02.06.2013 Views

MANUEL GÉNÉRAL DE L'INSTRUCTION PRIMAIRE - INRP

MANUEL GÉNÉRAL DE L'INSTRUCTION PRIMAIRE - INRP

MANUEL GÉNÉRAL DE L'INSTRUCTION PRIMAIRE - INRP

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

PARTIE <strong>GÉNÉRAL</strong>E 541<br />

= = = = = — REVUE LITTÉRAIRE —<br />

Par LÉO<br />

1. Le Pékin de l'Empereur. — 2. En Alsace-Lorraine : De l'École à la Caserne.<br />

3. Corneille au Collège. — 4. Un premier Vol.<br />

5. Le Livre d'Or des Femmes.<br />

I. — Le Pékin de l'Empereur.<br />

Deux camarades de régiment.— Un enragé joueur<br />

de cor. — La brouille. — A la veille de la bataille<br />

de Craonne. — « Triomphante » retraite de<br />

Blùcher. — Fidèle jusqu'au bout.<br />

Les événements qui ont pour théâtre le chemin<br />

des Dames et le plateau de Graonne, ont<br />

donné à M. G. Lenôtre l'occasion d'évoquer<br />

devant nous quelques scènes de la petite histoire<br />

qui souvent confine à la grande.<br />

« Le chemin des Dames » fut établi sous<br />

Louis XV pour faciliter les déplacements des<br />

trois filles du roi qui allaient souvent rendre<br />

visite à Mme de Narbonne, au château de la<br />

Bove. Cette route traverse, sur une longueur de<br />

18 kilomètres, le plateau de Graonne et descend<br />

dans la vallée de l'Ailette pour atteindre les<br />

bois de Vauclerc.<br />

On se rappelle que ce plateau fut, en 1814, le<br />

théâtre d'une sanglante bataille livrée par<br />

Napoléon aux Prussiens de Blùcher. Dans ces<br />

parages vivait alors u n gentilhomme campagnard,<br />

M. de Bussy qui, sorti de l'Ecole militaire<br />

en même temps que Bonaparte, avait été<br />

envoyé avec lui à Auxonne comme lieutenant<br />

d'artillerie. Bussy n'avait pas gardé un très bon<br />

souvenir de son camarade:<br />

« Logé à la caserne, le lieutenant de Bussy<br />

occupait une chambre au deuxième étage du<br />

pavillon des officiers; il y pissait le meilleur<br />

de son temps à sonner du cor de chasse, à<br />

grand renfort de couacs et de fausses notes,<br />

ce qui exaspérait le camarade Bonaparte, logé<br />

au troisième étage, et que ce charivari empêchait<br />

de travailler. Certain jour, on se rencontre<br />

dans l'escalier: «Mon cher, dit le petit<br />

Corse, vous devez bien vous fatiguer avec<br />

votre maudit cor. — Pas du tout. — Eti bien,<br />

vous fatiguez beaucoup les autres. — Je suis<br />

maître chez moi. — Si vous continuez, Bonaparte<br />

pourra vous montrer sa tactique de<br />

combat. » Un duel fut décidé ; mais le conseil<br />

du régiment intervint. Il fut convenu que Bussy<br />

userait discrètement de son instrument et que<br />

Bonaparte se montrerait endurant. Tout de<br />

même, Bussy avait gardé ça sur le cœur ; il ne<br />

se souciait pas de servir sous les ordres de son<br />

ancien camarade, qu'il n'arait jamais revu ni<br />

sous le Consulat, ni sous l'Empire. »<br />

Les choses en étaient là quand, en 1814, à la<br />

veille de la bataille de Craonne, l'empereur fit<br />

mander à son quartier général son ancien<br />

camarade d'Auxonne.<br />

« Eh bien 1 Bussy, lui dit-il en l'apercevant,<br />

sonnez-vous toujours du cor? — Oui, Sire, et<br />

toujours aussi faux. » La vieille querelle aurait<br />

recommencé si l'on n'avait eu mieux à faire.<br />

L'empereur, tout de suite en confiance, expose<br />

la situation à son camarade de régiment : Blùcher<br />

et les Russes tiennent le plateau; demain,<br />

à l'aube, les troupes françaises escaladeront les<br />

hauteurs; l'artillerie canonneral'isthme d'Heurtebise,<br />

tandis que Ney, au nord, du côté de<br />

Vauclerc, et Nansouty, au sud, au-dessus de<br />

Vassoigne, donneront l'assaut à la montagne.<br />

Tel est le plan. « — Connaissez-vous bien le<br />

plateau de Craonne, Bussy? — Parbleu, sire,<br />

c'est mon terrain de chasse. »> Et l'ancien<br />

lieutenant, qui avait mille fois arpenté ces<br />

champs et ces bois, monta à cheval et alla<br />

explorer les positions ennemies. Au jour, la<br />

bataille s'engageait : Bussy, en veste de chasse<br />

de velours vert, ne quittait pas l'empereur,<br />

déjeunait avec lui, assistait, frémissant d'enthousiasme,<br />

aux tentatives furieuses de Ney et<br />

de Nansouty pour gravir, sous la mitraille, les<br />

pentes du plateau. A une heure, la ferme<br />

d'Heurtebise était enlevée. Sacken et Woronzof<br />

cédaient sous la poussée de nos troupes, qui<br />

chassaient l'ennemi jusqu'à l'extrémité du<br />

Chemin des Dames. La nuit seule interrompit<br />

cette poursuite de 18 kilomètres. Blùcher qui,<br />

d'avance, avait qualifié son plan de bataille<br />

« d'admirable manœuvre » devant infailliblement<br />

« donner le coup de grâce à l'armée française<br />

», Blùcher se repliait sur Laon, laissant<br />

les Russes aux prises avec nos soldats. Il déclara<br />

que cette retraite était pour lui o un éclatant<br />

triomphe » et qu'elle rentrait dans ses<br />

géniales combinaisons... Déjà !<br />

Bussy, continue M. Lenôtre, à qui revenait<br />

une grande part du succès, ne rentra pas chez<br />

lui après la victoire. Promu colonel d'artillerie<br />

— un bel avancement — il n'avait eu ni le<br />

temps ni l'occasion de se fournir d'un uniforme :<br />

c'était en veste de chasse qu'il suivait partout<br />

l'état-major impérial, et les grognards, en le<br />

distinguant dans cet équipage, parmi les maréchaux<br />

dorés et les escortes rutilantes, l'appelaient<br />

« le pékin de l'empereur ». Il resta fidèle<br />

jusqu'au bout, et, dans les heures suprêmes de<br />

Fontainebleau, Napoléon, abandonné de tous,<br />

eut pour pieux témoin de ses larmes, de ses<br />

rages et de son désespoir, son ancien commensal<br />

d'Auxonne, avec lequel il avait failli « se<br />

couper la gorge » au temps de ses vingt ans.<br />

2. — En Alsace-Lorraine :<br />

De l'École à la Caserne.<br />

Une conférence à 'la Sorbonne. — Les petits Alasciens<br />

à l'école primaire. — Le dressage prussien<br />

Dans une conférence qu'il a faite à la Sorbonne,<br />

M. Benjamin Vallotton nous a exposé les<br />

péripéties émouvantes du drame alsacien-lorrain<br />

depuis l'annexion. Chemin faisant, il nous<br />

a montré quels procédés avait employés le caporalisme<br />

prussien, pour militariser l'enfant de<br />

telle sorte, qu'il glisse de l'école à la caserne<br />

sans avoir l'impression de changer de milieu.<br />

A l'école primaire, nous dit il, l'instituteur<br />

est un soldat dressé à la prussienne. On y vise

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!