téléchargement en PDF ici. - Silence

PavillonsEspace urbain, transportsLa maîtrise de la mobilité urbaine est peu abordée par les responsablespolitiques. Il est pourtant urgent d’agir non seulement sur la tarificationdes déplace ments mais aussi sur l’aménagement de l’espace, afin de réduirele volume des trafics et de rééquilibrer leur répartition modale.Les exemples de l’Alle magne et des Pays-Bas montrent qu’il est possiblede les mettre en pratique avec succès.Pourquoi l’habitat individuel isoléat tire-t-il autant les Français, etpourquoi la perspective d’une densificationde la ville existante est-ellegénéralement si mal ac ceptée ? Le manqued’information urbanistique, environnementaleet économique joue un rôleessentiel.La maison individuelleplébiscitée ?Selon le Centre de recherche pourl’étude et l’observation des conditions devie (CREDOC), la maison individuelle(elle représente les deux tiers des loge -ments neufs construits chaque année) estune “aspiration quasi-unanime”, souhai -tée par 82 % des Français, car elle sym -bolise le logement sur mesure, des pro -blèmes de bruit et de voisinage réduits, lejardin. Mais peut-on se contenter de ceconstat et accepter un étalement ur baincatastrophique ?Qu’il s’agisse de transport ou de loge -ment, l’attirance pour la solution indivi -duelle n’est pas une donnée de la nature,elle est conditionnée par les politiquesLa ville durableDRLotissement typiquement “breton” !publiques. La fascination des Françaispour la maison individuelle serait moinsmarquée si on leur proposait de choisirentre un habitat individuel périphérique,avec les difficultés associées de déplace -ment automobile (temps perdu, fatigue,risques d’accident, coût financier) et unlogement urbain (petit immeuble ou maisonde ville avec jardin à l’arrière) de qualité,en particulier bien insonorisé, etsitué dans un environnement attractif :circulation réduite, commerces, serviceset activités culturelles proches.La ville durable doit être :• compacte, ce qui suppose une maîtrise de l’extension périphérique à faible densitéde population, dévoreuse d’espace et source de trafic automobile ;• polycentrique et mixte (sans ségrégation spatiale trop marquée de l’habitat, des acti -vités, des services) afin de limiter et faciliter les déplacements internes ;• verte, irriguée par un réseau d’espaces verts et une voirie paisible, donc susceptiblede retenir ses habitants ;• juste, ce qui implique un certain équilibre social entre quartiers ;• belle, sans grands ensembles des Tren te Glorieuses, mais avec des constructionsvariées de qualité, la maison individuelle n’étant pas exclue.La ville durable ne rejette pas la voiture, mais elle donne toute leur chance et touteleur place aux transports collectifs et aux modes non motorisés.Henri Martin ■FNAUT LorraineMarché de dupesD’après le groupe Recherches straté -giques du PREDIT, de 1982 à 1994, la distanceentre logement et centre-ville a augmentéde 12 % et les déplacements entrebanlieue et périphérie de 79 % en kilomètresparcourus.“Cette évolution a créé une dépendanceà la voiture qui, d’objective, devientsociale et psychologique. Le mythe de laville à la campagne condamne souvent leshabitants à vivre dans des zones mal définieset mal commodes. L’achat d’un terrainà bâtir bon marché, stimulé par les prêts àtaux zéro, se révèle parfois un marché dedupes. Une étude de l’INRETS (Polacchiniet Orfeuil, 1998) établit que la dépenseglobale loge ment + transport en Ile-de-France représente 33 % des revenus pourun ménage habitant en zone centralecontre 52 % en moyenne pour un ménagehabitant en périphérie (59 % pour lesaccédants à la propriété)”.Plus précisément, la part du revenucon sacrée au logement, loyer ou remboursement d’emprunt, est de 27 % ;elle varie peu d’une zone à l’autre malgréles différences importantes du coût dulogement. Par contre, la dépense liée auxdéplacements quotidiens varie énormémentd’une zone à l’autre sous l’effet detrois facteurs : la taille de la famille, plusélevée en périphérie ; la distance moyenneparcourue par les habi tants de plus de6 ans (10 km dans la zone centrale, 24 kmdans la zone la plus excen trée) ; le revenumoyen des ménages, plus faible en périphérie.Cette dépense n’est que de 6 % àParis, elle atteint 26 % en péri phérie (et30 % pour les accédants à la propriété).Selon l’urbaniste Marc Wiel, “enmoins de dix ans, un ménage périurbainpaye en déplacements la différence entrele prix du terrain qu’il a acheté et celui duterrain en frange d’agglomération qu’il n’apas acheté”.SILENCE N°339 34Octobre 2006