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Zibeline n° 53 en PDF

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78<br />

FESTIVAL DU LIVRE<br />

LA CANEBIÈRE<br />

© G.C<br />

© Juliette Lück<br />

Une fois <strong>en</strong>core, le Festival<br />

du Livre de la Canebière<br />

a t<strong>en</strong>u ses promesses<br />

et a emporté le public dans<br />

de multiples balades, au fil<br />

des mots, au fil de l’eau ;<br />

de r<strong>en</strong>contres <strong>en</strong> prom<strong>en</strong>ades<br />

urbaines, de lectures <strong>en</strong><br />

musiques, de la Canebière<br />

au Frioul. Voici quelques échos<br />

de ce cabotage festivalier<br />

© Juliette Lück<br />

Festival vagabond<br />

Rappelons d’abord qu’il n’est pas aisé d’ancrer le<br />

festival <strong>en</strong> haut de la Canebière. Le collectif Manifeste<br />

Ri<strong>en</strong> se souvi<strong>en</strong>dra sans doute longtemps des<br />

conditions dans lesquelles la comédi<strong>en</strong>ne Virginie<br />

Aimone a joué Chacal : chants révolutionnaires<br />

kurdes, manifestation des mêmes, départ <strong>en</strong> fanfare<br />

des voitures de l’Ag<strong>en</strong>ce de Voyages Imaginaires,<br />

cloches des Réformés, sans compter le micro qui faisait<br />

des si<strong>en</strong>nes… pas facile de rester conc<strong>en</strong>tré dans un<br />

tel charivari. Mais bon, elle l’a fait. C’est ainsi sur ce<br />

festival, on joue le jeu quoiqu’il arrive. Parfois, c’est<br />

un peu rude ; la plupart du temps, tout se passe bi<strong>en</strong>.<br />

Il <strong>en</strong> a été ainsi de la majorité des r<strong>en</strong>contres littéraires,<br />

qui ont attiré beaucoup de monde et ont permis<br />

d’aborder des g<strong>en</strong>res et des thèmes variés, des<br />

monologues théâtraux de Léonora Miano consacrés<br />

aux Afropé<strong>en</strong>s, à la BD avec Eddy Vaccaro et<br />

Clém<strong>en</strong>t Baloup (un jeune auteur très prometteur<br />

dont nous reparlerons bi<strong>en</strong>tôt), <strong>en</strong> passant par un<br />

passionnant retour sur 50 ans d’indép<strong>en</strong>dance<br />

algéri<strong>en</strong>ne <strong>en</strong> compagnie de Maïssa Bey… On s’est<br />

aussi beaucoup prom<strong>en</strong>é durant ce festival.<br />

Balades <strong>en</strong> ville<br />

En 1909, l’éthologue Jakob von Uexküll introduisit le<br />

terme Umwelt pour désigner la bulle de perception<br />

dans laquelle chaque être vivant se déplace, filtre<br />

exclusif ne nous permettant pas d’accéder à l’univers<br />

d’autrui, sauf à déployer une certaine imagination. Ce<br />

concept trouve une illustration frappante lorsque deux<br />

mondes coexistant habituellem<strong>en</strong>t <strong>en</strong> parfaite<br />

ignorance l’un de l’autre se crois<strong>en</strong>t soudainem<strong>en</strong>t. Ce<br />

fut le cas samedi 9 juin, lorsqu’un troupeau constitué<br />

<strong>en</strong> grande majorité de femmes attirées par le Festival<br />

du Livre, et m<strong>en</strong>é par la comédi<strong>en</strong>ne Bénédicte Sire,<br />

fut conduit aux abords de la Canebière pour une<br />

balade littéraire. La découverte d‘espaces urbains<br />

insoupçonnés -d’un vaste hôtel délabré aux dorures<br />

baroques, à celui où Louise Michel r<strong>en</strong>dit son dernier<br />

soupir, <strong>en</strong> passant par le royaume du poulet, et jusqu’à<br />

un tripot peuplé exclusivem<strong>en</strong>t d’hommes- fut des<br />

plus réjouissantes. Les populations autochtones,<br />

écoutant les extraits d’ouvrages (Blaise C<strong>en</strong>drars,<br />

Albert Coh<strong>en</strong>, St<strong>en</strong>dhal...) dont il était fait lecture,<br />

semblai<strong>en</strong>t apprécier la visite. Et les interprètes de<br />

l‘ASIP -qui traduisai<strong>en</strong>t comme on danse le propos<br />

<strong>en</strong> langue des signes pour celles dont l’Umwelt est<br />

dénué de sons- ont ajouté un troisième univers à cette<br />

belle occasion de vérifier qu’on n’explore jamais mieux<br />

sa ville qu’<strong>en</strong> sortant des s<strong>en</strong>tiers battus. Autre<br />

parcours, autres découvertes insolites sur les pas<br />

d’H<strong>en</strong>drik Sturm. À partir du mur du Mémorial des<br />

camps de la mort, dont certaines f<strong>en</strong>tes sont incrustées<br />

(décorées ?) de chewing-gums -déposés là par qui ?<br />

pourquoi ? depuis quand ?- le cheminem<strong>en</strong>t de<br />

l’artiste-prom<strong>en</strong>eur nous a offert, <strong>en</strong>tre autres, une<br />

étrange plongée, via le parking souterrain, dans le<br />

monde clos d’un C<strong>en</strong>tre Bourse fermé le dimanche :<br />

des grilles partout, et pourtant la clim’, la lumière et<br />

surtout cette soupe musicale omniprés<strong>en</strong>te ; glaçant…<br />

À la sortie, direction la rue Thubaneau, dont il connaît<br />

très bi<strong>en</strong> l’histoire et qui fournit, vers la Mission de<br />

France, un assez joli exemple de coexist<strong>en</strong>ce religieuse.<br />

De retour sur la Canebière, c’est une autre balade dans<br />

Marseille que le CipM a proposée, un quadrillage<br />

loufoque de la ville par l’Inspecteur Ruiz(z), lu par son<br />

pince-sans-rire d’auteur D<strong>en</strong>is de Lappar<strong>en</strong>t, à<br />

l’occasion de la sortie du n°4 de Fondcommun, <strong>en</strong>tre<br />

revue d’artistes et gratuit urbain.<br />

Virée <strong>en</strong> mer<br />

Après ces heures passées à arp<strong>en</strong>ter le bitume, quel<br />

délice de pr<strong>en</strong>dre le bateau pour une escapade au<br />

Frioul ! Joie de la musique et des contes, calme et<br />

volupté lors des ateliers d’écriture où tous se<br />

conc<strong>en</strong>tr<strong>en</strong>t et s’écout<strong>en</strong>t, piochant dans les réserves<br />

d’imagination des uns et des autres. Luxe de s’adosser<br />

aux confortables coussins d’un canapé sous les pins,<br />

pour écouter deux auteurs de polar débattre de<br />

techniques à glacer le sang des lecteurs. Pour Monika<br />

Krist<strong>en</strong>s<strong>en</strong>, le plus grand moteur de l’écriture est de<br />

ne pas «surtravailler», de garder le plaisir, s’asseoir dans<br />

un café, observer autour d’elle, et p<strong>en</strong>ser à ce qui<br />

pourrait bi<strong>en</strong> arriver. Ce qui intéresse Marie Neuser,<br />

c’est «le passage à l’acte, la perte des pédales». Toutes deux<br />

ont su donner généreusem<strong>en</strong>t de leur temps pour<br />

cont<strong>en</strong>ter les insulaires d’un jour.<br />

De retour au port, il était temps de clôturer ces trois<br />

jours de fête, <strong>en</strong> poésie et <strong>en</strong> musique. La très belle<br />

lecture de Gabriel Mwènè Okundji a fait planer tous<br />

ceux qui avai<strong>en</strong>t embarqué sur Le Don du V<strong>en</strong>t, avant<br />

que les rythmes et la guitare de Didi Pausé et de son<br />

groupe Salaz ne les <strong>en</strong>traîn<strong>en</strong>t vers les rivages de<br />

l’Océan Indi<strong>en</strong>. Ultime et joyeux vagabondage d’un<br />

festival qui bouscule les frontières.<br />

GAËLLE CLOAREC ET FRED ROBERT<br />

Le Festival du Livre de la Canebière,<br />

organisé par l’association Couleurs Cactus,<br />

a eu lieu à Marseille les 8, 9 et 10 juin<br />

<strong>Zibeline</strong>, part<strong>en</strong>aire du Festival de la<br />

Canebière, publie la nouvelle et l’illustration<br />

lauréates des deux concours organisés par<br />

Couleur Cactus pour le Festival du Livre :<br />

Anita Lindskog a remporté le concours de<br />

nouvelles, et Darr<strong>en</strong> Johnson le concours de<br />

l’illustration numérique, inspirée du recueil<br />

de nouvelle de Francesc Seres (voir p. 79).

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