Spectrum #1 2018
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CULTURE<br />
Les auteurs romands : ils vivent !<br />
La littérature suisse romande est encore très méconnue de nos jours, au point de paraître<br />
inexistante, y compris dans l’esprit de nos citoyens. Heureusement, des organisations telles<br />
que le collectif Tulalu donnent la parole à ces auteurs régionaux et à leurs œuvres. Voici leur<br />
histoire, en compagnie de la présidente Carole Dubuis.<br />
GUILLAUME BABEY<br />
Tout commença en 2007. Miguel<br />
Moura, cuisinier et grand lecteur,<br />
organisait des soirées littéraires au<br />
« Zinéma », un cinéma alternatif à Lausanne.<br />
Chacun amenait son livre lors<br />
de ces rencontres informelles. Il arrivait<br />
fréquemment que des auteurs romands<br />
se glissent parmi les participants. Le<br />
public se formait progressivement autour<br />
d’eux. Ces auteurs en visite possédaient<br />
souvent un exemplaire de leur<br />
dernière œuvre et en récitaient des extraits.<br />
Face au succès de la lecture de<br />
ces extraits, les fondateurs du collectif<br />
souhaitèrent institutionnaliser l’événement<br />
par l’invitation périodique d’un<br />
auteur romand.<br />
Baptême de bibliophiles<br />
En 2010, l’association Tulalu fut officiellement<br />
fondée, avec pour but de<br />
promouvoir les auteurs suisses francophones.<br />
Le siège du collectif se trouve<br />
au cinéma Bellevaux après avoir été<br />
accueilli plusieurs années par le restaurant<br />
Lausanne-Moudon. L’apprentissage<br />
ne fut pas sans épreuves pour le<br />
groupe. Partant de zéro, ces passionnés<br />
bénévoles ont dû maîtriser rapidement<br />
les bases du métier. La principale difficulté<br />
était de trouver des sponsors. Ces<br />
épreuves n’entravèrent pourtant pas<br />
l’ascension du collectif, soutenu par la<br />
soif de lecture de son public. La preuve<br />
du succès, c’est l’imitation. En effet, de<br />
nombreuses associations aux objectifs<br />
similaires verront le jour durant cette<br />
période féconde du début des années<br />
2010. On peut citer le Jukebox, la Maison<br />
Eclose ou encore le Cran Littéraire.<br />
Tulalu sera souvent invité à participer<br />
aux événements organisés par ces<br />
autres cercles littéraires.<br />
Le plein essor<br />
De gauche à droite : Sima Dakkus, Pierre Fankhauser, Carole Dubuis et Miguel Moura.<br />
Les activités du collectif s’articulent<br />
autour de rencontres officielles avec<br />
un auteur et de lectures d’extraits par<br />
des comédiens, parfois accompagnés<br />
de musiciens. Pierre Fankhauser, auteur,<br />
traducteur et administrateur du<br />
groupe, prend le soin d’animer l’événement.<br />
Tulalu organise aussi des<br />
journées thématiques ou des collaborations<br />
avec un éditeur. Les œuvres<br />
doivent être des fictions et publiées à<br />
compte d’auteur, l’auteur doit assumer<br />
lui-même les frais d’impression et de<br />
publicité. En 2013, Carole Dubuis, auteure<br />
dramatique, devient présidente<br />
du collectif. Depuis, l’équipe a fort à<br />
faire car l’engouement, tant du côté<br />
du public que du côté des auteurs, ne<br />
cesse de croître. Preuve en est, la liste<br />
d’attente des auteurs souhaitant participer<br />
aux séances de lecture s’étale sur<br />
trois ans.<br />
Tendance romande<br />
Vous pouvez découvrir le programme de Tulalu sur leur site :<br />
https://tulalu.ch/au-programme/<br />
Le blog de Carole Dubuis : http://caroledubuis.ch<br />
Sur les 130 auteurs accueillis par Tulalu<br />
ces dix dernières années, peu d’entre<br />
eux se ressemblent, si ce n’est sur un<br />
point, selon Mme Dubuis : « Les auteurs<br />
romands ont une tendance à l’intériorité<br />
et à la réserve, pour ne pas dire à une<br />
certaine pudeur ». Malgré le succès de<br />
ces cercles littéraires, la présidente regrette<br />
le manque de collaborations. Une<br />
meilleure communication entre les différents<br />
groupes permettrait de résoudre<br />
des problèmes logistiques ou financiers.<br />
L’organisation n’oublie pourtant pas que<br />
son atout est avant tout la proximité,<br />
entre les auteurs et le public, entre les<br />
lecteurs et la littérature romande, entre<br />
les artistes locaux et les citoyens.<br />
© Photo : Gennaro Scotti<br />
16 02-03.<strong>2018</strong>