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Le miroir dans l'œuvre de Michelangelo Pistoletto - CDH

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peinture noire, la fenêtre ne montre que du noir là ou il <strong>de</strong>vrait y avoir <strong>de</strong> la<br />

transparence, <strong>de</strong> la lumière et par conséquent une vision traversante du mon<strong>de</strong><br />

extérieur. Duchamp donne à voir une fenêtre par la forme <strong>de</strong> son œuvre puisqu’il fait<br />

un « ready-ma<strong>de</strong> » d’une fenêtre dite « à la Française ». Mais il introduit l’œuvre <strong>de</strong><br />

<strong>Pistoletto</strong> <strong>dans</strong> son choix <strong>de</strong> rendre opaque le fond <strong>de</strong> la fenêtre.<br />

<strong>Pistoletto</strong>, <strong>dans</strong> l’Autoportrait or (fig3), illustre les <strong>de</strong>ux thèmes <strong>de</strong> la porte et du<br />

fond. <strong>Le</strong> tableau mesure <strong>de</strong>ux mètres <strong>de</strong> hauteur. Son format est à l’échelle réelle<br />

d’un corps <strong>de</strong>bout qui se déplace <strong>dans</strong> l’espace. Il est placé contre un mur et posé sur<br />

le sol, il n’est plus suspendu comme la fenêtre albertienne. <strong>Le</strong> fond du tableau <strong>de</strong>rrière<br />

son autoportrait peint est un monochrome doré.<br />

Face à ce tableau, sommes-nous alors encore en présence d’une fenêtre ou<br />

plutôt d’un <strong>miroir</strong>? Tous <strong>de</strong>ux donnent à voir une composition, mais le <strong>miroir</strong> a cette<br />

spécificité <strong>de</strong> repousser la lumière en la réfléchissant, il donne à voir <strong>de</strong>s scènes<br />

d’intérieur domestique et confond le plan <strong>de</strong> la représentation avec le plan matériel du<br />

tableau. En effet, la surface noire brillante <strong>dans</strong> le présent (fig7) <strong>de</strong> 1961, s’anime en<br />

présence <strong>de</strong> spectateurs. Plus il y a d’animation et <strong>de</strong> reflets sur le fond, plus la figure<br />

représentée, l’autoportrait, s’efface <strong>de</strong>vant un fond autonome. <strong>Le</strong>s reflets agrandissent<br />

l’espace limité <strong>de</strong> la toile et présentent le mon<strong>de</strong> du dédoublement, propre au <strong>miroir</strong>.<br />

Déjà pour Matisse, le thème <strong>de</strong> la fenêtre n’est plus seulement une limite entre <strong>de</strong>ux<br />

univers : la représentation et le mon<strong>de</strong> réel, mais elle <strong>de</strong>vient le lieu <strong>de</strong> prolongement<br />

<strong>de</strong> l’espace <strong>de</strong> représentation.<br />

« Quant j’ai peint mon autoportrait sur le <strong>miroir</strong>, j’ai vu que tout l’espace<br />

s’ouvrait et <strong>de</strong>venait vivant. Je suis passé du pigment à l’acier poli. D’une<br />

représentation verticale, figée et passée à un espace horizontal ouvert, présent et<br />

futur. Je peignais l’image <strong>dans</strong> le lieu <strong>de</strong> l’image » (9)<br />

<strong>Pistoletto</strong> parle du "lieu <strong>de</strong> l’image", ou encore affirme que « <strong>Le</strong> <strong>miroir</strong> est le lieu<br />

d’une expérience. » En préférant le mot <strong>de</strong> lieu, à celui d’espace, <strong>Pistoletto</strong> nous<br />

informe sur sa perception du <strong>miroir</strong> et <strong>de</strong> l’espace environnant.<br />

L’espace est un terme abstrait qui est illimité, c’est une notion qui est extensible<br />

et libre. Dans l’espace, on se déplace, mais cela reste au niveau <strong>de</strong>s choses et <strong>de</strong>s<br />

objets. <strong>Le</strong> lieu est créé par le vivant : pour qu’il y est un lieu, il faut une présence<br />

humaine. Pour Aristote, un lieu est un espace qui est autour <strong>de</strong> l’humain, un espace<br />

vital. Il est contenu, délimité par une frontière.<br />

En considérant ces <strong>de</strong>ux termes, on comprend que l’œuvre <strong>de</strong> <strong>Pistoletto</strong> n’a <strong>de</strong><br />

sens qu’avec la présence du spectateur. <strong>Le</strong> "lieu <strong>de</strong> l’image" et le "lieu d’une<br />

expérience" sont délimités par l’objet <strong>miroir</strong>, <strong>dans</strong> son reflet. L’homme ne peut être<br />

contenu <strong>dans</strong> le lieu du <strong>miroir</strong> physiquement, sa matérialité nous l’empêche, même<br />

Alice (<strong>Le</strong>wis Carroll) atteint le lieu spéculaire par ses rêves et y découvre une tout<br />

autre conception <strong>de</strong> l’espace, ce n’est que pur fantasme. Même si l‘espace intérieur<br />

du <strong>miroir</strong> n’est pas occupé par une présence humaine, c’est le double du spectateur<br />

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