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E nfin,<br />
El Watan - Samedi 29 octobre 2011 - 4<br />
INTERNATIONALE<br />
VICTIMES DE LA RÉPRESSION LORS DE LA RÉVOLUTION DE JANVIER<br />
Le gouvernement ordonne la prise<br />
le gouvernement de Béji<br />
Caïd Essebsi a décidé de pren-<br />
dre en charge les victimes de la<br />
répression lors de la révolution du 14<br />
janvier. La décision est tombée mardi,<br />
après une semaine de pression et de<br />
lobbying par des victimes qui ont choisi<br />
d’entamer une grève de la faim sur<br />
le lieu symbolique de La Casbah, siège<br />
du Premier ministère. La grève commencée<br />
le 19 octobre suivait de longs<br />
mois de lutte pour amener le gouvernement<br />
à reconnaître aux victimes le<br />
droit à la prise en charge et le statut<br />
de martyr de la révolution. C’est un<br />
collectif de blogueurs, Nawat (noyau),<br />
qui a soutenu toutes les démarches des<br />
victimes. «On a constaté une négligence<br />
flagrante donnant l’impression<br />
que l’Etat a laissé tomber ces gens»,<br />
raconte Ramzi Betayeb, membre de<br />
Nawat. Ce groupe de militants volontaires<br />
s’est penché, dès l’éclatement de<br />
la révolution, en décembre dernier, sur<br />
les cas des victimes de la répression en<br />
menant des enquêtes et en établissant<br />
un fichier des victimes. Les événements,<br />
qui ont débuté le 25 décembre<br />
et jusqu’après la fuite de Ben Ali, ont<br />
fait quelque 1500 victimes dont 344<br />
morts. Le dossier de ces victimes a ensuite<br />
été soulevé à chaque fois par les<br />
révolutionnaires mais sans en constituer<br />
une priorité.<br />
Mais le 21 septembre dernier, le<br />
Conseil des ministres a évoqué la<br />
possibilité de rédaction d’un décret<br />
qui offrirait la prise en charge aux<br />
victimes et la reconnaissance de l’Etat<br />
du statut de martyr de la révolution.<br />
L’évolution de la position du gouvernement<br />
on la doit pour beaucoup aux<br />
a percée de Hechmi Hamdi, patron de la<br />
L chaîne satellitaire Al Mustakilla émettant à<br />
partir de Londres, intrigue les Tunisiens. Ancien<br />
militant d’Ennahda avant de soutenir ouvertement<br />
le président Ben Ali, ce natif de Sidi Bouzid<br />
apparaît comme le trublion des premières élections<br />
libres tunisiennes. Les heurts enregistrés<br />
ces deux derniers jours dans sa localité sont<br />
notamment liés à l’invalidation des six listes de<br />
son parti, El Aridha (Pétition populaire pour la<br />
liberté et la justice). Le parcours de cet homme<br />
d’affaires, parlant de lui à la troisième personne,<br />
est atypique, passant de Tunis à Alger et de Khartoum<br />
à Londres. Dans les journaux tunisiens, il<br />
est qualifié de «mystérieux aventurier politique»,<br />
sinon de «clown politique».<br />
Les monologues diffusés par sa chaîne donnent<br />
de lui l’image d’un homme narcissique, se rêvant<br />
président de la Tunisie. Hechmi Hamdi est surtout<br />
spécialiste en retournement de veste. Etudiant, il<br />
a fait partie du mouvement Ennahda tout en<br />
continuant à écrire dans le journal Essabah, ex-<br />
en charge des blessés<br />
L’armée tunisienne empêchant les acteurs de la Révolution du jasmin à manifester dans les rues de Tunis en janvier dernier<br />
efforts de Nawat et à la persévérance<br />
d’un groupe composé de sept victimes.<br />
Mais les intentions du gouvernement<br />
primant sa loyauté sans faille<br />
au système. Lors de la chasse<br />
à l’islamiste lancée par le<br />
régime tunisien, il a fui vers<br />
l’Algérie avant de gagner<br />
Londres. Là-bas, il aurait<br />
connu une Algérienne, issue<br />
d’une famille aisée vivant<br />
à Londres et portant le nom<br />
de Yousfi, qui l’aurait aidé à<br />
créer la revue Al Moustakilla.<br />
Dans son exil londonien, il<br />
établira un réseau en toile<br />
d’araignée, n’hésitant pas à<br />
prendre l’argent de Hassan El Tourabi au Soudan<br />
pour faire la propagande de Omar El Béchir. Le<br />
divorce d’avec le parti Ennahda a été officiellement<br />
proclamé lorsque, dans un débat d’Al Jazeera<br />
qui le confrontait à Rached Ghannouchi, il<br />
a brandi un exemplaire du Coran «offert par Ben<br />
Ali», affirmant avoir vu de ses propres yeux Leïla<br />
Trabelsi faisant la prière et incitant ses enfants<br />
n’ont pas été suivies d’actes. «Nous<br />
avons compris quelque temps après<br />
que ces déclarations n’étaient qu’un<br />
PHOTO :D. R.<br />
calmant préélectoral», explique encore<br />
Ramzi Betayeb. Nawat a remis la<br />
pression via les médias et le 3 octobre,<br />
à suivre les préceptes de l’Islam.<br />
Peu après, Hamdi changea son fusil<br />
d’épaule en faisant défiler sur le<br />
plateau d’Al Moustakilla tous les<br />
ténors de l’opposition tunisienne,<br />
dont la journaliste et militante<br />
Sihem Ben Sedrine, qui écopa de<br />
quelques jours de prison à la suite<br />
d’un coup d’éclat sur cette chaîne.<br />
LES «PETITS BARONS» DU RCD<br />
Aujourd’hui, Khelil Ezzaouia d’Ettakatol<br />
et la même Sihem Ben<br />
Hechmi Hamdi<br />
Sedrine l’accusent d’avoir utilisé<br />
les réseaux dormants du parti de Ben Ali, le RCD,<br />
pour se frayer une place dans la Constituante.<br />
Et les commentateurs tunisiens de s’indigner :<br />
«Si les communications entre l’Arabie Saoudite<br />
et la Tunisie sont très surveillées, il n’en est pas<br />
de même pour les communications entre Abha<br />
(lieu de résidence de Ben Ali) et Londres et entre<br />
Londres et Tunis. Il suffit de contacter, via Al<br />
PHOTO :D. R.<br />
trois victimes, une femme atteinte de<br />
quatre balles et deux hommes originaires<br />
de Gasrine, amputés de la jambe,<br />
sont admis à l’hôpital militaire. Mais<br />
là aussi, en l’absence d’un engagement<br />
clair du gouvernement, très peu a été<br />
fait. Victimes et militants engageront<br />
alors un sit-in devant l’hôpital militaire<br />
et une attaque dans la presse avant que<br />
la grève de la faim ne soit entamée.<br />
Mardi, le président Foued Lembazaâ<br />
a donné instruction au ministère de la<br />
Défense de prendre en charge sur-lechamp<br />
les sept victimes, auxquelles<br />
sera ajoutée une fille souffrant de<br />
graves problèmes de respiration dus<br />
aux gaz lacrymogènes. Six ambulances<br />
ont été dépêchées et ont conduit<br />
les concernés à l’hôpital militaire. Ces<br />
derniers ont mis fin à leur grève de la<br />
faim, en signe de satisfaction. Au sein<br />
de Nawat, on salue aussi la décision du<br />
gouvernement tout en soutenant l’exigence<br />
de modifier légèrement le décret<br />
et introduire la possibilité de transfert<br />
à l’étranger pour des soins.<br />
Nouri Nesrouche<br />
LA FIDH APPELLE LES ÉLUS <strong>À</strong> S’ENGAGER FERMEMENT<br />
EN FAVEUR DES LIBERTÉS ET DES DROITS FONDAMENTAUX<br />
Après que le parti de Ghannouchi (Ennahda) ait remporté 41,70% des voix et<br />
devienne la première force politique en Tunisie, la Fédération internationale des<br />
droits de l’homme (FIDH) a réitéré, hier, son appel aux membres de l’Assemblée<br />
constituante ainsi qu’aux futures autorités tunisiennes compétentes à «s’engager<br />
fermement dans la construction d’une Tunisie démocratique, respectueuse des<br />
libertés et des droits fondamentaux et à ne pas déroger à ces principes et valeurs<br />
universels qui ont été à la base de la révolution». En dépit de quelques dépassements,<br />
les observateurs tunisiens et internationaux ont unanimement attesté de la<br />
tenue d’un scrutin libre et transparent, estime cette ONG dans un communiqué<br />
rendu public, hier, sur son site électronique. «Les 217 membres de l’Assemblée<br />
constituante aujourd’hui élus bénéficient ainsi d’une forte légitimité. Leur responsabilité,<br />
ainsi que celle du futur gouvernement qui sera mis en place dans<br />
les prochains jours, n’en sera que plus grande en tant que promoteurs des revendications<br />
de la société tunisienne qui s’est soulevée contre la dictature il y a<br />
à peine 9 mois», espère-t-elle, sans nommer la couleur politique des vainqueurs<br />
(Ennahda, ndlr). «Cette élection des membres de l’Assemblée constituante<br />
constitue une étape essentielle dans ce processus de démocratisation», conclut le<br />
document de la FIDH. M.-F. G.<br />
LES TUNISIENS VOIENT EN SA VICTOIRE «LA MAIN DE BEN ALI»<br />
Hechmi Hamdi, le trublion qui rêve d’un destin présidentiel<br />
Aridha, les ‘petits barons’ du RCD, au chômage<br />
forcé, pour qu’ils s’exécutent en coulisses en<br />
donnant les consignes de vote en catimini». Sihem<br />
Ben Sedrine dit, à son propos, qu’il était prêt<br />
à pactiser avec le diable pour se faire une place<br />
en Tunisie. «Pendant que nous focalisions notre<br />
attention sur les 40 partis créés par des personnes<br />
tournant autour de Ben Ali, la consigne a été<br />
donnée aux anciens du RCD pour voter pour le<br />
parti de Hechmi Hamdi», a-t-elle observé.<br />
Mais c’est aussi grâce aux promesses électorales,<br />
souvent irréalisables, que cet ovni de la politique<br />
a pu glaner des voix. «Il a fait rêver les gens en<br />
abusant de leur pauvreté et de leur ignorance»,<br />
a analysé Saif Nsiri, 34 ans, membre du Parti du<br />
travail tunisien (PTT). Celui qui se prend pour<br />
un prophète dans son pays ne rentrera pas en Tunisie.<br />
S’il affirme que cette décision est motivée<br />
par le fait que Hammadi Djebali (Ennahda) soit<br />
pressenti pour prendre les rênes du gouvernement<br />
tunisien, il se murmure, à Tunis, qu’il craint des<br />
poursuites judiciaires. Amel Blidi