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une bande dessinee idéologique : rahan - Revue des sciences ...

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(4) P. Clastres, p. 181.<br />

(5) J.H. Rosny-Aîné, p. 6.<br />

(6) M. Sahlins, p. 76 ; P. Clastres, p. 22.<br />

(7) M. de Montaigne, pp. 255-256.<br />

(8) F. Engels, Der Ursprung, p. 171.<br />

(9) V. Lénine, t. 2, p. 618.<br />

(10) Op. cit., p. 71.<br />

(11) P. Clastres p. 191.<br />

(12) L.H. Morgan, p. 548.<br />

nisme classique, tel qu'on le trouve<br />

chez G. Klemm ou L.H. Morgan.<br />

L'«état sauvage», au bas de l'échelle<br />

<strong>des</strong> sta<strong>des</strong>, est la toile de fond qui<br />

donne sens à son inverse. Comme le<br />

remarque P. Clastres, il est nécessaire<br />

que ce négatif ait existé et que l'extrême<br />

faiblesse soit à la source du besoin<br />

de «développement» (4). Alimenté<br />

par <strong>une</strong> littérature toujours<br />

actuelle, conforté par les films qu'on<br />

en tire, l'énorme lieu commun de la<br />

«Guerre du feu» possède tous les caractères<br />

d'<strong>une</strong> idéologie. Il paraît indiscutable<br />

et justifie le monde contemporain.<br />

L'effort prométhéen de nos<br />

ancêtres, qui traînent leur désespoir<br />

«dans la nuit épouvantable», comme<br />

l'écrit J.H. Rosny-Aîné (5), aurait-il<br />

<strong>une</strong> signification si l'on se rendait aux<br />

arguments — pourtant décisifs — de<br />

M. Sahlins ? La fameuse «civilisation<br />

de loisir » (6) <strong>des</strong> chasseurs-collecteurs<br />

actuels, dans <strong>des</strong> conditions de confinement<br />

nettement moins favorables<br />

qu'au paléotithique, rejoint le sentiment<br />

de Montaigne. Ses «cannibales»<br />

oisifs vivent dans l'abondance et<br />

«toute la journée se passe à<br />

danser» (7).<br />

Les hypostases les plus récurrentes du<br />

thème initial prennent la forme d'<strong>une</strong><br />

« sociologie » dont tout procède en fin<br />

de compte. Deux principes, individus<br />

ou groupes, se font face. L'un domine,<br />

exploite, trompe, avilit, chasse<br />

ou tue l'autre, affrontement dont la<br />

diversité <strong>des</strong> mises en scène tempère le<br />

caractère lancinant. La «contradiction<br />

» de base se traduit par la confiscation,<br />

par <strong>une</strong> minorité de nontravailleurs,<br />

d'un bien qui devrait profiter<br />

à tous. La minorité résout donc à<br />

son avantage, d'<strong>une</strong> manière parasitaire,<br />

le problème du besoin général<br />

auquel tous les hommes sont confrontés.<br />

Ainsi : «Jede Wohltat fur die einen<br />

ist notwendig ein Ûbel fiir die andern»<br />

(8). Dans le cas le plus simple,<br />

les riches, confondus avec les « filous »<br />

(9), accaparent <strong>des</strong> biens que les pauvres<br />

sont seuls à produire. A tout<br />

point de vue «l'ennemi principal est<br />

dans notre propre pays» (10). De<br />

même que l'assimilation de la préhistoire<br />

à l'indigence du Tiers Monde,<br />

l'exploitation <strong>des</strong> «classes» est alignée<br />

sur le modèle contemporain. Il serait<br />

aisé d'opposer à ce genre de conception<br />

l'idée amérindienne, par exemple,<br />

que l'aisance repose surtout sur<br />

l'« auto-exploitation de l'individu par<br />

lui-même » et produit à son tour l'« exploitation<br />

<strong>des</strong> riches par la communauté»<br />

(11).<br />

La césure entre seigneurs et esclaves<br />

est induite par la propriété. D'elle procède<br />

la mise en place d'<strong>une</strong> hiérarchie<br />

arbitraire, la « loi du chef» (30, 10),<br />

qui « ne connaît que la force <strong>des</strong> bêtes<br />

fauves» (4, 10) et dont la justice est<br />

expéditive (94, 51). Corrélativement,<br />

« la loi du clan est terrible pour les faibles»<br />

(4, 8). Il arrive que le pouvoir<br />

soit dévolu à la <strong>des</strong>cendance exclusive<br />

<strong>des</strong> chefs, ce qui provoque la formation<br />

d'<strong>une</strong> noblesse (77, 56), dont la<br />

progéniture reçoit <strong>une</strong> éducation priviléiée<br />

et «reproduit» le modèle social<br />

(30, 8). Au-<strong>des</strong>sus du commun, ces<br />

personnages résident dans <strong>des</strong> huttes<br />

spéciales (6, 7) et leur domaine est<br />

«sacré» (19, 51). Quelques commentaires<br />

«ethnologiques» renforcent le<br />

tableau : « Pour les Papous, la suprématie<br />

de la force est la seule dont<br />

l'homme puisse se prévaloir» (15, 49)<br />

et la justice est «intransigeante» chez<br />

les Massai (12, 52). La prééminence<br />

du «politique», dont l'existence serait<br />

attestée partout, assume <strong>une</strong> fonction<br />

précise. Elle permet de se comparer<br />

avantageusement aux «primitifs».<br />

Comme nous, ils vivent dans <strong>des</strong> sociétés<br />

(normalement) hiérarchisées ;<br />

contrairement aux nôtres, leurs chefs<br />

ne sauraient être que vils tyrans.<br />

Cette autorité fondée sur la force<br />

s'exerce aussi bien à l'intérieur de la<br />

famille. L'amour est inconnu au<br />

«stade sauvage» (12) et les hommes<br />

oppriment leurs compagnes. Certaines<br />

sont captives de leur mari (1,17). Parfois<br />

les femmes, au contraire, sont<br />

abandonnées par leurs frères (95, 56).<br />

Au mieux, on les cantonne dans les tâches<br />

domestiques les plus pénibles (73,<br />

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