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CHAMPIONNES<br />
Rencontre<br />
Aziza Oubaita,<br />
à cœur ouvert<br />
Avec 70 combats au compteur, elle en a donné (mais également reçu !), des crochets du droit.<br />
Pourtant, c’est loin des rings qu’Aziza Oubaita a mené le véritable combat de sa vie. Atteinte<br />
d’une myocardite aggravée, cette ancienne boxeuse professionnelle a subi une transplantation<br />
cardiaque en juillet 2016. Une opération qui ne l’a pas mise K.O puisque, moins de deux<br />
ans plus tard, elle renfilait ses gants pour un jubilé historique. Son « hymne à la vie ». Une<br />
première dans le monde du pugilat. Récit. PAR FLORIANE CANTORO<br />
Nous avons rencontré Aziza Oubaita<br />
sur le Salon International du<br />
Sport au Féminin (SISAF) en juin<br />
dernier, à Paris. La championne intervenait<br />
sur l’une des conférences<br />
de l’événement intitulée « Sport<br />
comme vecteur de reconstruction ».<br />
Il y a des dates qui nous marquent à<br />
vie. Et ce n’est pas Aziza Oubaita qui va<br />
nous dire le contraire. Cette ancienne<br />
boxeuse professionnelle se souviendra<br />
certainement toujours des 21 mai<br />
2015, 17 juillet 2016 et 30 mars 2018.<br />
Ces jours où, dans un sens comme dans<br />
l’autre, sa vie a basculé.<br />
Pourtant, il y a quatre ans, cette native de<br />
Casablanca, arrivée en France à l’âge de<br />
6 ans, vivait une retraite sportive paisible.<br />
Retirée des rings depuis 2011, elle avait<br />
repris son métier de styliste, une passion<br />
« aussi dévorante que la boxe ». Jusqu’à<br />
ce que la vie n’en décide autrement…<br />
Un « truc » nouveau dans la<br />
poitrine<br />
© Nadia Poorjabar<br />
qu’elle commence sur le tard en souvenir<br />
du feuilleton de son adolescence «Les<br />
Brigades du Tigre», lui ont forgé un coeur<br />
de sportive, trop musclé pour détecter les<br />
signes avant-coureurs de la maladie. En<br />
dépit des semaines de traitement, son<br />
état de santé s’aggrave et la greffe devient<br />
inévitable.<br />
Elle a lieu le 17 juillet 2016, une date<br />
désormais tatouée à l’encre près de son<br />
nouveau coeur. L’inscription « Only one<br />
life », avec un coeur rouge, est également<br />
visible sur son biceps droit. « C’est ma renaissance<br />
», explique la championne de<br />
boxe, spécialiste de la française avant<br />
de se tourner vers l’anglaise. Mais avant<br />
de revivre, il a fallu se battre. Contre la<br />
maladie, mais aussi contre soi-même.<br />
« Les patients transplantés deviennent<br />
des dépressifs chroniques. J’avais «Madame<br />
Déprime» qui était collée à moi en<br />
permanence et elle pouvait me happer à<br />
« SANS LA BOXE, J’AURAIS SÛREMENT<br />
JETÉ L’ÉPONGE ! »<br />
Tout a commencé le 21 mai 2015. « Ce<br />
jour où j’ai failli y rester… », se souvient<br />
Aziza. Cette nuit-là, elle se réveille à 3h du<br />
matin, affolée par un coeur battant à plus<br />
de 250 pulsations par minute. Sa tension<br />
està 5 et ses poumons remplis d’eau. En<br />
hypothermie totale, elle est transportée<br />
d’urgence à l’hôpital. Après une batterie<br />
d’examens, on lui décèle une myocardite<br />
aggravée (maladie du muscle cardiaque),<br />
conséquence d’une bronchite mal soignée.<br />
« C’est le début de ma descente aux<br />
enfers », raconte l’ancienne championne,<br />
aujourd’hui âgée de 46 ans. Elle souffre<br />
probablement depuis plusieurs mois.<br />
Mais ses entraînements de boxe, un sport<br />
n’importe quel moment ». Sportive depuis<br />
l’enfance, elle se retrouve à prendre des<br />
dizaines de pilules par jour et doit vivre<br />
avec ce « corps déglingué », « un organe<br />
en moins » et « un truc nouveau dans la<br />
20 WOMEN SPORTS N°10 • Octobre-Novembre-Décembre 2018 EN SAVOIR PLUS SUR WWW.WOMENSPORTS.FR