Oral History of Europe in Space - European University Institute

après ils disent : « Et bien oui, on a fait cela, c’était pour le bien du programme… » Et nous
on devait aller devant les pays membres et dire : « Sorry, mais on a besoin de… je crois que
c’était 30 millions d’ECU de plus. »
[A ce moment-là Raymond Orye appelle au téléphone, ce qui fait sourire tout le monde.]
GvR : Ah oui, il est sur le point de nous rendre visite avec d’ailleurs le responsable qui était
Vignelles de ce dépassement de 30 millions.
NT : Donc vous êtes restés bien copains tous?
GvR : Oh, oui ! D’ailleurs c’est quelque chose de caractéristique de l’activité spatiale. Peutêtre
partout – personnellement je connais mieux l’Europe ; les gens bien se bagarraient, ils
n’étaient pas d’accord mais ils restaient AMIS. On était vraiment amis avec les bons ; et en
général toute l’équipe… aussi bien à l’ESA, qu’au CNES, à Arianespace, les gens étaient
bons. Et même si, comme sur les 30 millions, on avait une grande bagarre, permettez
l’expression, ‘on s’engueulait’, après on restait amis. Des gens comme Vignelles, par
exemple, qui n’est pas exactement le plus facile, c’est pour cela qu’il réussit des choses
comme Ariane 5, c’est resté un ami.
NT : L’accident de Challenger, vous vous en souvenez ?
GvR : Oui, parce que cela a mis fin à toute cette histoire de TCI. La décision prise par le
Président des Etats-Unis était que le Shuttle était strictement pour leur propre utilisation ou
pour des satellites qui étaient grands au point qu’on ne pouvait les lancer avec d’autres
[lanceurs]. Le Shuttle c’est maintenant vers la Space Station. Le Shuttle c’était une erreur
dramatique. Si nous on en a fait, eux ils en ont fait aussi…
NT : Je vous propose que l’on interrompe un moment sur les programmes et que l’on parle de la vie un
peu après l’ESA, que vous avez quittée en 1991. Quelles étaient les circonstances de votre départ,
c’était votre choix ?
GvR : Non. Non, mais c’était le règlement. J’avais déjà été prolongé au-delà de 65 ans. Et
puis, on ne trouvait pas de successeur. Chaque fois, il y a avait eu quelques prétendants mais
ils étaient inacceptables ; je ne vais pas les nommer, ce ne serait pas gentil. Chaque fois j’étais
prolongé, puis il y eut la Conférence ministérielle de Munich où [hésitation], Jean-Marie
Luton insistait pour que je reste au moins jusqu’à la Conférence.
NT : Peu après vous prenez la présidence de l’ISU. Je vais profiter de la présence de
Monsieur Oosterlinck qui connaît bien toutes ces affaires pour que ce soit lui qui vous
interviewe sur cette période. Si vous le voulez bien ?
GvR : Je ne sais pas. Je ne suis pas sûr que j’aie très envie de parler de l’ISU. [Monsieur van
Reeth manifeste une certaine nervosité à ce moment-là].
NT : On peut déjà peut-être expliquer ce qu’est l’ISU.
GvR : Oui, cela c’est une bonne chose, si René peut le faire.
RO : Oui, et puis voir comment l’ESA a été impliquée dans l’ISU…
GvR : Oui c’est surtout cela... parce que franchement… Déjà, ils ont eu une première réunion
quelque part près de Harvard. A la deuxième – je peux peut-être raconter cela – j’étais en Inde
pour l’IAF et près de la piscine, il y a [Peter] Diamandis, que je ne connaissais pas, qui est
venu et que j’ai engueulé en lui disant : « Vous m’invitez à venir aux Etats-Unis pour votre
première réunion, cela coûte un passage en première classe pour les Etats-Unis et puis vous
me donnez un quart d’heure, ou 20 minutes maximum pour parler. Moi, je ne me déplace pas
28