Le Collectionneur de timbres-poste - 15 septembre 1864 - Arthur Maury

la Restaurationlui rendit son nom de Bourbon et
enfin elle reprit celui d'île de la Réunion en 1848.
De même qu'à la Nouvelle-Calédonie, le gouverneur
de l'île de la Réunion créa, de son autorité
privée, deux timbres-poste de 115 et de 30 centimes,
dont nous donnonsci-dessus les fac-simile.
Tous deux sont imprimés typographiquement en
noir sur papier à lettre azuré ; c'est par erreur que
plusieurs catalogues et albums ont attribué à ces
timbres d'autres couleurs que celle que nous indiquons.
Ils furent composés au moyen de petits ornements
clichés qui se trouvent dans toutes les
imprimerieset qui servent en général à l'encadrement
des couvertures de livres; système primitif
employé à Honolulu pour les timbres à chiffres et
dans la Guyane anglaise pour les provisoires.C'est
là un des caractères auxquels on peut reconnaître
les timbres authentiques de la Réunion, des nombreuses
contrefaçons.
Avec du tact, on parviendra, en examinant les
lettres et les dessins, à constater leur régularitéde
forme, régularité impossible à obtenir parfaite par
les procédés ordinaires de gravure et de lithographie.
Parmi les exemplaires que nous avons eu le
bonheur de posséder quelque temps, nous avons
remarqué de légères différences résultant de la position
des petits clichés d'ornementation. Ainsi les
boules formant la bordure extérieure du i'ô centimes
ont d'un côté un trait plus plein, une ombre,
laquelle, dans certains timbres, est toujours tournée
à gauche, tandis que dans d'autres elle porte
constamment du côté de la marge, comme si la
lumière venait du centre.
Il existe aussi quelques différences dan s la position
des deux petits points qui se trouvent après
l'abréviation TIMB :
Les imitations, très-nombreuses,sont généralement
peu fidèles; quelques-unes sont imprimées
sur papier bleu pâle, bleu foncé, gris et vert.
Bien qu'ayant été en usage pendant plusieurs
années, ces timbres sont devenus introuvables :
à part quelques collectionneurs qu'on peut compter,
personne n'a pu s'en procurer et cependant,
Dieu sait combien de lettres apostillées d'illustres
signatures, ont reçues le gouverneur et le directeur
des postes de l'île! La réponse est toujours
la même : « Les timbres sont supprimés, et malgré
toutes les reeherches, on n'en peut plus découvrir
un seul. »
L'une de ces réponses nous a été communiquée;
elle est signée d'un haut fonctionnaire qui fut
plusieurs années directeur des postes de Saint-
Denis. a Pendant cinq ou six années qu'ont duré
les timbres de la Réunion, écrit-il à un influent
collectionneurparisien, il en a été vendu dans mon
bureau pour 8 FRANCS!! » c'est-à-dire une dizaine
de timbres par an en moyenne et dans le cheflieu
de l'île !
Le peu d'accueil du public à leur égard provenait,
paraît-il, de ce qu'ils n'étaient pas gommés
derrière (singulière difficulté !) ; et comme chaque
particulierdevait se charger de les coller lui-même
sur sa lettre, on préférait affranchir au bureau,
en numéraire, cela était plus vite fait, car dans
les pays chauds la colle liquide se conserve avec
difficulté.
Enfin, comme ces timbres se détérioraient, on
résolut d'en faire un auto-da-fé. On réunit ce qu'on
en put trouver et le tout fut brûlé sans pitié.
Quel trésor perdu pour les collectionneurs!
Immédiatement après (1860), le directeur des
postes de l'île reçut les timbres ordinaires des
colonies françaises, dont l'emploi se généralisa
promptement.
Un savant de nos amis, qui a passé plusieurs
années à la Réunion, nous expliquait d'une autre
manière la rareté des anciens timbres. Il paraît
qu'à moins qu'ils ne soient conservés avec le plus
grand soin, tous les papiers y sont promptement
dévorés par un insecte qu'on appelle dans le
pays hakerlac, et qui est une grosse variété des
blattes Aussi les papiers précieux, de famille, etc.,
sont-ils renferméshermétiquementdans des boîtes
en fer-blanc.
A. MAURY.
DES TIMBRES DES ILES PHILIPPINES.
Peut-être nous flattons-nous,cependant ii nous
semble qu'en ce qui touche ces mystérieux tim-