difficultés et de peine à essayer d'analyser objectivement ces comportements.Par la suite, certains de mes confrères me dirent que je n'avais pas la manière, que lapsychologie n'était pas mon fort et que j'étais moi-même le pire ennemi du D.N.R.Au printemps de l'année 1980, ils se résolurent à aller voir leurs homologuescardiologues. Mais leurs entrevues se soldèrent comme les miennes par des échecs et descatastrophes. A chaque fois, quatre spécialistes de la cardiologie refusèrent touteexpérimentation sur un tel sujet tabou, pour lequel les Russes et les Américains n'avaientpas trouvé de solution.Revenons au docteur Roland Rager, ce géant de la science, ce savant naïf mais génialqui, indifférent à la hargne et à la grogne de ses collègues, utilisa l'ionocinèse, récemmentréactualisée par Jacques Janet en gastro-entérologie, pour exploiter le D.N.R. encardiologie.Nous avions montré que le D.N.R. était un anion qui traversait très facilementl'épiderme et le derme. Ce fut donc la méthode de choix pour le traitement des anginesde poitrine et les infarctus du myocarde, pour faire arriver le D.N.R. en quantité suffisantesur les coronaires et leur donner une élasticité quasi physiologique.Ce mode d'administration locale se révéla infiniment supérieur aux piqûres intramusculaireou intra-veineuse. En effet, les artères étant déficientes, l'irrigation est malassurée et les piqûres ne permettent pas d'apporter le D.N.R. en quantité suffisante auniveau des coronaires et des artérioles des jambes pour permettre de rétablir unecirculation périphérique satisfaisante. C'est ce qu'observa expérimen-talement RolandRager.Le traitement des angines de poitrine, des infarctus du myocarde et des artérites étaitconstitué par une série de douze à seize séances d'ionocinèse d'une demi-heure chacune.L'intensité du courant appliqué variait entre cinq et vingt-cinq milliampères.Dans les deux premiers cas, les électrocardiogrammes perturbés et même trèsperturbés redevenaient progres-sivement normaux, dans 60 % des cas pour les infractuset dans 90 % des cas pour les angines de poitrine. Pour les artérites, les atroces douleursnocturnes et diurnes s'estompaient progressivement. Le sang circulait peu à peu demanière quasi normale dans les jambes grâce à la restauration de la circulationpériphérique. Le spectre de la gangrène et de l'amputation des jambe s'éloignait et lespatients pouvaient recommencer à marcher.Le malheureux Roland Rager, homme consciencieux et objectif, attaché à rapporter lesfaits tels qu'il les observait, eut l'outrecuidance de publier ces résultats. Les tollés netardèrent pas à jaillir, nombreux et drus. Ce n'étaient que des hors d'oeuvre à côté de cequi l'attendait dans un proche avenir.Avec une apparente insouciance et la sérénité de l'authentique savant, il accorda desinterviews remarquées aux journaux et à la télévision.La hargne médicale bordelaise commença à se manifester. Les avertissementscommencèrent à fuser de toutes parts à l'adresse de Roland Rager. Avec beaucoupd'adresse, ou plus vraisemblablement avec l'aide la Providence, il esquiva tous les coups,mais à titre provisoire, il faut bien le préciser.Contre toute attente, une éclaircie parut se manifester du côté de Paris : en 1967,Roland Rager se vit décerner par l'Académie de Médecine le prix J. Lévy-Bricker, unedistinction enviée destinée à récompenser ses travaux sur l'utilisation du D.N.R. enthérapeutique humaine.Cette satisfaction faillit pourtant être ternie de manière regrettable.Que se passa-t-il ?Vers 1964, un laboratoire pharmaceutique qui commençait à s'intéresser à lacommercialisation du D.N.R. fit effectuer des études sur le traitement de l'athéromeexpérimental chez le lapin, pour essayer de donner un fondement pharmacodynamiqueaux travaux de Rager. Ce fut un institut bordelais de microscopie électronique dépendantde la faculté des sciences qui mena cette étude à bien.Je tiens à préciser que ce ne fut pas un laboratoire de la faculté de médecine quieffectua ce travail. En effet, tous les services et instituts français travaillant de près ou de
loin sur les maladies cardio-vasculaires nous refoulèrent systématiquement sans lamoindre hésitation, quels que soient les crédits proposés pour entreprendre le travail.L'étude sur le traitement de l'athérome expérimental sur le lapin dura plus de deuxans. Ce fut donc un travail très soigné. L'étude portait en particulier sur l'examen aumicroscope électronique des coupes histologiques de l'aorte des lapins traités et nontraités au D.N.R. Plus de mille photographies furent ainsi prises au microscopeélectronique.Ce travail original montra, de manière magistrale, lumineuse et sans appel, les rôlespréventif et curatif du D.N.R. sur l'athérome. Ceci complétait, de manière triomphale, lesrésultats brillants obtenus par Roland Rager chez l'homme, lors du traitement des anginesde poitrine, de l'infarctus du myocarde et de l'artérite des membres inférieurs.Mais Roland Rager avait glissé dans son dossier, pour concourir au prix J. Lévy-Bricker,une photographie non publiée du travail précédent.Après l'attribution de la distinction, cette photographie fut portée à la connaissance del'institut auteur du travail, à la suite de démarches dénuées de délicatesse. Certainsmembres de l'institut se fâchèrent, le directeur en tête. Ils allèrent jusqu'à dire que leurinstitut avait été pillé. L'intérêt scientifique de la découverte du D.N.R. et de sesapplications en cardiologie furent éclipsés par ce pseudo pillage. Il fut question de rédigerune demande pour faire annuler l'attribution du prix à Roland Rager.Une mise au point brève mais explicite fut nécessaire. Roland Rager demanda par écritau directeur de l'institut s'il était anormal que l'Académie de Médecine pût avoir en maindes documents que toutes les esthéticiennes de France et des Etats-Unis possédaientdepuis deux ou trois ans. En effet, un dépliant publicitaire destiné à ces dernières, rédigéen français et en anglais, avait été diffusé à des centaines d'exemplaires depuis desannées.Le directeur de l'institut, les yeux révulsés et le nez en drapeau, dut convenir qu'il n'yavait là aucune anomalie. L'incident était clos. Une fois de plus, la Science n'avait pasvécu de grands moments.Roland Rager, dont les mérites commençaient à être reconnus par l'Académie deMédecine, pouvait en toute modestie aspirer au prix Nobel, car les travaux sur l'hommeétaient confirmés après ceux effectués sur le lapin.A peu près à cette époque, il fit éditer un livre de quatre cents pages, L'infarctus netue pas, dans lequel il faisait une mise au point à l'adresse du grand public. Il consacraitquelques pages au D.N.R., et montrait les avantages de cette thérapeutique originale etefficace.Peu après, une attaque en règle fut déclenchée par un cardiologue bordelais etsavamment orchestrée à l'échelle nationale. Mon ami reçut donc de l'Ordre des médecinsun blâme sévère. Il ne lui était nullement fait grief d'avoir trouvé un moyen efficace delutter contre l'infarctus, mais d'avoir fait de la publicité sur sa personne. Ce coup bas,difficile à qualifier, même avec une langue riche comme la langue française, incita lavictime à réagir. Il porta l'affaire devant le Conseil d'Etat. Après une longue instruction, cedernier lui donna raison, déclarant nulle l'initiative du chef de service hospitalier bordelaisqui avait demandé le blâme.Peu après, le plaignant devenu retraité passait de vie à trépas, victime d'un infarctus.Ses collègues déclarèrent qu'il avait mauvais caractère et qu'il était insociable.