mémoires de l'académie d'orléans agriculture sciences, belles ...

12recteur de l’Université de Paris en 1428, qui, le 5 juin 1430, avait harangué Henri VI, roid’Angleterre et de France, lors de son entrée à Rouen, mais qui, homme de culture, possédaitdans sa bibliothèque les Comédies de Térence et l’Énéide de Virgile (France, II, p. 306). Jeanne estalors conduite en prison et revêt une robe que lui donne la duchesse de Bedford.- Or, dès le dimanche 27 mai, toute la ville de Rouen bruit de cette rumeur : "Jeanne a repris sonvêtement d’homme. C’est le dimanche de la Trinité".- Lundi 28 : Cauchon et ses assesseurs vont au château, dans la cellule de Jeanne, qui a "le visageplein de larmes et défiguré par une terrible douleur" (p. 326). Ils l’interrogent.- Le 29, ils délibèrent dans la chapelle de l’archevêché. Le seigneur abbé de Fécamp déclare :"Jeanne est relapse… À nous, juges, de la déclarer hérétique et de l’abandonner à la justiceséculière".- Mercredi 30 mai 1431 : dans la matinée, la sentence de mort sur le bûcher lui est notifiée.Jeanne demande à frère Martin une confession (la deuxième) et la communion. "Un clercnommé Pierre apporta le corps de Notre Seigneur, mais d’une façon irrévérencieuse, sur unepatine enveloppée du linge dont on couvre le calice, sans lumières, sans cortège, sans surplis etsans étole" (p. 335).Vers 9 heures du matin, Jeanne sort de la prison où elle était enchaînée depuis 178 jours,est mise dans une charrette et menée à la place du Vieux Marché, lieu de son supplice où sedressent trois échafauds, deux pour les juges et les prélats, le troisième pour la Pucelle. 160hommes d’armes anglais ceinturent la place. Le chapitre XIV du tome II, citant en référence unopuscule publié à Orléans en 1891 par l’abbé Cochard, s’achève en ces termes : "De peur qu’onne vînt recueillir les restes de Jeanne pour en faire des sorcelleries ou quelques maléfices, le bailliles fit jeter à la Seine".À la dame des Armoises, Anatole France donne sa véritable importance, tenue pournégligeable. Il en parle en ces termes : le 13 avril 1436, Richemont entre dans Paris. Or un moisaprès, "une fille âgée de 25 ans environ, qui, jusque-là, s’était fait appeler Claude, parut enLorraine et fit connaître à plusieurs seigneurs de la ville de Metz qu’elle était Jeanne la Pucelle.Au lieu-dit "La Grange aux Ormes", dans une paroisse voisine de Metz, elle fixa rendez-vous auxdeux frères de Jeanne : l’aîné, dit "Petit Jean" et le cadet, Pierre, dit "Pierrot", "qui la reconnurentaussitôt pour leur sœur".Le lundi 21 mai, les frères du Lys, Jean et Pierre, conduisirent cette Claude qui disait êtreJeanne à Vaucouleurs, puis dans la région. Protégée par la duchesse de Luxembourg, laprétendue Pucelle rencontra chez elle Robert des Armoises, seigneur de Tichemont, qu’elleépousa, et partit vivre en sa compagnie à Metz, dans l’hôtel de celui-ci, devant l’église Sainte-Ségolène, au-dessus de la porte Sainte-Barbe (avant le 7 novembre 1436). France écrit : "En sonlogis, devant l’église Sainte-Ségolène, la dame des Armoises mit au monde deux enfants. Il y avaiten Languedoc un honnête écuyer qui, s’il apprit ces naissances, douta fort que Jeanne la Pucelleet la dame des Armoises fussent la même personne ; c’était Jean d’Aulon, l’ancien maître d’hôtelde Jeanne, car il ne la croyait pas faite pour avoir des enfants, ayant obtenu à ce sujet laconfidence de femmes bien instruites" (Procès, III, p. 219).Le 1 er août 1439, la dame des Armoises est reçue à Orléans. "Si les habitants lareconnurent pour la vraie Pucelle Jeanne, ce fut moins par leurs yeux, assurément," dit France,"que sur la foi des frères du Lys. Ils l’avaient si peu vue, quand on y songe !". La dame desArmoises quitta la ville fin juillet, "départ brusque et précipité". La table était servie. Or, "le repaseut lieu sans elle".Cette dame se rend ensuite à Tours, puis en Poitou et s’y mit au service de Gilles de Rais.Or, elle pratiquait la magie, au dire de l’inquisiteur de Cologne.Au printemps 1440, elle se rend à Paris où elle est arrêtée, hissée dans la cour de mai, surla table de marbre, et "montrée au peuple qu’elle avait abusé. Suivant la coutume, on la prêcha eton la contraignit à se confesser publiquement" (II, p. 372 - 373). Dès lors, elle dut retourner vivreet mourir chez son mari, à Metz. Et Anatole France de conclure : "Le succès de cette supercherieavait duré quatre ans. Il ne faut pas en concevoir trop de surprise... Toujours les imposteurs,Académie d'Orléans Agriculture, Sciences, Belles-Lettres et Arts VI e Série- Tome 18 - 2008