Besoin d’un nouvel appart’ ? un service de votre quotidien Cherchez, trouvez, insérez... www.nfimmo.ch Le site de l’immobilier en Valais Photo: C. Hofmann
souvent le crayon tombe à vide; le dessin se trouve décapité ou amputé d’un membre…Le maître ne l’a pas regardé une fois. En moins d’une minute, cet instantané du mouvement est pris…» témoigne Clément-Janin en 1903). Le deuxième type est un dessin repris ou calqué, à partir de l’un de ces «dessins sans voir», de façon à aboutir à un tracé épuré, simplifié, synthétisé, le plus souvent rehaussé d’aquarelle. («Ce premier jet acquis, Rodin reprend son œuvre, parfois la corrige directement d’un coup de crayon rouge, mais le plus souvent, c’est en la calquant qu’il la rectifie…», continue Clément-Janin.) Parmi les dessins de Rodin, près d’un millier sont communément considérés comme des dessins érotiques, des- COMMISSAIRE: DOMINIQUE VIÉVILLE, DIRECTEUR DU MUSÉE RODIN Femme nue à quatre pattes de profil vers la droite, mine de plomb et aquarelle sur papier, 25,5 x 32,3 cm, collection Fondation Pierre Gianadda. sins que l’artiste n’enfermait pas dans un cabinet privé, mais qu’il cherchait à montrer en regard de ses sculptures, confirmant leur statut de grande œuvre. Les quelque quatre-ving-dix dessins exposés à la Fondation Gianadda font partie de cet ensemble exceptionnel. L’artiste y révèle le travail intime et fervent auquel il s’est principalement livré au cours des deux dernières décennies de sa vie. Instaurant une connivence, voire une véritable complicité, avec ses modèles, il les amenait à prendre des attitudes inédites, sensuelles, extravagantes, à se caresser, à dévoiler les parties les plus secrè- tes de leurs corps, à s’ouvrir, toujours plus largement et de façon parfois acrobatique, pour montrer sans ambiguité et sans fausse pudeur, leur sexe, leur plaisir, leur attente. Le sexe de la femme, ce siège des forces et des énergies vitales, presque toujours exposé, est situé au premier plan de la feuille. Dessiner le sexe, c’est dessiner ce qu’il y a de plus vrai. Dans ses dessins, d’une audace et d’une liberté extraordinaire, Rodin ne cesse de cerner, au plus près, la vérité des corps. «La beauté, c’est le caractère et l’expression. Or, il n’y a rien dans la nature qui ait plus de caractère que le corps humain. Il évoque par sa force ou par sa grâce les images les plus variées. Par moments, il ressemble à une fleur: la flexion du torse imite la tige, le sourire des seins, de la tête et l’éclat de la chevelure répondent à l’épanouissement de la corolle. Par moments, il rappelle une souple liane, un arbuste à la cambrure fine et hardie […] D’autres fois, le corps humain courbe en arrière est comme un ressort, comme un bel arc sur lequel Eros ajuste ses flèches invisibles. D’autres fois encore, c’est une urne. Le corps humain, c’est surtout le miroir de l’âme et de là, vient sa plus grande beauté». (Auguste Rodin, L’Art. Entretiens réunis par Paul Gsell, Paris, Grasset, 1911). Nadine Lehni Conservateur du Musée Rodin PAGE 43