Livre-objet du 40e anniversaire - Gymnase du Soir
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Danièle GEFFROY KONSTACKY<br />
Bachelière en langues modernes, puis secrétaire trilingue de direction,<br />
se présente avec succès à l’examen préalable de Lettres en 1972 pour<br />
obtenir sa licence quatre ans plus tard; depuis 2002, Chevalier dans<br />
l’Ordre des palmes académiques «pour services ren<strong>du</strong>s à la culture<br />
française».<br />
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« Dans la ville des reines de Bohême, au confluent de l’Elbe et de l’Orlice »<br />
14 mars 2005. Le train file à travers la campagne en cette fin d’hiver qui se prolonge. Dans deux heures<br />
je serai à Prague pour un déjeuner à l’Ambassade <strong>du</strong> Canada en l’honneur d’une écrivaine québécoise.<br />
Le train file et je pense à ce texte que je devrais avoir envoyé et qui n’arrive pas à prendre forme. Comment<br />
parler de soi? Comment évoquer des années si riches que je ne les ai pas vu s’écouler?<br />
Septembre 1961. L’autobus s’éloigne en direction de la Place Chauderon; je continue à pied par la rue<br />
de l’Ale, la rue St-Laurent, le Grand-Pont, jusqu’au Passage St-François, pour atteindre le Centre européen<br />
Langue et Civilisation de Lausanne. Quatorze ans <strong>du</strong>rant j’ai emprunté ce trajet, en regardant chaque fois<br />
avec un battement de cœur la Cathédrale. Je ne savais alors pas que, pendant quatre ans, j’allais monter<br />
vers elle, souvent quatre à quatre par les Escaliers <strong>du</strong> Marché, pour assister aux cours de professeurs<br />
auxquels vont toute ma reconnaissance pour la formation d’esprit qu’ils m’ont donnée. Toutefois, avant de<br />
franchir les portes de l’Université il me fallait passer le préalable de Lettres. La préparation assurée par le<br />
<strong>Gymnase</strong> <strong>du</strong> <strong>Soir</strong> m’avait été recommandée; les exigences étaient grandes, mais elles permettaient<br />
d’atteindre le but que l’on s’était fixé et c’est sans aucun doute le plus beau résultat pour un établissement<br />
de formation.<br />
Août 1979. La brouette m’emmène vers Echallens, vers un établissement secondaire moderne en pleine<br />
campagne! Intégrée à un corps enseignant soudé, titularisée, c’est avec enthousiasme que j’encourage mes<br />
élèves à réaliser des films en anglais, à travailler sur projets dans le cadre <strong>du</strong> français, à développer leur<br />
personnalité. Le plaisir d’enseigner. Jusqu’au jour où... la Tchécoslovaquie cherche des formateurs pour<br />
l’enseignement <strong>du</strong> français.<br />
Fin juillet 1990. Une voiture file à travers la campagne en direction de Hradec Králové. Pendant trois<br />
semaines, je vais animer un séminaire de formation continue pour les enseignants de Bohême orientale. La<br />
voiture est pleine de matériel, car le recteur m’a prévenue: «nous n’avons rien en français». En 1991, la<br />
voiture reprend la même route pour deux semaines. En 1992, j’obtiens un congé d’une année pour ouvrir<br />
une section de français à la Faculté de Pédagogie de Hradec Králové. Un vent de libéralisation souffle<br />
dans toute la Tchécoslovaquie et il est exaltant de participer à cette marche en avant de tout un pays.<br />
Treize ans ont passé, treize ans de bonheur auprès d’un compagnon attentionné, de ses enfants, nos<br />
enfants, et de nos petits-fils, dans la ville des reines de Bohême, au confluent de l’Elbe et de l’Orlice, au<br />
cœur d’une région de forêts et de châteaux. Le français est désormais bien présent à Hradec Králové et<br />
dans sa région; on y vient à l’occasion des Journées de la Francophonie, des soirées-club <strong>du</strong> jeudi soir qui<br />
réunissent tous ceux qui veulent parler français, chanter en français, rire entre amis. L’année dernière Jean-<br />
Luc Bideau nous présentait L’Echappée belle de Nicolas Bouvier; demain je recevrai Anne Cuneo, invitée<br />
par l’Ambassade de Suisse pour nous parler des événements qu’elle a vécus en 1968 et qu’elle relate dans<br />
son roman Prague aux doigts de feu.<br />
La boucle est bouclée, une Lausannoise reçoit une Lausannoise, dans la ville qui l’a adoptée et à laquelle<br />
elle a transmis sa passion pour la langue française.