LES AVIONS MILITAIRES - EuroSAE
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mais seulement des problèmes pratiques de contrôle. Pour la main d'œuvre par<br />
contre, il était particulièrement difficile, sinon pour la fin du montage de l'aéronef et<br />
pour sa livraison, de contrôler le stade d'avancement. L'usage était de prévoir dans<br />
le contrat une courbe de financement (millièmes mensuels du coût de la main<br />
d'œuvre). L'industriel avait une tendance naturelle à demander des paiements forts<br />
en début de période, mais il était retenu par le fait que les mêmes courbes servaient,<br />
lorsque les contrats étaient bien faits, pour la révision des prix. Sur la période<br />
considérée, où l'inflation était forte, ce facteur incitait à la sagesse : une courbe<br />
haute en début de période de fabrication et basse ensuite avait pour conséquence<br />
des révisions de prix moins fortes.<br />
L'ETAT D'ESPRIT DES NEGOCIATEURS<br />
Nous avons exposé des méthodes de négociation. Mais le résultat était aussi<br />
sensiblement influencé par l'état d'esprit du négociateur.<br />
Une conscience aiguë de la nécessité d'avoir une industrie forte conduisait à la<br />
doctrine selon laquelle il fallait, non seulement donner du travail aux industriels<br />
français, mais aussi éviter de leur faire perdre de l'argent. Les coûts futurs étant<br />
évidemment très entachés d'incertitude, il pouvait arriver que les prix soient fixés du<br />
côté haut de la fourchette pour éviter de mettre l'industriel en faillite. On a évoqué<br />
plus haut la pratique de prise en charge par l'État des frais de démarrage des<br />
fabrications de série, même en cas d'exportation des premiers matériels fabriqués :<br />
on conçoit que cela créait un climat particulier, pouvant démobiliser les<br />
négociateurs.<br />
Par ailleurs, un négociateur de l'État se trouvant en situation de blocage avec<br />
l'industrie devait avoir un excellent « dossier » pour convaincre sa hiérarchie, jusqu'à<br />
un échelon convenable, d'entrer dans le débat et de peser de son poids (d'autant<br />
plus grand que située plus haut, elle pouvait user d'arguments tenant à d'autres<br />
affaires pour faire céder l'industriel).<br />
Par contre, fréquemment, l'industriel allait se plaindre à la hiérarchie de la dureté<br />
du négociateur étatique qui, refusant le prix industriel, faisait traîner les affaires. Et il<br />
est vrai que l'industriel était en général plus pressé que le négociateur d'aboutir,<br />
pour emporter la commande et pouvoir démarrer rapidement le travail. Mais souvent<br />
le pauvre négociateur était alors pris entre deux feux, l'état-major concerné étant<br />
légitimement pressé, comme l'industriel, de voir démarrer le programme, surtout si<br />
les crédits avaient déjà été votés. En outre, lorsque le négociateur était chargé de<br />
faire le prix d'une énième tranche d'avions, l'industriel mettait en avant le risque de<br />
frais supplémentaires pour « rupture de la chaîne de fabrication », afin d'obtenir une<br />
conclusion rapide<br />
Curieusement, dans ces situations de faiblesse le négociateur eut rarement<br />
recours à l'utilisation d'un « prix provisoire » (à transformer ultérieurement en prix<br />
forfaitaire, ou autre) ; sans doute craignait-il qu'une fois l'État engagé dans le<br />
programme, l'industriel devint intraitable, et aussi préférait-il régler une fois pour<br />
toute le problème. Pourtant l'industriel pouvait être sensible à la menace du prix<br />
provisoire, dans la crainte d'une transformation en un prix « en dépenses<br />
contrôlées » laissant de faibles marges et compliquant son travail administratif. Dans<br />
le cas du Super-Étendard, ladite menace fut efficace.<br />
D'autre part, il advint, au début des années soixante-dix, qu'un haut personnage<br />
de l'état-major de l'Armée de l’air, estimant les prix trop élevés, écrivît à la DTCA<br />
pour demander que les ingénieurs négociateurs soient financièrement intéressés<br />
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