Spectrum_3_2020
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changement de paradigme : « Avant,
j’imaginais ma vie faite de travail et de
vacances. Mais aujourd’hui, j’aspire à des
choses plus simples, moins polluantes.
Nous devons apprendre à changer nos
désirs », affirme-t-il.
Le besoin d’en faire plus
Après un certain temps, entreprendre
des changements au niveau individuel
n’était plus suffisant pour ces trois activistes.
« Au fur et à mesure de mes recherches,
les informations se métabolisaient
», raconte Jonas. « Au début, je
ne faisais qu’y penser. Puis j’ai ressenti
un mal-être physique au point de ne pas
dormir. J’ai vécu ça et ça m’a transformé.
Je me suis alors engagé de plus en plus. »
Zélie a également ressenti ce mal-être et
ce besoin d’agir. Pourtant, lorsqu’on lui
demande ce qu’elle attend de son engagement,
elle ne se fait pas d’illusions :
« Plus tu te renseignes, moins tu as d’espoir.
Même si on arrêtait aujourd’hui de
polluer, les dégâts irréversibles que nous
avons causés par le passé occasionneront
plusieurs décennies de changements. Il
faut être conscient·e de ça et c’est uniquement
avec cet état d’esprit qu’on pourra
essayer de sauver le vivant », confie-t-elle.
Militer avec conviction n’est donc pas facile
tous les jours. Si tou·te·s ont douté à
un moment de l’utilité de leurs actions, nos
trois témoins affirment néanmoins préférer
agir plutôt que rester les bras croisés
« en regardant le monde s’effondrer. »
Vivre avec ses contradictions
Les trois étudiant·e·s montrent une
conscience aigüe de leurs propres
contradictions et une recherche de cohérence
dans leurs actions. Léa tempère :
« Quelqu’un qui fait du zéro déchet c’est
bien, mais si cette personne part tous
les ans en avion, ça reste moyen. » C’est
pourquoi il·elle·s cherchent à rester critiques
pour progresser.
Cependant, militer signifie aussi faire
face aux jugements des autres, que ce soit
de la part d’ami·e·s dubitatif·ve·s ou de
passant·e·s affecté·e·s par les manifestations.
« J’ai souvent entendu ‘Ne desservez-vous
pas votre cause en bloquant ce
pont et en vous mettant ainsi des gens à
dos ?’ », raconte Zélie. « Je crois que ces
critiques sont légitimes et elles ont d’ailleurs
été pensées dans la stratégie d’XR.
Le but n’est pas que tout le monde nous
aime, mais plutôt que des personnes déjà
sensibilisées s’intéressent et s’engagent. »
Tou·te·s trois sont ouvert·e·s à la discussion
et à la sensibilisation mais fuient les
débats interminables et stériles avec les
personnes qui critiquent sans argumenter.
Pour Jonas, la légitimité et la perfection
sont une question très suisse : « Comme
s’il fallait nécessairement être parfait·e
pour s’engager… mais on ne peut pas être
parfait·e avec ce système ! » Il conclut :
« Les gens trouveront toujours quelque
chose à redire par rapport à tes actions
parce que tu les déranges et ce que tu
fais est illégal. Mais tu ne peux pas t’arrêter
à cela, sinon tu ne milites plus. »
Réfléchir plus loin que la perfection
Ainsi, bien que les critiques extérieures
puissent être virulentes, les trois étudiant·e·s
poursuivent leur volonté de
manifester. Au-delà de la réflexion sur
son impact environnemental personnel,
chacun·e a la volonté de sensibiliser le
plus de monde. « Si une maison brûle,
elle va forcément finir en cendres si tu
ne fais rien. Mais si tout le monde s’y met
un petit peu, tu arrives à limiter les dégâts,
ou en tout cas tu essaies. Et si en
plus les pompier·ère·s s’y mettent, soit
les politiques, l’impact sera encore plus
grand », confie Léa. Néanmoins, Jonas
n’entretient que peu d’espoirs sur une
prise d’initiatives du gouvernement face
à la crise qui nous attend. Il met en avant
deux types d’écologie : « La première est
prônée actuellement par nos politiques
parce qu’elle s’intègre à notre système
capitaliste. La deuxième est une forme
d’écologie plus radicale qui s’attaque aux
causes du problème et donc au système
dans son intégralité. » Selon lui, il est nécessaire
de redéfinir nos désirs et ce qui
est valorisé par la société pour y parvenir.
En somme, l’imperfection importe peu :
l’apprentissage, la solidarité, la remise en
question et un engagement concret auront
bien plus d’impact. P
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