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L'Essentiel Prépas #16 _ Avril 2018

L'Essentiel Prépas, magazine dédié aux professeurs des classes préparatoires économiques et commerciales. Magazine numérique édité par HEADway Advisory.

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DÉBAT<br />

Comment bâtir<br />

des « universités<br />

européennes »?<br />

Il y a trente ans l’ensemble des ministres de l’Education et de l’Enseignement<br />

supérieur européens lançaient ce qu’on va appeler le Processus de Bologne.<br />

En septembre 2017 Emmanuel Macron allait plus loin en évoquant la création<br />

d’universités européennes à La Sorbonne. Mais comment procéder ?<br />

→ Le processus de<br />

Bologne a été initié<br />

en 1998 par la France,<br />

l’Allemagne, l’Italie<br />

et le Royaume-Uni<br />

avec pour objectif la<br />

mise en place d’un<br />

espace européen<br />

de l’enseignement<br />

supérieur. Aujourd’hui<br />

48 pays participent<br />

au projet autour de 3<br />

grands principes :<br />

• organiser des études<br />

en 3 cycles (Licence –<br />

Master – Doctorat) ;<br />

• développer des outils<br />

de la reconnaissance<br />

académique et<br />

professionnelle,<br />

notamment avec un<br />

système européen<br />

de transfert et<br />

d’accumulation de<br />

crédits (ECTS) ;<br />

• mettre en place une<br />

démarche qualité.<br />

Relire le rapport de<br />

Bernard Ramanantsoa :<br />

L’enseignement<br />

supérieur français<br />

Par-delà les frontières :<br />

L’urgence d’une<br />

stratégie et la dernière<br />

note de Campus<br />

France sur La mobilité<br />

internationale des<br />

étudiants européens<br />

L<br />

’idée d’« université européenne » a vite provoqué l’enthousiasme<br />

dans les universités françaises. Mais quel est le<br />

modèle ? Élitiste avec pas plus de trois ou quatre grands réseaux<br />

européens, un peu sur le modèle de l’University of California ? Ou<br />

ouvert à tous ? « On n’imagine pas de réseaux comportant plus<br />

de six universités, sinon cela sera difficile à gérer. Faut-il des<br />

réseaux thématiques ? Des réseaux entre des universités déjà<br />

très présentes à l’international ? Il nous faut aussi des réseaux<br />

plus larges y compris dans des pays comme la Pologne ou la<br />

Roumanie qui sont aujourd'hui moins visibles à l’international »,<br />

résume le président de la Conférence des présidents d'université,<br />

Gilles Roussel lors de son colloque annuel.<br />

Au niveau européen deux groupes de travail ont été créés par<br />

la Commission européenne et sa direction Éducation et culture.<br />

« Nous en parlons également avec la direction Recherche pour<br />

nous mettre d’accord sur le concept comme le nom de ces<br />

futures universités », établit Francesca Maltauro, responsable<br />

du projet au sein de la Commission « venue écouter les idées<br />

des universités françaises » lors du colloque de la CPU. Car rien<br />

n’est vraiment clair. « "Mal nommer les choses c’est ajouter au<br />

malheur du monde" disait Camus », s’exclame le tout nouveau<br />

président du CNRS, Albert Petit, inquiet que « l’Europe nous<br />

conçoive une de ces "usines à gaz" dont elle a le secret avec trop<br />

de contraintes qui empêche leur développement ». « C’est vraiment<br />

la notion de circulation de l’information et de la recherche<br />

propre à faire de l’Europe un espace naturel pour les étudiants<br />

qui conduit notre réflexion avec l’Union européenne », lui répond<br />

la ministre de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de<br />

l’Innovation, Frédérique Vidal. Les étudiants devront pouvoir<br />

démarrer leur cursus dans à un endroit, le poursuivre dans<br />

un autre sans demander d’équivalence pour obtenir non pas<br />

quatre ou cinq diplômes mais un diplôme européen. Le tout sans<br />

« modèle unique », insiste la ministre qui n’en définit pas moins<br />

qu’il y aura un « modèle pour toute l’Europe avec une certaine<br />

autonomie ».<br />

: Deux modèles existants<br />

Si les accords entre universités et Grande Écoles européennes<br />

sont multiples deux exemples permettent mieux d’imaginer<br />

comment on peut aller plus loin. Avec Eucor-Le campus européen,<br />

l’université de Strasbourg fait partie d’un consortium<br />

d’universités françaises, allemandes et suisses (Bâle, Freiburg,<br />

Haute-Alsace, Karlsruhe Institut für Technologie et Strasbourg).<br />

Est-ce là le modèle de l’université européenne ? « Plusieurs<br />

modèles sont possibles. Le nôtre est celui d’une université<br />

transfrontalière dans le cadre d’une structure juridique qui a sa<br />

personnalité propre et nous permet de construire une plateforme<br />

commune. Nous ne pouvons pas aller jusqu’à une fusion mais<br />

nous pouvons proposer des parcours intégrés, des diplômes<br />

binationaux ou ouvrir des laboratoires communs », explique le<br />

président de l’université, Michel Deneken.<br />

Le modèle est différent du côté d’ESCP Europe comme l’explique<br />

son directeur, Frank Bournois : « Nous sommes le rêve<br />

d’Emmanuel Macron réalisé depuis plus de 40 ans avec la création<br />

de l’EAP en 1973. Il n’y a qu’à ESCP Europe que tous les<br />

étudiants ne peuvent être diplômés qu’à condition d’avoir réalisé<br />

un parcours européen. Nous nous investissons depuis longtemps<br />

dans la fabrication d’un modèle unique de formation européen<br />

et sommes prêts à accompagner le mouvement voulu par le<br />

Président ». On ne peut pas être diplômé d’ESCP Europe en ayant<br />

seulement étudié à Berlin ou Paris et son bachelor s’effectue<br />

dans trois pays et trois langues. Surtout ESCP Europe est reconnue<br />

et accréditée dans chaque pays par les organismes locaux.<br />

Son Master in Management (diplôme Grande École) permet d’obtenir<br />

jusqu’à quatre grades masters simultanément délivrés dans<br />

quatre pays différents.<br />

: Des étudiants encore trop<br />

« franco-français »<br />

D’ici à 2020 les universités françaises voudraient faire passer<br />

le taux de leurs étudiants qui partent au moins deux mois à<br />

l’étranger – en études ou en stage – de 15 à 20 %. Et pour cela<br />

il faudra d’abord convaincre leurs professeurs… « Comment<br />

conjuguer mobilité et recrutement en master quand les étudiants<br />

en licence sont inquiets de leur niveau réel ou de l’opinion de<br />

leurs professeurs quant à leur niveau réel après un séjour à l’international<br />

», s’interroge David Alis, le président de l’Université<br />

Rennes 1. L’étude menée fin 2016 par Campus France indique<br />

que cette réticence de leurs professeurs à les laisser s’expatrier<br />

est le principal facteur qui explique la réticence des étudiants<br />

français devant même le coût de cette expatriation. « C’est notre<br />

principal combat que de lutter contre les enseignants qui ne<br />

veulent pas voir leurs étudiants partir », confirme Pierre Paul-Zallio,<br />

le directeur de l’ENS Paris-Saclay.<br />

Un problème qui remonte à loin : la plupart des équipes universitaires<br />

n’intègrent absolument pas cette dimension internationale<br />

dans leur projet. Si c’est compréhensible en droit – spécialité<br />

très ancrée nationalement – cela ne l’est pas dans la plupart des<br />

autres disciplines. « Nous comptabilisons 1 300 programmes en<br />

anglais en France contre 1 700 en Allemagne et 2 000 aux Pays-<br />

Bas », remarque la directrice de Campus France, Béatrice Khaiat,<br />

qui milite pour une « mobilité étudiante obligatoire ». n<br />

Olivier Rollot<br />

L’ESSENTIEL DU SUP | PRÉPAS 22 AVRIL <strong>2018</strong> | N°16

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