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DOSSIER
Texte Selin Varli et Lara Diserens
Illustration Anaïs Balmon
Big Brother Data : vie privée sur écoute
La libre exploitation des données par les GAFA reste parfois méconnue des utilisateur· trice·s.
Pas de panique : on vous éclaire sur les législations actuelles. Et pour en avoir le cœur net, on a
même tenté une petite expérience.
Autrefois, les murs avaient des oreilles…
aujourd’hui, les appareils connectés
ont pris le relai. Il y a plus de septante ans,
George Orwell prédit la surveillance numérique
des individu·e·s dans son œuvre
1984. Aux dernières nouvelles, c’est GAFA
(Google, Apple, Facebook et Amazon) qui
s’en régalerait le mieux…
Qu’est-ce que le Big Data ?
Gartner, site Internet de recherche technologique,
définit le « Big Data » comme
un volume important de données digitales
produites par l’activité humaine. Effectivement,
l’activité en ligne des individu·e·s
est continuellement épiée et leurs données
personnelles sont récoltées pour former le
« Big Data ». La pratique du « Big Data » est
au cœur du discours public : à quoi et à qui
bénéficie-t-elle réellement ?
Selon Laura Illia, Professeure à l’Université
de Fribourg, les données peuvent servir
différents acteur·trice·s et objectifs : « Le
Big Data contribue de manière considérable
à la recherche, notamment dans le
domaine de la santé. » Elle souligne aussi
que les entreprises sont sujettes à des réglementations
dans la récolte et le traitement des
données : « Nous avons le choix de donner
accès à nos informations privées. Il suffit
de rester informé·es et attentif·ve·s à ce
que nous acceptons de signer », préconise-t-elle.
Attention ! Votre smartphone a peut-être des oreilles...
Jusqu’où va l’intrusion?
Néanmoins, les dérives persistent. John
Podesta, homme politique américain, affirme
: « Les gens laissent derrière eux tellement
de données, sans même le savoir,
que les détenteur·trice·s de ces données
les connaissent mieux qu’eux-mêmes ne se
connaissent. »
« Le scandale Target » illustre parfaitement
ce propos : un père de famille s’indigne que
Target envoie à sa fille, âgée de 16 ans, de la
publicité destinée aux jeunes parents, avant
d’apprendre que cette dernière est enceinte.
Target le savait avant le père, grâce aux
données en ligne récoltées. Certaines théories
avancent même que l’intrusion dans
la vie privée va plus loin encore. Les appareils
connectés permettraient une écoute
permanente des individu·e·s, afin, entre
autres, de mieux servir les campagnes marketing.
Nous avons donc décidé de mener
l’enquête, expérience à l’appui.
Les femmes qui murmuraient à
l’oreille des smartphones
Les smartphones écouteraient constamment
nos conversations à des fins commerciales
? Mettons donc ces assomptions
à l’épreuve. Nous optons pour des
thématiques populaires : la grippe, la mode,
l’amour. Deux appels orientés et quelques
murmures ciblés à notre cher et tendre feront
l’affaire. Ça parle thé au miel, rupture et
plus rien à se mettre. L’appareil ne tarde pas
à mordre à l’hameçon : les publicités pour
médicaments envahissent nos fenêtres,
suivies par une variété infinie de sneakers
dans nos Feed Insta. Réponse à un discours
d’acheteur·euse·s compulsif·ve·s ou victimes
de nos recherches personnelles d’antan
?
Pour Kilian Ulrich, IT Support Specialist
Manufacturing en pharmaceutique, seule la
deuxième option est correcte. Il lève le voile
sur les iPhones accusés d’intrusifs : selon
lui, les vrais responsables sont ailleurs. À cet
égard, Kilian Ulrich invoque la responsabilité
individuelle : « Même si le micro est
allumé, il n’enregistre pas systématiquement.
Apple gagne de l’argent en vendant
des téléphones, pas en faisant de la publicité.
Le Business Model de Google est différent
: tout est enregistré afin de déterminer
au mieux les préférences. C’est grâce à ce
ciblage que Facebook est gratuit. » Reste à
savoir si les merveilles de l’intelligence artificielle
valent la peine de renoncer à l’intégrité
de sa sphère privée.
Qu’en est-il de la protection des
données ?
Un nouveau règlement européen sur la
protection des données (RGPD) est en vigueur
depuis mai 2018 dans toute l’Union
européenne. Parmi les différentes directives
se trouve la suivante : « Nécessité d’informer
et d’obtenir le consentement de la personne
dont les données sont traitées. » En cas de
violation du règlement, les entreprises
sont passibles d’une amende qui peut aller
jusqu’à 4% du chiffre d’affaire annuel mondial
du précédent exercice. Encore faut-il
qu’elle soient prises sur le fait ! ■
Livre à conseiller :
1984 par Georges Orwell
Site Internet Gartner :
https://www.gartner.com/en
03.2020 spectrum
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