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JOURNAL OFFICIEL - Débats parlementaires de la 4e République

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Doit-on alors traiter avec l'Istiq<strong>la</strong>l et faire apparaître quel'indépendance serait accordée au terme d'une longue évolution? Ce serait faire abstraction d'une œuvre qui est celle <strong>de</strong>squatre cent mille Français résidant au Maroc.Nous sommes les créateurs du Maroc mo<strong>de</strong>rne, et nous nepouvons pas admettre d'être frustrés <strong>de</strong> ce qui, incontestablement,est nôtre. Toute transformation qui tendrait à faire croireque <strong>la</strong> métropole envisage c<strong>la</strong>ns l'avenir un Maroc arabe librene saurait être une mesure d'apaisement, mais au contraire ungeste infiniment dangereux.Pourquoi ne pas s'orienter vers une formule d'association ?Rappelons-nous d'abord que nous nous trouvons en présence,non pas d'un pays peuplé uniquement d'Arabes, mais où ceuxcisont' venus s'installer dans les p<strong>la</strong>ines en conquérants etdans lequel ils sont minoritaires.Depuis longtemps <strong>la</strong> politique française, au lieu <strong>de</strong> tendreà une centralisation, concept occi<strong>de</strong>ntal, aurait dû, au contraire,régionaliser le Maroc et tenir le plus grand compte <strong>de</strong>s caractèresethniques si différents.<strong>de</strong>s popu<strong>la</strong>tions qui le composent.Pour n'avoir pas su prévoir ni soigner, on en est arrivé àune opération chirurgicale dont les suites étaient inévitables.Pendant dix années on a <strong>la</strong>issé à <strong>la</strong> tête du pays un hommedont les regards ne se dirigeaient plus par <strong>de</strong>là <strong>la</strong> Méditerranéevers Paris, mais qui avait pris au sérieux certainesparoles impru<strong>de</strong>ntes prononcées en 1942 par le prési<strong>de</strong>nt Roosevett.La situation est tragique parce que beaucoup <strong>de</strong> gens sontcompromis dans un nationalisme qui pour certains a un fon<strong>de</strong>mentreligieux, mais qui pour d'autres n'a comme ba=e qu'unespécu<strong>la</strong>tion sur <strong>la</strong> force respective <strong>de</strong> <strong>la</strong> France et d'un autreEtat.Nous avons supprimé <strong>la</strong> tête <strong>de</strong> <strong>la</strong> rébellion, les bras <strong>de</strong>meurent.Que faut-il l'aire ?Constatons d'abord que les tribus berbères sont absolumentcalmes et en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> toute espèce d'agitation politique.Où se trouvent nos adversaires ? Dans les villes peupléesd'Arabes, singulièrement à Casab<strong>la</strong>nca. Entraînent-ils <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tionavec eux ? J'ai parcouru les médinas <strong>de</strong> Fez, cle Rabat,<strong>de</strong> Marrakech sans percevoir aucun sentiment d'hostilité. Lecalme le plus complet v régnait. Le terrorisme est l'œuvred'une .infime minorité. Par là même, l'Istiq<strong>la</strong>l démontre safaiblesse. Le mouvement est incapable <strong>de</strong> rcnconter l'adhésiondu nombre. Il espère régner par <strong>la</strong> peur.Comment lutter avec efficacité ?ll' y à d'abord! non pas tant <strong>de</strong>s. mesures policières que <strong>de</strong>smesures sociales et économiques. 11 faut démontrer aux humbles-que nous sommes capables <strong>de</strong> les faire, vivre. Pour yparvenir, il semble indispensable <strong>de</strong> disperser le prolétariat <strong>de</strong>Casab<strong>la</strong>nca en lui donnant du travail ailleurs. (Exc<strong>la</strong>mations àl'èxlrême gauchc, à gauche et sur certains bancs, an centre.)Casab<strong>la</strong>nca est une merveilleuse réalisation d'urbanisme, maisc'est une tragique erreur sociale. (Interruptions sur les mêmesbancs.)Je m'explique.: Le prestige <strong>de</strong> <strong>la</strong> ville géante attire tous ceux qui veulent fairefortune et qui y vivent misérablement parce qu'ils ont trop <strong>de</strong>fierté pour revenir chez eux et avouer leur échec.11 faut que tous les originaires <strong>de</strong> l'Anti-At<strong>la</strong>s, du Sous, yretournent et y trouvent, grâce à nous, <strong>de</strong> quoi y vivre et y bienVivre.Nous <strong>de</strong>vons combattre <strong>la</strong> propagan<strong>de</strong> adverse en utilisant seimoyens. Une faible partie cle <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion est seule capable <strong>de</strong>lire' l'arabe. Jusqu'à présent, les journaux cle <strong>la</strong>ngue arabiédités avec l'autorisation <strong>de</strong> l'ex-sultan étaient tous contre nous.Publions à notre tour <strong>de</strong>s journaux et ayons surtout <strong>de</strong>s hommescapables <strong>de</strong> les commenter.Demandons enfin aux Arabes d'être eux-mêmes les gardiens'<strong>de</strong> l'ordre. Ou l'attentat a lieu dans les villes mo<strong>de</strong>rnes et alorsil est aisé d'établir une surveil<strong>la</strong>nce suffisante, ou il a lieu dansles médinas et alors il est impossible que le ou les tueursn'aient pas été vus en raison <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>nsité <strong>de</strong> <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion, <strong>de</strong>l'intense activité qui y règne et les dimensions réduites <strong>de</strong>sruelles.Souvenons-nous <strong>de</strong>s troubles en Algérie il y a quelquesannées. Le slogan était: « Les Français à <strong>la</strong> mer ! » Nous <strong>de</strong>vonsaffirmer que nos ressortissants au Maroc forment un groupeethnique marocain et qu'ils ne sauraient être traités comme <strong>de</strong>sétrangers mais, par voie cle réciprocité, il faudrait prévoir queles Marocains seraient admis à diriger le pays avec nous. Làaussi le système <strong>de</strong> <strong>la</strong> double nationalité est <strong>de</strong> nature à réaliserune égalité interne.A notre ser.s, il convient d'instaurer dans l'emuire fortunéun régime d'association, ce qui ne signifie pas <strong>la</strong> seule union <strong>de</strong>sArabes et <strong>de</strong>s Français mais ce qui" sous-entend une synthèsebeaucoup plus <strong>la</strong>rge où, naturellement, figureront d'une part<strong>la</strong> masse berbère qui doit obtenir une importante représen<strong>la</strong>tion,d'autre part les Israélites, dont les qualités d'adaptation sontparticulièrement remarquables.Rien n'empêche <strong>de</strong> réaliser ce<strong>la</strong>. Nous détenons par le traité<strong>de</strong> Fez Ja possibilité <strong>de</strong> transformer comme nous l'entendons ierégime intérieur du Maroc à <strong>la</strong> double condition <strong>de</strong> ne rien fairecontre l'Is<strong>la</strong>m et cle ne pas porter atteinte à l'intégrité <strong>de</strong>l'empire chérifien.Cette œuvre peut donc être entreprise. Nul doute qu'elle n'obtiennel'assentiment <strong>de</strong>s Français du Maroc dont <strong>la</strong> situation setrouverait renforcée. Nul cloute aussi qu'elle n'emporte l'adhésion<strong>de</strong> tous ceux qui ne veulent pas SJ sentir protégés, c'est-àdirenon égaux en droit.La France, a le ferme propos <strong>de</strong> ne pas quitter l'Afrique duNord. Elle ne peut pas y <strong>de</strong>meurer en tuteur ni en martre. Laseule politique possible est celle do l'association fondée surl'égalité.Il nous reste à vous prier instamment <strong>de</strong> suivre une telleorientation. Le Maroc n'est pas l'Istiq<strong>la</strong>l. Non seulement nous yavons un grand nombre cle Français, mais à côté <strong>de</strong> nous nosamis sont nombreux et puissants.Qu'il me soit permis <strong>de</strong> les saluer tous en <strong>la</strong> personne <strong>de</strong>l'un d'entre eux, l'homme qui, <strong>de</strong>puis quarante ans, personnifiel'amitié franco-marocaine, le compagnon <strong>de</strong> Lvautey, lefidèle <strong>de</strong>s mauvais jours cle 1915-1918 et do 1939-1915,* sonexcellence El G<strong>la</strong>oui, naclia <strong>de</strong> Mairakech. 11 est, lui aussi, lecréateur du Maroc mo<strong>de</strong>rne.Si, _ comme le dit ie général Bcthonart, « l'éloignernent clel'ancien sultan a créé cle <strong>la</strong>rges possibilités pour assainir <strong>la</strong>situation au Maroc », proc<strong>la</strong>mons nettement qu'il n'y a pas<strong>de</strong> question du trône marocain et, en accord avec nos amisberbères, arabes et israélites, édifions lo Maroc futur.Hier, nous avons fondé l'Etat marocain, nous lui avonsdonné une conscience par nos écoles et notre enseignement.Aujourd'hui, nous maintiendrons cet incrovable accomplissement.Demain, en association avec les Marocains, nous continueronsen commun, fraternellement, d'édifier un Maroc auquel nousavons donné notre esprit et notre cœur. Sans cet avenir pour <strong>la</strong>Tunisie el le Maroc, il n'y a pas d'Algérie française possible.Tout, là-bas, se tient. Songez-y pendant qu'iren est tempsencore. Mesurez votre effroyable responsabilité. Le sort <strong>de</strong> troismillions <strong>de</strong> Français est entre vos mains.Au-<strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> nos paroles, <strong>de</strong> nos discussions, <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie,il y a <strong>la</strong> France, que vous allez peut-être encore une foismutiler.Attention! Redites, monsieur le ministre, à M. le prési<strong>de</strong>ntdu conseil, ce soir absent, qu'il no faut pas que <strong>la</strong> voix <strong>de</strong>svivants se joigne'à celle <strong>de</strong>s morts pour lui crier: « On ne passepas! Pas ce<strong>la</strong> et pas vous! » (App<strong>la</strong>udissements à droite et surquelques bancs à l'extrême droite. — Exc<strong>la</strong>mations à gauche.)M. le prési<strong>de</strong>nt. La suite du dc

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