DOSSIER Ce - Gouvernement du Québec
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<strong>DOSSIER</strong><br />
Photo : Denis Garon<br />
L’ÉCOLE SECONDAIRE<br />
HENRI-BOURASSA<br />
Gilles Archambault,<br />
directeur de l’école secondaire<br />
Henri-Bourassa à Montréal-Nord<br />
« Il faut nous demander si notre<br />
style de gestion convient pour<br />
faire progresser les nouveaux<br />
enseignants. »<br />
Considéré comme un établissement<br />
d’enseignement ayant besoin<br />
<strong>du</strong> soutien particulier accordé à<br />
l’école montréalaise, l’école Henri-<br />
Bourassa, dirigée depuis cinq ans<br />
par Gilles Archambault, voit son<br />
personnel se renouveler à un<br />
rythme effarant. L’insertion des<br />
jeunes enseignants et enseignantes<br />
constitue donc un dossier<br />
prioritaire pour son directeur et,<br />
comme c’est un dossier qu’il<br />
affectionne particulièrement, il le<br />
garde pour lui. Il fait lui-même,<br />
seul, les entrevues de sélection et<br />
il ne reçoit que trois candidats<br />
pour chaque poste. <strong>Ce</strong> sont, bien<br />
sûr, des personnes déjà inscrites<br />
sur les listes de la commission<br />
scolaire. En juin, il présente les<br />
nouveaux enseignants et enseignantes<br />
à l’ensemble <strong>du</strong> personnel<br />
et aux mentors qu’il a choisis<br />
pour eux.<br />
Puis, dans l’après-midi <strong>du</strong> premier<br />
jour de la rentrée, en août, il<br />
réunit tous les débutants et débutantes<br />
afin de leur présenter l’information<br />
administrative et leur<br />
remettre tous les documents de<br />
référence de l’école. Ensuite, il<br />
leur expose le plan d’accompagnement<br />
prévu à leur intention.<br />
Inutile de dire qu’ils sont très surpris<br />
de voir le directeur y prendre<br />
une aussi grande part avec le conseiller<br />
pédagogique de l’école. Il<br />
école, où il y a un important projet<br />
d’intégration des nouvelles technologies,<br />
et qui manifestent un<br />
grand intérêt pour l’informatique,<br />
les informe que, jusqu’à la fin <strong>du</strong><br />
mois de janvier, tous les premiers<br />
et troisièmes lundis <strong>du</strong> mois, ils<br />
auront une rencontre obligatoire<br />
avec le conseiller pédagogique et<br />
lui-même afin d’examiner en leur<br />
compagnie leurs bons coups et<br />
leurs difficultés. Il leur garantit<br />
qu’à cette rencontre il ne parlera<br />
pas plus de dix minutes et que le<br />
conseiller pédagogique fera de<br />
même. Il leur dit également que<br />
les interventions devraient porter<br />
sur les quatre points suivants : la<br />
planification, la gestion des apprentissages,<br />
leur engagement<br />
dans l’école et leur développement<br />
professionnel. Il leur fait<br />
part également qu’il est ouvert à<br />
tout projet à caractère pédagogique<br />
ou de soutien des élèves<br />
qu’ils pourraient présenter, pourvu<br />
qu’il ne soit pas indivi<strong>du</strong>el. De<br />
plus, il leur annonce qu’ils peuvent<br />
s’inscrire à la formation continue<br />
en dehors des heures de cours,<br />
qu’il seront payés pour la suivre,<br />
mais qu’il tient à voir une réutilisation<br />
des acquis en classe, dès le<br />
mois suivant.<br />
À partir <strong>du</strong> mois de février, il ne<br />
tient qu’une rencontre par mois,<br />
au cours de laquelle le conseiller<br />
pédagogique n’intervient plus<br />
puisqu’il apporte à ceux et celles<br />
qui le souhaitent une aide plus<br />
indivi<strong>du</strong>elle. Les rencontres sont<br />
très structurées et servent de<br />
modèles aux jeunes enseignants<br />
qui, lorsqu’ils ont par la suite à<br />
exposer un problème au directeur<br />
ou à l’un de ses adjoints vont le<br />
poser, dire ce qu’ils ont fait pour<br />
le résoudre, proposer d’autres<br />
solutions et en recommander une.<br />
Habitués à travailler avec le directeur<br />
de l’école, ils sont plus à<br />
l’aise d’aller le voir s’ils éprouvent<br />
une difficulté ou veulent proposer<br />
un projet. La deuxième année de<br />
l’entrée en fonction des jeunes, ce<br />
sont les adjoints ou adjointes qui<br />
s’en occupent. « En procédant de<br />
cette façon, affirme Gilles Achambault,<br />
je crois qu’on va réussir le<br />
passage à une autre génération,<br />
parce que dans deux ans, cette<br />
école aura renouvelé 90 p. 100<br />
de son personnel. » Voilà une<br />
insertion professionnelle très<br />
assistée par la direction.<br />
n’ont pas plus d’habiletés à les<br />
utiliser. « <strong>Ce</strong> sont les plus anciens<br />
et les élèves qui les soutiennent »,<br />
dit-il. Pour Diane Provençal, il est<br />
assez invraisemblable que les<br />
jeunes profs n’aient jamais utilisé<br />
un traitement de textes ou ne sachent<br />
pas ce qu’est une base de données<br />
et un tableur.<br />
Les jeunes qui arrivent ont donc<br />
beaucoup de défis à relever, et plus<br />
particulièrement en ce qui concerne<br />
la gestion de classe et l’adaptation<br />
de l’enseignement aux élèves<br />
en difficulté. « Leur manque de<br />
préparation en gestion de classe<br />
les rend très vulnérables », affirme<br />
Diane Provençal, qui fait remarquer<br />
que les recherches américaines ont<br />
montré que le nombre de jeunes<br />
qui délaissent l’enseignement après<br />
cinq ans est effarant. « C’est un<br />
danger qui nous guette, dit- elle, si<br />
l’on ne met pas en place des<br />
mesures d’accompagnement. » De<br />
plus, il faut les empêcher de tenter<br />
de combler toutes leurs lacunes à la<br />
fois, sinon c’est l’épuisement assuré,<br />
les convaincre de choisir un seul<br />
champ d’activité à la fois et de se<br />
situer dans une optique de formation<br />
continue.<br />
« Les jeunes sortent de l’université<br />
et il leur faut déjà se mettre à jour<br />
en suivant la formation donnée<br />
par nos conseillers et conseillères<br />
pédagogiques», ajoute Marie-France<br />
Dussault, constatant par la même<br />
occasion qu’il se fait beaucoup de<br />
développement pédagogique dans<br />
les commissions scolaires et que<br />
bon nombre d’enseignants et d’enseignantes<br />
d’expérience sont plus<br />
à jour que les nouveaux venus.<br />
Là-dessus, une petite flèche est<br />
décochée aux universités qui,<br />
même si elles ont modernisé la formation<br />
des enseignants et des enseignantes,<br />
continuent de commander<br />
des cours aux autres facultés, cours<br />
peu adaptés aux besoins des futurs<br />
enseignants, ne réussissent pas à<br />
harmoniser leur calendrier avec<br />
celui <strong>du</strong> milieu scolaire pour vraiment<br />
permettre aux stagiaires de<br />
quatrième année de passer une<br />
étape, <strong>du</strong> début à la fin, dans l’école<br />
et n’arrivent pas à offrir des modèles<br />
qui permettent aux futurs<br />
enseignants de dépasser les notions<br />
théoriques et de voir comment elles<br />
peuvent être mises en œuvre.<br />
Si nos personnes invitées adressent<br />
quelques reproches à l’université,<br />
elles n’hésitent pas à noter que la<br />
tâche attribuée aux jeunes enseignants<br />
et enseignantes n’est pas<br />
toujours de nature à faciliter leur<br />
insertion harmonieuse non plus. Il<br />
arrive souvent qu’ils se retrouvent<br />
dans des milieux difficiles, rarement<br />
choisis par le personnel d’expérience.<br />
Puis, pour compléter leur<br />
tâche lorsqu’il n’y a pas assez<br />
d’heures d’enseignement dans leur<br />
discipline, on leur propose d’enseigner<br />
d’autres matières. « Donc,<br />
remarque Marie-France Dussault,<br />
ils se retrouvent dès leur entrée<br />
dans l’enseignement avec des<br />
tâches difficiles, à enseigner des<br />
matières pour lesquelles ils n’ont<br />
pas été préparés. Ils ont souvent<br />
des tâches plus difficiles que<br />
celles des enseignants d’expérience.»<br />
Il ne faut pas s’étonner<br />
alors qu’ils recherchent le soutien<br />
de la direction et de leurs collègues.<br />
Il en est qui se protègent bien de<br />
l’épuisement, cependant, en préférant<br />
n’accepter que 60 à 80 p. 100<br />
d’une tâche pour commencer <strong>du</strong><br />
bon pied dans leur métier.<br />
LE SOUTIEN DE LA DIRECTION<br />
Conscients des besoins des jeunes<br />
enseignants, les directrices et les<br />
directeurs présents considèrent<br />
qu’il leur appartient de fournir le<br />
soutien qui permettra aux jeunes de<br />
passer au travers de la phase<br />
de survie et d’atteindre le niveau de<br />
maîtrise nécessaire, non seulement<br />
pour être efficaces mais aussi pour<br />
avoir <strong>du</strong> plaisir à exercer leur profession.<br />
Huguette Martin rappelle<br />
les trois phases par lesquelles<br />
passent ceux et celles qui commencent<br />
dans l’enseignement, phases<br />
présentées par Roch Chouinard au<br />
cours d’un atelier auquel elle a<br />
assisté. La première est l’idéalisation,<br />
qui se caractérise par une<br />
vision romantique des élèves,<br />
l’amour de leur matière, la mise en<br />
œuvre d’activités variées et l’assurance<br />
que les élèves vont s’y engager.<br />
La deuxième, celle de la survie, est<br />
marquée par une certaine désillusion.<br />
Ne sachant pas trop comment<br />
aider les élèves en difficulté, les<br />
jeunes enseignants et enseignantes<br />
finissent par les percevoir comme<br />
des adversaires et utilisent plus de<br />
moyens correctifs. Arrive enfin la<br />
phase de la maîtrise où les jeunes<br />
recrues sont moins centrées sur<br />
elles-mêmes et plus sur les élèves. Il<br />
leur est alors plus facile de réfléchir<br />
sur leur pratique. Huguette Martin<br />
estime que c’est à elle de leur faciliter<br />
le passage d’une phase à une<br />
VIE 20 Vie pédagogique 111, avril-mai<br />
1999