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Bernard Boller, Gottschalk d'Orbais de Fulda à Hautvillers

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<strong>Bernard</strong> <strong>Boller</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> d’orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

Préface <strong>de</strong> Michel Wieviorka<br />

Postface <strong>de</strong><br />

Patrick lopez, Maire d’<strong>Hautvillers</strong> et<br />

Pierre-Yves Jar<strong>de</strong>l, Maire d’orbais-l’abbaye<br />

logo editeur


A mes petits enfants<br />

Amaury, Alexia et Adrien<br />

Capella ad Montem odonis<br />

anno MMIV


emerciements<br />

a eva Vojnovic, diplômée <strong>de</strong> la faculté<br />

<strong>de</strong> lettres <strong>de</strong> Zagreb, professeur <strong>de</strong> langue<br />

et littérature française, pour la traduction<br />

<strong>de</strong> : Saksonac <strong>Gottschalk</strong> na dvoru kneza<br />

Trpimira par l. Katic.<br />

a Claire Sarazin–Staats, pour son apport<br />

dans la traduction <strong>de</strong> : <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>r Sachse<br />

par K. Vielhaber.<br />

a Cédric Giraud, archiviste-paléographe,<br />

agrégé <strong>de</strong> l’université, pour la traduction<br />

<strong>de</strong> textes inédits <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.


« Toutes les aventures spirituelles<br />

sont un calvaire ».<br />

Georges BernanoS


Préface<br />

Grâce au travail patient, érudit et sensible, <strong>de</strong><br />

<strong>Bernard</strong> <strong>Boller</strong>, voici donc qu’un personnage hors<br />

du commun sort <strong>de</strong> l’ombre, <strong>Gottschalk</strong>, ce moine<br />

entré en dissi<strong>de</strong>nce au moment où se défaisait<br />

l’empire créé par Charlemagne.<br />

En cette pério<strong>de</strong> d’expansion du christianisme, <strong>Gottschalk</strong><br />

apparaît d’abord comme un homme d’Eglise, un moine bien<br />

formé, <strong>à</strong> la capacité créatrice impressionnante. C’est un lettré,<br />

qui laissera <strong>de</strong> nombreux écrits, un grammairien, un philologue,<br />

un philosophe ; un homme, aussi, dont le sens <strong>de</strong> la<br />

mélodie donne <strong>à</strong> penser, comme écrit <strong>Bernard</strong> <strong>Boller</strong>, qu’il est<br />

« aussi talentueux en musique qu’en poésie ». C’est aussi un<br />

voyageur, qui circule dans le vaste espace qu’est l’Europe, et<br />

y laisse ça et l<strong>à</strong> quelques traces <strong>de</strong> son passage. Enfin, c’est<br />

encore, et surtout, un théologien que ses prises <strong>de</strong> position<br />

transformeront en banni.<br />

Et ici, tout bascule dans l’intérêt que nous pouvons porter <strong>à</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>. Car <strong>à</strong> une époque où le pouvoir religieux et le pouvoir<br />

laïc s’entremêlent, promouvoir comme il le fait un point<br />

<strong>de</strong> vue qui met en cause <strong>de</strong>s idées plus ou moins établies, c’est<br />

s’exposer <strong>à</strong> <strong>de</strong>s réactions d’une gran<strong>de</strong> violence <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s<br />

autorités constituées. <strong>Gottschalk</strong>, tôt délié <strong>de</strong> ses vœux, est vite<br />

un exclu, un marginal, dont la trajectoire se conclut, <strong>à</strong> l’issue<br />

<strong>de</strong>s assemblées qui le jugent en 848 <strong>à</strong> Mayence, et surtout en<br />

849 <strong>à</strong> Quierzy, non seulement par la dégradation, mais aussi<br />

par une lour<strong>de</strong> peine <strong>de</strong> prison, par le fouet et par le silence<br />

perpétuel qu’apporte la mutilation <strong>de</strong> sa langue. Il s’inscrit<br />

ainsi dans une longue tradition, qui inclut les violences <strong>de</strong><br />

l’Inquisition ou celles <strong>de</strong>s régimes totalitaires.<br />

Son crime ? Avoir développé une doctrine <strong>de</strong> la double pré<strong>de</strong>stination,<br />

qui veut que Dieu ait fait ses choix et décidé <strong>de</strong><br />

sauver certains hommes par sa grâce : il y a les élus, et les


éprouvés, les uns pré<strong>de</strong>stinés au salut et les autres <strong>à</strong> la damnation.<br />

Doctrine qu’on peut lire aujourd’hui, <strong>de</strong> façon certes<br />

anachronique, et en sociologue, <strong>à</strong> la lumière <strong>de</strong> ses <strong>de</strong>ux<br />

dimensions principales. D’une part, elle décrit <strong>de</strong>ux groupes<br />

distincts, et rend donc compte d’un principe <strong>de</strong> division<br />

social, même s’il est pensé comme propre <strong>à</strong> l’au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong>. Et<br />

d’autre part, elle affirme que le <strong>de</strong>stin post-mortem <strong>de</strong> l’individu<br />

est tracé en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lui, ce qui rend finalement vain ou<br />

inutile tout effort ici bas. En termes sociologiques, cette doctrine<br />

revient presque <strong>à</strong> dénier toute chance ou toute place<br />

pour le sujet personnel, et <strong>à</strong> reconnaître l’existence d’une<br />

inégalité structurelle entre classes sociales.<br />

<strong>Gottschalk</strong> est un homme <strong>de</strong> convictions et s’il touche le lecteur<br />

<strong>de</strong> <strong>Bernard</strong> <strong>Boller</strong>, c’est aussi parce qu’il n’accepte aucune<br />

compromission, aucun compromis. Il résiste aux appareils,<br />

aux pouvoirs en place, qui non seulement le condamnent<br />

comme personne, mais le forcent <strong>à</strong> jeter ses écrits au feu : il<br />

ne se plie pas <strong>de</strong>vant leurs efforts pour contrôler jusqu’<strong>à</strong> sa<br />

conscience et sa vie <strong>de</strong> l’esprit. Il ne cè<strong>de</strong> ni recule <strong>à</strong> aucun<br />

moment. Il incarne, l’auteur <strong>de</strong> cet ouvrage l’a bien vu, la<br />

figure <strong>de</strong> la dissi<strong>de</strong>nce qui correspond <strong>à</strong> son temps, celle <strong>de</strong><br />

l’hérétique résolu, entêté, qui ne peut être finalement qu’exclu,<br />

isolé et violenté dans son intégrité physique <strong>à</strong> défaut <strong>de</strong><br />

pouvoir être atteint dans son être moral et intellectuel.<br />

Plus tard, <strong>Gottschalk</strong> intéressera les calvinistes, mais aussi<br />

les jansénistes, et quelques érudits, et son oubli n’a jamais été<br />

absolu. Mais il faut remercier <strong>Bernard</strong> <strong>Boller</strong> d’en donner <strong>à</strong><br />

voir toute l’épaisseur <strong>de</strong> la personnalité, et d’avoir reconstitué<br />

sa trajectoire peu banale, et sa vie intellectuelle autant<br />

que religieuse et politique. Ce qui apporte en même temps un<br />

double éclairage : sur une pério<strong>de</strong> historique, d’une part, et<br />

sur les mécanismes par lesquels certains pouvoirs et certaines<br />

institutions imposent leur ordre en mettant au pas les individus,<br />

et en réduisant leur conscience au silence.<br />

Michel Wieviorka<br />

docteur d’etat, ès lettres et sciences humaines,<br />

directeur d’étu<strong>de</strong>s <strong>à</strong> l’ecole <strong>de</strong>s Hautes etu<strong>de</strong>s<br />

en Sciences Sociales <strong>à</strong> Paris.


Sommaire<br />

avant-propos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .11<br />

I Le Regnum Francorum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17<br />

- le monachisme.<br />

- la rupture avec le sol natal.<br />

- l’économie <strong>de</strong> piété.<br />

- l’économie domaniale.<br />

- Foi et allégeance.<br />

- le ministère royal.<br />

- délitement <strong>de</strong> l’empire : les agresseurs normands, sarrazins et byzantins.<br />

Conclusion I<br />

II Le gyrovague . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49<br />

l’allemagne, la Suisse, la France, l’Italie, la Croatie, la Bulgarie.<br />

Conclusion II<br />

III L’œuvre . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57<br />

- l’enseignant.<br />

- le poète.<br />

- le musicien.<br />

- le théologien (la nature <strong>de</strong> l’âme, la trinité, la pré<strong>de</strong>stination).<br />

- le grammairien et philologue.<br />

- le philosophe.<br />

Conclusion III<br />

IV Le conflit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 103<br />

- les alliés.<br />

- les adversaires.<br />

Conclusion IV<br />

V La condamnation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .143<br />

Conclusion V<br />

VI Essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité . . . . . 153<br />

- l’individu face <strong>à</strong> l’institution.<br />

- les résistances au changement.<br />

- le mécanisme <strong>de</strong> dissi<strong>de</strong>nce.<br />

VII Conclusion générale . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163<br />

VIII Appendices . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169<br />

IX Annexes (généalogie, poèmes, fac-similés) . . . . . . . . . . . . . . 175<br />

X Planches . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 217<br />

XI Tables . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 234<br />

XII Cartes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 245<br />

XIII Glossaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 253<br />

XIV Bibliographie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 261<br />

XV In<strong>de</strong>x . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 271<br />

Postface . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 276


Abréviations<br />

a. F. annales <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong><br />

a. S. B. annales <strong>de</strong> Saint-Bertin<br />

a. X. annales <strong>de</strong> Xanten<br />

cap. capitulaire<br />

cl. colonne<br />

cf. conformément <strong>à</strong><br />

d. C. l. dom Cyril lambot : œuvres grammaticales<br />

et théologiques <strong>de</strong> Go<strong>de</strong>scalc d’orbais<br />

éd. édition<br />

f o . folio<br />

G. C. Gallia Christiana<br />

l. ligne<br />

G. M. Gallia Monasteria<br />

M. G. H. Monumenta Germanica Historica<br />

n. note<br />

op. opus (ouvrage)<br />

P. l. Patrologie latine<br />

ps. psaume<br />

t. tome


<strong>Gottschalk</strong> d’orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

AVANT-PROPOS<br />

Go<strong>de</strong>sscalcus est né en 803. <strong>Gottschalk</strong> 1 d’orbais,<br />

<strong>Gottschalk</strong> le Saxon, Gothescalc, Fulgence, tous<br />

ces autres noms recouvrent le même personnage.<br />

durant le délitement <strong>de</strong> l’empire carolingien, ce moine<br />

gyrovague du IX e siècle, intellectuel <strong>de</strong> conviction, s’opposa<br />

<strong>de</strong> toutes ses forces et jusqu’<strong>à</strong> sa mort, <strong>à</strong> l’ordre établi<br />

<strong>de</strong> l’eglise et <strong>de</strong> l’etat. Son œuvre et sa vie sont encore<br />

mal connues mais se reconstituent peu <strong>à</strong> peu <strong>de</strong>puis plusieurs<br />

décennies grâce <strong>à</strong> <strong>de</strong> nombreux chercheurs,<br />

principalement les allemands F. rädle 2 , M.l. Weber 3 ,<br />

l.Traube 4 , K. Vielhaber 5 , n. Fickermann 6 , B. Bischoff 7<br />

et l. Hödl 8 , les Belges dom G. Morin 9 , dom C. lambot 10 ,<br />

les Français J. Jolivet 11 , B. lavaud 12 et F.J. Gaudard 13 ,<br />

le Croate l. Katic 14 , le Suédois d. norberg 15 , l’Italien<br />

(1) nous avons opté pour cette orthographe,<br />

mais il en existe plusieurs autres ; Go<strong>de</strong>scalc,<br />

Gotescalc, Gotheschalk qui signifient : « serviteur<br />

<strong>de</strong> dieu».<br />

(2) <strong>Gottschalk</strong>s Gedicht an seinen letzten<br />

Freund<br />

(3) Die Gedichte <strong>de</strong>s <strong>Gottschalk</strong> von Orbais.<br />

(4) in M.G.H. Poetae III<br />

(5) <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>r Sachse<br />

(6) in M.G.H. Poetae VI<br />

(7) <strong>Gottschalk</strong>s Lied für <strong>de</strong>n reichenauer<br />

Freund<br />

(8) <strong>Gottschalk</strong> von Orbais<br />

(9) <strong>Gottschalk</strong> retrouvé<br />

(10) Oeuvres théologiques et grammaticales<br />

<strong>de</strong> Go<strong>de</strong>scalc d’Orbais<br />

(11) Go<strong>de</strong>scalc d’Orbais et la trinité<br />

(12) Précurseur <strong>de</strong> Calvin ou témoin <strong>de</strong> l’augustinisme<br />

?<br />

(13) <strong>Gottschalk</strong> moine d’Orbais ou le commencement<br />

<strong>de</strong> la controverse sur la pré<strong>de</strong>stination<br />

(14) Saksonac <strong>Gottschalk</strong> na dvoru kneza<br />

Trpimira<br />

(15) Acta universitatis stockholmiensis studia<br />

latina Stockholmiensa V<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

11


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

12<br />

avant-propos<br />

G. l. Perugi 16 , enfin l’anglais e.a. Walpole 17 . Cette liste<br />

n’est pas exhaustive mais elle montre combien ce personnage<br />

singulier appartient <strong>à</strong> la communauté historique,<br />

philosophique et culturelle européenne 18 . Ce moine<br />

d’orbais déchaîna la controverse sur la pré<strong>de</strong>stination<br />

vers le milieu du IX e siècle. Malgré la <strong>de</strong>struction d’une<br />

gran<strong>de</strong> partie <strong>de</strong> ses écrits, son œuvre fut considérable. Il<br />

n’était pas seulement, comme le voulurent ses adversaires<br />

contemporains, un blasphémateur et un hérétique, mais<br />

avant tout un poète d’une sensibilité aiguë, un subtil<br />

grammairien, un enseignant lettré, un théologien et un<br />

philosophe.<br />

Voyageur infatigable jusqu’<strong>à</strong> sa condamnation <strong>de</strong>vant<br />

Charles le Chauve au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quierzy <strong>de</strong> 849, il poursuivit<br />

son activité littéraire durant sa réclusion <strong>à</strong> l’abbaye<br />

d’<strong>Hautvillers</strong> où il mourut en 869. Inflexible, il tint tête <strong>à</strong><br />

l’archevêque <strong>de</strong> reims Hincmar qui lui <strong>de</strong>manda <strong>à</strong><br />

maintes reprises <strong>de</strong> renier ses doctrines. les mauvais traitements<br />

qu’il eut <strong>à</strong> subir émurent plusieurs abbés et<br />

évêques. Malgré sa flagellation et ses mutilations 19 ,<br />

<strong>Gottschalk</strong> maintint autour <strong>de</strong> lui un cercle d’amis qui<br />

continuèrent <strong>à</strong> soutenir ses thèses 20 . la neutralisation et les<br />

mécanismes d’exclusion <strong>de</strong> cette « pensée forte» sont au<br />

centre <strong>de</strong> notre recherche. l’environnement politique, économique<br />

et culturel n’est pas étranger <strong>à</strong> l’anéantissement<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> d’orbais. Sa résistance <strong>à</strong> la nomenclature<br />

ecclésiastique, <strong>à</strong> la pensée dominante <strong>de</strong> son temps, éclaire<br />

combien le pouvoir absolu nourrit la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> ses<br />

plus parfaits produits. Sa lutte se situe <strong>à</strong> l’apogée finissante<br />

<strong>de</strong> la puissance carolingienne. les petits-fils <strong>de</strong><br />

(16) Gottschalc<br />

(17) Early latin hymns<br />

(18) C’est J. Usher qui publia, pour la première fois<br />

<strong>à</strong> dublin en 1631, <strong>de</strong>ux confessions <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

(19) Perpetuum silentium ori tuo virtute aeterni<br />

verbi imponimus ; ( par la vertu du verbe<br />

éternel nous imposons <strong>à</strong> votre bouche un perpétuel<br />

silence). extrait <strong>de</strong> la sentence <strong>de</strong><br />

Quierzy voir : actes <strong>de</strong> la province <strong>de</strong> reims,<br />

tome I, page 203.<br />

(20) le clergé lyonnais avec Florus fut parmi<br />

ses plus forts soutiens.


avant-propos<br />

Charlemagne, Charles le Chauve et louis le Germanique,<br />

au traité <strong>de</strong> Verdun <strong>de</strong> 843, signent l’apparition <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

nations et confirment leurs particularismes. la naissance<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux peuples entraîne la partition du «regnum<br />

Francorum». le mobilier intellectuel <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong> est <strong>à</strong><br />

appréhen<strong>de</strong>r avec pru<strong>de</strong>nce. Pour ce siècle, le christianisme<br />

est la seule vérité, il faut assurer <strong>à</strong> dieu la prescience,<br />

la toute-puissance et la bonté, expliquer la grâce, le péché<br />

originel et la pré<strong>de</strong>stination ; que <strong>de</strong> difficultés si l’on ne<br />

subordonne pas les principes <strong>de</strong> causalité et <strong>de</strong> contradiction<br />

<strong>à</strong> celui <strong>de</strong> perfection. aujourd’hui, cette complexité<br />

s’appuie sur <strong>de</strong>s concepts historiques, sociologiques, psychologiques,<br />

physiques et moraux ignorés au temps <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>. Sa dissi<strong>de</strong>nce ne peut cependant être réduite <strong>à</strong><br />

la seule dimension théologique et cette recherche n’a pas<br />

pour objet cette <strong>de</strong>rnière dimension.<br />

Par une approche «historico-sociologique», le conflit<br />

qu’entretient <strong>Gottschalk</strong> avec l’église et l’état carolingien,<br />

révèle d’autres données jusqu’ici occultées.<br />

revisiter les disputes et controverses <strong>de</strong> ce IX e siècle<br />

conduit <strong>à</strong> étudier les déviances minoritaires et les réactions<br />

majoritaires, la liberté individuelle face aux pressions vers<br />

la conformité, la norme par rapport <strong>à</strong> l’innovation, les<br />

mécanismes d’exclusion menant <strong>à</strong> la dissi<strong>de</strong>nce affirmée,<br />

les enjeux <strong>de</strong> pouvoirs et leurs corollaires politiques et<br />

sociaux.<br />

dans un climat <strong>de</strong> lutte entre les églises du royaume<br />

comme, entre les provinces et ce <strong>de</strong>rnier, les théories du<br />

moine <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>vinrent <strong>de</strong> plus en plus dangereuses<br />

pour la société laïque et religieuse.<br />

le clérical cimentait alors toute la construction sociale et<br />

ce rôle fondamental lui donnait une dimension prioritairement<br />

politique. la religion <strong>de</strong> cette époque, en <strong>de</strong>venant la<br />

substance même <strong>de</strong> la réalité politique, envahit tous les<br />

domaines <strong>de</strong> la vie et interprète la société.<br />

dans une eglise politique, toutes les fautes sont politiques<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

13


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

14<br />

avant-propos<br />

et <strong>de</strong>viennent impardonnables. elles troublent l’ordre divin<br />

et l’ordre public. l’excommunication, c’est d’abord la mort<br />

civile et sociale. la société carolingienne est totalitaire car<br />

le chemin est court, du zèle dévot <strong>à</strong> l’intolérance. la qualité<br />

<strong>de</strong> certains évêques et abbés, la culture <strong>de</strong>s aristocrates<br />

laïcs n’y feront rien. la pénitence publique <strong>de</strong>vient policière,<br />

elle frappe les criminels <strong>de</strong> droit-commun comme les<br />

autres pêcheurs et les envoie en prison ecclésiastique.<br />

Païens, chrétiens, insoumis n’échappent pas <strong>à</strong> la cœrcition.<br />

les juifs sont dénoncés comme méchants. l’archevêque<br />

Hincmar en fait déj<strong>à</strong> <strong>de</strong>s traîtres qui ai<strong>de</strong>nt les musulmans<br />

et normands envahisseurs. <strong>Gottschalk</strong> ne fut pas le seul<br />

opposant <strong>à</strong> l’ordre moral monastique et clérical. <strong>de</strong>s<br />

princes et bon nombre <strong>de</strong> clercs ont également refusé<br />

d’obéir, mais le moine d’orbais argumente pertinemment.<br />

Très tôt, il s’opposa <strong>à</strong> son abbé raban Maur <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>,<br />

considérant qu’il n’était pas dans la tradition saxonne d’engager<br />

un enfant sur une voie décidée et tracée par d’autres,<br />

et que les groupes dirigeants ne <strong>de</strong>vaient pas imposer <strong>à</strong> un<br />

certain nombre <strong>de</strong> leurs membres 21 une vocation non<br />

mûrie. Il estimait que l’habitu<strong>de</strong> prédominante <strong>de</strong>s nobles,<br />

<strong>de</strong> confier au monastère leurs enfants dès l’âge tendre, ne<br />

<strong>de</strong>vait répondre qu’<strong>à</strong> la nécessité d’un long apprentissage<br />

éducatif répandu en ce lieu et <strong>à</strong> rien d’autre.<br />

Si le monastère n’était pas le point d’aboutissement d’un<br />

choix personnel initial, la pédagogie monastique ne pouvait<br />

avoir pour thèse essentielle la fidélité et l’irréversibilité.<br />

Fidélité <strong>à</strong> son état, irréversibilité <strong>de</strong> la voie vers la perfection,<br />

une fois qu’on y était entré. ainsi pour lui, cette<br />

fidélité et cette irréversibilité commandaient <strong>de</strong> toute évi<strong>de</strong>nce<br />

le consentement et la participation <strong>de</strong> la volonté<br />

individuelle.<br />

augustinien, <strong>Gottschalk</strong> considère également que l’hom-<br />

(21) <strong>Gottschalk</strong> était le fils du comte saxon Bernus, alias Berno.


me est présent <strong>à</strong> lui-même par la mémoire. Il s’agit pour lui<br />

d’affirmer que ce qui est présent est actif <strong>de</strong> son passé.<br />

Pour lui, comme pour saint augustin, il y a trois temps : le<br />

présent du passé, le présent du présent et le présent <strong>de</strong><br />

l’avenir.<br />

le présent du passé, c’est la mémoire. le présent du présent,<br />

c’est l’intuition, le présent <strong>de</strong> l’avenir, c’est l’attente 22 .<br />

la mémoire est la présence <strong>de</strong> l’esprit <strong>à</strong> soi-même, qui se<br />

nourrit et bondit <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> sensations, <strong>de</strong> notions et <strong>de</strong>s<br />

affections accumulées. C’est <strong>de</strong> cette imprégnation augustinienne<br />

que toute la pensée <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> sera mue. Sa<br />

quête incessante du savoir démontre que l’esprit est<br />

mémoire. elle sera la condition beaucoup plus que le<br />

moyen <strong>de</strong> sa conscience du mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> son imagination<br />

créatrice et pour lui, <strong>de</strong> la présence <strong>de</strong> dieu.<br />

Cette forte pensée, sur fond d’une désorganisation politique<br />

23 où la parcellisation <strong>de</strong> l’empire préparait l’organisation<br />

féodale et où les représentants <strong>de</strong> l’eglise s’opposaient<br />

avec leurs chefs, défiait le contrôle social du clergé.<br />

Connu imparfaitement, <strong>Gottschalk</strong> d’orbais l’emporte en<br />

puissance persuasive, comme en ténacité et en résignation.<br />

onze siècles avant london, Kratchenko ou Soljenitsyne<br />

les affres et la violence <strong>de</strong> ses procès ne le firent pas fléchir.<br />

au IX e siècle, l’hérétique était l’homme le plus détesté<br />

<strong>de</strong> l’eglise car il était <strong>à</strong> la fois <strong>de</strong>dans et <strong>de</strong>hors, il menaçait<br />

les fon<strong>de</strong>ments idéologiques, institutionnels et sociaux<br />

<strong>de</strong> la religion. Il était l’opposite <strong>de</strong> la foi et du monopole<br />

religieux.<br />

a supposer que <strong>Gottschalk</strong> n’eût pas cette originalité, il mit<br />

au jour mieux que personne les idées <strong>de</strong> ses contemporains.<br />

Seule, face <strong>à</strong> du totalitarisme, sa dissi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>meure<br />

en quelque sorte d’une gran<strong>de</strong> mo<strong>de</strong>rnité.<br />

(22) Confessions : livre XI, XX, 26.<br />

(23) 829/830 Première déposition et premier<br />

rétablissement <strong>de</strong> louis le débonnaire<br />

avant-propos<br />

833/834 ; secon<strong>de</strong> déposition et second rétablissement<br />

<strong>de</strong> louis le débonnaire.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

15


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

16<br />

avant-propos<br />

Cette recherche tient dans sa capacité <strong>à</strong> donner <strong>à</strong> voir la<br />

part <strong>de</strong> subjectivité qui concourt <strong>à</strong> l’analyse historique,<br />

notamment <strong>à</strong> travers l’appréhension <strong>de</strong> textes implacablement<br />

nourris <strong>de</strong> projections et <strong>de</strong> conventions socioculturelles.<br />

Par <strong>de</strong>l<strong>à</strong>, elle conduira <strong>à</strong> s’interroger sur la validité <strong>de</strong>s<br />

témoignages du IX e siècle qui, aussi objectifs qu’ils puissent<br />

être, sont le reflet <strong>de</strong> connaissances pour les uns,<br />

d’ignorances pour les autres.


I. le regnum Francorum<br />

I . Le Regnum Fr ancor um<br />

les mythes fondateurs <strong>de</strong> la société germanique ont élaboré<br />

une conception globale <strong>de</strong> l’organisation sociale,<br />

mais un fait historique a radicalement bouleversé <strong>de</strong><br />

font en comble les conceptions primitives : le christianisme.<br />

avec les évangiles, c’est la <strong>de</strong>struction <strong>de</strong>s mythes, le refus du<br />

<strong>de</strong>stin fixé par les dieux et l’affirmation <strong>de</strong> l’autonomie <strong>de</strong><br />

l’homme par rapport <strong>à</strong> la société. C’est dans l’aire franque et<br />

sur ses « marka » que s’engageront les combats reposant sur<br />

la personne et non plus sur la cité ou la tribut.<br />

Le monachisme<br />

au délitement annoncé <strong>de</strong> l’empire carolingien s’oppose<br />

l’expérience monastique, unificatrice, forgée par les grands<br />

fondateurs d’ordres bénédictins. luxeuil (590), Bobio<br />

(613), Saint-<strong>de</strong>nis (650), <strong>Hautvillers</strong> (650), Jumièges<br />

(654), Corbie (661), orbais (673), reichenau (724), <strong>Fulda</strong><br />

(741), Saint-Gall (750)…<br />

l’expansion maximale <strong>de</strong> cette gran<strong>de</strong> vague monastique<br />

atteint son point culminant durant les premières décennies<br />

<strong>de</strong> l’hégémonie carolingienne. la mémoire <strong>de</strong> cette époque<br />

passe donc presque exclusivement <strong>à</strong> travers la voix <strong>de</strong>s<br />

prêtres ou <strong>de</strong>s moines. Ces <strong>de</strong>rniers ayant la plus forte<br />

influence, il convient alors <strong>de</strong> ne jamais perdre <strong>de</strong> vue que<br />

les œuvres <strong>de</strong>s autres protagonistes <strong>de</strong> l’histoire nous parviennent<br />

<strong>à</strong> travers l’optique et les critères <strong>de</strong> jugement <strong>de</strong><br />

la culture monastique.<br />

Celle-ci <strong>de</strong>vient la pierre <strong>de</strong> touche pour juger les hommes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

18<br />

I. le regnum Francorum<br />

et le mon<strong>de</strong>. en réduisant <strong>à</strong> ses propres schémas religieux<br />

toutes les réalités <strong>de</strong> cette époque, l’expérience monastique<br />

pèse d’un poids singulier sur l’historiographie ici entreprise.<br />

Il est aussi un domaine peu exploré, celui <strong>de</strong> l’expression<br />

onirique souvent relatée dans les écrits monastiques.<br />

la portée religieuse et sociale <strong>de</strong>s « visiones » durant le<br />

haut-Moyen-âge est difficile <strong>à</strong> mesurer, mais il est évi<strong>de</strong>nt<br />

que l’univers religieux du IX e siècle n’a pas échappé <strong>à</strong> ce phénomène.<br />

Une étu<strong>de</strong> freudienne <strong>de</strong>s esprits médiévaux tournerait<br />

le dos <strong>à</strong> notre démarche, car nous ne pouvons prêter aux<br />

hommes <strong>de</strong> ce siècle <strong>de</strong>s préoccupations introspectives qui ne<br />

sont pas les leurs. Cependant, l’emprise du sentiment religieux<br />

sur les esprits est d’une telle évi<strong>de</strong>nce que, ce qui<br />

importe pour nous, est ce qu’ils croyaient voir ou avoir vu.<br />

le visionnaire, dans bien <strong>de</strong>s cas le rédacteur <strong>de</strong> la vision,<br />

tient une gran<strong>de</strong> place dans le mon<strong>de</strong> ecclésiastique. Il peut<br />

en effet, sans grand risque, s’octroyer le pouvoir <strong>de</strong> dicter<br />

sa volonté, qu’il s’agisse <strong>de</strong> fixer l’emplacement d’une<br />

abbaye <strong>à</strong> édifier ou <strong>de</strong> condamner tel usage monastique. le<br />

plus souvent, le visionnaire est un redresseur <strong>de</strong> torts et les<br />

personnages qui lui apparaissent en songe n’ont pas<br />

d’autre mission.<br />

dans la « Vision <strong>de</strong> Wettin » 24 , les prêtres qui ont servi au<br />

palais sont présentés comme ayant perdu tout pouvoir d’intercession.<br />

Quand on dira <strong>à</strong> la Vierge qu’ebon est <strong>à</strong> la cour<br />

où il suit les affaires du roi, elle répondra d’après Flodoart,<br />

que ce n’est pas en un tel lieu qu’il se sanctifiera.<br />

on comprend mieux désormais les précautions qu’il faut<br />

prendre vis-<strong>à</strong>-vis <strong>de</strong> ceux qui, tel l’archevêque Hincmar<br />

<strong>de</strong> reims, utilisent délibérément, la vision comme<br />

moyen <strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong> leurs propres idées, politiques ou<br />

autres. dans la «Vision <strong>de</strong> Bernold», par exemple, l’arche-<br />

(24) († 824) Walafrid Strabon et <strong>Gottschalk</strong><br />

eurent le moine Wettin comme professeur <strong>à</strong><br />

reichenau. W. Strabon, encouragé par un<br />

ancien confrère du nom d’adalgis, rédigea son<br />

premier grand ouvrage : la « Visio Wettini ».


vêque <strong>de</strong> reims rappelle qu’il existe <strong>de</strong>s visions fort<br />

connues, celles rapportées par Grégoire le Grand, Bè<strong>de</strong> et<br />

Boniface, afin <strong>de</strong> préciser que la vision doit être considérée<br />

comme respectable et digne <strong>de</strong> foi. Il faut cependant<br />

retenir au sujet du visionnaire, que ce personnage est fort<br />

tourmenté. Ce sont parfois <strong>de</strong> mo<strong>de</strong>stes moines. en face <strong>de</strong><br />

ces «prophètes», les représentants du sacerdoce n’auront<br />

pas toujours une attitu<strong>de</strong> d’approbation sans réserve. Ces<br />

visionnaires seront suspectés, tout simplement parce qu’ils<br />

détiennent un pouvoir concurrent, celui <strong>de</strong> voir l<strong>à</strong> où la hiérarchie<br />

ne voit rien. Parfois les gens d’autorité, non seulement<br />

ont récupéré les messages ainsi divulgués, mais ont<br />

tenu un discours sans inspirateur. C’est le cas notamment<br />

<strong>de</strong>s visions hincmariennes 25 et l’on se trouve l<strong>à</strong> <strong>de</strong>vant le<br />

problème que posent tous ces faussaires, <strong>de</strong>s faussaires<br />

pour la «bonne cause», parmi lesquels on doit ranger bien<br />

entendu l’auteur <strong>de</strong>s «Fausses décrétales».<br />

Tous les écrits qui nous sont parvenus n’ont fait en sorte<br />

que <strong>de</strong> servir <strong>à</strong> l’exaltation et <strong>à</strong> la justification du choix<br />

monastique, mais ils découvrent aussi <strong>de</strong> façon souterraine<br />

les racines politiques et sociales qui présidaient <strong>à</strong> l’édification<br />

<strong>de</strong> l’idéologie du «regnum Francorum». Une reformulation<br />

<strong>de</strong> la vie politique et sociale du IX e siècle carolingien<br />

apportera <strong>de</strong>s clés permettant <strong>de</strong> comprendre les<br />

sollicitations <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, la genèse <strong>de</strong> ses choix en<br />

matière religieuse et peut-être aussi le sens et les conditions<br />

<strong>de</strong> sa persistance dans la marginalité.<br />

La rupture <strong>de</strong>s liens avec le sol natal<br />

a la mort <strong>de</strong> Charlemagne en 814, <strong>Gottschalk</strong> dans sa<br />

onzième année 26 fut éloigné <strong>de</strong> sa Saxe natale et offert par<br />

(25) Cf. M. aubrun : in Moines, paroisses et<br />

paysans, p.166. éd. P.U.B.P. (2000).<br />

(26) F. Brunhölzl fait naitre <strong>Gottschalk</strong> en 803.<br />

In Histoire <strong>de</strong> la littérature latine t II, p. 115, éd.<br />

Brepols, (1991). K. Vielhaber, in <strong>Gottschalk</strong><br />

I. le regnum Francorum<br />

<strong>de</strong>r Sachse situe en 804 la naissance <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>. Haureau dans sa Nouvelle biographie<br />

générale t. XXI, p. 340, Paris, (1837) fixe<br />

la naissance <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> aux environs <strong>de</strong>s<br />

années 807/808.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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I. le regnum Francorum<br />

son père, le comte Berno ou Bernus, comme moine oblat <strong>à</strong><br />

l’abbaye <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>, en Hesse. en quittant le milieu au sein<br />

duquel il a vécu, le jeune oblat affronte désormais une réalité<br />

nouvelle 27 . Malgré la clôture <strong>de</strong> l’école latine <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>,<br />

<strong>à</strong> tout moment il s’offre <strong>à</strong> <strong>de</strong>s aspects nouveaux, entre en<br />

relation avec <strong>de</strong>s inconnus, constate, hors <strong>de</strong> sa <strong>de</strong>meure<br />

parentale, cadre stable et sécurisant, <strong>de</strong>s espaces <strong>de</strong> vie<br />

organisés différemment, et découvre la discipline <strong>de</strong>s<br />

classes et <strong>de</strong>s dortoirs. Un être aussi sensible, on le verra<br />

ultérieurement dans sa poésie, n’étant plus au centre du<br />

«domus» familial, vit sa première marginalité. Tout jeune<br />

oblat, <strong>Gottschalk</strong> ne pouvait adhérer <strong>à</strong> l’«Oblatio puerorum»<br />

28 , et n’était pas sans se rappeler la tradition saxonne<br />

familiale 29 . Certes les familles nobles offrantes du point <strong>de</strong><br />

vue <strong>de</strong> la liturgie, participaient ainsi activement <strong>à</strong> leur<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’intercession auprès <strong>de</strong>s moines. Mais chez les<br />

Saxons fraîchement convertis au christianisme, cette éducation<br />

rencontrait <strong>de</strong>s résistances et l’engagement, que les<br />

parents prenaient pour un fils, ne respectait pas le<br />

droit coutumier. la noblesse saxonne rejetait sans concession<br />

les vœux solennels <strong>de</strong>s oblats et proclamait : «qu’un<br />

homme libre ne pouvait faire <strong>de</strong> son fils un esclave» 30 . Se<br />

mesure ici le <strong>de</strong>gré d’adhésion <strong>de</strong>s peuples convertis <strong>de</strong><br />

(27) dans une lettre <strong>de</strong> son ami Walafrid<br />

Strabon, on peut lire : « atque in paupere,<br />

passa est quam nostra iuventus » rappelant<br />

ainsi les privations <strong>de</strong> leur jeunesse. Cf.<br />

dümmler : in Poet. aevi Carolini, t. II, p. 363.<br />

(28) dans son dictionnaire d’archéologie chrétienne<br />

et <strong>de</strong> liturgie, Paris, (1936), H. leclerc<br />

considère que l’oblation ne pouvait se faire avant<br />

l’âge <strong>de</strong> 10 ans. Il est <strong>à</strong> noter cependant que la<br />

règle instituée par saint Basile, inspirateur avec<br />

Sturm <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>, limitait <strong>à</strong> 15 ans l’état d’oblat.<br />

(29) dans une lettre attribuée <strong>à</strong> loup <strong>de</strong><br />

Ferrière datée <strong>de</strong> février 842 : «est autem,<br />

quem benignitati uestrae plurimum commendat,<br />

propinquus ejus Bernus, a beatae memoria<br />

glorioso imperatore hl(udouico) tenere<br />

educatus et claris ornatus honoribus» (or il en<br />

est un qu’il recomman<strong>de</strong> beaucoup <strong>à</strong> votre<br />

bienveillance, son parent Bernus, élevé tendrement<br />

et revêtu d’illustres charges par le glorieux<br />

empereur louis). Cf. l. levillain : in<br />

Correspondance <strong>de</strong> loup <strong>de</strong> Ferrière, t. I,<br />

p. 126, éd. les Belles lettres , (1964) . Sur ce<br />

personnage, candidat au siège d’autun, on ne<br />

sait rien d’autre. la parentèle du comte<br />

Bernus, père <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, reste <strong>à</strong> établir. Il<br />

est intérressant <strong>de</strong> signaler l’homonymie <strong>de</strong><br />

cet évêque d’autun. Mais dès 843 on trouve<br />

sur ce siège, alteus.<br />

(30) Cf. K. Vielhaber : in <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>r<br />

Sachse, p. 15, éd. ludwig röhrscheid Verlag,<br />

Bonn, (1956).


force par Charlemagne au capitulaire <strong>de</strong>s Saxons <strong>de</strong> 797 31 !<br />

Walafrid Strabon, ca<strong>de</strong>t <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, eut <strong>à</strong> connaître également<br />

les affres et les rigueurs <strong>de</strong> l’oblation 32 , mais<br />

contrairement <strong>à</strong> son ami, il était fils <strong>de</strong> petites gens et supportait<br />

les métho<strong>de</strong>s pédagogiques fort ru<strong>de</strong>s prodiguées<br />

par les moines plus âgés. la fresque <strong>de</strong>s «arts libéraux»,<br />

peinte sur les murs du palais <strong>de</strong> Théodulf, représente la<br />

grammaire par une femme qui tient un fouet dans la main<br />

gauche 33 . Hil<strong>de</strong>mar dans son commentaire <strong>de</strong> la règle <strong>de</strong><br />

Saint-Benoît donne quelques conseils au maître 34 : «Il<br />

doit ”agir avec modération et non les fouetter car ils reviennent<br />

”aussitôt après la correction <strong>à</strong> leurs sottises. Il faut<br />

apaiser ”et corriger. Un maître qui, dans sa colère, répriman<strong>de</strong><br />

un ”enfant au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong> <strong>de</strong> la mesure peut rendre les<br />

enfants plus ”mauvais». alcuin envoie aux maîtres <strong>de</strong> son<br />

abbaye <strong>de</strong> Saint-Martin-<strong>de</strong>-Tours ces conseils <strong>de</strong> modération<br />

: «Vous ”les anciens, élevez les jeunes gens dans un<br />

esprit <strong>de</strong> ”douceur. Considérez les adolescents comme <strong>de</strong>s<br />

fils» 35 .<br />

les maîtres <strong>à</strong> l’égard <strong>de</strong>s adolescents sont méfiants, ils doivent<br />

mettre le jeune homme en gar<strong>de</strong> contre les appétits<br />

sexuels. Ils craignent les amitiés troubles qu’un ancien<br />

peut avoir pour un moinillon. Sur ce sujet, le pénitentiel du<br />

Pseudo-Bè<strong>de</strong> prévoyait <strong>de</strong>s punitions allant <strong>de</strong> quarante <strong>à</strong><br />

cent jours <strong>de</strong> jeûne. Mais Bè<strong>de</strong> le Vénérable affirmait<br />

quant <strong>à</strong> lui : « nous connaissons <strong>de</strong><br />

nombreux ”enfants adonnés <strong>à</strong> la sagesse. » et Chro<strong>de</strong>gang<br />

<strong>de</strong> Metz d’ajouter : « lorsque l’on veut ôter la rouille, on<br />

(31) Ce n’est qu’en 792 d’après J. Favier : in<br />

Charlemagne, p. 313, éd. Fayard, Paris<br />

(1999), que commencèrent les nominations<br />

<strong>de</strong>s comtes <strong>à</strong> la tête <strong>de</strong> comtés organisés. le<br />

père <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, Bernus, fut donc parmi les<br />

premiers <strong>à</strong> hériter, pour son loyalisme envers<br />

l’autorité franque, <strong>de</strong> cette charge.<br />

(32) W. Strabon d’origine souabe 808 † 849<br />

I. le regnum Francorum<br />

futur abbé <strong>de</strong> reichenau parle <strong>de</strong> son ami saxon<br />

<strong>de</strong> jeunesse (sächsischer Jugenfreund) mit<br />

« pater fraterque » cf. K. Vielhaber, op. cité.<br />

(33) P. riché : in l’Empire carolingien, p. 252,<br />

éd. Hachette, (1994).<br />

(34) Hil<strong>de</strong>mar : éd. Bibliothéca Cassinensis,<br />

IV, (1880).<br />

(35) alcuin : in epistolae, IV, 95.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

22<br />

I. le regnum Francorum<br />

risque <strong>de</strong> percer le vase. Il faut retrancher les vices avec<br />

pru<strong>de</strong>nce et charité. »<br />

Mais les métho<strong>de</strong>s d’éducation monastique prévoyaient<br />

également quelques moments <strong>de</strong> détente entre les offices<br />

religieux et les heures <strong>de</strong> travail. afin <strong>de</strong> fortifier les élèves,<br />

on les emmenait durant une heure, au choix du maître, dans<br />

un pré où ils pouvaient jouer sous sa surveillance et cela<br />

chaque semaine ou chaque mois 36 .<br />

Contrairement <strong>à</strong> la noblesse saxonne, la noblesse franque<br />

soutenait cet enseignement et estimait que le choix <strong>de</strong>s<br />

parents engageait l’enfant toute sa vie et que l’on ne pouvait<br />

reprendre <strong>à</strong> dieu ce qu’on lui avait donné. Ce don<br />

n’était pas seulement celui <strong>de</strong> l’enfant mais aussi celui <strong>de</strong>s<br />

terres et <strong>de</strong>s rentes qui accompagnait l’oblation 37 .<br />

le choix du comte Bernus, père <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, ne respectait<br />

pas les usages saxons mais marquait son engagement<br />

dans la foi chrétienne en dépassant le serment symbolique<br />

d’autres familles saxonnes 38 .<br />

la politique développée par Charlemagne s’appuyait sur la<br />

nécessité <strong>de</strong>s concessions au milieu local et n’ignorait pas<br />

qu’une administration efficace passe par une véritable<br />

connaissance <strong>de</strong>s réalités nationales et par l’adhésion la<br />

plus large <strong>de</strong>s élites. Face <strong>à</strong> un peuple fraîchement soumis,<br />

il a offert aux grands <strong>de</strong> Saxe un pseudo pouvoir et l’illusion<br />

<strong>de</strong> prises <strong>de</strong> décisions. Il écoute les aristocraties fraîchement<br />

inféodées et le faisant savoir les compromet vis-<strong>à</strong>vis<br />

<strong>de</strong> leurs peuples respectifs. le comte est choisi par l’empereur<br />

et par lui seul. les nouveaux comtés épousent les<br />

territoires coutumiers et les unités naturelles. l’allégeance<br />

du comte Bernus ne commandait pas le non-respect <strong>de</strong>s<br />

(36) Cf. Hil<strong>de</strong>mar : op. cité.<br />

(37) d. Illmer : in Formen <strong>de</strong>r Erziehung und<br />

Wissensvermittlung im frühen Mittelalter,<br />

p. 19 <strong>à</strong> 25, Munich, (1971).<br />

(38) M. lahaye-Geutzen : in Das Opfer <strong>de</strong>r<br />

Kin<strong>de</strong>r (ein Beitrag zur liturgie undSozialge<br />

schichte <strong>de</strong>s Möchtums im hohen Mittelalter.<br />

altenberg, (1991). e. Palazzo : in Liturgie et<br />

société au Moyen-âge, éd. aubier, (2000).


usages saxons.<br />

le comte jouit <strong>de</strong> la grâce du roi, c’est-<strong>à</strong>-dire <strong>de</strong> cette<br />

confiance d’être cru sur parole quand il exprime la volonté<br />

royale : se drapant alors dans son aura, le soumis <strong>de</strong>vient<br />

le dominant. responsable <strong>de</strong> l’ordre, il dispense la justice,<br />

il prési<strong>de</strong> le plaid du comté et publie les capitulaires. Bien<br />

possessionné et pourvu <strong>de</strong> réseaux personnels et familiaux,<br />

il alimente le vivier dans lequel le roi pourra puiser, s’il en<br />

a besoin, ses ambassa<strong>de</strong>urs, voire les penseurs et savants<br />

utiles au clergé. le comte Bernus spéculait évi<strong>de</strong>mment<br />

sur le renforcement <strong>de</strong> sa lignée dans tous ces domaines.<br />

<strong>Gottschalk</strong> refusera cette instrumentation.<br />

la désignation d’un comte passe par la remise d’un billet<br />

où sont résumées les exigences royales.<br />

«Il revient <strong>à</strong> notre clémence <strong>de</strong> chercher dans tout le<br />

peuple ”les hommes bons et vigilants, et <strong>de</strong> ne pas conférer<br />

<strong>à</strong> la ”légère la dignité <strong>de</strong> juge mais procé<strong>de</strong>r <strong>à</strong> un examen<br />

<strong>de</strong> la ”fidélité et <strong>de</strong> la valeur <strong>de</strong> l’homme» 39 . le comte<br />

Bernus répondait <strong>à</strong> ces critères mais c’était sans compter<br />

sur l’esprit résolument saxon <strong>de</strong> son fils. lorsque adolescent,<br />

<strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>manda <strong>de</strong> reprendre sa liberté, le syno<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> Mayence en 829 accepta sa <strong>de</strong>man<strong>de</strong>. Mais ultérieurement<br />

l’abbé raban Maur lui refusera ce droit dans un<br />

long traité sur l’oblation <strong>de</strong>s enfants 40 .<br />

Ce <strong>de</strong>rnier n’entendait pas appliquer les principes royaux<br />

qui permettaient pourtant aux comtes nommés <strong>de</strong> «diriger<br />

”et administrer le comté en <strong>de</strong>meurant fidèle <strong>à</strong> notre<br />

gou- ”vernement, <strong>à</strong> faire en sorte que les hommes, qu’ils<br />

soient ”Francs, romains, Burgon<strong>de</strong>s ou <strong>de</strong> toute autre<br />

nation, ”<strong>de</strong>meurent gouvernés avec justice selon leurs lois<br />

et leurs ”coutumes et que soient défendus les veuves et les<br />

orphe- ”lins» 41 . Il est certain que beaucoup d’enfants accep-<br />

(39) Annales royales, éd. F. Kurze, (1895).<br />

(40) «De oblatione puerorum».<br />

I. le regnum Francorum<br />

(41) Annales royales, opus cité.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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une dissi<strong>de</strong>nce<br />

24<br />

I. le regnum Francorum<br />

taient la clôture sans avoir la vocation et, imposer coûte<br />

que coûte la validité <strong>de</strong> l’engagement parental, n’était pas<br />

sans nuire <strong>à</strong> la vie monastique. <strong>Gottschalk</strong> parmi bien<br />

d’autres en fut l’incarnation. Certaines situations entraînaient<br />

<strong>de</strong>s désordres moraux : les moines <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong><br />

<strong>Fulda</strong> en avaient averti l’empereur dès 812 dans une supplique<br />

<strong>à</strong> Charlemagne : «Que personne», <strong>de</strong>mandaient-ils,<br />

«ne soit ”fait moine <strong>de</strong> force ou tondu comme clerc, qu’il<br />

soit libre ”ou serf, car tel homme reçu sous la contrainte au<br />

monas- ”tère s’y manifeste par <strong>de</strong>s crimes et <strong>de</strong>s vices» 42 .<br />

l’entrée en religion pour <strong>de</strong>s raisons politiques ou économiques<br />

<strong>de</strong>meure monnaie courante tout au long du IX e<br />

siècle. les ambitions politiques <strong>de</strong>s grands laïcs, conjuguées<br />

aux besoins économiques <strong>de</strong>s monastères, condamnent<br />

<strong>de</strong>s centaines d’enfants <strong>à</strong> la vie religieuse forcée.<br />

Cette pratique <strong>de</strong> l’oblation, <strong>de</strong> la tonsure par calcul familial,<br />

introduisit dans les monastères carolingiens <strong>de</strong>s éléments<br />

<strong>de</strong> troubles et <strong>de</strong> désordres graves. Mais les canons<br />

maintinrent la légitimité <strong>de</strong> ces pratiques et le concile <strong>de</strong><br />

Worms en 868 conclut <strong>à</strong> la prohibition du mariage <strong>de</strong>s<br />

oblats <strong>de</strong>venus pubères, même s’ils ne souhaitaient pas<br />

ratifier le don <strong>de</strong> leurs parents 43 . Cette contrainte cœxistait<br />

avec l’obligation du célibat et la pratique régulière <strong>de</strong> la<br />

continence n’était pas sans susciter <strong>de</strong>s déséquilibres psychologiques<br />

ouvrant la porte aux excès et aux violences.<br />

les religieuses aussi n’étaient pas épargnées par l’exigence<br />

<strong>de</strong>s renoncements. rudolf, rédacteur <strong>de</strong>s annales <strong>de</strong><br />

<strong>Fulda</strong> vers 836, nous apprend que le monastère <strong>de</strong><br />

Bischofsheim, aujourd’hui Frauenberg, et dont lioba 44 ,<br />

parente <strong>de</strong> Boniface, fut abbesse, recevait <strong>de</strong>s oblatures <strong>à</strong><br />

un âge où l’âme ne mesure par toutes les contraintes, ce qui<br />

alimentait le monastère en sujets instables.<br />

(42) In, M.G.H. Epistolae IV, 549.<br />

(43) C. <strong>de</strong> Clercq : in Revue <strong>de</strong> droit canonique,<br />

p.116, VII 2, (1957).<br />

(44) Cf. rudolfe Ful<strong>de</strong>nsi. «Vita Leobae abbatissae<br />

biscofesheimensis» : in M.G.H. S.S. XV,<br />

I, 129.


(45) S.lebecq : Les origines franques, V e /IX e<br />

siècle, p. 175, éd. le Seuil, (1990).<br />

(46) Voir planches a, p.218.<br />

I. le regnum Francorum<br />

(47) Voir planche B, p.219.<br />

(48) Cf. a Schmitt : Führer durch <strong>Fulda</strong>, p. 22,<br />

(1995).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

26<br />

I. le regnum Francorum<br />

L’économie <strong>de</strong> piété<br />

l’eglise franque, soucieuse d’unité dogmatique en son<br />

sein, cherche dans un même mouvement, <strong>à</strong> grandir et <strong>à</strong> se<br />

fortifier spirituellement et matériellement. le développement<br />

ecclésiastique est, pour les évêques et les abbés une<br />

obsession grandissante face, d’un côté, aux usurpations <strong>de</strong>s<br />

laïcs, et <strong>de</strong> l’autre, <strong>à</strong> la fragmentation <strong>de</strong>s biens du clergé<br />

hérités <strong>de</strong> la pério<strong>de</strong> mérovingienne et son exacerbation<br />

<strong>de</strong>s régionalismes 45 .<br />

le jeune oblat <strong>Gottschalk</strong> rejoignit <strong>Fulda</strong> en 815 sous<br />

ratgar, troisième abbé <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>. Ce lieu était marqué par<br />

l’imposant chantier entrepris par cet abbé : la construction<br />

<strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> basilique 46 .<br />

le grand réformateur <strong>de</strong> l’église franque, Boniface, avait<br />

fortement marqué <strong>de</strong> son empreinte les pays germaniques<br />

et plus particulièrement la Hesse profon<strong>de</strong>. Il s’installa<br />

avec le soutien actif <strong>de</strong> son ami Sturm en 745 sur les hauteurs<br />

du Frauenberg et y éleva les premiers bâtiments<br />

conventuels <strong>de</strong> sa jeune communauté bénédictine. Ces<br />

proto-aménagements s’avérèrent rapi<strong>de</strong>ment insuffisants<br />

et dès 791, Baugulf, second abbé (779-802), entreprit la<br />

construction d’une basilique, près <strong>de</strong> la rivière <strong>Fulda</strong>.<br />

l’abbé ratgar (802-817) engagea sur l’emplacement d’une<br />

ancienne «villa rustica» <strong>de</strong>s travaux gigantesques durant<br />

plus <strong>de</strong> quinze ans. eigil quatrième abbé (818-822) les<br />

acheva. l’architecte rachulf construisit les cryptes ouest et<br />

est. elles furent consacrées sous l’évêque Heistulf <strong>de</strong><br />

Mayence en 819. C’est également durant cette pério<strong>de</strong><br />

(820-822) que fut bâtie la chapelle Saint-Michel 47 dans le<br />

cimetière <strong>de</strong>s moines au nord du cloître 48 . C’est donc dans<br />

cette atmosphère <strong>de</strong> grands travaux que se passa pour l’essentiel<br />

l’éducation du jeune <strong>Gottschalk</strong>. Cette affirmation<br />

<strong>de</strong> puissance découlait <strong>de</strong> l’accord pris entre l’anglo-saxon<br />

(49) on peut traduire littéralement : «revenu affecté <strong>à</strong> la maison <strong>de</strong> l’évêque».


Boniface et la papauté pour rétablir l’autorité ecclésiastique<br />

<strong>de</strong> la Germanie et y restaurer la hiérarchie et la loi <strong>de</strong><br />

dieu, corrompues aux temps antérieurs.<br />

C’est seulement <strong>à</strong> partir du concile <strong>de</strong>s estinnes (744), en<br />

Hainaut, qu’il fut décidé que les terres sécularisées resteraient<br />

propriétés éminentes <strong>de</strong>s églises dépouillées, et qu’il<br />

serait versé un cens symbolique par le bénéficiaire. Ces<br />

terres étaient alors qualifiées « precariae uerbo regis »<br />

(précaires au nom du roi). l’application <strong>de</strong> ces nouvelles<br />

règles ne se fit pas sans difficultés !<br />

le Frauenberg, initialement dénommé Bischofberg (le<br />

mont <strong>de</strong> l’évêque), puis, durant quelques années,<br />

Bischofheim (la mense domaniale épiscopale) 49 , révèle les<br />

logiques économiques successives qui se mettaient en<br />

place. Menses conventuelles, menses épiscopales, menses<br />

abbatiales seront autant d’objets <strong>de</strong> pouvoirs, <strong>de</strong> richesses<br />

et donc <strong>de</strong> discor<strong>de</strong>s que la puissance publique aura <strong>à</strong> arbitrer.<br />

Plus diffus, moins visible est le développement <strong>de</strong>s<br />

églises rurales qui accompagne la christianisation <strong>de</strong>s cam-<br />

(50) Kämmerzell, Gläserzell, Maberzell, Zell,<br />

Bronzell, eichenzell, e<strong>de</strong>lzell, Pilgerzell et<br />

Künzell.<br />

(51) l’analyse toponymique fait apparaître<br />

clairement les phénomènes syncrétiques qui<br />

présidèrent <strong>à</strong> l’élaboration <strong>de</strong>s noms <strong>de</strong> lieux.<br />

e<strong>de</strong>lzell (l’ermitage noble). Pilgerzell est cité<br />

dès 743 sous l’appellation <strong>de</strong> Biligrimecella<br />

(Billigrim est un nom <strong>de</strong> personne qui se compose<br />

du tu<strong>de</strong>sque «Hil» signifiant hache et<br />

«Grima» signifiant casque. Keulos apparaît<br />

dans une donation carolingienne du IX e siècle<br />

sous l’appellation «Cadolah». au IX e siècle,<br />

Künzell a un moine dénommé «Chindo», en<br />

1160 l’ermitage <strong>de</strong>vient «Kindicello» (l’ermitage<br />

<strong>de</strong> «Kindi»). niezig apparaît sous la<br />

forme «niuwi-Gizozi» dans une donation<br />

carolingienne du XIII e siècle, «nusazi» ou<br />

«neue Siedlung» (nouvel habitat).<br />

eichenzell s’appelait initialement «eichencella»<br />

(l’ermitage <strong>de</strong>s chênes) cette première<br />

fixation apparaît sous l’abbé Hadamar (13 e<br />

abbé <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>). Bronzell est cité par l’abbé<br />

I. le regnum Francorum<br />

eigil (818-822) dans sa «Vita sanct Sturmi»<br />

sous la forme «proxima cella» (l’ermitage le<br />

plus proche), dans la «Vita Lioba», on le<br />

retrouve sous l’appellation : «vicina cella»<br />

(l’ermitage voisin), en 852 dans un diplôme<br />

d’Hatto on peut lire : «premestescella» (l’ermitage<br />

<strong>de</strong> <strong>de</strong>vant). Johannesberg apparaît dans<br />

une donation <strong>de</strong> 743 puis en 811 au moment <strong>de</strong><br />

l’érection d’une église par le troisième abbé <strong>de</strong><br />

<strong>Fulda</strong>, ratgar (802-817). Maberzell apparaît<br />

en 1010 sous la forme «Magebrakcella»,<br />

«Magenberath» était moine et son nom signifie<br />

: le conseiller décharné.<br />

Gläzerzell, sous Hadamar, est appelé «glezercella»<br />

(l’ermitage <strong>de</strong>s souffleurs <strong>de</strong> verre).<br />

Kämmerzell (le parlement <strong>de</strong> l’ermitage) cf. J.<br />

reinhart : in <strong>Fulda</strong> von allen Seiten, <strong>Fulda</strong>,<br />

(1994). Voir carte a, p. 246.<br />

(52) Promulgation faite lors <strong>de</strong>s syno<strong>de</strong>s<br />

d’In<strong>de</strong>n et aix la Chapelle en 816 et 817.<br />

(53) a. dierkens : a propos <strong>de</strong> l’«Indiculus<br />

superstitionum et paganiarum» (mars 744)<br />

éd. H. Hasquin, Bruxelles, (1984).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

28<br />

I. le regnum Francorum<br />

pagnes. les populations trouvent leur compte dans cette<br />

proximité, mais c’est l<strong>à</strong> encore une segmentation <strong>de</strong>s ressources.<br />

raban Maur <strong>de</strong> Mayence, Hincmar <strong>de</strong> reims par<br />

<strong>de</strong>s efforts inlassables soutiendront le caractère sacré et<br />

l’unicité <strong>de</strong>s biens ecclésiastiques. Permettre <strong>à</strong> un oblat <strong>de</strong><br />

recouvrer sa liberté c’était évi<strong>de</strong>mment, <strong>à</strong> leurs yeux,<br />

prendre le risque <strong>de</strong> se voir repris les revenus et les biens<br />

offerts par les parents pour l’éducation du moinillon et,<br />

ainsi, d’appauvrir la mense conventuelle. les pesanteurs<br />

culturelles en Hesse <strong>de</strong>meuraient fortes et nombreuses.<br />

l’atomisation <strong>de</strong>s communautés religieuses y perdurait<br />

malgré la réforme bonifacienne. l’analyse toponymique <strong>de</strong><br />

<strong>Fulda</strong> nous éclaire sur l’entreprise <strong>de</strong> concentration effectuée<br />

par l’abbaye. Sur une aire relativement réduite, l’onomastique<br />

locale atteste douze communautés. on note neuf<br />

lieux-dits avec le suffixe «Zell» provenant du latin «cella»<br />

(ermitage) se trouvent dans un rayon maximum <strong>de</strong> huit<br />

kilomètres autour <strong>de</strong> l’abbaye 50 . a ces ermitages s’ajoutent<br />

d’autres lieux religieux Keulos, niezig, Johannesberg et<br />

Petersberg 51 . l’immersion du jeune <strong>Gottschalk</strong> dans cet<br />

environnement où l’hétérogénéité religieuse n’avait pas<br />

disparu, où la réforme <strong>de</strong> Benoît d’aniane 52 n’avait pu porter<br />

tous ses fruits, où chaque «cella» prodiguait son enseignement<br />

et sa propre lecture <strong>de</strong>s évangiles, ne pouvait<br />

qu’imprégner le jeune oblat <strong>de</strong> ces diversités. le paganisme<br />

n’était pas éradiqué. l’«Indicullus superstitionum et paganiarum»<br />

connu par le concile <strong>de</strong> Soissons en 744 53 dénonçait<br />

déj<strong>à</strong> les résistances populaires au christianisme ; y étaient<br />

mentionnés les ablutions nocturnes du solstice <strong>de</strong> juin, les<br />

hurlements collectifs lors <strong>de</strong>s éclipses <strong>de</strong> lune, les pratiques<br />

<strong>de</strong> divination comme la fabrication d’idoles anthropo-<br />

(54) F. Baugard : in Le christianisme en occi<strong>de</strong>nt<br />

du début du VII e au milieu du XI e siècle,<br />

textes et documents, Paris, (1997).<br />

(55) agobard : P.l, CIV, c.147.<br />

(56) r. MacMullen : in Christianisme et paganisme<br />

du IV e au VIII e siècle, éd. les Belles<br />

lettres, (1998).


morphes, le port d’amulettes et les cultes panthéïstes.<br />

a l’époque <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, le chrétien instruit et le paysan<br />

illettré partageaient-ils les mêmes croyances <strong>de</strong> base sur le<br />

mon<strong>de</strong> où ils vivaient ?<br />

Boniface dès 742 condamnait les para<strong>de</strong>s annuelles, les<br />

tables chargées <strong>de</strong> victuailles, les phylactères aux formules<br />

d’exorcismes vendus comme talismans autour <strong>de</strong>s églises.<br />

Un contemporain <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, l’évêque agobard <strong>de</strong><br />

lyon († 840), rédigea un traité intitulé : « Livre contre<br />

l’obscure croyance du vulgaire <strong>à</strong> propos <strong>de</strong> la grêle et <strong>de</strong>s<br />

coups <strong>de</strong> tonnerre ».<br />

Cet érudit commence ainsi son ouvrage : «dans ces<br />

régions ”presque tous les hommes, nobles et non nobles,<br />

gens <strong>de</strong> la ”ville et <strong>de</strong> la campagne, vieux et jeunes, pensent<br />

que la ”grêle et le tonnerre peuvent être déclenchés <strong>à</strong> volonté».<br />

agobard dénonce les «tempestorii» ou faiseurs <strong>de</strong> mauvais<br />

temps, venant d’un pays céleste appelé nogania et naviguant<br />

sur les navires célestes. «C’est pure folie et parfaite-”ment<br />

stupi<strong>de</strong>», conclut l’évêque. et la plus gran<strong>de</strong> stupidité<br />

<strong>à</strong> laquelle il lui fut donné d’assister sera l’exhibition<br />

<strong>de</strong> quatre personnes ligotées et prisonnières qui, soi-disant<br />

étaient tombées par <strong>de</strong>ssus bord 54 . agobard cite également<br />

une explication aussi sotte concernant les maladies du<br />

bétail et dans une argumentation <strong>de</strong> plusieurs pages, avec<br />

force références <strong>à</strong> l’écriture, explique que : «la vérité vient<br />

(57) «Il y a d’autres maux pernicieux qui sont<br />

assurément <strong>de</strong>s restes <strong>de</strong> paganismes, tels que<br />

sont la magie, l’astrologie judiciaire, le sortilège,<br />

le maléfique ou l’empoisonnement, la divination,<br />

les charmes et les conjectures qui se<br />

tirent <strong>de</strong>s songes. Ces maux doivent être très<br />

sévèrement punis selon la loi <strong>de</strong> dieu. Car il<br />

est hors <strong>de</strong> doute, et plusieurs en ont connaissance,<br />

qu’il y a <strong>de</strong>s gens qui, par les prestiges<br />

et les illusions du démon, gâtent tellement les<br />

esprits <strong>de</strong>s hommes par les philtres <strong>de</strong>s<br />

vian<strong>de</strong>s et <strong>de</strong>s phylactères, qu’ils semblent les<br />

I. le regnum Francorum<br />

rendre stupi<strong>de</strong>s et insensibles aux maux qui les<br />

font souffrir. on dit aussi qu’ils peuvent troubler<br />

l’air par leurs maléfices, envoyer la grêle, prévoir<br />

les choses <strong>à</strong> venir, ôter aux uns leurs fruits<br />

et leur lait pour les donner aux autres et faire une<br />

infinité <strong>de</strong> choses semblables. Si l’on découvre<br />

quelques-uns <strong>de</strong> ces gens-l<strong>à</strong>, hommes ou<br />

femmes, on doit les punir d’autant plus rigoureusement,<br />

qu’ils ont la malice et la témérité <strong>de</strong><br />

ne point appréhen<strong>de</strong>r <strong>de</strong> servir publiquement le<br />

diable» : in Capitularia Regnum Francorum,<br />

t. II, p. 44/45.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

30<br />

I. le regnum Francorum<br />

<strong>de</strong> dieu et <strong>de</strong> son pouvoir sur les choses du temps, comme<br />

la grêle, le vent et la pluie» 55 . les divinations et autres<br />

manifestations <strong>de</strong> paganisme entraînaient <strong>de</strong>s petits commerces<br />

et les paiements, pour la plupart en nature, étaient<br />

autant d’offran<strong>de</strong>s qui n’arrivaient pas au clergé 56 . le<br />

contraste entre l’érudit agobard et les mœurs qu’il note,<br />

souligne la superstition omniprésente <strong>de</strong> cette époque.<br />

reginon <strong>de</strong> Prüm († 915) rappelle que les archives ecclésiastiques<br />

du IX e siècle mentionnent une multitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

femmes qui, durant <strong>de</strong>s états extatiques, avaient traversé le<br />

ciel avec une maîtresse <strong>à</strong> leur tête, appelée diane.<br />

Survivance du culte <strong>de</strong> diane ? ou similitu<strong>de</strong> se réduisant<br />

au genre féminin ? Ces adoratrices avaient d’étranges<br />

accouplements avec le diable. les évêques <strong>de</strong> plus en plus<br />

outrés organisent, au concile <strong>de</strong> Paris en 829, la riposte aux<br />

croyances <strong>de</strong> sorcellerie tant répandues et sollicitent l’intervention<br />

<strong>de</strong>s pouvoirs publics dans un article 57 . Ce n’est<br />

qu’<strong>à</strong> partir du XI e siècle que leurs persécutions se firent <strong>de</strong><br />

plus en plus fortes et méthodiques. Ce sera la chasse aux<br />

sorcières. Parce qu’il fallait remédier aux dures réalités <strong>de</strong><br />

la vie et que l’enseignement <strong>de</strong>s chefs <strong>de</strong> l’église ne suffisait<br />

pas <strong>à</strong> répondre aux exigences du temps, il y eut aussi<br />

beaucoup d’emprunts, ou plus exactement la continuation<br />

d’usages anciens qui ne suivent qu’une piste, d’occurrence<br />

balisée, <strong>de</strong> Pline, jusqu’<strong>à</strong> l’époque carolingienne. le<br />

triomphe <strong>de</strong> l’église ne sera pas celui <strong>de</strong> l’oblitération,<br />

mais <strong>de</strong> l’intégration <strong>de</strong> plus en plus large et <strong>de</strong> la récupération<br />

conduisant <strong>à</strong> l’assimilation <strong>de</strong> certaines pratiques<br />

populaires. l’enseignement reçu par <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> <strong>Fulda</strong><br />

était bien entendu fort éloigné <strong>de</strong> ces pratiques qui s’appuyaient<br />

avant tout sur <strong>de</strong>s rituels, plutôt que sur <strong>de</strong>s<br />

(58) Cf. dom Cyril lambot : in Œuvres théologiques<br />

et grammaticales <strong>de</strong> Go<strong>de</strong>scalc<br />

d’Orbais, p. 74, louvain, (1945).<br />

(59) M. Parayre – Küntzel : in La vie quoti-<br />

dienne <strong>de</strong>s paysans d’Alsace, p. 79,<br />

éd. Istra, Strasbourg, (1975).<br />

(60) cf. othlon <strong>de</strong> Saint-emmeran <strong>de</strong><br />

Salzburg : in Biographie <strong>de</strong> saint Wolfgang.


I. le regnum Francorum<br />

croyances. Mais ces empreintes <strong>de</strong> conduites religieuses<br />

anciennes réapparaîtront lorsque <strong>Gottschalk</strong>, dans sa<br />

controverse avec l’archevêque <strong>de</strong> reims, proposera <strong>de</strong><br />

subir le jugement <strong>de</strong> dieu 58 . les habitu<strong>de</strong>s mentales formées<br />

aux VIII e et IX e siècles seraient bien moins gênantes,<br />

si ces attitu<strong>de</strong>s religieuses avaient une origine clairement<br />

païenne. le problème <strong>de</strong> leur syncrétisme rési<strong>de</strong> dans<br />

l’obscurité <strong>de</strong>s siècles précé<strong>de</strong>nts et leur pauvreté en<br />

témoignages.<br />

l’aspect négatif <strong>de</strong> cette piété populaire se caractérise par<br />

sa superficialité et la tendance <strong>à</strong> la superstition, conséquence<br />

d’un état d’esprit très matérialiste 59 . C’est pourtant<br />

<strong>à</strong> l’ombre <strong>de</strong>s couvents que s’épanouira la paix <strong>de</strong>s campagnes<br />

et avec elle une floraison <strong>de</strong> saints protecteurs du<br />

bétail, <strong>de</strong>s champs et du vignoble. au IX e siècle, autour <strong>de</strong><br />

<strong>Fulda</strong>, l’évangélisation était loin d’être achevée.<br />

l’enseignement <strong>de</strong> cette puissante abbaye produira <strong>de</strong> bons<br />

précepteurs, mais seules les riches familles pourront se les<br />

payer. l’école claustrale vit ar<strong>de</strong>mment, mais elle ne<br />

touche pas tous les chrétiens 60 .<br />

Ceux qui ont échappé <strong>à</strong> la servitu<strong>de</strong>, les «colliberti» en<br />

Gaule, les «lidi» en Saxe, les «laten» en Bavière et les<br />

«lazzi» en Franconie, ces «donats» <strong>de</strong> famille paysanne<br />

affranchie <strong>de</strong>viendront <strong>de</strong>s domestiques et les fils <strong>de</strong> clans<br />

feront les moines. les évêques ne seront pas ainsi les seuls<br />

<strong>à</strong> constituer un grand corps social nouveau. le clergé régulier<br />

les relaiera dans un même combat, pour former un<br />

groupe original, ni rural, ni urbain et qui, malgré <strong>de</strong>s recrutements<br />

hétéroclites, une vie recluse et une opposition <strong>à</strong><br />

tout accommo<strong>de</strong>ment social, acquerra cependant une<br />

excellente réputation. les grands domaines ecclésiastiques,<br />

fondés loin <strong>de</strong>s villes, comme <strong>Fulda</strong> ou orbais<br />

firent naître <strong>de</strong> nouveaux centres ou s’entassa une clientèle<br />

i<strong>de</strong>ntique <strong>à</strong> celle <strong>de</strong>s évêques. Sous raban Maur, l’école<br />

claustrale compta jusqu’<strong>à</strong> trois cents moines. les bénéfices,<br />

dons que les familles offraient <strong>à</strong> l’abbaye, pesaient<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

32<br />

I. le regnum Francorum<br />

d’un poids économique <strong>de</strong> plus en plus élevé et présidaient<br />

aux <strong>de</strong>stinées <strong>de</strong> l’institution.<br />

L’économie domaniale<br />

obtenir le privilège <strong>de</strong> l’exemption par le pape anima bon<br />

nombre d’abbés. Fondée le 12 mars 744 par Sturmius,<br />

l’abbaye <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> obtint du pape Zacharie dès 751 un privilège<br />

le soustrayant <strong>à</strong> la juridiction <strong>de</strong>s évêques <strong>de</strong><br />

Franconie. C’est ainsi que <strong>Fulda</strong> gagna très tôt son indépendance<br />

spirituelle politique et économique.<br />

Cette abbaye, théoriquement éloignée du mon<strong>de</strong> séculier,<br />

fut en réalité fort impliquée dans les affaires du temps. le<br />

prieur du monastère <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>, en raison <strong>de</strong>s vastes<br />

domaines qu’il possédait et par les privilèges accordés par<br />

le pape et l’empereur, dut remplir, <strong>à</strong> côté <strong>de</strong> ses fonctions<br />

spirituelles, celles d’un seigneur laïc. Grâce aux donations<br />

qu’elle reçut, l’abbaye affirma rapi<strong>de</strong>ment, dans le<br />

«regnum Francorum», sa position politique auprès <strong>de</strong>s<br />

villes et même <strong>de</strong>s régions environnantes. Ses propriétés,<br />

privilèges et droits constituèrent le champ <strong>de</strong> pouvoirs <strong>de</strong>s<br />

abbés qui se succédèrent.<br />

la définition du domaine <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> ne constitue pas une<br />

constante, mais plutôt un élément changeant dans la vie <strong>de</strong><br />

la communauté. Il <strong>de</strong>vait aller dans le sens <strong>de</strong> la croissance<br />

et tout évènement tendant <strong>à</strong> minorer les ressources ne<br />

pouvait être admis. l’acceptation, par l’abbé eigil, <strong>de</strong> laisser<br />

<strong>Gottschalk</strong> reprendre sa liberté, impliquait «<strong>de</strong> facto»<br />

que les moyens offerts par ses parents, pour l’éducation <strong>de</strong><br />

leur fils, risquaient d’être perdus pour l’abbaye. raban<br />

Maur, en se battant pour la réintégration du jeune moine au<br />

sein <strong>de</strong> la communauté, ne gérait-il pas aussi, au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong> <strong>de</strong>s<br />

considérations religieuses, en bon père <strong>de</strong> famille, l’économie<br />

domaniale ?<br />

(61) C’est durant l’abbatiat d’eigil que fut versé l’essentiel du financement pour l’éducation du<br />

jeune <strong>Gottschalk</strong>.


I. le regnum Francorum<br />

l’attitu<strong>de</strong> d’eigil 61 fut approuvée en 829 par le syno<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Mayence. Cette acceptation par le clergé séculier illustre combien<br />

la compétition était gran<strong>de</strong> avec le clergé régulier, les<br />

aspects dogmatiques n’étant jamais déconnectés <strong>de</strong>s considérations<br />

économiques. <strong>de</strong> nombreux syno<strong>de</strong>s carolingiens,<br />

dans leur capitulaires, abor<strong>de</strong>ront les problèmes <strong>de</strong> la gestion<br />

et du développement du foncier. au fur et <strong>à</strong> mesure <strong>de</strong> leurs<br />

assemblées, ils élaboreront un «corpus» <strong>de</strong> droits héréditaires<br />

tendant <strong>à</strong> réguler toutes les sources <strong>de</strong> revenu, réglementant<br />

ainsi dans le détail la vie matérielle <strong>de</strong>s grands domaines<br />

ecclésiastiques et par effet d’entraînement la propriété domaniale<br />

<strong>de</strong>s nobles laïcs. Il convient alors <strong>de</strong> bien discerner <strong>à</strong> travers<br />

les décisions d’ordre liturgique, théologique ou canonique,<br />

celles concernant avant tout l’économie générale <strong>de</strong><br />

l’eglise carolingienne. la rente <strong>de</strong> l’oblation s’inscrit également<br />

dans une logique d’enrichissement ; la mettre en péril,<br />

c’était porter atteinte au développement domanial. en théorisant<br />

sur le contrôle <strong>de</strong> l’oblation, raban Maur cherche <strong>à</strong> verrouiller<br />

définitivement les possibilités d’évasion monétaire<br />

que les gran<strong>de</strong>s familles apportaient aux écoles claustrales.<br />

la volonté religieuse <strong>de</strong> maintenir les revenus domaniaux<br />

ne s’arrêtait nullement <strong>de</strong>vant l’accaparement <strong>de</strong>s plus<br />

grands. Il en est pour preuve le diplôme <strong>de</strong> Charles le<br />

Chauve restituant, en 845, <strong>à</strong> l’archevêque <strong>de</strong> reims,<br />

Hincmar, les domaines d’epernay, d’œuilly et Cormicy<br />

qui provenaient du testament <strong>de</strong> Saint-rémi, après consultation<br />

<strong>de</strong> ses fidèles tant laïcs qu’ecclésiastiques (… inspecto<br />

coram ceto fi<strong>de</strong>lium nostrorum tam eclesiasti quam<br />

laïcalis ordinis testamento sancti remigii atque Hincmario<br />

archiepiscopo cum omni integritate reddimus…) l’étu<strong>de</strong><br />

du polyptyque <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong> Saint-rémi-<strong>de</strong>-reims, dont<br />

Hincmar fut aussi l’auteur, illustre combien âpre était la<br />

défense <strong>de</strong>s revenus religieux.<br />

Foi et allégeance<br />

<strong>de</strong>puis Charlemagne, l’ensemble <strong>de</strong>s sujets libres sont<br />

contraints <strong>de</strong> servir loyalement leur souverain. après la tra-<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

34<br />

I. le regnum Francorum<br />

hison <strong>de</strong> son fils Pépin en 792, Charlemagne déci<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

requérir <strong>de</strong> tous les hommes libres un serment <strong>de</strong> fidélité.<br />

Parmi les quatre articles du «Capitulare missorum» <strong>de</strong> 786<br />

<strong>à</strong> 792, il en est <strong>de</strong>ux qui concernent directement <strong>Gottschalk</strong><br />

et expliquent, nous le constaterons ultérieurement, le comportement<br />

<strong>de</strong> raban Maur <strong>à</strong> son égard.<br />

article 3 :<br />

«les clercs qui sous le nom <strong>de</strong> moine ne mènent<br />

pas ”pleinement la vie monastique, l<strong>à</strong> ou l’on observe<br />

selon ”«l’ordo», la règle <strong>de</strong> Saint-Benoît, tous seront<br />

conduits par ”les abbés <strong>à</strong> notre maître et promettront en parole<br />

et en vérité ».<br />

Par cet article, Charlemagne légifère pour les nombreux<br />

moines marginaux qui n’appartiennent plus <strong>à</strong> l’«ordo clericus».<br />

Il ne requiert <strong>de</strong> ces <strong>de</strong>rniers qu’une promesse sincère,<br />

le serment <strong>de</strong>s abbés lui suffisant <strong>à</strong> garantir la conduite<br />

<strong>de</strong> leurs subordonnés.<br />

article 4 :<br />

«… Par les avoués et les viguiés, les centeniers et<br />

les ”prêtres soumis au cens ; par tous les membres du<br />

peuple, ”<strong>de</strong>puis l’âge <strong>de</strong> douze ans jusqu’<strong>à</strong> la vieillesse qui<br />

vont ”aux plaids et peuvent exécuter les décisions <strong>de</strong> l’autorité<br />

”et la respecter, les paysans, les hommes <strong>de</strong>s évêques,<br />

<strong>de</strong>s ”abbesses et <strong>de</strong>s comtes et enfin les hommes <strong>de</strong>s<br />

autres ; ”ceux qui relèvent <strong>de</strong>s fiscs, les colons ou les<br />

dépendants ”<strong>de</strong>s églises, les esclaves honorés <strong>de</strong> bénéfices et<br />

remplissant ”<strong>de</strong>s offices ou ceux qui jouissent avec leur<br />

maître d’un ”service vassalique leur permettant d’avoir<br />

chevaux, ”armes, boucliers, lances et épées courtes ou<br />

longues ; que ”tous ces hommes jurent…».<br />

Charlemagne exige le serment <strong>de</strong> fidélité <strong>de</strong> tous en suivant<br />

l’ordre hiérarchique et consacre la majorité <strong>à</strong> douze ans.<br />

(62) M.G.H. Cap.I, capitulare missurum generale<br />

n°33.<br />

(63) Cf. Cap. Thionville, II, 805, c.11. «et hoc<br />

omnibus annuntiatum fiat, quid periuriumant<br />

falsum testimonium noceat».


<strong>Gottschalk</strong>, jeune oblat, <strong>de</strong>vait, comme tous ceux qui étaient<br />

instruits <strong>de</strong> cet article du «Capitulare missorum», se soumettre.<br />

en 802 l’empereur récidive et, dans le grand capitulaire<br />

<strong>de</strong>s «missi», insiste dans son : «De fi<strong>de</strong>litate promittenda<br />

domno imperatore» 62 .<br />

«au sujet <strong>de</strong> la fidélité promise au seigneur empereur<br />

il ”convient que tout homme, dans tout le royaume, qu’il<br />

soit ”ecclésiastique ou laïc, chacun selon sa vocation et<br />

sa ”mission propre, qui a promis fidélité pour luimême<br />

”envers le roi, fasse aujourd’hui promesse, au nom<br />

<strong>de</strong> ”l’empereur. et que ceux aujourd’hui encore qui n’ont<br />

pas ”promis cette fidélité, la fassent <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> douze<br />

ans ”inclus… mais aussi que tous sachent qu’ils auront<br />

<strong>à</strong> ”rendre compte sur eux-mêmes <strong>de</strong> ce serment».<br />

le contenu du serment <strong>de</strong> fidélité obligeait celui qui jurait,<br />

quelle que fût sa position sociale, <strong>à</strong> s’abstenir <strong>de</strong> causer un<br />

préjudice au bénéficiaire du serment.<br />

C’est l<strong>à</strong> que l’engagement du père <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> prend<br />

toute son importance. a ce même titre, les abbés étaient<br />

comptables <strong>de</strong> tous leurs hommes. la fidélité ne suppose<br />

donc pas un service précis, car l’empereur lui conférait<br />

avant tout une dimension positive. Ses fils Pépin et<br />

louis auront beaucoup <strong>de</strong> mal <strong>à</strong> faire respecter la<br />

conception franque traditionnelle du serment. Quant <strong>à</strong><br />

ses petits-fils lothaire, Pépin, louis et Charles, leurs<br />

autorités seront encore plus insuffisantes malgré les<br />

sanctions encourues comme l’ablation <strong>de</strong> la main 63 . Cet<br />

(64) Florilegium casinense, IV, t. IV, abbaye<br />

du Mont Cassin, (1880).<br />

(65) e. Magnou-nortier : in Foi et fidélité,<br />

p. 48, éd. Université <strong>de</strong> Toulouse le Mirail,<br />

(1976).<br />

(66) archevêque <strong>de</strong> lyon († 836).<br />

(67) evêque d’orléans († 818).<br />

(68) Comte saxon avant 814, abbé <strong>de</strong> Corbie<br />

(† 836).<br />

(69) archevêque <strong>de</strong> reims déposé en 841<br />

(† 851).<br />

I. le regnum Francorum<br />

(70) nous retrouverons ces religieux aux côtés<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> au cours <strong>de</strong> ses affrontements<br />

avec Hincmar et Charles le Chauve.<br />

(71) K. Vielhaber : in <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>r Sachse,<br />

p. 15, Bonn (1956).<br />

«ein freier Mann dürfte nicht seinen Sohn<br />

zum Sklaven machen, auch nicht zum « servitium<br />

<strong>de</strong>i» Mönchslebens zwingen» (un homme<br />

libre ne doit pas faire <strong>de</strong> son fils un esclave ni<br />

le contraindre au service <strong>de</strong> dieu dans la vie<br />

monastique).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

36<br />

I. le regnum Francorum<br />

engagement public fut repris au plan religieux. Paul<br />

diacre († 797), dans son commentaire <strong>de</strong> la règle <strong>de</strong><br />

Saint-Benoît, écrivait <strong>à</strong> propos <strong>de</strong> l’esprit <strong>de</strong> l’obéissance<br />

monastique : «Si le moine sert dieu <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> sa pro-<br />

”fession <strong>de</strong> foi qu’il a promise, c’est-<strong>à</strong>-dire l’obéissance,<br />

”il agit en vassal. S’il sert dieu pour recevoir l’héritage<br />

”<strong>de</strong> la patrie céleste, il agit en mercenaire. S’il le<br />

fait ”uniquement pour dieu et pour recevoir sa grâce, il<br />

se ”comporte en vrai fils» 64 .<br />

a la différence <strong>de</strong> la simple bonne foi, la foi vassalique<br />

crée la dépendance, comme la profession <strong>de</strong> foi monastique<br />

pour le moine, modifie le statut <strong>de</strong> la personne 65 .<br />

la faillite <strong>de</strong> la fidélité publique et sacerdotale n’eut pas<br />

pour seul acteur <strong>Gottschalk</strong> d’orbais. agobard 66 , Jonas 67 ,<br />

Wala 68 , ebon 69 opposèrent aussi une résistance obstinée et<br />

contestèrent l’autorité suprême. Ce premier affrontement<br />

dans l’empire, d’une partie du clergé, débouchera en 833<br />

sur l’excommunication et la déposition <strong>de</strong> louis le Pieux<br />

alias le Bon ou le débonnaire.<br />

<strong>de</strong>puis la naissance <strong>de</strong> Charles en 823, lothaire, fils aîné<br />

<strong>de</strong> louis, affiche ses dissensions. Sous prétexte <strong>de</strong> vouloir<br />

remédier aux maux dont souffre l’eglise, le clan formé par<br />

les dignitaires, cités ci-<strong>de</strong>ssus 70 , dénonce en fait l’insoumission<br />

<strong>à</strong> la tradition <strong>de</strong> l’église dont était coupable l’empereur<br />

louis. Ces dignitaires réaffirmaient la conditionnalité<br />

du pouvoir royal dont l’église disposait pour eux, <strong>de</strong><br />

façon souveraine. a la même pério<strong>de</strong>, <strong>Gottschalk</strong> portait<br />

plainte contre son abbé raban Maur et, au syno<strong>de</strong> convoqué<br />

<strong>à</strong> cause <strong>de</strong> lui en 829 <strong>à</strong> Mayence sous l’autorité <strong>de</strong> l’archevêque<br />

otgar, il fut délié <strong>de</strong>s vœux que ses parents<br />

avaient fait pour lui, arguant que le droit coutumier <strong>de</strong>s<br />

Saxons n’avait pas été respecté 71 . dès 830, l’historien<br />

(72) Hincmar <strong>de</strong> reims : in De ordine palatii. (73) In Le Miroir <strong>de</strong>s Princes (dédié en 831 <strong>à</strong><br />

Pépin 1 er d’aquitaine).


nithard, petit-fils <strong>de</strong> Charlemagne, constatait que l’état <strong>de</strong><br />

l’empire s’aggravait <strong>de</strong> jour en jour. a la mort <strong>de</strong> louis le<br />

Pieux en 840, il semble que rien ne puisse plus s’opposer<br />

aux affrontements, aux compétitions brutales entre les<br />

grands suivis <strong>de</strong> leurs clientèles.<br />

les règles <strong>de</strong> droit familial, la cohésion lignagère, et le<br />

culte <strong>de</strong> la dédition <strong>de</strong> soi, restaient en vigueur dans tout<br />

l’espace franc.<br />

a ces difficultés déj<strong>à</strong> sérieuses, nées <strong>de</strong>s crises doctrinales,<br />

se développaient d’autres forces dissolvantes : les convoitises<br />

externes <strong>à</strong> l’empire.<br />

Le ministère royal<br />

le rite du sacre créé entre l’église et le roi forme un lien particulier<br />

et fait du monarque, par ce huitième sacrement, un<br />

personnage <strong>à</strong> part, voué, comme les religieux eux-mêmes, <strong>à</strong><br />

un ministère particulier. Sous louis le Pieux, la tentation<br />

grandit <strong>de</strong> subordonner la légitimité royale aux critères élaborés<br />

par le clergé afin <strong>de</strong> contrôler le pouvoir royal.<br />

Cependant l’origine divine <strong>de</strong> la royauté ne fait aucun doute<br />

pour personne. le sacre manifeste le choix <strong>de</strong> dieu.<br />

«l’onction très sainte», écrit Hincmar, «se répand sur la<br />

tête du roi, <strong>de</strong>scend dans son intérieur et pénètre le fond <strong>de</strong><br />

son coeur» 72 .<br />

ainsi le roi possè<strong>de</strong> une vertu surnaturelle. le roi élu <strong>de</strong><br />

dieu est garant <strong>de</strong> la fécondité <strong>de</strong> la terre, <strong>de</strong> celle <strong>de</strong>s animaux<br />

domestiques et <strong>de</strong> la population. Thieuthil<strong>de</strong>, abbesse<br />

<strong>de</strong> remiremont ne fait-elle pas réciter <strong>à</strong> ses sœurs, mille<br />

fois le psautier et célébrer huit cents messes pour la santé<br />

du roi, la défaite <strong>de</strong> ses ennemis et son salut éternel.<br />

Jonas d’orléans, dans son : «De institutione regia», affirme<br />

l’origine divine du pouvoir royal. au roi voulu par<br />

dieu, chacun doit obéissance et soumission, pour autant<br />

(74) In Capitularia Regnum Francorum, II, p. 427 – 441, (1893).<br />

I. le regnum Francorum<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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I. le regnum Francorum<br />

qu’il exerce comme il convient sa mission 73 . le propre du<br />

ministère royal est <strong>de</strong> gouverner le peuple <strong>de</strong> dieu. le roi<br />

doit être le défenseur <strong>de</strong>s églises et <strong>de</strong>s serviteurs <strong>de</strong> dieu.<br />

<strong>Gottschalk</strong> n’aura donc rien <strong>à</strong> attendre <strong>de</strong> la clémence <strong>de</strong><br />

Charles le Chauve, au même titre qu’il ne reçut aucun soutien<br />

<strong>de</strong> louis le Germanique lors <strong>de</strong> son premier procès.<br />

les agents du roi doivent ai<strong>de</strong>r les évêques dans leur tâche<br />

pastorale et, associés <strong>à</strong> l’autorité royale, ils gui<strong>de</strong>nt le<br />

peuple vers le salut. Mais ce n’est pas pour autant que le<br />

ministère épiscopal <strong>de</strong>meure entre les mains du roi. dans<br />

sa lettre aux évêques <strong>de</strong> Francie, l’archevêque <strong>de</strong> reims<br />

affirme que les églises, confiées par dieu aux évêques,<br />

n’ont rien <strong>à</strong> voir avec les biens propres que le roi peut, <strong>à</strong><br />

son gré, donner ou ôter. C’est ainsi qu’Hincmar <strong>de</strong> reims,<br />

un an avant sa mort, écrivant au jeune louis III, le Bègue,<br />

souligne avec gravité : «… ce n’est pas vous qui<br />

m’avez ”élu <strong>à</strong> la direction <strong>de</strong> mon église mais moi qui, avec<br />

mes ”collègues et les autres fidèles <strong>de</strong> dieu et vos<br />

ancêtres, ”vous ai élu pour diriger le royaume <strong>à</strong> condition<br />

<strong>de</strong> respec-”ter les lois établies» 74 .<br />

Cette compétence ecclésiastique avait été admise par<br />

Charles le Chauve au concile <strong>de</strong> Savonnières <strong>de</strong> 859. «C’est<br />

par les évêques que dieu fait connaître ses décisions» déclara<br />

le roi. Cela conduira son fils louis le Bègue, lors <strong>de</strong> son<br />

sacre <strong>à</strong> reims en 877, <strong>à</strong> reconnaître son établissement par la<br />

miséricor<strong>de</strong> <strong>de</strong> dieu et l’élection du peuple.<br />

S’établissent ainsi les mots, les gestes et les objets constitutifs<br />

<strong>de</strong> la fonction royale : les «regalia».<br />

Mais bientôt les ambitions <strong>de</strong>s vassaux royaux et les intrusions<br />

norman<strong>de</strong>s, sarrazines et byzantines auront raison<br />

<strong>de</strong>s conceptions et prescriptions <strong>de</strong>s évêques.<br />

les images et les textes magnifiant la puissance royale<br />

s’effondreront après l’empereur Charles le Chauve, mais la<br />

(75) Voir carte F, p. 251.


construction idéologique lui survivra.<br />

Délitement <strong>de</strong> l’empire<br />

la tripartition <strong>de</strong> l’empire carolingien par le traité <strong>de</strong> Verdun<br />

en juillet 843 75 ne fit que régler le futur proche. la politique<br />

conciliatrice menée par les trois frères, lothaire l’aîné,<br />

louis le Germanique et Charles le Chauve, était guidée par<br />

la multiplication <strong>de</strong>s agressions norman<strong>de</strong>s, arabes et slaves<br />

que subissait leur royaume. les grands <strong>de</strong> l’ex-empire<br />

étaient, quant <strong>à</strong> eux, enclins <strong>à</strong> plus <strong>de</strong> loyauté, car chacun<br />

voyait dans ces désordres le signe <strong>de</strong> la colère <strong>de</strong> dieu.<br />

a Yurtz en 844, <strong>à</strong> Meersen en 847 et <strong>à</strong> liège en 855, les<br />

frères ennemis ont cherché, en présence <strong>de</strong> leurs fidèles, <strong>de</strong><br />

bonne foi ou non, l’oubli <strong>de</strong>s maux qu’ils se causaient<br />

entre eux ; et ont conclu <strong>de</strong>s accords mutuels auxquels ils<br />

s’engageaient <strong>à</strong> <strong>de</strong>meurer fidèles.<br />

les normands<br />

les premiers assauts Vikings sont mentionnés par l’abbé<br />

<strong>de</strong> Saint-Martin-<strong>de</strong>-Tours, alcuin, dès 799. Il indique<br />

qu’une centaine <strong>de</strong> normands, surpris sur une plage <strong>de</strong> la<br />

côte aquitaine, furent tués par les Francs. Ces envahisseurs<br />

relâchaient <strong>à</strong> noirmoutier, appelée alors île d’Her.<br />

Charlemagne, puis louis le Pieux érigèrent un système<br />

coordonné <strong>de</strong> défense côtière.<br />

Selon les annales franques rédigées par eginhard en 820<br />

une flotte <strong>de</strong> treize navires se présenta en Flandre (on ignore<br />

s’il s’agit <strong>de</strong> la Somme ou <strong>de</strong> l’escaut) et fut repoussée<br />

par l’armée franque. les normands cherchèrent ensuite <strong>à</strong><br />

(76) Cf. ermentaire : in Translation et<br />

miracles <strong>de</strong> saint Philbert.<br />

(77) Voir carte d, p. 249.<br />

(78) Plusieurs toponymes et hydronymes bretons<br />

et normands témoignent <strong>de</strong> la sé<strong>de</strong>ntarisation<br />

<strong>de</strong>s envahisseurs. Pour exemple, dans le<br />

Pays <strong>de</strong> Cau, le mot Bec est fort usité, il provient<br />

du norrois : bekz (ruisseau). les terminaisons<br />

en «tot», telles Turretot, Criquetot sont<br />

I. le regnum Francorum<br />

issues respectivement <strong>de</strong> Kriki (crique) avec<br />

l’appellatif norrois toft (terrain , ferme). en<br />

Bretagne se sont plutôt les mots ayant trait <strong>à</strong> la<br />

navigation qui ont <strong>de</strong>s origines norroises. Stur<br />

en breton signifie gouvernail et provient <strong>de</strong><br />

styri, même sens staon (étrave) provient <strong>de</strong><br />

stafm même sens, raz (chenal, courant) <strong>de</strong> r<strong>à</strong>s,<br />

même sens…).<br />

(79) In Annales <strong>de</strong> Saint-Bertin.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

40<br />

I. le regnum Francorum<br />

débarquer dans l’estuaire <strong>de</strong> la Seine sans plus <strong>de</strong> succès.<br />

Mais <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> 830, le dispositif <strong>de</strong> garnison et <strong>de</strong> flottille<br />

mis en place perdit <strong>de</strong> son efficacité. la chronique<br />

d’angoulême rapporte pour sa part un débarquement dans<br />

l’île d’Her le 20 août 835. Un dénommé renaud qui tenait la<br />

garnison parvint par surprise <strong>à</strong> chasser les normands après<br />

un ru<strong>de</strong> combat. Mais en 836 Hilbold, abbé <strong>de</strong> Saint-Philbert,<br />

et ses moines durent abandonner définitivement l’île <strong>de</strong><br />

noirmoutier pour se fixer <strong>à</strong> déas ; dix ans plus tard ce fut<br />

au tour <strong>de</strong>s moines <strong>de</strong> Saint-Maxence <strong>à</strong> Cunault, en anjou.<br />

Bien leur en prit car l’église <strong>de</strong> déas fut pillée en 847.<br />

en 862 les moines <strong>de</strong> noirmoutier se replièrent <strong>à</strong> Messay<br />

en Poitou, puis partirent pour l’abbaye <strong>de</strong> Saint-Pourçain<br />

en auvergne. Ils aboutirent finalement au monastère<br />

<strong>de</strong> Saint-Valérien-<strong>de</strong>-Tournus en Bourgogne qui leur fut<br />

concédé par Charles le Chauve en 875 76 .<br />

Cet exo<strong>de</strong> inaugurait une longue série d’autres fuites et<br />

pérégrinations éperdues <strong>de</strong> communautés monastiques qui<br />

choisissaient souvent l’exil. <strong>de</strong> 834 <strong>à</strong> 837, dorestad est<br />

pillé chaque année. dès 842, les hivernages <strong>de</strong>s Vikings se<br />

succè<strong>de</strong>nt en Bretagne, en aquitaine, en neustrie, en<br />

Bourgogne et en Francie.<br />

a partir <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong>, Quentovic est pillée régulièrement<br />

durant quatre ans. Hambourg et Paris sont mis <strong>à</strong> sac en<br />

845 77 . <strong>de</strong>s fortifications sont élevées <strong>à</strong> oisel et Pîtres sur la<br />

Seine, <strong>à</strong> auvers sur l’oise, <strong>à</strong> Charenton, Tribordan, <strong>à</strong><br />

l’Isles lès Villeroy sur la Marne et <strong>à</strong> Cé près d’angers sur<br />

la loire 78 . Ces multiples défenses et barrages sont com-<br />

(80) déj<strong>à</strong> en 813 amalaire <strong>de</strong> Metz, <strong>de</strong> retour<br />

d’une mission <strong>à</strong> Byzance dans ses «Versus<br />

Marini», parle <strong>de</strong>s attaques <strong>de</strong>s Maures et <strong>de</strong>s<br />

Slaves.<br />

(81) Orient et occi<strong>de</strong>nt du IX e au XV e siècle :<br />

Questions d’histoire, ouvrage collectif coordonné<br />

par G. Jehez, éd. du Temps, (2000).<br />

(82) la reconquête est un concept historiographique<br />

qui désigne la progression chrétienne<br />

au détriment <strong>de</strong>s musulmans dans la péninsule<br />

ibérique, par la guerre, le repeuplement et la<br />

mise en place <strong>de</strong> nouvelles structures. Ce n’est<br />

qu’<strong>à</strong> partir <strong>de</strong> X e siècle que cette reconquête<br />

prit une dimension idéologique.<br />

(83) Ce n’est qu’en 826 qu’Haraldr Klakk, roi<br />

danois, est baptisé <strong>à</strong> Mayence et qu’en 850<br />

que saint anschaire fait construire <strong>de</strong>s églises<br />

<strong>à</strong> ribe et <strong>à</strong> He<strong>de</strong>by (Scandinavie).


mandés par Charles le Chauve. Mais ce <strong>de</strong>rnier rencontre<br />

également <strong>de</strong>s difficultés avec le Breton nominoé et le<br />

comte lambert qui dès 843 renient leur allégeance 79 . louis<br />

le Germanique, lothaire connaissent <strong>de</strong>s problèmes similaires.<br />

Constantinople est approchée par les Suédois dès<br />

839. l’espagne, la navarre, la Septimanie et la Provence<br />

connaîtront également <strong>de</strong>s invasions norman<strong>de</strong>s, mais ces<br />

régions connurent surtout les invasions arabes 80 .<br />

C’est dans cet environnement cataclysmique pour <strong>de</strong> nombreux<br />

religieux que <strong>Gottschalk</strong> développa ses thèses fatalistes.<br />

les Sarrasins<br />

la marche d’espagne avait déj<strong>à</strong> souffert <strong>de</strong>s incursions<br />

ravageuses <strong>de</strong> Moussa ibn Moussa, seigneur <strong>de</strong> Saragosse<br />

et <strong>de</strong> Tu<strong>de</strong>la. Sa famille dominait la vallée <strong>de</strong> l’ebre <strong>de</strong>puis<br />

790. les ambitions <strong>de</strong> Moussa avaient également entraîné<br />

<strong>de</strong>s conflits avec son suzerain abd er rahmane II (822 -<br />

852). en 843, malgré la défaite infligée <strong>à</strong> Moussa et au roi<br />

<strong>de</strong> Pampelune, son allié, les bases arrières <strong>de</strong> ces vaincus<br />

ne furent pas détruites. Cet événement impliquait un répit<br />

<strong>de</strong>s raids <strong>de</strong> Moussa sur la Septimanie, mais, par contre,<br />

ouvrait une menace nouvelle <strong>de</strong> la part du royaume cordouan<br />

81 . dans la secon<strong>de</strong> moitié du IX e siècle, l’émirat <strong>de</strong><br />

Cordoue semble <strong>à</strong> son apogée. <strong>de</strong> puissantes familles<br />

autochtones islamisées apparaissent sur le <strong>de</strong>vant <strong>de</strong> la<br />

scène. les alliances politiques matrimoniales que nouent<br />

les familles musulmanes avec leurs frères <strong>de</strong> race chrétiens<br />

<strong>de</strong> navarre ne mettent plus en cause le rattachement <strong>de</strong><br />

(84) Pour ce prélat, le Christ n’avait qu’une<br />

nature divine secondaire, dérivée <strong>de</strong> celle du<br />

Père qui la lui avait conférée par adoption.<br />

(85) en Italie méridionale, pour conserver leur<br />

indépendance ou pour étendre les frontières <strong>de</strong><br />

leurs domaines, plusieurs princes chrétiens,<br />

comme le duc <strong>de</strong> naples vers 835, s’allièrent<br />

avec les souverains aghlabi<strong>de</strong>s d’afrique du<br />

nord et leurs gouverneurs <strong>de</strong> Sicile. les<br />

I. le regnum Francorum<br />

ban<strong>de</strong>s ifriqiyennes qui ravageaient alors la<br />

péninsule bénéficièrent <strong>à</strong> plusieurs reprises<br />

d’alliances militaires et d’offres <strong>de</strong> service <strong>de</strong><br />

la part <strong>de</strong> dignitaires chrétiens. en 876 l’un <strong>de</strong>s<br />

plus hauts fonctionnaires <strong>de</strong> la curie romaine<br />

fut même accusé par le pape Jean VIII d’avoir<br />

voulu livrer la ville aux musulmans. Cf. M.<br />

Talbi : in l’émirat aghlabi<strong>de</strong>, p. 513, Paris,<br />

(1966).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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I. le regnum Francorum<br />

cette province <strong>à</strong> l’Islam 82 . Il en fut <strong>de</strong> même pour les<br />

familles adhérentes <strong>à</strong> une autre religion 83 . l’Islam provoqua<br />

<strong>de</strong> nombreuses hérésies. Un seul évêque est encore<br />

attesté en 869 <strong>à</strong> Mérida mais, selon un géographe arabe,<br />

plus personne ne peut traduire une inscription latine trouvée<br />

sur un monument antique. Ces indications sont révélatrices<br />

du niveau culturel très bas auquel étaient réduits les<br />

chrétiens <strong>de</strong> cette ville. Cette acculturation témoigne <strong>de</strong>s<br />

nombreuses déviances qui affectent alors le christianisme<br />

dans l’andalus du IX e siècle.<br />

Parfois il s’agit d’une influence musulmane unitariste sur<br />

le christianisme. Tel est le cas du mouvement adoptianiste<br />

développé par elipand, métropolitain <strong>de</strong> Tolè<strong>de</strong> <strong>à</strong> la fin du<br />

VIII e siècle 84 . on retrouve dans cette hérésie l’influence<br />

orientale du nestorianisme et du monophysisme qui refuse<br />

d’accepter la double nature humaine et divine du Christ,<br />

très développée <strong>à</strong> l’époque <strong>de</strong> l’expansion <strong>de</strong> l’Islam. Ces<br />

théories nourrissent les disputes théologiques du IX e siècle<br />

et permettent <strong>de</strong> mieux cerner l’enjeu <strong>de</strong>s débats alimentés<br />

par <strong>Gottschalk</strong> avec ses écrits : «Deus unus et trinus». les<br />

thèses adoptianistes correspon<strong>de</strong>nt plus ou moins<br />

consciemment aux tentatives <strong>de</strong> rapprochement avec la<br />

religion musulmane très hostile <strong>à</strong> la doctrine chrétienne trinitaire.<br />

les condamnations officielles que suscite l’adoptianisme<br />

dans l’empire carolingien sont significatives du<br />

clivage qui s’établit entre l’occi<strong>de</strong>nt latin et un mon<strong>de</strong><br />

musulman intégrateur <strong>de</strong> ses propres minorités chré-<br />

(86) les musulmans dans leur conquête toléraient<br />

le transfert <strong>de</strong>s reliques. Celles <strong>de</strong><br />

Cyprien, Speratus et Pantaléon, martyrs africains,<br />

furent données aux envoyés <strong>de</strong><br />

Charlemagne par Haroun al rachid, d’après<br />

Florus <strong>de</strong> lyon : in, Carmen III.<br />

(87) P. Guichard : in Al Andalus 711-1492, p.<br />

62, éd. Hachette, (2001).<br />

(88) ramatuelle en arabe : «le mont <strong>de</strong> la vierge».<br />

Près <strong>de</strong> la Gar<strong>de</strong>-Freinet la <strong>de</strong>scription<br />

<strong>de</strong> la montagne aux cimes (Jabal al-Qilal)<br />

citée par les chroniqueurs arabes, correspond<br />

aux hauteurs du Freinet, dans le Var.<br />

ecumant la côte méditerranéenne, les charpentiers<br />

<strong>de</strong> marines arabes avaient besoin <strong>de</strong> nombreux<br />

bois pour réparer ou construire leur nef,<br />

c’est alors que leur source d’approvisionnement<br />

prit le nom <strong>de</strong> : «Massif <strong>de</strong>s Maures».<br />

Grimaud, Cogolin, Gassin, ramatuelle possè<strong>de</strong>nt<br />

toutes une porte sarrasine.


tiennes. <strong>de</strong>s connivences se nouent <strong>à</strong> tous les niveaux et en<br />

tous lieux 85 . la collusion <strong>de</strong>vient omniprésente y compris<br />

dans les strates les plus élevées <strong>de</strong> la hiérarchie catholique.<br />

Peu <strong>à</strong> peu, on voit s’épanouir diverses doctrines qui témoignent<br />

d’un recul du niveau théologique : la répugnance <strong>à</strong><br />

toute idée d’incarnation, la nature divine ne pouvant<br />

s’abaisser au niveau <strong>de</strong> la nature humaine et <strong>de</strong> sa matérialité.<br />

les apologistes <strong>de</strong>s martyrs <strong>de</strong> Cordoue sont les seuls dans<br />

leurs écrits latins <strong>à</strong> avoir conservé le souvenir <strong>de</strong> ces polémiques.<br />

le premier martyr <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong> fut le prêtre<br />

Perfectus. Impru<strong>de</strong>mment, il se serait laissé aller <strong>à</strong> <strong>de</strong> vives<br />

critiques envers l’islam et son fondateur Mahomet. Traduit<br />

en justice, il fut puni <strong>de</strong> mort et exécuté. Cet épiso<strong>de</strong><br />

semble révélateur d’une réalité quotidienne où les fidèles<br />

<strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux religions pouvaient engager un dialogue sur les<br />

problèmes religieux 86 mais il marque aussi un certain durcissement<br />

<strong>de</strong> l’attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s musulmans et <strong>de</strong> la condition <strong>de</strong><br />

«dhimmî» 87 . dans la majorité <strong>de</strong>s cas connus, l’initiative<br />

d’attaques contre l’islam provenait <strong>de</strong> chrétiens exaltés :<br />

tels que l’abbé Spérain<strong>de</strong>o, l’archevêque <strong>de</strong> Tolè<strong>de</strong>, euloge<br />

et son ami alvare qui, publiquement et délibérément,<br />

cherchaient <strong>à</strong> réveiller la conscience endormie <strong>de</strong> leurs<br />

coreligionnaires. les évêques réagirent, convoquant un<br />

concile en 852. l’évêque <strong>de</strong> Séville, reccafrid, déclara<br />

ennemis <strong>de</strong> l’état et criminels ceux <strong>de</strong> ses propres fidèles<br />

qui s’en prenaient <strong>à</strong> la souveraineté musulmane. <strong>de</strong> fait<br />

l’épiscopat ibérique interdit aux chrétiens <strong>de</strong> dénigrer l’is-<br />

(89) 717/820<br />

(90) Borna (dux guduscanorum) <strong>de</strong> 810 <strong>à</strong> 821.<br />

l’homophonie <strong>de</strong> Borna avec Berno ou<br />

Bernus, nom du père <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, est troublante.<br />

le voyage <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> dans <strong>de</strong>s<br />

contrées aussi éloignées, peut s’expliquer par<br />

le fait qu’il a pu avoir une parentèle en<br />

dalmatie. <strong>de</strong> plus M. rouche, dans son livre<br />

«Les racines <strong>de</strong> l’Europe» insiste sur la politique<br />

<strong>de</strong> contrôle engagée par Charlemagne<br />

I. le regnum Francorum<br />

sur les pays soumis. dans son Capitulum<br />

missi dominici, 802, c. 11, il établit une véritable<br />

exportation <strong>de</strong>s cadres saxons et leur<br />

donne pour thème : «Comment et <strong>de</strong> quelle<br />

manière les Saxons qui ont nos bénéfices doivent-ils<br />

les cultiver» ? enfin l’onomastique <strong>de</strong><br />

Borna n’est ni illyrienne ni slave mais bien<br />

saxonne.<br />

(91) lju<strong>de</strong>vit Posavski † 823 (Posavski en<br />

croate signifit <strong>de</strong> la rivière Save).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

43


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

44<br />

I. le regnum Francorum<br />

lam et <strong>de</strong> rechercher le martyr. en ce qui concerne la<br />

Provence, les raids musulmans engagés <strong>de</strong>puis 810 ont,<br />

eux aussi, laissé leurs empreintes toponymiques 88 .<br />

les réseaux religieux informaient chaque communauté<br />

monastique <strong>de</strong> l’état du regnum Francorum, et <strong>de</strong> nombreux<br />

moines gyrovagues, dont <strong>Gottschalk</strong>, se faisaient l’écho du<br />

délitement <strong>de</strong> l’empire et <strong>de</strong>s maux qui le rongeaient.<br />

les Byzantins<br />

<strong>de</strong>puis le VII e siècle, l’Istrie, la norique, la Pannonie et la<br />

dalmatie furent l’enjeu permanent <strong>de</strong>s pouvoirs byzantins<br />

et romains. après la prise <strong>de</strong> ravenne par les lombards au<br />

VIII e siècle et le transfert <strong>de</strong> l’Italie du Sud et <strong>de</strong>s parties<br />

occi<strong>de</strong>ntales <strong>de</strong> la péninsule balkanique <strong>à</strong> la juridiction <strong>de</strong><br />

Constantinople, la côte dalmate passe sous le contrôle <strong>de</strong><br />

l’empire byzantin. la dynastie isaurienne 89 était <strong>à</strong> son apogée.<br />

Un religieux dénommé Ursus venu d’Italie du nord<br />

avait tenté en vain, vers la fin du VIII e siècle une mission<br />

individuelle <strong>de</strong> récupération pour rome. C’est <strong>à</strong> partir du<br />

début du IX e siècle que le pouvoir byzantin affronta directement<br />

le pouvoir carolingien.<br />

les vassaux d’Istrie, <strong>de</strong> Pannonie et <strong>de</strong> dalmatie dépendaient<br />

directement au plan séculier du comte du Frioul et<br />

(92) Buzov, e., in Royaumes d’Europe <strong>de</strong> l’Est.<br />

(93) dans cette ville, une chapelle dédiée <strong>à</strong> la<br />

Sainte Croix, possè<strong>de</strong> encore actuellement sur<br />

un linteau au <strong>de</strong>ssus d’une porte l’inscription<br />

suivante :<br />

Go<strong>de</strong>. SaV. IVP.Pano … IS.To doMo. Co.<br />

voir B’ p.247<br />

Cet édifice comprend également un baptistère<br />

et une chapelle funéraire. <strong>de</strong>s historiens croates<br />

déchiffrent sur cette épigraphe le nom <strong>de</strong><br />

Go<strong>de</strong>SlaV et y voient la dédicace d’un<br />

dynaste indépendant. le premier Croate attesté,<br />

revendiquant une i<strong>de</strong>ntité propre, fut Vigeslav<br />

(† 810) et, comme ses successeurs Borna,<br />

Vladislav († 835) et Mislav († 845), il fut un<br />

vassal carolingien. Seul Trpimir 1 er fonda sa<br />

dynastie. Quant aux archéologues, ils datent<br />

l’élévation <strong>de</strong> cette construction du début du IX e<br />

siècle et y retrouvent la facture <strong>de</strong>s bâtisseurs <strong>de</strong><br />

la région <strong>de</strong> Zadar et Salona (Split). Un faisceau<br />

<strong>de</strong> présomptions nous conduit <strong>à</strong> proposer la<br />

reconstitution suivante <strong>de</strong> l’inscription.<br />

Go<strong>de</strong>S(CalC) aV(CTore) IVPPano/<br />

ISTo doMo CoSTrVXIT.<br />

«<strong>Gottschalk</strong> sous l’autorité d’un comte (Zupan<br />

en croate = comte) a construit cet édifice».<br />

(94) Voir la donation du duc Trpimir 1 er <strong>à</strong><br />

l’église Saint-Georges <strong>de</strong> Putalj : Regnante in<br />

Italia piissimo Lotario rege francor(um) p(er)<br />

indictione(m) XV sub die quarta nonarum<br />

Martium.<br />

(95) Hawkesworth, C., Religions quest and<br />

national i<strong>de</strong>ntity in the Balkans.<br />

M. C. Kitterick, r., The early Midle Ages<br />

Europe, 400-1000, éd. oxford university<br />

(2001).


pour l’autorité religieuse du pouvoir ecclésiastique<br />

d’aquilée. C’est en 811 que se précisent les aires d’influence<br />

entre Francs et Byzantins. la ville <strong>de</strong> nin fut le<br />

centre <strong>de</strong> cette réorganisation politique et religieuse. au<br />

sud <strong>de</strong> l’actuelle Croatie, c’est la rivière Cetina que<br />

Constantinople accepta comme frontière, tout en maintenant<br />

une suzeraineté sur les îles côtières <strong>de</strong> Gra<strong>de</strong> <strong>à</strong> Venise.<br />

les comtes Borna 90 <strong>de</strong> dalmatie et lju<strong>de</strong>vit, son neveu <strong>de</strong><br />

Pannonie, réaffirmeront leur allégeance aux carolingiens en<br />

814. Borna <strong>de</strong>meurera fidèle <strong>à</strong> ses engagements; il rendit<br />

hommage en personne <strong>à</strong> l’empereur louis le Pieux en 820.<br />

Cette loyauté ne fut pas respectée par lju<strong>de</strong>vit 91 , puisqu’<strong>à</strong><br />

partir <strong>de</strong> 819 il poussa les provinces <strong>de</strong> Krbava, Gatska, lika<br />

et Pannonie <strong>à</strong> faire secession 92 . Finalement défait, lju<strong>de</strong>vit<br />

fut emprisonné par son oncle et mourut en captivité.<br />

Split <strong>de</strong>vint archevêché et nin 93 , berceau <strong>de</strong>s comtes<br />

Borna, Vladislav, Mislav et Trpimir 1 er , évêché ensemble<br />

rattachés <strong>à</strong> rome.<br />

Ces comtes croates, tout en continuant <strong>de</strong> s’acquitter <strong>de</strong><br />

payer la dîme aux empereurs louis le Pieux puis<br />

lothaire 94 , facilitèrent les relations entre l’archevêque <strong>de</strong><br />

Split et celui <strong>de</strong> Constantinople 95 .<br />

C’est en ces provinces écartelées entre rome et Byzance<br />

que <strong>Gottschalk</strong> tentera <strong>de</strong> diffuser sa doctrine.<br />

après avoir séjourné <strong>à</strong> la cour du comte du Frioul,<br />

(96) Ce jeune compagnon <strong>de</strong> route, serviteur<br />

et écuyer <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, avait pris également<br />

son nom.<br />

(97) Sic nihilominus et equi sunt in acie laeti<br />

ex ea parte quam <strong>de</strong>o dante <strong>de</strong>bet uictoria<br />

sequi. Quod prorsus ego ipse per<br />

Gottesscalcum filiolum meum <strong>de</strong> equo nostro<br />

probaui. Cum enim Tripemirus rex Sclauorum<br />

iret contra gentem Graecorum et patricium<br />

eorum et esset in ipso confinio futuri belli uilla<br />

nostra, dixi illi ut iret et quicquid regi et eius<br />

exercitui necessarium esset sicut omnino<br />

<strong>de</strong>beret impen<strong>de</strong>ret. Adiuraui tamen terribili-<br />

I. le regnum Francorum<br />

ter eum per dominum <strong>de</strong>um ut nec arma sumeret<br />

nec cum exercitu pergeret, sed tamen studiose<br />

post eos equitans atten<strong>de</strong>ret quemnam<br />

gestum equus ille noster ageret atque gereret.<br />

Ex olim qui<strong>de</strong>m certissime sciebam illi parti<br />

hominum uenturam et futuram esse uictoriam<br />

quorum equi ince<strong>de</strong>rent laeti monstrarentque<br />

gestu triumphando laetitiam. Sicque mox<br />

contigit ut equi gestientis gestus elicuit atque<br />

protinus patefecit.<br />

dom C. lambot : in Oeuvres théologiques et<br />

grammaticales <strong>de</strong> Gottescalc d’Orbais, p. 169,<br />

louvain, (1945).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

45


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

46<br />

I. le regnum Francorum<br />

eberhard, <strong>Gottschalk</strong> se mit en route vers l’Istrie, la vallée<br />

<strong>de</strong> la Gatska, la lika, la dalmatie et la Bulgarie. Il fut le<br />

témoin direct <strong>de</strong>s assauts byzantins contre les marches du<br />

sud-est <strong>de</strong> l’empire. lors <strong>de</strong> son voyage, invité <strong>à</strong> la cour du<br />

prince croate Trpimir, il nous relate en ces termes la<br />

bataille <strong>de</strong> ce prince contre les Grecs, enrolés par l’empereur<br />

Michel III l’Ivrogne.<br />

«Comme le diable reconnaît l’homme qui va mourir<br />

et ”tend les lacets qui le prendront et le détruiront, il n’est<br />

pas ”étonnant que les animaux pressentent les événements<br />

<strong>à</strong> ”venir. aussi les corbeaux, les vautours, les éperviers et<br />

les ”aigles suivent les guerriers pour lesquels ils <strong>de</strong>vinent<br />

”qu’ils seront blessés, étranglés, tués. Tout aussi bien<br />

les ”chevaux, du côté auquel dieu doit donner la victoire,<br />

sont ”joyeux sur le champ <strong>de</strong> bataille. Ce dont moi-même,<br />

grâce ”<strong>à</strong> mon petit enfant <strong>Gottschalk</strong> 96 , j’ai eu la preuve<br />

pour mon ”cheval. Comme en effet, Trpimir, roi slave, se<br />

portait ”contre le peuple <strong>de</strong>s Grecs et leur patriciat et que<br />

notre ”domaine était sur le territoire voisin <strong>de</strong> la future<br />

guerre, je ”lui dis d’aller fournir tout ce qui était nécessaire<br />

au roi et ”<strong>à</strong> son armée, comme il <strong>de</strong>vait. Je l’ai conjuré<br />

pourtant ”d’une manière terrible, par le Seigneur dieu, <strong>de</strong><br />

ne pas ”prendre les armes et <strong>de</strong> ne pas faire route avec l’armée,<br />

”mais en chevauchant pourtant scrupuleusement <strong>à</strong><br />

leur ”suite et <strong>de</strong> remarquer quelle attitu<strong>de</strong> notre cheval<br />

aurait et ”prendrait. Je savais en effet <strong>de</strong>puis longtemps <strong>de</strong><br />

manière ”très certaine que la victoire viendrait et serait<br />

pour le parti ”<strong>de</strong>s hommes dont les chevaux s’avanceraient<br />

heureux et ”montreraient <strong>de</strong> l’allégresse par leur attitu<strong>de</strong><br />

triomphante. ”et il arriva bientôt que l’attitu<strong>de</strong> du cheval<br />

qui exultait se ”manifesta et fut tout <strong>à</strong> fait évi<strong>de</strong>nte…» 97<br />

la bataille fut remportée par Trpimir ; cet épiso<strong>de</strong> décrit<br />

par <strong>Gottschalk</strong> est une révélation supplémentaire <strong>de</strong>s<br />

(98) P.l. lXXXIX 751-3


agressions qui, <strong>de</strong> toute part, accablaient les royaumes<br />

francs. Malgré toutes ces difficultés, les petits-fils <strong>de</strong><br />

Charlemagne chercheront, parfois ensemble, souvent séparément,<br />

<strong>à</strong> faire revivre l’empire carolingien. Hincmar <strong>de</strong><br />

reims, en loyal conseiller <strong>de</strong> Charles le Chauve, inaugurera<br />

un nouveau règne qui sera l’apogée <strong>de</strong> toute l’histoire<br />

mythique du regnum Francorum.<br />

Conclusion I<br />

l’inventaire succinct <strong>de</strong> la société carolingienne, axé sur la<br />

pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, a pour objet <strong>de</strong> restituer le<br />

contexte politique, économique et religieux dans lequel<br />

furent immergés les différents acteurs du débat sur la pré<strong>de</strong>stination<br />

au IX e siècle.<br />

les contemporains <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> étaient mus par le tourbillonnement<br />

<strong>de</strong> ce temps troublé. Ils assistaient impuissants<br />

et plus ou moins consciemment <strong>à</strong> la décomposition<br />

d’un mon<strong>de</strong> dominé et imprégné jusqu’en ses plus intimes<br />

tissus par la religion et par la plus haute expression <strong>de</strong> la<br />

science religieuse : la théologie. Celle-ci ne leur permettait<br />

pas <strong>de</strong> résoudre les questions qui les submergeaient.<br />

<strong>Gottschalk</strong>, par ses origines, son statut social, son intelligence<br />

et son tempérament, tentait une explication cohérente<br />

: la pré<strong>de</strong>stination. Cette approche ne pouvait que générer,<br />

<strong>de</strong> la part <strong>de</strong> son abbé, <strong>de</strong> son évêque et <strong>de</strong> son roi une<br />

opposition frontale, et produire un conflit absolu.<br />

les pouvoirs <strong>de</strong> son temps avaient également <strong>à</strong> faire face aux<br />

rémanences païennes en terres christianisées, au paganisme<br />

durable <strong>de</strong>s Saxons 98 ou aux prédictions <strong>de</strong> Thiota, femme<br />

originaire d’alémanie qui annonçait dès 847 la proche fin du<br />

mon<strong>de</strong>, aux croyances scandinaves qui substituaient le mar-<br />

(99) août 822, Capitula ab episcopis<br />

(Attiniaci data août 829, episcoporum relatio<br />

ad Hludouicum imperatem) in, M.G.H.<br />

I. le regnum Francorum<br />

Capitularia I, p.39, n°196, Cap. 12.<br />

(100) l. Febvre : in Combat pour l’histoire,<br />

p.20, 21 et 103, Paris, (1953).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

48<br />

I. le regnum Francorum<br />

teau <strong>de</strong> Thor <strong>à</strong> la Croix et <strong>à</strong> l’adoptianisme qui eut un fort<br />

retentissement populaire en languedoc, en navarre, en<br />

Castille, en Catalogne et en aragon. Ciblés tout particulièrement<br />

par les attaques vikings en raison <strong>de</strong>s richesses<br />

vraies ou supposées, recélées dans les domaines religieux,<br />

bon nombre d’ecclésiastiques réguliers et séculiers, faute <strong>de</strong><br />

pouvoir tabler sur la défense <strong>de</strong>s aristocrates, ne purent que<br />

fuir <strong>de</strong>vant l’envahisseur. C’est ce que reprochera sèchement<br />

le pape nicolas 1 er <strong>à</strong> l’évêque <strong>de</strong> Thérouanne en rappelant<br />

que «le pilote est encore plus coupable d’abandonner<br />

”son navire pendant la tempête que pendant le calme».<br />

la défense collective faisant défaut, il ne se trouvait souvent<br />

personne, dans l’espace <strong>de</strong> la paroisse, pour diriger<br />

une possible résistance. le peuple chrétien, se sentant<br />

abandonné par toutes les puissances terrestres, sombra<br />

dans un évi<strong>de</strong>nt fatalisme, terreau fertile au prédistianisme.<br />

a ces déviations, se conjuguaient <strong>de</strong>s manifestations d’impiété.<br />

le clergé se plaignait auprès <strong>de</strong>s princes <strong>de</strong> l’indocilité<br />

religieuse <strong>de</strong>s puissants et <strong>de</strong>s palatins qui n’allaient<br />

même pas écouter la parole <strong>de</strong> dieu et qui, pire encore,<br />

empêchaient leurs serviteurs <strong>de</strong> le faire 99 .<br />

la définition <strong>de</strong> cette pério<strong>de</strong> est avant tout humaine. Une<br />

histoire humaine, la seule digne <strong>de</strong> ce nom a été donnée par<br />

Marc Bloch et lucien Febvre : «l’homme mesure l’histoire,<br />

”sa seule mesure, bien plus sa raison d’être. les<br />

hommes, ”seuls objets <strong>de</strong> l’histoire, d’une histoire qui ne<br />

s’intéresse ”pas <strong>à</strong> je ne sais quel homme abstrait, éternel,<br />

immuable en ”son fond et perpétuellement i<strong>de</strong>ntique <strong>à</strong> lui-


I I . Le gyr ovague<br />

délié <strong>de</strong> ses vœux par eigil en 829, <strong>Gottschalk</strong>,<br />

comme bien d’autres moines, parcourra les<br />

royaumes francs durant plusieurs années.<br />

Sa formation religieuse achevée <strong>à</strong> <strong>Fulda</strong>, reichenau et<br />

Corbie, on le retrouve dès 830 au monastère d’orbais (diocèse<br />

<strong>de</strong> Soissons). le comportement <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> n’était<br />

pas unique, <strong>de</strong> nombreux cas <strong>de</strong> moines ont malgrè gré eux<br />

défié la chronique. Il en fut <strong>de</strong> même pour la carrière <strong>de</strong>s<br />

laïcs. Pépin d’aquitaine, neveu <strong>de</strong> Charles le Chauve, vaincu<br />

par son oncle, soumis en 853, fit profession <strong>de</strong> foi <strong>à</strong><br />

Saint-Médard-<strong>de</strong>-Soissons la même année, puis, fuyant en<br />

854 son nouvel état se fit proclamer roi d’aquitaine 101 .<br />

re<strong>de</strong>venu laïc, il aurait apostasié les normands, dont il<br />

aurait adopté les rites. le propre fils <strong>de</strong> Charles le Chauve,<br />

Carloman, lui aussi, moine contre son gré et défroqué fut<br />

réduit <strong>à</strong> l’état laïc au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Senlis en 873 102 . réclamant<br />

<strong>de</strong> nouveau le titre <strong>de</strong> roi, puisqu’il n’avait plus d’ordre<br />

ecclésiastique et qu’il avait perdu, par jugement <strong>de</strong>s<br />

évêques son gra<strong>de</strong> et fait prisonnier, il fut aveuglé dans sa<br />

prison afin que toute résistance soit définitivement brisée.<br />

le recrutement <strong>de</strong> force <strong>de</strong>s moniales générait pour ces<br />

<strong>de</strong>rnières les mêmes types <strong>de</strong> désordres.<br />

(101) In Annales <strong>de</strong> Saint Bertin, p. 69 et 70,<br />

Paris, (1964).<br />

II. le gyrovague<br />

(102) In a.S.B. Mais les actes du syno<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Senlis sont perdus, il ne reste que les titres <strong>de</strong>s<br />

cinq articles.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

50<br />

II. le gyrovague<br />

«L’institutio sanctimonialium» <strong>de</strong> 817 s’efforça <strong>de</strong> régulariser<br />

la vie <strong>de</strong>s moniales en clôture, sans pour autant supprimer<br />

les religieuses privées.<br />

le non-respect <strong>de</strong> la règle et les écarts <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> sont<br />

mentionnés pour la première fois en 829 dans un courrier<br />

<strong>de</strong> raban Maur <strong>à</strong> otgar, archevêque <strong>de</strong> Mayence, où il<br />

qualifie le jeune moine <strong>de</strong> «frigitus monachii». Ces fugues<br />

n’étaient donc pas nouvelles et eigil avait fort bien compris<br />

la psychologie du jeune <strong>Gottschalk</strong> 103 . Mais les pérégrinations<br />

<strong>de</strong> ce <strong>de</strong>rnier n’étaient pas seules en cause dans<br />

les réprobations <strong>de</strong> raban, car les paroles répandues par le<br />

jeune moine lui semblaient déj<strong>à</strong> très dangereuses. en effet<br />

entre ses voyages, <strong>Gottschalk</strong> enseigne <strong>à</strong> orbais <strong>de</strong> 830 <strong>à</strong><br />

837. Il y est très actif. Il échange durant cette pério<strong>de</strong>, <strong>de</strong><br />

nombreuses correspondances, il approfondit saint<br />

augustin et échafau<strong>de</strong> sa théorie sur la pré<strong>de</strong>stination<br />

avant <strong>de</strong> partir vers 833 en pèlerinage <strong>à</strong> rome.<br />

en 840, <strong>de</strong> nouveau raban Maur signale <strong>à</strong> notingue,<br />

évêque <strong>de</strong> Vérone, l’errance <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, en ces termes :<br />

«Nuper quando ad serenissimum<br />

imperatorem ”Hludouicum in transitu expeditionis hostilis<br />

in pago ”Loganae uenisti et ibi<strong>de</strong>m mecum locutus <strong>de</strong> heresi<br />

quam ”quidam <strong>de</strong> pre<strong>de</strong>stinatione <strong>de</strong>i inique contendunt<br />

errantes ”et alios in errorem mittentes sermonem habuisti,<br />

conuenit ”inter nos ut e diuinis scripturis et <strong>de</strong> orthodoxorum<br />

”patrum sententiis aliquod opusculum conficerem<br />

ad ”conuincendum errorem eorum qui <strong>de</strong> <strong>de</strong>o bono et<br />

iusto ”tam nequiter sentiunt, ut dicant eius pre<strong>de</strong>stinationem<br />

”facere quod nec homo ad uitam pre<strong>de</strong>stinatus possit<br />

in ”mortem inci<strong>de</strong>re nec ad mortem pre<strong>de</strong>stinatus ullo<br />

modo ”se possit ad uitam recuperare, cum auctor omnium<br />

(103) F.J. Gaudard dans sa thèse sur<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’orbais émet l’hypothèse que<br />

celui-ci entretenait <strong>de</strong>s relations secrètes avec<br />

ses parents durant sa formation <strong>à</strong> <strong>Fulda</strong>. p. 19,<br />

Saint-Quentin, (1888).


erum ”et conditor naturarum <strong>de</strong>us nullius ruinae atque<br />

interitus ”causa sit sed multorum origo salutis…» 104<br />

Puis dans un autre courrier <strong>de</strong> 846, il nous apprend que le<br />

gyrovague s’est installé chez le comte du Frioul, eberhard,<br />

beau-frère <strong>de</strong> Charles le Chauve : «… De cetero quoque<br />

quia ”diuulgatum in istis partibus constat quendam sciolum<br />

nomine ”Gotescalcum apud uos manere qui dogmatizet quod<br />

pre-”<strong>de</strong>stinatio <strong>de</strong>i omnem hominem ita constringat ut etiam<br />

si ”quis uelit saluus fieri et pro hoc fi<strong>de</strong> recta atque bonis operibus<br />

”certet ut ad uitam aeternam per <strong>de</strong>i gratiam ueniat, frustra<br />

”et incasum laboret si non est pre<strong>de</strong>stinatus ad<br />

uitam…» 105<br />

enfin dans une lettre parvenue <strong>à</strong> reims en 849, le même<br />

raban Maur avertit Hincmar, métropolitain élu <strong>de</strong>puis<br />

quatre ans en remplacement d’ebon, <strong>de</strong> l’envoi d’un dangereux<br />

déviant. Il s’exprime succinctement, en ces termes :<br />

«… qu’il soit connu <strong>de</strong> vous qu’un certain moine,<br />

nommé ”<strong>Gottschalk</strong>, qui assure être prêtre <strong>de</strong> votre province,<br />

est ”revenu d’Italie vers nous <strong>à</strong> Mayence, introduisant<br />

<strong>de</strong> nou-”velles superstitions et une doctrine pernicieuse sur<br />

la pré-”<strong>de</strong>stination divine…» 106 . <strong>Gottschalk</strong> était donc<br />

(104) naguère, lorsque vous vous êtes rendu<br />

auprès du sérénissime empereur louis lors du<br />

passage d’une expédition militaire dans la circonscription<br />

<strong>de</strong> lugano et que, ayant parlé<br />

avec moi en ce même endroit, vous avez tenu<br />

<strong>de</strong>s propos sur l’hérésie, que certains errants<br />

induisent les autres en erreur et soutiennent<br />

injustement quant <strong>à</strong> la pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong> dieu,<br />

nous étions convenus que je fasse un ouvrage<br />

<strong>à</strong> partir d’extraits <strong>de</strong>s Saintes-écritures et en<br />

me servant d’avis <strong>de</strong>s pères orthodoxes pour<br />

convaincre d’erreur ceux qui se font une si<br />

mauvaise idée du dieu juste et bon qu’ils<br />

disent que sa pré<strong>de</strong>stination fait que ni l’homme<br />

pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la vie ne peut tomber dans la<br />

mort, ni celui pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la mort ne peut en<br />

aucun cas se sauver jusqu’<strong>à</strong> avoir la vie, alors<br />

que dieu, auteur <strong>de</strong> toute chose et fondateur <strong>de</strong><br />

la nature, n’est la cause <strong>de</strong> la ruine et <strong>de</strong> la<br />

mort d’aucun être, mais est l’origine du salut<br />

II. le gyrovague<br />

d’un grand nombre…<br />

In M.G.H, Epistolae. t.V, éd. e. dümmler,<br />

p. 428 c. 18-26.<br />

(105) du reste, comme il est bien connu en ces<br />

régions qu’un <strong>de</strong>mi-savant nommé <strong>Gottschalk</strong><br />

rési<strong>de</strong> auprès <strong>de</strong> vous et qu’il enseigne que la<br />

pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong> dieu lie tout homme <strong>de</strong> sorte<br />

que, même si quelqu’un veut être sauvé et<br />

pour cela combat par une foi droite et <strong>de</strong><br />

bonnes œuvres afin <strong>de</strong> parvenir par la grâce <strong>de</strong><br />

dieu <strong>à</strong> la vie éternelle, il travaille en vain et<br />

sans utilité s’il n’a pas été pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la vie.<br />

In P.l, CXII, 1530 d.<br />

(106) Nutum sit dilectioni uestrae quod quidam<br />

gyrouagus monachus, nomine<br />

Gothescalc, qui se assertii sacerdotem in uestra<br />

parrochia ordinatem, <strong>de</strong> Italia uenit ad nos<br />

Moguntiam, nouos superstitiones et noxiam<br />

doctrinam <strong>de</strong> prae<strong>de</strong>stinatione <strong>de</strong>i introducens…<br />

in P.l. CXXV, 84.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

52<br />

II. le gyrovague<br />

reparti ”d’Italie, laissant son cercle d’Irlandais poursuivre assidûment<br />

la querelle <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination 107 pour revenir <strong>à</strong><br />

Mayence. Il séjourna auparavant en dalmatie durant les<br />

années 846 et 847 <strong>à</strong> la cour du prince Trpimir en compagnie<br />

<strong>de</strong> son filleul, dénommé également <strong>Gottschalk</strong> 108 .<br />

après la victoire sur les Byzantins, le prince Trpimir fonda<br />

le monastère bénédictin <strong>de</strong> rizinice. le promoteur <strong>de</strong> ce<br />

projet, d’après l. Katic, ne put être que <strong>Gottschalk</strong><br />

d’orbais 109 .<br />

<strong>de</strong>puis la première moitié du IX e siècle, les monastères <strong>de</strong><br />

la côte dalmate connaissaient la dévastation par <strong>de</strong> nombreux<br />

envahisseurs. normands et arabes se faisaient une<br />

concurrence acharnée. <strong>de</strong>ux chefs vikings, Hosteinn et<br />

Björn, livrent bataille en Méditerranée et sont battus par la<br />

flotte musulmane 110 . l’érudition bénédictine <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong><br />

séduisit le prince Trpimir, refondateur <strong>de</strong> la vie conventuelle<br />

en dalmatie. <strong>Gottschalk</strong> se considère alors comme<br />

un missionnaire après avoir reçu l’hospitalité d’eberhard<br />

dans le Frioul. la sécession <strong>de</strong> Trpimir d’avec Byzance et<br />

son rapprochement auprès <strong>de</strong> Petar, archevêque <strong>de</strong> Split,<br />

engendrèrent un renouveau intellectuel, dont le foyer fut le<br />

monastère <strong>de</strong> rizinice.<br />

Bernino interprète le périple <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> dans plusieurs<br />

provinces romaines, au prétexte <strong>de</strong> prédire l’évangile <strong>à</strong><br />

tous les païens 111 . Il est vrai qu’en dénonçant les thèses <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> dans son «De prae<strong>de</strong>stinatione et libero arbitrio»,<br />

Hincmar, son archevêque, relevait déj<strong>à</strong> son esprit<br />

d’enrolement par le nombre croissant <strong>de</strong> ses disciples 112 au<br />

sein <strong>de</strong>s communautés où il avait enseigné plusieurs<br />

(107) In Die Gedichte <strong>de</strong>s <strong>Gottschalk</strong> von<br />

Orbais, M.l. Weber p. 34, éd. Peter lang,<br />

(1992).<br />

(108) In, d.C. lambot opus cité p. 169.<br />

(109) In Saksonac <strong>Gottschalk</strong> na dvoru kneza<br />

Trpimira, éd. Bogoslovska Smotra, 20, (1932).<br />

(110) Voir carte d, p. 249.<br />

(111) d. Bernino : Historia di tutte l’héresie,<br />

t. II, p. 501, Venezia, (1724).<br />

(112) «G. habitu monachus, mente ferinus,<br />

quietes impatiens… et <strong>de</strong>uoturum sensus<br />

peiuertere et magistii sibi nomen usurpando…<br />

quoniam legitime non paterat, uita religiosa et<br />

catholica doctrina praeesse…»


années, comme celles d’orbais et <strong>Hautvillers</strong>. Mais<br />

<strong>Gottschalk</strong> explique ses désillusions italiennes et sa nostalgie<br />

lors <strong>de</strong> son séjour sur la côte dalmate. dans sa lettre en<br />

vers adressée <strong>à</strong> W. Strabon : «Vt quid iubes pusiole», il se<br />

plaint <strong>de</strong> sa relégation et <strong>de</strong> son éloignement 113 . <strong>Gottschalk</strong><br />

mentionne également, dans toutes ses correspondances,<br />

qu’il faut relever bon nombre <strong>de</strong> monastères, donc<br />

d’écoles. Il se sent investi d’une mission divine, mais son<br />

prédistianisme semble ne pas avoir eu prise sur Trpimir<br />

puisque les archéologues croates ont mis au jour l’inscription<br />

dédicatoire du monastère <strong>de</strong> rizinice, où le prince<br />

s’inquiète <strong>de</strong> ses fautes et <strong>de</strong> sa ré<strong>de</strong>mption 114 ; <strong>à</strong> moins que,<br />

comme le suggère l. Katic 115 , la doctrine sur la pré<strong>de</strong>stination<br />

«post praevisa <strong>de</strong>merita», c’est-<strong>à</strong>-dire <strong>à</strong> cause <strong>de</strong>s<br />

mauvaises actions prévisibles, agisse pénitentiellement sur<br />

l’âme chrétienne. Il ne faudrait pas alors s’étonner <strong>de</strong><br />

l’inscription dédicatoire <strong>de</strong> Trpimir. le long séjour <strong>à</strong> la<br />

cour <strong>de</strong> ce prince permit <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong> définir et <strong>de</strong><br />

répertorier les zones d’influences byzantines ou romaines.<br />

Il visita les provinces romaines qui s’étendaient au nord<br />

<strong>de</strong> Passau (sur le danube) jusqu’<strong>à</strong> Belgra<strong>de</strong>. a l’ouest,<br />

vers dr<strong>à</strong>c, il longea la côte adriatique jusqu’<strong>à</strong> la rivière<br />

Cetina et la ville <strong>de</strong> Klis. enfin il aborda <strong>à</strong> l’est l’état bulgare<br />

par nis. Mais la christianisation bulgare ne fut réelle<br />

qu’<strong>à</strong> partir <strong>de</strong> 864, or il est certain que <strong>Gottschalk</strong> quitta<br />

cette région avant 848.<br />

Il est intéressant cependant <strong>de</strong> souligner que sous Trpimir II,<br />

Constantin VII Porphyrogénète parle d’un thaumaturge<br />

nommé Martin 115 , et que ce <strong>de</strong>rnier venait d’une région<br />

franque située entre la Vénétie et la Croatie, autrement dit<br />

(113) «Cum sim longue exul ual<strong>de</strong><br />

intra mare ? …»<br />

alors que proscrit, éloigné <strong>à</strong> l’extrême, au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong><br />

<strong>de</strong>s mers… vers 4 et 5.<br />

(114) Construxi monasterium, ibique cateruas<br />

II. le gyrovague<br />

fratrum adhibui, quorum sedulis uotis et frequens<br />

oratio nos immunes red<strong>de</strong>ret <strong>de</strong> peccatis…<br />

incertus <strong>de</strong> die nouissimo… sollicitus<br />

nimis amimae. Cf. Seli_.<br />

(115) opus cité.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

53


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

54<br />

II. le gyrovague<br />

du Frioul. C’est <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> cette indication <strong>de</strong><br />

Porphyrogénète que <strong>de</strong> nombreux auteurs croates assimilent<br />

Martin 116 <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong> 117 . l’homme, poursuit Porphyrogénète,<br />

était très rigoureux et très pieux, ne prenait pas soin <strong>de</strong> sa<br />

personne, ne se baignait jamais, ne se lavait même pas la<br />

figure et les mains. enfin il était très laid 118 .<br />

Martin, toujours d’après Porphyrogénète, se présentait<br />

comme un médiateur <strong>de</strong> paix chez les Croates ; et il ajoute<br />

qu’il fut mutilé 119 . la médiation <strong>de</strong> Martin dont parle<br />

Constantin VII ne tient-elle pas aussi au fait que <strong>Gottschalk</strong>,<br />

grand voyageur, connaissait en plus du latin, langue incontournable<br />

<strong>de</strong>s lettrés, bon nombre <strong>de</strong> langues vernaculaires ?<br />

Il <strong>de</strong>vient alors l’intercesseur idéal entre les Francs, les<br />

Croates, les Bulgares et les Byzantins. on prête également <strong>à</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> d’avoir laissé <strong>de</strong>rrière lui, en haute Italie, un petit<br />

groupe <strong>de</strong> religieux qui continua <strong>de</strong> développer ses thèses<br />

sur la pré<strong>de</strong>stination. les influences et les débats engendrés<br />

par notre moine gyrovague dépassèrent donc largement l’aire<br />

<strong>de</strong>s provinces <strong>de</strong> reims, <strong>de</strong> Mayence et <strong>de</strong> lyon.<br />

Conclusion II<br />

(116) In Co<strong>de</strong> du roi Tomislav, Klaic, p. 213,<br />

Zagreb, (1925).<br />

(117) In Histoire croate, S. Sakac, contrat du<br />

pape agaton contre la guerre (Croatie sacrée)<br />

p. 433/434, Zagreb, (1925).<br />

(118) on retrouve l<strong>à</strong> le portrait physique <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> fait par Hincmar dans une lettre<br />

adressée <strong>à</strong> egilon : «sed postquam in eam<strong>de</strong>m<br />

mansionem intrauit, non solum corpus lauare<br />

noluit, uerum nec manus, nec faciem…»<br />

(119) Porphyrogénète a donc eu connaissance<br />

<strong>de</strong> la condamnation <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> Quierzy<br />

ainsi que <strong>de</strong>s sévices qu’il y avait subis.<br />

(120) après sa mort, les moines d’<strong>Hautvillers</strong><br />

chantèrent sa réhabilitation et insérèrent dans<br />

leur martyrologe, sous la rubrique du 30<br />

octobre, après avoir commémoré quatre autres<br />

religieux, le texte suivant : Commemoratio<br />

domnorum Marci, Hermeri, Witerbi et Petri<br />

hujus monasterii monachorum. Et piae memo-<br />

riae Gothescalci natione Germani, a praelaris<br />

ingenii dotibus cognomento Fulgentii. … Ubi<br />

falso criminatus, praecipitanter iudicatus, et<br />

iniuste damnatus… per annos nihilominus fere<br />

uiginti <strong>de</strong>morari compulsus… anno salutis<br />

octogentesimo sexagesimo octauo aetatis sexa<br />

gesimo secundo.<br />

Mémoire <strong>de</strong>s frères Marc, Hermeric,<br />

Viterbe et Pierre, moines <strong>de</strong> ce monastère,<br />

et aussi du pieux souvenir <strong>de</strong><br />

Gothescalc, germain d’origine, surnommé<br />

Fulgence pour l’éclat <strong>de</strong> son génie. …<br />

Faussement accusé, jugé sans examen,<br />

injustement condamné ; pendant 20 ans<br />

environ, il fut forcé <strong>de</strong> vivre en ce lieu.<br />

l’an <strong>de</strong> notre salut, le 868 e ; <strong>de</strong> son âge, le<br />

62 e , ce texte nous donne une autre indication<br />

sur la naissance <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. In<br />

abbé Manceaux, Histoire <strong>de</strong> l’abbaye<br />

d’<strong>Hautvillers</strong>, p. 253.


<strong>Gottschalk</strong> incarne les <strong>de</strong>ux extrêmes <strong>de</strong> l’homme médiéval<br />

: le marginal et le saint 120 . Ce qui réunit ces extrêmes en<br />

un même profil, c’est leur exclusion <strong>de</strong> la société reconnue<br />

par les pouvoirs religieux et laïcs. lorsque <strong>Gottschalk</strong> dans<br />

ses nombreux poèmes fait allusion <strong>à</strong> la souffrance <strong>de</strong> son<br />

exil, il ne parle pas seulement d’un bannissement physique,<br />

mais aussi d’un bannissement intérieur, comme<br />

celui qui résulte <strong>de</strong> l’exclusion d’un homme d’un pays du<br />

bénéfice <strong>de</strong>s sacrements, d’une privation <strong>de</strong>s moyens quotidiens<br />

du salut.<br />

Son exil est vécu comme une peine <strong>de</strong> substitution <strong>à</strong> la<br />

mort. Malgré la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> son ami d’enfance W. Strabon,<br />

cela lui coûte énormément <strong>de</strong> composer <strong>de</strong>s vers et <strong>de</strong>s<br />

chants. S’il cè<strong>de</strong>, c’est plus pour l’affection qu’il porte <strong>à</strong><br />

son compagnon <strong>de</strong> jeunesse bien-aimé, qu’<strong>à</strong> l’usage 121 .<br />

les critiques violentes <strong>de</strong> ses supérieurs raban Maur et<br />

Hincmar provoquent sa mauvaise réputation, «infamia», et<br />

<strong>Gottschalk</strong> en a conscience. déj<strong>à</strong> marginalisé en refusant<br />

l’irréversibilité <strong>de</strong> son état, il est tourmenté et obsédé par le<br />

péché. Son chemin <strong>de</strong> chrétien le conduira du bannissement<br />

<strong>à</strong> l’exclusion, puis <strong>de</strong> l’exclusion <strong>à</strong> l’excommunication.<br />

Sa véritable marginalisation provient <strong>de</strong> la décision <strong>de</strong> sa<br />

communauté <strong>de</strong> le priver du droit <strong>de</strong> séjour sur le territoire<br />

<strong>de</strong> ses ancêtres. en transformant ses voyages en errance<br />

pour fuir la vie organisée et la règle <strong>de</strong> sa communauté,<br />

<strong>Gottschalk</strong> entame un long processus <strong>de</strong> déconsidération :<br />

l’«ordo» est la seule valeur <strong>de</strong> son temps. Son existence<br />

apparaît scandaleuse parce qu’elle échappe <strong>à</strong> l’organisation<br />

<strong>de</strong> la société. Il attire la méfiance sociale et s’expose <strong>à</strong><br />

l’hostilité et <strong>à</strong> la répression. Ses déplacements constants <strong>à</strong><br />

travers les royaumes et les marches francs sont considérés<br />

comme <strong>de</strong>s éléments <strong>de</strong> désordre social. ainsi, il usurpe<br />

l’autorité <strong>de</strong>s évêques.<br />

(121) Il était courant <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>à</strong> ses amis<br />

<strong>de</strong>s poèmes. Florus <strong>de</strong> lyon le fit envers le<br />

II. le gyrovague<br />

grammairien Vulfin d’orléans, audin et<br />

Thomas au diacre Florus <strong>de</strong> lyon.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

55


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

56<br />

II. le gyrovague<br />

l’eglise s’est très tôt attachée <strong>à</strong> encadrer les mouvements<br />

spontanés <strong>de</strong> pèlerinage et <strong>de</strong> prosélytisme, afin <strong>de</strong> leur<br />

imposer <strong>de</strong>s structures formelles d’organisation et d’en<br />

faire, en assurant la «stabilitas in peregrinatione», un élément<br />

<strong>de</strong> l’ordre social 122 .<br />

les règles monastiques réprouvaient également les moines<br />

itinérants, «gyrouagi». Ce non-respect <strong>de</strong>s modèles <strong>de</strong><br />

comportements et <strong>de</strong>s systèmes <strong>de</strong> valeurs admis engendre<br />

l’infamie, mais on ne peut affirmer que la rupture fut totale<br />

entre le gyrovague et les communautés religieuses <strong>de</strong><br />

Corbie, d’orbais, <strong>de</strong> reichenau ou d’<strong>Hautvillers</strong>. la délinquance<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> fut fort bien tolérée par certains <strong>de</strong><br />

ses amis, ce qui démontre que la frontière séparant ceux<br />

qui se soumettaient aux règles <strong>de</strong> la vie monastique et ceux<br />

qui les enfreignaient était souple et fluctuante. <strong>Gottschalk</strong>,<br />

<strong>à</strong> cause <strong>de</strong> ses nombreuses pérégrinations, avait acquis une<br />

vision du mon<strong>de</strong> élargie qui télescopait celle d’un mon<strong>de</strong><br />

clos, recroquevillé sur lui-même, comme sur son propre<br />

savoir. Un mon<strong>de</strong> comme fini, figé, où l’information extérieure,<br />

moteur <strong>de</strong> nouvelles connaissances, <strong>de</strong>meurait<br />

pauvre et pénétrait mal.<br />

(122) B. Geremek : in L’homme médiéval, p. 387, éd. le Seuil, (1989).


<strong>Gottschalk</strong> d’orbais ou <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> est le<br />

premier membre <strong>de</strong> la lignée saxonne <strong>à</strong> jouer un<br />

rôle notable en littérature. Il fut instruit <strong>à</strong> l’école<br />

claustrale <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>, puis <strong>à</strong> reichenau où il se noua d’amitié<br />

avec Walafrid Strabon. Ce <strong>de</strong>rnier l’avait surnommé<br />

Fulgence, et en retour <strong>Gottschalk</strong> appelait son ami<br />

Honorat. ayant étudié avec ar<strong>de</strong>ur la littérature patristique,<br />

notamment saint augustin, il en fut l’un <strong>de</strong>s meilleurs exégètes<br />

<strong>de</strong> son temps. l’œuvre littéraire <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> comporte<br />

plusieurs écrits en prose et <strong>de</strong> nombreux poèmes. Il a<br />

fait abondamment usage <strong>de</strong> ses longues lectures <strong>de</strong> la première<br />

littérature chrétienne et <strong>de</strong>s Pères <strong>de</strong> l’église. Ses<br />

œuvres <strong>de</strong> grammaire datent <strong>de</strong> l’époque où il enseignait <strong>à</strong><br />

orbais, avant les années instables <strong>de</strong> prédication errante.<br />

Quant <strong>à</strong> sa poésie, elle révèle un esprit d’une gran<strong>de</strong> sensibilité<br />

et le montre sous un jour incomparablement plus<br />

favorable que ne peuvent le faire ses écrits théologiques.<br />

Cet esprit audacieux était très en avance sur son temps, ce<br />

qui peut expliquer partiellement sa persécution 123 .<br />

(123) le janséniste G. Maugin († 1674) a édité<br />

les courriers et les écrits <strong>de</strong> l’augustinien<br />

<strong>Gottschalk</strong> in «Veterum auxtorum qui nono<br />

I I I . L’ œuvr e<br />

III. l’œuvre<br />

saeculo <strong>de</strong> prae<strong>de</strong>stinatione et gratia scripserunt<br />

opera et fragmenta».<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

57


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

58<br />

III. l’œuvre<br />

L’enseignant<br />

Maître <strong>à</strong> l’école claustrale d’orbais, <strong>Gottschalk</strong> prodigue<br />

son enseignement <strong>à</strong> <strong>de</strong> nombreux moines 124 dont la liste fut<br />

établie, <strong>à</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’Hincmar, par le prévôt <strong>de</strong> l’abbaye<br />

ratramne 125 , ami <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> et auteur <strong>de</strong> plusieurs traités<br />

126 . l’examen précis <strong>de</strong>s opuscules théologiques et grammaticaux<br />

gottschalkiens permet <strong>de</strong> relever neuf cent vingt<br />

citations <strong>de</strong> l’ancien Testament, dont près <strong>de</strong> cinq cents<br />

sont extraites <strong>de</strong>s psaumes. on dénombre encore quelque<br />

<strong>de</strong>ux cent soixante citations liturgiques, dont près <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

cents sont empruntées au seul «Responsorial». on note<br />

encore sept cents citations patristiques, peu <strong>de</strong> citations <strong>de</strong>s<br />

Pères grecs, une ou <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> saint athanase, <strong>de</strong> saint Basile,<br />

<strong>de</strong> saint Cyrille d’alexandrie, <strong>de</strong> saint Jean Chrysostome et<br />

d’origène.<br />

la patristique orientale <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> se limite <strong>à</strong> une trentaine<br />

<strong>de</strong> textes. en revanche, les Pères latins sont souvent<br />

mis <strong>à</strong> contribution, particulièrement ceux du IV e siècle. Si<br />

saint ambroise n’est cité que six fois et saint Hilaire<br />

qu’une fois et <strong>à</strong> tort, saint Jérome l’est plus <strong>de</strong> dix fois.<br />

Quant <strong>à</strong> saint augustin, les extraits <strong>de</strong> ses œuvres repré-<br />

(124) abbé : Bavon. Prévots : ratramnus et<br />

ranradus. Frères : Frameradus, leutbertus,<br />

Siglehadus, Vereddranus, Stadivius,<br />

leutgarius, Berthelmus, Beringerus, Hardoinus,<br />

Hartgarius, dodo, Hrotgarius, Hranradus,<br />

Vuillebertus, Hratbertus, Vuido, Beregrinus,<br />

Bertolnus, Vulteganus, Gottescalcus, Florentius,<br />

Hrotlandus, Vuillelmus, remegius, Hosmannus,<br />

lantbertus, Hildradus, Haimardus, odo,<br />

o<strong>de</strong>lboldus, eurus, lanterus, rodoardus,<br />

Mathaeus, a<strong>de</strong>loldus, Sigfridus, rohulfus,<br />

Theodulfus, Ha<strong>de</strong>lobus, ernoldus, Vualterus,<br />

Ingranns, Boso, ragemfredus, Grimoldus,<br />

Heinricus, nithadus, anselmus, rigaudius,<br />

a<strong>de</strong>rulfus, Sainardus, ragenardus, Hugo,<br />

Vualo, odila, airardus, dudo, Fransberga,<br />

Fulco, Herbertus, Guntatus, Fulcricus,<br />

Macharinus, Berra, Cicbertus, Salaco,<br />

Vuarnerus, Vuarenus, Vuarinus, Panto,<br />

Gontbertus, alexandra, audo, otginus,<br />

Gudinus, ercanrus, ado, Hunricus, Beddo,<br />

lantcarius, Hrothlodus, angelbertus, o<strong>de</strong>lricus,<br />

Vulfardus, euregrimmus, agenoldos, Ingobertus,<br />

Marcoinus, ermenardus, Gautbertus (messager<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>) eudo, anstramnus,<br />

Siglulfus, Hobericus, Berilus, Magnoadus,<br />

Gauzsulfus, Hairbernus, Ha<strong>de</strong>boldus, Hrotgarius,<br />

Teu<strong>de</strong>ricus, Hainricus, ercanradus, rothildis,<br />

Theu<strong>de</strong>ricus, Fulcricus, Hildiadis.<br />

Cf. dom dubout, Histoire <strong>de</strong> l’abbaye<br />

d’Orbais, catalogue <strong>de</strong>s religieux.<br />

(125) Il apparaît en 825 au monastère <strong>de</strong><br />

Corbie.<br />

(126) ratramne († 870) : De corpore et sanguine<br />

domini liber <strong>de</strong> anima ad odonem bellouacensem<br />

episcopum <strong>de</strong> natinitate cristi.


III. l’œuvre<br />

sentent environ la moitié <strong>de</strong>s citations patristiques données<br />

par <strong>Gottschalk</strong>. Parmi les Pères <strong>de</strong>s autres siècles, signalons<br />

saint Grégoire le Grand, cité plus <strong>de</strong> soixante dix fois,<br />

<strong>à</strong> peu près aussi souvent que saint Jérome et saint Isidore<br />

cité un peu plus <strong>de</strong> trente fois. l’auteur <strong>de</strong>s «Etymologiae»<br />

est surtout utilisé en tant que source <strong>de</strong> science profane ;<br />

autres contenus <strong>de</strong> cette nature : donat, cité six fois et<br />

Priscien cité cinquante fois. <strong>Gottschalk</strong> connaît les traités<br />

<strong>de</strong> Charisius, Pompée, les commentaires <strong>de</strong> Servius sur<br />

Virgile, le «De orthographia» d’agroecius et <strong>de</strong> Bè<strong>de</strong>. Il<br />

cite également audax, aulu-Gelle, avianus, Caper,<br />

Cicéron, Horace, Jules Sévère, ovi<strong>de</strong>, Papirianus, Platon,<br />

Pseudo-Caton, Probus, Salluste, Térence, Thucydi<strong>de</strong> et<br />

Virgile le Grammairien. la qualité <strong>de</strong> son enseignement se<br />

mesure dans ses étu<strong>de</strong>s grammaticales et étymologiques.<br />

Par ses connaissances du patrimoine culturel antique et<br />

celles du mon<strong>de</strong> savant carolingien, il préconise <strong>à</strong> ses<br />

élèves et disciples <strong>de</strong> nombreuses lectures.<br />

auprès <strong>de</strong> ses amis, il cherche <strong>à</strong> vali<strong>de</strong>r ses recherches.<br />

Mais on ne trouve pas chez <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong> relations<br />

notoires entre sa prose et son style poétique. Il conduit<br />

surtout <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> textes <strong>à</strong> travers la grammaticalité<br />

<strong>de</strong>s écrits anciens, contribuant ainsi <strong>à</strong> une critique originale<br />

<strong>de</strong>s textes antiques. le co<strong>de</strong>x Bernensis 83 est assurément<br />

l’œuvre majeure qui nous soit parvenue. elle pose<br />

la question : jusqu’où <strong>Gottschalk</strong> a-t-il suivi la tradition<br />

<strong>de</strong> l’école <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> ?<br />

dans ses écrits et ses cours, esprit inquiet, il introduit systématiquement<br />

une courte recherche. Il veut s’assurer <strong>de</strong> la<br />

pertinence et <strong>de</strong> la vérité <strong>de</strong> ses assertions.<br />

C’est ainsi qu’il explique le sens <strong>de</strong>s mots rares et étrangers<br />

; déclinaison, forme radicale <strong>de</strong>s mots sont alors justifiées.<br />

Mais il ne mènera pas d’étu<strong>de</strong>s étymologiques dans<br />

ses poèmes.<br />

Pour se disculper, <strong>Gottschalk</strong> pousse ses recherches très<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

59


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

60<br />

III. l’œuvre<br />

loin sur les antonymes, les homonymes, les synonymes, les<br />

apocopes et les étymologies. Par exemple, entre certains<br />

mots comme : «ludus» et «lusus» 127 entre «oportet» et<br />

«expedit» 128 . Il définit «mystes», «chaos», «lucubratiuncula»,<br />

«furcifer» 129 . Il explique et donne l’étymologie <strong>de</strong>s<br />

mots : «hebetudo», «<strong>de</strong>us», «augurium», «dux…» ; pour<br />

les noms propres comme «Edomita» et «Altumvillare», il<br />

précise la bonne orthographe. Il en va <strong>de</strong> même pour les<br />

déclinaisons <strong>de</strong> «barabas», les conjugaisons <strong>de</strong> «frustrare»<br />

et les formes radicales <strong>de</strong> «confricare».<br />

Pour <strong>Gottschalk</strong>, l’important est <strong>de</strong> retrouver le sens premier<br />

<strong>de</strong>s mots ; cette exigence lui permet <strong>de</strong> leur redonner<br />

un nouveau sens qu’il appelle : «poetria» (poétesse) 130 . Il<br />

commente <strong>de</strong>s citations qu’il trouve étranges ou qui représentent<br />

<strong>à</strong> ses yeux une certaine valeur du point <strong>de</strong> vue du<br />

style, telles que celles <strong>de</strong>s anglo-Saxons aldhelm et Bè<strong>de</strong>.<br />

<strong>Gottschalk</strong> se reconnaît comme le fidèle critique <strong>de</strong>s premiers<br />

grammairiens. Il s’acharne <strong>à</strong> démontrer combien la<br />

Bible est victime <strong>de</strong> tropes et il se réfère le plus souvent<br />

possible <strong>à</strong> Priscien 131 .<br />

ainsi, il dénonce vigoureusement toutes les antonomases,<br />

catachrèses, métaphores, métonymies et autres synecdoques.<br />

Pour lui, ceux qui se laissent prendre <strong>à</strong> ces figures<br />

et pensent différemment, sont dans l’erreur 132 . Il se montre<br />

récalcitrant avec tous ceux qui n’adhèrent pas <strong>à</strong> sa<br />

rigueur 133 . Il considère également que la phonétique <strong>de</strong>s<br />

antiphonaires est inexacte et veut qu’on écrive, afin d’éviter<br />

la répétition <strong>de</strong> «i», «reuiuescit» et non «reuiuiscit», «bonefacius»<br />

et non «bonifacius», il en est <strong>de</strong> même «genetrix» et<br />

«genetiuus». on observe chez lui qu’il a adopté, pour le<br />

(127) amusement et badinage (spécialement<br />

en versification).<br />

(128) Il faut, il importe que.<br />

(129) «Initié au mystère», «ténèbres» ou «vi<strong>de</strong><br />

originel», «œuvre <strong>de</strong> la nuit», «gibier <strong>de</strong> potence»<br />

ou «pendard».<br />

(130) d.C. lambot, p. 489, op. cité.<br />

(131) Tot artium liberatium singulariter tunc<br />

temporis capax sagax Priscianus :<br />

d.C. lambot, p. 191.<br />

(132) d.C. lambot, p. 469.<br />

(133) «uitium alternitatis» in d.C. lambot,<br />

p. 456, 458, 481, 486.


nom <strong>de</strong> Saint-rémi, la graphie <strong>de</strong> remegius <strong>de</strong> préférence <strong>à</strong><br />

remigius. Il inaugure également le principe <strong>de</strong> l’asyndète et,<br />

supprimant ainsi toute conjonction entre <strong>de</strong>ux termes <strong>de</strong> rapport<br />

étroit, il rend ses écrits plus incisifs et plus concis.<br />

Son enseignement s’appuie pour l’essentiel, sur Saint<br />

Jérome et les autres auteurs patristiques, afin <strong>de</strong> mieux<br />

affirmer que ces «auteurs classiques» 134 se suffisent <strong>à</strong><br />

eux-mêmes.<br />

les hautes autorités religieuses du IX e siècle se référaient<br />

<strong>à</strong> la Bible, dans sa version latine, pour toutes les questions<br />

grammaticales. or pour <strong>Gottschalk</strong>, c’est le Saint-esprit en<br />

personne qui a dicté cette traduction, c’est donc la grammaire<br />

qui rend lisible et correcte la Bible, et non les textes<br />

bibliques qui imposent la grammaire 135 . nous touchons l<strong>à</strong><br />

l’axiome <strong>de</strong> la pensée <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. dans une lettre <strong>de</strong><br />

saint Paul, il prend la liberté d’apporter <strong>de</strong>s corrections<br />

qu’il considère comme <strong>de</strong>s améliorations. C’est ainsi qu’il<br />

travaille sur la prosodie, l’accentuation, la métrique et sur<br />

toutes les questions <strong>de</strong> forme <strong>de</strong> la «paenultima». Il n’hésite<br />

pas <strong>à</strong> s’en prendre d’une façon offensante <strong>à</strong> Virgile<br />

pour son <strong>de</strong>uxième éloge concernant l’amour entre garçons<br />

136 . Il n’offre pas <strong>à</strong> ses élèves que <strong>de</strong>s références patristiques,<br />

mais aussi celles <strong>de</strong> nombreux auteurs profanes 137 .<br />

Il est l’intégrateur <strong>de</strong>s auteurs romains anciens et <strong>de</strong> l’augustinisme<br />

au profit du christianisme. Ses connaissances<br />

dans le domaine <strong>de</strong> la littérature grecque semblent superficielles,<br />

néanmoins ses multiples séjours en diverses<br />

contrées feront <strong>de</strong> lui un fin linguiste. C’est ainsi qu’il distinguera,<br />

en comparant plusieurs langues, l’utilisation faite<br />

(134) Pour K. Vielhaber, ce concept n’était pas<br />

usité au IX e siècle in <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>r Sachse,<br />

p. 39.<br />

(135) d.C. lambot, p. 381/390.<br />

(136) d.C. lambot, p. 91.<br />

(137) Il cite couramment agroecius,<br />

ammien-Marcellin, audax, Pseudo-augustin,<br />

III. l’œuvre<br />

aulu-Gelle, avianus, Caper, Pseudo-Caton,<br />

Charisius, Cicéron, donat, Horace, Josèphe,<br />

Jules Sévère, ovi<strong>de</strong>, Papirianus, Phèdre,<br />

Platon, Pompeius, Priscien, Probus, Salluste,<br />

Servius, Térence, Thucydi<strong>de</strong>, Virgile et<br />

Virgile le Grammairien. Cf. d.C. lambot,<br />

p. 554 <strong>à</strong> 556.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

61


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

62<br />

III. l’œuvre<br />

par les peuples germaniques du génitif et par les peuples<br />

latins <strong>de</strong> l’ablatif : «gens teudisca habet pene distinctos<br />

casus in lingua sua sicuti sunt et in latina». <strong>Gottschalk</strong> est<br />

le premier <strong>à</strong> différencier et <strong>à</strong> analyser les idiomes <strong>de</strong> la<br />

Vénétie et <strong>de</strong> la dalmatie.<br />

Par son érudition, il se sentait partout <strong>à</strong> la maison et ses origines<br />

saxonnes n’influèrent en rien sur son goût pour la<br />

culture antique ; il est un pur produit <strong>de</strong> la renaissance<br />

carolingienne, un maître qui, <strong>à</strong> l’intérieur et <strong>à</strong> l’extérieur<br />

<strong>de</strong>s écoles claustrales <strong>de</strong> reichenau, Corbie, orbais et, plus<br />

tard, <strong>Hautvillers</strong>, attirera <strong>de</strong> nombreux a<strong>de</strong>ptes.<br />

Le poète<br />

les douze cent soixante vers <strong>de</strong> l’œuvre poétique <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> qui lui sont attribués démontrent que ses<br />

poèmes, au contenu religieux et spirituel, ne sont guère <strong>de</strong><br />

pure convention.<br />

la bouche <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> n’émet que <strong>de</strong>s sons graves et ne<br />

dépeint jamais les couleurs claires.<br />

les poèmes conservés et d’authenticité reconnue 138 , <strong>à</strong><br />

moins que l’on parte d’une représentation erronée, confirment<br />

ainsi les échanges fructueux qu’il entretenait avec<br />

ses amis W. Strabon et ratramne <strong>de</strong> Corbie. Comme lui,<br />

ils furent <strong>de</strong> grands spécialistes <strong>de</strong> la métrique. l’esprit<br />

religieux <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> s’illustre particulièrement dans un<br />

cycle <strong>de</strong> huit poèmes en forme d’hymnes pour les heures<br />

canoniales <strong>de</strong> vêpres <strong>à</strong> none. Il y développe les pensées<br />

qui conviennent <strong>à</strong> chaque moment du jour et débouche<br />

souvent sur une prière pour <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> dieu :<br />

(138) Christe mearum. Spes mea Christe.<br />

Christe rex regnum. O ueneranda <strong>de</strong>i suboles.<br />

O <strong>de</strong>us miseri misere serui. Vt quid iubes. Age<br />

quaeso perge Clio. Heu ualeo omnigenum.<br />

O mi custos. Horarium. Ebo Remensu <strong>de</strong>cus.<br />

Quo ne tu missus. Cf. l’étu<strong>de</strong> philogique <strong>de</strong><br />

M.l. Weber, in Die Gedichte <strong>de</strong>s <strong>Gottschalk</strong><br />

von Orbais, éd. Peter lang, Frankfurt (1992).<br />

Voir annexe e, p. 181 <strong>à</strong> 215.


III. l’œuvre<br />

«Horae primae»<br />

«Audi lau<strong>de</strong>s horae primae, <strong>de</strong>us clementissime<br />

Quas tibi fundit <strong>de</strong>uote necnon fi<strong>de</strong>lissime<br />

Grex pusillus ac misellus humilis et modicus<br />

Namque tu es magnus sator uitis et agricola,<br />

Non confuse nec diuise tu, pater familias,<br />

Operarios conducens electam in uineam…»<br />

Ses chants hymniques relèvent davantage <strong>de</strong> la sphère privée.<br />

les prières scandées comme <strong>de</strong>s récitatifs expriment<br />

surtout la piété personnelle <strong>de</strong> l’auteur. Ses réflexions sur sa<br />

faiblesse et sa culpabilité, sur la pénitence et l’imploration<br />

<strong>de</strong> la miséricor<strong>de</strong> divine révèlent également l’état du grand<br />

tourment qui l’animait. Son «horarium» est précédé d’une<br />

introduction en prose et débouche sur <strong>de</strong>ux cent vingt-<strong>de</strong>ux<br />

septénaires trochaïques. Mais <strong>Gottschalk</strong> excelle également<br />

dans la métrique adonienne :<br />

«Christe mearum»<br />

Gloria lausque<br />

Sit tibi, Christe<br />

Cum genitare<br />

Quin et amore<br />

Nunc utriusque<br />

Quin sine fine, amen. (<strong>de</strong>rnière strophe)<br />

dans ce poème <strong>de</strong> douze strophes et <strong>de</strong> soixante douze<br />

vers, composés très tôt lors <strong>de</strong> son premier séjour <strong>à</strong> orbais,<br />

la joie <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> se change très nettement en musique.<br />

la répartition en strophes <strong>de</strong> six vers, conjointement <strong>à</strong> la<br />

contrainte <strong>de</strong>s rimes <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux syllabes avec assonances, crée<br />

une régularité formelle qui est inhabituelle pour l’époque et<br />

qu’on rencontre rarement avec une telle ampleur dans les<br />

vers adoniens. Ce n’est pas l<strong>à</strong> une tentative passagère mais<br />

bien un penchant caractéristique <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, comme le<br />

prouvent les poèmes rythmiques composés une douzaine<br />

d’années plus tard en Italie et en dalmatie.<br />

dans son poème sur la pénitence : «O <strong>de</strong>us, miseri, mise-<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

63


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

64<br />

III. l’œuvre<br />

rere serui», les mêmes tendances dans la structure et l’ornementation<br />

artistique se retrouvent malgré d’autres éléments.<br />

le <strong>de</strong>rnier vers «oh, que m’arrive-t-il ?» est répété<br />

comme un refrain interrogatif. la forme et le fond s’unissent<br />

parfaitement et l’insistance progressive est <strong>à</strong> peine<br />

perceptible. Quant <strong>à</strong> la répétition du premier vers, elle tient<br />

en haleine l’auditeur comme pour lui donner le sentiment<br />

d’une régénération <strong>de</strong> la prière.<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Ex quo enim me iussisti hunc in mundum nasci<br />

Prae cunctis ego amaui uanitate pasci<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

Ce poème sur l’humilité composé <strong>de</strong> cent quarante vers,<br />

est certainement avec «Vt quid iubes», la meilleure partie<br />

<strong>de</strong> l’œuvre <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. Il montre l<strong>à</strong> toute sa sensibilité<br />

et, conscient <strong>de</strong> sa propre faiblesse, la misère <strong>de</strong> l’homme.<br />

Il incline tout simplement <strong>à</strong> l’humilité que lui a enseignée<br />

la règle <strong>de</strong> Saint-Benoît. Son chant <strong>à</strong> un ami <strong>de</strong> reichenau,<br />

«Vt quid iubes, pusiole», fut longtemps contesté.<br />

Vt qui iubes, pusiole<br />

Quare manda, filiole<br />

Carmen dulce me cantare<br />

Cum sim longe exul Val<strong>de</strong><br />

Intra mare?<br />

O cur iubes canere? 139<br />

les treize strophes contiennent soixante-dix-huit vers<br />

adressés <strong>à</strong> un «pusiolus», et témoignent d’une égale maîtrise.<br />

Simple dans l’expression et aisément compréhensible,<br />

si l’on sait d’abord <strong>de</strong> quoi il en retourne, ce poème ne se<br />

rapporte pas <strong>à</strong> une relation pédérastique, et ne s’adresse<br />

pas <strong>à</strong> l’enfant Jésus comme certains l’ont envisagé. le <strong>de</strong>s-<br />

(139) Par quelle invite, jeune garçon,<br />

Fils bien-aimé, pourquoi me donner cette mission<br />

<strong>de</strong> me chanter <strong>de</strong> doux chants,<br />

alors que proscrit, dans l’extrême éloignement<br />

en <strong>de</strong>ç<strong>à</strong> <strong>de</strong>s mers ?<br />

o pourquoi cet engagement <strong>à</strong> chanter ?<br />

(Traduction libre).


tinataire n’est autre que Walafrid Strabon, comme l’ont<br />

prouvé les strophes ultérieurement découvertes 140 . Cet ami<br />

<strong>de</strong> jeunesse semble avoir <strong>de</strong>mandé <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong>, résidant<br />

au loin, <strong>de</strong> lui envoyer au moins une fois un poème et le<br />

malheureux exilé répond «carmen dulce» ; pourtant il n’en<br />

avait pas le cœur : les vers : «cum sim longe exul ual<strong>de</strong> / intra<br />

mare ?» ne se rapportent-ils pas également <strong>à</strong> l’état <strong>de</strong> disposition<br />

au péché, vécu <strong>de</strong> manière intense par <strong>Gottschalk</strong> ? Si<br />

on n’y voit qu’une allusion au séjour <strong>de</strong> l’auteur, dans ce <strong>de</strong>rnier<br />

cas, entrent en ligne <strong>de</strong> compte les années du prédicateur<br />

errant qu’il fut ; époque qui suit l’expulsion prononcée par le<br />

comte eberhard <strong>de</strong> Frioul.<br />

Mais ce n’est pas une alternative, <strong>de</strong> même qu’exégèse historique<br />

et exégèse allégorique ne s’excluent pas l’une,<br />

l’autre. a côté <strong>de</strong>s hexamètres et distiques qui sont<br />

employés d’ordinaire, <strong>Gottschalk</strong> utilise diverses strophes<br />

saphiques. dans «Christe rex regnum» ce sont douze<br />

strophes <strong>de</strong> tétramètres dactyliques. dans «O ueneranda<br />

<strong>de</strong>i suboles», il compose trente vers alcaïques et dans :<br />

«Age quaeso perge clio», <strong>de</strong>s vers anacréoniques.<br />

les formes et le fond stylistique <strong>de</strong> la versification <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> se reconnaissent encore dans la longue dédicace <strong>de</strong><br />

l’évangéliaire d’ebon 141 . elle est composée <strong>de</strong> quatre-vingtdouze<br />

hémistiches en quarante six hexamètres léonins 142 .<br />

Ebo Remensus <strong>de</strong>cus, praesul pastorque coruscus<br />

Celsa et clara farus, sanctis per saecula carus<br />

Ordinis omnis honos pariterque piissimus heros<br />

Atque sui compos quin noster ad omnia custos,<br />

5 Pontificum culmen seu dulce et nobile lumen,<br />

Cunctorum specimen ostrumque optabile tegmen<br />

(140) B. Bischoff, in Mittelalteriche Studien,<br />

Band II, p. 26, éd. anton Hiersemann,<br />

Stuttgart. (1967).<br />

(141) ebon († 851).<br />

(142) Voir planche I, p. 226.<br />

III. l’œuvre<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

65


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

66<br />

III. l’œuvre<br />

Et cleri norma et uulgi pia fanine forma,<br />

Doctor euangelicus, praecelsi regis amicus,<br />

Hunc in honore <strong>de</strong>i Petrique in amore beati<br />

10 Librum iussit agi plenus spiraminis almi,<br />

Cuius ad imperium accelerans uelociter illum,<br />

Abba humilis noster Petrus placidusque magister<br />

Coepit anhelanter perfecit et ipse flaganter<br />

Hunc auro interius Christi <strong>de</strong>uorauit amicus<br />

15 Atque ebore exterius pulchre <strong>de</strong>compsit opimus<br />

Sic et ut ornauit domino Petroque dicauit<br />

Culmine apostolico <strong>de</strong>itatis munero primo<br />

Sicque iubente illo mox paruit hic quoque dicto<br />

Praecepit dominus, perfecit uernula fidus<br />

20 Edixitque sacer celeberrimus atque magister<br />

Effecitque alacer fidissimus atque minister.<br />

Iusserat immo pater prolesque peregit amanter,<br />

Tertius hos inter Christus sit postulo semper.<br />

Hic enim euangelici retinentur bis duo libri :<br />

25 Mathei ac Marci Lucaeque Iohannis et almi.<br />

Hic quadriga pii micat ac nitet inclita Christi<br />

Quin etiam medici patet hic medicina corusci.<br />

Huc uos, o cuncti, properate ar<strong>de</strong>ntius aegri,<br />

Quaerite hic domini ex animo suffragia summi,<br />

30 Et rapite altithroni hinc passim medicamina Christi,<br />

Nanque hic langores poscentum diluit omnes,<br />

Hic facit incolomes citius remeare potentes<br />

Insuper et flentes regredidat celsus ouantes.<br />

Hic est omnipotens necnon super omnia clemens,<br />

35 Hic dabit et uobis optatae iura salutis,<br />

Supplicibus uotis illum quicumque petetis,<br />

Ad quem <strong>de</strong>lictis pro uestris quique uenitis,<br />

Carmen et hoc legitis, dominum, <strong>de</strong>posco, petatis,<br />

Lucis ut in celsae hoc arce rependat utrique<br />

40 Donet et eximiae pacis dia<strong>de</strong>ma perenne<br />

Eboni almifico quin Petro corte pudico,


Scilicet eximio duci cum prole magistro.<br />

Sitque illis solio Christus retributor in alto,<br />

Ipsorum studio quod hic libenter emicat auro,<br />

45 Et simul aetherio iugiter potiantur Olympo<br />

Cum patre seu nato necnon cum flamine sancto 143 .<br />

le prédécesseur d’Hincmar au siège <strong>de</strong> reims, l’évêque<br />

ebon, a donné lieu <strong>à</strong> l’abbé Pierre d’<strong>Hautvillers</strong> <strong>de</strong> produire<br />

un superbe évangile manuscrit, appelé évangéliaire<br />

d’ebon, qui, <strong>de</strong>puis la révolution française, est conservé<br />

dans la médiathèque municipale d’epernay. le manuscrit<br />

est introduit par les hexamètres ci-<strong>de</strong>ssus, dédicace révélant<br />

le haut-savoir <strong>de</strong> son auteur et copiste. Ces hexamètres<br />

léonins et ces tria<strong>de</strong>s en vers donnent <strong>à</strong> croire que<br />

seul <strong>Gottschalk</strong> en est l’auteur 144 . en effet, l’examen attentif<br />

<strong>de</strong> cette dédicace fait apparaître comme très vraisemblable<br />

une paternité gottschalkienne. Certes, on trouve<br />

aussi dans la poésie d’engelmod <strong>de</strong> Corbie <strong>de</strong>s hexamètres<br />

léonins, mais aucune tria<strong>de</strong> en vers. Quand bien<br />

même, parmi les cent dix hexamètres d’engelmod, se rencontre<br />

une fois la technique, caractéristique <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> : l’élision penthémimère.<br />

(143) ebon, l’honneur <strong>de</strong> reims, illustre pontif,<br />

pasteur brillant et céleste rayon, cher aux saints<br />

dans tous les siècles, honneur <strong>de</strong> tout le clergé,<br />

notre vigilant gardien, le plus grand <strong>de</strong>s pontifs,<br />

douce et forte lumière, le modèle <strong>de</strong> tous, notre<br />

puissant défenseur, la vivante règle du clergé, sa<br />

pieuse parole instruit les peuples <strong>à</strong> la vertu, docteur<br />

évangélique, ami d’un illustre monarque a<br />

fait faire ce livre. Il l’a donc commencé en<br />

l’honneur <strong>de</strong> dieu et par amour pour le bien<br />

heureux saint Pierre. S’empressant <strong>à</strong> ses ordres<br />

Pierre, notre humble abbé, notre doux maître, le<br />

commença avec hâte et l’acheva, avec veine,<br />

ami du Christ, il couvrit ses feuilles d’or et le<br />

revêtit magnifiquement d’ivoire. aussitôt qu’il<br />

fut orné ainsi, ebon le consacra au Seigneur, <strong>à</strong><br />

saint Pierre ce prince <strong>de</strong>s apôtres, comme pre-<br />

III. l’œuvre<br />

mier bienfait offert <strong>à</strong> la divinité, Pierre s’était<br />

empressé d’exécuter l’ordre d’ebon, ce qu’il<br />

avait accompli, un maître aussi célèbre ordonné,<br />

un agent sûr et actif en tout l’a exécuté. Que<br />

le seigneur soit avec eux, c’est ce que je <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

toujours. oh vous qui lisez ces vers, je vous<br />

en supplie, <strong>de</strong>man<strong>de</strong>z au Seigneur que du haut<br />

du lumineux palais, il répan<strong>de</strong> ses dons sur le<br />

généreux ebon et sur Pierre, ainsi que ses<br />

humbles enfants avec cet excellent maître, l’immortel<br />

ban<strong>de</strong>au <strong>de</strong> la paix divine. Que le Christ,<br />

près du trône céleste, récompense ceux par les<br />

soins <strong>de</strong>squels l’or brille sur ce livre et qu’ils<br />

jouissent tous ensemble du Ciel avec le Père, le<br />

Fils et le Saint-esprit.<br />

(144) n. Fickermann : in Poetia VI, p. 88 et<br />

M.l. Weber, op. déj<strong>à</strong> cité, p. 92.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

67


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

68<br />

III. l’œuvre<br />

Chez ce <strong>de</strong>rnier, on trouve cette élision vingt neuf fois dans<br />

ses <strong>de</strong>ux cent soixante-dix-neuf hexamètres 145 , ainsi sur<br />

une fréquence <strong>de</strong> dix vers s’échappe une telle élision. C’est<br />

<strong>de</strong> la sorte que se distinguent fortement les hexamètres<br />

léonins d’engelmod <strong>de</strong> ceux <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. en vérité, la<br />

dédicace en vers <strong>de</strong> l’évangéliaire d’ebon correspond pleinement<br />

au genre unique <strong>de</strong> la technique <strong>de</strong> versification <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>. ainsi, en plus <strong>de</strong>s léonins et <strong>de</strong>s tria<strong>de</strong>s en<br />

rimes, les quarante-six hexamètres, contenant quatre fois<br />

<strong>de</strong>s élisions typiques (vers 7, 11, 29 et 30), s’adaptent <strong>de</strong><br />

cette manière <strong>à</strong> la fréquence habituelle du Saxon. Ce qui<br />

frappe également, <strong>à</strong> diverses reprises, chez ce <strong>de</strong>rnier, c’est<br />

qu’on trouve <strong>de</strong>s rimes <strong>à</strong> <strong>de</strong>ux syllabes (vers 2, 7, 8, 13 et<br />

16). a côté <strong>de</strong> cette concordance dans la technique <strong>de</strong> versification,<br />

se rencontrent également <strong>de</strong>s assonances stylistiques<br />

qui concernent le fond.<br />

dans sa lettre-poème <strong>à</strong> ratramne <strong>de</strong> Corbie et dans sa<br />

lettre <strong>à</strong> loup <strong>de</strong> Ferrières, nous y retrouvons comme dans<br />

cette dédicace le même panégyrique outré. Faire plaisir en<br />

utilisant <strong>de</strong>s compliments est un trait répandu dans la littérature<br />

carolingienne, néanmoins, la surabondance ici <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> passe la mesure. Il en est <strong>de</strong> même pour la<br />

longue, presque lassante, énumération <strong>de</strong>s vers 1 <strong>à</strong> 8 et 19<br />

<strong>à</strong> 23, qui rappelle <strong>de</strong> nombreux passages ressemblant <strong>à</strong> la<br />

prose <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

l’isocolon <strong>de</strong>s vers 19 et 20 est frappant et <strong>de</strong>s traits antérieurs<br />

ne manquent pas (vers 2 et 45).<br />

nous rencontrons dans la poésie du Saxon l’utilisation<br />

spontanée <strong>de</strong> «minister» (vers 21) comme le signe direct<br />

<strong>de</strong>vant nous expliciter le nom particulier <strong>de</strong> uernula (vers<br />

19), nous rappelant ici l’utilisation <strong>de</strong> «seruus» synonymique<br />

<strong>de</strong> «serua», ce qui le caractérise ainsi doublement 146 .<br />

(145) l. Traube : in M.G.H., poet., lat., med.,<br />

aevi, t. III, Berlin (1896).<br />

(146) In Poetia III, chant 2, strophe 5, vers 2<br />

et chant 3, strophe 6, vers 1.


nous retrouvons le petit mot «quin» 147 trois fois (vers 4, 27<br />

et 41). les adverbes comme «ter» sont aussi souvent utilisés<br />

et spécifiques <strong>de</strong> son style (vers 11, 13, 22 et 45). Parmi<br />

le recherché «iugiter» (vers 45) sont aussi typiques : «insuper»<br />

(vers 33), «hinc» (vers30), «necnon» (vers 34) et<br />

«scilicet» (vers 42). la répétition <strong>de</strong> «<strong>de</strong>posco» avec<br />

«petatis» (vers 38) est en fait d’un usage singulier qui lui<br />

est propre. nous trouvons aussi chez lui l’attribution équivalente<br />

pour «celsa» «clara» (vers 2), «heros» «custos»<br />

(vers 3 et 4), «norma» «forma» (vers 7), «omnipotens»<br />

«clemens» (vers 34) ce qui ne peut être encore un hasard.<br />

dans sa lettre <strong>à</strong> loup, nous reconnaissons «piissimus» (vers 3)<br />

comme attribut <strong>de</strong> la parole, «fidissimus» (vers 21) comme<br />

attribut <strong>de</strong> soi. d’autres expressions apparentées <strong>à</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> se retrouvent dans «regis praecelsi» (vers 8),<br />

«summi domini» (vers 29), «altithroni Christi» (vers 30),<br />

«supplicibus votis» (vers 36), «in arce celsae lucis» (vers 39)<br />

et «aetherio Olympo» (vers 45). Parfois <strong>de</strong>s qualificatifs<br />

simples désignent le Christ comme «celsus» (vers 33) ou<br />

«natus» (vers 46), le Saint-esprit comme «flamen» (vers 46).<br />

Il fait également usage du mot docteur pour figurer le<br />

Christ (vers 27 et 30). en fin <strong>de</strong> compte une pareille maîtrise<br />

<strong>de</strong> la métrique ne peut être attribuée, comme le suppose<br />

Fickermann, qu’<strong>à</strong> un esprit aussi élevé et mystique<br />

que <strong>Gottschalk</strong>, seul capable d’une telle doxologie.<br />

Un nouvel examen du manuscrit nous a conforté dans cette<br />

attribution, cette rare habileté pose également le problème<br />

<strong>de</strong> la date <strong>de</strong> son achèvement. ebon, archevêque <strong>de</strong> reims<br />

fut déposé en 835 mais n’a jamais renoncé <strong>à</strong> son siège 148 ,<br />

même après sa nomination au siège d’Hil<strong>de</strong>sheim par<br />

(147) l. Traube in M.G.H. Poetia III, reconnaît<br />

ce mot comme une expression propre <strong>à</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>.<br />

(148) «timens quia nullatenus suam adapisci<br />

posset pacifice se<strong>de</strong>m, apostolica auctoritate et<br />

consenso episcoporum, dono etiam Hiudouuici<br />

III. l’œuvre<br />

regis germaniae a<strong>de</strong>ptus est, pro tempore ipse<br />

uacans auxantem se<strong>de</strong>m Hiltinesheim, adspirans<br />

semper ad proprium se<strong>de</strong>m». In M.G.H.,<br />

Concilia II, p. 812. Cédule <strong>de</strong>s clercs rémois<br />

contre Hincmar.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

69


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

70<br />

III. l’œuvre<br />

louis le Germanique. la confection du manuscrit sous<br />

l’abbatiat <strong>de</strong> Pierre d’<strong>Hautvillers</strong> peut donc être située <strong>à</strong><br />

partir <strong>de</strong> 833. l’errance <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> après<br />

orbais s’explique aisément, une petite journée <strong>de</strong> marche<br />

sépare les <strong>de</strong>ux abbayes. la vacance du siège épiscopal <strong>de</strong><br />

reims jusqu’en 845 permet également d’imaginer que<br />

<strong>Gottschalk</strong>, au même titre que les clercs rémois, considérait<br />

toujours ebon, malgré sa déposition et après sa pénitence,<br />

comme son métropolitain. Il a pu donc composer cette dédicace<br />

ultérieurement. le flot <strong>de</strong> louanges qu’elle contient ne<br />

put être engendré que par les bons rapports entretenus avec<br />

ebon, ce qui a pu également déplaire <strong>à</strong> son successeur et<br />

expliquerait en partie l’irréductibilité d’Hincmar envers<br />

l’auteur <strong>de</strong> cette dédicace. enfin, <strong>de</strong> par leur origine saxonne,<br />

ebon, comme eigil, ne pouvaient-ils aussi être plus<br />

compréhensifs sur le positionnement <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> après la<br />

rupture <strong>de</strong> ses vœux d’oblation en 829 <strong>à</strong> Mayence ?<br />

en définitive, l’image <strong>de</strong>s facultés artistiques <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> se trouve renforcée. Ce qui est <strong>à</strong> retenir <strong>de</strong> son<br />

œuvre poétique et musicale, qui nous est partiellement parvenue,<br />

c’est son extraordinaire maîtrise <strong>de</strong> l’écriture. Ce<br />

qui en a été sauvegardé ne peut être effacé par la dispute<br />

théologique sur la pré<strong>de</strong>stination qu’il a entretenue, mais<br />

éclaire d’un jour nouveau les griefs qui furent fait <strong>à</strong> ce penseur<br />

et <strong>à</strong> ce polémiste. les convictions religieuses <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> comman<strong>de</strong>nt d’être revisitées en tenant compte<br />

<strong>de</strong> l’extrême sensibilité qu’il nous a léguée dans sa poésie.<br />

Le musicien<br />

la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> versification <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> se prête fort bien<br />

<strong>à</strong> la composition musicale. <strong>de</strong>ux <strong>de</strong> ses poèmes attestent son<br />

art pour la mélodie 149 . le premier «Vt quid iubes pusiole» est<br />

(149) n. Fickermann dans la revue bénédictine<br />

n° 43 <strong>de</strong> 1931 militait pour une révision<br />

complète <strong>de</strong> la poésie carolingienne, celle-ci<br />

ne se limitant pas <strong>à</strong> la seule versification mais<br />

aussi <strong>à</strong> l’art musical.


composé <strong>de</strong> treize strophes formant soixante-dix-huit octosyllabes<br />

150 , le second ; «O <strong>de</strong>us miserere serui» comprend<br />

vingt strophes composées <strong>de</strong> soixante vers <strong>de</strong> douze pieds<br />

hexamètres léonins et d’un refrain : «Heu, quid euenit<br />

mihi ?» octosyllabique ponctuant chaque strophe. W. Meyer 151<br />

discerne dans cette construction les éléments constitutifs au<br />

mouvement que l’on trouve dans les rythmes mozarabiques 152 .<br />

Cette affirmation paraît trop insuffisante pour d’autres<br />

musicologues comme e. Jammen et G. <strong>de</strong> Valans 153 qui<br />

optent davantage pour une mélodie d’inspiration byzantine,<br />

ce qui nous paraît d’autant plus acceptable que notre musicien<br />

a pu, lors <strong>de</strong> son séjour sur la côte dalmate, entendre<br />

<strong>de</strong>s harmonies <strong>de</strong> ce type. Ce qui résulte avant tout, dans<br />

ces <strong>de</strong>ux poèmes <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, c’est une force d’expression<br />

d’une rare intensité. dans ses hymnes se manifeste<br />

une ferveur religieuse annonçant le mysticisme du XII e<br />

siècle ainsi qu’une subjectivité débordante : aveu <strong>de</strong> culpabilité<br />

et louange <strong>de</strong> la clémence <strong>de</strong> dieu y sont permanents.<br />

Comme sa prose, la poésie musicale <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong><br />

est caractéristique. les formes hypocoristiques comme :<br />

«pusiolus», «filiolus», «miserulus», «puerulus», «pusillulus»,<br />

«fratercullus», «tyranculus», «clientulus…» abon<strong>de</strong>nt.<br />

Ces diminutifs soutiennent l’intention affectueuse et caressante<br />

<strong>de</strong> la mélodie. Ils expriment toute la virtuosité <strong>de</strong>s<br />

jeux sonores. la forme et le fond <strong>de</strong> ces œuvres nous permettent<br />

<strong>de</strong> croire que <strong>Gottschalk</strong> était tout aussi talentueux<br />

en musique qu’en poésie. Un chantier totalement ouvert<br />

s’offre ici aux musicologues et historiens <strong>de</strong> la musique.<br />

Le théologien<br />

Malgré ses tâtonnements, la métho<strong>de</strong> théologique qui s’est<br />

constituée durant les premiers siècles <strong>de</strong> l’occi<strong>de</strong>nt chré-<br />

(150) B. Bischoff, Lied für <strong>de</strong>n reichenauer<br />

Freund, op. cité.<br />

(151) W. Meyer, in Narichten von <strong>de</strong>r königlichen<br />

Gesellschaff <strong>de</strong>r Wissenchaften<br />

III. l’œuvre<br />

Göttingen (1913).<br />

(152) La poésie amoureuse en langue latine,<br />

in Class Med, 13, (1952).<br />

(153) Muzik in Byzanz, Hei<strong>de</strong>lberg, (1962).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

71


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

72<br />

III. l’œuvre<br />

tien fut ambitieuse et vigoureuse. Privés du secours <strong>de</strong> la<br />

plupart <strong>de</strong>s disciples profanes, éloignés <strong>de</strong>s influences<br />

grecques, en cette époque carolingienne, les travaux et<br />

recherches <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> orbais, ou tout au moins les<br />

états fragmentaires qui nous sont parvenus dans divers<br />

opuscules 154 , nous éclairent sur la métho<strong>de</strong> théologique <strong>de</strong><br />

son temps. la force <strong>de</strong> l’«auctoritas» et la conviction que<br />

tout a été dit, procè<strong>de</strong>nt d’un principe <strong>de</strong> pensée où la preuve<br />

est au cœur <strong>de</strong>s débats. nous n’arbitrerons pas ici leurs<br />

contenus dogmatiques, car une étu<strong>de</strong> purement formelle<br />

sombrerait dans l’abstraction et toute rigueur purement<br />

théologique n’introduirait qu’au vi<strong>de</strong>.<br />

<strong>de</strong> la nature <strong>de</strong> l’âme<br />

C’est Gérard Mathon 155 qui, le premier, dans sa thèse soutenue<br />

<strong>à</strong> la faculté théologique <strong>de</strong> lille en 1964, empruntant<br />

aux «Responsa <strong>de</strong> diuersis» <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, fournira une<br />

étu<strong>de</strong> d’ensemble sur la nature <strong>de</strong> l’âme perçue au cours du<br />

IX è siècle. Pour ce chercheur, c’est <strong>de</strong> la polémique sur la<br />

nature angélique et sur la nature <strong>de</strong> l’âme en particulier que<br />

naîtront les questionnements concernant les limites et la<br />

localisation <strong>de</strong> l’âme.<br />

Ces questions furent posées par le roi Charles le Chauve en<br />

personne <strong>à</strong> Hincmar <strong>de</strong> reims et <strong>à</strong> ratramne <strong>de</strong> Corbie.<br />

<strong>de</strong>s questionnaires fleurirent également chez <strong>de</strong> nombreux<br />

religieux, tel celui d’un moine d’orbais <strong>à</strong> l’adresse du<br />

prisonnier d’<strong>Hautvillers</strong>. Ce correspondant, ami <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>, fait suivre ses questions <strong>de</strong> cette phrase : «il ne<br />

me vient pas maintenant en mémoire toutes les questions<br />

que j’ai résolues <strong>de</strong> vous poser» 156 . dans ses réponses sur<br />

(154) d.C. lambot. opus cité : Confessio<br />

breuior, p. 52, Confessio prolixior, p. 55, De<br />

trina <strong>de</strong>itate, p. 81, De prae<strong>de</strong>stinatione, p<br />

180, De trinitate, p. 259.<br />

(155) G. Mathon, L’anthropologie chrétienne<br />

en occi<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> saint Augustin <strong>à</strong> Jean Scot<br />

Erigène : recherches sur le sort <strong>de</strong>s thèses <strong>de</strong><br />

l’anthropologie augustienne durant le haut-<br />

Moyen-âge.<br />

(156) «non mihi modo subueniunt in memoriam<br />

omnia quae proposui a uobis quaerenda».<br />

d.C. lambot, op. cité.


la nature <strong>de</strong> l’âme «De natura animae», <strong>Gottschalk</strong> a rédigé<br />

un épilogue <strong>de</strong>mandant <strong>à</strong> un censeur qu’il ne nomme<br />

pas, mais auquel il dit «vous» 157 , <strong>de</strong> corriger les erreurs et<br />

les fautes commises par ignorance <strong>à</strong> propos <strong>de</strong>s questions<br />

dont il s’agit présentement, et <strong>de</strong> toutes celles que ce correspondant<br />

pourrait retrouver dans sa mémoire 158 . Ici apparaît<br />

un trait <strong>de</strong> caractère courant chez <strong>Gottschalk</strong> : faire<br />

preuve d’une gran<strong>de</strong> écoute, d’un goût soutenu pour l’approfondissement<br />

<strong>de</strong>s questions religieuses mal définies et<br />

un souci permanent <strong>de</strong> la preuve. l’aspect métaphysique<br />

<strong>de</strong> ses questionnements est également souligné par l’ordonnancement<br />

du plan <strong>de</strong> réponses 159 . Ce plan confère <strong>à</strong><br />

son auteur une certaine autorité 160 , il apparaît comme un<br />

penseur <strong>de</strong> référence. Un tel document traitant <strong>de</strong> l’âme<br />

humaine et <strong>de</strong> la vision <strong>de</strong> dieu, ayant pour objet la constitution<br />

d’un dossier théologique, ne pouvait laisser sans<br />

réaction l’archevêque Hincmar. après avoir eu connaissance<br />

<strong>de</strong> la table <strong>de</strong>s «responsa», l’archevêque <strong>de</strong> reims commença<br />

la rédaction <strong>de</strong> son «De diuersa et multiplici animae<br />

ratione». Hincmar prit le contre-pied <strong>de</strong>s idées nouvelles<br />

contenues dans cette «schedula capitulorum» provenant<br />

du prisonnier d’<strong>Hautvillers</strong>. Par quelles voies obscures<br />

Hincmar s’est-il procuré ces feuillets ? Il est fort probable<br />

que certains moines d’<strong>Hautvillers</strong> renseignaient l’archevêque<br />

<strong>de</strong> reims sur les activités et les correspondances qu’entretenait<br />

<strong>Gottschalk</strong>. Toujours est-il que cette interception lui permettra<br />

<strong>de</strong> le réfuter et implicitement <strong>de</strong> le menacer <strong>à</strong> la fin <strong>de</strong><br />

son second chapitre en ces termes : «Voil<strong>à</strong> quels<br />

docu-”ments, je ne dis pas quelles raisons, démontrent que<br />

(157) Ce censeur, ami <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> et <strong>de</strong><br />

ratramne, pourrait être loup <strong>de</strong> Ferrières.<br />

(158) d. C. lambot, p. 132, lig. 4 <strong>à</strong> 13.<br />

(159) Chapitre X : De natura animae ; chapitre<br />

XI : si sit se<strong>de</strong>s anima ; chapitre XII : si<br />

sunt inlocales qui <strong>de</strong>o adhaerent, angeli in<strong>de</strong>licet<br />

et animae sanctorum ; chapitre XIII : si<br />

III. l’œuvre<br />

plene <strong>de</strong>um cernunt animae sanctorum et si est<br />

mo<strong>de</strong> quod dixit Iohannes «ui<strong>de</strong>bimus eum<br />

sicuti est» an adhuc id plenius expectant in<br />

resurrectione corporum ; chapitre XV : <strong>de</strong> in<br />

corporalitate.<br />

(160) J.P Bouhot : Ratramne <strong>de</strong> Corbie, p. 45,<br />

éd. augustiniennes, Paris (1976).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

73


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

74<br />

III. l’œuvre<br />

nos ”âmes sont enveloppées, contenues et enchaînées par<br />

nos ”corps. Il nous paraît dangereux <strong>de</strong> résister <strong>à</strong> ces autorités.<br />

”a celui qui ne veut pas s’y rendre, au contradicteur, il<br />

ne ”reste donc qu’<strong>à</strong> mutiler les saints livres et <strong>à</strong> mettre en<br />

doute ”l’enseignement <strong>de</strong>s Pères, ou bien, ce qui est plus<br />

raison-”nable, <strong>à</strong> être séparé <strong>de</strong> la communion <strong>de</strong> l’église» 161 .<br />

Ce «contradictorum horum ab ecclesia societate secerni»<br />

augure bien du sort envisagé <strong>à</strong> l’encontre du prisonnier<br />

d’<strong>Hautvillers</strong>. Il est évi<strong>de</strong>nt que <strong>Gottschalk</strong> eut <strong>à</strong> traiter <strong>de</strong><br />

questions fort semblables <strong>à</strong> celles qu’Hincmar a trouvées<br />

dans la «schedula capitulorum» qui lui est parvenue. <strong>de</strong>s<br />

<strong>de</strong>ux côtés, les questions sur l’âme sont liées <strong>à</strong> une vision<br />

différente <strong>de</strong> dieu. or les <strong>de</strong>ux problématiques n’ont pas<br />

<strong>de</strong> rapport logique nécessaire, si ce n’est la controverse sur<br />

la nature <strong>de</strong> l’âme qui opposait secrètement <strong>Gottschalk</strong> et<br />

l’archevêque <strong>de</strong> reims.<br />

C’est ratramne <strong>de</strong> Corbie qui fit autorité par son traité sur<br />

l’âme en répondant <strong>à</strong> la double question : l’âme a-t-elle <strong>de</strong>s<br />

limites (circumscripta) et un lieu (localis) ? avec la métho<strong>de</strong><br />

habituelle, <strong>à</strong> partir <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong>s Pères, il rapporta bon<br />

nombre <strong>de</strong> citations patristiques qui lui permirent <strong>de</strong> définir<br />

le sens <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux adjectifs sur lesquels la question portait<br />

162 . la «disputatio», qui, <strong>de</strong> la rencontre entre <strong>de</strong>ux<br />

points <strong>de</strong> vue opposés, fait jaillir une conclusion nouvelle<br />

<strong>de</strong>meurera inconnue tout au long <strong>de</strong> ce IX e siècle. encore<br />

<strong>de</strong> nos jours, le débat entre créationisme et traducianisme<br />

n’est pas tranché 163 .<br />

<strong>de</strong> la Trinité<br />

déj<strong>à</strong> elipand, archevêque <strong>de</strong> Tolè<strong>de</strong>, <strong>à</strong> la fin du VIII e siècle<br />

déclenche contre Migétius une controverse relative <strong>à</strong> la<br />

Trinité (querelle <strong>de</strong> l’adoptianisme et querelle du «filioque»).<br />

(161) P.l., CXXV, 936, B – C.<br />

(162) dom. a. Wilmait, Opuscule inédit <strong>de</strong><br />

Ratramne sur la nature <strong>de</strong> l’âme, revue béné-<br />

dictine t. 43, p. 207 – 223 (1931).<br />

(163) Cf. d.C. lambot, op. cité, p. 291.


Cette dispute s’impose <strong>à</strong> l’attention par le nombre <strong>de</strong> théologiens<br />

qui y furent impliqués. elle poussa Charlemagne <strong>à</strong><br />

convoquer un concile <strong>à</strong> Francfort en 794 et valut <strong>à</strong> Félix<br />

d’Urgel, un <strong>de</strong>s protagonistes <strong>de</strong> l’affaire, auteur <strong>de</strong> nombreux<br />

traités, <strong>de</strong>ux condamnations et l’exil <strong>à</strong> lyon jusqu’<strong>à</strong><br />

sa mort en 816. Une autre querelle trinitaire naît en 808,<br />

car le pape léon III (795 - 816) affirme l’orthodoxie <strong>de</strong><br />

l’addition du mot «filioque» <strong>à</strong> la formule «ex patre proce<strong>de</strong>ntem».<br />

Toute conception <strong>de</strong> la Trinité pose que le Père<br />

est principal et que le Fils et le Saint-esprit en procè<strong>de</strong>nt.<br />

Mais il est d’autres thèmes <strong>à</strong> controverse, notamment ceux<br />

qui feront l’objet <strong>de</strong>s questions et réflexions <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

Quel est le rapport <strong>de</strong>s personnes <strong>à</strong> l’unité divine ? Faut-il<br />

faire porter l’accent sur le Père, le Fils, l’esprit, ou sur<br />

dieu ? Faut-il poser trois personnes référées <strong>à</strong> une divinité<br />

commune, ou une divinité qui se déploie en trois personnes<br />

? <strong>Gottschalk</strong>, et son adversaire Hincmar, ne se querelleront<br />

pas pour le détail <strong>de</strong> cette problématique, mais<br />

davantage pour une question liturgique et sur les procédés<br />

<strong>de</strong> preuve utilisés par l’un et par l’autre.<br />

l’expression qui revient constamment chez <strong>Gottschalk</strong>,<br />

dès qu’il est question <strong>de</strong> dieu, est le couple d’adjectifs<br />

«unus et trinus». on les trouve dans ses textes poétiques :<br />

«<strong>de</strong>us trine, <strong>de</strong>us une» 164 ou encore «trinum unumque<br />

<strong>de</strong>um», dans sa lettre en vers <strong>à</strong> ratramne 165 . on retrouve<br />

aussi très souvent la distinction <strong>de</strong>s personnes dans ses<br />

textes en prose 166 . Il n’est pas question d’entreprendre une<br />

énumération <strong>de</strong>s passages où l’on trouve le «unus et tri-<br />

(164) Go<strong>de</strong>scalci carmina, VI, 8, 3, éd.<br />

Traube, M.G.M., Poeta latini aevi karolini, III,<br />

p. 732.<br />

(165) Ibid., p. 734.<br />

(166) «Et quia scis eum germanissimum mihi<br />

liberes eum id est liberum facia funditus gatis<br />

a seruitute peccati, quin et effectum uas misericordiae<br />

et filium promissionis atque disruptis<br />

omnibus uinculis suis gratuitis misericor-<br />

III. l’œuvre<br />

diis et miserationibus tuis, commen<strong>de</strong>s eum<br />

patri tuo et tibi et spiritui sancto communi uestro<br />

amori, quatinus magis ac magis <strong>de</strong>inceps<br />

adoliscentem tam pulchrum <strong>de</strong>lectet in dies<br />

propter uos trinam et unam solam merito semper<br />

adorandam colendam tremendam et utinam<br />

gratis praesentialiter et perpetualiter possessuram<br />

pariter et possi<strong>de</strong>ndam potiendam<br />

perfruendam pulchritudinem (suite page 76)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

75


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

76<br />

III. l’œuvre<br />

nus» ou encore : «trinus et unus», <strong>Gottschalk</strong> n’ayant pas<br />

<strong>de</strong> préférence et <strong>de</strong> réponse nettes pour un ordre plutôt que<br />

l’autre. Mais l’implication d’un problème logique dans<br />

l’expression numérique 167 apparaît lorsque <strong>Gottschalk</strong> se<br />

fait pédagogue et logicien pour justifier son point <strong>de</strong> vue et<br />

ne se contente pas <strong>de</strong> la formulation ramassée citée, mais<br />

la précise en la mettant sous la forme : «naturaliter unus»,<br />

«personaliter trinus». le mot «natura» a pour lui plusieurs<br />

sens. Sa pensée est résumée dans un fragment inséré<br />

dans l’ouvrage polémique d’Hincmar «De una et non<br />

trina <strong>de</strong>itate» où l’on peut lire : «siqui<strong>de</strong>m in<strong>de</strong>… et in his<br />

mori, quin et in perpetuum placere parere<br />

seruire et adhaerere uobis nostro piissimo<br />

conditori creatori recreatori factori refectori<br />

formatori reformatori re<strong>de</strong>mptori saluatori<br />

liberatori».<br />

et parce que tu sais qu’il m’est proche, libèrele,<br />

c’est-<strong>à</strong>-dire rends-le tout <strong>à</strong> fait libre gracieusement<br />

<strong>de</strong> l’esclavage du péché, bien plus<br />

qu’une fois <strong>de</strong>venu vase <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et fils<br />

<strong>de</strong> la promesse et ayant rompu tous ses liens<br />

par tes marques gratuites <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et <strong>de</strong><br />

pitié, tu le confies <strong>à</strong> ton Père, <strong>à</strong> toi et au Saintesprit<br />

votre commun amour, afin que <strong>de</strong> plus<br />

en plus il plaise <strong>à</strong> un si beau jeune homme <strong>de</strong><br />

jour en jour <strong>de</strong> mourir <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> vous, beauté<br />

trine et une, qui seule <strong>à</strong> bon droit doit être l’objet<br />

éternel <strong>de</strong> votre adoration, <strong>de</strong> notre culte et<br />

<strong>de</strong> notre crainte, et qu’il est souhaitable <strong>de</strong><br />

possé<strong>de</strong>r gracieusement maintenant et toujours,<br />

ainsi qu’il faut la possé<strong>de</strong>r, s’en emparer,<br />

en jouir, bien plus qu’il lui plaise pour toujours<br />

<strong>de</strong> plaire, obéir, servir et s’attacher <strong>à</strong><br />

vous qui, dans votre très gran<strong>de</strong> bonté, nous<br />

établissez, créez, recréez, faites, refaites, formez,<br />

réformez, sauvez, libérez.<br />

Cf. d.C. lambot, op. cité,«responsa <strong>de</strong> diuersis»,<br />

p. 150.<br />

on retrouve également ici la flamme <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> pour la beauté masculine. Il s’attira<br />

plus tard les griefs d’Hincmar pour un autre<br />

écrit sur les jeunes gens lors <strong>de</strong> son voyage <strong>à</strong><br />

rome, où il constate leur féminité : «Nobiles<br />

Romanorum pueri et etiam adolescentuli tune<br />

temporis erant et sunt etiam hodie comatuli,<br />

retro ui<strong>de</strong>licet ab auribus promissam plus<br />

minus dimidii mensura pedis habentes comam,<br />

hin adulatorie uel potius inrisorie hypocoristicos<br />

comatuli quasi comptuli. Nam et<br />

Einhardus in Vita Karoli imperatoris eun<strong>de</strong>m<br />

Karolum dixit duisse dicaculum».<br />

les enfants nobles romains et même les jeunes<br />

gens <strong>à</strong> cette époque étaient et sont encore<br />

aujourd’hui «frisottés», c’est-<strong>à</strong>-dire qu’ils ont<br />

par <strong>de</strong>rrière la chevelure qui dépasse les<br />

oreilles <strong>de</strong> plus ou moins la taille <strong>de</strong> la moitié<br />

d’un pied, d’où <strong>de</strong> manière flatteuse ou plutôt<br />

ironique le diminutif «frisottés» comme pour<br />

dire efféminés. C’est ainsi qu’eginhard dans<br />

La vie <strong>de</strong> l’empereur Charles dit que le même<br />

Charles avait «la parole un petit peu railleuse».<br />

Cf. d.C. lambot, opusculum II, p. 489.<br />

(167) «At ubi communi nomine nuncupantur<br />

nequaquam pluraliter sed secundum beatos<br />

Athanasium et Augustinum et quod amplius est<br />

iuxta dominum singulariter pronuntiantur.<br />

Exterior enim et interior homo non sunt<br />

homines duo sed unus est homonam et corpus<br />

dicitur homo ut : Quidam sepelientes hominem<br />

et anima per se dicitur homo ut : Scio hominem<br />

in Christo siue in corpore siue intra corpus<br />

siue extra corpus nescio, et : Si exterior<br />

homo noster corrumpitur tamen interior<br />

renouatur. Nunc quoque exterior homo Pauli<br />

Romae quiescit in sepulchro et interior cum<br />

domino triumphat in caelo. Ergo cum sic ab<br />

inuicem direptus nunc interim uterque homo<br />

non tamen homines duo sed unus procul dubio<br />

sit homo licet sint duae substantiae spiritus et<br />

caro, multo magis pater et filius et spiritus<br />

sanctus, licet pluraliter efferantur propriis ad


trina <strong>de</strong>itas» 168 . nous retrouvons dans ce texte l’assimilation<br />

connue <strong>de</strong> «natura» <strong>à</strong> «substantia», nous rencontrons également<br />

les mots «substantia» et «essentia» pour expliquer<br />

la notion <strong>de</strong> personne, ce qui pose un problème, puisque,<br />

nous le savons, «essentia» et «substantia» sont la même<br />

chose que «natura». Il y aurait donc une nature <strong>de</strong> dieu et<br />

une nature <strong>de</strong> chaque personne pour <strong>Gottschalk</strong>. le<br />

contexte précise cette distinction en référant la première <strong>à</strong><br />

une communauté logique et la secon<strong>de</strong> <strong>à</strong> une singularité<br />

particulière <strong>à</strong> chaque personne. Ici s’amorce un thème<br />

théologique propre <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong> puisqu’il confère <strong>à</strong> dieu<br />

une existence logique, nominale et abstraite. Hincmar a vu<br />

ce point faible. S’explique alors l’expression : «naturaliter<br />

unus» dans «in natura <strong>de</strong>monstratur omnium trium… unitas».<br />

C’est donc la même chose <strong>de</strong> parler <strong>de</strong> l’unité divine<br />

et <strong>de</strong> la nature divine. «Natura» implique unité et sur un<br />

plan implicite nous rejoignons les problèmes théologiques<br />

et logiques : «naturaliter unus» est corrélatif du «personaliter<br />

trinus». Pour <strong>Gottschalk</strong> le terme «persona» pose la<br />

inuicem relatiuis nominibus, tamen naturali<br />

communi generali nomine quod est <strong>de</strong>us dominus<br />

spiritus non efferuntur pluraliter ullo modo<br />

sed <strong>de</strong>us ingenitus <strong>de</strong>us genitus <strong>de</strong>us proce<strong>de</strong>ns<br />

simul naturaliter unus <strong>de</strong>us esse cognoscitur<br />

probatur omni modo, quia in his tribus personis<br />

nulla fuit est aut erit immo nec quod absit esse<br />

potuit potest aut poterit diuersitas uel inaequalitas<br />

uel quantulacumque dissimilitudo.»<br />

Mais, lorsqu’ils sont appelés d’un nom commun,<br />

ce n’est pas pour un pluriel, mais selon<br />

saint athanase et saint augustin et <strong>de</strong> manière<br />

très répandue selon le Seigneur, ils sont dits au<br />

singulier. en effet, l’homme extérieur et intérieur<br />

ne sont pas <strong>de</strong>ux hommes, mais un seul<br />

homme, car on parle d’homme pour le corps,<br />

comme dans : Certains enterrant l’homme, et<br />

on parle d’homme pour l’âme en soi : Je<br />

connais un homme dans le Christ, soit dans son<br />

corps, soit <strong>à</strong> l’intérieur <strong>de</strong> son corps, soit hors<br />

<strong>de</strong> son corps, je ne sais, et : Si notre homme<br />

extérieur est corrompu, l’intérieur pourtant<br />

rénové. Maintenant encore, l’homme extérieur<br />

III. l’œuvre<br />

<strong>de</strong> Paul repose <strong>à</strong> rome dans un tombeau et<br />

l’intérieur triomphe avec le Seigneur au Ciel.<br />

donc, alors que l’un et l’autre hommes, séparés<br />

maintenant pour un temps l’un et l’autre,<br />

ne sont pourtant pas <strong>de</strong>ux hommes mais, sans<br />

aucun doute, un seul homme, bien qu’il y ait<br />

<strong>de</strong>ux substances, l’esprit et la chair, bien plus<br />

le Père, le Fils et le Saint-esprit, bien qu’ils<br />

soient exprimés au pluriel par <strong>de</strong>s noms<br />

propres en relation les uns avec les autres,<br />

pourtant ne sont en aucun cas exprimés au pluriel<br />

par le nom naturel, commun et général qui<br />

est «dieu», «Seigneur» et «esprit», mais dieu<br />

non engendré, dieu engendré, dieu procédant,<br />

en même temps que naturellement être un seul<br />

dieu est connu, est prouvé <strong>de</strong> toute manière<br />

car, en ces trois personnes, il n’y a eu, il n’y<br />

aura ni loin <strong>de</strong> l<strong>à</strong>, n’a pu, ne peut ou ne pourra<br />

être aucune diversité ou inégalité ou quelque<br />

différence même minime.<br />

Cf. d.C. lambot, p. 311.<br />

(168) Cf. d.C. lambot, p. 29, 30, Fragmenta<br />

IV et V.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

77


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

78<br />

III. l’œuvre<br />

question <strong>de</strong> la «trina <strong>de</strong>itas» 169 . Se référant <strong>à</strong> l’étymologie<br />

donnée par les glossaires <strong>de</strong> Placidi et ansileubi, il fait<br />

venir l’expression <strong>de</strong> «per se (sit) una» 170 . Ce terme «persona»<br />

est très important pour notre auteur 171 , dans la prose<br />

qui nous est parvenue, il représente comme : «gratia» et<br />

«pater» près <strong>de</strong> trois pour cent <strong>de</strong> son vocabulaire. le<br />

mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> raison <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> a pour base : «naturaliter<br />

unus», «personaliter trinus» et utilise <strong>de</strong>ux procédés qui se<br />

résument ainsi : usage direct <strong>de</strong> l’ecriture prise <strong>à</strong> la lettre<br />

et usage <strong>de</strong> l’analogie. la technique <strong>de</strong> la preuve chez<br />

notre moine peut se récapituler <strong>de</strong> la manière suivante :<br />

emploi <strong>de</strong>s commentateurs <strong>de</strong> l’écriture : (saint Jérome,<br />

saint Grégoire <strong>de</strong> nazianze et saint augustin d’une part et<br />

<strong>de</strong> l’écriture ; saint Paul, la Genèse… d’autre part. ne se<br />

limitant pas aux seules œuvres patristiques et scripturaires,<br />

il puise également <strong>de</strong>s arguments dans la liturgie afin d’y<br />

chercher l’expression fondamentale <strong>de</strong> sa thèse : «Te trina<br />

<strong>de</strong>itas unaque poscimus» 172 . Cette assertion ouvrit une vive<br />

polémique avec l’archevêque <strong>de</strong> reims.<br />

<strong>Gottschalk</strong> compila maints extraits patristiques et hymniques<br />

pour étayer sa théorie. Mais Hincmar et raban<br />

Maur lui reprochèrent d’en détourner leur sens <strong>à</strong> son profit,<br />

par exemple dans les citations suivantes :<br />

«et mutauerunt gloriam suam in similitudinem intuli :<br />

”gloria eorum» 173<br />

«in conspectu diuinitis et angelorum eius» 174 .<br />

(169) C’est par l’établissement <strong>de</strong> son long<br />

traité «De una et non trina <strong>de</strong>itate», élaboré<br />

durant plus <strong>de</strong> quatre ans, qu’Hincmar finira<br />

par faire valoir sa théorie. Celle-ci fut validée<br />

au concile <strong>de</strong> douzy en 860. Il y rédigea sa<br />

lettre synodale : «trinitas inconfusa atque<br />

inseparabilis» P. l., CXXVI, 122.<br />

(170) d.C. lambot, op. cité, p. 29, l. 22.<br />

(171) «personaudo» dicta corripitur, «persona»<br />

uero dicta quod «per se est una» productitur.<br />

Cf., d.C. lambot, p. 459, l. 7 et 8.<br />

(172) d.C. lambot, p. 23, extrait <strong>de</strong> «Shedula<br />

Gothescalci» d’Hincmar. Il s’agit <strong>de</strong> l’hymme<br />

: «Sanctorum meritis inclycta gaudia»<br />

dont l’auteur est inconnu.<br />

(173) et ils ont changé sa gloire <strong>à</strong> la ressemblance<br />

d’un veau : leur gloire. (saint augustin,<br />

psaume CV, n°19, P.l., XXXVII, 1412).<br />

(174) en présence <strong>de</strong> sa divinité et <strong>de</strong> ses<br />

anges (règle bénédictine p. 54, cap. XIX, éd.<br />

C. Butler, 1927).


«sed septies in hoc die<br />

”dicamus lau<strong>de</strong>s domino,<br />

”diuinitati perpeti<br />

”<strong>de</strong>bitam <strong>de</strong>mus gloriam» 175 .<br />

«summa diuinitas nos conseruet incolomes» 176 .<br />

«ut cantem tibi gloria mea<br />

”gloria uirtutis eorum tu es<br />

”exsurge gloria mea» 177 .<br />

«qualis est Pater et Filius talis est et<br />

”Spiritus Sanctus» 178 .<br />

«un<strong>de</strong> sic in libro <strong>de</strong> correptione et gratia, dicit sanctus<br />

”Augustinus <strong>de</strong> trina et una gloria<br />

”non ergo glorientur iniusti qui non habent un<strong>de</strong><br />

nec ”habent gloriam suam nisi ipsum cui dicunt : gloria<br />

mea et ”exaltans caput meum» 179 .<br />

Pour bon nombre d’évêques la liturgie est une source moins<br />

sûre que l’écriture et les Pères. les auteurs d’hymnes ne<br />

sont crédités d’aucune inspiration spéciale et les adversaires<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> ne se feront pas faute <strong>de</strong> le lui dire. Hincmar<br />

l’écrit dans son traité «De una et non trina <strong>de</strong>itate» 180 .<br />

Ce sera l<strong>à</strong> un <strong>de</strong>s reproches constamment faits <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong>,<br />

mais ce <strong>de</strong>rnier s’efforcera <strong>de</strong> prouver que sa théorie est<br />

parfaitement orthodoxe.<br />

(175) Mais sept fois en ce jour<br />

louons le Seigneur<br />

a la divinité éternelle<br />

rendons la gloire qui lui est due, (Analecto<br />

hymnica, t. lI, p. 14).<br />

(176) Que la très haute divinité vous conserves<br />

sains et saufs, (C.S.e.l., t. XXV, éd. o.,<br />

Gventher).<br />

(177) Pour que je chante pour toi, ma gloire<br />

Tu es la gloire <strong>de</strong> leur vertu<br />

lève toi ma gloire (ps., XXIX, ps., lXX, ps.,<br />

lXXXVIII, ps., lVI).<br />

(178) ainsi qu’est le Père, ainsi est le Fils et le<br />

Saint-esprit (Pseudo-augustin, symb. art. 7, t.<br />

IV, éd. J., armitage robinson).<br />

(179) C’est pourquoi dans le livre : «la répri-<br />

III. l’œuvre<br />

man<strong>de</strong> et la gloire, saint augustin dit <strong>de</strong> la<br />

gloire : «trine et une» ; que les injustes ne se<br />

glorifient donc pas, eux qui n’ont pas <strong>de</strong> quoi,<br />

non plus que les justes car ils tirent gloire <strong>de</strong><br />

celui dont ils ne tirent pas <strong>de</strong> gloire propre si<br />

ce n’est celui <strong>à</strong> qui ils disent : «tu es ma gloire<br />

et celui qui relève ma tête», (saint augustin,<br />

P.l. XlIV, 939, cap. XII, n. 39. Prosper «trina<br />

meiestas» 8, P.l., lI, 858 a).<br />

(180) «occasione accepta <strong>de</strong> finalite hymni<br />

cujus auctor penitus ignoratur in qua dicitur :<br />

Te trina <strong>de</strong>itas, unaque poscimus, <strong>de</strong>lectabiliter<br />

uocam nouitatibus ut innotescerent incubentes,<br />

coeperunt conten<strong>de</strong>re quod sicut trinus<br />

et unus <strong>de</strong>us ita trina et una <strong>de</strong>itas et <strong>de</strong>beat et<br />

catholici ualeat dici» (P.l., CXXV, 473 C).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

79


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

80<br />

III. l’œuvre<br />

Ses connaissances profon<strong>de</strong>s en matière grammaticale lui<br />

permettront <strong>de</strong> soutenir son raisonnement théologique.<br />

C’est sur la distinction du nombre que porteront le plus<br />

souvent ses remarques :<br />

«dum sub numero singulari dicitur <strong>de</strong>itas trina licet non sit<br />

dicta subintellegitur tamen simul et una» 181 . autrement dit<br />

l’expression «<strong>de</strong>itas trina», si on l’interprète correctement<br />

renferme <strong>de</strong>ux idées : d’abord par la signification <strong>de</strong> l’adjectif<br />

«trinus», elle pose une idée <strong>de</strong> trinité, ensuite par sa<br />

flexion grammaticale elle implique, «licet non sit dicta»,<br />

une singularité. <strong>Gottschalk</strong> tire parti non seulement du sens<br />

<strong>de</strong>s mots, mais encore <strong>de</strong>s circonstances <strong>de</strong> leur emploi et,<br />

ce qui est pertinent ici chez lui, c’est le dépassement <strong>de</strong><br />

l’abstraction du vocable isolé vers le rôle syntaxique indiqué<br />

par la morphologie. en tout état <strong>de</strong> cause, on voit que<br />

la grammaire offre <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong> un moyen d’exposition<br />

précis. dans sa recherche théologique sur la trinité en <strong>de</strong>rnière<br />

analyse, seule la formule «una et trina <strong>de</strong>itas» respecte<br />

la totalité <strong>de</strong> la révélation en faisant la synthèse <strong>de</strong>s<br />

thèmes que les hérésies adoptent séparément. C’est un<br />

principe <strong>de</strong> composition que l’on retrouvera <strong>à</strong> d’autres<br />

moments <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s idées 182 , l’absorption synthétique<br />

<strong>de</strong>s doctrines opposées est considérée comme une garantie<br />

<strong>de</strong> vérité. <strong>Gottschalk</strong> a posé la déité comme <strong>à</strong> la fois une et<br />

trine. le débat sera loin d’être clos et rebondira sous<br />

d’autres formes avec autant <strong>de</strong> vigueur au cours du XII e<br />

siècle. abélard dans ses «Theologia» verra également ses<br />

théories sur la trinité vivement controversées et condamnées.<br />

abélard ne faisant que réinterpréter le «De tribus diebus»<br />

d’Hugues <strong>de</strong> Saint-Victor († 1141).<br />

les hardiesses <strong>de</strong> pensée <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> ne se limitèrent<br />

point au seul problème trinitaire mais surtout <strong>à</strong> la théologie<br />

(181) d.C. lambot, p. 22. l. 2, 3, 4. (182) Pensons simplement <strong>à</strong> Pascal entre<br />

epictète et Montaigne.


pré<strong>de</strong>stinatienne.<br />

<strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination<br />

C’est avant tout sur sa doctrine concernant la pré<strong>de</strong>stination<br />

que <strong>Gottschalk</strong> a laissé une trace dans l’histoire <strong>de</strong> la religion<br />

au IX e siècle. encore une fois, nous ne chercherons pas<br />

<strong>à</strong> arbitrer ce débat qui a trouvé ses conclusions <strong>de</strong>puis fort<br />

longtemps mais nous examinerons les arguments <strong>de</strong>s principaux<br />

protagonistes contemporains <strong>à</strong> cette controverse 183 .<br />

l’affaire commence par un courrier parvenu en 849. raban<br />

Maur avertit Hincmar <strong>de</strong> l’envoi d’un dangereux déviationniste<br />

: «en ces temps qu’il soit connu <strong>de</strong> vous qu’un<br />

“certain moine gyrovague, nommé <strong>Gottschalk</strong>, qui assure<br />

“être prêtre ordonné <strong>de</strong> votre province 184 , est venu d’Italie<br />

“vers nous, <strong>à</strong> Mayence, introduisant <strong>de</strong> nouvelles superstitions<br />

“et une doctrine pernicieuse sur la pré<strong>de</strong>stination divine…»<br />

C’est l<strong>à</strong>, nous le savons aujourd’hui <strong>de</strong>puis la découverte en<br />

1939 par dom Morin <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> Berne, une<br />

interprétation erronée <strong>de</strong> sa pensée.<br />

le texte suivant, daté <strong>de</strong> 859, lui est prêté par Hincmar <strong>de</strong><br />

reims :<br />

«Ego Gothescalcus credo et confiteor profiteor et testificor<br />

“ex <strong>de</strong>o patre <strong>de</strong>um filium in <strong>de</strong>o spiritu sancto, et adfirmo<br />

“atque approbo coram <strong>de</strong>o et sanctis eius quod gemina est<br />

“pra<strong>de</strong>stinatio siue electorum ad requiem siue reproborum<br />

“ad mortem, quia sicut <strong>de</strong>us incommutabilis ante mundi cons<br />

“titutionem omnes electos suos incommutabiliter per gratui<br />

“tam gratiam suam prae<strong>de</strong>stinauit ad uitam aeternam, simi<br />

“liter omnino omnes reprobos qui in die iudicii damnabuntur<br />

(183) au cours <strong>de</strong>s siècles suivants, les passions<br />

se réveillèrent <strong>à</strong> la parution du livre du<br />

jésuite Cellot : «Historica Gothescalci» paru<br />

en 1655. dans cet ouvrage, il s’attaquait avec<br />

animosité et haine aux doctrines <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong><br />

que défendaient les jansénistes, notamment<br />

III. l’œuvre<br />

Maugin dans sa publication : «Veterum auctorum<br />

qui in IX <strong>de</strong> prae<strong>de</strong>stinatione scripserunt<br />

opera et fragmenta».<br />

(184) en effet durant la vacance du siège <strong>de</strong><br />

reims, enée chorévèque avait ordonné<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’orbais.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

81


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

82<br />

III. l’œuvre<br />

“propter ipsorum mala merita i<strong>de</strong>m ipse incommutabilis <strong>de</strong>us<br />

“per iustum iudicium suum incommutabiliter prae<strong>de</strong>stinauit<br />

“ad mortem merito sempiternam» 185 .<br />

l’archevêque <strong>de</strong> reims n’arrivera pas <strong>à</strong> abandonner cette<br />

façon <strong>de</strong> voir. Pour lui, <strong>Gottschalk</strong> est celui qui enseigne la<br />

pré<strong>de</strong>stination au péché.<br />

aussi brièvement, raban Maur expose que le syno<strong>de</strong> réuni<br />

<strong>à</strong> Mayence par louis le Germanique en 848 186 a condamné<br />

la doctrine enseignée et a renvoyé son auteur vers son<br />

métropolitain 187 .<br />

raban Maur a surtout insisté sur les périls quotidiens que<br />

recèle la théorie <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. Celle-ci aurait déj<strong>à</strong> fait <strong>de</strong><br />

forts ravages puisqu’elle a séduit beaucoup <strong>de</strong> gens peu<br />

attentifs <strong>à</strong> leur salut et qui disent : «en quoi me seraitil<br />

”profitable <strong>de</strong> m’efforcer <strong>de</strong> servir dieu puisque, si je<br />

suis ”pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la mort, je n’échapperai jamais <strong>à</strong> celleci<br />

? Si ”au contraire, me conduisant mal, je suis pré<strong>de</strong>stiné<br />

<strong>à</strong> la ”vie, j’irai sans aucun doute au repos éternel» 188 .<br />

en vérité <strong>Gottschalk</strong> considérait que le Christ n’a versé son<br />

sang que pour les seuls élus. dans ses correspondances <strong>à</strong><br />

loup <strong>de</strong> Ferrières et <strong>à</strong> Jonas, évêque d’orléans, il abor<strong>de</strong><br />

le sujet, mais la réponse <strong>de</strong>s intéressés ne nous est pas parvenue.<br />

<strong>Gottschalk</strong> avait quitté orbais longtemps avant<br />

(185) Moi, <strong>Gottschalk</strong>, je crois et confesse,<br />

reconnais et atteste <strong>de</strong> par dieu le Père, par<br />

dieu le Fils, en dieu le Saint-esprit et affirme<br />

et approuve <strong>de</strong> dieu et ses saints qu’il y a une<br />

double pré<strong>de</strong>stination, soit <strong>de</strong>s élus pour le<br />

repos, soit <strong>de</strong>s réprouvés pour la mort, car <strong>de</strong><br />

même que le dieu, immuable avant la création<br />

du mon<strong>de</strong> a pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la vie éternelle<br />

immuablement par sa grâce gratuite tous les<br />

élus, semblablement, le même dieu immuable<br />

par son juste jugement a pré<strong>de</strong>stiné immuablement<br />

<strong>à</strong> la mort, <strong>à</strong> bon droit, éternelle tous les<br />

réprouvés qui au jour du jugement seront<br />

condamnés <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> leurs démérites.<br />

(Fragmenta XV d.C. lambot, p. 38).<br />

(186) annales <strong>de</strong> Xanten, M.G.H., Scriptores II,<br />

p. 229.<br />

(187) annales <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>, M.G.H., Scriptores I,<br />

p. 365.<br />

(188) «Quia iam multos seductos, ut audlui<br />

habet, et minus <strong>de</strong>uotos… … sine alla dubitatione<br />

ad aeternam requiem uado» (P.l.<br />

CXXV, 84-85).<br />

(189) la vacance du siège dura cinq ans,<br />

Hincmar est élu en 845 <strong>à</strong> la succession<br />

d’ebon.


l’élection d’Hincmar au siège <strong>de</strong> reims 189 , les seules personnes<br />

<strong>de</strong>meurant dans le royaume <strong>de</strong> Charles le Chauve<br />

qui connaissaient <strong>Gottschalk</strong> en 848 étaient loup <strong>de</strong><br />

Ferrières, Walafrid Strabon et ratramne <strong>de</strong> Corbie. Ce <strong>de</strong>rnier<br />

était susceptible d’avoir quelques informations sur ses<br />

enseignements d’après les fragments d’une lettre qui nous<br />

est parvenue 190 . Il est donc légitime <strong>de</strong> penser que les<br />

longues absences <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> hors <strong>de</strong>s royaumes <strong>de</strong><br />

Charles et louis le rendaient vulnérable et sans appui. <strong>de</strong><br />

plus c’est un homme condamné par raban Maur, autorité<br />

reconnue <strong>de</strong> tous sur le plan doctrinal 191 et ce disciple<br />

d’alcuin, le remet <strong>à</strong> rotha<strong>de</strong> évêque <strong>de</strong> Soissons. les dangers<br />

que faisait courir <strong>à</strong> la société carolingienne l’enseignement<br />

d’une pré<strong>de</strong>stination qui peut conduire facilement<br />

<strong>à</strong> l’abandon <strong>de</strong> tout frein moral ont d’emblée retenu l’attention<br />

<strong>de</strong> l’archevêque <strong>de</strong> reims. Ce <strong>de</strong>rnier engage alors<br />

avec le moine un dialogue écrit, dont il nous en reste une<br />

trace 192 . Si l’accord existait sur la pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s élus,<br />

l’archevêque <strong>de</strong> reims affirmait que les réprouvés<br />

n’étaient pas <strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> périr. <strong>Gottschalk</strong> se préoccupa<br />

alors <strong>de</strong> faire connaître sa position <strong>à</strong> ratramne <strong>de</strong> Corbie<br />

fort bien introduit <strong>à</strong> la cour <strong>de</strong> Charles le Chauve. Pour ce<br />

<strong>de</strong>rnier, comme pour Hincmar et plusieurs évêques, il<br />

<strong>de</strong>venait urgent <strong>de</strong> mettre un terme <strong>à</strong> l’activité théologique<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> 193 .<br />

dans une société <strong>à</strong> l’évangélisation imparfaite comme<br />

nous l’avons exposé au chapitre I, le problème <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination<br />

<strong>de</strong>vait inévitablement rebondir. les séquelles<br />

(190) «Fecit hoc <strong>de</strong>nique gratis. Effuso qui te<br />

uoluit reparare cruore».<br />

(191) Chose étrange ; jusqu’<strong>à</strong> la mort <strong>de</strong><br />

raban Maur, en 856, personne ne s’est permis<br />

<strong>de</strong> critiquer ses définitions. Même le diacre<br />

Florus en 851, répondant <strong>à</strong> l’un <strong>de</strong>s traités <strong>de</strong><br />

raban Maur, fait preuve d’une gran<strong>de</strong> modération,<br />

alors qu’il est fort sévère pour Hincmar.<br />

III. l’œuvre<br />

(192) Hincmar : anno 849, Epistola ad simplices<br />

sua dioeceseos. d.C.l. p.8 <strong>à</strong> 10.<br />

(193) Confessio Go<strong>de</strong>scalchi monachi damnati,<br />

manuscrit, B.n., latin 12 292, p. 52-53-54 in<br />

d.C. lambot.<br />

(194) Pélage, né vers 360, mort en Palestine<br />

vers 440, hérésiarque breton, fut en relation<br />

avec saint augustin.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

83


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

84<br />

III. l’œuvre<br />

<strong>de</strong> l’enseignement pélagien 194 avaient entraîné, suite aux<br />

condamnations <strong>de</strong> saint augustin d’autres positions, ce<br />

<strong>de</strong>rnier les déclarant toutes suspectes <strong>de</strong> fatalisme. le<br />

concile d’orange <strong>de</strong> 529 avait adopté une position moyenne,<br />

proche <strong>de</strong>s formules <strong>de</strong> Prosper d’aquitaine († 455) :<br />

«l’homme est responsable <strong>de</strong> sa damnation par refus<br />

<strong>de</strong> ”s’amen<strong>de</strong>r, s’il n’est pour rien dans son salut éternel».<br />

ainsi sans trancher nettement la question <strong>de</strong> savoir si la<br />

pré<strong>de</strong>stination était double comme l’avait dit Prosper, les<br />

damnés n’étaient condamnés que «post preuisa <strong>de</strong>merita»<br />

195 . les choses en seraient restées l<strong>à</strong> si les hommes du<br />

IX e siècle ne s’étaient emparés <strong>de</strong>s «Sentences d’Isidore <strong>de</strong><br />

Seville» où l’auteur fait allusion <strong>à</strong> une : «prae<strong>de</strong>stinatio<br />

gemina». le débat, mal formulé et, surtout mal compris,<br />

entre foi, morale et leurs applications aux œuvres <strong>de</strong><br />

l’homme, fut certainement un <strong>de</strong>s problèmes sociologiques<br />

du haut-Moyen-âge les plus mal appréhendés.<br />

Ce n’est donc pas sans motif que les lecteurs <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> y trouvèrent la résurgence <strong>de</strong>s tendances fatalistes<br />

et dangereuses pour une société instable.<br />

Cependant, <strong>à</strong> l’examen attentif <strong>de</strong> sa «Confessio breuior»<br />

196 <strong>Gottschalk</strong> d’orbais expose que le mon<strong>de</strong> est divisé en<br />

<strong>de</strong>ux parts : l’une, celle <strong>de</strong>s élus, a le Christ pour tête,<br />

l’autre, celle <strong>de</strong>s réprouvés, suit le diable. Pour lui, dans<br />

les <strong>de</strong>ux cas, la répartition <strong>de</strong>s hommes a été faite par dieu<br />

avant la création. Il a décidé <strong>de</strong> sauver certains hommes<br />

par sa grâce et ayant prévu les péchés <strong>de</strong>s autres, il les a<br />

pré<strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> la mort. Sous cette forme excessivement cursive,<br />

(195) Par prévision <strong>de</strong> leurs démérites (réprobation<br />

positive).<br />

(196) Credo et confiteor <strong>de</strong>um omnipotentem<br />

et incommutabilem praescisse et prae<strong>de</strong>stinasse<br />

angelos santos et homines electos ad<br />

uitam gratis aeternam, et ipsum diabolum<br />

caput omnium daemoniorum cum omnibus<br />

reprobis membris in<strong>de</strong>licet suis propter praescita<br />

certissime ipsorum propria futura mala<br />

merita prae<strong>de</strong>stinasse pariter per iustissimum<br />

iudicium suum in mortem merito sempiternam,<br />

quia sic ait ipse dominus in euangelio :…<br />

d.C. lambot, p. 52.


cet écrit semble donner raison <strong>à</strong> l’archevêque <strong>de</strong> Mayence,<br />

raban Maur, et <strong>à</strong> son homologue Hincmar <strong>de</strong> reims, mais<br />

les citations d’augustin 197 <strong>de</strong> Fulgence 198 et d’Isidore <strong>de</strong><br />

Séville 199 bien choisies et qui accompagnent ce texte, prouvent<br />

que <strong>Gottschalk</strong> se gardait nettement <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination<br />

au péché. Il ne faut pas négliger également ce qu’il dit<br />

<strong>de</strong> la «uersimilitudo» et <strong>de</strong> la «praesumptio» 201 .<br />

Il y a l<strong>à</strong> le germe d’une théorie <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong>. Toujours<br />

dans sa «Confessio breuior», <strong>Gottschalk</strong> donne l’exemple<br />

<strong>de</strong> la rame qui semble brisée et <strong>de</strong>s doigts qui semblent raccourcis<br />

quand ils sont plongés dans l’eau. Il ajoute que<br />

cette erreur est <strong>à</strong> craindre dans la «littérature humaine»<br />

mais aussi dans «l’écriture divine». ne dénonce-t-il pas<br />

ainsi que le plan <strong>de</strong> la perception prévaut sur celui <strong>de</strong> la<br />

science sacrée ? Cette généralité est intéressante, mais<br />

<strong>Gottschalk</strong> ne décrit ni le mécanisme <strong>de</strong> l’erreur, ni les<br />

moyens <strong>de</strong> s’en gar<strong>de</strong>r. Cette amorce <strong>de</strong> l’implicite est<br />

importante. Il est certain que l’implicite a plusieurs strates<br />

et plus elles sont nombreuses moins on peut y <strong>de</strong>scendre<br />

profondément. afin <strong>de</strong> ne pas éliminer l’histoire, nous<br />

nous limiterons <strong>à</strong> l’explicite.<br />

l’agitation théologique dans les monastères était gran<strong>de</strong> et<br />

les moines chargés <strong>de</strong> recopier les manuscrits possédaient<br />

une information scripturaire et patristique qui les mettait<br />

ainsi, en tant que transmetteurs du savoir, dans la position<br />

<strong>de</strong> discuter avec les évêques. Ces <strong>de</strong>rniers n’ayant pas la<br />

même qualité d’information, ceci explique aussi pourquoi on<br />

les a souvent choisis parmi le clergé monastique, et para-<br />

(197) «Indicio ignis aeterni inreuocabiliter<br />

<strong>de</strong>stinus est». P.l., XXXV, 1873. «nemo : est<br />

quidam populus praeparatus ad iram <strong>de</strong>i,<br />

damnandus cum diabolo». P.l., XXXV, 1507.<br />

Filius perditionis dictus est Iudas traditor<br />

Christi, perditioni prae<strong>de</strong>stinatus». P. l.,<br />

XXXV, 1914.<br />

(198) «<strong>de</strong> ueritate prae<strong>de</strong>stinationis et gra-<br />

III. l’œuvre<br />

tiae : praeparauit (inquit) <strong>de</strong>us peccatoribus<br />

poenas illis…» P. l., lXXVI, 719 C.<br />

(199) «gemina est prae<strong>de</strong>stinatio siue electorum<br />

ad requiem, siue reproborum ad mortem.<br />

P. l., lXXXIII, 606 a.<br />

(200) d.C. lambot, p. 138, l. 25 et p. 375, l. 22.<br />

(201) d.C. lambot, p. 142, l. 6.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

85


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

86<br />

III. l’œuvre<br />

doxalement ce sont ces évêques qui tentèrent d’imposer<br />

silence aux moines en recherche. dans le cas précis, les<br />

idées <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> étaient trop sulfureuses pour que <strong>de</strong><br />

nombreux moines instruits ne se mêlent pas <strong>de</strong> l’affaire <strong>de</strong><br />

la pré<strong>de</strong>stination et ne la fassent pas rebondir.<br />

Très tôt, Hincmar en prit conscience. C’est pourquoi il<br />

entreprit, <strong>à</strong> l’instigation <strong>de</strong> Charles le Chauve, une réelle<br />

enquête théologique, et dans son traité sur «la pré<strong>de</strong>stination<br />

et le libre arbitre» <strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> réfuter les théories gottschalkiennes,<br />

il écrit :<br />

«In hoc… tempore Gothescalcus... <strong>de</strong> omnibus quae<br />

pe-”ruerse tunc temporis sensa cognouerat quattuor sibi<br />

elegit ”capitula, omnium pene peruersitatum illarum foetidas<br />

et ”caenulentas feces in se continentia…»<br />

«… In Moguntina ciuitate habitae synodo et<br />

Rabano ”archiepiscopo libellum sui erroris porrigens,<br />

damnatus… ”ad Remorum metropolim est remissus…»<br />

«… Sciendum est quoniam quaedam prisco tempore<br />

aliter ”dixerunt haeretici <strong>de</strong> praefatis quattuor capitulis<br />

quae ”primum Gothescalcus sibi assumpsit et <strong>de</strong> quinto<br />

quod ”postea superad<strong>de</strong>ndo praesumpsit, et quaedam aliter<br />

”Gothescalcus, nouorum prae<strong>de</strong>stinatianorum primice-”rius…<br />

dicit…»<br />

«… Praemonemus quemque lectorem ne prauorum haereat<br />

”sensibus cum in illorum scriptis inuenerit posita <strong>de</strong><br />

libris ”Fulgentii quod reprobi prae<strong>de</strong>stinati sunt non ad<br />

malum ”sed ad interitum, quae in Libro ad Monimum quasi<br />

in ”<strong>de</strong>fensione geati Augustini saepius replicat…»<br />

«… Praemonemus etiam Gothescalci et complicium<br />

eius ”fore consuetudinem ut catholicorum testimonia,<br />

praelatis ”doctorum atque librorum nominibus, excerpta<br />

<strong>de</strong>truncent ”et ad suos sensus sicut et scripturarum sententias<br />

inflec-”tere curent…»<br />

«… Ponamus quae Gothescalcus… <strong>de</strong> primo capitulo


un<strong>de</strong> ”uersatur quaestio in libro suae uirosae conscriptionis<br />

”archiepiscopo Rabano porrecto scribat dicens :<br />

”Tan<strong>de</strong>m, inquit, legi librum ueneran<strong>de</strong> pontifex tuum,<br />

in ”quo positum repperi quod impii quoque siue reprobi<br />

non ”sint diuinitus ad damnationem prae<strong>de</strong>stinati.<br />

”Et post aliquanta : Praesciuit, inquam, illos pessimum<br />

”habituros ortum peiorem obitum, prae<strong>de</strong>stinauit<br />

autem ”eos ad luendum perenne tormentum et sempiternum<br />

”interitum» 202 .<br />

Hincmar s’offusque également <strong>de</strong>s critiques faites <strong>à</strong> l’encontre<br />

<strong>de</strong> l’archevêque <strong>de</strong> Mayence.<br />

«…Quem magnum uirum in synodo et etiam in suis<br />

scrip-”tis Gothescalcus reprobus reprehendit…»<br />

«…Gothescalcus <strong>de</strong> libro Hypomnesticon Augustini<br />

inter ”cetera ad confirmandam sententiam suam quia sint<br />

repro-”bia a <strong>de</strong>o prae<strong>de</strong>stinati ad poenam hoc ponit exemplum<br />

”dicens <strong>de</strong> Iuda :<br />

(202) <strong>Gottschalk</strong>, parmi toutes les opinions<br />

perverses qu’il connaissait <strong>à</strong> cette époque, se<br />

choisit quatre points qui renfermaient en eux<br />

les rebuts dégoûtants et sales <strong>de</strong> presque toutes<br />

ces perversités.<br />

Présentant au syno<strong>de</strong> tenu dans la ville <strong>de</strong><br />

Mayence et <strong>à</strong> l’archevêque raban le traité<br />

contenant son erreur, il fut condamné et<br />

envoyé dans la métropole <strong>de</strong> reims.<br />

Il faut savoir que, précé<strong>de</strong>mment, <strong>de</strong>s hérétiques<br />

ont parlé d’une façon <strong>de</strong>s susdits quatre<br />

points que <strong>Gottschalk</strong> prit d’abord <strong>à</strong> son<br />

compte ainsi que du cinquième qu’il prit en<br />

l’ajoutant, et <strong>Gottschalk</strong>, chef <strong>de</strong>s nouveaux<br />

pré<strong>de</strong>stinatiens, en dit autre chose…<br />

nous avertissons le lecteur <strong>de</strong> ne pas s’arrêter<br />

aux opinions <strong>de</strong>s hommes mauvais lorsque,<br />

dans leurs écrits, il trouve extraits <strong>de</strong>s livres <strong>de</strong><br />

Fulgence que les réprouvés ont été pré<strong>de</strong>stinés<br />

non au mal mais au trépas, ce qu’il reprend<br />

dans le «livre <strong>à</strong> Monime» comme pour<br />

défendre saint augustin.<br />

III. l’œuvre<br />

nous avertissons aussi <strong>de</strong> l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> et <strong>de</strong> ses complices <strong>de</strong> citer <strong>de</strong>s<br />

extraits tronqués <strong>de</strong>s témoignages <strong>de</strong>s auteurs<br />

catholiques, en mettant en avant les noms <strong>de</strong>s<br />

docteurs et <strong>de</strong>s livres, et <strong>de</strong> prendre soin <strong>de</strong> les<br />

infléchir en leur sens comme il le fait aussi <strong>de</strong>s<br />

paroles <strong>de</strong>s ecritures.<br />

Citons ce que <strong>Gottschalk</strong> écrit en disant au<br />

sujet du premier point dont il est question dans<br />

le livre sorti <strong>de</strong> sa plume empoisonnée qu’il<br />

présente <strong>à</strong> l’archevêque raban :<br />

enfin, dit-il, j’ai lu ton livre, vénérable pontife,<br />

dans lequel j’ai vu écrit que même les<br />

impies ou les réprouvés ne seraient pas divinement<br />

pré<strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> la damnation.<br />

et après quelques mots :<br />

Il a su d’avance, dis-je, que ceux qui auront un<br />

très mauvais début auront une fin pire, il les a,<br />

en effet, pré<strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> souffrir un tourment<br />

durable et un éternel trépas.<br />

Fragments XII et XIII, d.C. lambot, p. 36/37.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

88<br />

III. l’œuvre<br />

”Si talis, inquit beatus Augustinus, factus esset, inculpabilis<br />

”esset et <strong>de</strong>i opificio reputaretur, non Iudae. Iniuste<br />

etiam ”in eo praelata damnatio esset. Item Petrus : Quibus<br />

iudi-”cium iam olim non cessat et perditio eorum non dormitat.<br />

”Et Iudas : Subintroierunt quidam homines qui olim<br />

praes-”cripti sunt in hoc iudicium impii.<br />

”Cuius caecitas non tantum admiranda quantum<br />

<strong>de</strong>mons-”tranda ui<strong>de</strong>tur quia <strong>de</strong>relictis manifestissimis…<br />

exemplis ”quae ex eo<strong>de</strong>m libro posuimus, haec tantum tria<br />

exempla ”<strong>de</strong>curtauit et ad suum sensum impu<strong>de</strong>nter<br />

inflexit…» 203<br />

Il accuse notre moine d’avoir interpolé les textes <strong>de</strong> saint<br />

augustin et, poursuivant sur le libre arbitre :<br />

«… Gothescalcus mo<strong>de</strong>rnus prae<strong>de</strong>stinatianus in libello<br />

”ad Rabanum archiepiscopum Moguntinum dicit ad<br />

locum :<br />

”De quo ui<strong>de</strong>licet libero arbitrio quid ecclesiae<br />

Christi ”tenendum sit atque cre<strong>de</strong>ndum, cum a ceteris<br />

catholicis ”patribus eui<strong>de</strong>nter sit <strong>de</strong>o gratias disputatum,<br />

tum praeci- ”pue contra pelagianos et caelestianos a beato<br />

Augustino ”plenius et uberius diuersis in opusculis et maxime<br />

in ”Hypomnesticon esse cognoscitur inculcatum. Vn<strong>de</strong><br />

te ”potius eius<strong>de</strong>m catholicissimi doctoris fructuosissimis<br />

”assertionibus incomparabiliter in<strong>de</strong> quoque malueram<br />

(203) «le réprouvé <strong>Gottschalk</strong> a critiqué ce<br />

grand homme au cours du syno<strong>de</strong> et même<br />

dans ses écrits.»<br />

«<strong>Gottschalk</strong> au sujet du livre d’augustin<br />

(l’Hypomnesticon), entre autres, pour confirmer<br />

son avis que les réprouvés seraient pré<strong>de</strong>stinés<br />

par dieu au châtiment, donne cet<br />

exemple en disant <strong>de</strong> Judas » :<br />

«S’il avait été fait tel,» dit saint augustin, «il<br />

n’eût pas été coupable et la faute en serait<br />

imputée <strong>à</strong> l’œuvre <strong>de</strong> dieu, non <strong>de</strong> Judas.<br />

C’est donc injustement que la damnation lui<br />

aurait été infligée». <strong>de</strong> même Pierre : «Pour<br />

eux, <strong>de</strong>puis longtemps le jugement ne cesse<br />

pas et leur perdition n’a pas <strong>de</strong> répit.» et<br />

Judas : «Il s’est infiltré <strong>de</strong>s hommes qui ont été<br />

jadis condamnés d’avance pour ce jugement<br />

comme impies…»<br />

«Son aveuglement ne paraît pas tant étonnant<br />

que remarquable car, abandonnant les<br />

exemples les plus manifestes que nous avons<br />

pris dans le même livre, il a seulement tronqué<br />

ces trois exemples et les a sans vergogne infléchis<br />

en son sens.»<br />

Fragment XV, d. C. lambot, p. 39.<br />

(204) <strong>Gottschalk</strong>, pré<strong>de</strong>stinatien mo<strong>de</strong>rne,<br />

dans son ouvrage adressé <strong>à</strong> l’archevêque <strong>de</strong><br />

Mayence, raban, dit <strong>à</strong> cet endroit :


niti ”quam erroneis opinionibus Massiliensis Gennadii qui plerisque<br />

”praesumpsit in locis tam fi<strong>de</strong>i catholicae quam beatorum<br />

”etiam patrum inuictissimis auctoritatibus infelicis<br />

Cassiani ”perniciosum nimis dogma sequens reniti» 204 .<br />

Malgré la toute-puissance <strong>de</strong> l’archevêque <strong>de</strong> reims <strong>de</strong>ux<br />

partis se formèrent dans l’église franque et la cruauté montrée<br />

au concile <strong>de</strong> Quierzy <strong>à</strong> l’égard <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> souleva<br />

une large réprobation.<br />

Ce sera l’église <strong>de</strong> lyon qui attaquera vigoureusement les<br />

idées d’Hincmar. Mais les dés furent jetés après l’intervention<br />

directe <strong>de</strong> Charles le Chauve, reconnaissant en l’archevêque<br />

<strong>de</strong> reims le médiateur désigné entre la royauté et<br />

l’église. C’est le point <strong>de</strong> vue hincmarien qui triompha. le<br />

concile <strong>de</strong> Valence (855), auquel participeront quatorze<br />

évêques et trois métropolitains qui formulèrent clairement<br />

la double pré<strong>de</strong>stination, ne fut pas entendu. C’est au syno<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> douzy (en 860), avec la rédaction <strong>de</strong> canons ambigus,<br />

permettant une double interprétation, que s’apaisèrent<br />

enfin les esprits.<br />

Hincmar, pour réfuter <strong>Gottschalk</strong>, aura donc dû fournir un<br />

long effort, et une recherche théologique durant plus <strong>de</strong> dix<br />

années. Il emprunta longuement au grand maître alcuin. Il<br />

se permit <strong>de</strong> modifier un <strong>de</strong> ses textes en substituant «<strong>de</strong>itas»<br />

<strong>à</strong> «essentia» 205 , procédé peu admissible, mais pour tout<br />

le reste <strong>de</strong>s citations, les choix seront heureux tant dans la<br />

sélection <strong>de</strong>s œuvres que dans le découpage <strong>de</strong>s textes 206 .<br />

«au sujet <strong>de</strong> ce que l’eglise du Christ doit tenir<br />

et croire sur le libre arbitre, d’une part cela a été,<br />

dieu merci, examiné <strong>de</strong> manière évi<strong>de</strong>nte par les<br />

autres Pères catholiques, d’autre part on sait que<br />

saint augustin, notamment contre les partisans<br />

<strong>de</strong> Pélage et <strong>de</strong> Célestius, l’a enseigné <strong>de</strong> manière<br />

très copieuse et abondante dans divers<br />

ouvrages et surtout dans l’Hypomnesticon.<br />

C’est pourquoi je préférerais sans comparaison<br />

que, l<strong>à</strong> aussi, tu t’appuies plutôt sur les affirma-<br />

III. l’œuvre<br />

tions très fructueuses <strong>de</strong> ce même docteur très<br />

catholique que sur les opinions erronées <strong>de</strong><br />

Genna<strong>de</strong> <strong>de</strong> Marseille qui, en <strong>de</strong> nombreux<br />

endroits, a osé s’opposer aux autorités très invincibles<br />

tant <strong>de</strong> la Foi catholique que <strong>de</strong>s Saints<br />

Pères mêmes pour suivre la doctrine par trop pernicieuse<br />

du funeste Cassien».<br />

(205) P.l., CI, 20.<br />

(206) Hincmar a utilisé plus <strong>de</strong> 1100 «excerptae»<br />

tirées <strong>de</strong> plus <strong>de</strong> 150 œuvres.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

90<br />

III. l’œuvre<br />

<strong>de</strong> l’eucharistie<br />

Sur la nature <strong>de</strong> l’eucharistie, comme bien d’autres débats,<br />

<strong>Gottschalk</strong> participera avec son ami ratramne aux<br />

réponses <strong>de</strong>mandées par Charles le Chauve.<br />

Sa contribution est assez limitée et fort éloignée <strong>de</strong> celles,<br />

beaucoup plus approfondies, <strong>de</strong> Paschase radbert et<br />

ratramne qui, <strong>à</strong> quelques années d’intervalle, rédigèrent<br />

chacun un ouvrage intitulé : «De corpore et sanguine domini».<br />

Tous <strong>de</strong>ux d’ailleurs offrirent leur travail au roi Charles.<br />

les réflexions <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, qui nous sont parvenues sur ce<br />

sujet sont les suivantes «Et addo quod sicut ueritas est Christus<br />

et ”uerus agnus <strong>de</strong>i qui cotidie pro uita mundi mystice immolatur<br />

”ita procul dubio ex pane uera caro et ex uino uerus<br />

sanguis ”eius consecratione spiritus sancti potentialiter<br />

creatur, ”quia reuera quemadmodum sanctus Augustinus<br />

uerissime ”testatur : Sicut <strong>de</strong> uirgine per spiritum sanctum<br />

uera caro ”sine coitu creatur, ita per eun<strong>de</strong>m ex substantia<br />

panis ac ”uini mystice i<strong>de</strong>m Christi corpus et sanguis<br />

consecratur.<br />

”Quod cum certissime ita sit nec ullus hinc<br />

christianus ”Christo cre<strong>de</strong>ns ambigere possit – quod et<br />

ipsum esse ”uerum pars etiam gentilium scit, nam quondam<br />

in terra ”Vulgarorum 207 quidam nobilis potensque<br />

paganus bibere ”me suppliciter petiuit in illius <strong>de</strong>i amore qui<br />

<strong>de</strong> uino sanguinem ”suum facit – illud in hoc libro mihi prius<br />

penitus fateor ”inauditum repperi sub nomine sancti<br />

Ambrosii quod non ”sit haec alia caro Christi quam quae<br />

nata est <strong>de</strong> Maria et ”passa in cruce et resurrexit <strong>de</strong> sepulchro<br />

: Haec inquit ”ipsa est et i<strong>de</strong>o Christi est caro quae<br />

pro mundi uita adhuc ”hodie offertur. Hoc in capitulo positum<br />

est primo. Similiter ”dicitur et in quarto : Vere cre<strong>de</strong> et<br />

hoc quod conficitur in ”uerbo Christi per spiritum sanctum<br />

(207) nous apprenons ici qu’après son séjour en dalmatie <strong>Gottschalk</strong> exerça son apostolat chez<br />

les Bulgares.


corpus ipsius esse ex ”uirgine. Istud plane fateor numquam<br />

me prius audisse ”uidisse legisse multumque miratus sum<br />

hoc sanctum ”Ambrosium dixisse et insuper etiam multo<br />

magis miror ”auctorem huius uoluminis istud ibi posuisse,<br />

quippe cum ”in eo<strong>de</strong>m quarto capitulo beatus Augustinus<br />

aliquanto ”superius dicat : Quia Christum uorari fas <strong>de</strong>ntibus<br />

non est ”uoluit in misterio hunc panem et uinum uere<br />

carnem suam ”et sanguinem consecratione spiritus sancti<br />

potentialiter ”creari, creando uero cotidie pro mundi uita mystice<br />

immolari, ”ut sicut <strong>de</strong> uirgine per spiritum uera caro sine<br />

coitu creatur ”ita per eun<strong>de</strong>m ex substantia panis ac uini<br />

mystice i<strong>de</strong>m ”Christi corpus et sanguis consecretur. Si<br />

enim uerum est ”immo quia procul dubio uerum est quod tantus<br />

auctor fassus ”est quia Christum uorari fas <strong>de</strong>ntibus non<br />

est, quomodo ”hanc carnem Christi uorari fas est si <strong>de</strong><br />

Maria nata et in ”cruce passa et <strong>de</strong> sepulchro resuscitata<br />

est, praesertim ”cum illa Christi caro resurgens <strong>de</strong> sepulchro<br />

ita glorificata ”sit ut iam uorari nullo modo possit ?<br />

Prorsus ego tam ”contraria sicut ista ui<strong>de</strong>ntur inter se<br />

dicta numquam in ”ullo scripto meo <strong>de</strong> cetero ita uoluissem<br />

praeponere, nisi ”consequenter ea nossem simul et possem<br />

(208) et j’ajoute que, <strong>de</strong> même que le Christ<br />

est la Vérité et le véritable agneau <strong>de</strong> dieu qui<br />

chaque jour est immolé mystiquement pour la<br />

vie du mon<strong>de</strong>, <strong>de</strong> même, sans aucun doute,<br />

sont créés en puissance par la consécration du<br />

Saint-esprit <strong>à</strong> partir du pain sa vraie chair et <strong>à</strong><br />

partir du vin son vrai sang, car en réalité<br />

comme saint augustin l’atteste avec beaucoup<br />

<strong>de</strong> justesse : <strong>de</strong> même que <strong>de</strong> la Vierge est<br />

créée par le Saint-esprit une vraie chair sans<br />

accouplement, <strong>de</strong> même par ce même esprit <strong>à</strong><br />

partir <strong>de</strong> la substance du pain et du vin les<br />

mêmes corps et sang du Christ sont consacrés<br />

mystiquement.<br />

Comme il en est assurément ainsi et qu’il n’est<br />

aucun chrétien croyant au Christ qui puisse en<br />

III. l’œuvre<br />

douter, ce que même une partie <strong>de</strong>s païens sait<br />

être vraie, car un jour un païen noble et puissant<br />

du pays Bulgare me <strong>de</strong>manda en suppliant<br />

<strong>de</strong> boire pour l’amour du dieu qui transforme<br />

le vin en son sang, voici ce que j’ai découvert<br />

dans ce livre sous le nom <strong>de</strong> saint ambroise et<br />

que j’avoue n’avoir absolument jamais entendu<br />

avant, <strong>à</strong> savoir que cette chair du Christ<br />

n’est pas une autre chair que celle qui est née<br />

<strong>de</strong> Marie, a souffert sur la Croix et est ressuscitée<br />

du sépulcre. Celle-ci, dit-il, est celle-l<strong>à</strong><br />

même, et c’est la chair du Christ qui est offerte<br />

encore aujourd’hui pour la vie du mon<strong>de</strong>.<br />

Cela se trouve au chapitre premier. <strong>de</strong> même,<br />

il est dit aussi au quatrième : Crois vraiment<br />

que ce qui est accompli dans (suite page 92)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

91


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

92<br />

III. l’œuvre<br />

<strong>de</strong>o donante protinus ”eui<strong>de</strong>nter exponere. Huc accedit et<br />

multo aliud molestius ”et omni modo difficilius illud ui<strong>de</strong>licet<br />

quod in septimo ”capitulo, ubi scilicet tribus modis<br />

dicitur corpus Christi id ”est : ecclesia et istud mysticum<br />

et illud quod se<strong>de</strong>t ad ”<strong>de</strong>xteram <strong>de</strong>i, ita disputat beatus<br />

Augustinus quasi non ei ”placuerit illud quod secus dixit<br />

sanctus Ambrosius» 208 .<br />

Pour <strong>Gottschalk</strong>, le vrai corps et le vrai sang du Christ, dans<br />

le mystère <strong>de</strong> l’eucharistie, sont créés par la consécration du<br />

Saint-esprit, et l’immolation est purement mystique. Il<br />

révèle surtout les contradictions entre les <strong>de</strong>ux saints :<br />

ambroise et augustin. Il est encore une fois regrettable que<br />

les énergies développées par les théologiens du IX e siècle se<br />

soient essentiellement concentrées sur le problème <strong>de</strong> la<br />

pré<strong>de</strong>stination, stérilisant ainsi pour plusieurs siècles l’approfondissement<br />

d’autres questionnements religieux.<br />

Le grammairien et philologue<br />

C’est la grammaire, et plus particulièrement une gran<strong>de</strong><br />

maîtrise <strong>de</strong> la linguistique, qui permirent <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong><br />

la parole du Christ par le Saint-esprit est son<br />

corps né <strong>de</strong> la Vierge. J’avoue tout <strong>à</strong> fait<br />

n’avoir jamais avant entendu, vu ou lu cela et<br />

je me suis beaucoup étonné que saint<br />

ambroise l’ait dit et je m’étonne bien plus que<br />

l’auteur <strong>de</strong> cet ouvrage l’ait cité ici, alors que<br />

saint augustin dans ce même chapitre quatre<br />

dit plus haut : Comme il n’est pas permis aux<br />

<strong>de</strong>nts <strong>de</strong> dévorer le Christ, il a voulu dans ce<br />

mystère faire en puissance, par la consécration<br />

du Saint-esprit, du pain et du vin vraiment sa<br />

chair et son sang, et, en le faisant, s’immoler<br />

mystiquement chaque jour pour la vie du<br />

mon<strong>de</strong>, pour que, <strong>de</strong> même que <strong>de</strong> la Vierge est<br />

créée par l’esprit une vraie chair sans accouplement,<br />

<strong>de</strong> même par ce même esprit <strong>à</strong> partir<br />

<strong>de</strong> la substance du pain et du vin les mêmes<br />

corps et sang du Christ soient consacrés mystiquement.<br />

S’il est vrai, ou plutôt puisque sans<br />

aucun doute il est vrai qu’un tel auteur a affirmé<br />

qu’il n’est pas permis aux <strong>de</strong>nts <strong>de</strong> dévorer<br />

le Christ, comment est-il permis <strong>de</strong> dévorer<br />

cette chair du Christ, si elle est née <strong>de</strong> Marie, a<br />

souffert sur la Croix et est ressuscitée du<br />

sépulcre, surtout lorsque cette chair-ci du Christ<br />

ressuscitant du sépulcre a été glorifiée au point<br />

<strong>de</strong> ne pouvoir plus être d’aucune manière dévorée<br />

? en outre, ces paroles qui semblent si<br />

contraires entre elles, jamais je n’aurais<br />

d’ailleurs voulu les mettre en avant dans aucun<br />

<strong>de</strong> mes écrits, si je ne savais et ne pouvais, avec<br />

l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> dieu, les expliquer <strong>à</strong> la suite et <strong>de</strong><br />

manière évi<strong>de</strong>nte juste après. a cet endroit,<br />

s’ajoute quelque chose <strong>de</strong> beaucoup plus gênant<br />

et plus difficile <strong>de</strong> toute façon : dans le chapitre<br />

sept où le corps du Christ est désigné <strong>de</strong> trois<br />

manières, <strong>à</strong> savoir l’eglise, ce sens mystique et<br />

le fait qu’il siège <strong>à</strong> la droite <strong>de</strong> dieu, saint<br />

augustin argumente comme si l’avis différent<br />

<strong>de</strong> saint ambroise ne lui plaisait pas.<br />

d.C. lambot, p. 325-326.<br />

(209) d.C. lambot, p. 359 <strong>à</strong> 374 et 499 <strong>à</strong> 503.


d’échafau<strong>de</strong>r maintes théories.<br />

l’ouvrage le plus achevé qui nous soit parvenu, «De in<br />

praepositione explanatio» 209 est une dissertation sur le bon<br />

emploi <strong>de</strong>s prépositions. Pour lui, <strong>de</strong> tels mots traduisent<br />

<strong>de</strong>s rapports bien déterminés entre les substantifs qu’ils<br />

relient. Cette étu<strong>de</strong> a donc un intérêt exégétique et théologique<br />

aussi bien que grammatical. C’est <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> sa<br />

recherche et son exigence <strong>de</strong> la bonne orthographe qu’il<br />

répondra aussi <strong>à</strong> Hincmar ; trouvant fort altérée son orthographe<br />

il lui écrit :<br />

«… in nomine sancti Bonifacii necdum id dispexisti<br />

quique ”cum ceteris hunc locum nimia prorsus absurditate<br />

fatuitatis ”Altiuillare appellas, cum si constructor eius<br />

nomen ”habuisset Monasterium Biduimi. Nunc autem<br />

nequit ita ”uocari, sicut monasterium Magnus locus<br />

Magnilocus ”nequit nuncupari. Sed si <strong>de</strong>cepit te centimanus<br />

celsitronus ”altithronus, ui<strong>de</strong> tan<strong>de</strong>m aliquando quod<br />

alti celsi et centi ”non sunt genetiui sed accusatiui – Et<br />

insuper ut genetrice ”siue genetiuo sic in i uertis e in<br />

nomine Bonefacii – ”altitronus celsitronus : altum tronum<br />

babens et celsum ”habens, et centimanus : centum manus<br />

habens. I<strong>de</strong>o sane ”dixi centi esse accusatiuum quia eius<br />

ui<strong>de</strong>tur officio ”fungi, sicut pennipotens et armipotens<br />

ablatiui uel magis ”genetiui, et armigeri» 210 .<br />

on constate ici que les schèmes selon lesquels s’organise<br />

(210) dans le nom <strong>de</strong> saint Boniface, tu n’as<br />

pas encore examiné cela : la répétition du «i»,<br />

toi qui appelles avec d’autres ce lieu «Villers<strong>de</strong>-Haut»<br />

(Altiuillare) avec une excessive<br />

absurdité due <strong>à</strong> la sottise, alors que seulement<br />

si son bâtisseur avait eu pour nom «haut»<br />

(Altus), il pourrait s’appeler ainsi, comme par<br />

exemple le «monastère <strong>de</strong> Biduin» (monasterium<br />

Biduini). Mais on ne peut l’appeler ainsi,<br />

comme le monastère «Grand lieu» (Magnus<br />

locus) ne peut se nommer «lieu-du-Grand»<br />

(Magnilocus). Mais si tu es trompé par «centimanus»,<br />

«celsitronus», «altitronus» «qui a<br />

III. l’œuvre<br />

cent mains», «qui a trône élevé», «qui a un<br />

trône en hauteur», considère enfin que «alti»,<br />

«celsi» et «centi» ne sont pas <strong>de</strong>s génitifs mais<br />

<strong>de</strong>s accusatifs. –et en outre, comme dans<br />

«genetrice» ou «genetivo», ainsi on change le<br />

«e» en «i» dans le nom <strong>de</strong> Boneface-, «altitronus»,<br />

«celsitronus» : «qui a un trône élevé»<br />

«qui a une place en hauteur», «centimanus» :<br />

«qui a cent mains». J’ai donc raison <strong>de</strong> dire<br />

que «centi» est un accusatif, car il semble remplir<br />

ce rôle, comme «pennipotens» et «armipotens»<br />

pour l’ablatif ou plutôt le génitif, et<br />

«armigeri». d.C. lambot, p. 457.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

93


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

94<br />

III. l’œuvre<br />

la pensée <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> peuvent être assimilés <strong>à</strong> <strong>de</strong> l’esthétisme,<br />

mais c’est surtout l’utilisation permanente d’une<br />

médiation logico-grammaticale qui l’anime et l’ai<strong>de</strong> <strong>à</strong><br />

confirmer ses thèses théologiques. Ce genre d’argumentation<br />

consiste <strong>à</strong> passer <strong>de</strong>s propriétés du langage <strong>à</strong> celles <strong>de</strong>s<br />

choses. Il suppose alors que les mots forment le langage et<br />

que tous ont une certaine i<strong>de</strong>ntité. l’analyse <strong>de</strong> ces i<strong>de</strong>ntités<br />

et leurs modifications éclairent la nature <strong>de</strong>s choses que<br />

les mots désignent. Pour lui, chaque mot reflète par sa<br />

construction (latine) l’objet qu’il désigne, d’où le rôle que<br />

joue l’examen étymologique. C’est ainsi que <strong>Gottschalk</strong><br />

s’appuie sur ce qu’il pense être l’étymologie <strong>de</strong> tel ou tel<br />

mot. nous l’avons remarqué dans le débat sur la trinité<br />

avec sa définition <strong>de</strong> «persona», «per se una». <strong>de</strong> plus,<br />

<strong>Gottschalk</strong> attire l’attention entre les sens <strong>de</strong>s mots voisins<br />

: «trinus» et «triplex». ainsi maîtrisée, l’étymologie<br />

est un savoir exact du vrai sens <strong>de</strong>s mots. Cela lui permet<br />

d’argumenter et <strong>de</strong> comprendre. Il en va <strong>de</strong> même pour les<br />

expressions construites telles que : «humanitas triplex» et<br />

«<strong>de</strong>itas trina» : il en résulte une meilleure assimilation <strong>de</strong><br />

la distance entre l’Homme et dieu. Mais pour <strong>Gottschalk</strong>,<br />

l’analyse <strong>de</strong>s significations ne se limite pas au seul vocabulaire<br />

latin : «Hebraei atque graeci loquuntur absolute<br />

”per genus femininum et latini per neutrum, nam nec<br />

illi ”neque nos dicimus absolute per genus masculinum» 211 .<br />

C’est ainsi que notre moine, en fonction d’une particularité<br />

<strong>de</strong> la langue hébraïque, trouve une base <strong>de</strong> spéculation<br />

suffisamment sûre pour légitimer le passage d’un système<br />

linguistique <strong>à</strong> un autre et présupposer une similarité profon<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> tous les langages, fondée sur leur commune relation<br />

avec une unique réalité.<br />

<strong>Gottschalk</strong> conclut <strong>à</strong> l’unité <strong>de</strong> la nature et <strong>à</strong> la pluralité <strong>de</strong>s<br />

personnes par une simple inspection grammaticale. Pour<br />

(211) d.C. lambot, p. 397, l. 17, 18, 19. (212) d.C. lambot, p. 50.


lui, l’hérésie consiste <strong>à</strong> mettre un pluriel l<strong>à</strong> où il faudrait un<br />

singulier, ou le contraire. la prière, par sa formulation, doit<br />

utiliser toutes les possibilités <strong>de</strong> la langue pour être théologiquement<br />

correcte. Pour <strong>Gottschalk</strong>, c’est dieu qui nous a<br />

enseigné la façon dont les nombres grammaticaux doivent<br />

être employés, d’où la formule «tibi <strong>de</strong>o gratias» 212 , adressée<br />

<strong>à</strong> une seule personne, et la formule : «uobis <strong>de</strong>o gratias»<br />

213 , adressée aux <strong>de</strong>ux autres. Il souligne les exceptions,<br />

comme l’absence <strong>de</strong> pluriel <strong>de</strong>s mots «lux» et «pax», qui<br />

sont <strong>de</strong>s noms divins témoignant que dieu est unique 214 .<br />

Il pose la question : comment un substantif qui n’admet pas<br />

le pluriel pourrait-il désigner un être qui ne serait pas<br />

unique ? afin <strong>de</strong> ne pas tomber dans l’hérésie notre moine<br />

affirme que l’on doit savoir qu’un nom ou un prénom peut<br />

varier en cas et en genre, d’où la nécessité d’analyser correctement<br />

ce <strong>de</strong>uxième genre <strong>de</strong> variation grammaticale.<br />

les questions grammaticales qu’il posait étaient parfois<br />

dépassées par une approche plus philologique. nous en<br />

avons pour preuve le passage suivant :<br />

«Gens teudisca sic habet pene distinctos casus in lingua<br />

”sua siculi et in latina… non discunt : uis tu <strong>de</strong> hoc ?<br />

aut : ”da mihi <strong>de</strong> hoc ; sed omnes in commune docti pariter<br />

in ”indocti dicunt : da mihi huius… uis tu huius ? scilicet<br />

non ”per ablatiuum, sed per genitiuum».<br />

Ici, <strong>Gottschalk</strong> rapporte qu’en langue tu<strong>de</strong>sque on ne fait<br />

pas <strong>de</strong> distinction comme ceux qui parlent le latin et qu’on<br />

emploie le génitif pour l’ablatif quand il s’agit <strong>de</strong> la partie<br />

et non du tout. <strong>de</strong> même, ils disent : «<strong>de</strong>ter mihi illius graeci<br />

”uini, uel illius mogari, uel illorum pirorum», alors que<br />

dans l’est <strong>de</strong> la France on disait : «<strong>de</strong> illo graeco uino,<br />

uel ”<strong>de</strong> illo mogaro». 215 les concepts <strong>de</strong> preuve <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> assis sur la grammaire sont <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ordres :<br />

(213) d.C. lambot, p.118.<br />

(214) d.C. lambot, p. 71 – 73.<br />

III. l’œuvre<br />

(215) Manuscrit <strong>de</strong> Berne, f. 64, r°, dom<br />

Germain Morin, revue bénédictine, t. XlIII, p.<br />

304 et suivantes (1931).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

95


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

96<br />

III. l’œuvre<br />

logique et philosophique. Tout son travail sur le plan du<br />

langage n’est jamais distinct <strong>de</strong> la logique, cette liaison est<br />

permanente dans toute son œuvre. Ce fait nous ai<strong>de</strong> <strong>à</strong><br />

mieux comprendre comment un théologien, un grammairien<br />

ingénieux, capable <strong>de</strong> soutenir <strong>de</strong>s querelles qui intéressaient<br />

les plus grands esprits <strong>de</strong> son temps, incarne un<br />

riche moment <strong>de</strong> l’histoire intellectuelle.<br />

Le philosophe<br />

Parmi les concepts philosophiques que met en œuvre la<br />

spéculation théologique <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, les uns concernent<br />

l’essence et l’existence <strong>de</strong> dieu : «esse», «est», et celui<br />

d’éternité 216 ; les autres concernent la substance, la personne<br />

et la nature <strong>de</strong> la trinité 217 .<br />

Si ces concepts semblent peu élaborés, on ne peut cependant<br />

pas nier que notre moine subodore les problèmes<br />

métaphysiques. Son esprit est bien trop subtil pour ne pas<br />

les pressentir. lorsqu’il écrit : «perfectus diuinis homo non<br />

est diuinas sed diuinatio… perfectus homo non est, homo<br />

sed ipsa humanitas», il désigne un être porteur d’une qualité<br />

poussée <strong>à</strong> son plus haut <strong>de</strong>gré, exemplaire et comme<br />

i<strong>de</strong>ntifié <strong>à</strong> son essence, et qui semble n’exister que pour<br />

elle et par elle, et doit être désigné en conséquence par le<br />

même substantif abstrait que cette qualité.<br />

Ce principe énoncé ressemble curieusement <strong>à</strong> du platonisme.<br />

<strong>Gottschalk</strong> a lu Platon, il le cite avec ar<strong>de</strong>ur : «tam<br />

nol-”let peccare quam si semper possit latere».<br />

«Vtinam sic istam plurimum mirandam pagani<br />

mecum ”sententiam mireris, et ne quod absit a domino<br />

damneris, ”eam iam iamque prout expedit imiteris, presertim<br />

cum ”dicat in euangelio dominus : Nisi quis renuntiauerit<br />

omni-”bus quae possi<strong>de</strong>t non potest meus esse discipulus.<br />

Plato ”paganus nollet etiam tunc peccare si posset<br />

latere, et ecce ”pro dolor Plato christianus non timet dam-<br />

(216) d.C. lambot, p. 64. (217) d.C. lambot, p. 35 <strong>à</strong> 40.


nabiliter et leta-”biliter peccare, cum procul dubio nequeat<br />

non patere».<br />

«Deus omnipotens qui dicit per prophetam : Dabo eis<br />

cor ”cognoscendi me et aures audientes ipse faciat ut<br />

supra ”dictam sententiam inluminatis oculis cordis efficaciter<br />

”legas intellegas impleas, nec excusare se coram<br />

Christo ”iudice quolibet modo poterit qui munus a lingua<br />

<strong>de</strong>dit ”quod praemium non <strong>de</strong><strong>de</strong>rit. Deus omnipotens auferat<br />

a te ”cor lapi<strong>de</strong>um et <strong>de</strong>t tibi cor carneum neque permittat<br />

te ”ocius interire sed faciat tecum misericordiam<br />

nunc et in ”die irae. Et si non uereris illum potentissimi<br />

regis et omni-”potentissimi domini <strong>de</strong>i nostri gladium quo<br />

accinctus est ”super femur suum, cur illum non times qui<br />

exit ex ore suo ”ne te transuerberet subito pro merito tuo ?<br />

Quare non ”simul etiam falcem metuis illam quam habet in<br />

manu sua ”ne uelut fugitiui sui concidat atque succidat<br />

crura tua ? ”Potens est etiam et illum quoque baculum<br />

harundineum in ”quo habes fiduciam attrectare et eum ueluti<br />

meretur secare. ”Ecce qualem possi<strong>de</strong>o qui uult militare<br />

saeculo relicto <strong>de</strong>o. ”An ignoras quod semper i<strong>de</strong>m ipse<br />

est ? Cura precor dilec-”tissime ne quantocius in perpetuae<br />

mortis praecipitium ”ruiturus curras. Omnes qui<strong>de</strong>m ex quo<br />

nati sumus, ut ait ”Augustinus, aequaliter ad mortem ui<strong>de</strong>licet<br />

huius uitae ”finem tendimus et sine intermissione pariliter<br />

currimus, ”sed ille moritur ocius cui mors obuiat citius.<br />

Proin<strong>de</strong> <strong>de</strong>bemus ”omnes generaliter et unusquisque <strong>de</strong> se<br />

(218) Puisses-tu admirer avec moi cette parole<br />

très admirable <strong>de</strong> ce païen, et pour ne pas être<br />

damné par le Seigneur, loin <strong>de</strong> l<strong>à</strong>, l’imiter dès<br />

maintenant comme il convient, surtout alors<br />

que le Seigneur dit dans l’évangile :<br />

Quiconque ne renonce pas <strong>à</strong> tout ce qu’il possè<strong>de</strong><br />

ne peut être mon disciple. Platon, le païen,<br />

ne voudrait pas pécher même s’il pouvait le<br />

cacher, et par malheur Platon, le chrétien, ne<br />

craint pour sa damnation et sa perte, alors que<br />

sans aucun doute cela ne peut qu’être évi<strong>de</strong>nt.<br />

Que dieu tout-puissant qui dit par le prophè-<br />

III. l’œuvre<br />

te : Je leur donnerai un cœur pour me<br />

connaître et <strong>de</strong>s oreilles pour entendre, fasse<br />

que tu lises, comprennes et accomplisses avec<br />

efficacité cette parole susdite avec les yeux du<br />

cœur illuminés, et qu’il ne puisse en aucun cas<br />

éviter <strong>de</strong> donner la récompense <strong>de</strong>vant le<br />

Christ juge, lui qui a fait un don par sa langue.<br />

Que dieu tout-puissant t’enlève ton cœur <strong>de</strong><br />

pierre et qu’il te donne un cœur <strong>de</strong> chair et<br />

qu’il ne te laisse pas mourir trop tôt mais qu’il<br />

te fasse miséricor<strong>de</strong> maintenant et au jour <strong>de</strong><br />

colère. et si tu ne redoutes pas (suite page 98)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

97


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

98<br />

III. l’œuvre<br />

suisque specialiter ”impendio formidare ne percussi repente<br />

cogamur imparati ”migrare. Qui fidit in falsis pascit uentos,<br />

id est qui relicta ”ueritate sequitur falsitatem pascit<br />

sequiturque spiritus malignos».<br />

«Excusans proprium facinus homo impurus lamia fit et ericius»<br />

218 .<br />

S’il s’abstient <strong>de</strong> toute spéculation métaphysique sur<br />

l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> «esse» et «est» en dieu, il n’en développe pas<br />

moins une dans son parallélisme entre «<strong>de</strong>us unus» et<br />

«<strong>de</strong>itas una et trina». Il implique l<strong>à</strong> une philosophie du<br />

rapport entre le langage et le réel. Pour lui, l’existant parfait<br />

est assimilé <strong>à</strong> l’essence, les termes sont intervertis par<br />

rapport <strong>à</strong> Platon où l’essence est existante. l’égalité est la<br />

même, la perfection <strong>de</strong> l’essence divine ne permet pas d’en<br />

supposer la non-existence. ainsi pour <strong>Gottschalk</strong>, dieu est<br />

déité parce que parfait, c’est sa preuve ontologique. Mais<br />

également comme Platon, il pratique la nécessité d’un<br />

paradigme pour comprendre les objets <strong>de</strong> sa pensée qui ne<br />

possè<strong>de</strong>nt pas <strong>de</strong> matérialité. Il travaille sur les «uestigia<br />

trinatis» que le mon<strong>de</strong> du sensible lui offre, soleil, éclat,<br />

chaleur, et le mon<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’esprit où se développe l’action<br />

divine : miroir <strong>de</strong>s aspects <strong>de</strong> la nature divine. Pour passer<br />

le glaive du roi très puissant et <strong>de</strong> notre<br />

Seigneur dieu tout-puissant dont il s’est ceint<br />

sur sa cuisse, pourquoi ne crains-tu pas que<br />

celui qui sort <strong>de</strong> sa bouche aussi ne te transperce<br />

tout <strong>à</strong> coup pour ta peine ? Pour quelle<br />

raison n’as tu pas peur que la faux qu’il a dans<br />

la main, ne taille en pièces et coupe tes jambes<br />

comme celles <strong>de</strong> son esclave en fuite ? Il a<br />

même le pouvoir <strong>de</strong> saisir aussi le bâton <strong>de</strong><br />

roseau en qui tu as confiance, et <strong>de</strong> le rompre<br />

comme il le mérite. Voil<strong>à</strong> comment je considère<br />

celui qui veut servir le mon<strong>de</strong> en abandonnant<br />

dieu. Ignores-tu qu’il est toujours le<br />

même ? Prends gar<strong>de</strong>, je t’en prie, mon bien<br />

aimé, <strong>de</strong> ne pas courir au plus vite te jeter dans<br />

le précipice <strong>de</strong> la mort éternelle. Tous <strong>de</strong> par<br />

celui dont nous sommes nés, comme dit<br />

augustin, nous nous dirigeons également vers<br />

la mort comme le terme <strong>de</strong> cette vie et nous y<br />

courons semblablement sans arrêt, mais il<br />

meurt plus vite celui <strong>à</strong> qui la mort se présente<br />

plus rapi<strong>de</strong>ment. Par conséquent, nous<br />

<strong>de</strong>vons, tous en général et chacun spécialement<br />

pour lui et pour les siens, beaucoup<br />

redouter d’être frappés et soudainement forcés<br />

<strong>de</strong> partir sans être prêts.<br />

Celui qui se fie aux choses fausses, paît les<br />

vents, c’est <strong>à</strong> dire celui qui, abandonnant la vérité,<br />

suit l’erreur, paît et suit les esprits mauvais.<br />

en excusant son propre crime, l’homme impur<br />

<strong>de</strong>vient un démon et un hérisson.<br />

(219) d.C. lambot, p. 307, l. 16, 17.<br />

(220) Il lui attribut cette louange : «post apostolos<br />

ecclesiarum magister». d.C. lambot, p. 327.


III. l’œuvre<br />

du plan humain au plan divin, il lui faut bien faire appel <strong>à</strong><br />

la ressemblance <strong>de</strong> l’homme <strong>à</strong> dieu : «Dedit, inquit euangelista,<br />

illis qui in uerbum carnem factum credi<strong>de</strong>runt<br />

potestatem filios <strong>de</strong>i fieri» 219 .<br />

C’est donc encore le platonisme qui nourrit la métho<strong>de</strong><br />

théologique <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. Cette imprégnation platonicienne<br />

est probablement due <strong>à</strong> la gran<strong>de</strong> influence augustinienne<br />

qu’il reçoit, au point même d’écrire : «mon<br />

augustin» 220 . Il cite ce père <strong>de</strong> l’église plus <strong>de</strong> trois cents<br />

fois. Il retrouve en lui l’homme <strong>de</strong> rupture, fondateur <strong>de</strong><br />

l’inquiétu<strong>de</strong> occi<strong>de</strong>ntale par rapport au christianisme<br />

d’orient.<br />

Comme lui, il introduisit une instabilité fécon<strong>de</strong>, une dynamique<br />

face <strong>à</strong> la politique <strong>de</strong> la peur inaugurée sous l’église<br />

carolingienne et <strong>de</strong>meurée jusqu’au XVIII e siècle un<br />

élément politique <strong>de</strong> premier ordre. Si <strong>Gottschalk</strong> n’a pas<br />

livré un système philosophique complet, il a, par ses règles<br />

<strong>de</strong> l’argumentation grammaticale, offert une philosophie<br />

implicite, puisque, comme pour chacun, toute pensée formulée<br />

est référée <strong>à</strong> <strong>de</strong>s postulats le plus souvent informulés<br />

et mal connus <strong>de</strong> celui qui en développe spontanément<br />

les conséquences.<br />

Certes au IX e siècle, la philosophie qui commence <strong>à</strong> se<br />

reconstituer n’a pas traversé les crises historiques qui, plusieurs<br />

fois, l’ont contrainte <strong>à</strong> réexaminer ses principes.<br />

C’est l<strong>à</strong> un élément important que l’on trouve chez<br />

<strong>Gottschalk</strong> : nul retour sur les conditions <strong>de</strong> la vérité, car il<br />

ne peut se poser les questions métaphysiques intérieures <strong>à</strong><br />

son propre dogmatisme.<br />

Cela vaut évi<strong>de</strong>mment pour tous les acteurs qui participèrent<br />

<strong>à</strong> la querelle sur la pré<strong>de</strong>stination, leur esprit étant peu<br />

exercé philosophiquement.<br />

Conclusion III<br />

l’œuvre <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> dont nous avons gardé trace est<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

99


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

100<br />

III. l’œuvre<br />

incomplète : ne pouvant donc être exhaustifs, nous tenons <strong>à</strong><br />

signaler qu’il s’est intéressé <strong>à</strong> <strong>de</strong>s sciences non encore formalisées<br />

<strong>à</strong> son époque, mais dont les détails sont frappants.<br />

Il s’intéresse <strong>à</strong> la zoologie et va chercher chez Isidore <strong>de</strong><br />

Séville <strong>de</strong>s étymologies qui relatent les mœurs chez le<br />

renard et chez l’ours. le livre XII <strong>de</strong>s «Etymologiae», où il<br />

a trouvé ses références, traite <strong>de</strong>s animaux. Il est donc évi<strong>de</strong>nt<br />

qu’il a dû y lire d’autres détails. C’est ainsi qu’il développe<br />

<strong>de</strong>s idées très personnelles en cherchant <strong>à</strong> rendre<br />

clair le phénomène <strong>de</strong> la génération, par une comparaison<br />

avec le ver qui, coupé en plusieurs morceaux, se transforme<br />

en autant <strong>de</strong> vermisseaux 221 . Il réfléchit également longuement<br />

sur la stérilité <strong>de</strong>s femmes 222 .<br />

les recherches et travaux <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> permettent au plan<br />

littéraire <strong>de</strong> dégager les éléments centraux <strong>de</strong> sa pensée.<br />

Son érudition est fort gran<strong>de</strong>. dans une correspondance<br />

avec loup <strong>de</strong> Ferrières datée <strong>de</strong> 849, il apparaît que notre<br />

moine cherchait <strong>à</strong> préciser le sens <strong>de</strong> mots grecs :<br />

«Quaternionen quem referisti nescio quis mihi sublegerat.<br />

”Verborum uero, quorum flagitasti rationem quia nec<br />

plearia ”statem omnium occurrit et eam indagare maximae<br />

causarum ”moles, quibus assidue abruor, inhibuerunt, in<br />

aliud tempus ”distuli, quamquam non sim nescius graecorum<br />

sermonum ”proprietates a graecis potius expectandas»<br />

223 .<br />

Il est évi<strong>de</strong>nt que bon nombre <strong>de</strong> ses écrits ont été perdus<br />

définitivement. Certains furent même brûlés <strong>de</strong> son vivant.<br />

Son enseignement eut néanmoins <strong>de</strong> nombreux a<strong>de</strong>ptes,<br />

(221) d.C. lambot, p. 290.<br />

(222) d.C. lambot, p. 292 <strong>à</strong> 294.<br />

(223) Je ne sais qui m’avait soustrait le cahier<br />

que tu as trouvé. d’autre part, bien que je ne<br />

sois pas sans savoir que le sens propre <strong>de</strong>s<br />

mots grecs doit être plutôt réclamé <strong>de</strong>s Grecs,<br />

j’ai remis <strong>à</strong> un autre temps l’explication <strong>de</strong>s<br />

mots que tu as sollicitée, parce que la signifi-<br />

cation parfaite <strong>de</strong> tous ne m’est pas venue <strong>de</strong><br />

suite <strong>à</strong> l’esprit et que la masse énorme d’affaires<br />

qui m’écrase sans cesse m’a empêché <strong>de</strong><br />

la rechercher.<br />

Loup <strong>de</strong> Ferrières, correspondance II, lettre<br />

80, p. 54-55, traduction léon levillain, éd.<br />

les Belles lettres, Paris (1964).


tant dans le royaume <strong>de</strong> Charles que dans ceux <strong>de</strong> louis et<br />

lothaire, et aussi au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong> <strong>de</strong> ces royaumes.<br />

la qualité <strong>de</strong> sa poésie rivalise avec celles <strong>de</strong>s plus grands<br />

<strong>de</strong> son époque, comme Walafrid Strabon et Florus <strong>de</strong> lyon.<br />

Grammairien éclairé, polyglotte, il construit sa pensée<br />

théologique en démontrant que la grammaire n’est pas un<br />

simple ensemble <strong>de</strong> règles abstraites, mais qu’elle est<br />

incarnée et qu’il faut concevoir une existence grammaticale.<br />

est-ce l<strong>à</strong> le fruit d’une pensée confuse ou un aspect du<br />

mon<strong>de</strong> parfaitement conscient <strong>de</strong> soi ? est-ce l’ébauche<br />

imparfaite d’une métaphysique qui n’a pu arriver <strong>à</strong> terme,<br />

faute d’une technique intellectuelle suffisante ? Ces questions<br />

posées par le philosophe Jean Jolivet ne sont pas tranchées<br />

224 . Comme lui, nous considérons que <strong>Gottschalk</strong> a<br />

construit une sorte <strong>de</strong> platonisme grammatical où les structures<br />

linguistiques sont fondées dans l’être qu’elles signifient.<br />

<strong>Gottschalk</strong> voit donc dans le mon<strong>de</strong> du langage une<br />

région du mon<strong>de</strong> réel.<br />

dans la culture carolingienne, la grammaire est <strong>à</strong> peu près<br />

la seule science profane connue et son utilisation contribue<br />

<strong>à</strong> la formation d’une métaphysique du langage. C’est avec<br />

un art certain et sur ce terrain seul que <strong>Gottschalk</strong> a pu<br />

contredire ses adversaires, c’est aussi avec cette philosophie<br />

réaliste du langage qu’il exposa sa métho<strong>de</strong> : <strong>à</strong> partir<br />

<strong>de</strong> textes sacrés, construire <strong>de</strong>s formules théologiques précises.<br />

Pour lui, une religion fondée sur <strong>de</strong>s textes révélés<br />

exige que son approfondissement passe par l’usage <strong>de</strong> la<br />

science grammaticale. a cette ambition consciente,<br />

(224) Go<strong>de</strong>scalc d’Orbais et la trinité, éd. Vrin, p. 18 Paris (1958).<br />

III. l’œuvre<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

101


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

102


I V. Le conf l i t<br />

dans une société mal christianisée, le problème <strong>de</strong> la<br />

pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>vait fatalement se poser.<br />

Beaucoup <strong>de</strong> chrétiens <strong>de</strong> fraîche date refusaient<br />

<strong>de</strong> conformer leur conduite <strong>à</strong> la morale qui leur était enseignée.<br />

la simplicité <strong>de</strong> leur vie religieuse conduisit le<br />

Concile <strong>de</strong> Paris, en 829, <strong>à</strong> insister sur l’importance <strong>de</strong>s<br />

œuvres pour le salut et sur l’insuffisance <strong>de</strong> la seule foi <strong>à</strong><br />

assurer celui-ci 225 . dans ce texte plein <strong>de</strong> recommandations<br />

apparaît une certaine connivence. le débat, mal formulé<br />

entre la foi, la morale et leur application aux œuvres <strong>de</strong><br />

l’homme, on en serait resté l<strong>à</strong> si <strong>Gottschalk</strong> n’avait pas<br />

produit <strong>de</strong>s textes radicaux, s’inspirant <strong>de</strong>s allusions faites<br />

par Isidor <strong>de</strong> Séville dans ses « Sentences» <strong>à</strong> une : «prae<strong>de</strong>stinatio<br />

gemina», puis <strong>à</strong> celles faites par Prosper, pour<br />

qui les damnés n’étaient condamnés que «post preuisa<br />

<strong>de</strong>merita» ou, encore sous d’autres influences anciennes,<br />

non tranchées nettement, sur la question <strong>de</strong> savoir si la pré<strong>de</strong>stination<br />

était double. Cette double pré<strong>de</strong>stination fut<br />

enseignée parfois par saint augustin : celle <strong>de</strong>s élus et celle<br />

<strong>de</strong>s damnés. Ce n’est donc pas sans motif que les textes<br />

(225) M.G.H. Concilia aeui karolini I, p. 609,<br />

cap. I.«<strong>de</strong>in<strong>de</strong> opera fi<strong>de</strong>i exercenda, quoniam<br />

fi<strong>de</strong>s, nisi opera habeat, mortua est in seme-<br />

IV. le conflit<br />

tipsa…» et p. 610… «quia haec fi<strong>de</strong>s uera et<br />

fructuosa esse non potest nisi bonis operibus<br />

exornetur, id est fi<strong>de</strong>, spe, caritate.»<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

103


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

104<br />

IV. le conflit<br />

gottschalkiens soulevèrent pour les uns un vif intérêt et<br />

pour les autres une certaine émotion. Même s’ils se trompaient,<br />

bon nombre <strong>de</strong> lecteurs y trouvèrent une résurgence<br />

<strong>de</strong>s tendances fatalistes dangereuses pour une société instable.<br />

Pour peu qu’on remplace le mot «dieu», le débat fondamental<br />

sur la pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong> l’homme était et <strong>de</strong>meure<br />

l’un <strong>de</strong>s plus grands <strong>de</strong> la métaphysique. Il faut bien<br />

admettre qu’au IX e siècle, les uns pensent que dieu, hors<br />

du temps, a tout organisé et pré<strong>de</strong>stiné <strong>de</strong>s civilisations, <strong>de</strong><br />

leur <strong>de</strong>stin et <strong>de</strong> leur aventure ; pour les autres cette rigueur<br />

est dangereuse <strong>à</strong> enseigner et est inacceptable parce qu’elle<br />

enlève <strong>à</strong> l’homme toute part <strong>de</strong> responsabilité dans son<br />

salut ou sa damnation.<br />

dès lors, le mon<strong>de</strong> est composé <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux masses intimement<br />

mêlées l’une <strong>à</strong> l’autre, celle <strong>de</strong>s élus et celle <strong>de</strong>s<br />

réprouvés, dont le nombre et la nature ont été irrémédiablement<br />

fixés avant la création. Pour les adversaires <strong>de</strong> la<br />

pré<strong>de</strong>stination, dieu avait pré<strong>de</strong>stiné les élus au salut, non<br />

les réprouvés <strong>à</strong> la damnation.<br />

au niveau <strong>de</strong> l’homme, on voit se poser d’autres questions<br />

non moins importantes. l’homme est-il libre ou non d’admettre<br />

l’action <strong>de</strong> grâce, libre ou non <strong>de</strong> mal faire ?<br />

l’homme choisit-il ou non le salut ou la damnation ?<br />

autrement dit, l’homme jouit-il pleinement <strong>de</strong> son libre<br />

arbitre ? les détracteurs <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> ne poussèrent pas<br />

l’analyse et son application au champ séculier, c’eût été<br />

une notion jugée subversive par le pouvoir politique, le<br />

libre arbitre <strong>de</strong>vant se limiter <strong>à</strong> l’obtention <strong>de</strong> la grâce.<br />

ainsi, entre l’arrivée <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> orbais, accompagné<br />

<strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> raban Maur, et le concile <strong>de</strong> Quierzy <strong>de</strong> 849,<br />

l’archevêque <strong>de</strong> reims prit la tête d’une entreprise visant <strong>à</strong><br />

contrecarrer l’enseignement <strong>de</strong> la double pré<strong>de</strong>stination.<br />

l’archevêque Hincmar suivait en cela les directives <strong>de</strong><br />

l’archevêque <strong>de</strong> Mayence, qui considérait déj<strong>à</strong> comme<br />

impies les théories <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. l’archevêque raban<br />

Maur reprochera encore <strong>à</strong> Hincmar, en 850, <strong>de</strong> poursuivre


la discussion avec l’hérétique et surtout <strong>de</strong> lui laisser la<br />

possibilité d’écrire. Si Hincmar veut bien l’écouter, il doit<br />

faire en sorte qu’aucune occasion ne lui soit plus donnée<br />

<strong>de</strong> correspondre avec qui que ce soit 226 . Mais c’est également<br />

Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Troyes, ancien chapelain <strong>de</strong> louis le<br />

Pieux et <strong>de</strong>venu évêque, qui est visé dans ce courrier <strong>de</strong><br />

raban Maur 227 , car avec ratramne <strong>de</strong> Corbie et loup <strong>de</strong><br />

Ferrières, il était intervenu par écrit en faveur <strong>de</strong> la doctrine<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. les preuves d’un échange <strong>de</strong> textes<br />

entre le moine et les prélats <strong>de</strong> reims et <strong>de</strong> Châlons sont<br />

attestées par leur prise <strong>de</strong> connaissance <strong>de</strong> la : «Confessio<br />

breuior» 228 .<br />

Cet échange <strong>de</strong> correspondance occupe probablement l’année<br />

849 avant et après la condamnation <strong>de</strong> Quierzy. lors<br />

<strong>de</strong> ses déplacements, <strong>Gottschalk</strong> se prit d’amitié avec<br />

Giselmar, moine <strong>de</strong> Corbie, leur correspondance fut interceptée<br />

et tomba entre les mains <strong>de</strong> plusieurs évêques <strong>de</strong> la<br />

province <strong>de</strong> reims 229 . <strong>de</strong> même, une réponse obséquieuse<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> l’évêque loup <strong>de</strong> Châlons démontre combien<br />

notre moine était comblé <strong>de</strong> recevoir un tel soutien :<br />

«au seigneur très glorieux et au père très bon, très excellent<br />

”parmi les vases <strong>de</strong> miséricor<strong>de</strong> et d’honneur et très<br />

révérend ”tant par la hauteur <strong>de</strong> sa sagesse que par la sainteté<br />

<strong>de</strong> sa ”vie, loup, très digne par la grâce <strong>de</strong> dieu du<br />

siège ”épiscopal, très doux évêque, moi, <strong>Gottschalk</strong>, bien<br />

que ”<strong>de</strong>rnier <strong>de</strong> tous ceux qui vivent sous le ciel, très<br />

confiant ”dans votre corps et votre esprit pour l’amélioration<br />

<strong>de</strong> la ”vie présente, je vous souhaite <strong>à</strong> la fois ici une<br />

longue ”prospérité et après, le salut <strong>de</strong> la gloire éternelle<br />

dans le ”Christ. le dix <strong>de</strong>s calen<strong>de</strong>s d’août, la lettre <strong>de</strong> votre<br />

(226) M.G.H., épistolae, t. IV, p. 488. «Quod<br />

ergo per portitorem litteram uestrarum misistis<br />

mihi diuersa opuscula conscripta hoc est<br />

imprimis uestrum quod dilectis filiis simplicibus<br />

sanstae sedis uestrae confecistis».<br />

(227) «postea Pru<strong>de</strong>ntii Traecasine ciuitas<br />

IV. le conflit<br />

episcopi quod excerpit <strong>de</strong> diuersis libris ut<br />

dicunt Augustini...».<br />

(228) d.C. lambot, p. 52 <strong>à</strong> 54.<br />

(229) … «quapropter male intellexit quod<br />

dixit, infi<strong>de</strong>lis Gotescalcus in maledicto scripto<br />

ad Gislemarum…» d.C. lambot, p. 9, l. 22.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

105


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

106<br />

IV. le conflit<br />

béatitu<strong>de</strong> ”m’a été remise, très belle par sa sagesse, très<br />

brillante par ”son éloquence et, ce qui est plus grand que<br />

cela, très douée ”d’humilité, très remarquable par sa charité<br />

et donc qui ”m’est très chère et très agréable. en outre, elle<br />

semble et a ”semblé m’apparaître non seulement plus douce<br />

que le miel ”mais même que tout nectar, car elle annonçait<br />

que vous ”jouissiez non seulement du salut spirituel qui,<br />

grâce <strong>à</strong> dieu, ”augmente toujours, mais aussi que vous avez<br />

la bonne santé ”du corps qui est nécessaire <strong>à</strong> tous vos fidèles,<br />

parmi lesquels ”je suis moi aussi, si vous le permettez, bien<br />

que je ne mérite ”que la <strong>de</strong>rnière place, si je mérite d’ailleurs<br />

d’en avoir une.<br />

”dès que ma petitesse a vu une fois ces indices d’un bonheur<br />

”tant souhaité, sur-le-champ louant dieu avec supplications,<br />

”je vous ai rendu <strong>à</strong> vous aussi <strong>de</strong>s remerciements<br />

en grand ”nombre. J’ai donc alors entrepris <strong>de</strong> faire ces<br />

<strong>de</strong>ux choses ”mais je suis loin d’avoir fini, bien plus je n’ai<br />

pas décidé ”<strong>de</strong> les arrêter tant que mon esprit a <strong>de</strong> la force».<br />

«et <strong>de</strong> ce fait si je voulais avec soin penser, peser et soupeser<br />

”l’importance du bien que dieu a daigné dépenser<br />

pour ”moi par un don gratuit <strong>de</strong> sa grâce, <strong>de</strong> sorte que ce<br />

n’est ”pas une fois mais toujours qu’il faille lui rendre ce<br />

qui doit ”rester <strong>de</strong> louanges, car tant que je vivrai, je ne<br />

pourrai ”venir <strong>à</strong> bout <strong>de</strong> la dépense, bien plus lorsque je<br />

mourrai, je ”commencerai alors <strong>à</strong> m’y efforcer, du moins si<br />

grâce <strong>à</strong> vos ”mérites la bonté <strong>de</strong> dieu daigne étendre <strong>à</strong> moi<br />

sa clémence ”sans laquelle jamais aucun saint, d’autant<br />

moins aucun ”pécheur parmi nous, n’a pu, ne peut ou ne<br />

pourra, comme ”votre excellence le sait bien mieux, tendre<br />

son esprit <strong>à</strong> ”entreprendre le bien même une seule fois <strong>de</strong><br />

manière ”salutaire, <strong>à</strong> plus forte raison le faire persévérer<br />

pour ”parvenir <strong>à</strong> sa consommation comme il convient. et<br />

vraiment ”votre sagacité sait excellemment bien qu’incessamment<br />

”nous <strong>de</strong>vons acquitter en toute sincérité auprès


<strong>de</strong> dieu et ”du prochain le dû <strong>de</strong> la charité dont évi<strong>de</strong>mment<br />

personne ”ne peut entièrement s’acquitter».<br />

«en outre, ce qui, dans la lettre <strong>de</strong> votre honneur, n’a<br />

pas ”empli mes entrailles d’une médiocre exultation, bien<br />

plus ”m’a en entier empli d’un onguent odoriférant et d’un<br />

goût ”d’ambroisie et m’a conduit <strong>à</strong> vous aimer plus abondamment,<br />

”c’est que votre paternité très bonne a infusé en<br />

un doux ”ruissellement la connaissance <strong>de</strong> votre personne en<br />

ramenant ”<strong>à</strong> ma mémoire et le lieu et le moment <strong>de</strong> notre<br />

mutuel ”entretien».<br />

«J’ai assurément admiré et admire encore vraiment le<br />

beau ”faîte <strong>de</strong> votre hauteur, l’élégant ornement <strong>de</strong> votre<br />

clarté, ”mais je brûle et m’étonne bien plus <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong>ur<br />

d’âme ”<strong>de</strong> votre béatitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> par l’excellence <strong>de</strong> votre<br />

humilité, <strong>de</strong> ”sa gloire <strong>de</strong> par l’éminence <strong>de</strong> votre charité,<br />

<strong>de</strong> son éclat ”<strong>de</strong> par l’évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> votre bonté et, <strong>de</strong> plus, <strong>de</strong><br />

son agrément ”<strong>de</strong> par la magnificence <strong>de</strong> votre piété».<br />

«Mais que vous rendrais-je pour un ca<strong>de</strong>au si doux, vraiment<br />

”très agréable et suave, sinon que je désire être tout<br />

vôtre ”tant que je vivrai, du moins si notre Seigneur<br />

et ”ré<strong>de</strong>mpteur Jésus-Christ daigne être notre médiateur ?»<br />

«Car <strong>de</strong> votre part je n’ai aucun doute, mais <strong>de</strong> la mienne<br />

”beaucoup, non que je n’aie pas confiance, loin <strong>de</strong> l<strong>à</strong>, en<br />

la ”grâce <strong>de</strong> celui en qui j’ai toujours cru et crois que je<br />

serai ”heureux, car celui qui a fait attendre lazare pour<br />

pouvoir ”le ressusciter, a le pouvoir <strong>de</strong> donner la vie même<br />

<strong>à</strong> moi ”qui suis englouti dans le péché, mais puissent ne pas<br />

(230) «Domino gloriosissimo patrique piissimo,<br />

inter uasa misericordiae ac honoris excellentissimo<br />

et tam sublimitate sapientiae quam<br />

sanctitate uitae reuerentissimo Lupo gratia <strong>de</strong>i<br />

pontificali cathedra dignissimo, antistiti benignissimo,<br />

Gottescalc, licet infimus omnium<br />

<strong>de</strong>gentium sub caelo, fidissimus tamen corpori<br />

et spiritui uestro praesentis uitae ad emoli-<br />

IV. le conflit<br />

mentum et hic longaeuam prosperitatem opto<br />

et perennis postmodum gloriae sospitatem in<br />

Christo».<br />

«Decimo kalendarum Augustarum die beatitudinis<br />

uestrae mihi <strong>de</strong>latae sunt litterae<br />

sapientia speciosissimae, eloquentia splendidissimae<br />

et, quae his maiora sunt humilitate<br />

praemunitissimae, caritate (suite page 108)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

107


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

108<br />

IV. le conflit<br />

me ”manquer <strong>de</strong>s sœurs qui veuillent et puissent le supplier<br />

en ”ma faveur ; cela daignez, Seigneur, je vous en prie,<br />

le ”réclamer avec miséricor<strong>de</strong> pour moi et invoquer humblement<br />

”la clémence <strong>de</strong> Jésus-Christ...» 230<br />

Pour Charles le Chauve, pour Hincmar et pour <strong>de</strong> nombreux<br />

évêques, le temps était venu <strong>de</strong> mettre un terme <strong>à</strong><br />

une activité considérée comme subversive. la chose ne<br />

parut concevable qu’au prix <strong>de</strong> rendre le moine totalement<br />

silencieux. Mais il apparaissait qu’il y avait peu <strong>de</strong> chance<br />

qu’il en soit ainsi. Car même s’il cessait d’écrire, les idées<br />

émises étaient fort discutées. les théories <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong><br />

praecellentissimae et i<strong>de</strong>o mihi karissimae<br />

atque gratissimae. Insuper etiam in<strong>de</strong> mihi<br />

non modo melle uerum et omni nectare dulciores<br />

uisae sunt et adhuc ui<strong>de</strong>ntur apparere,<br />

quod nuntiauerunt non solum spiritali quae<br />

semper, <strong>de</strong>o gratias, augetur salute uos pollere,<br />

sed et corporali, quae uniuersis fi<strong>de</strong>libus<br />

uestris, inter quos et ego si dignamini sum<br />

quamuis extremum ibi locum merear si tamen<br />

et hoc mereor possi<strong>de</strong>re, necessaria est, sanitate<br />

uigere».<br />

«Vt illos igitur tam optatae felicitatis indices<br />

exiguitas mea semel lustrauit apices, confestim<br />

lau<strong>de</strong>s agens <strong>de</strong>o supplices uobis etiam<br />

grates retuli multiplices. Quae qui<strong>de</strong>m duo<br />

facere iam tunc iniui sed omnino necdum finiui<br />

immo haec consummare non statui dum meo<br />

uirtus est spiritui».<br />

«Et utique si uelim diligenter adten<strong>de</strong>re appen<strong>de</strong>re<br />

ac perpen<strong>de</strong>re, tantum mihi bonum per<br />

gratuitum gratiae suae donum <strong>de</strong>us ibi dignatus<br />

est impen<strong>de</strong>re ut ei non semel sed semper<br />

oporteat mansura laudum repen<strong>de</strong>re, quoniam<br />

quoad uixero non ea quibo perexpen<strong>de</strong>re, quin<br />

potius cum obiero tunc ad id incipiam conten<strong>de</strong>re,<br />

si tamen mihi meritis uestris nunc clementiam<br />

dignetur diuina pietas praeten<strong>de</strong>re,<br />

sine qua nullus umquam sanctorum, quanto<br />

minus ullus nostrum iniustorum, potuit potest<br />

aut poterit, ut multo melius eximietas uestra<br />

nouit, ad ullum bonum inchoandum uel semel<br />

salubriter animum inten<strong>de</strong>re, nedum ad<br />

consummandum uelut oportet perten<strong>de</strong>re. Et<br />

reuera sagacitas tua scit optime incessanter<br />

<strong>de</strong>bitum caritatis <strong>de</strong>bere nos <strong>de</strong>o ac proximo<br />

sinceriter soluere, quod pro<strong>de</strong>cto constat non<br />

posse quemquam persoluere».<br />

«Praternea nec illud in epistula uestrae dignationis<br />

mediocre tripudium uisceribus meis<br />

infudit, immo uero uel me totum odorifero<br />

unguine uel ambrosio suco perfudit et ad uos<br />

cumulatius diligendum transfudit, quod uestri<br />

notitiam reducendo ad memoriam et locum et<br />

tempus mutuae conlocutionis nostrae fluore<br />

suaui piissima paternitas uestra profudit».<br />

«Miratus qui<strong>de</strong>m sum et miror adhuc admodum<br />

tectum celsitudinis uestrae speciosum…<br />

ornatum claritudinis formosum, sed longe<br />

vehementius ar(<strong>de</strong>o) et stupeo vestrae beatitudinis<br />

animum humilitatis excellentia generosum,<br />

caritatis eminentia gloriosum, benignitatis<br />

eui<strong>de</strong>ntia luminosum et insuper pietatis<br />

magnificentia <strong>de</strong>liciosum».<br />

«Sed quid uobis rependam pro munere tam<br />

dulci, grato nimis ac suaui, nisi quod totus<br />

esse cupio dum uiuo uester, si tamen dominus<br />

Iesus Christus re<strong>de</strong>mptor noster utriusque<br />

nostrum fore dignetur sequester ?»<br />

«Nam <strong>de</strong> uestra parte nihil, <strong>de</strong> mea uero non<br />

mediocriter dubito, non tamen quod absit <strong>de</strong><br />

illius gratia diffido, in quo beatus fore et semper<br />

confisus sum et confido, quia qui Lazarum<br />

distulit ut posset resuscitare, me quoque peccatis<br />

mersum potens est uiuificare, sed utinam<br />

mihi non <strong>de</strong>sint sorores qua pro me uelint et<br />

possint ei<strong>de</strong>m supplicare, quod uos domine mi<br />

dignamini quaeso misericorditer flagitare et<br />

Christi Iesu clementiam suppliciter inuocare…»<br />

d.C. lambot, p. 49 et planche J, p. 232


étaient trop capitales pour <strong>de</strong>s moines instruits et pour que<br />

la controverse ne se développe pas. Malgré la <strong>de</strong>man<strong>de</strong><br />

pressente <strong>de</strong> Charles le Chauve, Hincmar avançait lentement<br />

dans son enquête théologique. Il avait conscience que la<br />

condamnation <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quiersy était<br />

une maladresse et une faute au plan canonique. Cédant <strong>à</strong> la<br />

<strong>de</strong>man<strong>de</strong> royale, il suivait en cela la voie <strong>de</strong>s transgressions<br />

commises également par son homologue raban Maur, qui<br />

avait jugé sur le fond <strong>à</strong> Mayence dès 848, alors que<br />

<strong>Gottschalk</strong>, d’après le droit canon, aurait dû d’abord être<br />

convoqué par un syno<strong>de</strong> provincial, car il appartenait <strong>à</strong> la<br />

province <strong>de</strong> reims. l’archevêque Hincmar ne pouvait<br />

ignorer les canons <strong>de</strong> Carthage, en afrique, retenus par la<br />

«Dionysio - Hadriana». Condamner le moine avant d’avoir<br />

réellement examiné le contenu <strong>de</strong> ses écrits était d’une<br />

gran<strong>de</strong> gravité puisque les évêques réunis <strong>à</strong> Quiersy<br />

n’avaient jugé que sur la seule «Confessio breuior».<br />

Hincmar avait fort bien compris que nul (et surtout pas luimême)<br />

n’avait eu, au printemps 849, la capacité <strong>de</strong> livrer<br />

un vrai travail susceptible <strong>de</strong> réfuter les déviations <strong>à</strong> la doctrine<br />

officielle, celle-ci restant <strong>à</strong> préciser.<br />

Interné <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong>, <strong>Gottschalk</strong> ne fut pas davantage<br />

muet qu’<strong>à</strong> orbais. au début 850, il rédige une «Confessio<br />

prolixior» 231 .<br />

C’est avec l’énergie d’un homme humilié, bafoué, sûr <strong>de</strong><br />

ses lectures, <strong>de</strong> sa connaissance approfondie <strong>de</strong>s textes<br />

patristiques et <strong>de</strong> ses exégèses grammaticales, que le prisonnier<br />

d’<strong>Hautvillers</strong> qualifie, <strong>à</strong> son tour, d’hérétiques ses<br />

contradicteurs.<br />

«Nec sane cuiquam pie sapientium ui<strong>de</strong>ri <strong>de</strong>bet<br />

absurdum ”si gemina prae<strong>de</strong>stinatio creditur et cognoscitur<br />

et ”incunctanter esse dicitur apud te dominum nostrum naturaliter<br />

”qui<strong>de</strong>m unum sed simul etiam personaliter trinum,<br />

(231) d.C. lambot, p. 55 <strong>à</strong> 78.<br />

IV. le conflit<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

109


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

110<br />

IV. le conflit<br />

qui ”certe secundum hanc geminam prae<strong>de</strong>stinationem<br />

tuam, ”quemadmodum Augustinus tuus fi<strong>de</strong>liter credit et<br />

fi<strong>de</strong>nter ”asserit, bonus es in feneficio certorum, iustus in<br />

supplicio ”ceterorum, et insuper, ut profitetur consequenter,<br />

bonus es ”in omnibus quoniam bonum est cum <strong>de</strong>bitum redditur,<br />

et ”iustus in omnibus quoniam iustum est cum <strong>de</strong>bitum<br />

sine ”cuiusquam frau<strong>de</strong> donatur. Haec omnia sicut hic,<br />

tibi gratias, ”et credo et confiteor, gratias tibi, prout gratis<br />

largitus es ”mihi. Et quia in tuis, in libris tuorum scilicet<br />

ministrorum ”labore immo gratia tua ueraciter expositis<br />

haec a te dita ”reperio, tam perspicuae prorsus a te ueritati<br />

contradicere ”quod absit non au<strong>de</strong>o, quoniam prorsus a te<br />

ueritate negari ”sicut minata es metuens et illam quoque<br />

repetitam Pauli ”sententiam uehementissime timeo : Si quis<br />

uobis adnuntiauerit ”praeterquam quod accepistis, anathema<br />

sit. Tantum ”siqui<strong>de</strong>m amoris tibi domine Iesu ueritas<br />

inuicta perpetualiter ”<strong>de</strong>beo ut, quemadmodum ab Augustino<br />

perhibetur ueraciter ”tuo, neque hominibus placendi studio<br />

neque respectu ”<strong>de</strong>uitandorum quorumlibet incommodorum<br />

<strong>de</strong>torquear ”quod absit a uero. Et ut beatus etiam<br />

docet Gregorius : ”In quantum sine peccato possumus<br />

uitare proximorum ”scandala <strong>de</strong>bemus, si autem <strong>de</strong> ueritate<br />

scandalum sumitur ”utilius permittitur nasci scandalum<br />

quam ueritas relinquatur. ”Nec sane cuiuscunque persona<br />

contra recipienda modo ”quolibet excipitur, quando uel<br />

angelus uel apostolus ”adnuntians, ipsius ore apostoli anathemate<br />

digno percellitur. ”Ut enim praedictus Gregorius<br />

ueraciter fatetur : Dum ”salua fi<strong>de</strong> res agitur, uirtutis est<br />

meritum si quicquid ”prioris est toleratur. Alioquin si fieri<br />

posset millies potius ”pro ueritate <strong>de</strong>berem prorsus et optarem<br />

occumbere, quam ”semel quod absit cuilibet<br />

secus loquenti ce<strong>de</strong>ndo ”succumbere, illius ui<strong>de</strong>licet<br />

tuae memor sententiae : Qui ”me confessus fuerit coram<br />

hominibus, confitebor et ego ”eum coram patre meo qui est


in coelis. Simulque illius ”quoque memini : Ne transgrediaris<br />

terminos antiquos, ”quos posuerunt patres, tui, quod<br />

nimirum, ut Gregorius ”exponit, haeretici faciunt, qui a<br />

sanctae ecclesiae gremio ”extranei existunt. Ipsi inquit terminos<br />

transferunt, quia ”constitutiones patrum praeuaricando<br />

transcendunt, quia ”etiam greges diripiunt et pascunt,<br />

quia imperitos quosque ”peruersis ad se suasionibus<br />

trahunt et doctrinis pestiferis ”ad interficiendum nutriunt.<br />

Quos beatus quoque Iob ”increpat dicens : Numquid <strong>de</strong>us<br />

indiget uestro mendacio ”ut pro illo loquamini dolos ?<br />

Deus mendacio non eget ”quia ueritas fulciri non quaerit<br />

auxilio falsitatis. Haeretici ”autem quia ea quae praue <strong>de</strong><br />

<strong>de</strong>o intelligunt ex ueritate ”tueri non possunt, quasi ad<br />

approbandum radium luminis, ”umbras falsitatis requirunt.<br />

Et pro eo dolos loquuntur, ”dum infirmas mentes ab intellectu<br />

illius stulta seductione ”<strong>de</strong>cipiunt. Item : Aut placebit<br />

ei quem celare nihil potest ? ”Aut <strong>de</strong>cipietur ut homo uestris<br />

fraudulentiis ? Frau<strong>de</strong>m ”<strong>de</strong>o haeretici exhibent quia<br />

ea adstruunt quae nequaquam ”ipsi pro quo loquuntur placent,<br />

eumque dum quasi <strong>de</strong>fen<strong>de</strong>re ”nituntur offendunt, dum<br />

in aduersitatem eius corruunt, cui ”ui<strong>de</strong>ntur ex praedicatio-<br />

(232) et assurément cela ne doit sembler<br />

absur<strong>de</strong> <strong>à</strong> aucun homme doué d’une pieuse<br />

sagesse si l’on croit et connaît la double pré<strong>de</strong>stination<br />

et si l’on dit sans cesse qu’auprès<br />

<strong>de</strong> toi, notre Seigneur, il y a naturellement une<br />

unité naturelle en même temps aussi qu’une<br />

trinité personnelle, toi qui, selon ta double pré<strong>de</strong>stination,<br />

<strong>de</strong> la manière dont ton augustin le<br />

croit fidèlement et l’assure avec foi, es bon<br />

dans le bienfait donné aux hommes sûrs, juste<br />

dans le supplice <strong>de</strong>s autres, et en outre comme<br />

il le proclame logiquement, es bon pour tous<br />

car il est bon d’accor<strong>de</strong>r ce qui est dû, et juste<br />

pour tous car il est juste d’offrir le dû sans<br />

tromper personne. Tout cela comme lui (saint<br />

augustin), grâces te soient rendues, et je le<br />

IV. le conflit<br />

crois et le confesse, grâces te soient rendues,<br />

dans la mesure où tu me l’as accordé gratuitement.<br />

et comme dans tes œuvres, c’est-<strong>à</strong>-dire<br />

dans les livres qui l’exposent véridiquement<br />

par le travail <strong>de</strong> tes serviteurs, mais surtout <strong>de</strong><br />

ta grâce, je le trouve dit par toi, je n’ose pas<br />

contredire, loin <strong>de</strong> l<strong>à</strong>, une vérité si claire, car,<br />

craignant d’être rejeté par toi qui es la Vérité,<br />

comme tu en as menacé, je crains aussi beaucoup<br />

cette phrase répétée <strong>de</strong> Paul : Si quelqu’un<br />

vous annonce autre chose que ce que<br />

vous avez reçu, qu’il soit anathème.<br />

Si vraiment je te dois <strong>à</strong> jamais tant d’amour,<br />

Seigneur Jésus, Vérité invincible, que, comme le<br />

dit véridiquement ton augustin, ni par désir <strong>de</strong><br />

plaire aux hommes ni eu égard (suite page 112)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

111


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

112<br />

IV. le conflit<br />

ne famulari. Vn<strong>de</strong> et per psalmistam ”dicitur : Vt <strong>de</strong>struas<br />

inimicum et <strong>de</strong>fensorem . Omnis ”quippe haereticus omnipotenti<br />

<strong>de</strong>o inimicus et <strong>de</strong>fensor ”est, quia un<strong>de</strong> hunc quasi<br />

<strong>de</strong>fen<strong>de</strong>re uititur, in<strong>de</strong> ueritati ”illius aduersatur. Quia<br />

autem latere <strong>de</strong>um nihil potest, ”hoc ineis iudicat quod<br />

intus sentiunt, non quod famulari ”foris ui<strong>de</strong>ntur» 232 .<br />

dans son angoisse <strong>de</strong> ne pas convaincre, <strong>Gottschalk</strong> se<br />

laisse aller <strong>à</strong> l’invective et, dans ses débor<strong>de</strong>ments, qualifie<br />

Hincmar <strong>de</strong> «vessie chétive, <strong>de</strong> peu <strong>de</strong> force, enflée,<br />

chair gonflée, boursouflée, orgueilleuse, crevée, pourquoi<br />

dieu t’a-t-il tant déplu ?» 233 . Il poursuit en disant que dieu<br />

aux inconvénients <strong>à</strong> éviter, je ne m’écarte, loin<br />

<strong>de</strong> l<strong>à</strong>, du vrai. et comme l’enseigne aussi saint<br />

Grégoire : «Dans la mesure où nous le pouvons<br />

sans péché, nous <strong>de</strong>vons éviter <strong>de</strong> causer<br />

au prochain du scandale, mais si le scandale<br />

vient <strong>de</strong> la vérité, il est plus utile <strong>de</strong> permettre<br />

le scandale que d’abandonner la vérité». et on<br />

ne peut admettre que l’importance personnelle<br />

<strong>de</strong> quiconque soit reçue <strong>à</strong> l’encontre <strong>de</strong>s vérités<br />

reçues, puisque ange ou apôtre annonçant est<br />

frappé d’un digne anathème <strong>de</strong> la bouche <strong>de</strong><br />

l’apôtre même. en effet, comme le susdit<br />

Grégoire l’atteste véridiquement : «Tant qu’on<br />

agit en gardant la foi sauve, c’est un mérite <strong>de</strong><br />

la vertu que <strong>de</strong> supporter tout ce qui vient du<br />

supérieur». autrement, si cela pouvait se faire,<br />

je <strong>de</strong>vrais plutôt, et le souhaiterais, souffrir<br />

mille morts pour la vérité que succomber même<br />

une fois, qu’il n’en soit rien, en me rendant <strong>à</strong><br />

qui parle autrement, me souvenant <strong>de</strong> ta parole :<br />

«Qui m’aura reconnu <strong>de</strong>vant les hommes, moi<br />

aussi je le reconnaîtrai <strong>de</strong>vant mon Père qui est<br />

dans les cieux». Je me souviens aussi <strong>de</strong> cette<br />

parole : «Ne franchis pas les bornes anciennes<br />

que tes pères ont posées», ce que les hérétiques<br />

ne font que trop, comme l’explique Grégoire,<br />

«eux qui se tiennent hors du sein <strong>de</strong> la Sainte<br />

église». Ceux-ci, dit-il, déplacent les bornes<br />

car ils transgressent les dispositions <strong>de</strong>s Pères<br />

en s’écartant <strong>de</strong> la droite ligne, car aussi ils<br />

pillent et font paître les troupeaux, car ils attirent<br />

tous les ignorants <strong>à</strong> eux par <strong>de</strong>s conseils<br />

pervers et les nourrissent pour les tuer <strong>de</strong> doctrines<br />

mortelles». Ce sont eux que le bienheu-<br />

reux Job dénonce aussi en disant : «Est-ce que<br />

Dieu a besoin du mensonge au point que vous<br />

le défendiez par <strong>de</strong>s propos trompeurs ? Dieu<br />

n’a pas besoin du mensonge car la vérité ne<br />

cherche pas <strong>à</strong> s’établir <strong>à</strong> l’ai<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’erreur.<br />

Mais les hérétiques, puisqu’ils ne peuvent<br />

défendre grâce <strong>à</strong> la vérité les mauvaises<br />

conceptions qu’ils se font <strong>de</strong> Dieu, comme pour<br />

prouver le rayon <strong>de</strong> lumière, recherchent les<br />

ombres <strong>de</strong> l’erreur. Et ils défen<strong>de</strong>nt par <strong>de</strong>s propos<br />

trompeurs, en abusant les faibles esprits sur<br />

sa connaissance par une ruse stupi<strong>de</strong>». le<br />

même dit : «Cela plaira-t-il <strong>à</strong> celui auquel on<br />

ne peut rien cacher ? Ou bien sera-t-il trompé,<br />

comme un homme, par vos ruses ? Les hérétiques<br />

se montrent rusés avec Dieu car ils forgent<br />

<strong>de</strong>s choses qui déplaisent tout <strong>à</strong> fait <strong>à</strong> celui<br />

pour qui ils parlent, et en s’efforçant, pour ainsi<br />

dire, <strong>de</strong> le défendre, ils l’offensent en affrontant<br />

celui qu’ils semblent servir par leur prédication».<br />

C’est pourquoi il est dit par le psalmiste :<br />

«Pour que tu détruises l’ennemi et le défenseur.<br />

En effet, tout hérétique est l’ennemi et le défenseur<br />

<strong>de</strong> Dieu tout-puissant, car ce par quoi il<br />

s’efforce, pour ainsi dire, <strong>de</strong> le défendre est ce<br />

qui s’oppose <strong>à</strong> sa vérité. Mais comme rien ne<br />

peut échapper <strong>à</strong> Dieu, il juge en eux les pensées<br />

intérieures et non les apparences extérieures <strong>de</strong><br />

service»…<br />

d.C. lambot, p. 68-69.<br />

(233) Misella potentiola inflata uesica, cutis<br />

tumida turgida, elata pellis morticina, cur tibi<br />

displicuerit <strong>de</strong>us ita,…<br />

d.C. lambot, p. 96.


lui défend <strong>de</strong> prier pour son évêque : « Il est déj<strong>à</strong><br />

temps ”d’abandonner un frère qui est absent et qui ne<br />

connaît ”absolument pas ce que je dis <strong>à</strong> son intention avant<br />

qu’il ne ”voie mes écrits, et <strong>de</strong> répandre <strong>de</strong>s prières auprès<br />

<strong>de</strong> dieu ”qui est présent toujours et partout et qui, comme<br />

un ”donateur <strong>à</strong> titre gratuit, connaît éternellement<br />

toutes ”choses. Ô Seigneur, notre dieu et maître, Jésus-<br />

Christ, ”crucifié pour les seuls élus, toi qui vois que «voici<br />

que tes ”ennemis se sont faits entendre et que ceux qui t’ont<br />

haï ont ”relevé la tête», parce qu’après trois ans, <strong>à</strong> la moitié<br />

<strong>de</strong> ”l’année, ce voleur, ce brigand n’est pas mort comme<br />

on le ”pensait, je te prie certes brièvement mais humblement<br />

que ”tu fasses rapi<strong>de</strong>ment <strong>à</strong> ce sujet comme il vous<br />

convient, ”Seigneur notre dieu vrai et vivant, un et trine. Je<br />

ne le ”veux pas davantage ni avant ni autrement : quand tu<br />

le ”veux, que soit arraché d’ici, comme il est assez juste,<br />

un ”débauché, aveugle et impu<strong>de</strong>nt, opiniâtre, obstiné, hérétique,<br />

”ennemi <strong>de</strong> la vérité, ami <strong>de</strong> l’erreur» 234 .<br />

Ces écrits et son entêtement le feront sombrer davantage<br />

dans l’isolement et l’exclusion. l’église rémoise lui refusera<br />

définitivement la possibilité d’un débat objectif. dans<br />

un long exposé, il réclamera l’anathème pour ceux qui<br />

refusent sa lecture <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination. Il prend également<br />

conscience <strong>de</strong> la faiblesse <strong>de</strong> sa position sociale et pense<br />

que c’est l<strong>à</strong> un obstacle au triomphe <strong>de</strong> la vérité :«Je<br />

te ”prie, Seigneur mon dieu, <strong>de</strong> gar<strong>de</strong>r gracieusement<br />

ton ”église, pour qu’ils (sc. les hérétiques) ne la pervertissent<br />

”pas plus longtemps par leur erreur ni ne l’ébranlent<br />

(234) …iam tempus est fratrem <strong>de</strong>seri absentem<br />

et quid ad eum loquar antequam scripta<br />

mea ui<strong>de</strong>at penitus nescientem, et fundi preces<br />

ad <strong>de</strong>um semper ubique praesentem et sicut<br />

gratuitum donatorem cuncta sempiternaliter<br />

scientem. Domine <strong>de</strong>us noster et magister Iesu<br />

Christe, pro solis electis crucifixe, qui ui<strong>de</strong>s<br />

« quod ecce inimici tui sonnuerunt et qui o<strong>de</strong>runt<br />

te extulerunt caput » quia non est post<br />

IV. le conflit<br />

triennium dimidio terminato anno mortuus ceu<br />

putabatur fur et latro, breuiter qui<strong>de</strong>m sed<br />

pronus te exoro hinc uobis domino <strong>de</strong>o nostro<br />

uero ac uiuo uni simul ac trino sicut placet ita<br />

facias cito. Nolo plus nec prius nec secus :<br />

quando uis euellatur hinc rite sat moechus et<br />

caecus procax pertinax peruicax haereticus<br />

ueritatis inimicus falsitatis amicus.<br />

d.C. lambot, p. 35.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

114<br />

IV. le conflit<br />

<strong>à</strong> ”l’avenir par le mal mortel <strong>de</strong> leur hérésie, mais<br />

qu’ils ”trouvent une funeste fin eux et les leurs avec eux.<br />

Quant <strong>à</strong> ”moi, instruit gracieusement par la vérité même<br />

que les ”maîtres susdits et les très fidèles, très dévoués et<br />

très ”illustres serviteurs <strong>de</strong> cette même vérité ont prêchée <strong>à</strong><br />

ton ”église en la suivant, la foi catholique exprimée ici<br />

avec ”évi<strong>de</strong>nce sur ta pré<strong>de</strong>stination, inspiré, animé et<br />

armé ”gracieusement par toi et avec beaucoup <strong>de</strong> bonté,<br />

en ”même temps que miséricordieusement et admirablement<br />

”aidé et assuré, appuyé et soutenu fidèlement, grâces<br />

te ”soient rendues, je la crois fermement, la tiens pour vrai<br />

et ”la défends ouvertement et je fuis comme la peste et rejette<br />

”comme hérétique quiconque je sais enseigner <strong>de</strong>s<br />

choses ”contraires, et, pour expliquer avec une profon<strong>de</strong><br />

tristesse ”ce que saint augustin a établi logiquement en<br />

ces ”matières, quiconque j’entends s’opposer avec opiniâtreté<br />

”<strong>à</strong> l’invincible vérité et je vois enseigner <strong>de</strong>s<br />

choses ”contraires, je le dénonce pour hérétique et ennemi<br />

<strong>de</strong> la foi ”chrétienne et comme <strong>de</strong>vant être pour cela anathématisé<br />

”par tous les catholiques».<br />

«<strong>de</strong> plus, quant au débat avec l’un d’eux, s’il n’a pas<br />

voulu ”cé<strong>de</strong>r une fois ceci lu et compris et, <strong>à</strong> la façon <strong>de</strong><br />

Pharaon ”endurci 235 , selon l’habitu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s hérétiques s’est<br />

refusé ”avec mépris <strong>à</strong> acquiescer <strong>à</strong> une vérité si manifeste,<br />

selon ”le conseil ou plutôt le précepte <strong>de</strong> l’apôtre Paul, je<br />

déci<strong>de</strong> ”<strong>de</strong> l’éviter, car je vois qu’un homme <strong>de</strong> ce genre est<br />

perverti ”et condamné <strong>de</strong> son propre jugement. Pourtant, <strong>à</strong><br />

cause ”<strong>de</strong>s hommes moins expérimentés et pour cela<br />

séduits par ”eux et perdus s’ils ne se corrigent, je souhaiterais<br />

faire une ”réunion publique, s’il t’agréait, Seigneur,<br />

pour rendre ”grâces en commun <strong>de</strong> l’édification publique<br />

<strong>de</strong> la vérité et ”<strong>de</strong> la <strong>de</strong>struction complète <strong>de</strong> l’erreur toi qui<br />

(235) allusion <strong>à</strong> Hincmar.


IV. le conflit<br />

as daigné ”nous donner, même au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong> <strong>de</strong> ce que nous<br />

<strong>de</strong>mandons ou ”comprenons, une issue très heureuse si longtemps<br />

souhaitée, ”car assurément je supporte une excessive<br />

douleur et je ”souffre jour et nuit une tristesse profon<strong>de</strong><br />

quand je vois les ”hommes tenir la vérité pour insignifiante<br />

<strong>à</strong> cause <strong>de</strong> ”l’insignifiance <strong>de</strong> mon nom et que ne<br />

conservent pas ”envers toi une charité sincère, comme ils le<br />

<strong>de</strong>vraient, ”ceux qui uniquement pour paraître au moins<br />

vainqueurs ”<strong>de</strong> ma personne, ne t’ont aimé et ne t’aiment<br />

en rien ou ”vraiment bien peu, toi qu’ils ne se sont pas abstenus<br />

ni ne ”s’abstiennent <strong>de</strong> réfuter <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> moi ».<br />

« et s’il pouvait t’agréer, Seigneur tout-puissant en<br />

même ”temps que très clément, que <strong>de</strong> même que je crois et<br />

espère ”en toi, en me donnant <strong>de</strong> pouvoir gracieusement,<br />

comme ”tu as déj<strong>à</strong> daigné me donner et daignes même<br />

chaque jour ”me donner <strong>de</strong> vouloir aussi, que, <strong>de</strong>vant la<br />

multitu<strong>de</strong> ”rassemblée <strong>de</strong> toutes parts <strong>de</strong>s peuples qui te<br />

craignent, en ”présence aussi du prince <strong>de</strong> ce royaume ainsi<br />

qu’avec la ”vénérable armée <strong>de</strong>s pontifes et <strong>de</strong>s prêtres, <strong>de</strong>s<br />

moines et ”<strong>de</strong>s chanoines, il puisse m’être accordé, s’ils ne<br />

voulaient ”recevoir autrement cette vérité <strong>de</strong> la foi catholique<br />

sur ta ”pré<strong>de</strong>stination, <strong>de</strong> prouver cela aux yeux <strong>de</strong><br />

tous par une ”faveur <strong>de</strong> ta grâce au moyen <strong>de</strong> ce que<br />

je vais dire : ”qu’après avoir empilé quatre jarres l’une<br />

sur l’autre et ”avoir rempli chacune d’eau bouillante, d’huile<br />

grasse et <strong>de</strong> ”poix et avoir enfin allumé un feu très fourni,<br />

il puisse ”m’être permis, une fois invoqué ton nom très<br />

glorieux, ”pour prouver cette foi qui est mienne, ou mieux<br />

la foi ”catholique, d’entrer en chacune et ainsi <strong>de</strong> passer en<br />

chacune ”jusqu’<strong>à</strong> ce que, grâce <strong>à</strong> toi qui me précè<strong>de</strong>s, m’accompagnes<br />

”et me suis, me secours et me fais sortir avec<br />

clémence, je ”puisse sortir sauf pour qu’éclate enfin une<br />

bonne fois dans ”ton église l’éclat <strong>de</strong> la foi catholique et<br />

que l’erreur ”s’évanouisse, que la foi soit affermie et la per-<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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IV. le conflit<br />

fidie évitée.<br />

”daigne, Seigneur, inspirer <strong>à</strong> ceux qui lisent et comprennent<br />

”ces paroles un sentiment tel, comme il est nécessaire,<br />

”qu’ils te prient humblement <strong>de</strong> conduire rapi<strong>de</strong>ment <strong>à</strong><br />

son ”effet ce désir <strong>de</strong> mon âme, comme ton église en a<br />

besoin, ”et, si jamais par ton ai<strong>de</strong> je sors in<strong>de</strong>mne <strong>de</strong> tout<br />

cela, ”qu’ils embrassent la vérité et détestent l’erreur. Mais,<br />

si ce ”n’est pas en croyant, en attestant, espérant et aimant<br />

<strong>de</strong> par ”toi, grâce <strong>à</strong> toi et en toi, sûr <strong>de</strong> toi seulement et<br />

assuré ”uniquement <strong>de</strong> ta grâce que je le promets, soit que<br />

(236) Te precor domine <strong>de</strong>us gratis ecclesiam<br />

tuam custodias, ne sua diutius eam falsitate<br />

peruertant haereseosque suae pestifera <strong>de</strong><br />

reliquo prauitate subuertant, licet se suosque<br />

secum lugubriter euertant. Ego uero gratis<br />

edoctus ab ipsa ueritate quam sequentes praedicti<br />

ecclesiae tuae praedicauerunt magistri et<br />

eius<strong>de</strong>m ueritatis fi<strong>de</strong>lissimi <strong>de</strong>uotissimi ac<br />

celeberrimi prorsus ministri, hic eui<strong>de</strong>nter<br />

expressam <strong>de</strong> prae<strong>de</strong>stinatione tua fi<strong>de</strong>m<br />

catholicam, gratis a te pieque satis afflatus<br />

animatus armatus misericorditerque simul ac<br />

mirabiliter adiutus et tutus fretus et fultus fi<strong>de</strong>liter<br />

tibi gratias credo fortiter teneo ueraciter<br />

patenterque <strong>de</strong>fendo et quemcumque contraria<br />

dogmatizare cognosco tanquam pestem fugio<br />

et tanquam haereticum abicio et, ut explicem<br />

cum moerore maximo quod consequenter <strong>de</strong><br />

talibus a beatissimo praeceptum constat<br />

Augustino, quemcumque prorsus inuictissimae<br />

ueritati contumaciter repugnare audio et ei<br />

contraria docere conspicio haereticum et fi<strong>de</strong>i<br />

christianae inimicum atque ex hoc omnibus<br />

catholicis anathematizandum esse <strong>de</strong>nuntio.<br />

Porro conflictum cuiuslibet eorum, si semel<br />

his lectis et intellectis ce<strong>de</strong>re noluerit et instar<br />

Pharaonis induratus haeretico ui<strong>de</strong>licet more<br />

tam manifestae ueritati adquiescere contempserit,<br />

secundum consilium uel potius praeceptum<br />

Pauli apostoli iam mihi uitandum censeo,<br />

quia qui huiusmodi est subuersum et proprio<br />

iudicio con<strong>de</strong>mnatum esse ui<strong>de</strong>o. Attamen<br />

propter minus peritos et ob id ab eis inlectos<br />

et nisi corrigantur perditos, optarem publicum<br />

si tibi domine placeret fieri conuentum,<br />

quatenus adstructa palam ueritate et <strong>de</strong>structa<br />

funditus falsitate gratias ageremus communiter<br />

tibi qui nobis tam diu optatum, etiam<br />

supra quam petimus aut intelligimus dare<br />

dignatus fueris prosperrimum prouentum,<br />

quia profecto nimis ingentem patior dolorem<br />

et maximum die noctuque perfero moerorem<br />

quod propter mei nominis uilitatem uilem<br />

hominibus esse ui<strong>de</strong>o ueritatem et quod erga<br />

te sinceram ut <strong>de</strong>buerant non seruant caritatem<br />

qui ut tantummodo uictores mei esse<br />

ui<strong>de</strong>antur nihil uel omnino perparum dilexerunt<br />

et diligunt te, quem negare non refugerunt<br />

neque refugiunt propter me.<br />

Atque utinam placeret tibi cunctipotentissime<br />

pariter ac clementissime domine ut sicut in te<br />

credo et spero, dato mihi gratis posse prout<br />

iam dudum dare dignatus es et dare quotidie<br />

dignaris etiam uelle, coram undique collecta<br />

populorum te timentium multitudine, praesente<br />

etiam istius regni principe simul cum pontificum<br />

et sacerdotum monachorumque seu<br />

canonicorum uenerabili simul agmine, conce<strong>de</strong>retur<br />

mihi, si secus hanc catholicae fi<strong>de</strong>i <strong>de</strong><br />

prae<strong>de</strong>stinatione tua ueritatem nolent recipere,<br />

ut isto quod dicturus sum fauente tua gratia<br />

id adprobarem cernentibus cunctis examine,<br />

ut ui<strong>de</strong>licet quatuor doliis uno post unum<br />

positis atque feruenti singillatim repletis aqua<br />

oleo pingui et pice et ad ultimum accenso<br />

copiosissimo igne liceret mihi, inuocato gloriosissimo<br />

nomine tuo, ad approbandam hanc<br />

fi<strong>de</strong>m meam immo fi<strong>de</strong>m catholicam, in singula<br />

introire et ita per singula transire donec, te<br />

praeueniente comitante ac subsequente <strong>de</strong>xte-


je ”tremble <strong>de</strong> commencer soit que je craigne <strong>de</strong> finir,<br />

qu’ils ”me jettent alors dans le feu et m’y laissent <strong>à</strong> bon<br />

droit <strong>de</strong> ”mourir. Je te <strong>de</strong>man<strong>de</strong> pourtant humblement,<br />

Seigneur, en ”ton nom très doux, qu’aucun catholique ne<br />

me reprenne <strong>à</strong> ”la légère, loin <strong>de</strong> l<strong>à</strong>, en son esprit, car, je ne<br />

prends pas <strong>de</strong> ”par moi l’audace <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r <strong>de</strong> telles<br />

choses, comme tu ”le sais si bien, par ma propre témérité,<br />

mais plutôt <strong>de</strong> par ”toi en vertu <strong>de</strong> ta bonté» 236 .<br />

Tout en développant une nouvelle fois dans sa «Confessio<br />

prolixior» ses arguments habituels, le prisonnier revient<br />

sur la malveillance que lui porte son ex-abbé raban. C’est<br />

lui qui est <strong>à</strong> l’origine <strong>de</strong> tout ses maux. Il sent que sa <strong>de</strong>stinée<br />

est arrêtée : «Je prie, autant qu’il m’est donné<br />

avec ”une humilité inspirée par le Ciel <strong>de</strong>vant la très remarquable<br />

”majesté <strong>de</strong> l’Unité trine et <strong>de</strong> la Trinité une, que qui<br />

que tu ”sois qui liras ceci non avec la malignité du corbeau<br />

237 mais ”plutôt avec la tendresse <strong>de</strong> la colombe, tu te<br />

souviennes ”<strong>de</strong>vant dieu du pécheur <strong>Gottschalk</strong> et, avec<br />

l’affection ”d’un père ou d’un frère, tu implores avec sim-<br />

ramque praebente ac clementer educente,<br />

ualerem sospes exire quatenus in ecclesia tua<br />

tan<strong>de</strong>m aliquando catholicae hinc fi<strong>de</strong>i claritas<br />

claresceret et falsitas euanesceret fi<strong>de</strong>sque<br />

firmaretur et perfidia uitaretur.<br />

Vtinam haec domine legentibus et intelligentibus<br />

huiusmodi, sicut est opus, inspirare digneris<br />

affectum ut exorent te suppliciter quo celeriter<br />

hoc animi mei <strong>de</strong>si<strong>de</strong>rium meum, sicut<br />

indiget ecclesia tua, perducas ad effectum et si<br />

qui<strong>de</strong>m te suffragante <strong>de</strong> cunctis inlaesus prodiero<br />

amplexentur ueritatem et execrentur falsitatem.<br />

Sin autem quod ex te per te et in te<br />

cre<strong>de</strong>ndo confitendo sperando et amando<br />

tuique tantummodo securus tuaeque solummodo<br />

gratiae certus polliceor, uel inchoare trepidauero<br />

uel consummare formidauero, in<br />

ignem me protinus mittant et ibi<strong>de</strong>m merito<br />

perire permittant. Suppliciter tamen te domine<br />

rogo in dulcissimo nomine tuo ut nemo me<br />

catholicorum temere quod absit reprehendat<br />

IV. le conflit<br />

in animo suo, quia prorsus ausum talia petendi<br />

sicut ipse melius nosti a me propria temeritate<br />

non praesumo sed abs te potius tua benignitate<br />

sumo.<br />

d.C. lambot, p. 73, 74, 75. (Confessio prolixior)<br />

(237) raban en haut allemand signifie corbeau.<br />

(238) Precor quantumcumque mihi datur diuinitus<br />

humilitate coram trinae unitatis et unius<br />

trinitatis praesentissima maiestate, ut quisquis<br />

haec non liuore coruino sed amore potius<br />

columbino legeris Gotteschalci peccatoris<br />

ante <strong>de</strong>um memineris et paterno siue fraterno<br />

affectu simpliciter implores benignissimam<br />

ipsius clementiam ut dignetur mihi gratuita<br />

pietate largiri uerae semper et ubique coram<br />

se humilitatis excellentiam et sincerae caritatis<br />

perpetualiter eminentiam, sicque me protegat<br />

in<strong>de</strong>sinenter.<br />

d.C. lambot, p. 76.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

117


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

118<br />

IV. le conflit<br />

plicité sa très ”bienveillante clémence qu’il daigne m’accor<strong>de</strong>r<br />

en sa ”bonté gratuite l’excellence <strong>de</strong> l’humilité vraie<br />

toujours et ”partout, <strong>de</strong>vant lui, et <strong>à</strong> jamais l’éminence <strong>de</strong> la<br />

charité ”sincère, et qu’ainsi il me protège sans fin…» 238<br />

Ce texte est une ar<strong>de</strong>nte prière <strong>à</strong> dieu et avec son habituelle<br />

emphase, <strong>Gottschalk</strong> lui <strong>de</strong>man<strong>de</strong> d’ouvrir les yeux<br />

<strong>de</strong> ses adversaires aux vérités qu’il a reçues. Hincmar, son<br />

métropolitain, se trouve alors dans une situation délicate :<br />

il doit protéger son diocèse <strong>de</strong> la mauvaise doctrine et<br />

approfondir son argumentaire auprès <strong>de</strong> ceux qui font autorité<br />

et qui n’ont pas repris les thèses gottschalkiennes.<br />

Pour e. amann 239 , l’archevêque <strong>de</strong> reims recherchait<br />

simplement <strong>de</strong>s partisans ; pour J. <strong>de</strong>visse 240 , ce sont <strong>de</strong><br />

soli<strong>de</strong>s arguments doctrinaux qui étaient recherchés ; l’un<br />

ne va pas sans l’autre et nous le verrons plus avant, les partisans<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> s’appuyaient également sur <strong>de</strong> fortes<br />

preuves, notamment le traité XIII, n°8 sur l’évangile <strong>de</strong><br />

saint Jean, élaboré par saint augustin 241 . Ce <strong>de</strong>rnier reprend<br />

avec vigueur la définition <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux groupes humains liés<br />

respectivement au Christ et au diable. Il démontre que<br />

dieu n’est pas immuable si un <strong>de</strong>s seuls réprouvés est<br />

sauvé. C’est <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> l<strong>à</strong> que Jean Scot erigène va intervenir<br />

<strong>à</strong> la <strong>de</strong>man<strong>de</strong> <strong>de</strong> Pardule <strong>de</strong> laon et Hincmar. Il a<br />

pour mission <strong>de</strong> retourner l’argument gottschalkien qui<br />

s’appuie également sur ce passage <strong>de</strong> saint augustin. Jean<br />

Scot, d’origine irlandaise, jouissait, dans le cercle <strong>de</strong><br />

l’épiscopat franc, d’une haute considération <strong>de</strong>puis qu’il<br />

vivait <strong>à</strong> la cour <strong>de</strong> Charles le Chauve. Mais personne<br />

n’avait compté avec l’indépendance d’esprit et l’originalité<br />

intellectuelle <strong>de</strong> ce savant. lorsque Jean Scot erigène<br />

eut accompli sa tâche, le traité «De diuina prae<strong>de</strong>stinatio-<br />

(239) L’Epoque carolingienne, t. 6, Histoire <strong>de</strong><br />

l’eglise, p. 325.<br />

(240) Hincmar : archevêque <strong>de</strong> Reims, t. 1, p. 134.<br />

(241) «Est quidam populus praeparatus ad<br />

riam, damnandus cum diabolo».


ne», en dix-neuf chapitres et qui répondait aux espoirs fondés<br />

par ses commanditaires, dans la mesure où il repoussait<br />

catégoriquement les vues <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> comme<br />

contraires <strong>à</strong> la foi et <strong>à</strong> la raison, <strong>de</strong> vives critiques s’élevèrent.<br />

Plusieurs religieux comprirent que ce traité prêtait le<br />

flanc <strong>à</strong> la contestation. Parmi les écrits contestables au chapitre<br />

XV : la prescience et la pré<strong>de</strong>stination divines sont<br />

i<strong>de</strong>ntiques. au chapitre XVIII : par le péché du premier<br />

homme, la création toute entière n’est pas <strong>de</strong>venue coupable,<br />

parce que si la nature était coupable, elle aurait dû<br />

disparaître tout entière, puisqu’elle est une, etc. la<br />

métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> Jean Scot met <strong>à</strong> la première place la preuve <strong>de</strong><br />

raison et l’argumentation logique, puis elle cherche <strong>de</strong>s<br />

appuis chez les Pères et les evangiles.<br />

dès que ce traité dépassa le cercle étroit <strong>de</strong> ses origines, les<br />

critiques enflèrent et suscitèrent <strong>de</strong> violentes réactions.<br />

Florus <strong>de</strong> lyon entama contre le savant irlandais une<br />

attaque véhémente. Il qualifia Jean Scot <strong>de</strong> bavard et phraseur<br />

242 . Mais en réalité dans son premier mémoire, «De<br />

prae<strong>de</strong>stinatione», Florus est moins révolté par une réelle<br />

divergence d’opinion relative <strong>à</strong> la pré<strong>de</strong>stination, que par<br />

le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> preuve utilisé par erigène, aussi bien dans la<br />

division externe, que dans l’ordonnancement général <strong>de</strong>s<br />

idées. Florus, dans la majeure partie <strong>de</strong> son ouvrage, suit<br />

l’écrit en intercalant, selon l’opportunité, <strong>de</strong>s preuves<br />

bibliques et patristiques. en <strong>de</strong>hors d’une métho<strong>de</strong> qu’il<br />

considère comme profondément erronée, Florus blâme la<br />

doctrine <strong>de</strong> Jean Scot, selon laquelle il y aurait une seule<br />

pré<strong>de</strong>stination, parce qu’elle est i<strong>de</strong>ntique <strong>à</strong> la prescience<br />

et aux autres attributs <strong>de</strong> dieu. Il importe, dans chaque<br />

réplique <strong>de</strong> Florus, <strong>de</strong> refuter avant tout erigène et non <strong>de</strong><br />

(242) «Cuius dam vaniloqui et garuli hominis<br />

scripta».<br />

(243) Florus († 860) servit fidèlement trois<br />

IV. le conflit<br />

évêques : agobard, amolon et remy.<br />

(244) M.G.H. Poetae II, p. 357, carmen V.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

119


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

120<br />

IV. le conflit<br />

développer son propre système. Florus <strong>de</strong> lyon incarnera<br />

la fameuse tradition <strong>de</strong> l’école lyonnaise 243 . Il apparaît <strong>à</strong><br />

son époque avant tout comme un liturgiste éclairé, un<br />

canoniste, un poète et surtout un savant théologien.<br />

Walafrid Strabon dans une lettre <strong>à</strong> agobard le surnomait<br />

«la fleur <strong>de</strong> lyon» 244 . Mais Florus ne fut pas seul <strong>à</strong> contester<br />

le «De diuina prae<strong>de</strong>stinatione». l’assaut le plus sévère<br />

vint <strong>de</strong> l’évêque Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Troyes, un espagnol qui<br />

en réalité s’appelait Galindo. Jusque l<strong>à</strong> en excellents<br />

termes avec Jean Scot, qu’il avait connu <strong>à</strong> la cour du roi<br />

Charles, il entreprit <strong>de</strong> le combattre vigoureusement dans son<br />

ouvrage intitulé : «De prae<strong>de</strong>stinatione contra Ioaniem».<br />

l’ancien ami s’efforça d’éplucher les chapitres un <strong>à</strong> un 245<br />

et, comme pour Florus, ses griefs principaux vinrent <strong>de</strong> la<br />

nette préséance donnée par Jean Scot aux arguments<br />

rationnels sur les preuves d’autorité. les assauts conjugués<br />

d’autres éminents canonistes et théologiens comme<br />

ratramne <strong>de</strong> Corbie, Jonas d’orléans et loup <strong>de</strong> Ferrières<br />

eurent raison <strong>de</strong>s arguments <strong>de</strong> Jean Scot erigène et furent<br />

couronnés <strong>de</strong> succès. C’est aux syno<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Valence en<br />

855 246 et <strong>de</strong> langres en 859 que sa doctrine fut condamnée.<br />

Ce retournement dû essentiellement <strong>à</strong> l’église <strong>de</strong> lyon ne<br />

semble pas avoir affecté l’Irlandais, comme le prouvent<br />

ses œuvres ultérieures : la traduction <strong>de</strong>s «Areopagitica»<br />

et <strong>de</strong>s «Ambigua» <strong>de</strong> Maxime, et sa poésie latine 247 . les<br />

efforts d’Hincmar cherchant <strong>à</strong> freiner la diffusion <strong>de</strong>s<br />

idées <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> allaient-ils être réduits <strong>à</strong> néant ?<br />

l’envoi, par les évêques <strong>de</strong> la province <strong>de</strong> reims, du volume<br />

adressé par le prisonnier d’<strong>Hautvillers</strong> <strong>à</strong> Giselmar <strong>de</strong><br />

(245) P.l. CXV, 1009 – 1366.<br />

(246) ebon et lothaire participèrent <strong>à</strong> ce syno<strong>de</strong>.<br />

(247) on y trouve une épitaphe spirituelle<br />

adressée <strong>à</strong> Hincmar : «hic iacet Hincmarus<br />

cleptes uehementer auarus :<br />

Hoc solum gessit nobile quod periit».<br />

(Ci-gît Hincmar, le voleur, terriblement avare :<br />

la seule chose <strong>à</strong> louer en lui : est qu’il a<br />

disparu). l. Traube dans M.G.H., Poetae III,<br />

p. 553 considère qu’elle fut composée du<br />

vivant même <strong>de</strong> l’archevêque.<br />

(248) Zeitschrift für Kirchengeschichte, t. X,<br />

p. 258 – 309 (1889).<br />

(249) Manuscrit IX, lei<strong>de</strong>n B.P.l. 141.


IV. le conflit<br />

Corbie, encouragea Hincmar dans son entreprise. Pour W.<br />

Gundlach 248 , ce sont surtout les textes critiquant raban<br />

Maur avec une gran<strong>de</strong> impiété qui décidèrent l’archevêque<br />

<strong>de</strong> reims <strong>à</strong> rédiger son texte pastoral, le fameux<br />

«Ad simplices» 249 . Cet ouvrage est segmenté en six parties<br />

bien distinctes. l’introduction met évi<strong>de</strong>mment en gar<strong>de</strong><br />

contre le prisonnier d’<strong>Hautvillers</strong>. C’est le diable ; pour<br />

Hincmar, <strong>à</strong> n’en pas douter, c’est l’un <strong>de</strong>s faux prophètes<br />

dont parle l’écriture. Il altère les textes pour les plier <strong>à</strong><br />

son raisonnement, mais l’archevêque <strong>de</strong> reims n’est pas<br />

lui-même <strong>à</strong> l’abri <strong>de</strong> ce reproche. Cet argument sera d’un<br />

emploi fréquent contre ses adversaires. la thèse centrale<br />

<strong>de</strong>s «Ad simplices», que développera l’archevêque durant<br />

<strong>de</strong>s années, est qu’il n’y a qu’une pré<strong>de</strong>stination au bien.<br />

dieu n’est pas responsable <strong>de</strong> la damnation <strong>de</strong>s réprouvés,<br />

seul l’homme porte la responsabilité <strong>de</strong> ses fautes. C’est l<strong>à</strong><br />

faire une part très large <strong>à</strong> la volonté et aux choix humains.<br />

Cette perspective rappelle le semi-pélagianisme, mais<br />

Hincmar se gar<strong>de</strong>ra <strong>de</strong> reprendre ces thèmes. Il s’appuie<br />

essentiellement sur l’«Hypommesticon» 250 , qu’il attribue <strong>à</strong><br />

saint augustin. C’est Florus <strong>de</strong> lyon qui, au cours <strong>de</strong> la<br />

querelle, démontrera par références aux autres œuvres <strong>de</strong><br />

saint augustin, le caractère apocryphe <strong>de</strong> ce traité. C’est<br />

donc, <strong>à</strong> partir d’un texte d’augustinisme très mitigé<br />

qu’Hincmar argumentait contre <strong>Gottschalk</strong>. Mais la faiblesse<br />

<strong>de</strong>s sources hincmariennes ne s’arrête pas l<strong>à</strong>, le «Ad<br />

simplices» contient également <strong>de</strong> nombreuses références<br />

au «De induratione cordis pharaoni» presque<br />

constamment paraphrasées. J. <strong>de</strong>visse nous apprend que<br />

ce sont raban Maur et Pardule <strong>de</strong> laon qui lui ont fourni<br />

l’indication d’attribution <strong>à</strong> saint Jérôme 251 , or le «De induratione<br />

cordis pharaoni» n’a rien <strong>à</strong> voir avec les positions<br />

<strong>de</strong> saint Jérôme. Hincmar ne doute pas <strong>de</strong> ce qu’il lit<br />

(250) Son auteur n’a toujours pas été i<strong>de</strong>ntifié. (251) Hincmar : archevêque <strong>de</strong> Reims, t. 1, p. 138,<br />

éd. droz, Genève (1976).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

121


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

122<br />

IV. le conflit<br />

lorsque l’autorité <strong>de</strong>s prédécesseurs lui garantit l’authenticité.<br />

Il ne songe pas encore, <strong>à</strong> cette pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> sa recherche,<br />

<strong>à</strong> remettre en cause l’incohérence <strong>de</strong> la doctrine exposée<br />

par rapport <strong>à</strong> toutes les autres œuvres <strong>de</strong> saint Jérôme. on<br />

mesure mieux ici le progrès qu’il lui reste <strong>à</strong> parcourir pour<br />

atteindre un esprit moyennement critique. les lecteurs <strong>de</strong>s<br />

«Ad simplices», dotés d’une bonne culture augustinienne<br />

ont vite relevé ses faiblesses et les ont dénoncées sans<br />

indulgence. le parti <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> ne renonçait pas, ce<br />

n’est qu’<strong>à</strong> partir <strong>de</strong> 853 que l’archevêque <strong>de</strong> reims abdiquera<br />

totalement la défense <strong>de</strong> son texte. le temps vint où<br />

on n’allait pas tar<strong>de</strong>r <strong>à</strong> accuser Hincmar d’avoir systématiquement<br />

déformé le sens <strong>de</strong>s textes du condamné.<br />

Pour Hincmar, <strong>Gottschalk</strong> enseigne : «Nullus prae<strong>de</strong>stinatus<br />

“ad gloriam quicquid agat mali potest dici<strong>de</strong>re, nullus<br />

“prae<strong>de</strong>stinatus quicquidlibet uel quantumlibet beni agat,<br />

“potest eua<strong>de</strong>re» 252 .<br />

la formule n’est pas <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, même si elle découle<br />

<strong>de</strong> sa «Confessio prolixior». la forme très ramassée<br />

d’Hincmar est excessive et nous la découvrons très au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong><br />

<strong>de</strong>s textes aujourd’hui connus et publiés par d.C. lambot.<br />

le côté captieux reproché <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong> par son archevêque<br />

s’appliquerait l<strong>à</strong> totalement <strong>à</strong> lui-même. Mais dans l’atmosphère<br />

du moment, Hincmar ne peut laisser un seul témoin<br />

<strong>à</strong> décharge et le contexte politique n’est pas sans influence<br />

sur la façon dont sont construits le dossier et l’enquête<br />

théologique <strong>à</strong> l’encontre <strong>de</strong> notre moine. ratramne <strong>de</strong><br />

Corbie ne vas pas tar<strong>de</strong>r <strong>à</strong> s’en apercevoir. avec son traité<br />

dédié <strong>à</strong> Charles le Chauve, il explique dans ses <strong>de</strong>ux<br />

ouvrages «De prae<strong>de</strong>stinatione» 253 , en s’appuyant sur <strong>de</strong><br />

nombreux témoignages <strong>de</strong> la Bible et <strong>de</strong>s Pères, que tout ce<br />

qui advient est déterminé par les lois divines. Mais il a l’in-<br />

(252) nul pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la gloire ne peut s’y<br />

trouver soustrait, quelque mal qu’il fasse, nul<br />

pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la mort ne peut y échapper<br />

quelque bien qu’il fasse M.G.H, 14.<br />

(253) P.l. CXXI, 13 – 80.


telligence et la pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au roi <strong>de</strong> ne pas<br />

livrer au public savant son œuvre, tant que la question n’a<br />

pas été discutée suffisamment. Il affirme avec vigueur une<br />

double pré<strong>de</strong>stination, tant au bien qu’au mal. encore une<br />

fois, Hincmar mesure l’ampleur <strong>de</strong> sa tâche et les difficultés<br />

<strong>à</strong> surmonter pour satisfaire aux exigences <strong>de</strong> raban<br />

Maur. l’archevêque <strong>de</strong> reims résumera alors toute son<br />

argumentation en une formule <strong>à</strong> laquelle il sera désormais<br />

fidèle : «Parce que dieu est l’auteur du bien, non du mal,<br />

sa pré<strong>de</strong>stination est toujours bonne…» C’est alors que<br />

loup <strong>de</strong> Ferrières, également sollicité, lui fait parvenir une<br />

lettre qui expose fermement la double pré<strong>de</strong>stination 254 .<br />

loup établit successivement qu’il serait équitable que dieu<br />

damnât tous les hommes coupables en adam, la double<br />

pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s élus par la grâce et par la rétribution <strong>de</strong><br />

la justice <strong>de</strong>s mérites mauvais prévus par dieu chez les<br />

réprouvés. les positions et doctrines <strong>de</strong> ratramne <strong>de</strong><br />

Corbie et loup <strong>de</strong> Ferrières remettaient en cause ce<br />

qu’Hincmar enseignait dans son diocèse. Inquiet, l’archevêque<br />

<strong>de</strong> reims sollicite un recours <strong>à</strong> raban Maur. Il<br />

signale au vieil archevêque <strong>de</strong> Mayence que <strong>Gottschalk</strong>,<br />

non content d’être hérétique sur la pré<strong>de</strong>stination, invente<br />

maintenant <strong>de</strong>s formules inadmissibles pour parler <strong>de</strong> la<br />

Sainte-Trinité. la réponse <strong>de</strong> raban fut fort décevante et <strong>de</strong><br />

peu <strong>de</strong> secours. Il s’étonne <strong>de</strong> voir tant d’hommes s’occuper<br />

<strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination 255 . Quant au «Ad simplices», son<br />

approbation est totale et sans aucune réserve 256 . Qu’un tel<br />

homme, <strong>de</strong> telle réputation ne le reprit point sur son traité,<br />

lui commandait d’en défendre la doctrine et <strong>de</strong>venait ainsi<br />

une obligation morale. Pour la secon<strong>de</strong> fois, raban Maur<br />

vient <strong>de</strong> tracer <strong>à</strong> l’archevêque <strong>de</strong> reims les lignes <strong>de</strong> son<br />

(254) M.G.H., épistolae aeui karolini IV, I,<br />

p. 109 – 110.<br />

(255) Pour cet ancien élève d’alcuin, la tradition<br />

scripturaire l’emporte sur toutes nova-<br />

IV. le conflit<br />

tions, elle suffit <strong>à</strong> réfuter, ne serait-ce que par<br />

ses silences, une argumentation théologique.<br />

(256) M.G.H., épistolae aeui karolini III,<br />

p. 489.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

123


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

124<br />

IV. le conflit<br />

<strong>de</strong>voir et rien dans les legs <strong>de</strong>s grands <strong>de</strong> la renaissance<br />

carolingienne n’a aidé Hincmar <strong>à</strong> pénétrer au cœur du<br />

débat sur la pré<strong>de</strong>stination. ni alcuin ni les Pères du concile<br />

<strong>de</strong> 829 ne l’ont enrichi, au contraire, raban Maur, lui, a<br />

montré l’exemple <strong>de</strong> l’argument d’autorité l<strong>à</strong> où le métropolitain<br />

<strong>de</strong> reims intuitivement recherchait en vain la<br />

discussion sur le fond. le rémois dut se contenter <strong>de</strong> forger<br />

seul ses propres outils <strong>de</strong> travail et <strong>de</strong> réflexion, l’appareillage<br />

culturel <strong>de</strong>s premières générations <strong>de</strong> clercs<br />

carolingiens sur lequel il pensait pouvoir s’appuyer lui<br />

faisant défaut.<br />

<strong>de</strong> son côté, Charles le Chauve suivait la dispute <strong>de</strong> près et<br />

avait également ouvert sa propre enquête théologique.<br />

dans une lettre adressée au roi, son mentor ratramne écrit<br />

qu’il lui revient dans cette querelle <strong>de</strong> fixer la définition<br />

finale. dans ce débat sur <strong>de</strong>s textes déj<strong>à</strong> profondément étudiés,<br />

risquait tôt ou tard <strong>de</strong> se substituer une décision royale,<br />

ce qui ne ferait que compliquer l’affaire.<br />

la hâte avec laquelle Charles souhaitait conclure tenait<br />

essentiellement aux difficultés politiques que rencontrait<br />

son royaume et cette précipitation n’a fait que pervertir un<br />

peu plus les conditions du débat théologique.<br />

Les alliés<br />

Comme l’archevêque <strong>de</strong> reims, <strong>Gottschalk</strong> cherchait <strong>de</strong>s<br />

soutiens. Une lettre d’Hincmar nous fait savoir que certains<br />

moines s’étaient laissés convaincre par <strong>Gottschalk</strong> et<br />

(257) Pru<strong>de</strong>nce, alias Galindo († 861) fut le<br />

rédacteur <strong>de</strong>s annales <strong>de</strong> Saint-Bertin <strong>de</strong> 835<br />

jusqu’<strong>à</strong> sa mort. lorsqu’il consigna en 849 la<br />

condamnation <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, sa rédaction<br />

montre la distance qu’il prend par rapport aux<br />

faits reprochés au condamné.<br />

«Go<strong>de</strong>sscalcus Gallus quidam, monasterii<br />

Orbacensis parroechiae Suessonicae monachus<br />

et presbyter, scientia, tumidus, quibusdam<br />

superstitionibus <strong>de</strong>ditus, Italiam specie<br />

religionis adgressus in<strong>de</strong> turpiter eiectus,<br />

Dalmatiam, Pannoniam Noreiamque adorsus,<br />

quaedam nostrae salute ual<strong>de</strong> contraria, praecipue<br />

sub nomine prae<strong>de</strong>stinationis, pestiferis<br />

dictis et scriptis adstruens, in praesentia<br />

Hludouici Germanorum regis episcopali<br />

concilio <strong>de</strong><strong>de</strong>ctus atque conuictus, tan<strong>de</strong>m ad<br />

dioceseos suae urbem metropolim, Remorum<br />

Durocortorum nomine, cui Ingmarus uir uenerabilis<br />

praesi<strong>de</strong>t, redire compellitur quatenus<br />

illic dignum suae perfidiae indicium nanciscatur.<br />

Quem rex christiane fi<strong>de</strong>i strennuissimus


adhéraient <strong>à</strong> ses théories. <strong>de</strong>s évêques et <strong>de</strong>s abbés partageaient<br />

également ses thèses et son évêque rotha<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Soissons, qui le soutenait, sollicita l’avis du pape nicolas 1 er .<br />

aux yeux <strong>de</strong> l’archevêque rémois, tous les correspondants<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> passent pour ses complices. Hincmar est<br />

persuadé qu’ils manquent <strong>de</strong> fermeté sur le plan doctrinal<br />

et canonique et les suspecte <strong>de</strong> connivence. Celui qui<br />

représentait une opposition la plus déstabilisante fut l’archevêque<br />

<strong>de</strong> Sens, Wénilon. Fort <strong>de</strong> l’enseignement <strong>de</strong><br />

Pru<strong>de</strong>nce 257 , sa réaction vint après celle d’amolon qui lui<br />

s’indignait surtout <strong>de</strong> la forme qu’utilisait <strong>Gottschalk</strong> dans<br />

ses courriers 258 . Il désapprouve notre moine lorsqu’il traite<br />

d’hérétiques ceux qui s’opposent <strong>à</strong> lui («zelo fi<strong>de</strong>i») et<br />

quand <strong>Gottschalk</strong> qualifie ses adversaires <strong>de</strong> «rhabanicos».<br />

Ce ton polémiste et offensant <strong>de</strong>sservait sa cause,<br />

irritait ses amis et les portait <strong>à</strong> prendre quelque distance,<br />

comme loup <strong>de</strong> Ferrières qui lui répondit concernant un<br />

<strong>de</strong> ses questionnements sur les yeux <strong>de</strong> la chair après<br />

résurrection et la vision béatifique : «donc, puisqu’il<br />

faut ”toujours payer sa <strong>de</strong>tte <strong>de</strong> charité sans jamais l’acquitter,<br />

”je te conseille, mon révérend frère, <strong>de</strong> ne pas<br />

consumer ”davantage ton esprit <strong>à</strong> <strong>de</strong> tels problèmes, <strong>de</strong><br />

peur qu’outre ”mesure occupé <strong>à</strong> les résoudre, tu te<br />

cultor Karolus, aduocato sanctorum memoratae<br />

dioceseos episcorum conuentu, suis aspectibus<br />

praesentari <strong>de</strong>creuit. Quo perductus,<br />

publice flagellatus, librosque suarum adsertionum<br />

igni cremare compulsus est.<br />

l’adjectif indéfini «quaedam» (<strong>de</strong>s genres <strong>de</strong>)<br />

et la préposition «sub» <strong>de</strong>vant le verbe «nomine»<br />

(sous prétexte <strong>de</strong>) <strong>à</strong> la ligne suivante, donnent<br />

<strong>à</strong> ce passage une tonalité ambiguë et nous<br />

confortent dans l’idée que Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Troyes<br />

n’acceptait pas la sentence infligée.<br />

a.S.B., p. 56-57, éd. C. Klincksieck, Paris<br />

(1964).<br />

(258) P.l. CXVI, 86, 95.<br />

(259) Proin<strong>de</strong> semper soluendo et numquam<br />

persoluendo caritatis <strong>de</strong>bito, te, suspicien<strong>de</strong><br />

IV. le conflit<br />

frater, exhortor ut nequaquam ultra in talibus<br />

tuum ingenium conteras, ne, his ultra quam<br />

oportet occupatus, ad utiliora uestiganda siue<br />

docenda minus sufficias.<br />

Loup <strong>de</strong> Ferrières, correspondance II, p. 53,<br />

l. levillain, éd. les Belles lettres, Paris<br />

(1964).<br />

(260) l. levillain, op. cité, p. 229-231.<br />

(261) nous le constatons dans un courrier<br />

envoyé <strong>à</strong> ratramne <strong>de</strong> Corbie<br />

…Estque Augustini his sententia missa beati.<br />

Quam liquido exponi auctori quadrando<br />

poposci. Nempe tribus horum studui proprium<br />

in<strong>de</strong>re sensum, Matcaudo, Ionae atque Lupo,<br />

rutilantibus ore. Poscens obnixe satagant ut<br />

uera referre… P. l., CXXV, p. 618.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

125


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

126<br />

IV. le conflit<br />

consacres moins <strong>à</strong> la ”recherche et <strong>à</strong> l’enseignement <strong>de</strong><br />

questions plus utiles» 259 .<br />

Cet abbé est trop préoccupé par le dénuement qui afflige sa<br />

communauté pour s’impliquer dans un soutien clair, d’autant<br />

qu’il sollicitait par ailleurs la générosité d’Hincmar<br />

afin qu’il pourvoie <strong>à</strong> son déplacement vers Maastricht où<br />

<strong>de</strong>vait se tenir un colloque avec les rois 260 . d’autres amis<br />

plus frileux comme Matcaud ou Jonas d’orléans ne lui<br />

répon<strong>de</strong>nt même pas 261 .<br />

le plus courageux fut sans nul doute son évêque rotha<strong>de</strong>,<br />

puisqu’il porta l’affaire jusqu’<strong>à</strong> rome. Un peu plus tard,<br />

Hincmar écrira <strong>à</strong> son tour au pape pour expliquer qu’il n’a<br />

pu, pressé par le temps, se rendre <strong>à</strong> une citation <strong>à</strong> comparaître<br />

en compagnie <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> 262 , mais qu’il est prêt <strong>à</strong><br />

lui envoyer l’hérétique. nicolas 1 er ne donnera pas suite <strong>à</strong><br />

cette proposition. Ce n’est qu’en 866 que l’affaire faillit<br />

rebondir. Un moine d’<strong>Hautvillers</strong>, Guntbert, s’enfuit du<br />

monastère vers rome afin d’y apporter un appel du<br />

reclus 263 . Informé Hincmar chargea egilon, archevêque <strong>de</strong><br />

Sens, successeur <strong>de</strong> Wénilon, <strong>de</strong> se rendre <strong>à</strong> rome afin d’y<br />

régler si possible la question <strong>de</strong> l’élargissement du prisonnier<br />

d’<strong>Hautvillers</strong>. dans le courrier porté par egilon, il précisera<br />

que si le pontife désire l’envoi <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> au<br />

Saint-Siège, il <strong>de</strong>vra <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r au roi Charles d’en assurer<br />

l’exécution 264 . nous ne savons pas ce qu’a pu répondre le<br />

pape. Il n’a certainement pas souhaité entrer en conflit<br />

ouvert avec le rémois, dont la puissance personnelle<br />

s’était affirmée. l’archevêque pouvait <strong>à</strong> ses yeux jouer un<br />

rôle essentiel dans d’autres affaires qu’il jugeait plus<br />

(262) Signalons que rotha<strong>de</strong> fut déposé <strong>de</strong> son<br />

siège <strong>de</strong> Soissons durant <strong>de</strong>ux ans (863 et 864)<br />

après le syno<strong>de</strong> tenu <strong>à</strong> douzy en 860.<br />

(263) M.G.H., III, p. 201.<br />

(264) M.G.H., III, p. 162.<br />

(265) P.l., CXXI, c. 985-1068. l’abbé<br />

Manceaux traduit ce titre par : «les trois<br />

lettres favorables au novateur», (<strong>Gottschalk</strong>) !<br />

Histoire <strong>de</strong> l’abbaye d’<strong>Hautvillers</strong>, p. 247.<br />

(266) archevêque <strong>de</strong> lyon († 875).<br />

(267) archevêque <strong>de</strong> lyon († 31 mars 852).<br />

(268) on y retrouve toute l’influence <strong>de</strong> la<br />

pensée du diacre Florus <strong>de</strong> lyon.


importantes que la libération <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

après les moines ratramne <strong>de</strong> Corbie et Walafrid Strabon,<br />

c’est <strong>à</strong> l’église <strong>de</strong> lyon que revient le soutien le plus argumenté<br />

en faveur <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

dans un traité anonyme, le «Liber <strong>de</strong> tribus epistolis» 265<br />

imputé <strong>à</strong> remy 266 , successeur d’amolon 267 et ebon futur<br />

évêque <strong>de</strong> Grenoble, sont posées sept règles permettant<br />

d’examiner en toute sécurité les propositions incriminées<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. ainsi le «Liber» analyse, l’une après<br />

l’autre, leurs propositions sur la double pré<strong>de</strong>stination, la<br />

volonté salvifique restreinte, la valeur <strong>de</strong> la mort du Christ<br />

et le libre arbitre 268 .<br />

le texte affirme : «Il y a bien <strong>de</strong>ux pré<strong>de</strong>stinations au salut<br />

et au châtiment. Si quelqu’un s’en scandalise comme si<br />

cela mettait les réprouvés dans la nécessité <strong>de</strong> pécher, il<br />

faudra seulement leur expliquer qu’il n’en est rien». Il ne<br />

fait pas <strong>de</strong> doute pour le ou les auteurs <strong>de</strong> cette doctrine,<br />

que la double pré<strong>de</strong>stination soit la vraie pensée <strong>de</strong>s Pères<br />

et, après avoir rappelé <strong>de</strong>s témoignages <strong>de</strong> léon et<br />

Grégoire, le «Liber» conclut : «et ce sont l<strong>à</strong> <strong>de</strong>s dispositions,<br />

éternelles et immuables. aucun élu ne peut donc<br />

périr, aucun réprouvé ne peut être sauvé <strong>à</strong> cause <strong>de</strong> la dureté<br />

<strong>de</strong> son cœur 269 . Que l’on blâme la légèreté, la témérité, le<br />

bavardage inopportun <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> n’est pas une raison<br />

pour nier la vérité» 270 .<br />

le «Liber <strong>de</strong> tribus epistolis» reprend <strong>à</strong> son compte les<br />

<strong>de</strong>ux propositions émanant <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> 271 et poursuit :<br />

«Que dieu veuille seulement le salut <strong>de</strong> ceux qui se<br />

sau-”vent n’est pas une hérésie. le texte <strong>de</strong> Timothée est<br />

dif-”ficile <strong>à</strong> expliquer, tous doivent, <strong>à</strong> la suite <strong>de</strong><br />

saint ”augustin, respecter les diverses interprétations<br />

(269) Ecce beatissimi patres ecclesia uno<br />

sensu, uno ore, quia et uno spiritu diuinae<br />

praescientiae et prae<strong>de</strong>stinationis immobilem<br />

ueritatem in utraque parte, electrorum scilicet<br />

et reproborum praedicant et commendant…<br />

IV. le conflit<br />

(270) Qua propter et si illius miserabilis<br />

monachi, improbatur leuitas, temeritas culpatur,<br />

importuna loquacitas, non i<strong>de</strong>o negando<br />

est ueritas.<br />

(271) P. l., CVIII, c. 1004-1005.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

127


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

128<br />

IV. le conflit<br />

qu’on en ”propose dans l’église. dieu nous inspire <strong>de</strong> vouloir<br />

le salut ”<strong>de</strong> tous les hommes, pourvu que l’on rejette<br />

l’explication ”<strong>de</strong> Pélage. dieu veut également sauver tout le<br />

mon<strong>de</strong>, mais ”ne pré<strong>de</strong>stine qu’en raison <strong>de</strong>s bonnes<br />

œuvres qu’il pré-”voit. Il faut s’en tenir <strong>à</strong> ce qui est certain,<br />

ne pas condam-”ner sévèrement les esprits contentieux qui<br />

parlent parfois ”<strong>de</strong> manière choquante, mais tâcher <strong>de</strong> les<br />

calmer». C’est l<strong>à</strong> un reproche en direction d’Hincmar et<br />

<strong>de</strong>s membres ayant condamné <strong>Gottschalk</strong> au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Quierzy en 849.<br />

Plus loin, le «Liber» affirme : «Ce que dit le condamné<br />

sur ”la mort du Christ peut s’entendre, le Christ n’est pas<br />

mort» : «pro omni illa innumerabili et infinito multitudine<br />

impiorum qui ab exordio mundi usque ad passionem<br />

domini».<br />

«Il est mort pour tous ceux qui croient et persévèrent dans<br />

“la foi. Il est mort aussi pour ceux qui <strong>à</strong> un moment ou un<br />

“autre, ont été appelés <strong>à</strong> la foi mais n’ont pas persévéré».<br />

le «Liber» signale que c’est l<strong>à</strong> un point délicat, les Pères<br />

ne s’exprimant pour tous <strong>de</strong> la même façon. «Certains<br />

pré-”fèrent dire qu’il est mort pour tous. Il faut donc respecter<br />

”l’expression <strong>de</strong> chacun». le «Liber» poursuit : «au<br />

sujet du ”libre arbitre, il est invraisemblable que <strong>Gottschalk</strong><br />

sou-”tienne la proposition qu’on lui attribue, <strong>à</strong> savoir :<br />

qu’après ”la chute personne ne peut plus user <strong>de</strong> son libre<br />

arbitre ”pour faire le bien, mais seulement pour faire le<br />

mal, et ”ainsi que le bien ne puisse jamais être attribué <strong>à</strong> la<br />

coopé-”ration <strong>de</strong> la volonté humaine, mais <strong>à</strong> la grâce seule<br />

et que ”les fidèles eux-mêmes ne coopèrent pas au bien que<br />

la ”grâce leur donne d’accomplir. C’est l<strong>à</strong> une<br />

(272) le «Liber» ici démontre le procès d’intention<br />

fait <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong> et l’altération outrancière<br />

<strong>de</strong> ses propositions au point qu’elles<br />

<strong>de</strong>viennent incroyables.<br />

(273) …ipsa erat ante peccatam libera, ipsa<br />

facta est per peccatam seruituti obnoxia, ipsa<br />

fit per justificantem gratiam liberata…<br />

(274) Pene emoriens.<br />

(275) Maxime cum illi sensus qui ipso continebantur<br />

libelle, exepto uno qui extremus<br />

ponitur, non essent sui, sed ecclesiastici…


énormité ”qu’aucun catholique n’a jamais soutenue 272 . le<br />

Christ ”nous a guéris et libérés en nous arrachant <strong>à</strong> la servitu<strong>de</strong><br />

du ”péché» 273 .<br />

les auteurs <strong>de</strong> ce traité passent au crible les thèses<br />

hincmariennes et blâment sévèrement les rigueurs dont<br />

on a usées envers <strong>Gottschalk</strong>. Pour eux, il n’appartenait<br />

pas <strong>à</strong> <strong>de</strong>s moines mais aux évêques seuls <strong>de</strong> le condamner.<br />

Il était <strong>à</strong> <strong>de</strong>mi-mort 274 quand on le força <strong>à</strong> jeter ses<br />

écrits au feu. et les rédacteurs du «Liber» <strong>de</strong> s’interroger :<br />

«Pourquoi avoir agi autrement qu’avec les autres héré-<br />

“tiques qu’on s’efforce <strong>de</strong> persua<strong>de</strong>r ? Il faut réprimer les<br />

“excès <strong>de</strong> langage tout en respectant la vérité divine, et,<br />

“sauf la doctrine exprimée sur le libre arbitre, les doctrines<br />

“formulées ne sont pas <strong>de</strong>s opinions hasar<strong>de</strong>uses 275 mais<br />

“<strong>de</strong>s enseignements reçus.» les auteurs lyonnais écrivent<br />

qu’il faudrait adoucir la détention <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, voire y<br />

mettre fin, et ajoutent : «Tant <strong>de</strong> rigueurs et <strong>de</strong> si longues, ne<br />

“sont bonnes qu’<strong>à</strong> la désespérance» 276 .<br />

Hincmar ayant formulé la doctrine qu’il opposait comme<br />

vérité catholique, le texte du «Liber» contredit l’archevêque<br />

en ces termes : «Hincmar <strong>de</strong> reims veut absolument<br />

”que le Christ soit mort pour tous, alors que l’ecriture<br />

dit ”simplement plusieurs ou beaucoup. Il ne veut pas<br />

entendre ”parler d’une double pré<strong>de</strong>stination, cependant il<br />

est ”constant que dieu pré<strong>de</strong>stine les méchants <strong>à</strong> la mort<br />

sans ”les contraindre au mal. la logique veut qu’il confesse<br />

la ”pré<strong>de</strong>stination corrélative <strong>de</strong>s méchants <strong>à</strong> la<br />

peine» 277 .<br />

<strong>Gottschalk</strong> a raison contre Hincmar dans l’interprétation<br />

<strong>de</strong> nombreux passages <strong>de</strong> l’écriture et le clergé lyonnais le<br />

(276) Il est fait preuve ici d’une fine psychologie<br />

et cette approche semble bien connaître<br />

les ressorts du prisonnier d’<strong>Hautvillers</strong>.<br />

(277) P. l. CXXX, c. 1037.<br />

(278) P. l. CXXXVI, c. 1067.<br />

(279) Nullatenus cre<strong>de</strong>ndum est quod, in primo<br />

IV. le conflit<br />

homine, murtu anima per peccatum, non fuerit<br />

uoluntas mortua eo<strong>de</strong>m peccato.<br />

(280) Bonum itaque nostrum <strong>de</strong>i est, quia<br />

totum ex <strong>de</strong>o est ; et nihil boni nostrum est<br />

quia nihil boni nostri ex nobis est.<br />

(281) le cœur endurci <strong>de</strong> Pharaon.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

129


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

130<br />

IV. le conflit<br />

relève rapi<strong>de</strong>ment. Hincmar veut que saint augustin se soit<br />

rétracté dans l’«Hypomnesticon» sur le point <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination<br />

<strong>de</strong>s impies <strong>à</strong> la peine, or cet ouvrage est apocryphe.<br />

Hincmar a tort <strong>de</strong> dire que saint augustin ne parle<br />

pas <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s réprouvés dans le «De prae<strong>de</strong>stinatione<br />

sanctorum» 278 . Il explique mal en quoi consiste<br />

le dommage du libre arbitre. le libre arbitre c’est la<br />

volonté du bien qui meurt par le péché, comme l’âme ellemême<br />

279 .<br />

Pour Hincmar, le bien que nous faisons est <strong>à</strong> dieu et <strong>à</strong><br />

nous. le «Liber» dénonce ce partage et rectifie : «Pas <strong>de</strong><br />

“partage, tout notre bien est <strong>de</strong> dieu. rien ne vient <strong>de</strong> nous<br />

“comme <strong>de</strong> nous» 280 . le «Liber» répond ensuite <strong>à</strong> Pardule<br />

évêque <strong>de</strong> laon. Il conteste l’authenticité hiéronymienne<br />

du : «De induratione cordis pharaonis» 281 , il déplore que<br />

<strong>de</strong>s évêques se soient fait injure <strong>à</strong> eux-mêmes en faisant<br />

écrire sur <strong>de</strong>s sujets si hauts, amalaire 282 et Scot erigène 283 .<br />

«le premier a infecté <strong>de</strong> ses erreurs autant qu’il a pu<br />

tout ”le royaume <strong>de</strong> Charles et même d’autres contrées,<br />

le ”second au lieu <strong>de</strong> l’interroger sur la foi, on aurait dû brûler<br />

ses livres». enfin est abordée la lettre <strong>de</strong> raban Maur <strong>à</strong><br />

notingue 284 . les auteurs du «Liber» considèrent qu’elle est<br />

en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> la question et reprochent <strong>à</strong> raban <strong>de</strong> vouloir<br />

prouver que dieu ne pré<strong>de</strong>stine pas les impies <strong>à</strong> être impies<br />

et qu’il ne les met pas dans la nécessité d’être tels.<br />

S’offusquant d’une telle assertion, ils écrivent : «Mais qui<br />

a jamais soutenu pareil blasphème ? le point est <strong>de</strong> savoir<br />

si dieu pré<strong>de</strong>stine au châtiment ceux dont il prévoit l’obstination<br />

dans le mal. raban Maur ne s’en occupe pas. Il a<br />

tort <strong>de</strong> déclarer hérétique le principe <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> : aucun<br />

<strong>de</strong>s pré<strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> la vie ne peut périr».<br />

(282) archevêque <strong>de</strong> Trèves († 850).<br />

(283) 810 † 877.<br />

(284) evêque <strong>de</strong> Véronne.<br />

(285) Il incarnera la fameuse tradition <strong>de</strong><br />

l’école lyonnaise avec son œuvre majeure «De<br />

electionibus episcoporum».<br />

(286) Cuiusdam uaniloqui et garruli hominis<br />

scripta.


Florus <strong>de</strong> lyon 285 , ayant prit également le parti <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>, qualifia Jean Scot erigène, auteur, <strong>à</strong> l’instigation<br />

d’Hincmar et Pardule <strong>de</strong> laon, du traité contre la doctrine<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, <strong>de</strong> bavard et phraseur 286 . Mais Florus<br />

sera moins révolté par une réelle divergence d’opinions<br />

relative <strong>à</strong> la pré<strong>de</strong>stination, que par le mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> preuve utilisé<br />

par Jean Scot.<br />

raban et Hincmar qui accusaient <strong>Gottschalk</strong> d’horribles<br />

doctrines, n’en imposaient pas <strong>à</strong> l’église <strong>de</strong> lyon. Mais ni<br />

les lyonnais, ni Wénilon, ni Pru<strong>de</strong>nce, n’ont soutenu l’attitu<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> révolte du moine. l’engagement dans la querelle<br />

sur la pré<strong>de</strong>stination n’en fut pas pour autant sans outrance.<br />

l’opposition entre les partisans <strong>de</strong> la doctrine gottschalkienne<br />

et ceux <strong>de</strong> la doctrine hincmarienne était<br />

extrêmement vive. les questions <strong>de</strong> personnes nuisaient <strong>à</strong><br />

n’en pas douter <strong>à</strong> la sérénité du débat théologique. les<br />

caractères et les tempéraments se heurtaient plus encore<br />

que les doctrines proprement dites.<br />

Les adversaires<br />

raban Maur et Hincmar <strong>de</strong> reims furent les adversaires<br />

les plus résolus <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, mais ils ont également eu<br />

pour relais plusieurs autres hauts dignitaires religieux.<br />

le poids <strong>de</strong> l’autorité <strong>de</strong> raban Maur fut déterminant<br />

dans cette ligue. l’archevêque <strong>de</strong> Mayence a été le théologien<br />

le plus considéré <strong>de</strong> son temps. né vers 780 <strong>à</strong><br />

Mayence, il n’utilisa qu’exceptionnellement le surnom <strong>de</strong><br />

«Magnentius» pour signaler son origine. Il préféra celui <strong>de</strong><br />

Maur, donné par alcuin lors <strong>de</strong> son séjour <strong>à</strong> Tours, surnom<br />

attribué en souvenir du disciple très cher <strong>à</strong> saint Benoît.<br />

raban garda ce surnom sa vie durant par fidélité <strong>à</strong> son<br />

maître vénéré. enfant comme <strong>Gottschalk</strong>, il fut envoyé au<br />

(287) C’est ratgar (802/817) qui entreprit<br />

l’agrandissement <strong>de</strong> la basilique bonifacienne.<br />

(288) F. Brunhölzl ; Histoire <strong>de</strong> la littérature<br />

IV. le conflit<br />

latine, t. 2, éd. Brepols, louvain (1991).<br />

(289) eigil († 822).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

132<br />

IV. le conflit<br />

monastère <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> pour y recevoir sa première instruction.<br />

C’est en 801, sous l’abbé Baugulfe qu’il reçut son<br />

ordination au diaconat.<br />

Plus tard sous ratgar 287 , il prit la charge <strong>de</strong> l’enseignement<br />

<strong>à</strong> l’école claustrale. Il y subit les affres <strong>de</strong> cet abbé tyrannique<br />

qui allait jusqu’<strong>à</strong> lui retirer ses livres 288 . C’est après<br />

la mort d’eigil 289 , successeur <strong>de</strong> ratgar, qu’il fut élu abbé<br />

et que s’ouvrit <strong>à</strong> <strong>Fulda</strong> une pério<strong>de</strong> faste. <strong>Gottschalk</strong> a donc<br />

suivi, au sein <strong>de</strong> l’école claustrale, <strong>de</strong>s cours dispensés par<br />

raban Maur et ce <strong>de</strong>rnier a pu, lors <strong>de</strong> ses leçons, déj<strong>à</strong><br />

déceler chez cet élève un caractère particulier, voire rebelle.<br />

<strong>de</strong> plus, il ne pouvait accréditer l’idée que ses enseignements<br />

eussent pu déboucher sur <strong>de</strong>s théories aussi sulfureuses<br />

et être propagées dans les royaumes <strong>de</strong> louis, <strong>de</strong><br />

lothaire et <strong>de</strong> Charles.<br />

Pour raban la spéculation religieuse reste étrangère. Son<br />

œuvre écrite est exceptionnellement riche. Ses nombreux<br />

ouvrages sont <strong>de</strong>stinés <strong>à</strong> la pratique et d’orientation didactique.<br />

Il n’innove pas mais avec un caractère bien trempé<br />

théorise sur les disciplines qui se rapportent <strong>à</strong> la théologie.<br />

Sa première œuvre fut consacrée <strong>à</strong> la croix du Seigneur 290 .<br />

C’est un travail difficile <strong>à</strong> pénétrer 291 . Sous eigil, raban<br />

composa un manuel <strong>à</strong> l’intention <strong>de</strong> tous les clercs auxquels<br />

incombait la formation du clergé, le «De institutione clericorum»<br />

292 . Il dédia cet ouvrage <strong>à</strong> Heistulf, archevêque <strong>de</strong><br />

Mayence. on retrouve dans ce traité toute la typologie d’un<br />

enseignement figé. rien n’est original, d’ailleurs raban<br />

explique dans sa préface qu’il n’a rien voulu exprimer qui<br />

ne soit fondé sur l’autorité <strong>de</strong>s Pères et par eux formulé.<br />

C’est la forme typique <strong>de</strong> compilation et cette métho<strong>de</strong> sera<br />

(290) «De laudibus sanctae crucis», M. Perrin,<br />

Paris-amiens (1988). Cette œuvre en <strong>de</strong>ux<br />

livres se compose d’un cycle <strong>de</strong> vingt-huit<br />

poèmes <strong>à</strong> figure que précè<strong>de</strong> une dédicace <strong>à</strong><br />

louis le Pieux, également en vers.<br />

(291) F. rädle signale qu’agrippa <strong>de</strong><br />

nettesheim rapproche l’ouvrage <strong>de</strong> raban <strong>à</strong> la<br />

spéculation cabalistique.<br />

(292) a. Wilmart : Dictionnaire d’archéologie<br />

chrétienne et <strong>de</strong> liturgie, t. 5, c. 1014-1027,<br />

Paris (1922).<br />

(293) P. l., III, c. 613-678.


utilisée dans presque tous ses ouvrages. Contrairement <strong>à</strong><br />

alcuin qui, dans sa «Disputatio <strong>de</strong> uera philosophia», avait<br />

reconnu la valeur <strong>de</strong>s arts libéraux et voulu que la formation<br />

intellectuelle ne fût pas liée <strong>à</strong> une condition, mais <strong>à</strong> la disponibilité<br />

intérieure <strong>de</strong> l’écolier <strong>à</strong> faire abstraction <strong>de</strong> toute<br />

idée utilitaire. Chez raban, on ne retrouve rien <strong>de</strong> cette largeur<br />

<strong>de</strong> vues et du sens humaniste d’alcuin. en considérant<br />

la formation comme un domaine exclusif du clergé, confinée<br />

au rang <strong>de</strong> servante, raban va <strong>à</strong> l’encontre <strong>de</strong> ce<br />

qu’avait voulu son maître. alors que raban compte, au IX e<br />

siècle, comme un <strong>de</strong>s savants les plus en vue, sa personnalité<br />

et son aura éclairent d’une manière significative l’évolution<br />

<strong>de</strong> la vie intellectuelle qu’eurent <strong>à</strong> subir <strong>Gottschalk</strong> et<br />

son époque. Son «De sacris ordinibus» 293 va dans le même<br />

sens et plus tard, lors <strong>de</strong> sa retraite au Petersberg, il rédigera<br />

selon la métho<strong>de</strong> bien connue <strong>de</strong> la compilation son «De<br />

ecclesiastica disciplina». Si <strong>Gottschalk</strong>, <strong>à</strong> supposer qu’il en<br />

ait eu connaissance, avait retenu l’esprit <strong>de</strong> cet ouvrage, il<br />

aurait perçu combien sa voie était sans issue. C’est un exposé<br />

sur l’éthique chrétienne, empruntant différents écrits <strong>à</strong><br />

saint augustin. les ouvrages didactiques <strong>de</strong> raban sont peu<br />

nombreux ; le plus ancien, le «Liber <strong>de</strong> computo», dédié <strong>à</strong><br />

Macaire, moine irlandais, revêt la forme d’un dialogue<br />

entre un maître et son élève, lequel, comme il se doit, pose<br />

les questions. l’autre ouvrage non théologique fut produit<br />

après 842 ; le «De arte grammaticale». on y retrouve pour<br />

base principale Priscien, mais aussi <strong>de</strong>s extraits <strong>de</strong> la grammaire<br />

<strong>de</strong> diomè<strong>de</strong>, <strong>de</strong>s étymologies d’Isidore et <strong>de</strong> la<br />

métrique <strong>de</strong> Bè<strong>de</strong>. le sommet <strong>de</strong> l’œuvre <strong>de</strong> raban Maur<br />

est sans nul doute son «De rerum naturis» appelé égale-<br />

(294) l’œuvre est composée <strong>de</strong> vingt <strong>de</strong>ux<br />

livres, son originalité rési<strong>de</strong> également dans<br />

ses illustrations, elle est dédiée <strong>à</strong> Haimon,<br />

évêque d’Halberstadt, et <strong>à</strong> louis le Pieux.<br />

IV. le conflit<br />

(295) Mais son «De rerum naturis» n’aura pas<br />

l’influence <strong>de</strong> ses commentaires bibliques, où<br />

en huit livres il fait principalement l’exégèse<br />

<strong>de</strong> l’évangile <strong>de</strong> saint Mathieu, du Pentateuque<br />

et <strong>de</strong> la Genèse.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

133


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

134<br />

IV. le conflit<br />

ment «De uniuerso» 294 . C’est un travail savant et littéraire,<br />

allié <strong>à</strong> la science et <strong>à</strong> la persévérance ; l’ouvrage est une <strong>de</strong>s<br />

gran<strong>de</strong>s encyclopédies du Moyen-âge. Il puise ses sources<br />

dans une littérature vieille <strong>de</strong> plusieurs siècles. C’est une<br />

<strong>de</strong>s plus importantes productions <strong>de</strong> l’époque carolingienne<br />

qui confirme l’érudition <strong>de</strong> son auteur 295 . Parmi les nombreux<br />

petits ouvrages <strong>de</strong> circonstances, signalons plus particulièrement<br />

le «De oblatione puerorum», justifiant le vœu<br />

monastique <strong>de</strong>s parents pour l’engagement <strong>de</strong> leurs propres<br />

enfants : il y soutenait l’idée que même le vœu émis par les<br />

seuls parents obligeait l’enfant et que l’entrée d’un homme<br />

libre dans l’état monastique n’était pas une déchéance, mais<br />

une promotion. Cette thèse fut fermement contestée par<br />

<strong>Gottschalk</strong>, qui avait été libéré <strong>de</strong> l’engagement parental<br />

par l’abbé eigil.<br />

Pour la rédaction <strong>de</strong> son ouvrage sur l’âme : «De anima»,<br />

raban emprunta mot <strong>à</strong> mot la plus gran<strong>de</strong> partie <strong>à</strong><br />

Cassiodore, qui avait également titré son traité «De<br />

anima». Il dédia ce court écrit au roi lothaire II. Il existe<br />

également sous le nom <strong>de</strong> raban <strong>de</strong>ux pénitentiels, l’un<br />

dédié <strong>à</strong> otgar <strong>de</strong> Mayence 296 , l’autre <strong>à</strong> Héribald<br />

d’auxerre 297 . docte aux multiples facettes, raban fut également<br />

prolifique en hagiographie 298 . Il a composé un martyrologue,<br />

peu historique, mais innovant dans le genre littéraire<br />

299 . en son temps, la poésie était incontournable, tous<br />

ses vers sont composés en distiques et exceptionnellement<br />

en hexamètres 300 .<br />

Cette rapi<strong>de</strong> approche littéraire permet <strong>de</strong> mieux cerner la<br />

fécondité <strong>de</strong> l’archevêque raban Maur et le poids <strong>de</strong> ses<br />

(296) en 842, P. l., CXII, c. 1397-1424.<br />

(297) Vers 853, P. l., CX, c. 467-494.<br />

(298) notons que la : «Vita sanctae Mariae<br />

Magdalenae» dont on lui assure la paternité<br />

est contestée.<br />

(299) P. l., CX, c. 1121-1188.<br />

(300) Quand aux vingt-quatre hymnes et<br />

poèmes spirituels qui lui sont attribués soulignons<br />

que l’hymne pour la Pentecôte, «Veni<br />

creator spiritus», reste en usage encore<br />

aujourd’hui dans la liturgie catholique. (voir,<br />

e. dümmler, et M.G.H., Poetae II, p. 154-258,<br />

(1884) et H. lausberg, Der Hymnus : «Veni<br />

creator spiritus», opla<strong>de</strong>n (1979).


interventions dans les querelles théologiques. Son audience<br />

était immense, ses facultés lui permirent <strong>de</strong> rendre une telle<br />

production au fait qu’il fut l’un <strong>de</strong>s plus grands compilateurs<br />

<strong>de</strong> son époque. Il apparaît comme le lettré qui collecte une<br />

foule d’informations et, malgré la multiplicité <strong>de</strong>s sujets<br />

qu’il traita, ses efforts portèrent avant tout sur le clergé et sa<br />

formation : cela lui valut le titre <strong>de</strong> «praeceptor germaniae»<br />

et entretint le souvenir <strong>de</strong> son action pastorale, missionnaire<br />

et pédagogique. C’est ce <strong>de</strong>rnier élément qui pèsera <strong>de</strong> tout<br />

son poids contre l’enseignement <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

l’autre contradicteur majeur, qui jouera un rôle moteur<br />

dans la querelle <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination, fut Hincmar : fin procédurier,<br />

il a produit bon nombre <strong>de</strong> textes juridiques qui<br />

s’appuyaient sur une extraordinaire culture en matière <strong>de</strong><br />

littérature patristique.<br />

Parmi les attitu<strong>de</strong>s formelles d’Hincmar, celle qui nous<br />

semble avoir le plus <strong>de</strong> signification est le troisième texte<br />

adressé <strong>à</strong> egilon concernant les clercs ordonnés par ebon,<br />

son pré<strong>de</strong>cesseur. l’archevêque a constitué un véritable<br />

dossier et entend y déjouer un complot 301 . Pour lui, son collègue<br />

egilon doit avoir une connaissance parfaite <strong>de</strong> ses<br />

arguments 302 . Il joint <strong>à</strong> son dossier tous les courriers que le<br />

pape nicolas 1 er lui a envoyés ainsi que celui que le pontife<br />

a fait remettre au roi Charles. Mais l’archevêque <strong>de</strong><br />

reims n’y joint pas les divergences apparues entre les<br />

membres du syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> douzy sur l’affaire Wulfa<strong>de</strong>, par<br />

crainte que le pape n’en tire argument 303 . Ce cas révèle<br />

combien étroite est la marge entre le calculateur fourbe et<br />

le prélat intransigeant. C’est l<strong>à</strong> un Hincmar peu sympa-<br />

(301) M.G.H., 193.<br />

(302) Il justifie ses recommandations <strong>de</strong> la<br />

sorte : «S’il se trouvait dans la position <strong>de</strong> messager<br />

d’egilon, il aimerait recevoir <strong>de</strong>s instructions<br />

très précises…» M.G.H., III, p. 192.<br />

(303) l. levillain dans l’introduction <strong>de</strong> l’édi-<br />

IV. le conflit<br />

tion <strong>de</strong>s annales <strong>de</strong> Saint-Bertin par Félix Grat,<br />

ne ménage pas ses critiques envers l’archevêque<br />

rémois. en parlant <strong>de</strong> la «Gesta<br />

Hincmari», il écrit : «elle nous permet d’atteindre<br />

l’âme <strong>de</strong> son auteur, ambitieuse, autoritaire,<br />

vaniteuse et rancunière». p. XIV.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

135


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

136<br />

IV. le conflit<br />

thique, dont les défauts obscurcissent la logique et la fermeté<br />

<strong>de</strong> ses positions. Il manifeste ici, <strong>à</strong> plein, son tempérament<br />

politique : périssent les hommes pourvu que l’autorité, mère<br />

<strong>de</strong> tous les principes, soit sauve ! Stratège, il adresse <strong>à</strong><br />

Charles le Chauve son «De prae<strong>de</strong>stinatione <strong>de</strong>i et libero<br />

arbitrio» afin <strong>de</strong> savoir ainsi ce qu’il peut obtenir <strong>de</strong>s compétences<br />

<strong>de</strong> chaque évêque appelé <strong>à</strong> déci<strong>de</strong>r. Cela lui permet<br />

également d’évaluer parmi eux qui sera capable d’imaginer<br />

ce qui arriverait si un jour la doctrine <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> se<br />

répandait dans le domaine public. le rémois démontre<br />

que, s’il en était ainsi, toute responsabilité serait supprimée,<br />

et pour finir il s’en suivrait nécessairement chez l’individu,<br />

comme dans l’église et l’état une situation <strong>de</strong> résignation,<br />

c’est-<strong>à</strong>-dire, d’injustice et <strong>de</strong> violence au nom <strong>de</strong> dieu.<br />

l’archevêque apparaît ici dans toute sa stature d’homme<br />

d’état et comment ne pas être alors entendu <strong>de</strong> son<br />

monarque ? Sur bien d’autres détails, nous prendrons le<br />

prélat en défaut <strong>de</strong> rigueur. Ce fut le cas après le syno<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Valence en 855, où les adversaires d’Hincmar, le clergé<br />

lyonnais et ebon <strong>de</strong> Grenoble avaient nettement penché du<br />

côté <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. afin <strong>de</strong> contrecarrer les canons <strong>de</strong> ce<br />

syno<strong>de</strong>, Hincmar cite alors <strong>de</strong>s auteurs fictifs 304 combattant<br />

la double pré<strong>de</strong>stination, et <strong>à</strong> cette occasion affirme que<br />

cette doctrine était déj<strong>à</strong> qualifiée d’hérétique par les Pères.<br />

Il va jusqu’<strong>à</strong> dire, pour se justifier, que les évêques réunis<br />

<strong>à</strong> Quierzy avaient voulu signifier que le Christ, par sa mort,<br />

avait pu vi<strong>de</strong>r l’enfer 305 . Il procè<strong>de</strong> par restrictions successives<br />

306 : «dieu a voulu sauver tous les hommes<br />

mais ”seuls ceux qui se lient <strong>à</strong> la ré<strong>de</strong>mption et au baptême<br />

sont ”sauvables». Ce n’est donc pas un raisonnement<br />

sans failles, il établit une généralité. Pour Hincmar, dieu<br />

(304) F. Brunhölzl : Histoire <strong>de</strong> la littérature<br />

latine, op. cité, p. 201, l. 18.<br />

(305) P. l., CXXV, 276.<br />

(306) P. l., CXXV, 259, sq.<br />

(307) «Qui non credit iam indicatus est». P. l.,<br />

CXXV, 269.<br />

(308) J. <strong>de</strong>visse, : Hincmar, archevêque <strong>de</strong><br />

Reims, éd. droz, t. 1, p. 265.


veut sauver tous les hommes sans exception, <strong>de</strong> tous les<br />

lieux, <strong>de</strong> toute race, <strong>de</strong> toute époque, mais il n’affirme pas<br />

moins que le cas <strong>de</strong>s hérétiques, <strong>de</strong>s païens et <strong>de</strong>s juifs 307 ne<br />

le préoccupe pas. Il faut être dans l’église pour être sauvé.<br />

le rémois dans son passage sur le «De uocatione gentium»<br />

308 voyait plus loin et posait le problème <strong>de</strong> la valeur<br />

<strong>de</strong>s actes <strong>de</strong>s païens <strong>de</strong>vant dieu. Sur le fond rien ici ne<br />

sépare Hincmar <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. l’argumentaire hincmarien<br />

paraît très spécieux, mais est-ce vraiment surprenant pour<br />

une question si vaste, qui comportait au IX e siècle bien <strong>de</strong>s<br />

risques d’erreurs ? <strong>Gottschalk</strong> avait senti intuitivement<br />

toute l’irréductibilité du temps et <strong>de</strong> l’espace. Sa logique,<br />

appuyée sur un augustinisme absolu et rigi<strong>de</strong>, explique ses<br />

prises <strong>de</strong> positions initiales et, dégagé <strong>de</strong> toute responsabilité<br />

sacerdotale, il pouvait, contrairement <strong>à</strong> son archevêque,<br />

considérer la liberté <strong>de</strong> choix <strong>de</strong>s hommes comme parfaitement<br />

négligeable. Sa psychologie est l<strong>à</strong>, sur plus d’un<br />

point, comparable <strong>à</strong> celle <strong>de</strong> saint augustin. n’a-t-il pas pu<br />

se sentir contraint par la grâce ?<br />

Malgré tout, reims, avec Hincmar, <strong>de</strong>vient la métropole la<br />

plus influente <strong>de</strong> l’empire franc <strong>de</strong> l’ouest. les écrits politiques<br />

occupent une place centrale dans l’œuvre littéraire<br />

d’Hincmar. Il tient les annales royales <strong>de</strong> 861 <strong>à</strong> 882 309 , il<br />

<strong>de</strong>vient le théoricien du pouvoir royal dans son «De ordine<br />

palatii» ; se fondant sur l’organisation du palais <strong>de</strong><br />

Charlemagne, il dresse un tableau <strong>de</strong> l’ancienne conception<br />

carolingienne du gouvernement et <strong>de</strong>vient certainement<br />

malgré lui le premier conseiller <strong>à</strong> la cour <strong>de</strong> Charles<br />

le Chauve. avec son mémoire «De iure metropolitarum» 310 ,<br />

il remonte, comme d’habitu<strong>de</strong>, au déluge afin <strong>de</strong> prouver<br />

qu’aucun pouvoir, fût-il royal, donc <strong>de</strong> droit divin, ne<br />

(309) Annales <strong>de</strong> Saint-Bertin, F. Grat, J. Vielliard<br />

et S. Clemencet, Paris (1964).<br />

(310) T. Gross et r. Schieffer traduction du<br />

manuscrit <strong>de</strong> Bâle, bibliothèque universitaire,<br />

o, II, 29, Hannovre (1980).<br />

IV. le conflit<br />

(311) 872/882.<br />

(312) Le Palanquin <strong>de</strong> Salomon in Zahlenzymbolik<br />

bei Hraben, bei Hincmar, par B. Täeger,<br />

Munich (1970).<br />

(313) P. l., CXXV et CXXVI.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

137


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

138<br />

IV. le conflit<br />

<strong>de</strong>vait porter atteinte <strong>à</strong> celui <strong>de</strong>s archevêques et que<br />

l’eglise franque dans sa constitution juridique ne laissait<br />

même pas une place au vicariat apostolique ; ce que cherchera<br />

pourtant <strong>à</strong> imposer le pape Jean VIII 311 . Hincmar fut<br />

également prolifique en d’autres domaines. Son premier<br />

ouvrage, le «Ferculum salomonis» 312 , partiellement conservé,<br />

est un cycle <strong>de</strong> poèmes allégoriques <strong>de</strong> contenu dogmatique,<br />

ce qui semble logique au regard du parcours intellectuel<br />

<strong>de</strong> ce prélat. l’ensemble est évalué <strong>à</strong> 446 vers, pour<br />

la plupart composés d’hexamètres et <strong>de</strong> distiques. au soir<br />

<strong>de</strong> son long épiscopat, Hincmar composa une : «Vita sancti<br />

remigii» 313 . C’est dans un esprit totalement hagiographique<br />

que l’archevêque rédige cette vie <strong>de</strong> saint rémi ;<br />

l’intention édifiante est présente du début <strong>à</strong> la fin et le merveilleux<br />

y tient une gran<strong>de</strong> place. l’œuvre d’Hincmar<br />

démontre une culture vivante et engagée, ses choix parmi<br />

les autorités ne le sont pas moins et tout prend chez lui l’allure<br />

du plaidoyer. Ses arguments sont soigneusement triés<br />

et dialectiquement montés. dominateur froid, implacable,<br />

il ne reculera que pour mieux écraser ceux qui ont fait obstacle<br />

<strong>à</strong> ses plans.<br />

Charles le Chauve, souhaitant purger les désordres nés <strong>de</strong>s<br />

querelles théologiques, sollicita Jean Scot erigène. Ce <strong>de</strong>rnier<br />

enseignait <strong>à</strong> la cour et il eut comme élèves Wiebald et<br />

elie, qui <strong>de</strong>vinrent plus tard respectivement évêques<br />

d’auxerre et d’angoulême. Jean Scot fit partie du tout<br />

petit nombre d’occi<strong>de</strong>ntaux qui connaissaient le grec. C’est<br />

dans le cadre <strong>de</strong> sa propre enquête théologique que le roi<br />

Charles fit appel <strong>à</strong> lui en 851 et <strong>de</strong>manda <strong>à</strong> l’Irlandais,<br />

comme <strong>à</strong> Hincmar et <strong>à</strong> Pardule <strong>de</strong> laon, <strong>de</strong> réfuter la doctrine<br />

<strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination exposée par <strong>Gottschalk</strong>. C’est l<strong>à</strong><br />

(314) G. Ma<strong>de</strong>c, C.C.M. 50, Nouvelle édition critique,<br />

Turhout (1978) et P. l., CXXII, 365-440.<br />

(315) l. Traube, M.G.H., Poetae III, p. 518-553.<br />

(316) en 809 il fut élu archevêque <strong>de</strong> Trèves,<br />

puis administrateur <strong>de</strong> lyon en 835. Il mourut<br />

archevêque <strong>de</strong> Metz en 850.


un indice <strong>de</strong> la haute considération dont jouissait Jean Scot<br />

au sein <strong>de</strong> l’aristocratie franque. Il répondit aux espoirs<br />

fondés sur lui, dans la mesure où il repoussa catégoriquement<br />

les vues <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. dans son «De diuina prae<strong>de</strong>stinatione»<br />

314 , il utilise une métho<strong>de</strong> tout <strong>à</strong> fait remarquable<br />

; réminiscences et citations ne se rencontrent guère.<br />

Jean Scot, homme <strong>de</strong> culture, remet accessible au mon<strong>de</strong><br />

latin les «Ambigua in gregorium nazianzenum» et les<br />

«Areopagitica» <strong>de</strong> Maxime. Il s’est aussi occupé <strong>de</strong> poésie<br />

et nombre <strong>de</strong> ses vers sont adressés <strong>à</strong> Charles le Chauve 315 .<br />

Jean Scot erigène, comme raban Maur et Hincmar, se<br />

consacrera <strong>à</strong> détruire les thèses gottschalkiennes. d’autres<br />

intellectuels brillants apporteront leur contribution. Parmi<br />

ceux-ci, retenons amalaire <strong>de</strong> Metz 316 qui fut en relation<br />

avec alcuin et consacra l’essentiel <strong>de</strong> ses écrits <strong>à</strong> la liturgie.<br />

Son ouvrage majeur le «Liber officialis» 317 , fut dédié <strong>à</strong><br />

louis le Pieux, mais le talent <strong>de</strong> Florus <strong>de</strong> lyon parvint <strong>à</strong><br />

influencer les évêques francs au point qu’ils condamnèrent<br />

son ouvrage au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quierzy <strong>de</strong> 838. Cependant le<br />

«Liber officialis», appelé également «De ecclesiasticis<br />

officiis», sera largement diffusé et son influence, sur<br />

nombre <strong>de</strong> sujets sera déterminante au <strong>de</strong>l<strong>à</strong> du Moyenage.<br />

Mentionnons également le notaire <strong>de</strong> Charles le<br />

Chauve, enée, qui s’engagea pleinement dans la confrontation<br />

avec <strong>Gottschalk</strong>. en serviteur zélé, il s’acquitta <strong>de</strong>s<br />

basses œuvres. C’est lui qui signa les canons <strong>de</strong> Quierzy<br />

condamnant sans appel ceux qui avaient été pris au syno<strong>de</strong><br />

<strong>de</strong> Valence. Il se comporta d’une façon méprisante et hostile<br />

envers <strong>Gottschalk</strong> 318 . Il fut mêlé <strong>à</strong> l’intrigue 319 qui per-<br />

(317) r. W. Pfaff : Recherches <strong>de</strong> théologie<br />

ancienne et médiévale, éd. <strong>de</strong> l’abréviatio n° 47<br />

(1980) et n° 48 (1981).<br />

(318) «…dicebant mihi Bauo et Haldoinus<br />

quod mise <strong>de</strong>ceret latrans Aeneas quod dialecta<br />

faceret in libris beati Augustini quo illud <strong>de</strong><br />

IV. le conflit<br />

prae<strong>de</strong>stinatione reproborum ad mortem a me<br />

non posset intellegi».<br />

(319) J. <strong>de</strong>visse, Hincmar, t. II, p. 773/775.<br />

(320) Il fut condamné et déposé par l’archevêque,<br />

son oncle, Charles le Chauve lui fit crever<br />

les yeux en 875.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

140<br />

IV. le conflit<br />

mit <strong>à</strong> Hincmar <strong>de</strong> reims <strong>de</strong> confondre son neveu Hincmar<br />

<strong>de</strong> laon 320 . enée, pour ses loyaux services et par la volonté<br />

du roi, reçut l’évêché <strong>de</strong> Paris en 858.<br />

Conclusion IV<br />

Tensions et contradictions furent naturellement l’essence<br />

même <strong>de</strong> ce conflit. <strong>Gottschalk</strong>, dans ce climat, n’a pas<br />

craint jusqu’<strong>à</strong> sa mort d’affronter les plus hautes autorités<br />

spirituelles <strong>de</strong> son temps. les volontés laïques et religieuses<br />

<strong>de</strong> le réduire et la qualité intellectuelle <strong>de</strong> ses<br />

adversaires n’y feront rien.<br />

la contradiction qu’il porta jusqu’<strong>à</strong> la cour <strong>de</strong>s princes<br />

participa <strong>à</strong> n’en pas douter au mouvement <strong>de</strong> renouveau <strong>de</strong><br />

l’intelligentsia initié par Charlemagne.<br />

Cet esprit carolingien parcourut un vaste espace, allant <strong>de</strong><br />

l’ebre et <strong>de</strong> la côte atlantique jusqu’<strong>à</strong> l’elbe, en passant par<br />

la côte adriatique, et aux frontières <strong>de</strong> la norique, puis <strong>de</strong><br />

la mer du nord jusqu’aux marches méridionales du royaume<br />

lombard. Ce mouvement embrassa la gran<strong>de</strong> majorité<br />

<strong>de</strong>s peuples romains et germaniques. Cette culture, totalement<br />

chrétienne et d’orientation cléricale, n’a laissé que<br />

peu <strong>de</strong> place aux laïcs.<br />

les héritiers <strong>de</strong> Charlemagne continuèrent <strong>à</strong> s’entourer <strong>de</strong><br />

savants, <strong>de</strong> poètes, d’intellectuels, <strong>de</strong> religieux et cherchèrent<br />

en eux conseils, informations dont ils avaient besoin.<br />

la contradiction parmi tous ces hommes était inéluctable,<br />

et il fallut la dominer. Cependant le grand débat sur la pré<strong>de</strong>stination<br />

ne pénétra pas en profon<strong>de</strong>ur la société carolingienne,<br />

il <strong>de</strong>meura celui d’une élite. après louis le<br />

Pieux, les écoles du palais eurent <strong>de</strong> plus en plus <strong>de</strong> mal <strong>à</strong><br />

(321) Trois rois y participaient : Charles le<br />

Chauve, lothaire II <strong>de</strong> lorraine et Charles <strong>de</strong><br />

Provence. les signatures <strong>de</strong> cinquante-sept<br />

évêques, dont douze métropolitains… ardvic<br />

<strong>de</strong> Besançon, Wénilon <strong>de</strong> Sens, Hincmar <strong>de</strong><br />

reims, ado <strong>de</strong> Vienne, Thieutgaud <strong>de</strong> Trèves,<br />

Günther <strong>de</strong> Cologne, rodulf <strong>de</strong> Bourges,<br />

Frotar <strong>de</strong> Bor<strong>de</strong>aux, Fredold <strong>de</strong> narbonne,<br />

remy <strong>de</strong> lyon et Wénilon <strong>de</strong> rouen validèrent<br />

les canons adoptés. Cf. J. Hefele, Histoire<br />

<strong>de</strong>s conciles, p. 227-228 (1911).


s’affirmer <strong>à</strong> côté d’institutions similaires comme celles <strong>de</strong>s<br />

monastères <strong>de</strong> reichenau, Corbie, Saint-Gall, Tours, <strong>Fulda</strong><br />

ou Saint-riquier…<br />

le choix d’une voie moyenne au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> douzy en<br />

octobre 860 321 mit fin <strong>à</strong> la querelle. la «prae<strong>de</strong>stinatio ad<br />

mortem» n’est nullement mentionnée. en refusant l’abandon<br />

<strong>de</strong> l’individu <strong>à</strong> un <strong>de</strong>stin tracé en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> lui sans sa<br />

participation, Hincmar ne posa pas seulement le problème<br />

<strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> l’homme et <strong>de</strong> la grâce, mais également<br />

l’abandon <strong>de</strong> sa responsabilité sociale. Pour lui, le fatalisme<br />

détruit tout ressort et nourrit la misère et cette misère, la<br />

révolte. Il y a l<strong>à</strong>, en matière d’histoire sociale, <strong>de</strong> fécon<strong>de</strong>s<br />

observations. douzy sonne le glas <strong>de</strong> la controverse pré<strong>de</strong>stinatienne.<br />

Pour <strong>Gottschalk</strong>, la lutte fut inégale, il<br />

n’avait que sa plume et auprès <strong>de</strong> lui une poignée d’amis<br />

impuissants 322 . Ceux qui <strong>de</strong> loin prenaient sa défense se<br />

préoccupaient davantage <strong>de</strong> la doctrine que <strong>de</strong> la rigueur<br />

<strong>de</strong> son châtiment. le pape, lui-même informé, même tardivement<br />

n’avait pas souhaité affronter le puissant métropolitain<br />

rémois. d’autres prélats hésitaient car on leur avait<br />

présenté les écrits <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> en accentuant ses formules<br />

et en faussant ainsi leurs portées véritables. Pour<br />

bon nombre <strong>de</strong> religieux, le zèle <strong>de</strong> sa foi s’est confondu<br />

avec la défense <strong>de</strong> sa propre cause, sa manière <strong>de</strong> voir et<br />

ses ressentiments personnels. les différents protagonistes<br />

ont perdu le sens <strong>de</strong> l’objectivité : ne lisaient plus les textes<br />

avec sang-froid, ils les sollicitaient et parfois s’aveuglaient<br />

au point <strong>de</strong> perdre conscience du mensonge et <strong>de</strong> la calom-<br />

(322) on peut augurer que Walafrid Strabon,<br />

précepteur très écouté du roi Charles et grand<br />

ami <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, sans sa noya<strong>de</strong> dans la<br />

IV. le conflit<br />

loire en 849 aurait pu influencer d’une manière<br />

moins tragique le cours <strong>de</strong>s choses.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

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une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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une dissi<strong>de</strong>nce<br />

142<br />

nie. le cas <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> et son histoire, sous <strong>de</strong>s formes<br />

diverses, se renouvellera au cours <strong>de</strong>s siècles. Une question<br />

<strong>de</strong>meure sans réponse. Pourquoi ceux qui prirent sa<br />

défense ne furent-ils point rejetés <strong>de</strong> l’église ?


C’est <strong>à</strong> Quierzy <strong>de</strong>vant le roi Charles le Chauve, les<br />

évêques <strong>de</strong> Gaules, <strong>de</strong> Belgique et <strong>de</strong> reims, au<br />

printemps 849, peu avant Pâques, que comparut<br />

<strong>Gottschalk</strong>. l’assemblée qui <strong>de</strong>vait le juger comptait un<br />

grand nombre <strong>de</strong> moines et <strong>de</strong> prélats 323 . l’archevêque <strong>de</strong><br />

reims savait que, durant la vacance <strong>de</strong> son siège épiscopal,<br />

son chorévêque richaud avait accepté d’ordonner<br />

<strong>Gottschalk</strong>. Pour Hincmar, cette ordination était douteuse<br />

et <strong>de</strong>vait être rompue. en fin stratège, il confia, dès février<br />

849, l’organisation du concile <strong>de</strong> Quierzy <strong>à</strong> richaud et<br />

ainsi fit en sorte que celui qui avait établi illégalement<br />

<strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> la prêtrise instrumente sa dégradation.<br />

Comme l’année précé<strong>de</strong>nte <strong>à</strong> Mayence, <strong>Gottschalk</strong> se montra<br />

inflexible dans ses convictions et son refus <strong>de</strong> rétraction<br />

et son opiniâtreté lui valurent la sentence suivante :<br />

«Frère Gotescalc, sache que par le jugement <strong>de</strong> l’esprit-<br />

“Saint dont la grâce nous a fait don <strong>de</strong> l’office sacerdotal par<br />

“la vertu du sang <strong>de</strong> notre Seigneur Jésus-Christ, le sacrosaint<br />

“office du mystère (ministère ?) sacerdotal que tu as indûment<br />

(323) Wénilon archevêque <strong>de</strong> Sens, Hincmar<br />

<strong>de</strong> reims, Folcoin <strong>de</strong> Thérouanne, Ten<strong>de</strong>ric<br />

<strong>de</strong> Cambrai, rotha<strong>de</strong> <strong>de</strong> Soissons, ragenar<br />

d’amiens, Immo <strong>de</strong> noyon, erpain <strong>de</strong> Senlis,<br />

loup <strong>de</strong> Châlons, Yrmenfried <strong>de</strong> Beauvais,<br />

Pardule <strong>de</strong> laon, Teutbald <strong>de</strong> langres pour la<br />

province <strong>de</strong> lyon ; Gernbrins <strong>de</strong> rennes pour<br />

la province <strong>de</strong> Tours ; richaud, chorévêque<br />

<strong>de</strong> reims et Witans, chorévêque <strong>de</strong> Cambrai,<br />

V. la condamnation<br />

V. La condamnat i on<br />

Wénilon futur archevêque <strong>de</strong> rouen, enée,<br />

notaire du palais, futur évêque <strong>de</strong> Paris, Isaac<br />

diacre <strong>de</strong> Pardule, futur évêque <strong>de</strong> langres .<br />

assistaient également <strong>à</strong> l’assemblée les abbés<br />

ratbert <strong>de</strong> Corbie, Bavon d’orbais et<br />

Halduin d’<strong>Hautvillers</strong> et bien d’autres seigneurs,<br />

prêtres et diacres comme Wulfad,<br />

économe <strong>de</strong> la métropole rémoise, et l’archidiacre<br />

rodoald.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

143


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

144<br />

V. la condamnation<br />

“usurpé et dont jusqu’<strong>à</strong> maintenant tu n’as pas craint d’abuser<br />

“en toutes tes mœurs et actions mauvaises et tes doctrines<br />

“perverses , t’est retiré, si seulement tu l’as reçu et, pour<br />

“que tu n’oses plus l’exercer, entièrement interdit.<br />

“en outre, puisqu’au mépris <strong>de</strong>s lois ecclésiastiques tu as<br />

“osé, contrairement au propos et au nom d’un moine, troubler<br />

“les affaires ecclésiastiques et civiles, nous décrétons par<br />

“autorité épiscopale que tu sois sévèrement fouetté et remis<br />

“en prison selon les règles ecclésiastiques ; et pour qu’<strong>à</strong><br />

“l’avenir tu n’oses pas t’arroger l’office d’enseigner, par la<br />

“vertu du Verbe éternel nous imposons <strong>à</strong> ta bouche un<br />

“silence perpétuel» 324 .<br />

nous avons retenu la traduction la plus récente, celle élaborée<br />

par le philosophe Jean Jolivet, qui apporte un éclairage<br />

nouveau sur la condamnation <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. d’autres<br />

traductions existent notamment celle <strong>de</strong> l’abbé Manceaux<br />

où le vouvoiement et les ajouts éclairent le parti pris <strong>de</strong> cet<br />

historien du XIX e siècle 325 . la traduction <strong>de</strong> C. J. Hefele<br />

(324) Frater Gothescalc, sacrosanctum sacerdotalis<br />

ministerii officium quod irregulariter<br />

usurpasti, et in cunctis moribus, ac prauis actibus,<br />

atque peruersis doctrinis eo hactenus<br />

abuti non pertimuisti, iudicio spiritus sancti,<br />

cuius gratia munus est sacerdotale officium per<br />

uirtutem sanguinis Domini nostri Iesu Christi<br />

noueris tibi esse, si quomodo suscepisti, sublatum,<br />

et ne ulterius eo fungi praesumas penitus<br />

interdictum. Insuper quia et ecclesiastica et<br />

ciuilia negotia contra propositum et nomen<br />

monachi conturbare contemnens iura ecclesiastica<br />

praesumpsisti, durissimis uerberibus<br />

te castigari, et secundum ecclesiasticas regulas<br />

ergastulo retrudi auctoritate episcopali <strong>de</strong>cernimus<br />

; et ut <strong>de</strong> cetero doctrinale tibi officium<br />

usurpare non praesumas, perpetuum silentium<br />

ori tuo uirtute aeterni uerbi imponimus.<br />

Copie <strong>de</strong> la sentence découverte par nicolas<br />

Camuzat, chanoine <strong>de</strong> Troyes, et communiqué<br />

au père Jacques Sirmond, jésuite. extrait du<br />

«Concilium carisiacum» t. XXI <strong>de</strong>s conciles<br />

généraux p. 604 éd. du louvre (1680).<br />

(325) Frère Gothescalc, l’office sacré du<br />

ministère sacerdotal, qu’irrégulièrement vous<br />

avez usurpé, que par <strong>de</strong>s mœurs entachées<br />

d’actes criminels, que par une doctrine perverse<br />

vous n’avez pas craint <strong>de</strong> profaner ; si vous<br />

l’avez reçu en quelque manière, aujourd’hui,<br />

par la vertu du sang <strong>de</strong> notre Seigneur Jésus-<br />

Christ, par le jugement <strong>de</strong> l’esprit-Saint, dont<br />

la grâce confère l’honneur du sacerdoce,<br />

sachez qu’il vous est ôté, que toute fonction<br />

vous en est <strong>de</strong> ce jour interdite. <strong>de</strong> plus, et<br />

parce que, foulant aux pieds le nom et les<br />

<strong>de</strong>voirs d’un religieux, vous avez, au mépris<br />

<strong>de</strong>s lois ecclésiastiques, porté l’audace jusqu’<strong>à</strong><br />

troubler l’eglise et l’etat, nous avons ordonné,<br />

en vertu <strong>de</strong> l’autorité épiscopale, que vous<br />

soyez sévèrement frappé <strong>de</strong> verges et jeté en<br />

prison, comme le veulent les règlements ecclésiastiques,<br />

et afin que désormais vous n’ayez<br />

plus l’insolence d’usurper le ministère <strong>de</strong> la<br />

parole évangélique, par la vertu du Verbe éternel,<br />

nous imposons <strong>à</strong> votre bouche un perpétuel<br />

silence.<br />

Histoire <strong>de</strong> l’abbaye d’<strong>Hautvillers</strong> p. 245.<br />

abbé Manceaux


prend plus <strong>de</strong> recul, mais l’agrémente <strong>de</strong> commentaires<br />

mettant en cause l’authenticité <strong>de</strong> la sentence 326 . Quelle<br />

qu’ait été la date <strong>de</strong> rédaction <strong>de</strong> ce jugement, plusieurs<br />

faits <strong>de</strong>meurent intangibles :<br />

- le procès <strong>de</strong> Mayence en 829 délia <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong> ses vœux<br />

malgré les vives protestations <strong>de</strong> son abbé raban Maur.<br />

- la première condamnation <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Mayence en 848 <strong>de</strong>vant le roi louis le Germanique fut très<br />

sévère. les annales <strong>de</strong> Xanten nous informent qu’après<br />

avoir été battu avec plusieurs <strong>de</strong> ses complices dans la doctrine<br />

sur la pré<strong>de</strong>stination, le moine vagabond fut avec eux<br />

envoyé dans les Gaules. les annales <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>de</strong> 848 sont<br />

plus nuancées : «<strong>Gottschalk</strong>, que l’on disait hérétique, fut<br />

confondu <strong>de</strong> manière raisonnable, selon la plupart <strong>de</strong>s gens<br />

(326) «Frère Gotescalc, sache que la très haute<br />

dignité du ministère sacerdotal, que tu t’es<br />

arrogée au mépris <strong>de</strong>s règles et dont tu as<br />

abusé par tes mœurs, tes mauvaises actions et<br />

tes doctrines corrompues, t’est maintenant<br />

enlevée <strong>de</strong> par la sentence du Saint-esprit,<br />

dont provient, comme un pur présent, la dignité<br />

sacerdotale, et par la vertu du sang du<br />

Christ, si tant est que tu aies reçu cette dignité,<br />

et, quoi qu’il en soit, tu ne <strong>de</strong>vras en aucune<br />

manière te permettre d’en exercer <strong>de</strong> nouveau<br />

les fonctions. en outre, comme au mépris <strong>de</strong>s<br />

lois <strong>de</strong> l’église, tu cherches <strong>à</strong> jeter le désordre<br />

dans l’église et dans l’état, sans tenir plus <strong>de</strong><br />

compte <strong>de</strong> tes vœux et <strong>de</strong> ton état <strong>de</strong> moine,<br />

nous avons décidé, en vertu <strong>de</strong> l’autorité épiscopale,<br />

que tu serais très durement battu et<br />

ensuite, conformément aux règles <strong>de</strong> l’église,<br />

mis en prison. enfin, pour que tu ne puisses<br />

plus te permettre d’enseigner, nous te condamnons,<br />

par la vertu du Verbe éternel, <strong>à</strong> gar<strong>de</strong>r un<br />

éternel silence.»<br />

Jusqu’ici personne, <strong>à</strong> notre connaissance, n’a<br />

mis en doute l’authenticité <strong>de</strong> cette sentence ;<br />

il nous semble cependant qu’il y aurait <strong>de</strong><br />

bonnes raisons pour le faire. n’est-il pas surprenant<br />

que nul n’ait connu l’existence <strong>de</strong><br />

cette pièce avant que le P. Sirmond la découvrît,<br />

vers l’an 1600, dans un ancien manuscrit<br />

<strong>de</strong> nicolas Camuzat ? on n’en a jamais trouvé<br />

V. la condamnation<br />

un second exemplaire. a cette première observation,<br />

digne <strong>de</strong> remarque, vont se joindre <strong>de</strong>s<br />

arguments plus importants.<br />

a) Hincmar dit que les abbés et les moines présents<br />

avaient ordonné la peine du fouet, tandis<br />

que les évêques avaient simplement prononcé la<br />

damnatio ; or dans la sentence, nous voyons la<br />

flagellatio ordonnée par les évêques. Ce qui prouve<br />

qu’Hincmar dit vrai, c’est la manière dont<br />

remy <strong>de</strong> lyon a blâmé toute cette procédure.<br />

b) la sentence motive doublement la condamnation<br />

<strong>de</strong> Gotescalc : c’est d’abord la prêtrise<br />

reçue d’une manière illégale, ensuite le<br />

désordre introduit dans les « negotia ciuilia et<br />

ecclesiastica ». Pour la première faute,<br />

Gotescalc est, d’après la sentence, dégradé <strong>de</strong><br />

la prêtrise ; pour la secon<strong>de</strong>, il est fouetté.<br />

Mais ne voit-on pas que la sentence est muette<br />

sur le motif principal, l’affaire du pré<strong>de</strong>stinatianisme<br />

? a peine y fait-elle une vague allusion,<br />

quand elle dit que Gotescalc a mésusé <strong>de</strong><br />

son sacerdoce par sa mauvaise conduite et ses<br />

doctrines corrompues.<br />

c) la sentence présente comme douteuse l’ordination<br />

<strong>de</strong> Gotescalc. or, non seulement ce<br />

doute est en opposition avec le dogme, mais il<br />

est en contradiciton avec l’opinion d’Hincmar,<br />

qui croyait <strong>à</strong> la validité <strong>de</strong> cette ordination.<br />

d) le style ampoulé <strong>de</strong> cette sentence doit<br />

faire naître <strong>de</strong>s doutes sur son (suite page 146)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

145


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

146<br />

V. la condamnation<br />

présents, par l’archevêque <strong>de</strong> Mayence, raban Maur, et <strong>de</strong><br />

nombreux autres évêques, ce qui ne l’empêcha pas <strong>de</strong> persévérer<br />

par la suite dans sa vision <strong>de</strong>s choses 327 .<br />

après 849 et durant toute sa captivité, nous avons constaté<br />

qu’une partie non négligeable du clergé, plus particulièrement<br />

au sud du royaume <strong>de</strong> Charles, s’indigna <strong>de</strong> la procédure<br />

employée <strong>à</strong> l’encontre <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

Mais, comme Hefele, examinons la sentence tant sur le<br />

fond que sur la forme.<br />

l’archaïsme <strong>de</strong> certains termes rédactionnels milite pour<br />

son authenticité. dans la forme, le mot «mysterii» renvoie<br />

<strong>à</strong> la cérémonie religieuse et non pas <strong>à</strong> l’agent du sacerdoce.<br />

Quant au mot «ergastulo», «ergastulum» signifie «prison<br />

pour esclaves», cet emploi est fort usité sous les carolingiens,<br />

pério<strong>de</strong> où existaient encore beaucoup d’esclaves.<br />

Ce n’est que bien plus tard, que le mot «prisum» dérivé du<br />

latin populaire «prensio» remplaça «ergastulum».<br />

authenticité ; dans quelle autre sentence ecclésiastique<br />

voit-on un coupable dégradé <strong>de</strong> la<br />

prêtrise « per virtutem sanguinis Domini nostri<br />

Iesu Christi » ?<br />

le passage : «Insuper quia et ecclesiastica et<br />

ciuilia negotia contra propositum et nomen<br />

monachi conturbare… praesumpsisti », est<br />

emprunté <strong>à</strong> la lettre d’Hincmar <strong>à</strong> amolo <strong>de</strong><br />

lyon, mais on lui donne ici un autre sens.<br />

Hincmar veut dire que les erreurs <strong>de</strong> Gotescalc<br />

avaient occasionné <strong>de</strong>s désordres dans l’eglise<br />

et dans l’etat, soit parce que ses partisans ne<br />

s’appliquaient plus <strong>à</strong> aucune bonne œuvre et<br />

ne s’abstenaient d’aucun péché, soit parce que<br />

lui-même n’avait pas voulu renoncer <strong>à</strong> ses<br />

erreurs périlleuses pour l’eglise et pour l’etat ;<br />

c’est pourquoi il avait été condamné par les<br />

évêques. le rédacteur <strong>de</strong> la sentence a mal<br />

compris ce passage d’Hincmar ; il a cru que<br />

Gotescalc avait été puni parce que, contrairement<br />

<strong>à</strong> ses vœux monastiques, il s’était mêlé<br />

aux affaires du mon<strong>de</strong> et <strong>à</strong> celles du clergé<br />

séculier, ce qui, on le sait, n’a jamais été le cas<br />

<strong>de</strong> Gotescalc.<br />

f) C’est par suite d’un autre malentendu que<br />

l’auteur <strong>de</strong> la sentence fait prononcer contre<br />

Gotescalc, par les évêques, la peine <strong>de</strong> la « flagellatio<br />

». Il avait lu dans Hincmar : « Ut<br />

improbus uirgis caesus, sicut <strong>de</strong>creuerant<br />

Germaniae prouinciarum episcopi, ne aliis<br />

noceret… ergastulo est retrusus ». Il a cru que<br />

les mots « sicut <strong>de</strong>creuerant Germaniae<br />

prouinciarum episcopi » se rapportaient <strong>à</strong><br />

«uirgis caesus», c’est-<strong>à</strong>-dire que la « flagellatio<br />

» avait été prescrite par les évêques ; en<br />

réalité Hincmar veut dire que Gotescalc a été<br />

fouetté et, afin qu’il ne pût nuire, emprisonné,<br />

selon que les évêques <strong>de</strong> la Germanie, réunis <strong>à</strong><br />

Mayence, l’avaient jugé nécessaire. Hincmar a<br />

en vue ces mots <strong>de</strong> la lettre <strong>de</strong> raban Maur :<br />

«Decreuimus eam mittere ad uos, quatenus<br />

eum recludatis in uestra parochia ».<br />

nous voyons donc dans la sentence en question<br />

l’œuvre d’un faussaire assez récent et peu<br />

instruit <strong>de</strong> l’affaire <strong>de</strong> Gotescalc.<br />

Histoire <strong>de</strong>s conciles. livre XXII p. 152, 153.<br />

(327) « Gotescalcus, qui dicebatur hereticus,<br />

Mogontiaci a Rabano archiepiscopo multisque<br />

aliis episcopis rationabiliter, ut plurimis<br />

uisum fuit, conuictus est, licet ille postmodum<br />

in sua perdurauit sententia. »<br />

Pertz, M.G.H., III, p. 229.


Pourquoi, comme le suppose Hefele, la rédaction du faussaire<br />

est-elle récente (sic), si le texte emploie une terminologie<br />

en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> son temps ?<br />

le rédacteur <strong>de</strong> la sentence ne peut être <strong>à</strong> nos yeux qu’un<br />

contemporain <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> car sur le fond il a bien relaté<br />

les enjeux du procès. Si le seul aspect <strong>de</strong> la condamnation<br />

eût été religieux, il n’aurait pas pris soin <strong>de</strong> faire figurer le<br />

terme «ciuilia». Il s’agissait bien pour lui afin <strong>de</strong> refléter<br />

l’opinion <strong>de</strong>s procureurs, <strong>de</strong> dénoncer également une attitu<strong>de</strong>,<br />

une action et un discours subversifs pour le pouvoir<br />

politique. Hefele oublie, afin d’accréditer sa thèse, que<br />

<strong>Gottschalk</strong> se mêlait <strong>de</strong>s affaires du mon<strong>de</strong>, ne serait-ce<br />

qu’en opposant la coutume saxonne aux ambitions religieuses<br />

<strong>de</strong> raban. enfin Hefele n’avait pas eu connaissance<br />

<strong>de</strong>s écrits <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> retrouvés par dom Morin en<br />

1939, où l’on apprend combien le moine gyrovague était<br />

introduit <strong>à</strong> la cour du comte eberhard du Frioul et du prince<br />

croate Trpimir.<br />

dans les attendus <strong>de</strong> ce jugement, apparaissent clairement<br />

les risques encourus par le pouvoir séculier et ecclésiastique.<br />

la réprobation et la condamnation sans pitié étaient<br />

déj<strong>à</strong> inscrites <strong>de</strong>puis l’assemblée <strong>de</strong> Coulaines en 843.<br />

Charles le Chauve, <strong>à</strong> peine le partage <strong>de</strong> Verdun a-t-il mis<br />

une fin provisoire <strong>à</strong> la guerre fratrici<strong>de</strong>, se trouve confronté<br />

<strong>à</strong> <strong>de</strong> nombreuses difficultés. <strong>de</strong> son propre aveu, le<br />

jeune souverain mesure les problèmes qui l’atten<strong>de</strong>nt, et<br />

dans son discours il annonce : «Comme il arrive que les<br />

“tourbillons <strong>de</strong>s nuages amoncelés laissent après eux,<br />

“quand le temps s’avance, <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> leur passage, <strong>de</strong><br />

“même façon subsistent encore, avouons-le, en nous-mêmes,<br />

“chez les hommes d’église et aussi chez ceux qui se <strong>de</strong>vaient<br />

“<strong>à</strong> notre état, <strong>de</strong>s causes <strong>de</strong> dissension» 328 . dans ce passage<br />

(328) Processus uero temporis, ut solet<br />

con<strong>de</strong>nsos aeris turbines nubium in pertranserendo<br />

remanere uestigia, restiterunt, fatemur,<br />

in nobis et in uiris ecclesiasticis necnon et in<br />

V. la condamnation<br />

rei publicae nostrae solaciatoribus huiusmodi<br />

materiae et fomites dissensionum...<br />

M.G.H. Cap. II, n° 254, p. 253.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

147


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

148<br />

V. la condamnation<br />

les prémisses du jugement <strong>de</strong> Quierzy sont contenues en<br />

germe. le jeune roi poursuit et met le doigt sur le danger<br />

principal, celui <strong>de</strong>s hommes d’église qui ont pour eux une<br />

doctrine, une puissance spirituelle qui peut déstabiliser le<br />

royaume : «…et regia potesta stabilienda, et conseruanda»…<br />

Parmi les six mesures édictées par le jeune<br />

monarque <strong>à</strong> Coulaines, la <strong>de</strong>rnière précise, sans équivoque,<br />

que celui qui rompra la concor<strong>de</strong> en se montrant rebelle et<br />

opiniâtre sera admonesté et brisé. et Charles <strong>de</strong> conclure :<br />

«si le coupable comprend ces paroles, que la joie éclate<br />

“chez tous les fidèles, s’il refuse <strong>de</strong> les écouter, qu’alors<br />

“l’autorité épiscopale, la sublimité royale et la magnanimité<br />

“<strong>de</strong> ceux qui persistent dans ce lien <strong>de</strong> charité manifestent<br />

“le zèle <strong>de</strong> leur fervente piété, selon ce que réclameront la<br />

“nature <strong>de</strong> l’affaire et la nécessité, ce que conseillera la raison<br />

“et ce qui conviendra <strong>à</strong> la qualité <strong>de</strong> la personne. Qu’on<br />

“accomplisse alors irrévocablement avec le secours <strong>de</strong><br />

“dieu ce qui a trait au salut, <strong>à</strong> l’utilité et <strong>à</strong> la probité» 329 .<br />

l’influence <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> a été contenue durant près <strong>de</strong><br />

vingt ans par son emprisonnement et, dans la sentence, le mot<br />

«retrudi» (remis) nous rappelle que louis le Germanique<br />

avait déj<strong>à</strong> emprisonné notre moine. Il est hautement probable<br />

que <strong>Gottschalk</strong> fut arrêté et emprisonné <strong>à</strong> orbais 330 ,<br />

(329) Et si audierit, fiat <strong>de</strong> societate fi<strong>de</strong>li<br />

omnibus gaudium, sit uero obaudire renuerit,<br />

tunc pontificalis auctoritas et regalis sublimitas<br />

atque in caritatis connexione persistetium<br />

ac ratio expetierit suo qualitati personae<br />

conuenerit, zelum suae <strong>de</strong>uotionis feruentissime<br />

exerat, et quod inspirante <strong>de</strong>o agendum in<br />

omnem salutis et utilitatis atque honestatis<br />

partem iudicauerit, irrefragabiliter peragat.<br />

M.G.H., Cap. II, n° 254, p. 255.<br />

(330) Sous la plume <strong>de</strong> Michel Champenois,<br />

originaire <strong>de</strong> rilly-la-Montagne, un passage<br />

fort explicite soutient notre thèse puisqu’on peut<br />

lire : «Parmi ces <strong>de</strong>ssins que la lithographie sera<br />

heureuse <strong>de</strong> reproduire un jour, vous remarquerez,<br />

Madame, un monument chétif d’apparence<br />

dont un <strong>de</strong>s premiers évêques <strong>de</strong> reims a fait<br />

longtemps un asile <strong>de</strong> pénitence et d’expiation.<br />

C’est la tour Saint-réole <strong>à</strong> orbais, cette tourelle<br />

qu’il nous a fallu découvrir dans l’étroite et<br />

sale cour d’un maréchal ferrant… Une tradition<br />

que les habitants du pays conservent, c’est que<br />

la tour Saint-réole fut encore la prison <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>, ce moine altier, opiniâtre et superbe<br />

d’orbais, que l’impitoyable Hincmar fit<br />

condamner <strong>à</strong> une prison perpétuelle… Tous les<br />

témoignages écrits placent <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> la fin<br />

misérable <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> : mais sa captivité dura<br />

dix-sept ans, on peut admettre, sans violer l’histoire<br />

muette sur ce point, qu’il en passa les premiers<br />

<strong>à</strong> la tour Saint-réole…»<br />

Chroniques <strong>de</strong> Champagne, t. III, p. 277<br />

(1838). Voir également la lithographie<br />

d’arnout d’après durand, planche d, p. 221.


puis amené <strong>de</strong> force au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quierzy, afin qu’on le fit<br />

s’expliquer et en espérant qu’il s’y renierait. la contrainte<br />

du fouet et la mutilation <strong>de</strong> sa langue : «perpetuum silentium<br />

ori» 331 ne le firent pas plier, bien au contraire.<br />

<strong>Gottschalk</strong> dut également jeter au feu ses écrits avant<br />

d’avoir été laissé pour mort 332 . la violence relatée par les<br />

prélats fut exceptionnelle pour son temps. les châtiments<br />

corporels étaient monnaie courante <strong>à</strong> cette époque et l’offuscation<br />

attestée par un grand nombre <strong>de</strong> religieux nous<br />

incite <strong>à</strong> penser qu’ils sortaient <strong>de</strong> la norme et <strong>de</strong>s usages<br />

habituels envers les moines.<br />

la sanction n’eut pas l’effet escompté par Hincmar.<br />

l’engagement royal ne fut pas davantage efficace. l’eglise<br />

franque s’est un temps fracturée au point que remy, archevêque<br />

<strong>de</strong> lyon, s’est exaspéré <strong>de</strong> voir le malheureux torturé<br />

avec une «irreligiositas» et une cruauté inouïes.<br />

l’excommunication et le lynchage déchirèrent la communauté<br />

<strong>de</strong>s évêques 333 . le désordre enfla et la victimisation<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> n’instaura pas un ordre nouveau. l’acte <strong>de</strong><br />

Quierzy <strong>de</strong>vint le référent <strong>à</strong> qui l’on s’en remet pour déci<strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong> ce qu’il faut dire et ne pas dire, il réaffirma que l’infraction<br />

débouche sur la vengeance plutôt que sur <strong>de</strong>s rivalités.<br />

Il démontra que les juges religieux travaillaient<br />

d’abord <strong>à</strong> l’efficacité <strong>de</strong>s règles, instaurant l<strong>à</strong> qu’aucune<br />

trace <strong>de</strong> compromis avec la métaphysique du sacré ne puisse<br />

être possible. C’est en cela que le sacré fut complètement<br />

réduit <strong>à</strong> <strong>de</strong>s rapports purement humains.<br />

(331) l’archevêque <strong>de</strong> lyon remy confirme<br />

dans ses écrits l’horreur <strong>de</strong> la punition : « on<br />

dit qu’il a été déchiré «atrocissime» et sans<br />

miséricor<strong>de</strong>…»<br />

C.J. Hefele, Histoire <strong>de</strong>s conciles, livre XXII,<br />

p. 155 (1911).<br />

(332) Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Troyes, qui prit parti après<br />

Quierzy pour la double pré<strong>de</strong>stination au<br />

concile <strong>de</strong> Paris <strong>à</strong> l’automne 849, ne laisse<br />

aucun doute sur le caractère politique <strong>de</strong> la<br />

condamnation et les violences faites : «Quem<br />

V. la condamnation<br />

rex christianae fi<strong>de</strong>i strennuissimus cultor<br />

Karollus aduocato sanctorum memoratae dioceseos<br />

episcorum conuentu, suis aspectibus<br />

praesentari <strong>de</strong>creuit» et <strong>de</strong> conclure sur<br />

<strong>Gottschalk</strong> : «Quo perductus, publice flagellatus<br />

librosque suarum adsertionum igni cremare<br />

compulsus est».<br />

Annales <strong>de</strong> Saint-Bertin, F. Grat, J. Vielliart et<br />

S. Clémencet. Paris (1964).<br />

(333) Liber <strong>de</strong> tribus epistolis.<br />

P.l. CXXI, col. 1028, 1030.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

149


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

150<br />

V. la condamnation<br />

Conclusion V<br />

le religieux violent n’aurait pu conserver jusqu’<strong>à</strong> ces <strong>de</strong>rnières<br />

années l’emprise prodigieuse qu’il a exercée sur la<br />

chrétienté sans dire ce qu’il faut faire et ne pas faire pour<br />

que les rapports restent tolérables au sein <strong>de</strong>s communautés<br />

humaines, dans un certain contexte culturel et social.<br />

le sacré ne se définit-il pas avant tout comme l’ensemble<br />

<strong>de</strong>s postulats auxquels l’esprit humain est amené par ses<br />

transferts collectifs sur les victimes réconciliatrices ?<br />

l’esprit <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> se sait dépassé et transcendé par une<br />

force qui lui apparaît extérieure <strong>à</strong> lui-même et aucun châtiment<br />

ou raisonnement autre que le sien ne peut donc sur<br />

lui avoir prise.<br />

Il ne faut pas chercher dans son jugement <strong>de</strong>s concepts aux<br />

limites nettes ou maîtrisables par le langage. Une fois la<br />

sentence accomplie, il n’y a aucune raison pour qu’ultérieurement<br />

la violence ne recommence pas.<br />

les hommes ne peuvent connaître la paix que par la<br />

connaissance d’un mon<strong>de</strong> commun. <strong>Gottschalk</strong>, le<br />

condamné, est le responsable <strong>de</strong>s désordres et catastrophes<br />

qui affligent le clergé et l’état <strong>de</strong>s <strong>de</strong>rniers carolingiens,<br />

c’est-<strong>à</strong>-dire <strong>de</strong> leur crise.<br />

le mauvais traitement dont notre moine fut l’objet avant<br />

d’être excommunié n’est pas dans son principe un geste<br />

symbolique. C’est une réaction agressive contre un homme<br />

qui passe pour responsable <strong>de</strong> la crise, et avant tout pour un<br />

hérétique. Mais celui qui est déclaré comme tel incarne le<br />

retour <strong>à</strong> l’ordre, le retour <strong>à</strong> la vie normée. les juges <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> vivaient dans un univers intellectuel d’autant<br />

plus conformiste qu’il était totalement dispensé d’autocritique.<br />

Comme pour louis le Germanique, le roi Charles le<br />

Chauve et l’archevêque Hincmar, <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>vient l’instrument<br />

fortuit d’une réconciliation au terme d’un échec. Il<br />

incarnera une rupture grâce aux suggestions, tour <strong>à</strong> tour, <strong>de</strong><br />

certains qui l’accablent et d’autres qui l’exaltent. Mais<br />

jamais le prisonnier d’<strong>Hautvillers</strong> n’apparaîtra comme le


V. la condamnation<br />

seul principe actif <strong>de</strong> tout le processus <strong>de</strong> crise et <strong>de</strong> sa<br />

résolution et, même <strong>à</strong> ses dépens, l’instauration d’un ordre<br />

régénéré du religieux ne peut lui être attribué. les débats<br />

menés par Cappuyns au XVII e , Hefele au XX e et encore <strong>de</strong><br />

nos jours en témoignent. Malgré l’occultation d’une<br />

anthropologie <strong>de</strong>s conflits lors <strong>de</strong>s conciles carolingiens <strong>de</strong><br />

Mayence et <strong>de</strong> Quierzy, il apparaît qu’en ces lieux se sont<br />

révélés, comme pourrait le dire le philosophe rené Girard,<br />

les mécanismes du bouc émissaire.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

151


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

152


VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

VI . Essai sur l a pér enni<br />

t é<br />

Comprendre les relations d’influences permet <strong>de</strong> saisir<br />

les aspects cachés <strong>de</strong>s relations humaines. Il est<br />

<strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> l’histoire où l’obstination d’un<br />

individu ou <strong>de</strong> quelques petits groupes suffisent <strong>à</strong> créer<br />

l’événement et <strong>à</strong> influencer le cours <strong>de</strong>s choses. les faits<br />

qui nous concernent ici conduisent <strong>à</strong> étudier <strong>de</strong>s phénomènes<br />

qui se déroulèrent en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute rationalité<br />

consciente. <strong>de</strong> tout temps, on a recherché la manipulation<br />

<strong>de</strong>s idées, du langage et <strong>de</strong>s comportements. le pouvoir<br />

chrétien <strong>de</strong> la secon<strong>de</strong> moitié du IX e siècle semble avoir<br />

vaincu toutes les résistances et très tôt <strong>Gottschalk</strong> a senti<br />

les menaces qui allaient agir contre sa volonté. Il est cependant<br />

intéressant <strong>de</strong> constater que malgré les énormes pressions<br />

qui se sont exercées sur lui en vue d’atteindre l’uniformité<br />

dogmatique, il a su créer <strong>de</strong>s idées neuves et amener<br />

d’autres religieux <strong>à</strong> les accepter.<br />

le rapport <strong>de</strong> ces différentes forces en présence peut s’expliquer<br />

par <strong>de</strong>s causes culturelles, historiques et économiques,<br />

mais l’étonnement <strong>de</strong>meure. C’est aussi parce<br />

qu’il implique autre chose que <strong>de</strong> banales relations<br />

humaines. <strong>de</strong>s postures complexes s’élaborèrent dans <strong>de</strong>s<br />

phénomènes relationnels qui échappaient <strong>à</strong> la conscience<br />

<strong>de</strong>s acteurs. elles induirent, au nom d’une croyance modélisant<br />

une organisation totalitaire <strong>de</strong> toute la société, <strong>de</strong>s<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

153


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

154<br />

VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

stratégies visant <strong>à</strong> faire épouser les concepts <strong>de</strong>s archevêques<br />

<strong>de</strong> Mayence et <strong>de</strong> reims, c’est-<strong>à</strong>-dire tout ce que ne<br />

voulait pas <strong>Gottschalk</strong> 324 .<br />

L’individu face <strong>à</strong> l’institution<br />

les disputes théologiques au temps <strong>de</strong> Charles le Chauve<br />

attestent que la société carolingienne, malgré l’énorme poids<br />

<strong>de</strong> la religion, était hétérogène. les gens ne partageaient pas<br />

tous la même vision du mon<strong>de</strong>, quel qu’en fût le point <strong>de</strong><br />

vue <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> majorité. les intérêts <strong>de</strong>s individus <strong>de</strong>viennent<br />

alors incompatibles puisque l’ordre se cristallise autour<br />

d’un groupe clérical qui n’a pas toujours la lucidité <strong>de</strong> ses<br />

propres désordres, mais qui veut malgré cela maintenir le<br />

contrôle social en tant que force dominante institutionnelle.<br />

Cette conformité affichée est considérée comme le bien et toute<br />

novation est regardée comme une déviance. Hincmar et raban<br />

Maur qualifient <strong>à</strong> plusieurs reprises <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong> «nouus» 335 .<br />

Ils considèrent ses innovations théologiques comme non<br />

conformistes et posent les principes <strong>de</strong> la sanction 336 .<br />

on est en droit <strong>de</strong> se <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r qui est déviant puisque<br />

<strong>Gottschalk</strong> considère que ses adversaires ne sont pas dans<br />

l’orthodoxie ? Pour fon<strong>de</strong>r son point <strong>de</strong> vue, il cherchera <strong>à</strong><br />

acquérir <strong>de</strong> l’autorité car il a perçu qu’une vision minoritaire<br />

peut influencer la majorité <strong>à</strong> condition <strong>de</strong> recouvrir<br />

tout le champ <strong>de</strong> la compétence, <strong>de</strong> l’affection et <strong>de</strong> la<br />

reconnaissance. Plus son crédit sera grand, plus gran<strong>de</strong><br />

sera la confiance que lui porteront ses alliés et plus il jouira<br />

d’une situation favorable pour agir sans tenir compte du<br />

point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> l’institution. Ses nombreuses correspondances<br />

participent <strong>de</strong> cette quête.<br />

(334) dans sa lettre aux religieux d’<strong>Hautvillers</strong>,<br />

envoyée peu avant le décès <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>,<br />

Hincmar écrit : « Qu’il se convertisse, qu’il<br />

rentre dans le sein <strong>de</strong> l’église en abjurant ses<br />

erreurs, et alors traitez-le comme un enfant <strong>de</strong><br />

l’église, donnez-lui l’absolution ». In abbé<br />

Manceaux, op. cité, t. 1, p. 256.<br />

(335) Inexpérimenté, étrange.<br />

(336) «<strong>de</strong>lectabiliter uocum nouitatibus ut<br />

innotesceret incumbantes» (un goût pervers<br />

<strong>de</strong> la nouveauté avec ses complices et<br />

satellites).


VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

<strong>Gottschalk</strong> a voulu réduire l’influence majoritaire par une<br />

stricte intransigeance, un refus total <strong>de</strong> la pensée hiérarchique<br />

afin d’obtenir davantage d’impact sur tous les<br />

acteurs du débat. C’est ainsi que les principaux protagonistes<br />

<strong>de</strong> la dispute théologique conçurent <strong>de</strong>s argumentaires<br />

tendant <strong>à</strong> rallier le plus grand nombre 337 . Cette dépendance<br />

<strong>de</strong>vant l’information correspond <strong>à</strong> la tendance<br />

qu’avaient Hincmar et <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> rechercher la validation<br />

<strong>de</strong> leur thèse. Mais <strong>Gottschalk</strong> percevait que la dépendance,<br />

par l’intermédiaire <strong>de</strong>s autres, ouvre la voie <strong>à</strong> l’influence,<br />

alors que son archevêque cherchait <strong>de</strong> cette manière <strong>à</strong><br />

s’adapter aux jugements <strong>de</strong>s autres. les mêmes démarches,<br />

les mêmes objectifs débouchent sur <strong>de</strong>s effets opposés.<br />

Quand l’errance <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> est dénoncée par raban Maur<br />

«gyrouagus» c’est qu’elle est encore un facteur d’influence,<br />

une puissance potentielle et un comportement qui pourraient<br />

faciliter l’apparition du changement et <strong>de</strong> l’innovation.<br />

dans ces conditions, l’influence prendra la forme, soit <strong>de</strong><br />

l’innovation, soit <strong>de</strong> la conformité. le groupe conformiste<br />

déploiera une gran<strong>de</strong> quantité d’énergie pour tenter <strong>de</strong> se<br />

protéger. C’est la pression vers la norme, c’est le dossier<br />

monté par Hincmar, qui prend également le temps pour<br />

essayer <strong>de</strong> persua<strong>de</strong>r <strong>Gottschalk</strong> et ses partenaires d’accepter<br />

le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> son parti.<br />

on verra que si le déviant ne change pas, le parti <strong>de</strong> l’archevêque<br />

<strong>de</strong> reims aura toujours la possibilité <strong>de</strong> l’exclure et cette<br />

possibilité réduit considérablement le poids <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

Mais les convictions du Saxon sont suffisantes pour maintenir<br />

malgré tout sa lecture augustinienne <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination.<br />

Cette répugnance <strong>à</strong> changer tient <strong>à</strong> une inertie psychologique<br />

qui fait qu’il préfère dépenser lui aussi une<br />

gran<strong>de</strong> énergie pour continuer sa tâche, aussi désespérée<br />

soit elle 338 , plutôt que <strong>de</strong> l’abandonner. Cette inertie peut<br />

(337) appel <strong>à</strong> Jean Scot erigène pour les hiérarques,<br />

<strong>à</strong> <strong>de</strong> nombreux prélats pour <strong>Gottschalk</strong>.<br />

(338) Poème <strong>à</strong> W. Strabon.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

156<br />

VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

s’appliquer d’une façon symétrique <strong>à</strong> Hincmar. Il a pour lui<br />

l’obéissance et l’autorité. Cela constitue une <strong>de</strong>s raisons<br />

importantes <strong>de</strong> son combat incarnant l’institution. Ces<br />

<strong>de</strong>ux personnages réalisent concomitamment leurs besoins<br />

et leurs idéaux. Il renforcent ainsi leur valeur, l’un est doté<br />

du pouvoir, l’autre <strong>de</strong> compétences. Tout ceci nous<br />

conduit <strong>à</strong> croire que leurs désaccords ont eu un effet <strong>de</strong><br />

blocage offrant au déviant <strong>Gottschalk</strong> le moyen d’exercer<br />

une influence. Par <strong>de</strong>voir envers sa charge, l’archevêque<br />

<strong>de</strong> reims ira jusqu’<strong>à</strong> l’interpolation <strong>de</strong>s textes <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>. Cependant, <strong>à</strong> y regar<strong>de</strong>r <strong>de</strong> près, les arguments<br />

<strong>de</strong> l’un ou <strong>de</strong> l’autre pour justifier leur théorisation<br />

<strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination sont fort proches, et ultérieurement<br />

chercheurs et théologiens n’ont pas décelé <strong>de</strong> gran<strong>de</strong>s différences.<br />

Ils sont unanimes sur la dispute trinitaire pour<br />

reconnaître que la position gottschalkienne est la plus<br />

juste. Mais on ne peut réduire le débat théologique <strong>à</strong> une<br />

simple querelle <strong>de</strong> personne.<br />

les résistances au changement sont le fait du contrôle<br />

social. les représentants <strong>de</strong> l’institution religieuse se sentent<br />

investis d’une exigence et d’une nécessité : transmettre<br />

<strong>de</strong>s pratiques et <strong>de</strong>s valeurs préservant les relations<br />

hiérarchiques. Cela comman<strong>de</strong> une surveillance constante<br />

<strong>de</strong>s comportements individuels 339 , qui débouche sur le<br />

consensus, la soumission, la suppression <strong>de</strong>s préférences<br />

personnelles, seules conditions <strong>à</strong> l’exemption <strong>de</strong>s conflits.<br />

Il est évi<strong>de</strong>nt que le non-conformisme <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> a eu<br />

pour conséquence naturelle <strong>de</strong> faire apparaître la possibilité<br />

d’une nouvelle autorité, d’un nouveau pouvoir : le pouvoir<br />

<strong>de</strong> changer les pouvoirs existants et, par effet, <strong>de</strong><br />

renouveler la hiérarchie dans l’institution ecclésiale.<br />

Mais <strong>Gottschalk</strong> n’avait pas pour objectif la remise en<br />

cause <strong>de</strong> l’institution, seule son érudition portait ombrage<br />

(339) Tous les ordres religieux sont structurés autour <strong>de</strong> cette règle.


VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

<strong>à</strong> cette <strong>de</strong>rnière. Ce sont ses comportements <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>,<br />

<strong>de</strong> rigidité et d’entêtement qui organisèrent son rejet. Son<br />

archevêque Hincmar y a vu <strong>de</strong>ux aspects : l’un, instrumental<br />

définissant son objet les «Confessio breuior» et<br />

«Confessio prolixior» ; l’autre, symbolique donnant <strong>de</strong>s<br />

informations sur l’état d’esprit du rebelle 340 . Ce style <strong>de</strong><br />

comportement renvoie au déroulement et <strong>à</strong> l’intensité <strong>de</strong><br />

son expression et leurs combinaisons exprimeront toutes<br />

leurs significations et susciteront la réaction.<br />

<strong>Gottschalk</strong> avait pour but <strong>de</strong> montrer <strong>à</strong> l’institution sa<br />

motivation <strong>à</strong> témoigner <strong>de</strong> ses convictions et du <strong>de</strong>gré<br />

d’autonomie <strong>de</strong> ses engagements. Cette autonomie<br />

recouvre plusieurs facettes : l’indépendance <strong>de</strong> son jugement<br />

face <strong>à</strong> l’institution et une conduite intransigeante qui<br />

le pousseront <strong>à</strong> <strong>de</strong>s conclusions rigoureusement définitives<br />

et qu’il ne laissera pas déformer par <strong>de</strong>s intérêts subjectifs.<br />

l’objectif pour <strong>Gottschalk</strong>, c’est <strong>de</strong> provoquer <strong>de</strong>s réactions<br />

positives <strong>à</strong> sa doctrine. Il ne peut considérer son attitu<strong>de</strong><br />

que comme exemplaire. Il espère également dans l’affichage<br />

<strong>de</strong> son autonomie faire naître <strong>de</strong>s approbations 341 .<br />

Ce comportement perçu comme indépendant ne pourra<br />

influencer que momentanément une partie <strong>de</strong> l’institution,<br />

encourageant un temps une égale attitu<strong>de</strong> d’indépendance<br />

d’une partie <strong>de</strong> l’eglise et plus particulièrement le clergé<br />

lyonnais.<br />

(340) Sed iam tempus est ut tuas tres hereses<br />

quas mihi misisti, et si eis consentirem omnem<br />

mihi humanitatem faciendam esse promisisti,<br />

refellam atque subuertam per unum tantummodo<br />

capitulum beati Pauli apostoli quod ita<br />

se habet : Gratias agamus <strong>de</strong>o patri qui<br />

dignos nos fecit in parte sortis sanctorum in<br />

lumine, qui eripuit nos <strong>de</strong> potestate tenebrarum<br />

et transtulit in regnum filii caritatis suae<br />

in quo habemus re<strong>de</strong>mptionem remissionem<br />

peccatum.<br />

Mais il est bien temps que tes trois propositions<br />

hérétiques que tu m’as envoyées, et tu as<br />

promis d’avoir toutes les bontés pour moi si je<br />

consentais <strong>à</strong> leur faire bon accueil, je les réfute<br />

et les détruise uniquement grâce <strong>à</strong> un chapitre<br />

<strong>de</strong> l’apôtre saint Paul qui est : «rendons<br />

grâces <strong>à</strong> dieu le Père qui nous a rendus dignes<br />

d’avoir part au sort <strong>de</strong>s saints dans la lumière,<br />

lui qui nous a arrachés <strong>à</strong> la puissance <strong>de</strong>s<br />

ténèbres et nous a fait passer dans le royaume<br />

<strong>de</strong> son Fils bien-aimé en qui nous avons la<br />

ré<strong>de</strong>mption, la rémission <strong>de</strong> nos péchés».<br />

d.C.l., p. 98, l. 5 <strong>à</strong> 13.<br />

(341) Courriers <strong>à</strong> loup <strong>de</strong> Châlons, <strong>à</strong> loup <strong>de</strong><br />

Ferrières, <strong>à</strong> amolon <strong>de</strong> lyon, <strong>à</strong> Gislemar…<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

157


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

158<br />

VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

Cette posture dominatrice <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> altérera ses relations<br />

avec certains religieux. Il a commencé <strong>à</strong> perdre <strong>de</strong><br />

son ascendance lorsque Hincmar a pu faire naître l’idée<br />

qu’il y avait manipulation et que le moine avait l’esprit<br />

captieux 342 . Mais c’était l<strong>à</strong> reconnaître implicitement ses<br />

talents <strong>de</strong> convictions et accréditer l’idée que <strong>Gottschalk</strong><br />

maîtrisait mieux que quiconque <strong>de</strong> nombreux écrits.<br />

Cette influence ne pouvait qu’être redoutée par ses principaux<br />

adversaires.<br />

Pour l’institution, il existe un parti pris, celui <strong>de</strong> l’anti-extrémisme.<br />

Mais, émettre <strong>de</strong>s critiques contre ce qui est érigé en<br />

dogme ou valeur absolue par <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s modérées et<br />

avec un discours mesuré n’a pas plus <strong>de</strong> chance d’aboutir.<br />

Ce style vertueux n’est jamais récompensé. Pourtant c’est<br />

la consistance du comportement face <strong>à</strong> l’institution qui<br />

mesure l’indice <strong>de</strong> certitu<strong>de</strong>. la décision <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong><br />

s’en tenir inébranlablement <strong>à</strong> son point <strong>de</strong> vue est le reflet<br />

<strong>de</strong> sa cohérence. Sa force passe par la répartition opiniâtre<br />

<strong>de</strong> ses expressions, comme «Deus trinus et Deitas trina», et<br />

l’élaboration d’un système <strong>de</strong> preuves logiques, en l’occurrence<br />

ses travaux sur la phonologie, la syntaxe, la morphologie<br />

et l’étymologie. Une rigidité partagée <strong>de</strong> part et<br />

d’autre est le symptôme du conflit. Cependant tous les<br />

acteurs <strong>de</strong> la dispute pré<strong>de</strong>stinatienne n’adoptèrent pas la<br />

même rigidité. Jonas d’orléans et rotha<strong>de</strong> <strong>de</strong> Soissons<br />

donnent l’impression <strong>de</strong> tenir compte <strong>de</strong> la position <strong>de</strong>s uns<br />

et <strong>de</strong>s autres. Ils se présentent avec l’esprit ouvert et cherchent<br />

ainsi dans leur pru<strong>de</strong>nce <strong>à</strong> influencer chaque camp.<br />

l’absence d’accord avec eux n’engendre ni animosité, ni<br />

sentiment d’échec et n’exclut pas les contacts. Ils ne tentent<br />

pas <strong>de</strong> contraindre tout en exprimant <strong>de</strong>s préférences.<br />

Ce jeu ouvert, jusqu’<strong>à</strong> un certain point, sera vite annihilé.<br />

(342) Detinentur <strong>de</strong>tinebuntur sub diabolo captiui donec redimerentur …<br />

d.C.l, op. cité, p.43,l.2 .


VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

les partis d’Hincmar et Charles le Chauve ont vite compris<br />

que ces évêques modérés, partisans <strong>de</strong> l’équité , étaient<br />

davantage préparés <strong>à</strong> changer et <strong>à</strong> se soumettre <strong>à</strong> une<br />

influence. Il fallait donc éviter qu’ils soient rejoints par<br />

d’autres. l’archevêque et le roi décidèrent <strong>de</strong> pousser les<br />

feux, <strong>de</strong> renforcer leur ascendance et <strong>de</strong> prendre coûte que<br />

coûte l’avantage. Une première étape fut franchie avec violence<br />

au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quierzy en 849 et cette stratégie sera<br />

couronnée <strong>de</strong> succès aux syno<strong>de</strong>s <strong>de</strong> Savonnières en 859 et<br />

<strong>de</strong> douzy en 860. l’institution y fera définitivement consacrer<br />

la théologie du libre arbitre malgré le syno<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

Valence <strong>de</strong> 855 où l’église lyonnaise avait fait prévaloir<br />

les thèses gottschalkiennes.<br />

Les résistances aux changements<br />

le point <strong>de</strong> vue majoritaire jouit toujours du prestige <strong>de</strong> la<br />

vérité et <strong>de</strong> la norme. Il exprime le système social dans son<br />

ensemble. C’est <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> ces principes que les thèses pré<strong>de</strong>stinatiennes<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> engendreront <strong>de</strong>s résistances.<br />

elles furent plus ou moins fortes et ne purent triompher<br />

faute <strong>de</strong> compétences suffisantes <strong>de</strong> la part <strong>de</strong>s évêques,<br />

abbés et moines qui soutenaient les arguments <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>. Mais le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> ceux qui partageraient<br />

sa théologie ne fut pas seulement le point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la<br />

minorité, contraire <strong>à</strong> l’évi<strong>de</strong>nce et encore moins accusable<br />

d’anomie. l’archevêque Hincmar s’appuyait sur <strong>de</strong>s soutiens<br />

fragiles, tels ceux <strong>de</strong> Jean Scot 343 et il a fallu l’intervention<br />

et tout le poids royal <strong>de</strong> Charles le Chauve pour<br />

exiger la tenue d’un syno<strong>de</strong> : «par zèle pour la foi et amour<br />

<strong>de</strong> l’unanimité». l’argument d’autorité ne fit pas effet<br />

immédiatement car les alliances et les jeux <strong>de</strong> dépendances<br />

institutionnelles avaient laissé leurs empreintes parmi le<br />

clergé. le problème <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination requièrait <strong>de</strong>s opi-<br />

(343) J.S. erigène : De diuina prae<strong>de</strong>stinatione, P.l. CXXII, 365-440.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

159


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

160<br />

VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

nions et <strong>de</strong>s jugements qui ne pouvaient être validés par la<br />

seule logique et chaque groupe recherchait dans l’accord<br />

avec l’autre un soutien <strong>à</strong> son opinion. l’influence ne pouvant<br />

modifier les opinions ou les jugements, l’intervention<br />

royale <strong>de</strong>vint incontournable. C’est sur cette évi<strong>de</strong>nce que<br />

le monarque voulut trancher la question.<br />

l’interaction <strong>de</strong>s partisans et <strong>de</strong>s adversaires ne jouant<br />

plus, la crise religieuse fut inévitable. Il fallait mettre un<br />

terme au blocage. le triomphe <strong>de</strong> thèses <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> et<br />

<strong>de</strong> ses alliés c’était, pour les pouvoirs politiques et spirituels,<br />

le déséquilibre social et la porte ouverte aux agents du<br />

désordre. Pour ces pouvoirs en place l’ordre du Créateur<br />

était immuable. Mais cet ordre n’a eu qu’une signification<br />

momentanée dans une pensée ecclésiale stérile. la majorité<br />

<strong>de</strong>s prélats n’a su avoir ni théologie ni technique d’action<br />

<strong>de</strong>vant la révolte <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. l’église du IX e siècle<br />

n’a pu lui opposer qu’une lutte impitoyable. Face <strong>à</strong> cet<br />

homme, la pensée hincmarienne incarnera intensément la<br />

logique <strong>de</strong> la pensée globale <strong>de</strong> son temps.<br />

Cette pensée se situe dans le courant qui a donné naissance<br />

<strong>à</strong> un dramatique échec historique <strong>de</strong> l’église carolingienne.<br />

les violences exercées sur le prisonnier d’<strong>Hautvillers</strong> se<br />

voulaient pédagogiques. Hincmar pensait ainsi dénoncer<br />

les maux sociaux : le changement et la novation qui<br />

mènent <strong>à</strong> l’endurcissement, <strong>à</strong> l’hérésie et au schisme 344 .<br />

Pour l’archevêque la violence corporelle était légitimée par<br />

la virulence verbale <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. la lutte contre l’esprit<br />

<strong>de</strong> violence constitue l’une <strong>de</strong>s traditions héritées <strong>de</strong>s Pères<br />

<strong>de</strong> l’église. Cette lutte était donc également un impératif<br />

pour le clergé carolingien, puisque tout esprit offensif met<br />

en cause la norme et la société établie. les résistances aux<br />

changements furent directement proportionnelles aux dif-<br />

(344) lorsqu’il combat son propre neveu en<br />

juin 870 <strong>à</strong> attigny, il assimile très volontiers<br />

une faute canonique <strong>à</strong> une hérésie et cite les<br />

mêmes textes qu’il appliquait <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

In P.l. CXXVI, 529 et 613.


VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

férences <strong>de</strong>s positions et parvenues a un certain point optimal<br />

<strong>de</strong> divergence elles diminuèrent. C’est l’acte <strong>de</strong><br />

condamnation et la sentence <strong>de</strong> Quierzy qui entamèrent le<br />

processus <strong>de</strong> déconsidération <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. Ils le firent<br />

apparaître immédiatement comme délinquant, pervers et<br />

son image <strong>de</strong>vint négative. la condamnation indiqua alors<br />

que le pacte fragile <strong>de</strong>s relations, <strong>de</strong>s croyances et du<br />

consensus était rompu. la norme, mise en cause un temps,<br />

se retrouva réévaluée et elle s’imposa <strong>de</strong> nouveau. les<br />

résistances re<strong>de</strong>vinrent formelles et ne débouchèrent que<br />

sur l’isolement et l’opposition d’un seul.<br />

Les mécanismes <strong>de</strong> dissi<strong>de</strong>nce<br />

les conditions nécessaires <strong>à</strong> l’émergence <strong>de</strong> la dissi<strong>de</strong>nce<br />

sont le conflit et la psychologie du déviant. l’insistance <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> tout au long <strong>de</strong> sa vie a accentué les tensions<br />

théologiques et sociales. elle fut également l’expression<br />

d’une certitu<strong>de</strong>, d’une conviction et d’un engagement total<br />

ayant pour corollaire l’acceptation <strong>de</strong>s conséquences qui<br />

en découlent. Cette insistance fut aussi le reflet d’un état<br />

d’esprit offensif d’attente pour que ceux qui le condamnaient,<br />

changent, le comprennent et composent avec lui.<br />

enfin son insistance remit en question l’ordre religieux et<br />

fut l’expression d’une volonté <strong>de</strong> persévérer dans la vision<br />

d’un <strong>de</strong>stin divin <strong>à</strong> tout jamais immuable. <strong>Gottschalk</strong> affirme<br />

ainsi une conception très individualiste du salut. Il met<br />

l’accent sur le dialogue <strong>de</strong> l’homme avec dieu et par l<strong>à</strong>, nie<br />

l’utilité <strong>de</strong> la hiérarchie. Sa dissi<strong>de</strong>nce se résume au refus<br />

<strong>de</strong> toute intercession humaine. avec cette logique le prisonnier<br />

d’<strong>Hautvillers</strong> <strong>de</strong>vient étranger <strong>à</strong> son siècle. Il réduit<br />

l’histoire du mon<strong>de</strong> <strong>à</strong> celle du péché et <strong>de</strong> la grâce parce<br />

qu’il pense le drame du mon<strong>de</strong> en fonction <strong>de</strong> son propre<br />

drame. Pour ses adversaires les plus résolus une telle psychologie,<br />

dans une société ébranlée, est asociale, car son<br />

développement conduirait <strong>à</strong> la résignation et au fatalisme.<br />

la consistance <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> est un comportement excep-<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

161


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

162<br />

VI. essai sur la pérennité <strong>de</strong>s pressions <strong>à</strong> la conformité<br />

tionnel pour le IX e siècle, la plupart <strong>de</strong>s individus ne sont<br />

pas capables <strong>de</strong> le manifester aussi ostensiblement. Sa dissi<strong>de</strong>nce<br />

parut d’autant plus forte que son talent et le pouvoir<br />

<strong>de</strong> son intelligence égalaient ceux <strong>de</strong> ses adversaires.<br />

Confrontées <strong>à</strong> un tel défi, les autorités religieuses et laïques<br />

ne purent réagir ni par l’ignorance ni par le compromis,<br />

mais uniquement par l’exclusion. la mort sociale et religieuse<br />

était leur seule issue. a son échelle temporelle et<br />

aussi paradoxale que cela puisse paraître, nous pouvons<br />

affirmer que <strong>Gottschalk</strong> dicta sa propre condamnation, car<br />

la logique qui l’inclinait vers une doctrine augustinienne<br />

consistant <strong>à</strong> accor<strong>de</strong>r plus <strong>à</strong> dieu qu’<strong>à</strong> l’homme était irrecevable<br />

dans une époque aussi peu préoccupée <strong>de</strong> nuances.


etrouver <strong>Gottschalk</strong> et son parcours ne fut pas<br />

chose facile. Ce personnage oublié est un être<br />

complexe. Son intellect, forgé aux métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong>s<br />

«artes liberales», a subi inévitablement l’idéologie <strong>de</strong><br />

l’école <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>. l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s auteurs religieux et profanes,<br />

l’enseignement <strong>de</strong> la grammaire et le rôle <strong>de</strong><br />

son rhéteur nous conduisent <strong>à</strong> nous interroger sur les raisons<br />

<strong>de</strong>s choix pédagogiques <strong>de</strong> l’époque qui formèrent<br />

son esprit. Que ces raisons soient subjectives, rationalisation<br />

a posteriori, ou objectives, poids <strong>de</strong> la tradition culturelle,<br />

contraintes politiques et religieuses, elles nous<br />

permettent <strong>de</strong> porter un avis sur la valeur <strong>de</strong> cet enseignement<br />

et sur le rôle qu’il a joué, <strong>à</strong> l’insu <strong>de</strong> ses propres<br />

acteurs. C’est <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> la circulaire «De litteris calendis»,<br />

document transmis selon <strong>de</strong>ux rédactions, l’une <strong>de</strong>stinée<br />

aux archevêques <strong>de</strong> l’empire, l’autre envoyée <strong>à</strong><br />

<strong>Fulda</strong>, que sont définies les conditions <strong>de</strong>s enseignements<br />

pour le monastère <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> et le clergé séculier 345 . le passage<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, oblat, auprès <strong>de</strong> son «grammaticus»<br />

aura eu pour effet, dans sa fonction normative, <strong>de</strong> lui<br />

permettre d’acquérir, en plus <strong>de</strong> la «recte loquendi scientia»,<br />

sa propre vision <strong>de</strong> la langue latine. Cet enseigne-<br />

(345) F. Brunhölzl, Ful<strong>de</strong>nsia, Cologne, Vienne, (1974).<br />

VII. Conclusion générale<br />

VI I . Concl usi on génér al e<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

163


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

164<br />

VII. Conclusion générale<br />

ment permit <strong>à</strong> l’apprenant <strong>de</strong> constituer son propre système<br />

grammatical et une forme <strong>de</strong> compétence linguistique<br />

lui donnant la possibilité <strong>de</strong> réinvestir ses connaissances<br />

dans l’apprentissage d’autres langues.<br />

Quant aux étu<strong>de</strong>s d’auteurs profanes, nous retrouvons chez<br />

lui l’explication <strong>de</strong>s auteurs classiques, la «poetarum enarrationem».<br />

Pour les poètes, Virgile, Térence et Horace sont<br />

les éternels promus. Pour les historiens, seul Salluste apparaît,<br />

il ignore César, Tacite et Tite-live. Pour les orateurs,<br />

aucune surprise, c’est Cicéron. en ce qui concerne la dialectique,<br />

métho<strong>de</strong> que maîtrise bien <strong>Gottschalk</strong>, on peut<br />

s’étonner que celui-ci ne cite pas une seule fois aristote.<br />

le maître <strong>à</strong> penser pour notre moine religieux est et<br />

<strong>de</strong>meure assurément saint augustin. Toutes les citations <strong>de</strong><br />

cet auteur, données avec constance, conduisent <strong>à</strong> l’idée<br />

permanente qu’un examen attentif du mon<strong>de</strong> engendre la<br />

perception d’un ordre rationnel dans l’univers et que cet<br />

ordre amène <strong>à</strong> la foi en un «ordonnateur éternel». Mais<br />

sorti <strong>de</strong> cet enchantement mystique, on s’interroge sur<br />

l’absence d’esprit critique qui a présidé aux enseignements<br />

<strong>de</strong>s «artes liberales» suivis par <strong>Gottschalk</strong>.<br />

le conservatisme <strong>de</strong>s maîtres <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>, hostiles <strong>à</strong> toutes<br />

innovations pédagogiques, la force <strong>de</strong>s «auctoritates», la<br />

conviction que tout a été dit et qu’il n’y a rien <strong>à</strong> critiquer<br />

dans l’héritage <strong>de</strong>s anciens ne prennent <strong>de</strong> sens que dans<br />

une vision politique <strong>de</strong> cette époque. la liberté politique,<br />

n’existant pas, les tyrannies toutes-puissantes empêchaient<br />

la création originale et toute pensée contestataire.<br />

Cette chape <strong>de</strong> plomb explique en <strong>de</strong>rnier ressort l’inertie<br />

du système éducatif et communicationnel.<br />

l’usage abusif du principe d’autorité, l’absence <strong>de</strong> certaines<br />

disciplines qui risqueraient <strong>de</strong> déranger un équilibre<br />

social toujours menacé, ont occulté <strong>de</strong>s voix puissantes,<br />

courageuses et luci<strong>de</strong>s, comme lucrèce ou aristote, auteurs<br />

matérialistes et naturalistes. le renouveau <strong>de</strong> la culture <strong>de</strong>s


VIII e et IX e siècles, avait atteint ses objectifs, servir d’abord<br />

l’autorité, comme le droit, et ne pouvait qu’engendrer un<br />

phénomène reproductif <strong>de</strong> sa propre organisation sociétale.<br />

C’est <strong>à</strong> l’école <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> que <strong>Gottschalk</strong>, encore adolescent,<br />

ressentit la contradiction entre sa dépendance, issue <strong>de</strong>s<br />

conditions d’éducation durant l’enfance, et le mouvement<br />

vers l’autonomie mis en route par les nécessités <strong>de</strong> sa vie<br />

sociale. le point <strong>de</strong> moindre résistance fut donc le moment<br />

ou ses mécanismes d’élucidation jouèrent <strong>à</strong> plein : sa<br />

conscience du non-choix. C’est <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> l<strong>à</strong> que ses actes<br />

et ses paroles interprétatives susciteront <strong>de</strong>s résistances et<br />

déboucheront sur sa crise intérieure. l’analyse du vocabulaire<br />

gottschalkien 346 illustre ce non choix et concourt <strong>à</strong><br />

l’approfondissement <strong>de</strong> cette épistémologie carolingienne<br />

347 . <strong>Gottschalk</strong> n’a pas fini d’être étudié, l’ensemble <strong>de</strong> sa<br />

prose est <strong>de</strong>puis peu traduite en anglais <strong>à</strong> <strong>de</strong>s fins linguistiques<br />

348 . nous avons signalé qu’au plan musicologique un<br />

véritable chantier était ouvert. en ce qui concerne sa biographie,<br />

<strong>de</strong>s pages entières en direction <strong>de</strong> l’ancienne<br />

Illyrie sont encore <strong>à</strong> écrire. Quant au plan théologique, une<br />

réhabilitation, eu égard aux récentes découvertes et analyses<br />

<strong>de</strong> ses théories religieuses, pourrait être entreprise par<br />

le catholicisme. Il est vrai qu’<strong>à</strong> différentes pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

l’histoire <strong>de</strong> nos sociétés européennes, <strong>Gottschalk</strong>, mal<br />

connu, fut récupéré tantôt par les calvinistes 349 , tantôt par<br />

les jansénistes 350 , et plus près <strong>de</strong> nous par les nationalistes<br />

(346) Voir table <strong>de</strong>s mots fréquentatifs. p. 234<br />

(347) Sur la base du travail <strong>de</strong> d. Cyril<br />

lambot, nous avons dénombré plus <strong>de</strong> 4200<br />

expressions ou mots rares et curieux. a partir<br />

<strong>de</strong> ce décompte nous constatons qu’une<br />

soixantaine <strong>de</strong> termes dominent et leur répétitivité<br />

représente <strong>à</strong> elle seule 90% du vocabulaire<br />

singulier <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. C’est sur cette<br />

rémanence que se révèle alors toute la prégnance<br />

<strong>de</strong> la culture endurée et subie par<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’orbais. <strong>de</strong> ces termes dominants,<br />

41% ont une connotation spirituelle ce<br />

VII. Conclusion générale<br />

qui semble logique, 29% émanent <strong>de</strong> la sphère<br />

grammaticale, 12% procè<strong>de</strong>nt d’un discours<br />

juridique, 11% <strong>de</strong> la logique, et 7% sont d’une<br />

approche naturaliste. ne retrouve-t-on pas l<strong>à</strong>,<br />

«in fine», l’évaluation <strong>de</strong>s objectifs éducatifs<br />

<strong>de</strong>s écoles claustrales : celle que les enseignants<br />

<strong>de</strong> l’époque pouvaient seulement avancer<br />

?<br />

(348) Victor Genke : The context of truth ( <strong>à</strong><br />

paraître).<br />

(349) F.J. Gaudard, op. déj<strong>à</strong> cité.<br />

(350) G. Mauguin, op. déj<strong>à</strong> cité.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

165


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

166<br />

VII. Conclusion générale<br />

allemands 351 . Son histoire a même servi certains dogmatiseurs<br />

352 . Quel que soit l’angle sous lequel on abor<strong>de</strong> la vie <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong>, l’homme ne peut laisser indifférent, encore <strong>de</strong><br />

nos jours nous rencontrons ses détracteurs et ses apologistes.<br />

notre approche historico-sociologique n’est qu’un éclairage<br />

parmi d’autres <strong>de</strong> l’œuvre <strong>de</strong> ce penseur au tempérament<br />

exceptionnel et objectivement victime <strong>de</strong> la fusion du<br />

«sacré» et du politique. Cette conception totalitaire n’est pas<br />

morte et sévit encore dans bon nombre d’organisations<br />

humaines, <strong>de</strong> sociétés, et hante toutes les allées <strong>de</strong> pouvoir.<br />

Comme dans toute enquête historique, l’implicite doit être<br />

le plus court possible et laisser toute sa place <strong>à</strong> l’explicité.<br />

Ce n’est donc pas la foi, mais l’intelligence qui doit être<br />

jugé dans l’affaire <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>. Tout en gardant <strong>à</strong> l’esprit<br />

que notre culture et nos institutions ont pour fon<strong>de</strong>ment le<br />

rassemblement <strong>de</strong>s mythes bibliques, une lecture du XXI e<br />

siècle ne peut prétendre <strong>à</strong> l’expulsion totale <strong>de</strong> toute problématique<br />

religieuse. les sciences humaines se sont<br />

emparées du «logos» <strong>de</strong> la métaphysique ; ce terme, au-<strong>de</strong>l<strong>à</strong><br />

du langage proprement dit, désigne l’objet même que vise<br />

le discours métaphysique et, si ce discours pouvait s’achever,<br />

il serait i<strong>de</strong>ntique au «logos». la problématique <strong>de</strong><br />

l’interprétation <strong>de</strong> la parole <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, donc <strong>de</strong> sa pensée<br />

fut, nous l’avons constaté tout au long <strong>de</strong> notre<br />

recherche, profondément dépendante <strong>de</strong> l’environnement<br />

social, culturel, politique et religieux, et fut d’une autre<br />

façon comme le chemin que l’on avait tracé pour lui : une<br />

voie <strong>de</strong> soumission. l’exploitation <strong>de</strong>s représentations <strong>de</strong><br />

son époque <strong>de</strong>meure dangereuse car le schème, quel que<br />

soit son siècle, est une forme <strong>de</strong> mouvement intérieur et<br />

non pas la représentation d’une forme 353 . les approches<br />

(351) W. Kagerah, <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>r Sachse,<br />

Greifswald (1938). H. Grabert, Ein Mönch<br />

wi<strong>de</strong>r Kloster und Kirche, in nationalsozialistische<br />

Monastschefte 8 (1937).<br />

(352) abbé Manceaux et J. Hefele, op.<br />

déj<strong>à</strong> cités.<br />

(353) Cf : albert Burloud, Principes d’une psychologie<br />

<strong>de</strong>s tendances, éd. alcan, Paris (1938).


VII. Conclusion générale<br />

toujours plus aiguës que nous avons <strong>de</strong>s systèmes culturels<br />

et <strong>de</strong>s mécanismes qui les engendrent ne sont pas gratuites.<br />

elles ne sont pas sans contre partie, puisque si nous parvenons<br />

aujourd’hui <strong>à</strong> analyser et démontrer les systèmes<br />

d’écriture, <strong>de</strong> lecture et <strong>de</strong> pensée, c’est aussi <strong>à</strong> cause <strong>de</strong><br />

l’influence indirecte et inaperçue, mais contraignante,<br />

qu’exerce sur nous l’écriture judéo-chrétienne. le véritable<br />

défi pour ce qui nous concerne est le même que celui qui se<br />

présentait <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong> : une impuissance séculaire, d’abord<br />

<strong>de</strong> tous les croyants et ensuite <strong>de</strong>s non-croyants, <strong>à</strong> donner <strong>de</strong><br />

tous les textes une lecture qui s’impose avec évi<strong>de</strong>nce.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

168


VI I I . Appendi ces<br />

VIII. appendices<br />

A lettre <strong>de</strong> raban Maur, abbé <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>, <strong>à</strong> notingue,<br />

évêque <strong>de</strong> Vérone (mai 840)<br />

(M.G.H., epist., t.V, éd. e. duemmler, p. 428, 18-26).<br />

B extrait <strong>de</strong> la lettre <strong>à</strong> ratramne <strong>de</strong> Corbie (d.C. lambot,<br />

p.156/157).<br />

C lettre d’Hincmar <strong>de</strong> reims au pape nicolas 1 er<br />

(autour <strong>de</strong>s années 864-865).<br />

(M.G.H., p.500, 39-40, 42-43. P.l.CXXVI, 44 B-d,<br />

45 a, 45 d, 46 a).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

170<br />

VIII. appendices<br />

A. Raban, abbé <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong><br />

Lettre <strong>à</strong> Notingue, évêque <strong>de</strong> Vérone<br />

naguère, lorsque vous vous êtes rendu auprès du sérénissime<br />

empereur louis lors du passage d’une expédition militaire<br />

dans la circonscription <strong>de</strong> lugano et que, ayant parlé<br />

avec moi en ce même endroit, vous avez tenu <strong>de</strong>s propos<br />

sur l’hérésie que certains errants et induisant les autres en<br />

erreur, soutiennent injustement quant <strong>à</strong> la pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong><br />

dieu, nous étions convenus que je fasse un ouvrage <strong>à</strong> partir<br />

d’extraits <strong>de</strong>s Saintes-écritures et en me servant d’avis<br />

<strong>de</strong>s pères orthodoxes pour convaincre d’erreur ceux qui se<br />

font une si mauvaise idée du dieu juste et bon qu’ils disent<br />

que sa pré<strong>de</strong>stination fait que ni l’homme pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la<br />

vie ne peut tomber dans la mort, ni celui pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la<br />

mort ne peut en aucun cas se sauver jusqu’<strong>à</strong> avoir la vie,<br />

alors que dieu, auteur <strong>de</strong> toute chose et fondateur <strong>de</strong> la<br />

nature, n’est la cause <strong>de</strong> la ruine et <strong>de</strong> la mort d’aucun être,<br />

mais est l’origine du salut d’un grand nombre…<br />

B. <strong>Gottschalk</strong><br />

Extrait <strong>de</strong> la lettre <strong>à</strong> Ratramne <strong>de</strong> Corbie<br />

……par exemple : « Si la justice passe par la loi, le Christ<br />

est donc mort pour rien ». or, le Christ n’est pas mort pour<br />

rien. la justice ne passe donc pas par la loi. <strong>de</strong> même : Si<br />

l’héritage vient <strong>de</strong> la loi, il ne vient plus <strong>de</strong> la promesse. or,<br />

il y a un héritage <strong>de</strong> par la promesse. l’héritage ne vient<br />

donc pas <strong>de</strong> la loi. <strong>de</strong> même : en effet, s’il avait été donné<br />

une loi qui puisse donner la vie, la justice viendrait vraiment<br />

<strong>de</strong> la loi. or, il n’a pas été donné <strong>de</strong> loi qui puisse donner<br />

la vie. la justice ne vient donc pas <strong>de</strong> la loi. <strong>de</strong> même,<br />

saint augustin : « or, si le Christ n’est pas ressuscité, donc<br />

les morts non plus ne ressuscitent pas. » or, le Christ est<br />

ressuscité, donc les morts ressuscitent. <strong>de</strong> même dans la<br />

première partie <strong>de</strong> la Cité <strong>de</strong> dieu, il use très bien <strong>de</strong> ce<br />

syllogisme en trois parties : les prêtres <strong>de</strong>s idoles adoraient


VIII. appendices<br />

les démons et perpétraient en outre un grand nombre<br />

d’autres maux, pourtant les Grecs disaient qu’il fallait<br />

honorer ces prêtres, ce que niaient les romains tout en<br />

disant qu’il fallait rendre un culte aux dieux. Ce qu’il a donc<br />

affirmé par ce syllogisme en trois parties : les Grecs proposent<br />

: si l’on doit rendre un culte aux dieux, il faut donc<br />

honorer leurs prêtres. les romains avancent : or il ne faut<br />

pas honorer leurs prêtres. les chrétiens concluent : il ne faut<br />

donc pas rendre un culte aux dieux.<br />

Je l’ai appris, il y a <strong>de</strong> nombreuses années, par la grâce <strong>de</strong><br />

dieu dans le livre sur l’épître aux Galates. après avoir donc<br />

été <strong>à</strong> Quierzy et avoir été conduit ici, Bavon et Haudoin me<br />

disaient que le pauvre énée dirait en aboyant que la dialectique,<br />

dans les livres <strong>de</strong> saint augustin, faisait que je ne<br />

pouvais comprendre la pré<strong>de</strong>stination <strong>de</strong>s réprouvés <strong>à</strong> la<br />

mort. C’est pourquoi, un jour où Haudoin l’affirmait, j’aurais<br />

dit cet exemple <strong>de</strong> saint Jérôme sur l’épître aux Galates<br />

et j’aurais alors ajouté : la dialectique discerne le vrai du<br />

faux, elle ne confond pas, loin <strong>de</strong> l<strong>à</strong>, le vrai avec le faux, je<br />

dois dire qu’il s’est tu et même qu’il n’a plus rien osé dire<br />

par la suite. Si vous voulez donc en entendre davantage, je<br />

vous prie, écoutez avec plaisir et intelligence, comme il<br />

convient. Si dieu n’a pas prévu d’envoyer ni n’a d’avance<br />

ordonné d’envoyer les réprouvés en enfer, c’est-<strong>à</strong>-dire, s’il<br />

ne les a pas pré<strong>de</strong>stinés, il ne les enverra donc pas en enfer<br />

ni ne les y <strong>de</strong>stinera, car assurément si quelqu’un fait ce<br />

qu’il n’a pas prévu <strong>de</strong> faire, il se changera alors vraiment.<br />

dieu enverra donc les réprouvés en enfer, puisque nous<br />

disons avec le psalmiste : « C’est toi, dieu, qui les conduiras<br />

dans les profon<strong>de</strong>urs <strong>de</strong> la mort ». dieu a donc pré<strong>de</strong>stiné<br />

les réprouvés <strong>à</strong> l’enfer selon ce qui est dit dans la<br />

Sainte- écriture : « Celui qui passe <strong>de</strong> la justice au péché,<br />

dieu l’a préparé pour la romphée ».<br />

<strong>de</strong> même, l’apôtre Paul dit <strong>de</strong> la ré<strong>de</strong>mption <strong>de</strong>s seuls élus :<br />

« le Christ vous a rachetés <strong>de</strong> la malédiction <strong>de</strong> la loi, en se<br />

faisant objet <strong>de</strong> malédiction pour nous ». Si donc le Christ<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

172<br />

VIII. appendices<br />

a racheté les réprouvés <strong>de</strong> la malédiction <strong>de</strong> la loi en se faisant<br />

objet <strong>de</strong> malédiction pour eux, les réprouvés ne seront<br />

donc pas maudits mais vraiment bénis. Quant aux réprouvés,<br />

ils ne seront pas bénis mais comme il apparaît clairement,<br />

maudits, car c’est <strong>à</strong> eux que le Fils <strong>de</strong> dieu doit dire :<br />

« éloignez-vous <strong>de</strong> moi, maudits, pour aller au feu éternel ».<br />

le Christ n’a donc pas racheté les réprouvés <strong>de</strong> la malédiction<br />

<strong>de</strong> la loi et il ne s’est pas fait objet <strong>de</strong> malédiction<br />

pour eux.<br />

C. Hincmar <strong>de</strong> Reims<br />

Lettre au pape Nicolas 1 er<br />

Si votre sagesse catholique veut savoir ce qu’il semble dire<br />

contre la foi catholique <strong>à</strong> partir <strong>de</strong> la vieille hérésie pré<strong>de</strong>stinatienne,<br />

nous vous indiquons point par point, prises<br />

parmi beaucoup, quelques-unes <strong>de</strong> ses assertions, faibles<br />

en nombre mais non par leur poids.<br />

Il dit que <strong>de</strong> même que dieu en a pré<strong>de</strong>stiné certains <strong>à</strong> la<br />

vie éternelle, <strong>de</strong> même il en pré<strong>de</strong>stiné <strong>à</strong> la mort éternelle.<br />

Il dit que dieu ne veut pas que tous les hommes soient sauvés<br />

mais seulement ceux qui sont sauvés, que sont ainsi<br />

sauvés tous ceux qu’il a voulu sauver, et <strong>de</strong> ce fait tous<br />

ceux qui ne sont pas sauvés, ce n’est pas du tout sa volonté<br />

qu’ils soient sauvés. Car si tous ceux que dieu veut sauver<br />

ne le sont pas, il n’a pas fait tout ce qu’il a voulu, et s’il<br />

veut ce qu’il ne peut pas, il n’est pas tout-puissant mais<br />

faible. Car il est tout-puissant celui qui a fait tout ce qu’il<br />

a voulu, selon la parole <strong>de</strong> l’écriture : Tout ce que le<br />

Seigneur a voulu, il l’a fait au ciel et sur la terre, dans la<br />

mer et dans tous les abysses ; et aussi : dans ta volonté,<br />

Seigneur, tout a été fondé et il n’est personne qui puisse<br />

résister <strong>à</strong> ta volonté : si tu as décidé notre salut, aussitôt<br />

nous serons libérés.<br />

Il dit que ce n’est pas pour la ré<strong>de</strong>mption du mon<strong>de</strong> entier,<br />

c’est-<strong>à</strong>-dire pas pour le salut et la ré<strong>de</strong>mption <strong>de</strong> tous les


VIII. appendices<br />

hommes, que notre seigneur et sauveur Jésus-Christ a été crucifié<br />

et est mort mais seulement pour ceux qui sont sauvés…<br />

Il dit que la déité <strong>de</strong> la Sainte-Trinité est trine…<br />

Il se prévaut <strong>de</strong> chanter <strong>de</strong> mémoire pendant tout un jour<br />

sans reprendre souffle non seulement les écritures qu’il<br />

infléchit violemment en son sens mais aussi les paroles<br />

qu’il tronque <strong>de</strong>s auteurs catholiques. et il désire paraître<br />

non seulement le docteur <strong>de</strong> ses docteurs mais il tend avec<br />

assez d’habileté <strong>à</strong> pouvoir prendre, même en discutant,<br />

ceux qui parlent avec lui, et s’il ne l’a pu en vérité, il prendra<br />

soin d’affirmer par d’invincibles serments que ceux qui<br />

ont parlé avec lui, ont dit <strong>de</strong>s choses qu’ils n’ont d’aventure<br />

pas dites, afin <strong>de</strong> prouver que lui-même est sincère et<br />

que ceux qui le contredisent, mentent et ont un enseignement<br />

contraire <strong>à</strong> sa doctrine.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

174


I X. Annexes<br />

IX. annexes<br />

Annexe A<br />

Généalogie<br />

(<strong>de</strong>scendants <strong>de</strong> louis le Pieux) . . . . . . . . . . . . . . . . .176<br />

Annexe B<br />

Généalogie<br />

(<strong>de</strong>scendants <strong>de</strong> Charles le Chauve) . . . . . . . . . . . . . .177<br />

Annexe C<br />

ducs croates et illyriens (IX e siècle) . . . . . . . . . . . . . .178<br />

Annexe D<br />

empereurs byzantins (IX e -X e siècle) . . . . . . . . . . . . . .179<br />

Annexe E<br />

Poèmes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .180<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

175


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

176<br />

louis le Pieux ou le débonnaire<br />

n. 778 m. 840 781 roi d’aquitaine 814 empereur<br />

IX. annexes<br />

A. Généal ogi e<br />

Descendants <strong>de</strong> Louis le Pieux<br />

00 ermengar<strong>de</strong> (2e 00 X épouse)<br />

00 Judith (3<br />

m. 818<br />

e épouse)<br />

m. 843<br />

Charles le Chauve<br />

(Voir généalogie B)<br />

Gisèle<br />

n. 806 m. 875<br />

louis le<br />

Germanique<br />

n. 806 m. 876<br />

822 roi <strong>de</strong> Germanie<br />

825 roi <strong>de</strong> Bavière<br />

843 empereur<br />

870 roi <strong>de</strong> lorraine<br />

Pépin<br />

n. 797 m. 838<br />

814 roi d’aquitaine<br />

lothaire<br />

n. 794 m. 855<br />

817 coempereur<br />

835 empereur<br />

Charles<br />

n. 830 m.863<br />

archevêque <strong>de</strong><br />

Mayence<br />

Pépin<br />

n. 823 m. 864<br />

roi d’aquitaine<br />

Charles<br />

le Gros<br />

n. 839 m. 888<br />

876 roi d’alémanie<br />

881 empereur<br />

louis<br />

le Jeune<br />

n. 835 m. 882<br />

876 roi <strong>de</strong>s<br />

Francs orientaux<br />

Carloman<br />

n. 830 m. 880<br />

876 roi<br />

<strong>de</strong> Bavière<br />

Charles<br />

l’enfant<br />

n. 845 m. 863<br />

roi <strong>de</strong> Provence<br />

lothaire II<br />

n .835 m. 869<br />

Berthe<br />

n. 830 m. 853<br />

abbesse<br />

d’avenay<br />

louis II<br />

n. 825 m. 875<br />

839/840 roi<br />

d’Italie


Charles le Chauve<br />

n. 823 m .877 838 roi 875 empereur<br />

IX. annexes<br />

B. Généal ogi e<br />

Descendants <strong>de</strong> Charles le Chauve<br />

00 richil<strong>de</strong> (2 e épouse)<br />

00 ermantru<strong>de</strong> (1 ere épouse)<br />

Charles<br />

X<br />

rothil<strong>de</strong><br />

n. 871 m. 929<br />

Pépin<br />

drogon<br />

rotru<strong>de</strong><br />

abbesse <strong>de</strong> Sainte-ra<strong>de</strong>gon<strong>de</strong>-<strong>de</strong>-Poitiers<br />

Gisèle<br />

Hil<strong>de</strong>gar<strong>de</strong><br />

ermentru<strong>de</strong><br />

Carloman<br />

n. 849 m. 876<br />

abbé <strong>de</strong><br />

Saint-Médard<br />

louis le Bègue<br />

n. 846 m. 879<br />

856 roi <strong>de</strong> neustrie<br />

867 roi d’aquitaine<br />

877 roi <strong>de</strong>s Francs<br />

d’occi<strong>de</strong>nt<br />

lothaire<br />

abbé <strong>de</strong><br />

Saint-Germaind’auxerre<br />

Charles<br />

n. 848 m. 866<br />

855 roi<br />

d’ aquitaine<br />

Judith<br />

n. 844 m. 879<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

177


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

178<br />

IX. annexes<br />

C. Ducs cr oat es<br />

et i l l yr i ens (IX e siècle)<br />

wVisheslav . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 800-810<br />

(premier duc indépendant)<br />

wBorna . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 810-821<br />

(vassal carolingien pour la côte dalmate)<br />

wPosavski . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 817-823<br />

(neveu <strong>de</strong> Borna)<br />

wVladislav . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 821-835<br />

wMislav . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 835-845<br />

wTrpimir 1 er . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 845-864<br />

(fondateur <strong>de</strong> la dynastie trpimirienne)<br />

wZ<strong>de</strong>slav . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 864- ?<br />

wdomagoj . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 864-876<br />

wIljko . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 876- ?


IX. annexes<br />

D. Emper eur s byzant i ns<br />

(IX e - X e siècle)<br />

Dynastie isaurienne<br />

wnicéphore 1 er (général logothète) . . . . . . . . . . . . .802-811<br />

wMichel 1 er , rhangabe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .811-813<br />

wléon V l’arménien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .813-820<br />

Dynastie <strong>de</strong>s Amauriens<br />

wMichel II l’amaurien . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 820-829<br />

wThéophile II . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .829-842<br />

wMichel III l’Ivrogne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .842-867<br />

Dynastie <strong>de</strong>s Macédoniens<br />

wBasile 1 er le Macédonien . . . . . . . . . . . . . . . . . . .867-886<br />

wléon VI le Sage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .886-912<br />

walexandre III . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 912-913<br />

wConstantin VII Porphyrogénète . . . . . . . . . . . . .913-959<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

179


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

180<br />

IX. annexes<br />

E. Poèmes<br />

wHorarium . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .181<br />

wo mi custos . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .188<br />

wHeu ualeo omnigenum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .196<br />

wage quaeso perge clio . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .197<br />

wo <strong>de</strong>us miseri miserere serui . . . . . . . . . . . . . . . . . . .202<br />

wo ueneranda <strong>de</strong>i suboles . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .205<br />

wChriste mearum . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .206<br />

wSpes mea Christe . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .207<br />

wChriste rex regum dominans in aeuum . . . . . . . . . . . .209<br />

wVt quid iubes pusiole . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .211<br />

wInest quibus caritas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .212<br />

w<strong>de</strong> seminibus animatis . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .212<br />

wo <strong>de</strong>itas uigila . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .212<br />

wQuo ne tu missus doleas . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .213<br />

webo remense <strong>de</strong>cus<br />

(cette dédicace se trouve au chapitre III: L’œuvre, p. 65/66/67)


IX. annexes<br />

HORARIVM<br />

Dominator, domine, <strong>de</strong>us meus, misericordia mea, <strong>de</strong>us<br />

Pater, <strong>de</strong>us Filius, <strong>de</strong>us Spiritus Sanctus, <strong>de</strong>us trinitas et<br />

unitas, qui me sine merito meo dignatus es honorare hoc<br />

(h)orario, tu me piissime, misericordissime, clementissime,<br />

domine, dignare, quaeso, gratis custodire die noctuque<br />

confirmans in fi<strong>de</strong>, solidans in spe, coroborans in<br />

caritate, in uera fundans humilitate et in cordis et corporis<br />

munda conseruans castitate, ne – quod absit – amit(t)am<br />

hoc horarium criminalis flagitii uel facinoris iniquitate,<br />

sed tu me, <strong>de</strong>us, libera semper ab omni malo et<br />

conserua in omni bono tua gratuita bonitate, pietate, cui<br />

est omnis honor et gloria, potestas et imperium, cui est<br />

omnis uirtus et sapientia, maiestas et fortitudo, quique<br />

uincis, regnas et imperas per immortalia, infinita<br />

omniaque saecula saeculorum, amen, Amen, AMEN.<br />

I. RytHMVs VEspERtINVs<br />

Cursum mundi sol uergentis pariterque hominis<br />

Designans et metas orbis ac sphaerae uolubilis<br />

Circumlustrans mutat acta conficit et tempora<br />

Annorum necnon immensa peragit curricula<br />

Momenta uoluens alterna per aetatum milia<br />

Vectus aureo figmento et curru quadriiugo<br />

Lucidus in poli centro corporali radio<br />

Via regia libratim per mensem duo<strong>de</strong>cim<br />

Horas fingit, dies agit, oritur et occidit.<br />

Bisque secat zodiacum binis aequinoctium<br />

Tangens punctis quadruplatum reddit hemisphaerium.<br />

Hominis sunt ista, <strong>de</strong>us, ordinata dotibus,<br />

Qui fungit uita diebus pariter et noctibus<br />

Iussus quatuor ditatus te duce uirtutibus.<br />

Bina pulsat caelum luce : intellectu, opere<br />

Ergo, creator aeterne, pater potentissime,<br />

Qui per filium tam magnam construxisti machinam<br />

Atque homine(m)qui tuam condis ad imaginem,<br />

Quique nobis pignus sanctum <strong>de</strong>disti paraclitum,<br />

Miseris in nostra morte sis uolens succurrere,<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

182<br />

IX. annexes<br />

Quam occasu solis huius anxie recolimus,<br />

Sed in solis magni morte plurimum confidimus.<br />

Da nobis te inuenire placatum, piissime,<br />

Cum tibi red<strong>de</strong>mus flatum singulari uespere,<br />

Qui tempus ad uespertinum post actum diluuium<br />

Oleae misisti ramum homini praesagium.<br />

Nam quando misisti tuum filium carissimum<br />

Tale tunc nobis et tantum contulisti oleum,<br />

Quod omnes preoccuparet balsamorum gut(t)ulas<br />

Et aromatum fraglaret super omnes uirgulas,<br />

Ad cuius iam pe<strong>de</strong>s iacet <strong>de</strong>uicta mortalitas<br />

Cuiusque dono sanatur nostra nunc infirmitas,<br />

Et a quo protrata morte regnat immortalitas.<br />

Gloria sit <strong>de</strong>o, patri, proli quin spiritui,<br />

Deo trino necnon uni, paci, uitae, lumini,<br />

Nomini nimirum dulci diuinoque numini.<br />

II. RytHMVs COMpLEtORIVs<br />

Fluxit ille labor magnus, quem diurnum dicimus,<br />

Et redit quietis tempus, quam nocturnam pangimus.<br />

Esto nunc, dies aeterne, custos nobis intimus,<br />

Qui nescis oriri, certe niecis et occumbere.<br />

Tu uita, salus et quies, tu sine labe dies,<br />

Tu lux perennis piorum, fons origo mentium,<br />

Qui noctem quietis almam tribuis mortalibus,<br />

Noctem, inquam, tenebrarum signatricem prouidis.<br />

Eo ductu monuisti spatiando nouiter,<br />

Illam quod diuisionem disceremus gnauiter<br />

Principalem, quam tulisti luce atque tenebris,<br />

Lucem probans esse bonam cunctisque perutilem<br />

Proui<strong>de</strong>nter tenebrarum dirempta caligine,<br />

Vbi lancem posuisti geminam iudicii,<br />

Cum lex coepit exarari Moysi temporibus<br />

Existens tuis <strong>de</strong>ductor ad promissam patriam<br />

Die nubis sub columna, nocte sub flammiuoma.<br />

Ergo, Christe, tenebrosa tolle nobis opera<br />

Sisque nobis nube mitis, non igne terribilis,


IX. annexes<br />

Vt in te nunc aeternumque possimus quiescere.<br />

Gloria, laus, honor patri, proli ac spiritui<br />

Ex ambobus proce<strong>de</strong>nti ante orsa saeculi,<br />

Trinitati lux perenni, unitati perpeti.<br />

III. MEdIAE NOCtIs Ad NOCtVRNOs VIdELICEt HyMNOs<br />

Galli cantu mediante noctis iam caliginem<br />

Et produndae noctis atram leuante formidinem<br />

Te, <strong>de</strong>us alme, rogamus supplicesque poscimus,<br />

Vt a nobis tollas pie chaos confusibile<br />

Erebique chasma pella mortis antra conteras.<br />

Ad hoc nam uenisti clemens a paternis sedibus<br />

Vigil, potens, lux perennis atque custos maximus,<br />

Dum tenerent simul cuncta medium silentium<br />

Red<strong>de</strong>rent necnon mortalem meritis effigiem,<br />

Quo nos excitares, Christe, <strong>de</strong> somno malitiae<br />

Atque gratis liberas nocturno <strong>de</strong> carcere<br />

Red<strong>de</strong>resque nobis lucem uitae semper comitem.<br />

Namque nox signat aduersa mortis et pericula<br />

Tartarique Phlegetonta pingit antra tristia.<br />

Contra quae uenisti tan<strong>de</strong>m, qui formasti hominem,<br />

Lux aeterna, lumen potens, dies in<strong>de</strong>ficiens,<br />

Debellator atrae noctis, reparator luminis<br />

Destructorque tenebrarum, illustrator mentium,<br />

Quo nascente suscitamur, quo uocante surgimus,<br />

Faciente quo beati, quo linquente miseri,<br />

Quo a morte liberati, quo sumus perlucidi,<br />

Quo mortis uictores facti, noctis atque saeculi.<br />

Ergo nobis, rex aeterne, lucem illam tribue,<br />

Quae nulla fuscatur nocte solo gau<strong>de</strong>ns lumine.<br />

Gloria sit <strong>de</strong>o, (patri proli quin spiritui,<br />

Deo trino necnon uni, paci, uitae, lumini,<br />

Nomini nimirum dulci diuinioque numini).<br />

IV. RytHMVs MAtVtINVs<br />

A<strong>de</strong>st tempus matutinum, dulce gallicinium,<br />

Quo morte perempta redit saluator ab inferis,<br />

Ille blandus et tremendus, mitis et terribilis,<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

184<br />

IX. annexes<br />

Qui crucis in ara pie nostrum fleuit uespere<br />

Et patri concillauit toto fissus corpore<br />

Se pro nobis offerendo hostiam placabilem,<br />

Holocaustum singulare, uictimam mirabilem,<br />

Mire multum libra pensum, dulce sacrificium.<br />

Hinc manarunt sacramenta, quis constat ecclesia :<br />

Sanguis, aqua, uita nostra, mistica re<strong>de</strong>mptio,<br />

Pax inormis et dulcedo,lucida purgatio.<br />

Sicque restat sepultura, qua quiescunt mortui,<br />

Quam prouidit et quadrato protulit senario<br />

Occurrens nobis per simplum et proturbans geminum.<br />

His ita surrexit Christus blandus et fulgoreus,<br />

Quod docebat ad sepulchrum iuste se<strong>de</strong>ns angelus,<br />

Qualis est electis Christus, qualis peccatoribus.<br />

Ergo te precamur, <strong>de</strong>us fortis et omnipotens,<br />

Lux aeterna, mane nostrum lumenque perpetuum,<br />

Vota nostra matutina digneris respicere,<br />

Nostros dies tua pace placeat disponere,<br />

Salues nos uigil aeternus a noctis operibus,<br />

Dimittas peccata nostra, parcas facinoribus,<br />

Facias nos crucifixos uiciosis actibus<br />

Atque tibi consepultos quadratis muneribus,<br />

Vt, cum dies repentina tremendi iudicii<br />

Coeperit clarere cunctis specie terribilis<br />

Et tubae clangor audiri, qua resurgent mortui,<br />

Nos cognoscere digneris tuos esse proprios,<br />

Immutatos, incorruptos pariterque lucidos<br />

Ac tales digneris parti <strong>de</strong>putare <strong>de</strong>xterae.<br />

Hisque uotis simul iunge, <strong>de</strong>us clementissime,<br />

Hunc diem sine peccato tribuas transigere,<br />

Opem miseris instanter da misericorditer,<br />

Quo tibi possimus, <strong>de</strong>us, adhaerere iugiter,<br />

Et tibi placere semper conce<strong>de</strong> salubriter.<br />

Gloria sit <strong>de</strong>o nostro, patri potentissimo,<br />

Proli magne atque sancto flamini paraclito,


Quorum est una maiestas per aeterna secula.<br />

V. HORAE pRIMAE<br />

Audi lau<strong>de</strong>s horae primae, <strong>de</strong>us clementissime,<br />

Quas tibi fundit <strong>de</strong>uote necnon fi<strong>de</strong>lissime<br />

Grex pusillus ac misellus humilis et modicus<br />

Namque tu es magnus sator uitis et agricola,<br />

Non confuse nec diuise tu, pater familias,<br />

Operarios conducens electam in uineam,<br />

Quo existi primo mane Abel sacrificio,<br />

Tertia progressus in<strong>de</strong> Noe archam uelitans,<br />

Sexta pronotans et nona Abraham et Moysen,<br />

Donec tan<strong>de</strong>m tu uenisti consecrans un<strong>de</strong>cimam.<br />

Hinc primum uiuendi modum docens naturaliter<br />

Alterum per datam legem statuis legaliter.<br />

Sicque gradibus ascensis iubes spiritaliter<br />

Viuere, sic operari mistica in uinea,<br />

Vn<strong>de</strong> fiunt iure primi, qui erant nouissimi.<br />

Spiritalis namque uita animalem iudicat<br />

Et proce<strong>de</strong>ns aequa lance iam carnalem reprobat.<br />

Ergo, <strong>de</strong>us pie, clemens rexque prestantissime,<br />

Nostram uineam moralem digneris excolere<br />

Atque uitam puerilem misertus attollere<br />

Ac primeue iuuentutis flosculos erigere,<br />

Totum robur iuuenile miseranter regere<br />

Ac corpus et cor senile pie iam inuisere<br />

Et facta diuisione corporis et animae<br />

In tuas se<strong>de</strong>s beatas dignanter recipere<br />

Atque ista modo primis ostendas auspiciis<br />

Hunc diem sine peccato dona nos transigere<br />

Et donec te ui<strong>de</strong>amus hos dies disponere.<br />

VI. HORAE tERtIAE<br />

Hora tertia qui missus aduenisti celitus,<br />

Nunc, <strong>de</strong>us, ad nos benignus ueni, sancte spiritus,<br />

Qui pariliter es pius ut pater et filius.<br />

Exue nos uniuersis, precor, a flagiciis<br />

Facinoribus et cunctis omnibusque uitiis<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

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186<br />

IX. annexes<br />

Indueque te nos gratis indignos, ut perspicis.<br />

Nam fouebas uniuersam mundi noui fabricam<br />

Animabas atque cunctam creaturae machinam<br />

Osten<strong>de</strong>ns multiplicandam septiformem gratiam,<br />

Vn<strong>de</strong> te rogamus, alme spiritus paraclite,<br />

Quatinus digneris ope famulos inuisere<br />

Nosque tuos benedicte seruulos efficere,<br />

Vt possimus in aeternum habere propitium<br />

Te et patrem sempiternum filiumque maximum,<br />

Quorum est una potestas et communis caritas,<br />

Ineffabilis maiestas, infinita bonitas,<br />

Admirabilis facultas et inuicta pietas,<br />

Inexplebilis uoluptas, perpes immortalitas.<br />

Honor, uirtus atque regnum, <strong>de</strong>us, et imperium,<br />

Iuge sceptrum et tropheum simulque tripudium.<br />

Gloria sit <strong>de</strong>o, patri, proli quin spiritui,<br />

Deo trino necnon uni, paci, uitae, lumini,<br />

Nomini nimirum dulci diuinoque numini.<br />

VII. (HORAE) sExtAE<br />

Hora sexta crucifixus, summi patris unicus,<br />

Qui tuis aeterna salus perpetim propitius<br />

Nostros <strong>de</strong>leas excessus et peccata, quaesimus,<br />

Et a nobis pelle taetras, lux aeterna, tenebras,<br />

Quas Iudaei perpen<strong>de</strong>ndas non sensere mysticas<br />

Neque suas tenebrosas agnouerunt maculas<br />

Caecati profunda nocte cor<strong>de</strong>, ore, opere,<br />

Vn<strong>de</strong> sunt gauisi multum tanto <strong>de</strong> facinore<br />

Accensi nefanda nece facibus inuidiae.<br />

Sed tu, splendor, alme <strong>de</strong>us, tuis sis fi<strong>de</strong>libus<br />

Multum clemens at benignus atque praestantissimus,<br />

Nostra semper dona nobis peccata <strong>de</strong>plangere<br />

Maculasque iuuentutis lacrimis diluere,<br />

Bonis iugiter instare, mala uero fugere<br />

Gratia semperque tua caelibes existere,<br />

Quo perennes tibi lau<strong>de</strong>s ualeamus dicere,<br />

Ex te, per te in te quoque hinc possimus uiuere


IX. annexes<br />

Teque uitam sempiternam flamine cognoscere<br />

Necnon ipso <strong>de</strong>briati te semper diligere.<br />

Hic Amen subdo libenter dulci modulamine.<br />

Gloria, laus, honor patri, proli ac spiritui<br />

Ex ambobus proce<strong>de</strong>nti ante orsa saeculi<br />

Trinitati lux perenni, unitati perpeti.<br />

VIII. (HORAE) NONAE<br />

Hora nona qui potenter emisisti spiritum<br />

Et nobis uitae perennis contulisti praemium<br />

Prouidaque pensum libra consecrasti pretium,<br />

Nostrae mortis infernale penetrando baratrum<br />

Lux ad inferos cessisti diem fun<strong>de</strong>ns tenebris,<br />

Vbi tuis adsignasti uestimenta niuea,<br />

Reprobos multasti poena merito fulgorea,<br />

Hinc timentes et sperantes te precamur plurima :<br />

A nobis aeternae mortis <strong>de</strong>pellas formidinem<br />

Et tuis profundae noctis auferas caliginem<br />

Atque eos tuam transfer uitae ad dulcedinem.<br />

Tu es ueste candidatus, aspectu fulmineus,<br />

Tu es blandus et amandus, mitis et terribilis,<br />

Tu es pulcher et dilectus ac <strong>de</strong>si<strong>de</strong>rabilis,<br />

Solus uere immortalis et incommutabilis,<br />

Tu sanctus et admirandus, i<strong>de</strong>m rex et dominus,<br />

Purga nos multum squalentes et peccatis sordidos,<br />

Fac nos mente luminosos, corpore perlucidos,<br />

Vt tan<strong>de</strong>m corpus exutos recognoscas candidos.<br />

Hic fiat Amenque subdo uotis iungens modulos.<br />

Gloria sit <strong>de</strong>o, patri proli quin spiritui,<br />

Deo trino necnon uni, paci, uitae, lumini,<br />

Nomini nimirum dulci diuinoque numini.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

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IX. annexes<br />

O MI CVstOs<br />

O mi custos, o mi heros, mi pater misericors,<br />

Flecte, precor, ad me tuos miseranter oculos,<br />

Lucem super omnem pulchros, super solem splendidos.<br />

Tuque, mi re<strong>de</strong>mptor, Christe, fili patris optime,<br />

Dignare tuo cum patre me, quaeso, respicere<br />

Vt respectus possim flere miser amarissime.<br />

Tuque, spiritus o sancte, pie mi paraclite,<br />

Qui ex patre filioque procedis assidue,<br />

Me tuo misellum more conturbandum commoue.<br />

Noui namque me peccasse contra te grauissime<br />

Sicut die ita nocte cor<strong>de</strong>, ore, opere.<br />

Laboraui semper ual<strong>de</strong> te, <strong>de</strong>us, offen<strong>de</strong>re.<br />

Laboraui, inquam, ual<strong>de</strong> plura mala facere,<br />

Quam sint homines in orbe, quam astra in aethere<br />

Vel quam pisces intra mare, arena in litore.<br />

Volo un<strong>de</strong> nunc lugere, sed non possum,domine.<br />

Sine te quiui peccare, sed nequeo plangere.<br />

Sine te sum lapsus male, sed non possum surgere.<br />

Non enim possum plorare nec lamenta fun<strong>de</strong>re,<br />

Potui multa patrare qui mala cotidie,<br />

Quorum soli patet tuae numerus scientiae.<br />

Caro ita qui<strong>de</strong>m mea sine te est arida<br />

Sicut terra sine aqua, sicut petra rigida,<br />

Oculorum est pupilla ceu cristallum frigida.<br />

Sicque sicut silex dura cuncta sunt praecordia,<br />

I<strong>de</strong>o non ualet ulla emanare guttula<br />

Exque me nec saltem una ire potest lacrima,


Proin<strong>de</strong> meorum multa criminum cum milia<br />

Sint et plura quam arena marina per litora<br />

Atque multo grauiora massa extent plumbea.<br />

Clamat, ecce, supplex mea nunc ad te miseria,<br />

Petens ut digneris tua me misericordia<br />

Hac respicere in hora torpentem socordia.<br />

Age, iam mei mollita <strong>de</strong> cordis duritia,<br />

Educ, quaeso, modo multa lacrimarum flumina<br />

Ad facinora <strong>de</strong>flenda simul et flagitia.<br />

Grauiter peccauit mea nam tibi <strong>de</strong>mentia,<br />

Fortiter succurrat tua sed mihi clementia,<br />

Quoniam est tibi tanta ceu nulli potentia.<br />

Tu es trinus, tu es unus, tu es potentissimus,<br />

Tu es pius, tu benignus, tu es clementissimus,<br />

Ob hoc meis da dignatus flumina luminibus.<br />

Tu petram in stagna dudum conuertisti laticum<br />

Atque rupem in aquarum fontes multiplicium,<br />

Tu potes cor ita meum emollire ferreum,<br />

Tu pectus adamantinum red<strong>de</strong>re ut carneum,<br />

Tu mutare nunc beluinum in humanum animum<br />

Veteremque uel antiquum in iam nouum spiritum.<br />

Ad ca<strong>de</strong>ndum sola mea sufficit miseria,<br />

Ad surgendum eget tua sed misericordia,<br />

Quia inest mihi multa, pro dolor, uecordia.<br />

IX. annexes<br />

Porrige iam lapso manum, da luctum, da gemitum,<br />

Dona fletum, dona planctum ploratumque plurimum<br />

Facque cor humiliatum conturbatum spiritum.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

190<br />

IX. annexes<br />

Plorem, pater, uehementer te donante iugiter.<br />

Plorem, fili patris, semper, flagito suppliciter.<br />

Plorem, spiritus o sacer, te fauente impiger.<br />

Lacrimer in<strong>de</strong>sinenter et incessabiliter<br />

Lamenter necnon instanter infatigabiliter,<br />

Vt post perpetim consoler tecum et exhilarer.<br />

Summe pater, miserere, ac misericordiae<br />

Miseranter, quaeso, tuae clemens reminiscere<br />

Et ad meum me adtrahe forti Iesum robore<br />

Tuque, domine, o Christe, o caput ecclesiae,<br />

Adtractum <strong>de</strong>posco ad te me dignanter recipe<br />

Et receptum solidare in te noli spernere.<br />

Tuque, o sancte spiritus ac dulcis paraclite,<br />

Mei semper meminisse noli, rex, contemnere,<br />

Sed da patrem filiumque atque te diligere.<br />

Deus trine, <strong>de</strong>us une, <strong>de</strong>us clementissime,<br />

Trinitas colenda cor<strong>de</strong>, mente atque pectore,<br />

Vnitas amanda ual<strong>de</strong> omni nobis tempore,<br />

Qui es quadri diligendus orbis in climatibus,<br />

Sed mei plus irritatus corporis heu sensibus<br />

Quam sis mundi a totius credo peccatoribus,<br />

Miserere, quaeso, <strong>de</strong>us, miserere concitus,<br />

Succurre, <strong>de</strong>posco, prius quam inferni abyssus<br />

Me absorbeat, quo nullus utilis est gemitus.<br />

Respice quapropter prius, pater, fili, spiritus,<br />

Trine <strong>de</strong>us atque une, pereat quam famulus,<br />

Quem plasmasti tuis pius miserando manibus.


Manuum tuarum opus respice clementius,<br />

Si respexeris ploratus sequetur uberrimus,<br />

Immo simul ululatus erit amarissimus.<br />

Ego, pater, ille tuus prodigus sum filius,<br />

Abs te procul exul factus qui fui diutius<br />

Meretricibus coniunctus et consumptis omnibus,<br />

Quae tu bonus es largitus, panis miser indigus,<br />

Effectus fui subulcus saturari cupidus<br />

Siliquis, sed <strong>de</strong>dit nullus quae dabantur suibus.<br />

In me autem nunc reuersus, cum sim mendicissimus<br />

Cumque tuae sciam prorsus multos penetralibus<br />

Mercennarios in domus abundare panibus,<br />

Reminiscens, quod benignus es atque piissimus,<br />

Pietate tua fisus, quamuis indignissimus<br />

Nomine serui misellus filiique penitus,<br />

Aduolutus clamo tuis eiulans uestigiis,<br />

Pater mi, peccaui meis in caelum miseriis<br />

Atque coram te <strong>de</strong>lictis grauibus et nimiis.<br />

Non sum dignus dici tuus seruus nedum filius,<br />

Sed iam iam dignetur meus pater clementissimus<br />

Tractare suam benignus pietatem citius.<br />

Eripe <strong>de</strong> portis mortis me, pater amabilis,<br />

Pereat ne tui iuris suis plasma meritis.<br />

Abest panis, a<strong>de</strong>st famis, pestis miserabilis.<br />

Nemo panem habet uitae praeter te, altissime,<br />

Quem nunc cernor esurire indignus percipere,<br />

Sed gratuito largire tu pius hunc munere<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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IX. annexes<br />

Saginatus est occisus fratri meo uitulus,<br />

Qui fuit peregrinatus a patre diutius,<br />

Cum multis luxuriatus miser meretricibus,<br />

Qui ad te ubi reuersus fuit mendicissimus<br />

Consumptis paternis rebus atque bonis omnibus,<br />

Indigens suilli uictus sed carens hoc funditus.<br />

Inops panis, diues famis, ut est piis oculis<br />

A longe respectus patris est donatus osculis,<br />

Amplexatus et benignis uehementer bracchiis.<br />

Aliud nil fuit fatus, ni quod esset filius<br />

Eius ultra iam indignus, seruis a fi<strong>de</strong>libus<br />

Prima stola est indutus inque manu anulus<br />

Est confestim sibi datus, tegumenta pedibus<br />

Pariterque saginatus est occisus uitulus<br />

Sicque fuit epulatus tecum, pater, filius.<br />

Ergo, quia est inuentus, fuerat qui perditus,<br />

Rediit resuscitatus et reuixit mortuus,<br />

Gaudio magno gauisus est cum seruis dominus.<br />

Igitur ego ipsius nunc ad te, fraterculus,<br />

Clamo tuis aduolutus, pie pater, pedibus<br />

Tuus fateor indignus nihil minus filius.<br />

Ecce (petit Go<strong>de</strong>scalcus) ueniam sceleribus<br />

Pro suis, offensum quibus te tristatur pluribus,<br />

Quam polus ipse dipictus splen<strong>de</strong>at si<strong>de</strong>ribus.<br />

Ergo sicut tunc pius nihil eras amplius,<br />

Tam clementer es misertus nato currens obuius,<br />

Miserere sic dignatus modo mei ocius.


Et qui<strong>de</strong>m nil eo minus uerum multo amplius,<br />

Peccaui tibi proteruus diebus ac noctibus,<br />

At bonum pro nefas tardus, ad malum promptissimus.<br />

Iustificaui misellus meis facinoribus<br />

Peccatores omnes, mundus quos tenet quadrifidus,<br />

Proin<strong>de</strong> peto prostratus : miserere citius !<br />

O Iesu, quatriduanus, bone pastor, Lazarus<br />

Mortis in sepulchro situs iamque nimis fetidus<br />

Monumento quamuis pressus iamiam scatens uermibus<br />

Ecce, iacet interemptus multis pro criminibus,<br />

Quae gessit econtra stultus segnis hebetissimus,<br />

Priuatus uelut ambobus cum sensu luminibus.<br />

Freme, freme, bone Iesu, ac turbare spiritum,<br />

Lacrimare pio fletu serui pro interitu,<br />

Propria qui semet manu interemit iam diu.<br />

Clama, clama, Iesu Christe, uoce magna, domine :<br />

"Prodi foras, tumulate, ueni foras, Lazare !<br />

Exi, exi, ac proce<strong>de</strong> iam mortis <strong>de</strong> carcere!"<br />

Si clamaueris me, Christe, re<strong>de</strong>mptor piissime,<br />

Exibo laetus repente ac procedam propere.<br />

Quin uita seruum uocante fugiet mors rapi<strong>de</strong>.<br />

Ligatus manus et pe<strong>de</strong>s faciemque Lazarus<br />

Prodiit ille antiquus uoce <strong>de</strong>i excitus.<br />

Sic ego plus licet uinctus non prodibo tardius.<br />

Fili <strong>de</strong>i, Christe, uiui iube tui Lazari<br />

Pe<strong>de</strong>s, manus, ora solui et abire <strong>de</strong>sini<br />

Et uestigiis aduolui sui sacris domini.<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

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<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

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IX. annexes<br />

Iam tibi tuoque patri quin sancto spiritui,<br />

Trino <strong>de</strong>o atque uni cor<strong>de</strong>, ore supplici<br />

Grates ago uoce tali honore sub triplici.<br />

Benedictus sit excelsus genitor et genitus<br />

Spiritus necnon et sanctus, perdulcis paraclitus,<br />

Per quem suus est secundus suscitatus Lazarus,<br />

Manicis qui magnis uinctus, constrictus compedibus,<br />

Flammis eram <strong>de</strong>stinatus poenarum ultricibus,<br />

Quae tormentis extant prorsus plenae multiplicibus.<br />

Gloriam cantabo sane omni tibi tempore,<br />

Si digneris euocare mortis me <strong>de</strong> limine,<br />

Cui est uita cum patre et regnum cum flamine.<br />

Tange, tange, Iesu Christe, meos clementissime<br />

Oculos et squamas in<strong>de</strong> serpentinas abice<br />

Fluminaque multa ual<strong>de</strong> lamentorum elue.<br />

Tactos terge et reterge, quo plus fluant lacrimae.<br />

Fluant nocte, fluant die, ut possint restinguere<br />

Flammas, quae sunt mihi iure poenis meis <strong>de</strong>bitae.<br />

Spiritus o sancte, pia respice me gratia<br />

Et mersum mortis in ima me, precor, uiuifica<br />

Ac uiuificatum tua luce iam illumina.<br />

Gratis nam fecisti tua me misericordia,<br />

Gratis, flagito, reforma <strong>de</strong>num et resuscita,<br />

Gratis tua dantur dona, hinc dicuntur gratia.<br />

Memento, domine <strong>de</strong>us, quod gignens ac genitus<br />

Vt es potens atque pius, sic tu nihilominus<br />

Ante saecia es benignus, mitis, potens, ualidus.


In quemcumque enim spiras statim hunc uiuificas,<br />

Cum patre, cum prole tonas, regis et illuminas,<br />

Gratiam, cui uis, donas, solidas et uegetas.<br />

Quos placet, benigne uocas, uocatos sanctificas,<br />

Humiles pius exaltas et altos humilias<br />

Immundosque, quos uis, mundas, impuros purificas.<br />

Quid plura ? Leprosos sanas, impios iustificas,<br />

Cum patre proleque cuncta, quas uis, mentes recreas<br />

Insuper et recreatas pariter glorificas.<br />

Quamobrem te, <strong>de</strong>us pie, postulo humillime,<br />

Cito mihimet succurre cum patre, cum sobole<br />

Et oui nimis infirmae gratiam iam tribue.<br />

Da, precor, in te clamare, abba, pater, domine<br />

Necnon atque Iesu Christe simul, quaeso, dicere,<br />

Quin et te, o flatus alme, uocare humillime.<br />

Da timere, da amare, da feruenter colere<br />

Patrem, prolem sanctum atque da flatum diligere<br />

Toto cor<strong>de</strong>, tota mente toto necnon pectore.<br />

Esto mihi timor ingens atque amor uehemens,<br />

Diligam te nimis timens timeamque diligens<br />

Seruiamque contremiscens contremiscam seruiens.<br />

Exue me, peto, meis, domine, flagitiis,<br />

Quibus te offendi nimis retro actis saeculis<br />

Et nunc quoque plura priscis addo noua maculis.<br />

Deduc me in uiam pacis, cum obire iusseris,<br />

Portioque mihi lucis tunc patescat perpetis<br />

Merear et cum beatis te laudare angelis.<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

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IX. annexes<br />

Gloria, laus, honor patri, proli ac spiritui<br />

Ex ambobus proce<strong>de</strong>nti ante orsa saeculi,<br />

Trinitati lux perenni perpeti. AMEN.<br />

VALEO OMNIGENVM<br />

……… Heu, ualeo, omnigenum quia pon<strong>de</strong>re flagitiorum<br />

Me scio <strong>de</strong>pressum ; hinc uereor, rex splendi<strong>de</strong>, multum<br />

Cum mihi lamentum potius quam carmina laudum<br />

Competat et magnum pro carmine fun<strong>de</strong>re planctum.<br />

At tu pen<strong>de</strong>ntem crucis et tormenta luentem,<br />

Protulit ut lau<strong>de</strong>m, exaudisti, sancte, latronem<br />

Fun<strong>de</strong>ntique precem largitus es ipse salutem.<br />

Et sibi caelestem tribuisti cernere lucem.<br />

Sic quoque nunc famulum dignare audire misellum,<br />

Quin et uota precum pariter cum carmine laudum.<br />

Iam, precor, exaudi, qui nullum foeda fatenti<br />

Vulnera nescisti celeri pietate me<strong>de</strong>ri,<br />

Infaustoque mihi citius succurre petenti<br />

Atque me<strong>de</strong>re mei languoribus, obsecro, morbi,<br />

Qui licet ante tibi sint, o <strong>de</strong>us inclite, noti,<br />

Hos tamen ipse humili iam iam uolo cor<strong>de</strong> fateri.<br />

Sed cum sint nimii nequeantque ex ordine pandi,<br />

Hos idcirco breui perstringam cuncta scienti.<br />

………………….


AGE QVAEsO pERGE CLIO<br />

Age, quaeso, perge, Clio,<br />

Remeando cor<strong>de</strong> fido.<br />

Propera, celer uirageo,<br />

Repeda, sagax propago,<br />

Cui frater est Apollo.<br />

Ob id hoc uelut uolando<br />

Fer amico ouans Rathramno,<br />

Domino, patri, magistro,<br />

Calamo metrum impolito,<br />

Quod ei libens remitto,<br />

Celebri uiro et corusco,<br />

Amo quem satis profecto<br />

Animo pio atque benigno,<br />

Datur ut mihi maligno<br />

Ab eo <strong>de</strong>o, bonum qui<br />

Dabit omne flagitanti,<br />

Sine quo nihil fore ulli<br />

Liquet ut ualent alumni.<br />

Igitur, uelut petita<br />

Es, abi, mora nec ulla<br />

Tenearis ac <strong>de</strong>cora<br />

Vi<strong>de</strong>as sodalis ora.<br />

Bis enim uenis ab illo<br />

Speciosa iam magistro<br />

Adimens fel, imprimens mel.<br />

Reficis bis os alumni<br />

Dape dulci, odore suaui.<br />

Vbi hunc ui<strong>de</strong>s se<strong>de</strong>ntem,<br />

Alios probe docentem,<br />

Rogitent <strong>de</strong>um potentem,<br />

Det ut his piam quietem,<br />

Rogo, dic iugem salutem.<br />

Septeno Augustas <strong>de</strong>cimo praeeunte kalendas,<br />

Solis equi dulcem efflarunt ubi naribus ignem<br />

Fluctibus Oceani capita atque iubas malefacti<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

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IX. annexes<br />

Assuetum ad cursum properantes uertere currum,<br />

Splendidum iam toto cesserunt si<strong>de</strong>ra caelo,<br />

Pallida germano cessit quoque Cynthia Phoebo<br />

Solus iamque citis quadrigam agitabat habenis<br />

Iamque iubar mundo fun<strong>de</strong>bat amabile quadro<br />

Iamque nitore nouo ac splendore micabat opimo<br />

Clara et luce suam red<strong>de</strong>bat cuique figuram,<br />

Gau<strong>de</strong>bat tenebras procul omnis terra fugatas<br />

Atque mihi adplau<strong>de</strong>ns ueluti praesaga boni mens<br />

Tripudiabat ouans solito magis atque triumphans<br />

Artubus et cunctis hilarandi inerat potior uis,<br />

Cum mihi gratuito data sunt subito metra dono<br />

Celsithroni regis <strong>de</strong> parte relata sodalis<br />

Dulcia melle magis trans lumen fulgida solis,<br />

Quae sitiebat, uti mea mens sub si<strong>de</strong>re Cancri<br />

Messor amat refici fontis dulcedine puri<br />

Trabidus utque fame recreari uult quoque pane<br />

Algidus utque focum utque exoptat nudus amictum<br />

Exul uti patriam ceu terram naufragus imam<br />

Vtque situs tenebris cupit almae munera lucis.<br />

Haud secus egregias mea nunc cupiebat egestas,<br />

Quas tua nobilitas <strong>de</strong>prompsit, amice, Camenas<br />

Insignes, pulchras, dulces habilesque, uenustas,<br />

Famine perspicuas et uero pignore puras,<br />

Scematibus ualidas tropicoque lepore coruscas,<br />

Simplicitate probas, humili pietate <strong>de</strong>coras,<br />

Cum sale conditas, tum pacis amore politas.<br />

Quas equi<strong>de</strong>m sanctum dictasse reor tibi flatum.<br />

Immo procul dubio nihil hinc, uir humillime, nato<br />

Sunt bona cuncta ab eo ac cupienti dantur egeno.<br />

Ergo hunc aequalem pariterque pium genitorem,<br />

Trinum unumque <strong>de</strong>um uotis efferre per aeuum<br />

Debeo supplicibus, quo sum tibi praesi<strong>de</strong> iunctus.<br />

Absque meis meritis fecit hoc <strong>de</strong>nique gratis,<br />

Effuso qui te uoluit reparare cruore,<br />

Ditauit sophiae speciali quin et honore,


IX. annexes<br />

Virtutis uarie donauit amando <strong>de</strong>core.<br />

Dignus et est uite hinc laudum per saecia fauore,<br />

Si daret efficere id parili sine fine tenore,<br />

Sincero certe iugiter redamandus amore<br />

Et casto sancte metuendus ubique timore,<br />

Competit assidue quem sancto efferre tremore,<br />

Viscera largiri ualeant si nostra quid illi.<br />

Indigus est nostri, qui nil utique emolumenti.<br />

Non eget obsequii neque seruitii atque nec hymni.<br />

Solus ob id domini potitur cognomine ueri<br />

Et tamen ipse horum reliquorum siue bonorum<br />

Est dator atque auctor ceu nosti tu, bone doctor.<br />

Mente humili hunc i<strong>de</strong>o, si dat, benedicere certo,<br />

Quod tribuit nobis talem te pignus amoris,<br />

Qui seruare uelis et pangere dicta poesis,<br />

Quae sancto flatu non uili inflata boatu<br />

Dulciloquo affatu celebri rutiloque relatu<br />

Demulcet mentem modulaminis huius egentem<br />

Et solatur eam uariis languoribus aegram.<br />

Diuersisque malis diuersa poemata psallis.<br />

Sic cytharista etenim studuit celeberrimus olim<br />

Cor sedare hominis fidibus psallendo canoris<br />

Nimirum hominis iam regni honore carentis,<br />

Quem draco cru<strong>de</strong>lis uexabat et improbus anguis<br />

Et uere merito dominum, quia liquerat ultro<br />

Elatus fastu nimio feritatis et astu.<br />

Huic te psalmistae, huic, inquam, similem cytharistae<br />

Dixerim, amice sacer, generose poeta, frequenter<br />

Qui modulando tui leuigas graue pectus alumni.<br />

Atque utinam prosa tam dulcia tam speciosa<br />

Tam praefulgida et tam suauia tamque <strong>de</strong>cora<br />

Tam pia, tam placida atque, quod est plus, tam mihi uera<br />

Psallere magnifici pietas uoluisset amici !<br />

Hic tamen id parco in<strong>de</strong>, alibi quod red<strong>de</strong>re spero,<br />

Scripta fauente <strong>de</strong>o, licet id cito ut opto nequibo,<br />

Multas ob causas, quarum primam esse uenustas<br />

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IX. annexes<br />

Hanc uolo uestra sciat, quia uix uacat hora, residat<br />

Qua mea rusticitas, ut saltim hinc fingere ternas<br />

Litterulas liceat, quoniam imperium patris instat<br />

Ad patrandum aliquid, cum hoc, tunc protinus illud.<br />

Istud ob id nequeo, sed et haec ueraciter addo,<br />

Quod nimium metuo tibi respon<strong>de</strong>re, quod imo<br />

In sensu teneo, quia torpeo pectore bruto<br />

Inscitiae plenus multoque errore uolutus,<br />

Quamlibet hoc modico usus sim sub tempore pauco.<br />

Namque magisterio uix uno subditus anno<br />

Nec didici <strong>de</strong>inceps, dubiis ambagibus anceps,<br />

Sultorum princeps, abrupta per omnia praeceps.<br />

Nemo fuit mihi dux, i<strong>de</strong>o minime patuit lux,<br />

Septo peccatis quantum pietas nisi gratis<br />

Caelestis tribuit, cui uirtus, gloria, laus sit.<br />

Raro hoc per me fit, per te peto, crebrius ut sit.<br />

Proin<strong>de</strong>, scientiole scintillula cum mihi inesse<br />

Vix queat, extimeo hinc, quid amico fren<strong>de</strong>re summo<br />

Sensibus arguto lingua uehementer acuto,<br />

Quippe exercitio, qui nocte dieque sub isto<br />

Versatus dudum euasisti culmen ad ipsum.<br />

Hoc equi<strong>de</strong>m atten<strong>de</strong>ns, appen<strong>de</strong>ns atque reuoluens,<br />

Virtutem inflantem postponens aedificantem<br />

Gau<strong>de</strong>ns praeferre institui hactenus in<strong>de</strong> silere,<br />

Donec ope domini hinc ualeam quid certum adipisci,<br />

Aures magnanimis quod <strong>de</strong>mulcere sodalis<br />

Corque iuuare queat, ne squalor in ilia serpat<br />

Et <strong>de</strong>nuo offendam, si friuola forte refundam.<br />

Quod fieri ut possit, mea mens haut impigra poscit<br />

Suppliciterque rogat, pietas ut i<strong>de</strong>m tua poscat.<br />

Denique sunt multi domino donante magistri<br />

Hac regione siti, ingenio locuplete beati,<br />

Vn<strong>de</strong> palatina plerique morantur in aula.<br />

Ad hos atque alios per barbara regna locatos<br />

Cernua his auidus porrexi scripta diebus


IX. annexes<br />

Orans magnopere, dignentur ut ocius in<strong>de</strong><br />

Respon<strong>de</strong>re mihi, ceu scis, uehementer egenti.<br />

Estque Augustini his sententia missa beati,<br />

Quam liquido exponi auctori quadrando poposci.<br />

Nempe tribus horum studui proprium in<strong>de</strong>re sensum,<br />

Matcaudo, Ione atque Lupo rutilantibus ore<br />

Poscens obnixe, satagant ut uera referre.<br />

Proposita est reliquis tantummodo quaestio cunctis.<br />

Obposui sane obicitur, quod parte ab utraque.<br />

Nemo sed excepto quid adhuc mihi reddidit uno,<br />

Qui cum sit cautus simul et catus, est mo<strong>de</strong>ratus<br />

Sic iam terna sui librans responsa libelli,<br />

Vt <strong>de</strong>mpto neutri pleno discrimine parti<br />

Congruat, un<strong>de</strong> tibi recitanda haec utraque duxi,<br />

Respon<strong>de</strong>re alii properant dum mente sagaci,<br />

Quo magis his mihi quam reputes, carissime, quicquam,<br />

Si ui<strong>de</strong>as aliquid, concordans quod tibi non sit.<br />

At licet usque rogo mecum duo perpete uoto,<br />

Pectore quin toto supplex orare memento,<br />

Donetur habilis quo sermo ui<strong>de</strong>licet illis<br />

Cumque uigore salis pia nobis pignora pacis.<br />

Gau<strong>de</strong>o praeterea, nimium ueneran<strong>de</strong> poeta,<br />

Sublimis cum sis, humili quod honore nitescis<br />

Cumque polum subeas, quod humi te repere signas.<br />

Nam placet istud ei, ut nosti, uir splendi<strong>de</strong>, regi,<br />

Qui fore praehumilis pro te est dignatus in imis<br />

Mortis ad usque genus, quod erat super omnia peius.<br />

Hoc uelut ore facis, si cor<strong>de</strong> patrare stu<strong>de</strong>bis.<br />

Cunctarum uere uirtutum stabis in arce.<br />

Nam facile est homini miserum se uoce fateri,<br />

Ceu simulator agit, sed cor<strong>de</strong> tenere, quod infit,<br />

Pauperis est animo in supero regantis Olympo.<br />

Illud enim reprobi faciunt persaepe gemendi,<br />

Hoc autem electi nimirum ab origine mundi.<br />

Idcirco haud meritis ueri sed munere patris.<br />

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<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

202<br />

IX. annexes<br />

Felices, frater, felices, celse magister,<br />

Quos pater in Christo <strong>de</strong>legit more benigno,<br />

Quorum nemo perit, quos sanguinis unda re<strong>de</strong>mit<br />

Agni caelestis, qui uitam contulit illis!<br />

Felix, agnorum fuerit qui extremus eorum !<br />

Nec leo nec praedo lupus ac draco latro nec ambro<br />

Hinc rapient quenquam uel ui uel fraudibus unquam !<br />

Omne qui<strong>de</strong>m, quod ei tribuit pater, aduenit illi.<br />

O dEVs MIsERI MIsERERE sERVI<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Ex quo enim me iussisti hunc in mundum nasci<br />

Prae cunctis ego amaui uanitate pasci.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Tu me, domine, fecisti, ut seruirem tibi,<br />

Ego miser te dimisi et longe abiui.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Tu me quoque re<strong>de</strong>misti <strong>de</strong> iugo seruili<br />

Et ego te non agnoui nec ad te rediui.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Mandata, quae praecepisti, pro dolor ! reliqui,<br />

Fateor uoce lugubri, nimium <strong>de</strong>liqui.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Almam legem, quam <strong>de</strong>disti, <strong>de</strong>nique neglexi<br />

Et illa, quae uetuisti, aui<strong>de</strong> dilexi.<br />

Heu, quid euenit mihi ?


O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Cuncta bona praeteriui animo libenti<br />

Atque multa mala egi pectore feruenti.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Voluntates non dimisi sed his me addixi<br />

Et totius me peccati uinculis <strong>de</strong>uinxi.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Iram tuam prouocaui crimine frequenti<br />

I<strong>de</strong>oque te offendi offensa ingenti.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Sed quid plura dicam tibi, o pia lux saecli ?<br />

Mala, quaeque permisisti, cuncta miser feci.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Ergo iam succurre flenti, domine, clienti<br />

Scelera tibi fatenti ueniam petenti.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Affer opem indigenti iam manu clementi<br />

Vulneraque <strong>de</strong>tegenti me<strong>de</strong>re languenti.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Subueni te inuocanti et in te speranti<br />

Dextram da, quem re<strong>de</strong>misti, iam periclitanti.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

204<br />

IX. annexes<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Igitur uos omnes sancti, cohere<strong>de</strong>s Christi,<br />

Exorate prece dulci pro me infelici.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Alma tu Maria, tui uirgo mater <strong>de</strong>i,<br />

Interuentu nunc salubri memor esto mei.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Sancte Michael, insigni supplicato regi,<br />

Deprecentur atque cuncti angelorum chori.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Patriarchae quin electi et prophetae sancti<br />

Suffragamini petenti precibus clienti.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Clauiger quoque praecelsi, sancte Petre, regni<br />

Socios adiungens tibi preces fun<strong>de</strong> patri.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Martyrumque gloriosi beatorum globi<br />

Flagitate pro miselli peccatis alumni.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Insignes o summi <strong>de</strong>i confessores almi<br />

Opem ferte precor mihi oratu instanti.<br />

Heu, quid euenit mihi ?


O <strong>de</strong>us, miseri miserere serui !<br />

Virgines o clarae uestri per amorem sponsi<br />

Memoramini nunc mei <strong>de</strong>lictis oppressi.<br />

Heu, quid euenit mihi ?<br />

O VENERANdA dEI sVBOLEs<br />

O ueneranda <strong>de</strong>i suboles<br />

Inclita patris et effigies,<br />

Intime splendor et alme dies,<br />

Qui loca lumine cuncta reples<br />

Totus et in genitore manes.<br />

Nempe minus patre quid habes,<br />

Sceptra pari ditione tenes,<br />

Quaeque cupis, domine, illa potes,<br />

Nam recreas reuocasque homines<br />

Et patria pietate foues.<br />

Qui miseros facis incolumes<br />

Linquere crimina quique iubes<br />

Nos et in exilio esse doles<br />

Ad patriamque redire mones<br />

Teque <strong>de</strong>um reperire doces.<br />

Tu, rogo, suscipe nunc humiles<br />

Quas ego, rex, tibi fundo preces<br />

Meque, precor, miserum releues<br />

Ac pietate tua uegetes<br />

Et procul a uitiis segreges.<br />

Omnibus oro bonis soli<strong>de</strong>s,<br />

Ne premat amplius ulla lues,<br />

Sed merear tuus esse comes,<br />

Vt mihi <strong>de</strong>tur amanda quies,<br />

Quam meruere tui proceres.<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

206<br />

IX. annexes<br />

His tua, Christe, patet species<br />

Emicat et rutilat facies,<br />

Hinc quoque sunt iugiter hilares<br />

Teque colunt et amant alacres.<br />

His, <strong>de</strong>us, obsecro me socies.<br />

CHRIstE MEARVM<br />

1 Christe, mearum 2 Vn<strong>de</strong> per almum<br />

Lux tenebrarum, Te rogo flatum,<br />

Memet in atrum Nobile uerbum,<br />

Criminis antrum Qui regis ipsum<br />

Siue baratrum Cum patre mundum<br />

Suscipe lapsum, Compar in aeuum,<br />

3 Erue seruum 4 Atque clientem<br />

Val<strong>de</strong> misellum, Suscipe flentem<br />

Pelle piaclum, Teque timentem.<br />

Tolle reatum, Da mihi mentem<br />

Dirige gressum, Frau<strong>de</strong> carentem,<br />

Red<strong>de</strong> paratum. Praua cauentem<br />

5 Ima sinentem, 6 Tu <strong>de</strong>us unus<br />

Summa petentem Cum patre summus,<br />

Teque colentem Flamine plenus,<br />

Atque scientem, Semper amandus,<br />

Te uenerantem Mente colendus<br />

Quin et amantem. Seu uenerandus.<br />

7 Tu metuendus 8 Inclitus omnis<br />

Rexque tremendus, Conditor orbis<br />

Tutor habendus Luxque perennis,<br />

Et reuerendus Tu pia cunctis<br />

Duxque sequendus Norma ministris<br />

Atque petendus. Forma salutis,


9 Dextera fessis 10Spes mea, Christe,<br />

Spes quoque lapsis, Rex benedicte,<br />

Palma regressis Lux pia uite<br />

Sedula iustis, Duxque perite,<br />

Gloria seruis Pastor aman<strong>de</strong><br />

Et <strong>de</strong>cus almis. Quin ueneran<strong>de</strong>,<br />

11 Respice nunc me, 12Gloria lausque<br />

Da, sequar ut te, Sit tibi, Christe,<br />

Iam miserere Cum genitore<br />

Iamque me<strong>de</strong>re Quin et amore,<br />

Et tibi fac me Nunc utriusque<br />

Iamque placere. Quin sine fine. Amen.<br />

spEs MEA CHRIstE<br />

1 Spes mea Christe, 2 Summe creator<br />

Rex benedicte, Et reparator,<br />

Lux pia uite Sis mihi factor<br />

Duxque perite, Semper et auctor,<br />

Pastor aman<strong>de</strong> Sis animator<br />

Quin ueneran<strong>de</strong>, Et recreator.<br />

3 Tu iugis esto 4 Respice flentem,<br />

Gloria seruo, Queso, clientem<br />

Perpes alumno Te metuentem<br />

Vita misello, Atque petentem,<br />

Semper a<strong>de</strong>sto, Te uenerantem<br />

Rex pie, uoto. Quin et amantem.<br />

5 Porrige <strong>de</strong>xtram, 6 Tolle ruborem,<br />

Erige uernam, Mitte pudorem,<br />

Exue multam Pelle pauorem,<br />

Postulo culpam, Fun<strong>de</strong> nitorem,<br />

Corrige uitam Velle rigorem<br />

Tu male tritam. Daque uigorem.<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

208<br />

IX. annexes<br />

7 Necte timorem 8 Semper ubique,<br />

Quin et amorem, Christe, tuere<br />

Posco, perennem Et mihi, celse<br />

Per genitorem, Tu, misere<br />

Qui regit omnem Teque timere<br />

Fortiter orbem. Atque amare,<br />

9 Per tua, sancte, 10Da meditari<br />

Scripta meare, Et modulari,<br />

Cor<strong>de</strong> uel ore Ore profari,<br />

Hinc peragrare Cor<strong>de</strong> operari<br />

Perpete mente, Et tibi regi<br />

Hinc recitare Da famulari.<br />

11 Haec ego uerbi 12Christe, clienti<br />

Munere Summi Consule flenti<br />

Atque corusci Et, precor, audi<br />

Posco adipisci Vota miselli,<br />

Pressus inormi Vnice fili<br />

Mole piacli. Patris amandi.<br />

13 Sedula dulci<br />

Laus genitori<br />

Et tibi proli<br />

Flamini et ipsi<br />

Perpes et uni<br />

Laus <strong>de</strong>itati.


CHRIstE REx REGVM dOMINANs IN AEVVM<br />

Christe, rex regum, dominans in aeuum,<br />

Lumen aeternum patris atque uerbum,<br />

Qui regis cunctum pietate mundum<br />

Factor egentum,<br />

Flebilem multum miserere seruum<br />

Mente corruptum recreans alumnum<br />

Sis memor dudum tibi recreatum<br />

Atque re<strong>de</strong>mptum.<br />

Fac mihi signum, pie rex, benignum<br />

Quin et indignum rogo red<strong>de</strong> dignum,<br />

Vt canam laudum tibi, Christe, metrum<br />

Nunc et in aeuum.<br />

Corrigas ipsam, precor, alme, uitam<br />

Frau<strong>de</strong> <strong>de</strong>uictam uitiisque tritam,<br />

Vt tibi dignam, <strong>de</strong>us, obsequelam<br />

Iam modo soluam.<br />

Ten<strong>de</strong> praecelsam, peto, sancte, <strong>de</strong>xtram<br />

Et fuga foedam uariamque lepram,<br />

Pelle iam noxam nimium nociuam<br />

Delue culpam.<br />

Expia uernam reparando formam,<br />

Exhibe gratam citius me<strong>de</strong>lam,<br />

Forte ne taetram ruar in gehennam<br />

Daemone plenam.<br />

Nempe tu pri<strong>de</strong>m, Deus, hunc in orbem<br />

Veneras omnem recreare plebem,<br />

Omnibus pacem populisque lucem<br />

Ferre perennem.<br />

IX. annexes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

210<br />

IX. annexes<br />

Tuque mortalem, Deus alme, carnem<br />

Sumpseras i<strong>de</strong>m homo factus autem<br />

Fu<strong>de</strong>ras dulcem simul et salubrem<br />

Sponte cruorem.<br />

Hancque per mortem religando mortem<br />

Liberas omnem reparator orbem<br />

Vasa caelestem reuehens ad arcem<br />

Rege nitentem.<br />

Tanta tu pastor pariterque doctor,<br />

Perpes adiutor iugis atque tutor<br />

Feceras ductor, sator et re<strong>de</strong>mptor<br />

Lucis et auctor.<br />

Sis mihi factor, mihi sis et altor,<br />

Esto protector iugiterque rector,<br />

Esto <strong>de</strong>fensor, necis o peremptor,<br />

Semper et ultor.<br />

Esto saluator simul et ducator,<br />

Sis gubernator uelut es creator,<br />

Sis triumphator mihi siue uictor<br />

Et superator. Amen.


Vt QVId IVBEs pVsIOLE<br />

1 Vt quid iubes, pusiole,<br />

Quare mandas, filiole,<br />

Carmen dulce me cantare,<br />

Cum sim longe exul ual<strong>de</strong><br />

Intra mare ?<br />

O cur iubes canere ?<br />

2 Magis mihi, miserule,<br />

Flere libet, puerule,<br />

Plus plorare quam cantare<br />

Carmen tale iubes quale,<br />

Amor care.<br />

O cur iubes canere ?<br />

3 Mallem scias, pusillule,<br />

Vt uelles tu, fratercule,<br />

Pio cor<strong>de</strong> condolere<br />

Mihi atque prona mente<br />

Conlugere.<br />

O cur iubes canere ?<br />

4 Scis, diuine tiruncule,<br />

Scis, superne clientule,<br />

Hic diu me exulare<br />

Multa die siue nocte<br />

Tolerare.<br />

O cur iubes canere ?<br />

5 Scis captiuae plebiculae<br />

Israheli cognomine<br />

Praeceptum in Babylone<br />

Decantare extra longe<br />

Fines Iudae<br />

O cur iubes canere?<br />

IX. annexes<br />

6 Non potuerunt utique<br />

Nec <strong>de</strong>buerunt itaque<br />

Carmen dulce coram gente<br />

Alienae nostri terrae<br />

Resonare.<br />

O cur iubes canere?<br />

7 Sed, quia uis omnimo<strong>de</strong>,<br />

Consodalis egregie,<br />

Canam patri filioque<br />

Simul atque proce<strong>de</strong>nti<br />

Ex utroque,<br />

Hoc cano spontanee.<br />

8 Benedictus es, domine,<br />

Pater, nate, paraclite,<br />

Deus trine, <strong>de</strong>us une,<br />

Deus summe, <strong>de</strong>us pie,<br />

Deus iuste.<br />

Hoc cano spontanee.<br />

9 Exul ego diuscule<br />

Hoc in mare sum, domine,<br />

Annos nempe duos fere<br />

Nosti fore sed iamiamque<br />

Miserere.<br />

Hoc rogo humillime.<br />

10Plenus enim facinore<br />

Ego sum, o rex optime,<br />

Pleniorem sectae uera<br />

Pietatem noui esse<br />

Fateorque.<br />

Hoc credo firmissime.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

211


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

212<br />

IX. annexes<br />

11 Propterea, piissime,<br />

Miserere iam, domine,<br />

Pietatis rector clare<br />

Famulique rex aeterne<br />

Memorare,<br />

Prono posco pectore.<br />

12Reduc me uelocissime,<br />

O ductor clementissime,<br />

Nolo hic me magis esse,<br />

Pater sancte, flatus alme,<br />

Veridice.<br />

Hoc rogo precipue.<br />

INEst QVIBVs CARItAs<br />

Inest quibus caritas ipsis placet ueritas.<br />

Hortor ergo feruidas immo flammantissimas<br />

Quin et frequentissimas agant <strong>de</strong>o gratias.<br />

13Interim cum pusione<br />

Situs hac in regione<br />

Psallam ore, psallam cor<strong>de</strong>,<br />

Psallam die, psallam nocte<br />

Carmen dulce<br />

Tibi, rex piissime.<br />

dE sEMINIBVs ANIMAtIs<br />

Christe meam puppim rege quaeso uelut regis olim,<br />

Ne ruat in Syrtim uel in atram forte Carybdim.<br />

Rector es omnipotens et rex in saecula clemens.<br />

Ergo <strong>de</strong>us noster rege nos ac protege semper.Amen.<br />

O dEItAs VIGILA<br />

O <strong>de</strong>itas uigila quae trina uocaris et una<br />

Cre<strong>de</strong>ris assereris cognosceris atque probaris,<br />

Auxiliare tuis ut egemus ad omnia seruis.


IX. annexes<br />

QVO NE tV MIssVs dOLEAs<br />

Quo ne tu missus doleas nec temet abyssus<br />

Inuoluat, totis caueas, <strong>de</strong>posco, medullis,<br />

Atque scias utinam, quantum, carissime, plangam<br />

Ob tale scriptum, quod habetur, sit quasi dictum<br />

Ipsius ore <strong>de</strong>i, pro quo iurgia noui<br />

Facta, sed et fieri non cessant climata mundi<br />

Per diuersa, mihi sicut dixere periti,<br />

Ipse uel audiui passim letalia fundi.<br />

Hinc ego lamentor, hinc te modo cernuus hortor:<br />

Emendato tuum, uelut esse necesse, libellum,<br />

Cernimus, ante <strong>de</strong>um ne sis damnatus in aeuum,<br />

Antestabis eum pudibundus quando, benignum<br />

Electis uultum praebentem hinc quoque multum.<br />

Flagito te <strong>de</strong>nuo: Miserere tui pius ultro,<br />

Ne tunc, quando uoles, nequeas, hos per modo soles<br />

Est operae pretium patrare quod: ergo supernum<br />

Perspice iudicium neque sit pudor hoc ad agendum,<br />

Sis licet antistes; quin immo quod esse superstes<br />

Cerneris hoc ad opus, domino grates age pronus,<br />

Acceleraque uiam <strong>de</strong>uote <strong>de</strong>mere culpam,<br />

Quatinus hinc ueniam ualeas adipiscier, ut iam<br />

Non sibi displiceas, est cuius ubique potestas<br />

Quos uult pontifices damnare perin<strong>de</strong> nocentes<br />

Quosque cupit superis conectere ciuibus ipsis.<br />

Inter eos niti<strong>de</strong> iugiter merearis ut esse,<br />

Quo feruore uelim, si nescis, promere possim,<br />

Et puto, si fatear, tanto uix a patre credar.<br />

Conscius in celsis tamen est et in aethere testis,<br />

Qui scit inesse tui <strong>de</strong> se mihi pignus amandi.<br />

Perspice, quae domini <strong>de</strong><strong>de</strong>rit tibi gratia nostri<br />

Vnius et trini, excepit cum temet ab <br />

Auspiciis teneri: reminiscere, quanta uolenti<br />

Ire per abrupta obstiterit pietate paterna<br />

Abstuleritque tua ignoscens puerilia multa<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

214<br />

IX. annexes<br />

Contuleritque sua spirans in te sacra dona,<br />

Gratis, non merito, carismata larga serendo,<br />

Fontis opima sui potare fluenta clienti<br />

More sibi solito gratis concessit et ultro.<br />

Cui <strong>de</strong> parte tua modo talia sunt retributa,<br />

Inficieris uti, quod perditionis alumni<br />

Non sint praefixi sub tartara praecipitandi,<br />

Cum constet missos et eo iam praecipitatos,<br />

Vt legimus patulo cre<strong>de</strong>ntes pectore toto:<br />

Gratis ut electos paradisi in luce locatos,<br />

Sic merito reprobos in abyssum scimus adactos.<br />

Figulus ipse luti ceu uult facit; etquid iniqui<br />

Murmur figmenti praesumit ad ista reniti?<br />

At ego praescitos fateor diuinitus ipsos<br />

Ad facienda malos proprio probra uelle futuros;<br />

Hinc praedamnatos in abyssum praecipitatos<br />

Regis iudicio superi probo sat quoque iusto.<br />

Tu tamen econtra peribes his esse parata<br />

Tantum tormenta, existant quasi non et in ipsa<br />

Hii praefiniti praefixi praeque parati,<br />

Cum praedamnati, praemissi, praecipitati<br />

Credantur plane, cognoscantur manifeste,<br />

Probentur clare seu conuincantur aperte.<br />

Quisquis habet uisum, non tantum cernit id ipsum,<br />

Insuper exclamat, quod sic est nec secus extat,<br />

Increpat, ingeminat, testatur et hoc ita monstrat,<br />

Certius esse quasi nil umquam quiuerit ipsi<br />

At tu, qui summus specialiter esse sophia<br />

Praeditus effereris, minime sic esse fateris.<br />

Haecine nutrici sunt reddita seu genetrici<br />

Praemia tam dulci? Meruerunt haecine, fili,<br />

Gratia gratuita et sapientia, mater opima?<br />

Haec <strong>de</strong> patre tua capient, non altera dona?<br />

Ista repensa sui cum liba tuentur alumni,<br />

Laetanturne dolent, gau<strong>de</strong>nt an his mage merent?


IX. annexes<br />

Vere causa sui non est hic tripudiandi,<br />

Nec fuit ista tibi <strong>de</strong> se sors his redhibendi,<br />

Sed tamen in domino patre, prole ac flamine sancto<br />

Indubie fido, quod iam carismate digno,<br />

Munere quin largo <strong>de</strong>itas pia corriget ultro,<br />

Quicquid ibi mendae potuit humanitus esse,<br />

Nil quia <strong>de</strong> proprio nisi menda tenetur; ab illo<br />

Nato primorum sors haec <strong>de</strong> parte parentum<br />

Restitit, haec superest, sed iam modo tempus ad hoc est,<br />

Praeueniente <strong>de</strong>o, comitante, sequente benigno,<br />

Arripiatur uti constantia libera libri<br />

Nunc emendandi, datur hic dum stilla morandi<br />

Temporis et fandi nec non sata praua putandi,<br />

Quin euellendi nequam plantaria nostri<br />

De medio campi; ramnus radicitus horti<br />

Sit procul a nostri areola, quoniam male multi<br />

Ipsius incauti spinis heu sunt scio puncti;<br />

Quos tu si nosti, uix <strong>de</strong>sinis ora rigari<br />

Vberibus lacrimis, quoniam quod <strong>de</strong>terius his<br />

Noscitur esse malis, <strong>de</strong>lirant, sint quod opimis<br />

Pasti <strong>de</strong>liciis potius, quam sunt ita dumis<br />

Puncti, sicut eis perhibemus tristibus extis.<br />

Dic illis igitur, cui credunt quemque fatentur<br />

Auctorem horum uelut utilium fore florum,<br />

Vitalem pastum quasi spiritibus referentum.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

215


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

216


X. Pl anches<br />

X. Planches<br />

Planche A<br />

abbatiale <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .218<br />

Planche B<br />

Chapelle Saint-Michel-<strong>de</strong>-<strong>Fulda</strong> . . . . . . . . . . . . . . . . .219<br />

Planche C<br />

abbatiale d’orbais . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .220<br />

Planche D<br />

Tour st. réole, prison <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> . . . . . . . . . . . . . .221<br />

Planche E<br />

Plan <strong>de</strong> l’abbaye Saint-Pierre-d’<strong>Hautvillers</strong> . . . . . . . .222<br />

Planche F<br />

lieu-dit :les Buttes, où fut enseveli <strong>Gottschalk</strong> . . . . .223<br />

Planche G<br />

Vue axonométrique <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong> Corbie en 1745 . .224<br />

Planche H<br />

restitution <strong>de</strong> la rési<strong>de</strong>nce impériale <strong>de</strong> Quiersy . . . .225<br />

Planche I<br />

dédicace <strong>de</strong> l’évangéliaire d’ebon (fac similé) . . . . .226<br />

Planche J<br />

lettre <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> loup <strong>de</strong> Châlons . . . . . . . . . . .232<br />

Planche K<br />

Jubé du prince Trpimir retrouvé <strong>à</strong> rizinice . . . . . . . . .233<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

217


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

218<br />

X. Planches<br />

A. Abbatiale <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong><br />

3<br />

1) les trois cellae, fouilles (1908-1913) et (1919-1924)<br />

2) ferme domaniale mérovingienne, fouilles (1941)<br />

3) construction palatiale, villa rustica, fouilles (1953)<br />

4) église antérieure <strong>à</strong> Boniface, fouilles (1977)<br />

4<br />

1<br />

Cathédrale<br />

contemporaine (90 m)<br />

2<br />

Basilique <strong>de</strong> ratgar (142 m)


X. Planches<br />

B. Chapelle Saint-Michel-<strong>de</strong>-<strong>Fulda</strong> (Hesse)<br />

I<br />

II<br />

III<br />

IV<br />

I. Scène biblique (ancien cimetière <strong>de</strong>s moines)<br />

II. Chapelle Saint-Michel achevée en 822 (vue générale)<br />

III. Crypte, chapiteau <strong>à</strong> spirale ionique<br />

IV. roton<strong>de</strong> et absi<strong>de</strong> carolingienne (818-822)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

219


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

220<br />

X. Planches<br />

C. Plan d’ensemble <strong>de</strong>s parties existantes<br />

et détruites <strong>de</strong> l’abbaye d’Orbais (Marne)<br />

C B<br />

d<br />

A chœur et transepts<br />

B parties détruites<br />

C dortoirs<br />

D /E anciens bâtiments reconvertis (mairie,etc)<br />

F cloître<br />

G porche actuel<br />

e<br />

F<br />

e<br />

a<br />

G<br />

B<br />

n S<br />

o<br />

B<br />

d’après l’architecte<br />

Selmersen


X. Planches<br />

D. Orbais-l’Abbaye<br />

Tour Saint-Réole, prison <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong><br />

lithographie par arnout d’après durand<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

221


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

222<br />

X. Planches<br />

3<br />

1 cloître<br />

2 église<br />

3 abbatiale<br />

4 cuisine<br />

5 réfectoire<br />

6 chapitre<br />

7 sacristie<br />

E. Plan général <strong>de</strong> l’abbaye<br />

Saint-Pierre-d’Hauvillers (Marne)<br />

12<br />

1<br />

10<br />

4 5 6<br />

2<br />

8<br />

7<br />

9<br />

13<br />

11<br />

8 grange<br />

9 cellier <strong>de</strong>s morts<br />

10 cellier<br />

11 maison <strong>de</strong>s vicaires<br />

12 cour<br />

13 pressoir<br />

Par F . lebègue (1880)


F. Lieu-dit “les Buttes”<br />

où fut enseveli <strong>Gottschalk</strong><br />

X. Planches<br />

d. Izoard<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

223


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

224<br />

X. Planches<br />

G. Vue axonométrique <strong>de</strong> l’abbaye<br />

<strong>de</strong> Corbie en 1745 (Somme)<br />

o<br />

S n<br />

e


H. Restitution <strong>de</strong> la rési<strong>de</strong>nce<br />

impériale <strong>de</strong> Quierzy (Aisne)<br />

X. Planches<br />

d. Izoard<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

225


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

226<br />

X. Planches<br />

I. Dédicace <strong>de</strong> l’évangéliaire d’Ebon<br />

(fac similé)


Suite<br />

<strong>de</strong> l’évangéliaire<br />

X. Planches<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

227


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

228<br />

X. Planches<br />

Suite<br />

<strong>de</strong> l’évangéliaire


Suite<br />

<strong>de</strong> l’évangéliaire<br />

X. Planches<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

229


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

230<br />

X. Planches<br />

Suite<br />

<strong>de</strong> l’évangéliaire


Fin<br />

<strong>de</strong> l’évangéliaire<br />

X. Planches<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

231


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

232<br />

X. Planches<br />

J. Lettre <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> Loup<br />

<strong>de</strong> Châlons (fac similé)


K. Jubé<br />

du prince Trpimir 1 er<br />

Fragment <strong>de</strong> linteau du jubé<br />

mentionnant le prince croate Trpimir 1 er<br />

X. Planches<br />

a rizinice, hameau situé au bord du ruisseau <strong>de</strong> Saint-elie,<br />

le duc Trpimir fit construire, vers l’an 852, un monastère <strong>de</strong><br />

bénédictins. dès 1895 Mgr. Frane Bulic entama <strong>de</strong>s fouilles<br />

et découvrit les restes du monastère ainsi que les vestiges<br />

d’un cimetière. le mobilier retrouvé atteste que plusieurs<br />

nobles croates y furent inhumés entre le IX e et le XV e siècle.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

233


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

234<br />

XI. Tables<br />

XI . Tabl e <strong>de</strong>s mot s f r équent<br />

at i f s<br />

• aBSVM 252<br />

• aC Per HoC 120<br />

• aVGVSTInVS 180<br />

• Bene 56<br />

• CaTHolICVS 180<br />

• Clareo 200<br />

• ConSeQVenTer 96<br />

• CorPVS 88<br />

• <strong>de</strong>Beo 328<br />

• <strong>de</strong>ITaS 152<br />

• <strong>de</strong>VS 432<br />

• eCCleSIa 80<br />

• eleCTVS 88<br />

• eVI<strong>de</strong>nTer 60<br />

• eXPono 152<br />

• FIlIVS 208<br />

• FreQVenTer 82<br />

• GraTIa 240<br />

• GraTIS 127<br />

• HInC 236<br />

• HoMo 168<br />

• InTelleGo 104<br />

• IVre 102<br />

• lICeT 141<br />

• ModVS 208<br />

• naTVra 64<br />

• naTVralITer 128<br />

• nIHIloMInVS 66<br />

• nIMIrVM 78<br />

• noMeM 240<br />

• PaTeo 176<br />

• PaTer 192<br />

• PenITVS 81<br />

• PerSona 208<br />

• Pono 120<br />

• Prae<strong>de</strong>STInaTIo 104<br />

• Prae<strong>de</strong>STIno 72<br />

• ProFeCTo 107<br />

• ProFero 84<br />

• ProPrIVS 99<br />

• ProrSVS 238<br />

• QVIn 95<br />

• reGVlarITer 76<br />

• reProBVS 78<br />

• reVera 150<br />

• rITe 70<br />

• SaTIS 99<br />

• SCIlICeT 242<br />

• SCIo 76<br />

• SeQVor 71<br />

• SICVTI 86<br />

• SIMIlITer 78<br />

• SIQVI<strong>de</strong>M 70<br />

• SolVMModo 78<br />

• SPIrITVS 224<br />

• SVBaVdIo 54<br />

• TanTVMModo 84<br />

• TeSTIMonIVM 72<br />

• TrInITaS 134<br />

• TrInVS 340<br />

• VnITaS 60<br />

• VelVT 64<br />

• VeraCITer 94<br />

• VerBVM 64<br />

• VerITaS 128<br />

• VI<strong>de</strong>lICeT 190


XI. Tables<br />

XI . Tabl e chr onol ogi que<br />

VIII e siècle<br />

741 début <strong>de</strong>s annales royales – révoltes <strong>de</strong>s Berbères<br />

en espagne – Mort <strong>de</strong> Grégoire III, pape.<br />

742 naissance <strong>de</strong> Charlemagne – Chro<strong>de</strong>gang, évêque<br />

<strong>de</strong> Metz.<br />

743 Victoire <strong>de</strong>s Francs sur les Bavarois – Concile du<br />

royaume <strong>de</strong> Carloman aux estinnes.<br />

744 Concile du royaume <strong>de</strong> Pépin le Bref <strong>à</strong> Soissons –<br />

Fondation <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> par Sturmius.<br />

745 Concile <strong>de</strong> rome : établissement <strong>de</strong> la liste <strong>de</strong>s<br />

anges.<br />

746 Boniface , archevêque <strong>de</strong> Mayence – les alamans<br />

vaincus par Carloman 1 er .<br />

747 avènement <strong>de</strong>s abbassi<strong>de</strong>s <strong>à</strong> Bagdad.<br />

748 Sturmius <strong>à</strong> rome.<br />

749 Mort <strong>de</strong> ratchis, roi <strong>de</strong>s lombards, au mont Cassin –<br />

aistulf roi <strong>de</strong>s lombards.<br />

750 naissance <strong>de</strong> Benoît d’aniane – naissance <strong>de</strong> Félix<br />

d’Urgel – naissance <strong>de</strong> Théodulfe d’orléans.<br />

751 election et sacre <strong>de</strong> Pépin le Bref – Privilèges accordés<br />

<strong>à</strong> <strong>Fulda</strong> par le pape Zacharie – Prise <strong>de</strong> ravenne<br />

par les lombards.<br />

752 etienne II, pape.<br />

753 Concile <strong>de</strong> Hiéra : culte modéré <strong>de</strong>s images.<br />

754 assassinat <strong>de</strong> Boniface en Frise – avènement du<br />

Calife al -Mansar – adoption du romain <strong>à</strong> Ver.<br />

755 Concile <strong>de</strong> Ver : premier établissement <strong>de</strong> la dîme –<br />

avènement <strong>de</strong>s omeya<strong>de</strong>s en espagne – Tilpin :<br />

archevêque <strong>de</strong> reims.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

235


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

236<br />

XI. Tables<br />

756 Chro<strong>de</strong>gang rédige sa règle pour les chanoines<br />

(Regula canonicorum).<br />

757 Concile <strong>de</strong> Compiègne.<br />

758 didier, roi <strong>de</strong>s lombards.<br />

759 Prise <strong>de</strong> narbonne par les Francs.<br />

760 Première campagne <strong>de</strong> Pépin le Bref en aquitaine.<br />

762 Concile d’attigny.<br />

763 Willibald, prêtre : Vita Bonifatii.<br />

764 Pépin le Bref entre dans Toulouse.<br />

765 ambassa<strong>de</strong> franque <strong>à</strong> Byzance.<br />

766 avènement d’Haron -al-rachid – Mort <strong>de</strong><br />

Chro<strong>de</strong>gang.<br />

767 Concile <strong>de</strong> Gentilly avec les Grecs – Coup d’état <strong>à</strong><br />

rome – alcuin <strong>à</strong> Pavie.<br />

768 Mort <strong>de</strong> Pépin le Bref – avènement <strong>de</strong> Charles et<br />

Carloman.<br />

769 révolte du duc Hunaut II d’aquitaine.<br />

770 naissance d’eginhard – Charlemagne contrôle la<br />

Gascogne.<br />

772 adrien 1 er , pape – Prise d’Irminsul en Saxe – Pillage<br />

<strong>de</strong> la Hesse par les angariens.<br />

773 Campagne <strong>de</strong> Charlemagne en Italie et soumission<br />

<strong>de</strong>s lombards.<br />

774 Charlemagne <strong>à</strong> rome – Charlemagne couronné roi<br />

<strong>de</strong>s lombards.<br />

775 répression en Saxe – naissance d’amalaire.<br />

776 Campagne au Frioul.<br />

777 abd al-rahman-al-daklil <strong>à</strong> Pa<strong>de</strong>rborn.<br />

778 désastre <strong>de</strong> roncevaux – naissance <strong>de</strong> louis le<br />

Pieux – Insurrection en Saxe.<br />

779 Capitulaire <strong>de</strong> Herstal – Mort <strong>de</strong> Sturmius<br />

(17 décembre) – début <strong>de</strong> la guerre <strong>de</strong> Saxe.<br />

780 Beatus : «Commentaire <strong>de</strong> l’apocalypse»<br />

(Apocalipsii libri, II) – avènement <strong>de</strong> l’empereur<br />

Constantin VI <strong>à</strong> Byzance – naissance <strong>de</strong> raban<br />

Maur et <strong>de</strong> Jonas d’orléans.


781 Sacre <strong>de</strong> louis le Pieux, roi d’aquitaine _<br />

Charlemagne et alcuin se rencontrent.<br />

782 négociation avec les avars.<br />

783 Paul diacre <strong>à</strong> la cour <strong>de</strong> Charlemagne – Campagne<br />

<strong>de</strong> Saxe.<br />

784 Mort <strong>de</strong> Fulrad, abbé <strong>de</strong> Saint-<strong>de</strong>nis.<br />

785 Capitulaire pour les Saxons – exigence du serment<br />

<strong>de</strong> fidélité – Hil<strong>de</strong>bald, archevêque <strong>de</strong> Cologne.<br />

786 Introduction <strong>de</strong> la minuscule caroline <strong>à</strong> Salzbourg.<br />

787 <strong>de</strong>uxième concile <strong>de</strong> nicée – riculfe, archevêque <strong>de</strong><br />

Mayence.<br />

788 Soumission <strong>de</strong> la Bavière – Paul diacre quitte la cour<br />

pour le Mont-Cassin.<br />

789 Soumission <strong>de</strong>s Wilzes – Publication <strong>de</strong> «l’Admonitio<br />

generalis».<br />

790 négociation avec les avars – alcuin en angleterre –<br />

Hildoard, évêque d’arras.<br />

791 ricbod, archevêque <strong>de</strong> Trèves – Conquête <strong>de</strong><br />

l’Istrie.<br />

792 «Libri Karolini» – Concile <strong>de</strong> regensburg.<br />

793 révolte en Saxe – attaque <strong>de</strong>s Sarrazins en Septimanie<br />

– elipand : lettre en faveur <strong>de</strong> l’adoptianisme.<br />

794 début <strong>de</strong> l’académie palatine – Concile <strong>de</strong> Francfort<br />

(adoptianisme).<br />

XI. Tables<br />

er 795 Victoire sur les avars – naissance <strong>de</strong> lothaire 1 _<br />

léon III, pape – expédition <strong>de</strong>s Vikings en<br />

northumbrie.<br />

796 Concile <strong>de</strong> Cividale – alcuin, abbé <strong>de</strong> Saint-Martin<strong>de</strong>-Tours.<br />

797 Soumission <strong>de</strong> la Saxe – ambassa<strong>de</strong> franque <strong>à</strong><br />

Bagdad.<br />

798 Concile <strong>de</strong> risbach – nouvelle rédaction <strong>de</strong> la loi<br />

salique – Théodulfe, évêque d’orléans.<br />

799 Mort <strong>de</strong> Paul diacre – leidra<strong>de</strong>, archevêque <strong>de</strong><br />

lyon – naissance probable <strong>de</strong> Florus.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

237


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

238<br />

XI. Tables<br />

IXe siècle<br />

800 Fondation <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong> Conques – naissance <strong>de</strong><br />

nithard – Couronnement impérial <strong>de</strong> Charlemagne <strong>à</strong><br />

rome – Mort <strong>de</strong> Tilpin.<br />

801 Prise <strong>de</strong> Barcelone – raban Maur <strong>à</strong> Tours _ rotha<strong>de</strong> 1er ,<br />

évêque <strong>de</strong> Soissons.<br />

802 Capitulaire général pour les «missi» – Mort <strong>de</strong> Paulin<br />

d’aquilé – ambassa<strong>de</strong> du calife <strong>de</strong> Bagdad <strong>à</strong> aix-la-<br />

Chapelle.<br />

803 naissance <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> – Vulfaire, archevêque <strong>de</strong><br />

reims.<br />

804 Mort d’alcuin – achèvement <strong>de</strong> la chapelle palatine<br />

d’aix-la-Chapelle.<br />

805 Capitulaire <strong>de</strong> Thionville – naissance <strong>de</strong> loup <strong>de</strong><br />

Ferrières.<br />

806 Fondation <strong>de</strong> l’abbaye <strong>de</strong> Gellone – naissance <strong>de</strong><br />

louis le Germanique – naissance d’Hincmar -<br />

«Diuisio regnorum» – Capitulaire <strong>de</strong> nimègue –<br />

reconquête <strong>de</strong> la dalmatie par les Byzantins.<br />

807 négociations avec Haroun al-rachid, calife <strong>de</strong><br />

Bagdad.<br />

808 naissance <strong>de</strong> Walafrid Strabon.<br />

809 Concile d’aix la Chapelle et imposition du<br />

«filioque» - Théodulfe d’orléans : «De spiritu<br />

santo».<br />

810 Concile <strong>de</strong> rome – naissance probable <strong>de</strong> Jean Scot<br />

erigène - Borna : (duc dalmate) vassal <strong>de</strong><br />

Charlemagne.<br />

811 Capitulaire <strong>de</strong> Boulogne – Campagnes en Saxe, en<br />

Pannonie et en Bretagne – Paix avec le danemark.<br />

812 Constitution <strong>de</strong> la marche d’espagne – Campagne<br />

définitive contre les Wilzes .<br />

813 Smarag<strong>de</strong> : «Via regia» – amalaire <strong>à</strong> Byzance –<br />

naissance probable <strong>de</strong> ratramne <strong>de</strong> Corbie - léon V,<br />

empereur <strong>de</strong> Byzance.


XI. Tables<br />

814 Mort <strong>de</strong> Charlemagne (28 janvier). Couronnement<br />

impérial <strong>de</strong> louis le Pieux.<br />

815 <strong>Gottschalk</strong> est offert <strong>à</strong> l’abbaye <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> (oblation).<br />

816 etienne IV, pape – agobard, évêque <strong>de</strong> lyon –<br />

Gozbert, abbé <strong>de</strong> Saint-Gall – ebon, archevêque <strong>de</strong><br />

reims.<br />

817 Pascal 1er , pape – eigil, abbé <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> – <strong>Bernard</strong>, roi<br />

d’Italie – etablissement <strong>de</strong> la règle «<strong>de</strong> Pannonia»<br />

par Posavski.<br />

818 Jonas, évêque d’orléans – Benoît d’aniane :<br />

«Collectio capitularis» –Hincmar oblat <strong>à</strong> Saint-<strong>de</strong>nis.<br />

819 raban Maur : «De institutione clericorum» – révolte<br />

<strong>de</strong> Posavski, (neveu <strong>de</strong> Borna).<br />

820 raban Maur : «De computo» – Walafrid Strabon<br />

oblat <strong>à</strong> reichenau rencontre <strong>Gottschalk</strong> - Michel II,<br />

empereur <strong>de</strong> Byzance.<br />

821 Mort <strong>de</strong> Benoît d’aniane et <strong>de</strong> Théodulfe d’orléans -<br />

«Vita Alcuini» (anonyme).<br />

822 Florus <strong>de</strong> lyon : «De electionibus episcorum» –<br />

Mort d’eigil.<br />

823 naissance <strong>de</strong> Charles le Chauve – ebon <strong>de</strong> reims au<br />

danemark – <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> reichenau – amalaire <strong>de</strong><br />

Metz : «De ecclesiasticis officiis» – Mort du duc dalmate<br />

Posavski.<br />

824 eugène II, pape – Mort <strong>de</strong> Wetti moine <strong>de</strong> reichenau<br />

et professeur <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

825 Pépin 1er , roi d’aquitaine – ratramne entre <strong>à</strong> Corbie–<br />

retour <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> <strong>Fulda</strong>.<br />

826 Haraldr Klakk, roi danois, est baptisé – eginhard :<br />

«Vita Karoli» – louis le Germanique, roi <strong>de</strong> Bavière.<br />

827 Grégoire IV, pape – amalaire : «De ordine antiphonarii»<br />

- Jonas d’orléans : «De institutione laicali».<br />

828 loup <strong>de</strong> Ferrières <strong>à</strong> <strong>Fulda</strong> – Walafrid Strabon :<br />

«Versus <strong>de</strong> imagine tetrici» – agobard : «De diuisione<br />

imperii».<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

239


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

240<br />

XI. Tables<br />

829 Première déposition et premier rétablissement <strong>de</strong><br />

louis le Pieux – Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Mayence, <strong>Gottschalk</strong> est<br />

délié <strong>de</strong> ses vœux par eigil – Théophile II, empereur<br />

<strong>de</strong> Byzance.<br />

830 <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> Corbie – <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> orbais –<br />

Foulque :annales <strong>de</strong> Saint-Bertin (830/835) –<br />

Premiers succès <strong>de</strong>s Vikings.<br />

831 Jonas d’orléans : «De institutione regia» – radbert :<br />

«De corpore et sanguine domini».<br />

832 Hilduin <strong>de</strong> Saint-<strong>de</strong>nis réforme son monastère –<br />

<strong>Gottschalk</strong> écolâtre <strong>à</strong> orbais – Mort <strong>de</strong> rotha<strong>de</strong> 1 er .<br />

833 Secon<strong>de</strong> déposition et second rétablissement <strong>de</strong><br />

louis le Pieux – <strong>Gottschalk</strong> en pèlerinage <strong>à</strong> rome.<br />

834 Pillage <strong>de</strong> dorestad par les Vikings.<br />

835 l’archevêque <strong>de</strong> reims, ebon, est déposé – le duc <strong>de</strong><br />

naples s’allie aux souverins aghlabi<strong>de</strong>s – <strong>Gottschalk</strong><br />

<strong>à</strong> reims – <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> rédige la dédicace<br />

<strong>de</strong> l’évangéliaire d’ebon – Pru<strong>de</strong>nce : annales <strong>de</strong><br />

Saint-Bertin (835/861).<br />

836 Hilbold et ses moines abandonnent définitivement<br />

noirmoutier – loup <strong>de</strong> Ferrières : «Vita sancti Wigberti».<br />

837 <strong>Gottschalk</strong> quitte la Champagne ; second séjour <strong>à</strong> rome.<br />

838 <strong>Gottschalk</strong> voyage au Frioul – Charles le Chauve, roi.<br />

839 loup <strong>de</strong> Ferrrières dédie <strong>à</strong> Waldo son «Sancti<br />

Maximi» - Walafrid Strabon exilé près <strong>de</strong> Spire –<br />

rudolphe : annales <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong>.<br />

840 Haudoin, abbé d’<strong>Hautvillers</strong> – <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> la cour<br />

du comte eberhard (beau-frère <strong>de</strong> Charles le Chauve)<br />

il y rédige sa «Confessio breuior» – Mort d’agobard<br />

(6 juin) – Mort <strong>de</strong> louis le Pieux (20 juin) –<br />

rétablissement momentané d’ebon .<br />

841 nithart commence la rédaction <strong>de</strong> son «Histoire <strong>de</strong>s<br />

fils <strong>de</strong> louis le Pieux» – loup, abbé <strong>de</strong> Ferrières –<br />

Jonas : «De cultu imaginum» – Wenilon, archevêque<br />

<strong>de</strong> Sens.


XI. Tables<br />

842 Prise <strong>de</strong> Quentovic par les Vikings – raban Maur :<br />

«Expositio in Ieremiam» – avènement <strong>de</strong> Michel III,<br />

l’Ivrogne.<br />

843 Traité <strong>de</strong> Verdun – retour <strong>de</strong> W. Strabon <strong>à</strong> reichenau –<br />

Mort <strong>de</strong> Jonas d’orléans – raban Maur : «De arte<br />

grammatica».<br />

844 Mort <strong>de</strong> nithard – Serge II, pape – radbert : abbé <strong>de</strong><br />

Corbie.<br />

845 Hincmar, archevêque <strong>de</strong> reims – lettre <strong>de</strong> raban<br />

Maur <strong>à</strong> eberhard dénonçant l’activité <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> –<br />

nithard tué au combat contre les normands – Prise<br />

<strong>de</strong> Paris par les normands – avènement <strong>de</strong> Trpimir 1 er .<br />

846 <strong>Gottschalk</strong> en dalmatie – <strong>Gottschalk</strong> : «Vt quid iubes<br />

pusiole» – Pru<strong>de</strong>nce, évêque <strong>de</strong> Troyes.<br />

847 <strong>Gottschalk</strong> séjourne <strong>à</strong> la cour du prince Trpimir –<br />

léon IV, pape – <strong>Gottschalk</strong> en Bulgarie _<br />

rabanMaur, archevêque <strong>de</strong> Mayence.<br />

848 <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong> retour <strong>à</strong> <strong>Fulda</strong> avec plusieurs <strong>de</strong> ses<br />

disciples – <strong>Gottschalk</strong>, au syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Mayence :<br />

«Confessio breuior», (première condamnation <strong>de</strong>vant<br />

louis le Germanique).<br />

849 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Paris – Syno<strong>de</strong> d’epernay – <strong>Gottschalk</strong> au<br />

syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quierzy (secon<strong>de</strong> condamnation <strong>de</strong>vant<br />

Charles le Chauve) – Walafrid Strabon se noie dans<br />

la loire (18 août) – loup <strong>de</strong> Ferrières : «De tribus<br />

quaestionibus».<br />

850 <strong>Gottschalk</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> : opuscules théologiques,<br />

«De trinate», «De corpore et sanguine domini» et<br />

«Confessio prolixior» - ratramne <strong>de</strong> Corbie : «De<br />

quantitate animae» – Mort d’amalaire <strong>de</strong> Metz.<br />

851 <strong>Gottschalk</strong> écrit sa lettre versifiée <strong>à</strong> ratramne :<br />

«Carmen ad Ratramnum» – Jean Scot erigène s’installe<br />

<strong>à</strong> la cour <strong>de</strong> Charles le Chauve et y rédige sa doctrine<br />

contre <strong>Gottschalk</strong> : «De divina prae<strong>de</strong>stinatione».<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

241


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

242<br />

XI. Tables<br />

852 les Vikings <strong>à</strong> reims – raban Maur : «De institutione<br />

clericorum» – remy 1 er , évêque <strong>de</strong> lyon - Fondation<br />

du monastère <strong>de</strong> rizinice en dalmatie.<br />

853 Soumission <strong>de</strong> Pépin d’aquitaine – ratramne : «De<br />

natiuitate Christi» – Florus : «De tribus epistolis,<br />

absolutio cuiusdam quaestionis» – déposition<br />

d’Haudoin, abbé d’<strong>Hautvillers</strong>.<br />

854 radbert : «De partu uirginis».<br />

855 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Valence : les thèses gottschalkiennes l’emportent<br />

– Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quiezy – Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Soissons –<br />

Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Verberie – Benoît III, pape.<br />

856 Mort <strong>de</strong> raban Maur (4 février) – Mort <strong>de</strong> loup II,<br />

évêque <strong>de</strong> Châlons - Hincmar : «De uni non trinate<br />

<strong>de</strong>itate» – les Vikings <strong>à</strong> orléans.<br />

857 les Vikings <strong>à</strong> evreux, <strong>à</strong> rouen, <strong>à</strong> Sens.<br />

858 nicolas 1 er , pape – etablissement d’un camp normand<br />

dans l’île d’oisel – Capture <strong>de</strong> l’abbé <strong>de</strong> Saint-<strong>de</strong>nis<br />

par les normands.<br />

859 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Savonnières – Hincmar : «De prae<strong>de</strong>stinatione»<br />

– Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> langres : condamnation <strong>de</strong> la<br />

doctrine d’erigène.<br />

860 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> douzy : triomphe <strong>de</strong>s thèses hincmariennes<br />

– Mort <strong>de</strong> Florus <strong>de</strong> lyon.<br />

861 Mort <strong>de</strong> Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Troyes – rotha<strong>de</strong> II, évêque <strong>de</strong><br />

Soissons, déposé – Hincmar <strong>de</strong> reims poursuit la<br />

rédaction <strong>de</strong>s annales <strong>de</strong> Saint-Bertin (861/ 882).<br />

862 Jean Scot erigène dédie <strong>à</strong> Wulfad son «De diuisione<br />

naturae» – edit <strong>de</strong> Pîtres – Mort <strong>de</strong> Trpimir 1 er .<br />

865 Mort <strong>de</strong> rudolphe <strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> – Mort <strong>de</strong> Wenilon <strong>de</strong><br />

Sens.<br />

867 adrien II, pape – ratramne <strong>de</strong> Corbie : «Contra graecorum<br />

opposita» – Mort <strong>de</strong> l’empereur Michel III.<br />

868 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quierzy – Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Pîtres.<br />

869 Mort <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

870 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Verberie – Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> ratisbonne.


XI. Tables<br />

871 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> douzy – Mort <strong>de</strong> ratramne <strong>de</strong> Corbie.<br />

872 Jean VIII, pape.<br />

875 Charles le Chauve couronné empereur.<br />

876 Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Ponthion – défaite <strong>de</strong> Charles le Chauve<br />

<strong>à</strong> an<strong>de</strong>rnach.<br />

877 Mort <strong>de</strong> Charles le Chauve – Syno<strong>de</strong> <strong>de</strong> Quierzy –<br />

Mort <strong>de</strong> Jean Scot erigène.<br />

880 Mort d’Haudoin, abbé d’<strong>Hautvillers</strong>.<br />

881 les Vikings détruisent Corbie – Hincmar : «De ordine<br />

palatii».<br />

882 Mort d’Hincmar <strong>de</strong> reims <strong>à</strong> epernay (21 décembre) –<br />

Marin 1 er , pape.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

243


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

244


XI I . Car t es<br />

XII. Cartes<br />

Carte A<br />

<strong>Fulda</strong> et ses « cellae » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .246<br />

Carte B<br />

Pérégrinations <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> . . . . . . . . . . . . . . . . . . .247<br />

B’<br />

epigraphe <strong>de</strong> nin . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .247<br />

Carte C<br />

Marches dalmates . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .248<br />

Carte D<br />

assauts et invasions contre l’empire . . . . . . . . . . . . .249<br />

Carte E<br />

le royaume <strong>de</strong> Charles le Chauve . . . . . . . . . . . . . . .250<br />

Cartes F et G<br />

Partages <strong>de</strong> l’empire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .251-252<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

245


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

246<br />

XII. Cartes<br />

A. <strong>Fulda</strong> et ses « cellae »<br />

d. Izoard


XII. Cartes<br />

B. Pérégrinations <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong><br />

lieux <strong>de</strong> séjours attestés<br />

lieux probables <strong>de</strong> séjours<br />

• Mag<strong>de</strong>burg<br />

• Halle<br />

• Saint-Bertin<br />

• aix-la-Chapelle • Fritzlar<br />

• Corbie<br />

• Prüm<br />

• Mayence • <strong>Fulda</strong><br />

Quierzy • • Soissons<br />

orbais • • reims<br />

• Wurstzbourg<br />

<strong>Hautvillers</strong> • • Châlons<br />

• Worms<br />

• Kintzingen<br />

Ferrières •<br />

• Saint-Gall<br />

• Passau<br />

• reichenau<br />

• Clermont-Ferrand<br />

• Trevise<br />

• Bihac<br />

Véronne •<br />

• nin<br />

Bobbio •<br />

Ile <strong>de</strong> • Zadar<br />

• Maun • Kliss<br />

Mo<strong>de</strong>ne Split • • Salona<br />

• Vidin<br />

• rome<br />

B’. Epigraphe <strong>de</strong> Nin<br />

d’après Vedrana <strong>de</strong>longa “latinski epigrafski” Split (1996)<br />

(In Monumenta medii aevi Croatiae, 1)<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

247


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

248<br />

XII. Cartes<br />

C. Marches dalmates


XII. Cartes<br />

D. Assauts et invasions contre l’empire<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

249


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

250<br />

XII. Cartes<br />

E. Le royaume <strong>de</strong> Charles le Chauve


843<br />

855<br />

F. Partages <strong>de</strong> l’empire<br />

† 877<br />

† 869<br />

† 875<br />

† 876<br />

XII. Cartes<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

251


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

252<br />

XII. Cartes<br />

870<br />

880<br />

G. Partages <strong>de</strong> l’empire<br />

† 882<br />

† 880<br />

† 887<br />

† 882<br />

† 888


XI I I . Gl ossai r e<br />

XIII. Glossaire<br />

aBBaTIaT : durée, époque du gouvernement d’un abbé.<br />

aBlaTIF : cas <strong>de</strong> la déclinaison latine indiquant l’instrument,<br />

l’éloignement, l’origine, la matière.<br />

adonIen : se dit <strong>de</strong> vers composés d’un dactyle et d’un<br />

spondée.<br />

adoPTIanISMe : doctrine professant que le Christ n’est<br />

pas dieu <strong>de</strong> toute éternité mais qu’il le <strong>de</strong>vient lors <strong>de</strong> son<br />

baptême, où il est adopté par dieu.<br />

aGHlaBI<strong>de</strong> : dynastie arabe d ’afrique du nord qui établit<br />

sa rési<strong>de</strong>nce <strong>à</strong> Kairouan et régna sur la plus gran<strong>de</strong> partie<br />

<strong>de</strong> l’afrique, sous la suzeraineté <strong>de</strong>s abassi<strong>de</strong>s (800-909).<br />

alCaÏQUe : vers composé <strong>de</strong> cinq pieds dont le quatrième<br />

est toujours un anapeste et qui a sa césure après le<br />

<strong>de</strong>uxième.<br />

alléGorIQUe : qualificatif soulignant la fiction, la<br />

parabole qui présente un objet <strong>à</strong> l’esprit <strong>de</strong> manière <strong>à</strong><br />

éveiller la pensée d’un autre objet.<br />

anaCHorÈTe : religieux qui vit seul dans un endroit<br />

retiré.<br />

anaCréonIQUe : vers ïambique <strong>de</strong> trois pieds et <strong>de</strong>mi,<br />

dont le <strong>de</strong>uxième et le troisième sont nécessairement <strong>de</strong>s<br />

ïambes.<br />

anaPeSTe : pied <strong>de</strong> vers grec ou latin composé <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux<br />

brèves et d’une longue.<br />

anaTHÈMe : sentence rejetant hors du sein <strong>de</strong> la société<br />

religieuse ceux qu’elle frappait.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

253


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

254<br />

XIII. Glossaire<br />

annale : ouvrage qui rapporte les événements année par<br />

année ou en suivant l’ordre chronologique.<br />

anTIPHonaIre : livre d’église contenant les diverses<br />

parties <strong>de</strong> l’office notées en plein-chant.<br />

anTonoMaSe : figure <strong>de</strong> rhétorique par laquelle on<br />

emploie un nom propre pour un nom commun ou une périphrase<br />

et réciproquement.<br />

aPHorISMe : maxime énoncée en peu <strong>de</strong> mots.<br />

aPoCrYPHe : non authentique.<br />

aPoloGISTe : personne qui tient un discours qui a pour<br />

but <strong>de</strong> défendre, justifier une idée, une croyance, une<br />

chose, une personne.<br />

aPoSTaSIer : renoncer <strong>à</strong> sa religion, <strong>à</strong> ses vœux, <strong>à</strong> son parti.<br />

aPoSTolIQUe : qui vient , qui procè<strong>de</strong> <strong>de</strong>s apôtres.<br />

aSSonanCe : rime imparfaite reposant seulement sur<br />

l’i<strong>de</strong>ntité <strong>de</strong> la <strong>de</strong>rnière voyelle accentuée.<br />

aSYndÈTe : figure qui consiste <strong>à</strong> supprimer dans une<br />

phrase les particules conjonctives.<br />

aUGUSTInIen : qui se réclame <strong>de</strong> l’analyse et <strong>de</strong> l’exégèse<br />

<strong>de</strong> saint augustin.<br />

aXIoMe : vérité évi<strong>de</strong>nte par elle-même et qui n’est susceptible<br />

d’aucune démonstration.<br />

BéaTIFIQUe : qui rend heureux, vue que les élus ont <strong>de</strong><br />

dieu, dans le ciel.<br />

BlaSPHÈMe : parole qui outrage la divinité, la religion.<br />

CanonIQUe : conforme aux règles et modèles <strong>de</strong><br />

l’eglise.<br />

CaPITUlaIre : appartenant <strong>à</strong> un chapitre <strong>de</strong> chanoines<br />

ou <strong>de</strong> religieux. ; actes législatifs émanant <strong>de</strong> rois et divisés<br />

en chapitres.<br />

CaTaCHrÈSe : figure <strong>de</strong> rhétorique qui consiste <strong>à</strong><br />

employer un mot dans un sens différent <strong>de</strong> son sens propre,<br />

par suite <strong>de</strong> l’absence dans la langue d’un terme littéral.<br />

Cella : dans l’antiquité, lieu du temple où était placée la<br />

statue du dieu ; par extension, petite communauté religieuse,<br />

ermitage.


XIII. Glossaire<br />

CHoréVÊQUe : nom donné, jusqu’<strong>à</strong> la fin du XII e siècle,<br />

aux prêtres chargés <strong>de</strong> remplir les fonctions épiscopales<br />

dans les campagnes.<br />

CHrISTIQUe : ce dit <strong>de</strong> ce qui concerne la personne du Christ.<br />

ClaUSTral : qui appartient, qui a rapport au cloître.<br />

ClÔTUre : vie claustrale ; enceinte d’un monastère<br />

réservée exclusivement aux religieux et dont ces <strong>de</strong>rniers<br />

ne peuvent sortir librement.<br />

Co<strong>de</strong>X : recueil officiel <strong>de</strong> formules.<br />

ConVenTUel : qui est propre au couvent.<br />

daCTYlIQUe : vers formé <strong>de</strong> pieds contenant une<br />

longue et <strong>de</strong>ux brèves.<br />

déCréTale(S) : lettre portant décret ; recueil <strong>de</strong> lettres<br />

doctrinales.<br />

dIdaCTIQUe : se dit d’un ouvrage où l’auteur se propose<br />

d’instruire.<br />

dISTIQUe : en versification latine, réunion d’un hexamètre<br />

et d’un pentamètre.<br />

doGMaTIQUe : qui a rapport au dogme. Partie <strong>de</strong> la<br />

théologie qui contient le résumé systématique <strong>de</strong>s dogmes.<br />

doMUS : maison, <strong>de</strong>meure, logis, habitation, édifice,<br />

famille, sanctuaire, église, patrie.<br />

doXoloGIe : manifestation glorieuse du Christ dans la<br />

liturgie catholique.<br />

eCCléSIal : qui appartient <strong>à</strong> l’église.<br />

éléGIaQUe : mélancolique, triste.<br />

élISIon : suppression dans l’écriture ou la prononciation<br />

<strong>de</strong> la voyelle finale d’un mot <strong>de</strong>vant la voyelle initiale ou<br />

l’ « h » muet initial du mot suivant.<br />

éPIGraPHe : inscription gravée sur un édifice indiquant<br />

sa date <strong>de</strong> construction, sa <strong>de</strong>stination, son auteur, etc ;<br />

Citation placée en tête d’un livre, d’un chapitre pour en<br />

résumer l’objet ou l’esprit.<br />

éPIloGUe : conclusion d’un ouvrage littéraire.<br />

éVanGélIaIre : livre contenant les évangiles <strong>de</strong> toutes<br />

les messes.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

255


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

256<br />

XIII. Glossaire<br />

FIlIoQUe : mot latin signifiant « et du fils »,appartenant<br />

<strong>à</strong> la phrase du Crédo catholique.<br />

GénITIF : cas qui sert, particulièrement dans les langues<br />

<strong>à</strong> flexion, <strong>à</strong> désigner la dépendance et l’appartenance.<br />

GloSe : explication d’un texte obscur par <strong>de</strong>s mots plus<br />

intelligibles.<br />

GYroVaGUe : vagabond, moine errant et mendiant.<br />

HaGIoGraPHIe : science, traité <strong>de</strong>s choses saintes ;<br />

écrits sur les saints.<br />

HéréTIQUe : qui soutient une doctrine condamnée par<br />

l’église catholique.<br />

HeXaMÈTre : se dit d’un vers <strong>de</strong> six pieds.<br />

HoMoPHonIe : caractère <strong>de</strong> ce qui a le même son.<br />

HYdronYMIe : science ayant trait <strong>à</strong> l’étymologie <strong>de</strong>s<br />

cours d’eau.<br />

HYMnIQUe : qui est <strong>de</strong> la nature du cantique en l’honneur<br />

<strong>de</strong> la divinité.<br />

HYPoCorISTIQUe : diminutif ; Ce dit d’un mot qui atténue.<br />

ÏaMBIQUe : ce dit <strong>de</strong> vers composés avec <strong>de</strong>s pieds<br />

contenant une brève et une longue.<br />

IdIoMe : langue propre <strong>à</strong> une nation. langage particulier<br />

<strong>à</strong> une région plus ou moins étendue.<br />

IFrIQIYenS : peuple fondateur du foyer culturel araboandalou.<br />

InTerPoler : introduire dans un ouvrage <strong>de</strong>s passages, <strong>de</strong>s<br />

chapitres entiers, qui n’appartiennent pas <strong>à</strong> la pièce originale.<br />

ISoColon : série <strong>de</strong> vers dont tous les membres ont la<br />

même longueur.<br />

JanSénISTe : qui se réclame <strong>de</strong> la doctrine <strong>de</strong> Jansénius<br />

sur la grâce et la pré<strong>de</strong>stination (in augustinus, 1640).<br />

léonIn : se dit d’un vers latin dont la <strong>de</strong>rnière syllabe<br />

rime avec celle qui termine le premier hémistiche.<br />

lInGUISTIQUe : étu<strong>de</strong> historique et comparative <strong>de</strong>s<br />

langues.<br />

lITUrGIe : ordre <strong>de</strong>s cérémonies et <strong>de</strong>s prières déterminé<br />

par l’autorité spirituelle compétente.


XIII. Glossaire<br />

MarKa : frontière militaire d’un état ; Marche.<br />

MarTYroloGUe : liste ou catalogue <strong>de</strong>s martyrs et <strong>de</strong>s<br />

saints.<br />

MéTonYMIe : figure <strong>de</strong> rhétorique qui consiste <strong>à</strong> désigner<br />

un objet au moyen d’un terme désignant un autre<br />

objet uni au premier par une relation <strong>de</strong> la cause <strong>à</strong> l’effet,<br />

du contenant au contenu, <strong>de</strong> la partie au tout.<br />

MéTrIQUe : science qui étudie les éléments dont sont<br />

formés les vers ; Habitu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> versification propres <strong>à</strong> un<br />

poète.<br />

MéTroPolITaIn : archevêque par rapport <strong>à</strong> ses suffragants.<br />

MonaCHISMe : état <strong>de</strong> moine ; Institutions monastiques.<br />

MonoPHYSISMe : doctrine qui ne reconnaît qu’une<br />

seule nature en Jésus-Christ.<br />

MoZaraBIQUe : adjectif qualifiant la liturgie chrétienne<br />

d’origine orientale qui s’est maintenue jusqu’au XI e<br />

siècle en espagne.<br />

néoPlaTonISMe : courant philosophique, né avec<br />

Plotin au III e siècle, qui faisait du « Parméni<strong>de</strong> » le dialogue<br />

principal <strong>de</strong> Platon.<br />

noBIlIaIre : qui appartient <strong>à</strong> la noblesse.<br />

oBlaT : enfant voué dès sa naissance au service <strong>de</strong> dieu.<br />

onoMaSTIQUe : étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s noms propres.<br />

orTHodoXIe : conformité d’opinion <strong>à</strong> la vraie foi religieuse<br />

ou <strong>à</strong> la foi religieuse définie comme vraie.<br />

PalaTIn : se dit <strong>de</strong>s hauts dignitaires qui, au Moyen-âge,<br />

dirigeaient et organisaient les services du palais ; Seigneur<br />

possédant une rési<strong>de</strong>nce qui avait le titre <strong>de</strong> palais.<br />

PanéGYrIQUe : discours <strong>à</strong> la louange d’une personne<br />

illustre, d’une nation, d’une cité.<br />

PaTrISTIQUe : science qui a pour objet la connaissance<br />

<strong>de</strong> la doctrine <strong>de</strong>s Pères <strong>de</strong> l’eglise.<br />

PaTroloGIe : connaissance <strong>de</strong> la vie et <strong>de</strong>s œuvres <strong>de</strong>s<br />

Pères <strong>de</strong> l’eglise.<br />

PélaGIen : qui se réclame <strong>de</strong> la doctrine <strong>de</strong> l’hérésiarque<br />

Pélage (360-440).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

257


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

258<br />

XIII. Glossaire<br />

PenTaMÈTre : vers composé <strong>de</strong> cinq pieds, employé<br />

toujours après un hexamètre, avec lequel il forme une distique<br />

élégiaque.<br />

PenTHéMIMÈre : en métrique, se dit d’une coupe que<br />

l’on rencontre après la première partie du troisième pied<br />

dans l’hexamètre ou le sénaire ïambique.<br />

PHIloloGIe : qui concerne la science d’une ou plusieurs<br />

langues au point <strong>de</strong> vue <strong>de</strong> la grammaire empirique, <strong>de</strong> la<br />

critique textuelle et <strong>de</strong> l’histoire littéraire.<br />

PlaTonICISMe : application du système philosophique<br />

<strong>de</strong> Platon.<br />

PreSCIenCe : connaissance certaine que dieu a <strong>de</strong> tout<br />

ce qui doit arriver, même <strong>de</strong>s actes libres <strong>de</strong> la volonté.<br />

ProFane : qui est contre le respect dû aux choses saintes ;<br />

etranger <strong>à</strong> la religion.<br />

relaPS : retombé dans l’hérésie ou l’infidélité.<br />

roMPHée : longue épée thrace dont le large fer a <strong>de</strong>ux<br />

tranchants.<br />

SalVIFIQUe : qui sauve, salvateur.<br />

SaPHIQUe : vers qui se compose <strong>de</strong> onze syllabes réparties<br />

en un trochée, un spondée, un dactyle, un trochée et un<br />

trochée ou spondée.<br />

SarraSIn : nom donné par les occi<strong>de</strong>ntaux du Moyenage<br />

aux musulmans d’europe et d’afrique.<br />

SCHÈMe : figure ou image intermédiaire entre les catégories<br />

et les phénomènes et sous laquelle nous représentons<br />

un concept intellectuel.<br />

SénaIre : vers <strong>de</strong> six pieds correspondant au trimètre<br />

ïambique <strong>de</strong>s Grecs.<br />

SePTénaIre : vers <strong>de</strong> sept pieds et <strong>de</strong>mi.<br />

SPondée : pied composé <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux syllabes longues.<br />

SYnCréTISMe : fusion <strong>de</strong> plusieurs systèmes religieux,<br />

<strong>de</strong> pratiques religieuses appartenant <strong>à</strong> plusieurs cultures.<br />

SYneCdoQUe : procédé <strong>de</strong> style qui consiste <strong>à</strong> prendre<br />

la partie pour un tout, le tout pour la partie, le genre pour<br />

l’espèce, l’espèce pour le genre, etc


XIII. Glossaire<br />

SYno<strong>de</strong> : assemblée d’ecclésiastiques convoqués pour<br />

les affaires d’un diocèse.<br />

TéTraMÈTre : vers composé <strong>de</strong> quatre mètres regroupant<br />

d’une façon déterminée <strong>de</strong>s syllabes longues ou<br />

brèves et comprenant <strong>de</strong>ux temps marqués.<br />

THaUMaTUrGe :celui qui fait <strong>de</strong>s miracles.<br />

ToPonYMIe : science ayant trait <strong>à</strong> l’étymologie <strong>de</strong>s<br />

noms <strong>de</strong> lieux.<br />

TrInITaIre : personne qui croit <strong>à</strong> l’existence <strong>de</strong> trois<br />

personnes en dieu ; Sectaire dont les opinions sur la Trinité<br />

n’étaient pas orthodoxes.<br />

TroCHaÏQUe : si dit du rythme du vers où le pied fondamental<br />

est le trochée.<br />

TroCHée : pied <strong>de</strong> vers qui se compose d’une longue et<br />

d’une brève.<br />

TroPe : figure <strong>de</strong> mot dans laquelle on emploie les mots<br />

avec un sens différent <strong>de</strong> leur sens habituel.<br />

TYPoloGIe : métho<strong>de</strong> d’observation <strong>de</strong>s types humains ;<br />

étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s traits caractéristiques dans un ensemble <strong>de</strong> données,<br />

en vue d’y déterminer <strong>de</strong>s types, <strong>de</strong>s systèmes.<br />

UnIVoQUe : qui conserve le même sens dans <strong>de</strong>s<br />

emplois différents.<br />

VernaCUlaIre : se dit d’une langue parlée seulement<br />

<strong>à</strong> l’intérieur d’une communauté.<br />

VISIon : perception imaginaire, apparition surnaturelle.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

260


I – MANUSCRITS*<br />

XIV. Bibliographie<br />

XI V. Bi bl i ogr aphi e<br />

A – Poésies attribuées <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

w anGerS, bibliothèque municipale, 477 (461).<br />

w aUTUn, bibliothèque municipale, 33.<br />

w Berne, Burgerbibliothek, aa.90.1.<br />

w Berne, Burgerbibliothek, 584.<br />

w CaMBrIdGe, University library, Gg.5.35.<br />

w ePernaY, médiathèque municipale, 1.<br />

w GrenoBle , bibliothèque municipale, 265.<br />

w leI<strong>de</strong>n, Bibliotheek <strong>de</strong>r rijksuniversiteit , voss, lat. 0.88.<br />

w leI<strong>de</strong>n, Bibliotheek <strong>de</strong>r rijksuniversiteit, voss. lat. Q. 116.<br />

w london, British museum, Harleionus, 3072.<br />

w MonTPellIer, faculté <strong>de</strong> mé<strong>de</strong>cine, H. 219.<br />

w ParIS, bibliothèque nationale, ms. lat. 544.<br />

w ParIS, bibliothèque nationale, ms. lat. 1154.<br />

w ParIS, bibliothèque nationale, ms. lat. 1928.<br />

w ParIS, bibliothèque nationale, ms. lat. 387.<br />

w ParIS, bibliothèque nationale, ms. lat. 12140.<br />

w ValenCIenneS, bibliothèque municipale, 828.<br />

w VaTICan, biblioteca apostolica, reg. lat. 1616.<br />

w WolFenBÜTTel , Herzog august Bibliothek, Helmst.<br />

1062.<br />

* l’édition <strong>de</strong> l. CelloT et J. SIrMond, parue en 1650<br />

<strong>à</strong> Paris, reproduit : « Age quaeso perge clio » d’après un<br />

manuscrit aujourd’hui perdu.<br />

B – Œuvres grammaticales attribuées <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

261


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

262<br />

XIV. Bibliographie<br />

w Berne, bibliothèque municipale, ms. 83.<br />

w Berne , bibliothèque municipale, ms. 584.<br />

w leI<strong>de</strong>n , Bibliotheek <strong>de</strong>r rijksuniversiteit, voss. lat. Q. 17.<br />

C – Opuscules théologiques attribués <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

w BrUXelleS, bibliothèque royale, ms. 1831-1833.<br />

w ParIS, bibliothèque nationale, ms. 12292.<br />

w Berne, bibliothèque municipale, ms. 584.<br />

D – Lettre attribuée <strong>à</strong> <strong>Gottschalk</strong>.<br />

w roMe, bibliothèque vaticane, ms. Vat. lat. 7803, Fo. 176.<br />

II – SOURCES LATINES<br />

a. Patrologie latine : éd. MIGne, J.P., Paris (1844/1864).<br />

B. Monumenta Germanica Historica : Hanovre-leipzig (1826).<br />

a) M.G.H. Capitularia, I et II : éd. Borétius et Krause.<br />

b) M.G.H. Epistolae, I et II : éd. dümmler.<br />

c) M.G.H. Concilia, I et II : éd. Werminghoff.<br />

d) M.G.H. Scriptores.<br />

C. Annales <strong>de</strong> Saint-Bertin : GraT, F., VIellIard, J. et<br />

CleMenCeT, S., Paris (1964).<br />

d. Œuvres théologiques et grammaticales <strong>de</strong> Go<strong>de</strong>scalc<br />

d’Orbais, dom. laMBoT, C., louvain (1945).<br />

III – AUTEURS CAROLINGIENS<br />

w eGInHard : Vita Caroli, trad. Halphen, Paris (1938).<br />

w erIGene : De diuina prae<strong>de</strong>stinatione, P.l., CXXII.<br />

w FlorUS <strong>de</strong> lyon : Aduersus Iohannem Scottum, P.l. CIXX.<br />

w loUP <strong>de</strong> Ferrières : Correspondance, trad. leVIllaIn,


l., éd. les Belles lettres, Paris (1964).<br />

w HIl<strong>de</strong>Mar <strong>de</strong> Corbie : éd. Bibliotheca Cassimensis,<br />

t.IV (1880).<br />

w HInCMar <strong>de</strong> reims :<br />

- Epistolae Karolini, éd. e.Perels (1939).<br />

- Poetae latini aeui Karolini (446 vers) éd. Traube (1896).<br />

- Vita Remigii, P.l. CXXV (1879).<br />

w nITHard : Histoire <strong>de</strong>s fils <strong>de</strong> Louis le Pieux, trad.<br />

laUer,Ph., Paris (1926).<br />

w raBan MaUr : Epistolae, P.l. CXII.<br />

w raTraMne <strong>de</strong> Corbie : De prae<strong>de</strong>stinatione, P.l. CXXI.<br />

w reGInon <strong>de</strong> PrÜM : Chroniques, raU, r., darmstadt<br />

(1969).<br />

w WalaFrId STraBon : M.G.H., Poetae II,<br />

éd. dümmler (1884).<br />

IV – ETUDES ET COMMENTAIRES<br />

XIV. Bibliographie<br />

w aeGerTer, e. <strong>Gottschalk</strong> et le problème <strong>de</strong> la pré<strong>de</strong>stination<br />

au IX e siècle, éd. revue <strong>de</strong> l’histoire <strong>de</strong>s religions<br />

n°116 (1937).<br />

w BISCHoFF,B., <strong>Gottschalk</strong>s Lied für <strong>de</strong>n reichenauer<br />

Freund, éd. Medium aevum Vivum, Hei<strong>de</strong>lberg (1960).<br />

w BorraSCH, V., Der Mönch <strong>Gottschalk</strong> von Orbais,<br />

sein Leben und seine Lehre, Thorn (1868).<br />

w BrUnHÖlZ, F., Geschichte <strong>de</strong>r lateinischen Literatur<br />

<strong>de</strong>s Mittelalters, éd. V. Finck (1975).<br />

w CelloT, l., Historia Gotteschaldi prae<strong>de</strong>stinationi,<br />

Paris (1685).<br />

w dInKler, e., <strong>Gottschalk</strong> <strong>de</strong>r Sachse, Stuttgart (1936).<br />

w dorrIeS, H., <strong>Gottschalk</strong>, ein christlicher Zeuge <strong>de</strong>r<br />

<strong>de</strong>utschen Frühzeit, éd. Junge Kirsche n°5 (1937).<br />

w dÜMMler, e., M.G.H., Poetae II, Berlin (1884).<br />

w FICKerMann, n., Poetae VI, Weimar (1951).<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

263


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

264<br />

XIV. Bibliographie<br />

w FreYSTedT, a., Studien zu <strong>Gottschalk</strong>s Leben und<br />

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encyclopädie f. Protestant. Théol. u. Kirche, t. VII,<br />

leipzig (1899).<br />

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w Go<strong>de</strong>T, P., <strong>Gottschalk</strong> : in dictionnaire <strong>de</strong> théologie<br />

catholique, VI., Paris (1920).<br />

w GraBer, H., Ein Mönch wi<strong>de</strong>r Kloster und Kirsche :<br />

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w GÜnTHer, H., Der Mönch <strong>Gottschalk</strong> : in <strong>de</strong>utsche<br />

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w HerdInG, o., Über die Dichtungen <strong>Gottschalk</strong>s von<br />

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(1948)<br />

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w laMBoT, C., Oeuvres théologiques et grammaticales<br />

<strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> d’Orbais, louvain (1945).<br />

w laVaUd, r., Précurseur <strong>de</strong> Calvin ou témoin <strong>de</strong> l’augustinisme<br />

? Le cas <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong>, éd. revue thomiste<br />

n°15 (1932).<br />

w MonnIer, F., De Gothescalci et Johannis Scoti<br />

Erigena controversia, Paris (1853).<br />

w MorIn, G., <strong>Gottschalk</strong> retrouvé, éd. revue bénédictine


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n°43 (1931).<br />

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V – GENERALITES<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

265


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

266<br />

XIV. Bibliographie<br />

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<strong>de</strong> l’église <strong>de</strong>puis l’origine jusqu’<strong>à</strong> nos jours, Paris<br />

(1947).<br />

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<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

267


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

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268<br />

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une dissi<strong>de</strong>nce<br />

269


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

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(recueil d’articles) éd. Variorum reprints, london (1979).<br />

w TaeGer, B., Zahlenzymbolik bei Hraban, bei Hincmar,<br />

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w WeBer, r., Biblia Sacra, Iuxta Vulgatam Versionens,<br />

t. 1 et 2, Stuttgart (1969).<br />

w WIlMaIT, a., dom, Opuscule inédit <strong>de</strong> Ratramne sur la<br />

nature <strong>de</strong> l’âme, éd. revue bénédictine, t. 43, p. 207 –<br />

223 (1931).<br />

w Zadora-rIo, e., La topographie <strong>de</strong>s campagnes<br />

médiévales, n° 46, éd. d.a.F. (1994).


A<br />

abd er rahmane II p.40.<br />

adalgis n.24.<br />

adam p.123.<br />

ado <strong>de</strong> Vienne n.321.<br />

agaton n.117.<br />

aghlabi<strong>de</strong>s n.85.<br />

agobard p.28, 35, 119. n.55, 243.<br />

agroecius p.59. n.137.<br />

Aix-la-Chapelle n.52<br />

alcuin p.21, 38, 83, 89, 123, 131, 132, 138.<br />

n.35,255.<br />

aldhelm p.60.<br />

Alémanie p.46.<br />

alteus n.29.<br />

alvare p.42.<br />

amalaire p.130, 138. n.80.<br />

Amann, E. p.118.<br />

ammien-Marcellin n.137.<br />

amolon p.126. n.243,341.<br />

Andalus p.41.<br />

Angers p.39.<br />

Angoulême p.38, 138.<br />

Anjou p.39.<br />

Aquilée p.43.<br />

Aquitaine p.39, 49.<br />

arabes p.52.<br />

Aragon p.46.<br />

ardvic <strong>de</strong> Besançon n.321.<br />

aristote p.164.<br />

Attigny n.344.<br />

audax p.59. n.137.<br />

audin n.121.<br />

augustinien p.14.<br />

aulu-Gelle p.59. n.137.<br />

Autun n.29.<br />

Auvers-sur-Oise p.39.<br />

Auxerre p.138.<br />

avianus p.59. n.137.<br />

XV. I n<strong>de</strong>x<br />

les noms d’auteurs sont en romain gras. les noms <strong>de</strong> personnages et génériques en romain.<br />

les noms géographiques ou <strong>de</strong> lieux sont en italique.<br />

le nom <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> revenant très souvent n’a pas été mentionné.<br />

B<br />

Baugulf p.25, 131.<br />

Bavière p.30.<br />

Bavon d’orbais n.124,323.<br />

Bè<strong>de</strong> le Vénérable p.19, 21, 59, 60, 133.<br />

Belgique p.143.<br />

Belgra<strong>de</strong> p.53.<br />

Benoît d’aniane p.27.<br />

Berne p.81.<br />

Bernino, D. p.52.<br />

Bernold p.18.<br />

Berno/Bernus p.20, 22, 23. n.21,29,31.<br />

Bischofberg p.26.<br />

Bischofsheim p.24, 26.<br />

Björn p.52.<br />

Bloch, M. p.47.<br />

Bobio p.17.<br />

Borna p.43, 44. n.90.<br />

Bourgogne p.39.<br />

Bretagne p.39.<br />

Breton p.39.<br />

Bronzell n.50.<br />

Bulgare p.53.<br />

Bulgarie p.44.<br />

Burgon<strong>de</strong>s p.23.<br />

Byzance p.44, 52.<br />

Byzantins p.43.<br />

C<br />

Camuzat, N. n.326.<br />

Caper n.137.<br />

Cappuyns, M. p.151.<br />

Carloman p.49.<br />

Carthage p.109.<br />

Cassien n.204.<br />

Cassiodore p.134.<br />

Castille p.46.<br />

Catalogne p.46.<br />

XV. In<strong>de</strong>x<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

271


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

272<br />

XV. In<strong>de</strong>x<br />

Cé p.39.<br />

Célestius n.204.<br />

Cellot n.183.<br />

Cetina p.43, 53.<br />

César p.164.<br />

Champenois, M. n.330.<br />

Chapelle Saint-Michel p.25.<br />

Charenton p.39.<br />

Charisius p.59. n.137.<br />

Charlemagne p.19, 21, 22, 24, 33, 38, 46, 75,<br />

89, 137, 139, 140.<br />

Charles le Chauve p.12, 32, 34, 35, 37, 38, 39,<br />

46, 48, 49, 51, 72, 83, 86, 100, 108, 118, 119,<br />

122, 126, 130, 131, 135, 137, 138, 143, 146,<br />

147, 150, 154, 159. n. 320.<br />

Christ p. 41, 69, 82, 84, 92, 105, 127, 136,<br />

143.<br />

Chro<strong>de</strong>gang <strong>de</strong> Metz p.21.<br />

Cicéron p.164. n.137.<br />

Cogolin n.88.<br />

Constantin VII Porphyrogénète p.53, 54.<br />

Constantinople p.43, 44.<br />

Corbie p.17, 49, 56, 62, 67, 105, 140.<br />

Cordoue p.40, 42.<br />

Cormicy p.32.<br />

Coulaines p.147.<br />

Croates p.54.<br />

Croatie p.43, 53.<br />

Culte <strong>de</strong> diane p.29.<br />

Cunault p.39.<br />

D<br />

Dalmatie p.43, 52, 62, 63.<br />

Danube p.53.<br />

Déas p.39.<br />

De Valans, G. p.71.<br />

Devisse, J. p.118, 121.<br />

diomè<strong>de</strong> p.133.<br />

donat p.59. n.137.<br />

Dorestad p.39.<br />

Douzy p.89, 135, 140, 159. n.262.<br />

Dr<strong>à</strong>c p.53.<br />

E<br />

eberhard p.44, 51, 52, 65.<br />

ebon <strong>de</strong> reims p.18, 35, 51, 67, 69, 70, 135.<br />

n.141,143,189,246.<br />

ebon <strong>de</strong> Grenoble p.126.<br />

Ebre p.40, 140.<br />

E<strong>de</strong>lzell n.50.<br />

Eichenzell n.50.<br />

eginhard p.38.<br />

eigil p.25, 31, 32, 49, 50, 70, 131, 132, 133.<br />

egilon p.126, 135.<br />

Elbe p.140.<br />

elie p.138.<br />

elipand p.41, 74.<br />

enée n.184,323.<br />

engelmod p.67.<br />

ensileubi p.78.<br />

Epernay p.32, 67.<br />

epictète n.182.<br />

ermentaire n.76.<br />

erpain <strong>de</strong> Senlis n.323.<br />

Espagne p.39.<br />

Estinnes p.26.<br />

euloge p.42.<br />

evangéliaire d’ebon p.65, 68.<br />

F<br />

Febvre, L. p.47.<br />

Félix d’Urgel p.75.<br />

Fickermann, N. p.69.<br />

Flodoart p.18.<br />

Florus <strong>de</strong> lyon p.100, 119, 120, 121, 130.<br />

n.20,121,191,243,268.<br />

Folcoin <strong>de</strong> Thérouanne n.323.<br />

Francie p.37, 39.<br />

Franconie p.30, 31.<br />

Francs p.38.<br />

Francfort p.75.<br />

Frauenberg p.24, 25, 26.<br />

Fredold <strong>de</strong> narbonne n.321.<br />

Frioul p.43, 44, 51, 53.<br />

<strong>Fulda</strong> p.14, 17, 20, 24, 25, 26, 29, 30, 31, 49,<br />

57, 59, 131, 140, 145, 163, 164, 165.<br />

Fulgence p.57, 85. n.202.<br />

G<br />

Galindo p.119. n.257.<br />

Gassin n.88.<br />

Gatska p.44.<br />

Gaule p.30.<br />

Genna<strong>de</strong> <strong>de</strong> Marseille n.204.<br />

Germanie p.26.<br />

Gernbrins <strong>de</strong> rennes n.323.<br />

Girard, R. p.151.<br />

Giselmar p.105, 120. n.341.<br />

Gläserzell n.50.<br />

Gra<strong>de</strong> p.43.<br />

Grecs n.223.<br />

Grenoble p.126.<br />

Grimaud n.88.<br />

Gunlach, W. p.120.<br />

Guntbert p.126.<br />

Gunther <strong>de</strong> Cologne n.321.


H<br />

Haimont d’Halberstadt n.294.<br />

Halduin d’<strong>Hautvillers</strong> n.323.<br />

Hainaut p.26.<br />

Hambourg p.39.<br />

Haraldr Klakk n.83.<br />

Haround al rachid n.86.<br />

Haureau n.26.<br />

<strong>Hautvillers</strong> p.12, 17, 52, 56, 62, 70, 109, 120,<br />

150, 160. n.210.<br />

He<strong>de</strong>by n.83.<br />

Hefele, C. J. p.144, 146, 147, 151.<br />

Heistulf p.25,132.<br />

Hemeric n.120.<br />

Heribald d’auxerre p.134.<br />

Hesse p.20, 25, 26.<br />

Hilbold p.39.<br />

Hil<strong>de</strong>mar p.21. n.34,36.<br />

Hil<strong>de</strong>sheim p.69.<br />

Hincmar <strong>de</strong> laon p.139.<br />

Hincmar <strong>de</strong> reims p.12, 18, 26, 32, 36, 37, 46,<br />

48, 51, 52, 55, 58, 67, 70, 72, 73, 74, 77, 81,<br />

85, 86, 87, 89, 93, 104, 105, 108,112,117,118,<br />

120, 121, 122, 129,130,131, 135, 137, 139,<br />

143, 149, 150, 154, 155, 156, 158, 159, 160.<br />

n.247,321,323.<br />

Honorat p.57.<br />

Horace p.164. n.137.<br />

Hosteinn p.52.<br />

Hugues <strong>de</strong> Saint-Victor p.80.<br />

I<br />

Ile d’Her p.38.<br />

Illyrie p.165.<br />

Immo <strong>de</strong> noyon n.323.<br />

In<strong>de</strong>n n.52.<br />

Irlandais p.51<br />

Isaac n.323.<br />

Islam p.40, 41, 42.<br />

Isles-lès-Villeroy p.39.<br />

Istrie p.43, 44.<br />

Italie p.43, 51, 53, 81.<br />

J<br />

Jean VIII n.85.<br />

Jean Scot erigène p.118, 119, 130, 138, 159.<br />

n.343.<br />

Jammen, E. p.71.<br />

Johannesberg p.27.<br />

Jolivet, J. p.101, 143.<br />

Jonas d’orléans p.35, 36, 82, 120, 125, 158.<br />

Joseph n.137.<br />

Juda n.203.<br />

Jules Sévère n.137.<br />

Jumièges p.17.<br />

K<br />

Kämmerzell n.50.<br />

Katic, L. p.52.<br />

Keulos p.27.<br />

Klis p.53.<br />

Kratchenko p.15.<br />

Krbava p.44.<br />

Künzell n.50.<br />

XV. In<strong>de</strong>x<br />

L<br />

la Gar<strong>de</strong>-Freinet n.88.<br />

lambert p.39.<br />

Langres p.120.<br />

Languedoc p.46.<br />

Leclerc, H. n.28.<br />

léon III p.75.<br />

Liège p.38.<br />

Lika p.44.<br />

lioba p.44.<br />

lju<strong>de</strong>vit Posavski p.43, 44. n.91.<br />

Loire p.39.<br />

lombards p.43.<br />

London, A. p.15.<br />

lothaire p.34, 35 38, 44, 100, 131, 134.<br />

n.246.<br />

louis le Pieux ( le débonnaire) p.34, 35, 36,<br />

38, 43, 44, 139, 140. n.23,294.<br />

louis III le Bègue p.37.<br />

louis le Germanique p.13, 37, 38, 39, 70, 82,<br />

100, 131, 145, 148, 150.<br />

loup <strong>de</strong> Châlons p.105. n.323,341.<br />

loup <strong>de</strong> Ferrières p.68, 82, 83, 100, 122, 123,<br />

125. n.29,157,223,259,341.<br />

lucrèce p.164.<br />

Luxeuil p.17.<br />

Lyon p.28, 54, 75, 120, 126.<br />

M<br />

Maastricht p.125.<br />

Maberzell n.50.<br />

Mahomet p.42.<br />

Marc n.120.<br />

Marne p.39.<br />

Martin p.53, 54.<br />

Matcaud p.125.<br />

Mathon, G. p.72.<br />

Maxime p.120, 138.<br />

Mayence p.23, 26, 32, 51, 52, 54, 70, 81, 87,<br />

104, 109, 123, 143, 145, 146, 151, 154. n.83.<br />

Meersen p.38.<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

273


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

274<br />

XV. In<strong>de</strong>x<br />

Mérida p.40.<br />

Messay p.39.<br />

Meyer, W. p.71.<br />

Michel III l’Ivrogne p.44.<br />

Migétius p.74.<br />

Mislav p.44. n.92.<br />

Montaigne n.182.<br />

Morin G. p.81, 147. n.215.<br />

Moussa ibn Moussa p.40.<br />

Musulmans p.14.<br />

N<br />

Navarre p.39, 40, 46.<br />

Neustrie p.39.<br />

nicolas 1er p.47, 126, 135.<br />

Niezig p.27.<br />

Nin p.43, 44.<br />

Nis p.53.<br />

Noirmoutier p.38, 39.<br />

nominoé p.39.<br />

Norique p.43, 140.<br />

normands p.14, 38, 52.<br />

notingue p.50, 130, 170.<br />

O<br />

Oeuilly p.32.<br />

Oisel p.39.<br />

Orange p.84.<br />

Orbais p.12, 17, 30 49, 50, 52, 56, 57, 58, 62,<br />

70, 72, 104, 109, 148.<br />

origène p.58.<br />

otgar p.35, 50, 134.<br />

othlon <strong>de</strong> Saint-emmeran n.60.<br />

ovi<strong>de</strong> n.137.<br />

P<br />

Palestine n.194.<br />

Pampelune p.40.<br />

Pannonie p.43, 44.<br />

Papirianus n.137.<br />

Paris p.39, 103.<br />

Pardule <strong>de</strong> laon p.118,121,129,130,138.<br />

Pascal n.182.<br />

Paschase radbert p.90.<br />

Passau p.53.<br />

Pélage n.194,204.<br />

Pépin p.33, 34.<br />

Pépin d’aquitaine p.49.<br />

Perfectus p.42.<br />

Petar p.52.<br />

Petersberg p.27, 132.<br />

Phèdre n.137.<br />

Pierre d’<strong>Hautvillers</strong> p.67, 69. n.120.<br />

Pilgerzell n.50.<br />

Pîtres-sur-Seine p.39.<br />

Placi<strong>de</strong><br />

Platon p.59, 96, 98. n.137.<br />

Pline p.29.<br />

Poitou p.39.<br />

Pompée p.59.<br />

Priscien p.59, 60. n.137.<br />

Probus p.59. n.137.<br />

Prosper d’aquitaine p.84, 103.<br />

Provence p.39, 42.<br />

Pru<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> Troyes p.105, 119, 130.<br />

n.257,331.<br />

Prüm p.29.<br />

Pseudo-augustin n.178.<br />

Pseudo-Bè<strong>de</strong> p.21.<br />

Pseudo-Caton p.59. n.137.<br />

Q<br />

Quentovic p.39.<br />

Quierzy p.12, 89, 104, 105, 109, 127, 136,<br />

139, 143, 148, 149, 151, 159, 161.<br />

R<br />

raban Maur p.14, 23, 26, 31, 32, 33, 35, 48,<br />

50, 55, 81, 82, 83, 85, 104, 109, 117, 121,<br />

130, 131, 132, 145, 146, 147, 154, 155.<br />

n.237.<br />

rachulf p.25.<br />

ragenar d’amiens n.323.<br />

Ramatuelle n.88.<br />

ratber <strong>de</strong> Corbie n.323.<br />

ratgar p.25, 131. n.287.<br />

ratramne p.58, 62, 68, 72, 74, 83, 89, 105,<br />

122, 123, 126. n.126,157,261.<br />

Ravenne p.43.<br />

reccafrid p.42.<br />

reginon p.29.<br />

règle <strong>de</strong> Saint-Benoit p.33, 64. n.174.<br />

Reichenau p.17, 49, 56, 57, 62, 64, 140.<br />

Reims p.12, 30, 32, 37, 51, 54, 70, 82, 109,<br />

123, 137, 143, 154, 156.<br />

Remiremont p.36.<br />

remy <strong>de</strong> lyon p.126, 149. n.243,321.<br />

renaud p.38.<br />

Ribe n.83.<br />

richaud p.143. n.323.<br />

Rizinice p.52, 53.<br />

rodoald n.323.<br />

rodulf <strong>de</strong> Bourges n.321.<br />

romains p.23.<br />

Rome p.43, 44, 50, 125, 126.<br />

rotha<strong>de</strong> p.83, 125, 158. n.262,323.<br />

rudolf p.24. n.44.


S<br />

Saint ambroise p.58, 92.<br />

Saint anschaire n.83.<br />

Saint athanase p.58.<br />

Saint Augustin p.15, 50, 57, 85, 88, 92, 98,<br />

103, 114, 121, 127, 129, 133, 137, 164.<br />

n.194,203,204.<br />

Saint Basile p.58. n.28.<br />

Saint Benoit p.21, 34, 131.<br />

Saint Boniface p.19, 24, 25, 26, 28. n.210.<br />

Saint Cyrille d’alexandrie p.58.<br />

Saint-Denis p.17.<br />

Saint-esprit p.69, 92.<br />

Saint-Gall p.140.<br />

Saint Grégoire le Grand p.19, 58.<br />

Saint Grégoire <strong>de</strong> nazianze p.78.<br />

Saint Isidore p.59, 84, 85, 99, 103, 133.<br />

Saint Jean p.118.<br />

Saint Jean Chrysostome p.58.<br />

Saint Jérôme p.58, 61, 121.<br />

Saint-Martin-<strong>de</strong>-Tours p.21, 38.<br />

Saint-Maxence p.39.<br />

Saint-Médard-<strong>de</strong>-Soissons p.49.<br />

Saint Paul p.61,78. n.340.<br />

Saint-Philbert p.39.<br />

Saint-Rémi-<strong>de</strong>-Reims p.32.<br />

Saint réole n.329.<br />

Saint-Riquier p.140.<br />

Saint-Valérien-<strong>de</strong>-Tournus p.39.<br />

Salluste p.59. n.137.<br />

Salona n.93.<br />

Saragosse p.40.<br />

Savonnières p.37, 159.<br />

Saxe p.19, 22, 30.<br />

Saxons p.21, 35, 45.<br />

Senlis p.49.<br />

Sens p.126.<br />

Servius p.59. n.137.<br />

Séville p.42.<br />

Soissons p.27, 49.<br />

Soljenitsyne, A. p.15.<br />

Sperain<strong>de</strong>o p.42.<br />

Split p.44, 52. n.93.<br />

Sturm p.25. n.28.<br />

Suédois p.39.<br />

T<br />

Tacite p.164.<br />

Talbi, M. n.85.<br />

Ten<strong>de</strong>ric <strong>de</strong> Cambrai n.323.<br />

Terence p.59, 164. n.137.<br />

Teutbald <strong>de</strong> langres n.323.<br />

Théodulf p.21.<br />

Thieutgaud <strong>de</strong> Trèves n.321.<br />

Thieuthil<strong>de</strong> p.36.<br />

Thiota p.46.<br />

Thor p.46.<br />

Thucydi<strong>de</strong> p.59. n.137.<br />

Timothée p.127.<br />

Tite-live p.164.<br />

Tolè<strong>de</strong> p.41, 42.<br />

Tomislav n.116.<br />

Tours p.140.<br />

Tribordan p.39.<br />

Trpimir p.44, 45, 52, 53, 147. n.93.<br />

Tu<strong>de</strong>la p.40.<br />

U<br />

Usher, J. n.18.<br />

Ursus p.43.<br />

V<br />

Valence p.89, 120, 136, 159.<br />

Vénétie p.53, 62.<br />

Venise p.43.<br />

Verdun p.13, 18, 147.<br />

Vérone p.50.<br />

Vikings p.39, 46.<br />

Virgile p.59, 164. n.137.<br />

Virgile le Grammairien p.59.<br />

Viterbe n.120.<br />

Vladislav p.44.<br />

Vulfin d’orléans n.121.<br />

W<br />

Wala p.35.<br />

Walafrid Strabon p.53, 55, 57, 62, 65, 83,<br />

100, 119, 126. n.24,32,322.<br />

Wénilon <strong>de</strong> rouen n.321,323.<br />

Wénilon <strong>de</strong> Sens p.126,130. n.321,323.<br />

Wettin p.18. n.24.<br />

Webald p.138.<br />

Witans n.323.<br />

Worms p.24.<br />

Wulfa<strong>de</strong> p.135. n.323.<br />

X<br />

Xanten p.145.<br />

Y<br />

Yrmenfried <strong>de</strong> Beauvais n.323.<br />

Yurtz p.38.<br />

Z<br />

Zacharie p.31.<br />

Zadar n.93.<br />

Zell n.50.<br />

XV. In<strong>de</strong>x<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

275


<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

276<br />

Postface<br />

Il en est <strong>de</strong>s hommes, comme <strong>de</strong>s sites, qui furent un jour<br />

essentiels et qui tombèrent dans l’oubli. Saint Réol, archevêque<br />

<strong>de</strong> Reims, décida au VII e siècle <strong>de</strong> créer dans un<br />

vallon riche en forêts et en eaux jaillissantes une abbaye qui,<br />

très vite, <strong>de</strong>vait rayonner sur toute l’Europe.<br />

Des bâtiments qui furent érigés au XII e siècle et <strong>de</strong>s fortifications<br />

qui protégeaient la ville, il ne reste que peu <strong>de</strong> choses.<br />

Le chœur, les transepts et la première travée <strong>de</strong> la nef en sont<br />

les seuls vestiges qu’aujourd’hui, toutes les autorités s’emploient<br />

<strong>à</strong> restaurer pour les siècles <strong>à</strong> venir.<br />

Des hommes d’exception habitèrent ces lieux et, parmi eux,<br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais revient dans le patrimoine vivant, grâce <strong>à</strong><br />

l’œuvre essentielle <strong>de</strong> <strong>Bernard</strong> <strong>Boller</strong>. La réhabilitation <strong>de</strong> cet<br />

être fait <strong>de</strong> courage, d’intelligence et d’engagement, est une<br />

œuvre majeure qui démontre que se battre jusqu’<strong>à</strong> la mort pour<br />

ses idées, est le plus merveilleux <strong>de</strong>s <strong>de</strong>voirs <strong>de</strong> l’humanité.<br />

Il porta le nom <strong>de</strong> <strong>Gottschalk</strong> d’Orbais et retrouve aujourd’hui<br />

toute sa place dans le patrimoine <strong>de</strong> notre beau village<br />

d’Orbais-l’Abbaye.<br />

Pierre-Yves JARDEL<br />

Maire d’Orbais-l’Abbaye


Postface<br />

<strong>Hautvillers</strong>, célèbre par son abbaye où vécut Dom<br />

Pérignon <strong>de</strong> 1668 <strong>à</strong> 1715, et où reposent les reliques<br />

<strong>de</strong> sainte Hélène, a abrité pendant vingt ans un<br />

moine hors du commun dénommé <strong>Gottschalk</strong>. Ce remarquable<br />

ouvrage <strong>de</strong> <strong>Bernard</strong> <strong>Boller</strong> fait revivre le parcours <strong>de</strong><br />

cet érudit, lettré et poète.<br />

Ce philosophe <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> conviction <strong>de</strong>meure aujourd’hui<br />

d’une étonnante mo<strong>de</strong>rnité. Sa dissi<strong>de</strong>nce nous apprend, plus<br />

<strong>de</strong> mille ans après, le difficile combat <strong>de</strong>s idées.<br />

En dépit <strong>de</strong> nombreux procès et <strong>de</strong> leur violence, il ne fléchit<br />

jamais, même après avoir dû brûler ses écrits et été contraint<br />

au silence.<br />

Il repose au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> notre village Altus-Villare au lieu-dit<br />

« Les Buttes ».<br />

Cette contrée en limite <strong>de</strong> forêt est plantée <strong>de</strong> ceps <strong>de</strong> vigne.<br />

Elle participe désormais <strong>à</strong> la réputation <strong>de</strong> notre célèbre<br />

vignoble champenois, qui n’existait pas <strong>à</strong> la mort <strong>de</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> en 869, et ce <strong>de</strong>rnier, reconnu aujourd’hui comme<br />

l’auteur <strong>de</strong> la dédicace <strong>de</strong> l’évangéliaire d’Ebon, contribue<br />

également au renom d’<strong>Hautvillers</strong>.<br />

Ses idéaux <strong>de</strong> paix ont certainement été entendus par les altavillois<br />

puisque, très tôt, notre beau village <strong>de</strong> Champagne est<br />

<strong>de</strong>venu cette petite parcelle d’Europe unie par nos jumelages.<br />

Méditons ensemble les messages qu’il nous a légués.<br />

Patrick Lopez<br />

Maire d’<strong>Hautvillers</strong><br />

<strong>Gottschalk</strong> d’Orbais<br />

<strong>de</strong> <strong>Fulda</strong> <strong>à</strong> <strong>Hautvillers</strong> :<br />

une dissi<strong>de</strong>nce<br />

277


La composition <strong>de</strong> cet ouvrage<br />

a été réalisé par Christophe Brugère<br />

<strong>à</strong> Chelles (Seine-et-Marne).


Achevé d’imprimer en novembre 2004<br />

N° d’édition : XXXXX. N° d’impression : XXXXXX<br />

Dépot légal : novembre 2004

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