Dimension 3 n° 2012/5 - Belgium

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Enfants, pas soldats © Amnesty International Tout autour du globe, en permanence, des milliers d’enfants – filles et garçons – sont envoyés en première ligne des combats. En dépit de nombreux textes internationaux, des enfants continuent d’être recrutés par des groupes armés et sont privés de leurs droits fondamentaux. Ils deviennent cuisinier, esclave sexuel, soldat… Alors que leurs bourreaux agissent très souvent en toute impunité, eux n’en sortiront souvent pas vivants. Les États du monde ont la responsabilité et le devoir de respecter les textes qu’ils ont signés, notamment la Convention internationale des droits de l’enfant. Mais si certains font des efforts dans la lutte contre l’utilisation d’enfants-soldats, d’autres continuent de se soustraire à leurs engagements. Quand un conflit éclate dans un pays, toutes les parties prennent part au trafic : tant les groupes rebelles que le gouvernement et l’armée officielle, soit en recrutant directement, soit en soutenant des groupes paramilitaires qui recrutent des enfants. Lorsque les conflits s’apaisent, les promesses de démobilisation des enfants ne sont généralement pas respectées car les groupes armés finissent par rejoindre l’armée officielle avec leurs enfants et très peu, voire aucun ne seront démobilisés. Il est impossible de donner une estimation précise du nombre d’enfants-soldats dans le monde, mais l’on dispose d’informations concernant les pays les plus touchés et l’ampleur du phénomène dans ces états. En Amérique du Sud, la situation reste extrêmement préoccupante en Colombie, où l’ONU estimait en 2009 qu’entre 8.000 et 11.000 enfants étaient concernés. En Haïti, dès 10 ans, des enfants seraient utilisés par des éléments armés pour faire passer de la drogue, transporter des armes, etc. Au Moyen-Orient, où de nouveaux conflits ont vu le jour, le nombre d’enfants recrutés par les forces armées régulières et les groupes rebelles explose. Suite aux révolutions arabes, des témoins et organisations rapportent avoir vu des enfants participant aux affrontements armés dans des pays comme la Syrie. Très touchée, l’Afrique compterait un tiers du nombre total Amnesty fait campagne pour les enfants-soldats L’existence d’enfants-soldats est avant tout une problématique de droits fondamentaux. C’est pourquoi Amnesty International Belgique francophone y consacre cette année sa Campagne Bougies qui se tient du 12 novembre au 10 décembre. 24 novembre-décembre <strong>2012</strong> I dimension 3
droits de l’enfant Un moment de détente dans un centre de réinsertion sociale du BVES. © Amnesty International Un garçon tenta de s’échapper, mais on l’a rattrapé. On lui a attaché les mains, et puis ils nous ont obligés à le tuer en le frappant avec un bâton. J’en étais malade. Je connaissais ce garçon. Nous étions du même village. J’ai refusé de le tuer, alors ils m’ont dit qu’ils allaient m’abattre. Ils ont pointé un fusil sur moi, alors j’ai dû le faire. Susan, 16 ans, enlevée par le Lord Resistance Army en Ouganda. d’enfants-soldats dans le monde. La région des Grands Lacs est particulièrement affectée. En Asie, des cas d’enfants-soldats ont été rapportés au Pakistan, en Afghanistan et aux Philippines. Le Myanmar serait le pays qui utiliserait le plus d’enfants au sein de sa force armée gouvernementale. En Thaïlande, les Nations Unies ont reçu des informations faisant état de la participation d’enfants à des activités de groupes armés non-étatiques et de groupes de défense des villages. L’utilisation d’enfants-soldats présente beaucoup d’avantages “Les enfants-soldats sont idéaux parce qu’ils ne se plaignent pas, ils ne s’attendent pas à être payés et si vous leur dites de tuer, ils tuent.” C’est par ces mots qu’un officier tchadien résumait les avantages de l’utilisation d’enfants. En effet, les enfants coûtent moins cher que les soldats adultes : il ne faut pas les payer, ils consomment peu de nourriture, ils n’ont pas d’uniforme, etc. Ils sont également facilement manipulables : à force d’endoctrinement, on leur fait oublier la peur et la culpabilité. Les enfants ne représentent pas une menace pour ceux qui les commandent car ils sont fidèles et obéissants, il y a donc peu de risque qu’ils s’échappent ou se retournent contre leurs chefs. Des milliers d’enfants enlevés permettent d’augmenter rapidement et considérablement On nous faisait boire du lait mélangé à de la poudre de fusil afin de mieux contrôler nos peurs. Cela nous donnait plus d’énergie et nous donnait plus l’envie de tuer les troupes qui passaient devant nous. (…) Vous vous dites : “j’espère qu’ils vont venir vers moi”, et puis, vous chargez et tirez une rafale et vous vous sentez plus fort avec un meilleur moral. Un ex-enfant soldat. les rangs des armées. Ils sont de la “chair à canon” facilement remplaçable. Enfin, les filles sont recrutées pour assouvir les besoins des soldats. Toutefois, si leur taille et leur agilité représentent des atouts physiques, les enfants sont moins forts que les adultes et ne sont ni autonomes ni prudents. Souvent uniquement formés à tirer et à entretenir leur arme, ils ne sont pas des professionnels de la guerre. Par ailleurs, recruter et utiliser des enfants est un crime, et les responsables risquent de se retrouver jugés par la Cour pénale internationale. Comment en sortir ? Les Programmes DDR (Démobilisation, Désarmement, Réintégration) mis en place un peu partout dans le monde permettent aux enfants de sortir des camps et, lorsque c’est possible, de retrouver leur famille. Mais, une fois sortis, la lutte continue. Les jeunes doivent à nouveau être acceptés par la société, par leurs proches, par leur communauté. Les traumatismes de la guerre doivent être pansés. Un enfant seul et soumis à la violence des adultes aura du mal à s’en sortir, c’est pourquoi il incombe à la société, au gouvernement, de les protéger et de s’assurer que de véritables programmes de réinsertion soient mis en place. Il existe des structures qui s’occupent de démobiliser et de resocialiser les enfantssoldats. Amnesty International Belgique francophone vient en aide depuis de nombreuses années au BVES (Bureau pour le Volontariat au service de l’Enfance et de la Santé). Située à Bukavu, en République démocratique du Congo, cette organisation a pour mission la protection et la défense des enfants dans le contexte de guerre que traverse le pays. Le BVES se charge, au terme d’un long processus, d’aller chercher les enfantssoldats dans les groupes armés et de les réinsérer socialement. © Amnesty International Gaëlle Appelmans Amnesty International Belgique francophone online BVES - http://www.bves-rdc.org Amnesty - http://www.amnesty.be dimension 3 I novembre-décembre <strong>2012</strong> 25
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