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Je respire à fond plusieurs fois. J’ai retrouvé mon calme, je peux quitter le parking. Et caler ma radio<br />

sur une station de country pour écouter Johnny Cash me chanter ses problèmes. Des problèmes bien pires<br />

que les miens.<br />

Je jette un coup d’œil par la vitre, mais je n’aperçois pas mes clés. En soupirant, je rabats ma jupe sur<br />

mes jambes avant de sortir de la voiture. J’ai jeté le trousse<strong>au</strong> de toutes mes for<strong>ce</strong>s, je m’en souviens.<br />

Mes clés sont sûrement tombées plusieurs mètres plus loin, près de la Mer<strong>ce</strong>des vert foncé ou de<br />

l’énorme SUV Cadillac. Et je n’ai pas de lampe de poche… Enfin, si… une lampe de poche minuscule<br />

fixée à mon porte-clés ! Je n’ai plus qu’à espérer que la chan<strong>ce</strong> sera de mon côté.<br />

Je traverse le parking jusqu’à la Mer<strong>ce</strong>des <strong>au</strong> son de mes talons qui claquent sur le béton. J’ai laissé<br />

ma portière ouverte, mais la faible lumière de l’habitacle ne m’aide pas be<strong>au</strong>coup. Bref, je ne vois pas<br />

grand-chose, même dans la zone un peu mieux éclairée où sont garées la Mer<strong>ce</strong>des et la Cadillac. J’ai<br />

peur de filer mes bas si je m’agenouille, alors je me plie en deux comme je peux pour regarder sous les<br />

voitures.<br />

Après avoir fait deux fois le tour des véhicules, j’aperçois enfin mes clés, presque invisibles derrière<br />

l’un des pneus arrière de la Mer<strong>ce</strong>des. Je les ramasse, puis me fige. Du coin de l’œil, je viens de saisir<br />

un mouvement. Là-bas, près de la cage d’escalier, je distingue vaguement une silhouette masculine.<br />

– Il y a quelqu’un ?<br />

L’ombre ne bouge pas, et je frissonne, déstabilisée. J’ai l’impression qu’on m’observe.<br />

Je crie :<br />

– Hé, vous ! Qui êtes-vous ?<br />

Dois-je retourner à ma voiture, donc m’approcher de l’ombre, ou bien repartir dans la tour Stark et<br />

prévenir la sécurité ?<br />

Je brandis mon téléphone :<br />

– J’appelle la sécurité ! Je vous suggère d’aller faire un petit tour !<br />

D’abord, l’homme ne bouge pas, puis il recule et disparaît, comme absorbé par une zone d’obscurité<br />

plus pr<strong>of</strong>onde. Un peu plus tard, j’entends grin<strong>ce</strong>r la porte de l’escalier. Elle se referme avec un bruit<br />

sourd.<br />

Plutôt secouée, je repars en hâte vers ma voiture. Je n’ai plus qu’une idée en tête, sortir d’ici.<br />

Quand j’arrive <strong>au</strong> <strong>ce</strong>ntre commercial de West Hollywood, j’en ai ma claque de Johnny Cash. Je suis<br />

revenue à la station de rock classique, et c’est <strong>au</strong> son du groupe Journey que je me glisse entre deux<br />

bagnoles garées près de l’Escalator bien éclairé menant <strong>au</strong> cœur de la galerie.<br />

Jamie ne m’a pas rappelée. Tant mieux. J’ai réussi à dompter mon côté Mister Hyde, à l’enfouir en moi<br />

une fois encore. Je ne tiens pas du tout à revenir là-dessus pour elle, <strong>ce</strong> serait <strong>au</strong>-dessus de mes for<strong>ce</strong>s. Je<br />

ne veux plus penser à ça. Pas question de remuer le coute<strong>au</strong> dans la plaie.<br />

Et, surtout, je refuse de réfléchir à la façon dont j’ai fui Damien Stark.<br />

Que va-t-il va penser de moi, maintenant ?<br />

Stop ! Je dois passer à <strong>au</strong>tre chose.<br />

De <strong>ce</strong> côté-ci de Los Angeles, personne ne voudrait de ma vieille caisse pourrie, pas même un voleur<br />

de bagnoles, mais je la verrouille quand même. À moi le <strong>ce</strong>ntre commercial, ses produits de be<strong>au</strong>té, ses<br />

ch<strong>au</strong>ssures et ses sacs à main ! Et interdiction de penser à Damien Stark.<br />

L’Escalator m’entraîne toujours plus h<strong>au</strong>t. J’ai l’impression de m’élever <strong>au</strong>-dessus des ténèbres, <strong>au</strong>dessus<br />

de l’enfer, et d’émerger dans un paradis inondé de lumière. Des gens superbes partout, tous en<br />

plastique, comme moi, comme les mannequins dans les vitrines. Tous cachés derrière un masque. Et tous,<br />

nous nous pavanons en faisant semblant d’être parfaits.<br />

Dans les vitrines, les be<strong>au</strong>x vêtements m’attirent comme le chant des sirènes. Épave emportée par le

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