une bande dessinee idéologique : rahan - Revue des sciences ...

(36) F. Engels, Der Ursprung, p. 169.
passera une crête que nul n'avait franchie
avant lui» (117, 388). Le premier,
il conçoit que le soleil «tourne» autour
du monde, qui «serait rond
comme un fruit», de même que les pirogues
tournent autour d'une île (106,
21): il était assez délicat d'en faire
l'initiateur de la théorie copernicienne
! Parfois, R tâtonne dans son
laboratoire à ciel ouvert, répète les essais
(59, 64), recrée les phénomènes
(73, 61). Maître d'ceuvre d'une politique
de recherche volontariste, — comment
serait-il «moderne» sans cela ?
—, il «ne s'était jamais trouvé devant
un mystère sans tenter de l'éclaircir»
(92,11). La nature se prête à cette entreprise
: « Tout mystère a son explication»
(29, 68), bien qu'il arrive que
la compréhension soit différée. Incapable
d'expliquer l'arc-en-ciel, R
n'éprouve «aucune crainte, aucune inquiétude»,
— qui serait «religieuse»
—, car il «comprendra plus tard ce
qu'il ne s'explique pas aujourd'hui»
(114,796).
7? sera donc l'adversaire du sorcier et
de ses «territoires imaginaires». Ce
qui ne se touche ni ne se voit, ne peut
exister : «7? n'a jamais vu les "esprits"
apaiser la colère des "morts"»
(77, 56). Ceux-ci ne sauraient revivre
(38, 77), ils «n'ontpas besoin de nourriture»
(69, 58), « car la mort enchaîne
jusqu'à la fin des temps» (30, 26). R
est un incroyant radical (35, 27), caractéristique
essentielle (et martelée
plusieurs dizaines de fois) qui le distingue
des mortels pré-scientifiques.
Pour «le clan, c'est une "réincarnation",
un "miracle". Pour R, c'est un
mystère» (42, 14). Il ne croira jamais
«pareille sottise» (93, 32) et son
athéisme le porte à défier les dieux de
pacotille (111, 722). Passer outre aux
interdits met en lumière l'absurdité
des raisonnements «traditionnels». Il
mange des poissons sans que son
corps ne se couvre d'écaillés (29, 73),
pénètre dans un antre que les hommes
croient habité de démons et « Ce n 'est
que le vent qui hurle dans la caverne»
(58, 56). En rêve, il entend le sermon
paternel : «lutte contre ces mystères
pour éveiller l'esprit des hommes»
(35, 21).
Libéré des illusions et fausses croyances,
l'intellect est placé face au «réel»,
tandis que la découverte est soumise
aux conditions d'un «empirisme
naïf» où le hasard (36) joue un rôle
central. Il est en effet pur de toute intention
idéologique et relève d'une infrastructure
naturelle qui laisse,
d'elle-même, miroiter ses facettes.
Comme le « hasard objectif » des surréalistes,
la nature combine ses propres
morceaux tant et si bien que le résultat
finit toujours par correspondre
à quelque chose d'intéressant. Le hasard
« vient souvent en aide aux chasseurs»
(9, 26).
Cependant, la nation préhistorique a
besoin d'ingénieurs, plus encore que
de savants. 7? ne se contente pas d'observer
le monde, «7/ retient ce qu'il
voit et cela lui est souvent bien utile»
(10, 68). Ses découvertes «trouvaient
toujours une application» (27, 22).
Du besoin à la découverte, le chemin
est bien court. Que son coutelas ait
tendance à se prendre dans les ronces,
et 7? invente une fixation adéquate
(108, 59). Un bras cassé le fait immé-
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