Le café-concert: Archéologie d'une industrie ... - Marc Angenot
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Un jour je rencontre un'cocotte<br />
Qu'était très fournie en appas...<br />
<strong>Le</strong>s femm's un peu r'bondies, ça m'botte<br />
Tout d'suit' j'y dis deux mots tout bas.<br />
Ell' m'répond <strong>d'une</strong> voix insinuante:<br />
C'est d'main l'jour de mon loyer<br />
T'aurais pas un billet d'cinquante..<br />
-Ah! non alors... j'vas r'miser!<br />
(Delormel & Garnier)<br />
Dès le Second Empire, le caf'conc' fournit au discours populaire parisien un répertoire<br />
de cryptosémies (selon le terme du sémanticien L. Carnoy), de "phrases de remplissage" vides<br />
de sens mais comiques dont le succès, pour certaines d'entre elles, s'étendra sur un siècle au<br />
moins. "As-tu vu Lambert?", "On dirait du veau!" et "En voulez-vous des z-homards?" sont des<br />
scies qui datent du règne de Napoléon III. "Et ta soeur?..." (avec la réplique "Elle bat l'beurre"<br />
et ses variantes coprolaliques) appartient probablement à ce répertoire.<br />
La réitération de la formule attendue qui fait le charme de la scie aboutit au genre de<br />
la chansonnette "cri du coeur": "Ah! Ah! Ah! Auguste!!!" L'effet de scie combine la surenchère<br />
dans l'insanité et l'accumulation d'idiotismes populaires reconnus avec délice par le public:<br />
Ohu! Ohu! oh Ulysse!<br />
Tu m'l'a fais à l'eau d'mélisse<br />
Fais donc pas tes embarras<br />
Car avec moi ça n'prend pas!<br />
(Oh! Ulysse, Dupuy & Maade<br />
18<br />
(F 1616)<br />
On aboutit ainsi à la recherche fatrasique de l'insanité pour l'insanité, sans queue ni tête, à la<br />
loufoquerie stupéfiante:<br />
Célestin<br />
Était plein<br />
Titine est née à Grenelle,<br />
Tant mieux pour elle!<br />
Et Guguss' nez-aplati<br />
Tant pis pour lui!<br />
Titine aim' le vermicelle,<br />
Tant mieux pour elle!<br />
Guguss' le macaroni,<br />
Tant pis pour lui.<br />
(Cité par Chadourne, 1889, 227)<br />
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