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envahis de lianes de clématites, qui marquaient la fin de la Forêt<br />
Interdite.<br />
— Tu es donc une Enfant de la Peur, voulut-il savoir quand<br />
même.<br />
Éléa le regarda. Elle ne lui parlerait plus.<br />
— … Si tu veux.<br />
Elle sortit de la forêt, heureuse de trouver une excuse pour<br />
interrompre ses confidences douloureuses. Elle était debout<br />
devant le précipice. À sa droite et à sa gauche, une pierre<br />
blanche semblait s’enfoncer dans le sol. En face, de l’autre côté<br />
de l’immense crevasse, deux pointes rondes de roche faisaient<br />
de même, symbolisant les angles d’un rectangle au-dessus du<br />
vide. Axel reconnut l’endroit près duquel il avait passé la nuit et<br />
où il avait senti la jeune fille si proche de lui.<br />
— J’ai besoin de toi et tu le sais. Mais seulement pour<br />
demain soir. Si je te demande de venir maintenant, c’est pour te<br />
prouver que je ne suis pas aussi mauvaise que tu le penses.<br />
Axel eut un sourire en coin à cette réflexion.<br />
Lorsqu’il fit un pas vers elle, elle eut un délicieux sourire.<br />
Elle se retourna vers la crevasse et sauta dans le vide. Le jeune<br />
homme manqua de hurler, mais elle resta en l’air, comme<br />
suspendue à des ficelles transparentes. Éléa semblait pouvoir<br />
traverser le trou béant sur un pont invisible. Elle se mit à rire,<br />
un rire franc et moqueur.<br />
— Allez, viens, fit-elle. Tu ne risques rien si tu restes dans le<br />
champ des Pierres Blanches.<br />
Plutôt surpris et un instant désarçonné, Axel voulut la<br />
suivre, mais Nis freina toute avancée de ses quatre sabots.<br />
Malgré l’insistance d’Axel, la jument, les oreilles en arrière,<br />
gardait un air aussi buté que celui d’un âne. Éléa revint lancer<br />
quelques feuilles mortes au-dessus du vide et fit passer son<br />
propre cheval. Avant de franchir totalement le pont dévoilé par<br />
les feuilles, elle s’approcha de Nis.<br />
— Toi non plus, tu ne me fais pas confiance ? Eh bien,<br />
décidément, ce n’est pas une bonne journée. Mais ton maître a<br />
des raisons de m’en vouloir, tu n’en as aucune.<br />
De retour sur la terre ferme, elle caressa les doux naseaux<br />
blancs avec tendresse.<br />
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