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Zibeline n° 61 en PDF

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Peu de mots pour le dire<br />

Fabi<strong>en</strong>ne Yvert arp<strong>en</strong>te les s<strong>en</strong>tiers peu battus<br />

d’une poésie pleine des aléas et du dérisoire de<br />

l’exist<strong>en</strong>ce. Dans Télescopages, paru <strong>en</strong> 2010 chez<br />

Attila, elle avait mis <strong>en</strong> fiches sa vie de 1997 à<br />

2002. Depuis quelque dix ans, ce sont aussi de<br />

petits livres tamponnés que l’artiste typographe<br />

fabrique chez elle à Marseille. «Les petits livres,<br />

voilà mon champ de bataille», rev<strong>en</strong>dique-t-elle, car,<br />

comme elle le tamponne haut et fort dans Je<br />

n’écris plus «tous ces livres dans les librairies me<br />

dégoût<strong>en</strong>t/Autant de mots de blabla/Si peu de poésie<br />

de littérature».<br />

Ce qui l’intéresse «Le rebut palpitant, les restes<br />

du vivant, le soi-disant insignifiant.» C’est de cette<br />

matière prét<strong>en</strong>dum<strong>en</strong>t triviale que la poétesse fait<br />

son miel. Un miel acide, qu’elle tamponne sur<br />

les pages de ses deux derniers ouvrages. Y <strong>en</strong> a<br />

marre d’être pauvre dresse le bilan qui pourrait<br />

être pathétique d’une vie passée à «racler les fonds<br />

de tiroirs & les raclures de porte-monnaie». Pourtant,<br />

même «border larmes», celle qui vit «d’emprunts<br />

& d’eau fraîche» garde les yeux ouverts sur la<br />

misère des autres et ne perd ri<strong>en</strong> de son s<strong>en</strong>s de<br />

l’autodérision. Quant à Je n’écris plus, cette réédition<br />

du texte de 2004 est une sorte de<br />

manifeste, car de l’incapacité à écrire naît une<br />

nouvelle forme de travail : «J’écris de petites phrases<br />

qui essai<strong>en</strong>t de fixer le temps.» Et une nouvelle<br />

technique, celle du tampon, qui contraint à ne<br />

garder que le nécessaire. Une économie de mots<br />

<strong>en</strong> parfaite adéquation avec l’exist<strong>en</strong>ce précaire<br />

de cette artiste originale et <strong>en</strong>gagée.<br />

FRED ROBERT<br />

Y <strong>en</strong> a marre d’être pauvre et Je n’écris plus<br />

Fabi<strong>en</strong>ne Yvert<br />

Éditions des petits livres, 10 €<br />

71<br />

L<br />

I<br />

V<br />

Clavecin galant<br />

C’est au couv<strong>en</strong>t Royal de Saint-Maximin (Var)<br />

que Brigitte Tramier (à l’origine des classes de<br />

clavecin à Val<strong>en</strong>ce et Arles avant sa nomination<br />

au Conservatoire d’Aix-<strong>en</strong>-Prov<strong>en</strong>ce) a <strong>en</strong>registré<br />

ces pièces de Jacques Duphly (1715-1789) : un<br />

panorama sonore somptueux, d’une quinzaine<br />

de titres, donnant une belle idée de la richesse<br />

expressive du style «Galant» d’un émin<strong>en</strong>t représ<strong>en</strong>tant<br />

de l’école française de clavecin au<br />

XVIII e siècle. On se laisse conduire au fil d’une<br />

formidable palette de couleurs, un jeu libre, un<br />

lyrisme souple dans les phrasés dansants d’un<br />

Rondeau ou d’une Chaconne, vers quelques portraits<br />

sonores, délicieuses miniatures dessinant<br />

des figures mythologiques, de la commedia<br />

dell’arte, d’un contemporain… le tout sur un<br />

clavecin d’époque (1738) signé Antoine Vater,<br />

facteur à qui Duphly dédia son La de Vatre. Un<br />

clavier royal !<br />

JACQUES FRESCHEL<br />

CD Parnassie éditions<br />

PAR 03<br />

En téléchargem<strong>en</strong>t sur<br />

http://parnassie.fr<br />

R<br />

ES<br />

C<br />

D<br />

|<br />

Théodore Dubois<br />

On a souv<strong>en</strong>t <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du, ces dernières années dans<br />

notre région, au Grand théâtre de Prov<strong>en</strong>ce <strong>en</strong><br />

particulier, l’<strong>en</strong>semble Les Siècles dirigé par<br />

François-Xavier Roth jouer sur ses instrum<strong>en</strong>ts<br />

historiques. C’est <strong>en</strong> collaboration avec le C<strong>en</strong>tre<br />

de musique romantique française Palazzetto<br />

Bru Zane et les éditions Actes Sud que la formation<br />

grave (<strong>en</strong> live) ce beau programme dédié à<br />

un musici<strong>en</strong> du XIX e siècle, du type qu’on se<br />

Éclats <strong>en</strong> fusion<br />

Tout comm<strong>en</strong>ce par un stomp de Duke : le sax<br />

de Raphaël Imbert file ses croches ballottées<br />

avant qu’un blues lascif ne s’<strong>en</strong>file à son train et<br />

que résonn<strong>en</strong>t les sirènes d’un jazz band…<br />

Abrupto, le Quatuor Manfred, rehaussé de la<br />

clarinette de Flor<strong>en</strong>t Héau, livre un pur classique<br />

emperruqué ! Deux univers, ceux d’Ellington<br />

et Mozart, sembl<strong>en</strong>t s’édifier <strong>en</strong> parallèle, au fil<br />

des premières plages, voire s’ignorer… Pourtant,<br />

<strong>en</strong> t<strong>en</strong>dant l’oreille, on perçoit qu’adroitem<strong>en</strong>t<br />

le monde de l’un a déjà pénétré, saisi celui de<br />

l’autre, par-delà les siècles…<br />

On avait découvert ce travail de la Cie Nine<br />

Spirit sur Amadeus & The Duke <strong>en</strong> 2011, au GTP.<br />

Avant cela leur concept avait marié avec bonheur<br />

Bach & Coltrane autour d’un mémorable disque<br />

(Zig-Zag Territoires, 2008). Il trouve, avec cette<br />

seconde galette, un nouveau prolongem<strong>en</strong>t vers<br />

des terres fusionnelles.<br />

plait à ignorer dans l’hexagone. Dès les premières<br />

notes de son Ouverture Frithiof, on mesure<br />

pourtant la puissance sombre du romantisme de<br />

Théodore Dubois (1837-1924), son lyrisme clair<br />

dans son Concerto n°2 pour piano (brillante<br />

Vanessa Wagner sur un Erard de 1874) et<br />

l’originalité d’une écriture dans un rare Dixtuor.<br />

J.F<br />

«J’espère contribuer à ce que leurs éclats se fond<strong>en</strong>t<br />

<strong>en</strong> une seule et même lueur» précise Raphaël Imbert.<br />

De fait, la fusion opère : l’album trace une<br />

piste initiatique, autour de la mise <strong>en</strong> lumière<br />

d’un «classicisme» intemporel, élégant mais profond,<br />

au gré d’un s<strong>en</strong>s commun de la fantaisie<br />

et de la volonté de dissiper les frontières…<br />

Marion Rampal chante de sa voix grave un<br />

bouleversant Lied mozarti<strong>en</strong> façon cabaret quand<br />

le batteur Jean-Luc di Fraya joue le faussetfaussaire<br />

dans un poignant standard (My Love).<br />

Sax et cordes <strong>en</strong>tremêlés inv<strong>en</strong>t<strong>en</strong>t un Ed<strong>en</strong><br />

(Heav<strong>en</strong>), au seuil duquel sembl<strong>en</strong>t nous conduire<br />

deux gardes surgis d’une Flûte <strong>en</strong>chantée<br />

balancée… Alors, après un funèbre Chopin et la<br />

marche statuaire d’un Commandeur réincarné,<br />

au chant du cygne testam<strong>en</strong>taire de Martin<br />

Luther King, les barrières s’effac<strong>en</strong>t et l’harmonie<br />

règne. Un chemin s’ouvre, possible à tous, vers<br />

CD Musicales Actes<br />

Sud - distr. Harmonia<br />

Mundi<br />

www.lessiecles.com<br />

www.actes-sud.fr<br />

cette même Lumière maçonnique qui a éclairé<br />

les deux musici<strong>en</strong>s… où même «negro» rime avec<br />

spirituel !<br />

Au final, on plane dans l’éther d’un quintette<br />

dématérialisé (Thomas Weirich aux platines)<br />

avant que l’Ave verum ne se mue <strong>en</strong> «bœuf» sur<br />

le toit d’un temple voué à la Beauté. J.F.<br />

CD Jazz Village-harmonia mundi JV 570011<br />

www.jazzvillagemusic.com

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