Quel management pour la societe de demain - Philosophie ...
Quel management pour la societe de demain - Philosophie ...
Quel management pour la societe de demain - Philosophie ...
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
Débat avec Patrick Viveret<br />
Questions et <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> précisions<br />
- <strong>Quel</strong>s liens entre l’ensemble vocation/profession/métier et l’ensemble job/emploi/travail ?<br />
- Différence entre création <strong>de</strong> richesse, création <strong>de</strong> valeur et valeur ajoutée<br />
- Evolution en termes d’intelligences : les intelligences émotionnelle et corporelle ont<br />
moins évolué. Que faire <strong>pour</strong> les développer ?<br />
- La notion d’être est-elle seulement opposée à l’avoir ou a-t-elle un sens plus<br />
philosophique ?<br />
- Que pensez-vous <strong>de</strong> l’idée <strong>de</strong> Luc <strong>de</strong> Braban<strong>de</strong>re <strong>de</strong> mettre <strong>la</strong> pollution dans <strong>la</strong> partie<br />
« crédits » <strong>de</strong> <strong>la</strong> comptabilité ?<br />
- Comment gérer l’hubris ou <strong>la</strong> part <strong>de</strong>structrice <strong>de</strong> l’être humain ?<br />
- Travailler sur le mieux-être humain dans une perspective systémique mais avec quelles<br />
limites ?<br />
De <strong>la</strong> comptabilité<br />
Patrick Viveret : Concernant <strong>la</strong> comptabilité, <strong>la</strong> réforme <strong>de</strong> <strong>la</strong> comptabilité nationale rési<strong>de</strong><br />
dans le fait <strong>de</strong> soustraire un certain nombre d’activités dangereuses ou <strong>de</strong>structrices. Elles<br />
sont aujourd’hui comptées positivement dans le PIB car elles génèrent <strong>de</strong> <strong>la</strong> valeur ajoutée<br />
monétaire. La comptabilité nationale ne s’intéresse pas à <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>s activités mais aux<br />
valeurs ajoutées. Une valeur ajoutée peut être produite par un acci<strong>de</strong>nt, une <strong>de</strong>struction, une<br />
catastrophe <strong>pour</strong> l’environnement ou <strong>la</strong> santé et ces phénomènes ne sont pas mis dans une<br />
colonne particulière <strong>de</strong> <strong>la</strong> comptabilité.<br />
Il y a <strong>de</strong>ux courants <strong>de</strong> réformes. D’un côté, nous avons <strong>la</strong> voie <strong>de</strong> <strong>la</strong> création <strong>de</strong> nouveaux<br />
indicateurs permettant <strong>de</strong> re<strong>la</strong>tiviser l’approche <strong>de</strong> <strong>la</strong> comptabilité nationale et du PIB. Cette<br />
direction met en gar<strong>de</strong> contre <strong>la</strong> non prise en compte <strong>de</strong> données fondamentales et<br />
l’absence <strong>de</strong> repérage <strong>de</strong>s écarts entre les indicateurs <strong>de</strong> <strong>la</strong> comptabilité nationale et les<br />
indicateurs écologiques et sociaux.<br />
D’un autre côté, nous avons <strong>la</strong> voie <strong>de</strong> <strong>la</strong> réforme intérieure du cadre <strong>de</strong> <strong>la</strong> comptabilité<br />
nationale. Quand il y a <strong>de</strong>s activités qui, à l’évi<strong>de</strong>nce, sont dangereuses ou <strong>de</strong>structrices, on<br />
va les soustraire du compte global. Inversement, on va aller ajouter <strong>de</strong>s activités qui jouent<br />
un rôle contributif dans <strong>la</strong> richesse globale d’une collectivité.<br />
C’est le cas <strong>de</strong>s activités domestiques et associatives. Pour comprendre leur importance, il<br />
suffit d’imaginer ce qui se passerait si ces activités domestiques disparaissaient. Rappelons<br />
que le mot « économie » vient du grec « oikos » qui signifie « maison » et « nomos » qui<br />
veut dire « loi ». L’économie domestique reste le soubassement structurant permettant les<br />
autres étages <strong>de</strong> l’économie. On peut dire qu’il y a eu un véritable coup <strong>de</strong> force à <strong>la</strong> fois<br />
sémantique et machiste. En effet, <strong>la</strong> bourgeoisie du XVIIIe siècle a décidé que <strong>la</strong> gran<strong>de</strong><br />
affaire, c’était, justement, les affaires. On aurait très bien pu, à ce moment-là, choisir un<br />
autre terme que le mot « économie » qui rappe<strong>la</strong>it l’activité grecque. La bourgeoisie a dû<br />
disqualifier l’économie domestique. On a fini par appeler « économie » ce qui correspond à<br />
« l’orconomie », c’est-à-dire <strong>de</strong>s activités extérieures à <strong>la</strong> maison reléguant ces <strong>de</strong>rnières à<br />
<strong>de</strong>s activités improductives mises en œuvre par <strong>de</strong>s personnes inactives.<br />
Les activités domestiques et associatives (je pense aux travaux <strong>de</strong> Robert Putnam sur le<br />
capital social ou aux activités liées aux sociétés <strong>de</strong> <strong>la</strong> connaissance comme, par exemple, le<br />
capital éducatif global d’une nation) sont à réintroduire dans les systèmes comptables.<br />
Cette réintroduction ne va pas sans les doutes et interrogations légitimes du côté aussi bien<br />
<strong>de</strong>s additions que <strong>de</strong>s soustractions. Mais l’intérêt c’est que <strong>la</strong> comptabilité re<strong>de</strong>vient objet<br />
<strong>de</strong> débats.<br />
www.philosophie-<strong>management</strong>.com 166