11.07.2015 Views

GEORGIA BECHLIVANOU MOREAU LE SENS JURIDIQUE DE LA ...

GEORGIA BECHLIVANOU MOREAU LE SENS JURIDIQUE DE LA ...

GEORGIA BECHLIVANOU MOREAU LE SENS JURIDIQUE DE LA ...

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Pour cela, il fallait donc revenir vers la théorie retributive corrigée par les exigences actuellesdes droits de l’homme. Aussi, fallait-il que la peine devienne un concept juridique à l'instar de celuide l'infraction telle que préconisée par Feuerbach : « Une infraction n'est pas un fait mais un conceptjuridique. L'essence d'une infraction n'est rien d'autre qu'une transgression d'un droit 130 ». La peine(sanction) ne devrait donc être que la privation d’un droit et la souffrance de la peine devrait selimiter à celle découlant de cette privation. Seule une telle conception de la peine serait susceptiblede poser des limites précises au pouvoir de punir et au pouvoir en général exercé lors de l’exécutionde la peine. De fait, cette limitation serait devenue une exigence juridique et non simplementhumaniste : « Pour que l'on ne puisse pas abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition deschoses, le pouvoir arrête le pouvoir » disait Montesquieu 131 . Dans nos sociétés hautementjudiciarisées et démocratiques, il n'y a que le droit qui puisse jouer ce rôle dialectique entre lepouvoir et l'individu 132 . C’est à cette condition que le droit pourrait entrer dans la prison pour jouerson véritable rôle et assurer en même temps la « fonction instauratrice du sujet par le droit 133 ». Unetelle conception de la peine avait été défendue, en Italie, dès 1840, par Gaetano Filangieri : « Lecrime est la violation d'un pacte, et la peine est la perte d'un droit 134 . »C’est la coïncidence entre le déclin de l’objectif du traitement des détenus 135 , la montée ducourant de la criminologie critique dénonçant la notion de « dangerosité » comme étant dangereuseelle-même (le but de traitement ayant comme finalité l'aliénation de l'homme par la recherche de sonconditionnement conformiste 136 ) et l’apparition du courant judiciaire, qui a contribué à cechangement. Ce dernier, inspiré par les droits de l'homme, est apparu à partir des années 1970 137 . Siles tenants du traitement ont pu voir dans les droits de l'homme non pas sa mise en cause maisl'assise même d'un droit des détenus au traitement 138 , les tenants du courant judiciaire y ont vu le<strong>GEORGIA</strong> <strong>BECHLIVANOU</strong> <strong>MOREAU</strong>130 Cité par John VERVAE<strong>LE</strong>, « Les grandes théories de la peine aux XVIII e et XIX e siècles », in « La peine »,Recueil de la société Jean BODIN pour l'Histoire comparative des institutions, Bruxelles, De BoeckUniversité, 1989, p. 19.131 MONTESQUIEU, De l'esprit des lois, Flammarion, 1979, p. 293.132 H. MIKA and J. THOMAS, “The dialectics of prisonner litigation : reformist idealism or Social praxis ?”,in Social Justice, vol. 15, n° 1, 1988, p. 63.133 D. SA<strong>LA</strong>S, « Etat et droit pénal », in Droits, 1992.15, PUF, p. 90.134 Oeuvres de Gaetano Filangieri, traduits de l’italien, Paris J.P. Aillaud, 1840, 3 vol. t. 3, pp. 6-7.135 Des recherches évaluatives, entreprises au cours de la décennie soixante-dix, sont arrivées à la fameuseconclusion de nothing works, (John Eryl Hall) WILLIAMS, « Le changement de concept de la prison », in Lacriminologie ; bilan et perspectives, Mélanges offerts à Jean PINATEL, Paris, Pedone, 1980, p. 162 ; Lesobjectifs de la sanction pénale, (dir. A. Tsitsoura), préc., 1989, pp. 23-28.136 J.-H SYR, Punir et réhabiliter, préc., p. 53.137 Notamment en Scandinavie, en Angleterre, aux USA et au Canada, (Hall John Eryl WILLIAMS, Lechangement de concept de la prison, préc., p. 162, 169.138 J.-H SYR, Punir et réhabiliter, préc., p. 105. L'auteur fait référence à <strong>LA</strong>NREVIL<strong>LE</strong> P., « Les détenus etles droits de l'homme », Criminologie, 1976, vol. IX, p. 107 ; à PALMER J.W, Constitutionnal rights ofprisonners, Cincinnati, Anderson, 2e d. 1980, p. 81 ; et à A. REYNAUD., Les droits de l'homme dans laprison, Conseil de l'Europe, 1986. Voir aussi J. VERIN, « La recherche conduirait-elle à abandonner lapolitique criminelle de réinsertion sociale ? », in Mélanges offerts à Jean PINATEL, préc., pp. 61-72.<strong>LE</strong> <strong>SENS</strong> <strong>JURIDIQUE</strong><strong>DE</strong> <strong>LA</strong> PEINE PRIVATIVE <strong>DE</strong> LIBERTE...Université Paris I - Panthéon Sorbonne 200821

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!