Il - Maroc Hebdo International
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A MON AVIS<br />
CLƒMENCE<br />
CARACTƒRISƒE<br />
Trois mois de prison avec sursis, pour<br />
Mohamed Selhami, directeur de <strong>Maroc</strong><br />
<strong>Hebdo</strong> <strong>International</strong> (MHI), autant pour<br />
Amale Samie, journaliste. Le juge<br />
Abdelmajid Fikri a peut-être estimé que le<br />
verdict était encore trop clément, il l’a donc<br />
agrémenté de 696 000 Dirhams d’amende<br />
et autres frais.<br />
Aziz Chihal, animateur de "Studio 5"<br />
émission que vous ne connaissez pas tous,<br />
loin s’en faut, s’est estimé injurié lorsque<br />
Amale Samie a dénoncé son incompétence<br />
grave et déclaré que les programmes de la<br />
RTM étaient un complot de la bêtise contre<br />
la culture et un crime contre l’humanité.<br />
Bien. Aziz Chihal a bénéficié d’une formidable<br />
publicité gratuite dans les colonnes<br />
de MHI. <strong>Il</strong> serait avisé d’exploiter très vite<br />
le filon en sollicitant de nouveaux sponsors<br />
pour son " émission ". Et en augmentant ses<br />
tarifs.<br />
MHI, pour le juge Fikri, est un repaire de<br />
plumitifs spécialisés dans l’injure contre<br />
Aziz Chihal. Que fait le juge ? <strong>Il</strong> délivre une<br />
amende-matraque, à MHI, assortie de 3 mois<br />
de cabane avec sursis. C’est que Monsieur<br />
le juge ne plaisante pas. On est dans un tribunal,<br />
pas à un spectacle de Bziz ou de Saïd<br />
Naciri.<br />
Le verdict prononcé va faire jurisprudence.<br />
La condamnation va faire école. Elle<br />
figurera dans les manuels juridiques et les<br />
publications universitaires. N’en doutez<br />
point.<br />
Sur quelle base l’amende a été calculée<br />
? Sur la base de contrats publicitaires passés<br />
entre des sponsors et Aziz Chihal et qui<br />
auraient été annulés à la suite de l’article de<br />
Amale Samie.<br />
Pourquoi 3 mois de prison ? Quand MHI<br />
le saura, vous serez les premiers à être au<br />
courant.<br />
Mais pour que vous constatiez par vousmêmes<br />
que le juge Fikri n’a pas eu la main<br />
lourde, nous vous livrons le texte intégral<br />
du jugement prononcé contre MHI. Le juge<br />
a été équitable et généreux.<br />
Sa bienveillance sera reconnue à l’échelle<br />
planétaire. Nonchalamment ballottée sur<br />
le réseau Internet, la sentence qu’il a prononcée<br />
confirmera au monde qu’au <strong>Maroc</strong>,<br />
la justice va parfois à une telle vitesse qu’elle<br />
dépasse la démocratie.<br />
Ici, la presse est libre. On émet une opinion<br />
sur la médiocrité d’un animateur télé<br />
et sur la nullité des programmes de la chaîne<br />
qui l’inflige aux <strong>Maroc</strong>ains depuis des années<br />
et clac ! Trois mois de cachot et arrosage<br />
à la mitrailleuse lourde de la trésorerie<br />
d’un journal indépendant.<br />
Le juge Fikri et la RTM ont plusieurs<br />
longueurs d’avance sur nous, en matière<br />
d’impartialité, d’indépendance, de liberté<br />
d’expression et de pratique démocratique.<br />
Sans parler du respect dû aux téléspectateurs.<br />
Ces pédagogues nous ont fait un cours<br />
magistral, mais MHI n’a rien compris. En<br />
tout cas, il n’a pas compris une chose : il<br />
n’est pas en phase avec l’ère de progrès et<br />
d’ouverture que nous vivons. Mais MHI a<br />
fait appel quand même. Téméraire ? <strong>Il</strong> faudra<br />
voir.❏<br />
JUSTICE<br />
LÕaffaire MHI - Aziz Chihal telle que prononcŽe par le tribunal de<br />
1 re instance dÕAnfa<br />
LE JUGEMENT<br />
DU PROCéS<br />
Au nom de Sa Majesté le<br />
Roi. Le 05 Avril 1999, Le<br />
Tribunal de première instance<br />
d'Anfa, statuant en matière<br />
correctionnelle, a rendu le jugement<br />
dont suit la teneur:<br />
Entre:<br />
Le Procureur du Roi du<br />
Tribunal de céans,<br />
Les parties civiles demanderesses:<br />
- Aziz Chihal<br />
- Société Spectop<br />
Prise en la personne de son représentant<br />
juridique Aziz Chihal.<br />
Ayant pour leur mandataire,<br />
Me Abderrahman Fraïkech, avocat<br />
à Casablanca.<br />
Et les accusés:<br />
1- Amale Samie Fils de<br />
Abdellatif, marocain, né en 1944,<br />
de sa mère Khadija, fille de Abbas,<br />
marié, Directeur journaliste, demeurant,<br />
à Casablanca.<br />
2- Mohamed Selhami fils de<br />
Aziz, marocain, né en 1954, de sa<br />
mère Amina Benjelloun, marié,<br />
Directeur de Journal, demeurant<br />
Normandie II Bir Anzarane à<br />
Casablanca.<br />
Prévenus en vertu de la plainte<br />
directe pour diffamation et injures;<br />
faits prévus et punis par les<br />
articles 47-48 du code de la presse,<br />
442, 443 du code pénal, commis<br />
dans le ressort judiciaire du<br />
Tribunal de céans, et ce, depuis un<br />
temps non prescrit en matière correctionnelle.<br />
Ayant pour mandataire en justice,<br />
Me El Ferdaous Abdellah,<br />
avocat à Casablanca.<br />
Les faits<br />
Vu la plainte directe déposée<br />
par Me Fraikech pour le compte de<br />
son mandant Aziz Chihal au greffe<br />
du Tribunal de céans en date du<br />
14/1/99, dont la taxe judiciaire a été<br />
acquittée selon récépissé n°83421,<br />
aux termes de laquelle il expose:<br />
Qu'il est producteur de télé<br />
exerçant l'animation artistique, de<br />
sorte qu'il produit et présente dans<br />
ce cadre l'émission Studio 5 diffusée<br />
par la première chaîne.<br />
Qu'il s'expose à la critique à<br />
l'instar du reste des artistes dans<br />
les divers mass média;<br />
Que toutefois, il a fait l'objet<br />
d'un article vexatoire et partial de<br />
la part du premier accusé Amale<br />
Samie, publié dans l'hebdomadaire<br />
<strong>Maroc</strong> <strong>Hebdo</strong> édité à Casablanca<br />
en langue française;<br />
Que l'article a englobé des<br />
termes ignobles qui dépassent la<br />
qualification de diffamation et d'injure,<br />
par exemple: mielleux, maniéré,<br />
faux, méprisant, mièvre,<br />
grassement imbécile et faussement<br />
enthousiaste;<br />
Que bien plus, il est même allé<br />
jusqu'à qualifier l'exposant de<br />
nullité la plus crasse et de brouet<br />
si infect, et que son émission est<br />
une célébration triomphale de la<br />
médiocrité et constitue une arme<br />
de guerre contre les citoyens;<br />
Que ces faits portent atteinte à<br />
l'honneur de l'exposant et à la<br />
considération de sa personne, et<br />
constituent le délit de diffamation<br />
prévu et puni par l'article 442 du<br />
code pénal.<br />
Que la diffamation et l'injure<br />
publique sont punies conformément<br />
aux dispositions du dahir du<br />
15/11/1958 portant code de la<br />
presse;<br />
Que l'auteur de l'article et le directeur<br />
de publication sont respectivement<br />
considérés coupables<br />
conformément aux dispositions<br />
de l'article 67 du code de la presse<br />
ci-dessus;<br />
Qu'étant donné que cet acte a<br />
causé un grave préjudice à l'exposant,<br />
à savoir la privation de sa<br />
société SPECTOP qu'il dirige de<br />
plusieurs marchés, de telle sorte<br />
qu'il présente des pauses publicitaires<br />
pendant la diffusion de son<br />
émission Studio 5 au profit de<br />
nombreuses sociétés;<br />
Qu'il contracte des contrats<br />
avec ces sociétés par l'intermédiaire<br />
de la Société SPECTOP cidessus,<br />
et qu'après la publication<br />
de l'article objet de la plainte, plusieurs<br />
Sociétés ont annulé leurs<br />
commandes qu'elles avaient adressées<br />
à l'exposant;<br />
Qu'ainsi, ALIF Communication<br />
a annulé la commande<br />
n°98/93 de l'ordre de 80.500 Dh,<br />
et que le même Établissement a<br />
annulé deux commandes pour le<br />
même motif, de l'ordre de<br />
600.000Dh;<br />
Que la Société METAL<br />
Emballage a annulé, à son tour, sa<br />
commande de l'ordre de 163.000<br />
Dh en raison de l'article objet de<br />
la plainte;<br />
Que de même, l'exposant a subi<br />
un préjudice du fait de cet acte<br />
en sa qualité de journaliste, d'artiste<br />
et de producteur de télévision,<br />
ayant un large public aussi bien à<br />
l'intérieur qu'à l'extérieur.<br />
24<br />
Que l'article en question est<br />
susceptible de porter atteinte à sa<br />
réputation et à sa crédibilité, et de<br />
provoquer un écho non louable<br />
dans les rangs de ses fans et de ses<br />
admirateurs;<br />
Que c'est pourquoi, l'exposant<br />
sollicite en la forme de déclarer la<br />
plainte directe recevable, au fond<br />
sur l'action publique, de déclarer<br />
les accusés ci-dessus coupables<br />
conformément aux articles de<br />
poursuites, et sur l'action civile<br />
consécutive, de condamner les accusés<br />
à lui payer solidairement la<br />
somme de 816.500 Dh à titre d'indemnité<br />
matérielle et la somme<br />
de 1.000.000 Dh à titre d'indemnité<br />
morale, et de leur imputer les<br />
entiers dépens.<br />
Que la cause fut alors enrôlée<br />
à l'audience du 1.3.99, à laquelle<br />
les accusés ont comparu tout en<br />
étant épaulés par leur défenseur<br />
M. Abdellah El Fardaous, de même<br />
qu'a comparu Me Fraikech<br />
pour le plaignant.<br />
Qu'après avoir vérifié l'identité<br />
des accusés, Me Abdellah El<br />
Ferdaous est intervenu en précisant<br />
que l'article objet de la plainte<br />
directe avait été publié au numéro<br />
307 daté du 30/1/1998, et<br />
que la plainte directe avait été déposée<br />
le 14.1.1999;<br />
Que les actions publique et civile<br />
résultant des infractions prévues<br />
par le Dahir portant code de<br />
la presse sont forcloses par l'écoulement<br />
de cinq mois francs à<br />
compter du jour de la perpétration.<br />
Que de même, la plainte directe<br />
n'a pas détaillé clairement<br />
l'infraction qui a causé le préjudice<br />
et qui justifie des revendications<br />
civiles et que la société<br />
SPECTOP n'est pas en droit de<br />
déposer plainte.<br />
Qu'après que le Tribunal ait décidé<br />
de joindre les moyens de forme<br />
au fond, l'accusé Amale Samie<br />
a été avisé de l'objet de la plainte<br />
directe, notamment des termes figurant<br />
dans l'article, traduits par<br />
un traducteur assermenté; qu'ainsi<br />
il a confirmé que l'article parlait<br />
de l'émission et de la manière de<br />
sa présentation, et que les termes<br />
y consignés étaient ordinaires et<br />
n'avaient pas pour but d'outrager le<br />
plaignant.<br />
Qu'ensuite, le second accusé<br />
Mohamed Selhami a été, également,<br />
avisé de l'objet de la plainte<br />
directe, notamment des termes<br />
<strong>Maroc</strong> <strong>Hebdo</strong> <strong>International</strong> n¡ 369 - Du 23 au 29 avril 99