Livre-objet du 40e anniversaire - Gymnase du Soir

« Quel que soit le système éducatif considéré, il existera toujours des exclus »
A la lecture de ces quarante parcours de vie, nous ne pouvons être qu’admiratifs devant celles et ceux qui
ont consenti sacrifices et efforts afin de conjuguer études, vie professionnelle et parfois charge de famille.
Nous, c’est-à-dire les autres, qui ont eu la chance de connaître une trajectoire scolaire peu perturbée de
l’école enfantine aux cycles universitaires. Non pas que nous n’ayons point connu quelques égarements,
mais ceux-ci n’ont pas porté aux mêmes conséquences. A les lire nous aurions presque des regrets, comme
si nous avions troqué la difficulté contre l’ennui.
Visiblement le jeu en vaut la chandelle, pour qui a pu changer de vie certes, mais aussi pour les autres,
alors bénéficiaires de la richesse des expériences accumulées. Sinon pourquoi seraient-ils aussi nombreux
à soutenir cette école dite de la deuxième chance? Parce qu’elle constitue une échelle de secours dont on
se sert quand l’ascenseur social tombe en panne, mais aussi parce que favoriser l’accession au savoir et
à la connaissance, c’est un peu lutter contre l’inhumanité de la race humaine.
Les contributions de nos auteurs font référence de façon récurrente à la qualité de l’enseignement. Il vaut la
peine de s’y attarder; en effet, aujourd’hui, l’Ecole est au carrefour de nombreuses problématiques et les
compétences qui sont visées dépassent souvent le cadre scolaire. Les adultes déjà insérés dans la vie active
se dirigent vers le Gymnase du Soir, munis d’une forte envie de connaissance. Pour ce public, il est donc
possible, sinon indispensable, de se concentrer sur un enseignement à caractère académique capable
d’apporter immédiatement une réponse à des exigences nombreuses. C’est donc ce niveau d’excellence
qui doit être maintenu. Nous pensons qu’au fil des ans le Gymnase du Soir a fait ses preuves, qu’il a joué
son rôle de passerelle avec efficacité et économicité. Néanmoins pourra-t-il encore remplir sa mission à
l’avenir? Il ne s’agit pas de savoir si l’on défend la pérennité d’une institution, mais bien de s’interroger sur
la pertinence et l’actualité de la tâche qui lui a été attribuée.
D’un point de vue général, personne n’imagine que remplacer le terme de sélection scolaire par celui
d’orientation puisse résoudre des problèmes qui nécessitent encore des mesures compensatoires. Autrement
dit, une version appliquée à la pédagogie du théorème de Goedel pourrait affirmer que, quel que soit le
système éducatif considéré, il existera toujours des exclus. Ainsi, dans un contexte de changement et de
perméabilité entre les filières, le Gymnase du Soir est le plus à même d’apporter une réponse adéquate
entre la satisfaction d’une demande, parfois induite, et les exigences nécessaires à la réussite d’études
universitaires.
Les mutations de l’organisation sociale, auxquelles nous assistons, vont probablement accroître les
interconnexions entre le monde du travail et les Hautes Ecoles. Une de mes plus grandes frustrations est de
voir certains de nos élèves, parmi les plus brillants, renoncer à l’Université pour se rabattre sur des écoles
dites subséquentes qui permettent d’obtenir plus rapidement un revenu et de subvenir ainsi aux besoins de
leur famille. Peut-être les Hautes Ecoles aménageront-elles un jour des filières qui concilient activité
professionnelle et études universitaires. A quand une Université du Soir?
Olivier MAGGIONI
Directeur du Gymnase du Soir
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