et fém., « lieuse » ; ënejâ « moissonneuse ».<br />
L'ukrainien a en regard un type masc. -ij, de *-ëjî :<br />
zriij, pletij « tresseur », dadij «donneur», etc.<br />
Et le russe, dans la langue populaire, un type en -ej :<br />
babéj « amateur de femme, bdba », ukr. babîj ; bogatéj « richard » ;
532 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
gordéj « homme hautain », ukr. hordij ; kosééj « squelette ambulant,<br />
avare », ukr. kosëlj, sur l'adjectif v. r. kosëï « osseux » (§ 958) ;<br />
en -aj :<br />
dolgâj « homme ou objet long » ; golodâj « un affamé » ; korotâj<br />
« une blouse courte » ;<br />
en -jaj et -Ijaj :<br />
negodjâj « mauvais sujet, bon à rien, negôdnyj » ; kisljâj « homme<br />
sûri, kîslgj, flétri » ; lentjâj « homme fainéant, lenivyj » ; etc.<br />
Le vieux polonais avait nogaj « homme à longues jambes ».<br />
Le slovène a des noms d'agents en -âj :<br />
ëuvâj « gardien », strezâj « domestique, valet », toëâj « verseur,<br />
garçon de café », et kriëâj « le criard », etc., dont on ne séparera<br />
pas les noms d'instruments, qui pourraient continuer le type en<br />
-ëja (§ 1032) :<br />
p(e)hâj et psâj « pilon », sur psè-, phâti (§ 468) ; prçgljaj « cheville<br />
du joug » et prçgelj, sur prçg- « atteler » ;<br />
et des formes populaires en -ej, nombreuses et diverses :<br />
bogâlej « richard » ; dêdej « grand-père », de dèd et dedè ; fântej<br />
« garçon », de fànt et fanlè (ital. faute) ; diminutifs môzej pour<br />
mgzek, de môz « homme », dèzej de dèz « pluie », etc.<br />
Le serbo-croate a des noms en -aja, surtout dialectaux :<br />
sùrn(j)aja « femme du beau-frère, sùrâk » ; mjesâja « pétrisseuse »<br />
sur mijèsiii « pétrir » (et mjësâj « du pétri », § 1031) ; perâja « blanchisseuse<br />
» (et perâja «nageoire», § 1032, à côté de prèkaja, etc.).<br />
§ 1035. Les origines. — Le baltique a des noms d'agents en lit.<br />
-ëjas, lette -êjs, tirés de verbes, et bâtis spécialement sur le thème<br />
du prétérit en -ë- :<br />
lit. davëjas « donneur », sur dûodu, dàoti, prêt, dâvé-, et lette<br />
devéjs sur duôt, prêt, devê- (§ 633) ; lit. vedëjas «guide» sur vedu,<br />
prêt, vëdê-, meldëjas « qui prie » sur meldziù, meldê-, rasëjas « qui<br />
écrit » sur rasaù, râsê- ; et, avec généralisation de -ëjas, sèjëjas<br />
« semeur » sur sëju, sëti, prêt, sëjo-, de même lette sëjëjs.<br />
Un autre type est en -âj- et dénominatif : lit. vasarôjis « blé d'été,<br />
vasarà », lette vasarâjs et vasarâja ; lette eglâjs « bois de pins » sur<br />
egle « pin » ; etc.<br />
En slave, tous les types peuvent se ramener à un même type en<br />
-e/-, -(j)aj-, déverbatif avec des valeurs diverses, d'abstraits, de<br />
noms d'agents, etc. ; un type en -aj- apparaît secondaire.<br />
Il doit donc s'agir de dérivés balto-slaves, nouveaux et sans
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 533<br />
correspondants dans les autres langues indo-européennes, sur des<br />
thèmes verbaux en -ê-. Ces thèmes verbaux sont ceux des verbes<br />
d'état et des prétérits (§ 599), en slave de l'imparfait, et ainsi v. si.<br />
mystjai rejoint l'imparfait mystjaaxu comme lit. vedéjas le prétérit<br />
vèdé-.<br />
SUFFIXE *-tajï<br />
§ 1036. — Les exemples sont en vieux slave :<br />
sudruzatai (J. Ex.) « qui tient », vuzdruzatai (Izb. Svjat.) « qui<br />
retient » ;<br />
prëlagatai et -log- (Gr. Naz., Ham. 45426, 46630) «rapporteur,<br />
espion » ;<br />
ratai « laboureur », pol. et sor. rataj, polabe ratôy, s.-cr. ancien et<br />
dial. ràtâj, slov. rataj (§ 69), et r. ordtaj sur orât' ;<br />
posluxatai (Ham.) « qui écoute, obéit », et en slavon « auditeur » ;<br />
uxoposluxatai (Ham. 32012) « qui prête l'oreille,
534 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
*-atajl : verbe et substantif sont deux emprunts à l'ukrainien,<br />
huldiy, r. guljâl' «fainéanter», et hultâj, hultjâj, r. dial. gult(j)âj,<br />
du type expressif des mots en r. -(j)âj, -tjàj (§ 1034).<br />
Une seule forme se rencontre dans toutes les langues slaves,<br />
*ratajï «laboureur» : elle remonte au balto-slave, lit. arlôjas<br />
(-jis), v. pr. artoys.<br />
En baltique, on a un suffixe productif -tâj- de noms d'agents,<br />
sur thème verbal : lette -tâjs, fém. -tâja, qui peut se tirer de tous<br />
les verbes en -âl, -ît, etc., à thème dissyllabique, dziêdâtâjs<br />
« chanteur » de dziêdât, gulêtâjs « dormeur » de gulêt, darîtàjs<br />
«qui fait» de darît ; lit. -tojas (-tojis), sur les verbes à thème<br />
vocalique, giedôtojis de giedôti, darylojis de daryti, et aussi directement<br />
sur le thème verbal, pustôjis « souffleur » sur puciù, pûsti<br />
« souffler » comme artôjis sur ârîi « labourer ».<br />
En slave, le cas de *ratajï étant à part, tous les dérivés sont sur<br />
thème en -a-, et vozatai, xodatai sont distincts de voziti, xoditi ;<br />
posluxatai l'est de poslusali et est en regard de posluxû (§ 755),<br />
pozoratai en regard de pozoru (§ 728). La ressemblance est nette<br />
avec le type particulier d'itératifs de s.-cr. hôdati (§ 574).<br />
Le suffixe balto-slave *-tâja- apparaît comme un élargissement<br />
en *-yo- du suffixe *-tâ- que le grec a développé pour la formation<br />
de noms de personnes, et surtout de noms d'agents tirés de verbes :<br />
*ârtâya- « laboureur » correspond à gr. àporrçç.
CHAPITRE XXIX<br />
SUFFIXES EN -k-<br />
§ 1037. Suffixe -kû. Pour les substantifs, on notera d'abord<br />
les élargissements en -ku de thèmes consonantiques masculins en<br />
-men- (§ 185) : v. si. kamyku, kremykû (Gr. Naz.), jçëïmyku (Izb.<br />
Svjat., Ham.), slavon plamyk et pol. piomyk, remyku. et pol.<br />
rzemyk, s.-cr. pramik (pramîcak) et pol. promyk, bulg. yrûmik,<br />
pol. kosmyk, strumyk, et de là grzebyk de greben-, qui sont faits<br />
sur des formes proprement slaves et relativement récentes de<br />
nominatifs masculins singuliers ; — jçzyku sur thème masculin<br />
en *-û- (§ 202) ; mésgcî sur thème consonantique en -n-, et zajçcï<br />
(§ 183).<br />
On a d'autre part en vieux slave :<br />
znaku (Cyr. Jér.) «une connaissance, un familier», r. znak<br />
« signe », s.-cr. et slov. znâk, sur le thème verbal zna- ;<br />
zrakû « vue, aspect », prizraku « vision, apparition », etc. (§ 771),<br />
en regard de -zrëce-, -zrucati (§ 542), mais représentant *zor-ku<br />
sur le thème nominal du postverbal -zoru(§ 728) ;<br />
zvçku (J. Ex.) et zvçku (Gr. Naz.) « son », slavon prozvçku (§ 763),<br />
en regard de zvçknçti, zvçcali, mais avec zvçkû de *zvon-ku, sur le<br />
thème du postverbal zvonu (§ 727).<br />
Il n'y a donc pas de difficulté, pour v. si. braku « noces », et<br />
« fête, festin » en vieux russe, qui n'est sûrement dans r. brak<br />
qu'un slavonisme, comme brâk l'est en serbo-croate, à l'interpréter<br />
par *bor-ku, sur le thème du postverbal -borû (§ 728) et au sens<br />
nouveau « rassembler » de la racine *bher- en slave (§ 471).<br />
Y. si. zlaku « verdure, herbe », en regard de zelije « légumes »<br />
(§ 925), est sûrement aussi un slavonisme dans r. zlak, et l'on<br />
peut y reconnaître un élargissement *zol-kû de la forme balto-slave<br />
zal- de lit. zàlias « vert » et' zâlas « rouge », si. *zol-tu « d'or » ; la<br />
forme proprement russe doit être conservée dans le dialectal<br />
zôlok « rougeur du ciel ».<br />
Pour tch. prak « fronde », r. pôrok « baliste », voir § 1026 : ce
536 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
peut être un élargissement *por-ku du thème du postverbal -poru<br />
(§ 728).<br />
V. si. luku « graisse », r. tuk, et lit. tdukas (§ 761) est un élargissement<br />
de la forme tau- du thème du verbe v. si. tyje-, tyti, postverbal<br />
*tovu (§ 730).<br />
Avec des substantifs comme *gulkû « bruit, tapage », r. yolk,<br />
tch. hluk, en regard du verbe r. golcât', tch. hlûceti, ou r. sluk<br />
« bruit de ce qui cogne », verbe stûkaî' « heurter », stuôâi' « cogner »,<br />
on a affaire à des postverbaux de verbes en -kati et -ëati (§ 818) ;<br />
mais c'est tout le problème de la formation de ces verbes, dont<br />
le point de départ doit avoir été dans les élargissements nominaux<br />
en -k- de thèmes expressifs (§ 560).<br />
Le mot byku « taureau » doit de même se rattacher au thème<br />
du verbe s.-cr. bàkati « faire du bruit, mugir », prés, bûkâ- et bûëë-,<br />
tch. buëeti « beugler », mais avec une alternance vocalique, et sa<br />
variante *bukû dans s.-cr. bàk, attesté depuis le xvi e siècle à côté<br />
de bîk, fait supposer une flexion ancienne *bûkati, prés, buëe-<br />
(§ 544), à itératif *bykati.<br />
§ 1038. Adjectifs. — Outre la série pronominale de kaku « de<br />
quelle sorte », d'où s'est dégagé un suffixe -aku (§ 861), on a prëku<br />
« qui est en travers », s.-cr. prïjek, slov. prêk, adv. v. si. prëky<br />
(Ham.), vu prëky, r. poperëk, qui est *per-ku sur le préfixe *per-,<br />
prë- ; — et v. si. proku « le reste », prokyi, adjectif et substantif,<br />
sur pro- (§ 272), avec adverbe proëï, oprocï (§ 1199).<br />
L'adjectif et adverbe nicï « tête baissée », r. nie, nik, nâ-nic'<br />
(§ 1199), est *nï-ko-, sur la particule i.-e. ni (§ 275) ; pour son<br />
contraire vuznakù « à la renverse », voir § 861.<br />
L'adverbe v. si. paky « de nouveau », opaky « en arrière », est<br />
fait sur une forme qui répond à skr. âpâka-, dérivé en *-ko- du<br />
préfixe apa-, gr. OTTO (§ 322). Le sanskrit a des dérivés en -kaet<br />
tout un type de dérivés en -anc- sur adverbe et préposition,<br />
et sur anu « à la suite de, après » il a anvânc- « suivant », anuka-<br />
« épine dorsale » : ce qui permet de supposer que v. si. vunuku<br />
(Gr. Naz., Izb. Svjat.) « descendant, petit-fils », fém. vunuka<br />
( § 708), sur une forme vûnu- pour skr. et av. anu-, comme vu « dans »<br />
pour *en (§ 73), est un dérivé parallèle à skr. anv-aya- «descendance<br />
».<br />
L'adjectif v. si. xlaku « célibataire » (Gr. Naz., Izb. Svjat.),<br />
v. r. xoloku, présente une initiale x- qui ne doit pas être slave, et<br />
il est considéré comme un emprunt au gotique halks « privé de,<br />
indigent », mais il ne semble pas séparable de son synonyme<br />
xlastu, r. xolostôj (§ 1159), dont la forme doit être expliquée. Le<br />
sens des deux adjectifs paraît être « qui ne se reproduit pas, stérile » :<br />
r. xolostôj signifie aussi « châtré », et « vide de frai » en parlant du<br />
poisson, et le slavon ne xlakaja rend « (femme) enceinte ».
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 537<br />
Pour diku à côté de *divïjï, voir § 959 ; et pour ploskû «plat »,<br />
§ 1065.<br />
§ 1039. Finale -ko. — Dans abluko « pomme », r. jâbloko, pol.<br />
jabiko, etc., à côté de ablanï «pommier» (§ 1084), on doit<br />
reconnaître l'élargissement en -ko d'un neutre *âblu- (§ 174),<br />
parallèle à l'élargissement en -kû des masculins.<br />
De v. si. vëko «paupière», r. véko, sans rapport avec l'autre nom de<br />
la «paupière», v. si. vëzda (§ 1026), le sens est proprement «couvercle»<br />
: r. véko dans dial. vékosnik «chiffonnier» (§ 1149), tch.<br />
viko, et oënl vicko « couvercle de l'œil, paupière » ; slov. véko et<br />
véka avec verbe véëiti « munir d'un couvercle » ; pol. wieko<br />
« couvercle » et powieka « paupière », formation parallèle à pokrywa<br />
«couvercle» (§ 730) et qui fait supposer le développement d'une<br />
forme verbale en po-., Le correspondant baltique est lit. vôkas<br />
« couvercle, paupière » et vôka, lette vâks « couvercle, couverture ».<br />
La forme balto-slave était donc *vëk-, avec une forme alternante<br />
*vôk- à vocalisme nouveau -â- en letto-lituanien (§ 49). Ce thème<br />
est isolé, avec un verbe lit. vôkiu, vôkti « mettre à l'abri », lette<br />
vâkt, qui peut n'être qu'un dénominatif en -ye- (§ 554) de lit.<br />
vôkas.<br />
§ 1040. Suffixe -ka. — On a un élargissement en -ka, aussi récent<br />
que -kû dans le type kamykû, dans v. si. vladyka, masc., « gouverneur,<br />
seigneur », s.-cr. vlàdika, pol. wiodyka, sur le nominatif<br />
masculin singulier vlady « gouvernant ».<br />
La finale du féminin v. si. motyka « houe », r. motî/ka, s.-cr.<br />
môtika, est obscure comme le mot lui-même : on soupçonne un<br />
emprunt, et la ressemblance avec angl. mattock « pioche » ne doit<br />
pas être accidentelle, mais le bas-latin *mattia qui serait la base<br />
d'un dérivé en -ûca désigne un autre outil, la « masse ».<br />
Dans v. si. blizika « le prochain » et çzika « le parent proche »,<br />
l'élargissement est sur le nominatif masculin singulier des comparatifs,<br />
*blizii, neutre blize, de *blizûku (§ 275), r. uze, s.-cr. uzï, de<br />
çzûkû «étroit» ; la désinence -(j)i(i) dérive ou est remaniée de<br />
i.-e. *-yôs (§ 286), et elle n'appelait pas l'alternance k : c dans<br />
le suffixe.<br />
C'est au contraire une forme -ca qu'on a dans v. si. matica<br />
« matrice », s.-cr. mâtica et slov. mâtica « matrice, original » et<br />
« reine des abeilles », pol. macica « matrice » et « cep de vigne », r.<br />
mâtica « poutre de soutien d^un plafond » : ici, la désinence de la<br />
base mati est -i, de *-ï substitué à *-ë (§ 197), comme dans le<br />
suffixe -ica.<br />
Dans v. si. it'ca« fil de la trame » (Pand. Ant., et non izica Srezn.),<br />
s.-cr. zïca « fil », r. dial. ïica, le thème est *gij-, *gï- de lit. gijà
538 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
« fil de la trame », véd. jiyâ- « corde de l'arc », gr. (3i6ç « arc », et<br />
v. si. zila « veine, nerf », etc. (§ 1051).<br />
Pour r. sûka « chienne », pol. suka, polabe sauka, voir § 182 :<br />
le thème su- peut être celui de l'ancien nominatif masculin singulier<br />
lit. suô de sud.<br />
Y. si. kljuka «tromperie», adj. kljukavu «trompeur» (§ 993),<br />
r. kljukd « crosse », pol. kluka « mentonnet de la serrure » et « piège »,<br />
tch. klika « poignée, manivelle », s.-cr. kljuka et slov. kljûka<br />
«crochet, loquet», a l'aspect comme kljuëï «clé» (§ 1041) d'un<br />
dérivé du thème de lit. kliuli « être accroché ».<br />
Le slavon dlaka, s.-cr. dlâka «poil», slov. dlàka, et composé<br />
vlukodlaku « loup-garou », s.-cr. vukàdlak (§ 1227), n'est connu que<br />
par le slave méridional, et l'on ignore si le thème était *dol- ou<br />
*dïla-, ou encore *dla- comme *tlâ- dans le nom de l'« ours » en<br />
baltique, v. pr. clokis, lit. lokys.<br />
Slov. mlâka « flaque, mare », s.-cr. mlàka, tch. mlâka, pol. mlaka<br />
ou mloka, n'est pas plus clair ; les adjectifs s.-cr. mlâk « tiède »,<br />
et slov. mldhav « mou, flasque », s.-cr. occidental mlôhav (pour<br />
mla-, sans doute par attraction de l'italien molle), avec le -cedéformant<br />
(§1139), doivent se rattacher à ce mot. Un rapprochement<br />
avec lat. flaccus (et fr. « flache, flaque ») est possible par un<br />
thème *mlâ-k-, gr. [3 A Sx- et {ilrf/rjôç « mou », skr. mlâtdh « amolli ».<br />
Le mot rëka « rivière » n'est pas en rapport avec rëje-, rëjali,<br />
mais c'est le postverbal d'une racine lit. reik- (§ 512).<br />
R. scekâ « joue », pol. szczeka et szczeka « mâchoire », et r. pâsceka<br />
«mâchoire (de bête) » (§ 1220), est probablement d'origine expressive,<br />
et peut être le postverbal d'un verbe comme pol. szczekac<br />
« aboyer », szczçkac « cliqueter ».<br />
R. drâka « rixe, coup », et dërka, dirka, sur drdt'sja « se battre »,<br />
derë-sja, a sûrement pris sa finale -ka aux postverbaux des verbes<br />
expressifs en -kali (§ 818).<br />
Le slavon luska « écaille », r. luskâ, etc., est postverbal d'un verbe<br />
en *-ske- (§ 759).<br />
Et pour v. si. kyka « touffe de cheveux », voir § 802.<br />
§ 1041. Suffixe -cï. — On a -cl en vieux slave dans trois noms<br />
d'instruments :<br />
bicï « fouet », r. bië, gén. bicâ, s.-cr. blc, gén. blca, de biti<br />
« frapper » ;<br />
briëï (Gr. Naz., Upir') «rasoir», ukr. bryë, bulg.-macéd. bric,<br />
de briti « raser » ;<br />
kljuëï « clé », r. kljuc, gén. kljuëd, s.-cr. kljûë, gén. kljûëa, à côté<br />
de kljuka « crochet », et en regard du verbe lit. kliij.vù, kliùli « être
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 539<br />
accroché », et de lat. clâuis « clé », clàuus « cheville », claudô « je<br />
ferme », gr. xXs£ç de xAcl{F)iç.<br />
Y. si. zluëï « bile » passant à i/uci (§ 12), r. zë/c, slov. zôlc, s.-cr.<br />
iûc, est féminin, et en regard du verbe pol. zotknqc « jaunir », r.<br />
zèlknut' « se flétrir », tch. zluknouli « rancir », et de l'adjectif<br />
*zïlkûku « amer » dans slov. zôlhk-, s.-cr. zû(h)k- (§ 986) ; le rapport<br />
avec le thème zel- « vert » doit être celui d'un abstrait en -ï sur<br />
l'adjectif *zïlkù-ku, tiré de l'inchoatif *zïlk-nçti, ce qui mène à<br />
*zil-kaii avec l'élargissement en -k- des verbes en -kati et -cati<br />
(§ 560).<br />
Pour vraëï « médecin », voir § 1020.<br />
Les suffixes productifs sont -aëï (§ 854) et -iëï (§ 858).<br />
§ 1042. Suffixe ~iku. — Ce suffixe est productif sous la forme<br />
-nikû (§ 842) ; il n'apparaît autrement en vieux slave que dans :<br />
Ijubimiku « l'aimé » (§ 845) à côté de Ijubljeniku ;<br />
zlatiku «pièce d'or», dont le Suprasliensis offre un exemple<br />
unique pour 12 exemples du féminin zlatica, et pour zlalïniku,<br />
(Ham.), r. zolotnik, tch. zlalnik, etc., mais qui est confirmé par<br />
le moyen bulgare (Manassès) et attesté aussi en vieux serbe.<br />
Dans les langues slaves, les formes en -ik sont nombreuses,<br />
mais elles résultent de développements nouveaux, sur des bases<br />
anciennes qu'il faut essayer de retrouver.<br />
Le russe présente -ik dans des noms dérivés d'adjectifs :<br />
tupik « cul-de-sac » et « couteau émoussé », de lupôj ; maxovik<br />
« volant (de machine) » sur maxovôj « de mouvement » ; parovîk<br />
« chaudière à vapeur » sur parovôj ; pisëevik « estomac (des petits<br />
animaux» sur pisëevôj « alimentaire»; berëzovik «mousseron»<br />
sur berëzovyj « de bouleau », osinovik « girolle » sur osinovyj « de<br />
tremble », ryzik « bolet (roux) » et « (enfant) rouquin » sur ryzij<br />
« roux » ; — dans des dérivés de numératifs : ëetverik « boisseau,<br />
quart d'os'mina », sesterik « ce qui va par six » (des fils, etc.) ;<br />
— particulièrement dans un type productif de noms de personnes :<br />
frontovik « militaire du front, frontovôj, kadrovik « des cadres,<br />
kâdry », massovik « de masse, massa », peredovik « journaliste<br />
peredovôj, des articles de tête », etc.<br />
Un autre type productif est celui des diminutifs : dômik de<br />
dom, dôzdik de dozd', kljûcik de kljuë, nôzik de noz, almdzik de<br />
almdz « diamant», etc. ; — et -cik (§ 866) : avtomobil'ëik de avtornobil',<br />
kolokél'ëik « clochette » de kôlokol « cloche », avec -/'- de<br />
la forme antérieure en -ici, kolokôlec, à laquelle -ik s'est ajouté.<br />
Le polonais a des dérivés d'adjectifs : czyêcik « balsamine »,<br />
krwawik « variété (erythraeus) d'araignée », rychlik « (légume)
540 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
hâtif » sur rychly, mlodzik « jeune homme », etc. ; sur thème verbal<br />
budzik « réveille-matin » ; et des diminutifs : konik, nozyk, stolik,<br />
wietrzyk « brise », etc., et en -czyk (§ 866).<br />
Le tchèque a un type sur adjectif : malik « le petit doigt »,<br />
odpadlik « rénégat, apostat », zbohatlik « nouveau riche » de zbohalnouli<br />
« s'enrichir » ; et un type de diminutifs : nozik, vëtrik, vozik<br />
« charrette », chlapik « jeune gaillard » de chlap, avec forme dérivée<br />
en -icek : konik remplacé par koniëek.<br />
Le slovène a divers dérivés en -ik : dusik « azote » sur dusiii<br />
« étouffer », pepelik « potasse » sur pepçl « cendre » ; prosnjik « intercesseur<br />
» sur prôsnja « prière » et adj. prôsnji, sprêdnjik « devancier »<br />
sur sprêdnji « de devant », srêdnjik « (doigt) du milieu, srêdnji » ;<br />
imenlk « index des noms », spomenik « monument » sur spomçne-<br />
« faire souvenir », jesenik « septembre » sur /es|n « automne » ;<br />
•— mais sans diminutifs, et grozdik, donné exceptionnellement<br />
comme diminutif de grùzd « grappe (de raisin) », doit en être un<br />
dérivé au sens de « grappe de clématite » : les diminutifs sont en<br />
-eA.(§ 840) et -ic (§ 868), grozdèk et grozdlc.<br />
Le serbo-croate, dont les diminutifs sont comme en slovène<br />
en -ac et -ic, a des dérivés d'adjectifs : tàplïk « vent tiède » et<br />
« serre chaude », de tôpl-, vèdrîk « endroit sans roseaux d'un<br />
marais » de vêdar « clair », mrtvïk « homme molasse, fainéant »,<br />
siànïk « salière », jàbukovïk « cidre, eau-de-vie de pomme » ; et<br />
tout un type de dérivés de noms d'arbres et de plantes : bdrïk<br />
«pinède», jèlïk «sapinière», brèzlk «bois de bouleaux», gràb(r)ïk<br />
« bois de charmes », ôvsïk « folle avoine » de ôvas « avoine », etc.<br />
§ 1043. Les origines. — On mettra à part le type des mots<br />
savants en -ik, r. akadémik « académicien », grammâtik « grammairien<br />
», dont on a un exemple en slavon russe du xm e siècle,<br />
negramolikû.<br />
Un élargissement en -ïk de masculins en *-îjï, -ï (§ 146) est<br />
parallèle à l'élargissement en -ykû des masculins en -y (§ 1037) :<br />
r. cerevik « soulier », macéd. crévik, pol. Irzewik ; tch. hrebik<br />
«clou»; tch. febfik fzebrik) «échelle»; pol. rzepik et tch. repik<br />
« bardane » ; pol. siowik et tch. siavik « rossignol ».<br />
Et slovaque klik (tch. klicek) «germe» de v. tch. kli (§ 1028) ;<br />
le récent uhlik « carbone » peut être fait sur le collectif uhli<br />
« charbon » (§ 933), ou directement sur uhel.<br />
Un suffixe -iku est ancien en slave à côté de -ïcï : c'est lui qu'on<br />
trouve dans le type kolikû d'adjectifs pronominaux (§ 261), seliku,<br />
toliku, jelikû(ze), slov. onôlik, s.-cr. onolik, ovôlik, tch. vseliky<br />
et v. si. vïseiicï, adv., tirés des adverbes kolï, etc., et dans l'adjectif
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 541<br />
veliku tiré de velï- à côté de velii {§ 276). La forme -iku suppose<br />
*-eiko- (§ 19), et il s'agit donc d'un élargissement en *-ei-ko- de<br />
thème en *-iyo-, celui des masculins en *-ïjï et des neutres en -ïje.<br />
La quantité de -niku est longue dans s.-cr. -nîk, longue aussi dans<br />
tch. -nîk, et l'accent du slovène, ucenik, dolznik, indique une<br />
métatonie sur intonation douce (§ 102), ce qui restitue une<br />
accentuation finale *-ei-kô-, comme *-i-kô-, *-u-kô~.<br />
Le vieux slave a zlatiku de l'adjectif zlattt « d'or » parallèle à<br />
sïrebrïniku de sïrebrïnu « d'argent », et Ijubimiku sur le participe<br />
présent passif parallèle à -(j)eniku sur le participe passé passif.<br />
D'autres substantifs en -iku peuvent être anciens : v. r. vëniku<br />
« faisceau, botte », mod. venik « balai (de branches) », tch. vënik<br />
« bouquet de feuilles », diffère de vënïcï « couronne » et est un<br />
autre dérivé de *vënu (§ 835).<br />
Mais si le diminutif noîiku de noèï « couteau » est assez ancien<br />
en vieux russe (xm e 'siècle) et se retrouve dans pol. nozyk et tch.<br />
noztk, il n'apparaît pas en slovène où nôzik est artificiel pour<br />
nôzek et nozië, ni en serbo-croate : le slavon a nozicï, qui est attesté<br />
aussi en serbo-croate ancien. De même, de mçzï « homme », on a r.<br />
muéik, attesté depuis le xvi e siècle, pol. mçzyk, v. tch. et mod.<br />
muiik, mais slov. mçzik est pour un plus ancien mozîc, s.-cr. ancien<br />
muzic. Comme suffixe de diminutif, -ik apparaît comme une<br />
forme nouvelle de -ici.<br />
§ 1044. Suffixe -ici. —• C'est la forme régulière prise par le<br />
suffixe -ïcï quand il s'ajoute à un thème en *-yo- (§ 63) : le vieux<br />
slave a korabicl diminutif de korabljï « bateau ». Le serbo-croate<br />
a jusqu'à l'époque moderne, du moins dialectalement, dàzdïc<br />
de dàzd. « pluie », kônjïc de kônj, kàsïc de kds « corbeille », ôgnjîc<br />
de àganj, vjètrïc de vjëtçir, et màcïe, variété d'iris, le « glaive » ;<br />
à date ancienne kraljic « petit roi » et « roitelet », c(l)ovëëic « petit<br />
homme », muîic, nozic ; ces formes disparaissent devant le suffixe<br />
-ic : vjètric, kràljic, etc. Le slovène atteste de même mozîc, le<br />
tchèque krajic « croûton, tartine » de kraj (et krdjeti « couper »).<br />
Les substantifs en *-ïjï connaissaient également un élargissement<br />
en -ic antérieur à -ik : s.-cr. ancien slavic, v. pol. trzewic et tch.<br />
stfevic, slovaque ërevic, v. tch. rodic et pol. rodzic « parent, père » ;<br />
et de même, de *-ûjï dans stryi« oncle paternel » (§ 1020), l'élargissement<br />
est s.-cr. strîc, slov. strie, tch. stryc, v. pol. stryc (stryjec, et<br />
stryk).<br />
Des formes slavonnes -ici données par Miklosich, gvozdicï,<br />
kamenicï, sont suspectes, et meëicï chez Jean l'Exarque a besoin<br />
d'être vérifié ; mais nozicï est sûr et remonte au vieux slave : acc.<br />
plur. nozicë (v. r. pour -cg) Ham. 2619 «lancettes (de médecin)».
542 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
§ 1045. Suffixe -ika. — Le russe a un groupe de noms de baies<br />
en -ika : cernika « myrtille », durnika « myrtille de mauvais goût »<br />
sur durnôj « mauvais », golubika « airelle des marais », zemljanika<br />
et suntka (sunica) « fraise ». Mais c'est en slovène et en serbo-croate<br />
que le suffixe a le plus d'extension, surtout dans des noms de<br />
plantes :<br />
slov. bedrika « une sorte de pommier », bodljîka « chardon »,<br />
cemerika « ellébore », cesmika (et cesmina) « épine-vinette », lovorika<br />
«laurier», pirika «chiendent» de *pyrïjï (§ 146), vinika «vigne<br />
sauvage » ; et mladika « jeune pousse », outre les diminutifs de<br />
tendresse comme Nanika « Annette » ;<br />
s.-cr. cemèrika, sur cëmër « poison végétal », vinika (et vinjaga,<br />
§ 1014), mlàdika (et mlàdica) ; bùnika (et bûn) « jusquiame »,<br />
Ijùtika « échalote » (Ijût « âpre, épicé »), paprika « piment » (pàpar<br />
« poivre »), perùnika « iris », sepùrika « églantier » ; jèlika (et jéla)<br />
« sapin », omorika « espèce de pin », trepètljika « tremble », ùljika<br />
« olivier » {ûlje « huile ») ; bôdljika « pointe, épine » (bôdalj « chardon »,<br />
§ 1059), bjèlika «aubier», crvènika «raisin, pomme rouge», ostika<br />
« vinaigre, ècat », solika « grésil » (soi- « sel ») ; exceptionnellement<br />
dans un nom de personne, svàstika « sœur de la femme », sur le<br />
masculin svâst, mais c'est une réfection récente de svast-ka, macéd.<br />
svéska, comme trstika « roseau » est un doublet de trska, sur trsl.<br />
Le bulgare a Ijubika « violette » (s.-cr. Ijùbica).<br />
Le collectif v. si. (Upir') zelènicije (§ 925) est sur s.-cr. zelènika<br />
et slov. zelenika « houx » et « buis », mais également r. zelenica<br />
à côté de zelenika « if ».<br />
On trouve dans l'ensemble des langues slaves pol. et tch. osika<br />
« tremble », ukr. osyka (et pol. osina, r. osina, § 893), bulg. et slov.<br />
jasika, s.-cr. jàsika, élargissement de osa conservé seulement en<br />
polonais dialectal, en polabe et dans h. sor. wosa « tremble » et<br />
« guêpe », en regard du baltique *apsâ, v. pr. abse, lette apse, et<br />
de v. h. a. aspa, mod. Espe. La forme *asika des langues méridionales<br />
présente une sorte de vrddhi (§ 708) dans le dérivé.<br />
Un mot oriente vers l'origine du suffixe : s.-cr. màslika « lentisque<br />
», du grec [j.acmyji « gomme de lentisque, mastic », lat.<br />
masticum. C'est l'adaptation du suffixe grec -IXTJ, lat. -ica, comme<br />
dans le type en -ika des langues modernes, r. fizika, etc. (§ 1194).<br />
Adaptation dans la langue des lettrés, et la langue vulgaire traitait<br />
autrement lat. -ica : s.-cr. brôskva « chou » de brassica, brëskva<br />
« pêche » de persica (§ 204). Mais les noms de plantes sont en bonne<br />
partie d'origine savante. La généralisation en slave de la finale<br />
-ika est parallèle à celle de -ich en allemand : v. h. a. (pJfenich<br />
de lat. pânïcum « millet », m. h. a. hederich « lierre » de hederâceus.<br />
Le latin laciûca « laitue » donne v. h. a. lattuch, puis passe à Lattich ;
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 543<br />
en slave, -ûca est remplacé par *-ïca : pol. iocyka, tch. locika,<br />
slov. locika, s.-cr. locika (§ 26).<br />
Si l'élargissement en -ika apparaît particulièrement ancien dans<br />
le nom du « tremble », c'est pour remédier à la rencontre avec le<br />
nom de la « guêpe » ( § 35).<br />
§ 1046. Suffixe -oku. — Une forme -oku d'élargissement en *-kode<br />
thème en -o-, parallèle à -ïcï et -ukû, est attendue dans les<br />
substantifs comme elle se trouve dans les adjectifs (§ 985). Mais<br />
elle est très peu attestée, et on peut la reconnaître seulement<br />
dans :<br />
V. r. suvëdok- (xiv e s.) « témoin », s.-cr. svjèdok (dès le<br />
xm e siècle), slov. svedàk, avec le verbe s.-cr. svjedàcili « témoigner »,<br />
slov. svedoëlti, à côté/de v. r. sûvëduk- et mod. svédok, gén. svédka,<br />
pol. swiadek, tch. svëdek, verbe pol. swiadczyc, tch. svëdciti. La forme<br />
en -okû doit être primitive, car -uku ne fournit pas de nom d'agent<br />
à date ancienne. L'aspect est d'une variante plus populaire du<br />
dérivé plus savant v. si. suvëdëieljï, et il est possible qu'elle ait été<br />
conservée comme pseudo-composé à second terme -okû (§ 1227),<br />
pour distinguer le témoin oculaire du témoin auriculaire, posluxu<br />
(§ 755).<br />
V. r. blizokû « le proche parent », et fém. blizoka. Il n'est pas<br />
assuré que l'adverbe blizu soit une forme fixée de thème en -u- :<br />
sa variante blizu peut être un datif de direction (§ 321) aussi bien<br />
qu'un locatif, et l'adjectif *blizukû apparaît postérieur au vieux<br />
slave (§ 275).<br />
Slov. snubok «entremetteur de mariage», sur snublti (§ 614),<br />
mais parmi diverses formes, snubèc, snubâë, etc. ; et s.-cr. occidental<br />
snubok à côté de snubitelj.<br />
Le tchèque prvok « protozoaire » est une création artificielle,<br />
et de même zivok « animal » ;-) zralok « requin », sur zrâti « dévorer »,<br />
est pour zarlok, emprunt au polonais zarlok « glouton », adj. v.<br />
pol. zarioczy « goulu », sur zrec, prétérit zari.<br />
Un féminin -oka n'est attesté, en dehors de v. r. blizoka, que dans :<br />
r. osôkd « carex, laîche », plante des marais à feuilles coupantes,<br />
et pol. osoka. Le correspondant baltique est lit. âsaka, asakà<br />
« arête », lette asaka, avec le suffixe -aka très rare aussi en baltique.<br />
C'est sûrement un dérivé balto-slave ancien du thème i.-e. *akdu<br />
lette ass «pointu», lit.Mstrùs et si. osiru (§ 1112), osla «pierre<br />
à aiguiser » (§ 1051). En russe la « laîche », osôkd, est appelée aussi<br />
(vJostréc, et en serbo-croate ostrica.
544 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
§ 1047. Suffixe -oëï. — De ce suffixe, ou de cette finale, on trouve<br />
en slavon du xn e siècle trois exemples dans le même texte :<br />
laskoëî « flatteur », de laskati ;<br />
Içkocï « trompeur », sur Içkû « tortueux, perfide » (§ 763) ;<br />
rçgocï « moqueur », sur rçgali (sç).<br />
Et des exemples divers dans les langues slaves : r. svétoc « torche,<br />
flambeau », bulg. bâlvôë « vomissement » ; et pol. warkocz, tch.<br />
vrkoc « natte, tresse », s.-cr. vrkoë « un gandin », dont le thème est<br />
obscur.<br />
L'aspect est celui de déformations expressives de dérivés<br />
normaux : le bulgare bâlvôë, masc., de v. si. bljïvotiny, fém. plur.<br />
(§ 894) ; et le slavon laskoëî est en regard de v. si. laskucii (§ 864).<br />
Le slavon russe a inocï «mère d'enfants d'un premier lit», adj.<br />
inoëïnjï (§ 968), masc. inoëimu (§ 1069) ; le serbo-croate a inoëa<br />
« seconde femme chez les Musulmans », var. inoca, et Miklosich<br />
signale inosta en slavon serbe, ce qui indiquerait un dérivé en<br />
*-ija, mais cette graphie isolée prouve peu, et moins encore le<br />
flottement ë : c (§ 26). Ici aussi, on penserait à une déformation,<br />
d'un *inoëçd- « mère des autres enfants » à côté de inoëçdu « fils<br />
unique ».
CHAPITRE XXX<br />
SUFFIXES EN -Z-, -m-<br />
§ 1048. Suffixe -lû! —• Formation d'adjectifs sur thème verbal,<br />
ce suffixe est entré dans la conjugaison comme participe parfait<br />
(§ 384), mais des formes nombreuses ont continué et continuent<br />
de s'employer comme des adjectifs. D'époque vieux-slave ou<br />
ancienne, on a sur radical vocalique :<br />
v. si. izgnilu « pourri » et sugnilù, r. gnilôj, s.-cr. gnjil-, sur g ni- ;<br />
v. si. unylu « abattu, triste », r. unylyj, sur ny- ;<br />
r. utylyj « gras », pol. olyly et tch. otyly, s. cr. prètio, sur ly- ;<br />
tch. cily « frais et dispos », s.-cr. cil-, slov. cil, sur po-ëili « se<br />
reposer » (§ 514) ;<br />
v. si. obilu. « abondant », s.-cr. àbil, slov. obîl, s'analyse en ob-vi-,<br />
mais une variante slavonne izvilije « abondance » de v. si. izobilije<br />
(§ 926) est très douteuse, et la racine vi- est ambiguë (§ 515) ;<br />
le slavon poxylu « courbé », r. xilyj « faible », etc., doit être sur<br />
thème xy- ( § 757) ;<br />
bëlu « blanc » se ramène à une racine *bhê- (§ 298) ;<br />
milû « digne de pitié » et « cher », s.-cr. mil-, lit. mielas et mylas<br />
« cher », méilé « amour », est sans doute sur thème *mëi-, skr.<br />
mayas- « joie, réconfort », et peut-être lat. mïlis « doux » ; et voir<br />
miru « paix », § 1114 ;<br />
malu « petit » est sans explication sûre, mais il pourrait être<br />
un dérivé du thème ma- de r. mâjat' « fatiguer, exténuer », bulg.<br />
mâe- « entraver, retarder », qui doit être ancien et correspondre à<br />
v. h. a. muoen « tourmenter, faire de la peine », adj. muodi « fatigué,<br />
faible » ;<br />
r. tâlyj « fondu », slov. tâl, est en effet sur le thème ta- de taje-,<br />
tajati (§ 508) ;<br />
et r. sâlyj « fou » est sans doute sur le thème sa- de v. si. o-sajali sç<br />
« s'abstenir » ( § 788).<br />
Mais dzëlu «violent» ne s'analyse pas (§ 820) ; non plus que
546 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
cëlû «sain, intact», sans doute emprunt au germanique (§ 10),<br />
ou formation balto-slave parallèle, si on la retrouve dans si.<br />
c(ï)lo-vëku (§ 1231).<br />
Sur thème verbal à élément thématique :<br />
v. si. ispraxnëlu (J. Ex.) « tombé en poussière », pol. sprôchniaiy<br />
«vermoulu», sur praxnëti (Upir'), de *praxnu (§ 1070) ;<br />
slavon sûmëlu « hardi », pol. smiaiy, tch. smëly, s.-cr. smjël-,<br />
de sumëti « oser » ;<br />
v. si. zïrëlu « mûr », r. zrélyj, etc., de zïrëii ;<br />
v. si. kysëlu « aigre », tch. kysely, de kysëti « fermenter », avec<br />
doublet *kyslu sur kysnçti « s'aigrir » ( § 496) dans r. kîslyj, zakislyj,<br />
mais ce doublet doit être secondaire, et pol. kisiy est pour v. pol.<br />
kisiaty, de même que s.-cr. kïsel- est passé au type de vësel- (§ 1053)<br />
pour l'ancien kisël-, dial. kïsjel-.<br />
Sur radical consonantique :<br />
v. si. drqxlu « triste », r. drjâxlyj « décrépit » et verbe drjâxnut',<br />
et drçselu (§ 1053), sur thème d'origine obscure ;<br />
v. si. krçglu (Ham.), okrçglu « rond », r. krùglyj, slov. krçgel,<br />
qui a l'aspect d'un dérivé de krgyu « cercle » ;<br />
v. tch. moklij, mod. namoklîj « mouillé, trempé », et v. si. razmoklu<br />
(Pand. Ant.), sur moknçti «être mouillé» (§ 500) ;<br />
slavon umrûlu « (de) mort », pol. umarly et zmariy « mort,<br />
défunt », tch. umrly et zemrely, nedomrly « à demi mort, maladif » ;<br />
V. si. smaglu (J. Ex.) « brun, de couleur foncée », tch. smahlij,<br />
osmahly «torréfié, brûlé », sur smag- (§ 787), smagnçti «brunir (au<br />
feu) » ; et slavon russe smjaglu, verbe r. smjâgnut' « sécher, se<br />
gercer», adj. peresmjâglyj «gercé», qui doit résulter d'une contamination<br />
avec le thème de mjâgkij « mou », smjagëit' « amollir »,<br />
ou d'une fausse alternance avec une autre racine :<br />
r. smùglyi « basané, brun » et ukr. smahhjj, qu'on rapproche de<br />
lit. smâugti « étouffer, étrangler », germ. *smeuk-, *smuk-, m. h. a.<br />
smouch « fumée », angl. smoke « fumer » ;<br />
v. si. vûsrùxlu (Gr. Naz., Athan.) «rugueux, à aspérités» (§ 771),<br />
slov. srhel « hérissé », usrhel « qui a la chair de poule, blême», verbe<br />
srhniti « frissonner », et voir srûxukû, § 983 ;<br />
v. si. ieplu et ioplû « chaud » ( § 500) ;<br />
v. r. truxlu « pourri, réduit en poussière » et mod. trûxlyj, s.-cr.<br />
trû(h)l-, etc., et slov. trôhel, verbe r. trùxnut', et lette trausls<br />
«friable» (§ 765).<br />
Sont moins clairs :<br />
slavon naglu « emporté, brusque », pol. nagly « soudain », tch.<br />
nâhltj, slov. nâgel, r. nâglyj « effronté » ; et s.-cr. nâgl- « impétueux,
[§ 1020] SUFFIXES EN -/'- 547<br />
rapide » proche pour le sens du participe parfait nùgl- de nàgnuti<br />
« pencher » et « se hâter », à thème nouveau nag-, aor. nàgoh, pour<br />
na-gub-, mais le thème antérieur nag- ne s'analyse pas et est<br />
d'origine inconnue ;<br />
v. si. scëglu « seul », fréquent dans la traduction d'Athanase,<br />
surtout dans l'expression scëglù jedinu « tout seul, fxovoç s le, »,<br />
et adv. scëglo « à l'écart, XOCT' iSîxv » chez Constantin le Prêtre » ;<br />
dans l'Évangile de Nikolja (slavon serbe) scëglo edini Marc, IX, 2,<br />
XOCT' îSiav pSvouç, seorsum solos, leçon qui, pour ediny Mar. Zogr.,<br />
pourrait être primitive et avoir été corrigée parce que scëglû<br />
présentait un caractère trop expressif. Le mot se retrouve un<br />
peu altéré dans s.-cr. cigll « seul, unique » ; et d'autre part dans pol.<br />
szczegôlny « particulier », à finale modifiée d'après ogôlny « général »<br />
pour v. pol. szczegielny « solitaire ». La comparaison de scë- du<br />
domaine méridional et *scë- du polonais restitue ( § 18) un thème<br />
*skaig-, où l'on pourrait reconnaître le thème *skaid- « séparer »<br />
(§ 609) en admettant une altération de *skaidl- en *skaigl-. Pour<br />
tch. slîhly, c'est une autre altération, de :<br />
tch. stîply « svelte, élancé », slovaque stuply, pol. szczuply<br />
« mince, maigre », v. r. scuplû « maigre », inexpliqué.<br />
Et sur thème en sonante :<br />
bulg. vârl « furieux, violent, cruel » ; s.-cr. ancien vrl- « violent »,<br />
vrlost « violence, fureur », mod. viril « brave, valeureux », vrlo « très »,<br />
et slov. vrl, vrlo ; inexpliqué également.<br />
Pour la question du vocalisme radical, r. ryxlyj « friable », pol.<br />
rychiy « hâtif », tch. rychly « rapide », est sur thème ryx-, forme<br />
alternante de rux-, r. rûxnut' « s'écrouler », v. si. rusili « détruire »<br />
(§ 614), et l'on ne peut pas en séparer slov. râhel « meuble, tendre »,<br />
s.-cr. occidental ràhl- « meuble, lâche » et cak. râhl- « qui indique<br />
un autre thème, *rux-, et qui suppose *rûxnçli à côté de *ryxngti.<br />
Le vocalisme réduit et l'allongement vocalique se rencontrent<br />
tous deux avec les verbes en -ngti ( § 493, § 496), et aussi le vocalisme<br />
radical o (§ 380). C'est le vocalisme o qu'on a dans moklu, dans<br />
loplu dont le cas est spécial, et qu'on doit rétablir dans scëglû.<br />
Mais également drçxlû, de *drinx- devant consonne et avec une<br />
forme *drins- devant voyelle (§ 19) dans drçselû, connaît une<br />
variante drçx- attestée, faiblement il est vrai, par le savon russe<br />
druxlû et le vieux-polonais zdrçchnqc ; et si krçglû n'est plus qu'en<br />
regard du substantif krçgû, il fait supposer une forme verbale<br />
krçg- à vocalisme o alternant avec le vocalisme réduit du germanique<br />
hring- (§ 765). Ainsi l'adjectif verbal en -lu, devenu participe<br />
parfait, pourrait conserver quelques vestiges du parfait à vocalisme<br />
radical o (§ 380).
548 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
§ 1049. Dans les langues slaves. — En russe, le participe en -ldes<br />
verbes intransitifs s'emploie abondamment, et à peu près<br />
librement, comme adjectif marquant un état. Voici un aperçu des<br />
formes, pour faire apparaître l'ampleur du fait, conservation d'un<br />
état ancien et plus encore développement nouveau.<br />
Sur thème vocalique radical :<br />
bylôj « qui a eu lieu », de byt' ; spélyj « mûr » et perespélyj « trop<br />
mûr », de spel' ; zilôj « habité » de zil'.<br />
Sur verbe à présent en -e- : oblézlyj « tombé, pelé », de ob-lézt'.<br />
Sur verbe en -nul' :<br />
obrjûzglyj « ratatiné », de o-brjûzgnut' ; zaglôxlyj « étouffé », de<br />
za-glôxnut' ; izsjâklyj « tari», de iz-sjdknul' ; sôxlyj, izsôxlyj, vysoxlyj<br />
« séché », de sôxnut' ; obvislyj « penchant, flasque », de ob-visnut' ;<br />
zjâblyj « gelé, transi de froid », de zjâbnut'.<br />
Sur verbe en -ë- :<br />
gorélyj « brûlé », de gorét' ; prélyj « pourri », de prêt' ; ocepenélyj<br />
« engourdi », de o-cepenét' ; ocerstvélyj et zacerstvélyj « durci, rassis »,<br />
de -ëerslvél' ; okamenélyj « pétrifié » de o-kamenéi' ; obledenélyj<br />
« couvert de glace », de ob-ledenét' ; zaplésnelyj et zaplésnevelyj<br />
« moisi », de za-plésnet', -plésnevet' ; zapolélyj « couvert de sueur »,<br />
de za-potét' ; posinélyj « bleui », de po-sinét' ; ostervenélyj « acharné »,<br />
de o-stervenét' ; osalélyj « devenu fou », de o-salét' ; zaxilélyj, -rélyj<br />
« devenu débile », de za-xilét', -xirét'.<br />
Sur verbe en -a- :<br />
byvdlyj « arrivé, expérimenté », de byvdt' ; lezâlyj « qui a attendu,<br />
passé », de lezdt' ; vozmuzdlyj « d'âge viril » de voz-muzdt' ; zapozdâlyj<br />
« attardé », de za-pozdât' ; otstalôj « resté en arrière », de ot-stât' ;<br />
izvetsdlyj et obvetsâlyj « vétusté », de -velsât' ; polinjâlyj « déteint,<br />
décoloré », de po-linjdt'. Etc.<br />
En polonais, le type n'est plus vivant actuellement, mais il a<br />
laissé des traces abondantes de sa productivité antérieure :<br />
byly « ancien » ; polegiy « tombé, mort », de polegnqc ; ochrypty<br />
« enroué », de ochrypnqc ; zwiqdly « fané », de zwiçdnqc ; v. pol.<br />
nasierszaly «hérissé», sur le thème *sïrx- (§ 771).<br />
Et en dehors des verbes d'état :<br />
dbaiy « soigneux », de dbac « avoir soin » ; czuly « sensible », de<br />
czuc « sentir » ; przysiçgly « juré », de przysiqgnqc ; przgszhj « prochain,<br />
futur » et przesziy « passé » ; zamieszkaiy « domicilié », de zamieszkac
[§ 1020]<br />
SUFFIXES EN -/'- 549<br />
« habiter » ; okazaly « fastueux », de okazaé sig « se montrer » ;<br />
zapamiçtaly « furieux, enragé », de zapamiçlac siç « s'oublier ».<br />
Et indiquant l'aptitude :<br />
niedosiçgly « inaccessible », de dosiçgnac « atteindre » ; niedoseigly<br />
« incompréhensible », de doseignqc ; v. pol. postrzegty « qu'on peut<br />
apercevoir, poslrzee » ; v. pol. pomkly « qu'on peut faire avancer »,<br />
de pomknqc (siç) « (s')avancer ».<br />
Le tchèque a des formations nombreuses et libres : minuly<br />
« passé », de minouti ; vrely « bouillant », de vriti ; vyspëly « mûr »,<br />
de vy-spëti ; ulezely « (fromage) bien fait, (gibier) faisandé », de<br />
ulezeti se « se reposer » ; osirely « orphelin », de osireli ; osamëly<br />
«solitaire», de osamëli «rester seul», et ojedinëlî) sur jediny ; ojlnëly<br />
« givre », sur fini « givre » ; poselily « insensé », de poseliii se « devenir<br />
fou » ; potmësily « sournois », de po tmë siti « coudre, ourdir dans<br />
l'ombre ».<br />
En slovène, grand développement également :<br />
lâl « fondu » ; vèl et uvèl « fané » ; vrèl « bouillant » ; m fzel « froid »,<br />
de mrznili ; oblédel « pâli », de o-blédniti ; izbôkel « convexe », de<br />
izbôkniti sur èo/c « côté », izbôkati « bomber, renfler », et vzbôkel, de<br />
vzbôknili se ; nabrçkel « gonflé », de nabrçkniti ; nabûhel « bouffi »,<br />
de nabûhniti ; zamçkel « trempé », de zamôkniti ; zamôlkel « sourd,<br />
enroué », de zamôlknili ; napûhel « enflé, orgueilleux » et razpûhel<br />
«bouffi» de -pûhniti ; dorâs(t)el «pubère» de dordsti ; usehèl,<br />
usâhel « desséché », de usehniti, prés, -sâhne-. Etc.<br />
Et zalétel, sur zaletéli se « se précipiter », fém. zaletêla « femme<br />
impulsive, étourdie », et le slovène a tout un type productif de<br />
féminins en -êla : kesnêla « une retardataire, paresseuse », sur<br />
kesnéti « tarder », et avec extension de la forme -êla : obliznêla<br />
« femme gourmande, lèche-plat » en regard de oblizati, oblîzniti<br />
« lécher », et babêla « vieille femme », de baba, etc., non sans doute<br />
sans quelque confusion avec le suffixe -g/a (§ 1054).<br />
En serbo-croate, l'emploi comme adjectifs des formes en -/était<br />
assez limité : vrèl- « bouillant », zrël- « mûr », prètil- « gras,<br />
replet », mffl- « sombre », mrzl- « gelé », rnûkl- et promûkl- « enroué,<br />
sourd », lru(h)l- « pourri », ôsZaZ- « restant », plur. oslâlï « les autres »,<br />
zaàslal- « arriéré », et prislal- « de belle prestance, seyant » sur<br />
pristati, èslarjel- « vieilli » et zàstarjel- « suranné », etc. Mais dans<br />
la langue écrite moderne les constructions avec le participe en -lsont<br />
devenues plus librés : propal- « tombé, ruiné », ùspjel-<br />
« réussi », etc.
550 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
§ 1050. Substantifs en -lu. — Les exemples en sont rares :<br />
slavon çzlû « lien, nœud », r. ûzel, gén. uzld, pol. wçzel, tch. uzel,<br />
slov. vôzel, s.-cr. uzl-, sur le thème QZ- (§ 762) ;<br />
v. si. ërësliï « bourse » (Ham. 47519, var. ërësu Ham. 43923, mais<br />
dans un passage altéré); r. céres(e)l «ceinture pour l'argent», et<br />
ëéres, ëérez, pol. trzos : dérivé en -lu de la préposition ërësû « à<br />
travers », r. ëérez, et forme substantivée de l'adjectif lit. skersas<br />
(§ 243) ; pour le neutre *ëerslo, voir § 1052 ;<br />
v. si. zïzlu « bâton, sceptre », r. zez(é)l, s.-cr. zézelj, mot obscur ;<br />
v. si. tylù (J. Ex.) «nuque», r. tyl, tch. tyl, etc., qui a la forme<br />
de v. pr. tûlan « beaucoup », ce qui suggère l'hypothèse d'un<br />
rattachement au thème ly- «s'engraisser» (§ 519).<br />
Pour v. si. sulû « envoyé », l'explication par un dérivé du thème<br />
su- (§ 549) est plus risquée encore ; et dans kalu « boue » (§ 788),<br />
tulu « carquois » (§ 760), rien n'indique que -lu soit sufïixal, et il ne<br />
l'est sûrement pas dans stolû « siège » (§ 735).<br />
Le tchèque a un type productif d'adjectifs en -lu substantivés :<br />
fnukal et fnukâlek « pleurnicheur », de fnukali, kecal « bavard »<br />
de kecati, hyril « débauché » de hîjrili, d'où les noms de personnes<br />
Nezval, Susil, etc.<br />
§ 1051. Suffixe -la. — Les exemples sont plus nombreux :<br />
v. si. osla « pierre à aiguiser », pol. osia, slov. ôsla, sur le thème<br />
i.-e. *ak- de ostru «aigu», osoka (§ 1046) ;<br />
v. si. testa «hache» (Athan., I, 1129), r. teslâ (secondairement<br />
teslô, § 944), s.-cr. tësla, nom d'instrument sur tesati « tailler à la<br />
hache» (§ 548), avec correspondant en germanique dans v. h. a.<br />
dehsala « hache », v. norr. pexla, et un parallèle dans lat. tëla<br />
« métier à tisser » et « toile », de texô « je tisse » ;<br />
slavon metla « verge », et vieux-slov. metlami, instr. plur. (Freis.,<br />
II, 99) ; r. metld « balai », pol. miotta, s.-cr. mètla, etc., formation slave<br />
commune, mais nouvelle comme sedlo (§ 38), sur mete- «balayer»<br />
(§ 429), qui atteste la productivité du suffixe -la dans les noms<br />
d'instruments ;<br />
r. vlla « fourche », s.-cr. vile, plur., slov. vile, tch. vidle pour v.<br />
tch. vidly, pol. et sor. widly, sans rapport avec la racine vi- « tresser »,<br />
et sur un thème vid- qui est obscur : serait-ce, puisqu'il s'agit<br />
d'une fourche, une altération de *dvî-d- ? Cf. v. h. a. zwîg, mod.<br />
Zweig, « embranchement, branche », et s.-cr. dviz « de deux ans »<br />
(§ 1009), de *dwî-g(h)o- ;<br />
slov. zvâla « mors », s.-cr. zvàle, fém. plur., sur zivali « mâcher »,<br />
à côté de s.-cr. zvâlo « gosier » ( § 948) ;<br />
slavon strugla dans le Roman d'Alexandre, nom d'un jouet
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 551<br />
d'enfant, qui pourrait être le grec erTp6;x6oç « toupie » contaminé<br />
avec cTTpoyyûXoç « rond », et rattaché en slave au thème strug-<br />
(§ 946) de slov. strûglja « racloir » (§ 1062) ;<br />
v. si. zila « veine, nerf », r. zila, pol. zyia, s.-cr. zila, en regard de<br />
lit. gtjsla, lat. fïlum, sur un thème zi- qu'on a par ailleurs dans<br />
zica «fil» (§ 1040) ;<br />
v. tch. ëila « instant », parallèle à got. hweila « temps », ail.<br />
Weile « temps, loisir », sur la racine i.-e. k'"ï-, si. ci-, adj. cil- (§ 1048)<br />
— et tch. chwile « instant », emprunt à l'allemand ;<br />
v. si. mïgla (Upir') « brouillard », r. mgla, s.-cr. màgla, qui est<br />
balto-slave, lit. miglà, et qui se retrouve dans gr. o[uy):q, sur un<br />
thème *migh-, skr. meghâh «nuage» et en slave v. pol. miegoc<br />
« humidité » (§ 1174), qui montre que pol. mzec « bruiner » est sur<br />
*mïg- bien distinct de *mïz- « uriner » (§ 543) ;<br />
pol. jagla « grain jde millet », tch. jdhla, slov. jâgla, s.-cr. jâgla<br />
« grain de maïs », où il paraît naturel de retrouver le thème *5gde<br />
agoda « baie » (§ 1004).<br />
Mais on ne reconnaît pas de suffixe dans :<br />
v. si. sila « force », r. sila, lit. siela (§ 798) ;<br />
*jedla « sapin », pol. jodla, s.-cr. jéla, et *jedlï, tch. ancien jedl,<br />
r. el', en baltique v. pr. addle, lit. ëglè, qu'on rapproche de lat.<br />
ebulus « hièble », de *edhlo- ;<br />
v. si. svila « soie » (J. Ex., et adv. svilënu, § 980), s.-cr. svila<br />
et slov. svila, bien différent de slov. svilo « fil » (§ 1052) et sans aucun<br />
rapport avec sû-vili. Le vraisemblable est que c'est un mot<br />
d'emprunt, comme le sont, et assez altérés, les autres noms de<br />
la soie dans les langues slaves, r. sëlk et tch. hedvabi, pol. jedwab,<br />
du germanique v. norr. silki et v. h. a. gotawebbi. Gomme il n'est<br />
attesté que dans le domaine méridional, on peut supposer une<br />
forme *svidla ou *svitla, et une altération de lat. saela, v. h. a.<br />
sida, par exemple par rattachement au thème svël-, svil- « briller ».<br />
Dans les langues slaves, une finale -la, qui peut aussi provenir<br />
de -ula, -ïla (§ 1055), se rencontre et a eu un petit développement<br />
en slovène, par exemple : dékla «jeune fille, servante» et déëla<br />
« jeune fille » en regard de dêcek « garçon », sur déca « enfants »<br />
( § 875) ; kgkla (et kvçklja) « poule glousse » sur k(v)çkali « glousser » ;<br />
prêkla « perche », qu'on met en travers sur un toit de chaume,<br />
sur prêkfo) « à travers », qui pourrait se rattacher au type ancien<br />
en -la des noms d'instruments ; etc.<br />
Le bulgare a krddla « voleuse », lâzla « menteuse » (masc. -Ijo,<br />
§ 1062).<br />
Pour les suffixes -ala, -ila, voir § 1061 ; et pour slov. -êla, § 1049.
552 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
§ 1052. Suffixe -lo. — Ce suffixe, qui se confond dans une partie<br />
des langues slaves avec le suffixe -(d)lo de noms d'instruments<br />
(§ 943), fournit des noms de choses et des abstraits. On le reconnaît<br />
dans :<br />
v. si. dëlo « œuvre, acte », pol. dzieto, tch. dïlo, sur dë-;<br />
v. si. nacçlo « commencement », vu-, za-, r. naëàlo, s.-cr. poëélo,<br />
sur -ëïne-, -ëçti ; les mots manquent en polonais et en tchèque, mais<br />
le polabe, qui note régulièrement -dlo dans sundli = zçdlo, etc.,<br />
garantit -lo : nôtzungl — naëàlo, nopitzûngl = napocelo, avec<br />
ung = ç ;<br />
slavon otupëlo « répons », pripëlo « accompagnement », s.-cr.<br />
opijèlo « absoute », sur pë- « chanter » ;<br />
pol. jadlo « le manger », tch. jidlo, s.-cr. jëlo ( § 945) ;<br />
s.-cr. pllo « le boire », slov. pila, parallèle à *jad-lo ;<br />
tch. pfddlo « filage, du filé », sur prqd-, différent de pfdslo (§ 944) ;<br />
slov. svilo « fil », sur su-vi-, zvlli « enrouler » ;<br />
slov. imélo « avoir, biens », et bulg. videlo « lumière », s.-cr.<br />
vldjelo, slov. videlo «vue, spectacle », à part des dérivés en -a(d)lo<br />
et -i(d)lo (§ 947) ;<br />
v.-sl. ruxlo,(Gr. Naz.) «poids, charge», r. rûxlo «bien meuble»<br />
(,rûxljad' « meubles, nippes », § 1006), sur rux-, voir ruxo, § 1138 ;<br />
pol. tarlo « frai » et ukr. terlo, s.-cr. trio « parc à moutons » et<br />
bulg. târlo, sur lïr-, et avec contamination en tchèque entre trio<br />
et trdlo « pilon » ( § 943) ;<br />
slavon croate (Job, XXXVIII, 31) et s.-cr. ancien okruglo<br />
«cercle, pourtour», qui est l'adjectif okrçglu «rond» (§ 1048)<br />
substantivé, comme d'une façon générale les substantifs en -lo<br />
sont les neutres d'adjectifs verbaux en -lu.<br />
Les mots suivants appellent un commentaire.<br />
Bulg. poréklo « surnom », et s.-cr. poréklo (porijëklo) « origine,<br />
filiation » ; on trouve poréklo et podreklo « surnom » attesté dès<br />
le moyen bulgare du xiv e siècle, et en serbo-croate podrijëtlo<br />
« origine, souche » depuis le xvn e siècle, qui résulte d'une contamination<br />
entre poréklo et fém. podrijet « commencement, source »,<br />
abstrait de pà-drijeti (§1168) ; pour s.-cr. poguslo, voir § 944.<br />
V. si. stïblo (J. Ex.) «tige», collectif stïblije (§ 925), r. steblô,<br />
pol. zdzbio, v. tch. zblo, s.-cr. sîâblo « tronc, arbre », sur le thème<br />
*stib- de lit. slfibli, stièbti-s « se dresser », var. stip-, lit. stipti « se<br />
raidir », lat. stipula « tige » ; et voir stoboru « colonne », § 1123.<br />
V. si. crësla, plur., « reins, hanches », r. céresla, tch. trisla « aine »,<br />
pol. ancien trzosia, qui est visiblement le même mot que le masculin<br />
crëslu « ceinture, bourse » ( § 1050) et un dérivé de ërësu « à travers »<br />
désignant le pli de l'aine en travers du corps. On a un mot différent,
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 553<br />
d'origine claire, dans *ëerslo « coutre » (§ 944), et un autre encore<br />
dans slov. ëréslo et tch. trislo « tan ». Le mot slovène signifie aussi<br />
« écorce », avec verbe créslali « écorcer » et « cloison dans la noix ».<br />
Il s'agit donc de l'écorce de chêne qui donne le tan, et de la façon<br />
de détacher cette écorce : un rapport avec ërësu « à travers » est<br />
possible.<br />
Tch. heslo « devise, mot d'ordre », qui s'est étendu à pol. hasio<br />
et r. gâslo, est isolé en tchèque, mais apparaît dès le vieux tchèque ;<br />
l'explication la plus plausible est comme dérivé du verbe hesovati<br />
« exciter (les chiens) », emprunt à v. h. a. hessen, mod. hetzen.<br />
R. kréslo « fauteuil » de krëslo, ukr. krislo, tch. kreslo, pol.<br />
krzesio « chaise », mot qui se retrouve en baltique, v. pr. ereslan,<br />
lit. krëslas « chaise, tabouret », et krâsè, kresë, avec verbe dial.<br />
kràsti-s « s'asseoir sur une chaise » ; ce qui pose un thème baltoslave<br />
*kres-, dont on n,e voit pas le rapport avec si. kresaii « battre<br />
le briquet » (§ 804).<br />
R. remeslô « métier » (dial. remestvô), pol. rzemiosio, tch. remeslo,<br />
sur thème remes-, à côté de rem- dans v. si. remïstvo « art, habileté »<br />
(§ 937). Le baltique a lit. remësas «artisan, charpentier», remëstas<br />
« métier » et v. pr. romestue « hache », qui doit en être un dérivé au<br />
sens d'« outil de charpentier», mais lit. remestas « métier » est<br />
nettement un emprunt au slave, et l'on doit penser que les autres<br />
mots des langues baltiques sont des adaptations des mots longs du<br />
slave, remïstvo et remeslo confondus, pol. rzemieslnik « artisan ».<br />
En slave, on doit voir dans remes- un dérivé en -es- de la racine<br />
*rem-, avec le vocalisme radical -e- caractéristique du type<br />
(§ 190).<br />
Pour r. uslô « tissage, tissu », voir § 944, et pour -lo dans des<br />
mots comme greblo « rame », § 945 ; pour sed(û)lo « selle », § 38 ;<br />
pour bulg. vitlô « vis », § 1055.<br />
Le mot tëlo « corps » est d'origine inconnue (§ 191), et on ne peut<br />
pas y reconnaître le thème *të- de r. zatéjat' (§ 512).<br />
Pour v. si. stïklo (Ham.) « verre », r. steklô, etc., c'est un emprunt<br />
au germanique, got. stikls « coupe, verre à boire », v. h. a. stëhhal,<br />
masculin et désignant un objet, tandis que le mot slave désigne la<br />
matière. Il doit bien s'agir d'un dérivé à suffixe *-lo-, mais en<br />
germanique, où il est expliqué comme tiré du thème verbal de<br />
v. h. a. stëehan « piquer ».<br />
§ 1053. Suffixe -élu. — On trouve ce suffixe dans quelques<br />
adjectifs : f<br />
V. si. debelu (J. Ex., Gr. Naz.) « gros », s.-cr. dèbeo, slov. débel,<br />
r. debélyj et pop debëlyj, dial. dobôlyj « fort ». Le baltique a v. pr.<br />
debïka- « grand » ; on compare avec v. h. a. lapfar « lourd, pesant »,
554 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
ail. mod. tapfer « valeureux », et le lien est probable avec la racine<br />
si. dob- de dobljï « valeureux » (§ 956).<br />
Y. si. drçselu «triste », à côté de drçxlu (§ 1048), et slov. dresçl,<br />
s.-cr. ancien drësel-,<br />
V. si. veselû «joyeux», r. vésel, s.-cr. vësel-, etc., isolé en slave,<br />
mais un rattachement à la racine de skr. vaç- « vouloir, souhaiter »,<br />
av. vasô (adv.) «selon le souhait», gr. '(/^sxwv «qui veut bien»,<br />
apparaît satisfaisant.<br />
R. tjaêëlyj « lourd », seulement russe, depuis le xiv e siècle,<br />
à côté de tjdzkij, v. si. tçzïku (§ 984).<br />
Pour s.-cr. kïsel-, de kysël-, voir § 1048.<br />
On a aussi des substantifs :<br />
V. si. plëvelu « ivraie », tch. plevel « mauvaise herbe », ailleurs<br />
comme mot savant et slavonisme, r. plével, plur. plévely, etc. :<br />
sur plëve-, plëti « sarcler » (§ 437).<br />
Slavon dçtelu (xu e s.) « pivert », pol. dziçcioi, s.-cr. djëtel-, et<br />
secondairement djëtl- comme r. djâiel, gén. djàtla. Mais le mot<br />
signifie également « trèfle » en vieux tchèque : dëiel, mod. jetel<br />
(gén.^-tele), différencié de datel (gén. dalla) « pivert », et le slovène<br />
a dçtelja et dial. dgntelj ( § 66) « trèfle » (zôlna « pivert ») ; le nom du<br />
«trèfle» étant ailleurs le dérivé dçtelina (§ 893). Le thème est<br />
sûrement dçt-, et c'est celui du nom ancien de la « dent » conservé<br />
dans *dqsna « gencive » (§ 174). On doit supposer un dérivé dçt-elu<br />
désignant le trèfle à feuilles dentelées, et devenant ensuite, à côté<br />
de *zïlna (§ 1076), le nom du « pivert » qui, avec son plumage vert<br />
et sa crête rouge, a quelque ressemblance avec le trèfle incarnat.<br />
V. si. mûselu (ou ml-) « gain malhonnête » dans le premier terme<br />
du composé museloiskaleljï (Pand. Ant.) où
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 555<br />
« frelon » paraît rattacher à une racine *bhei-, avec élargissement<br />
*bhi-k- en slave comme dans l'irlandais bech. Mais on peut supposer<br />
aussi le dérivé d'une forme *buk- du thème onomatopéique bukde<br />
r. buëât' « bourdonner » (§ 596).<br />
Y. si. imela (Upir') « glu, gluau », imelïniku (Pand. Ant.)<br />
« oiseleur », s.-cr. imela « gui », v. tch. jmelé attestant *jïm-, pol.<br />
jemiola, r. oméla. Le baltique a lit. âmalas « gui » et emalas, v. pr.<br />
emelno. D'après le commentaire à Amos, VIII, 1 l^eux% : imelïniku,<br />
jakoze imela emletï vu skorë plica « la glu attrappe vite les oiseaux »,<br />
le mot serait un dérivé de *jïme- « prendre », au sens premier de<br />
« glu » ; mais ce n'est là sans doute que de l'étymologie populaire,<br />
et l'on peut penser que la forme originelle du balto-slave était<br />
emel- « gui », mot d'origine obscure.<br />
V. tch. zùzela « insectes, vermine », slov. zuzçla, mais le vieux<br />
slave a zuzelï (Athan.) « scarabée », voir § 1060.<br />
S.-cr. cipela « chaussure » est un emprunt au hongrois. Slov.<br />
dezéla « pays » (et dezçl, fém.) doit être aussi un emprunt et non<br />
s'expliquer par le dialectal drzçla pour drzâva « puissance, État »<br />
(§ 1187), qui appartient à un petit groupe de substantifs à suffixe<br />
-çla : brbrçla et ëeljustçla « bavarde », sur brbrâti « bavarder » et<br />
ëeljuslâli, dérivé de ëeljust « mâchoire » ; ce suffixe est parallèle<br />
en slovène à -êla sur verbes en -ëti (§ 1049).<br />
Un suffixe -elo paraît inexistant, et est rare comme finale :<br />
slov. krepélo « bâton » à côté de krepél, masc., et krepêl, fém., à<br />
thème obscur, et metélo « bâton pour baratter », sur mçle-, mésli<br />
«baratter» (§ 430), où il paraît s'agir de l'extension du suffixe<br />
-(d)lo, sur le modèle de -alo, -ilo, à un thème de présent en -e-.<br />
§ 1055. Suffixes -ïlu et -ûlu. — Différenciés seulement par les<br />
jers, ils peuvent mal se distinguer.<br />
On trouve quelques adjectifs en -ïlu :<br />
V. si. svëtïlu « brillant », r. svétlyj, etc., sur svël-.<br />
V. si. mûdïlu (Gr. Naz.) « lent », tch. mdlij, sur mud-.<br />
Le cas est spécial de pol. podty « lâche, vil », mot emprunté par<br />
d'autres langues, r. pôdlyj, tch. podly, slov. pçdel : il est tiré de<br />
l'adverbe podle « à côté », de po et *dïlje comparatif de *dïlgu<br />
« long » (§ 289), et de son comparatif v. pol. podlejszy « plus à côté,<br />
plus bas », v. tch. podlejsi.<br />
Le slovène a evelèl « florissant », formé sur evéte-, evël- à l'imitation<br />
de svelèl «brillant»; et picel «mesquin», fém. picla, emprunt à<br />
l'italien pieciolo. Pour v. si. obïlu « rond », c'est une forme du thème<br />
vît- (§ 777).
556 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
La liste des substantifs est bien plus longue. Noms d'animaux :<br />
V. si. kozïlu « bouc », r. kozël, pol. koziei, en regard de koza<br />
« chèvre ».<br />
V. si. orïlu « aigle », r. orël, gén. orlâ, etc. ; en baltique lit. erëlis,<br />
arëlis, v. pr. areli-, ailleurs got. aran-, hitt. haran-.<br />
V. si. osïlu « âne », r. osël, etc., emprunt au germanique, got.<br />
asilus, remaniement en -il- du latin asinus.<br />
Slavon pëtïlû « coq » (Év. de Nikolja), s.-cr. pijèll-, slov. péll-<br />
(et petélin, cak. pelelin, § 870), en regard de r. petûx, v. pol. pieluch<br />
(§ 1154), et slov. péteh (§ 1139), sur pëti « chanter», le mot vieuxslave<br />
étant kurû (§ 1114).<br />
Slavon kraguilù « épervier », variante de kragui dans la Vie de<br />
Constantin, III, qui se retrouve dans le serbo-croate occidental<br />
et slov. krâgulj, tch. krahulec et pol. krogulec, à côté de s.-cr.<br />
kràguj et bulg. kragûj. C'est un emprunt au turc kirguy, karkuy<br />
(§ 3), et le suffixe -ïlu est un développement du slave.<br />
Pol. wyzel « chien courant », tch. vyzel, s.-cr. vizl-, sûrement mot<br />
d'emprunt, mais dont la source reste hypothétique.<br />
Pol. susel et susiel, gén. susla, « spermophile », v. r. susolu (mod.<br />
suslik), et tch. sysel qui avec le blanc-russe suslik « bébé qui tète »<br />
indique un lien avec sûsali « sucer, téter », itér. sysati (§ 465), sur<br />
un thème onomatopéique qui a pu prendre la forme sus- à côté de<br />
sus-.<br />
R. sëegôl « chardonneret », gén. sëeglà, pol. szczygiel, sans doute<br />
également sur onomatopée.<br />
Les noms de choses sont surtout des emprunts :<br />
Y. si. kotilu « chaudron », r. kotël, gén. kotlâ, etc. de lat. catïllus<br />
par got. katil-,<br />
V. si. skçdïlù ou -dùlu « tuile », et -dïlï, -dulï, du latin scandula<br />
« bardeau », où l'on peut reconnaître, mais mal, une différenciation<br />
de skçdûlu et de son collectif skçdïlï(§ 712) ; dans les langues slaves<br />
modernes, on ne trouve que slov. skôdla « bardeau ».<br />
Y. si. ptkùlu (J. Ex.) « poix », de lat. picula « (un peu de) poix »,<br />
et pïcïlu (Supr.), avec le c de seconde palatalisation en face du k<br />
conservé devant -û- (§ 19) ; dans les langues slaves, slov. pekèl<br />
« poix » et « enfer », s.-cr. pàkao « enfer », v. pol. pkiel et mod.<br />
piekto, tch. peklo.<br />
Y. si. çgùlu « angle », r. ugol, gén. ugld, pol. wçgiei, etc., sûrement<br />
emprunt à lat. angulus.<br />
Slavon kûbïlu «corbeille, boisseau», r. ancien kob(e)l; v. pol.<br />
gbei, et mod. kubet « seau » de v. h. a. kubil, mod. Kiibel « baquet » ;<br />
s.-cr. kàbao, gén. kàbla « seau », du bas-latin cupella par le<br />
germanique.<br />
Slavon vitilu « vis », s.-cr. vltl- « treuil, dévidoir », slov. vitl-,
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 557<br />
et bulg. vitlô « vis, hélice », sur le thème vi- « tordre » avec élargissement<br />
en -Z- comme dans pëtïlû « coq » sur pë-, et comme dans tch.<br />
vitra « lien » (§ 1117).<br />
Slavon *svïrdïlu « foret, tarière », r. svérdel et sverlo, ukr. svérdlo,<br />
s.-cr. svrdao, gén. -dla, et svrdlo ; et pol. swider, tch. svider, qui est<br />
une déformation de *svird(l-) d'origine polonaise avec v. pol. ir<br />
de ir (§ 74), et aussi slov. svéder (§ 1115). Un thème verbal *svïrdn'existe<br />
pas, mais on a le thème *svïrb- « démanger », dont le sens<br />
premier doit avoir été celui de v. h. a. swërlan « faire tournoyer »<br />
et qui en baltique a donné le lette svafpsls « foret » (§ 592). Ainsi<br />
*svïrd- doit être une déformation de *svïrb-, par flottement ancien<br />
et contamination des deux suffixes -ïlu et -fd)lo.<br />
S.-cr. vrtao « jardin », gén. vrtla, élargissement de vrt, en est<br />
originellement le diminutif répondant à lat. horlulus, de hortus<br />
donnant *vurt- par le germanique *urt- (§ 77).<br />
D'autres mots encore, dans les langues slaves, doivent être<br />
des emprunts en -ïlu. ou -ulû : ainsi slov. vâlel « aune », gén. -tla,<br />
qu'on explique par altération de l'allemand Wald-elle, et zézel<br />
« pelle à feu », gén. -zla, par déformation de l'italien sessola « pelle ».<br />
Une finale -ula, qu'on a rencontrée dans slov. skçdla pour v. si.<br />
-dulû, de lat. scandula « bardeau », n'apparaît que dans un mot qui<br />
remonte au slave commun :<br />
v. si. igula « aiguille » dans adj. igulinu (§ 966), r. iglà, de *jïgula,<br />
tch. jehla (§ 63), en baltique v. pr. ayculo, et c'est sûrement un<br />
emprunt au latin vulgaire acucula, avec passage à agu- en roman,<br />
ital. guglia.<br />
§ 1056. Suffixe -lï. — On a un type de féminins en -lï :<br />
v. si. suxlï «bois sec» (Cyr. Jér., Pand. Ant., et Ps. LI, 14,<br />
variante), en regard de l'adjectif r. sôxlyj « séché » (§ 1049) ;<br />
v. si. zçblï « germe » (Pand. Ant.), prozçblï (Cyr. Jér.), sur zçb-<br />
« germer » (§ 432) ; etcsur zçb- «geler», r. zjab(e)l' «chose (fruit,<br />
champ) gelée », s.-cr. nàzëbl- « refroidissement, rhume » ;<br />
v. r. teklï « résine » sur tek- « couler », cf. r. tëkovaja smolâ « résine<br />
qui coule d'elle-même » ;<br />
v. si. bylï «plante» (§ 712), qui peut être un dérivé en -lï du<br />
thème by-, ou l'abstrait en -ï de l'adjectif verbal bylu, ce qui est<br />
clair pour r. byl' « événement », sur bylôj « qui a eu lieu ».<br />
Et d'une façon générale'ces féminins en -lï sont des dérivés en<br />
-ï sur -Z-, et ne diffèrent pas de bëlï, golï (§ 711), sur thèmes bël-,<br />
gol-, qu'on n'analyse pas. La productivité du type se continue :<br />
s.-cr. pô-gïbl- « danger » remplaçant v. si. -gybëlï « perte », et
558 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
prëgïbl- « articulation, pli », pour -gybëlï dans l'autre sens du<br />
thème (§ 1057) ; pômrzao et smrzao « gelée » ; ïznlkao « bourgeon »<br />
et ponïkao ; plur. pôtkïsli « restes de mouillure », sur kys-<br />
« tremper » ; prôtlsli « point de côté », sur pràtisnuti « pousser,<br />
piquer (dans le côté)» ;<br />
slov. sel « semailles », zçl « moisson » ; plur. svisli « comble sous<br />
le toit », sur vis-, s.-cr. ûvls « en haut ».<br />
Pour *jedlï « sapin » à côté de *jedla, voir § 1051.<br />
Sur thème en dentale, on a -slï, sans doute analogique de la<br />
forme -slo de -(d)lo (§ 944) :<br />
v. si. gçsli, plur., « cithare », r. gûsli, etc., sur gçd- ;<br />
v. si. jasli « mangeoire », r. jàsli, etc., sur jad-.<br />
Et slavon raslï «croissance», v. si. olurasli «pousse, rejeton»,<br />
lëtoraslï, novoraslï, r. ôlrasl', vôdorosl' « algue », pol. rosi, lalorosl,<br />
narosl « excroissance », s.-cr. ïzrâstao, sur raste-,<br />
V. si. myslï «pensée », r. mysl', s.-cr. pômîsao, etc. (§ 802), doit<br />
être sur thème *myd-, en regard de mçd- avec infixe nasal dans<br />
mçdru « sage » ( § 1112) et de got. ga-maudjan « faire souvenir,<br />
rappeler » ; il est difficile de rattacher à ce thème le thème *mudde<br />
si. mûdllû « lent », muditi « tarder », lit. maùsli « se languir »<br />
(§614).<br />
Les masculins en -lï constituent un autre type :<br />
v. si. çglï « charbon », r. ùgol', gén. ûglja, s.-cr. ùgalj avec le Ij<br />
de gén. uglja, en baltique v. pr. anglis, etc. (§ 169), où l'on doit<br />
reconnaître un suffixe balto-slave -lis (§ 1063) sur thème angd'après<br />
skr. ângâra- ;<br />
r. skôbel' (gén. -belja) « doloire, plane », slov. skçbelj (gén. -blja)<br />
et fém. skçblja, pol. skobla et tch. skoble, sur le thème du verbe<br />
conservé en baltique, lit. skabiù, skôbti (§ 546) «gratter», lat.<br />
scabô, got. skaban, et le suffixe balto-slave -lis se trouve avec<br />
l'autre racine si. skob- « crochet» dans lit. kablys (§ 739) ;<br />
slavon soplï « tuyau » et plur. sopli « flûte », et v. si. sopli « morve »<br />
(Éphrem), r. dial. sôpel', gén. sôplja, « tuyau » et « jambe de<br />
pantalon», et v. si. sopëli «flûte » (§ 1057), sur le thème de sope-<br />
« jouer de la flûte » (§ 431) et r. sap « morve » (§ 739) ;<br />
et sûrement *ëeslï « peigne » sur thème ces- (§ 558) d'après slov.<br />
céselj, gén. ëéslja, h. sor. cesel, tch. cesle devenu fém. plur., à côté<br />
de slov. céselj, s.-cr. cësalj, avec passage de cesl- à ceslj-. de gén.<br />
ëeslja substitué à *ëesli.<br />
Pol. rydel « bêche », gén. rydla, est pour ry(d)lo (§ 943) et doit sa<br />
finale -el à son synonyme szpadel, gén. szpadla, qui de son côté<br />
lui doit sa finale -del pour le plus ancien szpatel « spatule », emprunt<br />
à l'allemand Spalel.
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 559<br />
On a un autre type encore, d'anciens adjectifs en -lï, dans les<br />
adverbes de quantité kolï, tolï, etc. (§ 261).<br />
§ 1057. Suffixe -ëlï. —• Ce suffixe fournit des féminins sur thème<br />
verbal en -ë-, et sur d'autres thèmes. En vieux slave :<br />
gybëlï «perte» et poyybëlï, r. (po-)gibel', etc., sur gyb-nçti<br />
« périr » ; slov. pogîbel et, dans l'autre acception du thème, zgîbel<br />
« pli, articulations » sur zgibati « plier », comme s.-cr. prëgïbl-<br />
(§ 1056);<br />
kçpëlï « bain, piscine », sur kçp-ati « baigner », r. kupél', pol.<br />
kqpiel, etc., et s.-cr. kàpelj, fém. et masc., avec passage au type en<br />
-el(j)ï (§ 1060) de ce mot semi-slavon ;<br />
mluëalï (Cyr. Jér.) « silence », adj. mlûëalïnu (Supr.), sur mluëati<br />
« se taire » ; <<br />
obitëlï «habitation», sur obitati «habiter», de vitati (§ 573);<br />
r. obilel « monastère », slavonisme, s.-cr. occidental obitelj « famille »<br />
avec transposition de -ëlï en -elj, mais conservation de ë dans<br />
le cakavien ancien obitil ;<br />
obrëtëlï « trouvaille », priobrëtëlï « acquisition, gain », sur (pri-)<br />
obrëtati ;<br />
obutëlï (Pand. Ant.) « chaussure », slov. obûtel, sur ob-uje~, ob-uti<br />
« chausser » ;<br />
peëalï « souci », sur pece- sç « se soucier », r. peëàl', slov. peëâl,<br />
et bulg. peëâl comme russisme, mais avec comme forme populaire<br />
le verbe pecëli- « gagner », postverbal peëâla « gain » (§ 817) ;<br />
pistalï « flûte », sur piste-, piskati ( § 561) — et pistati avec d'autres<br />
sens (§ 597) —, r. pisëâl', pol. piszczel « péroné » ;<br />
skrizalï « pierre plate, dalle », plur. skrizali « tables (de la loi) »,<br />
r. skrizàl', et pol. dial. skrzyzal, masc., -zala, fém., « dalle, lame de<br />
schiste » ; sans rapport avec s.-cr. krizati « couper », qui est « croiser »<br />
de krlz « croix », mais sur un thème qui peut avoir été expressif et<br />
celui de skrïzïtati « grincer » ( § 562) ;<br />
sopëli « flûte », plur. (Pand. Ant.), r. sopël', et verbe sopëti, mais<br />
secondaire (§ 431), à côté de sopll, masc. (§ 1056) ;<br />
svirëlï, plur. svirëli « chalumeau », sur svirati, r. svirél', et modifié<br />
en s.-cr. svirala, fém. sing., ancien svirati, plur. fém., slov. svirâlo ;<br />
tvrudëlï « fortification » et « firmament, aTspswjxa », sur le thème de<br />
l'adjectif tvrùdu «ferme», abstrait tvrûdï (§ 711), verbe d'état<br />
tvrudëti ;<br />
vijalï « tempête » (PancJ. Ant.), sur vije-, viti « tordre », à côté de<br />
vijalica (§ 880).<br />
Et dëtëlï « action », dobraja dëtëlï et dobrodëtëlï (Pand. Ant.)<br />
« vertu », sur dë-ti « agir », avec -t- de liaison sur thème vocalique,<br />
comme dans obutëlï, et comme dans vi-t-ïlù « vis » (§ 1055) — ce qui
560 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
a provoqué dans les manuscrits vieux-slaves et slavons une<br />
confusion graphique avec dëteljï « créateur » (§ 846).<br />
En dehors du vieux slave, on trouve :<br />
r. zybël' « balançoire » sur zybdt' et kaëél' sur kaëâl', kolybël'<br />
« berceau » sur kolybdt' ; dial. bogalél' « richesse » sur bogatét'<br />
« s'enrichir » ; kapél' « dégouttement » sur kapât' ; melél' « tempête<br />
de neige », dial. zdmetél', ukr. mëlil', sur mete- (§ 429) ;<br />
r. topél' « marais », et pol. topiel « gouffre », sur to(p)ngii ;<br />
slov. odétel « vêtement, couverture », sur o-dëti « vêtir » ; globêl<br />
« enfoncement, ravin », sur globéti « s'enfoncer », v. si. u-glçbili sç ;<br />
vrzêl «lacune, vide», sur vrzéti «être ouvert, béant» (§ 428);<br />
zibel « berceau », sur zibati ; et ancien umêtel « connaissance »<br />
(xvi e s.), sur umëli.<br />
Et parallèlement, en slovène, un type en -âl par réfection de -êl<br />
sur thème verbal en -ati :<br />
kisâl « (plat) aigre » sur kisati « aigrir », prhâl « poussière qui vole »<br />
sur prhati « voleter », et mocâl « humidité, lieu détrempé », sladkâl<br />
« chose douce, vin doux », strmâl « endroit escarpé », suhâl « bois,<br />
arbre sec », zmrzâl « gelée », etc. ; et orâl « labour, terre labourée »<br />
à côté de râl de ralïj- (§ 1058).<br />
Le slovène krdél « troupeau » (et krdëlo), élargissement de<br />
*kïrdu, s.-cr. krd « troupeau (de porcs) », mot obscur, est à part de<br />
la série des abstraits et sûrement d'autre origine.<br />
Les dérivés en -ëlï sont proprement des dérivés en -lï sur thème<br />
verbal en *-ë-. Ils ont connu une extension au-delà de cette origine,<br />
et on les trouve aussi en regard de verbes en -ati, etc. Mais il faut<br />
observer, comme pour les dérivés en -ëj- (§ 1035), que le thème en<br />
*-ê- était aussi celui du prétérit, en slave de l'imparfait : ainsi v. si.<br />
pecalï est sur le thème de l'imparfait peëa-axû.<br />
On rencontre aussi en vieux slave un masculin : kraslëlï « râle,<br />
caille », r. korostél', tch. krlstel et christel, qui doit être bâti sur une<br />
onomatopée.<br />
En russe et en polonais, où -ëlï passe à -el', -iel, on ne peut<br />
plus reconnaître dans les masculins en -el- ( § 1060) ceux qui<br />
pourraient être d'anciennes formes en -ël-, et on ne le peut guère<br />
davantage dans les autres langues, en raison des flottements de<br />
finales.<br />
§ 1058. Suffixe -lii, -lïja. — C'est le suffixe v. si. -ii de féminins<br />
et de masculins à flexion féminine (§ 155) ajouté à un élément<br />
-Z- qui doit être celui du participe parfait en -l- :<br />
v. si. balii « médecin », masc., sur ba-je-, ba-jati ;
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 561<br />
v. si. ralij- « labour, champ », fém., chez Hamartole sous la forme<br />
v. r. rolij-, r. rol'jâ, pol. rola et ancien rold avec â long de -ïja (§ 62),<br />
v. tch. roli.<br />
Le suffixe est productif pour la formation de noms de personnes<br />
exerçant un métier :<br />
v. si. dëlalij- « tisseuse, fileuse » (Gant. IX, 12), sur dëlati « travailler<br />
» ; r. dial. delâv'ja « femme s'occupant d'ouvrages de main »<br />
paraît être une altération de -l'ja ;<br />
slavon tukalii « tisseur, tisseuse », s.-cr. et slov. tkâlja, et v. tch.<br />
tkadli, comme dans :<br />
v. tch. svadli « couturier, couturière », s.-cr. svâlja, r. svâl'ja,<br />
fém., et masc. sval', sur siti, sïv- ; et :<br />
v. tch. pradli « blanchisseur, blanchisseuse », s.-cr. et slov.<br />
prâlja, sur pere-, pïratl, en tchèque avec élargissement en -dit<br />
d'après :<br />
v. tch. pradli « fileur, fileuse », r. prjdl'ja, s.-cr. prêlja, slov.<br />
prçlja, sur prçde-.<br />
En polonais, ciesla « charpentier », attesté dès le xm e siècle,<br />
bien distinct du nom d'instrument ciosia « hache », v. si. lesla<br />
(§ 1051), est le nom d'artisan sur tesati.<br />
Mais c'est surtout en serbo-croate que le suffixe a pris une<br />
grande extension, avec des formes nombreuses qui se retrouvent en<br />
partie en slovène :<br />
en -alja : grebènâlja « cardeuse » sur grebènati ; nîzâlja sur nizati<br />
« enfiler (des perles) » ; okrètâlja sur okrelali « retourner » ; primâlja<br />
« accoucheuse » sur primati « recevoir (le nouveau-né) » ; zapijèvâlja<br />
« pleureuse » sur zapijèvati « pleurer (aux funérailles) » ;<br />
en -ïlja : bjèlïlja « blanchisseuse » sur bijèliti ; dàjîlja « nourrice »<br />
sur dôjiti, et slov. dojilja (v. si. doilica, § 880) ; et de là dàdïlja,<br />
qui est pour dàdija, du turc dadi « gardienne d'enfant » ; mùzïlja<br />
« femme qui trait », et slov. molzilja, sur *mïlze- « traire » ; ndsïlja<br />
« poule pondeuse » sur nàsiti (jdja ) ; perïlja et slov. péril ja, réfection<br />
de prâlja « blanchisseuse », sur pere-, pïrali ; plèlïlja « tricoteuse »<br />
et slov. pletilja, sur plele- ; rèdllja sur réditi (làn) «préparer (le<br />
lin)»; ràdïlja «accouchée» et porodïlja, slov. rodilja, sur (po-)<br />
roditi ; vèzïlja « brodeuse » sur vézë-.<br />
De svâl'ja « couturière », fém., le russe tire en masculin sval',<br />
et voir le suffixe -al(j)ï, § 1062.<br />
/<br />
§ 1059. Suffixe -ïljï. — Ce suffixe de substantifs masculins<br />
est peu attesté en vieux slave, mais il a joué un rôle important,<br />
puisque c'est lui qui explique l'élargissement en -ïlivu du suffixe
562 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
-ivû d'adjectiîs (§ 997). On le trouve, en fonction nette de suffixe,<br />
dans :<br />
v. si. bezumïljï « l'insensé », substantif et non adjectif, sur bez<br />
uma, adj. bezumïnu ;<br />
slavon obidïljï « celui qui fait tort, qui offense », adj. obidïlivu<br />
(§ 996), sur obida «tort, offense » ;<br />
slavon bodîljï « épine, piquant », sur bode-, slov. bôdelj, gén. bôdlja ;<br />
s.-cr. bôdalj « chardon » et bàdalj « aiguillon » sur l'itératif bâdaîi,<br />
et bulg. bodél « piquant, chardon » et bodil (mais plur. bodlî) par<br />
confusion avec bodilo (§ 948).<br />
Deux autres mots sont supposés en vieux slave par leurs dérivés<br />
verbaux (§ 583) :<br />
prokazïlëti «machiner», sur prokaza, adj. prokazivu «qui veut<br />
nuire » (§ 995) et r. prokâzlivyj « malin, espiègle » ;<br />
peëatïlëli « sceller », sur peëatï « sceau ».<br />
Un mot moins clair apparaît ancien dans les langues slaves :<br />
slavon croate okrisïlï «cercle» (Ps. LXXVIII, 28, Eccl. I, 6)<br />
et croate ancien okrisalj, slov. okriselj, gén. -slja, v. tch. okris(e)l ;<br />
il doit être dérivé d'une locution *o-krysu comme v. si. o-krçgu<br />
« autour », pol. okres « temps délimité », et verbe okreslic « circonscrire<br />
» pour v. pol. okryslic, la forme ancienne krys- étant un<br />
emprunt au moyen haut-allemand krës, mod. Kreis « cercle ».<br />
Mais des finales en *-(ï)ljï de substantifs masculins sont fréquentes<br />
dans les langues slaves et d'origines diverses, produits<br />
de la confusion avec les suffixes -Il et -elï, adaptation de mots<br />
d'emprunt, etc., et l'on ne peut plus reconnaître les dérivés du type<br />
du slavon bodîljï. Ainsi :<br />
s.-cr. rôgalj, gén. -glja, « angle, coin », slov. rôgelj « fourchon »<br />
et « coin », slavon serbe rogl- « pointe », sur rogû « corne » ;<br />
s.-cr. prêgalj « ver du fromage », qui peut être sur le thème<br />
prçg- au sens de « se (dé)tendre » (§ 433) ;<br />
s.-cr. pêdalj « empan », élargissement de v. si. pçdï (§ 719) ;<br />
slov. krhèlj, gén. -hljà, « fragment », sur krhati « effriter » ;<br />
pol. bqbel « bulle, ampoule », gén. -bla, et tch. boubel « kyste »,<br />
gén. -bele, formation expressive qui correspond à lit. bumbulas.<br />
Le mot v. r. kasïlï « toux », r. kâsel', gén. kâslja, tch. kasel, etc.,<br />
peut être un dérivé en -ïljï, ou en -uljï d'après lit. kosulys (§ 558).<br />
On a dans le même groupe tch. chrchel « crachat », gén. -chele,<br />
mais verbe chrchlati ; slov. hrâkelj, gén. -klja, « crachat », sur<br />
hrâkati « tousser » ; et slov. smrkelj « morve », sur smrkati « renifler »<br />
(§ 542).
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 563<br />
§ 1060. Suffixe ~el(j)ï. — Suffixe ou finale, la finale en -el(j)ï<br />
est fréquente, mais avec confusion possible avec d'autres finales,<br />
-ëlï, -ïljï, etc. :<br />
v. si. bruselï « plaque (de pierre), fém. collectif brïselife « tessons »<br />
(§ 931), vraisemblablement mot d'emprunt avec adaptation d'une<br />
finale étrangère ;<br />
v. si. zuzelï « scarabée », masc., mais v. tch. et slov. zuzela<br />
(§ 1054), r. zùzel', zuzélica et zuk, sur le verbe onomatopéique r.<br />
èuzzât' «bourdonner» (§ 597), tch. zukati ;<br />
r. kuzel', masc., « filasse », tch. kuzel « quenouille » et slov.<br />
kozêlj, de *kçzel(j)ï inexpliqué en regard de *kçdelja « quenouille » ;<br />
r. smel', masc., «bourdon», de ëmel', pol. czmiel, tch. ëmel et<br />
ancien sëmel, slov. ëmçlj ; sur thème *ëïm-, à côté de kom- dans<br />
komaru « moustique » (§ 1128) ;<br />
v. tch. sviezel, ihasc., « lien, entrave », mod. svizel, gén. -le,<br />
« difficulté », et r. vjazél', masc., nom de plante, « coronille, etc. »,<br />
sur (SÙ-)VQZ-;<br />
pol. gardziel, masc. et fém., « œsophage », sur gardlo « gosier » ;<br />
pol. pryszczel, masc., «éruption, boutons», sur pryszcz et verbe<br />
pryszczec « se couvrir de boutons » ;<br />
tch. troubel, masc., «tuyau (de pipe)», sur trouba «tuyau,<br />
trompette » ;<br />
s.-cr. kïmêlj, masc., « chassie », slov. krm£lj, remanié du slavon<br />
grïmëzdï (§ 1020).<br />
Le serbo-croate a tout un groupe de masculins en -elj :<br />
brzelj, un oiseau, crnelj, un poisson, sur les adjectifs brz et cfn ;<br />
grédelj « timon de la charrue » ; gùndelj « hanneton » ; kràtelj<br />
« champ trop court, kràlak » et « choléra », etc. ; et kupelj de -ëlï,<br />
§ 1057.<br />
On rencontre un féminin en -elja :<br />
r. kudélja «filasse, quenouille», et kudël', fém., en regard de<br />
kuzel', masc., slov. kodêlja, tch. koudel « étoupe » de v. tch. kudele,<br />
sur un thème *kçd- qui doit être celui de *kçdru « frisé » (§ 1113).<br />
§ 1061. Finales diverses. — On trouve toute une variété de<br />
finales en -/-, dont certaines prennent l'allure de suffixes. Des<br />
finales dures :<br />
-ala : '<br />
pol. -ala, comme tch. -al (§ 1050), dans des noms de personnes<br />
masculins de la langue familière : drzemala « l'endormi », guzdrala<br />
« le lambin », sur guzdrac siç, bazgrala « le barbouilleur » sur baz-
564 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
grac, etc., et dans des surnoms, Biadaia sur biadac « se lamenter»,<br />
Niedbaia sur nie dbac « ne pas se soucier » ;<br />
r. -ala dans des noms de personnes masculins et féminins :<br />
menjâla « changeur », zapevâla « chef d'un chœur » (zapevât' « donner<br />
le ton »), etc. ;<br />
s.-cr. mrëzale, plur., « grand filet (pour porter le foin) », vlàcale<br />
« chevalet pour transporter la charrue », zvàle « mors », et slov.<br />
zvâla, sing., sur zïvali « mâcher », et s.-cr. svirala « petite flûte »<br />
sur svirati pour v. si. svirëli (§ 1057).<br />
-ila :<br />
r. gromila « cambrioleur » (gromit' « saccager »), kutila « bambocheur<br />
» (kutit' « faire bombance »).<br />
Pour slov. -êla, voir § 1049.<br />
-olû :<br />
*komolu, adj., tch. komoly « sans cornes, tronqué », r. komôlyj,<br />
slov. komôl, et v. pol. et dial. gomoly comme gomoia : un rapprochement<br />
avec le germanique, v. h. a. hamal « estropié, mutilé », mod.<br />
Hammel « mouton (châtré) », apparaît satisfaisant ;<br />
pol. wierzchoi « sommet », sur wierzch, et tch. vrchol, slov. vrhçl ;<br />
tch. hranol « prisme », sur hrana « arête » ; hrbol « bosse », sur<br />
hrb ;<br />
slov. kozàl « corbeille d'écorce », voir kôzulj.<br />
-ola :<br />
v. si. gomola (Upir') « boule de pâte », pol. dial. gomoia (gomôika)<br />
« fromage maigre », slov. gomôla « argile schisteuse » (et yomôlja<br />
« grumeau, boulette de fromage ») ;<br />
v. si. kramola « sédition », r. ancien koromola, etc., emprunt<br />
au latin du Moyen Age carmula, d'origine germanique ;<br />
pol. pierdoia « ganache », plur. pierdoly « fadaises », sur pierdziec<br />
« péter » ; rzçpoia « (mauvais) racleur de violon », sur rzqp « croupion<br />
» ;<br />
tch. mrtvola « cadavre », et type expressif de masculins : drmola<br />
« homme qui baragouine » (verbe drmolili), etc. ;<br />
slov. pivola « sangsue » (et pijâvica).<br />
-ulu :<br />
pol. szkopui « écueil », de lat. scopulus ;<br />
et noms de personnes en -ul, avec un suffixe sûrement d'origine<br />
romane : s.-cr. Bâdul, bulg. Bâdul, etc.<br />
-ula :<br />
pol. feruia « férule », et noms de personnes péjoratifs : gadula<br />
« bavard » sur gadac « parler », etc. ;
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 565<br />
s.-cr. gàgula, nom d'un oiseau, sans doute sur une onomatopée ;<br />
gromùla « homme très grand, très gros » ; pàpula « purée (de pois) »<br />
sur pàpati «manger» du langage enfantin.<br />
-yl- :<br />
tch. pahyl « tronçon » est isolé ;<br />
v. si. kobyla « jument », r. kobtjla, etc., qui ressemble fort au baslatin<br />
caballa, mais la finale n'est pas expliquée ;<br />
v. si. mogyla (J. Ex.) «tertre, colline», r. mogila, etc., mot<br />
obscur ;<br />
v. si. motyla « fumier, excréments », sing., et plur. motyla de<br />
motylo, apparaît en rapport avec mete-, mesti « balayer », slavon<br />
sumetï « fumier » (§ 714), et mot- qui a pris un autre sens (§ 731).<br />
pol. -ajio :<br />
noms de personnes à valeur péjorative : jqkajio « bègue » (et<br />
jqkaia) sur jqkac, krzykajio « braillard » (et krzykata) sur<br />
krzyknqe.<br />
§ 1062. Finales mouillées. — Le suffixe -tja est -ja sur thème<br />
en -l-{§ 1027) :<br />
r. pétljâ « boucle, nœud », s.-cr. pëttja, slov. péttja, et pol. pçtla<br />
par rattachement à pçtae «entraver», est un emprunt au germanique<br />
*fetil-, v. h. a. fezzit et mod. Fesset « lien » ;<br />
pol. dziupta « creux, cavité » pour dupta, s.-cr. dàptja, sur<br />
l'adjectif duptjï «creux» (§ 956);<br />
pol. budowla « édifice » de budowac « bâtir » ;<br />
s.-cr. zbltja « réalité » sur zbîti se « avoir lieu » ; trûlja « chiffon,<br />
haillon » sur tru(h)l- « pourri » (§ 1048) ;<br />
slov. strûgtja (et strgûlja) « racloir » à côté de str(u)gâto (§ 946),<br />
svîglja « longue baguette » sur svigati « se mouvoir rapidement,<br />
s'agiter », et drômlja « guimbarde » qui est ail. Trommel.<br />
Le bulgare a un suffixe expressif -tjo de masculins en -o (§ 208) ;<br />
dripljo « débraillé », krddtjo « voleur », lâzljo « menteur », plâcljo<br />
« pleurnichard » ; — et Un suffixe -le tiré du type kozlé « chevreau »<br />
de kozél « bouc », qu'il étend à bratlé « petit frère », knizlé « petit<br />
Livre ».<br />
-al(j)ï :<br />
v. si. kovalî (Ham.) «forgeron», r. dial kovàl', pol. kowal, sur<br />
kovati ; et r. sval' « tailleur », masculin sur fém. svâl'ja, qui indique<br />
un lien entre le suffixe -ait et le suffixe -lii (§ 1058) ;<br />
r. kâtal' « rouleur, calandreur » sur katât' « rouler » ; strogâl'<br />
sur strogâl' « raboter » ; slradàl' « travailleur de la strâdâ » ( § 785)<br />
sur slradât' ; vrai' « hâbleur » sur vrat' ;
566 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
pol. drwal « bûcheron » sur drwa « bois » ; brzuchal « à gros ventre,<br />
brzuch », gqbal « homme fort en bouche », de gçba « bouche », nogal<br />
« homme à grandes jambes », okal « à grands yeux », wqsal « à grande<br />
moustache, wqs », etc. ;<br />
s.-cr. bôgâlj « stropiat », comme bôgac « mendiant, homme de<br />
Dieu » ; gùbâlj « (cheval) teigneux », de guba « teigne » ; kusâlj<br />
« (cheval) à queue coupée », de kûs « tronqué » ; mrkâlj « cheval<br />
bai », de mrk « brun » ; cetvrtâlj « quarte » (mesure de grains),<br />
d'après frtâlj « un quart », de l'allemand Vieriel, hongrois ferlàly ;<br />
et type de noms de personnes, V&kâlj de Vûk « Loup », etc.<br />
Est différent le suffixe féminin slov. -âl, gén. -âli (§ 1057).<br />
-ol(i)- :<br />
v. si. kukolï et kukulï, r. kùkôl', est le grec xooxoôÀÀiov « cuculle,<br />
capuchon de moine » ;<br />
v. r. topolï « peuplier blanc », mod. tôpol', masc., tch. topol, et<br />
pol. topol, fém., s.-cr. topôla, collectif v. si. topolije (§ 925), doit<br />
être un emprunt déformé à lat. pôpulus, fém., déformé aussi dans<br />
les langues romanes ;<br />
s.-cr. gdmolja « motte de fromage », slov. gomôlja, voir gomola.<br />
-ulj- :<br />
slov. kôzulj (et kozol, kozôra) « corbeille d'écorce », en regard de<br />
pol. kozub, mot obscur ;<br />
s.-cr. bùbûlj « caillou », qui peut être la même chose que pol.<br />
bqbel « bulle » (§ 1059) ; pàhûlj « tige d'herbe » ; pàsulj « haricot »,<br />
de lat. faseolus.<br />
Slavon kosulja « chemise », r. dial. kosûlja, pol. koszula, s.-cr.<br />
kàsulja, du bas-latin casula, casella, avec la finale d'un type de<br />
dérivés qui est productif dans les langues slaves :<br />
pol. babula « petite vieille », matula « maman », diminutifs de<br />
baba, mac, et aussi masc. -ulo : dial. tatulo et tatula « papa », de<br />
tata ;<br />
tch. brehule « hirondelle de rivage », krivule « cornue », vrtule<br />
« hélice », etc. ; et fakule « torche », et v. tch. fakla, emprunt à lat.<br />
facula et ail. Fackel, mispule « nèfle », de lat. mespilum ;<br />
slov. blebetûlja « bavarde », ropolùlja « babillarde », sur blebetâti,<br />
ropotâti, vragûlja « diablesse », sur vrâg, etc. ; et strgulja « racloir »,<br />
voir strûglja ;<br />
s.-cr. crèpulja « couvercle de terre, four de campagne », de<br />
crïjep « tesson », gràbulje et gràblje, plur., « râteau », hddulje<br />
« échasses » ; grdulja « femme affreuse », sur gfd(an) « affreux »,<br />
odrpulja « (chemise) déchirée » sur odrpaii, etc.<br />
-yl(j)ï :<br />
r. motyl' « papillon », masc., pol. motyl, tch. motyl, mot obscur ;
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 567<br />
pol. badyl « tige », et slov. bodilj « douleur piquante », sur bode-,<br />
badati, et voir bodlljï, § 1049 ;<br />
tch. strechyl « chandelle de glace » qui pend du toit, slrecha ;<br />
slov. smrdilj « fenouil », etc.<br />
Un suffixe -ajlija, dont la finale doit être -lija, du turc (§ 1195),<br />
est productif en serbo-croate :<br />
masc. dugâjlija « homme de haute taille », novâjlija « novice »,<br />
fém. zlatâjlija « collier d'or », granâjlija « fusil à gravures en rameau,<br />
grâna », etc.<br />
§ 1063. Les origines. — Le baltique a des masculins en -las et<br />
-slas : lit. aùlas « tige de botte » de aûii « chausser », krislas « fragment,<br />
éclat » de krlsti, prêt, kriiaù, « se détacher, tomber » ; —• fém.<br />
-la et -sla : vielà « fi] (de fer) » de vejù, vyti « tordre », gysla « veine »<br />
(si. zila, § 1051) ; — masc. -lis, et -lys sous l'accent, de *-li- et<br />
*-lyo-, -liyo- (§ 146), avec productivité en particulier dans les noms<br />
d'instruments : grêblys « râteau » sur grëbti (§ 432), kaplys « houe »<br />
sur kapôli « fouir » ; — masc. -élis, dont la forme est ordinairement<br />
en lette -élis à e bref, dans de nombreux dérivés de verbes : lit.<br />
sudifzélis « l'endurci » sur difzti « se durcir », pasmirdèlis « le puant »<br />
sur smirsti et smirdëti ; lette bèdelis « l'affligé » sur bèda « peine » ;<br />
— et -ala-, -ila-, -ula-, etc. On trouve en baltique toute la variété<br />
des suffixes et finales du slave, mais sans correspondances bien<br />
nettes, et lit. -élis, masc., est tout différent de si. -ëlï, fém. On a donc<br />
affaire à des formations dérivées indépendantes en baltique et en<br />
slave sur une même base commune *-lo- d'adjectif verbal, et s'il<br />
y a eu, comme il est vraisemblable, des formations d'époque baltoslave,<br />
on ne les reconnaît plus sûrement : ramener lit. -élis, lette<br />
-élis, et si. -teljï à un même suffixe -el- (§ 850) est une hypothèse,<br />
il faut le reconnaître, laborieuse.<br />
Ceci rend sceptique sur des rapprochements spéciaux proposés<br />
avec d'autres langues indo-européennes, comme du type si.<br />
svëtïlù avec lat. humilis, gr. xaXoç, ou du type si. -ëlï et -t-ëlï<br />
avec lat. loqu-êla, tû-t-ëla et hitt. -el, -zel.<br />
Mais un rapprochement moins lointain est à retenir : celui du<br />
type si. koz-ïlû « bouc » avec v. h. a. ig-il « hérisson » (si. jezï) ; le<br />
germanique présente un suffixe productif got. -ilus, v. h. a. -il<br />
mod. -el), qui forme des noms d'agents et d'instruments, v. h. a.<br />
biril « porteur » et « corbeille » de bëran « porter », et l'on retrouve<br />
cette valeur en slave dans pë-t-ïlû « coq », vi-t-ïlu. « vis », parmi<br />
beaucoup de mots d'emprunt, dont osïlu « âne », kotïlix « chaudron »<br />
pris à got. asilus, katil- (§ 1055). Il faut admettre que le slave -ïlû<br />
n'est pas seulement comparable au germanique -il-, mais qu'il<br />
lui est emprunté.
568 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
Pour le suffixe -ïljî du type bezumïljï (§ 1059), on le reconnaît<br />
dans le dérivé peëatïlj- de peëalï « sceau », qui est sûrement un<br />
emprunt ancien au turc (§ 189), et il s'explique bien par une forme<br />
turque *peëal-li « à sceau », avec le suffixe -li qui a donné dans les<br />
langues slaves méridionales le suffixe -lija (§ 1195). Ceci s'accorde<br />
avec l'histoire du suffixe -ïljï, très peu représenté en vieux slave, et<br />
qui pourtant avait de l'importance dans la langue, puisque déjà<br />
les adjectifs en -ïlivû, variantes de -ivu sur thème -il]-, sont<br />
largement attestés (§ 996). Le suffixe -ïljï devait, comme suffixe<br />
d'emprunt, appartenir à la langue vulgaire, et bezumïljï, « l'insensé »,<br />
devait être familier, mais acceptable par la langue écrite dans un<br />
mot de sens péjoratif et évitant le recours au trop solennel<br />
bezumïniku.<br />
Le suffixe -lii s'explique en slave par un dérivé en -ii de thème<br />
de participe en -/-, mais le turc a pu jouer un rôle dans son extension,<br />
et on pourrait reconnaître le turc -li dans kovalï « forgeron » dont<br />
la finale a l'allure d'une variante vulgaire -lï du suffixe -lii.<br />
SUFFIXES EN -m-<br />
§ 1064. En baltique. — Le grec a des adjectifs en -\LOÇ : Osppwç<br />
« chaud » et Oépojwa « je me chauffe », surtout en -IJAOÇ : v6;j.i[xoç<br />
« légal » sur vofioç « loi », et en -GIIJ.OÇ : /pyjai^oç « utile » sur XPF 1 ?<br />
« usage » ; et des substantifs en -[AOÇ, -pj : Sttoyy.6ç « poursuite »<br />
(SitGxsiv « poursuivre »), ÔSJXVJ « odeur » (6Çsiv « sentir »).<br />
Le latin a de même des substantifs en -mus, -ma : animus<br />
« esprit », fâma « renommée » ; des adjectifs en -mus : prïmus<br />
« premier », et surtout en -timus : lëgitimus de lëx « loi », et en -simus,<br />
-issimus, formations de superlatifs.<br />
En baltique, on trouve :<br />
quelques adjectifs en lit. -mas : les ordinaux pirmas « premier »,<br />
sëkmas, âsmas (§ 312) ; des dérivés d'adverbes en -imas : drlimas<br />
« proche » de artl « près », tôlimas « lointain » de toli « loin » ; et dans<br />
la conjugaison les formes de participes présents passifs, en -amas,<br />
-jamas, -omas, -imas, et les participes en -damas (§ 405), et en<br />
vieux lituanien le participe futur passif en -simas ( § 398) ;<br />
des substantifs en -mas et surtout -smas (comme -slas, § 1063) :<br />
jaùsmas « sentiment » sur jaûsti « sentir », thème jut- (v. si. -slutili,<br />
§ 610), vefksmas «pleurs» sur verkli «pleurer», etc. ; avec des<br />
féminins en -(s)ma, -(s)mè : bâimè « crainte » en regard de bijôti-s<br />
«craindre», factitif baidyti (si. bojati se, § 594), giesmè «chant»,<br />
lette dziêsma, sur giedu, giedôti «chanter» (§ 475) ;
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 569<br />
et deux types en -imas et -umas, lette -ums, qui donnent des<br />
dérivés abstraits d'adjectifs : lit. aukstùmas « hauteur » sur dukstas<br />
« haut » et lette aûgslums sur aûgsts, lit. didùmas « grandeur » sur<br />
didis « grand », etc. ; et surtout des dérivés de verbes en lit. -imas<br />
et lette -ums qui indiquent le résultat de l'action, et qui peuvent<br />
en principe se tirer librement de tous les verbes sur le vocalisme du<br />
prétérit, y compris l'allongement vocalique (§ 546), ce qui s'accorde<br />
avec leur sens de résultat de l'action : lit. arlmas « le labouré, le<br />
labour », de ariù, drli « labourer », prêt, ariaû, et lette arums, lit.<br />
vezimas « charretée », de vezù, vëzti « charrier », prêt, veziaû, et<br />
lette vezums ; lit. gërimas « boisson, ce qui a été bu » de geriù, gérti<br />
« boire », prêt, gëriau, et lette dzêrums de dzer'u, dzefi, prêt, dzêru ;<br />
lit. gjjnimas de ginù, gïnli « défendre », prêt, gyniau, krôvimas de<br />
krduju, krduti « entasser », prêt, krôviau.<br />
§ 1065. En Slave. — Les formations du baltique témoignent<br />
d'une large productivité du suffixe *-mo- en balto-slave. Le slave<br />
n'en conserve que les restes.<br />
Le plus important est son participe présent passif en -omû,<br />
-jemû, -imû, encore régulier en vieux slave, mais qui va disparaître<br />
dans toutes les langues slaves en laissant des traces plus ou moins<br />
abondantes (§ 407).<br />
Il y a des adjectifs à finale -mû, outre le cas spécial des ordinaux<br />
sedmû et osmu (§ 312), mais on ne peut pas reconnaître un suffixe<br />
dans nëmû « muet » (§ 118), ni dans strïmù « escarpé », pol. stromy<br />
{§ 734) ; et v. si. golëmû «très grand» (Const. Pr., Pand. Ant.),<br />
bulg. goljâm, v. tch. holemy, etc., n'est pas de formation claire.<br />
Son comparatif v. si. golëmljii est d'un type dissyllabique spécial<br />
(§ 288) ; la forme russe est en -jam- : adv. dial. goljdmo, et la forme<br />
serbo-croate est en -em : gblem, régulièrement dès le moyen serbocroate,<br />
ce qui doit montrer que le vieux-serbe golëmï est un<br />
slavonisme. Cette opposition de r. -jam- et de s.-cr. -em- paraît<br />
supposer, d'après l'exemple du suffixe -ënu (§ 65), une finale<br />
*-ën-mo-, *-çmû, et un dérivé de thème *golën~. Un rattachement<br />
à lit. galëti « avoir la force, pouvoir » est sommaire et n'explique pas<br />
la finale : on la trouve dàns v. si. golënï «jambe, tibia » (§ 1099),<br />
et l'adjectif dérivé apparaît alors analogue à ramënû « puissant »<br />
sur ramç «épaule» (§ 980).<br />
Sont plus clairs les adjectifs prëmû «droit», r. prjamôj (§ 320)<br />
dérivé d'adverbe, et lûk(ù)mû «égal» sur la racine lûk- (§ 328).<br />
Ils s'emploient surtout coihme adverbes, prëmo, tuk(û)mo, et l'on<br />
a de même mimo « en passant » sur mi-nçti « passer » (§ 490) ; et<br />
la série des adverbes de lieu de la question quô : kamo « vers où »,<br />
jamo(êe), lamo, onamo, ovamo, inamo, sëmo, vlsëmo. On y joint :
570 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
v. si. obimo (Upir') « en cercle », qui se rattache évidemment à la<br />
préposition ob(ï) «autour», mais une forme obi- comme préverbe<br />
est prise à ob-iti (§ 83), et obimo doit donc être fait sur ob-iti « aller<br />
autour » ;<br />
v. si. oplosmo (Izb. Svjat.) «largement, généralement», à côté<br />
du slavon oplosï (§ 1200), et de oploscë sur plosk-. Cet adverbe isolé<br />
doit apporter le thème de base de l'adjectif v. si. plosku « large »,<br />
r. plôskij, etc., à vocalisme long dans pol. piaski « plat » et dans lit.<br />
plôkcias, de *plâsk-tjas (§ 958), et lette plâsk-aîns : il s'agirait d'un<br />
dérivé en *-ko- (§ 1038) sur thème balto-slave *plâs-, avec dérivé<br />
en *-to- dans si. *plastu « couche », lit. pldstaka « plat de la main »<br />
(§ 1161), et plak- dans le lette plakl «s'aplatir», En slave, à côté<br />
de o-plos-, et de l'adverbe v. r. plasma « par le plat » (§ 1203), on a<br />
plos- dans le slavon inoplosï, r. splos « de façon continue », et slov.<br />
splàh « généralement » : c'est sur *ploxu, tch. plochy « plat » à côté<br />
de plosky, déformation en -x- (§ 1139).<br />
Le tchèque et le polonais, à instrumental masculin singulier<br />
en -umï, -em (§ 161), ont développé un type nouveau d'adverbes en<br />
-mo, et en polonais en -mie par substitution de -ie (§ 318) à -o :<br />
tch. darmo « gratuitement » pour instr. darem, et kradmo<br />
« furtivement », bodmo « en piquant », letmo « en vol, rapidement »,<br />
kolmo « perpendiculairement » sur kùl « pieu », mermo « à la mort,<br />
à tout prix » sur le thème mïr-, dvojmo « en double exemplaire »,<br />
avec des formes récentes, bëzmo « en courant » pour bëhem, skocmo<br />
« en sautant », obkrocmo « à califourchon » de obkrociti « enjamber »<br />
sur krok « pas, enjambée », etc. ;<br />
pol. darmo, et en polonais ancien kradmo et kradmie, siekmie<br />
pour siekiem « en coupant », omacmie « à tâtons » sur macac<br />
« tâtonner ».<br />
§ 1066. Les substantifs. — Un suffixe -mû se reconnaît dans :<br />
v. si. dymu « fumée », r. dym, gén. dyma, etc., lit. dûmai, plur.,<br />
à thème *dhu- dans lit. dulis « nuage, vapeur », skr. dhuli- « poussière<br />
» : c'est une formation d'époque indo-européenne, skr. dhûmdh,<br />
lat. fumus ;<br />
*pârmu « bac », v. r. poromu et mod. porôm, pol. prom, tch.<br />
prdm, etc., et v. h. a. farm, sur la racine *perh- (§ 98) ;<br />
slavon kosmu « poil, cheveu », bulg. kôsâm, pol. kosm et kosmyk<br />
« touffe » (§ 185), slov. kôsem et kôsma « touffe, flocon », et r. kosmd<br />
« touffe de poils », plur. kosmy « crinière », à côté de kosa « chevelure »,<br />
sur Ses- (§ 723).<br />
On peut reconnaître aussi le suffixe dans :
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 571<br />
v. si. glumu « plaisanterie, jeu » (§ 760), en germanique v. norr.<br />
glaumr « réjouissance », v. angl. gléam, dérivé de *ghleu- d'après<br />
v. angl. glëo, mod. glee « joie, gaillardise », et lit. glduda « plaisanterie<br />
», glâudoii « railler », qu'on rapproche du grec y'Av'sf] « rire,<br />
moquerie » ;<br />
v. si. sumû « grand bruit, fracas », qu'on peut rattacher à une<br />
racine balto-slave *seu- (§ 760) ;<br />
v. si. umû «intelligence», sur thème * au- d'après lit. aumuô<br />
à suffixe -men- (§ 184).<br />
Avec le slavon drûmu, bulg. dial. drûm « fourré », r. dial. drom,<br />
on pense naturellement à skr. drumdh « arbre », gr. Spufxoç « forêt »,<br />
sur *dru- « bois », mais le rapprochement risque fort d'être trompeur,<br />
et un lien avec le thème drûm- « secouer » ( § 815) a en sa faveur<br />
le parallèle de s.-cr. suma « taillis, forêt basse » dérivé de sum-<br />
« faire du bruit, s'agiter ».<br />
Pour pol. tium « foule », voir § 760 ; et pour slim- dans r. slimâk<br />
«limace», etc., voir § 1075. Le mot v. si. sramû «honte» est<br />
inanalysable et a des chances d'être un emprunt à l'iranien (§ 773).<br />
De même v. si. xramû « maison », r. xorômy, etc., avec son xinitial,<br />
est suspect d'être un emprunt, et il pourrait bien être une<br />
forme prise par le latin caméra « voûte, chambre », mot de culture<br />
de large extension. Y. si. s(û)val(û)mû «boule de métal» est le<br />
turc salma (§ 183).<br />
On peut avoir un suffixe -smù, comme lit. -smas, dans :<br />
v. si. usmû « peau » (Vie de Constantin, X, J. Ex.), et collectif<br />
usnije « cuir » (Éphrem), avec adjectifs usmënû et usnijanu (§ 980),<br />
qui suppose un substantif *usmen-. Le thème serait, soit *au- de<br />
ob-uti « chausser », soit, avec une dentale finale expliquant la forme<br />
-sm-, *aud- de si. udû « membre », lit. dusti « tisser » (§ 191) ; mais<br />
ni l'une ni l'autre de ces étymologies n'est bien évidente.<br />
On trouve une forme -ïmù dans :<br />
v. si. jarïmû « joug », bulg. jarém, s.-cr. jdram, slov. jdrem,<br />
secondairement -mo dans r. jqrmô, pol. jarzmo. Ce peut être le<br />
vestige d'un suffixe balto-slave resté très productif dans lit. -imas,<br />
et un dérivé de la racine *er- « ajuster » de si. oriti (§ 608), sur la<br />
forme longue ër- qu'on a dans lit. érdèli « se séparer », lette êrst<br />
« séparer », comme *âr- dans si. ramo « épaule » (§ 69).<br />
/<br />
§ 1067. Suffixe -ma. — Une finale -mï se restitue dans un mot<br />
inanalysable, *cïrmï « ver » passé à *ëïrvï, lit. kirmis, skr. kfmïh<br />
(§ 169).<br />
On reconnaît un suffixe -ma dans v. si. kruma « nourriture »,
572 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
sur thème *kûr-, lit. ser- (§ 815) ; mais l'autre mot krùma « poupe,<br />
gouvernail » est sûrement un mot d'emprunt.<br />
On a par ailleurs un suffixe ou une finale -ma dans :<br />
bulg. sldma « paille », s.-cr. slàma, tch. slâma, r. solôma, en<br />
baltique v. pr. salme, et lette salms « chaume » d'intonation rude<br />
comme en slave, dans les autres langues lat. culmus « chaume »,<br />
v. h. a. halm, et gr. xaXà[i.ï) sur racine « dissyllabique ». Une analyse<br />
de ce mot ancien est risquée, mais il n'est pas interdit d'y retrouver,<br />
au sens de « ce qui se dresse, tige », la racine de lat. -cellô, lit.<br />
kélii « élever », avec accord pour l'intonation dans lit. kâlnas<br />
« colline », balto-slave *sël-men- « faîte » et lat. columen, culmen<br />
(§ 186)<br />
Le slavon kruëïma « cabaret », r. korcmd, pol. karczma, etc., à<br />
dérivés v. si. krucïmarjï (Ham.) et krûcïmïniku (Izb. Svjat.)<br />
« cabaretier » (§ 843), kruëïmljavati (Supr.) « trafiquer », est sûrement<br />
un emprunt, et sa finale -ma orienterait vers le turc si son dérivé<br />
v. r. kurëïmitû (§ 1175) n'orientait pas vers le grec. De même<br />
les masculins non expliqués :<br />
v. si. kçdrïma (Athan.) « bourreau », v. r. kuderma ;<br />
v. si. dvalma (Théod.) « celui qui soigne des chevaux », qui se<br />
continue dans bulg. vâlma « serviteur de monastère ».<br />
Le russe kuter'mâ « gâchis » est obscur également ; le serbo-croate<br />
galâma « tumulte, vacarme » l'est aussi, à côté d'emprunts au<br />
turc à finale -ma, ou adaptés en -ma, comme kàldrma « pavé » de<br />
kaldirim.<br />
S.-cr. pjësma « chant » et bàsma « formule magique » sont des<br />
déformations de pësnï et basnï (§ 1085) par passage en finale de -n<br />
à -m : slov. pêsen et mod. pêsem.<br />
Le serbo-croate a kîëma « dos, épine dorsale » (depuis le<br />
xvm e siècle) qui s'explique mal par le turc kië « partie postérieure,<br />
croupion », mais il a également kîëma « crins du cheval sur le front »<br />
en kajkavien, et kicma « chevelure » en cakavien du xvi e siècle :<br />
c'est sûrement le même mot, « crinière » et de là « encolure », dérivé<br />
de v. si. kyka « touffe de cheveux » ( § 802) sur le modèle de l'ancien<br />
kosma « cheveu », mod. kôsmal « chevelu, poilu ».<br />
Le slavon vëdïma « devineresse, sorcière », r. mod. véd'ma en<br />
regard du masculin vedùn « sorcier » (§ 1102), sur vëdëli « savoir », est<br />
proprement russe, le polonais wiedzma, wiedma et le tchèque vëdma<br />
étant pris au russe.<br />
Le vieux-slave sëmija «gens de la maison» (§ 1028) est bâti<br />
sur un thème sëm-, en baltique lit. seimà, lette sàime « domestiques,<br />
famille », qui peut être, comme got. haims « village », un dérivé
[§ 1068] SUFFIXES EN -771- 573<br />
én *-mâ, *-mo-, mais il est hasardé d'y reconnaître une racine<br />
*kei- d'après le lette siëva « épouse » (d'intonation rude, § 708),<br />
v. h. a. hïwa, et lat. cïuis « citoyen ».<br />
§ 1068. Suffixe -mo. — Ce suffixe apparaît dans des mots anciens,<br />
et dans des formations plus récentes :<br />
v. si. ramo «épaule, bras», bulg, râmo, etc., à côté de ramg,<br />
sur *âr- (§ 186);<br />
slavon povësmo « filasse, groupe de fils de lin », bulg. povjâsmo,<br />
r. povésmo et bl.-r. povésma, v. tch. et dial. povësmo ; le mot paraît<br />
se rattacher à povësiti « suspendre », mais ce n'est pas trop satisfaisant,<br />
et l'on pourrait penser à une déformation ancienne en<br />
-vës- de -vçz- « lier », avec la forme -smo du suffixe prise au mot<br />
suivant :<br />
r. pâsmo « écheveau », pol. pasmo, tch. et slov. pâsmo, s.-cr.<br />
pàsmo, mais le polabe atteste *pasm§ (§ 186). Le mot se retrouve en<br />
baltique dans le lette puôsms « ce qu'on peut prendre de lin de la<br />
quenouille entre deux doigts», et «section, intervalle entre deux<br />
montants », sens dérivé comme pour prçslo « quenouille, fuseau »<br />
(§ 944). Le thème est donc *pô(s)-, et il n'est plus identifiable,<br />
un rapprochement avec si. pad- « tomber », ne représentant qu'une<br />
possibilité vague.<br />
Le mot v. r. pismo « lettre, écriture », mod. pis'mô, pol. pismo,<br />
tch., s.-cr. et slov. pismo, est ancien dans toutes ces langues, mais<br />
le vieux slave ne connaît que pismç, et le vieux polonais a pismiç<br />
à côté de pismo (§ 186).<br />
On a apparemment -imo dans :<br />
v. si. bëlïmo (Ham.) « leucôme », r. bel'mô « cataracte », pol.<br />
bielmo, tch. bëlmo, et slov. bêlno (§ 1080), ôbelno sur obéliti «blanchir<br />
», s.-cr. bidna(% 1077) ;<br />
slavon prazïmo « farine grillée », pol. prazmo « grains (de seigle)<br />
grillés », v. tch. et dial. prazma, v. r. prjazïmo et r. dial. prjâzmo,<br />
sur praziti «faire griller», r. prjâzit' (§ 615).<br />
Mais on doit n'y voir que des formations en -mo directement sur<br />
les thèmes bël-, praz-, comme dans :<br />
bulg. valmô « boule, rouleau » sur valiti « rouler », et ëelmô d'après<br />
pismô dans ëetmo i pismo « le'cture et écriture ».<br />
Le tchèque pizmo « musc », d'où pol. pizmo, vient de v. h. a.<br />
bisamo, mod. Bisan, latin du Moyen Age bisamum.<br />
Le vieux-polonais bierzmo « poutre », et bierzmno, bierwiono,<br />
n'est qu'une déformation de *bïrvïno (§ 1079) ; le slovaque prasmo
574 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
« palissade (autour d'un chalet) » en est une de prçslo, pol. przçsto<br />
« travée » ( § 944) ; et r. jartnô « joug » et pol. jarzmo sont visiblement<br />
secondaires de v. si. jarïmu.<br />
On observe ainsi une petite extension, à diverses époques, du<br />
suffixe -mo. Il apparaît pour une part variante du suffixe -men-,<br />
et une contamination entre les deux flexions a pu se produire dans<br />
des formes comme loc. plur. ramexu (§ 179). Il n'y a donc pas lieu<br />
de comparer directement si. pismo « écriture » à lit. piesimas,<br />
dérivé verbal régulier en lituanien de pièsti « tracer des traits »<br />
(§ 543).<br />
§ 1069. Suffixe -imu. — Il apparaît dans des formes substantivées<br />
du participe présent passif, indiquant particulièrement<br />
l'acquisition d'un lien de parenté :<br />
slavon otïëimu « celui qui est fait père, le parâtre », r. ôtëim, pol.<br />
ojczym, etc., et s.-cr. pàocim « père d'adoption », bulg. pobâstim sur<br />
bastd « père » ;<br />
v. si. rodimu (J. Ex.) « parent » ;<br />
v. si. zenima « concubine » (Pand. Ant., Izb. Svjat.), et slov.<br />
zçnim « fiancé » ;<br />
v. r. inoëimu « (beau-)père d'enfants du premier lit », en regard<br />
du féminin inoëï (§ 1047) ;<br />
s.-cr. ancien hotim « amant », mod. pobralim et pàsesîrima « frère,<br />
sœur d'adoption ».<br />
Le mot laimu « secret » reste un participe passif régulier, mais<br />
il a un dérivé taimiëistï « bâtard », comme zenimi(ëi)stï de zenima<br />
(§867).<br />
Un vieux-slave narodovodimo « démagogie » que pose Miklosich<br />
d'après Supr. 27823 vu... narodovodimëxû n'est qu'une altération :<br />
l'original grec fait supposer une lacune d'une ligne et invite à<br />
restituer vu... narodovodi- ... mëxu.
CHAPITRE XXXI<br />
SUFFIXES EN -n-<br />
§ 1070. Suffixe- nu. — L'indo-européen avait un suffixe -no-,<br />
l'ém. -nâ, qui fournissait en particulier des adjectifs verbaux<br />
(§ 409). Il est conservé dans des adjectifs et des substantifs, en<br />
grec asy.vôr « vénérable », xoarvoç « fumée », en latin dignus, pugnus,<br />
et neutre dônum, mais surtout dans des formations anciennes.<br />
En baltique, le lituanien a des adjectifs en -nas (et -nus) :<br />
glôdnas «lisse» (et glodùs, glodnùs) sur glôdziu, glôsti «lisser»<br />
3I. gladùku, § 983) ; et des substantifs en -nas : maïnas « échange »<br />
(si. mena, fém.), sur *mei- (§ 490), qui sont pour une bonne part<br />
d'anciens neutres, en vieux prussien -nan (§ 1074).<br />
Le slave a fait de l'adjectif verbal en *-no- son participe passé<br />
passif en -nu, -anti, -enû, -jenu (§ 408) ; et il l'a abondamment<br />
développé comme adjectif dérivé de substantifs, mais normalement,<br />
l>our des raisons de clarté, sous la forme élargie -ïnu (§ 575). La<br />
l'orme courte en -nu se conserve dans le type productif en -ënu<br />
de *-ç-nu (§ 982), auquel il faut adjoindre v. si. jçcïnu «d'orge»<br />
et jçëïnënu supposant * jecïm-nù, et v. si. usnije « cuir » supposant<br />
*usnû de *usm-n- (§ 980) ; exceptionnellement, sur thème en<br />
*-u-, cirkunu «de l'église» en slavon morave (§ 74) ; et dans un<br />
nombre assez important encore d'adjectifs et de substantifs<br />
i-iolés, mais qui, dès le vieux slave, avec la chute des jers faibles,<br />
ne se distinguent pas toujours sûrement des formes en -ïnu.<br />
On a les adjectifs :<br />
v. si. plunû « plein », s.-cr. pûn, de *pïl-nû, lit. pllnas, skr.<br />
/tûrndh, etc., qui remonte à l'indo-européen, mais s'analyse encore<br />
comme dérivé du thème verbal de lit. pilù, pilti « emplir » (§ 460),<br />
urr. rapïÀTjij,!,, lat. -plëre et adj( plênus ;<br />
v. si. junu «jeune», lit. jâunas, et lat. iuuenis, skr. yûvâ, gén.<br />
gûnah, et compar. gdvïjas- sur thème *yeu~.<br />
v. si. slanu « salé », r. sôlonyj, sur solï « sel » ;
576 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
v. si. prostranu « vaste, spacieux », sur la racine *ster-, postverbal<br />
prosloru « étendue » (§ 728) ; un adjectif en -ïnû a été refait ensuite<br />
sur ce postverbal : v. r. prostoronû et prostorïnu, mod. proslôrnyj,<br />
slov. proslrân et prostçren, s.-cr. prôstran « vaste » et prôstoran<br />
« spatial » ; et pol. przestronny « spacieux » par rattachement à<br />
slrona « région », pour *-stron, abstrait przestrzen « espace » (§ 711) ;<br />
slavon ot(ù)vrùnu «renversé» et v. si. otvrunï «à l'envers,<br />
à l'opposé », adv. (§ 1200), sur le thème *vïri- « tourner » ;<br />
v. si. plenica « tresse », supposant *plet-nu, antérieur à pleteniea<br />
sur pletenu (§ 880).<br />
On reconnaît également -nù dans :<br />
slov. plân « plat » et « libre de végétation », tch. plany « sauvage,<br />
stérile », sor. piony et pol. plon(n)y « stérile », dérivé bulg. planina<br />
« montagne » (§ 891), sur le thème pol- de polje « champ », r. pôlyj<br />
«ouvert, libre» (§ 1021) ;<br />
v. si. jasnù « manifeste », de *ësk-nu d'après lit. diskus, iskùs<br />
(§ 75);<br />
slavon prësnu « non fermenté, azyme », r. présnyj « doux, fade »,<br />
s.-cr. prijèsan « cru », pol. przasny avec sn comme dans przasnik<br />
«pain azyme », et v. si. oprësnuku (§ 839), sur *prësk- d'après lit.<br />
dial. prëskas « sans levain, doux » ;<br />
slavon rësnu «vrai», et dans v. si. rësnota «vérité» (§ 898),<br />
de *rësk-nû d'après lit. ràiskus « manifeste », réiskiu, réiksti<br />
« manifester » ; slov. rêsen, abrégé en rês « en vérité », adv. ;<br />
v. si. lësnu « étroit », sur lësk- de tiskati « presser », itér. tëstiti<br />
(§ 561) ; tch. tësny « étroit », et v. tch. tësknij, se rencontrant avec<br />
teskny «triste» sur lusk- (§ 814), d'où tch. mod. tisen «embarras,<br />
détresse» (§ 1085), et pol. tçskny pour v. pol. teskny «qui se<br />
languit ».<br />
Et les graphies du vieux slave, déjà peu sûres, il est vrai, invitent<br />
à reconnaître -nu, et non -ïnû, dans :<br />
v. si. bliznû dans adv. blizno (Gr. Naz., Izb. Svjat.) « près »,<br />
dérivé bliznïcï « jumeau » (§ 835), sur blizû « près » ;<br />
v. si. kolesnû dans kolesnica «char» (§ 191); l'adjectif ne se<br />
distingue plus du type en -ïnû dàns le slavon koles(ï)nû (Mikl.),<br />
s.-cr. ancien kolesan, slov. kolqsen ;<br />
r. rovésnyj « du même âge » et subst. rovésnik, pol. rôwiesny et<br />
rôwiesnik, tch. rovésnik, qui apparaît comme le dérivé d'une forme<br />
en -es- (§ 1134) ;<br />
v. si. zelëznu « de fer », sur zelëzo ;<br />
v. si. praxnû dans praxnëti « tomber en poussière » (ne praxnëjç<br />
Upir'), ispraxnëti, subst. r. poroxnô « ce qui tombe en poussière »
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 577<br />
(§ 1074), bulg. prâhân « amadou », fém. (§ 711) et v. si. praxnënu<br />
« moisi, pourri » (§ 980), sur praxu « poussière ».<br />
On trouve dans les langues slaves un type de dérivés d'adjectifs<br />
en -xnu qui doit être ancien (§ 1158).<br />
§ 1071. — D'autres adjectifs sont d'interprétation plus douteuse :<br />
v. si. desnu « à droite », qui, malgré les formes parallèles, mais qui<br />
peuvent être indépendantes, lit. dësinas et skr. dàksinah, doit être<br />
un dérivé en -nu, et non -ïnu, du thème *deks- de lat. dexler, got.<br />
taihswa ; il est hypothétique de retrouver en slave des- dans le<br />
verbe expressif desiti «attraper» (§ 804), en lui supposant le sens<br />
originel « attraper de la droite, de la bonne main » ;<br />
v. si. krûnu (Pand. Ant.) « écourté, mutilé », r. korno-ûxij<br />
« essorillé », qui d'après lat. curtus, paraît se rattacher à la racine<br />
de gr. xsîpcù « je coupe », lit. skirti « séparer », si. (s)kora « écorce »<br />
(§31);<br />
v. si. lënu « paresseux », s.-cr. lïjen, slov. lên, à intonation douce<br />
de métatonie du type de s.-cr. zîv ( § 298) d'après lit. lënas « tranquille,<br />
lent», qui doit être bâti sur la racine *lê- de v. si. lëtï «(il<br />
est) permis » (§ 1170) ;<br />
v. si. naprasnu « brusque », adv. naprasno (et naprasnivû,<br />
§ 995) ; s.-cr. nàprasan « subit », et ndprasan avec accent de postverbal<br />
(§ 828), et le plus récent ndprasil ; r. naprdsnyj «vain,<br />
gratuit », d'où secondairement le substantif naprds « accusation<br />
gratuite », comme slov. rês de rêsen : on doit sans doute partir d'un<br />
adjectif *(na-)prask-nù sur le thème de s.-cr. prâskati «craquer»,<br />
pràsnuti « éclater » ( § 787) ;<br />
v. si. raznu « divers » dans adv. razno, r. rôznyj « isolé » avec<br />
variante rasnu (Izb. Svjat., en slavon russe), pol. rôzny sans doute<br />
d'après prôzny « vide », sur le préverbe v. si. raz-, ras- « en séparant<br />
», de *orz- ; et on peut supposer de même :<br />
*vuz-nu sur vuz-, dans vuznaku « à la renverse » (§ 861) ;<br />
slavon oprisnû « séparé, à part », adv. oprisnï et v. si. oprisnë<br />
(Gr. Naz.), verbe oprisniti dans v. si. oprisnjenije (Gr. Naz.), et<br />
oprisnënije (J. Ex.), et voir r. oprie' « hormis », § 1200 : ce peut être<br />
le dérivé de l'adverbe qu'on a en baltique dans lit. pries « devant,<br />
en avant », prépos. pries « contre » et « avant », lette prieks, qui est<br />
obscur ; un rapport est difficile, en raison de la différence des sens,<br />
avec :<br />
v. si. prisnù « légitime, proche », adv. prisno « perpétuellement »,<br />
r. prisnyj « vrai » et « perpétuel »'; le slovène a pristen qui peut avoir<br />
été refait sur pris(l)n- des autres formes, comme s.-cr. prisan sur<br />
le déterminé seul usuel prisnï, mais on suppose avec vraisemblance<br />
que la forme originelle était *prist-nù, sur un composé pri-st-
578 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
à second terme -stù «qui se tient», de *st(h)â-, comme dans<br />
prostû « qui se tient droit » (§ 819) ;<br />
v. si. pruvësnu (Upir') « premier né », subst. prûvësnïcï (Upir',<br />
Gr. Naz.) : on doit ici aussi supposer *pïrvëst-nu, dans un dérivé de<br />
pïrvu « premier » analogue à nevësta « jeune mariée », c'est-à-dire<br />
un reste de l'ancien superlatif en *-sio- (§ 293) ;<br />
v. si. pritranù, rendant zgavtfç « perçant » dans l'exemple unique<br />
en rédaction vieux-slave, Supr. 530u, mais qui est assez fréquent<br />
en rédaction slavonne (Cyr. Jér., etc.) avec le sens de « terrible » ;<br />
le rattachement par Miklosich à la racine *ter-, postverbal tor-,<br />
convient à r. pritornyj « douceâtre » sur pri-lerél' « frotter, roder »,<br />
pritirka « polissage, adoucissage », mais non à pritranù : on doit<br />
supposer une autre racine, par exemple *lïrp-, *torp- de v. si.<br />
utrapû «engourdissement», *torpiti «faire souffrir» (§ 770).<br />
L'adjectif v. si. praznu « vide, vacant » est une variante de prazdïnu,<br />
mais attestée de trop bonne heure pour qu'on puisse se<br />
contenter de n'y voir qu'une réduction de prazd(ï)n- (§ 43).<br />
L'abstrait prazdï « loisir » (§ 719) fait supposer un adjectif *prazdù,<br />
et il y aurait alors sur un même thème praz- deux dérivés, l'un<br />
en -dù (§ 1001), l'autre en -nu; et pouvant mêler deux formes<br />
de leur thème, l'une *porz- devant d, l'autre *pors-, ou *pors- devant<br />
n (§ 10), et *pors- appartiendrait à la racine verbale de *pïrsati<br />
«s'éparpiller», v. si. -prasiti «disperser», praxù «poussière»<br />
(§ 771). La variante *porz- de *porz-, dans v. r. porozn- et porozn-,<br />
mod. porôznyj, pol. prôzny, conserverait la forme *pors- avec<br />
modification en *porz- sur l'alternance de v. si. oprazniti, imperf.<br />
opraznjati, r. porôznit' comme (is-)poroznjât', pol. (o-)prôznic<br />
comme (o-)prôzniac.<br />
Un adjectif v. si. skvrùnû « souillé », de *skvïr-nù, est plausible,<br />
et supposé par les dérivés skvrûnoslï (§ 905) et skvrûnota (§ 899),<br />
mais il est mal attesté par un exemple unique en rédaction vieuxslave,<br />
Supr. 52316, et r. skvérnyj « sale, vilain », plus ou moins<br />
slavon, slov. skûren, prouvent peu : la forme usuelle est skvrùnïnù,<br />
dérivé de skvrûna « souillure » (§ 1075).<br />
Des adjectifs sont isolés et obscurs, ce qui est attendu dans un<br />
type de formation ancien :<br />
v. si. klosnù (Pand. Ant., Izb. Svjat.) « estropié, boiteux »,<br />
oklosniti « estropier » ;<br />
slavon kùsnù « tardif », et v. si. kùsniti « tarder » ;<br />
v. si. ranû (Pand. Ant.) « de bon matin », adv. rano, r. râno,<br />
s.-cr. râno. On a pensé à un rapprochement avec lit. rîjtas « matin »,<br />
et le thème *râ- du slavon rarù « bruit », r. râjat' « retentir », lette<br />
rât «gronder» (§ 508), se trouve effectivement représenté par<br />
*réj- dans lit. rteju, rieti «crier contre» (§ 515) par suite d'une
[•§ 1072] SUFFIXES EN -71- 579<br />
confusion entre les deux types verbaux en *-ê-je- et en *-ej-je-,<br />
_î- (§ 511) ; mais un passage du sens de « crier » à celui de « matin »<br />
ne peut s'imaginer qu'en partant du chant du coq, lit. rojôti<br />
« chanter comme le coq », et si le coq est bien le « chanteur », si.<br />
*pëlïlu (§ 1055), ce n'est, semble-t-il, qu'en serbo-croate qu'il<br />
sert à désigner le matin : u pijeîle «au chant des coqs», prvi,<br />
drugi, ireci, pijetli, entre minuit et l'aube, dans la chanson<br />
populaire.<br />
Dans v. si. slunïce « soleil », des composés comme r. solno-pëk<br />
« brûlure du soleil » (§ 803) et des verbes pol. sionic siç « se chauffer<br />
au soleil», slov. dial. solnéti «faire soleil» (§ 815), on reconnaît<br />
le dérivé *sul-nu, sans doute adjectif, d'un athématique *sul~<br />
(§175).<br />
Dans v. si. zënica « prunelle », on peut supposer un vieil adjectif<br />
verbal ou participe passif *zënû du verbe zijali « être béant »<br />
(•§ 881).<br />
On aurait une forme *-snû du suffixe sur racine en dentale dans<br />
*vasnu, voir § 1085.<br />
Des mots anciens à finale -nu sont inanalysables :<br />
*jïno- « un » et * jïnu « autre » (§ 257) ;<br />
v. si. ërunù « noir », de *ëïrxnu, v. pr. kirsna-, skr. krsndh (§ 39).<br />
Le slavon vranu « noir » est identique à vranu « corbeau », et<br />
le slavon srënu. « blanc » à *sernu « gelée blanche », subst.<br />
Pour les adjectifs en -znu, voir § 1110.<br />
§ 1072. Les substantifs. — Il y a ici deux suffixes différents,<br />
*-no- et *-nu-, qu'on trouve bien distincts dans deux mots de date<br />
indo-européenne :<br />
sûnu « sommeil », de *sup-no-, gr. Ô7rvoç, et lit. sâpnas de *svap-<br />
(§ 37), skr. svdpnah ;<br />
synû «fils », skr. sùnûh (§ 160) ; pour v. si. synu, sunu «tour»,<br />
mot d'emprunt, voir § 34.<br />
En slavon, la distinction des deux types n'est plus nette : des<br />
formes en -ov- prouvent peu dans la flexion (§ 161) et dans les<br />
dérivés, de même l'élargissement en -nùku en raison de l'extension<br />
du suffixe -ùku (§ 839), et oprësnûkû « azyme» est tiré de l'adjectif<br />
"prësk-nu (§ 1070). Gomme mots qui peuvent avoir appartenu<br />
au type en *-nu-, on admet :<br />
*cesnu « ail », s.-cr. ëèsanf slov. ëésen, et *ëesnûku, r. ëesnôk,<br />
pol. czosnek, tch. ëesnek, v. si. cesnovituku (§ 839), sans étymologie<br />
assurée, et un rattachement au thème ces- de ëesati « peigner »<br />
doit chercher péniblement sa justification ;<br />
v. si. groznû «grappe de raisin», collectif groznovije (§ 925), et
580 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
slavon russe grïznu, à côté de grozdû (§ 1000), sans explication<br />
valable (§ 744) ;<br />
v. si. trësnu « frange », adj. trësnovitu en slavon (§ 990), et altéré<br />
en tch. trâsen, fém., gén. -snë (§ 1090) ; une forme teresna (Srezn.)<br />
n'est comme trïsna (Istrin) qu'une interprétation de graphies<br />
fautives, Ham. 432j4, pour acc. plur, masc. trësny ; mot isolé, et<br />
un rattachement au thème trësk- de v. si. trëskati « craquer avec<br />
bruit » (§ 746) est risqué ;<br />
*ëernû « dent molaire », r. dial. céren, pol. trzon et adj. Irzonowy,<br />
slovaque ëren, et v. si. ërënovïnu, ërënovitïcï (§ 990), qu'on<br />
rattache au celtique cern « molaire » et « coin ». Mais on a égalemen<br />
v. si. (Cyr. Jér., Upir') ërënu « poignée », r. céren « manche (de<br />
couteau) », pol. trzon, etc., et r. céren « foyer, chaudière », pol.<br />
trzon, et le polonais trzon signifie encore « pied de champignon,<br />
pied des cornes du bœuf, noyau de la vertèbre ». S'il s'agit du<br />
même mot, le sens initial pourrait avoir été « masse osseuse »,<br />
« saillie cornée », et l'on penserait alors à lat. cornu, gr. xspaç, etc.,<br />
dont la racine paraît avoir eu en balto-slave la forme *sr- d'après<br />
si. *sïrna « chevreuil » (§ 1076), et *kr- dans v. pr. kurwa- « bœuf »<br />
v. si. krava « vache » (§ 1185).<br />
-V. si. trunu « épine », r. tërn, s.-cr. trn, répond à got. paurnus,<br />
mais également à skr. tfnam « herbe », et le mot ne s'analyse pas.<br />
Pour v. si. cinu «ordre», malgré son adjectif ëinovïnu (§ 975),<br />
il peut n'être pas plus dérivé en *-nu- (§ 160) que le mot voisin<br />
sanu « dignité », adj. sanovitu (§ 990), qui est un emprunt au turc<br />
(§ 155), et la question ne se pose pas pour pol. czyn «acte», r.<br />
ocin « tuyau de plume », etc., qui sont des postverbaux de pol.<br />
czynic « agir », r. oëinit' « tailler une plume », etc. (§ 798).<br />
De même v. si. stanu n'est pas garanti forme en *-nu- par les<br />
dérivés slavon slanukû, v. si. ostanuku «reste», etc. (§ 838). Et il<br />
n'y a pas lieu de chercher autre chose que *-no- dans :<br />
*yûrnu (§ 73), v. r. yornû et mod. yorn « fourneau de forge»,<br />
et v. si. yrunïcï (Izb. Svjat.) «pot» (§ 835), dérivé de date indoeuropéenne,<br />
lat. furnus, skr. ghrnâh « chaleur », de la racine *g w her-<br />
« brûler » ;<br />
v. si. plënu « butin », lit. peinas « gain », sur thème *pel- {§ 114) ;<br />
v. si. rçsnù « frange, cil » (Théod. XVI, 8 vëcnyja rçsy « les<br />
franges de la paupière, vëko »), slavon rçsnica « cil », v. r. rjasnica<br />
et mod. resnica, sur v. si. recsa « frange » (§ 808) ;<br />
*sernû dans v. r. serenu « neige gelée » et mod. serën, séren<br />
« couche de glace », pol. srzon, sron « gelée blanche » de v. pol.<br />
srzon, slov. srên «neige durcie, givre», et en slavon adj. srënû,<br />
serenu « blanc », qui se dit de la robe du cheval ; d'un balto-slave
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 581<br />
*sers-, lit. sefksnas «gelée blanche, givre» et adj. «gris blanc»,<br />
d'où le slave *ser(x)n- (§ 39), élargissement de *ser-, lit. sarmà<br />
« givre », v. isl. hjarn « neige durcie ».<br />
§ 1073. — Des mots sont d'origine un peu moins sûre :<br />
v. si. blaznu « erreur, scandale » (et blazna, blaznï), en même<br />
temps qu'il est le postverbal du dénominatif blazniti (§ 789), doit<br />
être un dérivé en -nu du thème du lette blâzt « luire », blâzma<br />
« lueur », passant un sens d'« apparition » dans r. blaznit' « apparaître<br />
en songe », et ce thème peut être celui de véd. bhrâjati « il<br />
brille », av. brâzaiti, forme à vocalisme long de la racine *bhleg'~<br />
de gr. tpXéyw, lat. fulgeô, et lit. blizgëli, v. si. blïslali sg (§ 438) ;<br />
v. si. clënû « articulation, membre » (Gr. Naz., Éph. IV, 16,<br />
Hébr. IV, 12) et slavon clanu (§ 68), dérivé clënûku, v. r. celenukû<br />
(§ 839), qui se rattache sans doute comme kolëno (§ 1099) à lit.<br />
kelys « genou, nœud d'une paille » ;<br />
v. si. drunù (Gr. Naz.) «gazon», r. dèrn, tch. dm, pol. darn<br />
pour pol. ancien et dial. darn, sûrement sur la racine *der-, v. si.<br />
dere-, lit. dirti « écorcher » et « couper le gazon » (§ 471) ;<br />
v. si. (J. Ex., Izb. Svjat.) glënu «humeur, mucosité», tch.<br />
hlen, pol. glan « lie, marc de café », slov. glçn « mucus » et « limon »,<br />
rattaché avec glina «argile» (§ 1075) à *glïjï «colle», lit. gliëli<br />
« enduire, coller » (§ 515), gléima « mucosité », lette gliems « limace »,<br />
sur thème *glei-, gr. yXoiot; « glu » ;<br />
v. si. granu « verset », et v. tch. hrano et hrana (plur. hrana,<br />
hrany) «sonnerie pour les morts» et « épithalame », sor. grono<br />
« sentence », qu'on rattache au thème *ger- de lit. glrti « louer »,<br />
skr. grndti « il chante (la louange) » (§ 191), mais voir § 1084.<br />
D'autres mots à finale -nu s'interprètent mal ou sont sans<br />
explication :<br />
*cïlnu dans r. ëëln « barque », pol. czôlno de v. pol. czoln, s.-cr.<br />
cûn, et lit. kelnas « bateau de pêche, bac », dont le rapport n'est<br />
pas clair avec lit. kélmas « tronc d'arbre », kéllas « bac », et v. h. a.<br />
scalm « bateau » ;<br />
v. si. drënu « cornouiller », r. déren, derën, s.-cr. drïjen, qui est<br />
tout différent de *dïrnu « gazon » et n'a sûrement rien à faire avec<br />
la racine *der- ;<br />
v. si. vranu « corbeau », lit. vafnas, et slavon vranu « noir »,<br />
adj., r. voronôj, ne s'analyse pas ;<br />
*vënu, dans r. ven à côté de l'usuel venôk « tortis, guirlande»,<br />
et pol. wian douteux à côté de wianek, pourrait être tiré secondairement<br />
de vënïcï « couronne » à aspect de diminutif, mais de toute<br />
façon vënïcï et v. r. vëniku « faisceau » attestent un dérivé vënde<br />
la racine *vej- (§ 835).
582 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
Le vieux-slave gleznû « astragale, cheville » a des variantes<br />
glezno et glezna, mais la forme masculine est sûrement primitive :<br />
Ham. 189-t gleznû ruenyi àaTpayaXoç yjîipoç, var. glezny ruënya,<br />
fém., avec le pluriel de Daniel, Y, 5 SàxTuXoi, '•> Act. Ap.,<br />
III, 7 gleznë nogu « les chevilles, T« acpopà », duel féminin ou neutre,<br />
mais à côté de plesnë « plantes des pieds », de plesno, var. plesna<br />
(§ 1074). Et dans les langues slaves : r. glëzna «tibia, canon du<br />
cheval », pol. glozn « cheville », puis glozna, tch. hlezen, puis hlezno,<br />
bulg. glézen, et s.-cr. glèzanj, slov. glçzenj, sur gén. -znja, de gleznû<br />
avec substitution à -nû du suffixe productif s.-cr. -anj, slov. -enj<br />
(§ 1092). Le mot est sans étymologie, mais un rapprochement serait<br />
possible, par l'idée de partie faible du pied, avec lit. glçzlù, glèzti<br />
« devenir faible, débile », adj. glëznas « faible », lette glezns<br />
« sans résistance », thème d'ailleurs également isolé.<br />
Un mot *svënû est supposé par le verbe v. si. o-svëniti sg « se<br />
tenir à l'écart » (§ 749), et par l'adverbe et préposition v. si. svënje<br />
« à l'écart (de) », vieux-serbe osvënje, osvënï, osvjenj, altéré en mod.<br />
ôsim «sauf, hormis» et sfj'Jëm, qui doit être le neutre du dérivé<br />
adjectival en ~(j)ï (§ 957) d'un balto-slave *svai-na- : on l'a dans<br />
lit. svâinê « sœur de la femme », masc. svâinis, dérivé sans doute<br />
à vrddhi ( § 708) en regard de v. h. a. swein « serviteur », sur *swo-yo-<br />
« son propre », si. svojï, en partant d'un sens premier « en propre ».<br />
Le slavon kljunu « bec », s.-cr. kljûn, est sûrement un postverbal<br />
(§ 825) du perfectif nouveau *kljunçti de kljuje-, kljïvati<br />
«becqueter» (§ 528). Mais cette explication ne convient pas à :<br />
v. si. klinû « coin, cheville », s.-cr. Mïn, tch. klin (§ 809), qui ne<br />
s'analyse pas : une forme *klinçti n'est pas attestée ; et une<br />
comparaison avec r. mlin « moulin », en regard de melje-, *melti<br />
« moudre » ne saurait autoriser un rattachement à kolje-, *kolti<br />
« piquer », puisque le slavon mûlinù est un emprunt à v. h. a.<br />
mulîn, du bas-latin molïnum.<br />
S.-cr. irûn « fétu, brin de paille », avec un verbe trûniti « couvrir<br />
de poussière » et avec ses formes à préverbe is-, o-, est attesté<br />
depuis le xvi® siècle, antérieurement à la chute de h en serbocroate<br />
(§ 10), et d'ailleurs dans un domaine, la Dalmatie, où cette<br />
chute n'a pas eu lieu. Il est pourtant inséparable de truha « brin<br />
de paille » et de iru(h)nuli « pourrir, moisir » (§ 765), adj. trù(h)lï<br />
«pourri, vermoulu» (§ 1048) : il remonte sûrement à *trux-nû,<br />
avec la réduction ancienne de xn à n (§ 39), comme dans bûna<br />
« émeute » (§ 760).<br />
Le polonais lien « oxygène » est une création artificielle sur<br />
liée « brûler faiblement », llic (siç) « (se) carboniser », sans doute sur<br />
le modèle du postverbal plyn «fluide» (§ 825) ; indépendamment,<br />
le russe a tien « ce qui se pourrit, tombe en poussière », à côté de
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 583<br />
§ 1074. Suffixe -no. — Le grec a des neutres en -vov : Tspajxvov<br />
« toit », surtout en -avov : Speuavov « faux » sur Spércw « je cueille » ;<br />
le latin des neutres en -nam : rëgnum « règne » sur rëx « roi ».<br />
En baltique, où le neutre a disparu en letto-lituanien, le vieux<br />
prussien conserve plusieurs noms en -nan :<br />
balgnan « selle », lit. baïnas de baignas, sur balg- du germanique<br />
(§576);<br />
laignan «joue», qui peut être de *laikn- (§ 39), mais qui n'a<br />
sûrement rien à voir avec si. lice « figure, visage » (§ 191) ;<br />
nognan « cuir », qui doit être un dérivé du thème *nôg- de lit.<br />
nûogas « nu, dénudé », si. nagu, au sens de « dépouille, peau » ;<br />
pomnan « le derrière », qui pourrait représenter *pamp-na-,<br />
sur pamp- de lit. pai/hpti « enfler », pdmpa « renflement », comme<br />
si. *gçzu « le derrière h en regard de lit. gui- « renflé » ( § 450) ;<br />
et *iagno « foie », ancien pluriel neutre, v. lit. jeknos, fém. plur.,<br />
avec gn de kn, et lagno « culotte » (§ 39).<br />
En slave, la difficulté est de distinguer les dérivés en -no et en<br />
-ïno (§ 1079). On doit ou on peut reconnaître -no dans :<br />
v. si. zruno « grain », r. zernô, plur. zërna, s.-cr. zfno, et v. pr.<br />
syrne « grain », lit. zirnus « pois » et lette zifnis d'intonation rude :<br />
mot de l'indo-européen dialectal, lat. grânum, got. kaurn, qu'il<br />
est possible de faire dériver d'une racine *gr-, si. zïrëti « mûrir »<br />
(§ 583) ;<br />
v. si. duno « fond » (Pand. Ant.), et dans bezdûna « abîme »<br />
(§ 1219), r. dno, etc., et lit. dùgnas, lette dibens, de *dubn-, sur le<br />
thème dub- de lit. dùbti « devenir creux » (§ 39) ;<br />
v. si. runo « toison », r. runô, s.-cr. rûno, etc., sur le thème *reude<br />
rûvati « arracher » (§ 465), et voir s.-cr. rûta, § 1165 ;<br />
v. si. loîesno « matrice », plur. lozesna, ailleurs comme slavonisme,<br />
r. lozesna, etc., sur un dérivé en -es- (§ 191) de la racine *leg- ;<br />
*lçkno dans v. r. lukno « mesure de capacité » et r. dial. luknô<br />
« récipient en vannerie ou en bois, corbeille », etc. ; v. tch. lukno<br />
« mesure », s.-cr. ancien lukno « mesure pour les céréales » et<br />
« dîme », slov. Içkno « rétribution au prêtre » : vieux mot devenu<br />
obscur, mais sûrement sur thème *lenk- et dérivé de *lonk- « chose<br />
courbée », lit. lankas « anse, cercle (de seau, de tonneau) » (§ 763),<br />
et le sens ancien est conservé dans la forme remaniée slov. lôcen<br />
« anse » (§ 1077) ; y<br />
v. si. okno «fenêtre» dans le diminutif (Pand. Ant.) ok(u)nïce<br />
t§ 922), r. okno, pol. et tch. okno, etc. ; rien n'oblige à supposer<br />
-uno, et l'insertion d'un jer et sa vocalisation s'est produite dans<br />
le diminutif, slavon okonïee, r. okônce, v. pol. okience et mod.
584 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
okienko ; dérivé de oko « œil », et voir (j)acaja «ouverture, regard »,<br />
§ 1032 ;<br />
slavon croate rakno « sorte de vêtement », s.-cr. râkno « couverture,<br />
sorte de châle », slov. râkno, râknië « manteau de pluie », et « drap<br />
mortuaire » par rattachement à râka « tombe » ( § 205) : le bas-latin<br />
a racana « guenille » (xi e s.), et il doit s'agir du même mot, dérivé<br />
d'un emprunt à v. h. a. roc « vêtement de dessus, habit » ;<br />
v. si. stegno « cuisse », r. stegnô, s.-cr. stègno : sûrement sur la<br />
racine *steg- « piquer » et l'idée de piquet, slogu « (pieu de la)<br />
meule » ( § 733) ;<br />
v. si. sukno « tissu de poil », r. suknô « drap », s.-cr. sûkno, pol.<br />
sukno, et dérivé suknia «robe» (§ 1086) : sur le thème de suce-,<br />
sukati « tordre (le fil) » ( § 544) ;<br />
slavon vlakno, r. voloknô « fibre, filament », pol. wlôkno, etc.,<br />
sur *velk- « tirer » (§ 769).<br />
Avec la forme -sno sur thème en dentale :<br />
v. si. plesno « plante des pieds », qui n'est attesté en rédaction<br />
vieux-slave que dans le duel plesnë, mais on a aussi instr. sing.<br />
plesnom Ham. 52510, et en slavon instr. duel plesnoma ; le féminin<br />
r. plesnâ est sûrement secondaire du duel en -në, et acc. sing.<br />
plesnu Ham. 36j est un russisme ; de même slov. plésna à côté<br />
du plus populaire plésno, plésmo « cou-de-pied ». Le baltique<br />
a v. pr. plasmeno (§ 184) et lit. dial. plâsnas. Le thème est *pletde<br />
lit. plësti «étendre», platùs «large» (§ 429), et v. si. pleste<br />
« épaule » (§ 1021).<br />
On ajoutera à cette liste :<br />
pol. bagno « marécage », ukr. bahnô, tch. bahno, qui n'est pas<br />
expliqué ;<br />
v. si. lono « giron », r. lôno, etc., sans doute de *lok-no « pan<br />
flottant », v. pr. lagno « culotte » (§ 39), sur la racine *lek-, si. letëti<br />
« voler » ( § 595) ;<br />
v. si. krosno dans Ham. 5227, 1102 krosna pauëa «toiles<br />
d'araignée », citant Isaïe, LIX, 5 ; r. krôsno « métier à tisser » et<br />
« toile tissue », bulg. krosnô « ensouple », s.-cr. krosna, plur., « métier<br />
à tisser » et pol. krosna ; pour le féminin tch. krosna « hotte », voir<br />
§ 1086 ; le mot peut s'expliquer comme forme en -sno sur le thème<br />
en dentale *kret- de lit. krësti « secouer » et si. krçlali « mouvoir »<br />
(§ 762) : tûkali « tisser » indique aussi que le tissage est désigné par<br />
les secousses du métier à tisser (§ 465) ;<br />
v. si. sëno « herbe (à fourrage) », r. séno « foin », s.-cr. sljeno,<br />
et lit. siënas, lette siens d'intonation douce : mot inanalysable,<br />
et un rapprochement avec le grec (d'Hésychios) xotva n'apprend<br />
rien ;
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 585<br />
slavon vëno « prix de la fiancée », r. véno, pol. wiano, tch. vëno,<br />
qui doit être un emprunt au latin uënum «vente» (§ 209), remplaçant<br />
le mot balto-slave conservé dans v. lit. krienas, lette<br />
kriens (§ 534).<br />
Et sor. grono « parole », v. tch. hrana, plur., « glas, épithalame »,<br />
voir granu (§ 1073) et granl (§ 1084).<br />
Pour glezno, voir gleznû, § 1073 ; et pour pol. dziqsno, voir *dçsna,<br />
§ 1075.<br />
On a donc des restes notables d'une productivité ancienne du<br />
suffixe -no, qui a dû se poursuivre assez tard. D'ailleurs ce n'est<br />
qu'une forme neutre substantivée de l'adjectif -nu, et le russe<br />
poroxnô « ce qui tombe en poussière, bois pourri », pol. prôchno<br />
« bois pourri, amadou », tch. prâchno, est le neutre de l'adjectif<br />
praxnu (§ 1070).<br />
§ 1075. Suffixe -na. — Le baltique connaît un large emploi du<br />
suffixe *-nâ : lit. dainà « chanson populaire », sur le lette diêt<br />
«danser, chanter» (§ 518); graznà «parure», sur grazùs (et<br />
grâznas) « joli ». Sous la forme *-snâ, il fournit au vieux prussien<br />
tout un type de substantifs verbaux (§ 413) : waisna- «connaissance<br />
» sur waid-, waisl « connaître », mukinsna- « enseignement »<br />
sur mukint « enseigner ».<br />
En slave, des mots sont très anciens :<br />
v. si. cëna « prix », lit. dial. kaina, av. kaënâ-, sur racine *k w ei-,<br />
gr. Tijj.Yj « estimation » ;<br />
v. si. luna « lune », r. lunâ, etc., v. pr. lauxnos, plur., « astres »,<br />
lat. luna, et adjectif dans av. raoxsna- « brillant », sur thème<br />
*louk-s- (§ 39) ;<br />
v. si. pëny, plur., « écume », r. péna, s.-cr. pjëna (pour spjëna,<br />
voir § 749), v. pr. spoayno, lit. spâiné, d'intonation rude avec un<br />
allongement vocalique comme de vrddhi (§ 708) en regard de la<br />
brève du masculin skr. phénah, et avec une autre finale lat. spuma,<br />
v. h. a. feim ;<br />
v. si. vluna « laine », r. vôlna, s.-cr. vuna, et lit. vilna, d'intonation<br />
rude également, skr. urnâ, lat. lâna, got. wulla : vieux mot qui<br />
n'est plus analysable, et un lien avec lat. uellus «toison», verbe<br />
uellô «j'arrache», est très conjectural.<br />
Pour v. si. vesna « printemps », r. vesnd, s.-cr. vèsna, en regard de<br />
lit. vâsara, c'est l'adaptation d'un ancien athématique en -r : -n-<br />
(§476).<br />
Une série de formes du slave sont tout à fait claires :<br />
v. si. glina «argile» (Upir') et adj. glinïnu, r. glina, tch. hlina,<br />
s.-cr. gnjîla (§ 514), sur le thème de *glïjï «colle» comme glënu<br />
« mucosité » (§ 1073) ;
586 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
v. si. mëna «échange », lit. at-mainà, sur *mei- (§ 490) ;<br />
v. si. slana « gelée blanche », bulg. slanâ, s.-cr. et slov. sldna,<br />
et lit. salnà, lette saîns « de couleur blanche, pâle », adjectif sur<br />
sais « gelée », lit. s allas « froid », adjectif verbal de sala, sâlii « geler »<br />
(§ 445), et en germanique v. isî. hêla « gelée blanche » ;<br />
v. si. stïgna « place (publique) », r. slôgna (slavonisme), s.-cr.<br />
ancien stagna « place, rue », slov. stegnà « piste pour le bétail »,<br />
v. pol. et dial. sciegna « sentier » et « pâturage », à côté de v. si.<br />
stïdza « chemin, sentier », lette stiga (§ 18), et got. staigs « chemin »,<br />
sur *sleigh-, si. stignçti « atteindre » (§ 797) ;<br />
v. si. strana «région», r. storonâ, s.-cr. strâna, et adj. v. si.<br />
prostranû «spacieux» (§ 1070), sur stïre- «étendre»;<br />
v. si. vluna « flot, vague », r. volnâ, et lette vilna, lit. vilnis, acc.<br />
vilni, d'intonation douce, v. h. a. wëlla, sur le thème vel- de lit.<br />
veliù, véltin rouler », v. si. valiti se, vïlati sg « être ballotté » ( § 615).<br />
D'autres formes sont assez claires aussi :<br />
v. r. borona « herse » et mod. boronâ, pol. brona, s.-cr. brâna,<br />
sur un thème *bor- qu'on peut retrouver dans lat. forô «je perce »<br />
(§ 773);<br />
vs-sl. brïna « boue », dans un exemple unique (écrit bruna, § 61),<br />
et collectif brïnije (§ 929), s.-cr. ancien brna, slov. bina «glaise,<br />
terreau» ; de *brïd-na sur la racine brïd- de brede-, bride- «passer<br />
à gué», pol. brnqc « patauger » (§ 430), lit. brada « pataugeage,<br />
boue »(§ 724);<br />
v. si. skvruna «souillure», et sans doute adj. skvrixnu (§ 1071),<br />
slavon russe skvïrna et mod. skvérna, tch. skvrna « tache (de<br />
graisse) », slov. skrûna : un rapport est apparent avec le thème de<br />
v. si. -skvïre- « faire fondre la graisse » (§ 453), et avec skar- de v. si.<br />
skarëdu « répugnant », *skor- de v. isl. skarn « fumier » (§ 176) ;<br />
v. si. sliny, plur., «salive, bave», s.-cr. slïna, etc., et r. slinâ<br />
passant à sljund sûrement sous l'influence de pljûnut' « cracher »<br />
(§ 490); lette sliènas «crachat», plur., et avec d'autres finales<br />
lette sliëkas « crachat », lit. slîekas « ver de terre », et v. h. a. slïm<br />
« mucosité, glaire », en slave r. et tch. slimâk « limace », pol. slimak<br />
comme lat. lïmâx ;<br />
*vorna, tch. dial. et slovaque vrana « bonde », bulg. vrand,<br />
pol. wrona « trou de la bonde », et r. vorond « trou du gouvernail »,<br />
vorônka «entonnoir», s.-cr. et slov. vrânj «bonde» (§ 1096), avec<br />
verbes s.-cr. (za-)vrdnjiti « boucher », r. vorônit' « être bouche bée »,<br />
provorônit' « laisser échapper », sur vire-, slov. za-vréti « barrer<br />
l'entrée» (§ 728) ;<br />
v. si. xrana dans l'adverbe xranïno « avec sûreté » et le dénominatif<br />
xraniti « garder », r. xorôna « protection », s.-cr. hrdna<br />
«nourriture» (§ 773), sur la racine *ser- (§ 10) de lat. seruô «je<br />
préserve », av. haraite ;
[§ 1076] SUFFIXES EN -n- 587<br />
vieux s.-cr. hina « fraude », verbe hinili « tromper », slov. hiniti,<br />
et r. dial. xinit' « blâmer », sûrement sur thème xyb- (§ 802).<br />
Une forme est limpide, mais isolée :<br />
pol. ciosna « marque sur un arbre, martelage », avec variantes<br />
ciosn et ciosno, sur ciosac « tailler » (§ 804).<br />
Et une forme est en -ma sur thème en dentale :<br />
*dqsna « gencive », r. desnd, v. pol. dziqsna et mod. dziqsio et<br />
dziqsno (§ 944), sur *dçt- « dent », lit. dantis (§ 174).<br />
§ 1076. — D'autres mots s'interprètent de façon plus conjecturale,<br />
ou sont franchement inexplicables :<br />
slavon blana « arrière-faix », r. bolond « arrière-faix, excroissance,<br />
loupe des arbres », ukr. bolôna et pol. blona « peau, membrane »,<br />
tch. bldna « membrane, parchemin, aubier », de *bol-na, sans doute<br />
*bôl- d'intonation rude ; un rattachement au grec ooXiç « écaille »<br />
est en l'air ; celui à lit. bdlnas « blanc » (en parlant des animaux)<br />
et bâltas, sur bâl- qui doit être secondaire en baltique de bel- du<br />
slave (§ 298), inviterait à partir du sens d'« aubier », qui n'est<br />
sûrement pas primitif ; mais pour celui de « membrane », on ne<br />
peut pas supposer une dépréverbation ancienne de ob-val- en bal-,<br />
celle qu'on trouve dans tch. baliti « emballer » (§ 788) ;<br />
slavon et pol., tch. blizna « cicatrice », r. bliznd ; et s.-cr. bllzna<br />
« défaut dans un tissu », mais qui doit être un autre mot, postverbal<br />
de blizniti « faire des jumeaux » et « introduire deux fils au lieu d'un<br />
dans le tissage » ; au premier sens, dérivé de la racine du lette<br />
bliêzl « frapper », lat. flïgô « je bats », à laquelle se rattache également<br />
blizu «près», avec bliznu, adj. (§ 1070), et bliznïcï «jumeau»<br />
(§ 835);<br />
s.-cr. buna « émeute », sans doute de *bux-na (§ 760) ;<br />
v. si. dugna « cicatrice » (Gr. Naz., Izb. Svjat., Hés. L, 3), slavon<br />
russe dogna et degna : mot isolé, qu'il est possible, en partant de<br />
*dïg-, de rattacher à lit. diegli « ficher », dygùs « pointu », lat. fïgô<br />
«je fiche », fïxûra «blessure, marque (de clous) » ;<br />
v. si. duna (Euch.) désignant une maladie, la goutte dans pol.<br />
et tch. dna, avec adjectifs v. pol. denna et dnawa (niernoc)<br />
« (maladie) de dna » ; un rattachement à dûno « fond », avec idée<br />
de fondement, de bas-ventre, est forcé, et s'il s'agit d'un mot à<br />
suffixe -na, le thème de base, qui ne peut pas être *dub-, n'est<br />
pas reconnaissable ; '<br />
slavon krina « boisseau », bulg. krina, r. krina « pot (au lait) »,<br />
s.-cr. ancien krina « boisseau » et « vase à boire », diminutif v. si.<br />
krinica « cruche », r. krinica « source », et v. pol. krzynôw « baquet
588 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
de bois, pétrin », v. si. okrinu « coupe, vasque » et tch. okrin « vase,<br />
bassin » qui suppose un verbe *o-kriniti : on soupçonne un mot<br />
d'emprunt, ou deux mots différents, dont seul l'un pourrait être<br />
à gr. -/.pTjVY] « fontaine » ;<br />
v. si. rana « blessure, plaie », r. et tch. râna, s.-cr. ràna, d'intonation<br />
rude, et qui peut donc continuer *dr-, *ôr- aussi bien que râ- :<br />
un rapprochement avec skr. vranâh, qui n'a pour lui que la<br />
communauté des sens, est arbitraire, bien que généralement admis ;<br />
le thème rë-, râ- de si. rëdûku « espacé », lat. rârus ( § 983) peut<br />
difficilement convenir, et le thème ra- de ratï « guerre, combat »<br />
(§ 1171) ne serait qu'un peu plus satisfaisant ;<br />
v. si. sosna (J. Ex., Ham.) «pin», r. sosnâ, pol. et tch. sosna,<br />
inexpliqué et inanalysable ;<br />
v. si. sruna (J. Ex., Pand. Ant.) « chevreuil », r. sérna et ukr.<br />
sernà, s.-cr. sfna ; en baltique, lit. stirna et lette stifna présentent<br />
une initiale et une intonation différentes, mais le vieux lette connaît<br />
la forme sirna ; le vieux prussien a sirwis « chevreuil », en regard de<br />
ragingis « cerf » sur ragis « corne », si. rogu, qu'on rapproche de lat.<br />
ceruus. L'intonation rude du letto-lituanien peut s'expliquer par<br />
la vrddhi dans un dérivé féminin (§ 708), donc en supposant un<br />
masculin *s(t)irna-, et la forme s tim- à côté de sim- suppose<br />
de son côté un jeu d'alternances qui, en partant de *srn-, pouvait<br />
donner à la fois sirn- et *s(t)rin- (§ 117). En admettant avec<br />
Trautmann, malgré lit. stirna de type lette, une base baltique<br />
*sir-, *sri-, on rejoint le problème compliqué de la forme<br />
initiale du nom de la « corne », *krnu- dans lat. cornu, *keru- dans<br />
le dérivé lat. ceruus ; et voir *cernu, § 1072.<br />
Y. si. stëna « paroi, mur », r. stend, s.-cr. stijèna ; le rapprochement<br />
avec got. stains apparaît plus facile que sûr, et l'on peut penser<br />
à autre chose, un dérivé de la racine balto-slave *stip-, *stib- « se<br />
dresser», si. stïblo «tige» (§ 1052) ;<br />
v. si. struna « corde » dans le composé desçlïstrunïnu, r. strunâ,<br />
pol. et tch. struna, s.-cr. strûna et str&nja ( § 1086) « crin, poil de<br />
chèvre » ; les explications proposées sont toutes conjecturales ;<br />
v. si. tina « boue », r. tina « limon, vase », et slavon tinja (§ 1026),<br />
à côté de l'adjectif v. si. timënù (§ 980) sur *timen- (§ 186), h. sor.<br />
tymjo « marais » (et « sommet de la tête » par fusion avec tëmç,<br />
l'initiale ty- peut-être d'après tyl « nuque ») ; le rattachement qu'on<br />
a envisagé à taje- « fondre », sur racine "la- (§ 508), dont<br />
un élargissement en *tâi- apporterait la forme alternante *tï-, est<br />
hypothétique, mais conviendrait pour le sens et pour l'intonation ;<br />
v. si. vina « cause, grief », r. vina « cause, faute », etc. Le baltique<br />
a v. lit. vaina « faute », lette vaina, mais c'est un postverbal à<br />
vocalisme nouveau ai pour ie ancien (§ 50), et le verbe dont il<br />
dérive, antérieur au dénominatif lit. vainôti « accuser », peut avoir
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 589<br />
été emprunté au slave, r. vinit' ( § 798) ; le vieux prussien a et-winût<br />
« excuser », qui répond à r. izvinit', si ce n'est que -winûl est pris<br />
au doublet pol. winowac de winié. Si vinovati s'explique, en regard<br />
de -vinçti, comme dérivé du thème vi- « tordre » (§ 490), il n'est pas<br />
évident qu'il en soit de même de vina, qui pourrait avoir une autre<br />
origine et n'être pas un mot à suffixe -na.<br />
V. si. zlûna (J. Ex.) « pic, pivert », r. zelnâ, tch. zluna, s.-cr. zùna ;<br />
lette dziîna, et lit. gilnà « litorne, grive » ; le rattachement à lit.<br />
geïlas «jaune», si. zlûlu, tch. zluty, etc. (§ 1159), est aisé, mais<br />
pourrait être trompeur.<br />
Le mot *plëna présente deux sens différents : r. plenâ<br />
« membrane » et « lame mince », tch. plena « membrane », slov.<br />
pléna « plaque » ; en baltique lit. plèné et plènis « pellicule », lette<br />
plëne, v. pr. pleynis « peau du crâne » ; et, sur le même thème<br />
plê-, r. plevâ « membrane », lit. plèvê « peau (sur le lait) », etc.<br />
(§ 1185);<br />
r. plenâ « paille dans un métal », slovaque plena et tch. plen<br />
(fém.), en slovaque verbe plienit' sa « présenter une paille » ; slov.<br />
pléna et masc. plèn, verbe plénili se « s'écailler, se détacher par<br />
feuilles ».<br />
Est à part tch. plena « lange », par confusion avec v. si. pelena<br />
(§ 1097).<br />
Il paraît aisé de réunir les deux sens « membrane, pellicule »<br />
et « paille, écaille », et un rapprochement semble naturel avec<br />
le groupe de lat. pellis « peau », got. fill-, malgré la différence des<br />
formes plê- et pell- des thèmes. Mais le thème plê- se trouve avec<br />
un autre sens dans lit. plènè, plënis « poussière de cendres », et v.<br />
pr. plieynis qui est sûrement le même mot que pleynis « peau du<br />
crâne » ; et le problème se pose d'un rapport avec r. plet' « brûler<br />
sans flamme » et v. si. plësnï « moisissure » (§ 1085), et aussi avec<br />
le nom de la « cendre<br />
Pour v. si. blazna à côté de blaznu, voir § 789 ; pour glezna<br />
« cheville » secondaire de gleznû, § 1073, et plesna « plante du<br />
pied » de plesno, § 1074 ; pour grana « arête, rameau » à côté de<br />
granï, § 1084 ; pour s.-cr. biôna, § 1068.<br />
Le tchèque fait passer le suffixe -ïnja à -na, voir § 1090.<br />
Pour le suffixe -izna, voir § 1110.<br />
§ 1077. Suffixe -ïnû. — Le suffixe -ïnu fournit essentiellement<br />
des adjectifs en slave, et de même -inas en baltique. Et aussi des<br />
substantifs, en masc. -ïnû, neutre -ïno, fém. -ïna, et lit. -inas,<br />
fém. -ina, neutre v. pr. -inan dans aswinan « lait de jument » sur<br />
lit. asvà « jument » (§ 708). En lituanien, où le neutre n'existe plus,<br />
et où penlinas «éperon» répond à pçlïno du slave (§ 1079), on a<br />
des amplificatifs comme anginas « grand serpent » sur angis « ser-
590 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
pent », et tout un groupe de noms de mâles d'animaux : antinas<br />
« canard mâle » sur ântis, âvinas « bélier » sur avis « brebis »,<br />
zâsinas «jars» sur zqsis «vie», etc.<br />
En slave, on a de même v. si. ovïnu « bélier », r. ovén, s.-cr. àvan,<br />
en regard de ovïca « brebis » ; et une série assez importante de<br />
substantifs masculins en -inu, mais dont la finale s'altère volontiers<br />
dans les langues slaves, surtout par passage au type plus caractérisé<br />
en -ïnjï (§ 1092) :<br />
v. si. oslïnû « pointe, aiguillon », r. ostén, gén. ostnd, tch. osten,<br />
slov. çsten et ôsftjno, s.-cr. ostan et àstanj, et pol. oscien, mais gén.<br />
osna de l'ancien oscien à côté de oscienia ; sur *ostï (§ 1169), r.<br />
ost' « barbe, épine », etc., comme lit. âkstinas « aiguillon de bouvier »<br />
sur aklis ;<br />
v. si. razïnu et rozïnu « pointe, épine » (Izb. Svjat., Pand. Ant.,<br />
citant II Cor., XII, 7, variante de ostïnû), r. rozën, gén. roznâ,<br />
« pieu, broche », pol. rozen, et tch. rozen, slov. rdzenj, s.-cr. rdzanj ;<br />
en restituant une forme *arzïnû, on n'aperçoit pas d'explication<br />
du mot, tandis qu'en admettant la même substitution de ra- à roen<br />
slave méridional que dans v. si. razga pour rozga « sarment »<br />
(§ 70) un rattachement est immédiat à rogû «corne», lit. râgas,<br />
raginis « de corne », raginé « couteau à manche de corne » ;<br />
slavon rëzïnû « tranche », bulg. rjâzân, rézen, plur. réznove, et<br />
r. ancien rezen', s.-cr. rèzanj sur gén. rèznja, slov. rézenj et rézenj,<br />
rezânj, à côté de l'adjectif rézen « tranchant » ;<br />
v. si. mraëïnû « nuage de tempête, AaïÀaïf' » dans Supr. 5221 dva<br />
mracna Ijuia, mais -mo dans v. tch. et mod. mracno « nuée », sor.<br />
mrôcno «nuage sombre», et ailleurs le mot n'est qu'adjectif :<br />
r. môrocno, mrâëno « (il fait) sombre », etc. L'adjectif masculin<br />
substantivé se comprend avec oblakù sous-entendu, mais on ne le<br />
conçoit pas avec :<br />
v. si. konïcïnû « qui est à la fin », dans na konïëïnu vëkû Athan.,<br />
III, chap. XXXI, qui est Hébr. IV, 26 STO auvreÀsix TÔV oawvcov,<br />
où il faut sans doute rétablir acc. konïëinç.<br />
Le slovène a lôcen « anse », gén. lôcna (var. Içcenj), pour *lçkno<br />
(§ 1074), et lècen par réfection sur Içcali «courber» (§ 434) ; et<br />
belézen «marque (de l'année), millésime», masc., à côté de fém.<br />
belêzen «marque » (§ 1083). Pour s.-cr. sviban, voir § 1078.<br />
Le russe moderne a seddlen, bogorôdicen, mûëeniëen, sveiilen,<br />
pour les anciens sëdilïno, etc. (§ 1080).<br />
Sont à part v. si. bçbïnù « tambour » (Upir', Théod. LXXX, 3),<br />
r. bûben et v. r. bubonû, pol. bçben, s.-cr. bûbanj, et v. si. Iqiïnu<br />
« retentissement », v. pol. tçten, r. tùten et tùten', s.-cr. tûtanj, qui<br />
sont des formes à redoublement (§ 555).
:[§ 1078]<br />
SUFFIXES EN -h- 591<br />
§ 1078. Noms des mois. — Les anciens noms slaves des mois,<br />
que plusieurs langues slaves ont tenu à maintenir, et dont certains<br />
sont conservés ailleurs dialectalement, sont dans l'ensemble des<br />
adjectifs substantivés en -ïnu — masculins, sous-entendu mësçcï —,<br />
mais dont la finale a tendu à passer au type mouillé et a été<br />
conçue, dans les restaurations archaïsantes, sous cette forme<br />
mouillée. En voici la liste :<br />
v. tch. brëzen « mars » et mod. brezen, que l'on explique comme<br />
mois où le bouleau, slavon brëza, tch. brîza, commence à bourgeonner<br />
— ou, avec Y. Machek, où les femelles sont pleines, sur<br />
v. si. brëzda, tch. brezi (§ 956) ;<br />
tch. kvëten « mai, floréal » (le vieux tchèque n'a que kvëien<br />
«floral», adj.), et pol. kwiecien «avril», gén. kwietnia ; r. cvéten',<br />
savant, à côté de cvéten' « pollen » (§ 1092), et en regard du neutre<br />
v. si. cvëlïno « fleurs » (§ 1080) ;<br />
v. r. ëervenu «juillet», v. tch. ërven «juin» et ërven druhy<br />
« juillet », tch. mod. ëerven « juin » et ëervence « juillet », r. mod.<br />
ëérven' (savant) « juillet », ukr. ëérven' « juin » et ëêrvec' comme<br />
pol. czerwiec : dérivé de *ëïrvï «ver, kermès», comme mois de la<br />
récolte du kermès, ou bien mois où apparaît la larve des abeilles,<br />
le couvain ;<br />
tch. duben « avril », slovaque duben, sur dub « chêne » (qui<br />
bourgeonne en avril) ;<br />
v. r. grudïnu « novembre », slov. grûden « décembre », v. tch.<br />
hruden « décembre-janvier », et r. mod. grûden « décembre », ukr.<br />
hrûden, comme pol. grudzien : sur gruda « motte » (§ 1003), désignant<br />
la motte de terre gelée ;<br />
v. tch. et mod. leden «janvier», slovaque leden, et slov. ledçnec<br />
sur l'adjectif ledçn « de glace » ;<br />
v. tch. rûjen et mod. rljen « octobre », v. r. rjuinu et rjujenu<br />
«septembre» comme s.-cr. rûjan : sur r(j)uti «bramer», pol. ruja<br />
et tch. rije « rut (du cerf, etc.) » (§ 1025) ;<br />
v. r. sëëïnu «février» et v. serbe sëëïnï «janvier»; slov. seëdn,<br />
gén. -ënà, et dial. séëen, d'où svéëen et sveëân dans la langue commune,<br />
et slov. dial. seëânj, s.-cr. sïjeëanj «janvier» et dial.<br />
« février », r. mod. sécen' « janvier », et bl. r. séëen', masc., à côté<br />
de fém. séëen', gén. -ëeni, «paille hachée, séc(en)ka» (§ 1098);<br />
bulg. goljâm séëko « janvier », mdlâk séëko « février » : sur la racine<br />
sëk-, soit mois du froid coupant, soit de la coupe des arbres ;<br />
tch. srpen « août », slov, sfpen « juillet-août » et srpàn, gén.<br />
-dna (§ 1094), et slovaque 'srpen, r. sérpen', pol. sierpien «août»,<br />
s.-cr. srpanj « juillet », sur *sïrpû « faucille » ;<br />
slavon svibïnû « juin », slovène svîben « mai » comme s.-cr. svîbanj :<br />
sur slov. sviba « cornouillér », adj. svîben, s.-cr. svïba (§ 999), avec
592 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
un exemple ancien (xvi e s.) de sviban, gén. -bna, sans doute<br />
substantif au sens de « bois de cornouillers » ;<br />
slavon travïnu « avril-mai, prairial », slov. trdven, s.-cr. ancien<br />
travan et mod. dial. trdvanj, r. et ukr. trâven' « mai » : sur trava<br />
« herbe » ;<br />
On ne trouve attestées que des formes en -ïnjï avec :<br />
s.-cr. llpatij « juin » (une forme ancienne lipan paraît n'être<br />
qu'une graphie fautive), ukr. lypen' «juillet» comme pol. lipiec :<br />
sur lipa « tilleul », s.-cr. lipa ;<br />
pol. styczen «janvier», isolé, et qui doit être une réfection de<br />
sëcïnu sur le thème de stydnqc « se refroidir », donc par croisement<br />
avec sluden- ;<br />
slavon vrësenï « septembre », pol. wrzesien et bl. r. vrésen', ukr.<br />
véresen' : sur *versu, r. véres « bruyère » (§ 1135) ; pour le slovène,<br />
on donne vrsenj « août » qui, rattaché à *vïrse- « battre sur l'aire »,<br />
peut être artificiel.<br />
De même qu'apparaît artificiel r. studén' « décembre, frimaire »,<br />
bl. r. stûdzen', gén. -dnja : la forme ancienne est l'adjectif, slavon<br />
et v. r. sludenyi (mésçcï) « novembre-décembre », s.-cr. stùdenî<br />
« novembre » (gén. -nôga et rarement -na). Les formes réelles de<br />
substantifs sont r. stûden' « gelée, gélatine », gén. -dnja, masc.,<br />
et bl. r. slûdzen' « puits », masc. (§ 1092) en regard de pol. studnja<br />
(§ 1089), outre r. studén' « le froid », gén. -déni, fém., qui est l'abstrait<br />
v. si. sludenï (§711).<br />
§ 1079. Suffixe -ïno. — On reconnaît -ino, et non -no, ou on doit<br />
le supposer, dans les mots :<br />
v. si. az(ï)no, jazlno (Gr. Naz.) « peau, cuir », sur un balto-slave<br />
*âz-, lit. ozys «bouc» (§ 744), comme skr. ajinam «peau» sur<br />
ajdh « bouc » ;<br />
v. si. brasino « nourriture (de farine) », « provisions de route »<br />
et dim. brasïnïce «viatique» (§ 922), r. bôrosno «farine», s.-cr.<br />
bràsno, sur thème *bars-, lat. far de *fars, gén. farris, v. isl. barr<br />
« céréales », got. barizeins « d'orge » ;<br />
v. si. bruvïno «poutre », v. r. bervïno et mod. brevnô, ber(e)venô,<br />
pol. bier(z)wiono, dérivé probable de bruvï « sourcil » (§ 202) ;<br />
v. si. yovïno « fumier, excrément » dans Ham. Govïnacï « Copronyme<br />
» (§ 854), r. govnô, s.-cr. yôvno, et verbe o-yaviti (§ 782) ;<br />
v. si. jad(î)no (Théod., Ham.) «cautère» et «plaie suppurante<br />
(de brûlure) », sur jad- « manger » et « corroder » (r. édkij, § 983) ;<br />
*kurz(ï)no dans v. r. korzno et mod. kôrzno «manteau fourré,<br />
pelisse », tch. krzno, s.-cr. et slov. krzno, qui se retrouve dans<br />
v. h. a. kursina (ail. mod. Kurschner « pelletier ») sûrement
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 593<br />
emprunté au slave : sur un thème *kurz- d'origine obscure, peut-être<br />
emprunt à l'iranien ;<br />
v. r. medvëd(ï)no « peau d'ours » (Srezn., Supr.), mod. medvédna<br />
et medvédina ( § 895) ;<br />
v. si. nakovalïno « enclume », sur nakovalo ( § 946) ;<br />
slavon pçtïno « éperon » et « marque (sur le bétail) », r. ancien<br />
(xv e s.) zapjatniti « marquer (un cheval) » (Srezn., Suppl.) et mod.<br />
pjatnô «tache», zapjatnât' «tacher», pol. piçtno «marque, estampille<br />
» et pietnar « pièce de bois en saillie » (§ 1128) : dérivé de pçta<br />
« talon » aux deux sens « trace de talon, marque » et « éperon »,<br />
v. pr. perdis « talon » et lit. pentinas « éperon » ;<br />
slavon platïno « toile », v. r. pololïno et mod. polotnô, pol. plôlno,<br />
s.-cr. plâtno, de *polt- et différent par conséquent de v. si. platu<br />
«pièce de linge» (§ 784) ; le thème *poli- peut difficilement être<br />
celui de pol(u)tï «moitié, flanc» (§ 189), et le rapprochement est<br />
plus plausible avec got. falpan « plier » (ainfalps « simple », § 317),<br />
lui-même mal expliqué ;<br />
v. si. rizïno « pièce de vêtement, î^dmov » Supr. 12027 ;<br />
v. r. sudfïjno «vase» et «vaisseau, navire», mod. sûdno, plur.<br />
sadâ (flexion attestée dès le xv e siècle), où la forme en -(ï)no est<br />
une sorte de singulatif neutre : sur sçdû et sûsçdû « vase » (§ 766) ;<br />
v. si. svëtilïno (Ham.) «chandelier» et v. r., mod. svetil'nja<br />
«veilleuse, mèche » (§ 1089) et dial. svetil'na, sur svetilo (§ 947) ;<br />
slavon vap(ï)no « chaux », r. vâpno, etc., et v. si. dans povapïniti<br />
« enduire de chaux », sur v. si. vapu « couleur », emprunt au grec<br />
(§ 793) : c'est le « badigeon », dont on enduit les murs des maisons<br />
selon une coutume déjà signalée par Tacite chez les Germains,<br />
à côté des autres noms de la chaux, s.-cr. klàk de lat. cale-, v. r.<br />
izvestï et mod. izvest' de gr. àcSssToç.<br />
§ 1080. Les mots suivants étaient ou sont toujours plus ou moins<br />
sentis comme des adjectifs substantivés :<br />
v. si. cvëlïno (J. Ex.) « fleurs », v. r. « menstrues », en regard de<br />
tch. kvëten, masc. (§ 1078) ;<br />
r. drovnô « du bois », sur drovâ ;<br />
v. r. et mod. gûzno « croupion », qui est adjectif dans s.-cr.<br />
gûznô crijèvo « le rectum », sur ggzù « le derrière » (§ 450) ;<br />
v. si. zivotïno « animal », sur zivotu « vie » et « animal », qui reste<br />
adjectif, nom. plur. zivotïnaja (Ps.), r. zivôtnoe ;<br />
v. si. sëdilïno et fém. sëd^lïna (sous-entendu pësriï) « verset de<br />
psaume pendant lequel on peut s'asseoir », et slavon sëdalïna, r.<br />
mod. sedâlen sur sëdalo «siège» (§ 946), tandis que -ilïno, avec<br />
extension de -il-, doit attester que sëdëlo (§ 947) n'existait pas<br />
encore ;
594 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
v. si. bogorodicïno « tropaire de la Vierge » et mçcenicïno « tropaire<br />
des martyrs », r. mod. bogorôdièen et mûcenicen ( § 1077) ;<br />
v. r. svëtilïno « verset lu aux matines », mod. svetilen ;<br />
slavon blazenïna, plur., « béatitudes, macarismes » et v. si.<br />
blaéenïnu, gén. plur., Euch. 85 b 4, et aussi fém. blazenïng, r. mod.<br />
blaïénny.<br />
Il n'y a pas de raison de voir autre chose que des formes indéterminées<br />
de l'adjectif dans les pluriels neutres taina Bozia Supr.<br />
32410 0sou [AutTT7jpi.a, taina napisana Supr. 344s ysypa|j,jj.éva f/.ucnryjpt.a,<br />
puisqu'on a tainoje novo Supr. 35329 ixucrnjpwu xaivou dans le<br />
tour exclamatif déterminé.<br />
Les adjectifs neutres substantivés se rencontrent ailleurs encore :<br />
tch. mracno « nuée », voir § 1077 ;<br />
s.-cr. kopno « terre ferme », slov. kôpno, de s.-cr. kôpan, slov.<br />
kôpen « à sec, sans neige » (§ 551) ;<br />
slov. godovno « fête d'anniversaire » sur godovâti « célébrer un<br />
anniversaire ».<br />
V> si. gumïno « aire », r. gumnô, s.-cr. gûmno, supposerait un<br />
thème gum- non attesté s'il ne s'expliquait pas de façon très<br />
plausible comme composé obscurci (§ 1231).<br />
Le mot ërëljus(î)na «branchies», plur., est connu par un<br />
exemple unique en slavon tardif, et avec variante -nja, fém.<br />
plur., de -ïnja (§ 1088), mais il doit remonter au vieux slave et<br />
représenter -stïna, pluriel neutre de l'adjectif v. si. crëljusllnù<br />
(J. Ex.) « à branchies » ; le mot de base *crëljustï ne répond que<br />
vaguement à pol. skrzele « branchies », s.-cr. krëlje, et s.-cr. krljust,<br />
krëljust, fém.<br />
Les adjectifs en -ïnatu comme perïnatu «à plumes» (§ 987)<br />
paraissent supposer des substantifs en -ïno ou -ïna.<br />
Pour slov. bêlno, ôbelno « leucôme », c'est une altération de<br />
bëlïmo (§ 1068). *<br />
On a -ino, sur thème en -/-, dans :<br />
zagovëino « dernier jour gras » en slavon russe, comme l'adjectif<br />
v. si. govëinu «pieux» (§ 977), sur r. govét' «jeûner», zagovét'sja<br />
« se préparer au jeûne du carême » ;<br />
v. si. laino (Gr. Naz., Pand. Ant.) « bouse » et « brique (crue) »,<br />
pol. iajno « bouse, excréments », tch. lejno, slov. lâjno, s.-cr.<br />
lâjno ;<br />
v. si. smëino « dot de la femme » (Virg., et exemples en slavon),<br />
var. smëina (Upir'), avec des variantes slavonnes sûrement<br />
secondaires smëlï et smilo ; le mot est parallèle à vëno « prix
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 595<br />
d'achat de la femme (§ 1074), mais il est isolé, et son thème smëpourrait<br />
aussi représenter sumë-.<br />
Le plus vraisemblable est un rattachement au thème de smëje- sç,<br />
smïjati sç « rire » : après le (simulacre de) rapt de la fiancée, les<br />
accordailles où l'on rit ; on doit alors supposer un dérivé nominal<br />
smëj- parallèle à smëxû, de *smej-jï ou ~ja avec -ëj- comme dans<br />
le présent smëje- (§ 527).<br />
Pour laino, on le rattache à la racine *lei- « étaler un produit<br />
gras» de lat. linô «j'enduis», skr. lïgate «il se colle à», v. h. a.<br />
leimo « glaise » et v. isl. leira, v. pr. layso, dont on ne sépare pas si.<br />
lëje-, lïjati « verser », lit. lieli ; ici, on aurait le dérivé d'une forme<br />
sur thème *loj-, si. *lojï« graisse », lit. -lajas (§ 729) : *loj-j-, comme<br />
*kraji « bord » de *kroj-jï (§ 42).<br />
§ 1081. Suffixe -ma. — On trouve en vieux slave :<br />
grivïna « collier » (J. Ex., Upir'), bulg. grlvna « bracelet », s.-cr.<br />
grîvna, et r. grivna (depuis le xi e siècle) désignant un poids et une<br />
monnaie d'argent ou d'or (mod. « dix kopecks »), pol. grzgwna<br />
« marc d'or ou d'argent », tch. hrivna, sur griva « crinière » (§ 1185) ;<br />
mosïna « besace », r. mosnà « bourse », pol. moszna « sacoche »,<br />
tch. mosna « poche, gibecière », avec correspondants baltiques, lit.<br />
màkas « bourse », lette maks « poche », et sur *maks- lit. makslis et<br />
maksnà « gaine, fourreau » ;<br />
*nozïny, plur., dans le diminutif nozïnice « fourreau (de couteau) »,<br />
r. ancien et mod. nôzny, pol. nozny, tch. nozna et v. tch. noznicë,<br />
slov. nçzna et nçznica, s.-cr. nôznica, sur nozï « couteau », adj.<br />
nozïnu ;<br />
uslïna « lèvre », bulg. ûstna, s.-cr. ïlsna, slov. ûstna, sur plur.<br />
usta « bouche », adj. r. ûstnyj, slov. ûsten, etc.<br />
Le mot rozvïna « chaîne » Supr. 2253 ne se retrouve que sous la<br />
forme razvina Cyr. Jér., et dans le slavon razv[iv]ïnica « chaînette<br />
(de suspension) » : avec roz-, raz- (§ 70) de l'adverbe v. si. razvë,<br />
v. r. rozvë « à l'écart », donc indiquant ce qui s'écarte, ce qui est<br />
dans l'intervalle.<br />
Dans gén. plur. prëvësïnu Théod. LXI, 10 de prëvësïna « balance ».<br />
la finale dure est douteuse, car on trouve prëvësïnja (Upir', § 1087).<br />
Il y a des flottements entre les deux suffixes -ïna et -ïnja, ainsi r.<br />
svetil'na et svetil'nja «mèche» (§ 1079), et ces flottements ont<br />
pris une large extension en tchèque (§ 1090).<br />
Un substantif v. si. iaina « secret » doit être un adjectif substantivé<br />
sur l'adverbe *tajï «en secret» (pour un neutre taino, voir<br />
§ 1080) plutôt qu'un dérivé en -ina (§ 889) : les langues slaves ont<br />
r. Idjna, s.-cr. tâjna, etc., tandis que sur v. si. krai « bord » on<br />
trouve le slavon kraina « région frontière » représenté par ukr.
596 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
krajina, r. ukrâina (et Ukrâjna « Ukraine »), pol. kraina « contrée »,<br />
tch. krajina, s.-cr. krâjina « confins, zone de guerre », slov. krajina.<br />
De v. r. voina « guerre » sur v. si. voi, plur., « armée », les formes<br />
modernes sont r. vojnâ, pol. wojna, tch. vojna, et il est d'autant<br />
plus naturel de supposer un adjectif substantivé qu'on a parallèlement<br />
v. si. voiska « armée » (§ 973).<br />
C'est un adjectif substantivé qu'est v. si. sëdilïna (et -ïno)<br />
« verset où l'on peut s'asseoir » (§ 1080).<br />
Le suffixe -Ina sert d'autre part à former des féminins en regard<br />
de noms de personnes masculins, particulièrement de noms de<br />
filles :<br />
v. si. rabiëïna (et rob-) « fille d'esclave, rabica » (Cyr. Jér., Izb.<br />
Svjat.), masc. robiëistï (§ 867) ;<br />
v. si. bratiëïna « fille du frère, nièce » (Ham.), et var. brata(ni)na<br />
(Ham. 1831, 34), masc. bratanu (§ 1094), r. braiànna et braianiëna,<br />
v. tch. bratrana, s.-cr. brâtiëna, masc. bràtic', slov. brat(r)âna et<br />
bratîëna sur bratic ;<br />
slavon russe seslriëïna « fille de la sœur, nièce », masc. sestriëiëï,<br />
r. mod. sestricna, masc. séstric, s.-cr. sëstric(i)na, masc. sëstric,<br />
slov. sèstrîcna « nièce, cousine » et sestrâna (§ 1095), masc. sestriô ;<br />
slavon stryna « femme de l'oncle paternel, stryi », pol. stry(j)na,<br />
v. tch. stryna, bulg. et slov. strina, s.-cr. strîna, de *strujïna, d'où<br />
*struina avec jï donnant i (§ 63), et ui étant y (§ 53) ;<br />
pol. wyjna «femme de l'oncle maternel, *ujï», s.-cr. et slov.<br />
ûjna ;<br />
slavon russe gospodiëïna « fille de seigneur », masc. gospodiëicï,<br />
r. mod. gospôdiëna, s.-cr. gospôdicna et slov. gospodîëna « demoiselle<br />
» ;<br />
slavon russe kunçzïna « fille de prince, princesse », masc.<br />
kûnçzi(ci)ëï, pol. ksiçzna, tch. knëzna ; et slov. knçzna, mais<br />
savant.<br />
On note encore en slavon russe :<br />
bogaticïna « fille de riche », masc. v. si. bogaticistï, r. mod. bogâtiëna,<br />
masc. bogdtië ;<br />
boljaryëïna « fille de boïar », avec -yëina d'après -ynji, r. mod.<br />
bojârynja « femme de boïar » ; et r. bojârysnja et usuellement<br />
bârysnja « demoiselle » comme bârynja ;<br />
dëdiëïna « héritière », masc. dëdiëï ; et slov. dêdicna, mais<br />
livresque ;<br />
dusëerïna « fille de la fille ».<br />
§ 1082. Dans les langues slaves. — Le russe conserve une partie<br />
des noms de personnes en -na : sestriëna, etc. Mais surtout il a
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 597<br />
développé un type de production libre de patronymiques féminins<br />
en -ovna et -icna :<br />
Petrôvna « fille de Pierre, P'èlr », masc. Petrôvië ; Nikiticna « fille<br />
de Nicétas, Nikila », masc. Nikitic ; Il'inicna « fille d'Élie, Il'jâ »,<br />
masc. Il'ië.<br />
Ces patronymiques sont anciens : Stratigovna « fille du stratège,<br />
slratîg » remonte aux xiv e -xv e siècles ; et ils remonteraient même<br />
au vieux slave d'après le témoignage d'Hamartole : acc. (Evdokiju)<br />
Inerovunu 51820 TOU "Iyyspoç et instr. -ovnoju 50429, instr. Deka-<br />
politovnoju 5043()<br />
TTJV TOU Àsxa7toXtaroo. Mais il s'agit évidemment<br />
de formes en -ova russifiées : ce type de patronymiques n'apparaît<br />
qu'en polonais en dehors du russe.<br />
Avec les noms indiquant l'épouse, et non la fille, les formes sont<br />
en vieux slave et vieux russe celles de l'adjectif possessif déterminé :<br />
v. si. Uriinaja « la femme d'Urie »•(§ 966), etc.<br />
Le polonais a les patronymiques en -ôwna : Piolrôwna « fille<br />
de Pierre », Fredrôwna « fille de Fredro » ; mais le type est loin<br />
d'être général en Pologne : il est propre surtout à la Mazovie. On a<br />
par ailleurs des noms de femmes en -na, dans des formations peu<br />
nombreuses, mais anciennes, attestées dès le xv e siècle : ksiçzna<br />
«princesse», etc., et panna «demoiselle, fille de monsieur, pan»;<br />
et tout un type en -chna, l'alternance des gutturales ne jouant<br />
plus dans ces formations nouvelles : druchna « amie » et « demoiselle<br />
d'honneur », sur druch et druh (du tchèque) « ami » et dial.<br />
« garçon d'honneur », swachna et sœacha « entremetteuse de<br />
mariage» sur swach, hypocoristique de swat (§ 1139); surtout,<br />
à côté d'adjectifs en -chny, -uchny (§ 1158), des diminutifs en<br />
-uchna : maiuchna « petite maman », côruchna de côrka « fille »,<br />
ciotuchna de ciolka « tante », etc.<br />
Le tchèque a knëina « princesse », panna « fille, vierge, poupée »<br />
sur pân ; cisarovna « impératrice », krdlovna « reine », mais pour<br />
un plus ancien krâlovâ, et les noms de femmes sont en -ovâ, dokiorovâ,<br />
etc. (§ 965). Le type productif en -na est celui des noms des<br />
lieux d'une activité : jidelna « salle à manger » sur jidlo « le manger »,<br />
mais il est nouveau pour -ïnja, -né : kovârna « forge » pour v. tch.<br />
kovdrnë, slovaque kovâren (§ 1090).<br />
Le slovène a nçzna « gaine de couteau », plâzna « raclette de<br />
maçon » sur plâziti « faire glisser, frotter » ( § 769) ; gqrna « droit<br />
sur les mines, les coteaux, les vignes », de gôra « montagne »,<br />
gorica «vignes», adj. g or en, et hîsna «femme de chambre», de<br />
hua «maison», adj. hisen, cpii sont des adjectifs substantivés;<br />
popôtna « provisions de route, 'pçt » à côté de popçtnja et popçtnica ;<br />
•— quelques noms du type de pekârna « boulangerie », gostîlna<br />
« auberge », mais à l'imitation du tchèque, et les formes populaires<br />
sont en -nica : gosïîlnica, etc. ; — et tout le type des noms de
598 SUFFIXES DIVERS [§ 1082]<br />
femmes, surtout de parentes : kraljiëna « princesse », bratîëna<br />
«nièce», etc., et striëîëna «fille de l'oncle, strie», tetîëna «fille de<br />
la tante, téta », zavlëna « sœur du mari », élargissement de zâ(t)va,<br />
zuly (§ 203), et sptetlëna « femme de chambre » sur sptéte- « tresser,<br />
natter ».<br />
Le serbo-croate a sëstriëna, etc., et djevèriëna « fille du beau-frère,<br />
djëvër » ; biàna « leucome » pour bëlïmo et slov. bêlno (§ 1069);<br />
et quelques noms de lieux de métiers, du type tchèque : pèkârna<br />
et pèkârnica, et les récents et régionaux gostiona comme slov.<br />
gostîtna pour gdstionica « auberge », radiona pour ràdionica « atelier ».
CHAPITRE XXXII<br />
SUFFIXES EN -n- (suite)<br />
§ 1083. Suffixe -ni., — Le suffixe féminin *-ni- est connu du<br />
sanskrit, absent en grec et en latin, mais productif en germanique<br />
ancien, et fournissant des abstraits verbaux en *-nis : got. taikns<br />
« signe » sur ga-teihan « montrer » ; et en *-snis : got. usbeisns<br />
« attente » sur le verbe à finale en dentale us-beidan « attendre » ;<br />
et surtout des dérivés en got. -eins, -ôns, -ains de verbes en -jan,<br />
prés, -eï-, -on, prés, -ô-, et -an, prés. -ai-.<br />
Le baltique connaît des formations en -nis : lit. vilnis « vague »<br />
sur vélti « rouler » (v. si. vluna) ; et en -snis : lit. këpsnis « rôti »<br />
sur kèpti « rôtir ».<br />
En slave, on mettra à part les masculins à finale -ni (§ 169) :<br />
ogn(j)ï «feu», vieux mot indo-européen inanalysable; stën(j)ï<br />
« ombre », qui ne s'analyse pas sûrement ; pour lun(j)ï « vautour »,<br />
voir § 1020.<br />
Parmi les féminins en -ni, plusieurs sont des abstraits en -ï<br />
(§711) d'adjectifs en -nu : v. si. klosnï « mutilation », lënï « paresse »,<br />
praz(dï)nï « loisir », tch. plan « plaine » et lisen « embarras », bulg.<br />
prâhân « amadou ». Et ce doit être l'origine d'autres formes en -ni,<br />
mais où -nï apparaît comme suffixe dans des abstraits tirés de<br />
verbes. Clairement dans :<br />
v. si. branï « lutte », r. ancien boron', pol. bron « arme » et v. tch.<br />
bran, tch. mod. zbran, sur v. si. borje-, brati « lutter » ; en baltique<br />
lit. barnis « querelle » sur bârti « quereller » (§ 530) ;<br />
v. si. danï « tribut », r. dan', pol. dan, sur dati ; en baltique, lit.<br />
duonis est une réfection sur dûoti de l'emprunt donis au slave ;<br />
v. si. kaznï « instruction » et « remontrance, châtiment », r.<br />
kazn' « châtiment », v. polv kazn « instruction, discipline » et pol.<br />
mod. « torture, prison », tch. kdzen « discipline », sur kazati (§ 551) ;<br />
et v. si. pokaznï «instruction» (Ham.), «réprimande» (II Cor.,<br />
II, 6), v. pol. pokazn « réprimande, punition » et v. slov. pokazen<br />
(Feuilles de Freising), s.-cr. ancien pokazan « indication » — à ne
600 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
pas confondre avec pokajaznï «repentir», § 1109 —; slavon<br />
prikaznï « exemple », s.-cr. ancien prikazan et slov. prikâzen<br />
«apparition, fantôme»; slavon (récent) s(u)kaznï qui est pol.<br />
skazn « condamnation », slov. skâzen « présentation », s.-cr. ancien<br />
skazan « indication » (et « monstre ») ; — slov. nakâzen « monstre »,<br />
et s.-cr. ancien nakazan « monstre, monstruosité » en regard de<br />
l'adjectif ndkazan « monstrueux », ici avec rattachement à s.-cr.<br />
nakâziti «rendre difforme», postverbal nâkaz(a) «monstre» de<br />
kaziti « endommager » (§ 781), rattachement évident, mais qui a des<br />
chances d'être secondaire, car le sens « monstre » de s.-cr. nâkaz(a)<br />
et ancien skaz(a) est celui de lat. monstrum en regard de<br />
monstrare ;<br />
v. si. prëstanï dans bes prëstani « sans interruption » sur prëstati<br />
« cesser », et r. peréstan', bez peréstani ; slavon vu pristanï « en<br />
convenance» sur pristati, vustanï «sédition» sur vùfzj-siati, et r.<br />
pristan', v(ô)stan', pôstan', etc. (§ 789) ;<br />
v. si. povonï (J. Ex., Izb. Svjat., Upir') «inondation », et slavon<br />
povodïnï (Luc, VI, 48 pour v. si. navodije), glagolite croate povodanï<br />
(Job, XIV, 19, XX, 19), s.-cr. pôvôdanj (masc., par passage au<br />
type en -injï, § 1092), slov. povôden(j), gén. -dn(j)i, r. dial.<br />
pôvoden' «grande vague », tch. povoden (gén. -dnë, § 1090), en<br />
regard de v. r. povodï, mod. pôvod' et nâpovod' « fil de l'eau »<br />
(§ 717) ; — r. dial. izvon' et izvod' «grandes eaux, crue», zâvon'<br />
et zâvod' « petite baie » ; — verbe v. si. vuzvoniti sç « déborder »<br />
(Ham. 399, 38726, 27, var. vuzvodni-), subst. r. vzvôden' ; — et v.<br />
si. navodïniti sç, s.-cr. ancien navodanj « inondation ». Sur l'origine<br />
de cette forme *vodn-, puis vodïn-, largement attestée, de dérivés<br />
de voda « eau », voir § 176. Est à part v. tch. vodnë « orage » (§ 1088).<br />
On trouve blaznï « erreur » et sublaznï « erreur, scandale » dans<br />
le vieux slave ou vieux russe d'Hamartole comme en slavon russe,<br />
et s.-cr. sâblâzan, fém., slov. blâzen, masc. et fém., pour les usuels<br />
blaznû et sublaznû, et aussi fém. blazna (§ 1073).<br />
Le slovène a belézen, gén. -zni, « marque » (et masc. belézen,<br />
§ 1077), en regard de l'adjectif belézen.<br />
§ 1084. Les mots suivants à finale -ni sont moins clairs :<br />
v. si. dlanï « paume de la main », pol. dlon, s.-cr. dlàn (devenu<br />
masculin), r. ladôn' pour dial. dolôn', avec métatonie sur intonation<br />
rude (§ 103) dans tch. dlan et dans slov. dlàn, gén. dlanî (comme<br />
dans nit, gén. nîti et zvêr, gén. zverî, § 218) : la comparaison se<br />
limite à lit. dëlna, lette deïna, sans identification d'une racine<br />
*dël-, *dôl- ;<br />
slavon granï « chapitre, titre », et v. si. dans Ham. 47230 na tri<br />
granë (pour -ni) « à trois angles ( ?) » en parlant d'un nuage de grêle
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 601<br />
et traduisant le grec TSTpiyoç « craquant » interprété par « triplé » ;<br />
r. gran' « pan, facette, limite », v. pol. gran « angle, arête, frontière » ;<br />
tch. hrana « angle, arête » et v. tch. hran ou hrano, na trzy hrana<br />
« (croix) à trois branches », s.-cr. grâna « branche, rameau » ; dérivé<br />
r. granica « frontière », s.-cr. grànica, etc. Il ne semble pas que le<br />
mot soit différent de v. si. granu « verset » (§ 1073), et la présence<br />
de deux finales -nu et -na fait penser à des postverbaux d'un même<br />
verbe *graniti, r. granW « tailler à facettes », postverbal ogràn<br />
(§ 789), dont la base serait le substantif granï. On admet une parenté<br />
de granï avec le germanique gran-, v. h. a. grana « moustache »,<br />
mod. Granne « barbe, arête » : ce qui pourrait indiquer pour le slave<br />
un dérivé en -ï à allongement vocalique (§ 715) sur un verbe *gronantérieur<br />
au dénominatif graniti. Quant au sorabe grono « parole »,<br />
b. sor. gronis « parler », et v. tch. hrana, plur., c'est un mot différent<br />
sur thème *gor- (§ 191) et qu'on doit rapprocher de v. pr. gerbt<br />
« parler » et gerdaut « dire ».<br />
R. plen' « du pourri », sur plet' « se consumer, se pourrir », verbe<br />
isolé en russe, mais dont le thème plë- doit se reconnaître dans<br />
plëna (§ 1076) et dans plësnï (§ 1085) ;<br />
bl.-r. plyn' « courant (d'une rivière) », sur la base ply- de r.<br />
plyt' « voguer », et plus directement sur "plynçti comme le postverbal<br />
pol. piyn sur piynqc' (§ 730) ;<br />
v. r. rënï, interprété « banc de sable », qui n'est connu que par la<br />
Chronique de Kiev (année 988), et par ukr. rin' « gravier », rinysce<br />
« endroit de la rivière où le gravier se dépose » ; on le suppose<br />
emprunté au Scandinave, v. isl. rein « bande de terre herbeuse »,<br />
mais on penserait plutôt à une formation slave, sur rë- de v. si.<br />
rëjali «pousser» (§ 512), skr. rinâti «il fait courir, couler», lat.<br />
rïuus « rivière » ; le baltique a lit. raivë, rievé « fissure », rievà<br />
« fente dans un rocher, récif », et riva « rapide de rivière, seuil »,<br />
rëvê « récif, banc de sable », sur *rë- à côté de *rei-, *rï-, par confusion<br />
des racines en -ë- et -ï- ( § 511 ) ;<br />
slavon sanï « dragon » dans Isaïe, XXVII, 1, qui peut être selon<br />
Jagic un moravisme du vieux slave, le mot n'apparaissant ailleurs<br />
en ce sens que dans tch. san ; mais il paraît inséparable de :<br />
v. r. sani « traîneau », pluriel ou duel, r. mod. sâni, pol. sani et<br />
sanie, tch. sanë, slov. sani, et s.-cr. sâoni (depuis le xvn e siècle)<br />
dont le thème *sal- peut s'expliquer par rattachement fautif à<br />
sal « brancard, civière », emprunt au turc ; on compare r. pôloz<br />
« glissière, barre de traîneau » et « grand serpent, boa », tch. plaz<br />
« reptile » ( § 769) ; ici, on peut penser que le sens « dragon » est<br />
primitif, et que sani désignait les deux barres du traîneau qui<br />
ressemblaient à des serpents ou qui figuraient des dragons, et dans<br />
ce cas il doit s'agir d'un mot d'emprunt ;<br />
v. si. sënï « ombre », s.-cr. s/en, r. sen' « ombre » et plur. séni
602 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
« vestibule », pol. sien « vestibule » et tch. sin « salle » ; en rapport<br />
avec sïjati «briller» (§ 169) et sur une base *sja-, së- (§ 526) ; le<br />
sens « vestibule » est dérivé de celui de v. si. (Upir') « dais, tente »,<br />
et r. mod. sen', proprement « ombrage », gr. axtàç, lat. umbrâculum ;<br />
slavon slrunï « chaume », slavon croate strnie (Job, XLI, 19),<br />
collectif, et strnisce (Job, XXXIX, 15), r. dial. stern', pol. sciern<br />
et éciernisko, tch. strni et strnistë, s.-cr. slrn et strnistë ; un rapprochement<br />
avec v. si. trunû « épine » est indéfendable, un autre,<br />
avec slrïmu «escarpé», s'avère dans s.-cr. strmno (zlto) de<br />
« (céréales) à épis » à côté de stïnô, mais est secondaire ; on penserait<br />
à la racine *stïrb- de *stïrbnçti «se raidir» (§ 498).<br />
Pour v. si. vaznï « chance », voir § 1109.<br />
Est à part, sur base dissyllabique :<br />
slavon ablanï «pommier», slov. jâblan (et jâblana), s.-cr. jàblân<br />
(masc.), pol. jabion, v. tch. jablan et jablon, tch. mod. jablon, r.<br />
jâblon' par déformation de la finale, la forme *âbolnï étant confirmée<br />
par v. pr. wobalne ; en regard du slavon abliïko « pomme », r.<br />
jâbloko, etc. (§ 1039), sur thèmes *âbel- et *âblu- (§ 174).<br />
Et voir golënï « jambe, tibia », § 1099.<br />
§ 1085. Suffixe -snï. — Cet élargissement de -ni s'atteste dans :<br />
v. si. basnï « fable » (Gr. Naz., Izb. Svjat.), r. basn' (et bâsnja,<br />
§ 1089), pol. basn « conte », tch. bâsen (gén. -snë, § 1090) « poème »,<br />
et s.-cr. basan, puis bàsna « fable », et bàsna, bàsma « formule<br />
d'incantation » (§ 1067) : sur bajati (§ 508) ;<br />
v. si. pësnï « chant », pol. pieén, r. pésnja, tch. pisen (gén. -snë) ;<br />
s.-cr. pësan, puis pësam, mod. pjësna et pjësrna, slov. pêsen et mod.<br />
pêsem : sur pëti.<br />
Est moins clair :<br />
v. si. (Pand. Ant.) plësnï « moisissure, mite », r. plésen', pol.<br />
plesn, s.-cr. plïjesan, etc. On rapproche lat. pallêre « être pâle », gr.<br />
TtoAioç « gris », etc., avec des formes variées qui peuvent se rattacher<br />
à une même racine, et de plus près lit. pelëti « se moisir », plur.<br />
pelésiai « moisissure ». Mais on a en slave même un rapprochement<br />
plus direct encore, avec le verbe r. dial. plet' « brûler sans flamme,<br />
se consumer, se pourrir », prés. plee-. Or, comme polëti « flamber »<br />
et gorëti « brûler » sont parallèles en slave (§ 594), et que la racine de<br />
gorëti apparaît non seulement sous les formes gor- et zer-, mais<br />
aussi sous la forme *g w hr-ë- dans grë(ja)ti «chauffer» (§ 511), on<br />
peut attendre, en regard de polëti qui paraît isolé en slave, non<br />
seulement pel-, mais aussi *pl-ë-. Et si plë-, qui n'est sûrement pas<br />
une altération de tllë-, r. tlet', liée- « se corrompre, se consumer »
:[§ 1086] SUFFIXES EN -n- 603<br />
(§ 612), n'est attesté que par le russe dialectal moderne, on<br />
observera qu'il en est à peu près de même du russe dialectal znel',<br />
znêe- (§ 512), dont l'ancienneté est pourtant bien garantie par le<br />
postverbal v. si. znoi (§ 729).<br />
A cette forme *plë- « se consumer en flambant », « s'en aller en<br />
cendre », « s'émietter, se pourrir », se rattachent sans peine ou<br />
peuvent se rattacher, non seulement lit. plënis « poussière de<br />
cendre » comme r. plen' « du pourri », et lit. plëkstu, plëkti « se<br />
moisir » avec l'élargissement -kti parallèle à -kati du slave (§ 335),<br />
ainsi kaukiù, kaûkti « hurler » et si. kukali, mais aussi *plëna<br />
«pellicule» et «paille» (§ 1076). Et rien alors n'empêche, malgré<br />
les réserves formulées § 594, de rattacher polëti à lit. pelenaï<br />
«cendre» et si. pepelù à redoublement, et popelu (§ 80) avec la<br />
réfection complète sûr polëti dans v. si. plapol- (§ 555).<br />
On a encore : <<br />
slavon vasnï « discorde », pol. œasn et ukr. vasn' « brouillerie,<br />
querelle » ; et tch. vâsen « passion, manie », v. tch. vâsnë, de<br />
*vas-nja (§ 1086). On trouve encore v. si. vastiî «peut-être»,<br />
adverbe, et l'existence simultanée d'un substantif et d'un adverbe<br />
fait supposer à l'origine un adjectif *vasnu donnant un abstrait<br />
en -ï (§ 711) et un adverbe en -ï (§ 1199). Un rattachement à la<br />
racine en dentale vad-iti (§ 615), pol. wadzic «quereller», tch.<br />
vâda «querelle» (§ 781), paraît s'imposer.<br />
La formation en -snï devait apparaître à l'origine sur thème en<br />
dentale (§ 1110) ; son extension à des thèmes vocaliques est<br />
semblable à celle de l'élargissement en -t-, pë-t- dans pëtïlu, vi-tdans<br />
vitïlù (§ 1055).<br />
Pour tch. mod. tisen « embarras, détresse », c'est un abstrait<br />
en -ï sur tës(k)n-, voir § 1070.<br />
Les substantifs en -znï ,sont d'autre origine (§ 1110).<br />
§ 1086. Suffixe -nja. — C'est la superposition du suffixe -ja<br />
à un élément suffixal en -n-. De même que dans les adjectifs le<br />
suffixe -nu se maintient de façon limitée à côté de -ïnu productif,<br />
de même on trouve des substantifs en -nja à côté de -ïnja de<br />
grande extension. Mais avec la chute des jers faibles il est difficile<br />
de les identifier sûrement. On doit reconnaître -nja dans :<br />
slov. tônja « endroit profond de l'eau », tch. tunë, pol. tonia<br />
(et ton) « grande profondeur » et « coup de filet », r. tônja « endroit<br />
de pêche au filet, coup de filet », sur top- « s'enfoncer » ;<br />
v. tch. zinë « fil grossier, cordon de poil de bête », tch. mod.<br />
zinë « crin » et slovaque zina « corde », slov. zinja « crin de cheval »<br />
et zima d'après kôsma « touffe de poils », qui a son correspondant
604 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
direct dans lit. geinys « échelle de corde », lette dzeinis et dzeika<br />
« corde grossière » ; sur le thème de lit. gijà « fil », v. si. zica (§ 1040)<br />
et zila (§ 1051), et de même qu'on rapproche si. zila de lat. fïlum,<br />
de même zinja peut être rapproché de fûnis « corde » ;<br />
v. si. skvoz(ï)nja «trou» (Supr.) et skvaz(ï)nja (J. Ex., Upir',<br />
Ham.), slov. skçznja : dérivé du thème de la préposition v. si.<br />
skvozë «à travers», slov. skôz(i), adj. skôzen «de passage», et la<br />
forme skvaz- laisse supposer un factitif en -iti sur ce thème ;<br />
v. r. * prabos(ï)nja dans v prabosnjaxu (Chronique de Kiev,<br />
année 1074), qu'on interprète par « chaussure, soulier » d'après<br />
sa variante postérieure vu porusïnjaxu (§ 1091), mais qui est<br />
sûrement une locution adverbiale signifiant « pieds nus » du type<br />
à locatif pluriel de v. si. na Içkaxû « avec perfidie », r. vosnjâx<br />
« en rêve », sur un composé nominal en pra- (§ 1221) en regard de<br />
pro-bos- dans r. naprobôsku, nâprobos' « à pied nu ».<br />
Ce sont des dérivés en -ja de thèmes en -n- qu'on aperçoit dans :<br />
r. krôsnja « corbeille », s.-cr. krôsnja « corbeille, hotte », slov.<br />
krôsnja « crochets de portefaix, hotte », dérivé de krosno « métier<br />
à tisser » (§ 1074) ; le tchèque a krosna, krùsna « hotte » ; le polonais<br />
a krosna qui désigne proprement les crochets pour porter le bois,<br />
les vitres, et qui doit son s à krosniarz «vitrier», avec la forme<br />
mouillée de -arjï étendue en polonais (§ 852) ; c'est de krosno au<br />
sens de « cadre du métier à tisser » qu'on passe à ceux de « crochets<br />
de portefaix » et de « hotte, corbeille » ;<br />
r. dial. sûknja et pol. suknia « vêtement, robe », tch. suknë et<br />
s.-cr. sûknja «jupe», slov. sûknja «habit (d'homme)», mot<br />
emprunté par l'allemand, m. h. a. sukenie, d'où fr. « souquenille » :<br />
dérivé de sukno'(§ 1074), comme s.-cr. rûnja, slov. rûnja, de runo<br />
(§ 1024);<br />
slov. pldnja « espace libre, clairière », v. pol. plonia « endroit<br />
ouvert, trou dans la glace » et mod. pion, dérivé en -ja de l'adjectif<br />
*polnu (§ 1070), comme le dérivé en -ï tch. plan «étendue<br />
plate » (§ 711) ;<br />
r. dial. poroxnjâ « ce qui tombe en poussière », sur poroxnô<br />
(§ 1074).<br />
On ne voit dans tinja « boue » pour tina (§ 1026) qu'une substitution<br />
de suffixe, mais v. tch. vâsnë en regard de vasnï (§ 1085) peut<br />
être le dérivé de l'adjectif supposé *vasnu et en confirmer<br />
l'existence.<br />
Le serbo-croate strùnja à côté de strûna « crin, poil » doit être<br />
analogique de runja « poils, pilosité ».<br />
R. visnja « cerise griotte », s.-cr. visnja, etc., n'a comme correspondant<br />
que v. h. a. ϕhsila.<br />
V. si. ërës fïjnja (Vie de Constantin, chap. XII) « cerisier », r.
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 605<br />
ëerésnja «cerise douce», etc., est un emprunt à lat. ceras(i)um<br />
qui a pris la finale de visnja.<br />
Le vieux-serbe (xiv e s.) klas(ï)nje, plur., «jambières», mod.<br />
klàsnja « bas, guêtre », est de même sûrement un emprunt au<br />
roman, lat. pop. calcia, ital. calza ; et v. si. skrënja « plaisanterie »<br />
à v. h. a. scërn (§ 1026).<br />
On doit supposer un féminin en -nja dans le locatif duel isolé<br />
kûkiinju Supr. 54613 qui traduit KV^MÇ de Ps. CXLVI, 10 « jambes,<br />
jarrets», Igstexu du Psautier vieux-slave (§ 1161); on penserait<br />
à une faute pour kluk- qu'on a dans le slavon kluka « jarret », bulg.<br />
kâlka « cuisse », slov. kôlk et s.-cr. kuk, avec correspondants<br />
baltiques lit. kùlsê «hanche» et kulsis, kulksnis «articulation du<br />
pied », kulnis « talon », qui mènent à lat. calx.<br />
Avec des radicaux en gutturale, l'assimilation de mouillure ne<br />
jouait pas, et l'alternance de la gutturale a cessé de jouer devant<br />
-inja : slavon russe (xiv e s.) sulognja « syllabe », élargissement du<br />
plus ancien v. si. sûlogû (Gr. Naz.), r. slog.<br />
§ 1087. Suffixe -ïnja. — On trouve en vieux slave :<br />
glavïnja (Gr. Naz., Upir') « tison, brandon », r. golovnjd, s.-cr.<br />
glâvnja, slov. glâvnja ; et pol. giownia « tison » et « lame », v. tch.<br />
hlavnë « tison » et « lame de l'épée », tch. mod. hlaven « lame » et<br />
« canon du fusil », d'après les deux sens de v. h. a. brant, vieuxfrançais<br />
brand « tison » et « lame d'épée » (d'où « brandir »), les sens<br />
« nielle » et « carie » en russe, etc., étant de même des calques de<br />
l'allemand Brand ; évidemment dérivé de v. si. glava « tête », qui<br />
a dû désigner la tête de la torche, le bouchon de paille qu'on<br />
enflamme ;<br />
jadïnja (Izb. Svjat. ëd-) « nourriture » ;<br />
krus(ï)nja «poing» (Gr. Naz.), qu'on retrouve dans bl.-r.<br />
korsèn', masc., gén. -snjâ, «coup de poing» (§ 1092), sur r. dial.<br />
korx «poing fermé» (§ 814) ; le serbo-croate krsnja «(bruit de)<br />
brisure » et « crispation de la main » est plus récent et fait sur<br />
krsiti «briser» (§ 1090) ;<br />
sùpletïnja (Pand. Ant.) «liaison, aujx-reXox^ », slavon opletlnja<br />
(et -tina) « hutte? », r. splétni, plur., « commérages » et dial. pléini,<br />
pol. plelnia « corde tressée, fouet à plusieurs lanières » ;<br />
prëxodinja (Cyr. Jér.) et prëxodïnica (Cyr. Jér., J. Ex.) « étoile<br />
du soir », s.-cr. prèhodnica « étoile du matin » ;<br />
prëvësïnja (Upir') « balance », qui paraît avoir eu une variante<br />
-sïna (§ 1081), r. plur. prevésni (slavonisme), et prëvësilo (§ 947),<br />
sur le slavon prëvësiti « peser ».<br />
Mais veëer(ï)nja «repas du soir», dans Supr. na vecernji 33825<br />
suivi de sû-Gospodînji (§ 1219) «au dîner avec le Seigneur», n'est
606 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
qu'une faute pour veëerja (§ 1022). Le russe moderne a veëérnja<br />
« vêpres », et pâvecernja, pâvecernica sur v. si. pavecerja « soir »<br />
(§ 1220), r. poveëérie « complies », mais c'est pour v. r. vecerïnjaja,<br />
paveëerïnjaja, adjectif en -ïnjii (§ 970) ; de même obédnja « grandmesse<br />
» est pour v. r. obëdïnjaja, obëdïnica ; et ûtrenja, zaûtrenja<br />
« matines » (slov. zâjtrnja « petit déjeuner », § 1090) est pour v. r.<br />
(za)utrïnjaja, v. si. na utrïnjojç «au matin» (Euch. 54 a 24), na<br />
utrïn(j)ii «aux matines (Sav. 99 a ) et na utrïnici (Ass. 158 a ).<br />
§ 1088. En slavon et vieux russe. — Beaucoup de mots non<br />
attestés en vieux slave sont sûrement anciens, ainsi :<br />
v. pol. biernia « tribut », tch. bernë « contribution, impôt », slov.<br />
bçrnja « collecte », sur bere- ;<br />
v. tch. dlubnë « ciseau de menuisier » et « mailloche » (mod.<br />
dlubna « herminette » avec -na pour -në, § 1090), moyen-bulgare<br />
(xii e -xm e s.) dlubnja (Byzantinoslavica, IV, p. 230), r. dolbnjâ,<br />
sur *dïlbe- « creuser » (§ 432) ;<br />
slavon laz(ï)nja « bain », v. tch. lâznë et mod. lâzen, pol. iaznia,<br />
r. lâznia « échelier », et dial. « bain », sur laziti « grimper » (sur les<br />
marches-en escalier, r. polôk, de l'étuve) ;<br />
pol. skornia, skôrnia « botte », v. tch. skornë, et mod. skornë<br />
« soulier », s.-cr. skôrnia, macéd. skôrni, plur., slov. skçrnja,<br />
skgrnja (et masc. skôrenj, § 1092), sur skora « peau, cuir » (§ 31) ;<br />
v. tch. vodnë « orage, ondée », sur voda, adj. vodni.<br />
De nombreux mots apparaissent de bonne heure en slavon,<br />
et surtout en vieux russe :<br />
blçdïnja « luxure » (xi e s.) ; oborotïnja « (paiement?) en retour » ;<br />
porçdïnja « (mise en) ordre » (xiv e s.), r. mod. porjâdnja « ordre,<br />
équipement » ; casovïnja « oratoire (pour dire les heures) » (xiv e s.),<br />
mod. ëasôvnja ; myl(ï)nja « bain » (xvi e s.), mod. myl'nja « chambre<br />
de bain» (§ 1089) ; mudrovalïnja (xvi e s.) calquant
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 607<br />
prince, voir gridïba, § 910), r. mod. gridnja et gridnica « salle de<br />
garde», ukr. hrydnyc'a «caserne»; et v. r. celjadïnja (xiv e s.)<br />
« logement de la celjadï, des gens de la maison » ;<br />
slavon russe priglavïnja (xiv 8 s.) et priglavïnica « cervelet »,<br />
gr. •reapsyxstpaXtç ;<br />
r. kolokôl'nja « clocher » et v. r. kolokolïnica, sur kôlokol « cloche » ;<br />
v. r. movïnja, movïnica « bain », r. dial. môvnja et môvnica ;<br />
v. r. (xiv e s.) strëlïnja et strëlïnica «tour des archers», sur<br />
slrëljali ;<br />
v. r. (xv e s.) xlëbïnja et xlëbïnica « boulangerie » (mod. pekârnja),<br />
s.-cr. hljëbnica, dial. pour pèkârnica ;<br />
v. r. (xiv e s.) zobïnja et zobïnica « mesure de grains », mod. zôbnjâ<br />
et zobnica « sac à avoine », s.-cr. zobnica ;<br />
r. proskurïnja (xvi e s.), variante de proskurïnica (xv e s.), « femme<br />
qui fait cuire la proskwà «hostie» (prosforâ, prosvirâ) », mod.<br />
prosvirnja et prosvirnica, et dial. proskùrnja.<br />
Ces flottements entre ~nja et -riica sont courants, dans une<br />
même langue et entre langues, ainsi r. (xvi e s.) konjusïnja « écurie »<br />
et mod. konjûsnja, mais s.-cr. kànjûsnica, sur konjuxu (§ 1154) ;<br />
pol. wrotnia « gond, porte de grange », tch. vraten « battant de<br />
porte », et s.-cr. vràtnica, slov. vrâtnica, sur v. si. vrala. Et les<br />
dérivés en -nja se créent et se recréent, à des dates et avec des<br />
valeurs différentes :<br />
v. r. gorodïnja « partie d'un rempart ou d'un pont, travée,<br />
arche», et r. (ancien) gorodnjâ, dial. gorodèn' (§ 1092), «partie<br />
d'une clôture d'un poteau à l'autre », différent de s.-cr. grâdnja<br />
« bâtisse », tiré récemment de grâditi « bâtir » ; et r. dial. ogorôdnja<br />
« légumes du potager, ogorôd » ;<br />
r. kolotnjâ « chamailleries », pol. Môlnia « querelle », sur v. si.<br />
klatiti (§ 772), r. kolotit'sja « sè heurter, se battre » et pol. klôcic siç<br />
« se quereller » ; et s.-cr. klâtnja « vagabondage » et « divagation »,<br />
sur klâliti se « vagabonder » ;<br />
slavon kovalïnja et nakovalïnja « enclume », sur nakovalo et<br />
nalcovalïno (§ 1079), r. kovdl'nja « forge » et ndkoval'nja « enclume »,<br />
pol. kowalnia et kuznia, kuznica «forge» sur kuznï (§ 1109), r.<br />
kùznja et kuznica, slovaque kuzna, kûzen « forge » et tch. kouzeiî<br />
« dessous du poêle » ;<br />
v. r. mçlïnja « trouble » et zamçlïnja sur mçte- (v. si. mçtezï,<br />
§ 1017), et mod. smutnjâ, pol. mçtnia et smçtnia, sur mçtiti, s.-cr.<br />
smétnja « dérangement » et (s)/nûtnja « trouble », slov. zmçtnja<br />
et dial. zmçtnja ;<br />
v. r. sudïnja et sudïnica, et sudïbïnja, sudïbïnica «tribunal»,<br />
sur sçditi et sgdïba, r. mod. sudnica, slov. sodnica ; s.-cr. sûdnica<br />
« palais de justice » et sùdnja « destin, sudbina » ; et pol. sqdownia<br />
« salle de tribunal », sur l'adjectif sqdowy « de justice ».
608 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
§ 1089. Dans les langues slaves. — En russe, grand développement<br />
du suffixe, en deux types différents :<br />
I. Un type paroxyton, indiquant l'endroit d'une chose, le lieu<br />
d'une activité :<br />
kolokôl'nja « clocher », koféjnja « café », pâsnja « labour », sokôl'nja<br />
« fauconnerie » et sokoljâtnja sur sokolënok, sxôdnja « lieu de<br />
descente, passerelle », bôjnja « battoir » et voskobôjnja « fonderie<br />
de cire », syrnja et syrovârnja « fromagerie », solevârnja « saunerie »,<br />
kamenolômnja « carrière », vinokùrnja « distillerie », etc. ;<br />
bocârnja «tonnellerie» (bocâr «tonnelier»), goncârnja «fabrique<br />
de poteries », ovcârnja « bergerie », etc. ; et pekârnja « boulangerie »<br />
comme pol. piekarnia, sur r. pékar' « boulanger » (depuis le<br />
xvin e siècle) pris à pol. piekarz qui imite l'allemand Bàcker ;<br />
myl'nja « chambre de bain » et umyvdl'nja (et -nica) « lavoir »,<br />
kresëâl'nja « baptistère », kupâl'nja « bain », spâl'nja « chambre<br />
à coucher », belU'nja « blanchisserie », krasil'nja « teinturerie », etc.,<br />
d'où prjadil'rija « filature » sur prjadë- « filer ».<br />
On notera : derévnja (depuis le xiv e siècle) « village » (sans église,<br />
le village-paroisse étant selô), dialectalement « domaine, champ »,<br />
qu'il n'y a aucune raison de séparer de l'ukrainien derévnja « bois<br />
de construction », et qui a sûrement désigné à l'origine les bois<br />
de la commune, sur l'adjectif v. si. drëvïnu « de l'arbre, du bois »,<br />
le russe ancien suderevï (xvi e s.), adj. suderevnyj, signifiant «(le<br />
village) avec ses bois » ( § 1222) ;<br />
molél'nja « oratoire », déformation de molil'nja d'après molénnaja,<br />
adj. substantivé, et molébnica ;<br />
plur. prigôrsni « les mains pleines », sur v. r. priyursëa « poignée »<br />
(§ 1023).<br />
Pour bâsnja de basn' et pésnja, voir § 1085 ; pour svetil'nja<br />
« mèche, veilleuse », § 1079. Le mot bâsnja « tour » est un emprunt<br />
déformé à pol. baszta « bastion, beffroi », tch. basta, de l'allemand<br />
Basiei, ital. bastia.<br />
II. Un type oxyton à accent fixe, indiquant le produit d'une<br />
action verbale :<br />
gryznjâ « querelle » sur gryzt'sja « se mordre, se quereller » ;<br />
maznjâ « barbouillage » ; strjapnjâ « préparation des mets » sur<br />
strjâpat' « cuisiner » (§ 431) ; voznjâ « vacarme » sur vozît'sja « faire<br />
du tapage » ; etc. ;<br />
sans alternance de la gutturale (§ 1086) :<br />
rugnjâ «injures» sur rugât' «injurier», brexnjâ «aboiement,<br />
clabaudage » sur brexât' ; et rugoinjâ, brexotnjâ, et un type en<br />
-otnjâ :
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 609<br />
begotnjâ « allées et venues » sur bégal', packolnjâ « barbouillage »<br />
sur pâckal', etc., type naturellement dérivé à l'origine de verbes en<br />
-otât' :<br />
treskotnjâ « fracas » et v. r. et mod. treskotâ, sur trescât' « craquer »<br />
et treskotàt' (§ 899) ;<br />
stukotnjd « tintamarre », sur stukât' « heurter, faire du bruit » et<br />
slukotât' ;<br />
vorkotnjâ « roucoulement » et « gronderie », sur vorcât' « grogner »<br />
et vorkotât'.<br />
Ce type oxyton en -njà continue, avec son emploi nouveau de<br />
déverbatif, le type ancien de v. si. glavïnja, r. golovnjâ « tison »<br />
(§ 1087).<br />
Le blanc-russe a pogrebnjà « chambre à provisions » en regard<br />
de r. pôgreb « cave » (§ 803). Pour r. prostynjâ « drap de lit », c'est<br />
sûrement une déformation de l'ukrainien proslyra (§ 728), abrégé<br />
de r. prostirdlo.<br />
Polonais. — Le type ancien de glownia maintient quelques<br />
unités : iaznia « bain, étuve », studnia « puits » (depuis le<br />
xiv e siècle, § 1078), etc., et brodnia « sorte de filet de pêche » sur<br />
brodzic « traîner dans l'eau » (§ 607). Mais le type productif est celui<br />
des noms de lieux :<br />
en -nia : rzeznia « abattoir » sur rzezac ; kuchnia « cuisine », sans<br />
alternance de la gutturale, sur le thème kuch- emprunté à l'allemand<br />
(§ 575);<br />
en -arnia : piekarnia (xv e s.) «boulangerie», drukarnia «imprimerie<br />
», ksiçgarnia « librairie », bazantarnia « faisanderie », etc. ;<br />
en -ownia : cukrownia « raffinerie de sucre, cukier », cementownia<br />
« cimenterie », wozownia « remise » sur wôz « voiture », zbrojownia<br />
« arsenal » sur zbroja « armure » (§ 729), etc. ;<br />
en -alnia : jadalnia « sallfe à manger », sypialnia « chambre à<br />
coucher » sur sypiac' « dormir » (de usypiac, § 602), rozbieralnia<br />
«endroit où se déshabiller» et wyzuwa(d)lnia «où se déchausser<br />
», etc.<br />
On a -i(d)lnia dans l'ancien swiçcidlnia «autel des offrandes»,<br />
et -elnia dans :<br />
gorzelnia « brûlerie, distillerie » sur gorzec « brûler » ;<br />
czyielnia « cabinet de lecture », sur czylelny qui est tch. citelny<br />
« lisible », refait sur cilati « lire » parallèlement à ciselny « numérique<br />
» sur cislo « nombre » ;<br />
pustelnia « ermitage » comme pustelnik « ermite », de tch. pouslevna<br />
et poustevnik, qui doit son élargissement -etm- à l'analogie de<br />
cirkevnik « ecclésiastique » sur cirkev « église ».
610 SUFFIXES DIVERS [§ 1001]<br />
§ 1090. Tchèque. — Le tchèque présente deux particularités :<br />
d'une part le développement d'une flexion de féminins en -ja du<br />
type nom.-acc. zem, gén. zemë (§ 152) ; d'autre part l'extension du<br />
type en ~na à la place de -ne (§ 1082). On a ainsi :<br />
v. tch. studnë « puits », tch. mod. studna et dial. studen, slovaque<br />
sludna et studen ;<br />
v. tch. kovdrnë « forge », slovaque kovdren, et tch. mod. kovdrna ;<br />
v. tch. hlavnë « tison » et mod. hlaven, tdznë « bain » et lâzen ;<br />
v. tch. kolnë, slovaque kôlna, tch. mod. kolna, kûlna « remise »,<br />
sur l'ancien kola « voiture » ;<br />
vraten « battant de porte » sur vrata ; lîhen « couveuse » sur<br />
lihnouii « couver » ; pochoden « flambeau (pour éclairer la marche) »<br />
sur pochod «marche», adj. pochodni ; prochlubnë et -ben «creux,<br />
cavité » sur prochloubiti « creuser » ; etc.<br />
Et avec le flottement entre les trois types de féminins du type<br />
mouillé, zemë, gén. zemë, zem, gén. zemë et kost, gén. kosti ;<br />
pîsen « chanson », gén. plsnë pour v. tch. piesn, gén. piesni,<br />
bâsen « poème », gén. bâsnë pour bdsni ( § 1085) ;<br />
bdzen« crainte », gén. bâznë, pour v. tch. bdzn, bdzni, v. si. bojaznï,<br />
bojazni (§ 1109) ;<br />
povoden «inondation», gén. -dnë pour povo(dï)nï, gén. -ni<br />
(§ 1083).<br />
Pour zizen « soif », gén. ziznë, et v. tch. ziezn, c'est un développement<br />
sur le thème ziez- qui répondait à v. si. zçzda (§ 1022), par<br />
attraction du type en -zni (§ 1109) ; —• et trâsen «frange», gén.<br />
-snë, est pour v. si. trësnu (§ 1072), par rattachement à trdsti<br />
« secouer », de trçs-.<br />
Dans les noms des lieux d'une activité, c'est le type nouveau en<br />
-na qui est productif :<br />
cihelna « briqueterie » sur cihla, dilna « atelier » sur dilo « ouvrage »,<br />
jidelna « salle à manger » sur jidlo « le manger », pracovna « atelier »<br />
sur pracovali « travailler », etc. ;<br />
et en -irna sur le suffixe -if pour -ar(j)ï (§ 853) :<br />
konirna « écurie » sur konir « homme de cheval, palefrenier »,<br />
v. tch. konier à côté de konaf, slovaque koniar, pol. koniarz<br />
« maquignon » ;<br />
barvirna « teinturerie », sur barvir, ail. Fârber ;<br />
strojirna « atelier de construction » sur stroj « machine », strojar<br />
« ingénieur machiniste » ;<br />
spizirna « office, garde-manger » sur spize « nourriture » (ail.<br />
Speise) ; etc.
[§ 1065] SUFFIXES EN -Ttl- 611<br />
Slovène. — Le slovène a des mots d'époques diverses : glâvnja,<br />
bçrnja, et krîvnja « faute, tort » ;<br />
popôlnja et popôtna (§ 1082) « provisions de route » ;<br />
prekôpnja « endroit où la neige a fondu », sur pre-kopnéti<br />
« fondre » (§ 551) ;<br />
podcçpnja et podcçpina « ce qui goutte d'un bouchon, cèp » ;<br />
zâjtrnja «petit déjeuner» (§ 1087) ;<br />
sosêdnja « réunion de voisins » ; etc.<br />
et srênja «commune», qu'on explique par srëdn- sur srêda<br />
« milieu », mais une réduction de dn à n est spéciale ou dialectale,<br />
et il s'agit probablement d'autre chose.<br />
Le suffixe est productif dans la formation de noms d'action<br />
déverbatifs, surtout en regard de verbes en -iti :<br />
brûsnja « aiguisage » de brusiti, grdnja « insulte » de grditi,<br />
izkûsnja « expérience » de iz-kûsiti, grôznja « menace » de groziti,<br />
vôznja « transport » de vôzili ; dial. ûënja « étude, enseignement »<br />
de uëiti ; podvçznja «jarretière » et podvèz, podvçza (§ 762), de podvçzati<br />
; sçtnja « promenade » de sçtati (se) ; pérnja et pfnja « discussion,<br />
controverse » pour l'ancien pfja, v. si. pïrja ; etc. ; et sans<br />
alternance de la gutturale : pîknja « piqûre » sur pikati.<br />
Serbo-croate. —• Même type productif de noms d'action, en bonne<br />
partie avec les mêmes mots qu'en slovène :<br />
vôznja « trajet, course, horaire », sélnja « promenade », et hitnja<br />
« hâte » de hïtati, hrôpnja « râle » de hràpiti, kôpnja « bêchage »<br />
de kôpati, krsnja «brisure» de krsiti, kûpnja «achat» de kûpiti (et<br />
slov. kûpnja), nosnja «manière de s'habiller, costume» (et slov.<br />
nçsnja), pâznja « attention » de pdziti (et slov. pâznja), râdnja<br />
« travail » de râditi, proizvàdnja « production » de proizvôdili, etc.<br />
§ 1091. Suffixe -ïnjï. — Ce suffixe de masculins a été productif<br />
dans les langues slaves, mais à des époques diverses, et de façon<br />
en grande partie indépendante dans les différentes langues. Il s'est<br />
en outre substitué à d'autres suffixes, en -ïnu, en -en-, etc. Il faut<br />
en suivre l'histoire dans chaque langue, en essayant d'en retrouver<br />
les formes les plus anciennes.<br />
En vieux slave, la seule forme est :<br />
suvçzïnjï «l'enchaîné, le prisonnier», en regard de SÛ(V)QZU<br />
et suvçzû « lien » (§ 762), sûçzïniku (Gr. Naz.) « prisonnier » ; refait<br />
en slov. sûzenj, s.-cr. suzanj, /sur le génitif -znja. La forme sans<br />
préverbe est ancienne également : r. vjâzen', gén. -znja, pol.<br />
wiçzien, tch. vëzen. Est nouveau s.-cr. svëzanj, slov. svçzenj<br />
« faisceau, fagot, paquet », sur s.-cr. svézati (§ 1092).
612 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Un autre mot est l'adjectif en -ïnjii (§ 970) srëdïnjii « du milieu »<br />
substantivé sous sa forme indéterminée :<br />
srëdïnjï chez Athanase, qui apparaît plusieurs fois comme<br />
calque du grec [XSOTC « médian, moyen terme », ainsi I, 70lo srëd'nju<br />
paky obrëtaemu s rnu « ceci se trouvant être encore moyen<br />
terme », et une fois au moins nettement en valeur de substantif :<br />
II, chap. 26, srëdnju ne mogçstu byti bezu inogo xodataja « le moyen<br />
terme (TOU uicroo) ne pouvant pas être sans un autre intermédiaire ».<br />
Le mot suivant, qui se rencontre dans plusieurs langues, doit<br />
être ancien :<br />
v. r. lezni, plur., « malades couchés », r. mod. lézen', gén. -znja,<br />
« sole, dormant » (dans la construction) et divers autres sens, dont<br />
celui de « lotte », poisson, cf. lat. solea « sole » ; pol. lezen « le<br />
paresseux » et « solive », et slov. lezenj « traverse (de chemin de fer) ».<br />
Pour tch. vyhen « forge », s.-cr. vlyanj, etc., voir § 1020.<br />
C'est toute une série de formes qu'on trouve en vieux russe et<br />
en russe ancien des xiv e -xvi e siècles :<br />
popluzni (xi e s.), plur., «rampants», r. mod. pôlzén', pôpolzen'<br />
« personne rampante, petit enfant qui ne marche pas encore » et<br />
« grimpereau », oiseau ;<br />
podudatïnï « un auxiliaire, aide » (Dal' pôddaten') sur r. poddàl'<br />
« renforcer » ;<br />
prikladïnï désignant un grade dans l'église sur priklade- « appliquer,<br />
ajouter » ;<br />
protivïnï (xv e s.) « copie, remboursement compensatoire, taxe<br />
correspondante », mod. prôliven' « adversaire, vent contraire », etc.,<br />
et « lèchefrite, sorte de poêle à frire », qu'on suppose emprunté<br />
à l'allemand Bratpfanne, mais qui, au sens de « lèchefrite », partie de<br />
la rôtissoire face au rôti, peut fort bien être le dérivé de prôtiv<br />
« vis-à-vis » ;<br />
porubïnï (xvi e s.), mod. pôruben' « cercle de tonneau, ceinture de<br />
bois autour d'une barque », sur po-rubit' « couper » et « mettre<br />
en cage, pôrub » (§ 764) ;<br />
oxabenï (xvi e s.) « faubourg qui a son enceinte à part » et « sorte de<br />
robe », mod. ôxaberi « souquenille », pôxaben « mot impudent,<br />
obscène », uxâben' « ornière », sur le thème xab- ( § 782) ;<br />
proxodïnï « passant, vagabond », mod. prôxoden' « intrigant »,<br />
et pol. przechodzien « passant », gén. -dnia.<br />
On trouve encore :<br />
pogrebïnï (xv e s.) « pain cuit sous la cendre » sur pogreb-<br />
« enterrer » ;<br />
selezïnï (xv e s.), mod. sélezen' (dial. et ukr.) « canard mâle »,
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 613<br />
qui ne paraît pas s'expliquer par sïlezena « rate » et la couleur rouge<br />
verdâtre de la rate, mais qui a été sûrement mis en rapport avec<br />
ce mot (§ 1097) ;<br />
Irutïnï (xiv e s.) « frelon », élargissement de v. si. trgtu « fauxbourdon<br />
» (§ 766) d'après *sïrsenï, r. sérsen' (§ 183) ;<br />
porusïnï dans vu porùsïnjaxû- variante postérieure de v prabosnjaxû<br />
(§ 1086) mal compris, r. mod. pôrsen', gén. -snja, « chaussure<br />
d'une seule pièce » et « piston de pompe », et dial. pôrusen'<br />
qui indique une mise en rapport avec porûsil' « rompre » : un<br />
rattachement à la racine de rusiti, à degré réduit *rux- dans slov.<br />
râhel « meuble, lâche » ( § 757) paraît en effet s'imposer, sans être<br />
bien clair.<br />
§ 1092. Dans les langues slaves. On mettra à part les formations<br />
nouvelles par altération de masculins du type athématique en<br />
-en- (§ 183), qui attestent l'extension du suffixe :<br />
r. kôren', gén. kôrnja récent pour kârenja ; sérsen', gén. sérsnja<br />
pour pol. szevszenia ; r. sazén', fém., gén. -zèni, mais dial. sâzen',<br />
masc., gén. sdznja, et pol. sqzen, gén. sqznia pour le plus ancien<br />
-zenia, slov. sçzenj et s.-cr. sêzanj, gén. -znja ; r. stépen', fém., gén.<br />
-eni, et siupén', mais dial. stupen', masc., gén. -pnja, tch. stupen,<br />
gén. -pnë, slov. stçpenj et s.-cr. stûpanj, gén. -pnja, et pol. stopien,<br />
gén. -pnia ; r. slêrzen', gén. -znja. Et de même r. kâmen, gén.<br />
kâmnja pour -menja (§ 185).<br />
Pour l'extension de la forme r. -en', etc. dans le type en -ïnû<br />
des noms de mois, voir § 1078.<br />
Russe. — La productivité du suffixe a été notable, à date plus<br />
ou moins ancienne :<br />
bôrten' « trou d'une ruche dans un arbre », sur borV « ruche<br />
sauvage » (§ 1170);<br />
bréden' « traîne », sur brede- ( § 430) ;<br />
evéien' « pollen » ( § 1078) ;<br />
pleién' « clayonnage » ;<br />
pôrucen' « accotoir, rampe d'escalier », sur une locution avec<br />
rgka, comme plur. pôruci « bas de manche » et « bracelet » (§ 1219) ;<br />
slizen' « limace » ( § 758) ;<br />
slûden' « gélatine » ;<br />
mâzen' « graisseur » ;<br />
pâren' « garçon », abrégé de v. r. parobûku (§ 1220) ;<br />
ôboroten' « loup-garou », sur oborotiti « métamorphoser » ;<br />
dolben' « homme stupide », en regard de dolbnjâ « maillet »<br />
(§ 1088) ;<br />
duren' « bêta », sur dur- (§ 1113) ;<br />
sersàven' « l'ébouriffé » sur l'adjectif sersdvyj ;
614 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
blanc-russe stûdzeri «puits», masc., pour pol. studnia (§ 1078),<br />
et korsén' «coup de poing» pour v. si. krusïnja (§ 1087), comme<br />
r. dial. gorodén' (fém.) pour gorodnjâ (§ 1088) ; r. iveren' « éclat de<br />
bois » pour ukr. iver (§ 1121).<br />
Polonais. -— Productivité assez grande, ancienne et plus récente :<br />
iopien « bardane », « tarière de charron » et lopacien, gén. -tnia,<br />
sur la base lop- et sur lopata « pelle » (§ 1172) ;<br />
v. pol. polowien « obole, vingtième partie du rouble » ;<br />
sypien « puisoir », sur sypac ;<br />
v. pol. swirzbien « doigt du milieu », sur éwierzbiec « démanger » :<br />
le synonyme v. pol. drapirzyt (§ 1225) indique de quelle démangeaison<br />
il s'agit ;<br />
roczen « (animal) d'un an », sur rok « an », adj. roczny ;<br />
rôwien « le pareil », sur rôwny ;<br />
skorzen « étourneau », oiseau, à côté de skorzec, r. skvoréc ( § 835) ;<br />
slizien « barbeau », en regard de sliz « loche » ( § 758) ;<br />
topien « le noyé », sur topic ;<br />
v. pol. trzebien « eunuque », sur trzebic « essarter » et « châtrer »<br />
(§ 806)><br />
uczen « élève », comme tch. uëen, pour v. si. uceniku ;<br />
v. pol. przybycien, gén. -tnia, « nouveau-venu », sur przybyc<br />
« arriver en plus » ;<br />
skupien « acheteur », przekupien « revendeur » et zakupien ;<br />
v. pol. wstçpien « nouveau-venu, néophyte », sur w-slqpic ;<br />
wtrçcien, gén. -tnia, « intrus », et wlrçt, sur w-trqcic siç « s'ingérer »<br />
(§ 766);<br />
przechodzien, gén. -dnia, « passant », przychodzien (depuis le<br />
xvi e siècle) et v. pol. wchodzien « arrivant, nouveau-venu » ;<br />
wychopien « petite galette faite avec des raclures de pâte », sur<br />
wy-chopic « arracher » (§ 739).<br />
Tchèque. — L'extension du suffixe apparaît limitée. Aux mots<br />
déjà signalés, vëzen « prisonnier » (§ 1091) et les formes secondaires<br />
rozen «broche» (§ 1077), stupen «marche, degré», s'ajoutent :<br />
ucen « apprenti », comme pol. uczen « élève » ;<br />
stezen « mât » pour v. si. slezerû (§ 1119), et slëzen avec l'initiale<br />
de stëzej « gond, pivot » (§ 1032).<br />
Slovène. — En slovène, au contraire, l'extension est assez<br />
grande : glçêenj pour v. si. gleznu (§ 1073), rdzenj et rézenj pour<br />
-ïnu (§ 1077), suzenj et lezenj, et :<br />
çcenj (et lôcen) « anse » (§ 1077) ;<br />
skôrenj « botte » (§ 1088) ;
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 615<br />
pçdenj «empan», élargissement de fém. pÇd (§ 719) d'après<br />
sçèenj « brasse », comme r. pjadén', fém., gén. -eni, d'après sazén' ;<br />
svézenj « faisceau » (§ 1091) sur zvçzati « lier » ;<br />
mdrenj « parole, racontar », sur v. h. a. mari « nouvelle, récit »<br />
(mod. Mare), mâren « faire connaître », à part de slov. mârati<br />
«se soucier de», mais sûrement de même source (§ 790). Et les<br />
adaptations d'emprunts :<br />
bedènj « cuve », de v. h. a. butin, bas-latin buttis (d'où si. *bu6ï,<br />
§ 204);<br />
skedènj et skegènj «grange», de v. h. a. scugin(a) (mod.<br />
Seheune).<br />
Serbo-croate. — C'est en cette langue que la productivité du<br />
suffixe se montre la plus grande. Outre glëzanj, rdzanj, rèzanj,<br />
pôvôdanj (§ 1083), àstanj,'bûbanj, tûtanj (§ 1077), on a tout un type<br />
de dérivés de verbes :<br />
bâcanj « sorte de nasse », sur bàcati « jeter » ;<br />
mètanj «jet, coup de fusil », comme mëtak «jet, projectile », sur<br />
mètati « jeter » ;<br />
nâkôvanj « enclume » sur nakovati, pour v. si. nakovalo ;<br />
pôtpôranj et pôdupôranj « soutien, étai », sur podùprijeti, subst.<br />
pôtpor (§ 728) ; et zàpôranj «cheville pour fermer la porte», sur<br />
zàprijeti « fermer » ;<br />
pûcanj « coup de feu », de pïlcati « faire feu » ;<br />
skrêtanj « feuilles de tabac roulées l'une sur l'autre », de skrétati<br />
« faire tourner » ;<br />
svëzânj « liasse, fagot », comme slov. svçzenj ;<br />
pôsêtanj « vitesse de mouvement d'une roue », sur posétati<br />
« se déplacer » ;<br />
sûsanj « bruissement » et « feuilles sèches » sur la base expressive<br />
de suskali, sûsnuti « bruire » ;<br />
tûcanj « pilon », sur tucati « broyer » ; etc.<br />
Et aussi des dérivés de noms :<br />
lùéanj, nom de plante, ail sauvage, etc., et luzanja (§ 1096), en<br />
regard de lûg « bois, bosquet, marais », adj. luzan « des bois,<br />
forestier » ;<br />
nàzanj, plur. nôznji, «brodequins» et «peau des jambes du<br />
bœuf » ;<br />
ràvanj « citerne », et ùrôvanjy « pieu planté dans le sol », sur rôv<br />
« fosse » et uroviti « planter uri pieu » ;<br />
visanj « griotte sauvage », masc., à côté de l'usuel vïsnja (§ 1086).<br />
Pour zfvanj « meule de moulin », plur. zrvnji, c'est une déformation<br />
du féminin en -y v. si. zrùnuvi, slov. dial. zfnvi (§ 204).
616 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
§ 1093. Les origines. — Le baltique a des masculins en lit.<br />
-inis : sallînis « source » (et sallënis) sur sâltas « froid » ; et surtout<br />
en -inys, la différence entre les suffixes *-yo- et *-iyo- n'étant plus<br />
en lituanien qu'une différence d'accentuation (§ 146) : kalinys<br />
« travail de forge » et « prison », « prisonnier », sur kdlti « forger »<br />
(§ 530), et kalëti «être dans les fers», kalëjimas «prison», par<br />
dépréverbation de ap-kâlti « mettre dans les fers », comme en slave<br />
kovati «forger» et okovi «fers» (§ 737); pasiuntinys «envoyé»<br />
sur pa-sitysli « envoyer » ; etc.<br />
En slave, on a des adjectifs en -ïnjï et en -ïnjii, et un cas, srëdïnjï<br />
«le médian», d'adjectif en -ïnjii substantivé (§ 1091); mais cet<br />
exemple est spécial et isolé, et l'on ne peut guère rattacher v. r.<br />
protivïnï à l'adjectif protivïn(j)ii «qui est en face», dont on ne<br />
trouve qu'un exemple douteux en vieux russe pour l'usuel protivïnu.<br />
Les autres formations anciennes, comme v. si. suvçzïnjï, écartent<br />
cette explication. On doit penser à une dérivation au moyen du<br />
suffixe de substantifs en -jï, dont la productivité a été grande<br />
(§ 1019), sur la base des adjectifs en -ïnû et parallèlement à leur<br />
substantivation en -ïnû (§ 1077) ; peut-être aussi à des dérivés en<br />
-ïn-ï du type masculin en -ï qui a eu également sa productivité<br />
(§ 169).<br />
Ce sont des formes en -ïn-ï qu'on trouve dans les adverbes v. r.<br />
mezenï «au milieu» (§ 1199), sur l'adjectif r. méz(d)nyj, et r.<br />
ôcen' « très » dont l'histoire est plus compliquée (§ 1202).<br />
SUFFIXES EN -an-, -en-, ETC.<br />
§ 1094. Suffixe -anù. — Le vieux slave présente -anû, finale ou<br />
suffixe, dans :<br />
bralanû (Ham.) « neveu », v. tch. bratran, slov. bratàn et parallèlement<br />
sestràn ;<br />
koëanu (Ham.) « tige » (xaoÀoç « membre viril »), r. kocdn et pol.<br />
koczan (mod. kaczan) « trognon de chou, épi de maïs sans les grains »,<br />
s.-cr. koëân (kdcânj, càkânj), sur un thème koë- qu'on retrouve dans<br />
s.-cr. kôcët «poil raide » (§ 1173) et sous la forme koc- dans slov.<br />
kocina « poil », kôcast « velu, touffu » ;<br />
zupanu « chef d'une zupa » et v. r., s.-cr. zùpân, etc., de v. r.<br />
zupa « district », s.-cr. zûpa « paroisse », etc., à côté de v. si. zupiste<br />
«sépulture» (§ 950) ; avec réduction de zupanu à *zpan (hongrois<br />
ispan) et tch. pân « seigneur, monsieur », pol. pan : termes anciens,<br />
sûrement d'origine étrangère.<br />
Le vieux-slave ëïvanû « pot, cruche », et dérivé cïvanïëii « échanson<br />
» (§ 864), apparaît dans les autres langues sous la forme ëïbanï
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 617<br />
« setier » en slavon serbe, s.-cr. dzbàn « cuve », r. zban « pot (de<br />
bois) », etc. : évidemment mot d'emprunt.<br />
Le mot v. r. boranu et baranu « bélier », r. mod. barân, pol.<br />
baran, v. tch. et mod. beran et dial. et slovaque baran, est sûrement<br />
aussi un emprunt ancien, et l'on pense au germanique *barô<br />
« baron » introduit de très bonne heure en roman avec le sens de<br />
« guerrier », et qui signifie également « mâle, mari » en vieux<br />
français et « mâle » dans l'espagnol varôn.<br />
Le mot bajanu «magicien» (jj.àyoç Daniel, V, 11) n'est attesté<br />
que par un exemple en slavon russe.<br />
Du nom du « lierre », pol. brzes(z)tan, tch. bfect'an, s.-cr. bHljan<br />
et bHtan, slov. brsljân, même la forme commune ne se restitue pas.<br />
Le russe a un petit suffixe -ân dans des dérivés expressifs de noms<br />
et de verbes : velikân «-géant», brjuxân «homme à gros ventre,<br />
brjùxo », gorlân « braillard » de gôrlo, molëân « le silencieux, chien<br />
qui mord sans aboyer », etc. et grub'jân « un rustre, grûbyj ».<br />
Le polonais présente -an dans des emprunts, dominikan, czaban<br />
et czoban « berger », du turc, et tout un type dialectal en -jan<br />
abrégé de -janin, Krakowian « de Cracovie », krajan « indigène,<br />
compatriote», etc. (§212).<br />
Le tchèque a ce même type en -(j)an dans la langue commune,<br />
krajan de v. tch. krajënin, zeman « campagnard, hobereau » de<br />
v. tch. zemënin ; et des dérivés expressifs en -an : skuban et trhan<br />
« loqueteux » sur skubati et trhati « arracher, déchirer », hafan<br />
« clabaud, gros chien » sur hafati « clabauder », kochan « le bienaimé<br />
» de kochany « aimé », participe passif de kochaii ; noms<br />
propres et surnoms Stojan, Silhan « qui louche » de silhati « loucher »<br />
(m. h. a. schilhen, mod. schielen) ; — et en -ân : dlouhân « grand<br />
escogriffe », velikân « géant » ; et tchân « beau-père », forme d'hypocoristique<br />
(§1158) sur v. tch. test «père de la femme », v. si. tïstï<br />
(§ 169), avec fém. tchynë « belle-mère » (§ 920) pour v. tch. tsëë,<br />
v. si. tïsta (§ 1027).<br />
Le slovène a le type zemljàn « campagnard », et mescàn « homme<br />
de la ville » sur mésto « ville », d'où -sëan dans vascàn « villageois »<br />
de vas, nebçscan « citoyen du ciel » ; et un type belàn « à cheveux<br />
filasse », dolgàn « tout en longueur », glavàn « à grosse tête », nosàn<br />
« à gros nez », etc. ; srpàn « juillet-août est une variante de srpen<br />
(§ 1078).<br />
Le serbo-croate a un petit type dràgan « bien-aimé », bùkvan<br />
« nigaud » sur bûkva « hêtre » gt « bûche, lourdeau », divljan « le<br />
sauvage », domisljan « l'ingénieux », mrlvan « le fainéant », et<br />
sàran « carpe » et nom d'une vipère, en regard de sàren « tacheté »<br />
(§ 1097) ; grkljan «gosier» pour v. si. grutanï (§ 169) ; — et un<br />
autre type en -ân, gén. -dna : gâcân « (pigeon) pattu » sur gàce
618 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
« caleçon », gùsân « (pigeon) à grosse gorge » sur guse « goître »,<br />
obrùcân « marmite à cercle, ôbrûc », sirdtân « pauvret » sur sirôla<br />
«orphelin, pauvre» (§ 898) ; —• et des hypocoristiques, noms de<br />
personnes : Milan sur Mïlo(rad), Vùkan, etc.<br />
Le bulgare a sardn « carpe », goldn « va-nu-pieds », et des noms de<br />
personnes, Dragdn, etc.<br />
La finale -anti du slave est pour une bonne part d'origine<br />
étrangère ; mais on reconnaît une formation d'hypocoristiques :<br />
tch. tchân de ilslï, et v. si. bratanu qui doit être abrégé de bratuëçdu<br />
(§, 1216). Il s'agit en ce cas de dérivés d'hypocoristiques en -a,<br />
i.-e. *-ô(n) (§ 208), parallèles au type latin (rare) de patrônus.<br />
Le baltique aussi a des dérivés en lit. -onas : galvônas « chef »<br />
sur galvà « tête », lavônas « mort, cadavre » en regard de pa-liâuli<br />
« cesser », v. pr. au-laûl « mourir », ziûrônas « lunette » sur ziûrëti<br />
« lorgner », etc.<br />
§ 1095. Suffixe -ana. — Les noms en -an ont leurs féminins en<br />
-ana :<br />
v. si.-.brata(nï)na «nièce» (§ 1081), v. tch. bratrana «cousine»,<br />
slov. bratâna et parallèlement sestrdna « nièce, cousine », le sens de<br />
« cousine » s'expliquant par le pluriel sestrdne « les nièces, cousines<br />
germaines » ;<br />
slov. glavâna de glavàn, velikâna « géante » de velikân ;<br />
s.-cr. dràgana de dràgan, Vùkana de Vùkan.<br />
Deux mots sont à part :<br />
v. si. poljana «plaine» (Gr. Naz.), r. poljâna «champ, prairie,<br />
clairière », pol. poliana, s.-cr. poljàna, slov. poljdna « pays plat,<br />
champ », en regard de v. si. polje « espace découvert » (§ 1021) ;<br />
r. smetâna «crème aigre», pol. smietana «crème», tch. smetana,<br />
slov. smçtana, et s.-cr. ancien smetana donné au sens de « premier<br />
lait des nourrices, colostrum ». Un rattachement à mçte- « brouiller »<br />
est attendu, et il apparaît le plus clairement dans l'emprunt roumain<br />
smîntînâ. Mais il s'agit du participe passif substantivé de su-metati<br />
au sens de « jeter ensemble », le lait qu'on laisse prendre, se cailler.<br />
§ 1096. Suffixes en -anj-, — Une finale -anï se rencontre dans<br />
v. si. grulanï « gosier », thème masculin en -ï (§ 169).<br />
Ailleurs, une finale -an', -anj apparaît surtout comme variante<br />
ou déformation de suffixes en -n- :<br />
r. skan', fém., « fil tors, filigrane » (depuis le xvi e siècle), à côté<br />
de skan'ê, sur skat' «tordre (le fil) » (§ 544) ; kôpan', fém., «fosse
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 619<br />
creusée », en regard du substantif verbal kopânie et de kopanja<br />
des autres langues ;<br />
slov. et s.-cr. vrânj « bonde » pour bulg. vranâ, etc. (§ 1075);<br />
slov. locânj «anse», variante de Igcen(j) (§ 1092) et à côté de<br />
locânja ; vrtânj « spire » à côté de vrtânja « tourbillon » ; et dial.<br />
druzbânj « garçon d'honneur », élargissement de drûg de même<br />
sens sur drûëba « société ».<br />
La finale masculine -anj est un peu mieux représentée en<br />
serbo-croate : outre dstanj, gén. àstanja, pour ôstan, gén. ôstna<br />
(§ 1077), et kôcânj, càkânj pour kàcân (§ 1094), on trouve :<br />
lokvânj « nénuphar » sur l'àkva « mare » ( § 204) ;<br />
krbânj « calebasse, gourde », et tùkvânj, qui fait penser à un dérivé<br />
déformé sur tîkva « courge » de *tyky ;<br />
làkânj « flaque, mare », qui ne semble pas pouvoir avoir de<br />
rapport direct avec l'emprunt lôkva, v, si. loky, mais qui doit<br />
être un autre emprunt au roman, lat. lacûna « bassin, mare »,<br />
déformé par rattachement à lokati « laper ».<br />
La finale -anja a plus d'importance et prend davantage l'aspect<br />
d'un véritable suffixe.<br />
Un mot doit être ancien : bulg. et slov. kopanja « auge, huche »,<br />
s.-cr. kopanja (r. kôpan' « fosse creusée »), sur kopati. Le slavon<br />
serbe lokanja « ventre » est isolé, et un rattachement à lokati<br />
« laper » ne l'explique guère. Mais on trouve en slovène :<br />
brânja « ride », sur -brati, nabàr « pli » (§ 728) ;<br />
gobânja «champignon, bolet», sur ggba (§ 767), et gribânja,<br />
glibdnja, sur grîb, r. grib, etc. ;<br />
kotldnja, kôtanja « bassin, creux », dialectal pour kotlina, sur<br />
kôiel « chaudron », v. si. kotïlu ( § 1055) ;<br />
lebdnja « crâne » sur lèb, v. si. lubu (§ 756) ;<br />
locânja « panier à anse », à côté de locânj « anse » ;<br />
mrdânja « croupion » et prdânja « derrière », sur mrdati « remuer<br />
(le croupion) » et prdéti ;<br />
vrtânja « tourbillon » à côté de vrtânj « spire » ; etc.<br />
Et en serbo-croate :<br />
lùbanja « crâne », pour slov. lebânja ;<br />
luzanja, nom de plante, ancien et dialectal, à côté de lùzanj,<br />
gén. làznja (§ 1092) ;<br />
pomagànja «appel au secours» sur pàmâgâj «au secours» de<br />
pomâgati « aider », qui est un nom d'action du type déverbatif en<br />
-nja (§ 1090);
620 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
rvanja « lutte », ancien (xiv e -xvm e s.), parallèle au substantif<br />
verbal rvânje sur ïuati se (§ 465) ;<br />
putànja « sentier » sur pût « chemin » ; etc.<br />
Le baltique a un type assez étendu de féminins en lit. -onè :<br />
ainsi gaudonë « insecte qui bourdonne, taon » sur gaùsti « bourdonner<br />
» (si. ggde-, § 430) ; mais qui comprend des emprunts au<br />
slave, karônè « punition » à r. kardnie, pol. karanie ; le mot kapônê<br />
« houe, pioche » et « hachis », lette kapàne « hachoir » et « pétrin »,<br />
apparaît comme une formation indépendante sur kapôti « bêcher »<br />
§ 573), mais pour une part comme un emprunt au slave kopanja.<br />
§ 1097. Suffixes en -en-. — Ils ont les formes :<br />
-enu. Ce suffixe fournit la désinence de participe passé passif<br />
à côté de -anu et de -ënû, et il se retrouve dans quelques adjectifs<br />
isolés, studenù, zelenu, et ërùvenu (§ 409). Le serbo-croate sàren<br />
« bigarré, tacheté » (depuis le xiv e siècle) a été fait sur sâra<br />
« bigarrure », v. si. saru « couleur » (§ 1114), sur le modèle de crven<br />
« rouge », zèlen « vert » ; dans le cas de trëzven « sobre » à côté de<br />
trijèzan (§ 1182), il s'agit d'un slavonisme (§ 60), avec une variante<br />
ancienne et dialectale trëzmen, de trëzven, v. si. trëzvïnu (§ 978)<br />
qui offre le passage régional de vn à mn du type de râvan « égal »,<br />
neutre râmno.<br />
Le slavon récent kosvenû est r. kôsvennyj, adv. kôsvenno « de<br />
biais », fait sur kosôj « oblique », adv. kôso, d'après rôvnyj « égal,<br />
à plat », adv. rôvno.<br />
Des noms de personnes s.-cr. Milen, LjMen, bulg. Dobrén, etc.<br />
sont des hypocoristiques de s.-cr. Mïlofrad), etc., et ils continuent<br />
en même temps des dérivés en -en- (§ 183).<br />
Le baltique répond à -enu du slave par des adjectifs verbaux en<br />
lit. -anas : âlkanas « affamé » (§ 409).<br />
-eno. Un substantif r. psenô « millet » est un participe passif<br />
substantivé (§ 493). On a de même :<br />
slavon prçdeno « fil », r. prjâdeno, pol. przçdziono « écheveau »,<br />
tch. pradeno, slov. prqdeno ;<br />
slavon vrëteno « fuseau », r. verelenô, pol. wrzeciono, s.-cr.<br />
vretèno, etc.<br />
Cette forme, sur le thème *vïrt- «tourner», factitif *vortiti, est<br />
ancienne avec son vocalisme radical -e- (§ 823). C'est le reste d'un<br />
type qui fournit en sanskrit des noms d'action à côté d'adjectifs :<br />
vàrtanam « action de tourner » et vartanah « tournant », âdanam<br />
« action de manger, ad- », kdranam « action de faire, kar- », et<br />
karandh « habile ».
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 621<br />
-ena. Un mot est ancien, et obscur :<br />
v. si. pelena « lange », r. pelenâ, s.-cr. pelèna (tch. plena). Un<br />
rattachement à plëna « membrane » et à lat. pellis « peau » (§ 1076)<br />
est hypothétique et peu satisfaisant. Le baltique a lit. pelenaï,<br />
plur., «cendres», v. pr. pelanno «foyer», et le slave la forme peldans<br />
pe-pelu «cendre» (§ 1085) : s'agirait-il des cendres dont on<br />
saupoudrait les langes, ce qui a précédé le talc, ou ce qui a tenu<br />
lieu de langes?<br />
Le nom de la « rate » se restitue dans les langues slaves *sïlezena,<br />
et non *slëzena : r. selezënka, pol. sle(d)ziona, s.-cr. slezèna. C'est<br />
la normalisation en féminin en -a (§ 708) d'un ancien athématique<br />
indo-européen dont les formes sont des plus diverses : av. spdrszan-,<br />
gr. O7TXY)V, lat. liën, etc. ; en baltique lit. bluznis, v. pr. blusne, ce<br />
qui peut se ramener à un balto-slave *splzen-.<br />
Dans les langues modernes, le russe a un petit type de masculins<br />
et de féminins en -ëna, surtout dans les dialectes : gulëna « homme,<br />
femme qui fainéantise », sur guljdt', slastëna « gourmand(e) » sur<br />
slast', burëna « (vache) brune, bûraja », smirëna « homme, femme<br />
paisible, humble », etc.<br />
Le tchèque a slafena « vieille femme », pradlena « blanchisseuse »,<br />
pfadlena « fileuse », svadlena « couturière ».<br />
Le serbo-croate a des hypocoristiques, Milena de Mïlo(sava)<br />
comme masc. Milen ; de même le bulgare : Dobréna.<br />
En slovène, maklèn et pâklen « sorte d'érable » est un composé<br />
à premier terme peu clair (§ 1220) sur klèn « érable », r. klën, etc. ;<br />
zçlena « céleri » est une déformation de s.-cr. sèlen, du roman, ital.<br />
seleno {-ino, etc.).<br />
§ 1098. -enï. Les substantifs masculins en -enï sont les anciens<br />
athématiques du type de v. sl. kamenï (§ 185) et du type de korenï<br />
(§ 183), y compris (j)asenï «frêne», pol. wtosien «crin», kosmien<br />
« garrot du cheval », et le groupe des dérivés en -menï d'adjectifs<br />
de v. r. uzmenï « détroit ».<br />
Dans le domaine méridional, ces masculins en -enï sont passés<br />
à la flexion dure : s.-cr. kàmën, gén. kàmena, et slov. kâmen. On peut<br />
donc leur adjoindre :<br />
s.-cr. b&sên, gén. busena, « gazon », sur bûs « bouquet, buisson »,<br />
du germano-roman, ail. Busch « buisson », ital. bosco : dérivé<br />
semblable à pol. wlosien sur wios ;<br />
s.-cr. %Z/ên « charbon », bulg. vâglen, slov. (v)oglên, sur v. si.<br />
çglï, s.-cr. ùgalj, slov. ôgel ;<br />
slov. lépen « feuille », gén. lepçna, sur thème lep- en regard de<br />
lop- dans lit. lapas « feuille », si. lopata « pelle », etc. (§ 1172).
622 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Mais les flottements de finales, et de genres, ne sont pas rares,<br />
en particulier les confusions entre -enï et le suffixe -ïnjï. On ne voit<br />
pas quelle forme primitive on pourrait restituer pour le mot<br />
suivant, ni s'il y a lieu d'en restituer une :<br />
pol. lipien « ombre », poisson, v. tch. lipen, lipen, slovaque<br />
lipen, et tch. lipan, s.-cr. lipen et dial. lipljen (qui ne garantit<br />
nullement *-ën-).<br />
Des mots d'emprunt sont entrés dans le type masculin en -enï :<br />
r. kistén' «boule de fer », pol. kiscien, du turc (§ 183), et r. misén'<br />
« cible », devenu féminin, comme sazén' « brasse » qui a entraîné<br />
pjadén' « empan », fém., parallèlement à slov. pçdenj, masc.<br />
(§ 1092).<br />
En dehors de ëruvenï, studenï, zelenï, qui sont les abstraits<br />
d'adjectifs en -enû (§ 711), un féminin ancien est :<br />
slavon jesenï « automne », v. r. osenï et mod. ôsen', pol. jesien,<br />
s.-cr. jësën, qui se retrouve dans v. pr. assanis, et dans got. asans,<br />
fém., «moisson», ancien athématique en -n- d'après le dérivé<br />
asneis « ouvrier (de la moisson) », v. h. a. aran (mod. Ernte) et verbe<br />
aren « récolter, gagner », angl. earn.<br />
Le blanc-russe a séëen', fém., « paille hachée » (§ 1078). Le russe<br />
pécen' « foie » est féminin comme pol. pieczen, mais c'est un ancien<br />
masculin (§ 183). Il peut donc en être de même de kisén' « bourse,<br />
poche » (depuis le xvi e siècle), pol. kieszen « poche », et l'histoire<br />
du mot se laisserait ainsi rétablir : un emprunt au turc, r. kisâ<br />
« bourse », pol. kiesa, un dérivé pol. kiesien (xvi e s.), et un emprunt<br />
du russe à la forme plus récente kieszen du polonais.<br />
§ 1099. Finales en -ën-. — Pour -ën- masculin, dans s.-cr.<br />
kôrijen « racine » et son type ancien jelënï, et pour les dérivés du<br />
type v. si. mladënïcï, voir § 183 ; et pour l'isolé Slovène, § 187.<br />
Le féminin v. si. golënïn jambe, tibia », r. gôlen', s.-cr. gôlijen, etc.,<br />
est selon toute vraisemblance sur la base de l'adjectif golu « dénudé »<br />
et sur le thème *golen- que suppose également l'adjectif golëmu<br />
(§ 1065).<br />
Le neutre v. si. kolëno « genou », r. koléno, s.-cr. kàljeno, etc., a<br />
comme correspondants baltiques lit. kelys et kelënas ; il est<br />
sûrement en rapport avec *celnu «articulation» (§ 1073), et<br />
peut-être aussi avec ëeljadï «gens de la maison» (§ 1006).<br />
Le slavon polëno « morceau de bois, bûche », r. poléno, pol.<br />
polano, tch. poléno, slov. poléno, s'explique mal par un rattachement<br />
trop facile à polëti « flamber », et le sens oriente vers r. raspolôï<br />
«fendre», mais qui est une altération par rattachement à polôt'<br />
«sarcler» (§ 530) de *ras-polotiti, v. si. rasplatiti (Izb. Svjat.)
[§1101] SUFFIXES EN -71- 623<br />
« fendre en deux », pol. rozpiaiac, tch. rozpoltili « fendre » en regard<br />
de rozpùliîi « diviser en deux », dérivé de *poltï et *polutï « demi<br />
(-bête) » (§ 189). On supposerait, sur polu « moitié », à côté du dérivé<br />
en -(û)ii, un autre dérivé en -en-, et là-dessus un adjectif en<br />
*-ç-nà, *-ënu, du type de kamënû, dont polëno serait le neutre<br />
substantivé.<br />
Le serbo-croate kàprena « tissu fin, voile », ancien koprëna,<br />
paraît être la forme substantivée d'un adjectif de matière en<br />
-ënû sur le thème kopr- de kopriva «ortie» (§ 1189), et qui peut<br />
être antérieure à la forme koprina « soie » des autres langues<br />
(§ 893). Mais kùpjena « ronce » n'est qu'une déformation dialectale<br />
de kupina, v. si. kçpina « buisson » (§ 892).<br />
§ 1100. En -in-. — Avec la grande productivité des suffixes<br />
masc. -inu (§ 870), fém. -ina (§ 889) et adj. -inû (§ 966), il n'est<br />
plus possible de distinguer sûrement les finales en -in- qui seraient<br />
d'autre origine.<br />
Le serbo-croate a des noms de personnes et hypocoristiques en<br />
-in : Cvïjetin, Ràdin en regard de Cvjèiimïr, Ràdis(l)av, etc., de<br />
même le bulgare : Veselîn sur vésel « gai », comme lat. Hilarius.<br />
Dans un dérivé comme s.-cr. sjevèrïn « vent du nord, sjëvër », on<br />
pense au suffixe roman -ïn-, ital. marino « vent de mer ».<br />
Le serbo-croate cakavien krëlïno « aile », sur krëlô, krïlô, stok.<br />
lcrilo, apparaît ancien : on trouve podï kreliny, instr. plur., Mat.<br />
XXIII, 37 — Luc, XIII, 34 dans l'Évangéliaire de Nikolja en<br />
slavon occidental, pour podû krilë, acc. plur. duel, de l'Évangile<br />
vieux-slave.<br />
Le vieux-slave gobino « abondance » est adapté du germanique,<br />
got. gabein-, fém., « richesse », et voir gobïznù, § 1107.<br />
Un collectif s.-cr. zvjèrlnje « bêtes fauves » est fait sur l'adjectif<br />
v. si. zvërinû (§ 966).<br />
On observe un développement de la finale -inja : slov. ërepinja<br />
« tesson » pour crepina, v. si. crëpina (§ 892) ; s.-cr. mnozinja pour<br />
rnnozina « multitude », la raison en étant indiquée par un cas comme<br />
prokléiinja « malédiction » fait sur le type gfdinja, avec le suffixe<br />
v. si. -ynji (§ 920). Pour le suffixe s.-cr. -oiinja, voir § 903.<br />
§ 1101. En -on-. — Un slavon russe (xiv e s.) suxona « sécheresse »<br />
est isolé, avec son dérivé adj. suxonavû, mais suhonjav «un peu<br />
sec, mince » en serbo-croate.<br />
Le russe a des substantifs en -onja, masc. et fém., surtout<br />
dialectaux, désignations familières de personnes : brjuxônja<br />
« glouton » sur brjûxo « ventre », tixônja « bien tranquille, sainte<br />
nitouche », razdevônja « garçon efféminé », etc.<br />
Le serbo-croate a de même brkonja « homme à grande moustache,
624 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
bfk », glâvonja « à grosse tête », trbonja « à gros ventre, trbuh »,<br />
zdëronja « goinfre » sur zdèrali « dévorer », etc.<br />
En polonais, le suffixe est -on : dzwigon « porteur, portefaix »<br />
sur dzwigac « porter », /«èon « amateur » ; avec des surnoms,<br />
Bystron, etc.<br />
En tchèque, -on de même : hltoiï (et hltoun) « goinfre » sur hltati<br />
« avaler », tupon « homme stupide » ; et des noms de personnes<br />
comme Barton « Barthélémy ».<br />
Et -on en slovène : beraëôn « mendiant », élargissement de berâë<br />
(§ 855), verbe berâëiti « mendier » ; jahôn « bon cavalier » et « cheval<br />
de selle » sur jâhati, la forme -onja restant dans des surnoms<br />
comme Sladonja.<br />
§ 1102. Suffixe -an-. — Trois mots sont attestés en vieux slave :<br />
bëgunï (Pand. Ant., Izb. Svjat.) « fuyard », thème masculin<br />
en -ï (§ 169), et slavon bëgunu, v. tch. bëhun et mod. bëhoun<br />
« coureur », r. begûn et pol. biegun, slov. begûn (s.-cr. mod.<br />
bjegûnac) ;<br />
pëstunu. « précepteur » (Ass. 147 v . Ostr., Cyr. Jér.), r. péslun,<br />
pol. pidstun, tch. pëstoun, en regard du slavon pëstovati, r. péstovat'<br />
« garder les enfants », pol. piastowac et piescic « choyer », tch.<br />
pëstiti « élever » ; on n'a pas la base pëst-, et son rattachement à<br />
pil- «nourrir» (§ 468) n'est pas assuré, mais on peut supposer,<br />
de *pite-, un adjectif verbal *pisiu à côté de pitomu, d'où un<br />
factitif pëstiti ;<br />
vëdun- dans acc. plur. vëdunija « devins » Ham. 16813,16, qui<br />
doit représenter *vëdunii avec le suffixe masc. -ii (§ 155) ; et v. r,<br />
vëdunu « magicien », mod. vesëûn sur Padjectif vëscij « qui prédit,<br />
prophétique» (§ 958).<br />
Le nom de la « perche », poisson, est r. ôkun\ pol. okun, okon,<br />
et tch. okoun, s.-cr. ôkun, ce qui peut indiquer un ancien thème<br />
masculin en -ï, de la série assez importante des noms d'animaux<br />
(§ 171); un rattachement à oko «œil» est évidemment risqué,<br />
mais cf. s.-cr. dial. bùljes (§ 1147).<br />
Le slavon plolunu et plolonû est le « daim », du grec byzantin et<br />
moderne 7tXaTÔ>vi abrégé de •jiAcnrôxspooç « aux larges cornes ».<br />
Le slavon strugunû « racleur de peaux » sur strugali « racler »<br />
( § 544) est vieux-serbe, avec un pluriel strïgunije qui fait supposer<br />
-uni, thème masculin en -ï ; le mot n'est connu que par deux<br />
exemples.<br />
Le vieux-russe Perunu, dieu de la foudre, se retrouve dans pol.<br />
piorun « foudre », et r. perùn dans la langue poétique ; le mot a pu<br />
être rattaché, et il l'a été du moins par les étymologistes, à pere-,<br />
pïrati « fouler, battre » (§ 471), mais il est en regard de lit. Perkunas,
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 625<br />
et c'est évidemment un emprunt au germanique, le nom Scandinave<br />
de la mère de Thor, Fjçrgyn, permettant de supposer un thème<br />
ancien * Ferh-, avec amuissement de h en gotique et de là en slave,<br />
et passage à k en baltique (§ 10).<br />
§ 1103. Dans les langues slaves. — Le suffixe -un a sa productivité,<br />
surtout pour la formation de mots expressifs de la langue populaire.<br />
En russe, outre begun « coureur », on a boltûn « bavard » sur<br />
boitât' « bavarder », tgun « menteur » sur IgaV, sopûn « ronfleur »,<br />
sur sopét', vorëùn, vorkûn, vorkolûn «bougon » sur vorcâl', vorkotâl'<br />
«grogner» (§ 1089), xlopotûn «affairé» sur xlopotât' «se trémousser<br />
», etc. ; les féminins sont en -un'ja ( § 1028) : boltûn'ja<br />
« bavarde », govorûn'ja « péroreuse » sur masc. govorùn.<br />
Et pevûn « chanteur », fém. pevûn'ja ; petûn « coq » à côté de<br />
petûx (§ 1154). Et des dérivés avec d'autres sens : padûn «chute<br />
d'eau » (depuis le xvi e s.) ; kolùn « hache de bûcheron, cognée »<br />
sur kolôt' « fendre » ; koltûn « plique », maladie du cuir chevelu,<br />
d'où pol. koltun, qui n'a pas d'explication sûre.<br />
En polonais, outre biegun : opiekun « tuteur » (opieka « tutelle »,<br />
§ 803) ; zwiastun « annonciateur » (zwiastowac « annoncer » sur<br />
wiasc « nouvelle ») ; zdun « potier » sur zïd-, v. si. zïdu « maçonnerie » et<br />
«poterie» (§794). Et des mots divers : kaldun «panse», adapté de<br />
l'allemand Kaldaune « tripes » ; calun « linceul », pris à tch. caloun<br />
« tapisserie » ; avec extension du suffixe dans piolun « absinthe »<br />
pour un plus ancien piolyn (§ 1106).<br />
En tchèque : bëhoun, pëstoun, et : tahoun «bête de trait»<br />
(tâhnouti « tirer ») ; krikloun « criard » (kriknouti « crier ») ; zevloun<br />
« badaud », verbe zevlovati « musarder » sur v. tch. zëvel « qui reste<br />
bouche bée », de zëvati « bâiller » ; — et des mots récents et savants :<br />
letoun « avion » (et letadlo), mecoun « espadon » sur mec « épée »,<br />
blboun « dronte, Dido ineptus » sur blbnouti « devenir stupide » ;<br />
— et des emprunts : caloun « tapisserie » de v. h. a. schalune,<br />
lui-même du français Ghâlons(-sur-Marne) ; dragoun « dragon »,<br />
meloun « melon » ; et balon « ballon », dans la langue populaire balôn<br />
et baloun.<br />
En slovène : bahûn (et bahâc) « vantard » (bâhati « se vanter »),<br />
grdûn « homme répugnant », sur grd « vilain », lizûn « flagorneur »<br />
(lizati «lécher»), pojedûn «glouton» (pojédati «dévorer»), etc.<br />
En serbo-croate : bogàlun « un richard », glàdûn « un gommeux »<br />
(glàditi se « se lisser, se pomponner »), slàdûn « grenade douce » ;<br />
tèkûn « roue », variante dialectale de tàëak, comme slov. tekûn<br />
« coureur », sur tece-, etc. ; et adj. kostunj « osseux » à côté de<br />
kôstan, subst. kostûnac « noix osseuse, angleuse », élargissement de<br />
kostï (§ 958).
626 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
§ 1104. Les origines. — Il apparaît que, pour une bonne part,<br />
-unû est un suffixe d'emprunt, et d'abord une finale de mots<br />
d'emprunt : plotunu de gr. TcXairôm, v. si. Soluriu du nom roman<br />
Salona de Thessalonique, Korsunï (Ham., Vie de Constantin,<br />
chap. VIII) de Xsporôv «Cherson». Et l'on doit surtout penser au<br />
suffixe roman -on-, de large extension.<br />
Mais il est possible aussi que -unû soit pour une part d'origine<br />
slave, et continue des dérivés en -nû de thèmes nominaux en<br />
*-u-, et verbaux en -ovaii, parallèles aux dérivés en -jï du type de<br />
v. si. volui «de bœuf» (§ 955). V. si. pëstunû est en regard de<br />
pëstovati. Le serbo-croate vrhûnac « sommet », slov. vrhûnec, s'il<br />
n'est pas d'une ancienneté assurée, apparaît parallèle au lituanien<br />
virsunê, lette virsune, virsaûne, sur lit. virsùs comme v. si. vruxû.<br />
§ 1105. Suffixes -una, -unja. — On a en vieux slave :<br />
kostuna « fable » ( J. Ex., Gr. Naz.), mot isolé, et qu'on ne peut pas<br />
rapprocher de r. kosëûn « railleur (sacrilège) » qui est un dérivé de<br />
kostit' «injurier», et kostît' est dépréverbé (§ 1208) de pâkostit' ;<br />
lastuna ( J. Ex.) « martinet », oiseau, en regard de lastovica<br />
« hirondelle » (§ 880) ; la forme se retrouve dans l'emprunt roumain<br />
lâstun, tandis que le slovène a lastûr, gén. -rja (§ 1132).<br />
Le bulgare lastûna est un autre mot qui signifie « tige rampante »<br />
(de citrouille, etc.) et est en regard de lastâr «jeune rameau de<br />
vigne, pampre», s.-cr. làstâr, du grec moderne pXaoTocpi «jeune<br />
pousse ».<br />
Slov. mehuna « peau vide de grain de raisin » est un dérivé de<br />
mêh « outre », qu'on retrouve dans s.-cr. mjehunja et déformé en<br />
mdhuna, màhuna « gousse, silique », et dans r. maxunka, pol. miechunek<br />
« physalis », plante appelée ainsi pour son fruit enfermé<br />
dans une vésicule.<br />
On a s.-cr. -una féminin de -un dans dràguna « bien-aimée »<br />
sur drâgâ, sèkuna « sœurette » sur séka hypocoristique de sèstra.<br />
En russe, à côté de -un, fém. -ûn'ja, on a -unja masc. et fém. :<br />
bakûnja « beau parleur » sur bakâï « parler, bavarder », de bajati<br />
(§ 508) ; krivûnja « qui voit, marche de travers, louche, boiteux » ;<br />
devûnja « vieille fille ».<br />
§ 1106. Finale -ynû. — Cette finale apparaît dans un substantif<br />
vieux-slave :<br />
pelynu «absinthe» (Gr. Naz., Pand. Ant.), s.-cr. pèlin, slov.<br />
pelin, v. pol. pioiyn (mod. pioiun), et tch. pelynëk, pelunëk, r.<br />
polyn', fém. ; le mot n'est pas expliqué.<br />
Dans pol. mlyn « moulin », tch. mlyn, il y a eu substitution de
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 627<br />
finale, pour v. r. mlinu (xiv e s.), mod. mlin, du vieux-haut-allemand<br />
mulïn, bas-latin molïnus ; peut-être par rattachement à melje-<br />
« moudre », et sur thème dur mulu, pol. meiszy, mell, méity<br />
(§ 535).<br />
Le baltique a lit. malùnas « moulin », v. pr. malunis, en regard<br />
de mâlli « moudre », mais le suffixe lit. -ûnas est en bonne partie<br />
emprunté au slave : ainsi begûnas « fuyard » à r. begûn, et l'on ne<br />
reconnaît plus sûrement les mots anciens du fonds baltique. Il est<br />
productif en lituanien, avec féminin en -ûné, et il apparaît avec<br />
des mots proprement baltiques, comme atêjûnas « nouveau-venu »<br />
sur at-eïti « arriver ».<br />
En slave, -ynu a précédé -unu dans les emprunts au roman :<br />
s.-cr. Sàlïn « Salone », antérieur à Sàlûn « Salonique » (§ 54).<br />
SVFF1XES EN -zn-<br />
§ 1107. Finale -znu, — Le vieux slave a un adjectif en -ïznu :<br />
Ijubïznu « aimable », r. Ijubéznyj, tch. libezny, slov. Ijùbezen, s.-cr.<br />
Ijùbazan, et v. pol. lubiezny, pol. mod. lubiezny « voluptueux »<br />
refait sur lubiez «volupté » (§ 1017).<br />
En slavon, yobïz(ï)nu «dans l'abondance, riche», v. tch. hobezny,<br />
est à côté de gobiznu, et udobïznû « facile » à côté de udobiznu,<br />
qui peut être v. si. udobiznïnu (Izb. Svjat.) dérivé du substantif<br />
udobizna.<br />
Le serbo-croate a l'adjectif b'ôjâzn-, nom. masc. sing. b'ôjâzan<br />
« timide », qui est bojaznlnu de bojaznï « crainte » ; et gôjâzan « gras,<br />
qu'on engraisse facilement », qui est récent et à côté de g'ôjâtan,<br />
ce qui fait supposer deux élargissements en -ïnu (§ 978) d'adjectifs<br />
en -atu et -astu (§ 989), et une altération de -as(t)n- en -azn-.<br />
§ 1108. Suffixe -izna. — Ici, il s'agit d'un véritable suffixe, et<br />
important. En vieux slave :<br />
cëlizna « friche » (Gr. Naz., Upir') sur cëlu. « intact » ;<br />
glavizna « point capital, TO xscpàAaiov » ; v. tch. hlavizna « chapitre<br />
», et mod. « tête » dans la langue vulgaire ; pol. gïowizna<br />
« hure », r. golovîzna « tête de poisson, hure » ;<br />
golovizna « apprêt » (Izb. Svjat.) sur golovû ;<br />
udobizna « commodité » (Gr. Naz., Pand. Ant.) sur dob-, adv.<br />
udobï (§ 1200);<br />
ukorizna « blâme » sur ukoriti.<br />
/<br />
!<br />
D'autres mots apparaissent de bonne heure en vieux russe :<br />
ulïlizna « fissure » (début du xn e siècle), à côté de utïlina, sur<br />
v. si. çtïlu « percé » (§ 1223) ;
628 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
potrëbizna « nécessité » sur potrëba « besoin » ;<br />
lunïbizna « don gratuit » sur tunlba (§ 910) ;<br />
xudizna « misère » sur xudu. « chétif ».<br />
Et le suffixe s'étend en russe à partir des xiv e -xv e siècles :<br />
dorogovizna « cherté » sur dorogôj, et desevizna « bon marché »<br />
sur desëvyj ; otëlzna « patrimoine » et ancien materizna « héritage<br />
de la mère » ; etc.<br />
Le russe moderne a tout un type d'abstraits oxytons dérivés<br />
d'adjectifs : beliznâ « blancheur », noviznâ « nouveauté », prjamiznâ<br />
« rectitude », zeltiznâ « couleur jaune », etc. Le type a cessé d'être<br />
productif, mais il s'était largement étendu en concurrence avec<br />
-ina et en en prenant I'oxytonaison (§ 891), et une répartition s'est<br />
esquissée entre le type en -izna abstrait et le type en -ina plus<br />
concret : celinâ « terre en friche » et celiznâ « intégrité », novind<br />
« novale » et noviznâ « nouveauté », melinâ « banc de sable » et<br />
meliznâ « ténuité » (§ 889).<br />
En polonais, -izna apparaît dès le début : potrzebizna, przekorzyzna,<br />
et s'est abondamment développé : bielizna « blancheur »<br />
et « linge », golizna « indigence », mielizna « bas-fond », podobizna<br />
« fac-similé », siwizna « cheveux gris », zgnilizna « pourriture », etc. ;<br />
avec des formations récentes du xx e siècle, piowosc et piowizna<br />
sur piowy «jaune», tkliwosc et tkliwizna sur tkliwy «tendre»,<br />
wqllosc et wqtlizna sur wqtiy « faible » ; et avec tout un type de<br />
dérivés en -szczyzna d'adjectifs en -ski : panszczyzna « corvée »<br />
(due au pan, seigneur) sur panski, polszczyzna « langue polonaise »,<br />
bohaterskosc et bohaterszczyzna sur bohaterski « héroïque ». La<br />
formation donnait des abstraits de sens collectif : mçzczyzna « le<br />
mâle, les hommes» sur mçski «mâle» (§ 974), zenszczyzna «les<br />
femmes » sur zenski, et il en reste slarszyzna « les officiers supérieurs<br />
» sur starszy.<br />
Elle est vivante en kachoube : zoinierzizna « les soldats » sur<br />
zoinierz, zwierzyzna « les bêtes » sur zwierz, avec une extension de<br />
-izna plus grande encore qu'en polonais : baranizna pour pol.<br />
baranina « viande de mouton », dqbowizna pour pol. dçbina « bois<br />
de chêne ».<br />
Le polabe n'a d'exemple que de -ina ; mais le sorabe a nowizna<br />
« nouveauté, nouvelle », podobizna « portrait ». Le tchèque avait<br />
développé le suffixe, mais il n'en garde que des restes : bëlizna<br />
« pelisse blanche », qui remonte au vieux tchèque ; podobizna<br />
« effigie, portrait », peut-être imité du polonais ; babizna « mégère »<br />
sur baba, et hlavizna « tête » comme pol. giowizna « hure ». Le<br />
vieux-tchèque otëizna « patrimoine » se continue dans otcizen du<br />
slovaque, avec la confusion de -nja, -en et -na (§ 1090). Au vieux-
[§ 1135]<br />
SUFFIXES EN -S- ET -X- 629<br />
polonais przekorzyzna répondait en vieux tchèque priekorizn<br />
« vexation », avec passage au type en -znï.<br />
En slovène et en serbo-croate, le type en -izna a complètement<br />
disparu.<br />
Deux mots en -zna sont d'origine obscure :<br />
V. si. trizna dans un exemple unique en rédaction vieux-slave,<br />
Supr. 37610, où il rend STOX6>.OV « prix de la lutte » ; tryzna et trizna<br />
en rédaction slavonne (Gr. Naz., Izb. Svjat.) au sens de « lutte »,<br />
et en vieux russe, où il a aussi le sens de «joute aux funérailles<br />
d'un mort », vieille coutume connue chez les Germains et ailleurs.<br />
Le russe moderne trizna est livresque, mais le vieux tchèque a<br />
tryzna « fête funéraire », mod. iryzen « tourment, souffrance »,<br />
verbe tryzniti « faire souffrir », et pol. tryznic « dissiper, perdre (le<br />
temps) ». La forme initiale est sûrement tryzna, le vieux slave ne<br />
distinguant plus sûrement ry et ri (§ 53), et le sens premier est<br />
nettement « lutte », ce qui n'est pas en faveur du rattachement<br />
qu'on a proposé à trove-, truti « consommer ».<br />
Y. tch. divizna « bouillon-blanc », nom de plante qui apparaît<br />
sous des formes variées dans les langues slaves, pol. dziwizna, mais<br />
ordinairement dziewanna, r. divânka, slov. divin, s.-cr. diviz(i)na<br />
et divizma. Un rattachement à v. si. divii « sauvage » est aussi<br />
facile que sans doute trompeur, et le serbo-croate divizma est trop<br />
récent (xvm e s.) pour assurer un emprunt au grec et à un composé<br />
à premier terme Y)Su-.<br />
§ 1109. Suffixe -znï. — Le suffixe se rencontre en vieux slave<br />
dans les mots :<br />
kùznï « machination » et kyznï, et kuznï d'après kuznïcï (Pand.<br />
Ant., Ham.) «forgeron» (§ 835) ; v. r. kuznï «objets forgés», et<br />
r. kuznéc « forgeron », kûznja et kûznica « forge » comme pol. kuznia<br />
et kuznica (§ 1088) : sur kove- « forger », avec réfection sur le présent<br />
nouveau r. kuè-, pol. kuje- (§ 466) ;<br />
ziznï « vie », r. zizn', v. pol. zyzn « abondance, fécondité », avec<br />
un adjectif zyzny « fécond, fertile » de v. si. ziznïnu ou secondaire<br />
du substantif ;<br />
bojaznï « crainte », r. bojazn', pol. bojazn, s.-cr. bôjâzan, slov.<br />
bojâzen ; et v. tch. bdzn, bdzn, mod. bâzeâ, gén. bdznë (§ 1090),<br />
sur bâti se (§ 590) ;<br />
cajaznï (Gr. Naz.) « attente », un seul exemple ;<br />
kajaznï « pénitence » et pdkajaznï « repentir », sur kajati sç,<br />
seulement vieux-slave, et à ne pas confondre avec kaznï (§ 1083)<br />
sur kazati ;<br />
prijaznï « amitié, bienveillance » et neprijaznï « inimitié », r.
630 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
prijâzn', slov. prijâzen et s.-er. ancien prijazan, tch. prlzen comme<br />
pfitel (§ 81) ;<br />
bolëznï « douleur, maladie », r. bolézn' (savant), slov. bolêzen,<br />
ailleurs v. r. bolestï et r. pop. bôlest', etc. (§ 905).<br />
Mais vaznï (Izb. Svjat.) «chance» est isolé avec un adjectif<br />
vaznivû (Gr. Naz.) « chanceux » (§ 995), et ce peut être aussi bien<br />
un dérivé en -m (§ 1084), un thème vaz- étant aussi ou plus<br />
vraisemblable qu'un thème va-, bien qu'aussi peu identifiable.<br />
A cette liste, le slavon ajoute govëznï «piété», faiblement attesté,<br />
sur govëti « révérer ».<br />
Et le slovène upâzen, gén. -zni, « confiance, espérance », sur<br />
ûpati « avoir confiance » (§ 815), le contraire de bojâzen « crainte ».<br />
Le tchèque zizen « soif » est d'une autre origine (§ 1090), mais il a<br />
été attiré par le type en -znï ; de même v. tch. priekorizn pour v.<br />
pol. przekorzyzna et v. si. ukorizna.<br />
Le serbo-croate ancien Ijubezan « affection » et le slovène Ijubçzen<br />
sont des abstraits en -ï (§ 711) tirés des adjectifs s.-cr. dial. Ijubezan,<br />
variante de Ijùbazan, et slov. Ijubezen.<br />
Le suffixe -znï est ancien, et il apparaît avec une productivité<br />
limité^ qu'il a bientôt perdue. Sauf en slovène, où il a continué<br />
à connaître un petit développement. A côté de bojâzen, prijâzen,<br />
bolêzen, et comme upâzen, on trouve :<br />
golâzen « place dénudée (dans les champs de céréales) » et<br />
« vermine (qui en est la cause) », sur gol « dénudé » ;<br />
skakâzen « insectes, vermine qui saute », collectif, en regard de<br />
skakâvee « sauterelle » ;<br />
zivâzen « bêtes » (volatiles, insectes), à côté du collectif zivâd<br />
(§ 1006);<br />
mladçzen « la jeunesse, les jeunes » à côté de mlâdez, collectif<br />
(§ 1017).<br />
Et kljubçzen « esprit de défi » sur kljûbu « en dépit de », le<br />
contraire de Ijubqzen comme upâzen de bojâzen.<br />
§ 1110. Les origines. — Gomme le slave ne connaît pas de<br />
suffixe en -z- (§ 1192), il faut penser pour les suffixes en -zn-,<br />
inconnus du baltique, à des origines étrangères.<br />
Le germanique a des suffixes productifs en got. -ag-, -ig-, -eig-<br />
(-ïg-), -ug-; et v. si. xçdogu (Gr. Naz.) «habile», d'où xçdozïstvo<br />
(§ 935), vient de *handag-, variante de got. handugs «savant»;<br />
gobïdzï «opulent», d'où gobïdzije (§ 926), vient de got. gabigs<br />
(§ 18). Il faut donc voir dans les adjectifs en -ïznu du slave des<br />
dérivés en -nu (§ 1071) d'adjectifs en -ïdzï empruntés au gérmanique,<br />
gobïznu sur gobïdzï et gobiznu de got. gabeigs, forme plus
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 631<br />
usuelle que gabigs ; et Ijubïznu restitue un germanique *leubigqu'on<br />
n'a dans v. h. a. liublïh, mod. lieblich « aimable, qu'avec le<br />
remplacement fréquent en allemand par -lïh du plus ancien -ig.<br />
On voit ainsi que la semi-occlusive sonore dz', qui se réduit à<br />
z' et z dur dans la plupart des langues slaves ( § 13), s'était réduite et<br />
durcie en z devant consonne, *dz'n en zn, dès le slave commun.<br />
De même que -ïznu et -iznu, adjectifs, apparaissent comme des<br />
dérivés en -nu d'adjectifs d'emprunt au germanique -ig-, -ïg-, de<br />
même -izna est un dérivé en -na (§ 1076) de ces mêmes adjectifs.<br />
Mais ici la productivité du suffixe a été grande en slave et sur des<br />
mots du fonds slave, parallèlement à -ina, et le dérivé cëlizna<br />
« friche » sur cëlu en rapport avec le germanique hail- « sain »<br />
(§ 10) est complètement indépendant de v. h. a. heilig «saint».<br />
Le suffixe -znï est à part en slave des suffixes -znu et -izna, et<br />
il faut lui chercher une autre origine.<br />
Un élargissement en -sn- de suffixes en -n- a son point de départ<br />
dans la rencontre du suffixe avec un thème en dentale (§ 31), et<br />
l'on trouve en effet, dans de vieilles formations, plesno « plante<br />
des pieds» sur plet- (§ 1074), dçsna «gencive» sur *dçt- (§ 1075),<br />
et de même vasnï « discorde » très vraisemblablement sur vad-<br />
(§ 1085). En baltique, une forme -snis du suffixe -nis connaît un<br />
certain développement, sur des thèmes divers comme -snï en<br />
slave, mais sur un thème en dentale dans lit. kçisnis « morceau »<br />
de kçndu, kçsti « mordre ».<br />
Le germanique a aussi des dérivés en *-sni-, en partie sur thème<br />
verbal en dentale, ainsi got. us-beisns « patience » sur us-beidan. Or<br />
ce suffixe, conservé en germanique par le gotique, y présente une<br />
variante -zn- : anda-wizns « bonne chère », waila-wizns « festin »,<br />
sur wisan « rester, être ». Cette variante est rare, mais parce que<br />
le gotique conserve mal l'Ialternance s : z qui était en fonction<br />
de la place de l'accent.<br />
Ainsi le suffixe balto-slave est -sni-, et si. -znï a été pris par le<br />
slave au germanique. Le slave atteste la forme -zn- plus abondamment<br />
que le gotique, parce que dans ses emprunts anciens<br />
il conserve mieux que le gotique la forme alternante z de s : c'est<br />
le cas pour gonez-nçii « être sauvé » en regard de got. ganisan<br />
(§ 428).
CHAPITRE XXXIII<br />
SUFFIXES EN -r-<br />
§ 1111. Finale -p-.— L'indo-européen n'avait pas de suffixe<br />
en -p-. Le grec présente largement des finales en -on:-, -cm-, ainsi<br />
àvOpoyrcoç, itpoaùmov, où l'on reconnaît pour une part des seconds<br />
termes de composés sur le thème *ofc w - « voir », et qu'on suppose<br />
pour une autre part d'origine préhellénique.<br />
En baltique, on ne trouve que le type lit. -ôpas de dvejôpas<br />
«de deux sortes» (§ 315), développé sur la postposition -p(i)<br />
(§ 128).<br />
En slave, il y a un petit type verbal en -pati qui paraît être<br />
d'origine expressive (§ 556) ; et des noms isolés à finale -p-, qui<br />
posent tous des problèmes étymologiques. Deux de ces mots sont<br />
attestés en vieux slave :<br />
vrùtupû «caverne», et «jardin» Jean, XIX, 41, mais par<br />
altération de vrùtù et confusion entre la « tombe taillée dans le<br />
roc » de Marc, XV, 46 et le jardin où elle se trouvait, et de même<br />
vrùiupogradû Supr. est une altération de vrùtogradu. Le mot n'est<br />
attesté ailleurs qu'en bulgare : vârîôp « tourbillon d'eau » et<br />
« cavité en forme d'entonnoir » ; le russe et ukrainien vertép est<br />
un slavonisme, désignant la « caverne de brigands » de Mat.,<br />
XXI, 13 ou la crèche dans les coutumes de Noël. Un rattachement<br />
à *vïrt- «tourner», bulg. vodovârlez «tourbillon d'eau» (§ 1017),<br />
paraît sûr, pour le début du mot, mais n'explique pas la finale.<br />
On doit penser à un composé obscurci (§ 1231), et alors le second<br />
terme -up- serait lit. ùpé « rivière », lette upe, et v. pr. ape « courant<br />
d'eau », ancien athématique, skr. et av. ap- « eau ».<br />
luspa (J. Ex.) « écaille de poisson » et « enveloppe (du grain),<br />
s/ujTpov » ; et bulg. luspa, Ijuspa « écale » et «écaille», ukr. luspa.<br />
La forme ordinaire est r. luskd, pol. iuska, s.-cr. Ijuska, etc., avec<br />
verbe pol. luskac « écosser, écailler », tch. louskati, etc., et correspondant<br />
en baltique : lette laûska « coquille, écaille », lit. lusnà.<br />
On a aussi r. luzgâ « écaille », slov. lùzgati « écailler », et en baltique
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 633<br />
lit. lùzgana : ce qui laisse voir que luska et luzga sont des postverbaux<br />
de verbes en -skati, -zgati (§ 561). Pour v. si. luspa, on<br />
peut penser à une contamination entre luska et lupiti « peler,<br />
écailler » (§ 756) : ce qui est sûr pour v. pol. luspina, croisement de<br />
iuska et lupina « pelure, coque, écale ».<br />
Mais que tirer d'un mot comme r. skorlupa « écale, coquille<br />
d'œuf », pol. skorupa « coquille, tesson, carapace », tch. skraloup<br />
« croûte », slov. skorlûp « crème du lait » et skralûp « écorce,<br />
croûte », s.-cr. s/côrûp « crème »? Les autres mots en -p- de diverses<br />
langues slaves ou de leurs dialectes ne sont pas plus clairs, et il ne<br />
suffît pas de rapprocher ukr. vertép et le nom propre Mazepa pour<br />
en dégager un suffixe slave -ep-,<br />
§ 1112. Suffixe -ru, — Le suffixe *-ro- était un suffixe important<br />
en indo-européen, l'accent étant ordinairement oxyton, et par<br />
conséquent, à l'origine, avec degré réduit dans le radical (§ 94).<br />
On le trouve en hittite : kateras « inférieur » de kala « en bas », et<br />
dans toutes les langues indo-européennes, plus ou moins développé<br />
et plus ou moins conservé. En grec et en latin, le suffixe n'est plus<br />
productif, mais il reste ordinairement clair : gr. Sôpov « don »,<br />
a/.poç « pointu » en regard de xxlç « pointe », lat. aciës, èpuOpoç<br />
« rouge » et verbe IpsiiÔsiv « rougir », lat. ruber et rubêre. En germanique,<br />
il n'est plus représenté que par quelques mots : got.<br />
bailrs « mordant, amer », v. h. a. biltar, sur got. baitan « mordre ».<br />
Le baltique a des formes variées en -r-, ainsi lit. ausrà « aurore »<br />
sur aùsti « faire jour », et spécialement de nombreux adjectifs en<br />
-ras et -rus (§ 275) : giëdras (ancien) et gaidrùs (nouveau, § 50)<br />
« clair, serein » comme gr. (pcaSpôç « clair » à côté de (patStjzoç<br />
« brillant ». Une partie de ces formes se retrouvent en slave :<br />
budrùs « éveillé » comme si. budru, sur bud- « veiller ».<br />
En slave, les adjectifs en -ru constituent un type important et<br />
en bonne partie clair, mais ils sont tous anciens et remontent,<br />
antérieurement au stade vieux-slave, à l'époque du slave commun.<br />
Sont attestés en vieux slave :<br />
budru, r. bôdryj « vigilant » ;<br />
byslru « rapide, preste, pénétrant », r. bystryj ; sur le thème<br />
*bus-, *bous- de v. isl. bysia « jaillir avec force », norv. baus<br />
« violent », m. h. a. bûs « ce qui est bouffi », en slave *bous- dans r.<br />
bûxnut' «se gonfler», slov. bûhnili «s'enfler» et «jaillir violemment»,<br />
etc., et *bus- dans v.,'sl. bûxuma, busijç «tout à fait»<br />
(§ 321), s.-cr. bàhnuli « surgir » ;<br />
dobru « qui convient, beau, bon», r. dôbryj, sur dob- (§ 739) ;<br />
jedru « rapide », seulement vieux-slave en ce sens, mais inséparable<br />
de bulg. édâr « gros, fort », s.-cr. jédar « compact, ferme »,
634 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
et du substantif jçdro «noyau» (§ 1116) : sur thème jçd- ou /g-<br />
(§ 40), sans identification sûre ;<br />
kypru (J. Ex.) « spongieux », ukr. kypryj « meuble, friable »<br />
et « bien cuit », h. sor. kipry « friable, faible », tch. kypry « meuble »<br />
et v. tch. « frais et dispos », bulg. klpâr « délicat, beau » : ces sens<br />
variés dérivent d'un même sens concret qui doit avoir été celui de<br />
« bien gonflé, bien levé » en parlant de la pâte, et le rapport est sûr<br />
avec le thème kyp- de kypëti «bouillonner» (§ 593), tch. kynouti<br />
« lever, se gonfler » ;<br />
mokru « humide », r. môkryj, sur mok- ( § 740) ;<br />
mçdru « sage, habile », r. mûdryj, en baltique lit. mudrùs « alerte,<br />
éveillé », lette mudrs, et lit. mundras et mandrùs, lette muôdrs<br />
et verbe muôstu, muosi « (s')éveiller », ailleurs v. h. a. rnuntar<br />
« vif, allègre », skr. mudrâh : le slave mçdru doit être fait sur la forme<br />
à infixe nasal *mund-, avec degré vocalique à allongement *mûddans<br />
myslï« pensée » (§ 1056) ;<br />
ostru « pointu », r. ôstryj, et lit. astrùs, sur i.-e. *ak-, v. si. osla<br />
« pierre à aiguiser » (§ 1051) ;<br />
pïstru (Athan., I, 144s, etc.) « bigarré », r. pëstryj, sur pis-<br />
(§ 543)j<br />
rûdru « roux » (Izb. Svjat., Ham. 6410) et v. r. redru, r. mod.<br />
rëdryj, sur rud-, v. si. rudëti sg «rougir» (§ 599) passant à rid-<br />
(§ 61) ; et gr. spuOpoç lat. ruber ;<br />
siedru «miséricordieux», r. scédryj «généreux» (slavonisme),<br />
pol. szczodry, sur le thème *sëed- de v. si. slqdëti « épargner »<br />
(§450);<br />
vedru dans vedro «beau temps» (§ 1116), s.-cr. vëdar «clair,<br />
serein », bulg. védâr, slov. vçder : neutre substantivé comme en<br />
vieux slave dans v. h. a. wetar « temps, tempête », v. sax. wedar ;<br />
xytru. « habile », r. xitryj, évidemment sur le thème xyt- de<br />
xylali, xytiti « saisir », et sens plus ancien « (chercher à) s'approprier »<br />
(§ 601).<br />
On ajoutera :<br />
siaru « vieux », r. stdryj, et lit. stôras « gros », v. isl. stôrr « grand »,<br />
qu'on doit sûrement rattacher au thème stâ-, ainsi que skr. sthirâh<br />
« ferme » sur slhi- alternant avec sthâ- dans sthitdh « debout »<br />
(§ 594).<br />
Mais aucune analyse ne permet de reconnaître un suffixe -ru<br />
dans :<br />
jaru « rude, sévère », r. jâryj « furieux, emporté », qui est<br />
sûrement le même mot que r. jâryj « brûlant, brillant », ukr.<br />
jâryj, et r. jârkij «éclatant», s.-cr. jdrkï «ardent» (§ 986) : un<br />
rapprochement avec gr. Çcopoç « pur, non mélangé », en parlant
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 635<br />
du vin, n'a rien d'assuré, et l'initiale ja- peut aussi bien dériver de<br />
*ai- (§ 75).<br />
Un autre adjectif est r. et ukr. jâryj « de printemps », s.-cr. et<br />
slov. jâr, pol. jary « de cette année », et tch. jar y « frais, vigoureux »,<br />
en regard de jar- «printemps» (§ 1118). On n'analyse pas<br />
davantage :<br />
siru « orphelin », et lit. seirys « veuf », seirë « veuve » ;<br />
pronyru «pervers» (§ 614). Encore moins :<br />
skorû « rapide », r. skôryj (§ 820).<br />
Mais pour sporû « abondant », r. spôryj, un rapprochement<br />
avec skr. sphirdh « riche », et lat. pro-sper, comme dérivé en *-rodu<br />
thème verbal de skr. sphâyati, si. spë(ja)ti «prospérer» (§ 511),<br />
est possible en admettant une réfection du vocalisme radical sur<br />
le factitif sporiti (§ 742). '<br />
Pour syru « vert, qui n'est pas sec » (et surovu « cru », § 964),<br />
r. syrôj « cru, humide », qui a comme correspondants lit. suras<br />
« salé » et germ. sûr-, un thème de base *sû- n'est nullement<br />
garanti par lit. sûdyti « saler », qui doit être un factitif en -dyti<br />
(§ 620) du type de pûdyti «faire pourrir» sur pûti «pourrir», tiré<br />
secondairement de l'adjectif suras sur le modèle fréquent en<br />
baltique de lit. skaidrùs «clair» et skâidyti «séparer», malrùs<br />
« circonspect » et matyti « observer », lette muôdrs « éveillé » et<br />
muôdît « éveiller ».<br />
De l'adjectif izëkrû (J. Ex., Izb. Svjat.) « aux yeux bleus »,<br />
var. zerku (Malalas), R. Aitzetmuller a identifié la source (WSl.,<br />
III, 4, p. 388-393) : c'est un emprunt, par le turc, à l'arabe azrak,<br />
fém. zarkâ, espagnol zarco, qui donnait en slave * (i)zerku, *-zrëkû,<br />
et -zc.kru avec métathèse.<br />
§ 1113. — Aux mots attestés en vieux slave s'ajoutent :<br />
pol. jaskry « à couleurs voyantes » et slov. isker « ardent, vif »,<br />
voir le substantif iskra, § 1117 ;<br />
pol. modry « bleu foncé », tch. modry, s.-cr. môdar, slov. mçder :<br />
sans explication valable, un rapprochement avec lat. madère « être<br />
imprégné, humide » ne s'imposant pas ;<br />
slavon sërû «gris », r. séryj, pol. szary, tch. sery (§ 18), qui peut<br />
être un emprunt au germanique *haira-, mais qui pourrait aussi<br />
être un dérivé en *-ro- de la racine *skei- qu'on doit avoir dans<br />
sërû « ombre » (§ 1084), parallèle À got. skeirs « clair », en regard de<br />
skeinan « briller ».<br />
C'est cet adjectif qu'on doit retrouver dans le domaine méridional<br />
sous la forme s.-cr. sûr (depuis le xvn e siècle) « (au poil)<br />
gris », slov. sûr et bulg. sur, par contamination avec une déformation
636 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
de v. si. surovu « écru » (§ 964), croisé avec syrû dans s.-cr. sïrov<br />
« cru, brut » en face du livresque surov « grossier, brutal ».<br />
Le slovène présente l'adjectif dur « sauvage, farouche », avec<br />
verbe duriti « détester », ailleurs r. durit' « faire des sottises », pol.<br />
durzyc « duper », s.-cr. duriti se « s'emporter », avec substantifs r.<br />
dur' « folie », pol. dur « étourdissement », etc. (§ 760). Un rattachement<br />
à v. si. duti « souffler, gonfler » est exclu, puisque le thème en<br />
est dura- (§ 433) ; et le baltique a v. pr. dura- «effarouché », avec<br />
bura- « craintif », qui en est évidemment l'altération ; le rapprochement<br />
est possible avec lat. furere « être fou », av. dvaraiti « il se<br />
précipite ».<br />
On a *kgdru seulement dans bulg. kâdâr « frisé, aux cheveux<br />
bouclés », le serbo-croate ancien kudar n'étant pas clair ; ailleurs<br />
des substantifs, r. kûdri «boucles de cheveux», avec sing. kudrjâ<br />
et masc. kûder', slov. kçder, masc., et kçdra «boucle de cheveux »<br />
et «touffe», pol. kçdzior et v. pol. kçdzierz, masc., et dial. kçdry,<br />
plur. masc., avec adjectif v. si. kçdrjavu (§ 993) et v. r. kudrjavu,<br />
r. mod. kudrjdvyj, s.-cr. kùdrav et bulg. kâdrav, pol. kçdzierzawy,<br />
et verbe r. kûdrit'sja « devenir crépu », slov. kgdriti « friser », etc.<br />
Sur le verbe, le substantif a pu être refait en masculin en -rû. ou<br />
féminin, en -ra, mais la forme ancienne doit être *kçdrï, abstrait<br />
de l'adjectif *kçdru. Le thème kçd-, d'ailleurs inexpliqué, se retrouve<br />
sûrement dans *kçdel- «filasse, quenouille» (§ 1060), et le russe<br />
dialectal kûdit' signifie « rouler en filasse ».<br />
Un adjectif *motru est supposé par sumolriti « considérer »<br />
(§ 641), et c'est lit. fis-Jmatrùs « circonspect » sur matyti « observer ».<br />
De même *jïgru, sur thème *ig-, est la forme qui explique le<br />
substantif v. si. igrï « jeu » (§ 1118). Et l'on peut reconnaître dans<br />
le slavon segrivû « facétieux », en regard de sega « facétie » d'origine<br />
inconnue, bulg. segd, s.-cr. sëga, slov. séga « coutumes » et adj.<br />
segàv « plaisant, malin », l'élargissement en -ivu, comme dans<br />
le cas de pronyru et pronyrivu (§ 995), d'un adjectif *segrû.<br />
On restitue également un adjectif en -rû, ou en -tru comme<br />
-teru du type jeteru (§ 1119), d'après l'adverbe çtrï «à l'intérieur»<br />
(§ 320) et le dérivé çtroba « entrailles » (§ 913). Le sanskrit a antrâm<br />
« intérieur, entrailles » en regard de l'adverbe antdr « dedans »,<br />
adj. dntarah « intérieur » ; la base est la préposition « dans », baltoslave<br />
en, si. vu (§ 73) et p- comme forme renforcée, ainsi comme<br />
premier terme de composé nominal (§ 1223).<br />
Le thème sir- de siroku «large » (§ 985), sirili « élargir » (§ 798)<br />
est inexpliqué et ne se laisse donc pas analyser. Pour slov. sâr<br />
« bariolé », voir le substantif v. si. saru ; et quant à slov. dealer<br />
« vif, éveillé », et bçster sans doute par attraction de bister « clair,<br />
vif », c'est un emprunt à l'italien destro « adroit, agile ».
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 637<br />
§ 1114. Substantifs en -ru. — On trouve en vieux slave, en<br />
dehors de brat(r)û « frère » d'origine athématique (§ 198) :<br />
daru « don », r. dar, gén. dâra, s.-cr. et slov. dâr, tch. dar, avec<br />
métatonie sur l'intonation rude de s.-cr. dàti, slov. et tch. ddti ;<br />
et gr. 8£>pov ;<br />
mirû « paix », r. mir, gén. mira, tch. mir, et s.-cr. mîr, gén. mira<br />
(§ 830), mais cak. et slov. mîr, gén. mira, avec métatonie sur le<br />
thème d'intonation rude, comme dans le lette miers (§ 101) ; et<br />
vieux-lituanien mieras : la forme balto-slave était *mëirâ-, sur le<br />
thème *mêi- de l'adjectif v. si. milù, lit. mielas «cher» (§ 1048) ;<br />
piru « banquet », r. pir, gén. pira, s.-cr. et slov. pîr : c'est-à-dire<br />
« beuverie », sur s.-cr. pïli, slov. piti ;<br />
ziru « pâture », r. zir, gén. zira, s.-cr. et slov. zîr, etc., sur ziti<br />
(§ 795).<br />
Mais r. vir « tourbillon' (d'eau) », s.-cr. vîr, gén. vira, est un<br />
postverbal de -viraii (§ 777), sans rapport avec le thème vi- de<br />
viti « tordre », vijalica « tempête de neige » (§ 880), non plus qu'avec<br />
vixu.ru « tourbillon (de vent) » (§ 1127).<br />
On a encore en vieux slave les finales en -ru :<br />
koprû «fenouil», r. kop(ë)r, gén. koprà, mais s.-cr. kopar, gén.<br />
kôpra, qui est sans doute un mot d'emprunt (§ 739) ;<br />
kuru « coq », r. kur, gén. kûra, slov. kùr, gén. kûra, d'intonation<br />
rude dans s.-cr. Mrac, avec féminin r. kûra « poule », etc. (§ 708),<br />
qui peut être un adjectif substantivé, mais qui n'est pas de façon<br />
sûre un dérivé du thème expressif de skr. kduti « il crie », v. si. kujati<br />
« grogner » (§ 523);<br />
odru « lit », mais au sens de « bois de lit », et le mot signifie<br />
«châssis de voiture» dans r. dial. odër, «échafaudage» dans slov.<br />
çder, «plancher (au-dessus de l'aire) », dans tch. pop. (v)odr, et en<br />
vieux slave même «gril » dans odrïcï (§ 834) ; il peut donc s'agir<br />
d'une grille, d'un treillis, et l'on en retrouverait le thème od- dans<br />
lit. adîjli « tricoter », lette adît, à côté de lit. âdala « piquant,<br />
aiguille », lette adala, qui se laisse rapprocher de gr. àôyjp « barbe<br />
(d'épi) » ;<br />
syru « fromage », r. syr, gén. syra, s.-cr. sïr et slov. sir, gén. sira,<br />
d'intonation rude, qui est l'adjectif syru « cru » substantivé, et ne<br />
doit donc pas être un dérivé en -ru ;<br />
saru «couleur», et saruëii «peintre» (§ 864), bulg. sar, s.-cr.<br />
et slov. s ara « couleur » et « bigarrure », avec le verbe s.-cr. sârati<br />
« peindre, barioler » et les adjectifs slov. s âr « bariolé » et s.-cr.<br />
sàren (§ 1097) : mot inanalysable et sûrement emprunt au turc ;<br />
iuru. «taureau » et v. r. « aurochs », qui n'est plus que livresque
638 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
dans r. mod. tur, gén. tùra, et lit. taûras, lat. taurus, gr. Taopoç,<br />
inanalysable également ;<br />
vëîru « vent », r. vêler, s.-cr. vjëtar, tch. vitr, et slov. vêter avec<br />
l'accent de métatonie de vêje-, vêjati «venter» (§ 670) ; et v. pr.<br />
weiro « vent », lit. vëtra « tempête », donc adjectif substantivé en<br />
-ru sur le thème *wë-t- de skr. vâtah « vent » (§ 511).<br />
Dans svek(û)râ, vix(u)ru, xrabfûjru, la finale est -uru (§ 1127).<br />
§ 1115. — Aux mots vieux-slaves s'ajoutent :<br />
*zçbru « bison » dans le grec byzantin ÇoSfxëpoç, r. zubr, gén.<br />
zûbra, tch. zubr, et pol. zubr pris au russe pour zqbr- conservé dans<br />
des noms de lieux; le baltique a lit. sluiribras, lette s(t)umbrs,<br />
qui pourrait être un emprunt au slave avec s(t)- rendant le slave<br />
z- au temps où le letto-lituanien n'avait qu'un z ; et v. pr. wissambr(i)s<br />
qui a l'aspect d'une fusion de *zambr- et du germanique<br />
v. h. a. wisunt, lat. bisont- ; il serait imprudent d'analyser un<br />
pareil mot, et le bison n'a pas les dents, zçb-, du sanglier ;<br />
slavon rarii « bruit », dérivé, ou bien forme à redoublement,<br />
du thème ra- de r. dial. ràjat' «retentir» (§ 508), qu'il est difficile<br />
de retrouver dans *rarogu «faucon de chasse» (§ 1011), mais<br />
peut-être un peu moins dans ranu « matinal » (§ 1071) ;<br />
v. r. sjabrù (xiv e -xv e s.) « membre d'une communauté », r. mod.<br />
sjabër« voisin, associé », vieux s.-cr. sebrï (xiv e -xv e s.) « le non-noble,<br />
le vilain », s.-cr. dial. sëbar, qui doit s'expliquer par *sëm-rû (§ 40)<br />
sur le thème sëm- de sëmïja « gens de la maison » (§ 1028) ;<br />
slov. vçzger «morve», tch. vozher, h. sor. wôzh(o)r, pol. wozgier<br />
« morveux » et « morve » et wozgrzja « morve », v. r. vozgri, plur.<br />
fém., et mod. vôzgri, sing. vozgrjâ : on peut supposer un dérivé en<br />
-ru, adjectif et substantif, avec abstrait en -rï, d'où plur. -ri de nom<br />
de matière comme dans v. si. pëny, sling (§ 1075), etc., sur le thème<br />
vozg- du verbe pol. wozgac « émettre de la morve » et d'un substantif<br />
*vozga à finale -zga (§ 1109) : on a proposé comme base le lette<br />
vasa « terre humide, sève des arbres », v. h. a. waso « terre humide »,<br />
qui pourrait avoir été remanié en slave d'après rnëzga « sève ».<br />
Un substantif dçbru « forêt » est mal attesté par un seul exemple<br />
slavon, mais il est supposé par les dérivés dçbrava et dçbrova<br />
(§ 1187), et il répond à l'adjectif lette dumbrs «marécageux»,<br />
d'où dumbrava « marécage » ; et voir dubrï « ravin », § 1118.<br />
De murava «gazon» (§ 1187), le substantif de base est r. mur<br />
« herbe des prés », avec verbe dial. zamurél' « verdir », et avec<br />
correspondant baltique, lette maûrs «gazon», lit. mauraï, plur.,<br />
«lentille d'eau», mais inanalysable.<br />
On trouve encore dans les langues slaves :<br />
r. bagôr, gén. bagrâ, « croc, gaffe », ukr. bâhor « jante » et slovaque<br />
bahor, inexpliqué ;
[§1116] SUFFIXES EN -T- 639<br />
r. dial. ëéxor «querelleur», et tch. ëechry, plur., «touffe de<br />
cheveux», sur ëexati, forme expressive en -xati (§ 557) de ëesali,<br />
s.-cr. ëèhati « ébrancher, ébarber », slov. céhati « peigner, arracher »,<br />
pol. czochac siç « se gratter » et czochrac « peigner la laine, carder »,<br />
tch. (na-)ëechrati « repeigner, retaper»;<br />
r. kostër, gén. kosirâ, « bûcher », slov. kçster, pol. ancien et dial.<br />
kostra et kostro, inexpliqué ;<br />
v. tch. puchr et dial. pucher «fruit gâté», et verbe puchreti<br />
«pourrir», sur le thème pux- (§ 759) de puchnouti «enfler», et<br />
var. bouchor (§ 1124) sur le thème bux-.<br />
Mais les finales en -r- sont flottantes et mal identifiables. On a<br />
pol. swider « tarière », tch. svider et slov. svéder, déformations de<br />
*svïrdïlu (§ 1055); slov. gâber «charme» (arbre), bulg. gâbâr,<br />
tch. habr et s.-cr. gràbar, déformations de r. et pol. grab, s.-cr.<br />
grâb, qu'on retrouve dans v. pr. wosi-grabis « fusain » ; pol. lagier,<br />
gén. lagru, « lie de vin », emprunt à ail. Lager, et hewer, gén. hewra<br />
« levier » fhewar, lewar) à ail. Heber : slov. stebèr « colonne, pilier »,<br />
gén. stebrà, pour stoboru (§ 1123) ; etc.<br />
La distinction des adjectifs et des substantifs en -ru est un fait<br />
secondaire, comme celle des deux catégories de l'adjectif et du<br />
substantif en slave (§ 273). En serbo-croate, sëbar «le vilain » est<br />
régulièrement traité comme substantif, mais il devient sans peine<br />
adjectif dans le ragusain sebra salira vidjesmo «nous vîmes un<br />
vilain satyre » quand le poète traduit l'italien un satiro villan.<br />
L'accentuation des dérivés en -ru n'est pas uniforme, mais un<br />
type oxyton se reconnaît dans des adjectifs, comme dobrû, r. dobr,<br />
neutre dobrô (§ 298), et dans les substantifs de la série de daru,<br />
s.-cr. dâr, avec la métatonie sur intonation rude de s.-cr. sin et<br />
zîv (§ 103). Cette métatonie d'anciens oxytons confirme que les<br />
dérivés en -ru sont dans l'ensemble de vieilles formations du slave<br />
commun, et elle contribue à les distinguer des thèmes d'intonation<br />
rude à finale -ru qui gardent leur intonation, comme syru, s.-cr.<br />
sïr, dont l'analyse en sy-ru est des plus douteuses. Toutefois,<br />
l'adjectif slaru, qui ne prête pas au même doute, est paroxyton<br />
avec l'intonation rude, s.-cr. stâr, de stàti.<br />
§ 1116. Suffixe -ro. — Plusieurs substantifs en -ro sont simplement<br />
des adjectifs neutres substantivés, ainsi v. si. dobro « le bien,<br />
la richesse », r. dobrô, s.-cr. dobro, etc. ; de même v. si. vedro<br />
«beau temps», r. vëdro, tch.yedro «forte chaleur», qui n'est que<br />
le neutre de l'adjectif s.-cr. vëdar, etc.<br />
Le slavon jçdro « noyau », r. jadrô, pol. jqdro, tch. jâdro, slov.<br />
jédro (s.-cr. jézgra, § 1117), est en regard de l'adjectif s.-cr. jédar<br />
«compact», bulg. édâr « gros » (§ 1112).
640 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Sans rapport avec un adjectif, on a :<br />
v. si. jadra «sein», plur., vû-nëdra (§ 75), r. nédro, pol. niadro,<br />
s.-cr. njëdra, plur., etc., à initiale ë- ambiguë ; le plus plausible est<br />
qu'on a affaire à un dérivé en -ro, au sens de partie renflée du<br />
corps, de la racine *oid- « s'enfler » qu'on a moins de peine à<br />
retrouver ici que dans jadu « poison » (§ 785). Un autre mot est :<br />
v. si. jadro « voile de navire », qui traduit aussi ÎCTTOÇ « mât »,<br />
mais par confusion avec Êerrtov « voile », s.-cr. jëdro de ëdro, dial.<br />
jïdro, cak. jàdro comme slov. jadro, et pol. ancien et dial. jadro<br />
« filet (pour les poissons, les oiseaux) » : si l'on écarte le sens « mât »,<br />
qui est une erreur, il n'y a pas de raison de ne pas faire de jadro<br />
« sein » et « voile » à l'origine un même mot.<br />
V. si. jçtra (Gr. Naz.) « foie », plur., h. sor. jatra et slov. jçtra,<br />
tch. jdtra et fém. plur. jdtry, s.-cr. jêtra, fém. sing. L'aspect est<br />
d'un dérivé en -Ir- de la préposition « dans », comme dans çtrï<br />
« à l'intérieur », çtroba « entrailles » (§ 1113). Mais il y a désaccord<br />
entre les initiales jçtr- et çtr-, et on doit penser à une autre origine,<br />
la conservation du nom indo-européen du « foie », lat. jecur, etc.,<br />
en baltique lit. jâknos, d'un pluriel neutre *jeknâ (§ 176) : le slave<br />
aurait gardé la flexion alternante *jekr : *jekn-, en contaminant les<br />
deux formes en *jenkr-, puis jçtr- par attraction de çtr-,<br />
V. si. (j)uiro «matin», r. ûtro, s.-cr. jMro, slov. jûlro (§ 76) :<br />
le correspondant est l'adjectif lit. jautrùs « sensible, vigilant »,<br />
lette jàutrs « allègre, éveillé », sur lit. jaùsli « sentir », juléli « veiller »,<br />
v. si. o-slutiti «percevoir», s.-cr. cûtjeti (§ 610) ; la brève de s.-cr.<br />
jMro n'indique pas une intonation rude, mais c'est un abrègement<br />
qui doit provenir de l'emploi du mot dans des locutions adverbiales<br />
comme v. si. za utra « au matin, demain », r. zdvtra.<br />
Slavon pçlro, pol. piçtro « étage » et tch. patro, r. dial. pjatrô<br />
(pjdler) « saillie du toit du grenier à foin », s.-cr. dial. pëtar (pëtar)<br />
« grenier sous le toit », slov. pçier et plur. pçtra (pitre) « comble<br />
d'une grange » ; la forme ancienne *prçtr- est conservée par pol.<br />
dial. przçtr, h. sor. pfatr « comble de la grange » : c'est un dérivé en<br />
-ro du thème prçt- (§ 808) de prçlali « cacher, ranger » (§ 553).<br />
R. dial. pûzdrô « panse (d'une bête) », ukr. et bl.-r. puzdrô<br />
« vessie » et « bourses, testicules », s.-cr. puzdro et pùzdra « verge<br />
(des quadrupèdes) », pol. puzdro « étui » et « scrotum, testicules<br />
(du cheval) », tch. pouzdro « étui » : sûrement sur un thème expressif<br />
puz- qu'on a dans r. pûzo «panse» et dans puzijr' M bulle», etc.<br />
(§ 1131), et en baltique dans lit. pùzas « au gros ventre » et peut-être<br />
pûzù, pùzti « devenir débile ».<br />
V. si. rebro « côte », r. rebrô, s.-cr. rëbro, etc. : apparenté au<br />
germanique *reb- dans v. h. a. rippa « côte », v. sax. ribbi, neutre,<br />
de *rebya- ; et voir *rebrï, § 1118.
[§<br />
11 35]<br />
SUFFIXES EN -S- ET -X- 641<br />
V. si. vëdro « cruche, seau », r. vedrô, pol. wiadro, slov. védro,<br />
s.-cr. dial. vijèdro. Le grec ûSpîa « vase d'eau » fait penser à un dérivé<br />
du nom de l'« eau », mais ce dérivé est *udrô-, si. vydra « loutre »<br />
(§ 1117), et c'est un autre rapprochement qu'il faut chercher, avec<br />
lit. vëdaras « ventre », v. pr. weders, et skr. udàram, dérivé en *-ero-<br />
(§ 1119) d'un thème ud- qui en sanskrit pourrait être adverbial,<br />
ud- « vers le haut, vers le dehors », got. ût ; la forme à vocalisme<br />
long vêd- du balto-slave serait celle d'un ancien parfait (§ 381) sur<br />
un verbe tiré de cette racine.<br />
Ne se laissent pas analyser :<br />
v. si. pyro (Upir') « épeautre », slov. pira, pir, s.-cr. pïr, tch.<br />
pyr, et lit. pûraï « blé d'automne », gr. 7tûpoç « blé » ; voir *pyrïjï<br />
« chiendent », § 146 ;<br />
v. si. sïrebro «argent», r. serebrô (§ 71), etc. : mot de l'aire<br />
germano-balto-slave, v. pr. sirabla-, lit. sidâbras, got. silubr, sans<br />
doute emprunt à une langue inconnue, les autres langues indoeuropéennes<br />
présentant divers mots sur un même thème *arg-<br />
« brillant », lat. argentum, etc.<br />
La finale -ro apparaît encore dans l'adaptation de mots<br />
d'emprunt ; ainsi tch. futro « doublure » de l'allemand Fuîter ;<br />
lâlro et lâtr « brasse » et « corde de bois », pol. iatr, de v. h. a.<br />
lâfîer, lâchter. Le serbo-croate sïdro « ancre » est le grec a'i$Y)poç<br />
« fer », mod. aiSspov.<br />
§ 1117. Suffixe -va. — Outre sestra « sœur », ancien athématique<br />
(§ 198), on a une liste assez longue de substantifs en -ra :<br />
v. si. bedra « cuisse », r. bedrâ et bedrô, v. pol. biodra, sing. et<br />
mod. biodro, plur. biodra, v. tch. bedra, sing. et mod. bedra, plur., etc.<br />
Un rattachement à lat. fémur, athématique en -r : -n-, apparaît<br />
impossible à justifier, tandis qu'on a le thème bed- en baltique dans<br />
lit. bëdrè « fosse », lette bedre, sur lit. bedù, bèsti « piquer », lette<br />
bedu, best «creuser», et slav. bod-, lat. fodiô «je fouis» (§ 430) ;<br />
le mot slave qui signifie « cuisse, hanche » a donc signifié le creux,<br />
le pli de l'aine, et il conserve un sens ancien de la racine verbale.<br />
V. si. igra «jeu» (Pand. Ant., Gr. Naz.) à côté de igrï (Supr.,<br />
Euch.), avec verbe igrati « jouer, danser » (§ 811) ; bulg. et r. igrâ,<br />
slov. igra, tch. (j)hra, pol. gra, donc de * jïgra (§ 63), sur un thème<br />
*ig- qu'on trouve dans skr. éjati «il se met en mouvement»;<br />
le doublet igrï : igra doit indiquer comme base un adjectif en -rû<br />
(§ 1113) avec abstrait en -ri, ta.ûdis que igra est le postverbal plus<br />
banal du dénominatif igrati.<br />
Slavon ikra « œufs de poisson », r. ikrâ, pol. ikra et kachoube<br />
kro, tch. jUwa, slov. ikra et s.-cr. Ikra ; en baltique lit. ikrai, masc.
642 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
plur., lette ikri, qui ne doit pas être un emprunt au slave. Et<br />
deux autres mots :<br />
r. ikrâ « mollet », pol. dial. ikra, ikro, kachoube kro, slovaque<br />
ikra, et v. pr. yccroy, plur., v. lit. ikrai ;<br />
v. r. ikra, kra « bloc de glace flottant », ukr. ikra, pol. et tch.<br />
kra ; et Ham. 479x, 7,10 kra vieux-slave ou vieux-russe, en regard<br />
de gr. -rp^a qui désigne ici un bloc de glace détaché.<br />
Ces trois mots n'en font sûrement qu'un, *jïkra, qu'on n'analyse<br />
pas ; un rapprochement avec l'irlandais iuchr- « œufs de poisson »,<br />
d'un athématique *ik v ôr, n'a rien d'assuré.<br />
V. si. iskra « étincelle », r. iskra, s.-cr. Iskra, pol. iskra et skra ;<br />
sor. skra remanié sur le verbe, bas-sor. skris se de *skH~; slov.<br />
iskra et adj. isker « ardent », pol. jaskry « aux couleurs voyantes »<br />
(§ 1113). De *jïskra, sur le thème *isk- et variante *aisk-, qu'on a<br />
dans jasnù «clair», lit. âiskus, iskùs (§ 1070).<br />
V. si. méra « mesure », r. méra, s.-cr. mjëra, sur la racine *më-<br />
(§ 98) de véd. mâli « il mesure », mâtram « mesure », etc.<br />
R. mjazdrâ (mezdrâ) « côté de la chair d'une peau », verbe<br />
mjazdrit' « écharner », slov. mçzdra « intérieur d'une peau » et<br />
« peau sur le lait, sur une cicatrice », tch. màzdra et s.-cr. mézdra<br />
« membrane » ; la forme vieux-slave attestée est mçzdra (J. Ex.)<br />
«membrane», à suffixe -ja (§ 1023). Rapprocher le mot de lat.<br />
membrâna peut convenir pour l'initiale, mais n'explique pas la<br />
finale. Il faut penser à un composé *mçs-dr(j)a (§ 1216) de mçso<br />
« chair » et dere- « déchirer », -dr- (§ 728).<br />
V. si. sçdra « caillot (de sang) » chez Théodoret, Ps. XV, 7, citant<br />
Luc, XXII, 44 (Év. kaplja) ; tch. sddra « gypse, plâtre », s.-cr.<br />
sëdra « tuf, stalactite » ; et pol. zendra « mâchefer ». Il ne saurait<br />
s'agir d'un dérivé du thème sëd- « s'asseoir, se poser », dont la forme<br />
sçd- est uniquement celle du présent à infixé nasal : c'est un<br />
emprunt ancien au germanique *sendr-, v. h. a. sintar « scorie »,<br />
ail. Sinter « stalactite » et « mâchefer ».<br />
S.-cr. vâtra « feu, foyer », tch. vatra, ukr. vdtra et pol. watra :<br />
mot sûrement ancien, mais qui est mal conservé dans les langues<br />
slaves, où il n'est usuel qu'en serbo-croate, et qu'il est difficile de<br />
rapprocher de v. si. vûtrï « forgeron » (§ 1118) ; il peut s'agir, malgré<br />
le v- initial (§ 77), d'un emprunt à l'iranien, av. âlar- « feu », persan<br />
âdar.<br />
V. si. vëra «foi», r. véra, s.-cr. vjèra, etc., et lat. uërus «vrai»<br />
(§ 750), inanalysable.<br />
Tch. dial. vitra «lien (de bouleau)» et «badine», et slov. vitra<br />
« rameau d'osier » (pour tresser des corbeilles) à côté de dial. vîtva<br />
et vita, et de pol. witwa « osier » (§ 1185) : sur le thème élargi vitde<br />
vi- «tresser», comme dans vitïlu «vis » (§ 1055).<br />
Slavon vydra « loutre », r. vydra, s.-cr. vïdra, etc., et lit. ûdra :<br />
«si
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 643<br />
sur *ûd- (§ 708), en regard de ud- dans gr. 5§pa «serpent d'eau,<br />
hydre» (§ 176), d'un adjectif *udro-, skr. udrdh, qui doit être<br />
le dérivé en -ro- du thème ud- plutôt que celui du nominatifaccusatif<br />
gr. ûScop.<br />
Pour jara « printemps », voir jarï. Le slavon bava « marais »,<br />
s.-cr. bàra, slov. bdra, slovaque bara, etc., est inexpliqué.<br />
La finale -ra a eu comme finale sa productivité dans les langues<br />
slaves, ainsi slov. vîhra pour vlher de vixùru, et c'est même une<br />
sorte de suffixe dans slov. dial. zîgra « allumoir » sur éig- de<br />
(v)zigati : il doit s'agir de l'adaptation de la finale -er de l'allemand,<br />
qui est suffixe.<br />
On trouve des finales expressives -dra, -Ira, etc. : slov. kalûdra<br />
«mauvaise piquette, vin trouble» sur kaliti «troubler» (§ 788),<br />
klobûstra « mauvais chapeau, klobûk », etc. ; s.-cr. jézgra « noyau »<br />
et ancien jezgro pour jçdro (§ 1116).<br />
§ 1118. Suffixe -ri. — On a les masculins :<br />
v. si. veprï «verrat, sanglier», r. vepr', gén. véprja, etc. (§ 171),<br />
et lette vepris, avec comme correspondants v. h. a. ebur, lat.<br />
aper ; inanalysable, de même que :<br />
v. si. *ggrï dans plur. ugreve « coquilles » Ham. 5525, composé<br />
ugrïnoobrazïnu (§1217); r. ûgor', gén. ugrjd, «bouton (sur le<br />
visage)», mais ukr. vuhôr, gén. vuhrd, tch. uher, gén. uhru, pol.<br />
wqgr « bouton » et « grain de ladrerie du porc », diminutif bulg.<br />
vâgaréc « larve, œstre du bœuf », s.-cr. ùgrk de plur. ùgrei, slov.<br />
çgrc, ogre ; le mot se retrouve dans v. h. a. angarn larve, charançon »,<br />
et le baltique a lit. dnkstara, fém., et inkstiras, masc., «bouton,<br />
œstre, trichine » ;<br />
v. si. vutrï (J. Ex.) « forgeron », mot isolé, sauf la correspondance<br />
exacte avec v. pr. wutris à s côté de autre « forge » ; sans rapport<br />
concevable avec vatra « foyer, feu ».<br />
Les féminins sont :<br />
v. si. dïbrï « ravin », r. debr', v. pol. debrz et dziebra, mod. debra<br />
«ravin boisé», tch. ancien debr «ravin, vallée»; de dubrï (§ 61),<br />
sur le thème dub- de lit. dubùs « profond », dùbli « devenir creux »,<br />
got. diups « profond », si. dûno « fond » (§ 1074), avec des dérivés en<br />
-r- dans le lette dubra « mare », dumbrs « marécageux », et le slave<br />
dçbru «forêt» (§ 1115);<br />
v. si. igrï « jeu », voir igra ;<br />
slavon (russe) jarï « blé de 'printemps », à côté de jara « printemps<br />
», r. jar', v. pol. jarz et masc. jar ; v. tch. jef, mod. jaro et<br />
slovaque jar, fém. ; slov. jdr, fém., s.-cr. jdr, masc., « printemps »<br />
(jara « forte chaleur » est sur jdriti, § 790) ; avec un adjectif r.
644 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
jdryj « de printemps », pol. jary « de cette année » (§ 1112). Vieux<br />
mot indo-européen, av. yâr- « année », neutre comme got. jër, gr.<br />
ôpâ « temps, saison », lat. hôrnus « de l'année », ancien athématique<br />
adapté en slave en jarï et jara, et dérivé thématique *yâro-, adj.,<br />
d'où l'abstrait jarï « (blé) de printemps ».<br />
V. si. nozdri «narines», fém. plur. (§ 213), r. nozdrjâ, sing.,<br />
sur plur. nôzdri, tch. nozdra, v. pol. nozdrza, plur. -drze, et mod.<br />
nozdrze, neutre sing., s.-cr. nozdra et usuellement nôzdrva (§ 205) :<br />
le mot s'analyse comme mçzdra, en composé nos- et dr- « fente du<br />
nez, naseau» (§ 1216), le lituanien nasral « museau » devant être<br />
un emprunt au slave (§ 32) ;<br />
slov. réber, gén. rçbri, « pente d'une colline », en serbo-croate<br />
rebro brda qui accuse le lien avec rebro, et le mot apparaît surtout<br />
dans des locutions adverbiales vrçber, krêbri : donc formation sans<br />
doute secondaire et qui n'autorise guère à remonter à un adjectif<br />
*rebru ;<br />
r. kostér' « brome », plante (folle avoine), et « barbe d'épi », et<br />
kostrd, kostérja, pol. kostra « chènevotte », etc. ; avec des formes<br />
variées dans les langues slaves, ainsi s.-cr. koslrëi « poil (raide) »<br />
(§ 1173) ; mot qui peut avoir été une formation en -rï, et un dérivé<br />
de kostï au sens d'« arête », mais dont rien ne garantit ni l'origine<br />
ni l'aspect initial.<br />
Pour le tchèque moderne kostra « squelette », c'est un mot<br />
fabriqué ; et pour r. vôzgri «morve», voir § 1115.<br />
SUFFIXES EN -er-, -or-, ETC.<br />
§ 1119. Suffixe -eru. — Un suffixe *-ero-, qui a l'aspect d'un<br />
dérivé thématique d'athématique en -r-, avec le vocalisme -equi<br />
est ancien (§ 823), a joué un rôle important dans les langues<br />
indo-européennes, surtout sous la forme -tero- qui marquait<br />
l'opposition entre deux termes, et il a fourni un des types de<br />
comparatifs. En balto-slave, ces comparatifs ont disparu, et ce<br />
n'est que dans l'élément de base *-ë- des comparatifs longs du<br />
slave qu'on en peut retrouver le souvenir (§ 287). Mais, en dehors<br />
du comparatif, il en subsiste des vestiges, avec flottement de -eret<br />
-or- en slave (§ 80) :<br />
dans les adjectifs pronominaux (§ 262), koloryi «lequel (de<br />
plusieurs) », lit. kat(a)ràs, skr. katardh, et v. si. jeteru « un certain »,<br />
skr. yatardh. ; <<br />
dans les nombres ordinaux (§ 312), l'isolé vutoru «deuxième»,<br />
lit. ant(a)ras, got. anpar «autre».<br />
Le slave et le baltique ont par ailleurs développé une série de
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 645<br />
nombres collectifs (§ 315) en si. -er-, -or-, lit. -eri : v. si. pçtoro et<br />
pçlero, etc., dont le point de départ est si. ëetvero, lit. ketveri,<br />
dérivé thématique en -o- de l'athématique *k w etur-, si. ëetyre, lit.<br />
kelurl (§ 304).<br />
Le grec a un type de noms et surtout d'adjectifs en -spoç,<br />
productif à date ancienne :
646 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
bien avec celui du slave jazu « barrage, digue », dont le vocalisme<br />
long peut être celui du postverbal d'un factitif en -ili. Ainsi jezer<br />
serait un adjectif en *-ero- substantivé, dérivé au sens d'« eau du<br />
barrage ». Le rapprochement avec l'arménien ezr « lisière, frontière »<br />
pourrait faire supposer aussi le dérivé thématique d'un athématique<br />
en -r : -n- sur racine *egh-,<br />
sëveru « nord », r. séver, etc. ; lit. siâurè « nord », siaurys « vent<br />
du nord », adj. siaurùs « tempétueux, violent », sur une racine<br />
*këur~ qu'on retrouve dans lat. caurus « vent du nord-ouest » et<br />
v. h. a. skur, masc., « tempête ».<br />
stezeru rendant « base » (Supr.), « borne » (Gr. Naz.) ; s.-cr. stôzêr<br />
« pieu au milieu de l'aire, piquet de la meule », et « pivot, gond »<br />
comme slov. stezér ; bulg. stézer, r. dial. siozâr « pieu de la meule » ;<br />
h. sor. scezor «mât», tch. sloMr et stëzen (§ 1092), et voir stëzej<br />
« gond », § 1032. En baltique lit. stâgaras, stegerys « tige de plante » :<br />
sur le thème steg- « piquer » de v. si. stoyu « meule » (§ 733).<br />
veëeru « soir », r. véëer, etc., et lit. vâkaras ; ressemblance lointaine<br />
avec lat. uesper, gr. (f)soTOpoç « du soir », adj., èauépoc « soir ».<br />
Pour l'adjectif mater-, voir matoru, § 1123.<br />
§ 1121. Dans les langues slaves. — Un substantif "jïveru,<br />
non expliqué, est restitué par ukr. iver « copeau » (r. iveren', gén.<br />
-rnja, « éclat de bois », § 1092), pol. wiôr, slovaque iver, bulg.<br />
iver, s.-cr. Ivër, slov. ivqr.<br />
Un autre mot sûrement ancien est :<br />
v. pol. wiewiôr « écureuil », mod. wiewiôrka et ailleurs v. r.<br />
vëverica, s.-cr. vjëverica, tch. veverka de v. tch. vevericë (§ 886) ;<br />
en baltique v. pr. weware, lit. vêveris, acc. vëveri, qu'on retrouve en<br />
celtique dans le gallois wywer, avec une forme proche dans lat.<br />
uïuerra « furet, belette » : l'aspect est d'un mot à redoublement<br />
expressif.<br />
Et voici d'autres mots en -er, sans chercher à en dresser une<br />
liste complète :<br />
r. kîver «shako» (depuis le xiv e siècle), pol. kiwior, sûrement<br />
emprunt à une source non déterminée ;<br />
ukr. ëepéry, plur., « bois fourchu, sorte d'araire », sur r. dial.<br />
ëop « sarment », bulg. cep « branche », inexpliqué ; et s.-cr. ëepérak<br />
« empan », c'est-à-dire « fourche des doigts », à côté de ëëpûr, ëàpur<br />
« souche » (§ 1132);<br />
pol. wisior « ce qui pend, houpette, breloque », sur wisiec ;<br />
— szczypior « ail », sur szczypac « pincer, piquer » ; — kosior « pelle<br />
à feu », voir kosoru ;
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 647<br />
s.-cr. piller « treillis, clayonnage », et slov. pletçr (gén. -rja) et<br />
pletdr « panier » (§ 1128), sur plele- « tresser » ;<br />
s.-cr. kùcer « cabane » sur kuca « maison » ; — mlijècer<br />
« euphorbe », plante à lait ; — et dérivé cupérak « touffe de cheveux »<br />
en regard de ëùpati « arracher (les poils) » ;<br />
slov. cepèr « éclat de bois » sur cépiti « fendre » ; — stebèr, voir<br />
sloborù.<br />
Un mot présente un intérêt particulier :<br />
pol. gqsior «jars», h. sor. husor, v. tch. huser et mod. houser,<br />
bulg. gâser, slov. sgosçr (gén. -rja secondaire), à côté de r. gusâk,<br />
s.-cr. gûsak (§ 861). La finale de ce dérivé de gçsï est sans rapport<br />
avec celle de lat. anser « oie », mais elle est celle de m. h. a. ganser,<br />
et le nom du « jars » apparaît ainsi pris à l'allemand comme celui de<br />
l'«oie» (§ 171).<br />
L'allemand présente le suffixe -er de nom du mâle dans v. h. a.<br />
tûber, mod. Tauber « pigeon mâle » sur Taube, m. h. a. ganser, mod.<br />
Kaler « matou » en face de Katze, Puter « dindon » sur Pute « dinde » ;<br />
suffixe élargi en -erieh dans mod. Gânserieh, Tâuberieh, et Enterieh<br />
« canard » sur Ente.<br />
Ce suffixe -er de l'allemand a été étendu en domaine slave à :<br />
pol. kaczor « canard », h. sor. kaëor, tch. kaëer, sur kaÔ-, pol.<br />
kaezka « cane », kaezç « caneton » ; et, avec extension en polonais<br />
de -ierz (§ 1130) :<br />
pol. malpierz « singe mâle », sur malpa « singe, guenon ».<br />
Mais le nom du « matou » est en -ur en polonais et en tchèque<br />
(§ 1132).<br />
§ 1122. Finales -era, -erï. — Y. si. pestera « caverne », r. peëôra,<br />
bulg. pésterd, et pol. pieçzara, mais emprunt (dès le xvi e siècle)<br />
au russe peëëra : élargissement de v. si. pestï « four » et « caverne »<br />
(§1169);<br />
slavon nestera «nièce», v. pol. nieseiora, s.-cr. dial. nèstera, qui<br />
doit être comme ses ira d'origine athématique (§ 198), sur le thème<br />
ne(p)l- « neveu » (§ 35) ;<br />
slavon dëverï « frère du mari », r. déver', s.-cr. djëvër, etc., et lit.<br />
dieveris, également ancien athématique, gr. SÔCYJP (§ 198) ;<br />
pol. wiçcierz « nasse », r. vjâter' et venter' : emprunt à lit. vénteris.<br />
Pour la finale -ierz fréquente en polonais, et d'origines diverses,<br />
voir § 1130.<br />
/<br />
§ 1123. Suffixe -oru. — En dehors de vûtoru «deuxième», de<br />
kotoryi « lequel » et des nombres collectifs de la série de ëetvoro, on a<br />
l'adjectif :<br />
1
648 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
slavon matoru et v. si. mater- dans materïstvo « vieillesse »<br />
(§ 935) ; r. materôj « grand, gros » et ukr. mdteryj « avancé en âge »,<br />
s.-cr. mâtor « vieux » et bulg. mâlor, slov. matçr (v. tch. malorny) :<br />
l'aspect est d'un dérivé thématique de l'athématique mater-<br />
« mère », comme nestera « nièce » ; l'évolution du sens est semblable<br />
à celle de lat. mâleriês « matériau, matière », sur mater désignant<br />
la « branche mère » et le tronc de l'arbre.<br />
On doit avoir un adjectif *brëgoru dans le moyen-bulgare<br />
brëgoryç « oiseaux de rivage », bulg. mod. bregâr et s.-cr. bregùnica<br />
« hirondelle de rivage ».<br />
Les substantifs en -oru sont en vieux slave et dans les langues<br />
anciennes :<br />
v. si. avorû dans l'adjectif avorovu «de platane» (§ 962), s.-cr.<br />
jâvor « érable », r. jâvor « platane, érable des montagnes », etc. :<br />
emprunt au germanique, v. h. a. âhorn, avec un remaniement en<br />
slave par étymologie populaire sur le thème av- de aviti « manifester<br />
» ;<br />
v. si. govoru « bruit, rumeur », verbe govorili, r. gôvor « le parler »<br />
et de même dans les autres langues (§ 818), sauf pol. gwar (§ 1128),<br />
sur thème *gu-, gov- ;<br />
slavon kosoru « faux », s.-cr. kosor, etc. (§ 1119) : sur kosa « faux »,<br />
mais r. kosyr' «couperet» (§ 1131) peut être sur kosôj «(couteau)<br />
courbe » ;<br />
v. si. mrakoru « brouillard », ou -ora, dans un exemple<br />
d'Athanase, III, chap. 42, vu mrakorë sgste CTXOTOSIVIÔVTSÇ, élargissement<br />
de mraku, cf. s.-cr. tmora (§ 1125) ;<br />
slavon stoborû « colonne », stoborije (xi e s.) « colonnade » (§ 925),<br />
s.-cr. dial. st'ôbor (stobor) «enclos entouré de pieux», bulg. stobôr<br />
«palissade, grille», et slov. slebèr «colonne» (§ 1115), et s.-cr.<br />
stàbar « tronc, arbre » variante de stdblo, qui souligne un parallélisme<br />
avec v. si. stïblo « tige » (§ 1052) ; en baltique lit. stâbaras « branche<br />
d'arbre sèche », sur stàbas « poteau, colonne », slebëli-s « être raide »,<br />
lette stebs « mât » ; en germanique v. isl. stafr « bâton, poteau »,<br />
v. h. a. stabên « être raide » ;<br />
slavon et v. r. toporu « hache », r. topôr, gén. topord, pol. topôr,<br />
slov. tôpor, etc. : emprunt à un iranien *lapara-, comme l'arménien<br />
tapar. Un autre emprunt est :<br />
v. si. mramoru (J. Ex.) « marbre », r. mrâmor et v. r. moromorû,<br />
etc., au grec puxpfAapoç.<br />
Pour le slavon lëvorû « plante vénéneuse », c'est sûrement le<br />
grec sÀ>i§opoç non traduit et altéré.
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 649<br />
§ 1124. Dans les langues Slaves. — Peuvent être anciens aussi :<br />
slov. bûhor «bulle d'eau», sur bux- «s'enfler» (§ 759), qui se<br />
retrouve dans tch. bouchor, dial. bouchor, comme variante de v. tch.<br />
puchr « fruit gâté » (§ 1115) ;<br />
tch. hrachor « gesse », s.-cr. gràhor « vesce, gesse », slov. grâhor<br />
(et -ora), élargissement de s.-cr. gràh, etc. « pois » ;<br />
bl.-r. môtor « corde » et r. motyr' « tringle » (§ 1131), sur r. molàl'<br />
« pelotonner » ; et ukr. motôryj « habile » pour r. motôrnyj, tch.<br />
nemotorny « maladroit » ;<br />
tch. sochor « levier » comme r. dial. soxir' « étai du coutre de<br />
l'araire », élargissement de v. si. soxa « araire ».<br />
Isolément dans chaque langue slave, on a :<br />
pol. siqpor « pilon », élargissement de stypa, ail. Stampfe (§ 764) ;<br />
— komor « moustique » pour komaru (§ 1128) ; — znachor « devin,<br />
guérisseur», du russe znâxâr', v. r. znaxorï (§ 1126) ;<br />
tch. bachor « panse », voir bachor ;<br />
slov. bôdor « piqûre » ; smogôr « loupe des arbres » et « bouton<br />
de chaleur », sur une variante smog- du thème smag- ( § 787) ;<br />
sludor (gén. -ôra) « sol peu profond » ; zlâmbor « creux dans un arbre,<br />
maladie du bois » ; et blâgor « vœu de bonheur », qui est la locution<br />
blâgor — blago ze (§ 16) « bonheur à » substantivée ; la distinction<br />
est précaire en slovène entre le type sur -or, gén. -ora et le type<br />
mouillé -or, gén. -orja (§ 1126), et l'on a : mrâmor « courtilière »<br />
et « scrofule », gén. -ra, et var. brâmor, gén. -rja ; sivçr « homme<br />
aux cheveux gris », et fém. sivôra, et suhôr « homme maigre »,<br />
gén. -rja ;<br />
s.-cr. làhor, làhôr « brise », et verbe lahôriti, sûrement sur le thème<br />
lah- de lahk-, d'où lâk, slov. lâhk-, v. si. lïgûku «léger» (§ 986) ;<br />
tnfmôr « murmure », verbe mfmorili ; plijèvor « ce qu'on sarcle,<br />
mauvaise herbe », sur plijèvë- ; puhor « cendre légère » (pûhati<br />
« souffler ») ; sûskor « feuillage sec » (suskali « bruire ») ; zâmor<br />
« murmure, bruissement », verbe éàmoriti ; zûbor « susurrement »<br />
et zuber, verbe zuboriti et zuberiti, sur un thème expressif à variante<br />
zup- dans v. si. (J. Ex.) zupelïcï, zupelica « scarabée » ; — plïjenor<br />
« plongeon », oiseau, iïmor « rocher », inexpliqués ; trâtor « amarante<br />
», sans doute emprunt à ital. tartaro « tartre » et « lie-de-vin »,<br />
désignant la couleur rouge pourpre de la fleur. En serbo-croate,<br />
-orû, -or, et -orï, -orj- (§ 1126), sont complètement confondus.<br />
§ 1125. Suffixe -ora. — V./sl. kotora «dispute» est postverbal<br />
de kotorati sg (§ 817).<br />
Tch. bâxora «conte de fée» (usuellement bdchorka), et v. tch.<br />
(xv e s.), est le postverbal d'un verbe en -oriti (§ 1126).
650 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Slavon komora, voir v. si. komara (§ 1129).<br />
R. kokôra, et kôkor', fém., « arbre avec ses branches dans le lit<br />
d'une rivière », pol. dial. kokora « bois tordu », slov. dial. kokora<br />
« touffe de cheveux », et en slavon kokor(j)avu « hérissé » (§ 993).<br />
Pol. sikora « mésange », sor. sykora et tch. sykora, sur pol. sikac<br />
et sykac « siffler », tch. sykati.<br />
R. detvorâ « les enfants », collectif, ukr. ditvôra, sur r. detvâ<br />
«couvain» (§ 1185).<br />
Ukr. butôra « bagage de route », slov. bûtora « fagot », et s.-cr.<br />
ancien bulura « charge », est un emprunt au hongrois bûlor.<br />
Pol. (o)sokora « peuplier noir » est pris à r. ôsokor'.<br />
Slov. kozçra « corbeille » est variante de kôzulj, kozôl (§ 1062).<br />
S.-cr. tmàra « obscurité, temps sombre » a la finale de v. si.<br />
mrakor(a) (§ 1123), mais le mot n'est attesté qu'à date récente, et<br />
l'adjectif est tmûran (§ 1133), le verbe na-tmûriti se.<br />
§ 1126. Suffixe -orï. — V. si. *çyorï (Ham. ugorï) «anguille»,<br />
r. ûgor', pol. wqgorz, tch. ûhor, slov. oggr, gén. -rja, s.-cr. ûgor<br />
« congre » ; et lit. ungurys, v. pr. angurgis, sur lit. angis « serpent »,<br />
si. *çzï, pol. wqz (§ 77).<br />
V. si. znaxor- dans znaxorije « signe de reconnaissance, yv^piaux »,<br />
Athan., II, chap. 31 ; v. r. znaxorï «qui connaît», et znaxarï,<br />
r. mod. znâxâr' « guérisseur, sorcier », d'où pol. znachor (§ 1124).<br />
R. dial. bàxor', bàxar' « conteur, bavard », verbe baxôrit'<br />
« bavarder », et tch. bâchora « conte », s.-cr. bàhôrje « incantation »,<br />
verbe bâhoriti « faire des incantations ».<br />
Slavon duxorl « putois », r. (t)xor', pol. tchôrz, slov. dehôr, gén.<br />
-rja, etc. : sur duxnçii (§ 493) au sens de zadùxnçti « sentir<br />
mauvais ».<br />
Pol. piskorz « loche », tch. piskor, slov. piskçr, gén. -rja, « lamproie,<br />
loche », s.-cr. piskor (r. piskâr' « goujon »), expliqué comme<br />
dérivé de pisk- «siffler» (§ 561), de même en baltique lit. pyplys<br />
« loche », et lette pïka, pïksta, de lit. pypti et lette pïkslêt « siffler »,<br />
parce que la loche absorbe de l'air et le rejette quand on la sort<br />
de l'eau, comme le grondin.<br />
R. ôsokôr', fém., « peuplier noir » et ôsokor, masc., bl.-r. jasokor,<br />
pol. (o)sokora, expliqué comme composé de osa « tremble » (§ 1045)<br />
et de kora « écorce ».<br />
Le slavon Içkorjavu « tortueux » (§ 993) suppose un élargissement<br />
en -orj- du thème Içk- (§ 763).<br />
Le vieux-tchèque bachor « gros intestin », mod. bachor « panse »,<br />
est inexpliqué ; pour bouchor « fruit gâté », voir v. tch. puchr<br />
(§ 1H5).<br />
Slov. lâpor, gén. -rja, « marne », sans doute sur Idpati « happer » ;<br />
sîpor «sable marneux, gravier» (et siper, gén. slpra), sur sipati<br />
C
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 651<br />
«répandre», adj. sipek «friable» (§ 986) ; sladkôr «sucre», forgé<br />
sur slâdek, sladkâti « sucrer » ; brâhor « goître », stipor (et stiper,<br />
gén. stipra) « tussilage, pas-d'âne », inexpliqués. Et flottements de<br />
-or, gén. -ora, et -or, gén. -orja, et confusion en serbo-croate (§ 1124).<br />
L'importance des divers suffixes en -or- se marque encore dans<br />
leurs dérivés comme v. si. znaxorije, et le petit type verbal de v. si.<br />
govoriti, r. baxôrit', s.-cr. lahôriti (§ 1124), parallèle à -ariti (§ 852).<br />
§ 1127. Suffixe -u.ru. — Un élargissement en *-uro- du suffixe<br />
*-ro- apparaît en grec surtout dans un type d'adjectifs, dérivés<br />
de thèmes en -u-, et aussi d'autres thèmes : Atyùç et Aiyopoç « au<br />
son aigu », etc. Le baltique présente tout un groupe de substantifs<br />
en lit. -uras, surtout à valeur expressive : ainsi bâmburas « bouton »,<br />
lette bumburs « balle », à côté de lit. bumbulas, pol. bqbel « bulle<br />
d'eau» (§ 1059).<br />
En slave, où la distinction n'est plus sûre entre -uru et -ru, on<br />
doit reconnaître -uru dans :<br />
v. si. svekuru «beau-père», qui est skr. çvâçurah, gr. ! (/")sxupoç,<br />
v. h. a. swëhur, lit. sësuras (§ 203) ;<br />
v. si. vixuru (Pand. Ant.) «tourbillon, ouragan», v. r. vixorû<br />
(mod. vixor'), pol. wicher (et wichura, § 1133), s.-cr. vïhâr, slov.<br />
uiher, en baltique lit. viesulas, lette viësulis ; c'est le même mot<br />
qu'on a dans r. vixor, gén. vixrà, « touffe de cheveux », tch. vich(e)r,<br />
slov. viher : sur un thème *weis-, *uiois- qu'on a dans pol. wiecha<br />
« bouchon de paille » (§ 1140) et v. r. vëxutï (§ 189) ;<br />
v. si. xraburu « guerrier, brave », adjectif et substantif, qui est<br />
sûrement un emprunt au germanique, composé à second terme<br />
-buru (§ 274) ;<br />
v. si. bagu.ru « pourpre », sûrement aussi mot d'emprunt. Et de<br />
même le slavon *cîbûru, s.-cr. ëàbar « baquet, cuve », tch. dzber, etc.,<br />
dont le rapport est sûr, sinon clair, avec v. h. a. zwibar, mod.<br />
Zuber.<br />
Les formes temréj et témrivo (§ 1188) «obscurité» du russe<br />
dialectal sont isolées, mais elles indiquent un élargissement du<br />
thème de tïma qui ne peut avoir été qu'en -ur-, en regard de -oret<br />
-ur- dans s.-cr. tmàra et tmûran (§ 1125). Le sanskrit timirdh<br />
« sombre » est, lui, un dérivé en *-ro- sur racine « dissyllabique »,<br />
lit. témti «s'assombrir» d'intonation rude (§ 811). Une forme de<br />
suffixe *-îru parallèle à -uru n'est pas reconnaissable en slave,<br />
et elle n'est pas attestée en baltique, où lit. kibiras « seau » est une<br />
adaptation du slave *cïbûru.
652 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
§ 1128. Suffixe -arû. — Le grand suffixe en -ar- est le suffixe<br />
d'emprunt -ar(j)ï (§ 853), qui a pu se substituer à d'autres finales<br />
en -r- en leur transmettant sa flexion mouillée. A r. znâxâr', bâxar'<br />
pour znaxorï, bâxor' (§ 1126), on joindra le moyen-bulgare<br />
(Manassès) zenxarfu) « amateur de femmes », qui se continue dans<br />
bulg. zenkâr avec remplacement de x par k, et peut-être aussi dans<br />
s.-cr. zènâr avec élimination de x.<br />
Le baltique, en regard de lit. -orius emprunté au slave, ne<br />
présente qu'exceptionnellement une finale -oras. Dans les langues<br />
slaves, -arû se rencontre assez largement.<br />
On mettra à part le russe, où -âr apparaît dans une série de mots<br />
à la place de -âr' attendu (§ 852), ce qui s'explique par l'emprunt :<br />
gusljâr « joueur de gûsli » comme s.-cr. guslâr, mais pol. guslarz ;<br />
ovcâr « berger » comme s.-cr. ovcâr ; stoljâr « menuisier », de pol.<br />
stolarz calquant l'allemand Tischler ; skoljâr « écolier », et ukr. et<br />
bl.-r., du polonais szkolarz, mais v. pol. szkolar, du latin scholâris.<br />
En dehors de ce cas, on trouve :<br />
slavon komarû « moustique », r. komâr, gén. komarâ, pol. komar,<br />
s.-cr. kàmâr, gén. -âra, et slov. komâr (gén. -ârja secondairement) ;<br />
on a le thème kom- dans v. pr. camus « bourdon », lit. kamânê<br />
« abeille agreste » ; et ail. Hummel avec verbe hummen « bourdonner<br />
», et voir si. cïmeljï « bourdon », § 1060 ;<br />
v. r. tovaru « bagages (d'une armée), camp », r. tovâr, gén. -ara,<br />
« marchandise », pol. towar, s.-cr. tovar « charge » : emprunt slave<br />
commun au turc ;<br />
v. r. ogaru « navire (de course) », et on a sûrement le même mot<br />
dans le slavon serbe ogarï « chien courant, lévrier », mod. àgar,<br />
pol. ogar, etc., et tch. ohar : emprunt slave commun au grec ayY a P°Ç<br />
« courrier », pris par le grec au perse. Un autre aspect du nom du<br />
« chien courant » est le grec byzantin et moderne Çayàpi(ov),<br />
s.-cr. zâgar : on en a proposé l'explication par un emprunt au<br />
hongrois az agâr « le lévrier », avec agâr du slave.<br />
Pol. moczar « marécage » et moczara, tch. mocâr (et mocâl) ;<br />
slov. mocvâr (et mocçr, etc.) sur môcve, fém. plur. (§ 1184), s.-cr.<br />
môëâr et mdcvara ; sur moca (§ 1022) et le thème mok-, comme r.<br />
moëâg(a) (§ 1014).<br />
Pol. gwar «le parler», v. si. govoru (§ 1123) ; ciçzar «fardeau»<br />
sur ciçzyc « peser » ; dzwigar « support, poutre maîtresse » sur<br />
dzwigac « porter » ; piçtnar « pièce de bois en saillie » sur piçtno<br />
« marque », mais avec conservation sans doute du sens plus ancien<br />
«éperon» (§ 1079); centnar «quintal», du bas-latin centenarius ;<br />
legar «chantier» adapté de l'allemand Lager, à côté de lagier<br />
(§ 1115), et lewar «levier, treuil» et hewar (hewer) par croisement<br />
du bas-latin levarius et de l'allemand Heber.
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 653<br />
Slov. kotâr et s.-cr. kblâr « district », qu'on rattache à v. h. a.<br />
kalaro « grille, treillage » (marquant une limite de propriété) ;<br />
et slov. hatâr « limite, district », s.-cr. hâtâr, du hongrois hatâr ;<br />
slov. kolobâr (gén. -âra et -ârja) et s.-cr. kolobâr « cercle, anneau »,<br />
sur kolo avec une finale inexpliquée ; slov. lopàr, s.-cr. lôpâr<br />
« pelle à four » à côté de v. si. lopata, par changement ou altération<br />
de finale.<br />
Slov. kùsëar et kùsëer « lézard vert », pour v. si. asteru (§ 1120),<br />
et pletâr «corneille tressée » à côté de pïetçr (§ 1121).<br />
S.-cr. gùsâr et hùsâr, du slavon kurïsarï « corsaire », bas-latin<br />
cursarius ; pol. huzar «hussard», r. gusâr, etc., est un mot tout<br />
différent, emprunté au hongrois huszâr.<br />
§ 1129. Suffixe -ara. •— Finale assez rare dans les langues slaves,<br />
sauf en serbo-croate et en slovène, où -ara est suffixe productif :<br />
Y. si. komara (J. Ex.) « voûte » et slavon komora, r. dial. komôra<br />
« chambre (aux provisions) », pol. et tch. komora, s.-cr. kàmora et<br />
kâmara, du grec xafidcpoc « voûte », lat. camara, caméra « plafond<br />
voûté », puis « chambre ».<br />
Slavon kosara, r. kosâra, slov. kosâra « corbeille », s.-cr. kàsara<br />
« corbeille » et « parc à bestiaux », pol. koszara et koszar « parc<br />
à bestiaux », élargissement de kosï (§ 1020), s'est étendu du domaine<br />
méridional au polonais et au russe.<br />
R. moskarâ « insectes, moucherons », collectif sur môska « moucheron<br />
».<br />
Pol. maszkara « masque », de l'italien maschera ; pieczara, voir<br />
v. si. pestera (§ 1122).<br />
Slov. ovëâra « bergerie » et s.-cr. àvëara, en regard de r. ovcârnja<br />
et pol. owczarnia (§ 1089) ; slov. kocâra et s.-cr. kùcara (et kùcâr)<br />
«cabane», sur *kçlja (§ 1022); slov. pustâra «désert» et s.-cr.<br />
pùstara.<br />
Slov. kozâra « parc à chèvres » ; bokâra « vase renflé » sur bàk<br />
« flanc, panse » (bokàt « renflé ») ; kladàra « bûcher » sur klâda<br />
« bûche » ; punëâra, augmentatif de pûnca « jeune fille » ; etc., mais<br />
vozâra « sillon traversier » est pour (v)zâra, zaôra, postverbal de<br />
za-orâti, vz-orâti (§ 742).<br />
S.-cr. bràsnara «huche», pivara «brasserie», vrelènara «panier<br />
à fuseaux » ; kàrtara « cartomancienne », rèdara « ménagère » (qui<br />
fait le ménage à son tour), mùzara «vache laitière» sur mûzë-<br />
« traire » ; pùhara « vesse-de-loup » (pûhati «souffler, vesser»),<br />
gùzvara « gâteau feuilleté » (gùzvati « froisser, chiffonner », gûzva<br />
« lien, tresse de paille », § 1185), svàstara « pêle-mêle » sur le pronom<br />
svàsta (§ 241); et sur thème en gutturale : dàscara «baraque»<br />
(dàska «planche», adj. dàscan), potàëara «moulin à eau» (pàtok
654 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
« rivière », adj. pôtoënî) ; usiipcara « femme qui vend des beignets »,<br />
féminin de ùsiipëâr, sur ùstipak «beignet» (§ 796). Etc.<br />
Le serbo-croate a d'autre part un type en -arija : lagàrije, plur.,<br />
« menteries », nisiàrija « chose de rien », petljàrija « vie misérable »<br />
[pètljati « vivoter »), sljepàrije « duperies » sur sljèpâr « charlatan »,<br />
tricàrija « inepties » sur Irïce « son » et « vétilles » (§ 878). Est à part<br />
lùdôrije « folies », anciennement -ôrija « fou », sans forme de base<br />
en -or, donc sans doute tiré du thème ludo- de lùdôst, ludovali.<br />
§ 1130. Finales en -ër- et -ir-, — Il s'agit surtout des formes plus<br />
récentes du suffixe -ar(j)ï par emprunt au moyen haut-allemand<br />
-aere et à l'italien -iere (§ 853). Ces formes nouvelles, pol. -ierz,<br />
v. tch. -ief, puis -if, s.-cr. -ïr et -ijer, ont eu leur extension :<br />
tch. kosif, s.-cr. kàsijer et kosïr, pour kosoru « faucille » (§ 1119) ;<br />
s.-cr. vàdijer et vàdïr « étui pour la pierre à aiguiser des faucheurs<br />
», et slov. vodçr, gén. -rja, qui n'est un « étui à eau » que<br />
comme déformation par étymologie populaire de l'italien fodero<br />
« fourreau ».<br />
Le polonais confond en -ierz les finales -erï, -ërï et -irï, et il a<br />
pacierz-« pater (noster) », sziojerz «voile» du tchèque slojif pris à<br />
l'allemand Schleier, faiszerz « faussaire », de v. pol. falszyrz, etc.<br />
On trouve -ëru dans les noms de personnes en -mërû à côté de<br />
-rniru (§ 1230), et dans les composés plus récents de la série de<br />
tch. teplomër «thermomètre» (§ 750), mais pol. eieplomierz.<br />
Pour la finale -ir-, elle se confond avec -yr- dans une bonne partie<br />
des langues slaves.<br />
§ 1131. Suffixe -yrï. — Le vieux slave a la finale -yrï dans des<br />
mots d'emprunt :<br />
p(ù)sal(ù)iyrl tj^aXT^ptov « psaltérion » et «psautier», r. psaltyr'<br />
et psaliir', et pol. psallerz ;<br />
monostyrï et manastyrï [xovaorT^ptov, r. monasiyr', s.-cr. mânastlr,<br />
etc. ;<br />
kratyrï (Pand. Ant.) xpaTvjp « vase à boire » ; et slavon rogostyrï<br />
èpYoccm)pi.ov « atelier ».<br />
Cette finale est donc, à l'origine, proprement celle du grec -vjpà<br />
i dur en grec. Mais elle s'étend :<br />
v. si. plasiyrï « emplâtre » (Pand. Ant., Gr. Naz.), r. piâstyr',<br />
par déformation de gr. sprXaaTpov, lat. emplasirum et latin vulgaire<br />
plastr- dans v. h. a. pflasiar, fr. « plâtre » ;<br />
v. si. pasiyrï «pasteur, pâtre» (et pastuxû, § 1154), r. pdstyr',<br />
tch. pastyr, s.-cr. pàstïr, slov. paslir, gén. -rja, et v. pol. pastyrz,
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 655<br />
mod. pasterz, où il est invraisemblable de voir un dérivé slave sur<br />
pase-, et qui est évidemment le latin pâstôr-, mais à finale modifiée,<br />
puisque le roman 5 nè donnait û, si. y, que devant nasale (§ 54) ;<br />
v. si. netopyrï (J. Ex., Upir') «chauve-souris», avec variante<br />
slavonne neputyrï, r. nétopyr', slov. netopir ; s.-cr. nëtopïr, savant,<br />
et pop. dial. metàpir, et dans la langue commune lëplïr « papillon »,<br />
originellement « de nuit », par rattachement à lepètati « battre des<br />
ailes, voleter» : c'est sûrement un composé *no(k)to-pirï (§ 171),<br />
à côté de v. si. et v. r. upirï « revenant » devenu aussi, mais plus<br />
tard, r. upyr'.<br />
La formation en -yr- de v. si. zenyrivu « efféminé, eunuque »<br />
(Gr. Naz.) est isolée. Mais -yrï apparaît ancien dans le mot :<br />
slavon mëxyrï « vésicule » sur mëxû, tch. mëchyr « vessie », slov.<br />
mehir « vessie, ampoule, bulle », s.-cr. mjèhïr (et slov. -tir, s.-cr.<br />
-ûr, § 1132) ; et pol. mçchyrz, puis mçcherz, par croisement avec :<br />
tch. puchyr « ampoule », sor. pucher, gén. -rja, « bulle », et pol.<br />
pçcherz «vessie» de -chyrz, sur puxnçti «enfler» (§ 759), avec<br />
nasale secondaire en polonais dans un verbe expressif et du fait du<br />
flottement assez fréquent de G et M SOUS l'influence du tchèque<br />
(§65).<br />
Le slavon puslyrï « désert » est le russe pustyr' « espace vide,<br />
terrain vague » (slov. et s.-cr. pustara, § 1129) ; et puzyrï « bulle »<br />
est r. et ukr. puzyr' « bulle, vésicule, vessie », sur le thème puz- de<br />
r. pûzdrô, etc. (§ 1116).<br />
On trouve en outre en russe :<br />
kosîjr', moiyr', soxir', pour kosoru (§ 1123), motor, soxor (§ 1124) ;<br />
yladyr', comme ylâdys (§ 1152), «homme replèt, à la peau lisse » ;<br />
nemtyr' « un bègue » (nemiovât' « bégayer ») ; lupyr' « membre viril » ;<br />
vodyr', povodyr' « homme qui conduit, guide » ; etc.<br />
En tchèque : bradyr « barbier » pour v. tch. bradier (§ 853).<br />
En slovène :<br />
drobir, gén. -rja, « menues choses, morceaux de bois, etc. » ;<br />
hudir «le diable»; kurbir « putassier » sur kûrba (kûrva) ; leplr<br />
« bardane » sur lepiti « coller », mais déformation de lopùh (§ 1154) ;<br />
moë(v)ir, variante de mocvdr (§ 1128) ; osir «nid de guêpe, osa» ;<br />
slepir et slepië « orvet » ; etc.<br />
En serbo-croate :<br />
/<br />
plàhïr « (bœuf) qui s'effarouche » ; zvèkïr « heurtoir » ; et Trogïr<br />
en Dalmatie, de lat. Tragurium.
656 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Une finale -yra apparaît dans :<br />
v. si. sekyra « hache », r. seklra, etc., sûrement emprunt à lat.<br />
securis (§ 434) ;<br />
pol. kostyra, puis kostera, « joueur de dés », masc., et v. r. kostyry<br />
(xiv e s.), plur., dérivé kostyrïstvo, sur r. kost', pol. kostka « osselet,<br />
dé » ;<br />
pol. skowyra, puis skowera, « chien », en regard de skowyczec<br />
« hurler, piauler », et parallèlement slov. skovir « chouette », skovik<br />
« cri de chouette ».<br />
§ 1132. Suffixe -uru. — Pas de formes anciennes, mais la finale<br />
-ur est assez représentée dans les langues slaves pour prendre<br />
l'allure d'un suffixe :<br />
Slavon bozuru « crocus », s.-cr. bàzûr « pivoine », bulg. bôzur<br />
« pavot, pivoine » : sûrement sur une locution à premier terme<br />
Bozii « de Dieu ».<br />
Pol. koczur, kocur « matou », tch. kocour, sor. kocor, à côté de<br />
pol. kot « chat », kocica et kotka « chatte », etc. (§ 203). Le slovène<br />
a de même kacûr « serpent mâle », de kâëa « serpent ». Un autre<br />
suffixe de nom d'animal mâle est -er (§ 1121).<br />
Pol. pazur et tch. pazour «ongle, griffe», sor. pazor(a), est<br />
abrégé de v. si. paznogulï « ongle (d'animal) » (§ 189).<br />
Slov. mehûr « ampoule, vessie », s.-cr. mjèhûr, bulg. mehûr,<br />
est secondaire de -yri (§ 1131), et ukr. jâsëur, pol. jaszczur «salamandre»,<br />
l'est de -erû (§ 1120).<br />
On relève dans les différentes langues :<br />
Pol. kosiur et koszîur « canne à crosse en os, béquille », comme<br />
slov. kosiûra « grand couteau à manche d'os » ; piechur « fantassin,<br />
piéton », et piechotnik, sur pësï « à pied ».<br />
Tch. pësourem « à pied », adv., et pësky ; cancour « pendeloque »,<br />
sur thème à redoublement expressif (cancati est « radoter ») ;<br />
kanour « grand verrat », sur kanec « sanglier », et « tache d'encre,<br />
kanka », en regard de kana « salive », kaniti « baver ».<br />
Slov. mezûr «lueur dans les yeux, éblouissement », sur m(e)zati<br />
«clignoter» (§ 591) ; nemcûr «partisan des Allemands, Nemci»;<br />
plasëûr et plasëdr « vagabond » (porteur de manteau, plâsë) ;<br />
slépûr « qui a la vue faible », et « orvet » à côté de slepir ; et lastûr,<br />
gén. -rja, « martinet », pour v. si. lastuna (§ 1105).<br />
S.-cr. kôtûr « disque, roue », et kàtâc « roue » (§ 855), sur thème<br />
kol- (§ 738) ; ëàpûr et ëëpûr « souche », sur thème ëep- (§ 1121).c<br />
Le vieux-russe prasëurù « arrière-grand-père », r. et ukr. prâsëur,<br />
et pol. praszczur au sens d'« arrière-petit-fils », contient pra- (§ 1221)
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 57<br />
et sûrement le dérivé d'un nom de parenté, comme dans le cas de<br />
v. si. masterïsa « marâtre », r. mâcexa (§ 1146), et il est naturel de<br />
penser que ce nom est celui du père. En parlant de *ptr- > str-<br />
(§ 35), le se s'explique par *strj > *scr, comme dans le slavon<br />
osër-, s.-cr. ostr- (§ 29), et comme v. si. masier- s'explique par<br />
*matrj-, avec le suffixe *-yo- de lat. patrius « du père », gr. mxirpioç,<br />
et *-uyo- de skr. pltrvyah « oncle paternel », si. *strujï ; on peut<br />
supposer schématiquement *ptruyo- passant à *plyruo- et refait en<br />
*ptyeruo- sur la forme *pter- du thème *ptr-, comme *matrj- en<br />
*matjer- sur mater-, et de là *stjeuro-, -sëuru. Ainsi prascuru est la<br />
forme plus ancienne de v. si. praotïcï (J. Ex., Ostr.) « ancêtre ».<br />
§ 1133. Suffixe -ura. —- En dehors du suffixe savant -ura (§ 1197),<br />
on trouve :<br />
R. xmûra « nuage sombre », pol. et tch. chmura, avec un adjectif<br />
r. smûryj et xmûrnyj « gris, sombre », et cf. s.-cr. tmûran « obscur »<br />
(§ 1125).<br />
Pol. wilezura « fourrure en peau de loup », d'où r. vil'cûra, et<br />
lisiura « peau de renard », myszura « peau de souris » ; bzdura<br />
« bagatelle » sur bzdziec ( § 591 ) ; szlachciura « hobereau » sur<br />
szlachcic «noble, de la szlachta» (§ 1166) ; wichura «bourrasque»<br />
pour wicher (§ 1127).<br />
V. tch. et dial. mëchura désignant des choses ressemblant à une<br />
outre, des gâteaux, etc. ; et hypocoristiques, comme Vanura<br />
à côté de Vanëk.<br />
Slov. babûra et s.-cr. bàbura « vieille femme » et « cloporte » ;<br />
glavûra et s.-cr. glàvura « grosse tête » ; kocûra « mauvaise hutte »,<br />
et kocàra (§ 1129) ; zabûra « grosse grenouille ».<br />
S.-cr. bàzura «truie qu'on égorge à Noël, Bàzic»; cà(h)ura<br />
«capsule»; dial. kàpura, et kàpôrka, «poule qui a une huppe, un<br />
bonnet, kâpa » ; kàsmura « tignasse » de l'ancien kosma « cheveu »<br />
(§ 1067) ; lùbura « récipient fait d'écorce, lûb (§ 756) ». Etc.
CHAPITRE XXXIV<br />
SUFFIXES EN -s- ET<br />
§ 1134. Suffixes -s- et -so-, — Le type athématique en -es- est<br />
largement représenté en slave à date ancienne (§ 191), avec des<br />
dérivés comme lozesno «matrice» (§ 1074), auquel il faut joindre<br />
*orv-es-no- dans pol. rowiesny «d'âge égal», r. rovésnik (§ 1070),<br />
sur le thème *arv- de *arvïnu «égal» (§ 69) qu'on retrouve dans<br />
v. pr. arwis « vrai, sûr », et le neutre en -es- dans av. ravah- « espace<br />
libre », lat. rûs « campagne ».<br />
Le dérivé thématique en -so- a sûrement joué un rôle important,<br />
d'après celui du présent suffixal en -se- dont il a constitué la base<br />
(§ 436). On le trouve, de façon limitée, en sanskrit, en latin dans<br />
des adjectifs comme fluxus « fluide », laxus « relâché », subst.<br />
noxa « dommage » sur noeëre « nuire », en grec dans des formations<br />
assez nombreuses, adj. xépcoç« sec, aride », subst. SôH,a « opinion » sur<br />
Soxeïv « sembler », mais obscurcies par les traitements phonétiques.<br />
Le baltique présente un certain nombre de substantifs en lit.<br />
-sas, fém. -sa : gaïsas « clarté dans le ciel » sur le thème gaid- de<br />
giêdras « clair » (§ 1112), raupsaî « dartres » sur raupyti « creuser »,<br />
rùpas « raboteux », baisà « effroi » sur bai- de baidyti « effrayer »,<br />
v. pr. layso « glaise » sur *lei- comme si. laino (§ 1080) ; — et lit.<br />
-sas après k, etc., et hors de ce cas : vafgsas « un malchanceux »<br />
sur vafgas « misère », v. pr. wargs « mauvais » (§ 1007). Cette forme<br />
-sas apparaît comme suffixe d'hypocoristique dans preîksas « second<br />
mari d'une veuve », d'un ancien preikuris du lette parallèle à<br />
uzkuris, lit. uzkyrys « second mari qui vient vivre dans la maison<br />
d'une veuve », sur lit. kùrti « allumer le feu » (§ 757).<br />
En slave le nombre est assez grand de substantifs et d'adjectifs<br />
en -su et -xû ; et, sous la forme -xu (§10) et formes connexes, le<br />
suffixe est vivant avec une grande productivité dans la formation<br />
d'hypocoristiques.
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 659<br />
§ 1135. Suffixe -sû. — Substantifs :<br />
V. si. glasu « voix », r. gôlos, s.-cr. glâs (§ 772), dérivé du thème<br />
*gol- de v. si. glagolati « parler », avec des parallèles dans lit. balsas<br />
« voix » sur bïlti « parler » et garsas « son » sur girdëti « entendre ».<br />
Slavon kgsù « morceau », r. kus, gén. kusa, sur le thème kandde<br />
lit. kându, kçsti «mordre» (§ 766); et adj. kçsu «tronqué».<br />
L'intonation douce du slave, en regard de l'intonation rude du<br />
lituanien et que suppose skr. khidati, doit être celle d'un postverbal<br />
du verbe dérivé *kçsati.<br />
Y. si. vlasu « cheveu », r. vôlos, s.-cr. vlâs, avec correspondant<br />
av. vardsa-, dérivé du thème val- qui apparaît dans v. si. vladï<br />
« chevelure » et dans lit. valal, skr. vdlah (§ 719).<br />
Y. si. klasu « épi », r. kôlos, etc., où il est hypothétique de<br />
retrouver la racine *kel- de lit. kélli « élever », si. celo « front »<br />
(§ 191), ou *kol- de v. si. kolu « pieu », r. kolôt' « piquer » (§ 530).<br />
V. si. bësu « démon », r. 'bes, gén. bésa, s.-cr. bîjes « rage », est<br />
évidemment le même mot que lit. balsas « apparition effrayante,<br />
spectre », lette baiss « effroi » et lit. baisà, sur le thème bai- du<br />
factitif lit. baidgti « effrayer » et de skr. bhdyate, si. bojali se (§ 594).<br />
Y. si. krësu (Théod.) «temps du solstice», s.-cr. krïjes (§ 746),<br />
sans rapprochement sûr, et une analyse en *kreip-so- est arbitraire<br />
(§ 495). Une alternance est possible (§ 783) avec le thème krasde<br />
l'adjectif *krasu «beau» (§ 289), et dans ce cas on pourrait<br />
supposer, mais très conjecturalement, un dérivé *krê-so- en<br />
rapport avec lat. crë-scere « croître » ; et comme lat. crë- a l'aspect<br />
d'un thème élargi de la racine *ker- de lit. seriù, serti « donner<br />
le fourrage (au bétail) », gr. xopévvûfxt, « je rassasie », la forme en<br />
k- du slave s'expliquerait par le préverbe usuel vus- de vus-krësiti<br />
(§ 12), et v. pr. kërmens « corps » répondrait à lit. sefmens « repas<br />
d'enterrement » en s'expliquant de façon semblable.<br />
V. si. kosu (J. Ex.) « merle », pol. kos, etc., est interprété *kop-sod'après<br />
le grec xot^x 01 ^ variante de xôaoocpoç, mais ce<br />
rapprochement n'a pour lui que d'être traditionnel, et l'on peut<br />
penser que le nom de cet oiseau au vol furtif et rasant est en rapport<br />
avec l'adjectif kosu « oblique » (§ 820), soit cet adjectif substantivé,<br />
soit l'abrègement d'un composé comme dans le cas de krutû<br />
« taupe » abrégé de krutoryja, (§ 1101).<br />
V. si. ëasu. « moment », s.-cr. ëàs, représente un thème baltoslave<br />
*kës- qui se laisse mal analyser (§ 793). Et sont inanalysables :<br />
Y. si. lësû « forêt », r. les, gén. lésa, s.-cr. lïjes, sans rapprochement<br />
valable.<br />
Y. si. lisû « renard », s.-cr. lis/ différent du mot baltique, lit.<br />
làpè, lette lapsa.<br />
*versû « bruyère », r. vérés, pol. wrzos, s.-cr. vrïjes, en baltique<br />
lette virsâji, plur., et lit. virziai.
660 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Le serbo-croate stâs « stature, taille », qui n'est attesté que depuis<br />
le xvi e siècle, est sûrement un emprunt à l'italien ancien stasso<br />
« station ».<br />
Le polysyllabe ovïsu « avoine », slavon et r. ovës, gén. ovsd, etc.,<br />
a comme correspondants lit. âvizos, plur. fém., et lat. auëna, et<br />
une forme initiale ne se laisse pas rétablir.<br />
§ 1136. —Adjectifs :<br />
Y. si. kçsu « tronqué, à la queue coupée » (Pand. Ant.), s.-cr.<br />
kûs, etc., est évidemment de même origine que le substantif kçsu<br />
« morceau » : on peut supposer, pour expliquer l'intonation douce<br />
du slave au lieu de l'intonation rude attendue, que la forme<br />
première est l'adjectif oxyton comme les adjectifs en -aoç du grec,<br />
xo[j.èoç « élégant », XoÇôç « oblique », avec métatonie sur intonation<br />
rude, tandis que le substantif kçsu est le postverbal de son dérivé<br />
*kçsati, r. kusdl'.<br />
V. si. rusu (Izb. Svjat.) « blond roux», r. rûsyj, etc., lit. raûsvas,<br />
représente *roudh-so-, et lat. russus représente *rudh-so-, ou<br />
*rudh-to- comme lit. rùstas, sur le thème si. rûd-, rud- (§ 756).<br />
Pour *krasu « beau », voir le substantif krësu.<br />
Et pour *tysu « chauve », qui n'est pas clair non plus, voir<br />
§ 801.<br />
L'adjectif v. r. (xiv e s.) pelesu «brun sombre» et « tacheté »,<br />
r. mod. pelèsyj « tacheté » (en parlant d'animaux), se retrouve dans<br />
le substantif slov. pelçha «tache sur le corps » (§ 1146). Il doit se<br />
rattacher à la racine multiforme pet- de pepelu « centre », plësnï<br />
«moisissure» (§ 1085), et son aspect serait celui d'un dérivé de<br />
substantif neutre en -es- sur cette racine.<br />
§ 1137. Suffixe -xu. — Substantifs :<br />
Y. si. smëxu « rire », s.-cr. smljeh, sur smijati se, itératif lette<br />
smaïdît (§ 525).<br />
V. si. spëxu «empressement» (§ 748), sur le thème spë- de<br />
spë(ja)ti, lit. spëti (§ 511), avec extension de la forme en -xu.<br />
V. si. grëxu « faute, péché », r. greh, gén. grehd, présente une<br />
oxytonaison qui peut faire penser à un dérivé en *-so-, mais est<br />
inexpliqué (§ 748).<br />
V. si. straxu «peur» (§ 787), dérivé en -xu sur le thème strade<br />
stradati « souffrir ». Et parallèlement :<br />
R. et ukr. zax, uzdx « effroi », postverbal de r. -zaxdt' remanié<br />
de -zasdt' (§ 783), à dérivé ûzast' comme strast'.<br />
R. max « geste », s.-cr. mâh, etc. (§ 787), est le postverbal du verbe
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 661<br />
maxati (§ 557), ou bien la base première de ce verbe, élargissement<br />
en -s- du thème ma- avec extension de la forme -x-,<br />
Y. si. duxu « esprit » est le postverbal d'une racine balto-slave<br />
*dus- (§ 755), et :<br />
R. rux « mouvement », pol. ruch, est le postverbal d'un thème<br />
rus-, baltique *raus- (§ 757).<br />
Y. si. sluxu « ouïe » ( § 755) apparaît postverbal du verbe slusali<br />
« écouter », de même que son correspondant av. sraosa- en regard<br />
de skr. çrôsati « il entend ». Mais il y a bien, sinon suffixe nominal<br />
-so-, du moins élargissement verbal en -se- de la racine *kleu-<br />
(§ 593), ce qui revient au même (§ 436).<br />
Tch. cich « odorat », verbe cichati « sentir, flairer », en regard de<br />
cîti « sentir », et tch. pop. cuch, cuchati, est sur le modèle de sluch<br />
«ouïe», de même que pol. czuch «flair», h. sor. cuch «odorat,<br />
odeur », slov. cûh « (mauvaise) odeur » ; le serbo-croate ancien<br />
euh, devenu cûh « souffle, haleine » depuis le xvi e siècle avec verbe<br />
cûhnuti « souffler », est, lui, d'après dûh « souffle ».<br />
Pol. wçch « odorat » et slov. voh sont des postverbaux de pol.<br />
wqchac, slov. vôhati «sentir» (§ 767), comme parallèlement r.<br />
njux de njûxat' (§ 759), mais les verbes en -xati ont comme base<br />
des formes nominales en -x-.<br />
V. si. praxu « poussière », r. pôrox, etc., est également postverbal<br />
(§ 771).<br />
R. gorôx « pois », s.-cr. gràh, etc., répond à lit. gafsas, v. h. a.<br />
gers, qui désignent une plante différente, l'« angélique », et d'autres<br />
plantes à gros grains, mais n'est pas analysable.<br />
Y. si. vrùxu «sommet», lit. virsùs (§ 160), sur thème *wrs-,<br />
skr. vdrsman- « sommet », vdrsïyas- « plus haut », lat. uerruca<br />
« excroissance » ne l'est pas non plus. Ni le polysyllabe v. si. orëxu<br />
(Ham.) « noix, noyer », r. oréx, etc., en baltique lit. riesas.<br />
Pour tch. vîch «poignée de paille», voir vexa, § 1140, et pour<br />
slov. pirh « œuf de Pâques », voir plruh, § 1154.<br />
§ 1138. — Adjectifs :<br />
V. si. lixu « de reste,, superflu », r. lixôj « méchant », etc., représente<br />
*leik-so- (§ 10), sur la racine *leik- (§ 746) ; en baltique lette<br />
lleks, de *laika-, comme gr. Xomôç.<br />
V. si. gluxu « sourd » ( § 820) est en regard de lit. glùsas « hébété »,<br />
glùsti « être égaré », et, avec confusion des thèmes glus- et klus-<br />
« entendre », lit. dial. klùsqs « un peu sourd », et lit. glusnùs et<br />
klusnùs « docile ».<br />
V. si. lixu « calme » est inexpliqué, et une analyse en *tei-sone<br />
représente qu'une éventualité (•§ 609).
662 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
V. si. plaxu (Pand. Ant.) «inquiet, effarouché » (§ 772) se prête<br />
moins encore à l'analyse.<br />
Le substantif v. si. plësï « calvitie » (Upir'), r. et tch. pies, slov.<br />
plês, fait supposer un adjectif *plëxu (§ 711), que le parallélisme<br />
avec lit. plikas « chauve », pleïkè « place chauve », invite à interpréter<br />
par *ploi(k)-sô-, avec degré réduit *plïx- dans le slovaque<br />
plchnuï analogue à plznul' «muer» (§ 428).<br />
La formation la plus ancienne est v. si. vetûxu « vieux, caduc »,<br />
lit. dial. vëiusas, en regard de l'athématique lat. uetus, gén. ueteris.<br />
Cet adjectif se maintient dans les langues slaves : r. vétxij, tch.<br />
vetchy, avec des altérations : pol. wiotki pour le plus ancien wiotchy,<br />
slov. vçtek, s.-cr. vëlah et vil, vèdhï, vëgd ; de même en baltique :<br />
lit. vëëas de vet-s-, lette vecs.<br />
L'adjectif ploxu « plat » est un hypocoristique.<br />
Un substantif en -xo doit être le neutre substantivé d'un<br />
adjectif :<br />
v. si. ruxo (Gr. Naz.) « ce qu'on porte sur soi », v. pol. rucho<br />
« vêtement », tch. roucho, bulg. et slov. rûho, s.-cr. rMo « toile,<br />
drap », mot emprunté par le grec pou%ov « vêtement, drap » (dès<br />
le xm e siècle) ; à côté de v. si. ruxlo, r. rùxlo « bien meuble »<br />
(§ 1052), sur le thème, rux- de rusiti (§ 614), postverbal r. rax<br />
«mouvement», adjectif lit. ruosùs « actif »; avec forme rux- dans<br />
slov. rdhel «meuble, friable» (§ 1048), et râh qui doit plutôt en<br />
être la réduction.<br />
On peut penser à interpréter de même :<br />
r. brjûxo « ventre », pol. brzuch (depuis le xv e s.) et v. pol. et dial.<br />
brzucho, sor. brjuch, tch. brich(o) de v. tch. bruch(o) : comparé<br />
à des mots germaniques, dont ail. Brausche «bosse», de *brûsk-,<br />
et got. brusts « poitrine », et il peut s'agir à la base d'une racine<br />
expressive au sens d'« enfler », mais une analyse en *bhreu-so-,<br />
adjectif substantivé, est conjecturale.<br />
§ 1139. Hypocoristiques. — Un hypocoristique en -s est exceptionnel<br />
: tch. d'as de d'âbel «diable»; mais voir -as, § 1143, et<br />
pol. -s, § 1142.<br />
Les formations productives sont en -xu, et -xa, -si :<br />
pol. et tch. brach, de bral(r) « frère » ;<br />
pol. swach, de swal « marieur » ;<br />
tch. kmoch, de kmotr « parrain, compère » ;<br />
tch. hoch « garçon », sur holy « dénudé », holek « imberbe » ;
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 663<br />
r. sélex « canard », sur sélezen' (§ 1011) ; et ptax « oiseau », voir<br />
ptâxa, pol. ancien ptach à côté de piak (§ 861) ;<br />
slov. péleh «coq» (r. petûx, § 1154), sur pétel, petélin (§ 1055) ;<br />
pozrêh « glouton », sur pozréti et pozrël- au lieu de poêrl-, s.-cr.<br />
poz(d)rlac.<br />
Et avec les prénoms :<br />
pol. Piech de Piotr, tch. Pech de Peir ;<br />
pol. et tch. Stach de Stanislavu ;<br />
pol. Zdziech de Zdzieslaw, Bolech de Bolesiaw ;<br />
tch. Vach de Vàclav ; etc.<br />
Cette formation familière en -xu pouvait s'étendre à des noms<br />
de choses, et pol. iach « haillon » est sûrement une mutilation de<br />
iata « morceau d'étoffe » (§ 1166), le mot signifiant aussi « haillonneux<br />
» comme son dérivé Aachman (§ 1195).<br />
L'adjectif r. ploxu (xvi e s.), ploxôj « mauvais, piètre », pol.<br />
piochy « léger, étourdi », tch. plochy « plat », n'offre qu'une ressemblance<br />
trompeuse avec l'allemand flach « plat » : il faut y voir<br />
une forme abrégée, avec des sens expressifs », de v. si. ploskû<br />
«large, plat», tch. plosky, etc. (§ 1065).<br />
On a de même mlah- dans slov. mlâhav « mou » par déformation<br />
de mlak- (§ 1040).<br />
§ 1140. Suffixe -xa. —- On n'a affaire qu'à des finales dans :<br />
v. si. snuxa (Izb. Svjat.) « bru », r. snoxà, s.-cr. snàha, et skr.<br />
snusâ, lat. nurus, etc. ;<br />
v. si. juxa (Upir') «jus, soupe» et muxa «mouche», anciens<br />
athématiques (§ 175) ;<br />
slavon troxa « miette- », etc. ( § 740) ;<br />
v. si. lëxa « planche (de jardin) », r. lehd, etc. (§ 746) ;<br />
slavon jelïxa « aune », v. r. olïxa et mod. ôl'xâ, s.-cr. jôha, etc.,<br />
de *elisâ, v. h. a. élira, lit. dial. aliknis, plus lointainement lat.<br />
alnus ;<br />
v. r. ëeremuxa, r. mod. cerëmuxa « bourdaine » et dial. ëeremxâ,<br />
pol. trzemcha, tch. stremcha, slov. ërêmha, qui désigne aussi le<br />
« cassis » et le « merisier à grappes », en baltique lette cërmauksis<br />
« bourdaine » et « sorbier », lit. kermùsé « ail sauvage ».<br />
V. si. strëxa « (rebord du) toit », r. stréxâ, s.-cr. strëha, slov.<br />
stréha, d'intonation rude, a un rapport possible avec lit. striegli<br />
« couvrir le toit (de chaume) », qui est également isolé, tandis<br />
qu'une analyse en *stroi-sâ sur stroiti «arranger» (§ 608) est<br />
imaginaire.<br />
Pour vëxa dans r. vehâ «jalon, perche avec une poignée de<br />
paille », pol. wiecha « bouchon de paille », slov. véha « feuille de
664 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
légume » et « bonde », slovaque viecha et tch. vlch, v. tch. viech,<br />
et v. r. vëxûtï, etc. (§ 189), on a un rapprochement direct avec<br />
le Scandinave, vîse « panicule », vese « touffe, bouquet », veis « tige »,<br />
de veis- et *vais- ; le rattachement à la racine vei- « tordre », comme<br />
pour vixurû «tourbillon» (§ 1127), est hypothétique.<br />
C'est dans la formation d'hypocoristiques que -xa apparaît<br />
nettement suffixe et joue un rôle notable :<br />
r. svâxa « marieuse », pol. swacha, féminin de pol. swach sur swat ;<br />
r. pop. ptdxa « oiseau » (et masc. ptax), en regard de pol. et<br />
sor. plak, tch. ptàk (§ 861), et de l'usuel v. si. putica, r. pUca, etc.,<br />
élargissement de puta (§ 878) ;<br />
r. prjdxa « fîleuse » sur prjdl'ja ( § 1058) ; rjdxa « élégante » à côté<br />
de rjadlxa, rjazôxa (§ 1146) ; vrdxa « menteuse » en regard de vrai'<br />
« menteur, hâbleur », sur vrai' ; masc. spdxa et spixa « (grand)<br />
dormeur » ; masc. zéxa comme zevâka « qui baye aux corneilles,<br />
badaud» (§ 862); et fém. prigôxa «apprêt», qui est postverbal<br />
de (pri-)gosit' (§ 740) ;<br />
pol. kmocha, féminin de kmoch sur kmotr ; gocha sur gorzalka<br />
« eau-de-vie » ; procha sur prosba « prière » et prosic ; gospocha<br />
« bonne dame » sur gospodyni ;<br />
slov. pirha «vache brun-rouge», voir plruh (§ 1154).<br />
Et les hypocoristiques de prénoms : tch. Vâcha et Vach de<br />
Vâclav, s.-cr. Miha (et Miho, § 208) de Mihàil, etc.<br />
Le mot v. pol. marcha «charogne» (mod. «haridelle»), tch.<br />
mrcha, slov. miha et s.-cr. cak. mrha, a une variante mrûsa en<br />
slavon, bulg. mârsa, s.-cr. mrsa, et un sens abstrait (§ 1026)<br />
dans s.-cr. mrsa «maigreur», adj. mrsav «maigre», bulg. mârsav,<br />
slov. mrsav et mihav : c'est une formation expressive en -xa et<br />
-sa sur le thème mïr- « mourir », pol. mrzec et prêt, mari (§ 451).<br />
§ 1141. Suffixe -sa. — Le vieux slave, où dusa «âme» est<br />
naturellement à part, a seulement maslerïsa « marâtre » (Upir')<br />
et dans un seul exemple, la forme usuelle étant le slavon maslexa<br />
(§ 1146). On ne trouve par ailleurs, comme formation d'aspect<br />
ancien, que :<br />
tch. skryse « cachette », et r. krysa « toiture ». Mais en russe le<br />
suffixe est productif :<br />
levsâ « main gauche » ; pravsâ « main droite » et « droitier,<br />
droitière », masc. et fém. ; kvdksa « bihoreau », oiseau, et « femme<br />
criarde », sur kvàkal' « coasser » ; dial. kvôksa « grognon(ne) », masc.<br />
et fém., sur kvokiâl' «glousser»; sonsd, son'sâ, masc. et fém.,<br />
« l'endormi(e) ».
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 665<br />
Et hypocoristiques de prénoms : Mâsa de Marija, masc. Sâsa<br />
de Aleksândr, etc.<br />
Et surtout type de féminins de noms de fonctions : dôklorsa « doctoresse<br />
», général'sa « femme de général », opekunsa « tutrice », etc.<br />
Le suffixe est également représenté en slovène :<br />
bêlsa « vache blanche » ; Ijûbsa « petite amie, concubine » ;<br />
nôrsa « folle », masc. nôrec et adj. nor, de v. h. a. narro ; topîrsa<br />
« coureuse de nuit, salope », sur (ne)lopir « chauve-souris » ; etc.<br />
Et en serbo-croate :<br />
dâsa « donneur » ; prlstasa « partisan » ; nèbôjsa « intrépide » ;<br />
izdïrsa « qui se donne du mal », sur izdirati ; izjesa « goinfre »<br />
comme izjelica ; etc.<br />
§ 1142. Suffixes -sa, -s'-, -si. — En russe, petit type en -sa :<br />
drâksa « batailleur » sur drâka « rixe » (§ 886) ; kriksa « (enfant)<br />
criard » ; plâksa « pleurnicheur », et xnyksa sur xnykat' « pleurnicher<br />
» ; vardksa « barbouilleur », sur varàkat' ; etc.<br />
En polonais : piaksa « pleureur, pleureuse », masc. et fém., et<br />
beksa « pleurnicheur » sur beknqc « bêler, pleurnicher ».<br />
En tchèque, hypocoristiques anciens Jebsa, Zivsa, etc.<br />
Le polonais a des hypocoristiques en -s :<br />
kmos de kmolr, Pies à côté de Piech, etc. ; et brgs « petit bouledogue<br />
» sur brytan « dogue » (c'est-à-dire « britannique ») ; ko s<br />
« petit cheval » pour konik ; mis « ours », l'ours Martin, de Miehat.<br />
Et en -sia :<br />
kmosia, variante de kmocha ; gosposia « petite ménagère, bonne<br />
femme » en regard de gospocha « bonne dame » ; prénoms Joasia, etc.<br />
On a -sï dans des adjectifs (§ 957) :<br />
v. si. pësï « à pied » abrégé de *pëd-lyo- ;<br />
r. xorôsij « bon » de xorobfu)rû ;<br />
s.-cr. Vos « mauvais » sans doute de loir- ;<br />
v. si. oblasi « laïc » sans doute de oblaslïnu.<br />
Et *gos- de gotovu supposé par r. gosW « préparer » pour gotôvit'<br />
(§ 740).<br />
Et des formes hypocoristiques, de prénoms :<br />
pol. Bronisz de Bronislaw, Milosz et s.-cr. Mllos de Miloslavû, etc.
666 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
SUFFIXES EN -US-, -6X-, ETC.<br />
§ 1143. Suffixe -asu. — Slavon bëlasu «blanchissant, grisonnant<br />
», v. pol. biaiasy « blanchâtre », slovaque belasy (tch. bëlâsek<br />
« papillon blanc »).<br />
R. dubds « (chaloupe) de bois de chêne », et len(')gâs « paresseux »,<br />
durandâs « nigaud » sur dur-âk, krivandâs « de travers, qui boite,<br />
qui louche », donc avec diverses finales expressives.<br />
Pol. brudas « saligaud », yolas « va-nu-pieds » et yolec, grubas<br />
« un gros, ventru », etc. ; et adj. siwasy « grisâtre » et szarasy, etc.<br />
Tch. chud'as « pauvre diable », krut'às « homme dur, cruel »,<br />
ket'as « mercanti » sur l'allemand Kellenhândler, loir as « filou »<br />
et v. tch., sur loir (§ 957), etc. ; et hypocoristiques de prénoms,<br />
Janas de Jan, et Jirâsek de Jiri « Georges ».<br />
§ 1144. Suffixe -axiï. — Y. si. lezaxii (J. Ex.) «baleine», voir<br />
lezaga (§ 1014).<br />
Slavon siromaxu, qui est s.-cr. siràmah « pauvre », attesté depuis<br />
le xv e siècle, bulg. siromâh, slov. siromàh qui est kajkavien croate :<br />
sur siru « orphelin », avec une finale qui a l'aspect d'un second<br />
terme de composé, mais sûrement autre chose que maxù de maxati<br />
«agiter le bras, brandir» (§ 787).<br />
Pol. bielach et bielas « (lièvre) blanc » ; dial. ciarach et ciaras<br />
« petit noble, cul-terreux », sur ciarac siç « se vautrer ».<br />
Féminin -axa :<br />
R. ëerepâxa « tortue » sur cérep « test, tesson » ;<br />
komâxa et ukr. « puceron, cochenille, ver, fourmi », en regard de<br />
komâr « moustique » ; kumaxâ « fièvre », sur kumâ « commère »<br />
qui désigne familièrement la « fièvre » ; rubâxa « chemise » sur rub<br />
« morceau d'étoffe » (§ 764).<br />
§ 1145. Suffixe -asï. — La seule forme attestée à date ancienne<br />
est :<br />
v. tch. rubds « chemise de femme », et tch. mod. « suaire », comme<br />
r. rubâxa.<br />
Le russe a une petite série de mots familiers en -as, gén. -asd :<br />
dobrjâs « homme bienfaisant », kudrjâs « aux cheveux bouclés »,<br />
plemjâs «parent» sur v. r. plemenïnikû (§ 843), torgâs «mercier,<br />
revendeur », murâs « petite fourmi, muravéj », etc.
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 667<br />
En polonais, la finale est rare :<br />
niezgrabjasz « maladroit » (zgrabny « adroit »), koronjasz (et<br />
-niarz) « habitant de la Couronne, la Pologne russe », ete.<br />
Au contraire, grand développement en slovène et en serbocroate<br />
:<br />
slov. bogatàs et s.-cr. bogàtâs « richard » ;<br />
slov. koëijâs et s.-cr. kocijâs « cocher », de s.-cr. koëija « coche,<br />
voiture » ;<br />
slov. mejâs et s.-cr. mèdâs « voisin de frontière, s.-cr. mèda » ;<br />
slov. velikâs et s.-cr. velikâs « magnat » ;<br />
slov. osterijds « cabaretier » sur osterîja, de l'italien ;<br />
s.-cr. kolibâs « gardien de cabanon, koliba ». Etc.<br />
Et dans la langue nouvelle des sports :<br />
slov. sportâs « sportif », nogomelâs « footballeur », et s.-cr. spôrtâs,<br />
nogomètâs.<br />
Mais ici le suffixe n'est pas slave, c'est un emprunt au hongrois<br />
-as, et qui en slovène apparaît surtout en kajkavien, et sous<br />
l'influence du serbo-croate :<br />
slov. orjâs « géant », hongrois ôrjàs ;<br />
slov. pajdâs « camarade », s.-cr. pàjdâs, du hongrois pajtâs.<br />
§ 1146. Suffixes -ex(u), -exa. — Une finale -ex n'est attestée<br />
que dans quelles formes :<br />
r. bzdëx « vesse », lémex « soc » du plus ancien lemesï ; tch. pelech<br />
à côté de fém. peles(e) ; slov. péteh, pol. Bolech (§ 1139). La finale<br />
-exa est mieux représentée et plus intéressante.<br />
Le russe a une petite série de dépréciatifs en -ëxa :<br />
babëxa « vieille femme » sur bâba ;<br />
tetëxa « dondon » sur lëla « tante » ;<br />
gordëxa « femme orgueilleuse » sur gôrdyj ;<br />
puzdrëxa « ventru(e) », masc. et fém., sur pûzdrô «panse»<br />
(§ H16);<br />
raslerèxa « qui perd tout » sur rasterjât' ;<br />
rjazôxa «une élégante», et rjadixa (§ 1151), rjdxa (§ 1140), sur<br />
rjadît'sja « s'arranger, se faire belle, rjâzenaja ». Et l'hypocoristique<br />
Alëxa de Alekséj.<br />
On a slov. pelçha « tache sûr le corps » en regard de l'adjectif<br />
pelesu « tacheté » (§ 1136); — v. pol. warzecha «cuiller à pot»,<br />
puis warzçcha, warzqchew (§ 205), slovaque varecha (tch. vareëka),<br />
sur variti « faire bouillir ».
668 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Et un mot qui remonte au slave commun :<br />
slavon mastexa «marâtre» à côté de v. si. masterïsa (§ 1141),<br />
r. mâcixa pour mâcexa, pol. macocha, tch. macecha, s.-cr. màéeha.<br />
Le baltique a lit. pdmotè, v. pr. pomatre (§ 198), le grec a [X7]Tputà.<br />
On reconnaît évidemment dans masterïsa et mastexa des dérivés<br />
de mater-, et la forme v. si. -st-, s.-cr. -c-, indique un dérivé à suffixe<br />
-/-, parallèle au suffixe -u- du grec : *matrj- donnant v. si. *mastrjavec<br />
le traitement du groupe complexe trj qui n'est conservé qu'en<br />
vieux slave et en slavon et a disparu dans les langues slaves (§ 29),<br />
en laissant ici sa trace dans un mot isolé. Et avec un remaniement<br />
en v. si. master- sur le thème mater- généralisé dans la flexion de<br />
mati avec perte de *matr-. Puis, sur master-, l'hypocoristique<br />
mastexa.<br />
Le cas de v. r. prascuru « arrière-grand-père » est analogue, voir<br />
§ 1132.<br />
§ 1147. Suffixes -esï, -esa. — On trouve -est dans le slavon<br />
lemesï « soc », masc., r. lémes, s.-cr. lèmes, etc., en baltique lette<br />
lemesis, sûrement sur le thème de lit. limti « briser », si. lomiti<br />
(§ 607), et le vocalisme lem- doit indiquer qu'il s'agit du dérivé<br />
en *-yo- d'un neutre en -es- (§ 190).<br />
Le slavon mokresï est faiblement attesté avec variante mokrosï<br />
(Mikl.) au sens de «Verseau», signe du zodiaque (r. Vodoléj, pol.<br />
Wodnik, etc)), mais il se retrouve dans le serbo-croate dialectal<br />
mokres au sens d'«urine», mbkraca (§ 1181), et dans la toponymie<br />
yougoslave. On a d'autre part :<br />
pol. pielesz « gîte de bête fauve, repaire », masc., tch. peleeh,<br />
masc., et fém. peles « coupe-gorge », v. tch. pelesë, d'origine obscure.<br />
Le serbo-croate offre quelques mots en -es, masc. :<br />
bàres « marais », sur bar a (§ 1117) ;<br />
gàvnes, terme d'insulte, sur gôvno ;<br />
dial. bùljes «perche, ôkûn » (§ 1102), et bûtja, sur bûljiti « écarquiller<br />
les yeux ».<br />
Et en -esa, dans des noms de chèvres : màresa « chèvre noire »,<br />
de l'italien moro, rïdesa « chèvre rousse », de rîd. Et des noms de<br />
personnes : Grûbesa, Ugljesa.<br />
§ 1148. Suffixes -os, -ox, -oxa. — Une finale -os est exceptionnelle<br />
: tch. rdkos « roseau » est isolé, et les autres langues ont v. si.<br />
rogozû (Upir'), rogozina «natte de roseaux» (§ 892), etc. ; s.-cr.<br />
prkos « obstination », u(s)prkos « en dépit de » (depuis le xvn e siècle),<br />
inexpliqué.
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 669<br />
La finale est un peu moins rare en polonais, où il peut s'agir<br />
d'une forme dialectale de -osz (§ 14) : krzywos « du tortu », variante<br />
de krzywosz ; pasztos « grand pâté, pasztet » ; et noms de personnes,<br />
Witos, etc.<br />
On a un véritable suffixe -och en polonais : v. pol. ciastoch<br />
« homme mou », sur ciaslo « pâte » ; tiustoch, mod. Ituscioch,<br />
« homme gras » ; bfdzioch « péteur » ; motioch « populace », proprement<br />
« mauvaise herbe », sur motac sig « s'enrouler » ; wiercioch<br />
« un agité », sur wiercic sie « tournoyer » ; etc.<br />
Et en tchèque :<br />
cernoch « nègre », lenoch « fainéant », smrad'och « le puant »,<br />
vrtoch « caprice, fantaisie », etc.<br />
De même un suffixe -oxa en russe :<br />
projdôxa « aventurier, fripon » ';<br />
ob'edôxa « goinfre », masc. et fém. ;<br />
pobirôxa, et -rûxa, « mendiant(e) », masc. et fém., sur pobirât'sja<br />
« mendier » ;<br />
zavirôxa, et -rûxa, «qui radote, bat la campagne», sur zavirâl'sja<br />
; etc.<br />
Et en polonais :<br />
mçdrocha (v. pol.) « raisonneuse » ;<br />
rzedziocha « bonne ménagère », sur rzqdic « conduire (un<br />
ménage) ».<br />
§ 1149. Suffixe -osï. — Le suffixe -osï, féminin et masculin, est<br />
ancien et assez étendu :<br />
v. si. kokosï «poule», r. kôkos, s.-cr. kokôs, etc., en regard du<br />
masculin kokotû «coq» (§ 1174) ;<br />
v. si. pustosï, fém., « désert » et « vanité », r. pûslos, à côté de<br />
pustola ;<br />
slavon mokrosï « le Verseau », variante de mokresï, et slov.<br />
mokrçs, masc., « vent d'est » ;<br />
slavon russe (xvi e s.) plstrosï « ce qui est tacheté », et pol. pstrosz<br />
« cheval pie », masc., dial. p(e)stroch ;<br />
slavon russe (xvi e s.) rokosï, masc., et r. ancien rôkos « trouble,<br />
sédition », qui est pol. rokosz « soulèvement, révolte », masc., et<br />
ancien rakosz « opposition armée », sens dérivé de celui de « réunion,<br />
meeting de la noblesse », qui ressemble au hongrois rakâs « foule,<br />
réunion », mais qui s'expliquerait plus exactement par le hongrois<br />
Râkos, lieu de réunion des diètes ; sans rapport en tout cas, sauf
670 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
par rapprochement secondaire, avec r. rôkot « bruit, grondement »,<br />
verbe rokolât' ;<br />
r. dial. vékos, fém., « vêtements de rebut », que vend le chiffonnier,<br />
dial. vékosnik, sur le couvercle, véko (§ 1039) de corbeille qui lui<br />
sert à porter les petites choses à vendre au marché ; se confondant<br />
avec vétôs «friperie» (§ 711), vetôsnik «chiffonnier», de la langue<br />
commune.<br />
Et dans les autres langues slaves :<br />
Pol. -osz, masc. : dîugosz « homme de longue taille », gniazdosz<br />
« (oiseau) qui reste au nid », hardosz « un insolent » sur hardy de<br />
tch. hrdg «arrogant», krzyœosz «(arbre) tortu », etc. Et noms de<br />
personnes : Gnieœosz qui est gniewosz « hpmme coléreux », hypocoristique<br />
Milosz, etc.<br />
Tch. bëlos «cheval blanc», et bëlous (§ 1156), hnëdos «cheval<br />
bai », panos « petit pan, page », etc.<br />
Slov. mlakçs « râle d'eau » sur mlâka « mare », prékos « (animal)<br />
à robe rayée » sur prêko « en travers », et voir plus haut mokrçs<br />
« vent humide d'est ».<br />
S.-cr. bàgâtos « richard » et bogàtâs ; kîcos « un élégant », en<br />
rapport" sans doute, mais peu clair, avec kïtiti se « se parer » ;<br />
râbos « taille de boulanger », et ràvâs qui est le hongrois rovâs ;<br />
en tchèque rabuse, et slov. rovâs : le mot vient du hongrois, où<br />
rovâs « entaille a son explication, et la forme rab- paraît supposer<br />
un intermédiaire allemand ; — et les hypocoristiques Dràgos,<br />
Mllos, etc.<br />
§ 1150. Suffixe -osa. — Y. si. junosa «jeune homme», masc.,<br />
à côté de junota (§ 898) dont il peut être l'hypocoristique, et r.<br />
jûnosa, v. tch. junosë, etc.<br />
Slavon russe svçtosa « saint », r. svjaiôsa « saint » et « bigot ».<br />
R. obirôsa, et -rôxa, masc. et fém., « fripon(ne) », sur obirât'<br />
« dépouiller, plumer » ; stonôsa « geignard(e) », sur stonât' ; — et<br />
hypocoristiques Svjaiôsa de Svjâtoslav, Japôsa « Japonais » (méprisant).<br />
V. pol. panosza « jeune noble, noble en sous-ordre », sur le modèle<br />
de junosza.<br />
Slov. prékosa, féminin de prékos.<br />
S.-cr. ëlànkosa « femme aux articulations fortes », sur ëlânak,<br />
rôgosa « (chèvre) qui a les cornes longues », etc. ; et masc. nemogosa<br />
« celui qui dit toujours ne môgu, je ne peux pas », nèznadosa<br />
« celui qui fait semblant de ne pas savoir ».<br />
#»
[§ 1135] SUFFIXES EN -S- ET -X- 671<br />
§ 1151. Suffixes ~ix-, -is-. — En mettant à part les langues<br />
méridionales modernes qui confondent i et y, on trouve -ixu<br />
dans :<br />
V. si. zenixu « jeune époux », r. zenix, etc., sûrement hypocoristique,<br />
et de zenimû, r. zenimyj «(fils) à marier» (§ 406), slov.<br />
zçnim « fiancé » (§ 1069).<br />
Le tchèque zivocich « animal » pose un problème : ce serait<br />
à peu près le seul exemple du suffixe -ich en tchèque, et la base<br />
supposée zivok « animal » est d'un type en -ok qui est récent et<br />
artificiel (§ 1046) ; l'aspect est plutôt, comme on l'a aussi supposé,<br />
d'un composé (savant) à second terme ëich (§ 1137), mais au sens<br />
de « sentiment, cil'i », par réfection sur citi « sentir ».<br />
Le féminin -ixa est plus largement attesté :<br />
R. -ixa, suffixe productif pour la formation de noms de femmes :<br />
dvôrnicixa « femme du portier, ' dvôrnik » ; frantixa « élégante »<br />
sur frant « petit-maître », et sëegolixa sur sëëgol', rjadixa à côté de<br />
rjazôxa ; trusixa « poltronne » sur irus (§ 762) ; etc.<br />
Et aussi de femelles d'animaux : volëixa et volëica « louve »,<br />
zajëixa « femelle du lièvre, zdjac », etc.<br />
Pol. opacicha « abbesse » sur opal « abbé ».<br />
On a de même -isï :<br />
Y. r. tovariscï (xiv e s.) « associé », mod. tovârisc « camarade »,<br />
pour ukr. iovdrys, pol. towarzysz, v. tch. tovaris (mod. -rys), slov.<br />
tovâris : la finale -is est sûrement turque, comme le mot tovarû<br />
(§ 1128).<br />
Pol. odrwisz « trompeur, fourbe » à côté et comme hypocoristique<br />
de odrwiswiat « qui trompe le monde » (§ 1225), urwisz « vaurien »<br />
à côté de urwipoiec ; et nom de personne Bronisz de Bronislaw.<br />
Le polonais a aussi un suffixe -is, fém. -isia :<br />
dowcipnis « facétieux », sur l'adjectif dowcipny « spirituel » ;<br />
modnis « esclave de la mode » (adj. modny), et fém. modnisia ;<br />
poboznis « bigot », fém. poboznisia.<br />
yt," § 1152. Suffixe -ysï. — V. si. klepysï (Cyr. Jér.) « amandier», et<br />
slavon russe (xvi e s.) kljapysï «cheville servant de bouton»,<br />
r. mod. kljapys « garrot », sur r. kljap « gourdin », kljapéc « tra-<br />
"ïlr quenard », kljdpyj «courbé» qt kljapina «arbre tortu » : mot<br />
JlF désignant un morceau de bois tordu, et de là l'amande à aspect<br />
^ de bouton de bois.<br />
V. tch. et mod. sporys « verveine », slov. sports, s.-cr. sports,
672 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
r. spôrys « renouée », pol. sporysz « seigle ergoté », sur sporu<br />
« abondant » (§ 820).<br />
Slavon russe (xvi e s.) pupysï « ornement métallique en relief »,<br />
mod. pùpys « bourgeon, tumeur », sur pçpû « ombilic ».<br />
R. -ys, assez productif, pour noms de personnes :<br />
durnys « laideron » sur durnôj « laid », glâdys « homme replet »,<br />
glupys « un bêta », malys « un petit », zamôrys et zamorënys « un<br />
meurt-de-faim » ;<br />
et noms de choses :<br />
katys « boulette » sur kalâl' « rouler », mjâkis « du mou, mie de<br />
pain », vyigrys « gain » sur vyigrat', zarôdys « germe, embryon », etc.<br />
Pol. giadysz « un élégant », golysz « un pauvre diable ».<br />
Tch. slepys « orvet » (v. tch. et mod.), (mëkkys « mollusque », et<br />
savants hroznys « boa », korys « crustacé » ; et tovarys « camarade »<br />
pour v. tch. -ris.<br />
On a aussi tch. -ys dans mëslys « bourg », v. tch. mëstis et -tys,<br />
à finale peu claire.<br />
§ 1153. Langues méridionales. — Sans distinction de i et y :<br />
Slov. omçtih «brosse (de maçon), balai-brosse», sur omésti<br />
« balayer, brosser » ;<br />
golis « région dénudée » ; okolîs « détour » et « cercle, district »<br />
drobis « petite chose, petite monnaie », et usuellement drobiz ;<br />
modris « bleuet » et modriz ; etc. Le forme -Iz s'explique par<br />
l'attraction du suffixe plus important -ez (§ 1017), qui a aussi fait<br />
substituer stâlez à slâlis « état ».<br />
S.-cr. blùlïs « qui bavarde à tort et à travers », sur blûtiti ; màlïs<br />
« petit enfant » ; nëmarïs « homme négligent » ; ôkolîs « entourage »<br />
slàlkïs « friandise » ; etc. ;<br />
et -isa, masc. :<br />
màlisa « homme de petite taille », hvàlisa « vantard », stèdisa<br />
« homme économe, parcimonieux », etc. ; et hypocoristiques,<br />
Dràgisa, etc. ; — et fém. bogisa « iris », cf. bôzûr « pivoine » (§ 1132)<br />
§ 1154. Suffixe -uxu. — V. si. druzuxu (Cyr. Jér.) «homme<br />
audacieux ».<br />
Y. si. kozuxu (Ham.) « vêtement de fourrure, pelisse », r. kozux,<br />
s.-cr. kdzuh, etc., sur koza « peau ».<br />
Y. si. pastuxu «pâtre», pol. pastuch, à côté de pastyrï (§ 1131),<br />
et sûrement variante plus familière de cet emprunt au roman ;<br />
et s.-cr. pàsiûh « étalon », slov. pastûh, sur s.-cr. pâsë-, pàsti<br />
« couvrir une jument », de opasli « soigner, servir » (§ 783).
[§ 1154] SUFFIXES EN -S- ET -x- 673<br />
Y. si. (Théod.) ovicuxu « berger » ; et r. dial. ovcûh « tique ».<br />
Slavon voluxu. « bouvier ».<br />
V. r. konjuxu et mod. kônjux « valet d'écurie », pol. koniuch.<br />
Et r. svinûx « porcher ».<br />
Slavon otïcuxu « parâtre », s.-cr. ôëûh, slov. oëuh et oëih, sûrement<br />
hypocoristique, comme v. si. zenixu (§ 1151), de slov. çëim, etc.<br />
(§ 1069).<br />
Slavon russe (xv e s.) sopuxu « tuyau, siphon », v. tch. sopûch et<br />
mod. sopouch «tuyau pour la fumée», sur sope- (§ 431), et voir<br />
sopuxa.<br />
R. lopûx « bardane », pol. iopuch et iopien (§ 1092), tch. lopuch<br />
et -ouch, s.-cr. làpûh, slov. lopûh, sur lop~ dans lopata « pelle », lit.<br />
lapas « feuille » (§ 1172).<br />
V. r. pamçtuxu « qui se souvient », et r. pâmjaiûx.<br />
V. pol. pietuch, r. petûxn coq », voir pëlïlu (§ 1055).<br />
Slavon, et sans doute v. si., trïbuxu Ijutomyi « caillette » (§ 468),<br />
v. tch. terbuch « abdomen » et slovaque terbuch, slov. trébuh,<br />
s.-cr. trbuh ; r. trebuxd, fém., « tripes », et trebûx « goinfre ». Mais<br />
l'aspect du mot est d'un composé à premier terme trï-, le second<br />
terme étant sur le thème bu x- «s'enfler» (§ 759) : il doit donc<br />
s'agir à l'origine de l'estomac des ruminants à trois poches, panse,<br />
bonnet, feuillet, et quatre avec la caillette, et ce n'est donc pas<br />
un dérivé en -uxu. Non plus que :<br />
pol. iancuch «chaîne», v. tch. lancûch, et r. lancûg (§ 1013),<br />
emprunt à m. h. a. lann-zug.<br />
Dans les langues slaves modernes, le suffixe présente une certaine<br />
extension :<br />
r. boltûx « bavard » (et boltûn, § 1103) ; ôlux « benêt, lourdaud »,<br />
qu'on suppose être la continuation du slavon voluxu « bouvier » ;<br />
zjablûx« homme frileux » sur zjdblyj « transi de froid » (§ 1049), etc. ;<br />
pol. leniuch « paresseux », mieszczuch (et mieszczanek) « petit<br />
bourgeois», niewiesciuch «efféminé» (adj. niewiesci «de femme,<br />
niewiasta »), etc. ;<br />
tch. blatouch (v. tch. -ûch) « bouton-d'or, souci d'eau », sur<br />
bldio ; kolouch « faon » et v. tch. -ûch, inexpliqué, mais qui fait<br />
penser au slavon kolunù attesté surtout par le roumain ancien colun<br />
« onagre », avec extension à l'ouest du nom de l'onagre d'Asie,<br />
turc kulan, r. kulân ; padouch « coquin », v. tch. padùch et pol.<br />
dial. paduch ; etc. ;<br />
slov. debeluh « à gros ventre », oderûh « écorcheur, usurier »,<br />
potepûh « vagabond », skopûh f« avare », etc. ; et piruh « œuf de<br />
Pâques », avec réduction à pirh, verbe pîrhati « teindre en rouge »<br />
(les œufs de Pâques), sur le thème pyr- de tch. pyriti se « rougir »<br />
22
674 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10<br />
(§ 176), slov. zapiriti se, h. sor. pyric « chauffer », s.-cr. (u-)piriti<br />
« attiser le feu » ;<br />
s.-cr. rèpuh « tussilage », sans doute sur rêp « queue », et slov.<br />
repûh, mais contaminé avec lopûh « bardane ».<br />
§ 1155. Suffixe -uxa. — Y. si. gorjuxa (Gonst. Pr.) « moutarde »,<br />
adj. gorjusïnû, et gorusïnu (Év.), bulg. goruha, et s.-cr. gorùsica :<br />
aspect d'hypocoristique, non pas de gorïku « amer », mais goruxde<br />
v. si. gorçst- « brûlant », et gorjux- sur le plus récent gorçst-<br />
(§ 588).<br />
Y. si. pazuxa « aisselle », r. pâzuxa, pol. et tch. pazucha ; s.-cr.<br />
pàzuho, avec changement de genre sur le duel v. si. -së ; slov.<br />
pâzduha et pâzuha, la forme usuelle étant pâzha. En baltique, le<br />
lette a paduse, et le mot est expliqué par skr. dos-, av. daos- « haut<br />
du bras » : le sens est donc « dessous de bras », en slave avec préfixe<br />
paz- (§ 1223) et remaniement.<br />
Slavon crunuxa, qui est r. cernûxa « nielle », pol. czarnucha<br />
« nielle » et « vache noire », tch. cernucha, slov. ërnûha (s.-cr. dial.<br />
crnika, comme r. cerntka « myrtille », § 1045).<br />
Slavon musenuxa (xvi e s., Srezn., Suppl.), qui est r. msonuxa,<br />
msanuxa (DaV) «chambre calfeutrée» avec de la mousse, sur<br />
msit' « calfeutrer », part, passif msônyj.<br />
R. ropûxa « crapaud », pol. ropucha et tch. dial. rapucha, sans<br />
explication satisfaisante.<br />
Pol. sopucha « tuyau pour la fumée » et r. sôpuxâ, voir sopuxu.<br />
En russe, -uxa connaît une petite productivité dans la langue<br />
populaire :<br />
sopûxa «femme qui ronfle», masc. sopun «ronfleur» (§ 1103) ;<br />
starûxa « vieille femme » ; vostrûxa « une espiègle » sur (vJôsîryj<br />
« piquant, ingénieux » ; strjapûxa « cuisinière » sur strjapat' « faire<br />
la cuisine » (§ 431) ; pobiruxa « mendiante », voir pobirôxa ; golodûxa<br />
« faim », sur gôlod, sinjûxa « cyanose », zolotuxa « scrofules », etc.<br />
En polonais : dziewucha « fille » sur dziewa ; pielucha « lange »<br />
en regard de v. si. pelena (§ 1097); zawierucha «tourbillon,<br />
tumulte » en regard de wir « tourbillon » (§ 777), zawrec « bouillonner<br />
» ; etc.<br />
En tchèque : dëvucha «jeune fille » ; lopucha, variante de lopuch<br />
« bardane ».<br />
En slovène : zlatûha « bouton-d'or », potepûha « vagabonde ».<br />
§ 1156. Suffixe -us. — Pol. cienkusz «boisson faible, petite<br />
bière » sur cienki « fin, peu consistant » ; utracjusz « dissipateur »sur<br />
utracic « perdre, dissiper » ; etc., et chudeusz « pauvre diable »<br />
sur chudy « chétif » ; c'est la finale latine -us, donnant -usz.
[§ 1157] SUFFIXES EN -5- ET -X- 675<br />
Tch. dëdous « grand-père », starous « petit vieux » ; bëlous et<br />
bëlos « cheval blanc », chocholous « alouette huppée » sur chochol<br />
« panache », chocholka « huppe » ; etc.<br />
Slov. belûs « variété d'asperge » ; mecûs « œuf à coquille molle »,<br />
sur mçëa « le mou ».<br />
Suffixe -usa :<br />
S.-cr. ôskorusa « sorbier », tch. oskeruse, pol. skorusza et skoruch,<br />
slov. oskôrus, mot inexpliqué : il doit être plus ancien que son<br />
synonyme pol. jarzqb, tch. jerâb, slov. jerebika, r. rjabina, qui est<br />
l'adjectif *jarçbu « moucheté ». tch. dial. jeraby, slovaque jarabij,<br />
r. rjabôj, en regard de jarçbï « perdrix » (§ 999).<br />
R. milûsa « jolie personne », klikûsa « femme criarde, enragée »,<br />
kopûsa « lambine » (kopâl'sja « lambiner »), krjakûsa « canard »<br />
(.krjâkat' « cancaner »), volokusa « traîneau », xlopùsa « claquette »<br />
sur xlôpat', etc.<br />
V. tch. L'ubusë, mod. Libuse, etc., dans des noms de personnes ;<br />
le suffixe usuel est -uska : dëvuska sur dëvucha.<br />
Slov. blebetûsa « une bavarde », debelûsa « une grosse femme »,<br />
pepelûsa « cendrillon », rogûsa « pieu à pointes », etc.<br />
S.-cr. djevèrusa «demoiselle d'honneur» (djëvêr «garçon d'honneur<br />
»), govàrusa « bavarde », namigusa « aguicheuse, qui lance des<br />
œillades» (nàmignuti), pepèljusa «cendrillon»; etc., suffixe assez<br />
productif.<br />
§ 1157. Finales en -us- :<br />
R. dial. bôltus « bavard » et boltûn, boltûx ; râbus « larbin » ;<br />
svintus « homme dégoûtant, un cochon », comme pol. êwintuch.<br />
Pol. caius « baiser », de caiowac ; derus « écorcheur » ; morus<br />
« saligaud », peut-être sur le thème d'emprunt mor- « Maure,<br />
noir ».<br />
Tch. divous « un sauvage, un garnement » ; mrnous « mioche »,<br />
et neutre mrnë, adj. mrnavy « tout petit ».<br />
Et en polonais -us :<br />
caius « embrasseur », lalus « petit gommeux » sur lala « poupée »,<br />
mqzus « petit mari » ; et noms de personnes : Stefus, etc.<br />
Et fém. -usia :<br />
matusia «petite maman»; côrusia « fifllle », gebusia «petite<br />
bouche, gqba » ; et noms de personnes : Franusia, etc.<br />
Le russe dialectal slepûs'ja, à côté de slepys, « rat-taupe », un<br />
rongeur, a une allure polonaise.
676 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Est à part l'adverbe v. r. (xm e s.) miiusï « alternativement »,<br />
ukr. mytus', et verbe mitusati sja « alterner » en russe ancien, sur<br />
le thème mit- (§ 796).<br />
§ 1158. Dérivés de formes en -x-, — Pour mesurer l'importance<br />
en slave des formations en -x-, expressives, hypocoristiques, il<br />
faut considérer également leurs dérivés.<br />
On a rencontré un élargissement de thème en -x- dans zna-x-or-,<br />
ba-x-or- (§ 1126), et dans le moyen-bulgare zenxar- (§ 1128) ; et<br />
tch. tchdn «beau-père», fém. tchyrië, sont les dérivés d'un hypocoristique<br />
tch- de v. si. tïstï (§ 1094).<br />
Les dérivés en -sk- sont largement développés dans toutes les<br />
langues, d'une façon en bonne partie indépendante des suffixes<br />
en -x- et -s-. Il suffira d'indiquer les différents types en russe :<br />
vorôbysek « petit moineau » ;<br />
domisko « masure », zërnysko « petit grain », gôrjusko « petit<br />
chagrin, gôre » ( § 924) ;<br />
milâska « personne charmante », voriska « petit voleur », zemliska<br />
« mauvais-terrain », déduska « petit grand-père », golôvuska « petite<br />
tête », vertûska « pirouette » et « personne volage, girouette ».<br />
La formation la plus intéressante est celle des dérivés d'adjectifs<br />
en -xn- :<br />
r. dial. boljâxnyj sur bol'sôj « grand », compar. bôlee ;<br />
pol. bieluchny « tout blanc », cieniuchny « très ténu », dawniuchny<br />
« très ancien », maluchny « tout petit » ;<br />
slov. mdlehen, fém. -hna, et mdjhen « tout petit », gôtehen « tout<br />
nu », sdmehen « tout seul » et sdmen, pôlhen « tout plein » sur pôln ;<br />
s.-cr. làgahan, gén. -hna, « léger, facile », ancien et dial., et mod.<br />
làgan, fém. lâgana, sur là(h)k-, v. si. lïgûku ; et kajkavien legehen,<br />
slov. tdhen, fém. tdhna, sur lâhek, Idhka ; màlahan ; mlâdahan,<br />
puis mlàdan ; punahan, pûnan ; etc., et aussi làguhan et lagûsan ;<br />
tànahan, tànan « mince » et tanûsan.<br />
Ce type en -xn- est sûrement ancien, bien que, comme appartenant<br />
à la langue expressive, il ne soit attesté qu'à date assez<br />
récente, en serbo-croate depuis le xv e siècle. Il s'agit de dérivés<br />
à suffixe -nu (§ 1070) d'hypocoristiques en -x-, et avec -x- maintenu<br />
sans la réduction du groupe xn à n (§ 39).<br />
Le slovène et le serbo-croate supposeraient *-ùxnu, mais la<br />
finale -uxu de vetuxu (§ 1138) apparaît isolée : il s'agit sûrement<br />
de -xn- après voyelle reporté directement sur le thème en consonne,<br />
de laguhn- sur -uh devenant}ag(d)-hn- sur lag-.
CHAPITRE XXXV<br />
SUFFIXES EN -f-<br />
§ 1159. Suffixe -tû. — Comme suffixe d'adjectifs, il fournit des<br />
ordinaux : v. si. cetvrûtû « quatrième » et lit. ketviftas, gr. Ts-rapToç,<br />
lat. quârtus, etc. (§ 312) ; il fournissait des superlatifs, en grec<br />
-MTTOÇ et -TOCTOÇ (§ 293), mais le type est perdu en slave, sauf des<br />
vestiges, d'ailleurs importants : nevësta «jeune mariée», prûvësnu<br />
«premier-né» (§ 1071), sans doute suffixes -osti (§ 909) et -astû,<br />
-istu (§ 991). Et surtout il sert à la formation du participe passé<br />
passif, en partie éliminé en slave par le suffixe -nu, mais subsistant<br />
dans plusieurs types verbaux, et d'autre part conservé dans une<br />
petite série d'anciens adjectifs verbaux (§ 408) :
678 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
(§ 891), ce qui écarte tout rattachement à la racine es- «être»,<br />
mais en autorise un à celle de lit. âiskus, iskis, yskus, si. jasnû<br />
(§ 1070);<br />
zlatu « d'or », r. zolotôj, etc., lit. dial. zeïtas, et :<br />
ztûtu « jaune » (J. Ex.), r. zëliyj, tch. ztuty, etc., lit. geïtas, sur la<br />
même racine balto-slave gel- et zel- (§ 12), avec un verbe lit. zélti<br />
« verdir », adj. verbal si. zelenu « vert » (§ 409).<br />
L'adjectif slavon xlaslu « célibataire », r. xotostôj, est une variante<br />
de v. si. xlaku (§ 1038), et si xlaku s'explique comme emprunt au<br />
germanique, on doit supposer que *xolstu, qu'il est difficile d'en<br />
séparer, répondrait à *xolk-tu avec substitution à *xolk- d'un<br />
thème hypocoristique (§ 1139) *xolx-.<br />
D'autres formes encore laissent supposer des adjectifs en *-lo- :<br />
l'adjectif setïnu « dernier » sur *sek-to- et la racine *sek w -<br />
« suivre » ( § 434) ;<br />
le comparatif v. si. vçstii « plus grand », sans doute sur *wink-to-<br />
(§ 290), racine *weik- (§ 450).<br />
le verbe botëti « être luxuriant », sur *bog-to- et la racine de bogû<br />
« dieu » (§ 583) ;<br />
prçtati «comprimer» (§ 808) et prgtu «baguette» (§ 1161) sur<br />
*pring-to- (§ 36) et la racine de prçze- « tendre » (§ 435) ;<br />
su-klëstiti «serrer» sur *kleis-to- et la racine klis- (§ 744) ;<br />
pëstovati « garder les enfants », pëstunu « précepteur », sur *pis-tu<br />
et le thème pit- (§ 1102) ;<br />
ristati « courir » et lit. rlstas « rapide » sur la racine rit- (§ 654) ;<br />
tçtiva « corde (de l'arc) » sur *ten-t- de la racine *ten- « tendre »<br />
(§ H89) ;<br />
slavon vrësta «sac», sur *ver-l- de vire- (§ 1026).<br />
Et grçst- de grçstoku. « pénible » peut-être sur la racine *grud-,<br />
zest- de zestokû « rude », peut-être sur la racine *ged- ( § 985) ; et<br />
tous les adjectifs verbaux qu'on peut supposer à la base des<br />
abstraits en -tï, ainsi, pour *ëstï « le manger » (§ 1169), un participe<br />
passif *ës-tû de *ëd- antérieur à v. si. jadenu.<br />
Mais on écartera prostu « debout, droit, simple », composé<br />
à second terme -stu (§ 819) ; — sytu « rassasié », sur un emprunt au<br />
germanique à racine *sat- (§ 618) ; — s.-cr. et slov. cvrsl « solide »,<br />
altéré de *ëïrsîvu (§ 1182).<br />
L'adjectif pol. dial. szuty « sans corne », tch. dial. et slovaque<br />
suty, s.-cr. sM et bulg. sut, est inexpliqué et n'est pas analysable,<br />
des formes s.-cr. skka et s Ma « chèvre sans cornes » étant<br />
évidemment hypocoristiques.<br />
Il en est de même pour s.-cr. skrt « avare », slov. skrt (§ 813).
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 679<br />
§ 1160. Substantifs. — Le grec a un type en -TOÇ, à vocalisme<br />
radical o, comme s'il s'agissait de postverbaux de présents suffixaux<br />
en -te- : VOOTOÇ «retour» sur VÉO^AT «je m'en retourne», cpop-ROÇ<br />
« fardeau » sur
680 SUFFIXES DIVERS [§ 1-10]<br />
«pilonner», sur pïxati «concasser» (§ 468); et lit. piestà (acc.<br />
piësîq) « mortier », dial. piëstas « pilon ».<br />
R. kôlot « pilon », pol. dial. Mot « billot », et v. tch. et dial. Mât<br />
(s.-cr. et slov. klâto, § 1164), base et en même temps postverbal de<br />
r. kolotit' «battre», etc. (§ 772), de *kol-tû, comme lit. kâltas<br />
« ciseau », sur kol-, lit. kal- « frapper, etc. » (§ 530).<br />
V. si. mlatu « marteau », r. molol, etc., qui doit être sur un thème<br />
*mal- autre que celui de v. si. melje- « moudre » (§ 772).<br />
V. si. moslu «pont» (§ 738), sur met- «jeter», et lit. mèslas,<br />
mâstas « mesure », sûrement aussi sur met- en un sens évolué.<br />
V. si. polu « sueur », de *pok-tu (§ 36).<br />
Slavon brulu « clou », bulg. brut « cheville de fer », qui s'explique<br />
par *brouk-to- sur le thème bruk- de lit. (i-)brùkti « faire entrer en<br />
pressant », braûkti « essuyer » (si. brusnçti « racler », § 754).<br />
V. si. trçhï « troupe » et « faux-bourdon », qui admet également<br />
une explication par *trçk-tû en regard dé lit. trenkti « pousser »<br />
(§ 766).<br />
V. r. nerestu (xiv e s.) de *nerstu «frai» et r. mod. nérest, pol.<br />
mrzost, s.-cr. mrîjest (masc. et fém.), slov. mrêst « frai » et « rut »<br />
(masc.-.et fém.), sur thème * tiers- d'après lit. nefsti « frayer », subst.<br />
nafsas et narstas ; et voir s.-cr. nèrâst « verrat », nârasl « accouplement<br />
», § 774.<br />
R. lët« vol », etc. s'analyse bien en *lek-t-, mais c'est le postverbal<br />
de letëti (§ 804), et l'élargissement -t- est dans le verbe. On a dans<br />
les mêmes conditions plusieurs substantifs à finale -tû qui sont ou<br />
ne sont plus que des postverbaux :<br />
v. si. vëtû « pacte », etc. (§ 747) ;<br />
slov. slût «pressentiment», de slàtili «pressentir» (§ 758),<br />
grûst « dégoût » de grustiti (§ 985) ;<br />
v. si. svatû (Ham.) « parent par alliance », en regard du verbe<br />
svatiti sç « se lier par alliance », qui a l'aspect, parallèlement à<br />
xvatiti « saisir », d'un factitif du thème *svot-, *xvot- (§ 601), élargissement<br />
en -t-, comme gr. ' (F)éTTlcJ « parent », du pronom réfléchi<br />
*swo- et rejoignant le participe passif lat. suë-tus « accoutumé ».<br />
Pour pol. glist et glista «ver», voir § 1165 ; pour v. si. paprûtu<br />
« porche », voir *pïrtï, § 1168, et pour s.-cr. et slov. gât « barrage »<br />
voir galï, § 1170 ; etc.<br />
§ 1161. — Un nombre considérable de masculins à finale -tû<br />
sont d'origine plus ou moins douteuse ou complètement obscure :<br />
*berstu « orme », r. bérest, s.-cr. brïjest : un rattachement à *berza<br />
« bouleau », r. berëza, s.-cr. brëza, et skr. bhûrjah, a toutes chances<br />
d'être trompeur.
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 681<br />
Y. si. listû « feuille », s.-cr. lîst, gén. lîsta, qui paraît présenter un<br />
suffixe *-lu- d'après son collectif lislvije (§ 160), mais ce collectif<br />
peut être analogique de vëtvije « branches » ; en regard de lit.<br />
lalskas, qui autoriserait à une analyse *leis-t-.<br />
V. si. lyst- dans loc. plur. vu lystexu Ps. GXLVI, 10, slavon<br />
lystu «jambe, mollet» (et lysto), s.-cr. lîst, pol. ancien lyst (et<br />
iysta) : la forme vieux-slave, en rédaction slavonne, indiquerait<br />
sans le garantir un masculin en -ï ; sur thème lyd-, inexpliqué,<br />
d'après pol. mod. lyda et lydka, r. et tch. lytka, slov. lîtka.<br />
Slavon russe (xiv e s.) plastu, composé plastoglavu « à tête large »<br />
(§ 1215), r. mod. plast « bande, couche », slov. plâsl (masc. et fém.)<br />
« couche, javelle, tas de foin », s.-cr. plâst « tas de foin », tch. plâsl<br />
« rayon de miel » ; sur le même thème que l'adjectif v. si. plosku<br />
« large, plat », pol. plaski (§ 1065), donc indiquant quelque chose de<br />
plat, ou de couché à pl^t comme le foin fauché ; on compare à<br />
lit. plâstaka « plat de la main ».<br />
V. si. prùsiu « doigt », r. persl, s.-cr. prst, et lit. pifstas ; rapprochement<br />
proposé avec v. h. a. first « sommet, faîte » et skr. prsthâm<br />
« saillant, sommet », ce qui pourrait indiquer un composé ancien<br />
*pr-sl(h)o- du type de pro-stu (§ 819), au sens de «qui se tient<br />
devant », avec le premier terme *pr- qu'on a dans si. *pïrvu<br />
« premier », lit. pirmas (§ 312).<br />
V. si. xvostû « queue », qui peut être un emprunt au germanique<br />
(§ 744).<br />
V. si. xvrastu « buisson », qui peut être le postverbal d'un verbe<br />
en -tati (§ 775).<br />
R. dial. xist et ukr. xyst « souplesse, adresse », adj. r. xistnyj<br />
« adroit » et ukr. xystkyj « doué », qui pourrait être rattaché au<br />
thème xyt- de xytru «habile» (§ 1112) ; mais ukr. xystkyj signifie<br />
aussi « qui balance », et il s'agit alors du thème expressif de r.<br />
xistit' « remuer », pol. chystac « balancer », et tch. et v. tch. chystati<br />
«préparer, apprêter», qui réunit les idées de se remuer et d'être<br />
souple.<br />
Y. si. prçlù (Gr. Naz.) «verge, baguette», coll. prçtije (§ 925),<br />
r. prul, s.-cr. prûl, qui pourrait être en rapport avec v. si. prçtati<br />
«comprimer» (§ 808), non évidemment comme postverbal, mais<br />
en partant d'une même base *pring-lo- (§ 36).<br />
V. si. prutû « tissu de lin » (servant de mèche), r. port « tissu<br />
grossier » et plur. porty « vêtements », slov. prt « toile », adj. s.-cr.<br />
piien «de toile, de lin», dérivé, v. si. prutiste «haillon» (§ 950) :<br />
le mot pourrait à la rigueur être rattaché à une des racines *per-,<br />
par exemple celle de porje- « fendre », mais il peut aussi bien s'agir<br />
de tout autre chose, et d'un emprunt.<br />
V. si. rutû « rostre » (Supr. 40016 retï, corrigé par Mikl.) et
682 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
« museau » (Cosmas 12122), obrutiti « museler », r. rot « bouche », etc.<br />
(§ 813) : le sens rapproche le mot de v. si. rylo «houe», r. rylo<br />
« museau », s.-cr. rïlo « groin » (§ 943), ce qui doit en faire un dérivé<br />
de la racine de ruv-, ryti et rûvati (§ 465) ; le degré réduit ru- se<br />
rencontre dans skr. rutâh, lat. dï-rutus. Dès lors, il est possible<br />
d'expliquer de même le slavon :<br />
SI. krutû « taupe », r. krol, s.-cr. krt, par une forme kru- de kryti<br />
« couvrir, cacher », part, passif kruvenu, et plus précisément par<br />
une forme abrégée du composé slavon krutoryja (§ 730) ; un<br />
rattachement à lit. krutùs « remuant », krutù, krutëti « se remuer »<br />
est évidemment moins satisfaisant, et ce thème krut- du lituanien,<br />
qui est isolé, peut être suspecté d'être un emprunt au russe krut-<br />
« raide » au sens plus ancien « se tortiller, se remuer » de v. si.<br />
krqtati (§ 762).<br />
Y. si. sutû « gâteau de miel », r. sot, s.-cr. sât : une interprétation<br />
proposée par *sup-to- sur supe- « répandre, verser » ne s'impose pas<br />
plus que celle par *suk-to- sur *suk- de lit. sunkti « faire suinter »,<br />
si. soku « sève » (§ 544).<br />
Y. r. (xi e s.) sulu « bouffon » et mod. sut, slov. sûtec «niais », est<br />
expliqué par lit. siaûsti « vanner, jouer, se déchaîner », siuntù,<br />
siûsti « devenir fou » (si. sçtati sg, § 808), dont le thème *seutserait,<br />
d'après le lette sautis « fou », un élargissement en -t- de<br />
la racine de lit. sduti « pousser », si. sovati « lancer » (§ 469).<br />
§ 1162. — D'autres substantifs en -tu apparaissent complètement<br />
inanalysables :<br />
r. bal « bâton », s.-cr. bât, etc. ;<br />
r. ëèrt « diable », pol. czart, tch. ëert, etc. ;<br />
r. gtot «gorgée», s.-cr. gût «gosier», etc., et lat. glut(t)us<br />
(§813);<br />
pol. gnat « os », tch. hnât « jambe » et « os », s.-cr. gtijât « jambe,<br />
tibia », et slov. gnjât, fém., « cuisse », qu'un rapprochement avec<br />
v. h. a. knoto « nœud » ne permet pas mieux d'interpréter ;<br />
v. si. (Gr. Naz.) grotû « vase à boire », tch. dial. et slovaque<br />
hrot et s.-cr. et slov. grôt « trémie (de moulin) », et un mot différent :<br />
pol. grot « fer de flèche, javelot >>, tch. et v. tch. hrot « pointe »,<br />
qu'on compare à m. h. a, grât « arête, Gràte » ;<br />
r. sest « perche, gaule » et « mât », isolé et inexpliqué.<br />
D'autres substantifs sont des mots d'emprunt :<br />
v. si. ptatû « pièce de linge », probablement, et c'est sûr pour<br />
platû « lame, plaque » (§ 784) ;<br />
v. si. skutix «pli du vêtement» (Upir', Ham.), s.-cr. skût «pan<br />
du vêtement » et « giron, sein », qui est got. skaut- « bord du<br />
vêtement », m. h. a. scôz « sein, Schoss » ;
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 683<br />
y. si. slilu « bouclier » ( § 796) ;<br />
slavon prustû « porche, nartex », bulg. prust « vestibule », d'un<br />
roman *proôstium, romanisation de -rcpôOupov.<br />
Le slavon vlatu. « géant », v. r. vololu et mod. vôlot, ukr. vélet,<br />
est sûrement le nom des Yélètes, peuple ancien devenu légendaire.<br />
Et l'on mettra à part les postverbaux, comme plolu (§ 724) sur<br />
plete-, de *plek-le- (§ 429), où l'élargissement en -t- est dans le<br />
verbe ; slov. eût de ëûtiti (§ 758), klêst « ébranchage » (§ 747).<br />
Pour r. but « moellon », voir buta (§ 1166) ; pour ukr. vôlot, slov.<br />
et s.-cr. vlâi « panicule, épi », voir *voltï (§ 1171).<br />
§ 1163, Suffixe -to. — Le sanskrit a des neutres en -t(h)am :<br />
âstam « demeure », ukthdm « parole » ; et le grec en -rov : TCOTOV<br />
« boisson », «purôv « plante ». En baltique, seul le vieux prussien<br />
conserve le neutre (§ 125),-en présentant tout un type de neutres<br />
en -tan :<br />
anctan « beurre », sur la racine *eng v - de lat. unguô «j'oins » ;<br />
buttan «maison», voir si. bytù, § 1160;<br />
dalptan « poinçon », v. si. dlato ;<br />
meltan « farine » (lit. miltai, plur.), sur mal-, mel- « moudre » ;<br />
saytan « courroie » (lit. sallas « corde »), sur *sei-, si. sëtï « filet »<br />
(§ H68) ;<br />
saltan « lard », de sal-t-, si. *soltï « salant » (§1170) ;<br />
spaustan « pivot de meule », sur spaud-, lit. spâusti « presser »,<br />
spaudà « presse » ;<br />
twaxtan « balai (pour le bain?) », qu'on rattache moins sûrement<br />
à un thème *twak-s-, got. pwahan « laver » ;<br />
piwa-mallan « malt (de bière) », du germanique, ou du slave, tch.<br />
mlâto ;<br />
et l'obscur baytan.<br />
§ 1164. En Slave. — V. si. blato «marais », r. bolôlo, s.-cr. blâto,<br />
sur thème *bol-, lit. balà « marécage », lette bala « vallée limoneuse »,<br />
et *bôl- dans v. h. a. pfuol « mare ».<br />
Y. si. dlato (Upir') « ciseau, burin », r. dolotô, pol. dUto, tch. dlâto,<br />
et s.-cr. dlijèlo, slov. dlélo, bulg. dletô, sur *dïlbe- « creuser » (§ 769),<br />
v. pr. dalptan.<br />
V. si. pgto « entrave », r. pûto, s.-cr. puto, et v. pr. panto (fém.),<br />
lit. pdnlis, sur pïne- « tendre » (§ 457).<br />
Slavon siio « crible », r. s'rfo, s.^cr. sito, et lit. slelas, sur *sëi-,<br />
v. si. së(ja)ti « cribler» (§ 512).<br />
V. si. tësto «pâte» (Izb. Svjat., Ham.), r. tésto, s.-cr. lijeslo, et<br />
v. irl. tais, de *tais-to- à thème *tais-, base probable de tisk-, tësk-<br />
« presser» (§ 561).
684 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
V. si. vrala « (grand-)porte », plur., r. vorôtâ, s.-cr. vrâta, et v.<br />
pr. warto (fém. ), lit. variai (§ 125), sur le thème *ver- de vïre-<br />
« ouvrir, fermer » (§ 453).<br />
V. si. zito « céréale », r. zito, s.-cr. zito, et v. pr. geils qui peut<br />
être un ancien neutre (mais geili- dans le Vocabulaire), sur thème<br />
*
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 685<br />
sur jûosiu, jûosli « ceindre » (§ 551), brastà « gué » sur bredù, bristi<br />
« passer à gué », etc. En slave, sont clairs :<br />
V. si. pçta « talon », r. pjatd, s.-cr. péta, et v. pr. pentis « talon »,<br />
lit. péniis « dos de la hache », sur ptne- « tendre », r. pnul' « pousser<br />
du pied » (§ 457) : c'est le tendon du talon.<br />
V. si. vrusta «(rang d')âge», r. verstâ «rangée, verste », s.-cr. et<br />
slov. vrsta «rang, série, sorte», à côté de *-vïrstï (§ 1169) et de<br />
tch. vrstva «couche» (§ 915), sur vïrt- (§ 592), et lit. varslas<br />
« longueur du sillon » (jusqu'à ce qu'on tourne la charrue), v. pr.<br />
aina-wârst « une fois » (§ 330), lat. uersus « tour (de charrue), sillon,<br />
ligne ».<br />
On peut interpréter de même :<br />
V. si. cësta «place » (Ps, CXLIII, 14), tch. cesla « chemin », s.-cr.<br />
cësta, slov. césta, non sur la racine *(s)kïd- de cistû «pur», cëstiti<br />
«purifier» (§ 616), mais plutôt, d'après le sens, sur la racine plus<br />
isolée de lit. kâisiu, kâisti « lisser, frotter », kâisiuvè « racloir »,<br />
v. pr. coeslue « brosse », cf. r. tor « chemin frayé » sur *luii « frotter »<br />
(§ 728).<br />
R. glistd « ver » (et glist), pol. glista « ver de terre », tch. hlista<br />
(et hllst), s.-cr. et slov. glista, sur la racine *glei- de lit. gliëti<br />
« enduire » (§ 515), v. si. glënû « mucosité » (§ 1073), à élargissement<br />
glit- dans lit. glitùs « gluant », glaïslas « ciment, mastic ».<br />
V. si. krasla « croûte (de lépreux) », r. korôsta « gale », pol. krosta<br />
« pustule », v. tch. krâsta, s.-cr. krâsta « croûte », slov. krâsta, sur<br />
*kars- de lit. karsiù, kafsti « peigner la laine », lat. cârô, carrô<br />
« je carde » : l'intonation rude du slave peut être celle d'un dérivé<br />
à vrddhi ( § 708) au sens de « raclure de carde ».<br />
Tch. dial. et slovaque pl'uta «mauvais temps», pol. pluia<br />
(et pluchota, pluskota), le « crachin », sur plju- de pljïvati « cracher »,<br />
prés, pljuje- (§ 528), contaminé en polonais avec pljusk- «faire<br />
jaillir l'eau, clapoter », pol. pluskac, pluchac (§ 759).<br />
S.-cr. ruta « poil », adj. rûlav « poilu, velu » comme runjav dérivé<br />
de râno « toison », et slov. rùta « fichu, mouchoir », sur *reu- de<br />
ruvaliv. arracher », comme v. si. runo (§ 1074).<br />
Slavon s Iota, r. dial. slôta « temps de pluie et de neige », pol.<br />
slota, tch. slola, s.-cr. slôta : ce mot ne peut pas avoir de rapport<br />
avec lit. sâlti « avoir froid », v. si. slana « gelée blanche » (§ 1075),<br />
mais il peut s'expliquer par *slop-ta, sur le thème slap- de lit.<br />
slâpias « humide », slàpti « devenir humide ».<br />
R. trâta « dépense, perte », pol. trata, etc., n'est plus que le<br />
postverbal de tratili, mais ce mot ou une autre forme en -i- en a été<br />
la base, en regard de lit. trûolas « pierre à aiguiser », sur thème<br />
*trô- (§ 784).
686 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
Le tchèque podstata « substance » est sur le thème sta- le calque<br />
vieux-tchèque de lat. substantia.<br />
Le serbo-croate cèsta « fourré » est une formation récente sur<br />
l'adjectif cçstu, en regard de r. câsca (§ 1024) ; pour lôpla « balle »,<br />
voir lopata, § 1172.<br />
Pour pesta « pilon, moyeu », voir pëstû (§ 1160) ; pour s.-cr. pluta,<br />
voir plûto, et de tels flottements de forme ne sont pas rares.<br />
Est à part tch. poberta « voleur, chipeur », masculin, à côté de<br />
pobera, sur po-befe- «enlever» (§ 728). ,<br />
§ 1166. Formations obscures. — Beaucoup de mots en -ta ne<br />
s'analysent pas :<br />
Y. si. ëeta « troupe » (Cyr. Jér., Gr. Naz.), verbe pricetati « associer<br />
», sucetati sç «s'unir», r. cetâ «couple» s.-cr. cela «troupe»,<br />
n'a qu'un rapport vague avec lat. caterua.<br />
Slavon gtota « foule, presse », ukr. htotd, bulg. gtôta, s.-cr. dial.<br />
Btôta « famille, pauvres gens » et « mauvaise herbe dans les blés »<br />
ot gtotina (depuis le xv e siècle) « céréales autres que le blé », slov.<br />
gtôta « mauvaise herbe, déchet dans le froment » : donc expressif<br />
au sens de « mauvaise graine », inexpliqué.<br />
V. pol. jata « tente, cabane », h. sor. jeta, et pol. mod. jatki<br />
« étal (de boucherie) » comme tch. jatky de v. tch. jatka « cabane »,<br />
et :<br />
v. si. (Const. Pr.) pojata « toit, maison, a-rsyr) », s.-cr. pôjata et<br />
slov. pojâta « cabane, étable, remise », inexpliqué.<br />
R. kita « tige, bouquet », etc. (§ 801), voir *kystï (§ 1171).<br />
V. si. puta« oiseau », et pûtica, putistï (§878), sur thème balto-slave<br />
put- que le latin puer « enfant », putlus « poulet » ne permet pas<br />
d'analyser de façon sûre, ces mots à valeur expressive à l'origine<br />
étant de forme flottante.<br />
V. r. rota «serment», v. si. rotiti sç, «jurer» (§ 738), a l'aspect<br />
de postverbal de lat. rota «roue» sur la racine *ret(h)~ de lit.<br />
risti « courir », si. ristati (§ 449), et voir r. rtut' « mercure » (§ 1178).<br />
La supposition d'une réduction de *wr- à r-, menant à un rattachement<br />
à skr. vratâm « prescription », gr. (F)prjToa « formule légale »,<br />
est arbitraire (§ 40), et le vieux-prussien wertemmai qui est invoqué<br />
à l'appui de cette explication ne signifie pas « nous jurons », qui<br />
est ktantemmai qui suit sur un emprunt à pol. klçty « juré », mais<br />
« nous tournons (l'imprécation) » sur lit. verciù, vefsti « tourner »<br />
(§ 494). Mais une identification de si. rota «serment» avec lat.<br />
rota « roue » est possible en admettant que le mot slave a désigné<br />
le « cercle », l'assemblée devant laquelle on prêtait le serment.<br />
Y. si. sëta « tristesse », inexpliqué (§ 747).<br />
V. si. svita «vêtement» (Cosmas 128ia, Ham. 4284), r. svita
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 687<br />
« surtout de drap », s.-cr. svîta « drap », slov. svîta « vêtement de<br />
femme » : le mot est usuel en vieux russe depuis le xi e siècle, et<br />
toujours écrit sv-, ce qui exclut une explication par su-viti.<br />
Le polonais et v. pol. buta « orgueil » a l'aspect d'un postverbal<br />
de bucic siç « être orgueilleux », sur le thème but- de r. butét'<br />
« devenir gros » et slov. buta « homme à grosse tête » : racine<br />
expressive sans doute, qui paraît différente de celle de slov.<br />
bûtiti « heurter violemment », dont r. but « moellon » peut être le<br />
postverbal, laquelle doit être un emprunt au germanique *bôtan<br />
« frapper », d'où fr. « bouter ».<br />
De r. tàta « morceau d'étoffe, pièce », pol. iata, tch. tata, la forme<br />
d'origine était *âltâ (§70) : on peut supposer un dérivé en -ta, au<br />
sens de « pièce piquée », de la racine *ël- de v. h. a. âla « alêne »,<br />
Ahle », skr. ira.<br />
Plusieurs mots sont des emprunts :<br />
r. pldxta « sac de grosse toile, cotillon », pol. piachta et tch.<br />
plachta « grosse toile, bâche, voile », slov. ptâhta et s.-cr. ptàhta<br />
« couverture, bâche, drap (de lit) », sûrement du germanique<br />
(§36), et v. si. ptastï « manteau » (§ 1020) doit en être le dérivé ;<br />
pol. szlachta « noblesse », de v. h. a. slahta « espèce », mod.<br />
Geschlecht « genre, race, lignée » ;<br />
slov. tfta « baguette courbée, hart », s.-cr. tria « cep de vigne »,<br />
glosé par ital. ritorta « hart », et donc pris à l'italien torta « tortillement<br />
» ;<br />
r. xâta « chaumière », pol. chata, qui doit venir d'un iranien katpar<br />
un intermédiaire hongrois ;<br />
pol. chusta (dès le xiv e siècle) «pièce de toile de lin», v. r. xusta<br />
(xiv e s.) et r. dial., ukr. et bl.-r. xùsta «mouchoir», qui doit être<br />
de xvusta, fusta (§ 9) et tiré du grec byzantin
688 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
S UFFIXE -tï<br />
§ 1167. — C'est un grand suffixe productif dans toutes les<br />
langues indo-européennes, depuis le hittite -zis. Il s'ajoutait<br />
directement aux racines, particulièrement aux thèmes verbaux.<br />
Le baltique a -lis à peu près comme en slave, dans des conditions<br />
moins claires en raison de l'ambiguïté de la finale -is de masculins<br />
et de féminins. En slave de même qu'en baltique, le suffixe n'est<br />
plus productif que sous sa forme fixée -ti de caractéristique de<br />
l'infinitif (§ 417). Dans la formation des substantifs dérivés, il a<br />
subi les restrictions générales des suffixes et désinences à initiale<br />
consonantique (§ 173), et il n'a pas été remplacé par une forme<br />
élargie : le suffixe -osti est d'autre origine (§ 909) et d'emploi tout<br />
différent, puisqu'il fournit des dérivés d'adjectifs et non, comme<br />
-tï, des dérivés de thèmes verbaux. Mais les restes de -tï sont<br />
très abondants en slave, et la formation se maintient si claire qu'elle<br />
retrouve, dans des créations nouvelles sur le modèle des anciennes,<br />
une certaine vitalité.<br />
On mettra à part les abstraits en -ï d'adjectifs en -tû (§ 711),<br />
comme sytï « satiété » et la série des nombres cardinaux, pçtï, etc.,<br />
et les adaptations d'athématiques, v. si. nostï «nuit» (§ 174),<br />
kostï « os » (§ 175), desçtï « dix » (§ 189). Parmi les masculins en -ï<br />
(§ 169), gostï « hôte » est inanalysable, tïstï « père de la femme » est<br />
de formation obscure comme le féminin svïstï « sœur de la femme » ;<br />
tatï « voleur » est sur un thème *tâ- qu'on peut avoir aussi dans<br />
v. slov. tatva (§ 915) et qu'on trouve ailleurs élargi en *tâ-y-<br />
(§ 791) ; zçtï « gendre » est sur la racine i.-e. *genh-.<br />
Le type important est celui des abstraits féminins en -tï.<br />
§ 1168. Sur thème en voyelle ou sonante. — V. si. po-bytï<br />
«victoire», prë-bytï (Pand. Ant.) «séjour», za-bytï «oubli»; r.<br />
byt' « l'être, le fait », v. tch. byt « essence, existence », s.-cr. bit<br />
« essence », dôbït « profit », ancien zabit « oubli » et mod. zàbïl<br />
« endroit écarté, retraite », slov. dobît, zabit ; skr. bhûtih, et gr.<br />
tpûmç ; et voir bylû, § 1160.<br />
Y. si. datï (J. Ex.) « don », blago-datï « bienfait, grâce », r. pôdat'<br />
« impôt », péredal' « premier cadeau du fiancé » ; et véd. dâti-,<br />
gr. Soffiç.<br />
V. si. blago-dëtï «bienfait, grâce» (§ 533), s.-cr. blagddjet (et<br />
-dat), slavonisme comme r. blagodât' ; et lit. dëlis « charge » et<br />
« lieu de ponte » (lette iz-dêt « pondre »), v. h. a. tôt « action », gr.<br />
Oscrtç « position ».<br />
V. si. dëti «enfants», vieux s.-cr. dëtï, collectif (§ 211), sur de-,<br />
lette dêl « téter », v. si. doiti « allaiter » (§ 511).
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 689<br />
V. si. sëtï «filet», r. set', tch. sii' ; et lit. siëtas et saïtas (§ 50)<br />
« corde », v. pr. saytan, sur lit. siëti « lier » ; et voir sitû « jonc »,<br />
§ 1160.<br />
Y. si. po-statï « manière » (II Cor., III, 10) ; r. stat' « stature,<br />
manière » et adv. nastât', podstât', kstâti « à propos », subst. postât',<br />
podstât' « portion d'un champ » (à moissonner) ; pol. postac« stature,<br />
l'orme » ; tch. podstât' « base, podstavec » et « substance » (v. tch.<br />
podstata, § 1165) ; mais stat' «article» est une adaptation de r.<br />
stat'jâ (§ 1028) ; slov. postât « portion de champ » (à bêcher), podstât<br />
« base, substance » ; et lette stâtis (plur.) «solstice», av. *stâti- et<br />
skr. sthiti-, gr. a-îc/.mç.<br />
Slavon vitï « tourbillon », pol. voie « baguette souple », h. sor.<br />
wic « une herbe des marais » et « goutte, arthrite », slov. vît « vis »,<br />
prévît «baguette, lien », , s.-cr. pàvlt «clématite» (§ 1220), sur<br />
vïje- «tordre», et sans doute v. si. vuzvitï «gain» (§ 515) ; et lit.<br />
vytis «baguette d'osier», Jat. uïtis «vigne».<br />
V. si. zitï « vie » (Supr., Gr. Naz.), pazitï « pâture », sgzitï (Pand.<br />
Ant.) « qui vit avec, Y; » (§ 1222), slavon dlugozitï |xaxpo6io>cjiç,<br />
r. pâzit', tch. pazit « pelouse, gazon », sur zi-, et voir ziru « pâture »,<br />
§ 795 ; et av. fïti-,<br />
-jçtï dans v. si. rçkojçtî « poignée, gerbe », r. rukojàt', pol. rçfeo/ese<br />
(pour -/gc), et v. si. rçkovçtï par amuïssement du / intervocalique<br />
(§ 15), s.-cr. rukovët, slov. rokovçt, tch. rukojet' et rukovët', sur<br />
*jïme-, jçli ; et lit. is-imtis « exception ».<br />
V. si. pa-mçtï « mémoire », r. pâmjat', s.-cr. pâmët, sur mïn-<br />
« penser » (§ 591) ; et lit. mintis «pensée» et -mintis «souvenir»,<br />
skr. matih, lat. mens, got. ga-munds. Autre racine mïn- dans :<br />
r. syromjât' « peau foulée à cru, non tannée » (dès le xvi e siècle,<br />
Srezn., Suppl.), sur mjat' « fouler » (§ 457), mais c'est l'abstrait en<br />
-ï du participe passif mjâtyj.<br />
-zçtï dans v. r. sënozatï « fauchaison, prairie à foin », mod.<br />
senoéât' et -zâtka, pol. sianozçc, slov. sençzet, senozçl « prairie de<br />
montagne », s.-cr. cak. sënozet, fém. et masc., sur-zïnje-, zçti.<br />
R. dert' « reste de céréale égrugée », dert' et rôzdert' « terre<br />
défrichée », tch. drt' « chose broyée » et padrt' dans la locution na<br />
padrt' « en petits morceaux », sur dire-, *derti et dere-, dïrati<br />
«déchirer» (§ 471), et le substantif peut être en même temps<br />
l'abstrait en -ï du participe passif *dïrtu, ukr. roz-dértyj ; et s.-cr.<br />
ancien podrijet « commencement, source » sur *der- et pôdrë-,<br />
pôdrijeti « tirer, extraire », voir poréklo, § 1052.<br />
V. si. sù-mrùtï « mort », s.-cr. ^mrt, etc., tch. mrt' « chose morte,<br />
terre morte, stérile », odûmrt' ei slovaque odmrt' « domaine tombé<br />
en déshérence » et « nécrose » ; et lit. mirtis, lat. mors.<br />
R. dial. et ukr. pert' «sentier foulé» (par les troupeaux), tch.
690 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
prt, s.-cr. prt, sur pere-, pïrati « fouler » ( § 471) ; en baltique « battre »<br />
et « fustiger au bain, baigner », et subst. lit. pirlis « cabinet de<br />
bain » ; •— et slavon paprutï « porche », r. pâperl', qui a désigné<br />
le devant de l'église foulé aux pieds, et priprutï (Ham.), mais<br />
v. si. paprutu, masc.<br />
Y. si. strëlï, attesté par trois exemples d'Hamartole, strëtemu<br />
pokrovenym TOÏÇ I[A66À
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 691<br />
R. ost' « barbe, épine », pol. ose « arête », tch. ost « barbe d'épi »,<br />
slov. gst « pointe », s.-cr. ôsti (ôstve, § 205), plur., « harpon », et v. si.<br />
oslïnu «pointe, aiguillon» (§ 1077); lit. akstis, akstis «pique,<br />
broche », lette akstyns « aiguillon ». Le slave osîï peut être fait<br />
directement sur la racine *ak- de gr. axpoç, si. ostru. «pointu»<br />
(§ 1112), ou bien, d'après le baltique, sur l'élargissement *ak-sde<br />
lat. acus, neutre, gén. aceris « balle du grain », got. ahs « épi » ;<br />
et voir osûtu, § 1176.<br />
V. si. napastï « ce qui vous tombe dessus, épreuve » et dopastï<br />
(Gr. Naz.), propastï « précipice » ; r. past' « trappe » et « gueule »,<br />
napâst', prôpast', dial. zapâst' « précipice, ravin » ; pol. pasc<br />
« trappe », napasc, przepasc, v. pol. zapasc « enfoncement, ruine »<br />
et upasc, locution do upasci « à outrance » ; tch. past, propast,<br />
dial. napast' ; slov. pâst, napâst et popâst « attaque », prepâst et<br />
propâst, opâst « chute de neige qui recouvre (opâsti) un sommet » ;<br />
s.-cr. nâpast, prôpâst, ôpâêt « diffamation, calomnie », spàst « chute<br />
de neige ». Sur *pâd-, et sur *pad- av. avapasti- « chute » (§ 430).<br />
V. si. pestï « four », r. pec' « poêle », s.-cr. pêc, sur pek- « cuire »,<br />
et skr. palctih « mets cuit », gr. TTÉ^IÇ « cuisson ». Le mot vieux-slave<br />
signifie également «caverne», à côté du dérivé pestera (§ 1122).<br />
Le vieux serbo-croate a pecï « caverne » qui peut être un slavonisme,<br />
et la langue distingue pêc « four » et pècina « caverne ». Le slovène<br />
a pêc « four » et « roche », pçca « grotte », peëina « rocher » et<br />
« grotte ». On voit par là que le mot *pek-tï ne désignait pas ce qui<br />
cuit, mais ce qui est cuit, la terre cuite dont on fait le four, et la<br />
roche (argileuse, marneuse) à aspect de terre cuite, comme opoka<br />
(§ 733) ; et la caverne dans la roche rappelle le four, et a pu servir<br />
de four.<br />
V. si. prûstï « poussière », r. perst' « limon » (slavonisme), tch.<br />
prst' « terre, humus », slov. pfst, sur le thème *pïrx- de v. si. praxu<br />
(§ 771).<br />
Y. si. slastï« délectation, plaisir », r. slast' « douceur » (slavonisme),<br />
sur le thème *satd- (§ 772) de l'adjectif stadûkù «doux», à part<br />
de l'adjectif dont l'abstrait est sladostï « douceur », et antérieur<br />
au dénominatif v. si. staditi « rendre doux ». Il suppose, sur<br />
l'athématique sal-, si. sotï « sel », un thème verbal *salde- de<br />
présent en -de- (§ 444) comme lat. salière «saler», part, passif<br />
salsus, et got. saltan : l'idée n'est pas seulement celle de sel, mais<br />
de saveur, de rendre savoureux. Et ainsi lit. sqlù, sdlti « devenir<br />
doux » était en regard d'un présent *salde- qui explique directement<br />
le factitif saïdyti (§ 441).<br />
Slavon srustï « poil », v. r. sïrstï, pol. siersc, tch. srst, slov. srst,<br />
et r. mod. serst' « laine » et « poil (de chèvre, etc.) » : sur *sirx-<br />
(§771).<br />
V. si. strastï « tourment, passion », r. strast', tch. strast « peine »,
692 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
sur stradati et un plus ancien *strade- (§ 551) ; pour r. slrasl'<br />
« frayeur », voir plus loin.<br />
Y. si. vëstï « connaissance », nevëstï « ignorance », povëstï « récit »,<br />
suvëstï « conscience », et izvëstï dans po izvësti « de connaissance<br />
sûre » qui est en même temps l'abstrait de l'adjectif izvëstu « connu<br />
sûrement » ( § 408) ; r. vest' « nouvelle », pôvest', sôvest' (slavonisme) ;<br />
pol. vviese, powiesc, opowiesc « récit, histoire », tch. povëst, zvësi<br />
« nouvelle » ; slov. vêst, povëst, zvêst et svêst « conscience », izpovêst<br />
« confession », pripovêst « récit », prepovêst « interdiction » ; s.-cr.<br />
vïjest, pôvijest, ispovijest, prïpovijest, svljesl « conscience » et sâvjest<br />
(slavonisme). Sur vëd- ; sur thème *wid- dans skr. viltih « science »,<br />
av. visti-.<br />
Slavon vistï « prunelle? », nevistïn cécité, àêXs^ia» ; v. si. nenavistï<br />
« haine », zavistï « envie » ; r. nénavist', zâvist' ; pol. nienawisc,<br />
zawisc ; tch. nenâvist, et v. tch. ndvist « affection », zâvist ; slov.<br />
nenavîst, zavîst ; s.-cr. nenâvist, zâvist. Sur vid-.<br />
V. si. vlasti et oblastï « gouvernement, pouvoir » ; r. vôlost'<br />
« canton » et slavonismes vlast' « pouvoir », ôblast' « province » ;<br />
pol. wioêc « terre d'un paysan » ; tch. vlast « patrie » ; slov. (vJlâst<br />
« propriété, domaine », oblâsl « pouvoir » et « région », preoblâsl<br />
« prépondérance » ; s.-cr. vlâst « pouvoir », oblâsl, preoblâsl. Sur<br />
*valde-, sûrement emprunt au germanique (§ 430) ; et lette vâlsts<br />
« gouvernement, état », verbe vâldît « régner ».<br />
V. si. uzastï « épouvante », r. ûzast', v. tch. ùzëst et pfëzësi. Sur<br />
thème zas-, à côté du postverbal usuel v. si. uzasu, et prëzasu<br />
(§ 783).<br />
Et v. si. sûvrûslï (J. Ex., Gr. Naz.) « union d'âge », « (compagnon)<br />
du même âge » (et sùvrùstije, § 929), s.-cr. sùvrst « espèce » (§ 1222),<br />
slov. vrst et vrsta « rangée, sorte », zvfst et zvrsla « espèce, variété »<br />
sur zvrstiti « ranger » ; voir v. si. vrusta, § 1165.<br />
Sur le modèle de cés formes anciennes, claires et nombreuses,<br />
on trouve des formations nouvelles :<br />
v. si. jestï « l'être » dans un exemple de la traduction d'Athanase,<br />
II, § 52 : ne na estï (de, TO sïvai) pleskanû byvaetï ; et adv. estïno<br />
(sçstaago) -rèv SVTCOÇ (OVTOC) II, § 43, verbe estova sç UTRÀP^st. III,<br />
§ 63, substantif verbal estovanije « existence » I, 2608, etc. (fréquent) :<br />
formes créées pour la traduction.<br />
r. strasl' « frayeur », refait sur slraxu, parallèlement à Mast'<br />
à côté de (u)zâx (§ 1137) ;<br />
r. nâsest' « perchoir » (et masc. nâsest) sur nasésl', nasedât', avec<br />
déformation en nâsest' (nâsest) sur najti, nasël ; — et slov. posêst<br />
« possession, propriété » sur posésti, posédati « occuper » ;<br />
slov. brçst « gué » sur bréde-, brésti ; — plçst « treillis » sur pléle-,<br />
plésli ; — prçst « du filé, des fils » sur prçde-, prçsli ; — obrést « gain,
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 693<br />
intérêt », sur obréte-, obrésti « trouver » (v. si. priobrësti « gagner »,<br />
§ 449);<br />
et slov. posâst « spectre », s.-cr. récent et régional posasi « épidémie<br />
» (et pàsalina, pôslica), sur po-iti, po-sïdu, po-sïlu.<br />
§ 1170. Formes moins claires. — Il y a beaucoup d'autres<br />
mots en -tï dont l'explication est moins assurée :<br />
R. bort' « ruche sauvage », pol. barc, tch. brt ; de *burtï, avec<br />
rattachement possible, au sens premier d'« arbre creux », au thème<br />
*bor- de * borna «herse» (§ 1075), lat. forâre «percer» (§ 773).<br />
Y. si. ëçstï « part », r. ëast', s.-cr. ëêst, et v. si. priëçstï « participation,<br />
lot » (J. Ex.), r. uëa$t' « sort », tch. ûcasl (§ 808) : un rapport<br />
avec l'adjectif cesiû « dense » n'est pas satisfaisant ; celui avec<br />
la racine de kçsû «morcea,u», lit. kçisli «mordre» (§ 1135) paraît<br />
plus plausible, l'intonation douce du serbo-croate pouvant être<br />
de métatonie sur intonation rude (§ 218).<br />
Y. r. gatl et mod. gai' « chemin de fascines, jetée », pol. gac et<br />
tch. hat « fascine, fascinage » ; slov. gâl « barrage », fém. et masc.,<br />
et s.-cr. gâl, masc., le masculin comme postverbal du verbe gatiti<br />
(§ 784). On peut supposer un sens premier de « chaussée » (dans les<br />
marécages), et un dérivé du thème gâ- du baltique, lit. gôli « aller »<br />
(§ 442) ; cf. gr. pàcuç « marche » en regard de l'aoriste sêvj.<br />
R. grust' « chagrin », sur la racine de v. si. grçstoku « pénible »<br />
(§ 985).<br />
V. si. klëïi « cellule », r. klet', s.-cr. klljet, slov. klêt, désignant<br />
une annexe de la maison principale, un cellier, etc. Le lituanien<br />
klëtis n'est sûrement qu'un emprunt au slave, et klalmas « grange »<br />
est une forme contracte de klojlmas « aire à battre le blé ».<br />
Le rapprochement doit être avec at-slalmas « vestibule » sur la<br />
racine sli- de sliëti « appuyer », confirmant pour le slave la forme<br />
*kli- de cette racine supposée par le doublet kloniti : sloniti (§ 12).<br />
V. si. lëtï « (il y a) permission », avec dérivés sur thème lët-<br />
(§ 747) : on a une racine *lë- dans ténu « paresseux » (§ 1071) et lit.<br />
lënas « tranquille », lètas « timide, lent », lette lëts « facile », got.<br />
lêtan « laisser » ; et v. tch. letny « familier, amical », letenstvo, -stvie<br />
« amabilité », v. pol. lecienstwo « liberté » ; sans doute aussi lëto<br />
« été » (§ 1164), d'intonation rude, s.-cr. Ijëto.<br />
Slavon nitï « fil », r. nit', pol. nié, s.-cr. nli, etc., et lit. nytis<br />
« peigne de tisserand », lette nîts : le mot se rattache difficilement<br />
à la racine i.-e. *(s)në- «filer, tisser» du lette snât, lat. nêre, si.<br />
snovati (§ 466), et il ne peut lé faire qu'en admettant un degré<br />
réduit *(s)nï- de l'élargissement en *snë-y- de skr. snayu- «lien».<br />
On a un thème ni-, mais dans skr. nltih « action de conduire », verbe<br />
ndyati « il conduit ».
694 SUFFIXES DIVERS [§ 1-10]<br />
Slavon pçstï« poing, poignet », r. pjast', pol. piçsc, s.-cr. pêst, etc. :<br />
le mot paraît correspondre à v. h. a. fûst, de *funksti-, et en<br />
baltique lit. kùmsté et v. pr. kuntis doivent en être l'altération par<br />
rattachement au lette kàmpju, kàmpt « saisir » (v. si. kapï « fourreau<br />
», § 713) ; ce qui restituerait une forme comme *pnks-ti-,<br />
à thème proche de celui de lat. pugnus, gr. nùE,.<br />
Y. r. polstï « feutre », mod. polsi', pol. pilsc (et pilsn), h. sor.<br />
pjelsc, tch. plst, slov. pôlst, s.-cr. pûst, de *pïlstï d'après le polonais<br />
( § 74) et le sorabe : le rapport est évident avec le germanique fill<br />
« feutre », angl. felt, v. h. a. filz, et le slave pourrait être le dérivé<br />
d'un thème verbal *pïld- au sens de « fouler », qu'on retrouverait<br />
dans lat. pellô «je pousse, je frappe» de *pel-de-, sans tenter de<br />
rejoindre gr. nïXoç « feutre ».<br />
V. r. snastï « gréement », mod. snast', sur un thème snad- qui<br />
peut représenter *sna-de- (§ 444).<br />
R. dial. sôlot' « source marécageuse », dérivé solôtina, v. si.<br />
slatina « terre salée, salant » ( § 892) ; sur thème verbal *sal-, voir<br />
v. si. slastï supposant *sal-de-, mais alors la forme *sal-tï serait<br />
l'abstrait en -i du participe passif de ce verbe à présent suffixal.<br />
Ukr. sëet' «brosse» (r. sëëtka), pol. szczec (szczotka), tch. stël,<br />
slov. ëëçt (s.-cr. ëëlka) : le mot doit s'expliquer par *skep-ti-, sur<br />
la racine skab- « gratter » de lit. skabiù, skôbti, r. skôbel' « doloire »<br />
(§ 739), dont la forme était *skebh-, *skobh- d'après lat. scoblna<br />
« râpe » à côté de scabô « je gratte ».<br />
V. si. trustï (trïstï, § 61) «roseau» pol. tresc (v. pol. «roseau»,<br />
puis « tige, moelle », mod. « contenu, essence »), v. tr. trest (mod.<br />
tftina), slov. et s.-cr. trst : en regard de lit. tr(i)usis, traùsis et<br />
strustis, ce qui paraît indiquer un thème verbal *treus- ; on peut<br />
penser à un rapport avec le germanique *rausa-, got. raus<br />
« roseau », ail. Rohr, avec des altérations de l'initiale par contamination<br />
avec d'autres racines.<br />
§ 1171. Autres mots à finale -tï. — Ce sont des mots plus ou<br />
moins inanalysables :<br />
R. kist' «grappe, pinceau, gland», pol. kisc « panicule, pinceau,<br />
brosse » et okisc « gros flocon de neige, glaçon », slovaque kyst'<br />
«panicule (d'avoine), botte (d'épis)» : on rattache le mot à kyta<br />
« bouquet, gerbe, botte », verbe kylili ( § 801 ), et l'on pense également<br />
à l'allemand Quasi « touffe », qui est m. h. a., et vieux suédois<br />
kvaster, ce qui indiquerait un thème *kwast-, *kûst-.<br />
Pol. et sor. nac « fanes, feuilles de betterave », tch. naV, slov. nât<br />
(r. natina) : on compare à v. pr. noatis « ortie », lette nâtrè.<br />
*paportï «fougère», r. pdporol', pol. paproc, s.-cr. pàprat, et lit.<br />
papdrtis, peut-être forme à redoublement d'après slov. prâprat,
[§ 117.1] SUFFIXES EN -t- 695<br />
prâproi : on aurait le thème de base *par- dans v. h. a. farn, à côté<br />
de *prati- dans irl. raith.<br />
Y. si. plutï « chair », r. plot', slov. pôlt, s.-cr. pM, tch. plet' :<br />
la comparaison avec lit. plutà « croûte », lette pluta « chair, peau »,<br />
ne permet pas l'analyse du mot.<br />
V. si. ratï « guerre », r. rat', représente *orti- si le finnois artti<br />
« combat » lui est emprunté, mais d'intonation rude, *âr- (§ 69) et<br />
s.-cr. ràt (masc., refait en postverbal de râtovati), ce qui ne s'accorde<br />
pas avec skr. rtih « lutte », rnôti « il met en mouvement », gr.<br />
ëpvOfju.<br />
V. si. retï « émulation, rivalité » s'accommode encore moins du<br />
rapprochement avec skr. rtih et gr. ëpiç « querelle, rivalité » : le<br />
thème en pourrait être altéré par réduction d'un groupe de<br />
consonnes, et l'on penserait à *rep-iï, avec rep- de lit. ap-rëpti<br />
«prendre de force», rëplés (plur.) «tenailles», lat. rapiô.<br />
Slavon riti, plur., « croupe », pol. rzyc « derrière », tch. fit' « anus,<br />
croupion », s.-cr. rît, plur. rïti, et slov. rit, gén. rîti, avec métatonie<br />
sur intonation rude (§ 218) ; verbe s.-cr. ritati se, rïtnuti se « ruer »,<br />
slov. ritati; composés v. pol. drapirzyt «médius» (§ 1225), pol.<br />
bialorzyt « cul-blanc », oiseau (§ 1227) ; en baltique lit. rietas « haut<br />
de cuisse, jambon », lette riëta «jambe ». L'intonation rude baltoslave<br />
fait penser à la racine rëj- : rï- de rëjati, rinçli « pousser »<br />
(§ 512).<br />
R. vôlot' « filament » et « épi », ukr. vôlot (masc.) « panicule »,<br />
pol. wlac « épi » et nawloc « verge-d'or, solidage », slov. vlât (fém.<br />
et masc.) «panicule, épi», s.-cr. vlât (masc.) «tige de céréale,<br />
épi » ; et lit. vâltis « panicule d'avoine », v. pr. volti (de -tê, fém.)<br />
« épi ».<br />
Le vieûx-slave pustïka « petit caillou » ( § 885) suppose un mot<br />
*pûkti, qui serait un dérivé en -Il de la racine *puk-.<br />
Le tchèque pli' « radeau » et v. tch. plet est une variante de<br />
*plûtû, masc. (§ 1160).<br />
Sont secondaires :<br />
r. kast' « vilenie » et pôkast', en regard de kostit', pôkastit'<br />
« injurier », par déformation et dépréverbation ( § 1208) de pàkost',<br />
pâkoslit', v. si. pakostï « tort, injustice » (§ 905) ;<br />
slov. obîst « rein », pour obîstje, slavon obistije « ce qui entoure<br />
le rein », sur isto « rein » (§ 191).<br />
Sont postverbaux :<br />
slov. râst « croissance, végétation » et narâst, etc., masc. et fém.,<br />
s.-cr. pôdrâst, prorâst (§ 774)', et v. tch. letorast, mod. ratolest<br />
« rejeton », à côté de v. tch. lelorasl (§ 1056) ;
696 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
pol. sniec « rouille, nielle », tch. snët', etc., sur (g)nëtiti « enflammer»<br />
(§747);<br />
pol. chçc « envie » (§ 731). Etc.<br />
Est mot d'emprunt :<br />
V. si. llstï « ruse, tromperie », prëlïstï et oblïsîï (Cyr. Jér.) en<br />
regard de prëlïstiti, oblïstiti : du germanique, got. lists « finesse,<br />
astuce », et c'est en germanique que le mot s'analyse, en *lis-tis, en<br />
regard de got. lais « je sais », lais jan « enseigner ». Le mot germanique<br />
apparaît également au sens d'« habileté » dans l'emprunt roman,<br />
ital. lesto « adroit, agile », et dans le slave méridional, s.-cr. lâst<br />
«aise, commodité», adj. làs(t)an «facile», bulg. lésen (§271); et<br />
slov. lâst « aise », et prilast « fourrage meilleur qu'on donne à là<br />
vache pendant la traite », qui se trouve avoir comme synonyme<br />
lizanje « léchée », mais qu'il est arbitraire d'expliquer par le thème<br />
ancien llz- de slov. -lézniti (§ 543) et par prillzali se qui signifie<br />
« s'insinuer par caresses ».<br />
SUFFIXES EN -al-, -et-, ETC.<br />
§ 1172. En -al-. — Le suffixe productif est celui des adjectifs en<br />
-atu (§ 987).<br />
En slovène, skrzàt « cigale », gén. -âla, en regard de skrzetâti<br />
« chanter en grésillant », est une variante secondaire de postverbal<br />
de verbe en -tati (§ 816), et pour osât «chardon», voir osûtu,<br />
§ 1176 ; on a aussi vpijàt « le crieur » sur vpili « crier », vpîj « cri »<br />
(§ 813).<br />
On trouve -atï dans le masculin peëatï «sceau» (§ 189) ; pour<br />
le féminin s.-cr. et slov. svojat « parenté », voir v. si. svoiiï, § 1175 ;<br />
le tchèque oprat' « longe », et slovaque oprala, est expliqué comme<br />
déformation de *ob-rutï, r. àbrot' (§ 813).<br />
Le mot le plus notable, en -ala, est :<br />
v. si. lopata « pelle », r. lopâta, s.-cr. lopata, sur le thème lop- de<br />
lit. lâpas «feuille», lette lapa, adj. lit. lapôtas « feuillu », et slov.<br />
lépen (§ 1098), pol. iopien « bardane » (§ 1092) et r. lopûx (§ 1154) ;<br />
et lôp- dans lit. lopetà « pelle-bêche », et aussi dans lôpas « pièce<br />
à repriser», si. *laputï (§ 189), et dans lit. lôpa «patte», dérivé<br />
lepeta, lette lapa et lepa, r. lâpa, pol. lapa. Hors du balto-slave,<br />
on compare avec le germanique, got. lofa et v. h. a. laffa « plat de<br />
la main » et « patte ». Mais la racine est plus ou moins expressive,<br />
et on la retrouve dans lopotû, pol. iopol « bruit de battement d'aile »<br />
(§ 816), r. lâpat' «saisir, happer», pol. tapac et interjection tap<br />
« attrape ! », etc., et adv. v. r. lapï « aussitôt » (§ 1199).
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 697<br />
Et de lopata « pelle » on ne séparera pas r. loptâ, laptd, « jeu de<br />
paume », verbe lopfajtdt' «jouer avec la paume » ou avec la pala ;<br />
pour le slovaque lopta « balle » et le serbo-croate lôpla « balle,<br />
boule », on a pensé à l'intermédiaire du hongrois lapta. Là aussi,<br />
le thème est également expressif, ce qui a aidé à l'altération du mot<br />
lopata : ukr. lôpaty « frapper », et r. xlopâl' et subst. xloplâ (et slov.<br />
lopûtati « claquer », etc., § 1179).<br />
§ 1173. Formes en -et-. — Le grec a des formes en -STOV : SP7TSTÔV<br />
« reptile » sur Ipraiv « ramper », Saxsxov « bête féroce » sur Saxvsiv<br />
« mordre », aor. gSaxov. En germanique, on a le suffixe v. h. a. -id,<br />
ainsi zimbrid « édifice », « neutre », sur zimbren « bâtir », avec le<br />
féminin got. -ipa, v. h. a. -ida, emprunté dans si. -ida (§ 1007).<br />
Le lituanien a -etas, en particulier dans un type de dérivés de noms<br />
de nombres : dvëjetas « groupe de deux », et -ela dans lopetà « pellebêche<br />
».<br />
En slave, on a d'abord les postverbaux en -etu de verbes en<br />
-etati (§ 816), y compris r. krécet «gerfaut», pol. krzeczet, -ot, et<br />
slavon russe krecetu «cigale»; pol. trzpiol «étourdi» sur lrz(e)p(i)otac<br />
«se trémousser»; et pol. brzeszczot «lame (de sabre)»<br />
sur le thème brïzg-, brïsk- de v. pol. brzeszczyc siç « poindre »<br />
(§ 597).<br />
Puis -eto dans :<br />
v. si. (Pand. Ant.) teneto «filet», r. terietô, tenëto, tch. teneto, et<br />
slov, tençt et tençtvo « (fond du) filet-traîneau », sur ten- « tendre »,<br />
lit. tinklas « filet », si. tçtiva « corde » (§ 457) ;<br />
r. neretô, nerëto et nerët, « nasse », ukr. et bl.-r. néret, qui se<br />
rencontre seulement dans le groupe russe, et qui a l'aspect d'une<br />
formation parallèle à teneto sur le thème ner- de nïre-, *nerti<br />
«plonger» (§ 453), comparable au lette (dial.) nafts et plur. norty<br />
« nasse » ;<br />
r. reseto « tamis », pol. rzeszeto, s.-cr. resèto, inexpliqué ;<br />
v. tch. et mod. klepeto « pince (d'écrevisse) », dial. « griffe, griffon »,<br />
sur le thème de klepetali « faire du bruit », subst. klepetu, élargissement<br />
de klep- (§ 803).<br />
Et -ela dans des postverbaux de verbes en -etati, y compris v. si.<br />
kl(j)eveta «calomnie» (§ 563); et en polonais dans une petite<br />
série de mots, qui sont des mots d'emprunt : gazeta « gazette »,<br />
et kobieta « femme », qu'on doit sûrement expliquer comme pris<br />
au xvi e siècle au français régional, lorrain sans doute, « gobette »<br />
qui désigne une (jolie) fille. /<br />
Le vieux-tchèque hnilet « pourriture » est masculin et du type en<br />
-ûtï (§ 1176), mais le serbo-croate présente une série de féminins<br />
en -et :
698 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
gôlël « montagne pelée », gén. gôlëti, adj. gôlëtan, sur gol- ;<br />
plâvët (dès le xv e siècle) « bleu d'azur », sur plâv « blond, bleu » ;<br />
vrlët « roche escarpée », sur vrl- « violent » (§ 1048) ;<br />
kôcët « poil raide », sur le thème koc-, koc- de kàcân « trognon », etc.<br />
(§ 1094);<br />
kôstrët « poil (de chèvre), cilice », et kôstrijet secondaire (hyperjékavisme),<br />
sur le thème kostr- de r. kostér' « barbe d'épi » (§1118).<br />
Ce suffixe -ët du serbo-croate doit dériver de -çtï, à cause du -ëqu'on<br />
a dans dësët « dix », de desçtï ; il est alors le résultat d'une<br />
substitution à -çdï ou *-jadï, comme c'est le cas dans tch., havët'<br />
« vermine » pour havëd' (§ 1005), et dans r. cérnel' et cérned' « canard<br />
noir», etc. (§ 1006).<br />
§ 1174. Formes en -ot-, — On a tous les postverbaux en -otu<br />
des verbes en -olati, y compris v. si. kokotu « coq » et r. kôkot<br />
« caquetage » (§ 816). Isolément :<br />
v. si. zivotu « vie », r. zivôt, gén. -otà, s.-cr. zlvot, gén. zivdta, slov.<br />
zivdt ; et gr. (3COTOÇ, ailleurs lit. gyvatà, lat. uïla, comme gr. pio-r/j.<br />
Le suffixe productif est -ota (§ 904). Il présente une variante<br />
-otl :<br />
r. mérkot' « crépuscule », pérxot' « pellicule », se distinguent mal<br />
des masculins en -utï devenus féminins ( § 189), mais on a nettement :<br />
slavon lixotï « anomalie », et v. si. dans la locution (J. Ex.) vu<br />
lixotï « en superflu » ; ailleurs r. lixost' et lixotâ, etc. ;<br />
slavon russe lukotï « lacet, crochet », r. lûkot', pol. ancien Iqkoc<br />
«courbure» (mod. Iqkotka), tch. loukot' «courbure» (et loukota)<br />
et « jante », et v. tch. lûkot, masc., « jante » ;<br />
pol. dobroc « bonté », wilgoc « humidité » ; lakoc « friandise »,<br />
plur. iakocie (§ 168) ;<br />
v. pol. pierwoc «début», et miegoc «humidité», adj. miegolny<br />
« humide », sur le thème mïg- de mzec « bruiner », v. si. mïgla<br />
« brouillard » (§ 1051) ;<br />
slov. srâmot, variante de sramôta « honte ».<br />
Le baltique a un suffixe d'abstraits lit. -atis, fém., à côté de<br />
-atas et -ata : ainsi gaïsatis « perte de temps » sur gaïsti « tarder »,<br />
vienalls « unité » sur vienas « un ».<br />
§ 1175. Formes en -il-. — Le type productif est celui des<br />
adjectifs en -ilu (§ 990). On a encore -itu dans s.-cr. gurït « grognement<br />
», postverbal de guritati (§ 816) ; et dans :<br />
v. r. kûrëïmitu « cabaretier », et singulatif korëmitinû, verbe<br />
korcmititi. Ce mot est sur le thème du slavon krûcïma « cabaret »,<br />
mais il présente la finale grecque du type de v. si. Pentapolitinû
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 699<br />
nsvTcatoA'iTrçç (§870), et il suppose une variante grecque endes<br />
noms d'agent vieux-slaves krucimarjï et krûcïmïniku (§ 1067),<br />
ce qui invite à chercher une origine grecque, ou gréco-latine, au<br />
mot inexpliqué kruëïma. On peut la trouver en partant de<br />
krûëïmarjï, comme emprunt à lat. commerciârius « trafiquant » :<br />
le mot latin donnait en slave *kumïrcarï, qui s'altérait par métathèse<br />
en *kurëmarï, et dont se tirait *kûrcma sur le modèle de ryba<br />
et rybarjï, etc. ; et sur ce thème une variante de type grec en<br />
-£IT]Ç de lat. -ârius chez les Slaves de culture grecque superposée à<br />
une culture latine.<br />
On a -ito dans :<br />
pol. jelito « boyau », sor. jel(i)to, tch. jelito « boudin » et anciennement<br />
« intestin », s.-cr., ancien jelito et cak. jëlïto, plur. jelita<br />
« intestins », slov. dial. olito, mot obscur, en rapport possible avec<br />
v. pr. laitian « saucisse ».,<br />
Et -ita dans :<br />
v. si. lanita « joue », r. et slov. lanita, et v. tch. lanitva « mâchoire »,<br />
obscur également; une analyse en *ôln-it- (§ 69) mènerait au<br />
thème i.-e. *8l- du nom du « coude », balto-slave *olk- dans v. si.<br />
lakulï (§ 189) : serait-ce un adjectif en -itu substantivé au sens de<br />
«coudé», en partant du sens de «mâchoire»?<br />
Et -iti dans v. si. svoitï « propriété, parenté » (Izb. Svjat., Pand.<br />
Ant.), qui a l'aspect d'un abstrait en -ï d'adjectif en -itu ; la<br />
variante s.-cr. svôjât « parenté », slov, svojât et svojâd, doit résulter<br />
d'une contamination avec le suffixe -(j)adï de collectifs (§ 1006).<br />
§ 1176. Formes en -ït- et -ut-, — On a -itu et -ûiu dans les<br />
postverbaux de verbes en -ïtati et -utati, et isolément :<br />
v. si. xribïtu et xrïbïtù (§ 37) «échine du dos», r. xrebét, gén.<br />
xrebtâ, s.-cr. hrbat, gén. hrpta, tch. chrbet, et pol. grzbiei, gén.<br />
grzbieia, de v. pol. chrzbiet, gén. chrzebta ; le mot paraît être un<br />
élargissement du thème xrib- de v. tch. chrib- « colline », slov.<br />
hrtb et s.-cr. ancien hrib, avec forme alternante xrib- comme dans<br />
le cas rare de muxa et musica (§ 878), le x- initial faisant penser,<br />
soit à un emprunt, soit à un thème de verbe expressif ;<br />
slavon osùtu « chardon », r. osât, pol. et tch. oset, gén. ostu ; et<br />
slov. osât avec adj. osât «pointu», fém. osâta, du type en -atù ;<br />
en baltique lit. asutaï, plur., « crins de cheval » : sur l'élargissement<br />
en *ak-u-, lat. acus « aiguille »,/acuô, acûtus, de i. e. *ak-, lette as s<br />
« piquant », si. ostru et *ostï« pointe »(§ 1169).<br />
On a -uti dans tout le type de masculins de v. si. lakùiï, noguti, etc.<br />
(§ 189), auquel il faut joindre :
700 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
slov. léhet « morceau de champ », gén. léhta, sur léha « planche »<br />
(§ 746), comme véhel «bouchon (de foin)» sur véha (§ 1140) ;<br />
v. tch. hnilei « pourriture », masculin avec dat. -eti, adj. hniletny,<br />
sur gnilu, comme holet « glace » (gén. holti) sur golu.<br />
Le type en -utï a les correspondants lit. -utis, -utas, et germ.<br />
-U J)-.<br />
§ 1177. — Formes en -yt~. — On trouve -yto dans :<br />
slavon kopyto « sabot (de cheval) », r. kopyto, s.-cr. kàpito, etc.,<br />
sur le thème de kopati « fouir », slavon kopysati « gratter (du<br />
sabot) » (§ 556) ;<br />
v. si. koryto « auge » (Ham. 19020), « citerne » (Ham. 1944), r.<br />
koryto, s.-cr. kàrilo, qui n'est sûrement pas plus que korïcï « puisoir »<br />
(§ 835) un dérivé de kora « écorce » ; la comparaison la plus exacte,<br />
pour le sens, est avec v. pr. pracartis « auge », lit. prâkartas<br />
« mangeoire », qui de son côté ne s'explique pas de façon bien<br />
évidente par rattachement à la racine *kert- de si. *cïrte-<br />
« entailler »(§ 429).<br />
On a -yta dans :<br />
r. ràkita « variété de saule », pol. rokita « osier », tch. rokyta,<br />
s.-cr. ràkita, slov. rakita : comparaison approximative avec le<br />
lette ërcis, ërcetis « génévrier », qui indiquerait un thème *erk~,<br />
*ork~.<br />
Pour une origine possible de la forme -yl-, voir -ut-, § 1179.<br />
§ 1178. Formes en -gt-. — Le vieux-slave moggtï «un puissant,<br />
magnat » (Cant. IV, 8, Hés. XXI, 30, Gr. Naz.) est le participe<br />
présent v. si. mogçst- substantivé à thème primitif -çt- (§ 171),<br />
avec dérivés slov. mogQtec et adj. mogçten, r. mogûlnyj « puissant »,<br />
tch. mohutny et v. tch. mohuty.<br />
Avec d'autres conservations de la forme ancienne -gl- (§ 279)<br />
dans :<br />
s.-cr. imùlak « avoir, bien », pol. majqtek et adj. majçtny ;<br />
slavon vrçtûkù «source », s.-cr. vrûtak, slov. vrôtek (§ 588) ;<br />
v. r. slovutyi et slovutïnû « célèbre », tch. slovutny, et v. pol.<br />
siawçtny, mod. siawelny « très honorable », d'après slawny, après<br />
disparition du thème de v. si. slove- remplacé par stynqc (§ 463).<br />
On a un développement de formes en pol. -çtny du type de<br />
majçtny :<br />
umiejçtny et umielriy « savant, expert » sur umiec, prés, umie-,<br />
3 e plur. umiejq (§ 580) ;<br />
v. pol. godziçtny « convenable, de valeur » sur godzic siq<br />
« s'accorder ».
[§ 1178] SUFFIXES EN -t- 701<br />
Et de formes en tch. -uty du type de v. tch. mohuty :<br />
bëhuty « courant », smrdulxj « puant », lekuty « coulant, fluide »,<br />
treskuty « craquant », visuty « pendant ».<br />
La finale -çt- ne se distingue pas de -ut- dans une partie des<br />
langues slaves, et dans l'autre partie elle s'en distingue mal du fait<br />
des flottements de suffixes. On peut admettre -çt- dans les<br />
substantifs :<br />
slov. pergt « aile », et perût (et perûta), féminin, comme tch.<br />
perut' et s.-cr. përût, qui peut être l'ancien participe présent de<br />
pere- « voler » ( § 472) ;<br />
slov. plavçt et plavût (et plavûta) « nageoire », sans doute de<br />
plôve-, plûti, avec réfection sur plâvati « nager » : ailleurs tch.<br />
ploutev, pol. piylwa ;<br />
r. rtut' « vif-argent, mercure », pol. rtçc, tch. rlul\ qui est expliqué<br />
de même comme ancien'participe présent du verbe lit. ritù, risti<br />
« rouler », attesté indirectement en slave par plusieurs formes<br />
dérivées importantes (§ 449). Plus douteusement dans :<br />
v. si. slanutûku « pois chiche », avec l'indication d'une variante<br />
slançlukû, bulg. dial. slanûtâk, s.-cr. slanûtak, où un flottement<br />
-nç- : -nu- (§ 65), soit phonétique, soit par extension de -nu- du<br />
vieux slave occidental, est possible, mais mal garanti : sur le thème<br />
k sal-, un présent *sal-ne- est moins plausible que *sal-de- (§ 1169),<br />
et slanutûku s'explique plus naturellement comme dérivé en<br />
-uiûkû (§ 1179).<br />
En regard de s.-cr. skrobût, masc., « clématite », le slovène a<br />
s(k)robpt, masc., et fém. srobôta, et skrobôt, avec l'accentuation<br />
(ancienne, § 828) d'un postverbal de verbe en -olati, et l'on a<br />
effectivement un verbe skroboiâli « bruire, froufrouter » ; et en<br />
slavon skroboiû « bruit », et nom d'une plante. Mais on trouve aussi<br />
en vieux slave (Upir') sugrebutï, écrit également sûgrëbçtï, qui<br />
traduit afxtÀai;, Nahum, I, 10, le fragon épineux ou le liseron.<br />
Ce pourrait être le nom ancien de la clématite, et s'il avait désigné<br />
d'abord une plante épineuse, le fragon ou petit houx, on y retrouverait<br />
le participe présent du verbe s(û)grebe- pour skrebe- «racler»<br />
(§ 432), avec la confusion russe de skrebât' et sgrebât'.<br />
Le mot r. xomut « collier de cheval, joug », tch. chomout, s.-cr.<br />
hômût, et slov. homôt, pol. chomqt et chomqto, est d'origine obscure.<br />
Parallèlement à -çt- sur présent en -e-, on trouve -çt- sur présent<br />
en -i-, comme dans v. pol. godzjçtny « convenable » :<br />
r. kipjalôk « eau bouillante » sur kipét' ;<br />
pol. wrzqtek « eau bouillante » sur wrzec, avec forme plus récente<br />
wrqtek (§ 588) ;
702 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
s.-cr. svrsétak « achèvement, fin », sur svrsiti « terminer ».<br />
Et pol. zarzqtek « braise » sur zarzyc (§ 736), mais qui est nouveau<br />
pour le slavon (russe) zeratûku (et zaratûku) « cendre », s.-cr. zerdtak<br />
«braise» : mot qui a un aspect de dérivé en -tuku (§ 839) d'un<br />
adjectif en -atu parallèle à zeravu « incandescent » à côté de v. si.<br />
zarjavu (§ 993), sur le thème zer- alternant avec gor- de gorëti<br />
(§ 594).<br />
§ 1179. Formes en -ut-. — Les formes sont nombreuses, mais de<br />
types divers.<br />
On a -utu dans des postverbaux de verbes en -utati :<br />
s.-cr. gùgûi de gugûtaii « roucouler » (§ 816) ;<br />
slov. lopût « maladroit qui fait du bruit », en regard de lopûtati<br />
« faire claquer ». Et dans :<br />
v. r. loskutu et mod. lôskût « chiffon » et « morceau (de terre) »,<br />
et lit. lâskutas, lâskatas « chiffon » ;<br />
pol. kogut « coq » pour l'ancien kokot (§ 1174), et tch. kohout ;<br />
pol. kikut « moignon » sur v. pol. kika « manchot » ; mankut<br />
« gaucher » sur manka « main gauche », emprunt à l'italien manca<br />
(« gaucher » est mancino) ; filut « finaud », du français « filou » ;<br />
tch. mrzout « grognon », sur mrzeti « être désagréable » ; zrout<br />
« goinfre » sur zrâti ; et le type de noms de personnes de Blahout ;<br />
slov. tekût, masc. (et fém., et lekûta), s.-cr. tëkût, masc., « pou<br />
de la volaille », peut-être sur tece- « courir » ;<br />
slov. prhût, s.-cr. prhût, masc. et fém., «pellicule », et r. pérxot',<br />
sur la racine *pïrx- ( § 189) ;<br />
slov. dial. kréljut (kreljût), fém., «aile», et s.-cr. cak. krëljùt,<br />
qui est parallèle à slov. perût, s.-cr. pêrut (.§ 1178), donc sans doute<br />
du type en -çtï, sur cak. krëlô, krélo, pour krïlô, krllo, forme<br />
secondaire qui résulte du jeu en cakavien, sur le verbe kriliti<br />
« couvrir de son aile », de i et e issus de e du type dél : -dïlll (§ 51) ;<br />
slov. zijut, masc., « gouffre », sur zijdti ;<br />
s.-cr. kôlut « disque, cercle » sur kôlo ; valut « caillou roulé » en<br />
regard de vâljati « rouler » ; dial. bhkût, gén. brskûta, « rapide d'une<br />
rivière », à côté de brzâk et brzlca, sur brz « rapide » ; dial. tllût<br />
« dos d'un couteau », sur tylu « nuque », comme v. r. tylïje, tylïcï<br />
« dos d'une hache », bulg. tllno, tilnik.<br />
-uta :<br />
Slavon (xi e s.) kosuta « biche », bulg. et slov. kosùla, s.-cr. kàsuta,<br />
et tch. kosut, masc., « bouc ». En admettant que le féminin est<br />
primitif, on suppose un ancien composé à second terme sulu<br />
« sans cornes » (§ 1159), le premier terme ko- pouvant être le produit<br />
d'un croisement avec le synonyme komolu (§ 1061).
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 703<br />
R. plakûta, masc. et fém., « pleurnicheur, -cheuse ».<br />
Noms hypocoristiques de personnes : pol. Blizuîa, Wojuta,<br />
Bogula et v. tch. Bohula ; pol. Boruta « esprit des bois », tch.<br />
Borut(a), Borita, le tchèque Borita se rattachant à Borivoj, mais<br />
Boruta, et Baruth en allemand au vni e siècle, étant sur borû, pol.<br />
bôr « forêt ».<br />
Slov. perùta « aile », plavûta « nageoire », voir perçt, plavôt ;<br />
mehûta « cocon vide » sur mêh « outre » ; vehûta « variété de chou qui<br />
ne pomme pas » sur véha (§ 1140) ; lopûta « trappe, claque », avec<br />
verbe loputati « claquer », est sur un thème expressif, élargissement<br />
de top-, r. lôpal' « crever », ukr. lôpaty « frapper » (§ 1172) ; plahûta<br />
«drap (grossier) » est pour plâhta (§ 1166) ; polûta «moitié, hémisphère<br />
» est à côté de polûtek ; nemskûta « les Allemands », sur<br />
némski « allemand », est un dépréciatif comme cafûta « pauvre<br />
femme, salope ».<br />
On trouve des dérivés en s.-cr. -utak :<br />
bjelûtak « quartz » sur bljel « blanc » ; oblùlak « caillou arrondi,<br />
ôblï » ; smrzlûlak « motte de terre gelée, smrzl- » ; navijûtak « fil<br />
enroulé sur l'ensouple », sur nàviti « enrouler » ; et dial. polutak<br />
« moitié », cak. polutak et slov. polûtek, qui est sur la forme polufixée<br />
en premier terme de composé un dérivé analogique de<br />
ëetvHak, v. si. ëetvrùtùku (§ 317).<br />
Ces dérivés en s.-cr. -utak doivent appartenir au type des dérivés<br />
en v. si. -tûku (§ 838), sans doute comme slanutukû « pois chiche »<br />
(§ 1178), et comme s.-cr. osriutak « ourdissage » qui est sur la base<br />
snu- d'un verbe en -ovali. Ceci invite à penser que c'est tout le type<br />
suffixal en -ut- qui est bâti sur ce type verbal, et sur son ancien<br />
adjectif verbal et participe passé passif, en baltique lit. -ûotas,<br />
-âutas, à côté de -gt- (§ 1177) sur la base nominale ancienne en<br />
*-u- du type verbal en -ovati (§ 571).<br />
Une autre forme de dérivés est en pol. -(j)utki, fournissant des<br />
diminutifs d'adjectifs : malutki « très petit », niziutki « très bas »,<br />
giupiutki «très bête», etc., et variante de -(j)uchny : maluchny,<br />
glupiuchny, etc. Ici, on apercevrait un contact entre le suffixe<br />
-ut- et le suffixe -ux- (§ 1158), également très représenté, dont la<br />
finale -x- est hypocoristique, et qui pourrait présenter aussi<br />
l'élément thématique -u- du type verbal en -ovali.<br />
SUFFIXES EN -st- ET EN -tj-<br />
§ 1180. En -st-, — Il s'agit surtout des types productifs d'adjectifs<br />
en -astu (§ 989) et -istu (§ 991), et du grand type de substantifs<br />
en -osft.
704 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
En rapport sûrement avec le suffixe -ostï (§ 909), on a nevësta<br />
«jeune mariée» et starosta «ancien, chef» (§ 293). Et en tchèque,<br />
sur le modèle de starosta « maire » :<br />
mësVanosla « staroste d'une ville, mësto » ;<br />
prednosta « chef d'un office, chef de gare », sur predni « qui est<br />
en avant » ;<br />
vasnosta « un prétentieux », sur vasnost abrégé de Vase mitost<br />
« Votre Grâce ».<br />
Le slovène a quelques féminins en -ast qui ont l'aspect d'abstraits<br />
d'adjectifs en -astu. :<br />
tomâst «impétuosité», sur lom «rupture, fracas»;<br />
bozjâst « épilepsie » et neutre bôzje, en regard de bôzji udârec<br />
« apoplexie » ;<br />
svojâst « parenté » à côté de svojât (§ 1172).<br />
C'est peut-être de la même façon, sur la forme mouillée -'astu,<br />
-ëstu, que s'expliquent des mots isolés en -estï :<br />
v. si. jçzëstivu «malade» (Izb. Svjat., Hom Mih. 244 rb , 17),<br />
adjectif qui suppose *jç(d)zëslï tiré de jedza « maladie » ;<br />
slavon russe zorlnëstï « cartilage ».<br />
On a des postverbaux :<br />
pol. oszust « fourbe », de oszustac « tromper » (§ 759) ;<br />
r. xrôbost « bruit » de xrobostât' « résonner », comme pol. chrobot<br />
de chrobotac « grincer, cliqueter » ;<br />
pol. szelest « bruit, froufrou » en regard de szelescic « bruire,<br />
frémir ».<br />
Plus isolément :<br />
v. si. monisto « collier », r. monîsto, formation qui n'est pas<br />
expliquée, mais dont on a le thème moni- dans lat. morille, v. h. a.<br />
menni;<br />
v. si. koristï « dépouiller, butin », tch. korist, pol. korzysc « profit »<br />
et s.-cr. kôrlst, slov. korist, r. koryst' « butin, gain » avec -y- de<br />
l'ukrainien ; inexpliqué ;<br />
pol. kopysé « spatule, cuiller à pot » et tch. kopist, sur le thème<br />
kop- de kopati ;<br />
v. si. celjustl « mâchoire », r. ëéljust', tch. celist, s.-cr. cëljùst,<br />
slov. celjûst, et pol. czelusc « mâchoire » et « gueule de four », qui<br />
pourrait être un composé avec usta « bouche » comme second<br />
terme ;<br />
s.-cr. krëljust, krljust « écaille de poisson », sans doute aussi<br />
composé altéré à second terme Ij&ska « coquille, écaille » (§ 1040).
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 705<br />
§ 1181. En M/-. — Pour le suffixe M/7 d'adjectifs, voir § 958.<br />
Le serbo-croate a une série de mots en -ac : gôlâc « gueux » et<br />
«limace», sur gô(l) ; glùhaé (et glùhâk, glûhac) «sourd», etc.;<br />
suffixe de caractère familier, qui pourrait être d'origine étrangère<br />
(du grec -oba), comme l'est, en partie au moins, le suffixe -aëï<br />
(§ 857).<br />
Un suffixe d'une certaine importance est *-lja :<br />
v. si. obusta (Gr. Naz.) « chaussure », bulg. obûsta, s.-cr. àbuca,<br />
slov. obûca, et onusla (Supr.), r. onûca «bande pour les pieds»,<br />
pol. onuca, tch. onuce, slov. onûëa, sur -uje-, -uti (§ 523) ;<br />
slavon olçsia « rapt », sur ot-çti, part, passif oieîù ; et slov. jçëa<br />
« prison » comme jélje ;<br />
v. r. data «don» (xi e s.), mod. dàca «paye» et «maison de<br />
campagne », slov. dàca « tribut », s.-cr. dàca « don » et « repas<br />
funèbre », sur da- ; et r., uddëa « réussite » sur uddt'sja « réussir » ;<br />
slov. jésca « nourriture » (et adj. jêsc « glouton », § 958) et jêst<br />
(§ 1169);<br />
et le slavon vrësta « sac », s.-cr. vrëca, etc., voir § 1026, et également<br />
pour v. si. prasla « fronde ».<br />
Le vieux-slave gasti, duel, « caleçons » (Upir'), r. gdci, pol. gacie,<br />
s.-cr. gàce, est obscur et inanalysable ; dans kleslq « tenailles », le<br />
thème est klëst- (§ 747) mais qui peut s'analyser en klës-l- (§ 1159).<br />
En serbo-croate, ddjeca « vêtement » est pour v. si. odezda<br />
( § 1023) ; màkraca « urine », sur môkr- « mouillé », et son synonyme<br />
plus grossier pisaca, sur pisati « pisser », sont parallèles aux adjectifs<br />
en -acï (§ 960).<br />
Pour le suffixe *-otja, voir § 902.<br />
OQ
CHAPITRE XXXVI<br />
SUFFIXES EN -v-<br />
§ 1182. Suffixe -vu. — Dérivé thématique du suffixe -u-,<br />
le suffixe -wo- est de large extension dans les langues indoeuropéennes<br />
: skr. -vah, lat. -uos, etc. En baltique, lit. -vas, ainsi<br />
efdvas « spacieux » sur érdéîi « se séparer » (si. rëduku, § 983),<br />
sleïvas « aux jambes torses » sur slei-, pâ-sliias « oblique » (§ 499) ;<br />
particulièrement adjectifs de couleur : muïvas « jaunâtre » (mùlti<br />
« devenir sale »), zelvas « verdâtre » (zélti « verdir », si. zelenu,<br />
§ 409)7 etc.<br />
En slave, on trouve les adjectifs :<br />
v. si. zivu « vivant », et lit. gyvas, skr. jïvâh, lat. uïuus ;<br />
v. si. mruivû « mort », r. mërtvyj, et lat. morluus, avec la même<br />
finale que zivu, et pour skr. mrtâh, gr. (3poréç « mortel » ;<br />
slavon krivu « courbe » et v. si. dans ras-kriviti « tordre » (§ 798),<br />
et lit. kreivas, sur un thème krei- qui peut être celui de lit. skriëli<br />
«voler en rond» (§ 515) ;<br />
v. si. pravu «droit», r. prâvyj, sûrement sur le thème prë- du<br />
préverbe pro- « à travers », préfixe nominal prâ- « avant » (§ 1221) ;<br />
v. si. lëvu « à gauche », s.-cr. lïjevï, et lat. laeuus, gr. Mi{F)6ç,<br />
sans thème isolable ;<br />
v. si. pruvu « premier », r. pérvyj, s.-cr. prvï, et véd. pûrvah,<br />
sur *pf- (§ 312) ;<br />
v. si. trëzvu « sobre », r. terëzvyj (dial.) et trézvyj (slavonisme),<br />
pol. trzezwy, slovaque Iriezvy et v. tch. slriezvy (mod. slrizlivy,<br />
par passage au type en -livu, § 998), slov. trézen et dial. trézev,<br />
s.-cr. trijèzan et irëzven (§ 1097), sans étymologie assurée;<br />
v. r. rëzvu dans rëzvïcï « brave, preux », r. rézvyj « vif, folâtre »,<br />
pol. rzezwy « alerte » ; et v. si. rëzvo Ham. 2817, mais douteux et<br />
répondant mal au grec STCIT£T£UY[ASVWÇ « bien réussi » : sur rëzali<br />
« trancher », au sens de « plein de mordant », cf. pol. razny<br />
« prompt, alerte » sur razic « frapper » ;<br />
v. si. ërûstvû « solide » (J. Ex., Gr. Naz.), r. cërstvyj « dur », pol.
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 707<br />
czerstwy « vigoureux », tch. ë(eJrstvy « frais », et slavon ëvrustu,<br />
s.-cr. cvrst « robuste, ferme », bulg. ëevrâst : sur un thème *ëïrstqui<br />
peut s'expliquer par un élargissement en -t-u- de la racine<br />
de *ëïrte- «entailler» (§ 429), lit. kifsti «frapper», part,<br />
passif kifstas ;<br />
v. si. posivu « convenable » (A. Test., Prov. XY, 5, et Ham.<br />
40416 altéré) et posivïnu (Cyr. Jér., Ham., § 978), subst. posivije<br />
(Ham., § 926) : sur le thème siv-, de *keiwo-, skr. çévah, çivâh<br />
« aimable, agréable », lette siëva « épouse », et peut-être de *kei-,<br />
v. si. sëmija « famille » ( § 1067) ;<br />
v. si. sudravu « sain », r. zdorôvyj, qui a une allure de postverbal<br />
d'un verbe *su-dorvili, v. pol. zdrowic « donner la santé », et ce<br />
verbe — mais qui n'est plus que le dénominatif de zdrowy —•<br />
serait un factitif sur lé thème *derv- de v. si. drëvo « arbre, bois »<br />
(§ 191) : sur thème d(h)ru-, l'avestique a dr(u)va- «en bonne<br />
santé », en regard de skr. dhruvdh « ferme », et lit drûtas « fort,<br />
solide ».<br />
Et v. si. dëva « vierge », adjectif et substantif, voir § 1185.<br />
On a les adjectifs de couleur :<br />
v. si. plavu « blond », r. polôvyj « de couleur isabelle », et lit.<br />
palvas « jaune pâle », v. h. a. falv « pâle » de *falwa-, sur le thème<br />
de lat. pallêre, lit. pelé « souris », etc. (§ 1085) ;<br />
slavon sivu « gris », s.-cr. sïv, et lit. syvas « (cheval) blanc », sur<br />
un balto-slave *sî-, forme réduite du thème *kyê- de skr. çyâvâh<br />
« brun » et çyâmdh « noir », lit. semas « gris cendré », mais il est<br />
douteux que sinjï «bleu foncé» (§ 957) se rattache à ce thème ;<br />
v. si. slavu dans slavoocije (J. Ex.) «couleur glauque des yeux»,<br />
r. solovôj « de couleur isabelle », dérivé slavon slavii « rossignol »<br />
(§ 146); et v. h. a. salo « de couleur sombre, terne» (d'où fr.<br />
« sale »). ,<br />
Et slov. slîv « de couleur prune » sur sliva « prune », voir § 1185.<br />
D'autres formes en -vu sont supposées par :<br />
v. si. ravïnu «égal», r. rôvnyj, etc. (§ 69), en regard de v. pr.<br />
arwis « vrai », et lit. arvas « libre » qui est à côté de ardvas « espacé »,<br />
ardyti « séparer », donc sur la racine *ar- de si. oriti (§ 608) ;<br />
v. si. protivç « en face », adverbe et préposition (§ 1203), et adv.<br />
sçprotivï « contre » (§ 1200), sur la préposition tch. proti « contre »,<br />
slov. prôti, et lette pretï, skr. prdti, gr. hom. rcpoTt ;<br />
v. si. razvë « à l'écart », adverbe et préposition, v. r. rozvë, à côté<br />
de v. si. raznû « divers », r. rôznyj « séparé », sur le préverbe v. si.<br />
raz- (§ 1071).<br />
Mais r. kôsvennyj « oblique » est un élargissement secondaire de<br />
kosu (§ 1097) ; et v. si. kruvopivu «buveur de sang» est à part<br />
(§ 995). Le slovène ajoute les adjectifs :
708 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
plitev « peu profond » à côté de plîtek, et s.-cr. cak. plitav à côté<br />
de plîtak : c'est un remaniement de plytukû (§ 984), et le slovène<br />
plitev a l'aspect de la forme en -lev (§ 918) de plîiva «radeau»<br />
(§ 915), devenue adjectif ;<br />
sçdev « pair, accouplé », à côté de sôd « (nombre) pair », tch.<br />
sudij ; il doit s'agir d'un des sens du composé sç-du (§ 819) : adj.<br />
« accouplé », à côté de « vase » et « jugement », subst., et slov.<br />
sçdev pourrait être une variante secondaire de cet adjectif par<br />
substitution à -du du thème dv- de dvâ « deux ».<br />
§ 1183. Substantifs. — Le baltique a des substantifs en lit. -vas :<br />
levas «père» (§ 35), pilvas «(gros) ventre», sur pilti «emplir»<br />
(§ 460).<br />
En slave, il faut mettre à part les postverbaux comme<br />
-pëvu (§ 751), etc. Le slavon stavu «élément» (§ 792) est nettement<br />
postverbal du factitif staviti (§ 613) dans v. si. sustavu<br />
« substance », etc., mais il peut remonter au dérivé en -v- qui<br />
explique la forme du factitif : lette stâvs « qui se dresse, escarpé »,<br />
d'où lit. stovëti « se tenir debout » (§ 594).<br />
Slov^ mlêv, masc., « banc de sable » est en regard de v. si. mëlî<br />
«rivage» (§ 718) en se rattachant à mlêv «mouture» sur mléti<br />
« moudre » (§ 727).<br />
V. si. gnëvu « colère », s.-cr. gnjëv, s'explique de même comme<br />
postverbal de gnëvati (sç) « (s')irriter » (§ 751).<br />
Y. si. nravu « caractère, mœurs », r. nôrov, est sur la racine *ner-<br />
(§ 773).<br />
Slavon jazvu « blaireau », et azvu faiblement attesté, mais qui<br />
paraît confirmé par aogoç du grec byzantin ; b. sor. jaz(v), v. tch.<br />
jëz(e)v et mod. jezevec, r. jazvéc, pol. jazwiee, slov. jdzvec, s.-cr.<br />
jâzavae ; le mot est à côté de jazvina « terrier, tanière » ( § 892)<br />
qui semble se rattacher naturellement à v. si. jazva « plaie » (§ 746),<br />
et l'on ne peut tirer rien de sûr des variantes slov. jdzba « trou »,<br />
s.-cr. jàzbina « terrier (de blaireau) », slov. jâzbec « blaireau » et<br />
cak. jàzbac. Il faut observer que le nom du blaireau est en baltique<br />
lette dpsis, âpsa, lit. opsrys, obsrùs, v. pr. wobsdus : un balto-slave<br />
*âbs-, inexpliqué, aurait pu donner un slave *(j)azb- et se contaminer<br />
avec jazva.<br />
Y. si. vlûxvu «magicien» (§ 20), r. voix v, slov. vôlhvec, bulg.<br />
vlâhva « brigand », est sûrement d'origine étrangère : le vieux<br />
nordique a vçlva « devineresse », et le mot slave répond exactement<br />
à la forme du nom du « loup », v. si. vlukû, r. volk, qu'on attend<br />
en germanique, *wulhvua-, au lieu de got. wulfs, etc.<br />
Pour divu « merveille », voir divo, et pour *kurvu « bœuf », voir<br />
v. si. krava « vache ».
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 709<br />
§ 1184. Suffixe -vo. — Le vieux-slave pivo «boisson», s.-cr.<br />
pivo « bière », est bâti directement sur le thème verbal pi-, et il<br />
diffère en cela des dérivés à suffixe -ivo qui ont pu lui servir de<br />
modèle (§ 1188).<br />
Mais slov. sîvo « couture », sur si-, n'est qu'une variante dialectale<br />
du postverbal siv (§ 795), comme s.-cr. sijevo «semis» de sijev<br />
(§ 751) ; r. stérvo «charogne» est pour *stïrvï, masc. (§ 171), et<br />
dial. jâtvo «volée» pour jato (§ 1164) ; s.-cr. ôstrvo est récent et<br />
d'un plus ancien ostrovo pour v. si. oslrovu (§ 737).<br />
Y. si. ërëvo « ventre », lié à ërëvii « soulier », r. cerevik, doit être<br />
un dérivé de la racine * (s)ker- (§ 191).<br />
V. si. divo « merveille », doit être une réfection de divu qui<br />
ressemble à l'ancien nom balto-slave du « dieu », lit. diëvas, avec un<br />
dérivé divii « sauvage » (.§ 959).<br />
V. si. drëvo « arbre, bois », r. dérevo, s.-cr. drïjevo, et lit. dervà,<br />
est un dérivé thématique *derwo- de la racine *dru- de druva « bois »,<br />
plur., r. drovâ, s.-cr. drvo (§ 159).<br />
Pol. mlewo « mouture », avec correspondant v. h. a. melo « farine »<br />
de *mel-wa-, est une forme ancienne qui est recouverte dans<br />
les langues slaves par le dérivé à suffixe productif -ivo : en polonais<br />
var. mliwo, meliwo ; r. mélevo, qui n'est qu'une variante graphique<br />
de mélivo, ukr. mélyvo ; tch. melivo, avec un exemple peu sûr de<br />
v. tch. mlevo ; slov. melivo, mais le féminin mlêv (§ 727) pourrait<br />
être un remaniement de *mlëvo ; s.-cr. mëljivo et mllvo, avec des<br />
variantes dialectales mlevo et mlijevo attestées trop tardivement<br />
pour être des témoins du plus ancien *mlëvo.<br />
§ 1185. Suffixe -va. — Le suffixe est représenté en baltique :<br />
lit. kalvà «colline» sur kélti «élever», si. ëelo «front» (§ 191);<br />
pieva « prairie » sur *pëi-, si. pilali (§ 468) ; masc. al-éiva « arrivant »<br />
sur al-eïli.<br />
En slave, outre le suffixe -tva (§ 915), on trouve :<br />
v. si. dëva « vierge », s.-cr. djëva, qui est également adjectif (§ 273),<br />
dérivé de la racine de- (§ 511) ;<br />
v. si. jazva « plaie », r. jdzva « fente » (§ 746), sur le thème baltique<br />
iz-, aiz- (§ 75) ;<br />
v. si. glava « tête », r. golovd, s.-cr. gldva, d'intonation douce,<br />
mais secondairement d'après lit. galvà, acc. gâlvq (§ 220) ; et v. h. a.<br />
kalo « chauve », de *kal-wa-, qui rattache le mot au thème de si.<br />
golu « dénudé » (§ 820) : il doit, donc s'agir d'un dérivé balto-slave<br />
*gal-va- de ce thème, avec ' vrddhi ( § 708) dans le substantif<br />
féminin ;<br />
v. si. krava (Izb. Svjat.) «vache», r. korôva, s.-cr. krâva, et lit.<br />
kdrvé, d'intonation rude, qui apparaît comme le féminin à vrddhi
710 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
d'un masculin *krwo-, v. pol. et dial. karw « (vieux) bœuf », v. pr.<br />
kurwa-, curwis « bœuf ». U n'est pas impossible de rattacher ces<br />
mots à lat. ceruus « cerf » et v. h. a. hiruz, dérivés au sens de<br />
« cornu » du nom de la corne, gr. xépaç, etc. : cette racine est<br />
représentée par ailleurs en balto-slave sous la forme *sr- dans v. si.<br />
srûna « chevreuil », v. pr. sirwis (§ 1076), mais ce sont des mots de<br />
l'aire de I'italo-celtique, du germanique et du balto-slave où l'on<br />
peut trouver en balto-slave, en regard de lat. k, germ. h, non seulement<br />
s, mais aussi k (§ 12).<br />
On a encore :<br />
r ; plevâ « membrane » à côté de plenâ, sur thème plê- (§ 1076) ;<br />
v. r. sliva « prune » et mod. sliva, s.-cr. slïva et plus récent sljïva,<br />
avec un adjectif slov. sîîv « de couleur prune » ; et v. h. a. slëha<br />
« prune sauvage » de *slaihô, ce qui dégage un thème *slei- qu'on<br />
retrouve peut-être dans lat. lîuêre « être livide ».<br />
Les mots suivants ne s'analysent pas :<br />
v. si. griva dans le dérivé grivïna «collier» (§ 1081), r. griva<br />
« crinière », s.-cr. griva, qui doit avoir signifié « encolure », et qui<br />
répond à skr. grïvân nuque, col », av. grïva ;<br />
v. si. mluva «bruit, tumulte», r. molvâ (§ 815) ;<br />
pol. mierzwa « vieille paille » et « engrais », mierzwic « fumer » ;<br />
tch. mrva « paille », mrviti « fumer » et sens premier « faire de la<br />
menue paille » ; s.-cr. mrva « miette », mrviti « émietter », slov.<br />
mrva : le mot se compare à lit. marvà « mélange confus » ;<br />
v. si. njiva « champ », s.-cr. njïva (§ 25).<br />
V. si. tçdvijq « reins » est le dérivé du thème *lndhwo- de lat.<br />
lumbî, etc. (§ 1028).<br />
Un type abondamment représenté de mots à finale -va résulte<br />
du remaniement morphologique du type athématique féminin en<br />
*-ù, -ûv- : r. dial. cérkva pour cérkov', r. bûkva, smôkva, s.-cr. utva,<br />
svëkrva (§ 201-204), avec v. si. plëvy, plur., «menue paille», r.<br />
polôva, s.-cr. pljëva, comme forme ancienne (§ 200), et avec une<br />
extension ultérieure de -va, ainsi dans s.-cr. nôzdrva « narine »,<br />
pour v. si. nozdri, plur. (§ 205). On ajoutera :<br />
r. guz « corde », et pol. gqzew, tch. houzev, slavon gozvica, et<br />
s.-cr. gûzva (§ 77) ;<br />
r. môkva « humidité, pluie » et ukr. mokvâ, slovaque mokva, et<br />
tch. mokvati « suinter », à côté de :<br />
slov. môëve « marécage », plur., non directement sur le verbe<br />
môëiti, mais secondaire de mçëa «humidité, trempée» (§ 1022)<br />
sur le modèle du plus ancien lôkva « mare » ; et de là le thème
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 711<br />
mocv- de slov. mocvàr et moëvâra, s.-cr. mbëvara et mocâr, pol.<br />
moczar(a) (§ 1128) ;<br />
slov. ponlkva, s.-cr. pànikva « gouffre » (où une rivière s'enfonce<br />
sous terre), en regard du verbe s.-cr. poniknuti (§ 797) ;<br />
slov. plôskev et plôskva « le plat, la surface », sur plôsk « plat » ;<br />
pol. pluskva « punaise », avec des variantes nombreuses, plaszka,<br />
ploszczyca, btoszczyca et ukr. blosëyc'a, qu'on veut comparer à lit.<br />
blàkê et lat. blatta « blatte », mais qui est un mot altéré par rattachement<br />
à diverses racines, dont celle de plusk «clapotis» (§ 759) ;<br />
ce qui conviendrait le mieux est le thème plosk- « plat », et pol.<br />
plaski (§ 1065), la forme blo- de l'ukrainien devant résulter d'une<br />
contamination avec bloxâ « puce » ;<br />
pol. zuchwa « mâchoire », de v. pol. zucha, verbe zuchac (§ 787).<br />
Pol. witwa « osier » et slov. dial. vîtva, à côté de vitra (§ 1117),<br />
est un remaniement de v. si. vëtvï «branche» (§ 160), pol. dial.<br />
wietew, tch. vëtev, r. vetv' ; — gçstwa « foule », avec gestwina « fourré »,<br />
est sur l'adjectif gçsty, mais ne se sépare pas des dérivés en -tva<br />
(§ 916), ailleurs s.-cr. gûsta, etc. (§ 1024) ; — rynwa «gouttière»<br />
est pour rynna, de l'allemand Binne ; — kulwa « avare » et l'ancien<br />
brzechwa « flèche sans pointe de fer » s'expliquent mal.<br />
R. detvâ « couvain » et ukr. ditvâ, d'où detvord « les enfants, la<br />
marmaille» (§ 1125), diffère par l'accent du type en -tva, r. bitva,<br />
comme du type r. smàkva, et il représente une formation parallèle,<br />
sur l'ancien collectif dëtï, à dëtïca, bulg. decd, s.-cr. djèca (§ 211).<br />
Tch. zluva « loriot » est une altération de v. tch. et slovaque vlha<br />
(§ 1010) par métathèse de vl(u)ha en *hluva et attraction de<br />
zlaria « pivert » (§ 1077) et zluty « jaune » (§ 1159).<br />
Il y a en outre les postverbaux : r. strâva «nourriture » (§ 779),<br />
s.-cr. lâva « aboiement » (§ 791), etc. Et les emprunts : v. si. lixva<br />
«usure» (§ 37), pol. barwa et tch. barva «couleur» de m. h. a.<br />
varwe, farbe ; et :<br />
r. kûrva « putain », pol. kurwa, s.-cr. kûrva, tch. kurva et ancien<br />
hurva d'après ail. Huïe : sûrement emprunt au germanique,<br />
v. h. a. huora de *hôrô, avec passage précoce et général de -y à -va<br />
dans un mot vulgaire, et avec x du germanique rendu à date très<br />
ancienne par k (§ 10), ou bien avec rattachement par étymologie<br />
populaire à kuru « coq ».<br />
§ 1186. Finales en -vï. —r On trouve -vï dans les adaptations<br />
d'anciens thèmes en -u- (§ 159) : masc. *stïrvï « charogne », *tetervï<br />
« coq de bruyère », *panarvï « ver blanc », d'où *ëïrvï « ver » (§ 171) ;<br />
fém. vëtvï «branche», *vïrvï «corde» (§ 160), et tout le type en<br />
-uvï, r. -ov', etc., de -y (§ 201), et en slov. -tev de -tva (§ 916).
712 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
On a en outre des postverbaux : v. si. obuvï (Pand. Ant.) « chaussure<br />
» sur ob-uvati (§ 760), v. tch. odëv «vêtement » (§ 751), etc.<br />
Est isolé :<br />
v. si. cëvï dans cevïca (§ 874), s.-cr. cljev «tuyau », v. si. cëvïnica<br />
«flûte» (§ 718).<br />
SUFFIXES EN -av-, -iv-, ETC.<br />
§ 1187. En -av-, — D'abord le suffixe -avu d'adjectifs (§ 993).<br />
Dans les substantifs, on a isolément masc. -avï dans zeravï « grue »<br />
(§ 175), et -avu dans :<br />
slavon rçkavu « manche », r. rukâv, pol. rçkaw, s.-cr. ràkàv, etc.,<br />
avec dérivé rgkavica, r. rukavica, etc. (§ 880), «gant, gantelet» :<br />
c'est un adjectif substantivé signifiant « (vêtement) à bras » et<br />
fixé comme masculin comme joint à un nom masculin de vêtement.<br />
Le suffixe productif des substantifs est le féminin -ava :<br />
Y. si. druzava «puissance, xpàxoç », r. derzdva, s.-cr. drzava, sur<br />
v. si. druzati « tenir, xpa-rsïv ».<br />
V. si. kricava « cris » de kricaii, et tch. krikava de kfiknouti.<br />
V. si. ponjava « pièce de toile, linge, linceul » et ponjavica<br />
(§ 880), r. ponjâva «jupon de toile », s.-cr. pànjava « drap (de lit),<br />
nappe », slov. ponjâva ; il ne paraît pas possible de rattacher le mot,<br />
du moins directement, à la racine verbale de pine- « tendre »,<br />
opona « rideau », et il doit s'agir d'un adjectif substantivé dérivé<br />
d'un mot d'emprunt, à lat. pannus « morceau d'étoffe », adj.<br />
panneus, ou à got. fana.<br />
V. si. dçbrava et dçbrova « forêt », r. dubrava et dubrôva, bulg.<br />
dâbrâva, tch. doubrava, slov. dobrâva, s.-cr. dùbrava, mais<br />
Dùbrôvnïk, et pol. dqbrowa : le mot suppose un dérivé dçbru<br />
«forêt» (§ 1115) de v. si. dçbu «arbre, chêne», avec adjectif<br />
dçbrovu, pol. dial. dqbrowy, se mêlant à l'adjectif substantivé<br />
*dçbravu (§ 993).<br />
Slavon gçstava « densité », slov. gosëâva « densité, bois épais ».<br />
Slavon tçzava « poids », s.-cr. ancien tezava « poids (de balance) »,<br />
slov. tezâva « difficulté, peine ».<br />
Slavon muravïnu « couvert de verdure », de r. muravà « gazon »<br />
et ukr. muràva, pol. murawa, slov. murâva, dérivé de r. mur « herbe<br />
des prés » (§ 1115).<br />
Y. r. ëasëava à côté de l'usuel câsëa « bois épais, fourré » (§ 1024).<br />
V. r. (xn e s.) stonava « gémissement », en tchèque adj. stonavjj<br />
« maladif », sur stonati « être souffrant » (§ 548).<br />
Pol. trzçsawa « marécage » et trzçsawica, proprement « sol qui
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 713<br />
tremble » (r. trjasina « fondrière »), et v. si. trçsavica « fièvre »<br />
(§ 880), r. trjasâvica (trjasûëka), s.-cr. irësavica «tremblement<br />
(des mains) », avec adj. *trçsavu (§ 993).<br />
Pol. pçpawa, nom de plante, potentille, tch. et s.-cr. pupava,<br />
et r. pupâvka « anthémis » : adjectif substantivé sur pçpu (§ 764).<br />
R. bulavâ « massue, pomme d'une canne », pol. buiawa « bâton<br />
de commandement » : expliqué comme dérivé de pol. buia « boule »,<br />
tch. boule « bosse » et slov, bûla, sur le thème bul- de lat. bulla, etc.<br />
Ukr. témrjava « obscurité », variante de r. lemrivo.<br />
S.-cr. zèrava et zèravica « braise », slov. zerjâvica, zerjâvka, et<br />
adjectif slavon zeravu « incandescent », tch. zeravy, slov. zerjàv,<br />
sur thème zer- (§ 594), comme v. si. zarjavu sur zariti ; et voir<br />
zeratùku « cendre, braise », § 1178.<br />
Y. pol. chmurawa « assombrissement » sur chmura « nuage »<br />
(§ 760).<br />
Pol. kurzawa « tourbillon de poussière » sur kurz « poussière »<br />
(§ 1019).<br />
Pol. rzawa « hennissement » sur rzec « hennir » ; et wrzawa<br />
«vacarme», voir § 1190.<br />
S.-cr. tvrdava « forteresse » sur tvïditi « fortifier », et slov. trjâva,<br />
trdnjâva sur ifditi, d'un plus ancien s.-cr. tvrda (§ 1024).<br />
S.-cr. mècava « tempête de neige » sur mètë- « neiger en tourbillon<br />
» ( § 429) ; mrëava « nuage noir, fourré épais » sur mrëali<br />
« s'obscurcir » ; grmljava « roulement de tonnerre » ; lomljava « fracas<br />
» ; meljâva «mouture», à côté de mëljivo (§ 1184), refait sur<br />
méljati « broyer » ; dèrnjava « criaillerie » sur dèrati se « s'égosiller »,<br />
et krivnjava sur kriviti se « crier à tue-tête », kùknjava sur kukati<br />
« se lamenter » et tùznjava sur tùzili « se plaindre », pùenjava<br />
« fusillade » sur pueati, pûeanj (§ 1092) ; etc.<br />
On a en outre de nombreux noms de rivières, de régions et de<br />
localités, qui posent tous les problèmes d'origine des toponymes :<br />
v. r. Morava et pol., tch., s.-cr. (lat. Marus, Margus, v. h. a.<br />
v. h. a. Maraha), r. Libâva (lette Liepâja), pol. Drawa, tch. Vltava,<br />
s.-cr. Rèsava, etc.<br />
Et des postverbaux, non seulement du type de r. podstâva<br />
(§ 792), mais en slovène (iz)delâva, (iz)iskâva, etc. (§ 818).<br />
§ 1188. Suffixe -ivo. — En regard du suffixe d'adjectifs -ivu<br />
(§ 995), le suffixe -ivo présente une grande extension. En vieux<br />
slave :<br />
kladivo (Upir') «maillet, marteau», et tch. et s.-cr. ancien,<br />
slov. klâdivo, le sens de « marteau » appuyant le rattachement du<br />
thème kla- de klade- « charger » à celui de lat. elâdës ( § 430) ;
714 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
prçdivo (Upir') « du filé, fil », r. prjddevo (-ivo) « filasse », pol.<br />
przçdziwo, tch. predivo, slov. predîvo, s.-cr. prëdîvo ;<br />
sëëivo « cognée », bulg. secivô « outil tranchant », s.-cr. sjëëïvo et<br />
plur. sjeëiva ;<br />
socivo (Izb. Svjat., Gr. Naz.) «jus de légumes, légumes cuits,<br />
lentilles », et socevica « lentille », r. sôëivo, soëevica, slov. socivo<br />
et s.-cr. sôcïvo, sur sokû «suc, jus» (§ 733) et une autre forme<br />
*socï (§ 880);<br />
mûvivo « bain » (Ham. 26116, 46415, qui peut être vieux-russe),<br />
en regard de v. r. movî(§ 519).<br />
En slavon et dans les langues slaves :<br />
slavon jadivo « chose à manger », r. édivo et ézevo, v. pol.<br />
jedziwo, slov. jêdivo, s.-cr. jêdïvo et jëstîvo, et adjectif s.-cr. jèdiv<br />
« mangeable », r. ezevôj « du manger », sur v. si. jadï « le manger »<br />
(§ 713), r. ed', slov. jêd, et slavon jazda, r. ézd, etc. (§ 1024) ;<br />
slavon zïnivo « ce qu'on moissonne », r. znivo « chaume », pol.<br />
zniwo « moisson », tch. znivo ;<br />
v. r. molozivo et mod. molôzivo « premier lait (après que la vache<br />
a vêlé) >>j tch. mlezivo, slov. mlézivo et fém. mléziva, pol. mleziwa<br />
et mloziwo, miodziwo par rattachement à miody, et adjectif slov.<br />
mléziv « de mauvais goût, fade » : dérivé de *melzï, slov. mlêz et<br />
s.-cr. dial. mljëza « premier lait (de l'accouchée) », abstrait en -ï<br />
(§ 713) distinct du postverbal *molzu (§ 769) de *mîlze- « traire » ;<br />
v. r. varivo (xn e s.) « ce qu'on fait bouillir », r. vdrevo (-ivo)<br />
« potage », pol. warzywo « légumes verts », s.-cr. vàrlvo, tch. varivo<br />
et adj. varivy « ce qui convient pour le bouillon » ;<br />
r. ancien ognivo (xvi e s.) et mod. ognivo « briquet, batterie de<br />
fusil », v. pol. ogniwo « foyer » et « briquet, anneau », pol. mod.<br />
« anneau (d'une chaîne) » et ogniwko « briquet, annelet », v. tch.<br />
ohnivo « briquet » et mod. ohnivy « de feu, enflammé », adj., slov.<br />
ognjivo « briquet » et ognjiv « de feu » ; et :<br />
r. krésivo (-evo) « briquet », pol. krzesivo, tch. kresivo, s.-cr.<br />
krësïvo, sur kresaii « battre le briquet » (§ 804) ;<br />
r. mélivo (-evo), pol. m(e)livo, etc., «mouture», pour un plus<br />
ancien *melvo (§ 1184) ;<br />
r. kûrevo «ce qu'on fume», pop. «tabac», sur kurlt' «fumer»,<br />
et slov. kurîvo « combustible » sur kûriii « faire du feu » ( § 757) ;<br />
r. tôplivo « combustible », et tch. topivo ;<br />
v. r. kruzivo (xiv e s.) et mod. krûzevo «(point de) dentelle », sur<br />
krug « cercle », kruzit' « faire autour » ;<br />
r. kdlivo (-evo, -iva) «un petit peu, un petit morceau», dial.,<br />
inexpliqué ; mésivo « pâtée (pour les bêtes), sur mesit' « pétrir » ;<br />
iémrivo, -iva, dial., « obscurité » et ukr. témrjava, sur temr- (§ 1127) ;<br />
pol. doiwo « traite » et slov. dojîvo « quantité de lait d'une traite » ;<br />
pol. paliwo « combustible » et slov. paiivo ;
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 715<br />
pol. pieczywo « pâtisserie », et slov. peclvo, s.-cr. pëcïvo « rôti »<br />
et « petits pains » ;<br />
pol. rzeziwo « massacre » sur rzez (§ 776), et slov. rezîvo « matière<br />
à tailler » ;<br />
pol. grosiwo « de l'argent » sur grosz « sou, argent » ; kosiwo<br />
(v. pol.) « fauchage » ; iuczyvuo « bois de torche » (v. tch. lue « torche »,<br />
§ 1019) ; miqsiwo « de la viande, miçso » ; zelaziwo « ferrement » ;<br />
tch. barvivo « principe colorant », sur barvili « teindre » ; krmivo<br />
« fourrage », sur krmiti « nourrir les bêtes » ; stelivo « litière », sur<br />
stele-, stlâti ; svitivo « ce qui sert à l'éclairage », et adj. svitivy<br />
« éclairant » ; u£iuo « matière d'enseignement », et slov. ucîvo ;<br />
slov. berîvo «lecture» (brâti «lire», § 471); cepivo «vaccin»<br />
(cépiti « fendre » et « vacciner ») ; ynojîvo « engrais » (ynojiti<br />
« fumer ») ; lepîvo « colle, mastic » ; netîvo « combustible » (nétiti<br />
« faire du feu », § 747) ; strelîvo « munitions » (streliti « tirer ») ;<br />
vezîvo « coton à broder » ; pletîvo « fil à tricoter », et s.-cr. plëtïvo ;<br />
s.-cr. Êëcïuo « ce qu'on acquiert », sur tèci « acquérir » par dépréverbation<br />
de stèci «amasser» (§ 1208).<br />
Etc., et avec le degré alternant c pour è dans s.-cr. tëcîvo et dans<br />
pëcïvo et slov. pecîvo (§ 111).<br />
§ 1189. Suffixe -iva.— Bien plus rare que -ivo, et sans sa<br />
productivité :<br />
V. si. tçtiva « corde (de l'arc) », r. tetivd pour tja-, pol. ciçciwa,<br />
tch. tëtiva, slov. et s.-cr. teliva : sur un élargissement en -t- (§ 1159)<br />
du thème ten- « tendre » (§ 457).<br />
Slavon kropiva «ortie», r. kropiva, mais sor. kopriwa, tch.<br />
kopfiva, s.-cr. kopriva, slov. kopriva et dial. kropiva, pol. pokrzywa<br />
avec métathèse : dérivé, avec koprina « soie » ( § 893) et koprëna<br />
«tissu fin» (§ 1099), d'un thème kopr-, ou krop-, qui est apparemment<br />
le même que celui du nom du « fenouil » (§ 1114). L'ortie<br />
a servi de plante textile jusqu'à une date assez récente ; son<br />
nom dans les langues baltiques, v. pr. noatis, lit. notre et lette<br />
nâtré, a comme correspondant slave *natï « fanes (de betterave) »<br />
(§1171).<br />
Pol. staciwa (plur. -tvy) « métier à tisser », slov. stâtiva et usuellement<br />
stâtva (plur. -ve), s.-cr. stativa et statva (§ 916) «chevalet<br />
du métier à tisser », et v. tch. et mod. stativo. Le mot, au pluriel,<br />
désigne proprement les montants de l'échafaudage qui soutient<br />
le métier à tisser, et, comme pol. statywa « support », tch. stativ,<br />
c'est un emprunt au latin statîuus, ail. Stativ.<br />
Pour r. kâliva et témriva, voir -ivo.<br />
Slov. hotiva « fille illégitime » est le féminin de hottv « bâtard »,<br />
dérivé de hôt « concubine », v. si. xotî (§ 713) ; et pâmetiva « fête des<br />
Saints Innocents » est l'adjectif v. si. pamçtivu (§ 995) substantivé.
716 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
S.-cr. dial. odiva « fille mariée hors de sa famille » est isolé et<br />
sans rapport avec l'adjectif (rare) hodiv « qui peut marcher » ; on<br />
penserait à un dérivé du dialectal àdati « marier », variante de l'usuel<br />
ùdati, au sens de slov. oddâti « marier au dehors ».<br />
§ 1190. Finale -ëv-. — On trouve exceptionnellement en slovène,<br />
à côté des postverbaux en -ava du type de iskâva ('§ 818), le<br />
postverbal hoîêva « désir », tiré de hoiëti et différent de hotiva.<br />
La question se pose de l'existence d'un suffixe d'adjectifs -ëvû<br />
parallèle à -avu et -ivu. Le macédonien dialectal -ef (§ 994) représente<br />
-javu, mais le vieux tchèque a libëvy « maigre », var. libivy<br />
et mod. libovy, dont la forme apparaît confirmée par plusieurs<br />
exemples de libëvu en slavon russe, r. mod. libivyj, libivôj « faible ».<br />
Les lexiques du serbo-croate occidental, cakavien et kajkavien,<br />
attestent libiv au sens apparemment contraire de « charnu », et<br />
le slovène de ces régions a de même libîvo et libovina « du charnu »,<br />
mais il s'agit de la viande du gigot ou du jambon par opposition<br />
au gras. Le thème est celui de lit. Uebas et Idibas « maigre », v. angl.<br />
léf, de *leibha-, « faible ». On peut supposer en slave un substantif<br />
dérivé *lib-ja, et sur ce substantif l'adjectif libëvu avec le traitement<br />
ancien ë de ja qu'on a dans zelëli de zelfa (§ 586).<br />
Le mot pol. wrzawa «vacarme, bagarre» (§ 1187), tch. vrava,<br />
bulg. vrjàva « cris, grand bruit » et s.-cr. vrëva « foule, tumulte »,<br />
doit représenter *vïrëva et être tiré de vïrëti «bouillonner».<br />
§ 1191. Suffixes en -ov-, —D'abord le suffixe d'adjectifs -ovu<br />
(§ 961). Et diverses substantivations de ces adjectifs, ainsi v. si.<br />
dçbrova variante de dçbrava (§ 1187).<br />
Le nom du «plomb», v. si. olovo (Gr. Naz.) et adj. olovënu<br />
(§ 980), r. ôlovo, s.-cr. ôlovo, et pol. olôw, slov. olôv, se retrouve en<br />
baltique sous la forme lit. âlvas, v. pr. alwis : ce doit être un mot<br />
voyageur, comme les noms des métaux, qu'on rencontre sous une<br />
forme différente, mais assez voisine, dans le germanique *blïwa-,<br />
ail. Blei.<br />
Le vieux-tchèque et slovaque tàlov « pus », v. pol. talowily<br />
«gras» et s.-cr. tàlôvan (tâlog «dépôt», § 1011), est inexpliqué.<br />
Le tchèque domov « pays natal, foyer » n'est pas une substantivation<br />
de l'adjectif v. tch. domovtj « de la maison », mais c'est la forme<br />
fléchie secondairement de l'adverbe domu « à la maison » (§ 321) :<br />
c'est ce que montre le mot venkov « la campagne », qui est tiré,<br />
lui, de l'adverbe venku « dehors », élargissement de ven en -ka<br />
(§ 322) avec flexion secondaire, venek et svenku.<br />
C'est en serbo-croate qu'on trouve un suffixe productif -ov de<br />
substantifs :
[§ 1160] SUFFIXES EN -t- 717<br />
bjèlôv « chien blanc », gén. bjelova ; gàrôv « chien noir », sur gâr<br />
« couleur de suie » (§ 736) ; kùsôv « à queue coupée » ; rôgôv « (bœuf)<br />
à grandes cornes » ; pràznôv « homme vide, niais », qui a l'aspect<br />
d'un abrégé de prazndglavac ; slùîôv « oiseau de mauvais augure »,<br />
sur slûta «mauvais présage» (§ 758); nitkôv «homme de rien,<br />
canaille », sur nïtko « personne, nullité » ; etc.<br />
L'accent est différent de celui des adjectifs en -ov, du type<br />
dùbov « de chêne », fém. dùbova. C'est un suffixe emprunté au<br />
hongrois -ô, désinence de participe présent : lôpôv « voleur », du<br />
hongrois lopô, participe du verbe lopni « voler » ; âsôv « bêche »,<br />
de âsô, inf. âsni « fouir » ; hintov « voiture », de hintô, et âkôv « seau »,<br />
de akô, emprunt du hongrois au slave okovu.<br />
FINALES EN -z-<br />
§ 1192. Il n'y a pas de suffixe en -z- : il ne pourrait venir que d'un<br />
indo-européen *-g(h)-, balto-slave -z-, et si l'on trouve en grec un<br />
suffixe -70Ç, le correspondant en balto-slave en est -ga-, comme<br />
-g(h)a- en indo-iranien (§ 289), dans si. *dïlgu «long», etc.<br />
(§ 1009).<br />
En baltique, le lituanien a un suffixe productif -ùzis, fém.<br />
-Mè, formant des diminutifs et des termes de tendresse, d'origine<br />
expressive indéterminable : kunigMis « le cher abbé » de kùnigas<br />
« prêtre » (pol. ksiqdz).<br />
En slave, les finales en -z- sont des finales de thèmes, de postverbaux<br />
comme r. sojMn alliance » (§ 762), ou inanalysables comme<br />
de r. berëza « bouleau », lit. bérzas, v. h. a. birihha. Il n'est pas<br />
possible de voir un dérivé suffixal de rogu « corne » dans v. si.<br />
rogozû (Upir') « jonc », r. rogôz, etc.<br />
Le russe a quelques mots en -oza de valeur expressive dans<br />
egozâ « (enfant) pétulant », elozâ « qui se traîne, qui s'agite », et<br />
slrekozâ « libellule » qui pourrait être un élargissement de strëk<br />
«taon» (§ 733). Le slovène a de même gramôz «gravier», halgza<br />
« broussailles » qui n'est qu'une variante secondaire de halçga<br />
(§ 1013) par fausse réfection sur le collectif halôzje, trabuza<br />
« bavard(e) » avec verbes irabljâti, irabuzljâti ; etc. On ne sait<br />
même pas l'origine exacte d'un mot qui ne peut pas être antérieur<br />
au xvi e siècle : korMa « maïs », r. kukurMa, s.-cr. kukùruz.<br />
Sont à part, avec la finale -çzï réduite de -çdzï (§ 1015), les<br />
suffixes en -zn-, -izna (§ 1108),- -znï (§ 1109).
CHAPITRE XXXYII<br />
LES SUFFIXES D'EMPRUNT<br />
§ 1193. — Les emprunts de suffixes sont fréquents. Il y a<br />
d'abord emprunt de mots, avec analyse des mots étrangers et<br />
reconnaissance de la valeur suffixale de leurs finales, puis extension<br />
des suffixes à des mots indigènes. Inversement, il peut y avoir<br />
renforcement de suffixes indigènes par apport de mots d'emprunt,<br />
ainsi dans le cas des féminins en -y, -uv- (§ 204).<br />
En slave, à l'époque du vieux slave, on reconnaît comme suffixes<br />
étrangers :<br />
-arjï, du latin -ârius directement ou par le germanique ( § 853) ;<br />
-ezï, sûrement du roman (§ 1018) ;<br />
-ynji, sûrement du germanique (§ 921), et également :<br />
-izna et -znï (§ 1110) ;<br />
-ïda (§ 1007) ;<br />
adj. -ïsku (§ 973) ;<br />
-ëii du turc (§ 864), et de même sans doute :<br />
-acï {§ 857);<br />
-ïljï ( § 1063).<br />
§ 1194. Finales et suffixes. — La distinction entre finales de<br />
mots d'emprunt et suffixes n'a rien de tranché, et des finales peuvent<br />
apparaître transformées plus ou moins nettement en suffixes :<br />
v. si. -çdzï, finale d'emprunts au germanique, s'étend comme<br />
suffixe pour aboutir au suffixe productif r: -jâga (§ 1016), et<br />
parallèlement cette finale donne en baltique le suffixe d'adjectifs<br />
lit. -ingas (§ 1008) ;<br />
-ïlu du germanique et des emprunts au latin par le germanique<br />
connaît une petite productivité en slave (§ 1063) ;<br />
-çdï et lit. -andis, du germanique *-andi-, apparaissent étendus à<br />
quelques mots (§ 1000) ;<br />
-unu sort pour une bonne part d'emprunts au roman (§ 1104),
[§ 1195] LES SUFFIXES D'EMPRUNT 719<br />
et -yrï d'emprunts au grec et au latin (§ 1131) ; et d'autres suffixes,<br />
en -çg-, -yg- (§ 1016), etc. ont visiblement leur origine dans des<br />
emprunts.<br />
Au suffixe slave -ïja (§ 1028) et à -ija de -ii (§ 156) s'ajoute le<br />
suffixe -ia. du grec, lat. -ia, qui se rencontre en vieux slave dans des<br />
emprunts : usija « essence, oùoîa », plur. rusalijç « Rosalies », lat.<br />
rosalia, gr. poucraAta ; sing. kucija « grains trempés », du grec<br />
byzantin xooxxia. « fève » par un intermédiaire roman à prononciation<br />
c' de k', et r. kut'jâ « plat de grains (qu'on mange pour les<br />
morts) », avec passage de k' à t', comme dans la forme populaire<br />
Avdôt'ja de Evdokija « Eudocie » ; et dans les noms de pays, Svrija<br />
« Syrie », etc. Cette finale a connu dans les langues slaves un<br />
développement si grand qu'on n'en peut pas suivre le détail, sous<br />
les formes -ija et -ja, dans les mots du vocabulaire de culture, et<br />
avec adaptation de lat. -iô, fr. -ion, en -(i)ja dans r. agitâcija,<br />
revoljucija, s.-cr. revolûcija; pol. rewolucja, tch. revoluce ; et aussi<br />
dans des formations populaires, comme le type de collectifs s.-cr.<br />
momcàdija «jeunes gens » sur mômcâd (§ 1006). Dans les emprunts<br />
au grec, la forme du grec savant -ta, comme lat. -ia, fr. -ie, est<br />
préférée à -icc du grec vulgaire : s.-cr. miràdija « aromate » pour<br />
(AuptoSià. Le bulgare élargit en -otija le suffixe -ota (§ 902).<br />
L'emprunt au latin -ica, gr. -w.~t\, du suffixe -ika (§ 1045) remonte<br />
au vieux slave, en se continuant à l'époque moderne dans les mots<br />
savants, r. fizika, etc. On a de même -iku, r. fizik « physicien » et<br />
v. si. (Gr. Naz.) gramatiku ypafxjxaTixoç, v. r. gramotiku et mod.<br />
grammâtik « grammairien ».<br />
Le suffixe grec -laaa. de noms de femmes s'est introduit en latin<br />
dans des emprunts comme diaconissa « diaconesse », gr. Siocxôvicrca<br />
de Stàxovoç « diacre », et il a eu ensuite une grande extension. On<br />
trouve en slavon dijakonisa, prezviterisa (Srezn., Suppl.) « prêtresse,<br />
TïpeaouTsplaça » (comme titre interdit aux femmes), et istocïnicisa,<br />
ktitorisa, noms de deux icônes de Notre Dame ; dans les langues<br />
modernes, r. dijakonissa, et princéssa, s.-cr. princésa (tch. princezna,<br />
ail. Prinzessin).<br />
§ 1195. Autres suffixes d'emprunt. — Aux langues romanes :<br />
s.-cr. et slov. -aca (§ 857) ;<br />
pol. -e/lo. du latin savant, et slov. -ùda, -(j)âda de l'italien<br />
(§ 1004);<br />
s.-cr. régional -ijer, -Fr de l'italien -iere ( § 853) ;<br />
slov. -avt, suffixe péjoratif, dé l'italien -aldo : tdjavt « aboyeur,<br />
criailleur », dépréciatif de lâjavec ; mâzavt « saligaud », pour mdzavec<br />
« barbouilleur », srkavt « siroteur » pour sfkavec, etc. ;
720 SUFFIXES DIVERS [§ 1195]<br />
A l'allemand :<br />
v. tch. -ier, mod. -ir, du moyen haut-allemand -aere ( § 853) ;<br />
pol. -ior, tch. -er, de -er(ich) des noms de mâles (§ 1121) ;<br />
-ant : r. muzykânt « musicien », ail. Musikant, et koncerlânt « qui<br />
donne un concert, koncêrt », outre debjulânt « débutant », du français<br />
» ; pol. spekulant « spéculateur » ; tch. konsultant « conseiller<br />
d'études », pracant « qui aime travailler » sur pracovati et prâce<br />
«travail» (§ 1026), svingulant «tricheur» sur svindlovati, ail.<br />
schwindeln ; s.-cr. muzikant, et zabùsant « carottier, embusqué »<br />
sur zàbusiti « s'esquiver, carotter » ;<br />
-man, de l'allemand -mann « homme », second terme de composé,<br />
dans des emprunts à l'allemand souvent déformés, et avec extension<br />
à des mots slaves : pol. helman « chef d'armée », et tch. hejtman,<br />
de Hauplmann, m. h. a. houbetman, heupiman ; pol. ancien liczman<br />
« calculateur » sur liczyc « compter », et mod. liczman « jeton », qui<br />
ne doit pas être l'altération d'un autre mot, mais qui doit résulter<br />
de la perte complète du sens du suffixe ; de même iachman « haillon »<br />
sur lach (§ 1139) doit avoir signifié « haillonneux », sens conservé<br />
par le féminin iachmana, lachmanka ; — slov. fârman « paroissien »<br />
de fâra 4 paroisse », ail. Pfarre et Pfarrmann ; dial. hotman « père<br />
hors mariage » sur hôt « concubine » (v. si. xotï, § 713) ; otrôcman,<br />
déformation plaisante de otrok, otroëè « enfant », et assez large<br />
extension de -man comme suffixe expressif ; pûrman « dindon »<br />
et purân, de pûra « dinde » ; râcman « canard mâle » de rdca « cane » ;<br />
— et s.-cr. râcman de ràca, lâcman(in) «étranger» de Landsmann<br />
« compatriote » (le compatriote de l'Allemand est l'étranger du<br />
Slave) ;<br />
-ung : pol. ralunek « secours », verbe ratowac « secourir », de<br />
Rettung, retten ; rachunek « compte », rachowac « compter », de<br />
Rechnung, rechnen ; et sur des mots slaves : pocalunek « baiser »,<br />
podarunek « présent » (et podarek) ; — slov. kôstinga « frais », de<br />
kostàli « coûter », ail. Kosten ; râjtinga « compte », de râjtati<br />
«compter»; prepiringa «dispute» pour prepîr(ka), sur prepîrati<br />
se ;<br />
-tein, dial. -le : slov. bablè « vieille femme », otroële « enfant ».<br />
Emprunts au turc :<br />
-dzi : s.-cr. et bulg. -dzija, continuant v. si. -cii (§ 865) ; -li, qui<br />
est à retrouver, non pas dans v. si. -lii, s.-cr. -Ija (§ 1058), mais<br />
dans v. si. -ïljï (§ 1063), et qui a donné -lija en bulgare et en serbocroate,<br />
dans des dérivés de mots turcs : bulg. kâsmetlija « veinard »<br />
sur kâsmét « chance », meraklija « amateur passionné » sur merdk<br />
« goût, envie », s.-cr. haràëtija « qui exige le tribut, hàrâë », zanàtlija<br />
« artisan » de zànat « métier » ; et avec grande extension dans des<br />
dérivés de mots slaves : s.-cr. odHija « homme déguenillé », sur
[§ 1196] LES SUFFIXES D EMPRUNT 721<br />
àdrijeti « déchirer », uzvàdlija « chemise en toile brodée, ùzvod »,<br />
djecûrlija « marmaille » de djèca « enfants » avec suffixe -ura ( § 1133) ;<br />
et dans des noms d'habitants de villes et de régions, Saràjlija<br />
« habitant de Sarajevo », Parizlija « Parisien », prekomàrlija « habitant<br />
d'outre-mer » ;<br />
-lik, -lik (avec un i fermé proche du y slave), -liik, -luk, selon<br />
l'harmonie vocalique du turc : v. si. -lûku dans sokalukû (Upir')<br />
«cuisine» à côté de sokacii «cuisinier» (§ 155), kurëluku (J. Ex.)<br />
« moule » ; — r. -lyk dans baslyk « capuchon », d'où slyk « bonnet de<br />
paysanne , du turc bas-lik « couverture de la tête, bas » ; — bulg.<br />
-lâk : agalâk « dignité d'aga, seigneurie », avdzilâk « chasse » sur<br />
avdzija « chasseur », turc avci (avec c notant dz) ; et aussi -luk :<br />
mahmurlûk « malaise après l'ivresse, mal aux cheveux » ; — s.-cr.<br />
-luk : pasàluk « province de pacha, vilayet », avec extension à des<br />
mots slaves : cizmàrlukt « métier de bottier, ëïzmâr », bezobràzluk<br />
« effronterie » (bezobrazan « effronté »), nestàsluk « espièglerie » (nëslasan<br />
« remuant, espiègle »).<br />
Pour -ma, voir § 1067.<br />
Le turco-persan hâne « maison » a donné s.-cr. -(h)ana : barutàna<br />
«poudrière» de bârut «poudre», (h)apsàna «maison d'arrêt,<br />
(h)àps»; et sur des mots non turcs : ciglàna «briqueterie» sur<br />
clgla « brique », svilàna « filature de soie, svila ».<br />
Emprunts au hongrois :<br />
slov. et s.-cr. -as (§ 1145) ;<br />
s.-cr. -ov (§ 1191).<br />
§ 1196. — Emprunts aux langues modernes de culture :<br />
-at : r. konkordât, et pol., etc. ;<br />
-az : r. saboldz, etc., et listâz sur list « feuille » ;<br />
r. -ër : graver « graveur », etc., et basnër « qui se tient dans la<br />
tourelle, bâsnja, du tank », sumër « bruiteur » sur sum ;<br />
r. -ionér : revoljucionér, etc. ;<br />
pol. -(i)nier : inzynier, etc., et kosynier «homme armé d'une<br />
faux », uciekinier « réfugié » sur uciec siç « se réfugier » ;<br />
r. -izm : marksizm ; pol. -izm : szowinizm, et towianizm « doctrine<br />
de Towianski » ; tch. -ismus : komunismus ; slov. -izem : realîzem ;<br />
s.-cr. -izam : marizam « marrisme », romanlizam ;<br />
r. -isl : zurnalist, et svjazist sur svjaz' « liaison », sluzbisl « (militaire)<br />
zélé, service-service » ; — slov. realîst, et s.-cr. reàlist ; —• pol.<br />
-ista : sluzbista, organista et, lutnisla « joueur de luth, lutnia »,<br />
bçb(e)nista «joueur de tambour, bçben»; tch. -ista : motorista, et<br />
flétista « joueur de flûte, fletna », houslista « violoniste » sur housle<br />
« violon », mâjista « écrivain du groupe de la revue Mâj » ;<br />
r. -il : meteorit, dial. nâjmit « journalier » sur naëm « louage » ;
722 SUFFIXES DIVERS [§ 11-10]<br />
slov. jezuït, s.-cr. jezùït ; — pol. -ila : jezuita, najmita, wrôzbita<br />
« devin » sur wrôzba « divination » ; tch. jezuita, fém. kapacila<br />
« capacité » ;<br />
-tor : r. agitatôr, pol. dokior, etc. ;<br />
-ara : r. kul'tùra. Etc.<br />
§ 1197. Finale -osu. — Ce n'est pas un suffixe, mais une caractéristique<br />
d'emprunts au grec -oç :<br />
v. si. Xrislosu « Christ, Xpia-t-ôç », r. Xrislôs ; klirosu « clergé »,<br />
dérivé klirosïnû, de xXvjpoç, et r. kliros, krylos « chœur » ; nomosu<br />
(Izb. Svjat.) «loi, VÔJJIQÇ», adj. nomosïskû ;<br />
slavon irmosû « premier verset qui donne le ton à l'enchaînement,<br />
slp[xoç, de l'hymne », r. irmôs ; sakosu, r. sâkkos, « chape, tunique de<br />
prélat, cràxxoç ».<br />
Ces formes en -osu de mots grecs non traduits ne sont pas rares<br />
en slavon, ainsi skoposu au sens d'« observatoire » ; le mot CTXOTOSÇ,<br />
au sens nouveau d'« air de musique », se retrouve en serbo-croate<br />
ragusain des xvi e -xvn e siècles : skopos « air, chant ». Mais le slavon<br />
patosu (Mikl.) est s.-cr. pàtos « plancher », postverbal de pàtosati<br />
(§817).<br />
Il est curieux que ces mots en -osu aient en slavon des variantes<br />
en -usa, ainsi yarosu et garusû « saumure, ydcpoç » ; pàrdusu « panthère,<br />
ïcàpSoç » remonte au vieux slave d'après Ham. 4218, 4717,<br />
475 8, et est usuel en vieux russe, en russe moderne pàrdus et<br />
pard. On pense à des emprunts savants au latin, venus du domaine<br />
occidental.<br />
Parmi les mots de la langue ordinaire, le russe ûksus « vinaigre »,<br />
attesté depuis le xn e siècle, doit s'expliquer comme emprunt à<br />
avec le o grec sous l'accent rendu par a (§ 54), et avec assimilation<br />
à a de o inaccentué. L'histoire de r. mûskus « musc, \mayjic, »<br />
apparaît moins simple avec la variante muskusu de musku aux<br />
xv e -xvi e siècles. Quant à r. parus « voile », mot assez récent<br />
(xv e s.), il est arbitraire de le rattacher au grec ancien cpapoç « pièce<br />
de toile », et il faut supposer un emprunt à une langue finnoise.
CHAPITRE XXXVIII<br />
LES FINALES D'ADVERBES<br />
§ 1198. Les adverbes, du point de vue des types morphologiques,<br />
ont été étudiés en détail §§ 318-331. Mais il convient de les<br />
examiner aussi du point, de vue de la dérivation.<br />
Le type en -o (§ 318), formation régulière, n'appelle pas<br />
d'observation.<br />
Pour le type en -e, on peut ajouter des chiffres de fréquence<br />
dans les textes vieux-slaves : cinq formes dans les Évangiles,<br />
dobrë, zulë, Ijutë, mçdrë, pravë ; une seule dans le Psautier, dobrë ;<br />
une cinquantaine d'exemples dans le Suprasliensis : krïstijanë,<br />
sûvrusenë, nelicemërïnë, dobrorazumivë, etc. ; une trentaine<br />
d'exemples dans le De Virginitate, traduction relativement<br />
tardive et de caractère savant.<br />
Pour le type en -ïsky, on a vu, § 319, qu'en polonais -ski a disparu,<br />
et qu'à côté de -ski s'était formé un type en -skie : v. pol. ludzki,<br />
et ludzkie, lacinskie, chiopskie « en paysan, chiop » ; ce type était en<br />
-skié, avec le e fermé issu de longue, donc avec -é du nominatifaccusatif<br />
neutre contracte de l'adjectif (§ 268).<br />
La formation en -ïsky est régulière en vieux slave, et c'est très<br />
exceptionnellement qu'on trouve la finale -ë : neclovëëïsië Supr. 109„<br />
et en slavon russe svoiscë « à soi, en propre», tomitelïscë «tyranniquement<br />
». Le comparatif ne peut être que rare, car il est évité<br />
dans les adjectifs en -ïskû, comme dans les adjectifs possessifs<br />
auxquels ils ont été assimilés : on a zidovïscëe « plus à la juive,<br />
louSaixwtspov » Athan., III, ehap. XXVII, mais l'exemple est<br />
unique.<br />
§ 1199. Adverbes en -ï. — Le type a une grande importance en<br />
vieux slave, et il faut dresser la liste des formes attestées, en<br />
reprenant et en complétant cell/; déjà donnée § 320. On ne peut pas<br />
séparer ces adverbes des adjectifs invariables en -ï (§ 277), et on ne<br />
peut pas non plus les distinguer dans tous les cas des substantifs<br />
féminins en -ï. Sur thème monosyllabique :
724 LES FINALES D'ADVERBES [§ ,1200]<br />
gladï « par la faim », sur instr. gladomï ;<br />
v. r. lapï « aussitôt », ne lapï « ne plus », v. tch. lap « aussitôt »,<br />
et pol. dial. tapie « rapidement », tiré du verbe expressif r. lâpat'<br />
«saisir, attraper», etc. (§ 1172);<br />
v. r. licî « en face », v. tch. lie, sur instr. lieemï, et à part du type<br />
de razliëï ;<br />
çtrï « à l'intérieur » (§ 1113), et vûnçtrï, izçtri (§ 276) ;<br />
pravï « droit » ;<br />
prëdï « devant », à côté de prëdû préposition (§ 1001) ;<br />
prëmï « droit », et vuprëmï (Théod. 72t) ;<br />
proëï «en avant, au loin, Tcpocrco» (Ham. 51110, 522^ et proce<br />
461S, 36323, 24), r - pfoë « loin (de) », et slavon oproëï « hormis » ;<br />
v. r. to pîrvï de v. si. to pruvo « alors en premier », toperï et mod.<br />
tepér' « maintenant », tch. teprv « alors seulement » et v. tch. teprvo,<br />
slov. stôprv « seulement », s.-cr. ancien sloprv « récemment » et<br />
dial. stôprvo « à peine (que) » ; pol. dopiero « à peine (que) » et v. pol.<br />
dopiro (§ 74), mais aussi dopierz qui doit attester *topïrvï à côté de<br />
*to pïrvo ; et voir pripruvï (§ 1200) ;<br />
stadï« en troupeau »(J. Ex.), mais l'exemple de Mikl. est à vérifier ;<br />
stranï « de côté » (Izb. Svjat.), r. storôn', pôstoron' ;<br />
strîmï « à pic, tout à fait », sur strïmu (§ 820) ;<br />
v. r. ustï « à l'embouchure » et nausïi, vuuslï, otuustï ; izustï<br />
« de la bouche, par cœur », r. naizûst' (et s.-cr. naizust « de<br />
mémoire », slov. naizûst, du russe) ; et voir naustï « éloquent ».<br />
Le cas de v. si. nicï « tête baissée » est spécial ; le russe refait<br />
nie, sur le thème verbal nik- (§ 797), en nik et en nânic, d'où le<br />
contraire nâvznië « à la renverse » par altération de l'ancien vuznaku<br />
(§ 861).<br />
Le mot Uni «paresse» paraît substantif (§ 711), mais le vieux<br />
russe a un exemple de lënï adverbe ;<br />
vasnï « peut-être » est à côté du substantif vasnï « discorde »<br />
(§1085);<br />
iskrï « près », slov. isker (iskrè), et slavon priiskrï, adj. priiskrinu<br />
{Pand. Ant.), semble analysable en is-krï (§ 320) ;<br />
vysprï « en haut » doit l'être, puisqu'on trouve également sûsprï<br />
« d'en haut, avcoOsv » Ham. 38722 : le second terme est donc le<br />
thème *(s)per-, soit celui de pere- «voler» et lit. sparnas «aile»<br />
(§ 191), soit celui de pire- « pousser » (§ 453) ;<br />
SQSÏ «l'un l'autre» (Gr. Naz., Izb. Svjat., Virg.) est sûrement<br />
sç-si (§ 1222) de *su sç ; pour pol. zas « par contre, mais », c'est une<br />
réduction de zasiç « pour soi », tch. za se « de nouveau ».<br />
Sur thème dissyllabique :<br />
svobodi, adjectif invariable, qui ne s'analyse pas en slave<br />
(§ 277);
[§ 1200] LES FINALES D ADVERBES 725<br />
obilî « en abondance » (Théod. 118149) et slavon izobilï : l'adjectif<br />
obilu (§ 1048) a cessé de s'analyser ;<br />
pustosï «en vain, (iàrrçv » Supr. 37328 est substantif (§ 1149),<br />
et ici accusatif fixé, ou faute pour vu pustosï ;<br />
v. r. mezenï « au milieu », adverbe et préposition, est sur meîdïnu<br />
(§1093);<br />
v. r. mitusï «alternativement», voir § 1157;<br />
v. si. asutï « en vain » ; v. tch. jësut « vanité », subst., adj. jësutny<br />
« vain », passé en slavon croate dans le texte de l'Ecclésiaste,<br />
subst. esut' VI, 11, adj. esutno ; slavon russe osutï (xi e -xn e s.).<br />
Les rattachements envisagés, soit à sutû «sans corne» (§ 1159),<br />
soit à v. r. sutu «bouffon» (xi e s.), r. sutît' «railler» (§ 1161),<br />
n'expliquent pas l'initiale a-, mais la forme v. r. osutï pourrait<br />
indiquer une mise en rapport avec *o-sutiti, r. osutît' « se moquer<br />
de ».<br />
§ 1200. — Formes à préverbe ou préfixe nominal :<br />
becënï «gratuitement, tkopsàv» (Upir'), dans un exemple unique<br />
qui demande confirmation ; l'adjectif s.-cr. bèscjen, slov. brezcên,<br />
est de -cënïnu ;<br />
podatï (Ham.) « au loin, à distance », mais pour podali (Izb.<br />
Svjat.), et v. r. dati, en regard de r. mod. àdaV et poôdal' « à (une<br />
certaine) distance » ; il y a un substantif r. dat' « le lointain », s.-cr.<br />
dâlj, etc. (§ 718) ;<br />
v. r. (na) podutzï « en longueur », mais il y a un substantif<br />
*dïlzï (§ 711), et l'on trouve d'autre part v. si. podtugû «le long<br />
(de) », préposition, s.-cr. ancien potag « près de, chez », pol. podtug<br />
et wedlug « selon » à côté de podle « près de », wedle sur le comparatif<br />
*dïtje (§ 289) ;<br />
bezdobï « mal à propos », udobï « à propos », et v(u)podobï « convenablement<br />
» (Théod. 296) de vu podobç ;<br />
dodotï « jusqu'en bas, sioç XOCTW » (Hés. 1322) de var. do dolu ;<br />
pogodï « en conséquence,
726 LES FINALES D'ADVERBES [§ ,1200]<br />
razliëï « différ(emm)ent », adv. et adj. invariable ; sûlicï (Izb.<br />
Svjat.) « face à face » et slavon russe suliëï (§ 1222), r. dial. ôblië ;<br />
et voir raznoliëï (§ 1201) ;<br />
oblisï « superflu » Théod. XV, 8, Athan. I, 148^ etc. et « impair »<br />
Athan. I, 1308 (11 ex. chez Athan.), toujours invariable, adverbe ou<br />
adjectif ;<br />
zamasï « peu s'en faut, presque, CT/ESOV » (Ham. 5408), sur maxû<br />
(§ 787), pol. zamachem « d'un seul coup » ;<br />
slavon razmësï « pêle-mêle » (Mikl.) ;<br />
sûnadï « à la surface », èmnoX^ç » (Théod. 6418), tch. snad<br />
«peut-être», pol. snadz (snac), sor. snadz (§ 444) ;<br />
nanëmï « bégayant » (Supr.), adj. invar., voir na- § 1219 ;<br />
ponçzdï « nécessairement, àvayxTjç » (Athan. I, 565) sur<br />
po nçzdi ;<br />
vûspçtï «en arrière» (§ 1219), zapçtï Cant. III, 5, Théod. 67ae,<br />
(na) opçtï Ham. 20221, 53524, r. vspjat', opjât', tch. zpët, opët, etc. ;<br />
slavon oplosï « largement, généralement », et v. si. oplosmo<br />
(§ 1065), r. splos « de façon continue », et voir inoplosï ;<br />
isplunï « à plein », adj. invariable ;<br />
vuprëmï, voir prëmï ;<br />
naprëzdï « en avant », sur (na) prëzde sans doute, mais il y a un<br />
substantif prëzdï (§ 1019) ;<br />
v. r. opriëï et mod. oprîc «hormis», sûrement altération de<br />
oproëï par attraction du slavon oprisnu «à part» (§ 1071), et :<br />
v. r. opris(ï)nï, adv. sur l'adjectif oprisnu ;<br />
oproëï, voir proëï ;<br />
prëprosti «tout simplement», vuprostï (Théod. 11813), slavon<br />
poproslï « droit », mais il y a le substantif prostï, oprosiï, et prëprosti<br />
est aussi substantif (§ 711) ;<br />
sçprotivï «contre » (§ 1222) en regard de protivç (§ 1023) ;<br />
pripruvï (J. Ex.) « en première position, sur le devant », voir<br />
(lo) pruvï ;<br />
izdrçdï «hors rang, éminemment », porçdï (Virg.) « à proportion » ;<br />
vûrçëï «en mains » (J. Ex.), slavon iz(d)rçëï «(en jetant) de la<br />
main », r. vruë, tzruë, et voir obërçëï ;<br />
poslëdï « à la suite, après » et poslëdi, v. pol. posledz, mais *vuslëdï<br />
ne se distingue pas de vu slëdu, r. vsled, pol. wslad ;<br />
osobï « en particulier », zasobï « l'un après l'autre, àAAsraxXAvjÀoç »<br />
Ham. 51118, r. zasôb', zaosèb' «en particulier»; usobï «l'un contre<br />
l'autre, XOCT' àAX^Xcov » Ham. 476e, qui est çsobï, dérivé v. si. çsobica<br />
«lutte intestine, sédition» (§ 881); posobï «l'un après l'autre»<br />
Théod. II, 5, XXI, 28, mais substantif dans v. r. posobï « assistance<br />
» (§ 739), na posobï ;<br />
slavon prisrùdï, var. poserdï, « (en s'adressant) au cœur », adj.<br />
r. prisërdyj et prisërdnyj, usërdnyj « zélé, empressé » ; et voir<br />
vïsesrûdï ;
[§ 1201] LES FINALES D ADVERBES 727<br />
prëtçzï « tirant sur le joug, faisant attelage, sTspoÇuyoîivTsç »<br />
II Cor., VI, 14, et voir inotçzï ;<br />
slavon naustï « capable de parler, éloquent », le contraire de<br />
nanëmï ; et v. r. izustï « par cœur », voir ustï ;<br />
izvësiï « certain » (Mikl.), adj. invariable, n'est peut-être que le<br />
substantif izvësiï (§ 1169) ;<br />
otvrunï « à l'inverse », de otvrunû, adj. (§ 1070) ;<br />
nazadï «en arrière, feicrôsv » Ham. 35716, sur zadï, substantif ou<br />
adverbe (§ 719), v. si. zadi, suzadi, pozadi (Ham. 40825) ;<br />
vunezaapï «subitement» et vunezaapg (§ 323), sur le thème<br />
(j)ap- de za(j)apëli «soupçonner» et tch. jâpaii «observer»<br />
(§ 786).<br />
Le slavon osvënï « à part », bulg. osvén « excepté, sauf », est le<br />
vieux-serbe osvënï, puis osvem et ôsim, abrégé de osvënje, v. si.<br />
svënje « à l'écart (de) » (§ 1073).<br />
Le slavon sçzçbï « (en touchant) avec les dents » est s.-cr. suzub,<br />
suzubi « de front », adv. et prépos., mod. dial. sùzubicë (§ 322).<br />
Le slavon vuznaëï (Mikl.) est une variante de vuznako, -ky, adj.<br />
vuznaku « à la renverse » (§ 861) et r. navznik, nâvznic, d'après le<br />
contraire nânië, voir nicï.<br />
V. r. oderenï « en pleine possession » est expliqué par *dïrnu<br />
«gazon» (§ 1073), parce qu'on jurait avec une motte de gazon<br />
sur la tête.<br />
Et voir iskrï, vysprï et sUsprï, § 1199.<br />
§ 1201. — Formes de composés :<br />
strïmoglavï « tête la première » ;<br />
raznolicï « d'aspects divers » en slavon et Ham. 515, et voir razlicï ;<br />
vïselicï (Pand. Ant., Gr. Naz.) « de toutes sortes » est à part de la<br />
série pronominale de kolikû, mais s'y rattache par son dérivé<br />
vïselicïsku comme vïsëëïsku (§ 261) ;<br />
slavon cetveronozï « à quatre pattes » (s.-cr. ceîveronàskë) ; et<br />
v. tch. ctver(o)noh employé comme adverbe à côté de l'adjectif<br />
ëtveronohy, v. si. ëetvrënogu (§ 1227) ; v. r. vuznozï « côté des pieds »<br />
est substantif (§ 717) ;<br />
slavon russe rukopasï « à main nue », dont le second terme est<br />
le thème pax- de paxati au sens d'« agir, travailler» (§ 557) ; en<br />
russe moderne, le mot est substantif : rukopas « combat à main<br />
nue », adj. rukopâsnyj ;<br />
slavon inoplosï « de façon continue », r. splos, voir oplosï ;<br />
obapolï (Virg.) et -poly « des deux côtés », r. obâpol' « tout autour »<br />
et -pol, -poly ;<br />
slavon obërçëï « des deux mains », r. oberuc', slov. obêroc (s.-cr.<br />
objëruëkë), et pol. oburqcz ; et voir vûrçëï ;<br />
vïsesrudï « de tout cœur », et voir prisrudï ;
728 LES FINALES D'ADVERBES [§ ,1200]<br />
inoslanï « constamment » ( § 789) ;<br />
pruvosupï (-sopï) «dans le premier sommeil, TOU TTPONOU UTÎVÎOU»<br />
dans un passage du Suprasliensis conservé en rédaction slavonne<br />
(Die Welt der Slaven, V, p. 230, note 23) ;<br />
inotçzï (J. Ex.) « de façon continue », et voir prëtçzï ;<br />
srëdovëcï (Upir') « d'âge moyen », qui paraît être un adjectif<br />
invariable ;<br />
slavon vïsevërï « en toute sincérité, eDaxpivôç » ;<br />
ocivistl « avec évidence » (§ 1216).<br />
Et la série v. r. ezegodï « chaque année », ezenedëlï, ezelëtï (Srezn.,<br />
Suppl.), r. mod. ezegôd', ezelët', ezeûtr'.<br />
Et les séries -gubi et -kratï, § 1204.<br />
§ 1202. Dans les langues slaves. — Le type disparaît dans les<br />
langues qui ne gardent pas les mouillures finales, en ne laissant que<br />
quelques vestiges, et remplacé par d'autres formes, en serbo-croate<br />
par ses types en -kë et -(i)cë. Le polonais également n'en a plus que<br />
des traces, posledz, oburqcz, etc. ; niemal, omal « peu s'en faut,<br />
presque » s'expliquent par v. pol. niemale et dial. omale.<br />
En russe, au contraire, le type reste vivant, du moins dialectalement.<br />
Par exemple, outre nâzem', ôfbjzem', vstar', dobrovôl'<br />
(§320):<br />
ôboë « sur le flanc » ;<br />
vkos', nâkos', nâiskos' « de biais, de travers » sur kosôj ;<br />
vplav' et vplyv' « à la nage, en bateau » (§ 730) ;<br />
vplot' « tout contre » ( § 724) ;<br />
prisered' « près du milieu, seredâ » ;<br />
ispodvol' « peu à peu, doucement », sans doute de pod vèlju<br />
dans podvolit' « laisser aller à la dérive ».<br />
R. dial. pokâmest' apparaît secondaire de pokâmest «en attendant<br />
», qui continue le russe ancien po ka mësta « jusqu'où,<br />
jusqu'à » (§ 239).<br />
L'adverbe ôcen' (§ 322), usuel depuis le xvm e siècle, a une<br />
variante ancienne (xvn e siècle) et dialectale ôë(j)un' : il faut<br />
sûrement partir d'une locution v. pol. w oczy « dans les yeux,<br />
directement, tout à fait », locatif r. v oë'jû conservé dans la langue<br />
des bylines et dans l'adverbe voë'jû, vôc'ju « en face, évidemment » ;<br />
d'après bien' sur l'adjectif oëïnu, oënôj, on a eu vôc'ju-n', qui s'est<br />
réduit à ôëun' avec l'élimination ordinaire de la forme vô- d'initiale<br />
accentuée (§ 77).<br />
§ 1203. Autres formations adverbiales. — Aux formes déjà<br />
signalées, on ajoutera d'autres exemples.<br />
Adverbes en -je (§ 322) : dàleëe, etc., et svënjev, à l'écart» (§ 1073),<br />
tunje « gratuitement » (§ 957).
[§ 1201] LES FINALES D ADVERBES 729<br />
Adverbes tirés de l'instrumental (§ 321) :<br />
-omï, -em, -mo : pol. et tch. darmo, etc., voir § 1065 ; -ijç : bùsijç<br />
(§ 1112, et s.-cr. bas «précisément», tûeijç, et (ne bëase) lëtijç<br />
«il n'était pas) permis» Supr. 44114 sur lëlï (§ 1170); slavon<br />
(urazu...) grobijç «(je frapperai...) à fond, «pS-rçv », qu'il ne paraît<br />
pas nécessaire d'expliquer en remontant à la racine de grebe-<br />
« racler », grabiti « ravir », et qui doit plutôt être l'instrumental<br />
d'un collectif *grobï de grobu «tombeau» (§ 712). Plus isolément :<br />
-Q : prolivç « en face (de) », adv. et prépos. (§ 1182), où l'on peut<br />
reconnaître, aussi bien que l'accusatif, l'instrumental féminin en -Q<br />
antérieur à -ojç (§ 150) ;<br />
-y : aky, maly, paky et opaky, pravy, prëky (Ham.) « en travers »<br />
et vuprëky (§ 1038), pôrëdy «rarement» (Izb. Svjat.), v. r. tixy<br />
« tranquillement » ; et straxy « par crainte », gnusy « par dégoût »<br />
(Cosmas 16022), sramy «'par honte» (Cosmas 13719), v. r. gnëvy<br />
« en fureur » ; slavon vïly « lentement, modérément », et v. si. dans<br />
vluny Athan. (Lettre sur la fête de Pâques, chap. I) pour *vïly ny<br />
rà xocÔ' TjiJMç Yjpsixa, adj. vïlovïnu rjpsu,oç « calme, lent » Supr. 497a5<br />
(§ 976), sur un thème vil- qui peut être celui de dovïlëli « suffire »<br />
(§ 601) ou celui de vïlati sç « être ballotté » (§ 615) ;<br />
-ami : Igkami « par ruse » (Supr.), slavon Ijubûvami « avec<br />
amour », slavon croate scedrotami « avec compassion » (Zach.<br />
1,16);<br />
-ostami : radostami, slavon rïvïnostami, zavidostami, v. r. zalosëami,<br />
lënosëami « par paresse », pakosëami « par méchanceté », vieuxserbe<br />
miloslami « par tendresse » ;<br />
-(ï)mi, -(ï)ma : kolïmi, jelïmi(ze) et jelïma(ze), tolïmi<br />
et -ma, boljïsïmi et boljïma, mïnjïsïmi, veslïsïmi (Athan.), nçdïmi<br />
(Euch.) et ngdïma (Supr.), munoyùmi (Gr. Naz.) ; buxurna, dëljïma,<br />
radïma ;<br />
slavon vïsïma, tunjïma « gratis » ; slavon russe lozïma « par<br />
mensonge », neputïma « sans chemins » ; v. slov. lubmi « par<br />
agrément» dans nudmi ili l(j)ubmi «par contrainte ou de bon<br />
gré » (III, 32) ;<br />
s.-cr. b'ôljma « mieux », vëcma « davantage », veoma « grandement,<br />
très » ; sàsma « tout à fait » à côté de sàsvlm (r. sovsëm), d'un plus<br />
ancien svasma de su vïsïma ; et les récents mànjma « moins » sur<br />
mànjë, llsma « surtout » sur lise de lih « en excédent » ;<br />
slov. strâhoma « avec crainte » et bêgoma « en fuyant », dâroma<br />
« en cadeau, gratuitement », hltoma « en hâte », nemûdoma « sans<br />
tarder », nenâdoma « de façorf inattendue », etc., avec grand<br />
développement en slovène : produit d'une fusion du type daromï,<br />
pol. darmo, et du type boljïma, qui se reconnaît dans vêëema « en<br />
grande partie » en regard de vèce « plus » ;
730 LES FINALES D'ADVERBES [§ ,1200]<br />
r. ves'mâ, gnetmd « en pressant » sur le gérondif gnetjâ, lézma<br />
et lézmjd « à plat » sur lëza « étant couché », gôrma et gormjâ « en<br />
brûlant », drozmâ et -mjâ « en tremblant », kismâ et -mjâ « en<br />
grouillant, en grand nombre », livmja « à verse », rëvma et revmjâ<br />
« en piaillant », stôjmjà « debout » ; dial. sizma « assis », non sur le<br />
gérondif sldja, mais sur siz- du participe passif sléeno ; et dial.<br />
nyn'ma, nôn'ma sur nyne, nône «maintenant» (§ 322), trôjmâ<br />
« à trois » ; plâsmja « avec le plat (du sabre) » de v. r. plasma sur<br />
thème plas-, non directement sur le substantif plast « couche »<br />
(§ 1161).<br />
§ 1204. Adverbes pronominaux. — Les types, déjà vus, sont :<br />
-ako (§ 324) : kako, etc., et onako (Gr. Naz.), jedïnako et obojako<br />
(Supr.) ;<br />
-olï (§ 325) : kolï, etc., et selï Ham. 37010, *vïselï dans v. r. otù<br />
vïselë « de partout » ou « de tout temps », slov. vsèle(j) « toutes les<br />
fois, toujours » ;<br />
-gda (§ 326) : kugda, nëkugda, onûgda (Athan), etc. ; slavon<br />
drugùda « une autre fois », s.-cr. drugda et tch. druhdy « parfois » ;<br />
-de (§ 327) : kûde, ovûde (Izb. Svjat., Srezn., Suppl.), jedinùde<br />
(Upir')," etc., et drugoide «en un autre endroit, sTépaOi, » (Cyr.<br />
Jér.), mûnogûzde et var. mûnogoizde « en beaucoup d'endroits,<br />
•rcoAAaxoij » (Hés. 143,), oboizde «des deux côtés» (Hés. 366) ;<br />
-amo (§ 328) : kamo, etc., et slavon nëkamo, jedinamo «en un<br />
seul endroit », drugojamo « en un autre endroit », v. si. obojamo<br />
(Ham.) « vers les deux côtés » ;<br />
-qdu (§ 329) : kçdu, etc., et vïnëjçdu, jedinçdë (Upir') « par un seul<br />
endroit », slavon nëkçdu, nikçduze ; vïsjakojçdë « partout », bulg.<br />
vsjdkâde, s.-cr. svàkud.<br />
Adverbes numéraux :<br />
-gubï (§ 317) : sugubï, trïgubï (Upir', Théod. 4819), slavon jedinogubï,<br />
dvo(je)gubï, cetverogubï ;<br />
-sïdi (§ 330) : duvasïdi, etc., avec des formes attestées en slavon<br />
de jedinozdi à pçtïdesçtizdy, sutisïdy ; mûnogasïdi (Supr.), kolisïdi<br />
(Pand. Ant.) ; jelisïdi (Athan.) et jelikasli (J. Ex., Ham.), rëdukazdy<br />
(J. Ex.), en slavon tolisti et tolikasli, drugyzdy, malizdi ;<br />
-krat- (§ 330) : kolï krat(y), etc., munogy kraty, mûnogokraty et<br />
mûnogûkraty (Supr.), s.-cr. mnokrat(i) (§ 942), vieux-serbe et slavon<br />
croate (Eccl. V, 19) dovol(j)ekrat «assez de fois»; v. si. tokralï<br />
« cette fois » (Supr.), sekratï « à l'instant » (Cyr. Jér.) ; et pol. dwakroc,<br />
etc. ;<br />
-icejç (§ 331) : vûtoricejç, etc., sùtoricejç et sûtokraticejQ, slavon<br />
tûmoricejç « en myriade » ; -ici : drugoici, etc., et slavon jedinoici<br />
et pruvoici ; seici « aussitôt », et toici (Éphrem) « alors aussitôt ».
CHAPITRE XXXIX<br />
LA DÉRIVATION VERBALE<br />
§ 1205. — L'essentiel a été dit sur la dérivation verbale (§ 637),<br />
et l'étude morphologique du système verbal comporte celle des<br />
différents thèmes qui peuvent se tirer d'une racine : itératifs et<br />
factitifs en -iti, verbes d'état en -ëti, restes des présents suffixaux<br />
en -De-, -te-, -de-, dérivés suffixaux en -nçti, -ovati, -kati. -lati,<br />
-skaii, -lati, et tout le système de la dérivation imperfective ;<br />
avec les suffixes d'emprunt Arati, r. -irovat' (§ 568), et -isati (§ 575),<br />
et les formations hypocoristiques en -xati (§557), dont r. zaxàt'(sja)<br />
« s'effrayer » (§ 783), pol. kochac « aimer » (§ 1200). Les formations<br />
diminutives sont diverses, comme les tours expressifs : en serbocroate<br />
-kati (§ 559), et -arati d'origine dénominative (comme<br />
-ariti, § 852), puskàrati « tirailler » sur puskâr « (bon) tireur de fusil,<br />
puska », piskàrati « écrivailler ».<br />
§ 1206. La préverbation. — On ne peut que dresser une liste<br />
des préverbes (§ 643) ; quant à la masse illimitée des formes à<br />
préverbe, l'étude des postverbaux suffit pour en donner une idée.<br />
La préverbation peut être double : v. si. vëdëti « savoir », povëdëti<br />
« raconter », et ispovëdëti « confesser », propovëdëti « prêcher »,<br />
supovëdëti « annoncer », zapovëdëti « ordonner » ; sûnabudëti, perfectif<br />
de l'imperfectif na-bûdëti «veiller sur» (§ 641), rasprostrëti<br />
« déployer », etc.<br />
On trouve en particulier des préverbes doubles à valeur<br />
expressive : isprovrësti « renverser sens dessus dessous », imperf.<br />
isprometati (ispromëtanije J. Ex.), et oprovrësti, slavon vusprovrësti<br />
et oprovratiti « retourner sens dessus dessous » ; et dans les langues<br />
slaves des itératifs perfectifs (§ 645) : pol. powypadac « tomber, se<br />
précipiter l'un après l'autre'», s.-cr. isprekidati « rompre sur<br />
plusieurs points, interrompre », etc.<br />
La préverbation triple est exceptionnelle : en slavon prëduvusprijqti<br />
« recevoir à l'avance », mais prijçti « accueillir, recevoir »
732 LA DÉRIVATION VERBALE [§ 1207]<br />
ne s'analyse plus ; en vieux slave prizapovaditi « adjoindre à un<br />
attelage, •rcapaÇsûÇai » Ham. 5055 (altéré en -vëdati) sur zapovaditi<br />
àvocÇsûlou ; et vuraspropinati (sebë Xrïsla) «crucifier en (eux-même<br />
le Christ) » ( J. Ex.), mais cette superposition de ras- et pro-(pinati)<br />
ne doit représenter qu'une hésitation de copiste entre pro- ancien et<br />
ras- plus récent.<br />
Le préverbe peut se joindre au verbe précédé de la négation :<br />
v. si. vuznenavidëti « haïr » ; iznemosti, imperf. iznemagaii, et<br />
otûnemosti « tomber en impuissance, défaillir » ; iznebyti (Ham.)<br />
« cesser d'être, périr » ; slavon vuznebrësti « ne pas se soucier,<br />
négliger », viizneumëti « ne pas savoir (que faire), hésiter ».<br />
L'addition du préverbe ajoute son sens à celui du verbe. Et<br />
dans le composé ce peut être le préverbe qui apporte le sens<br />
dominant de l'action, le verbe n'en indiquant que la modalité :<br />
r. vyplakat' « obtenir à force de pleurer », vyxnykat' « à force de<br />
pleurnicher », et toute une série de verbes où vy- équivaut à vynut'<br />
«tirer» : vyigrat' «gagner au jeu», vyprosit' «obtenir par des<br />
prières », vysluzil' « acquérir par son service », etc. ; de même s.-cr.<br />
izorati « tirer de son labour, gagner en labourant », etc.<br />
Si on enlève le préverbe par « dépréverbation » (§ 640), le verbe<br />
simple apparaît avec un sens différent, celui de sa forme à préverbe :<br />
s.-cr. pâlit i « souffrir », perf. zàpaiiti « obtenir, faire yenir à force<br />
de peine », et imperf. zàpacati et pàtiti « élever (du bétail, de la<br />
volaille) ».<br />
§ 1207. La dépréverbation. — Elle apparaît très fréquente dans<br />
les langues slaves, et dès le vieux slave et le slave commun. On<br />
peut même dire que c'est un fait général, et qu'un verbe simple a<br />
son sens plus ou moins lié à celui de sa forme ou de ses formes<br />
à préverbe usuelles. Le verbe zûvaii est « appeler », mais r. zvat'<br />
« appeler » est « nommer » d'après nazvât', « faire venir » d'après<br />
prizvât' ; s.-cr. zvàti est « nommer », nà-zvati, « appeler à soi »,<br />
pri-, et « inviter » d'après pozvati. En négligeant ces nuances<br />
sémantiques, et en écartant les cas moins clairs, voici une liste<br />
de faits de dépréverbation, longue et qui est loin d'être complète.<br />
En vieux slave :<br />
bïrati « récolter », de su-, et « élire », de iz- (§ 471) ;<br />
boiëti « être malade », de raz-bolëii sg ( § 290) ;<br />
klati « égorger », de za-, et r. kolôt' « piquer » de u-, et « fendre »<br />
de ras- (§ 530) ;<br />
Içze- « couver », de iz- (§ 447) ;<br />
Içciti « séparer », de raz-, et pol. lqczyc« joindre », de z- ( § 611) ;<br />
niknçti « pousser, germer », de vuz- ( § 497) ;<br />
oriti « abattre », de suri-, et s.-cr. noriti, d'où pol. ronic, etc.
[§ 1208] LA DÉRIVATION VERBALE 733<br />
(§ 83) ; r. zorit' «ruiner», de raz-, tch. bofiti «démolir», de ob-<br />
(§608);<br />
rësiti « délier », s.-cr. drijèsiti, de raz-, et pol. rzeszyc « lier »<br />
comme przy- et lit. raisyti (§ 607) ;<br />
rusiti «détruire», de raz- (§ 614) ;<br />
stutiti « sentir », tch. cliiti, etc., de *ot-jutiti (§ 610) ;<br />
uzdati « brider », de sûn-uz- ( § 1003) ;<br />
vaditi « accuser », de na-, r. vâdit' « attirer », de pri-, pol. wadzic<br />
« quereller », de za-, s.-cr. vaditi « extraire », de iz- (§ 615) ;<br />
variti « devancer » de prëdu- (§ 615).<br />
Et ras-cëpiti « fendre » et r. sëepdt' (§ 748) ;<br />
bruzda « bride » sur ob-rutiti « museler », r. brotdt' « mettre le<br />
licou » de obrotdt' (§ 813).<br />
Mais së(ja)ti «semer», vu-, na-, et së(ja)li «cribler», pro-,<br />
sont à part (§ 512).<br />
§ 1208. Dans les langues slaves. —• En russe et d'autres langues :<br />
klasi' « châtrer », de vy-, et bulg. kladé- « garnir (le feu) », de na-<br />
(§ 430) ;<br />
kovdt' « ferrer (un cheval) », de pod-, et s.-cr. kovati « enchaîner »,<br />
de o- (§ 737);<br />
ludit' « tromper », tch. louditi « séduire », etc., de o-blçditi ;<br />
motdl' « enrouler, dévider », pol. molaé, etc., de o-, na- (§ 731) ;<br />
nesti « pondre », tch. et slov. nésti, s.-cr. nosili, de sû-nesii,<br />
su-nositi « déposer (les œufs) » ;<br />
pldvit' « faire fondre », de vy- (v. si. is-, Ham. 38625), et s.-cr.<br />
plàviti « inonder », de na-, et « écrémer », de s- (§ 613) ;<br />
travit' « faire brouter » et s-, « graver à l'eau-forte, corroder »<br />
et vy-, « chasser (à courre) » et na-, za-, peut-être de za- dans un tour<br />
expressif au sens de « détourner de brouter » ; pol. trawic « digérer »<br />
et s- ; tch. trâviti « empoisonner » et pol. truc, s.-cr. trôvati, bulg.<br />
irôvi-, de o- (§ 463) ;<br />
ukr. kvâryty « gâter », s.-cr. et slov. kvdriti, sûrement de skvariti<br />
(§ 790).<br />
En russe :<br />
v. r. njati « prendre », de sun-çti (§ 83) ;<br />
v. r. voevati « ravager (un pays) », de raz- et vojevali « guerroyer<br />
» ;<br />
dial. beddt' « dîner », de ob-eddt' ;<br />
beredit' «irriter (une plaie) »,/le *ob-verediti (§ 806) ;<br />
botokdt' « envelopper », de ob-votok- ;<br />
brotdt' de ob-rotât', voir bruzda (§ 1207) ;<br />
cinit' « tailler (un crayon) », de o-, et « farcir », de na- ;<br />
dôxnut' « crever », de iz- ( § 493) ;
734 LA DÉRIVATION VERBALE [§ 1207]<br />
klepât' « river », de s-, za-, « calomnier », de na-, sur v. si. klepati<br />
« faire résonner » (§ 548) ;<br />
kostii' « injurier » et subst. kast' « vilenie », de pôkasUt' pour<br />
pdkostit' (§ 1171) ;<br />
pajât' «souder», de s- (§ 729) ;<br />
pjâtit' « faire reculer », de o-, os- (§ 784) ;<br />
porit' « être avantageux », de sporit' (§ 742) ;<br />
prjaë « tendre, atteler », de na-, za- (§ 435) ;<br />
dial. tjâmit' « s'aviser, se souvenir », de potjâmit' pour pamjatiî'<br />
(§ 788);<br />
topit' « chauffer » et is-, « faire fondre », de ras-, « submerger »,<br />
de za-, « noyer », de u- (§ 500).<br />
En polonais :<br />
baczyé « regarder », de ob- (§ 615) ;<br />
badaé « chercher » et tch. bâdali, de ob-adati (§ 381) ;<br />
brudzic « salir », de ob-rudzic ( § 756) ;<br />
v. pol. iuczyé « viser », de u-iuczyc « atteindre » (tch. luciii<br />
« jeter », § 757) ;<br />
Izyc « outrager » de ze-lzyc, obe-lzyc (§ 811) ;<br />
sypiac « dormir », de u- (§ 1089).<br />
En tchèque :<br />
baliti « faire des paquets », de ob-valiti (§ 788) ;<br />
boudili « fumer la viande » de ob-vçditi (§ 611) ;<br />
brojiti se «s'agiter», de ob- (§ 729) ;<br />
broubiti « border, ourler », de ob-rçb- ( § 764)<br />
cloniti « abriter, ombrager», de od-sloniti (§ 741) ;<br />
dldzili « planchéier » et subst. dlaga, de pod-lagati ( § 787) ;<br />
haliti « envelopper, couvrir », za-, et s.-cr. gdliti « se couvrir<br />
(de nuages) », tiré de son contraire raz- (§ 788) ;<br />
haniti « blâmer », de po- ( § 789) ;<br />
krisiti « rappeler à la vie », et s.-cr. krsnuti « surgir », de vus-<br />
(§ 495).<br />
Et le substantif dial. bred pour vfed « abcès », voir r. beredit'<br />
et § 806.<br />
En bulgare :<br />
bdyni- se « agneler », de ob- (§ 615) ;<br />
bêsi- « pendre » (transitif), de ob-vësiti (§ 609) ;<br />
blize- « lécher », de ob-.<br />
En slovène :<br />
bârati « ébouillanter », de ob-var(j)ati ;<br />
botavéti « s'enfler », de ob-olav- (§ 730) ;<br />
dvekdti «mâcher», et bulg. dâvkâ-, de raz-zvekati (§ 787) ;<br />
kopiti « châtrer », de skopiti.
[§ 1209] LA DÉRIVATION VERBALE 735<br />
En serbo-croate :<br />
bâviti se «s'occuper», de za- (§ 613), bàviti «procurer», de do-,<br />
nà- ;<br />
bïknuti « accoutumer », de ob-vyknçti ;<br />
biskati « épouiller », de ob- (§ 467) ;<br />
bliciti « ressembler » et lîëiti « accuser », de ob-, et licili se<br />
« renoncer à », de od- ;<br />
bràditi « naviguer », de pre- (§ 724) ;<br />
bûliti « arroser d'huile, ùlje », de ob- ;<br />
dlgnuti «lever», de vûz-dviynçti (§ 497) ;<br />
djêsti « mettre (le foin) en tas », de sà- ( § 640) ;<br />
gldviti «stipuler», de u- (§ 772) ;<br />
jâpiti « être béant », de raz- et zjap-, v. si. zëpëti (§ 556) ;<br />
klàdili se « parier » de o (p)- ( § 785) ;<br />
kûbe- (dial.) « arracher les poils, plumer », de skùbe- ;<br />
loziti « garnir, allumer (le feu) », de na- (§ 608) ;<br />
kàpali «ensevelir», de u-, za- (§ 732) ;<br />
kriliti « protéger », de o-,,za- ( § 798) ;<br />
pdsë- «couvrir une jument», de opasti (§ 1154) ;<br />
péti, pènjati « hisser », po-, de v. si. vus- ( § 457) ;<br />
plàziti « tirer (la langue) », de is- (§ 607) ;<br />
pljùskati «écoper», de is-, sur pljuskaîi «clapoter» (§ 561) ;<br />
rdstiti « côcher », râstili se « s'accoupler », de nardstiti pour<br />
*nrastiti (§ 774) ;<br />
rene- et zdene- (s.-cr. ancien), de dàrenê-, izdené-, formes à<br />
préverbe de zene-, gnati « chasser » (§ 470) ;<br />
sèliti se « émigrer, déménager », de iz-, pre- (v. si. vuseliti « établir<br />
sur un domaine », § 38) ;<br />
tèci « acquérir », de stèci « faire affluer » (§ 726) ;<br />
tèciti «ronger», de ras-;<br />
vàrati « tromper », de prè-, à côté de vàrati « garder », v. si.<br />
varovati (§ 568) ;<br />
voditi se « être en chaleur », en parlant d'une vache, de podvdditi<br />
se « être menée pour être saillie ».<br />
§ 1209. Traitements phonétiques. — Des traitements phonétiques<br />
du slave commun, et du balto-slave, s'expliquent par la dépréverbation<br />
:<br />
x- dans xodili «aller», sïd-, xraniti «garder» (§ 10), xvaiiti<br />
« saisir » et sûrement xoiëii « vouloir » ( § 601) ;<br />
les doublets en k- et s-, g- et i, dans *kvïie- « fleurir » et svïtëli sg<br />
« briller », kloniti « incliner » ' et sloniti « appuyer », zlatu « d'or »<br />
et *zïltû « jaune », si. slusati « écouter » et lit. klausyti, lit. slepiù<br />
« je cache » et v. pr. -klipis, si. -klepe- (§ 12) ; à quoi on doit ajouter<br />
krojiti «couper» de ras- et strojiti «arranger» de su- (§ 609),<br />
*znïjati « brûler sans flamme » et gnëvati « irriter » de raz- (§ 751),
736 LA DÉRIVATION VERBALE [§ 1207]<br />
krûmiti «nourrir» de vus- et lit. sérti «affourager» (§ 815), si.<br />
cëv- « tuyau » et lit. seivà (§ 718) ;<br />
et les doublets en sk-, sp- et k-, p- (§ 31), du type de lit. skriëti<br />
«voler en rond» et si. kri(d)lo «aile», mais pol. skrzydlo (§ 515),<br />
lit. skaityti « compter » et si. cisti ( § 429) ; — et se et se dans v. si.<br />
ras-cëpiti « fendre » et r. scepât' (§ 748).<br />
§ 1210. La dépréverbation en baltique. — La dépréverbation<br />
est particulièrement fréquente en slave, du fait du système de<br />
l'aspect qui lie l'imperfectif à son perfectif : de biti « battre », la<br />
forme à préverbe ubiti « abattre, tuer » exige un imperfectif, qui<br />
est ubijati, mais qui peut être aussi biti, r. bit' « abattre (le bétail),<br />
tirer (le gibier) ».<br />
A un degré moindre, toutes les langues à préverbation vivante<br />
doivent connaître son contraire, la dépréverbation. Le latin l'a<br />
connue : le français « couver » ne continue pas lat. cubâre « être<br />
couché », mais un bas-latin cubâre dépréverbé de incubâre « être<br />
couché sur », et l'action de couver est toujours l'« incubation ».<br />
En baltique, avec l'opposition balto-slave du verbe simple, du<br />
« résultatif » et de l'itératif antérieure à l'opposition d'aspect du<br />
slave (§ 639), la dépréverbation existe, et sûrement de façon assez<br />
étendue. En voici quelques exemples :<br />
lit. ardyti « séparer », irti « se séparer », de is-, comme v. si. oriti<br />
« abattre » de s un- ( § 608) ;<br />
befti «répandre, éparpiller», de is-, nu- (§ 471) ;<br />
dvësti « crever » de is-, comme r. dôxnut' de iz- (§ 544) ;<br />
kalëti « être dans les fers », de ap-kâlti « mettre dans les fers »<br />
(§ 1093);<br />
lipti « se coller », et « monter » de uz-, comme s.-cr. péti de vûz- ;<br />
rengti « apprêter, habiller », et « déshabiller » de is-, nu- ;<br />
splésti « élargir », de is-plèsti, sûrement par analyse is-spl-<br />
(v. si. pleste « épaule », § 1021) ;<br />
lette dêt « pondre », de iz-, et « souder à », de uz- (§ 533) ;<br />
ieskât « épouiller », comme s.-cr. biskati et sûrement aussi du fait<br />
d'une dépréverbation ;<br />
rist « lier », et « délier » de al-, comme v. si. rësiti de raz- ;<br />
segt « couvrir », de ap- (§ 435).<br />
Le baltique, qui intercale ou intercalait le réfléchi entre le<br />
préverbe et le verbe (§ 422), présente un type particulier de<br />
dépréverbation :<br />
lette saîkl « avoir faim », de iz-s-aîkt (§ 423) ;<br />
et sûrement lit. sëmti « puiser », de is-si-imti (§ 540).<br />
En slave, c'est sans dépréverbation qu'apparaît la soudure du<br />
réfléchi et du verbe dans s.-cr. sMvar(a) «spectre» et sigrati se<br />
«jouer» (§ 736).
CHAPITRE XL<br />
LA COMPOSITION<br />
§ 1211. — Le procédé de la composition, hérité de l'indoeuropéen,<br />
est vivant dans les langues slaves : « facteur » est r.<br />
pis'monôsec, «pompier» est s.-cr. vatrôgasac «éteigne (gâsiti)-îeu<br />
(vàtra)». Sans doute, en vieux slave, langue de traduction, la<br />
majorité des composés ont l'aspect de calques du grec, et beaucoup<br />
sont de caractère savant dans les langues slaves. Mais cette<br />
facilité à rendre les composés des autres langues atteste qu'en<br />
slave même, dans la langue parlée, le type était bien vivant.<br />
En français, il y a eu évolution de la composition : les composés<br />
sont devenus des juxtaposés, lat. signifer est passé à « portedrapeau<br />
» ; et si le procédé ancien continue de se développer<br />
largement dans le vocabulaire scientifique, « cosmonaute », et<br />
distingué ou prétendu tel, « capilloculteur », on a bien aussi créé<br />
« gratte-ciel ».<br />
Le slave, sur ce point comme sur d'autres, est fortement<br />
conservateur : c'est un composé, nebàder, que le serbo-croate<br />
a aussitôt forgé, et le slovène nebolîènik, pour rendre l'anglais<br />
sky-scraper, et ce sont des composés qui répondent aux juxtaposés<br />
des langues germaniques, r. narodoljûbec à ail. Volksfreund.<br />
Les composés sont abondants dans les vieilles langues indoeuropéennes<br />
qui ont une littérature, en sanskrit, en grec, et ils y<br />
prennent un caractère solennel ou poétique. Le slave n'a rien<br />
connu de tel à date ancienne, mais il n'en possédait pas moins sa<br />
culture, avec des chants et des contes populaires, un vocabulaire<br />
des coutumes et des relations sociales dont témoignent des<br />
composés devenus obscurs, ë(ï)lovëku « homme », potïbëga « femme<br />
fugitive » (§ 1231), des noms de divinités, Daz(d)ïbogu, et, comme<br />
les Celtes et les Germains, des noms de chefs, Eastislavu (§ 1230),<br />
cérémonieux et de bon augure. ,<br />
§ 1212. Premier terme substantif. — Voici les composés qu'atteste<br />
le vieux slave, avec leurs correspondants grecs quand ce sont des<br />
calques (entre parenthèses ceux qu'on restitue) :
738 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
arioneistovïnu (arie-) àast,o(;.aviTTiç « (partisan) enragé d'Arius »<br />
(Athan.) ;<br />
aromatoobrazïnu dcpcojxaTwSTjç (Ham.) ;<br />
basnoslovïcï [Au0oX6yoç (Ham.), basnozizdïcï [Au0o7tXàaT-/jç (Ham.) ;<br />
blçdoljubije « amour de la débauche », slavon blçdoljubïcï 91X0-<br />
7TOpVOÇ ;<br />
bogoavljenije Osocpàvsic., bogoëïtïcï Gsocsê^ç, bogomati 0so|xrjTwp<br />
(Ham. 458, 7, etc.), bogonosïcï 6so
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 739<br />
krasotopisïcï xoofAoypàtpoç (Ham.) ;<br />
krûvojadivû aluoëopoç, krûvopivu aîjj.07i0T7)ç, kruvotocica vj aEjj.oppooucra<br />
;<br />
kukonosu « au nez crochu » (J. Ex.) ;<br />
kumirosluzenije stîkoXoXaTpsîa ;<br />
kuroglasenije, variante de kokotoglasenije ;<br />
kuznoslovije zsyyoXoyia (Ham.) ;<br />
lëtopisïcï (xpovoypocçoç), lëloraslî «pousse (de l'année) » (§ 1056) ;<br />
licemërû «hypocrite», licetvorjenije Tzpoacmoizoda. (Ham., Izb.<br />
Svjat.), nelicezïrïnu à7tpoocù7r6À7]7TToç (Hés. CXVIII, 120) ;<br />
lïvogradïcï AeovT07toXiT7)ç Ham. 71 e, var. leontoyrazdaninu ;<br />
lïvonravïnû XSOVT6TPO7ÏOÇ (Ham.), lïvoobrazïnu XEOVTCOST]Ç (Ham.) ;<br />
materoljubïcï tpiXo[X7)Top (Ham. 300^ ;<br />
medotocïnu îxsXtppuToç, et voir medvëdï « ours », § 1216 ;<br />
mësçceslovesïniku fATjvoXoyiov. ;<br />
mçsopusiu « permission .de viande, carême-prenant», mçsotvorjenije<br />
xpsoopyîa (Gr. Naz.) ; et voir rnezdra «membrane», § 1216 ;<br />
mirodruéiteljï xoujj.oxpocTwp, miromyslïnû xocrfxofpcov (Pand. Ant.),<br />
mirotvorïcï sEpv]vo7toi6ç, XOCT^OTOI.OÇ (Pand. Ant.) ;<br />
mïzdo(olu)davïcï (j,ic>0a7i:o86T7jç, mïzdoimïcï «qui prend les taxes,<br />
publicain », SwpoXTjTCTTjç (Pand. Ant.) ;<br />
mçzebësovïstvije àvSpofjuxvia (Ham.), mçzeblazïstvije (àvSpayaôla),<br />
mçzeljubica
740 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
pïsograzdaninû KUVOTTOXITTJÇ (Ham.), et voir pïsijeglavïcï (Ham.)<br />
xuvoxéçaXoç (§ 1213), slavon pïsoglavû (§ 1227) ;<br />
plododavïcï xapTcoSov/jç (Gr. Naz.), plodoprinosenije xapmxpopia ;<br />
plùtojadivu capxocpayoç, plutoljubivu (ptXoaapxoç ;<br />
pobëdoljubije tptXovswâa confondu avec -vixîa (Pand. Ant.),<br />
pobëdonosïcï vtx7)
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 741<br />
tëlopïsanije cm)XoYpa0oporax.ôç (Ham.), tllënozqtvïnû (pG'.vouoipwoç(Ilam.),<br />
sur tïlënije (§ 1216) ;<br />
trëbotvorjenije (Hés. 913) sîSmXixt) duaiv., lu sans doute *stScoXo0ua-[a ;<br />
Irûnoplodlnû àxavOocpopoç (Gr. Naz.) ;<br />
umolïsîïcï çpv)vaTOjrd)ç (Pand. Ant. = Tite I, 10) ;<br />
uxoposluxatai WTaxoucrrr\q (§ 1036) ;<br />
vënïcenosïcï crTsç^fpopoç Ham. 49527, mais en slavon vënïce-, voir<br />
§ 1216 ;<br />
vëroimanije « fait d'avoir foi, mciTMcnç » (Ham. 4223), vërojçtïnu<br />
« digne de foi » (Izb. Svjat.) ;<br />
vinodalije olvoSoaia, vinopiica oîvown)ç, vinopijanïstvo oîvo
742 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
zvëzdozïrïcï « qui observe les astres », zvëzdozakonije àcrrpovoji.ta<br />
(Ham.), zvëzdoslovije àcTpoXoyia (Ham.) ;<br />
zitomërjenije a-iTo^ÉTptov ;<br />
zivotoljubïcï (çiXoÇcooç), zivotopisïcï Çcoypàtpoç (Yirg.), zivotorodïnu<br />
« qui fait naître les animaux » (Ham. Ç
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 743<br />
krotoljubïcï « aimant la douceur », et :<br />
krotûkodusïnu 7tpaû0u[i,oç (Pand. Ant.), kroiùkomqdrinu [zsTpiôçpow<br />
(Ham.) ;<br />
krupodusïnû (Éphrem) ôXiyo^ux«v (§ 756) ;<br />
krûnonosu pivÔT(X7jToç (Ham. 4661X, corrigé dans Srezn.) ;<br />
kupïnomyslije (Gr. Naz.) à\i6voioc,kupïnoslavije(Gr. Naz.) éfxo8o£toc,<br />
kupïnosçstije TO ôfxooiicrtov ;<br />
lixoimanije TrÀeovs^a, lixojadenije (àSvjçayÊa), lixoslov(es)ije (Pand.<br />
Ant.) «bavardage, paTToXoyioc » ;<br />
lïgukoslovesije xowpoXoyloc (Athan. I, 30^, llgûkoumije (Gr. Naz.)<br />
« légèreté d'esprit » ; et v. r. lïgosïrdu « au cœur léger », r. mod.<br />
legkosérdyj ;<br />
Ijubïznoëïstïnû (Gr. Naz.) «ptXoTtfxoç, Ijubïznoslavljenije (Ham.)<br />
fiXoSo^ia, Ijubïznoislïcï çi.XaX-/)6-/jç Ham. 22517, et :<br />
Ijuboistïcï Ham. 22212 ; Ijubodëi « débauché », prëljubodëi « adultère<br />
» sur Ijubu, adj., mais tenant la place de Ijuby, subst. (§ 1216) ;<br />
et avec une autre valeur (§ 1225) Ijuboimënïnu çtXàpyupoç, Ijubopïrivu<br />
744 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
prazdïnodëjatiije (Pand. Ant.) «oisiveté», prazdïnoslovesije àpyo-<br />
Xoyia (Pand. Ant.) ;<br />
prëkopisanije (Ham.) àvTtypacpov, prëkoslov(es)ije (Pand. Ant.,<br />
Ham.) âvTiXoyia ;<br />
prisnopamçlïnu (Ham.) «stp>7]
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 745<br />
tïmïnonosïnu. (Ham.) cxoTsivocpopoç, tlmïnoobrazïnù (Ham.) OXOTSIvo(iop
746 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
jed(i)noglasije oujxtpomoc, jed(i)nodusïnû 6[xôiu/oç, jed(i)no-<br />
SQstïnû ô|Aoo
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 747<br />
prëzdesëdanije irpcyroxocOeSpca, prëzdevuzlëganije TcponoyMaia, prëzdesvçstenù<br />
« présanctifié ».<br />
Mais ce sont des juxtaposés (§ 1218), plus que des composés,<br />
de même doluperivu (§ 995, J. Ex.) sur dolu «vers le bas», et<br />
okrçgu n'est que juxtaposé dans okrçgu-ostrovi Ham. 24114 rendant<br />
ai KoxXàSsç vîjcroi, comme dans okrçgu slstvije 65ls xoxXotpoptoc.<br />
Le composé a la forme okrçgo- (Izb. Svjat.), comme iskro-, prëko-,<br />
sçprolivo-, vyspro- ; on trouve même la locution adverbiale vu<br />
iainç « en secret » devenue premier terme de composé en -o- :<br />
vûtainoimïnu dans Euch. 45 a 4 (v'sëxû casu) vùtainoemïnyxu «(de<br />
toutes les heures) où (la fièvre) prend en secret », mais ce composé<br />
est trop exceptionnel pour n'être pas suspect.<br />
L'exemple le plus net, et le plus représenté, est celui de velï-,<br />
forme fixée en adverbe (§ 276) à côté des formes velije- et velikod'adjectifs<br />
:<br />
velïglasïnu (j.syaX6cawvoç, velïlëpïnu y.zyalcmpz-K-qç, (Pand. Ant.),<br />
velïrëëije fisYaXopp7j(iociSv7j-(Izb. Svjat.), etc.<br />
§ 1215. En slavon. — A ces listes de formes vieux-slaves,<br />
qui ne sont pas complètes, les textes slavons ajoutent une quantité<br />
d'autres formes, dont certaines remontent sûrement à l'époque<br />
vieux-slave. Tout texte récemment dépouillé apporte des exemples<br />
nouveaux à joindre à ceux des lexiques de Miklosich et de<br />
Sreznevskij : ainsi la traduction moyen-bulgare (xiv e s.) de la<br />
Chronique de Manassès, versifiée et qui abonde en composés grecs,<br />
que le slave calque sans peine.<br />
On notera, avec substantif au premier terme :<br />
bësobojanije SsiaiSai|j.ovia ;<br />
casozvonja « horloge sonnant les heures » ;<br />
divobljudïcï -rspa-nxTxoTcoç (Zach. III, 8) ;<br />
druvosëëï £UXOX67TOÇ ;<br />
glavobolije xsçaXaXyEa ;<br />
groboryja Tuixêcopir/oç ;<br />
idolozïrenina SÎSCOXO6UTOV ;<br />
ikonorazbiica «iconoclaste » (§ 876) ;<br />
iskusomçzïna « (femme) qui connaît l'homme » ;<br />
kostolomu « maladie qui brise les os » ;<br />
kozorozïcï odyfotepcùç « Capricorne » ;<br />
listopadu « chute des feuilles, octobre-novembre » ;<br />
Içkonosù âyxuXoppivoç ; '<br />
oplazosrudu « au cœur insolent » (t7TspsoxàpS!.oç, Ézéch.), sur<br />
oplaza (§ 769) ;<br />
plastoylavu «(arbre) à tête en couche (plate) », surplastu (§ 1161) ;
748 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
ryboloviz « pêcheur » ;<br />
sënosëcï (§ 1019) ;<br />
slùnïceobrazïnu « de la forme du soleil, Y)Xi6[xop
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 749<br />
Avec numératif :<br />
duvojeglasije SicpOoyYduvojezenïcï Sîyaixoç, etc., et voir duvo-.<br />
Avec adverbe, les composés ou plutôt juxtaposés :<br />
jçdëëçdinu ocxoyevrçç, sur v. si. jçdë « se tenant près » ( § 1003) ;<br />
lunjejadïcï « parasite », r. tunejddec, sur iunje « gratuitement »<br />
(§ 957) ;<br />
prëkylaza «crabe, cancer», moyen-bulg. prëkolaza (§ 1024).<br />
A ces listes de formes des textes vieux-slaves et slavons, les<br />
langues slaves ajoutent de nombreux composés, ainsi :<br />
r. motovjâz et motoùz « tortis, cordonnet», pol. motow(i)qz<br />
« lien de l'écheveau », tch. motouz, s.-cr. ancien et dial. motuz, slov.<br />
motvàz (§ 943) sur moiû « écheveau » (§ 731). Et, en se limitant aux<br />
composés qu'on a déjà rencontrés :<br />
v. r. meëenosa « porté-glaive » et zuboëza « morsure » (§ 1024), r.<br />
kolovorôl «tournant» (§ 770), kozemjâk(a) « corroyeur » (§ 807),<br />
kosnojazyëie «bégaiement» et vol'nodûmie «libre-pensée» (§ 933),<br />
syromjâl' «peau foulée à cru» (§ 1168), voskobôjnja «fonderie de<br />
cire » (§ 1089) ;<br />
v. pol. grododzirza «châtelain» (§ 1024), osoryja «fouille-guêpe,<br />
bondrée » (§ 730), pol. rzeczoznawca «expert» (§ 876), rymopis<br />
«rimeur» et wierszopis «versificateur» (§ 794) ;<br />
v. tch. duchoprod «simonie» (§ 819), konedra « équarisseur »<br />
(§ 728), ritopas «parasite» (§ 783), strëlokol «sagittaire» (§ 735),<br />
tch. hnojokyd « enlève-fumier » (§ 801), hovnival « bousier » (§ 777),<br />
dëjezpyt « histoire », jazykozpyt « linguistique » et jehlosyp « chute<br />
des aiguilles» (§ 799), kolomaz «graisse pour les roues» (§ 783),<br />
kulomet «lance-balles» (§ 804), lidojed «anthropophage» (§ 752),<br />
mëxonosa «porte-besace» et stëgonosa «porte-étendard» (§ 1024),<br />
misiopis «topographie» (§« 794), stejnokroj «uniforme» sur stejny<br />
« pareil » (§ 737), teplomër « thermomètre » (§ 750) ;<br />
s.-cr. bremènosa « portefaix » et cëtovoda « chef de bande » (§ 1024),<br />
ëorbolok «lèche-soupe» (§ 740), mlsolôvka «souricière» (§ 887),<br />
nogàstup «sentier» (§ 764), pârobrôd «bateau à vapeur» (§ 724),<br />
pllnomjër «compteur à gaz» (§ 750), pûskomët «portée de fusil»<br />
et vâtromët « feu d'artifice » (§ 804), sôlotûk « pilon à sel » (§ 769),<br />
stetôëinja «fauteur de dommage» (§ 1027), tvrdàglav «opiniâtre»<br />
(§ 941), Molaza «perce-oreille» et zirôpada «chute des glands»<br />
(§ 1024), vratôlom «casse-cou» (§ 734), éitàrod «produit des blés»<br />
(§ 738);<br />
slov. delopùsi « vigile » (§ 758), veîromèr « anémomètre » (§ 750) ;<br />
moyen-bulg. plavogrivëstu «à crinière fauve» (§ 989), macéd.<br />
zimovrav « buttage d'hiver » (§ 771).
750 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
§ 1216. Liaison des deux termes. — Le premier terme des<br />
composés avait en indo-européen la forme du thème, non fléchi.<br />
Dans le type thématique, la voyelle finale était -o-, en grec<br />
6eo-Xoyoç, et -o- a tendu à se généraliser : gr. uxo-êXa&fjç sur ^tr/j],<br />
Xeipo-ypatpov sur ~/s'
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 751<br />
pçtï, accusatif de l'idée verbale comme dans lesli pçtï « courir un<br />
chemin » (Ps.). Et c'est un accusatif de temps, adverbialisé, qu'on<br />
doit reconnaître dans le vieux-russe noëïlëgu « gîte de nuit », r.<br />
noëlég, pol. nocleg, tch. nocleh (§ 726). Une finale en -ï- de premier<br />
terme n'apparaît autrement que dans potïbëga « (femme) qui fuit<br />
son époux», composé obscurci (§ 1231), avec un adjectif devenu<br />
adverbe, velï-, et avec des numératifs, tri-, et desqlï- dans desçtïstrunïnu,<br />
var. desçlo-.<br />
Les anciens substantifs en -u- sont devenus thèmes en -o- :<br />
syno-bozïslvije, medo-loëinu, sauf la conservation de medu- dans<br />
medvëdï « ours » qui n'est plus analysé, et sauf polu- à côté du<br />
juxtaposé poludîne et du plus ancien v. si. pladïne (§ 1214). Pour<br />
les adjectifs, on trouve les deux types kralo- et kratuko-, kroto- et<br />
kroluko-, seulement rëdo-, et seulement mçkuko-, Içzïko-, tinuko-,<br />
lïguko- avec conservation de lïgo- en vieux russe. De même<br />
zeslo- et .zestoko-, mais seulement sir oko- ; et velï-, velije- et veliko-,<br />
La forme dosloino- est à côté de la forme nue doslo- du thème.<br />
Les athématiques figuraient au premier terme des composés sans<br />
voyelle de liaison : gr. Tra-cp-àSsXrpoç « frère du père », caxecr-oopoç<br />
« porteur d'un bouclier, odbcoç ». Quelques traces de cet état ancien<br />
doivent se retrouver en slave, comme en baltique (§ 1233) :<br />
nozdri « narines » (§ 1118), qui doit s'analyser en nos-dri « fentes<br />
du nez », avec second terme dr- de dire- « déchirer » ( § 728), et premier<br />
terme nos- «nez», ancien athématique (§ 175) ;<br />
mçzdr(j)a « écharnure, membrane» (§ 1117), de mçs-dr-, avec<br />
premier terme mçso « chair » thématique comme skr. màmsdm,<br />
mais le védique atteste aussi mas athématique et mâms- en<br />
composition ;<br />
* pol- dans v. si. pla-dïne « à midi », pla-nostï (Upir') « minuit »,<br />
qui doit être le thème ancien dont polu « moitié » est le dérivé en<br />
-u- (§ 160).<br />
Dans s.-cr. bremènosa «portefaix» (§ 1024) et kàmivâl «roulepierre<br />
» (§ 777), le premier terme a cessé d'être adapté en composé<br />
en -meno- et a pris une forme de juxtaposé ; pour s.-cr. dànguba<br />
« perte de temps » (§ 754), c'est un postverbal.<br />
Avec premier terme verbal, on a vëglasu de *vëd-golsu (§ 1225).<br />
Des formes fléchies apparaissent dans des juxtaposés :<br />
bratuëçdu « enfant du frère, neveu » ;<br />
bogumilu « pitoyable à Dieu » (et non « cher », § 1048), qui est<br />
chez Cosmas le nom de l'hététique Bogomile ;<br />
zuluradu « qui se réjouit du mal » en slavon, r. zlorddnyj « malveillant<br />
», mais s.-cr. zlùrad à côté de zlôrad.<br />
Un composé tch. solivar « saunerie » peut être un juxtaposé,
752 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
comme l'est évidemment ranhojië « rebouteur » (§ 859), avec solipour<br />
solo- dans s.-cr. sôlotûk « pilon à sel » (§ 769) ; mais on trouve<br />
aussi un -i- de liaison pour -o- dans hovnival «bousier» (§ 777).<br />
Avec nom de nombre, on a tri- à côté de tri- (§ 1204), et r. pjatipour<br />
v. si. pçto- dans pjatidesjdtyj (§ 314), pjatidnévka (§ 886).<br />
L'adverbe oëivistï « avec évidence », et tch. oëiuistë, pol. oczywiscie,<br />
présente le duel oci-, à côté de oëe- dans la variante ocevisto<br />
et dans le substantif oëe-bolï. La forme oëi- est sûrement secondaire<br />
de oëe-, thème devenu isolé dans la flexion oko, gén. ocese, mais qui,<br />
comme zemo- de zem-, fait remonter à l'athématique *ok w -, d'où<br />
aki- en balto-slave (§ 193), avec -o- sur thème simplement mouillé<br />
dans zemo-, et -e- sur consonne palatalisée dans oëe-.<br />
§ 1217. Substantif et adjectif. — Le premier terme du composé<br />
peut être un substantif ou son adjectif dérivé : kraso-ljubije et<br />
krasïno-prûsïcï, podobo-liëïnu et podobïno-obrazu, sur krasa et<br />
krasïnu, podoba et podobïnu. Mais il y a des cas où la forme de<br />
l'adjectif est inattendue :<br />
andelïskoobrazînû àyysXoeiSïjç ;<br />
kapïnokrilû xoXeoTrrspoç « à aile en fourreau », sur kapï « fourreau »<br />
(§ 713) ;<br />
osïl(i)jeglavïcï ôvoxétpaXoç ;<br />
pïsijeglavïcï xuvoxécpaXoç ;<br />
volujeglavu j}ouxswy.oç.<br />
Pour lïmïno-obrazïnû, le modèle en est dans le grec, axorsivô-<br />
[i,op
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 753<br />
§ 1218. Composés et juxtaposés. — La composition a ses<br />
marques distinctives, dans la forme du premier terme ou dans celle<br />
du second : glavobolije « céphalalgie », vologlavu « bucéphale »,<br />
avec les formes glavo- et -glavu de glava qui ne se trouvent qu'en<br />
composition.<br />
Quand ces indices font défaut, on n'a plus affaire à un composé<br />
à deux termes, mais à un groupe plus ou moins étroit de deux<br />
mots, à un juxtaposé : pakybytije « renaissance » est un composé<br />
dans le grec TcoLkiyysvsaia. à cause de la finale -la, mais en slave c'est<br />
un juxtaposé « existence à nouveau ». Le mot r. skâtert' « nappe »<br />
serait un juxtaposé à premier terme (du)ska, mais c'est difficile<br />
à croire (§ 1168).<br />
Il en est ainsi avec les adverbes comme premier terme quand<br />
il n'y a pas transposition comme dans okrçgoslovije sur okrçgu<br />
(§ 1214), et avec le type courant des adverbes en -o : dobro-, zulo-,<br />
raznostojanije (J. Ex.) « fait de se tenir en divers lieux », Ijutotçgu<br />
(Gr. Naz.) SuaxàôexToç « difficile à contenir » renforçant tçgu<br />
«fougueux» (§ 763), slavon kupïnozitije «vie en commun», prisnodëva<br />
àswwpôévoç, etc. De même avec les verbes comme seconds<br />
termes : dobrotvoriti àya0o7Toisïv (§ 1228).<br />
Entre groupe de mots et juxtaposé, c'est une question de<br />
fréquence d'emploi : en français « bienvenu », et « malvenu » ou<br />
« mal venu ». Avec les numératifs, on a groupe dans v. si. duva<br />
desçti « deux dizaines, vingt », qui devient juxtaposé, et composé<br />
dans dùvadesçtïnù et dans r. dvddcat', dvadcdtyj. Avec les noms de<br />
villes, v. r. novu gorodu « ville neuve » devient Novùgorodu, gén.<br />
Nova goroda et Novugoroda, mod, Novgorod, gén. -da.<br />
§ 1219. Premier terme préfixe ou préposition. — Le préfixe le<br />
plus courant est la négation ne- devant un nom, avec toute liberté<br />
d'emploi : nepravïda
754 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
iz- : izdredinu «hors rang» et adv. izdrçdï (§ 1200), izobilïnù<br />
«abondant» et subst. izobilije sur iz obila (§ 926) ; izdekonïnu sur<br />
izdekoni (§ 976) ; izokû (J. Ex., Const. Pr.) «cigale», proprement<br />
« aux yeux saillants », cf. razoku.<br />
na- : nanebesïnu s7coupàvioç, nazemïnu, èniysioç, nasçstïnû èmoiicrtoç,<br />
navïsedïnevïnu (Ham.) xaO-rçjAspivoç ; slavon nazimù « de<br />
l'année », proprement « à l'hiver », en parlant d'une bête née au<br />
printemps, s.-cr. nàzimac « cochon d'un an » (r. nâzim' « approche<br />
de l'hiver ») ; — avec un adjectif : slavon nadebelïnu « plutôt gras »,<br />
naçsu « qui commence à avoir de la barbe », v. si. nanëmï<br />
« bégayant » (§ 1200), slov. ndgluh « un peu sourd », nâkriv « un peu<br />
courbe », s.-cr. nàglûh, nâcrn « noirâtre », nàljût « un peu<br />
piquant », etc. ; avec le comparatif v. si. naivçste « le plus », et<br />
formation en na(j)- du superlatif dans les langues slaves (§ 293).<br />
nadu : nadùlëtïnu. (Gr. Naz.) wuepxpôvioç, slavon nadugrobïnû<br />
sTtiTizoïoç, nadùnebesïnù uTtepoupdcvioç.<br />
o(b)- : obusije (Upir') «lobe de l'oreille», etc. (§ 928); adv.<br />
okolo « autour », slavon ozimu « de vers l'hiver, d'automne », r.<br />
ozimyj ; pol. osek « bois tortu », osçka « croc » (§ 768), v. si. osçkatu<br />
«épineux» (§ 987) ; — avec un adjectif v. pol. obslary «^vieillot »,<br />
slov. ôstar, osiv « grisâtre », ôsuh « un peu sec », ôlen « un peu<br />
paresseux », s.-cr. ôlijen, ôdug « longuet », et olak « facile à tisser »<br />
(§ 814).<br />
otu- : olûjadu « contrepoison, àvTicpâpiiaxov » ; Otufrugu, « Cataphryge<br />
» Athan. I, 268 est forgé sur otu Frugyjç «de Phrygie»;<br />
ozemïstvo « bannissement », sÇopiqAoç (Athan.) paraît dérivé de<br />
o(t) zem-, mais peut s'expliquer aussi par o zemi (§ 169).<br />
po- : pomorije « bord de la mer », etc., posçtïstvïnu (Athan.)<br />
6 xaTà tpûaxv sur sçtïslvo « nature », ponedëljiniku. « (jour) après<br />
dimanche, lundi», pol. potraw «regain» (§ 779); slavon ponozï<br />
« cnémide, jambart », r. pôruc « bas de manche » ; — avec un adjectif<br />
: moyen s.-cr. et mod. polako « tout doucement », povecï « un<br />
peu plus grand », pôblize « d'un peu (plus) près » sur la locution<br />
pô blïzu « près » ; moyen-bulgare polëpsa « plus belle », pobogatu<br />
«plus riche», etc., et bulg. mod. pô-bogât, comparatif en pô-<br />
(§ 292).<br />
podu- : podugorije « piedmont », etc. ; podunebesïskû 6 ÔTT' oôpavov,<br />
poduzakonïnû ô u-rrà vo|j.ov.<br />
prëdu- : prëdudvorije upoaiXiov, prëduteëa upoSpo^oç, prëdûplucïnû<br />
« sur le devant de la ligne de bataille, ô èxl TtapaTà^scoç ».<br />
pri- : primorije « rivage, TO uapaSaXacraiov », pripçtïnù 7rap68ioç,<br />
r. prigorôd « faubourg » ; — avec un adjectif : priskrûbïnu « affligé,<br />
TcspiXuTtoç », pristrasïnu « effrayé, sjxcpoêoç », pribëdïnu « dangereux »,<br />
et grand développement en slavon, en polonais atténuatif :<br />
przygiuchy « un peu sourd », przypiaski « un peu plat », etc.
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 755<br />
su- : suglasïnû oijxtpcovoç, sùpospësïniku cruvspYoç, sûprisnosçstïnû<br />
(TuvatSioç, etc., formes nombreuses ; sùmyslu « sens, raison », sumotrï<br />
(Gyr. Jér.) « but », qui sont les bases des imperfectifs sumysliti<br />
et sumotrili (§ 641), et dont il apparaît qu'ils ne sont pas (à l'origine)<br />
des postverbaux.<br />
u- : ubogu «pauvre» (et nebogu), en regard de bogatu «riche»<br />
(§ 987) ; avec un sens différent, usrudïnû « plein d'ardeur, •rcpéQufJi.oç »,<br />
et usrûdu (Izb. Svjat.), qui pourrait être un postverbal, mais<br />
*sïrditi signifie « irriter » (§ 810), et sa forme à préverbe u-, dans r.<br />
dial. userdit'sja (pour o-), slov. usrdiii, ne paraît pas ancienne.<br />
vu- : vugrobïnii (J. Ex.) « dans les tombes, oE sv TOÏÇ (j.v/j;xe[oiç ».<br />
vuz- : vuzmïzdije « rétribution », etc. ; vuzglavïnica « oreiller »,<br />
nevûzoblagodëtïnu « ingrat, àxœpicToç » ; vuzmozlnû « possible »,<br />
ô xaxà SivafAiv Euch.,. mais lié à vuzmosti « pouvoir » ; v. r. vuznozï<br />
« côté des pieds » (§ 717), en regard de r. vzgolôv'e « côté de la tête,<br />
chevet » ; adv. vûspçti« du côté du talon, en arrière » (§ 1200).<br />
za- : slavon zagorije, etc., et zalësïsku « derrière la forêt », zaambonïnu,<br />
r. mod. zaamvônnyj, « derrière l'ambon ».<br />
mezdu- : mezdumërije « intervalle », etc. ; et :<br />
srëdu- : srëdudvorije TO fiicrauÀov d'après mezdu-, pour srëdo-<br />
(§ 1213) sur l'adverbe srëdë (§ 321).<br />
paie- : dans Ham. paëejestïstvïnù ô mrsp «ptScriv, pacesçstïstvïnû<br />
ûuepoiSffioç, paëemirïsku ôrapxocrfAioç.<br />
proiivç- : protivçbozïnû (Ham.) xvzidsoç, protivçobrazïnu (Ham.)<br />
àv-nTOTTOÇ, slavon protivçslovije àvTiXoyta.<br />
vyse- : vysemirïnu (Athan.), -mirïsku (Izb. Svjat.) u7tspx6a[j.toç,<br />
vysejeslïstvïnû Izb. Svjat. (uTrspoiWoç).<br />
Mais les formes avec kromë- et prëzde- sont des juxtaposés<br />
(§ 1214).<br />
Il y a une préposition prûvëje « antérieurement à », qui est le<br />
comparatif de pruvyi (§ 312) suivi du génitif ; on la reconnaît,<br />
transposée en premier terme en -o-, dans pruvomirïnyi (Athan.)<br />
Ô 7tpO XOOfAOU (§ 1214).<br />
La préposition ku, qui n'est pas préverbe, figure également<br />
comme premier terme, dans le slavon kûvrëdije TzpormôSsicc « passion,<br />
entraînement », qui suppose une locution ku vrëdu « au préjudice »<br />
sur vrëdu « dommage » (§ 806), et dans des dérivés de locutions :<br />
otu ku-Kolasaiskaago (posulanija) «(de l'épître) aux Colossiens,<br />
ku Kolosajemu », gr. èx -n)ç vtp&ç KoAocraaeïç, Gyr. Jér. dans les<br />
Feuilles de Chilandar ;<br />
vu ku-Efescëi (epislolii) èv T9J -rcpoç 'Eosmouç (Athan.); (vu<br />
epislolii vutorëi) ku-Korin6ïscëi (Athan.) ;<br />
ktt-Axavl radi (Ijubvi) 8ià TTJV rcpoç TOV 'Ayjxào (cptAoCTTopyiav)<br />
« à cause de l'affection pour Achab » Ham. 15326.
756 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
Ces composés ne diffèrent pas du type général podunozije « ce<br />
qui est podu nogama », si ce n'est que les dérivés de cette sorte<br />
sont rares. Mais on trouve de la même façon :<br />
na-sïmrïtïnçjQ (pobëdç postavivu) Supr. 48828, gr. TO xocrà TOU<br />
0avaToi> (xpoTcaiov erT7)
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 757<br />
(Gr. Naz.) « de travers, Siàcrrpocpoç, en parlant des yeux, louche »,<br />
v. pol. rozoki, s.-cr. ancien razok et mod. râzrok par rattachement<br />
au thème de (na-)zreti « regarder » ; le slavon rasoxu « fourchu »<br />
est postverbal (§ 740).<br />
Il faut mentionner une particule préfixée ko- qui n'est pas un<br />
véritable préfixe, mais un élément expressif de renforcement,<br />
comme en français ca- dans « cafouiller » ; ainsi dans r. kôvorot<br />
« gond » de la porte, ce qui la fait tourner, ukr. kovértaty « faire<br />
tourner», s.-cr. kovHâë «roulette»; h. sor. komdzic «retarder»<br />
(§ 756), et voir s.-cr. korâciti « marcher », § 775.<br />
On peut avoir une forme renforcée ka- du type des composés<br />
nominaux, pa- de po-, dans r. kâverzy, plur., « chicanes, intrigues »,<br />
sur *vïrze- « lier », r. verztl « radoter » (§ 428).<br />
§ 1220. Premier terme des composés nominaux. — Plusieurs<br />
préfixes prennent une forme spéciale dans des composés nominaux<br />
(§ 116) : ainsi, en regard de pogubiti «faire périr, perdre», le<br />
substantif paguba « perdition », qui n'est pas un postverbal, mais<br />
le composé d'un préfixe pa-, forme à allongement de po-, et du<br />
thème gub-, On trouve des faits semblables en baltique, lit. paet<br />
pô- (§ 1224); en grec, -rzpo- et TÏQOH «au matin», npomspum<br />
« deux ans avant » sur rcépuai « l'an dernier », et leurs traces en<br />
latin. En slave, voir l'adjectif pronominal samu, à l'origine premier<br />
terme de composé, § 256. Et :<br />
pa- :<br />
Y. si. paguba, r. pâguba ;<br />
pamçtï « mémoire », r. pâmjat', tch. pamët, slov. pâmet, s.-cr.<br />
pâmêt ;<br />
pazitï « pâture » (§ 1168), r. pâzit' ;<br />
pabiruku (Pand. Ant.) « grappillon », s.-cr. pâbirak « grappillon,<br />
glane », et slov. pâberek, tch. pabërek, avec po- « après » et birde<br />
bere- « cueillir » ;<br />
parodukû (Gr. Naz., Upir') « fruit non mûr », r. pârodok, et r.<br />
dial. parozenica « accouchée » ;<br />
pavecerja (Ham.) « soir » (r. poveëérie « complies »), et s.-cr. dial.<br />
pâvecera « repas après le dîner », avec po- « après » et veëeru et<br />
veëerja ;<br />
paçku « araignée », voir § 767.<br />
Slavon paslorukû « fils d'un premier lit », v. tch. pastorek, s.-cr.<br />
pâstorak (§ 35) ;<br />
padusti « belle-fille », padiïsterica, r. pâdcerica, et lit. pôdukrè<br />
(§ 198);<br />
pasynukù « beau-fils », et :
758 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
pasrûbu « beau-fils », r. paserb, pol. pasierb, sur un thème *sïrbqui<br />
n'est évidemment pas le nom *Sïrb- des Serbes, et qu'on ne<br />
doit pas chercher dans ukr. prysérbylysjan se joindre à (quelqu'un) »,<br />
altération de r. prisébrit'sja sur sçbrû. « associé » (§ 1115), mais qui<br />
peut parfaitement être celui de *sïrbati « humer », avec un sens<br />
figuré et dépréciatif, ce qu'il faut absorber après un autre, le reste<br />
d'un autre père ou d'une autre mère ;<br />
paprutï « porche », avec po- et pïrati « fouler » (§ 1168) ;<br />
pabradukû (xi e s.) « menton », ailleurs r. podborôdok, etc. ;<br />
pavlaka, v. r. pavoloka « tissu, étoffe de prix », v. tch. pavlaka,<br />
s.-cr. pavlaka « housse » et « crème » (§ 769).<br />
V. r. parobuku « garçon », r. pdrobok (pâren', § 1092), pol. parobek<br />
« valet de ferme », tch. parobek, qui ne doit pas s'expliquer comme<br />
dérivé de v. si. po-rabili (J. Ex.) «réduire en servitude», mais<br />
plutôt comme mot, sur robu « esclave, serviteur », de la série de<br />
pasynukû, avec un sens originel difficile à restituer.<br />
Russe pâdora « mauvais temps », pâder et pàdera « haridelle »<br />
(§ 728);<br />
pâyolos « écho » ( § 772) ;<br />
pâgorok « colline », pol. pagôrek, tch. pahorek ;<br />
pâluba « toit de planches », pol. palub ( § 756) ;<br />
pâmorok(a) « temps sombre » (§ 771) ;<br />
pâroj « second essaim », slov. paràj (§ 729) ;<br />
pâseka « rucher », pol. pasieka « clairière » et tch. paseka (§ 752) ;<br />
paskuda « vilenie » ( § 764) ;<br />
pâsmur, pdsmàra «homme morose » (§ 760) ;<br />
pastén, pâslen' « ombre » (§ 749) ;<br />
pdsceka « mâchoire (des bêtes) », pol. paszczeka « gueule », tch.<br />
vulg. pastëka «joue, gueule», sur r. sëeka «joue», pol. szczçka<br />
(§ 1040);<br />
pdtoka « sirop », pol. patoka, tch. patoky, slov. pdtoka, s.-cr.<br />
pâtoka (§ 726) ;<br />
pâvorot' « retour » et pavoroz « cordon » (§ 770).<br />
Ukr. pâëosy « étoupe », pol. paczes, tch. paëes « démêlure »<br />
(§ 803) ;<br />
pâludy « écailles sur les yeux » (§ 768).<br />
Pol. paiqk « cintre », tch. palouk « prairie » (§ 763) ;<br />
pawqz « perche pour lier », tch. pa(v)uz(a) ( § 762) ;<br />
parôw « ravin » ( § 730) ;<br />
paciep « lieu sombre » (§ 718) ;<br />
pairochy « entrailles » ( § 740) ;<br />
patyk(a) « bâton » (§ 800) ;<br />
pacholç « garçon », tch. pachole, sans doute sur thème xol-<br />
(§ 788);<br />
pazur « griffe », tch. pazoar, est abrégé de paznoguïi (§ 1132).
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 759<br />
Tchèque pablesk « reflet » ( § 745) ;<br />
padrt' «petits morceaux» (§ 1168) ;<br />
pahrbek « butte, colline », sur hrb « bosse » (slavon grubavû<br />
« bossu », § 993) ;<br />
pajed' « chancre » qui ronge la chair ;<br />
pdnoha « branche » (§ 744) ;<br />
parez « souche » ( § 776) ;<br />
paroh « poussée de corne, roh », « ramure, bois de cerf » ;<br />
patësky « marc de raisin » ( § 745) ;<br />
pazvuk « résonance » ;<br />
et slovaque pahrebla « ce qu'on ratisse » (§ 803).<br />
Slov. pdklest « branche coupée » ( § 747) ;<br />
pâklen (et maklèn) «sorte d'érable, klèn» (§ 1097).<br />
S.-cr. pàljetak «glane», ce qui reste après la récolte de l'année,<br />
tjëtina ;<br />
pâvït « clématite » (§ '1168) ;<br />
pâtïsak « contrefaçon » (§ 797).<br />
Ce dernier mot montre que les formes en pa- peuvent prendre<br />
une nuance péjorative : tch. paklië « fausse clé », padëlek « contrefaçon<br />
» et padëlali « contrefaire » ; s.-cr. patvôriti « contrefaire »<br />
est v. si. po-tvorili « refaire » avec rattachement à un composé<br />
nominal *patvor-, le postverbal v. si. potvoru ayant aussi le sens<br />
péjoratif de « maléfice » (§ 736), et slov. ponarçja celui de « contrefaçon<br />
»(§ 1024).<br />
§ 1221. — Pra- :<br />
Y. si. pradëdù « arrière-grand-père » et prëdëdu, r. prâded, pol.<br />
pradziad, tch. pradëd, slov. prâded et préded, s.-cr. pràdjed, bulg.<br />
prâdjado et macéd. prédedo ;<br />
slavon prababa « bisaïeule », r. prabâbka, slov. prdbâba et prebâba,<br />
s.-cr. prababa, bulg. prababa et macéd. prébaba ;<br />
v. si. praotïcï (J. Ex.) et prëotïcï (Sav.) 7rpoTOXTwp, r. prâotec ;<br />
pramaii (TtpofA^rwp) dans adj. pramaterïnjï J. Ex. (§ 968), r.<br />
prâmdter', tch. pramâti, s.-cr. pràmâjka ;<br />
praroditeljï (Ham.) Ttpoyovoç et adj. prëroditeljïnu, r. prarodilel',<br />
tch. prarodiëe (plur.) ;<br />
pravûnukù (Ham.) àiroyovoç, r. prâvnuk, et macéd. prevnuk.<br />
Les formes en prë- du vieux slave et du slovène dialectal sont<br />
secondaires de pra-. Ce sont celles du moyen bulgare : régulièrement<br />
prëdëdu, prëotïcï, etc. dans la traduction de Manassès, et ce sont<br />
celles du macédonien moderne, tandis que l'influence russe a<br />
restauré pra- en bulgare.<br />
V. r. prasôuru et mod. prâscur « arrière-grand-père », pol.<br />
praszczur « arrière-petit-fils », voir § 1132.
760 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
Et slavon prapradëdu, r. praprâded « trisaïeul », pol. prapradziad,<br />
s.-cr. pràpradjed ;<br />
slavon prapravunukù, r. praprâvnuk, pol. praprawnuk ;<br />
r. praprabdbka « trisaïeule », s.-cr. pràprababa ;<br />
r. praprdsëur « arrière-arrière-grand-père », et aussi r. prapraprdscur,<br />
pol. praprapradziad, etc. ;<br />
slov. prdbratic « petit-neveu » ;<br />
s.-cr. prâsukundjed « quadrisaïeul » sur sukùndjed « trisaieul »,<br />
avec sukun- de lat. secundus, ital. secondo.<br />
En dehors des noms de parenté, la forme pra- apparaît rarement<br />
à date ancienne :<br />
v. r. prasolu, mod. prdsol « marchand de salaisons », pol. prasôl<br />
«commerçant en sel» (§ 741), sur pro-soliti, r. prosolii' «bien<br />
saler » ;<br />
v. r. vo prabosnjaxù « à pieds nus » (§ 1086).<br />
Mais les langues occidentales modernes connaissent un grand<br />
développement de pra- pour marquer ce qui est primordial, comme<br />
en allemand ur-, et par calque de l'allemand dans le vocabulaire<br />
savant :<br />
pol. prajçzyk « langue primitive, Ursprache », tch. prajazyk,<br />
slov. prdjézik, s.-cr. pràjezik ;<br />
pol. pracziowiek « homme primitif, Urmensch », tch. praclovëk,<br />
slov. prdclôvek, s.-cr. pràcovjek ;<br />
pol. prawiek « temps primitifs, Urzeit », tch. pravëk, slov. prdvêk,<br />
s.-cr. pràvijek ;<br />
tch. prales « forêt vierge, Urwald », slov. prdgozd, s.-cr. pràsuma.<br />
Et tch. prapriëina « cause première, Urgrund », prazdroj «source<br />
première, Urquell », slov. prdblk « aurochs, Urochs », prdobràz<br />
et prdllk, s.-cr. prâlik, « prototype, Urbild », s.-cr. prâkolijevka<br />
« berceau primitif, pays d'origine », etc.<br />
Ce sont là généralement des créations savantes par calque.<br />
Mais il y avait bien aussi un certain développement de pra- dans<br />
la langue réelle, dont témoignent :<br />
slov. prdkol et collectif prdkolje, s.-cr. dial. prâkôlje, « vieux<br />
pieux », vieux échalas à remplacer ;<br />
s.-cr. dial. prâcijep « timon » (§ 748).<br />
Avec adjectif : tch. praddvny, s.-cr. prâdâvnï, et tch. praslarij,<br />
slov. prdstàr, s.-cr. pràslar « très ancien, uralt ».<br />
Et des formations expressives : tch. pramdlo « un tout petit peu »,<br />
prabidny « archimisérable », pol. pratotr « archicoquin ».
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 761<br />
§ 1222. — SQ- :<br />
V. si. sçpïrjï « adversaire » (§ 1019), v. pol. sqpierz, tch. souper ;<br />
SQpostatu «adversaire», r. supostdt (§ 1160) ;<br />
sçpfçgû « attelage, couple » (§ 763), r. suprûg « époux » ;<br />
sçsëdû «voisin» (§ 776), v. r. susëdu (mod. soséd), pol. sqsiad,<br />
tch. soused, slov. sçsed, s.-cr. susjed ;<br />
sçprotivï « contre », adv. (§ 1200), slov. dial. sçproii, s.-cr. sïcproc<br />
et verbe suprollviti se (§ 817) ;<br />
sçsï «l'un l'autre», adv. (§ 1199) ;<br />
sçdlûzï (Gr. Naz.) « débiteur » ; slov. sodôlèen « complice, ail.<br />
mitschuldig », sodoUnlk « codébiteur » et s.-cr. suduznik, créations<br />
modernes ;<br />
sçgrazdaninu aufMtoX£T*)ç (Pand. Ant., Éph. II, 19, var. su-),<br />
r. sograzdanln, s.-cr. sùgraâanin ;<br />
sçmeêdïnikû «limitrophe » (Upir', Ham.) ; r. suméznyj (sméznyj),<br />
et dial. sûmez(du) «entre»; slov. soméja «frontière commune»,<br />
s.-cr. sùmeda ;<br />
sçpazitïniku (Ham.) « qui fait paître avec » (var. su-) ; slov.<br />
sopâsnik « pâturage communal », s.-cr. supasa ;<br />
sçzitï (Pand. Ant.) tj aufj,6ioç (§ 1168) ;<br />
sçsëku « coffre à blé » (Ham.), r. susék, pol. sqsiek, tch. sousek<br />
(§752);<br />
sçmïnëti (sq) «douter» et su- (§ 65), dénominatif de *SQmïnja<br />
(§ 1024) comme pitëti de *pitja (§ 586) ; v. pol. sqmnienie et<br />
sumnienie « scrupule », mod. sumienie « conscience » ; slov. sûmnja<br />
et sçmnja « soupçon », s.-cr. sûmnja « doute ».<br />
Et sugubï «double», adj. invariable (§ 317), sûrement de sç-<br />
(§ 65) ; et sgdû « vase » et « jugement » (§ 819), lit. samdas « location »<br />
(§ 1224).<br />
Slavon sçylasije « accord » (et su-), r. sogldsie, tch. souhlas, slov.<br />
soylâs, s.-cr. sùglasan (récent) ;<br />
sçlozï CTtiyKotToç, et v. si. sûlozï (Izb. Svjat.) ;<br />
sçziteljï crûjxêtoç et sû-, r. sozltel' «cohabitant, conjoint», tch.<br />
souziti « vie en commun » ;<br />
sçklëtïnikû (xi e s.) « compagnon de cellule, aùyxsKkoç, » ;<br />
sçvrazï « ennemi », slov. sovrâz, s.-cr. kajk. suvrastvo « inimitié » ;<br />
sçmrakû « crépuscule », r. sûmorok, tch. soumrak, slov. sçmrak et<br />
sùmrak, s.-cr. sfomrâk (§ 771), et voir s.-cr. sûton ;<br />
suliëï (slavon russe) et v. si. sû- « face à face », et *sçzçbï, s.-cr.<br />
suzub « de front », adv. (§ 1200).<br />
Et d'autres formes encore en slavon, et dans les langues slaves :<br />
Vieux-russe suderevï « aveè ses bois » (§ 1089) ;<br />
suimû « mêlée », mod. suèm « assemblée » (§ 811) ;<br />
suporû « dispute » ( § 728) ;
762 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
sustanica « sédition » (les ouffroccriacnraC de Marc, XV, 7), sur stan-<br />
(§ 789);<br />
suiçza «plaignant» (§ 1022), mod. sutjdga, et sulùga «lien»<br />
(§ 763) ;<br />
sustrëkati (§ 449) «rencontrer», subst. sustréta, s.-cr. sûsret<br />
(§ 752), verbe sùsresii, sùsretati.<br />
Russe sûdoroga «crampe», slov. sçdrag(a) «grêle» (§ 773);<br />
sûkrôm « séparation », tch. soukromë « en particulier » (§ 741) ;<br />
sùkrovica « sanie », slovaque sûkrvica, slov. sçkrvica, s.-cr.<br />
sùkrvica ;<br />
sûrzanka «blé mêlé de seigle, roi», v. pol. sqrzgca (sqzyca),<br />
tch. sourzice, slov. sçrïica, s.-cr. sùr(a)zica ;<br />
sugréb « mesure de sel » et sugrôb « tas de neige », sur sgrebàl'<br />
«entasser en raclant» (§ 803); s.-cr. sûgreb «tas de terre (de<br />
creusement) » (§ 803) ;<br />
sugrév «chaleur» (§ 751); — (v)sûterp' «autant qu'on peut<br />
supporter », adv. ( § 770) ; — sûvod' « tourbillon », sur vodd ;<br />
— suvôj «rouleau» (§ 729); — sûvoloka «mauvais chanvre»<br />
(§ 769) ;<br />
susiigdt' et so- « poursuivre, atteindre », s.-cr. sùsîignuti et<br />
subst. sèstïg (§ 797).<br />
Polonais sumiot (et smiot) «amas de neige» (§ 804), avec suqui<br />
s'explique par dénasalisation devant m (§ 65).<br />
Tchèque soutëska «défilé», slov. sotêska, s.-cr. sMjeska (§ 745) ;<br />
avec un développement particulièrement abondant de formes en<br />
*sç-, sou- en tchèque :<br />
soubor « ensemble » (§ 728) ; — souëet « addition, total » (§ 810) ;<br />
— soudrznost « cohésion » ; — souhra « jeu d'équipe » ; — soukup<br />
« co-acheteur » (§ 759) ; — soulad « harmonie » (§ 785) ; — soumër<br />
«symétrie» (§ 750); — soupis «relevé, inventaire» (§ 794) sur<br />
sepsati « composer, dresser (un inventaire) » ; — souprava « garniture »<br />
(§ 792); — soustava (et se-) «composition, système» (§ 792);<br />
— soustrasl «compassion»; — soustrëditi «concentrer» (§ 806) ;<br />
— soustruh « tour (de tourneur) » (§ 755) ; — soutok « confluent »<br />
(§ 726) ; — souvraV «tournant» (§ 770). Etc., avec des formes<br />
récentes, créations du xix e siècle, et non sans influence de<br />
l'allemand :<br />
soucit et slov. socût « compassion, Mitgefuhl » sur *tjut- (§ 758).<br />
Slov. sopâr(a) « vapeur » (§ 782) ; — sçper « contre », préposition<br />
(§ 1019) ; — soociti «confronter», et s.-cr. suàëiti.<br />
S.-cr. sùgradica « pluie mêlée de grêle », et sùsnjezica « pluie<br />
mêlée de neige » ; — sMoô « heurt, collision » ( § 739) ; — sùmjesa<br />
«mélange» (§ 746); — sùmit «tête-bêche» (§ 796); — sMika<br />
« événement » (§ 800) et sMuk(a) (§ 769) ; — sûton « tombée de la<br />
nuit » (§ 732) ; — suvrst « espèce » (§ 1169).
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 763<br />
Avec adjectif, on trouve en slavon sçbëlïnu (Mikl.) «tirant sur<br />
le blanc », s.-cr. sùbjel ; sçblizï « (assez) près », s.-cr. ancien subliz,<br />
et mod. sMlize. Mais il s'agit en serbo-croate de su- qui dans<br />
l'usuel sùvise « par-dessus », d'où « trop », est une variante de<br />
sàvisë, et l'on a dialectalement su pour s(a), su dva, su tri, su<br />
ëim, etc., qui paraît résulter d'un développement secondaire sans<br />
rapport avec l'ancien sç-, puisqu'on a aussi bien tch. ku pour k(e)<br />
et pol. ku généralisé.<br />
§ 1223. — 0-.<br />
On reconnaît la forme renforcée *on- de vu(n)- (§ 73) dans :<br />
v. si. çdolî « vallée », r. udôl, udôl' « bas-fonds » et jûdol' « vallée »<br />
(slavonisme), pol. wqdoi « ravin », tch. ûdoli ;<br />
v. r. uvozu, pol. wqwôz « défilé, ravin », tch. ûvoz « chemin creux »<br />
(§ 723);<br />
v. r. utùku « trame » et mod. utôk, pol. wqtek, tch. utek, slov.<br />
vçtek, s.-cr. ûtak, bulg. vâtâk (§ 814) ;<br />
r. utôr «jable», pol. wqtor, tch. ûtor, slov. (v)otèr, s.-cr. Mor<br />
(§ 728);<br />
pol. wqgroda « enclos, jardin » ;<br />
pol. wqpiory, plur., « édredon, taie d'oreiller», sur wpierzyc<br />
« emplumer » ;<br />
tch. ûval « ravin » ( § 777), qu'on doit retrouver dans le nom de lieu<br />
v. pol. Wqwal, mod. Wawel.<br />
Dans tch. ûboëi « pente » en regard de v boku « sur le côté »,<br />
et uëel « but, intention », en regard de v ëele « au front, à la tête »,<br />
le û- peut s'expliquer autrement.<br />
Et v. si. çda (Ham.) « hameçon », r. udd, pol. wçda (§ 819).<br />
Dans v. si. onusta « chaussure », r. et slov. onûca, pol. onuca,<br />
tch. onuce, on a sans doute on- devant voyelle répondant à Qdevant<br />
consonne (§ 523).<br />
Mais c'est un ç- différent qui apparaît dans d'autres mots, où<br />
l'on doit lui supposer un sens privatif : celui de i.-e. *n-, gr. à-,<br />
lat. in-, germ. un-, forme réduite de la négation ne, avec renforcement<br />
en gr. vrr dans vr\-{F)i§- « qui ne sait pas », VT)-7IOIVOÇ<br />
« impuni », etc. :<br />
v. si. çrodu « fou », r. urôd et jurôdivyj comme slavonismes, le<br />
russe urôd « avorton » pouvant être le postverbal de urôdit'<br />
« estropier, défigurer » ; le mot se rattache au thème rod- de roditi<br />
«procréer» (§ 738), et il ne peut pas avoir de rapport avec v. si.<br />
ne roditi « ne pas se soucier », où rod- vient de *ard- (§ 70) ;<br />
v. si. çtïlû « troué, percé », r. utlyj, pol. wqtiy « débile », tch.<br />
ûtly « délicat, tendre », slov. (v)çtel « creux » et s.-cr. dial. Mal,
764 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
qui s'explique bien par « sans fond », g- et v. si. tïla, plur., « sol,<br />
fond », lit. tilés, plur., « planches du fond d'une barque » (§ 1022).<br />
Y. si. gsobï, adv., «l'un contre l'autre» (§ 1200), subst. gsobica<br />
«lutte intestine, sédition» (§ 881), pourrait s'expliquer également<br />
par ne sobojg « non l'un pour l'autre ».<br />
Et pol. wqtpic « douter » suppose une forme nominale en g- qui<br />
peut être *g-put- avec métathèse, sur le thème pût- « s'informer »<br />
et en regard de s.-cr. nepcd «suspicion (sans examen) » (§ 718).<br />
Tous les exemples de cette forme g-, de i.-e. *n-, à valeur négative<br />
sont plus ou moins obscurs, parce que le type est très ancien, de<br />
même que le préfixe i.-e. *dus- a disparu en ne laissant qu'une<br />
trace hypothétique dans v. si. duzdï « pluie », et que *su- a disparu<br />
de même ou est devenu méconnaissable (§ 1231).<br />
Avec adjectif, l'Izbornik de Svjatoslav présente une petite série<br />
de formes en jg- et u- : jgërumïnu et uërùmïnu « tirant sur le rouge »,<br />
uzelenï « verdâtre », jgsinjï sur sinjï « bleu foncé » : serait-ce un<br />
développement du g- négatif pour indiquer ce qui n'est pas<br />
exactement ?<br />
Un autre préfixe de composé nominal apparaît dans des conditions<br />
aussi peu claires, paz- :<br />
v. si. paznogutï « sabot d'animal », pol. paznogiec « ongle »,<br />
r. dial. pâznogl' « dernière phalange du doigt » (§ 189) ;<br />
v. r. pazderu « paille, chaume (du lin) », r. pâzder et pazderd,<br />
pol. pdzdzior, etc. (§ 728).<br />
Dans v. si. pazuxa « aisselle », r. pdzuxa, etc., la forme pazn'est<br />
attestée que par slov. pâzduxa ; comme pour pol. pazur,<br />
tch. pazour de paznogutï (§ 1132), où paz- est éliminé comme<br />
préfixe, on peut admettre une forme remaniée par rattachement<br />
à un thème paz- qui est celui de paziti «ajuster» (§ 783), et<br />
substitution à -duxa du suffixe -uxa (§ 1155).<br />
Cette forme paz- paraît être en rapport avec le thème pozd- de<br />
v. si. pozdë «tard» (§ 1001) et avec celui de la préposition lit.<br />
pàs « auprès de », lat. post « après » et « derrière », le sens « derrière »<br />
convenant bien aux exemples slaves.<br />
D'autres cas d'opposition entre un préfixe et sa forme renforcée<br />
de composé nominal ont sûrement existé en slave. Avec raz-,<br />
l'accent de v. si. razumu «discernement» (§ 760), r. rdzum, s.-cr.<br />
ràzum, peut être celui d'un postverbal (§ 829), et l'on a pol. et<br />
tch. rozum avec roz- de *ârz-, mais le slovaque présente des formes<br />
en rdz- qui feraient supposer *ârz- avec allongement (§ 70) :<br />
rdzcestie pour tch. rozcesti « carrefour », râztoka pour tch. roztok<br />
(§ 726), et rd(z)socha qui se rencontre jusqu'en tchèque dialectal<br />
pour rozsocha « enfourchure » (§ 740).<br />
De vûz-, on doit trouver une forme longue vgz-, comme lit. ûz-,<br />
dans l'adverbé vysprï « en haut » (§ 985).
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 765<br />
§ 1224. Préfixes de composés nominaux en baltique. — Le<br />
lituanien a pô- comme si. pa- : pôdukrê « belle-fille », pôsûnis<br />
« beau-fils », pôbrolis « demi-frère » sur l'hypocoristique brôlis<br />
(§ 198), pôgimis « arrière-faix » sur gimti « naître ».<br />
Il a prô- comme si. pra- : prôtêvis « aïeul » sur tëvas « père »,<br />
prôpernai « il y a deux ans » sur pérnai « l'an passé » comme gr.<br />
•npomépvai, et v. pr. prâbutskas « éternel » sur *prâ-bûti-, du verbe<br />
lit. prabûti « demeurer », r. probyt'.<br />
Il a sdn- comme si. sç- : sândora « concorde » sur su-derëti<br />
«s'accorder», sdmburga «eau sur la glace» sur burgëti «jaillir,<br />
sourdre», su-burgis «confluent», sqnarys «jointure de deux articulations<br />
» sur narys « articulation » de nérli « enfiler, emboîter »<br />
(§ 453), sqspara «poteau d'angle» sur spirti «pousser»; et lette<br />
suôvafdis « homonyme » sur vàrds « nom », v. pr. san-insle « ceinture »<br />
sur *inz- « lier », si. vçz-, çzlu « lien » (§ 1050).<br />
Et lit. samdas « location, bail », skr. samdhâ « convention »,<br />
comme si. sçdu « jugement » (§ 819), ici avec conservation dans un<br />
composé très ancien du -m- devant dentale, comme dans simlas<br />
« cent » (§ 41), de sam- qui répond à skr. sam-, av. ham- « ensemble »,<br />
gr. apia (§ 83).<br />
On a également lit. prie- en regard de prië préposition et pripréverbe<br />
: prielipa « appentis », de pri-lipti « être accolé », priegalvis<br />
« oreiller » de prië galvës « à la tête », priekalas « enclume » de pri- et<br />
kâlti « forger » (§ 530), etc. ; nûo- en regard de nu- préverbe (§ 643) ;<br />
et ûz- en regard de uz- (§ 985).<br />
§ 1225. Composés à premier terme verbal. — Ce sont des composés<br />
« progressifs », le second terme dépendant du premier :<br />
en grec àpxé-xaxoç « qui commence le mot, source du mal »,<br />
SXXS-^TMV « traîne-tunique », tpepé-oixoç « porte-maison », nomade<br />
ou escargot. La voyelle de liaison peut être -o-, comme dans les<br />
composés à premier terme nominal : çuyô-jxaxoç « qui fuit le<br />
combat », et tous les composés en
766 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
Ce type de composés est ancien, et la forme réduite du thème<br />
verbal devait le rendre fréquemment peu clair et amener sa<br />
disparition. C'est très hypothétiquement qu'on peut penser à le<br />
retrouver dans v. si. jçëïmy « orge » (§ 185) et dans v. pol. jabrzqd<br />
« sarment » (§ 171) ; dans laskrûdu (v. si. laskrudï «gourmandise»),<br />
en slavon laskosrudù (§ 12), il n'est pas sûr que le thème las-<br />
(§ 787) ait été proprement verbal. Une forme plus récente est tch.<br />
neznaboh « athée », s.-cr. neznàbozac « païen, idolâtre ».<br />
Mais le type s'est continué sous des formes plus viables. D'une<br />
part, comme en grec, avec voyelle -o- de liaison : Ijubonistï cpiÀo-<br />
7TTCO/OÇ, etc. (§ 1213), calquant le grec, et Ijubocïstije (Gr. Naz.,<br />
Pand. Ant.) tpiXcmjiia pour le slavon ëïstoljubije, r. cestoljûbie<br />
« ambition », et pour v. si. cçdoljubu tpiXoirsxvoç, etc. De même :<br />
nenavisioclovëëije (Gr. Naz.) j!ucrav6pG>TOa pour le slavon ëlovëkonenavistïnu,<br />
r. ëelovekonenavistnyj ;<br />
nezaimorëkanije (Athan.) « langage sans frein, àGupoyÂcoTTia »,<br />
avec zaimo- de zajçti usta « fermer la bouche » ;<br />
prëstçpoklçtije « transgression de serment, parjure » qui doit<br />
répondre à une transposition en composé de TCapàêaaiç ôpxou ;<br />
slavon iskusomçzïna « (femme) qui connaît l'homme ».<br />
Si le type s'est développé dans la langue savante à l'imitation<br />
du grec, il existait dans la langue réelle, et on le trouve dans des<br />
formes populaires comme r. vertoprâx « évaporé, étourdi » (« tournepoussière<br />
»), slov. vrtoglàv et s.-cr. vrtàglav « qui fait tourner la<br />
tête », « vertigineux » et « étourdi » ; pol. pasorzyt « parasite »<br />
(§ 1227), v. tch. pasorit et fitopas (§ 783) ; s.-cr. sûnovrât «cassecou»<br />
(§ 770).<br />
Mais le type productif est avec voyelle -i- de liaison :<br />
r. vertigolova « étourdi », boligolôv « ciguë », derzilôd'ja « rémora »<br />
(poisson) ;<br />
v. pol. drapirzyt « doigt du milieu » sur drapac « gratter » et<br />
rzyc (§ 1171), grzejskarb « chauffe-trésor, avare» et mod. krçciwqs<br />
« tortille-moustache, paresseux », odrwiswiat « fourbe » sur odrwic<br />
« duper » ;<br />
tch. pudivitr « chasse-vent, écervelé », vydriduch « écorche-âme,<br />
écorcheur, usurier » ;<br />
s.-cr. kàzipût « montre-chemin, poteau indicateur », et kàziprst<br />
« doigt index », pàlikuca « brûle-maison, incendiaire ». Etc.<br />
Ces composés à voyelle -i- apparaissent dès le vieux slave dans<br />
les noms de personnes : Rostislavu (Vie de Méthode), v. r. Vladislavu,<br />
Volodislavû, etc. (§ 1230). La forme -i- est celle de l'impératif, et<br />
le tchèque tluëhuba « grand bavard », sur tlouci hubou « piler avec<br />
la bouche, jacasser », présente tluë qui est l'impératif de tlouci en<br />
tchèque parlé (§ 355). Mais ce n'est qu'une forme de thème verbal
[§ 1212] PREMIER TERME DES COMPOSÉS 767<br />
commode pour la composition, de même qu'en français « porte »<br />
dans « porte-plume », et de même qu'en grec -ci- des abstraits<br />
verbaux en -cuç, ainsi Tep^î-[j.6poToç « qui réjouit les mortels », sur<br />
TspTTo « je réjouis » et rsp^iç, avec extension à èXxecn-7tsTcXoç en<br />
regard de SXXS-X'ITCOV. En slave, la base en peut être simplement<br />
dans l'élément thématique -i- des verbes en -iti, Rosti- (Rasti-)<br />
comme rastiti « faire croître ». Mais l'interprétation comme forme<br />
d'impératif doit être ancienne, et c'est un impératif qu'on a dans<br />
le slavon et vieux-russe Daz(d)ïbogu, nom de divinité, v. pol.<br />
Dadzbôg, nom de personne, d'ailleurs sans qu'on connaisse l'interprétation<br />
exacte du mot.
CHAPITRE XLI<br />
LA COMPOSITION (suite)<br />
\<br />
§ 1226. Forme du Second terme. — La forme est des plus<br />
libres, et l'étude des finales flexionnelles et des suffixes appelle<br />
celle des formes composées : vodonosï (§ 717), bogocïtïcî (§ 834),<br />
bogoborije (§ 927), dobrorodïstvo (§ 938), etc.<br />
Sans dérivation, le second terme peut être le substantif simple :<br />
vinogradu « vignoble », lixoklçtva « faux serment », vïsevladyka<br />
« maître-, de tout», malomostï «infirme» (§ 170), bogomati «mère<br />
de Dieu », etc.<br />
Ce peut être l'adjectif simple : bogomçdru Osocrocpoç et cëlomçdrù<br />
omppcov (Ham.), slavoradu SoÇoxocpyjç (Pand. Ant.), svçtoiëpû<br />
ÎEPO7IPS7RIJÇ (J. Ex., Pand. Ant.), slavon zutoxytru XOCXOTSXVOÇ,<br />
vûzlysu «chauve sur le devant, àvacpâXavfoç », r. vzlysyj (§ 801).<br />
Mais l'adjectif qu'on trouve au second terme d'un type productif<br />
de composés est un adjectif particulier : c'est la forme adjectivale<br />
du composé « possessif »<br />
§ 1227. Les composés possessifs. — Le français a des juxtaposés<br />
qui indiquent qu'on possède une qualité : « rouge-gorge » est<br />
l'oiseau a gorge rouge. Les langues indo-européennes avaient des<br />
composés dont le substantif second terme devenait adjectif à trois<br />
genres : gr. po§o-8àxiroXoç « aux doigts de rose », fém. -oç, neutre<br />
-ov, sur masc. SàxToXoç « doigt », crxXTjpo-xàpStoç « au cœur dur »<br />
sur fém. xapSia « cœur » : lat. ahêno-barbus « à barbe, barba, de<br />
bronze ». En slave, ce type de composés est très développé. Voici<br />
une liste de formes en vieux slave et en slavon, longue, bien<br />
qu'incomplète :<br />
anâelû : slavon ravïnoangeîu (et *Ham. 26119) iaâyysXoç ;<br />
bedro : moyen-bulg. velikobedrû « aux grandes cuisses » ;<br />
Bogu : slavon dûvobogû SiOsoç ;<br />
brada : slavon bezbradu « imberbe », dobrobradu sà-Kàytm, gçsto-
[§ 1227] SECOND TERME DES COMPOSÉS 769<br />
bradû SacroTtwywv, ëislo-, dlugo-, rëdo-, skçdo-, r. bezborôdyj,<br />
dolgoborôdyj ;<br />
ëelo : slavon tvrûdoëelu « au front dur » ;<br />
cçdo : inocçdu et jedinoëçdu [xovoysv/jç, bralucedu « neveu »<br />
(§ 1216), slavon dobroëçdû «qui a de bons enfants», r. edinoëâdyj<br />
(et -ëâdnyj, odnoëâdnyj) ;<br />
ëçstï : slavon dobroëqslu « prospère, EÔXU/ÔV », zûloëçstu Suoruyjjç ;<br />
r. zlo(s)ëâstnyj, mais s.-cr. ancien dobràëesl «heureux», mod.<br />
zlàëesl « méchant » et slov. zlôëest, bulg. zloëést « malheureux » ;<br />
dïno : bezdinu «sans fond», fém. bezdïna (§ 1219) et déterminé<br />
bezdïnaja (J. Ex.), gr. TJ M>x>aaoç, « l'abîme » ;<br />
dlaka « poil » ( § 1040) : slavon vlûkodlaku « loup-garou », s.-cr.<br />
vukàdlak, slov. volkodlàk ;<br />
dolu : slavon (xi e s.) suxodolu « vallée sèche », r. suxodôl, adjectif<br />
substantivé ;<br />
drëvo : slavon russe oçlnodrëvyi « d'un seul morceau de bois »<br />
(r. odnoderëvka « maillet ») ;<br />
dusa : krupoduxu (Éphrem, ou krçpo-, § 756) « pusillanime,<br />
oXiyo^u/oç (r. malodûsnyj) ;<br />
glasu : (ne)vëglasu (§ 1225), gromglasu ppovxoçtovoç,<br />
slavon bogoglasu « qui est la voix de Dieu », xudoglasu « à la voix<br />
grêle, ÎGXVÔÇCÙVOÇ », r. bezgolôsyj « aphone » (et gromoglâsnyj) ;<br />
glava : slavon plastoglavu. (§ 1161), dobro-, vele-, duvoje-, suio- ;<br />
vologlavu et volujeglavu fJooxécpaXoç (§ 1215) ; pïsoglavû xuvoxétpaXoç,<br />
tch. psohlavy, s.-cr. psàglav, slov. psoglàv, et pol. psiglôw (§ 1217) ;<br />
slov. triglàv ; r. bezgolôvyj, malo-, mnogogolôvyj et mnoyoglâvyj ;<br />
granï « angle, facette » (§ 1084) : slavon cetveregranu (== ëetvrë-)<br />
TSTpâycovoç (r. mnogogrânnyj « à plusieurs facettes ») ;<br />
griva : moyen-bulg. ëçstogrivu « à la crinière touffue », r.<br />
dolgogrivyj ;<br />
kosa : slavon ëçstokosu Sacriiôpti;, dobrokosu sij7tX6xoqi.oç, rusokosu<br />
^av0oxo[xoç, r. bezkôsyj, s.-cr. zlalàkos ;<br />
krilo : slavon kapïnokrilu xoXsoTrrspoç (§ 1217), sestokrilu<br />
êÇawTspuyoç, velïkrilu et velikokrilu (xeyaXo7tTspuyoç, zlalokrilu %puerô-<br />
•jrrepoç, r. bezkrylyj « aptère », zlatokrylyj ;<br />
lëto : slavon tozdelëtu (§ 1215), trïlëtu « de trois ans » ;<br />
lice, lik- : slavon dlûgoliku « à longue face », dobroliku £Ù7rp67)Xo
770 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
Euch. 43 to 17 ; slavon pûtistenoyu, brûzonogu, tïnûko-,<br />
jedino-, duvoje-, trï-, osmo-, suto- ; et cëlonogovati (Cyr. Jér.)<br />
ôp8o7ra§îjffoa (§ 1228); r. krivonôgij «bancal», ëetveronôyij, stonôg<br />
« mille-pattes », pol. piaskonogi et tch. ploskonohy « aux pieds<br />
plats » ;<br />
nogutï : slavon kljuëatonogûtu xc.jxiowu^ ;<br />
nosu : krunonosu (Ham.) PIV6T(J,T)TOÇ, kukonosû (J. Ex.) « au nez<br />
en croc », slavon Içkonosu àyxuAoppivoç, teslonosû « pélican » (§ 1215),<br />
dlûgo-, dobro-, krivo- ; ploskonosu et tçponosu «au nez camus», r.<br />
ploskonôsyj, tuponôsyj, pol. plaskonos (subst.), tch. tuponosy ;<br />
nravu : dobronravu (Virg.)
[§ 1227] SECOND TERME DES COMPOSÉS 771<br />
soxa : slavon rasoxu. « fourchu », mais également postverbal<br />
(§ 1228) ;<br />
srudïce : milosrûdu (lat. misericors, § 1230), tçzïkosrûdu PapoxocpSioç,<br />
dobrosrudû (Pand. Ant.), vysokosrûdu (Pand. Ant.)<br />
û^7)Xox«pStoç, zestosrudu et slavon zestokosrùdu, laskrudû et slavon<br />
laskosrûdu (§ 1225), usrûdu (§ 1219), adv. vïsesrudï (§ 1201) ;<br />
slavon blagosrûdu sôxàpSioç, druzo- Opaao-, oplazo- cr-rspso- (§ 1215),<br />
Ijuto-, slabo-, xrab(u)ro-; r. bezsérdyj, zestokosérdyj, etc.;<br />
strana : slavon nasestranu, vase- (§ 1215) ;<br />
slruja : slavon zlalostrui xpoaoppooç (r. zololostrûjnyj) ;<br />
sludu : slavon bestudu. « éhonté » (v. si. bestudïnu) ;<br />
susû : slavon dobrosusu EUfj,o«T0oç ; r. medosôs, nom d'oiseau,<br />
molokosôs « blanc-bec », substantifs, sont des postverbaux (§ 799) ;<br />
sija : slavon tïnûkosïi « au cou grêle », kratosii, tvrudo-, zesto- ;<br />
r. dolgoséja, subst. masc. et fém., golo-, tonko- ; s.-cr. dugôvrat,<br />
golà-, krivà-, tvrdo- sur tirât « cou » (§ 770), et voir v. si. vyja ;<br />
tïlo : çtïlû (§ 1223) ;<br />
trupu : moyen-bulg. xudolrupu « au tronc, corps menu » ;<br />
umu : xudoumu « faible d'esprit », slaboumù (Pand. Ant.),<br />
vysokoumu « orgueilleux » (Cosmas 1032, etc.), slavon maloumu ;<br />
r. slaboûmyj, zloûmyj (et -ûmnyj) ;<br />
usta : Zlatoustu « Chrysostome, XpucrécrTo^oç », zestokoustu<br />
(Athan.) CXXTIPOCTTOJXOÇ, slavon veleustu (j.syaX6ffiro[xoç ; r. dvuûstyj,<br />
stoûstyj ;<br />
uxo : slavon ravïnouxu « à oreilles égales », r. bezûxij, kornoûxij<br />
« essorillé » ;<br />
vëku : skorovëku « dont la destinée passe vite » (Hom. Mih.<br />
242 vl 30), slavon srëdovëku (v. si. srëdovëcïnu, § 1213, r. dolyovécnyj)<br />
;<br />
vëra : malovëru oXiyômaxoq ; r. malovér, subst., et bezvér, zlovér,<br />
adj. -vérnyj ;<br />
vlasu : prostovlasu (à7tXo0pi^), slavon gçstovlasu SaaùdpiE,, cesto-,<br />
cruno-, krato-, ruso- ; r. prostovolôsyj, belovolôsyj ;<br />
vruxu : slavon vysokovruxu ôijAXocpoç, duvoje-, trï-, ostro-, suxo-,<br />
zlato-, r. dvuvérxij, zolotovérxij ;<br />
vyja : zestokovyi (Pand. Ant.) sx>.YjpotpâyrfAoç ;<br />
xlûmu : slavon sedmoxlûmu smoc'kocpoç ;<br />
zima : slavon nazimu, ozimu (§ 1219) ;<br />
zlato : moyen-bulg. mûnogozlatu Tcokbyypuaoç, ; r. vsezlatôj est<br />
un juxtaposé de vise et adj. zlatu, zolotôj ;<br />
zçbu : rëdozçbu (J. Ex.), slavon trïzçbu TpioSouç, ostrozçbu ; r.<br />
trezûbyj et subst. trezûb « trident », ostrozûbyj et pol. ostrozçby ;<br />
zruno : slavon ëçstozrunû « aux grains denses », r. malozërnyj ;<br />
zrëlo : slavon russe tonkozerlyi « au goulot étroit, j3pax
772 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
Et les langues slaves présentent beaucoup d'autres formes encore<br />
ainsi :<br />
r. krivobôkij « courbé d'un côté, bok » ; tolstobrjûxij « au gros<br />
ventre, brjûxo » ; ëernogldzyj « aux yeux noirs » (glaz « œil ») ;<br />
krivojazykij « à la langue, jazyk, de travers, qui grasseye » ; zlatokrôvyj<br />
«au toit, krov, d'or » ; dolgopâlyj «aux longs doigts» et<br />
bezpâlyj « sans doigt » sur pdlec « doigt » ( § 835) ; tolstopûzyj « à la<br />
grosse panse, pûzo » (§ 1116); krivorôtyj «à la bouche, rot, de<br />
travers » ; malotélyj « au petit corps, télo » ;<br />
pol. bialorzyt « cul-blanc », pasorzyt « parasite » sur rzyé (§ 1171),<br />
et v. tch. bëlorit, pasorit et ritopas (§ 1225) ;<br />
s.-cr. golbkrak «aux jambes nues» sur krâk (§ 775), zlatàrun<br />
« à la toison d'or » sur rûno, et golàvrat « au cou nu », voir sija.<br />
La facilité de composition apparaît des plus grandes : r. bezsuprûgij«<br />
sans conjoint, suprûg », bezxvôslyj « sans queue, xvost », etc.<br />
Le second terme est le thème nu du substantif ou est ramené à ce<br />
thème : ëçstoopaxu sur opasï. On a -liku, et -licï conservant la forme<br />
de lïce. Sur pleëô « épaule », de *plet-je (§ 1021), le russe fait zlatoplécij,<br />
et avec une fausse alternance zolotoplékij, beloplëkij, comme<br />
le substantif podoplëka sur podopléë'e « doublure sous l'épaule de<br />
la chemise de paysan ».<br />
§ 1228. Second terme verbal. — Si l'adjectif est tiré d'un thème<br />
proprement verbal, on a affaire à un postverbal : ainsi licemëru<br />
«hypocrite» sur mëriti (§ 750), et non sur mëra, et qui d'ailleurs<br />
est traité comme substantif, adj. licemërïnu ; novouku (Pand.<br />
Ant.) v£oxaT7)X7]Toç, slavon neuku, adj., et r. néuk (§ 755), sur<br />
uciti et non sur uku « enseignement » ; slavon pravosçdu « au<br />
jugement juste », qui paraît substantif, et r. pravosûd est« jugement<br />
juste », de pravo sudît' ; velijejadu, krûvojadu (§ 752), et l'on notera<br />
r. sumasbrôd « un extravagant », adj. -sbrodnyj, de s umâ sbrodit'sja<br />
«laisser son esprit vagabonder» (§ 724). Il n'y a d'ailleurs pas de<br />
frontière rigide entre le composé postverbal et le composé possessif,<br />
et rasoxu « fourchu » est en rapport à la fois avec soxa et avec<br />
-sositi (§ 740).<br />
Mais il y a aussi des composés dont le second terme est une forme<br />
fléchie de verbe. Voici une partie de ceux qu'on rencontre en vieux<br />
slave :<br />
blagodariti z'x/v.p iaTs.lv ;<br />
blagosloviti eàXoyeïv, slavosloviti So^oXoyeïv, zulosloviti xaxoXoysïv,<br />
xuloslovesiti (Gr. Naz.) « blasphémer » ;<br />
blagotvoriti xahonoisïv, dobrotvoriti sûspysTsïv, zulotvoriti (xaxonoisïv)<br />
;
[§ 1229] PROBLÈMES SPÉCIAUX 773<br />
blagovoliti sùXoyeïv ;<br />
prëljubodëjati y,oiysbsi\> ;<br />
Ijuboplakati Supr. 31612 TO çtXoravOéç, lu FI,£VOÇ.<br />
Participes passés : novoosvëstenu vEoçcimcrroç, novorozdenu àjçmysvrjç<br />
; rçkotvorjenu -/sipoTroîrjToç, prûvosûtvorjenu 7tpoyovoç ; bogouëenù<br />
et bogonauëenu 6so818otxToç, bogodûxnovenu (Pand. Ant., Athan.)<br />
OeoTïvsociToç ; prùvozïdanu TcpWTOTcXacrroç.<br />
On reconnaît d'une part des calques du grec, d'autre part des<br />
juxtaposés, blagovoliti et blagoizvoliti, etc. (§ 1218), outre les<br />
groupes en bëdïno rendant gr. Suer- comme bëdïno nosimu (Ham.)<br />
SoaêàcTTocxToç, à côté de formes analogues qui ont plus nettement<br />
l'aspect de composés. En slave comme en grec, une partie de ces<br />
formes à second terme verbal peuvent être dérivées de noms,<br />
cëlonogovali (§ 1213) de *cëlonogu comme opOouoSsïv qu'il traduit<br />
de ôp0o7iouç. Le vieux slave présente même orçzenosïstvovati<br />
Sopuçopsïv, plodonosïstvovati xapTioçopsïv.<br />
§ 1229. Composés spéciaux. — Des mots formant couple<br />
peuvent être unis si étroitement qu'ils constituent en français des<br />
juxtaposés : « ses père et mère», «la douce-amère ». Dans plusieurs<br />
langues indo-européennes, ils fournissent un type particulier de<br />
composés qu'on désigne par le terme sanskrit dvandva, parce<br />
que le type est le plus net dans cette langue. Mais on le trouve<br />
également en grec : vu^F-spov « nuit et jour ». Et il est attesté en<br />
slave :<br />
bratusestra « frère et sœur », traité comme duel masculin avec<br />
datif bratusestroma (Ostr.), et dérivé slavon bratûsestrïca, également<br />
duel ; le sanskrit présente de même le duel dans ses composés<br />
dvandva : pitâputraû « père et fils » de pitâ et putrâh ;<br />
vlûkoclovëkû Xuxocv0p
774 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
moyen-bulg. vodosusïnu ûypoxepaoç (^spaoSpo?) « de l'eau et de la<br />
terre ferme, suxo, amphibie ».<br />
Avec des pronoms, on a le juxtaposé v. si. onusï « tel et tel »,<br />
dérivés onusica (§ 881) et onusinu (§ 966).<br />
Dans les langues modernes, le russe a otéc-mât'.<br />
On reconnaît un composé ancien, altéré, dans maluzena TO<br />
àvSpoyuvov « le couple », traité comme duel de même que bralusestra :<br />
dat. mal(u)zenoma Ham. 429x, dérivé malùzenïstvo (Gr. Naz.)<br />
« mariage » et singulatif slavon malùzenïcï ; pol. malzonek « époux »,<br />
v. tch. malien et mod. manzel : on doit restituer *manu-zena<br />
(§ 159), forme antérieure à mçzezenu.<br />
On notera des juxtaposés Kana-Galiléisk- (Euch. 14 a 24 vu Kana-<br />
Galilëiskyxu bracëxù « aux noces de Gana de Galilée ») ; praksuapostolu<br />
« Actes des Apôtres, ïlpàÇeiç TWV KTOXTTOÀWV » (Cosmas<br />
108]2, et o praksë-apostolë 10810). Et des hybrides : zemleleonu<br />
XocfJwaÀéwv « caméléon », Ham. 49127, et bësovarxu §
[§ 1229] PROBLÈMES SPÉCIAUX 775<br />
Les noms de personnes du type r. Vladimir ne sont qu'apparemment<br />
des composés à second terme mirù « paix » (ou « monde »).<br />
Ces composés sont des noms solennels de chefs et des noms de bon<br />
augure hérités de l'indo-européen. Dans les Nuées d'Aristophane,<br />
on voit Strepsiade se disputant avec sa femme sur le nom à donner<br />
à leur fils : elle veut Xanthippos, et lui Phidonidès, elle tenant aux<br />
chevaux, et lui à l'économie,
776 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
comme tch. dial. letoper qui aboutissent à s.-cr. lëptïr « papillon »<br />
par rattachement à lepètati « voleter ».<br />
On peut de même analyser rnezdr(j)a «membrane», nozdri<br />
«narines» (§ 1216), trïbuxu «estomac» (§ 1154); mais potïbëga<br />
« femme répudiée », proprement « fugitive », apparaît dans les<br />
manuscrits vieux-slaves altéré en podubëga, podupëga, parce qu'on<br />
n'y retrouve plus le premier terme i.-e. *potis « maître », skr.<br />
pdtih, gr. Tcôaiç « époux », mot qui, perdu en slave, est bien conservé<br />
en baltique, lit. pàts «époux» et «lui-même» (§ 256), viespaiis<br />
«maître» (§ 170).<br />
Pour pastoruku. « fils d'un premier lit », voir § 35 ; pour prasëurû<br />
« arrière-grand-père », § 1132; pour pazuxa «aisselle», § 1223;<br />
pour paçkû « araignée », § 767.<br />
Dans ë(ï)lovëkû «homme», on reconnaît le second terme vëkû<br />
«âge» (§ 746), mais le premier terme ëïlo- ne s'identifie pas aussi<br />
facilement. C'est une création du slave, à côté de mçzï dont le<br />
baltique a perdu la trace, tandis que le slave perdait lit. vyras,<br />
skr. vîrah, lat. vir, et il est curieux que le mot soit déjà devenu<br />
obscur. On rattache ordinairement le premier terme à ëeljadï<br />
«gens de la maison» (§ 1006), ce qui n'aide guère à expliquer le<br />
sens du composé et ne rend pas compte de la forme ëïlo-. Elle ne<br />
peut pas avoir de rapport avec ëilu «reposé, dispos» (§ 1048),<br />
qui est sur un thème *ëî- d'intonation rude (§ 514), mais elle fait<br />
penser à cëlu « sain, intact » : cela indiquerait que ce mot slave, et<br />
balto-slave, s'il a sûrement subi l'influence du germanique, got.<br />
hails, n'en est pas un simple emprunt (§ 10), mais un correspondant<br />
régulier, et qui a pu en slave posséder à côté de *kail- un degré<br />
réduit *kil-.<br />
Dans maluzena « couple », on doit retrouver mgzï « homme »<br />
soUs sa forme ancienne *manu- (§ 1229). —• L'analyse de skarëdû<br />
«répugnant» en skar-ëdû n'est qu'une possibilité (§ 176).<br />
Y. si. gumïno « aire », r. gumnô, s.-cr. gûmno, etc., ne s'explique<br />
comme dérivé en -ïno qu'en postulant un thème gum- (§ 1180) :<br />
ce doit être plutôt un composé à premier terme ga- « bœuf »<br />
conservé dans govçdo (§ 1002) et à second terme min- de mïne-<br />
« fouler » (§ 457), et l'on peut supposer un composé possessif<br />
*gumïnû à forme neutre fixée, du « foulé de bœuf ».<br />
Dans v. si. besëda « entretien, conversation, parole », r. beséda,<br />
s.-cr. bèsjeda, on croit apercevoir une forme -sëda du thème sëd-<br />
« s'asseoir », et comme premier terme la préposition bez- « sans » :<br />
son sens plus ancien est celui de skr. bahih « séparément », et<br />
il se conserve en vieux slave dans une opposition comme bez nasu...<br />
sû nami Supr. 5528 « à l'écart de nous, en notre absence, «7Ï6VTSÇ, ...<br />
avec nous », ce qui peut autoriser à interpréter besëda par « séance,<br />
entretien à part ».
[§ 1229] PROBLÈMES SPÉCIAUX 777<br />
On ne peut que soupçonner d'anciens composés dans celjustï<br />
«mâchoire» avec second terme -ustï de usta (§ 1180); dans<br />
jastrçbu « autour » et dans v. pol. jabrzqd « sarment » (§ 171), dans<br />
jçcïmy « orge » (§ 185), dans l'adjectif sverëpu « sauvage », r. svirépyj<br />
« féroce », tch. sverëpîj.<br />
Le vieux-slave drïkolï (dru-) « bâton, gourdin » a l'aspect, en<br />
supposant drukolï comme forme initiale, d'un composé du thème<br />
ancien dru- « bois » de druva (§ 159) et de la racine verbale kol- au<br />
sens de «fendre» (§ 530), donc d'un mot signifiant à l'origine<br />
« mailloche » (pour taper sur le coin) ; le vieux-tchèque drkolna<br />
paraît attester drï-, mais il doit s'agir de la substitution à drûde<br />
l'initiale mouillée de drevo (§ 191) dans un composé qui était<br />
encore analysable.<br />
L'explication de r. ôsokôr' « peuplier noir » par « à écorce, kora,<br />
de tremble, osa» (§ 1126) est plausible; celle de v. si. vrûtûpu<br />
«caverne» par «tourbillon d'eau» et lit. ùpé (§ 1111) est plus<br />
risquée.<br />
§ 1232. Accentuation des composés. — Dans les composés<br />
dont les deux termes sont des noms, l'accent porte le plus souvent<br />
sur l'initiale du second terme :<br />
r. suxodôl, vodovorôt, voevôda, bogobôrec, psalmopévec ;<br />
s.-cr. bogomoljac, drvàdjelja, knjigànosa.<br />
Mais le russe indique une opposition entre les postverbaux<br />
masculins à accent sur le second terme et les féminins en -ï à recul<br />
d'accent sur l'initiale (§ 720) : listopdd, masc., et listopad', fém.,<br />
létopis', zivopis'. L'accent initial est celui du type en -i- oxyton<br />
mobile (§ 218).<br />
En serbo-croate, l'accent sur l'initiale apparaît également avec<br />
les masculins à second terme monosyllabique : blàgoslôv, lîstopâd<br />
(qu'on trouve aussi féminins), kolomâz « graisse de voiture »,<br />
kôlovrât «rouet» et slov. kolôvrat (§ 93) en regard de r. kolovorôt<br />
(§ 770).<br />
Avec les composés à préfixe nominal, l'accent est volontiers sur<br />
l'initiale : r. sùmorok, sûdoroga, s.-cr. susjed, suljeska ; mais on<br />
trouve aussi r. susék, et l'opposition entre les masculins à accent<br />
sur le second terme et les féminins en -ï à accent initial : suvôj,<br />
masc., et sûvod', fém. Sont à part les anciens composés à thème<br />
monosyllabique, qui sont oxytons : sçdu, r. sud, gén. sudd, s.-cr.<br />
sûd, gén. sûda ; çda, r. udd.<br />
Les composés à premier terme verbal en forme d'impératif<br />
ont en russe l'accent sur le -i- de liaison : Vladimir, vertigolova ;<br />
ou un accent double : sorvigolovd « garnement, brise-tout »,<br />
littéralement « arrache-tête » sur sorvdt' « arracher » ; on a aussi
778 LA COMPOSITION ]§ 1212]<br />
avec finale d'adjectif substantivé boligolôv. En serbo-croate,<br />
l'accent (ancien) est sur -i- : kràdikesa « vole-bourse, pickpocket »,<br />
vùcibatina « traîne-bâton, vaurien » ; on trouve aussi dans un<br />
composé long izjedipàgaca « dévore-galette, goinfre », et avec<br />
intonation rude du thème verbal svrzibrâda « qui renonce à la<br />
barbe, la rase », à deux accents, sur svrgnuli « rejeter ».<br />
A côté des composés possessifs du type poSoSdbo-uXoç « aux doigts<br />
de rose » indiquant une qualité, le grec a des composés indiquant<br />
l'action verbale, et il oppose dans le premier cas l'accent reculant<br />
le plus loin qu'il peut et dans le second cas l'accent sur le second<br />
terme : 7roX6-Xoyoç « dont il est beaucoup parlé » et TCoXu-Xôyoç « qui<br />
parle beaucoup ». En slave, où les composés à sens verbal sont le<br />
plus souvent sufïixaux, r. bogonôsec Oeoçopoç « porte-Dieu »,<br />
bogorôdica OEOTOXOÇ, l'accent est dans les deux cas sur le second<br />
terme : bogoslôv OsoXoyoç, et régulièrement en regard des composés<br />
possessifs du grec, malovér ôXtYOTTKTTOÇ, Zlatoûst et zlatoûsiyj.<br />
§ 1233. Les composés en baltique. — Voici une liste de composés<br />
à premier terme nominal dans les textes vieux-prussiens, pris<br />
parmi les plus clairs. Avec voyelle de liaison -a- :<br />
buccareisis « noix de hêtre, faîne », avec bucus « hêtre » (de pol.<br />
buk) et lit. riesas « noix », si. orëxu ;<br />
bucawarne « corneille du hêtre », avec warne « corneille », v. si.<br />
vrana ;<br />
buttarikia- « maître de maison », avec buttan « maison » et rikijs<br />
« maître » ;<br />
buttalawas « père de famille », avec tawas « père » ;<br />
dagagaydis « froment d'été », sur dagis « été » et gaydis « froment » ;<br />
crauyawirps « saigneur », sur krauyo « sang » et po-wisrpt« lâcher » ;<br />
laucagerto « poule des champs, perdrix », de lauka- « champ » et<br />
gerîo « poule » ;<br />
malunakelan « roue du moulin », de malunis « moulin » et kelan<br />
« roue » ;<br />
mangason « fils de putain », de manga et souns « fils » ;<br />
piwamaltan « malt de bière », de piwis « bière » et maltan ;<br />
labbaseglsna « bonne action », de labs « bon » et segisna « action » ;<br />
naunagimta- « nouveau-né » de nauns « nouveau » et yemton<br />
« enfanter ». Etc.<br />
Avec voyelle -i- ou -u- :<br />
dantimax « gencive », sur dantis « dent » et lit. mdkas « poche » ;<br />
panustaclan «briquet», sur panno «feu» de *panu (§ 176) et<br />
*slakla- « fer, acier » du germanique *stahla-, ail. Stahl.<br />
Sans voyelle de liaison :<br />
sasintinklo « filet à lièvre », de sasins « lièvre » et lit. liriklas<br />
« filet » ;
[§ 1229] PROBLÈMES SPÉCIAUX 779<br />
waispatti- « femme, épouse », comme lit. viëspati (§ 155).<br />
La voyelle de liaison manque dans d'autres cas encore, et dans<br />
butsargs « gardien de maison », de buttan et lit. sârgas « gardien ».<br />
En lituanien, on trouve le -a- de liaison :<br />
geradëjas «bienfaiteur» et piktadëjas «malfaiteur», sur gëras<br />
« bon », piklas « mauvais » ;<br />
mielasirdingas « compatissant », sur mielas « cher » et sirdis<br />
« cœur », comme si. milosrudu ;<br />
gatvâraistis « bandeau de tête », sur galvà et raïstis « bandeau ».<br />
Mais couramment les composés sont sans voyelle de liaison :<br />
dukskalis « orfèvre », sur duksas « or » et kâlti « forger » ;<br />
kiaûlstaldis « étable à porcs » sur kiaûlè « porc » et staîdas<br />
« étable » ;<br />
sûdvabatis «bousier,», sur sùdas «excrément» et vâbalas «scarabée<br />
» ;<br />
pëdsakas « recherche de piste » sur pèdà « pied, trace de pas »<br />
(§ 175) et sèkti « suivre » (§ 733) ;<br />
piëtvakarinis « sud-ouest », sur piëtai, plur., « midi » et vakaraî<br />
« ouest » ;<br />
didgalvis « à grosse tête à, sur didis « grand ».<br />
De même en lette :<br />
rùokpèlnis « travailleur manuel », sur rùoka « main » et peins<br />
« gain, salaire », comme lit. rankpelnys ;<br />
labdaris « bienfaiteur », sur labs « bon » et darît « faire » ;<br />
dziffnJkalis « tailleur de meules » sur dzifnus « meule », plur.<br />
(§ 204), et kaïl « frapper, forger ».<br />
Cette absence de voyelle de liaison doit s'expliquer dans<br />
l'ensemble par un abrègement de mot long, et dans les formations<br />
récentes par une imitation des composés de l'allemand. Le vieuxprussien,<br />
bien que ses composés calquent souvent les composésjuxtaposés<br />
de l'allemand, garde ordinairement le -a- de liaison,<br />
et il répond à Hausvater par buttatawas (et buttas taws avec gén.<br />
buttas) — mais aussi à Haushatter par butsargs.<br />
Pour une petite part, il doit s'agir de la conservation d'un<br />
état ancien : à l'origine, les premiers termes athématiques gardaient<br />
leur forme athématique, et lit. viëspats « seigneur », v. pr. waispatti-<br />
« épouse », continue skr. viçpdtih, av. vïspaitis « chef du groupe<br />
familial », sur i.-e. *wik-, et *waik- du dérivé gr. (F)oïx.oç,. Dans<br />
v. pr. sasintinklo, le premier terme sasin- « lièvre » est de même<br />
un athématique (§ 183).<br />
De cet état, le slave conserve le souvenir dans *pol- de v. si.<br />
ptadïne, vëglasu de vëd-gtasu, etc. (§ 1216). Les préfixes nominaux<br />
du slave, pa-, sç-, etc. ont leurs correspondants exacts en baltique<br />
(§ 1224).
Cet index ne signale que les mots<br />
Les chiffres renvoient aux pages.<br />
ablanï, 602.<br />
ablûko, 391, 537.<br />
agnçdû, 492.<br />
agoda, 491.<br />
aje, 389, 512.<br />
*albandï, 491.<br />
asterù, 645.<br />
asutî, 725.<br />
avorû, 648.<br />
azîno, 88, 592.<br />
bakl(j)ada, slov., 491.<br />
baliti, tch., 192.<br />
baran, r., 617.<br />
baiogû, 496.<br />
bedra, 641.<br />
besëda, 776.<br />
bestudûkû, 304.<br />
bezdùna, 753.<br />
bezoëïstvo, 406.<br />
bezputica, r., 753.<br />
blana, 587.<br />
blaznu, 581.<br />
blazenije, 395.<br />
blizna, 587.<br />
bliznïcl, 297.<br />
blizokù, 543.<br />
bodïljl, 562.<br />
bolestl, 374.<br />
'bolèdl, 492.<br />
boraviti, s.-cr., 257.<br />
borona, r., 159, 586.<br />
bort', r., 693.<br />
boiurù, 656.<br />
brakû, 535.<br />
branjug, s.-er., 500.<br />
brazda, 490.<br />
brazgotina, s.-cr., 371.<br />
brëgù, 490.<br />
INDEX<br />
qui ont fait l'objet d'un commentaire.<br />
brlna, 586.<br />
brjuxo, r., 662.<br />
brutu, 680.<br />
brus-, 108.<br />
brûzda, 247.<br />
brùzëja, 529.<br />
bunili, s.-cr., 126.<br />
burja, 520.<br />
but-, 687.<br />
bùiela, 554.<br />
bykû, 536.<br />
byll, 25.<br />
bystru, 633.<br />
cep', r., 97.<br />
cëlu, 776.<br />
cëpiti, 97.<br />
cësta, 685.<br />
cëvî, 30.<br />
cieéla, pol., 561.<br />
ëaplja, 520.<br />
êari, 178.<br />
êasù, 201.<br />
celjadî, 492.<br />
ëeljustl, 704.'<br />
âemerû, 645.<br />
•ôernû, 580.<br />
'ieslï, 558.<br />
âesnu, 579.<br />
cçstî, 693.<br />
êila, tch., 551.<br />
'iîlnù, 581.<br />
êlovëkù, 776.<br />
émouditi, tch., 133.<br />
ârëljust-, 594.<br />
ârëmiga, 498.<br />
ârësla, 552.<br />
érëslù, 550.<br />
érëvo, 709.
782 INDEX<br />
irûstvû, 706.<br />
6uch, tch., 661.<br />
éudo, 489.<br />
derevnja, r., 608.<br />
dert', T., 689.<br />
desiti, 227.<br />
detva, r., 711.<br />
deiela, slov., 555.<br />
dësiti, tch., 180.<br />
dçtelû, 554.<br />
dikij, r., 435.<br />
divii, 435.<br />
dlaka, 538.<br />
dlanï, 600.<br />
dlaïiti, tch., 189.<br />
domov, tch., 716.<br />
doToga, r., 160.<br />
dçbrava, 712.<br />
dçbû, 138.<br />
draka, r., 538.<br />
drazest, s.-cr., 376.<br />
drçselù, 554.<br />
drïkolï, 777.<br />
drozdijç, 526.<br />
drugu, 757.<br />
drûmù, 250, 571.<br />
drûzûku, 461.<br />
duéëjë, tch., 530.<br />
dumat', T., 124.<br />
durit', r., 636.<br />
duzdevu, 439.<br />
duzg, pol., 139.<br />
dûgna, 587.<br />
dùna, 587.<br />
dûzdï, 775.<br />
dvekali, slov., 188.<br />
dvoril, 87.<br />
dgra, r., 46.<br />
fal'sivgi, r., 483.<br />
frigati, s.-cr., 212.<br />
gadati, 175.<br />
gaditi, 174.<br />
-galiti, 192.<br />
gananije, 175.<br />
gatati, 175.<br />
gatï, 693.<br />
-gaviti, 179.<br />
gqsior, pol., 647.<br />
glasû, 659.<br />
glava, 709.<br />
glavar', r., 318.<br />
glavînja, 605.<br />
gleznù, 582.<br />
glënû, 581.<br />
glQbokù, 462.<br />
glumû, 571.<br />
gluxû, 661.<br />
gnëvù, 105, 708.<br />
gnîsî, gnusû, 31.<br />
godiste, s.-cr., 427.<br />
godiii, 75.<br />
gogolï, 22.<br />
golëmù, 569.<br />
golënl, 622.<br />
gonetati, s.-cr., 252.<br />
gorazdû, 489.<br />
gorje, 512.<br />
gor(j)uxa, 674.<br />
gospodarjï, 317.<br />
goslinïcî, 298.<br />
govçdo, 490.<br />
gramada, 491.<br />
gran-, 600.<br />
grîmëzdl, 512.<br />
grobijç, 25, 729.<br />
groblja, 514.<br />
grobù, 38, 279.<br />
groza, 59.<br />
grçstokû, 462.<br />
grùnïcï, 299.<br />
gumlno, 594, 776.<br />
guviti se, s.-cr., 179.<br />
gvorû, 70.<br />
ggd-, 171.<br />
haniti, tch., 194.<br />
heslo, tch., 553.<br />
hiniti, s.-cr., 224, 587<br />
hlepjeti, s.-cr., 237.<br />
hman, slov., 191.<br />
hoduji, tch., 527.<br />
igra, igrl, 641.<br />
igûla, 557.<br />
ikra, 641.<br />
imela, 555.<br />
inoSî, 544.<br />
iskra, 642.<br />
islina, 358.<br />
istû, 440, 677.<br />
izdrçil, 30, 726.<br />
izëkrù, 635.<br />
izçëtl(nù), 433.<br />
izgrëbi, 27.<br />
jaôaja, 529.<br />
jadro, -ra, 640.<br />
jadû, 184.<br />
jadûku, 460.
jagla, 551.<br />
jalovû, 440.<br />
jara, jarl, 643.<br />
jarigù, 498.<br />
jarina, 361.<br />
jarîmû, 571.<br />
jaru, 634.<br />
jaskinia, pol., 387.<br />
jato, 684.<br />
jatûxulïnica, 350.<br />
jazii, 180, 646.<br />
jazva, 93.<br />
jazvû, 708.<br />
jelilo, 699.<br />
jestî, 692.<br />
jeëëba, tch., 379.<br />
jeste, 433.<br />
jezerû, 645.<br />
jçilnënù, 456.<br />
jçdë, 259, 490.<br />
jçdrû, 633.<br />
jçira, 640.<br />
jçzëstivu, 476, 704.<br />
jizliutf, tch., 482, 504.<br />
junïcl, 297.<br />
jutit', T., 118.<br />
(j)utro, -ëi, 432, 640.<br />
juxa, 127.<br />
kaczor, pol., 647.<br />
kaliii, 192.<br />
kapl, 26.<br />
kast', po-, T., 695.<br />
kasïll, 562.<br />
kaverzy, r., 757.<br />
kiéma, s.-cr., 572.<br />
kimati, slov., 213.<br />
kist', r., 694.<br />
kisen', r., 622.<br />
klada, 163.<br />
kladivo, 713.<br />
klasù, 659.<br />
klëstiti, 94.<br />
klëtl, 693.<br />
klçpyël, 671.<br />
klinû, 239, 582.<br />
kljuéî, kljuka, 538.<br />
kljuditi, 120.<br />
klgbûko, 391.<br />
klûka, 605.<br />
knieja, pol-, 530.<br />
kobieta, pol., 697.<br />
kobl, 31, 79.<br />
kobyla, 565.<br />
kochai, pol., 725.<br />
INDEX 783<br />
kocanû, 616.<br />
kolail, 323.<br />
koleja, r., 529.<br />
kolëno, 622.<br />
kolimogû, 496.<br />
kolouch, tch., 673.<br />
komarû, 652.<br />
komolyj, r., 564.<br />
kopali, 26, 61.<br />
kopije, 400.<br />
koprena, s.-cr., 623.<br />
kopru, 77, 637.<br />
korak-, 164.<br />
korîcî, 299.<br />
kornut', v., 250.<br />
korylo, 700.<br />
korzno, T., 592.<br />
koster', T., 644.<br />
kosu, 659.<br />
kosvennyj, r., 620.<br />
kosara, 653.<br />
kosuta, 702.<br />
kolêi, tch., 331.<br />
koumati, tch., 124.<br />
kovttegù, 497.<br />
kovrigù, 498.<br />
koza, 87.<br />
*kçdru, 636.<br />
kçpina, 145.<br />
kçsù, 659, 660.<br />
krada, 185.<br />
kraina, 595.<br />
krakû, 163.<br />
krasia, 685.<br />
krava, 709.<br />
kreljut, s.-cr., 702.<br />
kremen-, kresati, 227.<br />
kreslo, r., 553.<br />
krësù, 659.<br />
krçtati, 131.<br />
krina, 587.<br />
kromë, 82.<br />
kropili, 77.<br />
kropiva, 715.<br />
krosno, 584.<br />
krosnja, 604.<br />
krçgLu, 546.<br />
krupa, 114.<br />
krûâîma, 572, 698.<br />
krùkyga, 498.<br />
krûma, 251.<br />
krùmitl, 251.<br />
krûnû, 577.<br />
krûs(î)nja, 605.<br />
krùtoryja, krûtû, 682.
784 INDEX<br />
krûvavu, 473.<br />
krùx-, 112.<br />
kudelja, r., 563, 636.<br />
kudesnik, T., 120.<br />
kuk-, 116.<br />
kupiti, 114.<br />
kuru, 637.<br />
kurva, 711.<br />
kat'ja, r., 719.<br />
kutû, 141.<br />
kùkùnj-, 605.<br />
k(ù)lëi, 530.<br />
•kùlîjl, 525.<br />
kùr(l)6ii, 330.<br />
*kûrxû, 250.<br />
kûznî, 71.<br />
kvâriti, 196.<br />
kyprù, 634.<br />
iach, pol., 663.<br />
lagodili, 185, 491.<br />
laino, 595.<br />
landgga, pol., 498.<br />
lanita, 699.<br />
lata, 687.<br />
lemeëi, ~668.<br />
leiaga, 501.<br />
"lezlnji, 612.<br />
lënû, 577.<br />
Utï, 693.<br />
lëto, 684.<br />
lëxa, 93.<br />
libëvù, 716.<br />
liczman p,oI., 720.<br />
liczyé, pol., 211.<br />
iisiù, 681.<br />
Usai, 531.<br />
lïsiï, 696.<br />
*lïtvîci, 299.<br />
Ijutù, 677.<br />
lodika, s.-cr., 543.<br />
lokanj, s.-cr., 619.<br />
lono, 584-.<br />
lopata, 696.<br />
lopta, T., 697.<br />
losï, 432, 665.<br />
lovîéii, 330.<br />
Içgù, 140.<br />
*Içkno, 583.<br />
luêiti sg, 116.<br />
lucl, 116, 509.<br />
ludù, 145.<br />
lusk-, 122.<br />
luspa, 632.<br />
luza, 521.<br />
lystù, 681.<br />
tgsû, 221.<br />
madez, 505.<br />
majati, 191.<br />
maliX, 545.<br />
malùzena, 774, 776<br />
mamiti, 191.<br />
man(i), s.-cr., 191.<br />
maral', r., 196.<br />
mariti, 196.<br />
marsk, pol., 153.<br />
mastexa, 668.<br />
malorù, 648.<br />
meëïka, 353.<br />
meledit', r., 113.<br />
metit', r., 95.<br />
metla, 550.<br />
mëlï, mëlû, 31.<br />
mësto, 684.<br />
mëxgrï, 655.<br />
mëzga, 495.<br />
mçïdra, mçz-, 642.<br />
milosrûdu, 774.<br />
mirû, 637.<br />
mit-, 208.<br />
mlgla, 551.<br />
mîstï, 690.<br />
mladïnû, 455.<br />
mlaka, 538.<br />
mldlo, tch., 684.<br />
mlatù, 156, 680.<br />
mlëvo, 709.<br />
mtyn, pol., 626.<br />
moâfvjar-, 652.<br />
monisto, 704.<br />
mora, 47.<br />
mostû, 74, 680.<br />
motovilo, 413.<br />
molgka, 537.<br />
mçdrù, 634.<br />
mraélnù, 590.<br />
mrcha, tch., 664.<br />
mrëia, 521.<br />
mrva, tch., 710.<br />
mulit', T., 125.<br />
muxa, 127.<br />
muzga, 495.<br />
mgsli, 558.<br />
nada, s.-cr., 259.<br />
naglù, 546.<br />
nagraditi, 159.<br />
nakaziti, 600.<br />
napîda, 493.<br />
naprasnu, 577.
neprijaznï, 774.<br />
nepûstî, 31.<br />
nerest, r., 680.<br />
nereto, r., 697.<br />
netçz-, 511.<br />
nelopyrï, 655, 775.<br />
nevësty, 352.<br />
nezitû, 679.<br />
N&mïcî, 298.<br />
nistëj, tch., 529.<br />
nistï, 433.<br />
nitï, 693.<br />
noSïl&gu, 751.<br />
noga, 88.<br />
nozdri, 664.<br />
nravu, 161, 708.<br />
obadu, 61, 106.<br />
obawiaé siç, pol., 199.<br />
obazdlnikù, 308.<br />
obedï, 27.<br />
obflty, pol., 58.<br />
obilû, 545.<br />
obimo, 570.<br />
obldo, 258.<br />
obllù, 168.<br />
oblastinû, 442.<br />
oblasl, 432.<br />
obrgcî, 509.<br />
obrzask, pol., 98.<br />
ocen', r., 728.<br />
odiva, s.-cr., 716.<br />
odrû, 637.<br />
ogarû, 652.<br />
ognï; 511.<br />
okno, 583.<br />
okolije, 394.<br />
okrisïll, 562.<br />
okun', r., 624.<br />
olovo, 716.<br />
oman, r., 191.<br />
oplosmo, 570.<br />
opoka, 64.<br />
opricï, 726.<br />
oprisnù, 577.<br />
or(j)l, 510.<br />
orçdije, 400.<br />
orgzije, 400.<br />
osika, 542.<br />
oslçdî, 491.<br />
osoka, 543.<br />
osor, s.-cr., 48.<br />
osoryja, 57.<br />
osiï, 691.<br />
ostînû, 590.<br />
INDEX 785<br />
ostrogù, 154, 497.<br />
osutû, 699.<br />
ostasû, 179.<br />
otrokû, 39.<br />
ovadû, 61.<br />
ovinu, 442.<br />
ovïca, 343, 352.<br />
ovoste, 513.<br />
oxvota, r., 60.<br />
*çgrl, 643.<br />
çgûlû, 556.<br />
Qrodïi, 763.<br />
çsobi, 764.<br />
Qtllu, 763.<br />
QtrI, 636.<br />
çzgû, 495.<br />
pacholç, pol., 758.<br />
paciep, pol., 32.<br />
pamçtûkù, 352.<br />
paçku, -gcina, 144, 360.<br />
*paportï, 694.<br />
paprutl, 690.<br />
para, 178.<br />
parobùkù, 758.<br />
paras, r., 722.<br />
pasmo, 573.<br />
pasrùbû, 758.<br />
pasluxù, 672.<br />
pastyrl, 654.<br />
pasztuga, pol., 500.<br />
pazderu, 764.<br />
paznogùtî, 764.<br />
pazur, pol., 656.<br />
pazuxa, 674, 764.<br />
peh(ota), slov., 99.<br />
pekar', r., 320.<br />
pelena, 621.<br />
pelesû, 660.<br />
peljati, slov., 230.<br />
pepelù, 255, 603.<br />
perïnatû, 465.<br />
'perjaja, 530.<br />
Perunu, 624.<br />
perut', tch., 701.<br />
peMI, 691.<br />
pëgù, 261.<br />
pëny, 585.<br />
pëstunù, 624.<br />
pësiXku, 303.<br />
pçdl, 32.<br />
pçstï, 694.<br />
pçtlno, 593.<br />
p?tro, 640.<br />
piskorï, 650.
786 INDEX<br />
plkùlu, 556.<br />
planû, 576.<br />
plastu, 681.<br />
plastyrl, 654.<br />
plaèlï, 511.<br />
platlno, 593.<br />
platù, 182, 682.<br />
plaxta, 687.<br />
plesno, 584.<br />
pleste, 512.<br />
plet', r., 602.<br />
plëna, 589, 601.<br />
plësnï, 589, 602.<br />
plësl, 662.<br />
plistl, 508.<br />
ploëa, 521.<br />
ploskû, 570.<br />
ploèiadï, 492.<br />
plotunù, 624.<br />
ploxû, 663.<br />
pluskma, pol., 711.<br />
plusta, 513.<br />
plùnije, 395.<br />
plgtùkù, 461.<br />
podlûgu, 725.<br />
podly, poï7, 555.<br />
podragû, 160.<br />
podrijetlo, s.-cr., 552.<br />
podu, 88, 489.<br />
poguslo, s.-cr., 415.<br />
pokosï, 725. ,<br />
polëno, 622.<br />
polje, 512.<br />
polst', T., 694.<br />
polu « plancher », 68.<br />
ponjava, 712.<br />
pora, T., 48, 84.<br />
poreklo, 552.<br />
porok, r., 522.<br />
portil', r., 246.<br />
porûsînl, 613.<br />
posagu, 177, 237.<br />
posqg, pol., 237.<br />
posivù, 707.<br />
posmagù, 189.<br />
postïka, *pù-, 353.<br />
polïbëga, 776.<br />
potolok, T., 147.<br />
pousievnlk, tch., 609.<br />
povësmo, 573.<br />
povodije, 400.<br />
povodï, -ni, 30, 600.<br />
pozdgj, T., 489.<br />
pçditi, 142.<br />
PQttilstvije, 750.<br />
praboénja-, 604.<br />
pragû, 163.<br />
prasiurû, 656.<br />
prasta, 521.<br />
pratiti, 521.<br />
praz(dl)nû, 578.<br />
prazù, 163.<br />
prëgynja-, 387.<br />
prësnù, 576.<br />
prçslo, 414.<br />
prçiati, 235.<br />
priiina, r., 214.<br />
prilast, slov., 696.<br />
prisnû, 259, 577.<br />
prilranù, 578.<br />
procii, 432.<br />
proskupii, 525.<br />
prostynja, r., 609.<br />
proliven', r., 612.<br />
prçtu, 681.<br />
prud, s.-cr., 259.<br />
pruslû, 683.<br />
prûsiù, 681.<br />
prûtù, 681.<br />
prûvësnù, 578.<br />
prziti, s.-cr., 177.<br />
pustù, 119, 677.<br />
puzdro, 640.<br />
pût-, pytati, 216.<br />
puta, -tica, 344.<br />
rabota, rabù, 162, 369.<br />
rad-, 162.<br />
rai, 510.<br />
rakno, s.-cr., 584.<br />
rakovina, 362.<br />
rana, 588.<br />
ranû, 578.<br />
rarôg, pol., 497.<br />
rarû, 638.<br />
raskosl, 28.<br />
ratï, 695.<br />
ravïnu, 707.<br />
raznû, 577.<br />
razvë, 707.<br />
razïnù, 590.<br />
rqczy, pol., 432.<br />
rebro, 640, 644.<br />
remeslo, T., 553.<br />
remïstvo, 405.<br />
retï, 695.<br />
rëdùkû, 460.<br />
rënï, 601.<br />
rësnù, 576.<br />
rëzvù, 706.
itl, 695.<br />
rmut, tch., 132.<br />
rod-, 76.<br />
rogû, 87.<br />
roko&ï, 669.<br />
rota, 686.<br />
rovesnik, r., 576, 658.<br />
rozvlna, 595.<br />
roidislvo, 405.<br />
TLUV, r., 701.<br />
ruéai, 531.<br />
ruâka, r., 353.<br />
ruta, 685.<br />
ruxo, 662.<br />
rûtû, 681.<br />
ryba, 487.<br />
rydel, pol., 558.<br />
ryxlyj, r., 547.<br />
ryzdl, 430.<br />
sa (d)lo, 413.<br />
sani, 601.<br />
scëglû, 547.<br />
stlezënka, r., 621.<br />
selezïnï, 612.<br />
ser'ga, r., 502.<br />
sëëïnù, 591.<br />
sëmija, 525, 572.<br />
sëtil, 601.<br />
sërù, 635.<br />
'sçbrû, 638.<br />
sçdra, 642.<br />
sinjl, 431.<br />
siromaxû, 666.<br />
skatert', r., 690.<br />
skobel', r., 558.<br />
skoposû, 722.<br />
skrënja, 522.<br />
skrizalï, 559.<br />
skvoz(l)nja, 604.<br />
skurûna, 586.<br />
skvrûnflnjû, 578.<br />
slama, 572.<br />
slanutûkù, 701.<br />
slasiï, 691.<br />
slaiina, 694.<br />
slavù, 707.<br />
sliny, 586.<br />
sliva, 710.<br />
sliz, r., 118.<br />
sllza, 245.<br />
slîzûkû, 460.<br />
slotà, 685.<br />
sluga, 123, 495.<br />
slutù, 679.<br />
INDEX 787<br />
sluzû, 118.<br />
smaglù, 546.<br />
smetana, r., 618.<br />
smëino, 594.<br />
smoku, 80.<br />
smola, 68.<br />
snadit', T., 490.<br />
snaga, 495.<br />
snastl, 694.<br />
snëi', tch., 94.<br />
soâeuica, 346.<br />
sodev, sloy., 708.<br />
sçkû, 145.<br />
*sçmïnja, 518, 761.<br />
sçsl, 724.<br />
splos, r., 570.<br />
spaj, r., 53.<br />
sporù, 260, 635.<br />
sracica, 344.<br />
sragû, 163.<br />
sramu, 159, 571.<br />
sramçzivû, 503.<br />
srenja, slov., 611.<br />
srëda, 233.<br />
srûna, 588.<br />
stado, 489.<br />
stamen-, 264.<br />
starù, 634.<br />
stas, s.-cr., 660.<br />
stativa, 715.<br />
stat'ja, r., 526.<br />
steg-, 66.<br />
stegno, 584.<br />
'steiaja, 530.<br />
steierû, 646.<br />
stëna, 588.<br />
siïblo, 552.<br />
siïklo, 553.<br />
stoborù, 648.<br />
stolû, 69, 279.<br />
strast', r., 692.<br />
strëkati, 65.<br />
strëla, 100.<br />
strësti, 163.<br />
strëtî, 690.<br />
strëxa, 663.<br />
strogij, r., 163.<br />
strupû, 128.<br />
strùdl, 32.<br />
strûkû, 249.<br />
strùnï, 602.<br />
stryna, 596.<br />
sudy, tch., 258.<br />
suka, T., 538.<br />
suknja, -no, 584, 604.
788 INDEX<br />
sulit', r., 125.<br />
(ne)sumçiivù, 503.<br />
surovû, sur-, 440, 636.<br />
susei, pol., 556.<br />
sulvar(a), s.-cr., 70, 736.<br />
sûdravû, 707.<br />
sùgrebutï, 701.<br />
"sûln-, 579.<br />
sùniëavà, 472.<br />
sûtâ, 682.<br />
sûvëdokû, 543.<br />
Svarogû, 496.<br />
svastika, s.-cr., 542.<br />
svatû, 680.<br />
svënje, 582.<br />
svçtû, 677.<br />
sviba, slov., 487.<br />
svila, 551.<br />
svita, 686.<br />
*svlrdîlù, 557.<br />
svoboda, 256.<br />
svoitï, 699.<br />
sgrù, 635.<br />
swada, pol., 265.<br />
szlachta, pol., 687.<br />
szpadel, pol., 558.<br />
sal-, 193.<br />
Saren, s.-cr., 368.<br />
sâeka, r., 538.<br />
Séepiti, 97.<br />
sëëtka, r., 694.<br />
Sëlp-, 209.<br />
sqlali, 235.<br />
stitû, 208.<br />
sumù, 124.<br />
ëulû, 682.<br />
taina, 595.<br />
tali, 27.<br />
talog, s.-cr., 496.<br />
taskat', r., 188.<br />
tchân, tch., 617.<br />
telica, 346.<br />
temlgga, r., 498.<br />
temrej, r., 651.<br />
tetûka, 352.<br />
tërjati, 107.<br />
tësnû, 576.<br />
tësto, 683.<br />
tçliva, 715.<br />
tin(j)a, 522, 588.<br />
tinï, 26, 28.<br />
tisen, tch., 576, 603.<br />
tïla, llljç, 515.<br />
tïma, 244.<br />
tjâmit', r., 192.<br />
tlapa, tch., 241.<br />
tium, pol., 125.<br />
tlûkù, 249.<br />
tomitù, -ti, 67, 468.<br />
tonja, 603.<br />
topel', r., 560.<br />
topoll, 566.<br />
tovarisël, 671.<br />
trapâ, 151.<br />
trata, -titi, 183, 685.<br />
trator, s.-cr., 649.<br />
traziti, s.-cr., 189.<br />
trëati, s.-cr., 249.<br />
trëba, -biti, 232.<br />
trëskati, 65.<br />
trësnû, 580.<br />
trëzvù, 706.<br />
trias, 345.<br />
trizna, 629.<br />
trlbuxû, 673.<br />
trçdù, 137.<br />
trçtù, 142, 680.<br />
trçx-, trux-, 140.<br />
trun, s.-cr., 582.<br />
trûgu, 250.<br />
trùstî, 694.<br />
tunjï, 431.<br />
*tûrk-, 248.<br />
tûstï, 433.<br />
tvrûdù, 489.<br />
tylù, 550.<br />
tgnu, 224.<br />
udariti, 178.<br />
udod, r., 22.<br />
uhraditi, tch., 159.<br />
ukrop, r., 77.<br />
uksus, r., 722.<br />
umu, 125, 571.<br />
uslo, r., 415.<br />
usmù, 571.<br />
usrùd(ïn)u, 755.<br />
usidï, 28.<br />
utrije, 398.<br />
uzda, 490.<br />
uiin(a), 206.<br />
vabiti, 187.<br />
vaditi, 175.<br />
vap(î)no, 593.<br />
vapiX, 202.<br />
vasnï, 603.<br />
vatra, 642.<br />
vazam, s.-cr., 243.<br />
vaznï, 630.
veierû, 646.<br />
vekos, r., 670.<br />
venkov, tch., 716.<br />
versa, r., 522.<br />
veselù, 554.<br />
veliina, r., 357.<br />
vëdro, 641.<br />
vëglasû, 765.<br />
vëko, 537.<br />
vënikû, 541.<br />
vënîcî, 299.<br />
vëno, 585.<br />
*vênù, 581.<br />
vëtrïnjî, 444.<br />
vëtrù, 638.<br />
vëverica, 646.<br />
vëxa, 663.<br />
vëza, 522.<br />
vëzda, 522.<br />
vçd-, 133.<br />
. vi(d)la, 550.<br />
vijalica, 347.<br />
vina, 588.<br />
vinjaga, s.-cr., 491.<br />
vir, r., 169, 637.<br />
'vistû, 677.<br />
vill, 689.<br />
vilïlù, 556.<br />
vitra, tch., 642.<br />
vixurû, 651.<br />
vïly, 729.<br />
vladî, 33.<br />
vlasû, 659.<br />
vlastt, 433.<br />
vlatû, 683.<br />
vlûna, 585, 586.<br />
vlùxvû, 708.<br />
voina, 596.<br />
vojevoda, 774.<br />
volui, 429.<br />
vor, r., 49.<br />
'vorna, 596.<br />
vozgri, r., 638.<br />
vraël, 510.<br />
vragu, 154, 495.<br />
vraska, 153.<br />
vfava, tch., 716.<br />
vraza, 515.<br />
vraiïda, 493.<br />
vrësta, 523.<br />
vrëteno, 620.<br />
vrûsta, 685.<br />
vrùtûpù, 632.<br />
vtip, tch., 209.<br />
vùnukû, 536.<br />
INDEX 789<br />
vûtrî, 643.<br />
vûz, 462.<br />
vùznaku, 327.<br />
vydra, 642.<br />
vygn(j)l, 511.<br />
vysoku, 462.<br />
vysprï, 724, 764.<br />
wqtpié, pol., 764.<br />
wieku(j)i, pol., 432.<br />
xab-, 177.<br />
xistnyj, r., 681.<br />
xladû, 157.<br />
xlaku, xlastû, 536, 678.<br />
xlebat', T., 229.<br />
xlçdû, 145.<br />
xlçpati, 237.<br />
xolit', T., 193.<br />
xgt-, 60.<br />
xramù, 571.<br />
xrïbîiû, 699.<br />
xulili, 126.<br />
xusla, 687.<br />
xvaliti, 193.<br />
xvoslû, 87.<br />
xvrastu, 163, 278.<br />
xybati, 222.<br />
xylû, 117.<br />
xystïnikû, 308.<br />
xytrù, 634.<br />
zadi, 33.<br />
zaprutùkû, 304.<br />
zaskopije, 400.<br />
zastit', r., 259.<br />
zazdï, 509.<br />
zelije, 393.<br />
zënica, 349, 579.<br />
zlakù, 535.<br />
zlûëï, 539.<br />
znaxorl, 650.<br />
zgbru, 638.<br />
zrùno, 583.<br />
z&lû, 263.<br />
zadai sie, pol., 174.<br />
zaloba, -loslï, 374.<br />
ias-, 180.<br />
ielçdîcï, 299.<br />
ienixù, 671.<br />
ieratùkù, 702.<br />
ierava, 713.<br />
zestokû, 462.<br />
zçlo, 413.<br />
zica, 537.<br />
zidukù, 461.
790 INDEX<br />
Zila, 551.<br />
zinja, 603.<br />
ziru, 207, 637.<br />
Zivoêich, tch., 671.<br />
deivè, lit., 21.<br />
*garazds, got., 489.<br />
haban, hob-, got., 177.<br />
kërmens, v. pr., 659.<br />
klanas, lit., 83.<br />
krantas, lit., 131.<br />
laignan, v. pr., 583.<br />
nèsSia, lit., 434.<br />
nognan, v. pr., 583.<br />
plats, got., 183.<br />
zizeiï, tch., 610, 630.<br />
zlùna, 589.<br />
zuchwa, pol., 189.<br />
zupanù, 616.<br />
BALTIQUE ET AUTRES <strong>LANGUES</strong><br />
pomnan, v. pr., 583.<br />
preikêas, lit., 658.<br />
sabulum, lat., 414.<br />
samdas, lit., 765.<br />
sudgti, lit., 635.<br />
uodas, lit., 106.<br />
wertemmai, v. pr., 686.<br />
-zn(i)s, got., 631.<br />
Zèbti, lit., 63.
TABLE DES MATIÈRES<br />
AVANT-PROPOS 7<br />
INTRODUCTION<br />
701. La formation des noms 9<br />
702. Les suffixes et leur emploi. . 9<br />
703. La forme des suffixes 11<br />
704. Origines et évolution des suffixes 12<br />
705. Slave et baltique 13<br />
706. Classement des suffixes 14<br />
PREMIÈRE PARTIE<br />
LES SUFFIXES FLEXIONNELS<br />
CHAPITRE PREMIER<br />
Suffixes *-o-, *-«-, *-i-<br />
707. Suffixe *-o- 19<br />
708. Suffixe *-â- 20<br />
709. Suffixe *-i- 22<br />
710. Les féminins en -ï 23<br />
711. Dérivés d'adjectifs 23<br />
712. Dérivés de substantifs 25<br />
713. Dérivés de verbes 25<br />
714. Avec préverbe 27<br />
715. Vocalisme radical 28<br />
716. Extension du type 29<br />
717. Les composés v 30<br />
718. Substantifs isolés... ' 30<br />
719. Finales -dï, -tï 32<br />
720. L'accentuation 33
792 TABLE DES MATIÈRES<br />
CHAPITRE II<br />
Les postverbaux<br />
721. Définition des postverbaux 34<br />
722. Plan de l'étude 35<br />
Vocalisme radical -o-<br />
723. (-s-, -z-) 36<br />
724. (-t-, -d-) 37<br />
725. {-b-, -p-} 38<br />
726. {-k-, -g-) 39<br />
727. {-m-, -/-, -n-) 42<br />
728. (-r-) 45<br />
729. (-/-) 51<br />
730. (-»-) 56<br />
CHAPITRE III<br />
Vocalisme radical -o- (suite)<br />
731. Postverbaux à alternances moins claires (-s-, -z-, -t-,<br />
-à-) 59<br />
732. (-p-,-b~) 61<br />
733. (-k-, -g-) 64<br />
734. (-m-) 66<br />
735. (-/-) 67<br />
736. (-r-) 69<br />
737. (-/-, -o-) 71<br />
CHAPITRE IV<br />
Vocalisme radical -o- (suite)<br />
738. Postverbaux sans alternance (-1-, -d-) 74<br />
739.(-p-,-b- ) 77<br />
740. (-/*-, -g-, -x-) 79<br />
741. (-m-, -/-, -n-) 82<br />
742. {-r-) 83<br />
743. (-/-, -v-) 85<br />
744. Divers 87<br />
CHAPITRE V<br />
Vocalisme radical -ë-<br />
745. Postverbaux à alternances claires 89<br />
746. Alternances moins claires 91
TABLE DES MATIERES 793<br />
747. Postverbaux sans alternance (-z-, -t-, -d-) 94<br />
748. (-p-, -k-, -g-,-x-) 97<br />
749. (-m-,-Z-,-n-). . 99<br />
750. (-r-,-y-) 102<br />
751. Postverbaux en -/- et -v- 103<br />
752. Postverbaux avec ou sans alternance ë : a 105<br />
753. Divers 107<br />
CHAPITRE VI<br />
Vocalisme radical -u-<br />
754. Alternances claires (-s-, -d-, -b-) 108<br />
755. {-k-, -g-, -x-) 110<br />
756. Alternances moins claires (-s-, -d-, -p-, -b-) 113<br />
757. (-k-, -g-, -x-, 4-,,-r-) , 116<br />
758. Sans alternance (-s-, -z-, -Z-, -d-) 118<br />
759. (-p-, -b-, -k-, -g-, -x-).... 121<br />
760. (-m-,-l-,-n-,-r-,-v-) 124<br />
761. Formations diverses 127<br />
CHAPITRE VII<br />
Vocalisme radical -Q-<br />
762. Alternances claires (-s-, -z-, -Z-, -d-) 129<br />
763. (-b-, -k-, -g-) 133<br />
764. Alternances moins claires (-1-, -d-, -p-, -b-) 137<br />
765. {-k-, -g-, -x-) 139<br />
766. Sans alternance (-s-, -t-, -d-) 140<br />
767. (-p-, -b-, -k-, -g-, -x-) 143<br />
768. Formations diversès 144<br />
CHAPITRE VIII<br />
Vocalismes radicaux "-al-, *-ar-<br />
769. Alternances claires (*-a/-) 146<br />
770. (*-ar-, -z-, -Z-, -d-, -p-, -b-) 149<br />
771. (-k-, -g-, -x-) 152<br />
772. Alternances moins claires, ou sans alternance (*-al-). . 155<br />
773. (*-ar-) ; 158<br />
774. Groupe *ar- initial/. 161<br />
775. Divers 162
794 TABLE DES MATIÈRES<br />
CHAPITRE IX<br />
Vocalisme radical -a-<br />
776. Alternance é : a 165<br />
777. Alternances ï : a, e : a 167<br />
778. Alternances y : av et y : va 170<br />
779. Alternance o : a 172<br />
780. Formations sur imperfectifs dérivés 173<br />
781. Alternances moins claires (-s-, -z-, -d-) 174<br />
782. (-b-, -g-, -r-) 176<br />
783. Sans alternance (s-, -z-) 179<br />
784. (-f-) 182<br />
785. (-d-) 184<br />
786. {-p-,-b-,-f-) 186<br />
787. (-k-, -g-, -x-) 187<br />
788. (-m-, -/-). 191<br />
789. (-«-) 194<br />
790. -r-) 195<br />
791. (-/-) 198<br />
792. (-v-) 199<br />
793. Isolés. 201<br />
CHAPITRE X<br />
VOCALISME RADICAL -i-<br />
794. Alternance ï : i * 203<br />
795. Alternance des imperfectifs dérivés 204<br />
796. Alternances moins claires ou sans alternance (-s-, -z-,<br />
-h -d-, -p-, -M - 207<br />
797. {-k-, -g-) 210<br />
798. {-m-, -l-, -n-, -r-, -v-) 213<br />
CHAPITRE XI<br />
Vocalisme radical -y-<br />
799. Avec alternances (s-, -t-, -p-) 216<br />
800. {-k-, -g-, -x-, -m-, -l-, -v-) 218<br />
801. Sans alternance (-s-, -z-, -t-, -d-, -b-) 221<br />
802. (-k-, -g-, -x-, 4-, -n-, -r-, -v-) 222<br />
CHAPITRE XII<br />
Vocalisme radical -e-<br />
803. Avec alternance 225<br />
804. Sans alternance (-s-, -t-) 227
795 TABLE DES MATIÈRES<br />
805. {-p-, -b-, -k-, -s-, -v-, Ij-, -r/-) 229<br />
806. Vocalismes radicaux *-el-, *-er- 230<br />
CHAPITRE XIII<br />
Vocalisme radical -g-<br />
807. Avec alternance 234<br />
808. Sans alternance 234<br />
CHAPITRE XIV<br />
Vocalisme radical -i-<br />
809. Avec alternance 238<br />
810. Sans alternance (-s-, -t-, -d-, -p-, -b-) 240<br />
811. {-k-, -g-, -x-, -m-, -n-, -r-) . 242<br />
CHAPITRE XV<br />
Vocalisme radical -Q-<br />
812. Avec alternance 246<br />
813. Sans alternance (-/-, -d-, -p-, -b-) 246<br />
814. (-k-, -g-, -x-) 248<br />
815. (-m-, -n-, -v-) 250<br />
CHAPITRE XVI<br />
Postverbaux à thème dissyllabique<br />
816. Postverbaux des verbes en -tati 253<br />
817. Autres formations 255<br />
818. (suite).... 257<br />
819. Postverbaux sur thème réduit 258<br />
Les adjectifs<br />
820. (-o-, -é-, -u-) 260<br />
821. (-p-, *-al-, *-ar-, -a-, -i-, -y-, -ç-, -ï-, -û-) 262<br />
CHAPITRE XVII<br />
Les postverbaux, vue générale<br />
822. Le postverbal 265<br />
823. Origine et développement des postverbaux 265<br />
824. Évolution et extension des postverbaux 266<br />
825. Forme des postverbaux 268<br />
826. Postverbaux et dérivés verbaux 269<br />
827. Postverbaux masculins et féminins 272
796 TABLE DES MATIÈRES<br />
CHAPITRE XVIII<br />
Accentuation des postverbaux<br />
828. Postverbaux masculins 275<br />
829. Accent sur le préverbe et accent sur le thème 276<br />
830. Les postverbaux oxytons 277<br />
831. Postverbaux féminins 280<br />
832. Origine des accents 281<br />
INDEX DES POSTVERBAUX 285<br />
DEUXIÈME PARTIE<br />
LES SUFFIXES PRODUCTIFS<br />
CHAPITRE XIX<br />
Les suffixes productifs<br />
833. Groupement des suffixes 295<br />
SUFFIXES MASCULINS<br />
834. Suffixe -Ici 295<br />
835. Singulatifs et formations diverses 297<br />
836. Le suffixe dans les langues slaves 299<br />
837. Origine du suffixe 300<br />
Suffixe -ûku<br />
838. En regard de thèmes verbaux 301<br />
839. En regard de noms 302<br />
840. Dans les langues slaves 304<br />
841. Origine 305<br />
Suffixe -niku<br />
842. Suffixe -enikû 306<br />
843. Suffixe -ïniku 306<br />
844. Dans les langues slaves 308<br />
845. Origine 309<br />
Suffixe -teljï<br />
846 310<br />
847. -ilelji 312<br />
848. Extension du suffixe -teljï 313<br />
849. Dans les langues slaves 314<br />
850. Origine du suffixe 315
TABLE DES MATIÈRES<br />
Suffixe -arjï<br />
7 9 7<br />
851<br />
852. Dans les langues slaves 318<br />
853. Origine<br />
319<br />
854. Suffixe<br />
855. Dans les langues slaves<br />
856. Suffixe<br />
857. Origine du suffixe<br />
CHAPITRE X X<br />
Suffixes masculins (suite)<br />
Suffixe -ici<br />
858<br />
859. Dans les langues slaves 325<br />
860. Origine<br />
326<br />
861.<br />
862. Dans les langues slaves<br />
863. Origine<br />
864<br />
865. Dans les langues slaves<br />
866. Suffixes -ëik et -scik<br />
867<br />
868. Dans les langues slaves<br />
869. Origine<br />
870. Suffixe -inu<br />
871. Dans les langues slaves<br />
872. Suffixe -janinu<br />
873. Dans les langues slaves<br />
874. Suffixe -ïca<br />
875. Dans les langues slaves<br />
Suffixe -aku<br />
Suffixe -cii<br />
Suffixe *-ïtyo-, v. si. -istï<br />
Suffixes -inu et -janinu<br />
CHAPITRE XXI<br />
Suffixes féminins<br />
316<br />
321<br />
322<br />
323<br />
323<br />
324<br />
326<br />
32 7<br />
328<br />
329<br />
33 0<br />
33i<br />
332<br />
334<br />
335<br />
336<br />
33 7<br />
337<br />
338<br />
340<br />
34 1
798 TABLE DES MATIÈRES<br />
876. Noms d'agents 342<br />
877. Les origines 343<br />
Suffixe -ica<br />
878. Diminutifs 344<br />
879. Formation de féminins 345<br />
880. Substantivation d'adjectifs 346<br />
881. Divers 3 48<br />
882. Suffixe -ïnica 349<br />
883. Dans les langues slaves 350<br />
884. Origine 352<br />
Suffixe -uka<br />
885. En vieux slave 352<br />
886. Dans les langues slaves (russe, pol., tch.) 353<br />
887. (slov., s.-cr., bulg.) 354<br />
888. Origine 355<br />
Suffixe -ina<br />
889. I. Abstraits d'adjectifs 355<br />
890. Sur thème dissyllabique 357<br />
891. Dans les langues slaves 357<br />
892. II. Dérivés de noms 359<br />
893. En slavon 361<br />
894. Types particuliers de dérivés 361<br />
895. Valeurs du suffixe 363<br />
896. Dans les langues slaves 364<br />
897. Les origines 365<br />
CHAPITRE XXII<br />
Suffixes féminins (suile)<br />
898. Suffixe -ota 367<br />
899. En slavon 368<br />
900. Dans les langues slaves (russe) 368<br />
901. (polonais, etc.) 370<br />
902. Suffixe *-otja •• 370<br />
903. Suffixe -otina 371<br />
904. Origine 372<br />
Suffixe -ostï<br />
905. En vieux slave 373<br />
906. Élargissements du suffixe 374<br />
907. Dans les langues slaves 374
799 TABLE DES MATIÈRES<br />
908. Accentuation 376<br />
909. Origine 376<br />
Suffixe -ïba<br />
910. En vieux slave 377<br />
911. Dans les langues slaves (russe, pol., tch.) 378<br />
912. (slov., s.-cr., bulg.) 379<br />
913. Suffixe -oba 380<br />
914. Origine 381<br />
Suffixe -tva<br />
915. Vieux slave et slavon 381<br />
916. Dans les langues slaves 382<br />
917. Suffixe -tïba. : 383<br />
918. Origine 384<br />
Suffixe -ynji<br />
919. En vieux slave 385<br />
920. Dans les langues slaves 385<br />
921. Origine 387<br />
CHAPITRE XXIII<br />
Suffixes neutres<br />
922. Suffixe -ïee 389<br />
923. Dans les langues slaves 390<br />
924. Suffixe -uko 390<br />
Suffixe -ïje<br />
925. Vieux slave. I. Collectifs 392<br />
926. II. Abstraits d'adjectifs 394<br />
927. III. Dérivés de composés 395<br />
928. IV. Composés à préposition premier terme 397<br />
929. Autres formations. Sur substantifs 398<br />
930. Sur thèmes verbaux 399<br />
931. Mots isolés 400<br />
932. Formes élargies 401<br />
933. Le suffixe dans les langues slaves 401<br />
934. Origine du suffixe 403<br />
^Suffixe -ïstvo<br />
935. En vieux slave. Dérivés d'adjectifs 404<br />
936. Dérivés de noms de personnes 404<br />
937. Dérivés de noms de choses 405
800 TABLE DES MATIÈRES<br />
938. Dérivés de composés 406<br />
939. Suffixe -ïstvije 406<br />
940. Dans les langues slaves (russe, pol., tch.) 408<br />
941. (slov., s.-cr., bulg.) 409<br />
942. Origine 410<br />
CHAPITRE XXIV<br />
Suffixes neutres (suite)<br />
943. Suffixe -(d)lo 412<br />
944. Formes en -slo 414<br />
945. Formes en -lo 415<br />
946. Suffixe -a(d)lo 416<br />
947. Suffixe -i(d)lo 417<br />
948. Dans les langues slaves 419<br />
949. Origine 420<br />
Suffixe v. si -iste<br />
950. En vieux slave 422<br />
951. Formes en -liste 423<br />
952. La dérivation 424<br />
953. Dans les langues slaves 425<br />
954. Origine 427<br />
CHAPITRE XXV<br />
Suffixes d'adjectifs<br />
955. Suffixe ~(j)ï, adjectifs possessifs 429<br />
956. Les autres adjectifs en ~(j)ï 430<br />
957. Formations moins claires 431<br />
958. Suffixe *-tjï 432<br />
959. Suffixe *-ïjï 434<br />
960. Dans les langues slaves 436<br />
Suffixe -ovu<br />
961. Adjectifs possessifs 437<br />
962. De noms d'animaux et de choses 438<br />
963. Origine 439<br />
964. Autres mots en -ovu. 439<br />
965. Dans les langues slaves 440<br />
Suffixe -inu<br />
966. En vieux slave 441<br />
967. Dans les langues slaves 443
TABLE DES MATIÈRES 801<br />
Suffixe -ïnjï<br />
968. En vieux slave 444<br />
969. Dans les langues slaves 444<br />
Suffixe -ïnjii<br />
970. En vieux slave 445<br />
971. Dans les langues slaves 446<br />
972. Origine 447<br />
Suffixe -ïsku<br />
973. Vieux slave 448<br />
974. Dans les langues slaves 449<br />
, CHAPITRE X X V I<br />
Suffixes d'adjectifs (suite)<br />
975. Suffixe -ïnu 451<br />
976. Sur composés, etc 452<br />
977. Sur thème verbal., 453<br />
978. Élargissements d'adjectifs 454<br />
979. Dans les langues slaves 455<br />
Suffixe -ënu<br />
980. Vieux slave 456<br />
981. Dans les langues slaves 458<br />
982. Origine 459<br />
Suffixe -ûku<br />
983 459<br />
984. (suite) 461<br />
985. Suffixe -oku 462<br />
986. Dans les langues slaves 463<br />
Suffixe -atu<br />
987 464<br />
988. Dans les langues slaves 465<br />
989. Suffixe -astu 466<br />
Suffixe -itu<br />
990. ; 468<br />
991. Suffixe -islu 469<br />
992. Dans les langues slaves 470<br />
26
802 TABLE DES MATIÈRES<br />
Suffixe -avu<br />
993 471<br />
994. Dans les langues slaves 473<br />
Suffixe -ivu<br />
995<br />
996. Suffixe -ïlivu 479<br />
997. Origine de -ïlivu 481<br />
998. Dans les langues slaves 481<br />
999. Suffixes en -b-<br />
1000<br />
1001. Finale -du<br />
1002. Finale -do<br />
1003. Finale -da<br />
1004. Finales -oda, etc<br />
1005. Finale -dï<br />
1006. Suffixe -(j)adï<br />
1007. Suffixe -ïda<br />
TROISIÈME PARTIE<br />
LES AUTRES SUFFIXES<br />
LA COMPOSITION<br />
CHAPITRE XXVII<br />
Suffixes en -b-, -d-, -g-<br />
Suffixes en -d-<br />
Suffixes en -g-<br />
1008<br />
1009. Finale<br />
494<br />
1010. Finale-ga<br />
495<br />
1011. Finale -og-<br />
496<br />
1012. Finales -ig-, -yg-<br />
498<br />
1013. Finales -gg-, -ug-<br />
499<br />
1014. Finale -(j)ag-<br />
501<br />
1015. Finale -çdzï<br />
502<br />
1016. Origines des suffixes en -g-<br />
1017. Suffixe -ezï<br />
504<br />
504<br />
1018. Origine de -ezï<br />
506<br />
s»<br />
475<br />
487<br />
488<br />
488<br />
489<br />
490<br />
491<br />
491<br />
492<br />
493
803 TABLE DES MATIÈRES<br />
CHAPITRE XXVIII<br />
Suffixes en -j-<br />
1019. Suffixe -(j)ï 508<br />
1020. (suite) 510<br />
1021. Suffixe -(j)e 512<br />
Suffixe -(j)a<br />
1022 513<br />
1023. Formes à préfixe et composés 516<br />
1024. En slavon et dans les langues slaves 517<br />
1025. Sur thème vocalique 520<br />
1026. Formations moins claires. 520<br />
1027. Extension du type 523<br />
Suffixes en -ïj-, -ëj-, etc.<br />
1028. Suffixes en -ïj- 525<br />
1029. Finale -uj- 526<br />
1030. Suffixe *-(j)ajï 527<br />
1031. Dans les langues slaves 527<br />
1032. Suffixe -ëja 529<br />
1033. Autres formations 530<br />
1034. Dans les langues modernes 531<br />
1035. Les origines 532<br />
Suffixe *-tajï<br />
1036 533<br />
CHAPITRE XXIX<br />
Suffixes en -k-<br />
1037. Suffixe -kû 535<br />
1038. Adjectifs 536<br />
1039. Finale -ko 537<br />
1040. Suffixe -ka 537<br />
1041. Suffixe -cï 538<br />
1042. Suffixe -iku 539<br />
1043. Les origines 540<br />
1044. Suffixe -iëï ' 541<br />
1045. Suffixe -ika 542<br />
1046. Suffixe -okû 543<br />
1047. Suffixe -oëï 544
804 TABLE DES MATIÈRES<br />
CHAPITRE X X X<br />
Suffixes en -/-, -m-<br />
1048. Suffixe-M 545<br />
1049. Dans les langues slaves 548<br />
1050. Substantifs en -lu 550<br />
1051. Suffixe -la 550<br />
1052. Suffixe -lo 552<br />
1053. Suffixe -élu 553<br />
1054. Suffixe -ela 554<br />
1055. Suffixes -lia et -ulu 555<br />
1056. Suffixe -Il 557<br />
1057. Suffixe -ëlï 559<br />
1058. Suffixe -lii, -lïja 560<br />
1059. Suffixe -ïljï 561<br />
1060. Suffixe -el(j)ï 563<br />
1061. Finales diverses 563<br />
1062. Finales mouillées 565<br />
1063. Les origines. • • • • 567<br />
Suffixes en -m-<br />
1064. En baltique • • • • 568<br />
1065. En slave •••• 569<br />
1066. Les substantifs • • • • 570<br />
1067. Suffixe -ma 571<br />
1068. Suffixe 573<br />
1069. Suffixe -imû 574<br />
CHAPITRE XXXI<br />
Suffixes en -n-<br />
1070. Suffixe -nu 575<br />
1071. (suite) 577<br />
1072. Les substantifs 579<br />
1073. (suite) 581<br />
1074. Suffixe -no 583<br />
1075. Suffixe 585<br />
1076. (suite) 587<br />
1077. Suffixe -ïnu 589<br />
1078. Noms des mois 591<br />
1079. Suffixe -ïno 592<br />
1080. (suite)<br />
1081. Suffixe -îna 595<br />
1082. Dans les langues slaves 596<br />
593
805 TABLE DES MATIÈRES<br />
CHAPITRE XXXII<br />
Suffixes en -n- (suite)<br />
1083. Suffixe -ni 5"<br />
1084. (suite) 600<br />
1085. Suffixe -snï 602<br />
1086. Suffixe-n/a 603<br />
1087. Suffixe -ïnja 605<br />
1088. En slavon et vieux russe 606<br />
1089. Dans les langues slaves (russe, pol.) 608<br />
1090. (tch., slov., s.-cr.) 610<br />
1091. Suffixe -ïnjï 611<br />
1092. Dans les langues slaves • 613<br />
1093. Les origines..,. 616<br />
Stuffixes en -an-, -en-, etc.<br />
1094. Suffixe -anu 616<br />
1095. Suffixe -ana 618<br />
1096. Suffixes en -anj- 618<br />
1097. Suffixes en -en- 620<br />
1098. -enï 621<br />
1099. Finales en -en- 622<br />
1100. En-m- 623<br />
1101. En-on-:<br />
1102. Suffixe-an- 624<br />
1103. Dans les langues slaves 625<br />
1104. Les origines 626<br />
1105. Suffixes -una, -unja 626<br />
1106. Finale -ynu 626<br />
Suffixes en -zn-<br />
1107. Finale -znu 627<br />
1108. Suffixe -izna 627<br />
1109. Suffixe -znï 629<br />
1110. Les origines 630<br />
CHAPITRE XXXIII<br />
Suffixes en -r-<br />
1111. Finale-p- 632<br />
1112. Suffixe-ru. v 633<br />
1113. (suite) ( 635<br />
1114. Substantifs en -rû 637<br />
1115. (suite) 638<br />
623
806 TABLE DES MATIÈRES<br />
1116. Suffixe -ro 639<br />
1117. Suffixe 641<br />
1118. Suffixe-n 643<br />
Suffixes en -er-, -or-, etc.<br />
1119. Suffixe -eru 644<br />
1120. En vieux slave 645<br />
1121. Dans les langues slaves 646<br />
1122. Finales -era, -erï 647<br />
1123. Suffixe -oru 647<br />
1124. Dans les langues slaves 649<br />
1125. Suffixe 649<br />
1126. Suffixe-on 650<br />
1127. Suffixe -uru 651<br />
1128. Suffixe -aru 652<br />
1129. Suffixe -ara. . 653<br />
1130. Finales en -ër- et -ir- 654<br />
1131. Suffixe -yrï 654<br />
1132. Suffixe-ara 656<br />
1133. Suffixe -ura.... 657<br />
CHAPITRE XXXIV<br />
Suffixes en -s- et -x-<br />
1034. Suffixes -s- et -so- 658<br />
1035. Suffixe -su. Substantifs 659<br />
1036. Adjectifs 660<br />
1037. Suffixe -xu. Substantifs 660<br />
1038. Adjectifs 661<br />
1039. Hypocoristiques 662<br />
1040. Suffixe 663<br />
1041. Suffixe -sa 664<br />
1142. Suffixes -sa, -s'-, Sï 665<br />
Suffixes en -as-, -ex-, etc.<br />
1143. Suffixe -asu 666<br />
1144. Suffixe -axu 666<br />
1145. Suffixe -asï 666<br />
1146. Suffixes -ex(u), -exa 667<br />
1147. Suffixes -esï, -esa 668<br />
1148. Suffixes -os, -ox, -oxa 668<br />
1149. Suffixe -osï 669<br />
1150. Suffixe-os v a 670<br />
1151. Suffixes -ix-, -is- 671
807 TABLE DES MATIÈRES<br />
1152. Suffixe -ysï 671<br />
1153. Langues méridionales 672<br />
1154. Suffixe -uxu 672<br />
1155. Suffixe 674<br />
1156. Suffixe -us 674<br />
1157. Finales en -us- 675<br />
1158. Dérivés de formes en -x- 676<br />
CHAPITRE X X X V<br />
Suffixes en -t-<br />
1159. Suffixe -tu 677<br />
1160. Substantifs 679<br />
1161. (suite) 680<br />
1162. (suite) 682<br />
1163. Suffixe -to 683<br />
1164. En slave 683<br />
1165. Suffixe-ta 684<br />
1166. Formations obscures 686<br />
Suffixe -tï<br />
1167 688<br />
1168. Sur thème en voyelle ou sonante 688<br />
1169. Sur thème en consonne 690<br />
1170. Formes moins claires 693<br />
1171. Autres mots à finale -tï 694<br />
Suffixes en -at-, -et-, etc.<br />
1172. En -al- 696<br />
1173. Formes en -et- 697<br />
1174. Formes en -ot-. 698<br />
1175. Formes en -il- 698<br />
1176. Formes en -ït- et -ùt- 699<br />
1177. Formes en -yt- 700<br />
1178. Formes en -çl- 700<br />
1179. Formes en -ut- 702<br />
Suffixes en -st- et en *-tj-<br />
1180. En -st- 703<br />
1181. En *-tj-
808 TABLE DES MATIÈRES<br />
CHAPITRE XXXVI<br />
Suffixes en -v-<br />
1182. Suffixe -vu 706<br />
1183. Substantifs 708<br />
1184. Suffixe 709<br />
1185. Suffixe -va 709<br />
1186. Finales en -vï 711<br />
Suffixes en -av-, -iv-, etc.<br />
1187. En -av- 712<br />
1188. Suffixe -ivo 713<br />
1189. Suffixe -iva 715<br />
1190. Finale -ëv- 716<br />
1191. Suffixes en -ov- 716<br />
Finales en -z-<br />
119 2 717<br />
CHAPITRE XXXVII<br />
Les suffixes d'emprunt<br />
119 3 718<br />
1194. Finales et suffixes 718<br />
1195. Autres suffixes d'emprunt 719<br />
1196. (suite) 721<br />
1197. Finale -osû 722<br />
CHAPITRE XXXVIII<br />
Les finales d'adverbes<br />
1198 723<br />
1199. Adverbes en -ï 723<br />
1200. Formes à préverbe ou préfixe nominal 725<br />
1201. Formes de composés 727<br />
1202. Dans les langues slaves 728<br />
1203. Autres formations adverbiales 728<br />
1204. Adverbes pronominaux 730<br />
CHAPITRE X X X I X<br />
La dérivation verbale<br />
1205 731<br />
1206. La préverbation 731
809 TABLE DES MATIÈRES<br />
1207. La dépréverbation 732<br />
1208. Dans les langues slaves 733<br />
1209. Traitements phonétiques 735<br />
1210. La dépréverbation en baltique 736<br />
CHAPITRE XL<br />
La composition<br />
1211 737<br />
1212. Premier terme substantif 737<br />
1213. Premier terme adjectif 742<br />
1214. Premier terme pronom, etc 745<br />
1215. En slavon 747<br />
1216. Liaison des deux termes 750<br />
1217. Substantif et adjectif 752<br />
1218. Composés et juxtaposés 753<br />
1219. Premier terme préfixe ou préposition 753<br />
1220. Premier terme des composés nominaux. Pa- 757<br />
1221. Pra- 759<br />
1222. SQ- 761<br />
1223. Q- 763<br />
1224. Préfixes de composés nominaux en baltique 765<br />
1225. Composés à premier terme verbal 765<br />
CHAPITRE XLI<br />
La composition (suite)<br />
1226. Forme du second terme 768<br />
1227. Les composés possessifs 768<br />
1228. Second terme verbal 772<br />
1229. Composés spéciaux 773<br />
1230. Composés slaves et calques 774<br />
1231. Les composés obscurcis 775<br />
1232. Accentuation des composés 777<br />
1233. Les composés en baltique 778<br />
INDEX 781