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Le miroir dans l'œuvre de Michelangelo Pistoletto - CDH

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<strong>de</strong> <strong>Pistoletto</strong>, lorsque <strong>dans</strong> l’Autoportrait en or, en peignant son image sur une<br />

substance sublimée rappelant l'espace cosmique, il se construit sa propre icône.<br />

Mais avec le mètre cube d’infini, on dépasse le tableau, la fenêtre albertienne. Une<br />

fois <strong>de</strong> plus, l’artiste, à travers son art, essaye d’exprimer l’idée du cosmos. <strong>Pistoletto</strong><br />

produit une machine, « une Pierre Noire » (mot utilisé <strong>dans</strong> tout ce qui il y a <strong>de</strong> plus<br />

mystique <strong>dans</strong> ce concept, du caillou du même nom <strong>de</strong> la Kaaba à Mecque jusqu'au<br />

bloc <strong>de</strong> granit <strong>dans</strong> "Space Odissey" <strong>de</strong> Kubrick) nous permettant <strong>de</strong> faire un voyage<br />

aller-retour vers les frontières <strong>de</strong> l’au-<strong>de</strong>là.<br />

L’objet est impénétrable physiquement et comme le souligne l’artiste, « en<br />

mettant le nez <strong>de</strong><strong>dans</strong>, la dimension <strong>de</strong> ce qui se produirait à l’intérieur se serait<br />

altérée et le travail aurait changé ». Il s’agit avec cette œuvre, <strong>de</strong> rentrer à l’intérieur<br />

avec l’esprit. <strong>Le</strong> spectateur côtoie un objet qui exprime l’infini.<br />

Cette œuvre est une création issue <strong>de</strong> l’élan créateur <strong>de</strong> la série <strong>de</strong>s objets en<br />

moins, elle ouvre une autre brèche <strong>de</strong> recherche pour <strong>Pistoletto</strong>. <strong>Le</strong> <strong>miroir</strong> rencontrant<br />

son double, se détache <strong>de</strong> la figure humaine, et donne lieu à une série <strong>de</strong> propriétés.<br />

Quand <strong>de</strong>ux <strong>miroir</strong>s se rencontrent, ils se multiplient, jusqu’à l’infini. Cette rencontre<br />

mène <strong>Pistoletto</strong> vers <strong>de</strong> nouvelles réflexions dirigées vers la recherche <strong>de</strong>s outils qui<br />

ai<strong>de</strong>nt à mieux comprendre et représenter le mon<strong>de</strong>.<br />

L’infini : division et multiplication du <strong>miroir</strong><br />

<strong>Le</strong>ibniz théorise que la perception <strong>de</strong> quelque chose <strong>de</strong> grand est rendu<br />

possible par la somme d’une infinité <strong>de</strong> petites perceptions dont on ne se rend pas<br />

compte. Il argumente que « Il y a mille marques, qui font juger qu’il y a à tout moment<br />

une infinité <strong>de</strong> perceptions en nous, mais sans aperceptions et sans réflexion, c’est-àdire<br />

<strong>de</strong>s changements <strong>dans</strong> l’âme même dont nous ne nous apercevons pas » (22)<br />

<strong>Le</strong>ibniz parle ainsi du “presque rien”, <strong>de</strong>s états d’âmes qui passent inaperçus, la<br />

somme <strong>de</strong>squels définit une sensation <strong>dans</strong> un moment précis. Cette considération <strong>de</strong><br />

la divisibilité et constitution d’un objet en une infinité <strong>de</strong> parties est une <strong>de</strong>s bases <strong>de</strong><br />

la pensée infinitésimale <strong>de</strong> <strong>Le</strong>ibniz et sera utilisée <strong>dans</strong> le travail <strong>de</strong> division du <strong>miroir</strong>.<br />

<strong>Le</strong> <strong>miroir</strong> tel que pensé par <strong>Pistoletto</strong> partage <strong>de</strong>s caractéristiques avec la mona<strong>de</strong><br />

leibnizienne qui est une constante, une unité éternelle, in<strong>de</strong>structible, immuable créée<br />

par Dieu. <strong>Le</strong> <strong>miroir</strong>, grâce à sa caractéristique physique, ne change pas<br />

qualitativement sa propriété même si elle est coupée ou cassée. Il est immuable en<br />

quelque sorte. Ce qui caractérise la mona<strong>de</strong> c’est non seulement le fait qu’elle est une<br />

unité irréductible mais aussi qu’elle a la capacité <strong>de</strong> contenir une sorte d’ADN <strong>de</strong><br />

l’univers. <strong>Le</strong>s mona<strong>de</strong>s s’organisent <strong>dans</strong> une harmonie pré-établie par Dieu, chaque<br />

mona<strong>de</strong> étant un petit <strong>miroir</strong> <strong>de</strong> l’univers. Selon le modèle leibnizien, l’univers,<br />

divisible à l’infini, est donc constitué d’unités qui le reflètent. <strong>Le</strong> <strong>miroir</strong> imprime <strong>de</strong><br />

façon instantanée une image, le <strong>miroir</strong> a une “mémoire momentanée”, fugitive, pour<br />

utiliser les propres paroles <strong>de</strong> <strong>Le</strong>ibniz. « Per me esiste un solo specchio, diviso e qui<br />

moltiplicato in quanti specchi si possono trovare. » (23)<br />

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