rapport_annuel_2015
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Rapport sur l'homophobie <strong>2015</strong> • Sport<br />
La parole à…<br />
Maguy Nestoret-<br />
Ontanon<br />
Si le sport est souvent défini comme « porteur de<br />
valeurs humaines, éducatives ou citoyennes », il est<br />
également décrit comme étant le reflet ou le miroir<br />
de la société. Il y aurait donc fort à parier, si l’on s’en<br />
tient à cette dernière affirmation, que comme dans<br />
la société civile les mêmes phénomènes se produisent<br />
dans le sport. Or, le premier constat que j’ai pu<br />
faire en démarrant ma mission est que l’homophobie<br />
n’a pas sa place dans le sport. Info ? Intox ?<br />
La réponse spontanée qui me vient à ces deux<br />
interrogations est incontestablement le mot<br />
« tabou » : l’homophobie n’a pas sa place dans le<br />
sport car elle est un sujet tabou, un sujet dont on<br />
ne parle pas facilement, un sujet qui ne peut pas<br />
exister car contraire au sport « porteur de valeurs<br />
humaines, éducatives ou citoyennes ». Pourtant au<br />
fil des entretiens, au fil des rencontres, j’ai pu<br />
remarquer que cette discrimination, tout comme<br />
le racisme ou le sexisme, est bien présente dans le<br />
sport, sans forcément que les acteurs et actrices du<br />
sport ne s’en rendent d’ailleurs bien compte.<br />
Par les propos qu’il utilise, le sport est en effet par<br />
lui-même porteur d’homophobie ou de sexisme.<br />
Pourtant ces mots, ces expressions sont dits bien<br />
souvent sans arrière-pensée, sans connotation<br />
homophobe ou sexiste, et, dans l’idée de celui ou<br />
celle qui les prononce, ils n’ont pour vertu que de<br />
s’encourager, de montrer que l’on est plus fort-e<br />
que son adversaire. Mais ces paroles peuvent<br />
résonner de façon totalement différente dans la<br />
tête de celui ou celle qui les reçoit et peuvent amener<br />
à une véritable perte de confiance et d’estime<br />
de soi-même. Très loin finalement du sport<br />
« porteur de valeurs humaines, éducatives ou<br />
citoyennes ». C’est pour combattre ce fléau qu’est<br />
l’homophobie que, à l’occasion de la Journée de<br />
lutte contre l’homophobie et la transphobie,<br />
le 17 mai 2014, la ministre aux Droits des femmes,<br />
à la Ville, à la Jeunesse et aux Sports, Najat Vallaud-<br />
Belkacem, a souhaité renforcer la lutte contre<br />
l’homophobie dans le sport en créant un poste de<br />
cadre interfédéral visant entre autres missions à<br />
assurer le suivi de la charte contre l’homophobie.<br />
Dans le cadre de ma mission étendue depuis à<br />
l’ensemble des discriminations par le ministre des<br />
Sports, Patrick Kanner, et le secrétaire d’Etat aux<br />
Sports, Thierry Braillard, j’ai l’occasion de rencontrer<br />
les fédérations sportives, les acteurs et actrices<br />
du sport afin d’établir un état des lieux de ce qui<br />
existe au niveau fédéral en termes de lutte contre<br />
l’homophobie. Ce constat établi, il nous appartient<br />
au niveau du ministère des Sports de développer et<br />
de promouvoir des outils de sensibilisation, des<br />
formations à destination du mouvement sportif.<br />
Encourager de nouvelles initiatives, libérer la parole,<br />
travailler sur les stéréotypes pour que le sport<br />
puisse être un moteur pour lutter contre les discriminations<br />
et faire bouger les lignes sur ces importants<br />
enjeux sociétaux. Pour aider à lutter contre<br />
l’homophobie, nous travaillons aussi en lien avec<br />
SOS homophobie et la Fédération sportive gaie<br />
et lesbienne, notamment dans la diffusion des<br />
plaquettes « L’homophobie dans le sport ».<br />
Au-delà du peu de témoignages que j’ai pu<br />
recueillir – et je reviendrai sur ce point –, je souhaite<br />
en relayer deux qui m’ont été <strong>rapport</strong>és par<br />
Christelle Foucault, présidente de la Fédération<br />
sportive gaie et lesbienne. Ces deux témoignages<br />
révèlent pour l’un la violence de l’homophobie et<br />
pour l’autre la banalisation du traitement des<br />
propos homophobes. Fred, parachutiste en<br />
Nationale 2, 350 vols à son actif, a décidé d’arrêter<br />
son activité après la découverte de son homosexualité<br />
par ses coéquipiers et la réception de<br />
messages anonymes : « Fais attention à ton parachute<br />
», « Ne reviens pas sauter en parachute dans<br />
mon club sinon ton parachute ne s’ouvrira pas ».<br />
Edouard, ancien espoir au tennis de table, a quitté<br />
son club suite aux brimades incessantes de ses<br />
camarades et face à la sourde oreille de son entraîneur<br />
considérant que c’était « des paroles de<br />
gamins » et que ça passerait. Ces deux expériences<br />
prouvent, s’il en était encore besoin, que tous<br />
les sports, tous les niveaux sont concernés par<br />
l’homophobie et le harcèlement discriminatoire