Alternatives : Var et Alpes-Maritimes Alternatives - Silence
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L’affaire de l’amiante en BD<br />
Dessins <strong>et</strong> destins d’amiante<br />
L’affaire de l’amiante, le plus grand scandale de santé publique en France,<br />
aura coûté la vie, d’ici 2025, à plus de 100 000 personnes. Pour la première fois,<br />
une bande dessinée raconte le côté humain de c<strong>et</strong>te affaire, sans compromission.<br />
Amiante, Chronique d’un crime social est une BD d’un genre nouveau<br />
qui ne laisse pas le lecteur indifférent. Un an après sa parution, elle continue<br />
à susciter de nombreux débats <strong>et</strong> expositions partout en France.<br />
Le scénariste Albert Drandov nous emmène à la découverte de la BD en images<br />
avant de nous expliquer sa démarche dans une interview.<br />
Première alerte<br />
«officielle»<br />
« La première trace écrite officielle d’une<br />
alerte des dangers de l’amiante en France<br />
date de 1906. A c<strong>et</strong>te époque M. Auribault,<br />
inspecteur du travail à Caen,<br />
explique dans une note qu’il compte cinquante<br />
morts en cinq ans dans une filature<br />
d’amiante près de Condé-sur-Noireau.<br />
Il propose alors l’installation de ventilations.<br />
En vain. Cela m’a donné l’idée<br />
d’écrire l’histoire de l’embauche d’un<br />
gamin. De montrer les conditions de travail<br />
<strong>et</strong> c<strong>et</strong>te rencontre, supposée, entre le<br />
patron de la fabrique <strong>et</strong> l’inspecteur. Des<br />
fans normands de vieilles cartes postales<br />
m’ont fourni des images des fabriques.<br />
Même la coiffe des ouvrières est d’époque.<br />
Une histoire superbement dessinée par<br />
Krist Mirror »<br />
Amiante. Chronique d’un<br />
crime social est plus<br />
qu’une bande dessinée.<br />
En racontant, sources à l’appui,<br />
l’ampleur du scandale de<br />
l’amiante <strong>et</strong> en saluant la justesse<br />
du combat des victimes,<br />
elle perm<strong>et</strong> de prolonger les<br />
débats sur la santé au travail.<br />
L’auteur nous raconte sa démarche<br />
originale.<br />
D’où vient votre intérêt pour<br />
l’affaire de l’amiante ?<br />
Albert Drandov : Longtemps,<br />
j’ai travaillé comme journaliste<br />
indépendant sur des suj<strong>et</strong>s<br />
de santé, d’environnement, le monde du<br />
travail, <strong>et</strong>c. pour des journaux comme<br />
Charlie hebdo, Le Canard enchaîné, Le<br />
Journal du dimanche… Quand j’ai commencé<br />
à écrire sur l’amiante, en 1998, j’ai<br />
été impressionné par l’énormité du scandale,<br />
ses multiples fa-<br />
c<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> ses innombrables<br />
conséquences.<br />
Il y avait la souffrance<br />
des victimes mais<br />
aussi le peu d’intérêt<br />
manifesté par les<br />
médias, surtout après<br />
l’interdiction, en 1997.<br />
Comme si la page<br />
devait être tournée.<br />
Comme s’il fallait<br />
accepter ces « dommages<br />
collatéraux de<br />
la production » <strong>et</strong> ne plus s’intéresser aux<br />
responsables du plus grave scandale sanitaire<br />
que le pays ait connu.<br />
SILENCE N°342 54<br />
Ne pas accepter<br />
que les victimes<br />
de l’amiante<br />
soient des<br />
« dommages<br />
collatéraux de<br />
la production»<br />
Janvier 2007<br />
Pourquoi avoir choisi d’en faire<br />
une BD ?<br />
Je suis un accro de bandes dessinées. Je<br />
tiens une chronique hebdomadaire sur<br />
une radio des Yvelines depuis 2002.<br />
Souvent, je râle de voir si peu d’albums<br />
parler de suj<strong>et</strong>s actuels ou d’histoires<br />
vraies ayant un contenu social, ou disons<br />
« sociétal ». Un jour, je suis tombé sur<br />
Rural, la BD d’Etienne Davodeau, qui<br />
parle de la lutte de paysans bio contre un<br />
proj<strong>et</strong> d’autoroute. Et là, je me suis dit<br />
“mon gars, faut se lancer”.<br />
Difficile de trouver un éditeur ?<br />
Ça s’est fait très vite. J’ai croisé Kristijan<br />
Cvejic, l’auteur d’une BD sur des loustics<br />
des cités de banlieues, qui souhaitait<br />
développer sa p<strong>et</strong>ite maison d’édition. Et<br />
qui était animé comme moi par la volonté<br />
de mieux ancrer la BD dans le réel. Ma<br />
proposition l’a tout de suite branché. Il a<br />
pris le risque éditorial <strong>et</strong> économique de<br />
lancer c<strong>et</strong>te BD à une époque,<br />
en 2004, où on ne parlait pas<br />
encore du Clemenceau ou de la<br />
tour Montparnasse… C’était<br />
courageux.<br />
Comment avez-vous construit<br />
les histoires de l’album ?<br />
D’emblée, j’ai souhaité me<br />
concentrer sur l’aspect humain<br />
de l’affaire. En gros, raconter un<br />
siècle de mensonges par le biais<br />
d’une quinzaine d’histoires, de<br />
1906, date de la première alerte<br />
officielle, jusqu’à la marche des veuves de<br />
Dunkerque, en 2005. Le tout en y<br />
incluant des documents d’époque, sou-