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Zibeline n° 61 en PDF

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Hessel, Quilès<br />

et la bombe<br />

06<br />

É<br />

V<br />

É<br />

N<br />

E<br />

M<br />

E<br />

N<br />

TS<br />

Le décès du diplomate, intellectuel et surtout<br />

citoy<strong>en</strong> de 95 ans intervi<strong>en</strong>t le jour où Paul<br />

Quilès publie un second ouvrage mettant <strong>en</strong><br />

cause l’armem<strong>en</strong>t nucléaire français, et sa<br />

prét<strong>en</strong>due dissuasion. Le dernier combat de<br />

l’homme indigné ne pouvait trouver achèvem<strong>en</strong>t<br />

plus symbolique.<br />

Après le succès incroyable de son petit livre<br />

Indignez-vous, découvert grâce aux Écritures<br />

croisées aixoises (voir Zib’38), le vieux monsieur<br />

avait associé sa révolte au projet de<br />

«métamorphose» d’Edgar Morin (voir Zib’ 44)<br />

attaquant très directem<strong>en</strong>t les reculs sociaux<br />

de la présid<strong>en</strong>ce Sarkozy. Puis, choqué par<br />

l’abs<strong>en</strong>ce dans la campagne de François Hollande<br />

de la question du nucléaire militaire, il<br />

publia un autre petit livre, tout aussi rapide,<br />

incisif et procédant par raccourcis et slogans,<br />

avec Albert Jacquard. Plus percutant <strong>en</strong>core,<br />

et convaincant, parce que fondé sur des<br />

analyses concrètes et évoquant des solutions<br />

possibles : Exigez un désarmem<strong>en</strong>t nucléaire<br />

total n’a pas connu le même succès médiatique,<br />

d’autant que Stéphane Hessel n’avait<br />

plus la force de le déf<strong>en</strong>dre, de son affable<br />

fermeté, sur les plateaux télévisés.<br />

Le combat de ce petit livre est à la fois repris<br />

et inspiré par l’anci<strong>en</strong> ministre de la déf<strong>en</strong>se,<br />

Paul Quilès, qui démonte l’inanité d’une politique<br />

«dissuasive» dont chacun sait qu’elle ne<br />

l’est pas : juste après l’élection de François<br />

Hollande, dès juillet, l’anci<strong>en</strong> ministre écrit<br />

que «la bombe nucléaire s’appar<strong>en</strong>te à une<br />

assurance mort», au mieux caduque puisque<br />

la France ne veut pas faire disparaître le monde,<br />

même si elle est m<strong>en</strong>acée, même si elle<br />

est atteinte. Or, Hessel l’affirmait égalem<strong>en</strong>t<br />

avant les élections présid<strong>en</strong>tielles, la France<br />

socialiste peut aujourd’hui, seule parmi les<br />

trois pays possédant la force nucléaire immédiate<br />

-La France, les EU, la Russie, d’autres<br />

possédant des armes, mais non la capacité de<br />

riposte immédiate sur laquelle la «dissuasion»<br />

se fonde- faire cesser l’escalade absurde d’un<br />

armem<strong>en</strong>t extrêmem<strong>en</strong>t coûteux, parfaitem<strong>en</strong>t<br />

inutile au mieux, terriblem<strong>en</strong>t dangereux au<br />

pire. C’est-à-dire s’il servait, ce qui signifierait,<br />

immédiatem<strong>en</strong>t ou à moy<strong>en</strong> terme, la fin du<br />

monde.<br />

Aujourd’hui où chacun r<strong>en</strong>d hommage à Stéphane<br />

Hessel, où chacun dit la grandeur de<br />

l’homme, du Résistant, de l’homme de cœur,<br />

personne ne semble vouloir repr<strong>en</strong>dre ce dernier<br />

combat, qu’il n’a pas pu m<strong>en</strong>er à terme.<br />

Exigez un désarmem<strong>en</strong>t nucléaire total avance<br />

pourtant des argum<strong>en</strong>ts économiques (combi<strong>en</strong><br />

de milliards pourrai<strong>en</strong>t être investis<br />

ailleurs !) et le nouveau petit livre de Paul<br />

Quilès démonte les cinq m<strong>en</strong>songes d’État qui<br />

prét<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t que cet armem<strong>en</strong>t est indisp<strong>en</strong>sable.<br />

Tous deux s’appui<strong>en</strong>t sur les chiffres<br />

officiels de L’Observatoire des armem<strong>en</strong>ts,<br />

comme le premier livre de Paul Quilès publié<br />

cet été qui relate <strong>en</strong> particulier à quelle catastrophe<br />

nous avons échappé <strong>en</strong> 1983.<br />

Cette lutte est concrète, et peut aboutir. Ce<br />

serait le plus grand hommage possible au courage<br />

et à la clairvoyance de monsieur Hessel.<br />

AGNÈS FRESCHEL<br />

Guetta 4, Dujardin 2<br />

Ce qui est <strong>en</strong> quelques<br />

semaines dev<strong>en</strong>u l’affaire<br />

Guetta pourrait être<br />

un révélateur, si ce n’était<br />

l’arbre qui cache une forêt<br />

<strong>en</strong>chevêtrée…<br />

Que reproche-t-on aux 400 000 € que la Ville<br />

de Marseille veut allouer à un «grand événem<strong>en</strong>t<br />

populaire» qui manque à la capitale<br />

culturelle D’être payant malgré l’arg<strong>en</strong>t<br />

public Les places pour le concert de Guetta<br />

seront moins chères qu’à l’Opéra, et qu’au<br />

Stade Vélodrome. D’être alloué à une star aux<br />

cachets astronomiques Celles du cinéma<br />

français n’ont ri<strong>en</strong> à <strong>en</strong>vier à David Guetta, et<br />

Möbius avec Jean Dujardin a bénéficié de<br />

200 000 € de la Région, pour que le tournage<br />

se déroule <strong>en</strong> PACA. L’arg<strong>en</strong>t que les collectivités<br />

allou<strong>en</strong>t à la culture sert souv<strong>en</strong>t,<br />

indirectem<strong>en</strong>t, à payer certains cachets mirobolants<br />

de stars. Parce qu’elles rapport<strong>en</strong>t et<br />

qu’il faut aujourd’hui que les investissem<strong>en</strong>ts<br />

culturels induis<strong>en</strong>t un bénéfice pot<strong>en</strong>tiel. Que<br />

les tournages ou les concerts rempliss<strong>en</strong>t les<br />

hôtels, fass<strong>en</strong>t marcher l’industrie du tourisme<br />

et l’artisanat, produis<strong>en</strong>t des emplois et du<br />

chiffre d’affaire dans les <strong>en</strong>treprises d’un<br />

territoire.<br />

Or la culture n’a pas à être un facteur de développem<strong>en</strong>t<br />

économique. Les <strong>en</strong>treprises att<strong>en</strong>d<strong>en</strong>t<br />

un retour sur investissem<strong>en</strong>t, et cela s’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>d<br />

; mais que les collectivités se pr<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à<br />

ce jeu-là est nettem<strong>en</strong>t plus contestable :<br />

l’objectif de la culture c’est la création artistique,<br />

sa diffusion, la préservation et la mise<br />

<strong>en</strong> lumière des patrimoines et de la p<strong>en</strong>sée.<br />

De même que l’objectif de l’Éducation nationale<br />

est d’éduquer, et de la santé publique de<br />

soigner, pas de r<strong>en</strong>tabiliser les hôpitaux.<br />

Dans ces services publics la cohabitation avec<br />

des systèmes privés crée des déséquilibres qui<br />

ont souv<strong>en</strong>t été décrits. Dans le secteur culturel<br />

la cohabitation a pris ces dernières<br />

années des habitudes libérales, sur fond de<br />

crise.<br />

Ainsi l’État demande aux théâtres et aux<br />

musées un pourc<strong>en</strong>tage de recettes propres<br />

qui les oblige à louer leurs espaces à des événem<strong>en</strong>ts<br />

privés. Ce sera le cas, à Marseille, du<br />

MuCEM ou du FRAC. On inv<strong>en</strong>te des Délégations<br />

de Service Public, ou des Part<strong>en</strong>ariats<br />

Public Privé, demandant à des prestataires<br />

privés de programmer sans perspective de<br />

l’intérêt général. Sans avoir <strong>en</strong> tête la qualité<br />

culturelle, mais la r<strong>en</strong>tabilité.<br />

Aujourd’hui les théâtres, les festivals, n’hésit<strong>en</strong>t<br />

plus à se payer des stars relatives. Car si<br />

la star Guetta fait scandale, c’est simplem<strong>en</strong>t<br />

parce qu’elle est un peu grosse : les petites stars<br />

sont déjà r<strong>en</strong>tables, rempliss<strong>en</strong>t les salles de<br />

théâtre et de concert, qui sont aujourd’hui<br />

sommées de dégager une part importante de<br />

recettes propres.

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