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C U L T U R E<br />

Littérature - DÉCÈS<br />

Pinter,unevoixenragées’éteint<br />

w Le dramaturge britannique<br />

Harold Pinter est mort la<br />

veille de Noël à 78 ans.<br />

w La littérature mondiale perd<br />

l’un de ses auteurs les plus<br />

critiques et engagés.<br />

En octobre 2005, Harold<br />

Pinter recevait à 75 ans<br />

le Prix Nobel de littérature.<br />

Souffrant d’un cancer<br />

de l’œsophage depuis 2002, le<br />

célèbre dramaturge anglais ne<br />

put se rendre à Stockholm pour y<br />

prononcer son discours. Des séances<br />

de chimiothérapie qu’il qualifiait<br />

de “cauchemar personnel”, il<br />

dira : “J’ai traversé la vallée de<br />

l’ombre de la mort.”. Celle-ci l’a<br />

rattrapé la veille de Noël, à l’âge<br />

de 78 ans. Avec Pinter, disparaît<br />

l’un des auteurs les plus applaudis<br />

mais aussi un militant antiimpérialisteengagé.<br />

Ces dernières années, Pinter<br />

s’était en effet fait l’un des critiques<br />

les plus virulents du président<br />

américain George W. Bush<br />

et de l’ancien Premier ministre<br />

britannique Tony Blair – qu’il<br />

avait qualifié de “pauvre idiot”. A<br />

la fin de sa vie, l’auteur disait<br />

même vouloir se consacrer exclusivement<br />

à l’action politique :<br />

“J’utilise beaucoup de mon énergie<br />

plus particulièrement pour<br />

changer la situation politique qui<br />

est, à mon avis, très inquiétante<br />

dans l’état actuel des choses.” En<br />

2003, il publiait ainsi “War”, un<br />

recueil de poèmes contre la<br />

guerre en Irak. Et avant cela, il<br />

avait critiqué les bombardements<br />

de l’Otan au Kosovo en<br />

1999 puis l’invasion de l’Afghanistan<br />

fin 2001. Anti-système,<br />

Pinter avait même refusé d’être<br />

anobli par la reine Elizabeth.<br />

Malgré la maladie, Pinter<br />

avait néanmoins continué à travailler.<br />

En 2006, il montait même<br />

sur scène pour interpréter “La<br />

dernière bande”, monologue de<br />

son ami Samuel Beckett, un succès<br />

critique à Londres.<br />

Décrit par l’Académie Nobel<br />

comme “le représentant le plus<br />

éminent du théâtre dramatique<br />

anglais de la seconde moitié du<br />

XX e siècle”, Pinter avait vu ses<br />

pièces considérées comme des<br />

classiques. Il est ainsi le premier<br />

auteur étranger à être entré de<br />

son vivant au répertoire de la Comédie-Française.<br />

M Pinter, photographié devant chez lui à Londres le 13 octobre 2005, jour de l’annonce<br />

de son Prix Nobel de littérature.<br />

Un enfant du Blitz<br />

Harold Pinter est né dans une<br />

famille de tailleurs juifs le 10 octobre<br />

1930 dans le quartier populaire<br />

d’Hackney, dans l’East End<br />

de Londres. Chez ses parents, il<br />

n’y avait pas de livres – la famille<br />

n’avait pas les moyens d’en acheter.<br />

Après une scolarité primaire<br />

fortement perturbée par les bombardements<br />

londoniens – “J’ai été<br />

évacué trois fois, alors que tombaient<br />

les V2. Le sentiment d’être<br />

bombardé ne m’a jamais quitté”,<br />

confiera-t-il par la suite –, il rattrapa<br />

le temps perdu à partir de<br />

1944 en empruntant force ouvrages<br />

de Joyce, Lawrence, Dostoïevski,<br />

Hemingway, Rimbaud ou<br />

Yeats, à la bibliothèque municipale<br />

de son quartier natal. A 15<br />

ans, alors qu’il n’a jamais mis les<br />

pieds dans un théâtre, son professeur<br />

d’anglais le désigne pour interpréter<br />

Macbeth.<br />

Sa vocation est née. Après un<br />

passage à la Royal Academy of<br />

Dramatic Art, il fait ses débuts<br />

comme acteur. Et ce n’est que<br />

vers 1957 qu’il commence à écrire<br />

pour la scène, des saynètes et des<br />

sketches. Sa première grande<br />

pièce, “L’Anniversaire”, en 1958,<br />

fut un four retentissant, massacrée<br />

par les critiques et retirée de<br />

l’affiche du Lyric Theater après<br />

huit représentations !<br />

Un théâtre de la menace<br />

Rattachée un peu abusivement<br />

au théâtre de l’absurde, l’œuvre<br />

de Pinter relève plus justement<br />

d’un “théâtre de la menace”.<br />

D’apparence banale, le dialogue<br />

explore, à partir de situations<br />

quasi-vaudevillesques, les rapports<br />

de domination et de soumission<br />

entre des personnages sur<br />

lesquels pèse quelque inexplicable<br />

pression extérieure, comme<br />

dans “Le Gardien”, “L’anniversaire”,<br />

“Le monte-plat” ou “Le retour”.<br />

Les répliques peuvent ici<br />

faire songer, il est vrai, aux pièces<br />

de Beckett mais il est sans doute<br />

le seul auteur qui ait généré un<br />

adjectif, “pinteresque”, preuve<br />

d’une irréductible singularité.<br />

Certains aiment à voir dans la<br />

succession des pièces de Pinter<br />

une évolution vers une deuxième<br />

phase plus lyrique à la fin des années<br />

60 (“Paysage”, “Silence”),<br />

puis une troisième, plus politique<br />

(“Langue de la montagne”, “Le<br />

nouvel ordre mondial”), dans les<br />

JOHN STILLWELL/AP<br />

années 80. Cette division paraît<br />

toutefois un peu artificielle face à<br />

une écriture travaillée de manière<br />

persistante par la complexité<br />

des rapports entre la mémoire,<br />

l’identité, le langage et la<br />

réalité. Comme l’écrit le metteur<br />

en scène Sir Peter Hall, chez lui,<br />

“les mots sont des armes que les<br />

personnages utilisent pour se déstabiliser<br />

ou se détruire et, défensivement,<br />

pour dissimuler leurs<br />

sentiments”. Pinter, lui, en tant<br />

que citoyen, n’a jamais fait mystère<br />

des siens. Obsédé par la manipulation,<br />

il s’est engagé politiquement<br />

de manière très claire<br />

depuis les années 70, pour les<br />

droits de l’homme, à travers des<br />

écrits, des prises de position publiques<br />

et des films pour la BBC,<br />

dans lesquels il dénonce les impérialismes<br />

de tous bords.<br />

Pinter, côté cinéma<br />

Découvert grâce à son théâtre<br />

– on lui doit au total une trentaine<br />

de pièces –, Harold Pinter<br />

travailla en effet aussi pour la télévision<br />

et le cinéma et notamment<br />

pour Hollywood. En 1963, il<br />

collaborait ainsi au “Servant” de<br />

Jospeh Losey, cinéaste qu’il retrouvera<br />

quatre ans plus tard<br />

pour “Accident” et, en 1970, pour<br />

“The Go-Between” avec Julie<br />

Christie. On lui doit également<br />

les scénarios de “The Last Tycoon”<br />

d’Elia Kazan en 1976, de<br />

“La femme du lieutenant français”<br />

en 1981 (d’après John<br />

Fowles) ou encore du “Procès” en<br />

1993 (d’après Kafka). Tandis que,<br />

l’année dernière, il signait pour<br />

Kenneth Branagh le scénario du<br />

“Limier”, remake du chefd’œuvre<br />

de Mankiewicz resté inédit<br />

chez nous.<br />

H. H.&Ph. T.<br />

Concert<br />

Une autre<br />

Neuvième<br />

pour Langrée<br />

A BRUXELLES puis à Liège, l’Orchestre<br />

Philharmonique de Liège<br />

et de la Communauté française<br />

donnait la semaine dernière son<br />

ultime concert de l’année 2008,<br />

accueillant pour l’occasion son<br />

ancien directeur musical Louis<br />

Langrée. Programme résolument<br />

romantique, avec le concerto<br />

pour piano de Schumann<br />

et la Neuvième – et ultime –<br />

symphonie d’Anton Bruckner. A<br />

Bruxelles, la première partie de<br />

soirée put laisser le spectateur<br />

sur sa faim. Benedetto Lupo<br />

donna en effet une lecture parfois<br />

désarçonnante du concerto :<br />

fougueuse, presque brutale<br />

même, dans l’“Allegro affetuoso”,<br />

plus recherchée mais<br />

aux confins du maniérisme dans<br />

l’“Intermezzo”, tout en force et<br />

brillante dans le “Finale”, le tout<br />

avec de fréquentes cassures de<br />

rythme. Langrée et ses troupes<br />

eurent beau tenter de tracer en<br />

arrière-plan le sens de la continuité<br />

qui manquait au pianiste<br />

italien, l’ensemble laissa un sentiment<br />

mitigé. Seul à bord, le chef<br />

français put confirmer dans la<br />

Neuvième (on a gardé le souvenir<br />

d’une mémorable Septième)<br />

à quel point l’univers austère et<br />

profond du maître de Saint-Florian<br />

lui sied bien. Dans une lecture<br />

empreinte d’honnêteté, refusant<br />

tout effet facile, Langrée et<br />

ses Liégeois s’imposèrent par<br />

l’homogénéité du discours, la pureté<br />

des lignes et la plénitude<br />

d’une sonorité évoquant parfois<br />

même l’orgue, et ce nonobstant<br />

quelques défaillances du côté des<br />

cors. Si le “Misterioso” d’entrée,<br />

inexorable sans être oppressant,<br />

put donner le sentiment d’être<br />

encore en devenir, le scherzo sut<br />

combiner puissance et sens du<br />

rythme, élégance et simplicité de<br />

la danse, avec même un travail de<br />

recherche et de fraîcheur dans le<br />

trio central, tandis que l’adagio<br />

conclut la soirée par un sommet<br />

dramatique. (N. B.)<br />

Cinéma<br />

DécèsduréalisateurRobertMulligan<br />

w L’auteur américain<br />

d’“Un été 42” est mort,<br />

à 82 ans, aux Etats-Unis.<br />

Le réalisateur américain Robert<br />

Mulligan s’est éteint<br />

samedi à l’âge de 83 ans à<br />

son domicile à Lyme, dans le Connecticut,<br />

des suites d’une maladie<br />

cardiaque, a annoncé, lundi,<br />

son épouse Sandy. Le réalisateur<br />

avait décroché une nomination<br />

aux Oscars pour son film “Du silence<br />

et des ombres” (“To Kill a<br />

Mockingbird”, 1962), adapté du<br />

roman de Harper Lee, “Ne tirez<br />

pas sur l’oiseau moqueur”. Grâce<br />

à ce film, Gregory Peck avait obtenu<br />

l’Oscar pour son interprétation<br />

d’un avocat d’une petite ville<br />

du sud des Etats-Unis qui défend<br />

un Noir accusé à tort de viol.<br />

Au cours de sa carrière, débutée<br />

en 1951 à la télévision, Mulligan<br />

a également réalisé “Prisonnier<br />

de la peur” (avec Anthony<br />

Perkins, en 1957), “Le sillage de<br />

la violence” (avec Steve Mc-<br />

Queen, en 1965), “Un été 42”<br />

(1971), “L’Autre” (1972), ou encore<br />

“Un été en Louisiane”, son<br />

dernier film, qui mit le pied à<br />

l’étrier à Reese Witherspoon en<br />

1991. (AP)<br />

WWW.BEFILMFESTIVAL.BE<br />

L A L I B R E 2 VENDREDI 26 DÉCEMBRE 2008 21<br />

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