Télécharger ce livre au format PDF - Index of

– J’ai… j’ai bu mon poids en champagne ce soir. Je ne devrais même pas faire l’effort de vous
répondre.
Il éclate de rire, un rire franc et authentique. J’adore ce rire. Eh oui ! ce mec me plaît. Il ne correspond
pas à l’idée que je me faisais de lui, mais il dégage quelque chose d’irrésistible. Et si ce soir je me
retrouve à crever d’envie de baiser, ce n’est pas seulement parce qu’il est chaud comme la braise. Il est
aussi bien dans sa peau. Ça me rappelle ce que m’a dit cette effrontée d’Evelyn, tout à l’heure : Si mes
invités ne sont pas contents de la façon dont je les traite, ils n’ont qu’à se tirer. Cette réflexion m’a
choquée ; et ma mère aurait fait une attaque en entendant ça. Mais j’ai aussi été très impressionnée.
Je constate que Damien Stark va encore plus loin que notre hôtesse.
– Cette femme s’appelle Giselle et possède la galerie où vont être exposées les peintures de Blaine,
me précise-t-il d’une voix douce.
– Ah bon ? Ce n’est pas Evelyn ?
– Evelyn a organisé le vernissage, c’est tout. Elle est devenue une sorte de mécène pour Blaine. Mais
demain soir, toutes les toiles vont déménager dans la galerie de Giselle. Cela fait plus d’une semaine que
nous avons prévu de nous voir ce soir, son mari, elle et moi. Nous travaillons parfois ensemble.
Impossible de partir en douce, mais je me suis quand même trouvé un coin tranquille pour vous appeler.
– Ah ! d’accord…
Audrey Hepburn a un mari…
Je suis transparente, je le sais, et ça m’énerve au plus haut point. D’un autre côté, Damien Stark
m’appelle pour me rassurer et cette délicate attention me touche. Mais il ne m’aura pas comme ça. Je dois
être forte, je dois lui dire qu’il n’aurait pas dû prendre cette peine. Je dois absolument mettre un terme à
cette chose qui naît entre nous. Ces bonnes résolutions partent aussitôt en fumée lorsque je lui demande :
– Où êtes-vous ?
– À La Mer.
Un restaurant-bar de Malibu, un endroit si chic que même moi j’en connais la réputation.
– Il paraît que c’est un restaurant excellent.
– En effet, la nourriture est exquise, mais ce qui le distingue vraiment des autres, c’est son ambiance
charmante, mais intime. L’endroit parfait pour boire un verre et parler affaires en toute discrétion. Ou ne
pas parler affaires, d’ailleurs.
Ah, ces intonations sensuelles… Je ne peux m’empêcher de me tortiller un peu sur la banquette.
– Et vous êtes là-bas strictement pour affaires ?
Il glousse tout bas et ça me chamboule.
– Je vous assure que je n’ai pas l’intention de m’envoyer en l’air avec Giselle et son mari. Les
hommes, ce n’est pas mon truc… les femmes mariées non plus.
Je garde le silence.
– Je veux vous revoir, Nikki. Et vous aimeriez beaucoup ce qu’on mange ici, j’en suis sûr.
– Juste ce qu’on y mange ?
J’ai voulu le railler un peu, mais prononcés à haute voix, ces mots ont pris une consonance gentiment
provocatrice. Je ferme les yeux.
Reprends-toi, ma vieille, sinon tu vas te retrouver tout en bas de cette pente glissante.
– Le café aussi est très bon, vous savez.
– Je… j’adore le café…
Je prends une grande inspiration, et j’ajoute :
– Mais ce serait une mauvaise idée.
– Ne dites pas ça, vous allez vous mettre à dos les centaines de milliers de paysans qui cultivent du
café dans le monde.
– Un dîner, un café, un rendez-vous avec vous… Très mauvaise idée.