La loi fait obligation au juge de limiter les mesures qu’il confie à des services, ce qui correspond à<strong>la</strong> quasi totalité de nos décisions. La plupart de celles-ci sont revues chaque année.Combien de temps un service sur mandat judiciaire doit-il intervenir ? Est-il normal que certainsdossiers judiciaires (de p<strong>la</strong>cement le plus souvent) durent 3, 5, 10 ans ? N’est-on pas dans autrechose que de l’aide aux familles (qui l’acceptent d’ailleurs parfois bien volontiers devenues"incapables" d’exercer leur rôle après un long désinvestissement et une perte d’ "habitudes").Pourquoi revoir les dossiers systématiquement à <strong>la</strong> fin de chaque échéance, re<strong>la</strong>nçant ainsi àchaque fois <strong>la</strong> question du maintien ou non de <strong>la</strong> mesure judiciaire ? Ne devrait-on pas plutôtassigner à cette mesure judiciaire des objectifs précis pour sa durée et considérer que <strong>la</strong> duréefixée, sauf exception, est celle "utile" ? Elle doit être circonscrite.C’est à dire porter sur un "mineur" pour "une" cause d’intervention ; doit-on encore aujourd’huiétablir des signalements pour des fratries entières au motif que les mêmes causes produiraient lesmêmes effets ? Elle ne doit strictement porter limitation que de certains droits des parents :Aux termes de l’article 375-7 du code civil : "les père et mère de l’enfant bénéficiant d’unemesure d’assistance éducative continuent à exercer tous les attributs de l’autorité parentale quine sont pas inconciliables avec cette mesure".Est-on sur cette question, malgré les indéniables avancées et <strong>la</strong> réflexion menée sur cesquestions, encore parfois bien rigoureux sur l’ensemble de ses droits que les parents conservent :droits de consentir à certains actes (mais lesquels ?), droit d’être informé, pour le moins, desactes courants ...La juridictionnalisation de <strong>la</strong> matière de l’assistance éducative (par le renforcement global ducontradictoire : accès aux dossiers, auditions systématiques des parties y compris avant unedécision d’investigations, des droits de <strong>la</strong> défense) nous conduit à être plus exigeant sur cesquestions au nom du respect des libertés individuelles.L’institution judiciaire doit d’abord s’imposer ces exigences pour effectivement s’articuler et nonpas se substituer (durablement et parfois sans plus trop de sens) à l’action naturelle d’aideapportée par le Département aux enfants et aux familles.Le Département dispose d’importants moyens pour remplir cette mission ; il suffit de se reporteraux dispositions du chapitre II du CASF et les articles L222-1 et suivants.Le chapitre III de ce code nous rappelle quelles sont les exigences qui s’imposent au service duConseil général pour associer le représentant légal aux aides apportées et aux actions menées.Pour mémoire, il suffit de se reporter aux dispositions des articles L223-1 et suivants. Quelquestermes issus de ces articles éc<strong>la</strong>irent ce propos : "information, accompagnement à l’entretien par<strong>la</strong> personne de son choix", établissement d’un document "projet de l’enfant" dont le contenu esttrès précis et là encore d’un haut niveau d’attentes (actions menées, objectifs, cohérence etcontinuité, co-signature parents/Président du Conseil général et transmission au juge en cas dep<strong>la</strong>cement judiciaire) ...L’article L223-1 du CASF et plus précisément le suivant, L223-2, ne font que décliner <strong>la</strong> questionde l’obtention de l’accord des parents aux mesures demandées ou proposées.Un examen des termes de l’article qui est le pivot de l’articu<strong>la</strong>tion, sa cheville, ou son axe :l’article L226-4 du CASF apparaît alors nécessaire :Il faut, de façon impérative, continuer l’exploration et <strong>la</strong> c<strong>la</strong>rification des critères de saisine par lePrésident du Conseil général de l’autorité judiciaire, en l’espèce le parquet.- Le 1 er de l’article reste re<strong>la</strong>tivement mystérieux dans son interprétation :"mineurs ayant déjà fait l’objet de mesures qui n’ont pas permis de remédier à <strong>la</strong> situation" : dequoi parle t-on ?Les services du Département disposent de l’ensemble des moyens propres (service des MDS,établissement éducatif, CDE) ou de services habilités ou agréés pour intervenir dans le champ de2 ème journée départementale de <strong>la</strong> protection de l’enfance – 9 juin 2011 47
<strong>la</strong> protection de l’enfance (établissements habilités) ; ils peuvent bien entendu faire appel àd’autres moyens médico-éducatifs (établissements spécialisés, service de pédopsychiatrie ...) pouraider des mineurs et leurs familles ;de quoi parle-t-on ? : d’une impossibilité des départements à développer les moyens de protectiond’assistance des mineurs dont ils ont <strong>la</strong> charge ?- Dans le même ordre d’idée je ne m’attarderai pas sur l’autre cas de saisine de l’autoritéjudiciaire : l’impossibilité d’évaluer <strong>la</strong> situation réelle de l’enfant.Ce dernier critère de l’intervention judiciaire est parfaitement compréhensible et pertinent : iln’aboutira pas nécessairement à une action de protection judiciaire in fine mais on comprend toutl’intérêt de demander à des services d’enquête dépendant directement de l’autorité judiciaire deprocéder à une vérification avec des moyens plus intrusifs afin de comprendre et d’évaluer.- En revanche, je pense qu’il est beaucoup plus utile de s’attarder aujourd’hui par quelquesquestions, mais surtout à l’avenir dans d’autres moments de travail, sur <strong>la</strong> première partie dudeuxièmement de cet article qui parle justement de ce fameux consentement à travers les notionsde refus d’accepter l’aide éducative ou l’impossibilité de col<strong>la</strong>borer.Ces cas d’ouverture de l’intervention judiciaire constituent des critères beaucoup plus complexes àcerner et méritent une réelle réflexion puisque se jouent là encore des questions de liberté dechoix d’éducation et plus <strong>la</strong>rgement de rapport entre le cadre social et <strong>la</strong> liberté d’action desindividus.Qu’est ce que le refus d’accepter l’intervention :- <strong>De</strong>s questions de temporalité se posent : à partir de quel moment y a t-il refus ? Après unerencontre ? <strong>De</strong>ux ou trois ? Un mois ? Sur <strong>la</strong> durée d’aide proposée ?- Sur quoi porte le refus ? Le diagnostic en tout ou partie ? Les moyens à mettre en oeuvre ?- Ces questions font-elles ou doivent-elles faire l’objet de "protocolisation" plus fine ?Qui refuse de consentir :Un parent, les deux, le beau parent ? Cette question n’est pas sans importance dans les famillesrecomposées où il n’est pas rare de ne pouvoir contacter utilement l’un des parents (pourtanttitu<strong>la</strong>ire de l’autorité parentale conjointe avec l’autre parent ...) ou au contraire l’un s’oppose parprincipe.Qu’est ce que l’impossibilité de col<strong>la</strong>borer avec le service ? L’absence des parents, d’un parent ?La ma<strong>la</strong>die mentale compromettant <strong>la</strong> validité du consentement va<strong>la</strong>ble et éc<strong>la</strong>iré ? D’un parentou des deux ?Pour conclure je n’ai pas, à ce stade, de réponse à ces questions sinon embryonnaires mais jecrois qu’elles sont à poser pour avancer dans ce qui sera une articu<strong>la</strong>tion plus satisfaisante del’intervention administrative et judiciaire.Ce travail sera rendu aussi plus complexe que le légis<strong>la</strong>teur (sage de ne pas donner trop derigidité à <strong>la</strong> définition de certains concepts qui demeurent à approfondir dans <strong>la</strong> confrontation denos débats) a aussi parfois maintenu des moyens qui permettent d’éviter cette fameuse (etcomplexe) articu<strong>la</strong>tion comme le sont <strong>la</strong> saisine directe du juge des enfants par les familles ellesmêmesou du Procureur en cas de "gravité" de <strong>la</strong> situation (article L226-4 CASF).2 ème journée départementale de <strong>la</strong> protection de l’enfance – 9 juin 2011 48