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Mauvaises intentions #3 [80p. A4] - PDF (10.7 Mo) - Infokiosques.net

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contribution... 25disant « mouvance » (type « anarcho-autonome ») ; carces entités renforcent les séparations. Au contraire, si noussommes solidaires, c’est parce que des pratiques, des actesde révolte, qui appartiennent aux luttes, au mouvement social,sont attaqués. Le but étant de les rendre inoffensifs enles enfermant dans le cadre institutionnel.An t i t e r r o r i s m eCertains n’ont pas manqué de critiquer l’usage de l’outilantiterroriste, en raison de la disproportion entre le moyenutilisé et la nature des infractions poursuivies en avançant,par exemple, pour « l’affaire Tarnac », qu’il s’agissait de simplessabotages et non d’attentats. D’autres ont remis en causel’existence même de cette législation qui serait contraireaux principes du droit démocratique. Des personnes, enfin,voient dans l’antiterrorisme et dans l’état d’exception devenupermanent un véritable « mode de gouvernement ».Toutes ces critiques ont en commun de présenter cette juridictioncomme un extraterrestre, une exception dans ledroit. Pourtant, l’antiterrorisme se distingue moins qu’iln’y paraît des autres procédures juridiques. 1Dans les cas de l’association de malfaiteurs, du trafic destupéfiants, des bandes organisées… les gardes à vue peuventaussi durer 4 jours 2 , la préventive est difficile à éviteret souvent longue, les peines encourues sont alourdies.Ces pratiques de répression, présentées comme des juridictionsd’exception, sont en réalité couramment utilisées.Par ailleurs, d’autres catégories construites par l’État subissentelles aussi une répression féroce. Par exemple, lessans-papiers peuvent subir un contrôle d’identité de 32jours en centre de rétention. Ils peuvent aller en prisonpour avoir refusé d’embarquer, puis retourner au centre derétention avant d’être expulsés. Et dans les faits, la juridictionantiterroriste n’entraîne pas forcément une répressionplus importante que les juridictions communes. Même enantiterrorisme, les gardes à vue peuvent durer moins de6 jours, il arrive que des personnes sortent de préventiveavant leur procès, et, si les peines encourues sont souventtrès élevées, cela ne veut pas dire que les juges vont les appliquertelles quelles.Les procédures antiterroristes construisent des accusationssur la base d’<strong>intentions</strong> supposées, qu’elles soient ounon suivies d’actes. Précisons qu’en antiterrorisme commedans tout le droit pénal, les <strong>intentions</strong> doivent toujours êtreétayées par des éléments matériels. Plus l’intention est pré-1 Nous reprenons ici une grande partie des analyses du texte de Léon de Mattis, «L’antiterrorisme n’est pas une exception », janvier 2009, disponible surhttp://www.leondemattis.<strong>net</strong>.2 Juridiquement, en antiterrorisme, les gardes à vue peuvent durer jusque 6 jours.Mais, la plupart du temps, elles durent 4 jours ou moins.pondérante dans l’accusation, plus des éléments matérielsanodins pourront être utilisés à charge. Ces derniers, prisisolément, ne constituent pas nécessairement des infractions.Ce peut être la possession d’un pic à glace, un coupde fil passé à telle personne, avoir de l’argent en liquide…Mais accuser une personne de se préparer à commettre telou tel délit avant même sa réalisation est une pratique courantedans tout le droit pénal. Ainsi une personne peut êtreinculpée de complicité dans la préparation d’un meurtrequi n’a jamais eu lieu. Les <strong>intentions</strong> sont toujours prisesen compte dans les condamnations : homicide volontaireou involontaire, intention, ou pas, de voler, dégradationsvolontaires…La spécificité de l’antiterrorisme tient dans le fait que lepouvoir attribue aux personnes accusées des <strong>intentions</strong> àcaractère politique. Il s’agit, en France, d’avoir « pour butde troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou laterreur ». En Europe, c’est, entre autres, « gravement déstabiliserou détruire les structures fondamentales politiques,constitutionnelles, économiques ou sociales d’un pays ou d’uneorganisation internationale ». Un même acte peut donc releversoit du droit ordinaire, soit du terrorisme. 3 Cette distinctionrepose seulement sur le type d’intention attribuéeaux personnes inculpées : une infraction peut devenir unacte terroriste si les juges estiment que ses motivationssont politiques, au sens où elles s’attaquent à l’État dansses fondements. 4À trop souligner les particularités de l’antiterrorisme, onrisque, même sans le vouloir, d’enfermer les quelques centainesde personnes qui subissent cette répression dans uncercle restreint. De renforcer une catégorie dont le pouvoirsouhaite l’existence : celle des « terroristes ». Or cette étiquette,comme bien d’autres, sert à isoler, à faire en sorteque la répression antiterroriste soit perçue comme quelquechose de très spécifique, ce qui empêche d’élargir lasolidarité à d’autres situations de répression.Dans les imaginaires, le « terroriste », c’est l’homme sansvisage toujours prêt à poser une bombe à clous au milieude la foule. En réalité, les procédures antiterroristes correspondentà de multiples situations différentes, qui parfoisn’ont d’ailleurs pas grand-chose à voir entre elles et sontdissemblables en leur sein même : des activités séparatistesbasques ou corses, des actions contre les radars, des activitésattribuées à ce que l’État résume sous les appellations« islamiste » ou « anarcho-autonome »… Evidemment,personne ne s’appelle de lui-même « terroriste ». Ce sont3 En Espagne, la loi dit que « tout travail en faveur de l’indépendance d’une partie duterritoire, même non violente » est traité comme un acte terroriste.4 Une spécificité propre à l’antiterrorisme concerne la composition des coursd’assises. Ce sont uniquement des magistrats professionnels, dont il est plus aiséd’anticiper le verdict, et non un jury populaire, qui composent les cours d’assises enmatière antiterroriste.

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