Point de mire Quand l’ennui au travail rend malade Le manque de stimulation et de défis au travail peut être tout aussi problématique que le surmenage. Les conséquences physiques et psychologiques du syndrome de bore-out sont similaires à celles du burn-out. Andi Zemp, psychologue spécialiste en psychothérapie FSP, expert en stress et burn-out Image: © Adobe
Point de mire Le syndrome d’épuisement par l’ennui désigne un état qui peut survenir à la suite d’une sousutilisation manifeste des compétences professionnelles. Le terme «boreout» a été créé par les auteurs suisses Peter Werder et Philippe Rothlin, et décrit pour la première fois en 2007 dans leur ouvrage Diagnose Boreout – Warum Unterforderung im Job krank macht. Les facteurs décisifs d’un bore-out sont non seulement l’ennui, la sous-exploitation et le désintérêt pour sa propre activité, mais aussi le fait que les personnes concernées mettent tout en œuvre pour dissimuler leur sous-emploi. Elles adoptent donc des stratégies comportementales qui les font paraître occupées: elles arrivent tôt, partent tard, se pressent dans les couloirs ou se plaignent à leurs collègues d’être surchargées de travail. Comme le burn-out, le bore-out est un syndrome qui n’a pas encore été défini et délimité de manière satisfaisante. Aujourd’hui encore, le terme «bore-out» est donc davantage traité dans les médias plutôt que sous l’angle d’un tableau clinique. Symptômes Sur le plan symptomatique, le syndrome de bore-out ressemble à celui du burn-out. Les personnes concernées souffrent d’un manque d’entrain, de difficultés à s’endormir et d’insomnies, de troubles digestifs, de maux de tête, de vertiges, d’une prédisposition aux infections, d’acouphènes, d’une baisse de moral, de dépression ou d’anxiété. Elles s’isolent de plus en plus et ont le sentiment de passer à côté de leur vie. Ce sentiment désagréable augmente à son tour la charge de stress et donc les symptômes. Dans son ouvrage de 2013 intitulé Boreout – Biografien der Unterforderung und Langeweile, la sociologue viennoise Elisabeth Prammer décrit le phénomène selon lequel, lorsque les symptômes du bore-out apparaissent, les personnes concernées se soumettent à une stratégie comportementale qui les entraîne dans une spirale négative: craignant que leur engagement ne les lie à ce travail décevant, elles se mettent en retrait et ne font que le nécessaire. Certaines restent à leur place de travail, mais ont intérieurement démissionné, elles n’osent pas formellement démissionner de peur de ne pas trouver de nouvel emploi. L’état mental de la personne affectée se détériore visiblement et sa performance au travail reste modeste. Causes Le travail que nous faisons est une partie importante de notre définition de nousmêmes, voire de notre identité personnelle. Lorsque nous rencontrons de nouvelles personnes, la question sur la profession est très souvent posée. La perte involontaire d’un emploi s’accompagne généralement d’une crise personnelle profonde. En outre, la performance est fortement valorisée, tant sur le plan professionnel que privé, tandis que l’oisiveté et la contemplation ont des connotations clairement négatives. Alors que le stress et le surmenage sont souvent et volontiers communiqués et entraînent généralement une augmentation de la reconnaissance sociale, la sous-exploitation communiquée a tendance à irriter l’interlocuteur et engendrer une forme de scepticisme. La plupart des gens ayant généralement besoin d’être reconnus comme un membre important de la société, ils évitent donc de communiquer leur propre sous-charge. Comme dans le cas du burn-out, le boreout est souvent dû à une inadéquation entre une personne et son travail. Thérapie Le bore-out est généralement diagnostiqué tardivement. Souvent, c’est le psychothérapeute qui découvre que le burn-out cache en fait un bore-out. En plus de séances de psychothérapie et de thérapies corporelles, un traitement médicamenteux de soutien peut parfois être utile. Les méthodes de coaching sont privilégiées pour soutenir les personnes concernées par un changement d’emploi. En définitive, un plan de traitement individuel doit être élaboré pour toutes les personnes concernées. Contact: www.andizemp.ch Le manque permanent de défis et l’ennui au travail sont accablants et peuvent aboutir à une spirale descendante. 31