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JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

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M. le «rési<strong>de</strong>nt. Monsieur Cadi Ab<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r, vos paroles sontinadmissibles. Je veux croire qu'elles ont dépassé votrepensée.M. Pierre <strong>de</strong> Benouviile. Retirez vos paroles ! Censure !H. Cadi Ab<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r. Vous, taisez-vous, au lieu <strong>de</strong> vousagiter !Il n'y a qu'un sultan, c'est Sidi Mohammed ben Youssef! [Nouvellesprotestations.)M. Pierre <strong>de</strong> Benouviile. II insulte un souverain ami <strong>de</strong> <strong>la</strong>France.M. le ministre <strong>de</strong>s affaires marocaines et tunisiennes. Monsieurle prési<strong>de</strong>nt, je tiens à protester contre les termesemployés par notre collègue à celte tribune à l'égard du sultanrégnant à Rabat.M. Cadi Ab<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r. Je maintiens mon pr ipos et ne retireabsolument rien.Sur <strong>de</strong> nombreux bancs à droite et à l'extrême droite. Censure! Censure 1M. le prési<strong>de</strong>nt. Monsieur Cadi Ab<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r, je vais vous rappelerà l'ordre.M. Cadi Ab<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r. Vous ne pouvez vous appuyer sur lesBerbères, monsieur le prési<strong>de</strong>nt du conseil, je vous ai expliquépourquoi.Seul le rappel d« Sidi Mohammed ben Youssef donnera <strong>la</strong> solutionrecherchée. (Nouvelles protestations. — Bruit.)Sur divers bancs à droite et à l'extrême droite. Rappel àl'ordre !M. Cadi Ab<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r. La question dynastique est tout dans'*celte affaire marocaine. Tout le reste n'est que corol<strong>la</strong>ire.Monsieur le prési<strong>de</strong>nt Mendès-France, iéglez cette questionà l'ang<strong>la</strong>ise.M. Pierre <strong>de</strong> Bénouvilte. Nous réglons nos problèmes à <strong>la</strong>française.M. Gadi Ab<strong>de</strong>lka<strong>de</strong>r. Nehru et le docteur Nkroumah ont étéRamenés <strong>de</strong> prison pour prendre le pouvoir aux In<strong>de</strong>s et à <strong>la</strong>Gold Coast. Le retour du docteur Nkroumah n'a rien enlevé aucharme et au prestige <strong>de</strong> <strong>la</strong> reine Elisabeth et à <strong>la</strong> puissanceang<strong>la</strong>ise. Le retour <strong>de</strong> Sidi Mohammed ben Youssef n'enlèverarien, toute proportion gardée, à votre charme et à <strong>la</strong> puissance<strong>de</strong> <strong>la</strong> France. (App<strong>la</strong>udissements sur quelques bancs à gauche.)H. le prési<strong>de</strong>nt. Tous les interpel<strong>la</strong>teurs se sont fait entendre.Dans <strong>la</strong> discussion générale <strong>de</strong>s interpel<strong>la</strong>tions, <strong>la</strong> paroleest à M. Grousseaud.M. Jean Grousseaud. Mesdames, messieurs, monsieur leministre, il y a différentes manières d'entrer dans l'Histoire.Certains choisirent <strong>de</strong> donner à <strong>la</strong> France un empire mondial,tels Ferry, Faidherbe, Brazza, Galiieni ou Lyautey. D'autresIncarnèrent, comme Clemenceau, <strong>la</strong> résistance victorieuse.M. le prési<strong>de</strong>nt du conseil a opté pour <strong>la</strong> voie <strong>de</strong> <strong>la</strong> démissionnationale. (Mouvements divers.)M. le ministre <strong>de</strong>s affaires marocaines et tunisiennes. Je vousrépondrai <strong>de</strong>main.M. Jean Grousseaud. S'il avait <strong>de</strong>s craintes <strong>de</strong> sombrer dansl'oubli, lot <strong>de</strong> certains hommes politiques qu'on décore dunom d'homme d'Etat, le voilà rassuré.La démonstration était déjà faite que le <strong>de</strong>uil <strong>de</strong> <strong>la</strong> nation<strong>de</strong>venait sa gloire personnelle: il fal<strong>la</strong>it encore nous persua<strong>de</strong>rque nos seuls partenaires possibles, ce sont les assassins. M. leprési<strong>de</strong>nt du conseil y est parvenu. (Protestations sur plusieursbancs à gauche.)M. le ministre <strong>de</strong>s affaires marocaines et tunisiennes. MonsieurGrousseaud, je proteste contre les termes que vousemployez à cette tribune!M. Jean Grousseaud. Protestez, monsieur le ministre. Ils sontVrais quand même. (Nouvelles protestations sur les mêmesfrancs. — Bruit.)Confondant <strong>la</strong> précipitation et l'action, il sait se hâter sanslenteur. Brû<strong>la</strong>nt le temps, prenant seulement <strong>la</strong> peine <strong>de</strong> venirsans voir, il lève victorieusement toutes les oppositions.Quel magicien ! Si tout ce<strong>la</strong> n'était qu'illusion, on lui pardonneraitvolontiers, mais il ne s'agit pas seulement d'un dangereuxmirage purement spectacu<strong>la</strong>ire, il est un joueur d'autantplus redoutable que sa mise est notre <strong>de</strong>stin.Il me suffira d'examiner Faction du Gouvernement en Tunisieet au Maroc pour démontrer <strong>la</strong> nocivité <strong>de</strong> cette politique, dontle terme ne peut être que <strong>la</strong> disparition <strong>de</strong> <strong>la</strong> France en Afrique.du Nord, malgré les affirmations contraires du Gouvernement.D'abord, permettez-moi <strong>de</strong> faire justice d'une comparaisonintolérable et inadmissible <strong>de</strong> l'Indochine et <strong>de</strong> l'Afrique. Voussavez parfaitement que <strong>la</strong> géographie s'inscrit en faux contrevos affirmations, qui ne paraissent <strong>de</strong>stinées qu'à ceux <strong>de</strong> nosconcitoyens qui ne <strong>la</strong> connaissent pas. U y a <strong>de</strong>s contrevéritésà l'usage <strong>de</strong>s naïfs.La régence a d'abord retenu votre attention. L'ancien rési<strong>de</strong>ntgénéral, M. Voizard, poursuivait sans résultat <strong>la</strong> chimère<strong>de</strong>s concessions. Vous y avez brusquement substitué <strong>la</strong> capitu<strong>la</strong>tion.L'économie <strong>de</strong>s déc<strong>la</strong>rations du Gouvernement peut être ainsirésumée: autonomie interne reconnue, droit <strong>de</strong>s Français <strong>de</strong>vivre et <strong>de</strong> travailler.Nous sommes prêts, avez-vous dit, à transférer à <strong>de</strong>s personneset à <strong>de</strong>s institutions tunisiennes l'exercice interne <strong>de</strong> <strong>la</strong>souveraineté. Et les Français, en échange <strong>de</strong> leurs services passéset présents, du rôle qu'ils jouent et doivent jouer dansl'avenir, ont acquis le droit <strong>de</strong> vivre et <strong>de</strong> travailler en Tunisie,droit dont personne ne songe à les priver.Alors que vous aviez critiqué les gouvernements précé<strong>de</strong>nts,il vous a plu <strong>de</strong> rappeler les promesses faites par eux, et notammentpar M. Robert Schuman. Vous préten<strong>de</strong>z en sommeréaliser leurs intentions.11 n'est pas dans mon propos <strong>de</strong> défendre ces gouvernements,mais il semble que <strong>la</strong> contrepartie <strong>de</strong>mandée n'existe plusactuellement.L'acceptation <strong>de</strong> l'autonomie interne a comme conséquenceincontestable l'abrogation rie <strong>la</strong> convention <strong>de</strong> <strong>la</strong>- Marsa <strong>la</strong> plusimportante, celle qui avait élé conclue grâce à Paul Cambon.Vise-t-elle également l'article 7 du traité du Bardo, concernantles droits <strong>de</strong> <strong>la</strong> République française au sujet <strong>de</strong> l'organisationfinancière du pays ? Probablement. Elle porte donc une gravenovation à nos rapports avec <strong>la</strong> Tunisie.Mais le traité du Bardo lui-même subsiste-t-il ? Nous conservonsle droit <strong>de</strong> représentation extérieure. Aurons-nous 1 longtemps<strong>la</strong> possibilité <strong>de</strong> maintenir dos troupes ?Nous n'avons qu'une assurance formelle, celle <strong>de</strong> M. le prési<strong>de</strong>ntdu co.nseil, qui déc<strong>la</strong>rait l'autre jour à celte tribune : « J'aiaffirmé en même temps, et en termes, je crois pouvoir le dire,non équivoques, que l'union militaire et diplomatique <strong>de</strong> <strong>la</strong>Tunisie avec <strong>la</strong> France ne pouvait pas être rompue ».Ce<strong>la</strong> est bel et bon. Mais le gouvernement <strong>de</strong> Tunis Jie nous<strong>de</strong>man<strong>de</strong>ra-t-il pas, si l'ordre intérieur est assuré, <strong>de</strong> retirer nostroupes conformément à l'article 2 du traité du Bardo ? « Cetteoccupation, stipule-t-il, cessera lorsque les autorités militairesfrançaises et tunisiennes aurc'it reconnu d'un commun accordque l'administration locale est ea étal <strong>de</strong> maintenir l'ordre ».M. Frédéric <strong>de</strong> Villeneuve. Toute <strong>la</strong> question est là.M. Jean Grousseaud. Voilà le danger. A ce moment, il ne nousrestera plus qu'tin droit <strong>de</strong> figuration diplomatique bien précaire.Lew liens qui unissent nos <strong>de</strong>ux pays seront rompus.Il s'agit donc du départ <strong>de</strong> <strong>la</strong> France en <strong>de</strong>ux étapes. Voilà ceque, en réalité, vous négociez. Voilà le but pour lequel il vousfal<strong>la</strong>it absolument trouver <strong>de</strong>s interlocuteurs « va<strong>la</strong>bles »,comme vous diles.Du point <strong>de</strong> vue juridique, d'ailleurs, <strong>la</strong> lettre et l'esprit dutraité sont transgressés.La formule <strong>de</strong> transfert <strong>de</strong>s pouvoirs accordés par <strong>la</strong> Franceà <strong>de</strong>s institutions et à <strong>de</strong>s personnes lui est profondément contraire,et vous le savez. Même si, pour <strong>de</strong>s raisons qui lui sontpropres, l'actuel bey <strong>de</strong> Tunis se déc<strong>la</strong>re satisfait, il n'en resteas moins qu'il nous est impossible <strong>de</strong> déléguer à d'autres qu'auey <strong>de</strong>s droits que nous avons reçus <strong>de</strong> lui.Ainsi, il apparaît que le discours <strong>de</strong> Tunis n'a, hé<strong>la</strong>s! pascomporté assez <strong>de</strong> réflexion préa<strong>la</strong>ble. 11 sent l'improvisaliUi <strong>de</strong>sformules au mépris <strong>de</strong>s textes.Vous prétendiez à cette tribune que les violences ne vousforceraient pas à cé<strong>de</strong>r Sur ce qu'il faut maintenir. Mais vousne maintenez rien. Si vous faites bon marché <strong>de</strong> <strong>la</strong> positieti <strong>de</strong><strong>la</strong> France, vous êtes plein d'une absolue désinvolture à l'égard<strong>de</strong>s Français.M. le ministre <strong>de</strong>s affaires marocaines et tunisiennes. Vousmanquez <strong>de</strong> mesure, mon cher collègue.M. Jean Grousseaud. Je n'en manque pas plus que vous,monsieur ie ministre.H. François Quilici. Vous manquez <strong>de</strong> mémoire, monsieur leminisire.M. Jean Grousseaud. Il y a, à côté du protectorat résultant<strong>de</strong>s conventions <strong>de</strong> 1881 et 1883, nos compatriotes qui sontactuellement au nombre dé 200.000. Ils auront le droit <strong>de</strong> vivreet <strong>de</strong> travailler ainsi que leurs enfants.Mais dans <strong>de</strong> nombreux pays, nos concitoyens peuvent vivreet travailler.Ah! J'entends bien, ils jouiront d'un statut spécial On leurdonnera <strong>de</strong>s garanties.

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