correspondance entre les besoins exprimés par <strong>la</strong>popu<strong>la</strong>tion et l’offre publique <strong>de</strong> services marchands.Des compétences urbaines encore insuffisantesAu-<strong>de</strong>là <strong>de</strong>s capacités indivi<strong>du</strong>elles, <strong>la</strong> gouvernance urbainesuppose donc une capacité d’organisation ainsi qu’unedéfinition <strong>de</strong>s besoins essentiels <strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions urbainesavant <strong>de</strong> les tra<strong>du</strong>ire en actions au niveau politique et <strong>de</strong> lessatisfaire. Ainsi, <strong>la</strong> gouvernance urbaine nécessite <strong>de</strong>scompétences à <strong>la</strong> fois techniques et organisationnelles. Ellea pour ambition <strong>de</strong> concilier le travail entre plusieurs niveauxet plusieurs types d’acteurs publics et privés (compétencesmulti niveaux) : d’une part, le niveau étatique ainsi que leniveau décentralisé, l’Etat et les établissements publics (leschambres <strong>de</strong> commerce et d’in<strong>du</strong>strie) ; d’autre part, l’Etatet <strong>la</strong> société civile (citoyens, ONG, experts,...) ; enfin, l’Etatet le secteur privé.Les compétences dont il est question ici sont <strong>de</strong>scompétences rares, qui se construisent au fil <strong>de</strong> l’expérience,qu’elles soient indivi<strong>du</strong>elles ou organisationnelles. Ellessont <strong>de</strong> plus en plus <strong>la</strong>rgement représentées au sein <strong>de</strong>sMinistères régaliens ou <strong>de</strong>s Ministères Techniques quidisposent d’un personnel d’encadrement <strong>de</strong> mieux en mieuxrompu à l’exercice <strong>de</strong>s responsabilités et à <strong>la</strong> prise <strong>de</strong>décision dans <strong>de</strong>s environnements <strong>de</strong> plus en pluscomplexes. Ces responsables ont également développé,grâce à <strong>de</strong>s accords <strong>de</strong> coopération externes et <strong>de</strong>s contacts<strong>de</strong> plus en plus fréquents avec les groupes in<strong>du</strong>strielsmondiaux, <strong>de</strong> véritables capacités <strong>de</strong> négociations et <strong>de</strong>mise en œuvre <strong>de</strong> grands projets nécessitant une ingénieriefinancière et technique é<strong>la</strong>borée. Mais ces compétences,on l’a dit, sont rares et concentrées aux échelons les plusélevés <strong>de</strong> l’Etat et <strong>de</strong>s administrations publiques. Ellepercolent difficilement jusqu’aux collectivités territorialesdont les personnels politique et technique se retrouventsouvent dépassés par <strong>de</strong>s responsabilités auxquelles ilsn’étaient pas préparés. Et ce, d’autant que les textesréglementaires ne fixent pas c<strong>la</strong>irement les tâches dévoluesaux collectivités locales.Une autre évolution importante a été que lemouvement tardif <strong>de</strong> décentralisation a été suivi, quelquesannées plus tard, d’un mouvement d’ouverture <strong>de</strong> certainsservices marchands au secteur privé (<strong>de</strong>puis <strong>la</strong> simpledélégation jusqu’à <strong>la</strong> privatisation pure et simple) qui n’apas <strong>la</strong>issé le temps <strong>de</strong> construire <strong>de</strong>s collectivités efficaceset <strong>de</strong> les habituer à régler les problèmes soulevés par <strong>la</strong>mise en œuvre <strong>de</strong> ces services. Le processus <strong>de</strong>décentralisation re<strong>la</strong>tivement récent n’a donc pas toujours,pour cette raison, été con<strong>du</strong>it à son terme. Et aujourd’huiencore, en Méditerranée, certaines entreprises nationalescréées par l’Etat central sont toujours sous <strong>la</strong> tutelleexclusive d’un ministère.Le manque d’autonomie financière : <strong>la</strong> marque<strong>du</strong> gouvernement central sur les autoritéslocalesMais l’élément le plus marquant <strong>de</strong>s difficultés rencontréesdans <strong>la</strong> dévolution <strong>de</strong>s responsabilités aux communes restefinancier. Pour pouvoir être autonomes, les collectivitéslocales ont, en effet, besoin <strong>de</strong> ressources financièressuffisantes.Leurs <strong>de</strong>ux principales ressources en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>l’emprunt, proviennent <strong>de</strong> <strong>la</strong> fiscalité et <strong>de</strong>s dotations <strong>de</strong>l’Etat. Une réelle autonomie financière supposerait que lescollectivités locales puissent disposer <strong>du</strong> pouvoir <strong>de</strong> fixer levolume <strong>de</strong> leurs recettes par <strong>la</strong> fiscalité. Or, les dotations<strong>de</strong> l’Etat ten<strong>de</strong>nt à se substituer progressivement à cettefiscalité, rognant au fur et à mesure leurs marges <strong>de</strong>manœuvre. Par exemple, les dotations <strong>de</strong> l’Etat au Marocreprésentent 68% <strong>du</strong> total <strong>de</strong>s revenus <strong>de</strong>s provinces etpréfectures, et 15% <strong>de</strong>s revenus <strong>de</strong>s communautés etmunicipalités urbaines. La décentralisation n’a pas trouvéles ressources fiscales nécessaires à son application. Bienque certains Etats aient déployé <strong>de</strong>s efforts pour doter lescollectivités locales <strong>de</strong> ressources fiscales consistantes,cette fiscalité est loin <strong>de</strong> répondre aux besoins. Le <strong>de</strong>gré <strong>de</strong>décentralisation effective est faible. Le gouvernement localest limité dans ses capacités à fixer le niveau <strong>de</strong> <strong>la</strong> fiscalitélocale pour financer les services publics.Dans aucun <strong>de</strong>s pays méditerranéens ungouvernement local ne peut emprunter <strong>de</strong>s fonds, àl’exception <strong>de</strong> <strong>la</strong> Tunisie et <strong>du</strong> Maroc. Mais même dans ces<strong>de</strong>ux pays, le ministre <strong>de</strong> l’Intérieur exerce un contrôle surle budget annuel et peut refuser l’emprunt. Par ailleurs, <strong>de</strong>lour<strong>de</strong>s contraintes pèsent sur les autorités locales lors <strong>de</strong><strong>la</strong> réalisation <strong>du</strong> budget et <strong>la</strong> détermination <strong>de</strong>s dépenses.Elles ré<strong>du</strong>isent considérablement leur autonomie. Parexemple, en Egypte, l’estimation <strong>de</strong>s dépenses est faite parchaque ministère concerné et est ensuite donnée pourapprobation au conseil popu<strong>la</strong>ireSi l’on <strong>de</strong>vait résumer <strong>la</strong> situation concernant <strong>la</strong>répartition <strong>de</strong>s compétences en matière <strong>de</strong> services urbainsmarchands en Méditerranée il faudrait donc souligner queles autorités communales disposent au mieux <strong>de</strong>compétences en matière <strong>de</strong> gestion, alors que l’Etat centralconserve, au moins, ses prérogatives en matière <strong>de</strong>p<strong>la</strong>nification et d’orientation générale <strong>de</strong>s services publics.115LES VILLESMEDITERRANÉENNESDIX ANS APRESBARCELONE
FACE AUX RÉSISTANCES,L’ÉMERGENCE DE CONDITIONS DESUCCÈS ET DE SOLUTIONSINNOVANTESUne notion qui s’enracine lentementLes résistances à un transfert accru <strong>de</strong> compétences versles villes sont, on l’a vu, encore très nombreuses. Nombre<strong>de</strong> pays européens ont, au <strong>de</strong>meurant, connu ou connaissentencore <strong>de</strong>s difficultés simi<strong>la</strong>ires. Le volontarisme etl’engagement formel <strong>de</strong>s Etats est, ici, moins en cause que<strong>la</strong> lour<strong>de</strong>ur <strong>de</strong>s habitu<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s pratiques acquises maisaussi <strong>la</strong> complexité même d’un processus qui est lourd <strong>de</strong>conditionnalités. La décentralisation est un processus <strong>de</strong>long terme pour lequel une stratégie doit être mise en p<strong>la</strong>ceet <strong>de</strong>s priorités c<strong>la</strong>irement définies.Le PNUD qui a fait <strong>de</strong> <strong>la</strong> gouvernance locale une <strong>de</strong> sespriorités d’action dans les pays méditerranéens met en avantquatre priorités d’action dans le long cheminementinstitutionnel vers une gouvernance locale réussie qui sont :• Le transfert <strong>de</strong> ressources et <strong>la</strong> fiscalité locale,• Le développement <strong>de</strong>s compétences (capacitybuilding),• Une participation active et structurées <strong>de</strong>s citoyensaux décisions,• La mise en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> projets expérimentauxpermettant <strong>de</strong> démontrer le bien-fondé et l’efficacité<strong>de</strong> <strong>la</strong> décentralisation.Sur tous ces points, les réformes en cours dansl’ensemble <strong>de</strong>s pays gagnent en légitimité en opérant unefocalisation sur <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong> terrain et sur les obstaclesprocé<strong>du</strong>riers qui s’opposent à <strong>la</strong> mise en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> servicespublics plus efficaces. C’est ce qui explique que <strong>la</strong>décentralisation bénéficie d’un statut <strong>de</strong> plus en plusprivilégié dans l’agenda politique <strong>de</strong>s différentsgouvernements. Elle est inscrite dans <strong>la</strong> constitution <strong>de</strong>certains pays, dans <strong>de</strong>s termes, certes, plus ou moinsexplicite, mais qui ne permettent pas <strong>de</strong> douter <strong>de</strong> l’intention<strong>du</strong> légis<strong>la</strong>teur. La constitution marocaine, par exemple, prendsoin <strong>de</strong> ne pas se référer au principe <strong>de</strong> l’autonomie localeou <strong>du</strong> libre exercice <strong>du</strong> pouvoir par les collectivités locales,préférant mettre l’accent sur <strong>la</strong> notion <strong>de</strong> gestiondémocratique <strong>de</strong>s affaires locales.Au-<strong>de</strong>là, <strong>la</strong> décentralisation est vécue comme unfacteur essentiel d’apprentissage <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie politique et <strong>de</strong><strong>la</strong> participation citoyenne aux affaires publiques. C’est doncune fonction <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> importance quand on connaît lesdifficultés <strong>de</strong> toutes sortes qui retar<strong>de</strong>nt l’ouverture <strong>du</strong>champ politique national central. C’est ce qui explique queles forces sociales se soient, en priorité, investies sur lep<strong>la</strong>n local. C’est ce qui explique également que <strong>la</strong>gouvernance urbaine soit progressivement <strong>de</strong>venu le thèmecentral <strong>de</strong>s coopérations qui se nouent avec leurspartenaires au Nord <strong>du</strong> bassin directement ou à travers <strong>de</strong>sorganisations multi<strong>la</strong>térales. Le programme GOLD (voirencadré) en est une parfaite illustration.LE PROGRAMME GOLDLe programme GOLD Maghreb, initiative <strong>de</strong> partenariatspour <strong>la</strong> Gouvernance Locale et le Développement dansle Maghreb, se propose d’offrir aux administrationslocales un cadre <strong>de</strong> référence et <strong>de</strong>s instrumentsopérationnels pour encourager et faciliter l’établissement<strong>de</strong>s partenariats internationaux, afin <strong>de</strong> contribuer plusefficacement à un développement local <strong>du</strong>rable,équitable, pacifique et démocratique.GOLD Maghreb vise à soutenir les élus locaux, <strong>la</strong>société civile et le secteur privé maghrébin dans leureffort <strong>de</strong> promotion <strong>du</strong> processus <strong>de</strong> décentralisation et<strong>de</strong> développement participatif et intégré au niveau <strong>de</strong>srégions administratives <strong>du</strong> Maroc, <strong>de</strong> l’Algérie, <strong>de</strong> <strong>la</strong>Tunisie et <strong>de</strong> <strong>la</strong> Lybie.Il a pour principal objectif d’appuyer le processus<strong>de</strong> développement local participatif à travers unemeilleure utilisation <strong>de</strong>s ressources <strong>de</strong> <strong>la</strong> coopérationinternationale, <strong>de</strong> <strong>la</strong> coopération décentralisée et <strong>de</strong> <strong>la</strong>coopération Sud-Sud. GOLD intervient en matière <strong>de</strong>gouvernance locale, <strong>de</strong> développement économique localet <strong>de</strong> prévention <strong>de</strong> l’exclusion sociale. Il vise égalementà promouvoir les cultures méditerranéennes, <strong>la</strong>connaissance et le respect réciproque et à favoriser leséchanges culturels.Le groupe <strong>de</strong> travail au sein <strong>de</strong>s régions GOLD(Gouvernorats, Wi<strong>la</strong>yas, Shabiyat) é<strong>la</strong>bore les Documents<strong>de</strong> Marketing <strong>du</strong> Territoire (DMT) à travers une assistancetechnique. Les acteurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> coopération décentraliséepeuvent participer à ces activités en fournissant une ai<strong>de</strong>ou en contribuant à <strong>de</strong>s formations d’exécutifs locaux.Vers une participation accrue <strong>de</strong>s citoyens auxdécisionsLa gouvernance urbaine n’est pas qu’une affaire <strong>de</strong> volontépolitique. Elle est également affaire <strong>de</strong> métho<strong>de</strong>. Le seulfait <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> démocratie participative, <strong>de</strong> partenariat,116LES VILLESMEDITERRANÉENNESDIX ANS APRESBARCELONE