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Mauvaises intentions #3 [80p. A4] - PDF (10.7 Mo) - Infokiosques.net

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46contrôle judiciaireDes nouvelles depuis notre chez nous carcéraldécembre 2009 – Damien & Greg, Avignon – non-fides.frDeux ans et demi et certainementencore tout autant devant nous, avantde remettre les compteurs de notreredevabilité à zéro, d’en finir avecune compression de nos vies auxtonalités parfois sourdes et d’autresfois assourdissantes. Depuis les 20et 29 octobre, c’est dans une phaseassourdissante qu’elle est entrée. Noslieux de vie sont devenus nos cellules.Des cellules où les murs ne sont pasde béton, mais d’ondes magnétiques,où les barreaux sont invisibles,impalpables, mais bien présents. Oùle rôle du maton nous est imparti.À nous de nous escorter dans notrecellule aux heures fixées, de veiller àne pas enfreindre le règlement. À nosproches, également de partager lesconséquences de cette situation, d’ensubir les contraintes, de nous rappelerl’heure lorsque des fois / souvent,on a tendance à l’oublier. Une sorted’autogestion de notre enfermement.Nous venons donc d’écoper d’un Placementsous Surveillance électronique(PSE). Un bracelet électroniquecomme aménagement de notre peinede prison ferme. Une laisse virtuelleattachée à notre cheville, pour parleren termes clairs.« Il faut bien savoir que c’est pourvous éviter la prison que nous faisonstout ça. »Remarque lancée en guise de mise engarde par le maton venu installer lebracelet.Effectivement, le bracelet électroniquedevrait nous permettre de ne pasremettre les pieds en taule, son isolementet sa désocialisation radicale.De plus nous ne sommes pas seuls,nous sommes entourés, épaulés. Noussommes chez nous tous les soirs, prèsde nos amis, de nos proches. Si infimesoit-elle, nous gardons également unecertaine emprise sur nos vies, par lebiais de petites marges sur nos horairesde sorties, par le fait d’avoir toutde même suffisamment d’espace à nosdomiciles pour ne pas trop étouffer.En étant « dehors », hors des mursbien réels et physiques d’une taule, ilnous semblait aussi bien plus simplede pouvoir continuer à prendre partaux luttes, de conserver une part neserait-ce que minime de notre capacitéd’agir, de nuire.Nous avons été placé devant unchoix. Notre peine (pas plus d’un an)nous permettait d’obtenir un PSEplutôt qu’une incarcération. Et pourtoutes les raisons citées ci-dessus,c’est ce que nous avons choisi. Peud’autres possibilités s’offraient à noussi nous avions refusé le PSE. Nousn’en voyions que deux, l’incarcérationou la cavale. Cette dernière nousl’avons écartée, les conséquencesnous paraissaient bien trop lourdesen comparaison de la peine à purger.Nous avons fait le choix du PSE, maisen aucun cas nous n’en faisons uneévidence.Beaucoup trop de paramètres entrenten compte dans une telle décision.Pour des personnes isolées, atomisées,sans le moindre soutien, et cloitréesdans des clapiers à peine plusgrands que les 9 m2 cellulaires, cettedécision paraît peut être beaucoupmoins évidente.Mais plus largement, quel est cechoix ? Est-ce réellement un choix ?S’il paraît difficile de nier que le PSEpermet, dans certains cas, des conditionsun peu plus supportables quedurant une incarcération, il n’empêcheque ces deux mesures restent,de manière certes différente, desformes d’enferment, d’isolement etde contrôle, et conservent les mêmesobjectifs pour la justice et l’Etat.A travers elles, ils exercent leur besoinvindicatif, affirment leur autorité,soumettent les récalcitrants pardes mesures punitives, poussent versune réinsertion sociale en plaçantl’accès au salariat comme conditionde libération. Mais ils restreignentégalement des pratiques de lutte et desurvie aux strictes cadres de la légalité(et de la démocratie). Par la peur ilstentent de dissuader de toutes <strong>intentions</strong>offensives.Pour vous éviter la prison... nousvous proposons : la prison.En remplaçant un enferment par unenferment, un isolement par un isolement,une désocialisation par unedésocialisation, une perte d’autonomiepar une perte d’autonomie, onvoudrait nous voir nous réjouir et, desurcroît, ostensiblement. On voudraitnon seulement nous faire accepter,mais aussi apprécier, l’inacceptableen l’opposant à des situations toujourspires [1] .Dans la même logique, oui, le placementsous surveillance électroniquepermet plus de marges de manœuvrequ’une incarcération. Mais bien hypocritessont ceux qui maintiennentque c’est réellement un choix et leplacent au rang de progrès social. Onne choisit pas entre l’incarcératio<strong>net</strong> l’enfermement à domicile, on sedébat seulement face aux exactionsdu pouvoir. Et dans ce contorsionnementtout le monde ne réagit pasde la même manière. Chacun, enfonction d’une multitude d’élémentset de ses capacités à faire face, s’engagedans la voie qui le fera le moinssouffrir et/ou lui offrira le plus demarges de manœuvre.En acceptant le bracelet nous n’acceptionspas le discours qui fait delui une avancée, l’humanisation d’un

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