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Cherbourg et ses environs : nouveau guide du ... - Normannia

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<strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> <strong>ses</strong> <strong>environs</strong> : <strong>nouveau</strong> <strong>guide</strong> <strong>du</strong> voyageur à <strong>Cherbourg</strong>.<strong>Cherbourg</strong>. Alentours de la ville : parties 1 <strong>et</strong> 2 / par Jean Fleury <strong>et</strong> HippolyteValléePremière partie.Notions générales sur la Ville <strong>et</strong> l'Arrondissement.NOUVEAUGUIDE DU VOYAGEURA CHERBOURG.<strong>Cherbourg</strong>.I.A peu près au milieu des côtes septentrionales de la presqu'île qui forme une partie <strong>du</strong> département de la Manche, sur unfond de stéaschiste, s'étend une p<strong>et</strong>ite plaine verdoyante <strong>et</strong> fertile, d'environ 4 lieues de longueur, d'une largeur très-variable,mais qui ne s'étend pas à plus d'un quart de lieue. C'est là, à 49° 38'31'' de latitude, à 3° 57' 18"d e longitude, à 20 ou[p. 2]22 lieues de l'Angl<strong>et</strong>erre, 26 ou 28 lieues de Portsmouth, à 88 lieues de Paris, 28 de Caen, 20 de Coutances, 19 de S. t -Lo <strong>et</strong>à 5 de Valognes, qu'on trouve assis au bord de la mer, <strong>Cherbourg</strong> avec <strong>ses</strong> maisons de schiste bleuâtre, souvent recouvertesde chaux ou de ciment <strong>et</strong> surmontées de toits bleus ou noirs, avec son clocher qui domine la ville, son double port, <strong>ses</strong>vaisseaux, sa superbe digue, les nombreux ouvriers de sa marine, <strong>et</strong> derrière, son rideau de montagnes, tantôt arides <strong>et</strong>rocailleu<strong>ses</strong>, tantôt couronnées de p<strong>et</strong>its champs fertiles bordés d'ormes <strong>et</strong> de hêtres, <strong>et</strong> s'abaissant ça <strong>et</strong> là pour laisserpasser un ruisseau que dans le pays on décore <strong>du</strong> nom de rivière. Placé au fond d'une grande baie, il semble être la tête d'unimmense taureau qui avance dans la mer <strong>ses</strong> deux cornes, rameu<strong>ses</strong> comme les bois d'un cerf, dont la pointe d'Omonville <strong>et</strong>le cap Lévy forment les premières branches, <strong>et</strong> qui se terminent par les hautes falai<strong>ses</strong> granitiques de la Hague <strong>et</strong> le cap deGatteville ; les yeux flamboyants, l'oreille au gu<strong>et</strong> sur l'Angl<strong>et</strong>erre, prêt, au moindre mouvement de son ennemie, à vomircontre elle <strong>ses</strong> superbes vaisseaux <strong>et</strong> les boul<strong>et</strong>s rouges de <strong>ses</strong> forts.La nature lui avait donné une rade pour le protéger contre tous les vents, excepté contre ceux <strong>du</strong> nord ; le génie deshommes a achevé l'ouvrage de la nature ; <strong>et</strong> le gigantesque proj<strong>et</strong> de fermer entièrement c<strong>et</strong>te rade, au moyen d'une muraillede 3,768 mètres de long, s'y exécute depuis 1783, <strong>et</strong> c'est un[p. 3]spectacle très-pittoresque, les nuits d'été, d'apercevoir sur c<strong>et</strong> espace enlevé à la mer, les feux mobiles destinés à éclairer lestravailleurs ; lorsque les ouvrages en seront terminés, protégée par c<strong>et</strong>te digue <strong>et</strong> par le Fort Royal bâti sur l'île Pelée, rocherqui fit partie <strong>du</strong> continent jusqu'en 1560, <strong>et</strong> qui s'en trouve aujourd'hui séparé par 1500 toi<strong>ses</strong> de roches sous-marines, quirendent de ce côté le passage tout-à-fait impossible ; défen<strong>du</strong>e <strong>du</strong> côté de la terre par 8 forts placés sur les hauteurs, <strong>et</strong> quien temps de guerre se joindraient par une enceinte de fortifications, la place de <strong>Cherbourg</strong> serait vraiment imprenable.Dans c<strong>et</strong>te superbe rade, 90 vaisseaux de ligne peuvent venir s'abriter <strong>et</strong> contre les ennemis extérieurs <strong>et</strong> contre lescourants, qui sont si violents dans c<strong>et</strong>te partie de la Manche ; puis après y avoir mouillé, peuvent à leur gré ou continuer leurroute, — car on en sort avec presque tous les vents, — ou entrer à leur droite dans le port militaire dans lequel ils trouverontun avant-port <strong>et</strong> deux bassins dont un n'est que commencé, ou bien à gauche dans le port de commerce, qui étend commedeux bras <strong>ses</strong> j<strong>et</strong>ées en granit, pour les inviter à se reposer entre de magnifiques quais aussi de granit, dans l'avant-port s'ilsne veulent rester que quelques jours, <strong>et</strong> s'ils veulent s'arrêter plus long-temps dans le vaste bassin de commerce, où l'eau est


maintenue au moyen d'une écluse de 40 pieds de largeur <strong>et</strong> de deux portes. Il y entre, année commune, 1200 navires enrelâche.[p. 4]Mais c'est c<strong>et</strong>te position exceptionnelle de <strong>Cherbourg</strong> comme place de guerre, qui rend <strong>ses</strong> quais déserts <strong>et</strong> soncommerce peu considérable, comparativement à celui <strong>du</strong> Havre. On en exporte cependant beaucoup d'oeufs pourl'Angl<strong>et</strong>erre (1,000,000 de francs par an), de salaisons (850,000 kilogrammes environ) <strong>et</strong> de mul<strong>et</strong>s pour l'île Bourbon <strong>et</strong> lesAntilles. Le commerce de <strong>Cherbourg</strong> consiste encore en fabrique de soude de varech, brute <strong>et</strong> raffinée, teintureries, tanneries(300,000 francs d'affaires), constructions <strong>et</strong> armements maritimes, exportations de toiles <strong>et</strong> de beurre de la Hague ;importations de bois de sapin <strong>et</strong> de chêne, de mâtures, de lins <strong>et</strong> de chanvres <strong>du</strong> nord, d'épiceries, vins, fers, houille, <strong>et</strong>c.Ce commerce est fait par 225 à 230 navires, tant français qu'étrangers, de 30 à 800 tonneaux, montés chacun de 6 à 18hommes d'équipage. Les importations <strong>et</strong> exportations dont les chiffres se balancent à peu près, s'élèvent à environ 4 ou 5millions de francs.Quoiqu'il remonte à une haute antiquité, <strong>Cherbourg</strong> offre presque partout l'aspect d'une ville nouvelle ; les anciennes ruesoccupent peu de place, <strong>et</strong> les autres sont en général larges <strong>et</strong> bien aérées, les fontaines nombreu<strong>ses</strong> : elles le seront encoreplus après l'achèvement d'un aque<strong>du</strong>c, auquel on travaille aujourd'hui, destiné à porter à travers la ville jusqu'au port militaireune partie des eaux de la Div<strong>et</strong>te.<strong>Cherbourg</strong> a 10 places, 59 rues, 12 impas<strong>ses</strong> <strong>et</strong> 5[p. 5]passages. On y trouve deux égli<strong>ses</strong> dont une dans le faubourg <strong>du</strong> Roule, élevée à l'aide de souscriptions particulières en1831 — 32, n'est pas reconnue par l'administration municipale. On doit incessamment en bâtir une troisième, ainsi qu'unesalle de spectacle. Il y a aussi un temple protestant construit en 1834, un hôpital de la marine, un hôpital civil, un collègecommunal de 1 re classe, dans lequel on a essayé de fondre une école primaire ; un cabin<strong>et</strong> d'antiquités <strong>et</strong> d'histoire naturelle ;une bibliothèque qui s'est formée en peu d'années, <strong>et</strong> un musée qui s'est accru encore plus rapidement. Parmi les riches<strong>ses</strong>scientifiques de la ville on cite encore la bibliothèque de M. Couppey, la bibliothèque <strong>et</strong> la collection de médailles de M.Asselin.En 1836 on a établi à <strong>Cherbourg</strong> des cour<strong>ses</strong> de chevaux, <strong>et</strong> tout annonce que c<strong>et</strong>te institution prospérera ; unétablissement de bains de mer n'est pas encore terminé, <strong>et</strong> la société philharmonique qu'on y avait établie est dissoute depuisplusieurs années.<strong>Cherbourg</strong> est une place de guerre de 1 re classe de la 14 e division militaire ; il y a un lieutenant de la 4 e légion degendarmerie dont le chef-lieu est à Rouen ; il y a en outre pour l'arrondissement maritime <strong>du</strong> Havre, une compagnie degendarmerie maritime dont le chef d'escadron réside à <strong>Cherbourg</strong>. Le corps royal d'artillerie y a un colonel directeur <strong>et</strong> unsous-intendant militaire de 2 e classe.<strong>Cherbourg</strong> est la résidence d'un colonel directeur, d'un chef de bataillon <strong>et</strong> d'un capitaine <strong>du</strong> génie militaire.[p. 6]Il y a dans c<strong>et</strong>te ville un préf<strong>et</strong> maritime, un bataillon d'artillerie, un bataillon d'infanterie de marine, un commissairegénéral, des directeurs des constructions navales <strong>et</strong> des travaux hydrauliques <strong>et</strong> bâtiments civils, un tribunal maritime, uneécole de navigation <strong>et</strong> une direction des douanes.L'arrondissement <strong>du</strong> port de <strong>Cherbourg</strong> s'étend sur toutes les côtes <strong>du</strong> département de la Manche. C<strong>et</strong> arrondissement adans le département <strong>du</strong> Calvados une extension qui renferme à peu près les cantons maritimes d'Isigny, de la Cambe, <strong>et</strong>c.,dans l'ancien district de Bayeux ; ces côtes forment un développement de plus de 80 lieues ; elles sont divisées en troisquartiers, ceux de <strong>Cherbourg</strong>, de Caen <strong>et</strong> de la Hougue. — Les cinq syndicats <strong>du</strong> quartier de <strong>Cherbourg</strong> sont : <strong>Cherbourg</strong>,Carter<strong>et</strong>, Fermanville, Omonville <strong>et</strong> les Pieux.<strong>Cherbourg</strong> est le siège d'une sous-préfecture, d'un tribunal civil de première instance, d'une chambre <strong>et</strong> d'un tribunal decommerce, d'une justice de paix ; elle possède encore une caisse d'épargnes, une salle d'asile, un bureau de bienfaisance,un couvent, une manufacture de dentelles, une école primaire supérieure, un pensionat secondaire, plusieurs écolesprimaires élémentaires, deux journaux <strong>et</strong> une société académique. Une ligne télégraphique aboutit à c<strong>et</strong>te ville.Il s'y tient 4 foires par an : le 27 janvier, le lendemain des Rameaux, le lendemain de la Trinité <strong>et</strong> le 26 août ; elles sont peu


considérables ; il s'y vend des bestiaux <strong>et</strong> de la mercerie.Il y a deux jours de marché par semaine : le lundi <strong>et</strong> le jeudi ; on avait tenté d'en établir un troisième le samedi dans lefaubourg des Mielles ; c<strong>et</strong> essai n'a pas réussi.[p. 7]En 1740 la population de <strong>Cherbourg</strong> ne s'élevait qu'à environ 7,000 habitants ; en 1797, époque <strong>du</strong> premier recensementofficiel de c<strong>et</strong>te ville, on y en trouva 11,382 ; il y en a aujourd'hui 19,710.Près de la moitié de c<strong>et</strong>te population appartient à la classe laborieuse. On pourrait reprocher aux ouvriers de notre villeleur propension à l'ivrognerie ; il faut chercher la cause de ce vice, dans l'absence chez nous des dan<strong>ses</strong> <strong>et</strong> autresamusements qui, dans presque toutes les villes, aident au travailleur à se délasser des longs travaux de la semaine.Parmi les hommes remarquables nés à <strong>Cherbourg</strong>, on cite : les frères Le Parmentier qui, en 1550, découvrirent l'île deFernambouc ; Gilles Le Hédois, d'abord matelot, corsaire, puis capitaine au service <strong>du</strong> Portugal, <strong>et</strong> enfin amiral <strong>du</strong> Brésil ;Jacques de Caillères, historien, <strong>et</strong> François de Caillères, son fils, membre de l'académie française <strong>et</strong> plénipotentiaire aucongrès de Riswick ; Joseph Grivel, auteur ascétique <strong>du</strong> XVIII e siècle ; Jean Hamon, médecin <strong>et</strong> écrivain à qui Boileau a faitune épitaphe ; M. me R<strong>et</strong>eau-Dufresne, auteur d'une histoire de <strong>Cherbourg</strong> ; Jean Groult, chirurgien de Louis XIII <strong>et</strong> de LouisXIV ; Ch. Bataille, baron d'Oxford ; Claude Lecapelain, savant dans la langue hébraïque ; Desroches-Orange, qui, de simplecavalier[p. 8]de dragons, devint lieutenant-général des armées <strong>du</strong> roi <strong>et</strong> gouverneur des invalides ; J. B. Beauvais, évêque de Senez, undes meilleurs prédicateurs <strong>du</strong> XVIII. e siècle ; Avoyne de Chantereyne, auteur d'une histoire de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> d'un mémoiresur la descente des Anglais à Urville, mss., mort en 1789 ; Pierre Frér<strong>et</strong>, peintre, un des fondateurs de l'académie de<strong>Cherbourg</strong> ; Louis Frér<strong>et</strong>, peintre de la reine Marie-Antoin<strong>et</strong>te ; P. Groult, auteur d'ouvrages sur le droit maritime ; le contreamiralTroude, mort en 1820 ; Louis Vastel, avocat au parlement de Rouen, auteur de plusieurs ouvrages estimés ;Duchevreuil, savant antiquaire ; l'abbé Demons, auteur d'une histoire <strong>et</strong> de plusieurs mémoires sur les antiquités de<strong>Cherbourg</strong>, mss. ; Richard Dancel, mort en 1836, évêque de Bayeux, <strong>et</strong>c.L'abbé de S.t-Pierre, qui s'est ren<strong>du</strong> si célèbre au dernier siècle par son proj<strong>et</strong> de paix perpétuelle <strong>et</strong> <strong>ses</strong> écrits contre lecélibat des prêtres, était de S.t-Pierre-Eglise, à quatre lieues de <strong>Cherbourg</strong>.II.Mais ce n'est pas seulement comme port militaire, ce n'est pas seulement comme ville de commerce que <strong>Cherbourg</strong> serecommande à la curiosité des étrangers ; <strong>ses</strong> campagnes pittoresques, les sites variés qui l'environnent, la douceur de sonclimat qui, moins chaud <strong>et</strong> moins froid que celui de Paris, perm<strong>et</strong>, malgré les quelques brouillards qui en hiver s'étendent[p. 9]sur les côtes, d'y élever en pleine terre le myrte, le figuier, ainsi que beaucoup de plantes des pays chauds, <strong>et</strong> les moeurs desvillages qui l'avoisinent en font une des plus attrayantes villes <strong>du</strong> littoral de la Manche.Figurez-vous un pays tout couvert d'inégalités, varié de vallons, de collines, de jolies rivières, de vertes prairies, decoteaux chargés de pommiers <strong>et</strong> de moissons, coupé de haies vives d'ormes, de hêtres <strong>et</strong> d'aubépines. — Etes-vous ami del'in<strong>du</strong>strie <strong>et</strong> des cho<strong>ses</strong> positives ? — Vous y trouverez, depuis quelques années <strong>du</strong> moins, de larges routes commodes <strong>et</strong>faciles. Etes-vous poète ? — Des sentiers tortueux <strong>et</strong> frais qui ne sont souvent que des ravins creusés à quinze ou vingt piedsau-dessous <strong>du</strong> sol, s'y croisent en tous sens autour de vous <strong>et</strong> vous offrent en été leur mystérieux ombrage, en hiver leursombre <strong>et</strong> boueuse horreur ; pour le commerçant, des pro<strong>du</strong>ctions abondantes, des bestiaux, des marchés, des foires ; pourl'amant de la nature, de jolies maisonn<strong>et</strong>tes de schiste, d'arkose <strong>et</strong> de grès, crépies de chaux, quelquefois surmontées dejoubarbes de peur de la foudre, entourées d'une cour <strong>et</strong> d'un joli jardin, se réunissant en groupes gracieux, rarement asseznombreu<strong>ses</strong> pour former des villages ; pour l'un, de p<strong>et</strong>ites propriétés bien fertiles <strong>et</strong> bien cultivées, toujours d'aprèsl'ancienne méthode cependant ; pour l'autre, le travail, le mouvement, la gai<strong>et</strong>é folle.Puis çà <strong>et</strong> là les terres cultivées disparaissent, la[p. 10]


végétation s'affaiblit ; plus de maisons, plus d'enclos : la terre a la couleur de la cendre, <strong>et</strong> près d'un vallon fertile, le terrains'élève en croupe arrondie <strong>et</strong> se couronne d'une lande aride <strong>et</strong> nue ; les bruyères croissent à la surface <strong>du</strong> sol, <strong>et</strong>, dans l'été,font à la terre un tapis de fleurs rouges sur un fond noirâtre ; dans le printemps des ajoncs noirs broutés <strong>et</strong> arrondis en hemiellipsoïdespar les moutons qu'on y laisse vaguer, réjouissent la vue de leurs élégants bouqu<strong>et</strong>s d'un jaune frais, <strong>et</strong>, de placeen place, le grès intermédiaire, le granit, le micaschiste découvrent leurs roches gri<strong>ses</strong> ou blanches, trouées de profondescrevas<strong>ses</strong>, demeure ordinaire des fées <strong>et</strong> autels des sacrifices druidiques.Puis d'immen<strong>ses</strong> falai<strong>ses</strong> de 50 à 100 pieds, de granit, rarement de grès ou de micaschiste, comme les landes, stériles <strong>et</strong>couvertes seulement d'ajoncs <strong>et</strong> de serpol<strong>et</strong>, car les arbres qui se hasardent à y pousser dans les interstices des rochers sontrabougris <strong>et</strong> couchés sur le sol par les vents <strong>du</strong> nord <strong>et</strong> de l'ouest ; çà <strong>et</strong> là quelques p<strong>et</strong>ites cabanes de gazon construites parles douaniers qui errent toute la nuit sur les côtes ; des rocailles pleines de crevas<strong>ses</strong> où, dans les jours d'hiver, vient battre lamer verdâtre <strong>et</strong> écumeuse, où viennent se percher les oiseaux aquatiques lorsqu'ils sont las de suivre les on<strong>du</strong>lations desvagues ; <strong>et</strong> ailleurs des grèves plates <strong>et</strong> couvertes d'un sable très-fin, ensevelies en octobre dans un épais nuage de fumée,quand les habitants des lieux[p. 11]voisins brûlent pour fabriquer de la soude les plantes marines qu'ils ont fait sécher pendant la belle saison.Enfoncez-vous plus avant dans la campagne, les jolies maisonn<strong>et</strong>tes font place à de vieilles chaumières où le jour pénètreà peine par des portes bâtardes ou tout au plus par une p<strong>et</strong>ite fenêtre à chassis de plomb ; partout des masures couvertes delierre <strong>et</strong> de jaunâtres lichens, des pans des murailles encombrés de ronces <strong>et</strong> d'herbes parasites ; des cours sales où lescanards <strong>et</strong> les oies barbottent dans la vase <strong>et</strong> dans le fumier ; des étables couvertes de chaume où ruminent les vaches auxlourdes mamelles, les brébis à la laine forte <strong>et</strong> rude. Entrez dans ces demeures : l'aire est de terre noire, mais bien balayée,les poutres sont bas<strong>ses</strong>, <strong>et</strong> noircies par la fumée, mais l'araignée n'y a pas ten<strong>du</strong> une seule toile ; les lits sont trop hauts, lesmeubles taillés à coups de hache, mais tout y est d'une propr<strong>et</strong>é irréprochable ; les murs y sont tapissés d'images grossièresentourées d'une longue complainte ; au plancher est suspen<strong>du</strong> le veilleur, où l'on attache la lampe pendant les soiréesd'hiver ; les fusils sont suspen<strong>du</strong>s au-dessus de l'ais de la cheminée ; tout est triste <strong>et</strong> sombre, mais tout est en ordre. Unejolie paysanne qu'à <strong>ses</strong> yeux bleus ou verts, à <strong>ses</strong> cheveux blonds vous reconnaissez pour être de la race normande, se lève,vient à vous, <strong>et</strong> pendant que vous admirez son costume pittoresque qui fait[p. 12]valoir toutes les grâces de son corps, elle s'apprête à vous donner des rafraîchissements pour lesquels elle ne voudra jamaisrien accepter. C'est à la fois la Br<strong>et</strong>agne <strong>et</strong> la Flandre, <strong>et</strong> si vous parvenez à entendre de ces hommes leur langage accentué<strong>et</strong> énergique, qui, avec <strong>ses</strong> anciens conquérants, a envoyé beaucoup de <strong>ses</strong> formes à l'Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> à l'Italie, vous penserezà leurs légendes bizarres où ils entremèlent des scènes voluptueu<strong>ses</strong> à d'horribles aventures, les amours des fleurs <strong>et</strong> desfées aux démons qui achètent pour de l'or l'âme des enfants encore dans le ventre de leurs mères.Suivant les traditions, le pays était autrefois couvert de ces immen<strong>ses</strong> <strong>et</strong> sombres forêts dont les hauts plants de hêtress'élevant comme les colonn<strong>et</strong>tes d'un temple gothique, inspirent à l'âme une sorte de mystérieux effroi qu'on se plaît à braver.C'était là que les druides aimaient à consommer leurs barbares sacrifices, ainsi que nous l'attestent les monuments qu'ilsnous ont laissés de leur séjour ; c'était là aussi que les anciens seigneurs se plaisaient à élever leurs demeures féodales. Lesprincipales étaient : celle qui entourait le château de Bricquebec, très-vaste encore, quoique de long-temps les marchands debois, les sabotiers, les charbonniers auxquels sont depuis peu venus se joindre les trappistes, s'en disputent le défrichement ;celle de Brix, au milieu de laquelle s'élevait le vieux château d'Adam, d'où sortirent les Bruce, plus tard rois d'Ecosse, <strong>et</strong> qui,[p. 13]à travers les montagnes <strong>et</strong> les vallées, s'étendait jusqu'aux portes de la ville ; <strong>et</strong> celle de Banne, qui paraît avoir occupé toutela plage N.-O. de la presqu'île ; elle est aujourd'hui entièrement détruite ; la mer même a envahi une grande partie des lieuxqu'elle occupait, mais deux gros rochers, nommés le Raz de Banne, en ont conservé le nom, <strong>et</strong> de nombreux débris devégétaux qu'on r<strong>et</strong>rouve de temps en temps sous le sable, viennent corroborer la vérité <strong>du</strong> fait. C<strong>et</strong>te forêt ne semble pourtantpas avoir été contemporaine des premiers temps <strong>du</strong> monde, car d'après l'inspection des lieux <strong>et</strong> les fouilles qu'on y a faites,on a cru reconnaître que la mer serait pendant long-temps venue battre au pied des collines qui encadrent <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong>, cequi ajoute <strong>du</strong> poids à c<strong>et</strong>te opinion, c'est que, il y a cent ans, elle venait encore recevoir la Div<strong>et</strong>te au pied de la montagne <strong>du</strong>Roule d'où elle est aujourd'hui bien éloignée.Les <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong> sont trop montueux pour offrir de grands cours d'eau ; le plus considérable est la Div<strong>et</strong>te quiprend sa source à Briquebost, court à l'ouest, arrive auprès de l'église de Sideville ; c'est là que son cours commence àdevenir plus intéressant ; elle coule mollement entre des plants d'aunes <strong>et</strong> de saules, dans de jolies prairies ; les collines quil'enserrent, d'abord bas<strong>ses</strong> <strong>et</strong> écartées, s'élèvent, se rapprochent peu à peu, <strong>et</strong>, avant d'arriver


[p. 14]à <strong>Cherbourg</strong>, forment la délicieuse vallée de Quincampoix ; de là elle rejoint la route de Paris, reçoit le Trottebec au pont <strong>du</strong>Roule, <strong>et</strong> les deux rivières entrent ensemble sans se mêler dans le canal de r<strong>et</strong>enue, si doux à contempler d'une collinevoisine, quand le ciel s'y réfléchit, quand la lune éclaire de <strong>ses</strong> pâles rayons les arbres qui l'encadrent, <strong>et</strong> le somm<strong>et</strong> desmonts, tandis que les vallées pleines de blafardes vapeurs, ressemblent à une mer aux capricieux rivages, semée d'îles <strong>et</strong> devaisseaux immobiles sur leurs ancres au milieu des brouillards !Les autres rivières sont la Saire qui prend sa source au Mesnil-au-Val, <strong>et</strong> arrose la fertile contrée auquel elle a fait donnerle nom de Val-de-Saire, (<strong>et</strong> non de Cérès, comme on l'avait cru long-temps), l'Ouve qui sort de Hardinvast, <strong>et</strong> la Scie quiprend sa source à Grosville.Les montagnes sont peu élevées ; la plus remarquable est le Roule à l'entrée de <strong>Cherbourg</strong>.Les roches qui composent le sol se prolongeant dans la mer, y nourrissent, les schisteu<strong>ses</strong> surtout, une grande quantitéde plantes marines qui se détachent quelquefois dans les nuits orageu<strong>ses</strong> <strong>et</strong> sont recueillies sur le champ par les habitantsdes côtes pour en fumer leurs terres. Il s'en fait aussi tous les ans une récolte régulière au mois de mars ; on emploie encoreau même usage le sable fin des grèves,[p. 15]<strong>et</strong>, c'est un spectacle très-animé que c<strong>et</strong>te multitude de charr<strong>et</strong>tes qui le transportent, s'avançant lentement sur les routes aumilieu des coups de fou<strong>et</strong>, des chansons <strong>et</strong> des joyeux propos des charr<strong>et</strong>iers. Ceux de l'intérieur des terres se servent d'unechaux grossière faite des marbres qui se trouvent assez abondamment dans le pays, surtout dans le sud de l'arrondissement.Les pro<strong>du</strong>ctions naturelles le plus importantes sont les pommes dont on fait d'excellent cidre ; le blé, l'orge, le lin, laluzerne, le colza, le sarrasin <strong>et</strong> la pomme de terre [1]. Le Val-de-Saire est plus fertile[p. 16]que la Hague qui est rocailleuse <strong>et</strong> parsemée de landes ; il est presque entièrement composé de belles prairies quinourrissent ces vaches si renommées. On fait partout <strong>du</strong> beurre excellent.Les arbres les plus communs dans le pays sont : le chêne qui y reste toujours nain, l'orme, le hêtre, le bouleau, le frêne <strong>et</strong>le chataignier. Depuis quelques années M. le comte Dumoncel a fait planter sur <strong>ses</strong> vastes propriétés des pins, des mélèzes<strong>et</strong> d'autres arbres <strong>du</strong> nord qui ont parfaitement réussi.La principale nourriture des paysans consiste en pain d'orge <strong>et</strong> en bouillie de sarrasin ; ils ne mangent guère d'autreviande que le porc ; encore en beaucoup d'endroits n'y a-t-il que les riches qui puissent se procurer c<strong>et</strong>te satisfaction auxgrands jours ; mais un m<strong>et</strong>s qu'ils préfèrent à tous, c'est la gal<strong>et</strong>te, sorte de pâte composée de farine de sarrasin, de lait <strong>et</strong>d'oeufs, <strong>et</strong> cuite en couches minces sur la tuile avec <strong>du</strong> beurre. Il faut les voir quand le jour d'une partie proj<strong>et</strong>ée vient enfind'arriver, il faut les voir, dis-je, autour d'un feu de bûch<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> de fougère, le cruchon de cidre au milieu d'eux, boirejoyeusement les uns après les autres dans l'unique tasse qui sert pour tous, <strong>et</strong> manger la gal<strong>et</strong>te que leur donne toutebrûlante la ménagère armée de l'écouche à préparer le lin ; il faut entendre leurs éclats de rire <strong>et</strong> le feu roulant desplaisanteries grivoi<strong>ses</strong> plus ou moins gazées qui divertissaient autrefois les parents comme[p. 17]elles divertissent aujourd'hui les enfants, pour connaître combien dans notre siècle qui ne rit plus que <strong>du</strong> mal, il y a encoredans le coeur de l'homme simple, de franchise <strong>et</strong> de gai<strong>et</strong>é naïve.Cependant, nous devons le dire ici ; la simplicité des moeurs s'efface peu à peu ; l'habitant des campagnes commence àse moquer de ce qui excitait la terreur de <strong>ses</strong> pères ; il ne s'amuse plus, il ne rit guère, il fume <strong>et</strong> boit encore, mais il calcule <strong>et</strong>sait lire, il est citoyen, électeur, garde national, il a gagné sans doute en mérite ; chaque indivi<strong>du</strong> a peut-être per<strong>du</strong> eninsouciance <strong>et</strong> en bonheur, mais le sort de la masse s'améliore <strong>et</strong> l'avenir est là pour dédommager chacun des quelquessouffrances <strong>du</strong> présent.L'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong> se divise en cinq cantons : <strong>Cherbourg</strong>, Octeville, Beaumont, Les Pieux, Saint-Pierre-Eglise. Le second <strong>et</strong> le troisième appartiennent à l'ancienne Hague ; le dernier au Val-de-Saire. En tout 73 communes <strong>et</strong>76,668 habitants.J. F.


[p. 18]PRÉCISde l'Histoire de <strong>Cherbourg</strong>.La ville de <strong>Cherbourg</strong> est d'une haute antiquité ; on ignore l'époque précise de sa fondation. Les uns l'ont attribuée à Césarou à Titurius Sabinus, son lieutenant, qu'il envoya soum<strong>et</strong>tre les Unelli. D'autres à Cherebert ou Charibert, frère de DagobertI er ; supposition inadmissible puisque notre province n'était pas dans la part de ce prince <strong>et</strong> qu'il régnait sur le midi de laFrance. On pense généralement aujourd'hui que <strong>Cherbourg</strong> est le Coriallum de l'Itinéraire d'Antonin, de la carte de Peutinger,<strong>et</strong> que son origine est toute gauloise ; des médailles bien antérieures à l'époque des Césars, trouvées dans les ruines del'ancien château <strong>et</strong> dans une urne sous une des roches <strong>du</strong> Roule viennent à l'appui de c<strong>et</strong>te opinion.L'étymologie <strong>du</strong> mot <strong>Cherbourg</strong> n'a pas moins partagé les savants. M. Ragonde prétend qu'il dérive <strong>du</strong> celtique <strong>et</strong> qu'ilsignifie ville de guerre, ville fortifiée. Voici les différents noms sous lesquels <strong>Cherbourg</strong> se trouve désigné dans les vieuxauteurs. Caroburgus, Charoburgum, Chereburgum, Cherburgium, Cererisburgus, Cheriburgum, Cherebertum,Caesarisburgus, Caesarisburgum, <strong>et</strong>c.Sous les Unelli, c<strong>et</strong>te ville ne se composait que d'un amas de huttes habitées par des pêcheurs. Sabinus[p. 19]s'étant ren<strong>du</strong> maître <strong>du</strong> Cotentin, elle passa sous la domination des Romains <strong>et</strong> y resta plus de cinq cents ans. Clovis l'ach<strong>et</strong>avers l'année 497, <strong>et</strong> elle fut successivement possédée par Childebert, roi de Paris <strong>et</strong> de Neustrie ; par Clotaire I er , parCaribert ; par Chilpéric I er , par Sgebert, roi d'Ostrasie [2] par Théodebert, Clotaire II, Dagobert I er , Clovis II, Clotaire III,Dagobert II <strong>et</strong> Thierry III.L'évangile fut annoncé à <strong>Cherbourg</strong> en 431 par Saint-Ereptiole, premier évêque de Coutances. Saint-Scubilion y vintégalement en 555 <strong>et</strong> acheva de convertir la contrée.Les historiens ne mentionnent aucun autre fait particulier concernant <strong>Cherbourg</strong> jusqu'au IX siècle. Il fut comme toutes lesvilles <strong>du</strong> Cotentin exposé aux excursions des Normands (841-895) <strong>et</strong> comme elles, pillé, ravagé, saccagé. La peste <strong>et</strong> lafamine, fléaux non moins terribles que les barbares <strong>du</strong> Nord, vinrent aussi vers la même époque en affliger les malheureuxhabitants.En 887 Saint-Clair débarqua à <strong>Cherbourg</strong>, y fut ordonné prêtre <strong>et</strong> se r<strong>et</strong>ira dans une forêt des <strong>environs</strong>.<strong>Cherbourg</strong> cessa d'appartenir à la France en 912, <strong>et</strong> passa sous la domination de Rollon, qui força Charles-le-Simple à luicéder la Neustrie à titre de <strong>du</strong>ché.[p. 20]Héroult ou Aigrold, roi de Danemarck, ayant été détrôné par son fils, quitta <strong>ses</strong> états <strong>et</strong> arriva à <strong>Cherbourg</strong> avec une flottede soixante voiles (938). Il fut bien accueilli par Guillaume-Longue-Epée, fils de Rollon <strong>et</strong> second <strong>du</strong>c de Normandie, qui mit leCotentin à sa disposition. Il fixa sa résidence à <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> y demeura jusqu'à son rétablissement sur la trône.Guillaume étant mort assassiné (942), son fils Richard à peine âgé de dix ans, lui succéda. Le roi de France, Louis IV,voulut profiter de la jeunesse <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong> <strong>du</strong>c pour s'emparer de la Normandie, <strong>et</strong> s'avança à la tête d'une armée ; maisAigrold ayant été prévenu à temps, mit à la voile avec vingt-deux vaisseaux de guerre débarqua à <strong>Cherbourg</strong>, se joignit auxNormands restés fidèles à leur prince légitime, <strong>et</strong> tailla en pièces l'armée <strong>du</strong> roi de France qui fut fait prisonnier.Richard II succéda à son père en 996 ; <strong>et</strong> deux ans après il fonda une église ou chapelle collégiale dans l'ancien châteaude <strong>Cherbourg</strong>. Ce <strong>du</strong>c eut des démêlés (1003) avec le roi d'Angl<strong>et</strong>erre dont il avait répudié la soeur Ethelred, voulant vengerc<strong>et</strong> affront, leva une armée nombreuse <strong>et</strong> vint aborder à Barfleur. Néel-de-S.t-Sauveur accourut aussitôt au secours de ceport <strong>et</strong> mit les Anglais en pleine déroute. Les chroniqueurs citent les habitants de <strong>Cherbourg</strong> comme s'étant particulièrementdistingués à ce combat.Richard III, qui craignait une nouvelle attaque de[p. 21]


la part de l'Angl<strong>et</strong>erre, fit réparer les fortifications des places les plus importantes <strong>du</strong> Cotentin, <strong>et</strong> notamment celles de<strong>Cherbourg</strong>.Guillaume-le-Conquérant, excommunié pour avoir épousé sa cousine, n'obtint la levée de l'excommunication qu'à lacondition de fonder cent places de pauvres dans chacun des quatre hôpitaux qu'il voudrait choisir ; l'hôtel-dieu de <strong>Cherbourg</strong>fut un de ceux qu'il désigna (1053).Mauger, archevêque de Rouen, relégué à Jersey (1055), sous prétexte de con<strong>du</strong>ite scandaleuse, périt en voulant repassersur le continent ; son corps fut r<strong>et</strong>rouvé le long de la côte <strong>et</strong> inhumé à <strong>Cherbourg</strong>.Gerberot, comte de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> <strong>ses</strong> deux fils, se signalèrent à la célèbre bataille de Hastings (1066) qui donnal'Angl<strong>et</strong>erre à Guillaume-le-Conquérant.Henri I, roi d'Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> <strong>du</strong>c de Normandie, vint à <strong>Cherbourg</strong> en 1110, suivi d'un grand cortège.Ce prince se voyant près de mourir, fit connaître sa fille Mathilde, épouse de Geoffroi Plantagen<strong>et</strong>, comte d'Anjou, pourson héritière légitime. Etienne de Blois, comte de Boulogne, qui avait juré fidélité à la nouvelle reine, ne tarda pas à violer sonserment <strong>et</strong> se fit couronner roi d'Angl<strong>et</strong>erre. La guerre fut déclarée. Etienne équipa une flotte, descendit en Normandie,[p. 22]prit par force un grand nombre de châteaux <strong>et</strong> mit le siége devant <strong>Cherbourg</strong> (1039), qui ne se rendit qu'après une résistancede plus de deux mois. C<strong>et</strong>te ville fut reprise en 1142 par le comte d'Anjou.Les hostilités continuèrent en Angl<strong>et</strong>erre, <strong>et</strong> Mathilde passa en Normandie pour solliciter <strong>du</strong> secours. Ce fut pendant c<strong>et</strong>t<strong>et</strong>raversée, qu'assaillie par une violente tempête, elle fit le voeu dont elle s'acquitta en fondant l'abbaye de <strong>Cherbourg</strong>.En 1163, le fils de l'impératrice Mathilde, Henri II, vint à <strong>Cherbourg</strong>, accompagné de la reine Eléonore, sa femme, <strong>et</strong> ypassa les fêtes de Noël.Après une guerre sanglante, Richard Coeur-de-Lion <strong>et</strong> Philippe Auguste, se reconcilièrent <strong>et</strong> partirent ensemble pour laTerre-Sainte. Un grand nombre de bourgeois de <strong>Cherbourg</strong> firent partie de c<strong>et</strong>te expédition, <strong>et</strong> l'un d'eux, nommé Vigan, <strong>ses</strong>ignala à la prise de plusieurs villes.Jean-Sans-Terre s'étant emparé de la Normandie, au préjudice d'Arthur de Br<strong>et</strong>agne, une guerre éclata entr'eux (1199).Arthur tomba au pouvoir de son ennemi, qui, après l'avoir traîné de ville en ville, chargé de fers, le fit renfermer dans lechâteau de <strong>Cherbourg</strong>, d'où il ne sortit (1203) que pour être précipité dans la mer <strong>du</strong> haut d'un rocher.La même année, Philippe-Auguste, que l'assassinat d'Arthur avait indigné, porta la guerre en Normandie, <strong>et</strong> conquit toutela province. <strong>Cherbourg</strong>[p. 23]ouvrit <strong>ses</strong> portes. Entr'autres privilèges le roi de France permit aux marchands de faire le commerce de l'Irlande, prérogativequ'ils ne partageaient qu'avec ceux de Rouen.Un traité avait assuré à la France la pos<strong>ses</strong>sion de la Normandie. Au mépris des engagements, les Anglais essayèrentplusieurs fois de reprendre <strong>Cherbourg</strong>. En 1293, sous le règne de Philippe-le-Bel, ils vinrent saccager <strong>et</strong> incendier la ville ;l'Abbaye <strong>et</strong> l'Hôtel-Dieu furent également pillés <strong>et</strong> livrés aux flammes. Le château seul où s'étaient réfugiés les habitants,opposa une résistance qui força les ennemis de se r<strong>et</strong>irer.Sept ans après, le roi voulant m<strong>et</strong>tre <strong>Cherbourg</strong> en bon état de défense, le fit entourer de murailles dans la partie la plusvoisine <strong>du</strong> château.En 1346, les Anglais, au nombre de quarante mille, descendirent à la Hougue <strong>et</strong> se rendirent maîtres de toutes les places<strong>du</strong> pays. Cependant <strong>Cherbourg</strong> soutint le siège avec tant de vaillance que les ennemis furent encore c<strong>et</strong>te fois ré<strong>du</strong>its à lelever.(1354.) — Jean-le-Bon céda <strong>Cherbourg</strong> à Charles II, dit le Mauvais, roi de Navarre, qui y mit une garnison de Navarrais.C<strong>et</strong>te ville lui fut ensuite reprise par le roi de France (1356) pour cause de rebellion <strong>et</strong> ren<strong>du</strong>e en 1357.


Le roi de Navarre s'étant aperçu que les fortifications élevées en 1300, n'étaient pas suffisantes pour[p. 24]m<strong>et</strong>tre <strong>Cherbourg</strong> à l'abri des attaques de l'Angl<strong>et</strong>erre, fit construire les fortes <strong>et</strong> puissantes murailles qui subsistaient encoreau siècle de Louis XIV, <strong>et</strong> que ce prince donna l'ordre d'abattre. — Charles-le-Mauvais séjourna deux mois à <strong>Cherbourg</strong>, en1363, <strong>et</strong> c'est là que le roi de Chypre, Pierre 1 er , vint le supplier de ne pas armer contre le roi de France qui lui avait promis del'aider à combattre les infidèles. Il fut fort bien reçu par Charles qui cependant refusa d'obtempérer à sa demande.Le roi de Navarre revint à <strong>Cherbourg</strong> en 1366, <strong>et</strong>, voulant récompenser les bourgeois de la bravoure dont ils n'avaientcessé de donner des preuves, il les exempta de l'impôt, leur permit de porter l'épée <strong>et</strong> les créa tous nobles <strong>et</strong> barons.En 1370, la ville <strong>et</strong> le château tombèrent au pouvoir de Jacques de la Pipe <strong>et</strong> de Robert Cranoles, chefs de ribauds, qui neles gardèrent que peu de jours.Charles-le-Mauvais, ayant rompu de <strong>nouveau</strong> avec le roi de France dont il était le vassal, vendit <strong>Cherbourg</strong> aux Anglais,moyennant 22,000 marcs d'argent <strong>et</strong> ne s'en réserva que la seigneurie. Ceux-ci y envoyèrent aussitôt un corps de quatrecents archers <strong>et</strong> de deux cents hommes d'armes.Duguesclin se rendit maître de toutes les villes de Normandie appartenant au roi de Navarre, <strong>et</strong> vint m<strong>et</strong>tre le siége devant<strong>Cherbourg</strong> (1378.) Les efforts[p. 25]<strong>du</strong> général français échouèrent contre la résistance de la garnison, <strong>et</strong> il se r<strong>et</strong>ira aux approches de l'hiver. Ce siégemémorable est le plus long que <strong>Cherbourg</strong> ait eu à soutenir. Olivier Duguesclin, frère <strong>du</strong> général, y fut fait prisonnier, <strong>et</strong> outreles comtes de Dunois <strong>et</strong> de Saint-Paul, [3] un grand nombre de seigneurs y perdirent la vie.Pendant l'année 1379, plusieurs escarmouches eurent lieu entre les Anglais de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> les Français des garnisonsde Valognes <strong>et</strong> des places voisines. Une trève conclue en 1380 suspendit pour un temps les hostilités.Richard II, roi d'Angl<strong>et</strong>erre, rendit <strong>Cherbourg</strong> à la France en 1394.Charles-le-Mauvais étant mort, son fils lui succéda. Ce jeune prince réclama auprès <strong>du</strong> roi de France Charles VI, larestitution des villes <strong>et</strong> seigneuries qui avaient appartenu à son père. Un conseil général tenu en 1397, décida que les placesde Normandie étaient trop voisines de l'Angl<strong>et</strong>erre pour qu'on pût s'en dessaisir, mais qu'un dédommagement étant dû au roide Navarre, le <strong>du</strong>ché de Némours serait érigé pour lui en pairie, <strong>et</strong> qu'une somme de 200,000 écus d'or lui serait payée. En1404, il reçut également une grosse somme d'argent en échange de la ville de <strong>Cherbourg</strong>, dont le conseil lui avait conservé lapos<strong>ses</strong>sion.[p. 26]C<strong>et</strong>te même année, les <strong>Cherbourg</strong>eois échouèrent dans une expédition contre l'île de Wight, dont ils cherchaient à enleverles riches<strong>ses</strong>.Henri V, roi d'Angl<strong>et</strong>erre, voulant m<strong>et</strong>tre à profit l'état de trouble <strong>et</strong> de désorganisation dans lequel était tombée la Francepar suite de la maladie de Charles VI, leva une armée de cinquante mille hommes (1415), descendit à Harfleur <strong>et</strong> s'emparasuccessivement des principales villes de Normandie. <strong>Cherbourg</strong> fut réservé pour la fin de la campagne, <strong>et</strong> le <strong>du</strong>c de Glocestervint l'assiéger en 1418. Défen<strong>du</strong> par <strong>ses</strong> seuls habitants, il soutint le siége pendant trois mois, <strong>et</strong> les ennemis, que des pertesconsidérables avaient affaiblis, se seraient vus forcés de renoncer à leur entreprise, si d'Angennes, alors gouverneur de laville ne l'eût traitreusement livrée pour une somme d'argent. A partir de ce jour, elle resta plus de trente années au pouvoir del'Angl<strong>et</strong>erre. Henri V la visita en 1420.L'église de <strong>Cherbourg</strong> était devenue trop étroite, les habitants conçurent le proj<strong>et</strong> d'en élever une autre. Les travauxcommencés avant le siége furent repris en 1423 <strong>et</strong> terminés dans l'intervalle de 1450 à 1466.Un traité conclu à Arras en 1435 avait assuré à l'Angl<strong>et</strong>erre la propriété de <strong>Cherbourg</strong>, mais la paix ne fut pas de longue<strong>du</strong>rée. De nouvelles guerres ensanglantèrent la province, <strong>et</strong> au mois de mars 1450, Thomas Kiriel débarqua à <strong>Cherbourg</strong>,suivi de[p. 27]


trois mille soldats. Il prit Valognes <strong>et</strong> alla camper à Formigny. Là, quoique bien plus nombreux, les Anglais furentcomplétement battus par l'armée française. Charles VII s'empara ensuite de toutes les villes de Normandie appartenant àl'Angl<strong>et</strong>erre. <strong>Cherbourg</strong> se trouvait alors une des places les mieux fortifiées de la province, <strong>et</strong> lorsque le connétable deRichemont vint l'assiéger (juill<strong>et</strong> 1450), elle était défen<strong>du</strong>e par deux mille hommes résolus à vaincre ou à périr. L'attaque futpoussée avec tant de vigueur que la garnison « ne savait où donner de la tête. » Un gros canon <strong>et</strong> quatre bombardes, furentrompus à force de tirer ; on se servit même d'une nouvelle espèce de bombarde dont les assiégés, au dire des chroniqueurs,furent « moult ébahis, car oncques n'avaient eu connaissance d'un tel mystère. » Thomas Goëvel ou Gouevel, gouverneur,voyant l'inutilité d'une plus longue résistance, se décida à capituler. Les assiégeants entrèrent dans la ville le 12 août. C<strong>et</strong>tereddition causa tant de joie dans le pays, qu'on en fait encore mémoire tous les ans à pareil jour, dans l'église de Coutances.Le comte de Sancerre, seigneur <strong>du</strong> Bueil, fut nommé gouverneur de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> les fortifications étant réparées, on j<strong>et</strong>a lesfondements de quatre nouvelles tours. Ce fut aussi pour conserver le souvenir de c<strong>et</strong>te victoire, que les habitants firent éleverle monument de l'Assomption.[p. 28]Louis XI ayant égard à la fidélité <strong>et</strong> à la grande loyauté des bourgeois de <strong>Cherbourg</strong>, les affranchit en 1464 des tailles,aides, impositions, quatrièmes <strong>et</strong> de toutes charges quelconques. Ces priviléges leur furent confirmés par Charles VIII en1483 ; par Louis XII en juill<strong>et</strong> 1498 ; par François I. er en juill<strong>et</strong> 1520 ; par Henri II en 1547 ; par Charles IX en 1562 ; par HenriIII en 1576 ; par Henri IV en 1594 ; par Louis XIII en 1613 <strong>et</strong> par Louis XIV en 1653.La Normandie avait été cédée à Charles de France, frère de Louis XI, à titre d'apanage ; mais le roi, considérantl'importance de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de plusieurs autres villes de la province (1467), voulut en recouvrer la pos<strong>ses</strong>sion, <strong>et</strong> donna enéchange le <strong>du</strong>ché de Guyenne.Pendant l'année 1504, une épidémie terrible ravagea le Cotentin. <strong>Cherbourg</strong> ne fut pas épargné. La même calamité sereprésenta en 1517.Un grand nombre de rois ont visité <strong>Cherbourg</strong>. Le séjour que François I. er y fit en 1532, est celui que nos historiens ontdécrit le plus complaisamment. Ce prince, accompagné <strong>du</strong> dauphin <strong>et</strong> d'une partie de sa cour, arriva le 28 avril. Le clergé <strong>et</strong>les bourgeois le reçurent en une grande pompe à l'entrée de la ville ; étant descen<strong>du</strong> de cheval, il se plaça sous un dais desatin viol<strong>et</strong>, brodé d'or <strong>et</strong> semé des armes de la couronne, <strong>du</strong> dauphin, de la ville <strong>et</strong> de la province. Le cortége se mit enmarche au bruit de l'artillerie <strong>et</strong> des acclamations de la multitude ;[p. 29]toutes les rues qu'il traversa étaient ornées de tableaux, d'arcs de triomphe <strong>et</strong> jonchées de fleurs. Arrivé à l'église où un trôneavait été préparé, on chanta le Te Deum, <strong>et</strong> les ressorts <strong>du</strong> monument de l'Assomption furent mis en jeu. Le roi se renditensuite au château.En 1554, la peste affligea de <strong>nouveau</strong> les habitants de <strong>Cherbourg</strong>.Avant Charles IX, la milice bourgeoise était sous les ordres d'un seul chef, ce roi la divisa (1562) en quatre compagniesayant chacune un capitaine [4].C<strong>et</strong>te même année, les protestants de Basse-Normandie, soutenus par la reine Elisab<strong>et</strong>h, s'emparèrent d'un grandnombre de villes. Ils voulurent aussi se rendre maîtres de <strong>Cherbourg</strong> ; mais s'étant aperçus qu'il leur faudrait lutter longtemps,<strong>et</strong> peut-être inutilement, contre Jacques de Matignon, [5] qui était accouru au secours de la place, ils jugèrent prudentde se r<strong>et</strong>irer. Une nouvelle attaque, tentée quelques mois après par le <strong>du</strong>c de Bouillon, n'eut pas un meilleur succès.L'édit d'Amboise ren<strong>du</strong> le 19 mars 1563, sembla devoir rendre la paix à la Basse-Normandie ; cependant il n'en fut pasainsi, <strong>et</strong> dès la même année <strong>Cherbourg</strong> courut risque d'être surpris par les troupes d'un nommé Pierrepont. Matignon quiobservait ce[p. 30]gentilhomme, découvrit <strong>ses</strong> proj<strong>et</strong>s, l'attaqua à l'improviste, mit son parti en déroute, se saisit de sa personne <strong>et</strong> obtint de luid'importantes révélations.Les protestants levèrent de <strong>nouveau</strong> l'étendard de la révolte en 1574. Le comte de Montgommery débarqua à la Hougue,suivi de cinq à six mille Anglais, se joignit aux rebelles <strong>et</strong> prit successivement Carentan, Valognes, S.t-Lo <strong>et</strong> Domfront.Matignon, dont la sollicitude <strong>et</strong> la vigilance ne se démentaient pas, venait heureusement de faire réparer les fortifications de laville <strong>et</strong> <strong>du</strong> château de <strong>Cherbourg</strong> ; un bastion même avait été ajouté <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> nord, <strong>et</strong> lorsque Montgommery se présenta


devant la ville pour l'assiéger, il la trouva si bien fortifiée, que, dé<strong>ses</strong>pérant de pouvoir la ré<strong>du</strong>ire, il tourna <strong>ses</strong> vues d'un autrecôté.Jacques de Matignon remporta ensuite plusieurs autres victoires sur les protestants. C<strong>et</strong> homme illustre, qu'un de noshistoriens appelle dans son enthousiasme le plus grand héros de son siècle, mourut le 17 juill<strong>et</strong> 1597, âgé de 72 ans. Sesdescendants ont conservé jusqu'au milieu <strong>du</strong> dernier siècle la charge de gouverneur de <strong>Cherbourg</strong>.C<strong>et</strong>te ville refusa (1589) avec Caen <strong>et</strong> Dieppe, de prendre part aux guerres de la ligue ; elle fut aussi une des premières àreconnaître Henri IV.(1591) — Nous avons maintenant à parler d'un complot ourdi dans le plus grand secr<strong>et</strong>, <strong>et</strong> qu'un singulier hasard fitdécouvrir. Six cents révoltés sous les ordres[p. 31]de Dutourps, avaient formé le proj<strong>et</strong> de surprendre <strong>Cherbourg</strong> le dimanche des Rameaux, pendant l'heure des offices. Ilsarrivèrent à p<strong>et</strong>it bruit dans la forêt de Brix, où ils attendirent le moment d'agir. Avis fut donné <strong>du</strong> complot à M. de la Chaux-Montreuil, gouverneur, par une vieille femme qui, se trouvant dans la forêt à ramasser des bûch<strong>et</strong>tes, avait enten<strong>du</strong> l'entr<strong>et</strong>iende deux soldats. Les habitants se préparèrent aussitôt à combattre, <strong>et</strong> lorsque les ennemis se présentèrent, ils furentrepoussés <strong>et</strong> mis en déroute. Dutourps ayant été pris, on l'amena à <strong>Cherbourg</strong>, où son procès fut instruit. Déclaré coupablede haute trahison, il fut exécuté avec trois des principaux chefs <strong>du</strong> mouvement sur la place d'armes <strong>du</strong> château, <strong>et</strong> sa têteplacée au bout d'une pique, alla orner la porte Notre-Dame.La peste vint de <strong>nouveau</strong> (1594) j<strong>et</strong>er la consternation dans <strong>Cherbourg</strong>. Elle reparut en 1621 ; puis en 1623, apportée de laRochelle par un navire chargé de balles de coton. C'est pendant c<strong>et</strong>te dernière année que le seigneur de Tourlaville fitconstruire le couvent de Bénédictines dont on voit encore l'entrée principale rue au Fourdrey.Les troubles qui agitèrent la France pendant la minorité de Louis XIV se firent plus ou moins ressentir dans les différentesvilles de Normandie. Les habitants de Valognes ayant pris parti pour la Fronde, le comte de Matignon reçut l'ordre de marchercontre eux. Il arriva devant la ville le 20 mars 1649,[p. 32]avec une armée de six à huit mille hommes, <strong>et</strong> trois jours après, il fut rejoint par M. de Caillères [6], à la tête de la milice<strong>Cherbourg</strong>eoise. Les assiégés craignant les suites d'une résistance qui ne pouvait les sauver, demandèrent à entrer àcomposition.De jeunes français qui avaient appris à Venise le secr<strong>et</strong> de la fabrication des glaces, résolurent d'intro<strong>du</strong>ire en France, cegenre de travail. Ils vinrent s'établir dans la forêt de Tourlaville en 1666, <strong>et</strong> c'est à c<strong>et</strong>te époque que fut construite la célèbremanufacture royale qui n'a entièrement cessé d'être en activité que depuis une vingtaine d'années. Les vastes bâtimentscomposant l'établissement, ont été ven<strong>du</strong>s en 1834 à divers propriétaires qui se sont empressés de les faire abattre. Lesquelques débris encore existants, ne tarderont pas à disparaître <strong>du</strong> sol.Louis XIV ayant proj<strong>et</strong>é de faire construire un port à <strong>Cherbourg</strong>, y envoya Vauban. Le savant maréchal remplit sa mission,<strong>et</strong> traça les plans de nouvelles fortifications qui furent commencées en 1688, puis détruites l'année suivante. On démolitégalement le château <strong>et</strong> les anciennes fortifications [7].Jacques II, roi d'Angl<strong>et</strong>erre, chassé de <strong>ses</strong> états, arriva à <strong>Cherbourg</strong> en 1688. Après y être resté huit jours, il partit pourParis. Quatre ans plus tard, Louis XIV[p. 33]ayant mis seize mille hommes à sa disposition, il entreprit de remonter sur le trône <strong>et</strong> se rendit à la Hougue, où devait venir leprendre l'escadre commandée par l'amiral de Tourville. C<strong>et</strong>te flotte, composée de 44 vaisseaux de guerre, fit rencontre (1692)entre Barfleur <strong>et</strong> l'île de Wight des flottes combinées de l'Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> de la Hollande, fortes de quatre-vingt-quatre vaisseauxde premier rang. Le combat s'engagea dans la matinée <strong>du</strong> 29 mai <strong>et</strong> <strong>du</strong>ra trois heures d'abord. Interrompu par un épaisbrouillard, il recommença sur les 5 heures <strong>et</strong> continua jusqu'à la nuit. L'amiral de Tourville avait eu le dessus, mais plusieursde <strong>ses</strong> vaisseaux s'étant malheureusement écartés pendant l'obscurité, il se trouva trop faible le lendemain <strong>et</strong> fut forcé de ser<strong>et</strong>irer. Vingt-neuf vaisseaux parvinrent à doubler le cap de la Hague <strong>et</strong> atteignirent les ports de Brest ou de Saint-Malo ;douze se réfugièrent à la Hougue, <strong>et</strong> trois autres dans la baie de <strong>Cherbourg</strong>. L'ennemi dé<strong>ses</strong>pérant de s'emparer de ces troisvaisseaux, [8] vaillamment soutenus par le canon <strong>et</strong> la mousqu<strong>et</strong>erie des habitants, les fit sauter à l'aide de brûlots. Ceux dela Hougue eurent le même sort.


La flotte anglaise qui bombarda Dieppe <strong>et</strong> le Havre en 1694, arriva devant <strong>Cherbourg</strong> au commencement <strong>du</strong> mois d'août <strong>et</strong>reprit le large après quelques[p. 34]démonstrations hostiles. Elle reparut l'année suivante <strong>et</strong> se borna également à quelques manoeuvres.La paix conclue en 1697 avait été de <strong>nouveau</strong> rompue en 1701, <strong>et</strong> vers la fin <strong>du</strong> mois d'août 1708 les Anglais tentèrent unedescente que la bonne contenance des habitants les empêcha d'effectuer.(1709) — Un convoi de plus de 150 bâtiments chargés de blé, se voyant poursuivi par une flotte anglaise, chercha unrefuge dans l'anse de <strong>Cherbourg</strong>. Il y resta plus d'une année, les navires ennemis n'ayant cessé de croiser à peu de distance.Le proj<strong>et</strong> de Vauban était abandonné depuis longtemps ; l'ingénieur en chef de Caux n'épargna aucune démarche pour yfaire donner un commencement d'exécution, en ce qui touchait la partie maritime. Les travaux à faire comprenaient lecreusement d'un port, la construction de deux j<strong>et</strong>ées, des murs de quai, d'une écluse, d'un pont-tournant <strong>et</strong> d'une chaussée.On passa l'adjudication moyennant 560,000 livres, <strong>et</strong> les travaux, entrepris en 1739, furent achevés en 1742.L'année 1755 donna naissance à l'académie de <strong>Cherbourg</strong> ; c<strong>et</strong>te société, approuvée par le gouvernement en 1775 <strong>et</strong>encore existante, a publié plusieurs volumes de mémoires [9].[p. 35]Un des événemens les plus déplorables de notre histoire est la descente des Anglais en 1758. Dans la crainte d'undébarquement on avait établi des lignes à l'est <strong>et</strong> à l'ouest de la ville, <strong>et</strong> plusieurs milliers d'hommes, sous le commandement<strong>du</strong> maréchal-de-camp, comte de Rémond, campaient au Mont-Epingu<strong>et</strong>. C<strong>et</strong>te crainte n'était que trop fondée ; le 2 juin unpavillon rouge, surmonté d'une flamme blanche, signala <strong>du</strong> haut de la montagne <strong>du</strong> Roule l'arrivée d'une flotte ennemie. Ellese montra à la pointe de Querqueville, <strong>et</strong> comme l'alarme s'était déjà répan<strong>du</strong>e parmi les habitants, elle continua sa route <strong>et</strong>se dirigea vers St-Malo.C<strong>et</strong>te flotte qu'on sut depuis se composer de plus de 120 voiles, reparut à la pointe de la Hague le 24 juin, <strong>et</strong> vint mouillersur la rade en face de <strong>Cherbourg</strong>. Le vent ayant contrarié le débarquement qui devait avoir lieu le trente, l'escadre remit à lavoile <strong>et</strong> cingla vers l'Angl<strong>et</strong>erre.Le 5 août de la même année une nouvelle flotte, forte d'environ 100 voiles, j<strong>et</strong>a l'ancre devant <strong>Cherbourg</strong>. Nousempruntons les détails suivants au journal de Voisin-la-Hougue, témoin oculaire.[p. 36]« La nuit suivante, deux galiotes se sont approchées de la rade <strong>et</strong> ont j<strong>et</strong>é environ 30 bombes qui n'ont causé aucun dommage.Le lendemain, lundi 7, à dix heures <strong>du</strong> matin, ce bombardement a cessé, soit que les galiotes n'osassent approcher de plus près, soit autrement.Cependant elles n'avaient rien à craindre, car le comte de Rémond qui commande ici avait déjà donné ordre de ne point tirer, <strong>et</strong> même fait enclouerune partie des canons ; si on a tiré quelques coups, c'était contre son ordre.On ne comprend rien à l'ordre de ce commandant ; il faut absolument qu'il ait quelque ordre secr<strong>et</strong> d'abandonner <strong>Cherbourg</strong> aux ennemis, ou quela tête lui ait tourné ; il a même fait démolir, dès le samedi 5, les fours où l'on cuisait le pain des troupes ; c'était justement le temps où l'on en avait leplus besoin.A midi, toute la flotte ennemie s'est portée sur le travers de Nacqueville <strong>et</strong> d'Urville, <strong>et</strong> à deux heures après midi, trois galiotes à bombes <strong>et</strong> environ20 navires de guerre se sont mis à travers <strong>et</strong> ont fait un feu terrible de leur artillerie sur la côte, tirant par volée, de minute en minute, au moins 4 à 5cents coups de canon tout d'un coup. Pendant ce temps, le comte de Rémond avec le régiment de Languedoc dragons, un escadron, le régimentd'Horion, deux bataillons, celui de Lorraine, un bataillon, <strong>et</strong> celui de Clare, un bataillon, avec 3,800 détachés, <strong>et</strong> derrière lui tous les habitants desparois<strong>ses</strong> circonvoisines qui avaient pris les armes <strong>et</strong> bien résolus de défendre leur pain, a voulu passer, ou <strong>du</strong> moins fait feinte de passer le travers <strong>du</strong>feu des ennemis, pour s'opposer à leur descente qu'ils faisaient un peu plus loin, en un lieu nommé Landemer, à la faveur de leur feu ; <strong>et</strong>, comme cepassage n'était pas possible à moins qu'on n'eût voulu exposer toutes ces troupes à une destruction totale, M. de Rémond s'est r<strong>et</strong>iré après avoirper<strong>du</strong> M. de Macarty, [10] capitaine au régiment de Clare, qui a été tué d'un boul<strong>et</strong> de[p. 37]canon, ainsi que quelques soldats <strong>et</strong> détachés. S'il avait fait un détour pour prendre les hauteurs, il aurait tombé sur l'ennemi qu'il aurait défaitcertainement ; mais il ne l'a pas voulu, ce qui fait croire qu'il y a <strong>du</strong> mystère dans sa con<strong>du</strong>ite ; ainsi il s'est r<strong>et</strong>iré, <strong>et</strong> les ennemis ont descen<strong>du</strong> en troiscolonnes au nombre d'environ 7,000 hommes <strong>et</strong> 600 chevaux, <strong>et</strong> se sont formés en corps sur la paroisse d'Urville où ils ont passé la nuit.


Le lendemain matin, mardi 3, comme on s'attendait encore que le comte de Rémond se déciderait à prendre les hauteurs pour attaquer l'ennemi,on pensait qu'il rassemblerait <strong>ses</strong> troupes ; au contraire ils les a divisées par détachements qu'il a envoyés dans les campagnes pour couper lespassages ; il en a été même un détachement de 600 hommes jusqu'à Martinvast, qui ont rompu le pont qui était sur la Div<strong>et</strong>te, comme si les ennemisavaient eu besoin de passer la Div<strong>et</strong>te pour venir d'Urville à <strong>Cherbourg</strong>. Ensuite il a fait enclouer le reste des canons <strong>et</strong> mortiers, <strong>et</strong> fait j<strong>et</strong>er lesbombes, gargous<strong>ses</strong> <strong>et</strong> poudres qui étaient sur les forts à la mer, puis il s'est sauvé à Valognes <strong>et</strong> a abandonné la ville à la merci des ennemis, sanss'embarrasser d'enlever seulement l'artillerie de fonte, ni les poudres de magasin, quoiqu'il y eût des charr<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> des chevaux plus qu'il n'en fallait.Nos troupes se voyant sans chef sont allées camper au mont Epingu<strong>et</strong> avec un chagrin extrême de n'avoir pas combattu ; quelque temps après, M.le maréchal de Luxembourg, M. le <strong>du</strong>c d'Harcourt, M. de Co<strong>et</strong>logon <strong>et</strong> plusieurs autres lieutenants généraux se sont aussi ren<strong>du</strong>s au camp <strong>du</strong> montEpingu<strong>et</strong>, lequel s'est trouvé fort de 16 ou 17 mille hommes ; cependant ces messieurs n'ont pas trouvé à propos d'attaquer l'ennemi qui n'était fort quede 7 mille hommes.Le même jour, sur les six heures <strong>du</strong> soir, un détachement de 3 à 4 cents hommes des ennemis, tant cavalerie qu'infanterie, s'étant acheminé vers<strong>Cherbourg</strong>, la bourgeoisie s'est trouvée obligée d'aller au-devant, ainsi que M. Paris, curé : quelques autres prêtres, les maire, échevins <strong>et</strong> autresprincipaux bourgeois, ont été avec un drapeau blanc jusqu'au lieu nommé Chantereyne, pour prier le commandant de donner[p. 38]ordre qu'il ne soit fait aucune insulte ni dommage aux bourgeois, <strong>et</strong> qu'il fasse garder à <strong>ses</strong> troupes une exacte discipline, ce qu'il a promis, <strong>et</strong> a publiéun manifeste de la part <strong>du</strong> général Blygh.Du nombre de ce détachement, une partie a passé la nuit sur la place d'Armes, <strong>et</strong> l'autre partie s'est emparée des corps-de-garde.Le lendemain, mercredi 9, le reste des troupes ennemies est venu camper sur deux lignes depuis les Fourches patibulaires jusqu'à l'Abbaye ;ensuite elles se sont emparées de tous les forts <strong>et</strong> y ont mis des gardes ; elles ont aussi posé un détachement de 4 à 5 cents hommes sur la montagne<strong>du</strong> Roule, <strong>et</strong> un autre sur la lande d'Octeville ; pour garder toutes les avenues.Ainsi les ennemis étant entièrement maîtres de <strong>Cherbourg</strong>, ont démoli <strong>et</strong> renversé à forces de mines tous les travaux <strong>du</strong> roi, savoir : les j<strong>et</strong>ées, lesquais <strong>et</strong> les forts ; brûlé le pont tournant, les portes <strong>du</strong> bassin, l'écluse <strong>et</strong> environ 37 navires, sans compter les bateaux de pêche <strong>et</strong> chaloupes, avectous les gréements, bois de construction, <strong>et</strong> généralement tout ce qui servait à la marine, qu'ils ont même fait tirer des magasins. Ils se servaient pourleurs mines de la poudre que le comte de Rémond leur avait laissée dans la Tour des Sarrasins.Pendant c<strong>et</strong>te destruction, les maraudeurs à deux lieues à la ronde ont commis toutes sortes d'excès, violé, pillé, profané <strong>et</strong> enlevé les va<strong>ses</strong>sacrés des église, les ornements, titres <strong>et</strong> papiers, <strong>et</strong> vidé généralement toutes les maisons de tous meubles morts <strong>et</strong> vifs, <strong>et</strong> enlevé jusqu'aux bois desportes <strong>et</strong> fenêtres, même des planchers <strong>et</strong> couvertures, coupé quantité de jeunes arbres, <strong>et</strong> détruit les blés aux endroits où ils ont passé.Plusieurs maisons des faubourgs ont aussi essuyé le pillage, <strong>et</strong> une grande partie des eff<strong>et</strong>s, meubles, linges <strong>et</strong> hardes des bourgeois, qu'ilsavaient fait transporter dans les parois<strong>ses</strong> voisines, de crainte <strong>du</strong> bombardement, a été totalement enlevée.Au surplus, le général anglais <strong>et</strong> autres officiers exigeaient <strong>du</strong> corps de ville à tous moments des cho<strong>ses</strong> inouïes <strong>et</strong> la plupart[p. 39]impossibles à trouver, comme vins, liqueurs, sucre, boeufs, moutons, volailles, <strong>et</strong>c, <strong>et</strong>, sur le moindre refus, ils menaçaient de m<strong>et</strong>tre la ville au pillage<strong>et</strong> de la brûler.Le général Blygh a exigé de la ville une contribution de 44,000 livres, à quoi se sont trouvé monter les rôles annuels de la capitation, 20. e deniers,in<strong>du</strong>strie, de la romaine <strong>et</strong> des aides ; on lui a payé la moitié comptant, <strong>et</strong> donné deux otages pour l'autre moitié, savoir : un fils pour M. Duval Postel <strong>et</strong>le sieur Gauvain.Le général de l'artillerie a fait enlever toutes les cloches de l'abbaye au nombre de quatre. Il voulait aussi faire enlever celle de notre église ; maisaux instantes prières de M. le curé <strong>et</strong> de M. <strong>du</strong> Sauvage, il s'est contenté de la plus p<strong>et</strong>ite pesant 700 livres.Le général Blygh a aussi fait enlever toute l'artillerie de fonte se consistant en deux mortiers <strong>et</strong> 21 pièces de canon depuis 8 livres de balles jusqu'à14 livres, <strong>et</strong> fait rompre les tourillons <strong>et</strong> boutons d'acul de toutes les pièces de fer <strong>et</strong> les an<strong>ses</strong> des mortiers.Les ennemis avaient déjà commencé à miner les deux tours, savoir : la tour qui est auprès de l'église <strong>et</strong> celle qu'on appelle des Sarrasins ; mais, àl'instante prière de MM. le curé <strong>et</strong> <strong>du</strong> Sauvage, il les ont laissées sur pied, vu que l'une aurait sans doute sauté sur l'église <strong>et</strong> l'autre renversé plusieursmaisons.Ils ont emmené trois pri<strong>ses</strong>, savoir : la 12. e dans laquelle ils ont embarqué nos canons <strong>et</strong> mortiers de fonte, la 30. e <strong>et</strong> la 33. e marquées ci-devant.On estime la perte que le roi a faite à <strong>Cherbourg</strong>, tant par la destruction que l'enlèvement de l'artillerie, à deux millions <strong>et</strong> demi, <strong>et</strong> pour lesbourgeois à sept cent mille livres.


Pendant tous ces ravages faits à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> même dès l'approche des ennemis, le tiers au moins des habitants ont pris la fuite à notre camp <strong>et</strong>dans les parois<strong>ses</strong> voisines, sans savoir pour la plupart où tendaient leurs pas, ré<strong>du</strong>its à coucher dans des granges, des cours ou des fossés,manquant <strong>du</strong> nécessaire, en sorte que plusieurs sont morts de peur, de fatigues,[p. 40]<strong>et</strong> d'échauffures ; si tout ce monde fugitif avait resté chacun dans sa maison comme les autres, il ne leur aurait arrivé aucun mal, <strong>et</strong> même plusieursauraient empêché leur maison d'être pillée, parceque dès qu'on avait recours aux officiers anglais où à la garde, ils y m<strong>et</strong>taient ordre.La nuit <strong>du</strong> 15 au 16 <strong>et</strong> le matin <strong>du</strong> 16, les Anglais se sont rembarqués au Galley avec précipitation ; on attribue ce rembarquement précipité au bruitqui se répandit, le 15, chez M. de Lorimier où logeait le général, que la maison <strong>du</strong> roi était à Valognes. La chose est assez vraisemblable, parce qu'ona trouvé sur le fort de Longl<strong>et</strong> deux trous de mines <strong>et</strong> deux barriques de poudre auprès, pour miner ce fort, lequel par conséquent ne l'a point été, <strong>et</strong> lefort <strong>du</strong> Galley n'a aussi été miné qu'en partie.Le vendredi 18, les ennemis ont mis à la voile faisant route pour Saint-Malo.Les Anglais estiment leurs pertes à l'expédition de <strong>Cherbourg</strong> à 712 hommes, tant maraudeurs tués, prisonniers de guerre, que déserteurs.Depuis c<strong>et</strong>te funeste révolution, la garde bourgeoise a été interrompue d'autant plus que les Anglais ont enlevé les armes des bourgeois, déposéesà la maison-de-ville : ils ont pareillement enlevé les drapeaux <strong>et</strong> les tambours. »Nous n'ajouterons rien aux faits consignés dans le journal de Voisin-la-Hougue. Il serait d'ailleurs fort difficile d'expliquerles vrais motifs qui déterminèrent le comte de Rémond à abandonner <strong>Cherbourg</strong>. Agissait-il en vertu d'ordres secr<strong>et</strong>s, ou safuite n'était-elle que le résultat de la plus honteuse couardise ? c'est une question qu'il ne sera peut-être pas même donné àl'avenir de résoudre. Toujours est-il que l'occupation de la ville par les Anglais plongea les habitants dans un état de misèredont ils furent plusieurs années sans pouvoir se relever.Les travaux <strong>du</strong> reconstruction <strong>du</strong> port <strong>du</strong> commerce,commencés en 1766, ne furent achevés qu'en 1775.[p. 41]Un arrêt <strong>du</strong> 12 octobre 1774 supprima l'abbaye de <strong>Cherbourg</strong> ; les religieux l'évacuèrent l'année suivante.Les États-Unis venaient d'arborer le drapeau de l'indépendance, <strong>et</strong> la France qui déjà sentait sourdre en elle le libéralismede 89, s'était associée au soulèvement de la nation américaine. La paix fut encore une fois rompue avec la Grande-Br<strong>et</strong>agne.En 1778, deux vaisseaux anglais s'avancèrent jusque dans la rade de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> donnèrent la chasse aux navires <strong>du</strong>commerce qui s'y trouvaient mouillés. Plusieurs de ces derniers même ne <strong>du</strong>rent leur salut qu'à la promptitude avec laquelleils coupèrent leurs câbles. L'année suivante le cutter le Tourlourou fut également poursuivi à coups de canon presque jusqu'àl'entrée <strong>du</strong> port ; quelques boul<strong>et</strong>s endommagèrent des maisons de la ville.<strong>Cherbourg</strong> ayant été choisi préférablement à la Hougue, pour fonder un grand établissement maritime sur la Manche, onentreprit, en 1779, les travaux de construction des forts de l'Ile-Pelée <strong>et</strong> <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>. On résolut également de fermer la radepar une digue <strong>et</strong> un premier cône fut échoué le 6 juin 1784.Louis XVI avait à coeur l'avancement des travaux de la rade ; il envoya son frère, le comte d'Artois, les inspecter. Ceprince arriva le 22 mai 1786 <strong>et</strong> resta[p. 42]trois jours à <strong>Cherbourg</strong>. Le roi y vint lui-même un mois après (22 juin). Il fut reçu au-delà <strong>du</strong> pont-tournant par le clergé, lesautorités civiles <strong>et</strong> militaires <strong>et</strong> se rendit à l'abbaye, résidence <strong>du</strong> gouverneur, où un logement lui avait été préparé. Lelendemain il se leva de grand matin, entendit la messe, se fit con<strong>du</strong>ire sur les travaux, s'embarqua pour la Digue, traversa larade au bruit de l'artillerie de toute une escadre, fut témoin de l'immersion d'un cône <strong>et</strong> dîna sur un autre cône coulé dix joursauparavant. La journée se termina par une visite au fort de l'Ile-Pelée.Le 24, Louis se rendit à bord <strong>du</strong> Patriote, vaisseau amiral, <strong>et</strong> y dîna. Ensuite il gagna le large, suivi de la flotte qui exécutadevant lui les manoeuvres d'un combat naval. A son r<strong>et</strong>our par l'anse d'Urville, il se fit expliquer les opérations de l'arméeanglaise lors <strong>du</strong> débarquement en 1758.Le 25, la journée fut employée à visiter le fort <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>, la redoute de Querqueville <strong>et</strong> les divers établissements <strong>du</strong> port.


Le roi quitta <strong>Cherbourg</strong> le 26 à cinq heures <strong>du</strong> matin.Une grande secousse allait ébranler la France, <strong>et</strong> par contre-coup l'Europe, le monde entier. Les vieilles institutionscroulaient de toutes parts, <strong>et</strong> la société marchait à pas de géant dans une voie nouvelle. La royauté eut peur ; elle voulutétendre la main pour arrêter ces trente millions d'hommes qu'une puissance invisible poussait en avant ; elle[p. 43]se cramponna au passé, vains efforts !... Le terrain fuit sous <strong>ses</strong> pieds, elle resta suspen<strong>du</strong>e sur le vide. A la vue de l'abîme levertige la prit ; elle ferma les yeux <strong>et</strong> se laissa choir. — Paris était bien le centre <strong>du</strong> mouvement, le foyer <strong>du</strong> libéralisme ; maisla grande voix des philosophes avait r<strong>et</strong>enti jusqu'au fond des provinces les plus éloignées ; les intelligences s'étaientéclairées ; les croyances religieu<strong>ses</strong> n'excitaient plus que le rire ; les dîmes, les priviléges <strong>et</strong> les droits seigneuriauxsoulevaient partout l'indignation. Dix-huit siècles d'exactions <strong>et</strong> de tyrannies avaient amassé <strong>du</strong> fiel dans toutes les ames, lacolère gonflait toutes les poitrines ; aussi lorsque le premier cri de liberté se fit entendre, fut-il répété d'une extrémité à l'autre<strong>du</strong> royaume. On s'associa à l'action révolutionnaire : on se disposa à la soutenir ; les idées nouvelles inspiraient un vraifanatisme, <strong>et</strong> trop souvent le peuple, qui ne voit qu'à la surface, fut entraîné à des excès que tout honnête homme, quellesque soient <strong>ses</strong> convictions, flétrit d'un blâme énergique.<strong>Cherbourg</strong> ne regarda point d'un oeil indifférent les grandes cho<strong>ses</strong> <strong>et</strong> les grands événements qui s'accomplissaient enFrance. Chaque fois qu'une nouvelle importante arrivait, la majeure partie de la population était en mouvement. On seréunissait en groupes, on discourait, les esprits s'exaltaient ; mais <strong>du</strong> plus rare si l'on en vint à ces extrémités fâcheu<strong>ses</strong>, quiailleurs firent couler tant de sang. La prise de la Bastillesurtout, causa un véritable enthousiasme.[p. 44]Le 18 juill<strong>et</strong> 1789, l'ordre fut donné aux habitants de porter la cocarde tricolore. Ils s'empressèrent d'obtempérer à c<strong>et</strong>ordre, <strong>et</strong> les rubans étant venus à manquer, on fabriqua d'immen<strong>ses</strong> cocardes avec <strong>du</strong> papier peint. La journée <strong>du</strong> lendemainse passa paisiblement ; il n'en fut pas de même le surlendemain. Dans la matinée, les ouvriers, alors fort nombreux à<strong>Cherbourg</strong>, s'assemblèrent sur la place d'Armes, se présentèrent en masse devant le colonel <strong>du</strong> régiment de la Reine <strong>et</strong>exigèrent de c<strong>et</strong> officier la mise en liberté d'un sapeur, scieur de long, détenu au Fort-Royal pour insubordination. Ce ne fut làque le prélude des scènes désordonnées qui suivirent <strong>et</strong> qui <strong>du</strong>rèrent toute la nuit. Sur les huit heures <strong>du</strong> soir, hôtel de M. deGaranteau [11], subdélégué de l'intendant, fut forcé : les meubles furent brisés <strong>et</strong> précipités dans le puits. — L'habitation deM. Avoyne Chantereyne, négociant, subit le même sort. — M. Vitrel, fabricant de draps, n'échappa que par l'intervention del'abbé Vitrel, son parent. — De là les factieux se transportèrent chez M. Mauger, négociant, où la dévastation fut complète. —M. Dulongprey Couey prodigua le vin <strong>et</strong> l'or pour les calmer. — Madame Audry, directrice des messageries, eut recours aumême moyen. — Ensuite les bureaux de la douane[p. 45]furent envahis, les papiers <strong>et</strong> les registres lacérés <strong>et</strong> j<strong>et</strong>és dans le bassin <strong>du</strong> commerce.La ville avait été dans l'agitation toute la nuit. Au point <strong>du</strong> jour les torches qui éclairaient la populace s'éteignirent, le pillagecessa <strong>et</strong> chacun rentra chez soi. Il eût été facile à l'autorité d'empêcher ces désordres, de faire arrêter les dévastateurs ; ellesembla au contraire les prendre sous sa protection <strong>et</strong> elle les fit accompagner par un piqu<strong>et</strong> en armes <strong>du</strong> régiment de laReine. Le 21 cependant, trois cents des plus mutins furent arrêtés <strong>et</strong> incarcérés. Peu de jours après on en pendit deux, septautres furent fou<strong>et</strong>tés à tous les coins des rues <strong>et</strong> le reste recouvra la liberté.Quelques précautions furent pri<strong>ses</strong> pour prévenir le r<strong>et</strong>our des troubles, mais la tranquillité ne fut pas ren<strong>du</strong>e auxhabitants. La plupart étaient en proie à des craintes continuelles, <strong>et</strong> moins d'un mois après l'émeute, une fausse nouvelleplongea tout-à-coup la ville dans la consternation <strong>et</strong> l'épouvante. Le bruit se répandit que les Caenais étaient en marche sur<strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> qu'ils venaient tout piller <strong>et</strong> massacrer. C'était précisément jour de marché ; on ferma les boutiques, les ruesdevinrent désertes, <strong>et</strong> les bourgeois se barricadèrent dans leurs maisons. On a accusé Dumouriez, alors simple commandantde la ville, d'avoir excité c<strong>et</strong>te panique : son but aurait, dit-on, été d'éloigner le <strong>du</strong>c d'Harcourt, gouverneur de la Normandie, <strong>et</strong>le <strong>du</strong>c de Beuvron, lieutenant[p. 46]général de la Province, qui contrariaient son ambition. L'effroi gagna en eff<strong>et</strong> fort promptement ces messieurs <strong>et</strong> ils n'eurentrien de plus pressé que de faire leurs paqu<strong>et</strong>s <strong>et</strong> de s'embarquer pour l'Angl<strong>et</strong>erre.


<strong>Cherbourg</strong> comme la plupart des villes de France eut son club, composé d'une trentaine de sans-culottes, dont les idéesétaient aussi exagérées que ridicules. Un seul discours remarquable y fut prononcé, le 7 avril 1791, par M. Jubé, inspecteurdes côtes de la Manche, à l'occasion de la mort de Mirabeau.Garnier-de-Saintes <strong>et</strong> Lecarpentier, commissaires en tournée dans le département de la Manche, vinrent dans nos murs àla fin de septembre 1793. Ils destituèrent plusieurs fonctionnaires <strong>et</strong> firent emprisonner ou tra<strong>du</strong>ire devant le tribunalrévolutionnaire quelques personnes déclarées suspectes.Presque tous les ecclésiastiques attachés à <strong>Cherbourg</strong> avaient émigré lors de la promulgation de la constitution civile <strong>du</strong>clergé. Le représentant <strong>du</strong> peuple Bour<strong>et</strong> (des Bas<strong>ses</strong>-Alpes), arriva au mois de janvier 1794, <strong>et</strong> donna l'ordre (30 nivose anII) de dévaster l'église. Les draperies, les ornements, les tableaux furent mis en pièces ; on brisa les orgues, lesconfessionnaux, les autels, les statues, les sculptures, <strong>et</strong> ce que le vandalisme ne put mutiler ou détruire ce jour là, fut détruitles jours suivants par le marteau des maçons.On sait combien les fêtes de la révolution étaient[p. 47]imposantes <strong>et</strong> agissaient puissamment sur l'imagination. <strong>Cherbourg</strong> en célébra quelques-unes avec grande pompe. Nousciterons entr'autres la fête anniversaire de la prise de la Bastille (14 juill<strong>et</strong> 1790) ; la fête de l'Etre-Suprême (8 juin 1794), <strong>et</strong> lafête en l'honneur des héros morts au siège de Granville. C<strong>et</strong>te dernière solennité fut vraiment belle <strong>et</strong> digne <strong>du</strong> motif qui l'avaitinspirée (10 juill<strong>et</strong> 1794). Le proconsul Lecarpentier [12] y assista <strong>et</strong> prononça un discours, dont la violence n'était passeulement dans les habitudes <strong>du</strong> fougueux terroriste, mais encore dans presque tous les écrits politiques de l'époque.Pendant les dernières années de la révolution, plusieurs condamnés politiques furent amenés à <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> enfermés auFort-Royal.Le déplorable état des Finances avait forcé d'interrompre les travaux de la rade. On les reprit en octobre 1802. L'annéesuivante, les consuls décrétèrent qu'un port militaire de 1 re classe serait établi à <strong>Cherbourg</strong>. Les ouvrages furent aussitôtentrepris. (15 avril 1803). Une frégate anglaise de 44 canons, la Minerve, s'étant avancée par bravade jusqu'à la portée desforts, s'échoua sur le talus nord de la Digue ; <strong>et</strong> dans l'impossibilité de se rem<strong>et</strong>tre à flot, amena son pavillon.(12 février 1808). Horrible tempête qui bouleversa la Digue.[p. 48](1809). Huit mille prisonniers espagnols furent dirigés sur <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> employés aux divers travaux <strong>du</strong> port militaire. On ytransféra également deux cents forçats qui y restèrent jusqu'à la restauration.Le 15 août 1810, jour de la fête de l'empereur, fut un jour d'anxiété <strong>et</strong> de désolation pour bien des familles. Entr'autresréjouissances, le programme avait annoncé qu'une joûte aurait lieu dans le bassin de commerce. A l'heure indiquée unemultitude de monde encombrait les alentours, <strong>et</strong> plusieurs centaines de curieux avaient pris place à bord d'un navire à lége,qu'une simple amarre r<strong>et</strong>enait au quai ; au signal donné pour le départ des nageurs, il se fit un mouvement : chacun sepencha sur son voisin pour mieux voir ; l'amarre se rompit <strong>et</strong> le navire chavira. Un assez grand nombre de canots s<strong>et</strong>rouvaient heureusement non loin de là, <strong>et</strong> la plupart des naufragés purent être recueillis. En quelques instants laconsternation s'était répan<strong>du</strong>e dans la ville : la soeur craignait pour son frère, l'épouse pour son époux, la mère pour son fils,<strong>et</strong> c'était par les rues une foule de femmes éplorées, demandant leurs proches aux passants. On assécha le bassin, <strong>et</strong> lescadavres furent r<strong>et</strong>irés de l'eau ; plus de vingt personnes avaient per<strong>du</strong> la vie ! Le lendemain, la population en deuil suivit leconvoi[p. 49]jusqu'au cim<strong>et</strong>ière ; il y avait des larmes dans tous les yeux, des sanglots dans toutes les poitrines.Les travaux <strong>du</strong> Port-Militaire avançaient avec une rapidité qu'on pourrait appeler napoléonienne. L'empereur, accompagnéde l'impératrice <strong>et</strong> d'une suite nombreuse, vint les visiter en 1811. Il arriva le 26 mai sur les quatre heures de l'après-midi, <strong>et</strong>fut reçu par les autorités civiles <strong>et</strong> militaires. M. Delaville, maire, lui présenta les clés <strong>et</strong> dit ces seules paroles qui noussemblent d'une belle simplicité :« Sire,Nous avons l'honneur de présenter à Votre Majesté les clés de la ville de <strong>Cherbourg</strong>.


Nous vous recevrons mal, mais nous vous aimons bien, <strong>et</strong> nous venons vous le dire. »Napoléon fit son entrée au bruit des cloches <strong>et</strong> de l'artillerie. Sans prendre un instant de repos, il se rendit au Port-Militaire,s'embarqua avec son cortége <strong>et</strong> visita la Digue <strong>et</strong> les forts.Le 27, il se leva à cinq heures <strong>du</strong> matin, parcourut le tracé de l'enceinte fortifiée, le chantier des constructions navales, allasur les hauteurs qui dominent le port <strong>et</strong> la rade, détermina l'emplacement que plusieurs redoutes devaient occuper, <strong>et</strong>examina en détail l'arsenal de la marine <strong>et</strong> le port de commerce. Dans l'après-midi, l'empereur <strong>et</strong> l'impératrice se rendirent àbord de l'escadre mouillée sur la rade. Napoléon signa sur la culasse d'un canon le brev<strong>et</strong>qui élevait au grade d'officier général le capitaine Troude.[p. 50]L'examen des proj<strong>et</strong>s <strong>du</strong> port <strong>et</strong> des fortifications prit la journée <strong>du</strong> 28. Le 29, l'empereur monta à cheval de grand matin <strong>et</strong>visita de <strong>nouveau</strong> les chantiers, les cales <strong>et</strong> les hauteurs ; ensuite il passa en revue le 5 e . régiment d'infanterie de ligne dansla cour de la caserne de la marine.Le 30, il r<strong>et</strong>ourna à bord des navires mouillés sur la rade, se fit rejoindre par l'impératrice <strong>et</strong> déjeûna sur la Digue. Le vents'étant un peu élevé, la division <strong>du</strong> contre-amiral Troude put exécuter diver<strong>ses</strong> manoeuvres.A une heure de l'après-midi, l'empereur <strong>et</strong> l'impératrice montèrent dans leurs voitures <strong>et</strong> quittèrent la ville au bruit dessalves de l'artillerie.(25 août 1813). Deux ans après, à la même époque, l'impératrice revint à <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> assista à l'immersion de l'avantport,dont le creusement était terminé.L'empereur avait abdiqué à Fontainebleau le 11 avril 1814. Le <strong>du</strong>c de Berry, qui alors se trouvait à l'île de Jersey, vintdébarquer à <strong>Cherbourg</strong> (13 avril), <strong>et</strong> partit le lendemain pour Paris. Les autorités se montrèrent fort empressées, <strong>et</strong> ce fut pourperpétuer le souvenir <strong>du</strong> passage <strong>du</strong> prince qu'on éleva l'obélisque de la place d'Armes.Neuf mille hommes de la garde russe arrivèrent à <strong>Cherbourg</strong> le 20 juin 1814, <strong>et</strong> s'y embarquèrent[p. 51]5 jours après. L'année suivante, à l'époque de la seconde restauration, 15,000 prussiens, également nos alliés, seprésentèrent devant la ville, <strong>et</strong>, comme on refusait de les y laisser entrer, ils en firent le blocus qui <strong>du</strong>ra plus de quarantejours.C'est au général Proteau que les <strong>Cherbourg</strong>eois doivent de ne pas avoir hébergé ces incommodes amis. Du reste on s<strong>et</strong>int de part <strong>et</strong> d'autre dans une sage réserve, <strong>et</strong> pas un coup de fusil ne fut tiré.Le <strong>du</strong>c d'Angoulème visita la ville en octobre 1817. Les travaux de la Digue étaient abandonnés, <strong>et</strong> ceux <strong>du</strong> portn'occupaient plus qu'un p<strong>et</strong>it nombre de personnes.Des missionnaires, au nombre de huit, arrivèrent à <strong>Cherbourg</strong> dans les derniers jours de décembre 1820. La missioncommença le 1. er janvier 1821 <strong>et</strong> finit le 18 février. Les humbles prêtres furent entourés d'hommages <strong>et</strong> de respects : on lescaressa, on les choya, on les encensa, <strong>et</strong> pour complaire à ces pieux dispensateurs d'emplois <strong>et</strong> autres faveurs temporelles,nos hommes en place ne reculèrent devant aucune turpitude, devant aucune momerie. — La plantation <strong>du</strong> calvaire avait eulieu le 16 février.(10 septembre 1827). Voyage de madame la <strong>du</strong>chesse d'Angoulème à <strong>Cherbourg</strong>.(1829). — Un bassin avait été creusé à la suite de l'avant-port. L'immersion fut opérée en présence <strong>du</strong> dauphin, <strong>et</strong> réussitparfaitement. Le prince était[p. 52]arrivé le 24 août ; il repartit le 28 à 7 heures <strong>et</strong> demie <strong>du</strong> matin.


Les bandes d'incendiaires, qu'une politique infernale avait lâchées sur la Basse-Normandie, s'approchèrent de <strong>Cherbourg</strong>dans les premiers mois de 1830, <strong>et</strong> brûlèrent plusieurs maisons des <strong>environs</strong>. L'épouvante était au comble ; les habitants descampagnes passaient les nuits sur pied, <strong>et</strong> souvent l'effroi leur fit voir des brûleurs dans des étrangers fort inoffensifs. C'étaits'exposer à des mauvais traitements que de traverser un village même en plein jour.La révolution de 1830 venait de renverser encore une fois les Bourbons <strong>du</strong> trône. Après l'abdication de Rambouill<strong>et</strong>,Charles X, suivi de sa famille, s'achemina vers <strong>Cherbourg</strong>, où il arriva le 16 août. Il s'embarqua à bord <strong>du</strong> Great Britain,paquebot américain, <strong>et</strong> dit un éternel adieu à la terre de France que bientôt il perdit de vue.Le 10 juin 1831, une frégate anglaise, la Volage, vint mouiller sur la rade. Elle avait à son bord don Pédro I er , empereur <strong>du</strong>Brésil, chassé de <strong>ses</strong> états. Ce prince, accompagné de sa femme, la fille d'Eugène Beauharnais, débarqua au Port-Militaire,non loin de l'endroit où Charles X s'était embarqué l'année précédente. Il y aurait un triste rapprochement à faire entre cesdeux souverains qu'une destinée semblable a con<strong>du</strong>its à <strong>Cherbourg</strong>. L'absolutisme les a per<strong>du</strong>s l'un <strong>et</strong> l'autre, <strong>et</strong> l'un <strong>et</strong> l'autresont morts[p. 53]dans l'exil. Qui aurait cru cependant que le vieux roi devait survivre au jeune homme ?L'ex-empereur partit pour Londres le 20 juin <strong>et</strong> fut de r<strong>et</strong>our le 23 juill<strong>et</strong>, jour de l'arrivée de dona Maria, reine <strong>du</strong> Portugal,sa fille. Ils quittèrent <strong>Cherbourg</strong> le 2 août.(Mai 1832). Invasion <strong>du</strong> choléra-morbus.La frégate la Résolue vint s'échouer sur les rochers <strong>du</strong> cap Lévi pendant la nuit <strong>du</strong> 23 juin 1833. Diver<strong>ses</strong> tentatives pour larem<strong>et</strong>tre à flot n'ayant eu aucun succès, force a été de la démolir.Le roi Louis-Philippe <strong>et</strong> la famille royale, (le <strong>du</strong>c d'Orléans excepté), ont visité <strong>Cherbourg</strong>, dans les premiers jours deseptembre 1833. Le prince de Joinville y est revenu au r<strong>et</strong>our d'une campagne en 1835.(1836). Premières cour<strong>ses</strong> de chevaux.Tel est l'exposé rapide des événements arrivés à <strong>Cherbourg</strong> pendant l'espace de dix-huit siècles. On a pu voir quel'importance de notre ville ne date pas seulement de l'époque où les magnifiques établissements de la rade <strong>et</strong> <strong>du</strong> port furententrepris, mais qu'au milieu même des siècles barbares elle excita les passions envieu<strong>ses</strong> de l'Angl<strong>et</strong>erre, <strong>et</strong> que c<strong>et</strong>tepuissance n'épargna rien pour s'en rendre maîtresse. <strong>Cherbourg</strong> continue à défier son ennemie ; un nouvel avenir de gloirel'attend comme place de guerre <strong>et</strong> comme ville maritime, <strong>et</strong> l'on peut dire sans exagération que le port, après l'achèvementdes travaux, sera un des plus beaux <strong>et</strong> des plus vastes de l'Europe.H. V.[p. 54]LE VIEUX CHERBOURG.Si quelqu'un des preux chevaliers qui venaient autrefois caracoler <strong>et</strong> combattre devant <strong>Cherbourg</strong>, pouvait renaîtresubitement, si quelque nécromancien allait réveiller Dunois <strong>et</strong> le comte de S.t-Paul <strong>du</strong> champ où ils dorment depuis près d<strong>et</strong>rois siècles auprès de S.t-Sauveur, <strong>et</strong> les con<strong>du</strong>isait au haut <strong>du</strong> Roule en leur disant : — Regardez ! Voilà la ville devantlaquelle Duguesclin échoua avec <strong>ses</strong> braves c'était vers ce point qu'il faisait lancer d'ici ces gros<strong>ses</strong> boules de granit, quiservent encore aujourd'hui de bornes dans les rues ; — ce serait en vain qu'ils chercheraient, les braves guerriers, ces fortesmurailles qui résistaient à la bombe, ces grands fossés pleins d'eau qui entouraient la p<strong>et</strong>ite ville <strong>et</strong> se mêlaient à la mer, cechâteau qui n'a jamais été pris par force, ce grand donjon, ces tourelles d'où la châtelaine amoureuse lâchait la colombe quidevait porter à son ami les gages de sa tendresse, ces magnifiques demeures illustrées par le séjour des rois <strong>et</strong> des princes,par les fêtes galantes de la cour de Henri II, <strong>et</strong> de la belle Eléonore ; au lieu de tout cela, ils trouveraient une ville basse <strong>et</strong>plate, éten<strong>du</strong>e capricieusement dans la plaine des deux côtés d'un superbe port, sans autres bornes que la mer ; des champscultivés là où il y avait des forêts, des routes creusées dans des gués impraticables. Depuis lors la Div<strong>et</strong>te[p. 55]a changé de lit, la ville de position, la mer même s'est déplacée ; la moitié de l'ancien port est à sec ; l'avant-port <strong>du</strong>commerce est creusé sous les fondements des fortifications ; toute la partie occidentale a été conquise sur les eaux, <strong>et</strong> les


portes de la ville d'autrefois sont presque au centre de la nouvelle cité. Du vieux château on ne r<strong>et</strong>rouverait pas une pierre,pas une ruine, si ce n'est peut-être un vieux puits qu'on ne s'est pas encore avisé de combler [13] ; de ces fortes murailles de10 pieds d'épaisseur qui entouraient la ville, à peine un vieux pan enclavé dans les constructions de l'église, <strong>et</strong> qu'on nereconnaît qu'à <strong>ses</strong> touffes d'aches <strong>et</strong> de giroflées jaunes ; de ces antiques fortifications, une vieille tour qui ne tardera peutêtrepas à disparaître.Essayons, d'après les monuments <strong>du</strong> temps, de reconstruire <strong>Cherbourg</strong> tel qu'il était à ces époques reculées.La ville n'avait pas alors la route de Paris avec <strong>ses</strong> jolies maisons <strong>et</strong> son rideau d'ormes qui se courbent sur la tête <strong>du</strong>voyageur. Le Roule descendait jusqu'à la rive droite de la Div<strong>et</strong>te, <strong>et</strong> il n'y avait pour entrer dans <strong>Cherbourg</strong> que l'étroitchemin, appelé les Ru<strong>et</strong>tes, qui domine la vallée. C'est par là, que François I er , le roi magnifique <strong>et</strong> galant, passa quand il vintvisiter nos aïeux ; <strong>et</strong> de là, son oeil ne put se reposer ni sur le canal encadré[p. 56]d'arbres verts, qui se mirent si bien dans <strong>ses</strong> eaux, ni sur le double bassin aux beaux quais, ni sur la partie de la ville, quis'étend à droite de la rivière : toute c<strong>et</strong>te plaine n'offrait qu'une aride éten<strong>du</strong>e de sable, garnie de p<strong>et</strong>ites <strong>du</strong>nes à peinevariées un peu pendant l'été par les tiges vigoureu<strong>ses</strong> <strong>et</strong> piquantes <strong>du</strong> panicaut, les rameaux foncés <strong>du</strong> fenouil agités par lesvents, <strong>et</strong> les fleurs assez peu brillantes <strong>du</strong> gallium verum <strong>et</strong> de l'ononide rampante [14]. A l'emplacement des deux bassins <strong>du</strong>commerce, de[p. 57]la place de la Div<strong>et</strong>te, de la prison <strong>et</strong> des halles, s'étendait à mer haute, une grande masse d'eau salée qui, d'un côté venaitau devant de la Div<strong>et</strong>te jusqu'au pont <strong>du</strong> Roule, <strong>et</strong> de l'autre, bordait une chaussée sur laquelle ont été bâties depuis lesmaisons de la rue <strong>du</strong> Vieux-Quai, — battait de <strong>ses</strong> ondes les murs de la ville, qui suivaient une partie de la rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin, — puis en se r<strong>et</strong>irant faisait moudre un moulin à la place <strong>du</strong>quel on a construit le groupe de maisons qui forme le nordde la rue de la Div<strong>et</strong>te, <strong>et</strong> laissait à sec les navires qui pouvaient ainsi se faire porter aussi loin qu'ils le voulaient dans cehavre profond pour opérer leur déchargement ou faire réparer leurs avaries. La chaussée qui commençait auprès <strong>du</strong> Cauchincon<strong>du</strong>isait le voyageur à l'entrée principale de la ville.C'était la porte de Notre-Dame. Située vers le milieu de la rue des Portes d'aujourd'hui ; elle était surmontée de la statue <strong>et</strong>des armes de <strong>Cherbourg</strong>. Ces armes consistaient en « un écu d'azur, à une fasce d'argent, accompagnée de trois besansd'or, deux en chef, deux en pointe. C<strong>et</strong> écu était appuyé sur une lance aussi d'or. »<strong>Cherbourg</strong> avait encore une autre porte, ouverte bien postérieurement à la première, nommée la Porte-Neuve. Elle étaitcomme la précédente composée d'une porte ouvrante <strong>et</strong> d'un pont-levis ; tout le reste de la ville était entouré de fossés larges<strong>et</strong> profonds.[p. 58]A gauche de la porte Notre-Dame, le mur se dirigeait vers le sud-ouest <strong>et</strong>, dans l'espace compris aujourd'hui entre les rues<strong>du</strong> Faubourg <strong>et</strong> de la Fontaine, il faisait un angle vers la place de la Fontaine. La tour qui défendait c<strong>et</strong> angle tombait enruines en 1543 ; Matignon, général de François I. er en Normandie, la fit remplacer par un bastion, auquel il donna le nom deS.t-François. Sept cents prisonniers furent employés à vider les fossés <strong>et</strong> à dresser les nouvelles batteries.C'est sur l'emplacement actuel de la place de la Fontaine, que se trouvait la Porte-Neuve ; le fossé en c<strong>et</strong> endroit avait 120pieds de largeur <strong>et</strong> 12 de profondeur ; la partie solide <strong>du</strong> pont était soutenue par six gros piliers ; le pont-levis avait 15 piedsde longueur.De là, les murailles prenaient la direction de la place d'Armes ; entre c<strong>et</strong>te place <strong>et</strong> le passage Digard, à peu de distancede c<strong>et</strong>te dernière rue, on trouvait une grande tour nommée la Tour-Corn<strong>et</strong>te. Sur la Place, en creusant pour poser l'obélisque,on a découvert les fondements de la Tour-Carrée, qui a donné son nom à une des rues voisines ; entre ces deux forteres<strong>ses</strong>,le mur était protégé par deux autres tours plus p<strong>et</strong>ites, dont le nom est inconnu.A l'angle de la même place, au bord de la mer s'élevait la Tour-Gouberville. L'officier dont elle portait le nom était deNéhou ; il se distingua dans les guerres de religion sous les ordres de De la[p. 59]Chaux, gouverneur de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> mourut au siége de Théville en 1629.


En suivant le contour des murs, on trouvait encore deux autres tours sans nom avant d'arriver à celle qui est connue sousle nom de Vieille-Tour. C'est la plus importante pour nous, puisqu'elle subsiste encore. Nous nous y arrêterons un moment.Les pieds baignés par la mer, elle lève sa tête crénelée, encore chargée de graminées <strong>et</strong> de giroflées jaunes, <strong>et</strong> forte de<strong>ses</strong> murailles restées intactes, elle s'enorgueillit de braver les efforts conjurés <strong>du</strong> temps <strong>et</strong> des vagues qui, depuis quatresiècles, viennent deux fois par jour saper <strong>ses</strong> fondements. C'est le plus vieux monument de notre ville.Charles VIII, réveillé de son apathie par Jeanne d'Arc <strong>et</strong> Agnès Sorel, s'était enfin souvenu qu'il portait le nom de roi deFrance. Battus à Formigny, les Anglais s'étaient r<strong>et</strong>irés à <strong>Cherbourg</strong>, où ils se fortifièrent. Le connétable de Richemont les ypoursuivit ; le siège fut long <strong>et</strong> meurtrier : mais attaqués avec une espèce nouvelle de bombardes, les ennemis furent obligésde capituler le 12 août 1450, <strong>et</strong> par suite d'évacuer la Normandie.Les fortifications de la ville avaient été endommagées pendant le siège. Jean <strong>du</strong> Bueil fit construire plusieurs nouvellestours au bord de la mer ; l'une était p<strong>et</strong>ite <strong>et</strong> située près de la Tour-Gouberville. La seconde est celle qui nous occupe ; ellepouvait recevoir six ou huit canons.[p. 60]Elle n'a jamais eu d'emploi comme forteresse, si ce n'est en 1758 qu'on imagina de faire aux Anglais, qui s'avançaientcontre la ville, ce que Cambyse fit aux Egyptiens ; mais nos voisins furent moins scrupuleux que les adorateurs <strong>du</strong> boeufApis : un boul<strong>et</strong> enleva un doigt à une statue de la Trinité qu'on avait placée sur la plate-forme.Le peuple en a fait le siège de terribles événements <strong>et</strong> long-temps elle a été un obj<strong>et</strong> d'effroi. D'après les traditions, on yaurait étranglé un officier, parce qu'il avait manqué de respect à un gouverneur de <strong>Cherbourg</strong> ; des soldats y seraient mortsde faim, <strong>et</strong> chaque nuit leurs fantômes, couverts de longs habits blancs, se promenaient sur le couronnement <strong>et</strong> rondaientautour de la tour. On s'avisa d'espionner les revenants ; c'étaient d'honnêtes in<strong>du</strong>striels qui allaient voler des planches dansun enclos voisin.La tour a long-temps servi de prison, <strong>et</strong>, certes, ce n'était pas une douce prison avec <strong>ses</strong> murs humides, sa p<strong>et</strong>itebarbacane grillée, qui, en été, laissait à peine arriver un rayon de soleil, <strong>et</strong> en hiver donnait passage aux vents, à la neige, à lapluie. Le malheureux était obligé de se coucher sur <strong>du</strong> sable malpropre, qu'il ne devait qu'à la compassion <strong>du</strong> geolier : tropheureux encore quand les rats pouvaient l'y laisser dormir en paix ! On n'y m<strong>et</strong>tait d'abord que des criminels ; on finit par enfaire un violon pour les tapageurs nocturnes. Depuis la construction de la prisonde la place de la Div<strong>et</strong>te, elle n'est plus d'aucun usage.[p. 61]En quittant c<strong>et</strong>te forteresse, la muraille passait derrière le choeur de l'église, dans le jardin <strong>du</strong> presbytère, où il en reste unpan qui sert de terrasse, <strong>et</strong> s'avançait jusque dans l'avant-port <strong>du</strong> commerce.Une brèche considérable ayant été faite en c<strong>et</strong> endroit pendant le siége de 1450, on y construisit une grosse tour à troisbatteries, qui fut appelée Tour-des-Sarrasins, nom qu'elle a laissé à la place voisine ; on pouvait y m<strong>et</strong>tre dix-sept pièces decanon ; elle a servi de magasin à poudre jusqu'en 1778, époque où elle fut abattue. Les armes de France étaient sculptéessur la clef de voûte.Entre ces deux tours, à peu près sur la ligne de la Grande-Rue, s'ouvrait une porte de secours.Une autre forteresse placée auprès <strong>du</strong> pont-tournant actuel défendait l'entrée <strong>du</strong> port. Il y avait auprès un pont de sept ouhuit arcades.A partir de c<strong>et</strong> endroit la muraille faisait un angle pour aller rejoindre le bastion <strong>du</strong> Moulin, situé près <strong>du</strong> moulin dont nousavons parlé (entre les rues Quai-<strong>du</strong>-Bassin <strong>et</strong> de la Div<strong>et</strong>te) <strong>et</strong> de là, la porte Notre-Dame.Outre les communications extérieures entre ces différentes fortifications, il y en avait de secrètes. Sous la place d'Armes,en face de la mairie, on a trouvé, à six mètres de profondeur, les ruines d'un souterrain. Il a trois branches ; l'une s'avancevers l'emplacement[p. 62]de la Tour Corn<strong>et</strong>te, l'autre vers la Tour Gouberville, <strong>et</strong> la troisième, qui suit la direction de la rue de l'Hôpital, faisait sans


doute communiquer la Tour-Carrée à la Tour des Sarrasins. On a aussi trouvé les débris d'un autre souterrain sous la rue desPortes.Les maisons des habitants de <strong>Cherbourg</strong> n'occupaient que l'espace compris entre le mur à l'ouest, <strong>et</strong> la rue des Portes <strong>et</strong>des Fossés à l'est ; aussi n'y avait-il qu'un p<strong>et</strong>it nombre des rues qui existent aujourd'hui. On trouve citées : la place del'Eglise, les trois p<strong>et</strong>ites rues parallèles, d'Espagne, des Soeurs <strong>et</strong> <strong>du</strong> Nord, qui joignent la rue de l'Hôpital ; une partie de c<strong>et</strong>tedernière rue ne cessa même d'être un faubourg que vers l'an 1300, lorsque, pour la première fois, <strong>Cherbourg</strong> fut entouré demurailles. Sur la place de la Révolution qui portait alors le nom de la Trinité, étaient la Juridiction <strong>et</strong> les Halles. La Grande-Rueavec <strong>ses</strong> arcades, paraît être une des plus anciennes. Il en est de même de la rue au Fourdrey, qui existait dès 1317, ainsique le prouve un contrat dans lequel on la désigne par Vicus in quo moratur Robertus Le Fourdrey [15]. Vers ce même temps,se trouvent aussi nommés le boël Mesnil ou Meslin, le boël Goueslain, la rue <strong>du</strong> Nouët ou au Blé, la chasse Digard, la rueOnfroy ou de la Vase, <strong>et</strong> la rue des Fossés,[p. 63]dont les maisons donnaient d'un côté sur les fossés <strong>du</strong> château.L'édifice le plus important <strong>du</strong> vieux <strong>Cherbourg</strong>, était le château dans lequel se r<strong>et</strong>iraient les bourgeois aux approches del'ennemi, <strong>et</strong> que Froissart appelle l'un des plus forts <strong>du</strong> monde.Son origine se perd dans la nuit <strong>du</strong> passé. On en a long-temps attribué la fondation à César, quoique la présence deCésar sur notre territoire soit un fait très-douteux. Au reste, il l'eût tout au plus restauré. Des antiquités qu'on y a trouvées lorsde sa démolition prouvent qu'il existait bien avant c<strong>et</strong>te époque. Ce sont des médailles d'or, dont une face représente unvisage d'homme <strong>et</strong> l'autre un cheval. Montfaucon les regarde comme antérieures de deux ou trois siècles à la naissance deJésus-Christ. Sous l'empire romain il reçut probablement garnison, car on y a aussi trouvé un grand nombre de pièces demonnaie à l'effigie de Jules César, de Tibère, de Néron, de Nerva <strong>et</strong> de quelques autres empereurs [16].Il occupait tout l'espace compris entre les rues des Fossés, des Portes, Quai-<strong>du</strong>-Bassin <strong>et</strong> les murailles de la ville <strong>du</strong> côté<strong>du</strong> Port. Il formait un quadrilataire irrégulier, dont la plus grande diagonale était est <strong>et</strong> ouest : 85 t sur 75, y compris les fossés.Il avait une entrée à pont-levis auprès de la p<strong>et</strong>ite place formée par la rencontre des rues de la Vase, des Portes, des Fossés[p. 64]<strong>et</strong> <strong>du</strong> Château ; le fossé avait en c<strong>et</strong> endroit douze pieds de largeur. Le donjon, isolé <strong>du</strong> château par des fossés aussi, était aunord, sur l'emplacement des maisons qui forment le côté sud de la rue <strong>du</strong> Port ; il avait 23 t sur 15. Quatre tours composaientc<strong>et</strong> édifice ; la plus haute était élevée de 120 pieds au-dessus <strong>du</strong> niveau de la mer ; le château en avait huit ; toutes destructure différente, <strong>et</strong> couronnées de mâchicoulis, avec parap<strong>et</strong>s <strong>et</strong> chemins de ronde. Au devant <strong>du</strong> château on trouvait unbeffroi ou tour d'observation, carrée <strong>et</strong> jointe à l'édifice par un ouvrage en maçonnerie.Les rois français <strong>et</strong> anglais avaient travaillé tour à tour à le rendre imprenable. Pressé par le maréchal de Vauban, LouisXIV eut aussi un moment la volonté d'ajouter de nouvelles fortifications au château de <strong>Cherbourg</strong>, pendant que d'un autrecôté on faisait agrandir le port ; mais ces travaux furent totalement abandonnés l'année suivante, <strong>et</strong>, en 1689, on détruisit nonseulementce qu'on avait fait, mais la vieillesse moussue de <strong>ses</strong> douze tours ne put défendre le vieux protecteur de lapresqu'île ; il fut aussi démoli. Aujourd'hui il n'en reste plus de traces que dans les plans de Vauban.L'histoire de c<strong>et</strong> édifice se lie à celle des conquêtes des Normands, <strong>et</strong> il a souvent joué un rôle important dans le moyenâge ; c'est là que Haigrold, roi de Danemarck, chassé de son royaume, vint loger, en 945, avec le p<strong>et</strong>it nombre des suj<strong>et</strong>s quilui étaient[p. 65]restés fidèles. Richard III, <strong>du</strong>c de Normandie, l'assigna pour douaire à sa femme Adèle, fille <strong>du</strong> roi de France, Robert ;Edouard le confesseur y demeura avant de partir, pour aller prendre pos<strong>ses</strong>sion <strong>du</strong> royaume d'Angl<strong>et</strong>erre ; Guillaume-le-Rouxy séjourna long-temps ; Guillaume-le-Conquérant y fut malade. Il fut aussi visité par Henry I er qui, parti joyeusement des côtesfrançai<strong>ses</strong>, arriva en deuil sur celles de Grande-Br<strong>et</strong>agne [17]. Le règne de Henri II d'Angl<strong>et</strong>erre fut l'époque de sa splendeur ;ce prince l'habita fréquemment <strong>et</strong> y passa diver<strong>ses</strong> solennités avec une cour nombreuse <strong>et</strong> brillante. D'autres hôtescouronnés, heureux ou fugitifs, l'occupèrent successivement. On compte parmi les plus illustres : Mathilde, fille de Henry I er ,chassée des états de son père [18] ; Richard Coeur-de-Lion, qui devait périr d'une manière si romanesque ; Saint-Louis(1278), qui devait aller mourir de la peste en Afrique. Charles-le-Mauvais, qui l'obtint en apanage, après avoir été prisonnierde Pierre-le-Cruel, alla aussi mourir tragiquement à Evreux, brûlé par l'esprit de vin, dont les médecins avaient fait imprégner<strong>ses</strong> draps ; Marguerite d'Anjou y passa au sortir de sa prison d'Angl<strong>et</strong>erre ; François I er au sortir de sa prison d'Espagne. Lechâteau fut encore visité par Henry II, qui périt si tristement au milieu d'une fête ; <strong>et</strong> l'année même de sa démolition, le dernierdes Stuarts, Jacques


II, y réclamait aussi sa place de prince malheureux <strong>et</strong> fugitif.[p. 66]Ceux-là y venaient <strong>du</strong> moins avec leur liberté ; que d'autres n'y vinrent que chargés de chaînes !Parmi les prisonniers <strong>du</strong> château de <strong>Cherbourg</strong>, on compte : Robert de Bellesme, comte d'Alençon, si flétri par leschroniqueurs, qui le comparent à Néron <strong>et</strong> aux Furies [19] ; son arrestation eut une cause toute différente. Il était <strong>du</strong> nombrede ceux qui avaient conseillé à Robert II de redemander le trône à son frère Guillaume-le-Roux ; <strong>et</strong> plus tard, il commandaitl'arrière-garde à la désastreuse bataille de Tinchebray. Dé<strong>ses</strong>pérant, après c<strong>et</strong> échec, de faire triompher la cause de Robert, ilvoulut au moins sauver son fils Guillaume Clyton <strong>et</strong> tenta de l'enlever ; le proj<strong>et</strong> fut éventé ; le comte reçut l'ordre de seprésenter devant le roi d'Angl<strong>et</strong>erre ; il refusa. Mais envoyé plus tard vers Henri par Louis-le-Gros, il fut arrêté au mépris <strong>du</strong>droit des gens <strong>et</strong> condamné comme coupable de félonie, pour n'avoir pas comparu après trois citations ; on lui donna pourprison le château de <strong>Cherbourg</strong> (1112) ; il en fut tiré l'année suivante, <strong>et</strong> con<strong>du</strong>it à Verham, en Angl<strong>et</strong>erre, où il mourut.Celui qui succéda à Robert, fut encore plus malheureux que lui, <strong>et</strong> surtout, il l'avait moins mérité ; je veux parler d'Arthur deBr<strong>et</strong>agne, pauvre enfant, que ni <strong>ses</strong> droits, ni sa beauté, ni sa grande jeunesse[p. 67]ne purent sauver de la fureur d'un oncle ambitieux. Etats, liberté, vie, Jean-Sans-Terre lui ravit tout ; <strong>et</strong>, après l'avoir r<strong>et</strong>enuquelque temps prisonnier dans un cachot, il le précipita dans la mer <strong>du</strong> somm<strong>et</strong> d'un rocher (1202). Le ciel ne lui laissa mêmepas une sépulture, <strong>et</strong> l'on est divisé sur le lieu de sa mort, puisqu'on cite également la tour de Rouen <strong>et</strong> le château de Falaise.La chronique de Saint-Brieux (Chronicon Briocense), écrite peu de temps après c<strong>et</strong>te mort (1314), affirme que ce meurtre doitêtre placé à <strong>Cherbourg</strong>. Chantereyne, cité par l'abbé Demons [20], rapporte que de son temps, une bague appartenant àArthur, fut trouvée dans le port <strong>du</strong> commerceDeux prisonniers, dont la détention à ce château est rapportée dans un journal manuscrit, écrit au seizième siècle, parJean-de-la-Mer, d'Equeurdreville, [21], ont vivement excité la curiosité des antiquaires.« En 1535, dit-il, une femme vint en la ville de Chierbourg, laquelle était <strong>du</strong> sang royal, <strong>et</strong> disait l'on que le roi en sa justicel'advoit condamnée à estre VI ans entiers dedans le château de Chierbourg.En l'an 1541, la dame qui était en prison au château de Chierbourg, fut mise en liberté <strong>et</strong> hors, par le plaisir <strong>du</strong> roy. »[p. 68]Chantereyne, à qui nous empruntons c<strong>et</strong>te citation, prétend que c'était Jacqueline de la Trimouille, épouse d'ArmandGouffier, seigneur de Boisy, dont le nom se trouve d'ailleurs parmi ceux des soeurs de l'Assomption, <strong>et</strong> qui mourut en 1544 auchâteau de Chinon où elle avait été transférée.« En l'an dessus dit, 1541, vint en la ville de Chierbourg, un homme d'église qui fut emmené par les archers de la garde <strong>du</strong>corps <strong>du</strong> roy de France, <strong>et</strong> mis dedans le château en la tour, <strong>et</strong> disait l'on qu'il estait archevesque de Valence, avec plusieursautres dignitez, oncle de l'empereur de Rome, <strong>et</strong> estait d<strong>et</strong>enu à cause de l'ambassade de France, laquelle ne estait pointrevenue d'Espagne....., <strong>et</strong> l'avait, ledit empereur, r<strong>et</strong>enu secrètement <strong>et</strong> ne savait-on pourquoi, car il n'était mention de guerre ;<strong>et</strong> à raison de ce, le roy de France fit r<strong>et</strong>enir l'évesque de Valence, dont il est fait mention ici devant en ce présent livre,comme ledit évesque passait par le Daulphiné de France, <strong>et</strong> fut amené, lui quinzième de sa bande, à Chierbourg seulement,<strong>et</strong> estaient environ 200 chevaulx <strong>et</strong> asnes. Il fut pris de là <strong>et</strong> emmené à Chierbourg [22]. »Le nom <strong>du</strong> prisonnier est connu ; mais les historiens sont partagés sur les cau<strong>ses</strong> de sa détention.[p. 69]Pendant la trève qui avait suivi la guerre entre François 1. er <strong>et</strong> Charles-Quint, deux seigneurs, l'un Français <strong>et</strong> l'autreEspagnol, mais depuis long-temps au service de la France, envoyés à Venise <strong>et</strong> en Turquie, furent assassinés à l'instigationde l'empereur, par les ordres <strong>du</strong> marquis <strong>du</strong> Guast, gouverneur <strong>du</strong> Milanez. Beaucaire prétend que Georges d'Autriche étaitau nombre des meurtriers, <strong>et</strong> que telle fut la cause de son arrestation à Lyon. Quelques auteurs espagnols cherchent à ledisculper, <strong>et</strong> prétendent que s'il eût été coupable de ce meurtre, le roi de France ne lui eût point fait dire par deuxgentilshommes de sa cour, qu'il aurait désormais la permission de se promener dans la banlieue avec deux de <strong>ses</strong> gens, sansavoir aucun commerce avec les autres prisonniers <strong>du</strong> château, <strong>et</strong> qu'en payant 50,000 <strong>du</strong>cats pour sa rançon, il obtiendrait saliberté. Mais les raisons qu'ils donnent pour expliquer son emprisonnement ne paraissent pas satisfaisantes ; c'est unproblème que de plus savants que nous se chargeront d'éclaircir. Le prisonnier partit pour l'Espagne, le 15 août 1542, <strong>et</strong>


passa plus tard en Flandre, où il échangea son archevêché de Valence contre l'évêché <strong>et</strong> la principauté de Liège.C'est aussi dans ce château qu'on enferma Dutourps <strong>et</strong> ceux qui furent pris avec lui [23].On ne creuse guère le sol occupé par l'ancien[p. 70]château, sans y trouver des débris de voûtes <strong>et</strong> de murailles. Il n'y a pas long-temps encore, qu'en j<strong>et</strong>ant les fondementsd'une maison de la rue Notre-Dame, on découvrit un cachot d'environ huit pieds carrés ; l'entrée était étroite, on y descendaitpar deux degrés. Il y avait dedans un squel<strong>et</strong>te, couché sur le dos, les deux mains appuyées sur la poitrine avec desmenottes. A côté se trouvaient un bout de chaîne <strong>et</strong> un boul<strong>et</strong> [24]. C'était une femme ! Epouse infidèle, elle avait peut-êtreouvert trop facilement l'oreille aux doux propos d'amour, ou fille vertueuse, elle avait refusé de se soum<strong>et</strong>tre à la brutalité d'uncomte de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong>, pour s'épargner un vivant reproche, on l'avait j<strong>et</strong>ée là ; la trappe s'était refermée, <strong>et</strong>.... on l'avaitoubliée !!!..CHAPELLE DU CHATEAU.La chapelle <strong>du</strong> château eut aussi <strong>ses</strong> époques de gloire. En 1050, Guillaume-le-Conquérant était à <strong>Cherbourg</strong> avec sajeune épouse Mathilde. Il tomba malade ; sur le point d'expirer, il fut couché par terre, suivant l'usage [25], <strong>et</strong> c'est ainsi qu'il fitvoeu, s'il se rétablissait, de construire une église à la Vierge <strong>et</strong> de fonder un chapitre. Dès qu'il se sentit mieux, il nomma troischanoines ; plus tard, il y en ajouta cinq autres ; il fit restaurer, agrandir <strong>et</strong> dédier à Notre-Dame,[p. 71]la chapelle <strong>du</strong> château, construite par Richard II, sous l'invocation de Saint-Benoît ; il affecta à c<strong>et</strong>te église, une terre dans l'îlede Jersey ; lorsqu'il eut conquis l'Angl<strong>et</strong>erre, il ajouta le manoir de Hapfort à sa précédente donation. C<strong>et</strong>te chapelle pouvaitavoir 60 pieds de long sur 45 de large. En 1209, le chapitre fut transféré à Coutances, mais les chanoines demeurèrentobligés de célébrer tous les ans l'office à <strong>Cherbourg</strong>. Ils possédaient un moulin au Roule <strong>et</strong> divers fiefs à Nouainville,Equeurdreville, Octeville, Tourlaville, Sauxmesnil, où ils recueillaient la dîme. Le droit de nommer au bénéfice de c<strong>et</strong>techapelle, depuis érigée en cure, fut réservé au roi. C<strong>et</strong>te charge tomba ensuite en désuétude ; cependant il y eut jusqu'à larévolution des chapelains qui devaient deux mes<strong>ses</strong> bas<strong>ses</strong> à la maison de Chartres dont ils recevaient une rente de 57francs.« C<strong>et</strong>te chapelle, dit Toustaint de Billy, était si estimée, qu'on se trouvait heureux <strong>et</strong> dans le comble d'honneur de pouvoir yêtre inhumé. »« On lit, dans la Chronique de Normandie, de Nagerel, le trait suivant :Un docteur de Lombardie, nommé Bernard II, <strong>et</strong> que Richard II avait gardé auprès de sa personne en qualité de conseiller,fut le trouver un jour, pendant qu'il était en prières à sa Chapelle <strong>et</strong> lui dit : ‘Syre, vous m'avez moult aymé, dont je vousremercie. Aussi, vous ay-je grandement aydé <strong>et</strong> moult loyalement[p. 72]servi, <strong>et</strong> pour toutes cho<strong>ses</strong>, je vous requiers un don ! — Vous l'aurès, dist le <strong>du</strong>c, demandés. — Je vous requiers que dedanstrois jours que je mourray, je soye mis en terre en c<strong>et</strong>te vostre chapelle. — Si le cas s'offre, dist le <strong>du</strong>c, ce que Dieu ne veuille,je vous l'octroye.’Bernard mourut le troisième jour comme il l'avait prédit, <strong>et</strong> fut enterré dans la Chapelle <strong>du</strong>cale, suivant la promesse deRichard. »C'est là aussi que fut inhumé le fameux prélat, Mauger, archevêque de Rouen, oncle <strong>et</strong> ennemi <strong>du</strong> Conquérant qu'il sehâta d'excommunier après son mariage avec Mathilde ; il fut exilé sous prétexte de mauvai<strong>ses</strong> moeurs, <strong>et</strong> se r<strong>et</strong>ira aux îles dela Manche. Il s'y livrait, dit-on, à la magie, <strong>et</strong> faisait de là de fréquentes excursions dans le Cotentin. Dans un de ces voyages,il prédit aux matelots qui l'accompagnaient, que l'un d'eux devait mourir dans la journée ; un moment après, il tomba dans lamer, <strong>et</strong> périt en laissant l'avenir incertain de la place à lui assigner [26].La chapelle <strong>du</strong> château fut démolie en 1760. En déblayant le terrain, on trouva sept tombeaux de pierres ; les squel<strong>et</strong>tesétaient bien conservés <strong>et</strong> avaient, dit-on, une plus haute stature que les hommes d'à présent ; on y trouva aussi quelquesfragments d'anciennes armures. [27]


[p. 73]Il y a 60 ans on voyait encore des ruines de c<strong>et</strong>te chapelle dans un jardin de la rue Notre-Dame, qui appartient aujourd'huià M. Couturier.ÉGLISE SAINTE-TRINITÉ.L'église de la Sainte-Trinité qui existe encore aujourd'hui est d'une date moins reculée. C'est un monument bizarre, danslequel on reconnaît facilement l'oeuvre des différentes époques qui l'ont pro<strong>du</strong>it : style gothique, roman, renaissance, s'ytrouvent confusément entassés ; le choeur est <strong>du</strong> commencement, la nef de la fin <strong>du</strong> quinzième siècle ; deux chapellesappartiennent au seizième <strong>et</strong> le portail au dix-neuvième.C'est la troisième paroissiale qui ait été construite à <strong>Cherbourg</strong>.La première fut fondée vers l'an 435 à la sollicitation de S.t-Ereptiole, évêque de Coutances. Elle fut détruite au IX. e sièclelors des invasions des Normands.Guillaume-le-Conquérant, après avoir fait élever la chapelle <strong>du</strong> Château, s'occupa aussi de la construction d'une églisehors des murs, probablement à l'endroit où se trouve celle d'aujourd'hui. On en fit la dédicace en 1055. Les évêques deCoutances en eurent le patronage [28]. Une bulle <strong>du</strong> pape Eugène III (1145), qui donne à l'évêque Algarve eclesiam Sanctoe-Marioe de Coesarisburgo cum ecclesia[p. 74]SANCTAE-TRINITATIS, <strong>et</strong>c., prouve que déjà elle était consacrée à la Sainte-Trinité.En 1293 ou 1295, les Anglais firent une irruption dans le Cotentin, brûlèrent l'hôtel-dieu de la Bucaille <strong>et</strong> l'abbaye dont ilsenlevèrent les livres. Les habitants, réfugiés dans le château, dont ils eurent beaucoup de peine à faire lever le siège, nepurent sans doute pas défendre leur église, qui <strong>du</strong>t être pillée, ainsi que les autres édifices situés en dehors des fortifications.En 1412, c<strong>et</strong>te église tombait en ruines <strong>et</strong> n'était plus d'ailleurs en rapport avec le nombre des habitants ; on réunit del'argent pour en construire une nouvelle ; mais le siége de 1418 <strong>et</strong> la dis<strong>et</strong>te qui suivit, firent suspendre les travaux. On lesreprit en 1423 ; les Anglais qui occupaient le pays y travaillèrent de concert avec les habitants. On n'acheva alors que lechoeur <strong>et</strong> le clocher. Le carreau était apporté de Caen <strong>et</strong> coûtait dix-huit sols le tonneau. L'édifice ne fut terminé qu'après lesiége de 1450. Il fut dédié à la Sainte-Trinité le 24 mai 1466 par Jean, évêque de Justinopolis.Pendant le siége de 1450, les <strong>Cherbourg</strong>eois avaient promis, s'ils étaient délivrés de la domination étrangère, d'élever unmonument à la Vierge. Ce fut pour accomplir c<strong>et</strong>te promesse, qu'après l'expulsion des Anglais, ils ornèrent leur église d'unemachine à personnages, devenue depuis fameuse sous le nom de Monument de l'Assomption. Elle représentait[p. 75]le couronnement de Marie dans le ciel ; on la m<strong>et</strong>tait en jeu par des ressorts, tous les ans, à la fête <strong>du</strong> 15 août. Ce jour là, unefoule immense de personnes accourues de toutes parts se pressait dans l'enceinte de l'église : des personnages illustres yvenaient même de très-loin, les places étaient r<strong>et</strong>enues plusieurs jours à l'avance, <strong>et</strong> souvent de graves désordres étaient lerésultat de c<strong>et</strong>te affluence. En 1700, une femme enceinte s'y trouva mal : un gentilhomme qui était auprès d'elle, fut obligé dem<strong>et</strong>tre l'épée à la main pour lui faire ouvrir un passage ; il y eut <strong>du</strong> sang répan<strong>du</strong>. Pâté, alors curé de <strong>Cherbourg</strong>, fit fermerl'église, qui ne fut rouverte que par un jugement de l'official de Valognes. Deux ans après, c<strong>et</strong>te cérémonie fut supprimée. Cemonument était placé au haut de la voûte de la nef, devant une croisée où l'on avait ménagé une place. Il n'a été détruit qu'àla révolution.Il avait été remis lors de sa construction, à la garde de douze bourgeois notables. Ce fut l'origine ou plutôt lerenouvellement de la confrérie de Notre-Dame [29], qui s'accrut bientôt de plus de[p. 76]quinze cents personnes, parmi lesquelles on compte Georges d'Autriche, archevêque de Valence [30] ; quatre abbésréguliers <strong>et</strong> plusieurs commandants de <strong>Cherbourg</strong> ; Jacqueline de la Trimouille [31] ; Françoise de Rohan, <strong>et</strong> beaucoup deseigneurs français, anglais, br<strong>et</strong>ons, hollandais, <strong>et</strong>c. Jean Auber, qui avait inventé le monument de l'Assomption, fut lepremier échevin de la confrérie.


En 1473, Pierre Turpin, évêque d'Evreux, venu pour voir ce monument <strong>et</strong> se faire inscrire sur le rôle de la confrérie, tombamalade à <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> y mourut : il fut enterré dans le choeur. Son épitaphe y était encore plus de deux siècles après [32].L'édifice a trois nefs ; le maître-autel est adossé à la muraille ; une p<strong>et</strong>ite fenêtre placée derrière un Jehovah, éclaire unbaptême de Jésus-Christ, oeuvre d'Armand Frér<strong>et</strong>, ainsi que le reste de l'autel.Le choeur est fermé par une grille en fer, <strong>et</strong> contient 46 stalles.L'église a quatre grandes chapelles latérales : dans celle dite de Jésus ou <strong>du</strong> Sépulcre, on a lu pendant long-tempsl'inscription suivante :« Messire Le Parmentier, seigneur de Cosqueville <strong>et</strong> bourgeois de c<strong>et</strong>te ville, <strong>et</strong> sa femme Françoise, ont donné c<strong>et</strong>techapelle <strong>du</strong> Sépulcre, l'an MVCCLIII. »Dès les premiers travaux de l'église, on avait eu[p. 77]dessein de construire une tour <strong>et</strong> un portail ; on avait même commencé en 1531, mais à c<strong>et</strong>te époque, François I. er avaitbesoin d'argent pour le rachat de <strong>ses</strong> fils qu'il avait livrés par le traité de Madrid, il fit un appel à <strong>ses</strong> fidèles suj<strong>et</strong>s, comme illes appelait ; les <strong>Cherbourg</strong>eois lui donnèrent l'argent qu'ils avaient rassemblé pour leur église, <strong>et</strong> méritèrent ainsi l'honneurde le recevoir dans leurs murs l'année suivante. Le portail <strong>et</strong> la tour qui n'ont été construits qu'en 1825, jurent étrangement parleur lourdeur <strong>et</strong> leur mauvais goût avec le reste de l'édifice. C<strong>et</strong>te tour a 26 mètres de haut. On a établi dans la voûte destribunes en amphithéâtre à la place d'un demi-jeu d'orgues qui s'y trouvait avant la révolution.L'édifice a 46 mètres de long sur 28 de large, <strong>et</strong> peut contenir environ trois mille personnes. Il est encombré de bancs,comme toutes les égli<strong>ses</strong> <strong>du</strong> nord <strong>du</strong> département. Outre le monument de l'Assomption qui passait pour un chef-d'oeuvre, ony voyait encore autrefois un crucifix de cinq pieds sept pouces, que Voisin-la-Hougue appelle un des plus beaux ouvrages <strong>du</strong>monde.La chaire, qui est très-élégante, est d'Armand Frér<strong>et</strong>, ainsi que la statue de la Vierge. Celle de S.te-Anne, qui est dans lachapelle des Fonts, est de Louis Frér<strong>et</strong>, fils d'Armand.Parmi les tableaux, on remarque une Visite des saintes femmes au tombeau de Jésus. C<strong>et</strong>te belle[p. 78]toile qui est attribuée à Gaspard Crayer, à Bon Boullongne <strong>et</strong> à Philippe-de-Champagne, a été restaurée par Langevin. L<strong>et</strong>ableau de Jésus porté au tombeau est de ce dernier artiste.On y trouve encore,Dans la chapelle <strong>du</strong> S.t-Sacrement :Jésus portant sa croix.Une Adoration des Mages ;Une Adoration des Bergers, par La Hire,Un S.t-François d'Assi<strong>ses</strong> <strong>et</strong> un Prophète Elie dans le désert, par M. Le Sauvage.Sur la porte de la Sacristie :Un S.t-Pierre.Dans la chapelle des Fonts :Un Baptême de S.t-Jean, par Langevin.


Et dans la tribune :Un tableau de la Cène, par M. Le Sauvage.« Parmi les anciennes épitaphes qui se trouvaient dans c<strong>et</strong>te église, on remarquait les deux suivantes :R<strong>et</strong>ourné est Messire Laurent.Bergerel, d'où était venu.Plus cher était que les écusA chacun tant gros que menu.Par Lachésis circonvenuFut l'an quinze cent trente-sept,Fin de septembre, aux vers tout nuBaillé. Son âme en gloire s<strong>et</strong>. » [33]« Par l'Eternel qu'on doit craindre <strong>et</strong> aimer,Vrai créateur de la machine ronde,Fut appelé le bon Jean de la MerEt adjourné de ce bas mortel monde.Malgré fleurs, force <strong>et</strong> nature faconde,En un clin d'oeil fut ren<strong>du</strong> bouche close ;Puis le sien corps fut cy-mis <strong>et</strong> reposeEn attendant la résurection.Que le Seigneur, de qui tout vient, disposeQu'au nombre soit de sienne élection. »[p. 79]« Quatre épitaphes se lisent encore aujourd'hui ; 1.° contre le dernier pilier de la nef, à droit e en montant au choeur :Cy-devant repose le corps d'honorable homme Jean de Bailly, en son vivant bourgeois de c<strong>et</strong>te ville. Lequel décéda ledernier jour de décembre 1624. Et d'honnête femme Isabeau Troude, son épouse laquelle décéda le 12 d'avril 1642. »Priez Dieu pour leurs âmes.2.° Contre le pilier <strong>du</strong> côté opposé :Cy-devant reposent les cendres de M. rs Bertelot de Bailly, vivant, S. r de Caubisson qui décéda le XXIV. e jour de mayMDCLVIII, <strong>et</strong> de Thomas de Bailly, son fils, qui décéda le XXV. e de janvier MDCLIX, tous deux bourgeois <strong>et</strong> marchands dec<strong>et</strong>te ville. Lequel Thomas a donné cent sols de rente foncière pour un obit. »« Priez Dieu pour eux. »« 3.° Dans la chapelle des Fonts :Cy-devant git le corps Thomas VaultierQui en vivant d'un coeur sain <strong>et</strong> entierTint le chemyn des décrepts <strong>et</strong> edictsDu seigneur Dieu sans aulcuns contredits.Pour toy, subj<strong>et</strong> à naturelle mort,Amy lysant, si pitié te remort,[p. 80]


A tout le moins souhaite lui qu'il soitAvecques Dieu qui les elleux reçoit. »4.° Sur la p<strong>et</strong>ite porte, <strong>du</strong> côté de la mer :« Piorum jacent hic cineres sacerdotum MM.Francisci La Galle <strong>et</strong> Guillelmi Cosme qui facultatum potissimam partem civitati suae <strong>et</strong> his aedibus sacris sunt largiti, illead juventutis institutionem, hic ad organi stipendia : ambo ad preces annuas. Obiit ille 23 octob. 1657, hic 17 apr. 1659.Queis in pace quies. » [34]HOPITAL CIVIL.L'église de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> l'hôpital civil ont eu de fréquents rapports, puisque souvent le curé de la ville était en mêm<strong>et</strong>emps prieur de l'hospice. Voici comme les historiens rapportent la fondation de c<strong>et</strong> établissement :Baudouin, comte de Flandre, avait puissamment[p. 81]secouru Guillaume-le-Bastard, surnommé depuis le Conquérant, dans <strong>ses</strong> querelles avec <strong>ses</strong> compétiteurs au <strong>du</strong>ché deNormandie. Guillaume épousa sa fille, Mathilde, qui d'ailleurs avait aussi par sa mère des droits à la succession de Richard-Sans-Peur. Mais Mathilde était sa cousine, <strong>et</strong> la dispense nécessaire n'avait pas été obtenue ; le pape Léon IX lança auconcile de Reims, tenu l'année même <strong>du</strong> mariage (1049), une excommunication contre les <strong>nouveau</strong>x époux. Le <strong>du</strong>c n'obtint larévocation de c<strong>et</strong>te peine qu'à la condition de fonder cent places de pauvres dans quatre hôpitaux : « partie à Cherebourg,partie à Bayeux, partie à Caën <strong>et</strong> autre partie à Rouën, où sont encore les hostels [35]. »L'hôtel-dieu fut d'abord établi hors des murs dans les prairies d'une ferme appelée la Bucaille. Cependant une ancienn<strong>et</strong>radition prétend que les bourgeois de la ville en j<strong>et</strong>èrent les fondements en même temps que ceux de la première église(435), <strong>et</strong> c'est sans doute en c<strong>et</strong>te qualité de fondateurs que le prieuré de c<strong>et</strong> établissement était à leur nomination.Guillaume-le-Conquérant alors n'eût fait que le restaurer.Peu de temps après, le comte Gerberot s'étant révolté contre Guillaume, devenu roi d'Angl<strong>et</strong>erre, le Conquérant confisquasur lui le fief <strong>du</strong> lardier qui[p. 82]s'étendait dans presque toute la ville, <strong>et</strong> en fit présent au prieur de l'hôpital, avec la seigneurie de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> lecommandement des bourgeois de la garde <strong>du</strong> château.Le prieur de l'hôtel-dieu avait encore le droit de prendre dans les grandes forêts de Brix <strong>et</strong> de Tourlaville tout le bois dont ilavait besoin pour lui <strong>et</strong> <strong>ses</strong> vassaux, <strong>et</strong> d'y m<strong>et</strong>tre <strong>ses</strong> porcs à manger le gland ; ce droit s'appelait franc panage.Mais si la guerre survenait, le prieur <strong>et</strong> <strong>ses</strong> gens étaient tenus de faire le service militaire <strong>et</strong> de fournir les charriots, lesbéliers <strong>et</strong> les autres armes ; le prieur avait douze deniers tournois par jour de service [36]. Philippe-Auguste, par une chartede 1207, perm<strong>et</strong> à l'hôtel-dieu d'acquérir jusqu'à vingt livres tournois de revenu annuel sans payer les droits d'amortissement<strong>du</strong>s au fisc [37].Une charte donnée par Philippe-le-Bel (1286) à l'hôpital à la suite d'un pillage prouve qu'il y avait alors des frères quiprenaient soin des malades <strong>et</strong> formaient une communauté religieuse. C<strong>et</strong> établissement ayant été brûlé par les Anglais en1293, le prieur Jean Cabieul [38] ach<strong>et</strong>a un emplacement près de l'église <strong>et</strong> y fit bâtir une chapelle qu'il dédia à St.-Louis. Il fitaussi construire en même temps une maison de refuge pour les pauvres[p. 83]pendant la guerre. L'ancien hôtel-dieu dont les établissements tombaient en ruines, fut bientôt abandonné pour le <strong>nouveau</strong> ;on n'en voit plus de traces aujourd'hui que dans un p<strong>et</strong>ite buanderie qui appartient encore à l'hospice.Lorsqu'après la peste, qui vint en 1626 exercer <strong>ses</strong> ravages à <strong>Cherbourg</strong>, on désinfecta c<strong>et</strong> établissement, le feu prit par


accident, <strong>et</strong> détruisit la chapelle <strong>et</strong> une partie des édifices.Le dommage ne fut réparé que plus de vingt ans après par Michel Groult, curé de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> prieur de l'hôpital. Lachapelle même ne fut reconstruite qu'en 1644, comme l'atteste l'inscription suivante qu'on lit sur une des murailles :« Michael Groult, presybter <strong>et</strong> rector ecclesiae Caesarisburgiensis, concivium suorum suffragiis, 3 mai, 1639, hujus domûsprior, hanc à fundamentis reparavit, anno 1644. »En 1767 on construisit le long bâtiment qui occupe toute la ruelle appelée Chasse des Soeurs.Pendant la révolution l'hospice fut pillé ; les pauvres <strong>et</strong> les malades furent obligés de se répandre dans la ville pour obtenirdes secours. Il n'a été rouvert qu'en 1804.On lit dans la chapelle l'épitaphe suivante :« HicMatteus Creste peccator <strong>et</strong> sacerdos maerens,Hujus Dei domûs prior insufficiens,Nuper de Tollevastro pastor existens,[p. 84]Et vivis sublatus jac<strong>et</strong> obdormiens.Orate, fideles,Ut inter sanctos <strong>et</strong> electosDei respir<strong>et</strong> ressuscitatus.Amen.Obiit die 13 decembris 1752 a<strong>et</strong>atis suae 77. »C<strong>et</strong> hôpital, qui est beaucoup trop p<strong>et</strong>it pour une ville de 20,000 ames, ne peut contenir que 200 personnes, tant hommesque femmes <strong>et</strong> enfants ; ce n'est même que dernièrement qu'on a songé à trouver un local pour les agonisants, encore n'est-ilpas entièrement préparé. Les admissions sont nécessairement très-rares, <strong>et</strong>, chose horrible ! on est souvent obligé d'attendrequ'un malheureux soit ôté de sa couche pour la donner à un autre. — D'un autre côté la construction en est lourde ; lesappartements sont humides <strong>et</strong> mal éclairés ; l'air qu'on y respire est concentré <strong>et</strong> malsain, aussi les enfants qu'on y élèvesont-ils presque tous remarquables par leur difformité <strong>et</strong> leur air maladif.La ville a depuis quelques années ach<strong>et</strong>é un terrain nommé Tivoli, au haut de la rue de la Duchée, en face <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong>cim<strong>et</strong>ière, pour en faire une dépendance de c<strong>et</strong> établissement. Ce ne sont guère que des jardins <strong>et</strong> des maisons qui tombenten ruines. On y a transféré les aliénés qui troublaient la tranquillité de leurs camarades, ils sont au nombre de 17.C<strong>et</strong> établissement est dirigé par une supérieure <strong>et</strong> administré par une commission nommée par le préf<strong>et</strong> de la Manche.[p. 85]Tous les hôpitaliers s'occupent à préparer pour calfater, des étoupes de chanvre goudronnées. Ce travail rapporte à peuprès 6,000 francs par an.Le 6 juin 1811, Napoléon avait autorisé la ville de <strong>Cherbourg</strong> à construire un nouvel hôpital, triple de celui qui existe, avecles fonds qui proviendraient de la vente de celui-ci. Il y adjoignait une allocation de 20,000 francs pendant neuf ans, à partir de1815. Mais Napoléon fut c<strong>et</strong>te année là même, relégué à l'île d'Elbe, l'année suivante à Sainte-Hélène, <strong>et</strong> l'hôpital attendencore l'allocation promise.Nous aurions dû peut-être placer ici les articles concernant la CHAPELLE DU VOEU <strong>et</strong> l'ABBAYE ; cependant il nous a sembléplus logique d'en finir d'abord avec tout ce qui se trouve de remarquable intra muros ; nous ferons suivre ensuite tous lesédifices religieux qui, à différentes époques, ont été construits en dehors de la ville.COUVENT DE BÉNÉDICTINES.Sous le numéro 17 de la rue au Fourdrey, on voit une porte carrée entourée de sculptures, <strong>et</strong> de deux colonnes cannelées,le tout mutilé par le temps, <strong>et</strong> encore plus par la main des hommes. C<strong>et</strong>te porte date <strong>du</strong> commencement <strong>du</strong> XVII e siècle.


Après l'exécution, pour cause d'inceste avec son jeune frère, de la dernière héritière <strong>du</strong> nom de Tourlaville, les membresrestants de c<strong>et</strong>te famille, l'abbé[p. 68]de Tourlaville ou de Hambye, <strong>et</strong> son frère Jean ne se consolèrent de ce malheur que par des actes de bienfaisance enversles pauvres, <strong>et</strong> de pieu<strong>ses</strong> dotations aux égli<strong>ses</strong>. Ce fut ce dernier qui en 1625 construisit c<strong>et</strong> édifice pour en faire un couventde Bénédictines. Charlotte de La Vigne, soeur de l'épouse de Jean, en fut la première abbesse.Ce couvent ne subsista qu'une année. La peste qui était venue ravager la Normandie en 1504, 1517, 1554, avait reparu à<strong>Cherbourg</strong> en 1621. Plusieurs religieu<strong>ses</strong> en furent atteintes ; leurs compagnes effrayées se r<strong>et</strong>irèrent, à l'exemple d'un grandnombre des habitants de la ville, à Valognes, dans un établissement qui ne devait être que provisoire ; mais les soeurspréférèrent bientôt c<strong>et</strong>te demeure à celle qu'elles occupaient précédemment ; elles s'y fixèrent, <strong>et</strong> leur maison y a subsistéjusqu'en 1789 sous le titre de Notre-Dame-de-Protection. C'est aujourd'hui l'hospice civil de Valognes. On y lit encorel'inscription suivante :« En l'an de Nostre Seigneur MDCXXXV, le XXIII de mai, le pape Urbain séant ; Louis XIII régnant ; Léonor de Matignon,évêque de Coutances ; Charlotte de la Vigne, première abbesse,J'ai été placée en l'honneur <strong>et</strong> gloire de Dieu, de la très-sainte Vierge <strong>et</strong> <strong>du</strong> glorieux père saint Benoist, pour pierrefondamentale, par noble dame Madeleine de La Vigne, dame d'Emondeville <strong>et</strong> Ozeville, épouse <strong>du</strong> noble seigneur Jean deTourlaville,seigneur <strong>du</strong>dit lieu, <strong>et</strong> soeur de ladite abbesse. »[p. 87]Il y a aussi à <strong>Cherbourg</strong> deux autres constructions qui ont mérité d'être nommées ici, non par leur aspect qui n'a rien deremarquable, mais par les souvenirs qui s'y rattachent.MAISON DE SAINT CLAIR.L'une à l'angle de la rue des Moulins <strong>et</strong> d'une place qui hésite entre le nom de la Révolution <strong>et</strong> celui de la Trinité, est unevieille maison aux murs noircis <strong>et</strong> chargés de vétusté ; l'architecture en est irrégulière <strong>et</strong> dénote les réparations de différentsâges, mais elle garde encore sa cheminée arrondie, composée de briques rouges <strong>et</strong> noires, <strong>et</strong> <strong>ses</strong> touffes de pariétaires auxrameaux rosés, d'ombilics <strong>et</strong> de giroflées jaunes, derniers amis restés fidèles à la vieillesse <strong>et</strong> au malheur.C<strong>et</strong>te maison serait, d'après la tradition, un des plus anciens édifices de <strong>Cherbourg</strong>, puisqu'on prétend qu'elle servit à logersaint Clair, venu en France vers l'an 807.Ce saint, qui fut un des apôtres <strong>du</strong> Cotentin, était né, au rapport des biographes, sur le bord de la Tamise, dans le villaged'Orchester, d'une famille illustre <strong>et</strong> considérée dans le pays. Parti d'Angl<strong>et</strong>erre parce qu'on voulait lui faire épouser uneprincesse, il aborda à <strong>Cherbourg</strong> avec deux jeunes gens qui avaient consenti[p. 88]à le suivre ; il se r<strong>et</strong>ira bientôt dans une forêt qui couvrait toute la plage occidentale de la ville, à l'endroit de la commune deNacqueville où l'on voit encore une p<strong>et</strong>ite chapelle qui lui est consacrée. Il y trouva, dit-on, deux ermites auxquels il s'associapendant quelque temps ; mais forcé de fuir devant les persécutions des habitants des côtes, il se r<strong>et</strong>ira dans le monastère deMadane, Mau<strong>du</strong>in ou Meu<strong>du</strong>n, fondé par saint Scubilion, monastère qu'on place également à la Bucaille, près <strong>Cherbourg</strong>, àNégreville <strong>et</strong> à S.t-Pair, près Granville. Le charme de <strong>ses</strong> prédications, l'onction de sa parole, attiraient à lui un grand nombred'auditeurs, de femmes surtout ; une dame de haut rang qui y assistait souvent, l'aima <strong>et</strong> osa le lui dire. Clair, pour échapper à<strong>ses</strong> persécutions, s'enfuit en Haute-Normandie ; mais son talent l'y suivit <strong>et</strong> fit découvrir sa r<strong>et</strong>raite à la femme qui l'avaitaimé ; deux hommes qu'elle avait envoyés vers lui n'ayant pu le faire consentir à r<strong>et</strong>ourner près d'elle, le décapitèrent : dansun moment de jalousie, elle leur avait, dit-on, donné c<strong>et</strong> ordre. Clair, suivant la chronique, prit sa tête dans <strong>ses</strong> mains <strong>et</strong> parlalong-temps après qu'elle fut coupée : l'endroit où il fut enterré porte encore son nom ; c'est Saint-Clair-sur-Epte, près deGisors, où fut conclu le traité de 912, par lequel Charles-le-Simple cédait la Neustrie à Rollon, chef des Normands.Le culte de ce saint est répan<strong>du</strong> dans toutes les parties de la France, <strong>et</strong> l'on compte un grand nombre de[p. 89]


saints Clair, dont les actes ne sont pas plus authentiques les uns que les autres. Ils guérissent tous des maladies des yeux[39].MAISON DE L'ABBÉ DE BEAUVAIS.L'autre qui appartient à des temps plus rapprochés de nous, est située sous le numéro 15, auprès de l'hôpital civil, au coinde la rue <strong>du</strong> Nord, <strong>et</strong> habitée en ce moment par le sieur Fleury, tonnelier.C'est dans la chambre qui fait face aux deux rues que naquit, le 10 décembre 1731, l'homme qui, au milieu de la courcorrompue <strong>et</strong> libertine de Louis XV, osa réveiller le roi, endormi parmi les flatteries <strong>et</strong> les plaisirs, par ces audacieu<strong>ses</strong>paroles : « Sire, mon devoir de ministre de Dieu m'ordonne de vous dire que vos peuples sont malheureux, que vous en êtesla cause <strong>et</strong> qu'on vous le laisse ignorer. » Jean-Baptiste-Charles-Marie de Beauvais.Son père, qui était avocat au parlement de Paris, ne le laissa pas long-temps à <strong>Cherbourg</strong> ; il l'emmena dans la capitale <strong>et</strong>lui fit faire <strong>ses</strong> études au collège de Harcourt.Le jeune homme ne tarda pas à se distinguer dans la carrière ecclésiastique qu'il embrassa de bonne heure ; <strong>ses</strong> sermonslui firent bientôt une grande réputation : imagination ardente, ame sensible <strong>et</strong> pleine[p. 90]d'onction, il répandait dans <strong>ses</strong> écrits les nobles qualités de son intelligence, <strong>et</strong> souvent il mérita d'être comparé à Fénélon <strong>et</strong>à Massillon ; mais il a de plus que tous deux une élévation de pensée, une énergie dont, depuis Bossu<strong>et</strong>, la France n'avaitpas offert de modèle.Dès 1668, il fut choisi pour prononcer le panégyrique de S.t-Augustin en présence de l'assemblée générale <strong>du</strong> clergé.Appelé bientôt après à la cour, il fut désigné en 1773 pour occuper un siége épiscopal. Mais le cardinal de la Roche-Aymons'y opposa en objectant qu'il n'était pas noble. « Si je croyais, lui répondit fièrement Beauvais, que la noblesse fût la principalecondition requise pour l'épiscopat, je foulerais ma croix aux pieds, <strong>et</strong> je renoncerais à la haute dignité dont je suis revêtu. » Lecardinal fut obligé de céder, <strong>et</strong> Beauvais fut nommé évêque de Senez. Ce fut l'année suivante qu'il fit devant Louis XV lefameux sermon sur la Cène qui avait pour texte ces paroles devenues depuis prophétiques : « Encore quarante jours <strong>et</strong>Ninive sera détruite » ! Il s'adressait au roi. L'impression de ce discours fut terrible, lorsqu'on le rapprocha de la mort de LouisXV, arrivée en eff<strong>et</strong> quarante jours après. Beauvais fut chargé de prononcer l'éloge funèbre <strong>du</strong> prince défunt. « Le silence despeuples, s'écrie-t-il dans ce discours vraiment éloquent <strong>et</strong> qui a été tra<strong>du</strong>it en anglais, « le silence des peuples est la leçondes rois. » Il se rendit ensuite à son évêché ; mais son[p. 91]manque de noblesse lui suscita une foule de tracasseries qui le forcèrent à se dém<strong>et</strong>tre de sa charge. R<strong>et</strong>iré dans la capitale,il avait, en 1683, formé le proj<strong>et</strong> de fonder un séminaire pour les jeunes prédicateurs ; l'archevêque de Paris, de Juigné, avaitapprouvé son plan, lorsque la révolution vint à éclater. Nommé député aux états-généraux par le bailliage de Paris, lemauvais état de sa santé l'empêcha de s'y distinguer ; il mourut l'année suivante (4 avril 1790) d'une maladie de langueur, àl'âge de 59 ans.On a de lui, 1.° Plusieurs sermons ; 2.° Les panégyriques de S.t-August in, de S.t-Louis <strong>et</strong> de S.t-Vincent de Paule ; 3.° Lesoraisons funèbres de l'infant don Philippe, <strong>du</strong>c de Parme, <strong>du</strong> maréchal de Muy, de M. de Broglie, évêque de Noyon, de LouisXV <strong>et</strong> de M. Léger [40]. Ces deux derniers discours suffiraient seuls pour assurer sa réputation. Tous <strong>ses</strong> ouvrages ont étépubliés en 1807 par M. l'abbé Gaillard, 4 vol. in-12.Nous ne pouvons abandonner ce suj<strong>et</strong>, sans reprocher à nos concitoyens leur indifférence pour un grand homme. Il n'y apas la moindre inscription sur sa demeure, — ce n'est pas dans les écrits de <strong>ses</strong> concitoyens qu'on peut trouver des détailssur sa vie, — <strong>et</strong> la bibliothèque ne possède pas les oeuvres <strong>du</strong> premier,[p. 92]je dirai même plus, <strong>du</strong> seul écrivain illustre dont <strong>Cherbourg</strong> ait eu à s'énorgueillir ! « Les habitants de la Ferté-Milon, dit M. deBerruyer, montrent avec orgueil la maison de Racine ; ceux de Château-Thierry, celle de La Fontaine ; ceux de Rouen, cellede Corneille ; ceux de Caen, celle de Malherbe. La maison où un homme de génie a vu le jour n'est plus une maison, c'est untemple. »ANTIQUITÉS RELIGIEUSES EXTÉRIEURES A LA VILLE.


Sur la route de l'Abbaye, auprès des établissements <strong>du</strong> Port-Militaire, le voyageur aperçoit à sa droite une p<strong>et</strong>ite chapelleau milieu des ormes, puis dans une grande cour remplie de boul<strong>et</strong>s, un assez joli bâtiment au fronton <strong>du</strong>quel on a écrit :ARSENAL DE LA GUERRE, <strong>et</strong> plus loin de hauts murs qui ferment un enclos. La chapelle est celle de Notre-Dame-<strong>du</strong>-Voeu ;l'enclos renfermait autrefois l'abbaye <strong>du</strong> même nom, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te maison servait de demeure à l'abbé.Elle fut bâtie, à ce qu'on croit, sous le règne de Henri II, par Osbert de la Heuse, gouverneur de <strong>Cherbourg</strong>, qui, vieux <strong>et</strong>dégoûté <strong>du</strong> monde, alla se r<strong>et</strong>irer dans ce monastère, dont il se fit recevoir chanoine huit jours avant de mourir. L'origine de lachapelle <strong>et</strong> de l'abbaye remonte jusqu'au douzième siècle.CHAPELLE DE NOTRE-DAME-DU-VOEU.La reine d'Angl<strong>et</strong>erre, Mathilde, avait mécontenté les barons, qui, d'ailleurs las de la domination normande,[p. 93]l'avaient remplacée par un de leurs compatriotes, Etienne, comte de Boulogne. Vaincu dans un combat meurtrier, l'anglosaxonavait été contraint de céder, mais l'altière Mathilde, en remontant sur le trône, refusa de ratifier la charte accordée auxbarons par son père. Chassée d'Angl<strong>et</strong>erre, elle fut obligée de chercher <strong>du</strong> secours dans la Normandie, qui n'avait pas prispart à la révolte.La reine fugitive se dirigeait vers le port de <strong>Cherbourg</strong>, que le comte d'Anjou avait repris à Etienne l'année précédente.Tout-à-coup le ciel s'obscurcit, la mer grossit <strong>ses</strong> ondes, le vent siffle dans les cordages ; une tempête affreuse se déclare,des vagues menacent à chaque instant d'engloutir la frêle embarcation ; l'effroi est dans tous les coeurs : c'est à peine si l'ona la force d'adresser au ciel quelques insignifiantes prières. — « Si je revois la terre, s'écria Mathilde, je chanterai une hymneà la mère <strong>du</strong> Sauveur, je lui élèverai une chapelle, <strong>et</strong> je fondrai une abbaye à l'endroit où je débarquerai. » Elle n'avait pas finic<strong>et</strong>te prière, que la tempête s'apaisa tout-à-coup ; les vagues cessèrent de déferler sur les flancs <strong>du</strong> navire, <strong>et</strong> le calmesuccéda aux fureurs de l'orage. Bientôt la côte bizarrement accidentée de <strong>Cherbourg</strong> apparut aux regards étonnés. « Chante,reine, s'écria un marin dans son enthousiasme, chante, reine, voici la terre. » Mathilde chanta en eff<strong>et</strong>, <strong>et</strong> depuis lors, l'anseoù elle débarqua porte le nom de Chantereyne.[p. 94]Elle ne tarda pas à tenir sa promesse, <strong>et</strong> en 1145, elle fit j<strong>et</strong>er les fondements d'une chapelle qui porta le nom de sonVoeu.C<strong>et</strong>te chapelle n'est pas celle qui existe aujourd'hui ; détruite probablement à la suite d'une invasion, ou abattue dans lacrainte que la mer, qui s'avançait d'une manière effrayante, n'envahît la modeste construction, elle a été rebâtie depuis àl'endroit où elle se trouve aujourd'hui.Il n'y a pas encore un siècle qu'on voyait les ruines de la première, dans un champ qui portait le nom de Clos de laChapelle ; maintenant il est compris dans l'enceinte <strong>du</strong> Port-Militaire.« La chapelle <strong>du</strong> Voeu a appartenu à l'abbaye jusqu'à l'époque de la révolution. Dévastée alors, comme tous lesétablissements religieux, elle fut donnée, par un décr<strong>et</strong> <strong>du</strong> 20 mars 1791, au ministère de la marine, qui la céda quelqu<strong>et</strong>emps après à l'artillerie de terre. On en fit une salle d'artifice. En 1817, Louis XVIII rendit une ordonnance qui la rétablit, <strong>et</strong> leshabitants la restaurèrent complètement à leurs propres frais. L'administration de la marine donna pour sa part les débris <strong>du</strong>vaisseau l'Eylau, que l'on employa à la construction de la tribune.« Elle fut rouverte <strong>et</strong> ren<strong>du</strong>e aux exercices de la religion le 15 décembre 1818.« C<strong>et</strong>te chapelle a 45 pieds de longueur sur 16 de largeur. Elle peut contenir environ 60 personnes. On[p. 95]y remarque deux p<strong>et</strong>ites statues en albâtre, venant de l'ancienne abbaye, l'une de sainte Mathilde, l'autre de saint Augustin, <strong>et</strong>quelques tableaux tels que :« Au-dessus de l'autel :Un Naufrage,


Une Vierge <strong>et</strong> l'Enfant-Jésus,A gauche de l'autel,Le voeu de l'Impératrice Mathilde, par M. Henry fils ;Dans la nef,Un Christ.Le Martyr de S.t-Symphorien.Sur la droite de l'autel, dans un grand cadre, est l'inscription suivante :« Ad perp<strong>et</strong>uam rei memoriam.La chapelle Notre-Dame-<strong>du</strong>-Voeu, dévastée pendant la révolution, ren<strong>du</strong>e à la religion par ordonnance <strong>du</strong> roi le 3décembre 1817, restaurée par les habitants, a été rouverte à la piété le 15 décembre 1818. L'impératrice Mathilde, devenuereine d'Angl<strong>et</strong>erre, l'érigea antérieurement à l'abbaye de <strong>Cherbourg</strong>, l'an de J.-C. 1145, selon le voeu qu'elle fit dans un<strong>et</strong>empête qui la j<strong>et</strong>a sur la côte près d'ici, nommée Chantereyne depuis c<strong>et</strong> événement.Ora pro nobis sancta Dei genitrix. »On voit encore au-dessous de ce cadre l'épitaphe de Léobin Le Fillastre, <strong>et</strong> <strong>du</strong> côté opposé, la pierre sépulcrale <strong>du</strong> mêmeabbé.[p. 96]« La chapelle de Notre-Dame-<strong>du</strong>-Voeu est placée sous l'administration de la fabrique <strong>et</strong> sous la surveillance <strong>du</strong> curé de<strong>Cherbourg</strong>. » On y dit une messe tous les premiers dimanches <strong>du</strong> mois, <strong>et</strong> quelques autres pour les fondateurs, à différentesépoques.ABBAYE DU VOEU.Lorsque les vagues venaient battre jusqu'au pied <strong>du</strong> Roule, les côtes situées au nord-est <strong>et</strong> au nord-ouest étaient plusavancées dans la mer, <strong>et</strong> l'île <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong> (Insula Ulmi), beaucoup plus grande qu'elle ne l'est aujourd'hui, puisque ce fut lepoint que Mathilde choisit pour accomplir la partie de son voeu, concernant une abbaye.La position de c<strong>et</strong> établissement dans l'île <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong> résulte d'une charte, sans date, donnée à Rouen par Henri II, fils deMathilde, <strong>et</strong> d'une bulle d'Urbain III, en date <strong>du</strong> 12 mai 1185.On ne sait à quelle époque elle a été transportée au lieu qu'elle occupe aujourd'hui.La fondation de c<strong>et</strong>te communauté est attribuée également à Guillaume-le-Conquérant <strong>et</strong> à Mathilde. Il paraît qu'en eff<strong>et</strong>Guillaume fonda un monastère en c<strong>et</strong> endroit, mais c'était probablement peu de chose, <strong>et</strong> presque toute l'oeuvre doit êtreattribuée à la reine d'Angl<strong>et</strong>erre, ainsi que cela résulte des passages suivants.On lit dans le Nécrologe de l'Abbaye :Pridiè nonas julii, obiit Henricus, rex Angliae, fundator hujus ecclesioe. Item, 4 i<strong>du</strong>s septembris, obiitMathildis, imperatrix, hujus ecclesioe fundatrix.Henri commence sa charte ainsi :[p. 97]Pro Dei amore <strong>et</strong> pro animâ dominae <strong>et</strong> matris meae, Mathildis, imperatricis, quae eam abbatiam à FUNDAMENTISaedificavit, <strong>et</strong>c.


Mathilde avait un goût particulier pour c<strong>et</strong>te abbaye. Il y avait alors à Jersey une riche <strong>et</strong> célèbre communauté fondée en1125 par Guillaume Hamon, sous le nom de S.t-Hélier. Elle en fit venir l'abbé Robert, pour prendre la direction de celle de<strong>Cherbourg</strong>. Algarve, 46. e évêque de Coutances, chargé par elle de choisir des religieux, y envoya des chanoines réguliers deS.t-Augustin, qu'il tira <strong>du</strong> monastère de S.te-Barbe en Auge.Déjà riche des dons de Mathilde <strong>et</strong> de ceux de <strong>ses</strong> courtisans, c<strong>et</strong>te communauté le devint encore plus sous Henri II, sonfils. Ce prince donna à l'abbé le patronage de Barfleur <strong>et</strong> de Gatteville ; il fournit des fonds pour achever <strong>et</strong> embellir lesbâtiments, <strong>et</strong>, en 1181, il assista lui-même à la dédicace de l'église, qui fut faite par Henri, 35. e évêque de Bayeux,accompagné des évêques d'Avranches <strong>et</strong> de Barthewels.Quelques années plus tard (1185), Gautier de Coutances, archevêque de Rouen <strong>et</strong> frère de Benjamin, abbé de<strong>Cherbourg</strong>, obtint <strong>du</strong> roi la réunion de l'abbaye de S.t-Hélier de Jersey à l'abbaye <strong>du</strong> Voeu, quoique la première fût plusconsidérable que la seconde. Il ne resta à S.t-Hélier que cinq chanoines <strong>et</strong> un prieur relevant de l'abbaye de <strong>Cherbourg</strong>. C<strong>et</strong>état de cho<strong>ses</strong> a <strong>du</strong>ré jusqu'à la réforme.[p. 98]Clément VI annexa encore à c<strong>et</strong>te communauté les égli<strong>ses</strong> des Pieux, <strong>du</strong> Theil, de Sideville <strong>et</strong> <strong>du</strong> Mesnil-au-Val.Mais la fin de la domination anglaise en Normandie fut aussi le terme de sa prospérité ; depuis lors, située sur une pointeavancée près d'une ville qui s'avance elle-même comme pour donner la main à l'Angl<strong>et</strong>erre, elle ne pouvait échapper auxravages des dévastateurs qui s'abattaient de temps en temps sur nos côtes.Le premier pillage dont il soit question dans les auteurs, se rapporte à l'année 1293, sous le règne d'Edouard I ; une partiedes bâtiments furent livrés aux flammes, les livres enlevés <strong>et</strong> un religieux emmené prisonnier.Une bulle accordée en 1329 par le pape Jean XXII, à la sollicitation de Philippe-de-Valois, porte que l'abbaye avait étébrûlée deux fois, <strong>et</strong> qu'on en avait détruit « les ornements, les livres, les chartes <strong>et</strong> les monuments, » <strong>et</strong> depuis c<strong>et</strong>te époque,pendant les sanglantes querelles qui éclatèrent entre l'Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> la France, il ne se montra pas un seul p<strong>et</strong>it vaisseauanglais, il ne se fit pas une seule descente, que la pauvre abbaye exposée sans défense, ne payât pour la résistance qu'onéprouvait <strong>du</strong> côté de la ville.ABBAYE SARTRINE. — Ce fut pour échapper à ces inconvénients de leur situation, que dès l'an 1307, lorsque <strong>Cherbourg</strong> futentouré de murailles pour la première fois, Raoult <strong>du</strong> Coudray, alors abbé <strong>du</strong> Voeu,[p. 99]songea à chercher dans l'intérieur de la place, un lieu pour se réfugier en temps de guerre. Il ach<strong>et</strong>a à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, dans la rueNouët ou au Blé, à l'endroit occupé aujourd'hui par les numéros 19 <strong>et</strong> 21, deux maisons qui se touchaient ; l'un des vendeurss'appelait Thomas Sartrin, ce qui fit donner à c<strong>et</strong>te maison le nom d'Abbaye Sartrine. Il y fit bâtir aussi une chapelle quisubsistait encore en 1549, lors de l'arrivée de François I. er à <strong>Cherbourg</strong>.Elle a été démolie depuis, <strong>et</strong> remplacée par la prison <strong>du</strong> Balliage ; une p<strong>et</strong>ite rue qui porte le nom de Chasse de l'ancienneprison, en rappelle seule le souvenir.Ce fut dans c<strong>et</strong>te maison qu'ils se r<strong>et</strong>irèrent pendant les dix mois que <strong>du</strong>ra le siége de 1418, tandis que les Anglaisoccupaient leur abbaye.Las de tous ces pillages, <strong>et</strong> craignant d'ailleurs que l'ennemi ne s'en servît comme d'une forteresse pour attaquer la ville,Charles-le-Mauvais fit raser l'église <strong>et</strong> l'abbaye. Pour dédommager les religieux, il leur accorda, en 1370, une charte parlaquelle il leur perm<strong>et</strong>tait d'acquérir jusqu'à 40 sols de revenu annuel sans payer les droits d'amortissement, « enconsidération, dit-il, de ce que plusieurs de leurs maisons ont esté abattues <strong>et</strong> destruites, aucunes parce qu'elles estaient prezdes fossez nouvellement faicts autour de ladite ville, <strong>et</strong> les héritages prins <strong>et</strong> occupez aux dits murs <strong>et</strong> fossez, <strong>et</strong>c. »Après le départ des Anglais, l'abbaye fut reconstruite[p. 100]La nouvelle église fut consacrée par Jean, évêque de Justinopolis, <strong>et</strong> coadjuteur de Coutances, en 1464, deux ans avant laparoissiale de <strong>Cherbourg</strong>.


« En 1514, <strong>nouveau</strong> pillage par les Anglais. »En 1574, pendant les guerres de religion, Montgommery, général protestant, après avoir pris Carentan, Domfront,Valognes, vint pour assiéger <strong>Cherbourg</strong> ; mais il se r<strong>et</strong>ira sans avoir tenté l'affaire. Il se contenta de saccager les <strong>environs</strong>, depiller l'abbaye <strong>et</strong> de m<strong>et</strong>tre le feu dans l'église aux stalles <strong>du</strong> célébrant. Suivant Avoyne de Chantereyne, à qui nousempruntons ces détails, les vestiges en paraissaient encore dans le choeur, <strong>du</strong> temps où il écrivait son histoire. — Le dernierpillage eut lieu lors de la descente des Anglais dans l'anse d'Urville en 1758 ; ils enlevèrent jusqu'aux cloches de l'abbaye« L'abbaye de <strong>Cherbourg</strong> a eu trente-deux abbés réguliers. »Le premier, Robert, que Mathilde avait fait venir de S.t-Hélier, fut envoyé pour défendre auprès <strong>du</strong> pape Alexandre III,Thomas Beck<strong>et</strong>, archevêque de Canterbury. On sait que c<strong>et</strong>te mission n'eut d'autre résultat que d'engager le pape à faire despromes<strong>ses</strong> qu'il n'avait pas dessein de tenir.On sait aussi l'assassinat de Thomas Beck<strong>et</strong> (1174), la part que Henri II fut accusé d'y avoir prise, <strong>et</strong> la canonisation de ceprélat sous le nom de S.t-Thomas de Canterbury.Le second abbé de <strong>Cherbourg</strong>, nommé Jonon ou Jonas, se plaint dans une l<strong>et</strong>tre d'être malheureux,[p. 101]exilé, étranger, (miser, exsul <strong>et</strong> peregrinus) il déplore vivement dans une élégie les malheurs de l'abbaye <strong>et</strong> les siens ; on ytrouve ces vers :Hic terrae steriles <strong>et</strong> vinea nulla superstes,Silva car<strong>et</strong> foliis, desunt sua pascua pratis.Ici le sol n'a point de moissons ni de vignes ;Les bois sont sans feuillage <strong>et</strong> les prés sans troupeaux.Le dernier abbé régulier fut Léobin Le Fillastre, qui alla en 1532, avec tous <strong>ses</strong> religieux <strong>et</strong> le clergé, jusqu'au delà <strong>du</strong> pont<strong>du</strong> Roule, en procession au devant de François I. er . Il mourut en 1558.Son épitaphe <strong>et</strong> la pierre sépulcrale de son tombeau ont été conservées par l'abbé Demons, <strong>et</strong> se voient encore dans lachapelle de Notre-Dame-<strong>du</strong>-Voeu. Il est représenté de grandeur naturelle en chasuble <strong>et</strong> la crosse à la main.Voici son épitaphe :Ah ! Filastraeus, qui quondam gloria gentisExtitit, <strong>et</strong> sanctae religionis honos ;Qui que suos vivus praeclaris moribus auxit ;Tractavit que suae tam benè cuncta domûs ;Qui fut ex ternis longè gratissimus hospes,Nec caris unquam defuit indigenis,HICJACET. O fatum ! fatum lacrymabile cunctisAut quibus est virtus, aut pia cura fides !Atropos una taces : non laudans, invida, nempèQuod careas meritis una sub orbe suis [41][p. 102]Les abbés commendataires qui succédèrent aux abbés réguliers sont au nombre de onze. « Le dernier fut Lattier deBayane, depuis cardinal <strong>et</strong> auditeur de Rote, ensuite pair de France, mort en 1820, dans un âge très-avancé. »L'abbé <strong>du</strong> Voeu partageait avec le roi la seigneurie de <strong>Cherbourg</strong> ; il avait le pas sur tous les autres chefs religieux <strong>du</strong>diocèse, <strong>et</strong> portait la mître <strong>et</strong> la crosse ; il exerçait les droits nobiliaires, avait un colombier, une prison <strong>et</strong> une juridiction à lui.Voici la description que l'abbé Demons fait de l'abbaye :« Elle était à un quart de lieue à l'ouest de <strong>Cherbourg</strong>, » à 1169 mètres <strong>du</strong> port. « L'église <strong>et</strong> le couvent étaient placés àl'extrémité d'un vaste enclos entouré de murs dont la plus grande partie subsiste encore. Dans une cour spacieuse s<strong>et</strong>rouvaient deux étangs ; un moulin <strong>et</strong> un colombier, avec les granges <strong>et</strong> autres bâtiments nécessaires à la faisance valoir. »


L'église, y compris le portail, avait 120 pieds de longueur <strong>et</strong> environ 40 de largeur. Elle était bien[p. 103]voûtée partout. Le choeur était séparé de la nef par un jubé ou tribune de pierre. C<strong>et</strong>te tribune était ornée <strong>du</strong> côté de la nefdes statues de grandeur presque naturelle de Notre-Seigneur <strong>et</strong> des Apôtres. Il y avait cinq autels dans c<strong>et</strong>te église, dont unétait dédié à Saint-Hélier, probablement depuis l'union <strong>du</strong> prieuré de ce nom dans l'île de Jersey, à notre abbaye. Le choeurétait grand ; les stalles avec leur couronnement offraient un bel ouvrage de scuplture. Il y avait un orgue placé comme celuide <strong>Cherbourg</strong> au bas de l'église. En 1712, pendant la messe solennelle de saint Augustin, patron de l'ordre, le nommé Bargis,organiste, tomba mort en touchant de l'orgue.« Le cloître n'était pas très-grand. Il occupait exactement l'emplacement de la cour, derrière la maison neuve. C'était unpéristyle soutenu de p<strong>et</strong>ites colonnes deux à deux. Le chapitre subsiste encore ; il est très-p<strong>et</strong>it, mais la voûte, qui est un peuélevée, est très-belle, Il y a encore plusieurs bâtiments qui faisaient partie <strong>du</strong> monastère. » [42]C<strong>et</strong>te abbaye fut supprimée le 12 octobre 1774. Elle servit ensuite de résidence au <strong>du</strong>c de Harcourt, gouverneur de laprovince. Ce fut là que Louis XVI alla loger lors de son voyage à <strong>Cherbourg</strong> en 1786.Louis XVI était alors roi glorieux <strong>et</strong> couronné, il ne prévoyait guère le sort qui l'attendait sept ans plus tard.[p. 104]Comme Mathilde, fondatrice de l'établissement, son dernier visiteur royal ne devait pas mourir sur le trône. Tous deuxavaient été entourés d'honneurs <strong>et</strong> d'hommages, tous deux furent en butte aux poursuites de leurs suj<strong>et</strong>s, l'une par trop deraideur, l'autre par le défaut contraire : tous deux plus à plaindre qu'à condamner, tous deux victimes des grands plutôt que <strong>du</strong>peuple, Louis pour avoir trop accordé à <strong>ses</strong> flatteurs, Mathilde pour avoir cédé trop peu à <strong>ses</strong> barons. Lui, meilleur peut-être <strong>et</strong>plus humain, elle plus grande <strong>et</strong> plus forte, car elle sut opposer un front calme aux dangers, car elle osa prendre un parti, <strong>et</strong>résister courageusement aux flots des opinions qui voulaient l'entraîner.L'habitation des anciens religieux est aujourd'hui l'Hôpital de la Marine ; il ne reste des anciens bâtiments que la salle <strong>et</strong> leréfectoire.« Dans la partie affectée au logement <strong>du</strong> directeur de l'artillerie de terre, dit M. de Berruyer, se trouve un monument quimérite de fixer l'attention <strong>du</strong> voyageur, <strong>et</strong> surtout de l'antiquaire. C'est la cheminée de la salle principale de l'ancienne Abbaye.C<strong>et</strong>te cheminée a 10 pieds de hauteur sur 8 environ de largeur, <strong>et</strong> est ornée de tableaux en relief parfaitement conservés.Nous devons à l'amitié de M. le chef d'escadron Plivart, sous-directeur, une explication fort ingénieuse de ces tableaux :Tableau supérieur. — Au milieu, on voit la[p. 105]Vierge près de son prie-dieu se r<strong>et</strong>ournant à l'arrivée de l'ange Gabriel.L'ange Gabriel fait une salutation. Il tient dans la main gauche une bagu<strong>et</strong>te mystique.Sur le prie-dieu, est un livre ouvert portant les armes de France <strong>et</strong> celles <strong>du</strong> seigneur abbé.A côté, est un carreau garni de franges pour s'agenouiller ; ensuite, c'est le lit de la Vierge avec un ciel, en forme debaldaquin, aux colonnes <strong>du</strong>quel se drapent des rideaux.La chambre est éclairée par des croisées dont les vol<strong>et</strong>s sont ouverts.A gauche, le Père éternel sort d'un nuage, au milieu de rayons lumineux.Un faisceau de <strong>ses</strong> rayons va porter le S.t-Esprit auprès de la Vierge.Le riche édifice que l'on voit après est le Paradis, sous le pérystile <strong>du</strong>quel se pressent une multitude d'anges.En dehors <strong>du</strong> tableau, <strong>et</strong> toujours <strong>du</strong> côté gauche, on voit le diable terrassé par saint Michel.


En dehors, <strong>et</strong> <strong>du</strong> côté droit, est un personnage jeune <strong>et</strong> richement vêtu, selon la mode <strong>du</strong> temps, dont la main se trouveprise entre les dents d'un pourceau engagé dans <strong>ses</strong> jambes. C<strong>et</strong>te figure est allégorique. On a voulu sans doute représenterl'homme <strong>du</strong> monde en proie au péché, dont il cherche en vain à se dégager.Le tableau se termine de ce côté par l'Abbé, engrand costume, proclamant la gloire de la Vierge.[p. 106]En pendant, <strong>du</strong> côté opposé, est un jeune moine, portant une bourse à sa ceinture ; c'est sans doute un frère quêteur ou l<strong>et</strong>résorier de l'abbaye.Tableau inférieur. — Au milieu, se trouve un écusson dont les armes ont été effacées. Il est soutenu par deux figureshéraldiques.A gauche, on a essayé évidemment de représenter la Normandie, car on voit une montagne, des rochers, un donjon <strong>et</strong> unpaysan cueillant des pommes.A droite, des plantes d'aloès, une colonne à moitié brisée, une croix sur une hauteur, annoncent la Terre-Sainte.On voit un moulin dans lequel un anachorète est agenouillé devant un prie-dieu.Sur une montagne, dans le fond, est la ville de Jérusalem.A gauche, un chevalier part de la Normandie pour la conquête de la Terre-Sainte ; il presse les flancs de son cheval quis'élance au galop.A droite, un Musulman court défendre Jérusalem. La peur le saisit ; son cheval se cabre <strong>et</strong> le renverse ; ou peut-être, estcele personnage parti de la Normandie, qui meurt en Terre-Sainte ? C<strong>et</strong>te supposition serait assez vraisemblable ; en ce quele costume de l'homme <strong>et</strong> le harnachement <strong>du</strong> cheval sont absolument les mêmes de part <strong>et</strong> d'autre.La prise de Jérusalem, par Godefroy de Bouillon, ayant eu lieu en l'année 1099, le suj<strong>et</strong> traité dans le[p. 107]tableau inférieur prouve que la cheminée, dont nous venons de donner la description, n'a pu être construite qu'aucommencement <strong>du</strong> 12 e siècle ; ce qui s'accorde avec l'opinion que l'abbaye a été fondée en 1145 » [43].A côté de ces établissements qui remontent à l'époque <strong>du</strong> moyen âge, il en est d'autres d'une date plus rapprochée quidoivent aussi trouver leur place dans c<strong>et</strong> article consacré aux vieux monuments de <strong>Cherbourg</strong>. Nous y comprendrons mêmela CHAPELLE S.t-SAUVEUR, quoiqu'elle soit encore aujourd'hui sur le territoire d'Octeville, lorsque les autres établissements ontcessé d'appartenir aux communes d'Equeurdreville <strong>et</strong> de Tourlaville pour être réunis à celle de <strong>Cherbourg</strong>.LE ROULE. — L'ERMITAGE DE HAUT.En entrant dans notre ville, le voyageur remarque à sa gauche une montagne aux flancs bruns frappés de rouge en été, dejaune au printemps <strong>et</strong> en automne, sillonnés de chemins tortueux, semés d'éboulements de terre rouge, de caillouxblanchâtres, de taches de fougères vertes <strong>et</strong> fauves tour à tour, de traînées d'herbe que l'eau y fait pousser çà <strong>et</strong> là <strong>et</strong> delinge blanc mis à sécher, avec un p<strong>et</strong>it fort écrasé au somm<strong>et</strong>, <strong>et</strong> <strong>du</strong> côté de la ville, des roches coupées à[p. 108]pic, pleines de crevas<strong>ses</strong> <strong>et</strong> de fissures. C<strong>et</strong>te montagne est le Roule.On jouit <strong>du</strong> haut de la plateforme aride qui s'étend au somm<strong>et</strong> d'une des vues les plus vastes des <strong>environs</strong>. A vos pieds, laville avec <strong>ses</strong> toîts gris, partagée en deux parties inégales par le port de commerce encadré dans les arbres avec sa doublej<strong>et</strong>ée qui va amicalement au-devant des navires, les blanches maisons <strong>du</strong> quartier des Mielles, la ver<strong>du</strong>re frappée de blancdes saules de Tourlaville ; puis le sol s'élevant tout à coup, la croupe arrondie de la lande Saint-Maur <strong>et</strong> les falai<strong>ses</strong> étagées<strong>et</strong> nues qui se prolongent jusqu'au cap Lévi, en face, la mer, l'Ile-Pelée, la Digue, la rade avec <strong>ses</strong> vaisseaux à l'ancre, le fort


<strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>, les travaux <strong>du</strong> Grand-Port, puis au loin, par-dessus les enclos, les arbres, les villages, les routes, par-dessus ledouble clocher de Querque-ville <strong>et</strong> le fort <strong>du</strong> même nom, l'anse d'Urville où les Anglais descendirent en 1758, <strong>et</strong> les falai<strong>ses</strong>de Gréville ; puis au sud, la Fauconnière avec son télégraphe, <strong>et</strong> Quincampoix avec sa jolie rivière <strong>et</strong> <strong>ses</strong> p<strong>et</strong>its bois.Les lieux élevés <strong>et</strong> nus inspirent la mélancolie <strong>et</strong> une sorte d'élan vers les contemplations mystiques. Là, ditChâteaubriand, l'ame religieuse, comme une plante des montagnes, semble s'élever vers le ciel pour lui offrir <strong>ses</strong> parfums.Les autels des Druides, les premières égli<strong>ses</strong> chrétiennes ont été bâties sur des hauteurs, <strong>et</strong> selon l'Ecriture, les juifs allaient[p. 109]sacrifier sur les montagnes. Le Roule devait avoir aussi son monument religieux.A quelques pas à l'est <strong>du</strong> fort [44] on voit, comme une oasis au milieu d'un désert, un p<strong>et</strong>it massif d'arbres autour d'unemaisonn<strong>et</strong>te nouvellement badigeonnée. Malgré les injures <strong>du</strong> marteau <strong>et</strong> <strong>du</strong> platre, on distingue dans le pignon qui est enface de la porte d'entrée, au-dessus d'une lucarne à foin, assise les mains sur <strong>ses</strong> genoux, une Vierge sculptée en relief. Puisaprès avoir traversé une cour enfoncée dans le sol, on remarque encore à l'autre extrémité de la chaumière, quelquesarceaux gothiques <strong>et</strong> la moitié d'une statu<strong>et</strong>te en calcaire.Ces bâtiments qui ressemblent à un nid bien abrité dans le somm<strong>et</strong> d'un arbre, sont le centre d'une p<strong>et</strong>ite ferme consistantseulement en deux ou trois pièces de terre labourées, situées sur le haut même de la montagne, quoique le sol qui lesentoure soit à peu près impropre à la végétation des céréales.En l'an 1652, un jeune prêtre de <strong>Cherbourg</strong>, nommé le P. Duquesne, épris de la solitude <strong>et</strong> de l'isolement de ce coin d<strong>et</strong>erre, le fit entourer d'arbres <strong>et</strong> s'y r<strong>et</strong>ira pour prier. Il avait donné à sa r<strong>et</strong>raite le nom d'Ermitage de Notre-Dame deProtection. Quelques années après sa mort, l'Ermitage qui était resté sans habitants fut occupé par un capucin <strong>du</strong> midi,nommé le frère Pierre Jacqu<strong>et</strong>. Les évêques[p. 110]de Coutances y envoyèrent ensuite d'autres moines mendiants <strong>du</strong> même ordre. Ils étaient très-misérables ; dans l'intervallede leurs occupations, ils apprenaient à lire aux enfants, <strong>et</strong> apportaient sur leur dos, <strong>du</strong> bas de la montagne, la terre végétalequi s'y trouve aujourd'hui. Ils restèrent ainsi jusqu'à la révolution.Leur cim<strong>et</strong>ière était sur l'emplacement <strong>du</strong> fort actuel. Ils y avaient d'abord placé une croix de bois, nommée la Croix <strong>du</strong>Roule. Détruite en 1753 par un orage, elle fut remplacée par une autre en granit. Sur une pierre, placée probablement au piedde c<strong>et</strong>te croix, <strong>et</strong> qui servait, il n'y a pas encore long-temps, à fermer le four <strong>du</strong> fermier, on lit l'inscription suivante ; lespremières l<strong>et</strong>tres <strong>du</strong> nom <strong>du</strong> curé de Tourlaville sont enlevées :« D. O. M.Ci-git le corps <strong>du</strong> R. P. Duquesne, prêtre, fondateur de l'hermitage de Notre-Dame de Protection, où il a été 40 ansanachorète.Il est mort en odeur de saint<strong>et</strong>é, le 11 février 1692, à 66 ans, étant né à <strong>Cherbourg</strong>, le 11 février 1626.Le frère Pierre Jacqu<strong>et</strong>, originaire <strong>du</strong> Dauphiné, nommé vraiment solitaire, mourut dans c<strong>et</strong>te maison après 20 ans derésidence, le 20 juin 1750.L'ancienne croix de bois ayant été abattue par le[p. 111]tonnerre, les frères Benoît, Bruno <strong>et</strong> Pacome, aidés de la charité publique, la bénédiction a été faite le 17 janvier 1764, parMessire..............., curé de Tourlaville ; le 26 octobre 1769, a été inumé le père Bernard.Requi es cant in pace. »GROTTE DES FÉES. — ERMITAGE-DE-BAS.Au pied de c<strong>et</strong>te montagne, dans un champ qui depuis les <strong>nouveau</strong>x ouvrages qui ont été faits dans la partie N.-E. en est


séparé par un large chemin, on trouve une caverne connue de temps immémorial, sous le nom de GROTTE DES FÉES.Ce n'est pas ici le lieu d'examiner si le mot fée vient de fata, fatidica, vates, ou de tel autre nom semblable. Ce qu'il y a decertain, c'est qu'à l'origine, les fées étaient des espèces de prophétes<strong>ses</strong> qui prédisaient l'avenir <strong>du</strong> fond des antres, commela Sibylle de l'Enéide, ou les Druides<strong>ses</strong> de l'île de Sena [45] Plus tard, on en fit des êtres intermédiaires entre l'homme <strong>et</strong> ladivinité. Chaque contrée a eu <strong>ses</strong> fées particulières auxquelles elle a donné <strong>ses</strong> moeurs, <strong>ses</strong> goûts <strong>et</strong> <strong>ses</strong> passions. Etpendant que les fées orientales habitaient dans de beaux palais de marbre <strong>et</strong> de porphyre, au milieu d'une cour voluptueuse,<strong>et</strong> entourées de toutes les recherches <strong>du</strong> luxe, les fées de nos campagnes labouraient la terre, quoique leurs[p. 112]travaux ne fussent guère visibles, mangeaient de la gal<strong>et</strong>te, <strong>et</strong> pendant la nuit, montaient sur le cou des chevaux, dont ellesnouaient les crins pour servir d'étriers.Mais ce n'étaient pas ces fées qui habitaient la grotte qui nous occupe. Sa situation d'autrefois, au-dessus d'un grouped'arbres épais <strong>et</strong> touffus, le bruit de l'eau qui suinte goutte à goutte, <strong>et</strong> tombe monotonement dans l'eau au fond de la grotte,une table qui se trouvait à l'entrée, tout, jusqu'à son humidité, jusqu'au nom de Sennecey donné à un terrain voisin, nom qui,d'après quelques étymologistes, signifie demeure des devins, ou d'après M. Bull<strong>et</strong>, bois des saints, des vénérables, (sen,saint, <strong>et</strong> cey, bois), tout semble attester que, conformément aux traditions, elle a été, pour les <strong>environs</strong> de notre ville, uneespèce d'antre Trophonius. Elle est aujourd'hui masquée par une boulangerie, <strong>et</strong> peut avoir dix mètres de profondeur sur troisou quatre de largeur. Elle est surmontée d'un p<strong>et</strong>it bouqu<strong>et</strong> d'ormes, dont les racines s'infiltrent dans la voûte qu'ellessoutiennent. Comme toutes les grottes des fées qui se trouvent dans les autres pays, elle a été long-temps un obj<strong>et</strong> de terreurpour les habitants des alentours.Peut-être même ne fut-ce que pour chasser de l'esprit <strong>du</strong> peuple l'impression fâcheuse que ce lieu pro<strong>du</strong>isait, qu'on sedécida à bâtir la chapelle connue sous le nom d'Ermitage-de-Bas. On ignore à quelle époque eut lieu la fondation de c<strong>et</strong>établissement. On[p. 113]sait seulement qu'il existait lors de la peste qui ravagea <strong>Cherbourg</strong> en 1546, <strong>et</strong> qu'on y transportait les pestiférés ainsi quedans quelques baraques voisines de la ville.La chapelle de l'Ermitage-de-Bas, beaucoup plus grande <strong>et</strong> plus belle que celle de l'Ermitage-de-Haut, était placée sousl'invocation de Notre-Dame-de-Grâce. Elle était pour les marins l'obj<strong>et</strong> d'une dévotion particulière. D'abord c'était un cordeliertiré <strong>du</strong> couvent de Valognes qui la desservait ; plus tard, ce fut un prêtre séculier à la nomination <strong>du</strong> seigneur de Tourlaville.Elle était encore, il y a eu peu d'années, dans un assez bon état de conservation ; il avait même été question de la rendre auculte, mais ce proj<strong>et</strong> a été abandonné ; elle vient d'être ven<strong>du</strong>e. Les restes de la chapelle détruite sont devenus des celliers,<strong>et</strong> l'habitation des bons moines, une guingu<strong>et</strong>te !CHAPELLE S.T-SAUVEUR.Presque dans la même direction, mais plus au sud de la ville, sur une hauteur distante de <strong>Cherbourg</strong> d'un p<strong>et</strong>it quart delieue, on trouve une autre construction d'un genre analogue. C'est une p<strong>et</strong>ite chapelle qui s'annonce au loin par unecampanille qui se dessine sur le ciel, au milieu des feuilles laches des frênes qui l'entourent, <strong>et</strong> par une croix de bois plantéedans un p<strong>et</strong>it enclos. On voit au-dessus de la porte une niche où l'on avait placé une statue de S.te-Honorine,[p. 114]à qui la chapelle était autrefois consacrée ; la nef est séparée <strong>du</strong> choeur par une grille, <strong>et</strong> n'est éclairée que par de p<strong>et</strong>itescroisées rondes, ouvertes sur deux renflements demi-hexagonaux. Elle est peu fréquentée, <strong>et</strong> les murs <strong>et</strong> le pavé sonttapissés de ces urédinées qui se plaisent à revêtir de leurs grandes plaques de velours vert les murs <strong>et</strong> les pavés des vieuxédifices. Il n'y a que peu de temps qu'elle est voûtée. Au milieu on trouve un tombeau de calcaire très-simple <strong>et</strong> sansinscription, mais qui n'en est pas en moins grande vénération dans le pays, comme l'attestent les nombreu<strong>ses</strong> cavités qu'on ya creusées, <strong>et</strong> dans lesquelles on fait séjourner de l'eau bénite, pour m<strong>et</strong>tre dans la bouillie des p<strong>et</strong>its enfants. Ce tombeauest celui d'un prêtre qui vivait au commencement <strong>du</strong> 17. e siècle, <strong>et</strong> qui est connu sous le nom de Bienheureux Barthélemy.Barthélemy Picquerey naquit à <strong>Cherbourg</strong> en 1609. Ses parents qui s'étaient r<strong>et</strong>irés à Martinvast pour échapper à la peste,en moururent cependant en 1626. Barthélemy fit <strong>ses</strong> études à Caen <strong>et</strong> entra comme novice chez les capucins, puis ilabandonna le froc <strong>et</strong> se fit prêtre en 1633. Il se plaisait à enseigner le catéchisme aux enfants, à l'entrée <strong>du</strong> Faubourg, au piedd'une croix de carreau, qui a subsisté jusqu'en 1787. La rue à l'extrémité de laquelle elle se trouvait en a long-temps porté lenom, c'est aujourd'hui la rue de la Fontaine.


Mais il était mal à son aise au milieu <strong>du</strong> tracas de[p. 115]la ville ; en 1659, il choisit pour se r<strong>et</strong>irer, la p<strong>et</strong>ite chapelle S.te-Honorine qu'il fit décorer de cinq nouvelles statues decalcaire, comme l'atteste une inscription qu'on voit encore à l'entrée <strong>du</strong> choeur.Barthélemy s'était fait bâtir un logement dans le jardin attenant à c<strong>et</strong> oratoire. « Dans c<strong>et</strong>te tranquille solitude, ce pieuxprêtre redoubla <strong>ses</strong> austérités <strong>et</strong> <strong>ses</strong> travaux. Sa nourriture ordinaire était <strong>du</strong> pain <strong>et</strong> de l'eau. Il ne s'était réservé qu'unmodique revenu pour son entr<strong>et</strong>ien, ayant abandonné son patrimoine à sa soeur dès qu'il eut pris les ordres sacrés, afin devivre comme les pauvres.« Il portait un rude cilice, jeûnait continuellement <strong>et</strong> passait une partie de <strong>ses</strong> nuits en oraison dans sa chapelle. Il restavingt-six années dans c<strong>et</strong> ermitage, où il édifia les grands <strong>et</strong> les p<strong>et</strong>its par son humilité, son amour pour la pénitence <strong>et</strong> lapratique de toutes les vertus chrétiennes....... Il mourut saintement le 2 septembre 1685, à 75 ans [46]. »Comme il l'avait désiré, il fut inhumé à la porte de sa chapelle. Suivant Chantereyne [47], on grava sur son tombeau lesonn<strong>et</strong> suivant :Que ce tombeau nous cache un dépôt précieux !Passants, c'est de Picquerey la dépouille mortelle,De qui l'esprit sans doute est au ciel glorieux,Car il fut ici bas des humbles le modèle.[p. 116]Ce saint prêtre animé d'un zèle officieux,A fait édifier c<strong>et</strong>te auguste chapelle.Où le peuple en son nom un jour, fera des voeuxPour rendre à l'univers sa mémoire immortelle.Après avoir prêché d'exemple en ces bas lieux,Si l'implacable mort a su fermer <strong>ses</strong> yeux,C'était pour lui montrer la lumière éternelle !Dieu lui dit : c'est le prix de tes travaux pieux ;Viens donc le recevoir, mon serviteur fidèle,Nul jamais dans le ciel ne le mérita mieux.Plus tard la chapelle fut allongée par le soin de sa famille <strong>et</strong> la dévotion des fidèles ; l'ancien tombeau fut remplacé par unautre, où, suivant le même historien, on voyait son portrait ; aujourd'hui le portrait a disparu.Un peu plus loin, dans un pré, on trouve une jolie p<strong>et</strong>ite fontaine voûtée, <strong>et</strong> couverte d'un arbre dont les racines traversantla voûte se mêlent aux lichens qui se mirent dans <strong>ses</strong> eaux limpides. C<strong>et</strong>te fontaine porte aussi le nom <strong>du</strong> bienheureuxBarthélemy, <strong>et</strong> elle est comme la chapelle l'obj<strong>et</strong> d'une grande vénération dans le pays.Au-dessous de c<strong>et</strong>te chapelle, dans la seconde pièce de terre à l'est de la chasse Sainte-Honorine on a vu jusqu'en 1827deux croix de pierre qui ont aujourd'hui disparu. La tradition raconte qu'elles furent placées sur le lieu de la sépulture deDunois <strong>et</strong> <strong>du</strong> comte de S.t-Paul, morts tous deux pendant le siége de 1379 [48]Un peu de confusion était pour ainsi dire inévitable[p. 117]dans c<strong>et</strong> article qui devait réunir des cho<strong>ses</strong> si différentes ; nous avons tâché d'y m<strong>et</strong>tre le plus d'ordre <strong>et</strong> de clarté possible ;nous n'avons plus qu'à mentionner les édifices religieux qui n'existent plus.Dès l'an 800, il paraît qu'il se trouvait un couvent à la Bucaille : il y a long-temps qu'on n'en voit plus de traces, non plusque de celui qui florissait à Tourlaville quelques siècles plus tard.On voyait encore auprès de <strong>Cherbourg</strong>, non loin <strong>du</strong> lieu de l'échouement de Mathilde, une chapelle consacrée à S.t-


Thomas de Canterbury. Elle a subsisté jusque dans le XVII. e siècle. Des marchands s'y assemblaient tous les ans à la S.t-Martin d'hiver. On y enterrait les lépreux <strong>et</strong> même les personnes étrangères à la religion catholique. Les vestiges de c<strong>et</strong>techapelle ont été long-temps connus sous le nom de Buttes Saint-Thomas ; le champ où elles se trouvaient fait à présentpartie <strong>du</strong> chantier de la marine.On trouve encore mentionnés dans les auteurs, comme ayant existé de ce côté de la ville, l'Ermitage de Saint-Achard, <strong>et</strong>dans les Mielles, une chapelle de Sainte Madeleine.J. F.[p. 118]CHERBOURG MODERNE.<strong>Cherbourg</strong> est une ville qu'on croirait de création récente ; les terrains vagues il y a dix ans, se sont couverts de bâtis<strong>ses</strong> ;les masures ont disparu <strong>du</strong> sol pour faire place à des habitations plus élégantes <strong>et</strong> mieux disposées ; de tous côtés ce sontdes maisons neuves, <strong>et</strong> nous pensons qu'on peut estimer à six cents au moins le nombre de celles qui ont été élevées depuis1827. Ces maisons bien alignées, construites avec soin <strong>et</strong> solidité, sont d'un style simple <strong>et</strong> uniforme. Si quelques-unessortent de la ligne commune <strong>et</strong> méritent d'attirer les regards, elles n'offrent cependant rien d'assez intéressant pour qu'il nousfaille les signaler à la curiosité <strong>du</strong> voyageur [49].Les édifices publics, <strong>et</strong> c'est avec peine que nous le disons, ne sont vraiment pas dignes d'une ville comme <strong>Cherbourg</strong>.Déjà d'immen<strong>ses</strong> capitaux ont été dépensés, <strong>et</strong> l'on n'a réussi qu'à élever des bâtiments d'un aspect disgracieux, <strong>et</strong> dontsouvent les dispositions intérieures ne sont même pas en rapport avec la destination. On se propose de construire[p. 119]un abattoir, une église, un hôpital civil <strong>et</strong> une salle de spectacle. Dieu sait quand ces proj<strong>et</strong>s seront mis à exécution. Toutefois,espérons que les leçons de l'expérience ne seront pas dédaignées, <strong>et</strong> qu'on ne se préparera pas de <strong>nouveau</strong>x regr<strong>et</strong>s pourl'avenir.HOTEL-DE-VILLE.ÉTABLISSEMENTS CIVILSET PARTICULIERS.L'Hôtel-de-ville est situé sur la place d'Armes, en face de l'obélisque, <strong>et</strong> fait l'angle de la rue de la Paix. C'est un édifice defort simple apparence, qu'un balcon en granit, supporté par deux colonnes de la même pierre, distingue seul des maisonsavoisinantes.Au rez-de-chaussée, à gauche en entrant, se trouve la demeure <strong>du</strong> concierge ; les bureaux, le cabin<strong>et</strong> particulier <strong>du</strong> maire<strong>et</strong> le bureau de la caisse d'épargnes sont à droite. — L'entrée <strong>du</strong> Musée-Henry est à gauche au premier, <strong>et</strong> la salle <strong>du</strong> conseilà droite. — La bibliothèque, les antiquités <strong>et</strong> les obj<strong>et</strong>s d'histoire naturelle se trouvent au second.La troupe de terre en garnison à <strong>Cherbourg</strong> a un poste dans le local d'encoignure. Il est desservi une fois la semaine par lagarde nationale de la ville. Le service est fort mal fait ; sur 30 ou 40 hommes commandés, quatre ou cinq au plus seprésentent à l'appel,[p. 120]<strong>et</strong> il n'est pas rare de trouver le poste entièrement désert. A <strong>Cherbourg</strong>, le pouvoir n'a de partisans que dans les hautsfonctionnaires ; la majorité de la population est radicale. Aussi le bel enthousiasme qu'inspira la révolution de juill<strong>et</strong>, est-ilcomplétement éteint. De bon gré ou de force, il faudra bien sous peu renoncer à réclamer aucun service des bourgeois.Deux maisons si<strong>ses</strong> rue de la Paix <strong>et</strong> attenantes à l'Hôtel-de-Ville, en sont une dépendance. La première, que les frères dela doctrine chrétienne ont été forcés d'évacuer en 1833 est en partie occupée par une classe d'enseignement mutuel. On ainstallé un tribunal dans une des chambres, <strong>et</strong> c'est là que viennent tour à tour siéger le premier conseil de guerre permanentde la 14. e division militaire, M. le juge de paix <strong>et</strong> le conseil de discipline de la garde nationale. — L'autre maison sert debureau de police.


CAISSE D'ÉPARGNES DE CHERBOURG.L'ordonnance <strong>du</strong> roi portant autorisation de la société anonyme formée à <strong>Cherbourg</strong> pour l'établissement, dans c<strong>et</strong>te ville,d'une caisse d'épargnes <strong>et</strong> de prévoyance, remonte au 24 septembre 1834.C<strong>et</strong>te caisse a été ouverte le 2 novembre suivant. Elle est destinée, dit l'art. 2 des statuts, à recevoir en dépôt les p<strong>et</strong>itessommes qui lui seront confiées par les cultivateurs, artisans, ouvriers, domestiques[p. 121]<strong>et</strong> autres personnes laborieu<strong>ses</strong> <strong>et</strong> économes, <strong>et</strong> à leur donner les moyens de conserver <strong>et</strong> d'augmenter leurs économies.Les fonctions des administrateurs <strong>et</strong> <strong>du</strong> directeur sont entièrement gratuites. La caisse ne perçoit ni commission nirétribution quelconque.Elle reçoit en dépôt toutes les sommes qui ne sont pas au-dessous de un franc, <strong>et</strong> au-dessus de c<strong>et</strong>te somme, tous lesmultiples, sans fractions, jusqu'à celle de trois cents francs, qui ne peut pas être dépassée chaque semaine par un mêmedéposant.Aucun déposant ne peut avoir à son crédit une somme qui s'élève à plus de trois mille francs, en capital. Lorsque le créditd'un déposant a atteint c<strong>et</strong>te somme, il lui en est donné connaissance, <strong>et</strong> si, dans le mois qui suit c<strong>et</strong> avertissement, celui-cine manifeste pas une intention contraire, la caisse place, en son nom, ces trois mille francs en rentes sur l'état.Aussi long-temps que le déposant ne réclame pas la remise de son inscription de rente, les arrérages en sont touchés parla caisse <strong>et</strong> portés en accroissement au crédit <strong>du</strong> déposant.L'intérêt est fixé à 4 p. % pour l'année.Il ne court au profit <strong>du</strong> déposant que lorsque les épargnes ont atteint la somme de dix francs. — Il n'est alloué aucunintérêt pour les portions de dépôt excédant c<strong>et</strong>te somme ou <strong>ses</strong> multiples. — L'intérêt est dû à compter <strong>du</strong> quinzième jour quisuit l'époque[p. 122]à laquelle a été versée ou complétée chaque somme de dix francs ou <strong>ses</strong> multiples. — Les sommes r<strong>et</strong>irées cessent deporter intérêt à partir <strong>du</strong> jour qui a précédé la demande <strong>et</strong> qui complète un nombre exact de semaines, depuis l'époque <strong>du</strong>versement. — Le décompte des intérêts est fait à la fin de chaque année ; il est ajouté au capital, <strong>et</strong> pro<strong>du</strong>it des intérêts pourl'année suivante.La caisse reçoit les dépôts <strong>et</strong> les demandes de remboursements à l'hôtel-de-ville, tous les dimanches, de dix à deuxheures <strong>et</strong> fait les remboursements le même jour. Ce remboursement n'a lieu que le deuxième dimanche, ou dix jours aprèspour les sommes de 500 fr. <strong>et</strong> au-dessous, <strong>et</strong> le troisième dimanche pour les sommes au-dessus. — Il est remis gratuitementau déposant un livr<strong>et</strong> de dépôt, numéroté <strong>et</strong> contresigné par un directeur.La caisse ne recoit point de dépôt par correspondance. — Les personnes non domiciliées à <strong>Cherbourg</strong> ou celles qui sontdans l'impossibilité de se rendre à la caisse, ont la faculté de faire déposer en leur nom par un représentant [50].Elle est aujourd'hui dans l'état le plus prospère. Les préventions que le peuple ne manque jamais d'avoir pour tout ce quiest <strong>nouveau</strong> se sont dissipées <strong>et</strong> l'on est déjà à même d'apprécier les heureux résultats de c<strong>et</strong>te bienfaisante institution.[p. 123]Vingt-quatre mille francs environ sont apportés chaque mois au bureau de la caisse d'épargnes. Nous allons donner unrelevé des comptes pour l'année 1837, que nous devons à l'obligeance de M. Lefoll<strong>et</strong>, caissier.La somme restant en dépôt, le 31 décembre 1836, s'élevait à 262,583 fr. 11 c.Il a été deposé en 1837 256,319 91.Les intérêts alloués pendant c<strong>et</strong>te même année se montent à 12,429 91.——————TOTAL. 531,332 93


Si l'on dé<strong>du</strong>it de c<strong>et</strong>te somme les remboursements effectués en 1837 110,070 47————On aura pour différence la somme restant <strong>du</strong>e au 31 décembre 421,262 46Voici maintenant la qualité <strong>et</strong> le nombre des déposants ; nous y ajoutons la somme déposée par chaque espèce deprofession.Ouvriers. 192 58,370 fr. 17 c.Domestiques. 124 47,368. 55.— ——————Employés. 40 21,714. 43.356 127,453. 15.[p. 124]Report 356 127,453 15.Militaires <strong>et</strong> marins 90 85,352 93.Professions diver<strong>ses</strong> 170 152,413 36.Mineurs 151 53,890 63.Sociétés de secours mutuels 4 2,152 39.—— ——— ——Déposants 771.Somme égale à celle restant <strong>du</strong>e au 31 décembre 1837 421,262 46.Dans les six premiers mois de 1838, le nombre des déposants s'est augmenté de 160 environ.La somme en caisse au 30 juin dernier s'élevait à... 475,377 fr. 54 c.Il y avait donc eu depuis le 1. er janvier 1838, une augmentation (dé<strong>du</strong>ction faite de remboursements) de 54,115 fr. 08 c.MUSÉE-HENRY.L'étranger qui visite le Musée-Henry doit d'abord éprouver un vif sentiment de surprise. Les forts, la Digue, le Port-Militaireavec <strong>ses</strong> ateliers, <strong>ses</strong> machines, <strong>ses</strong> vastes établissements, <strong>ses</strong> bassins de granit, <strong>ses</strong> cales, <strong>ses</strong> vaisseaux aux larges flancsà la triple ceinture de sabords, ont pu exciter son admiration. Mais rien de ce qu'il a vu ne lui avait fait supposer que ce<strong>Cherbourg</strong>, aux dehors si peu artistiques, possédât[p. 125]une riche, une magnifique galerie de tableaux. Il avait imaginé quelque collection composée à grand'peine des pro<strong>du</strong>ctionsdes peintres de la localité !..... il n'en peut croire <strong>ses</strong> yeux, il s'avance, il j<strong>et</strong>te des regards avides autour de lui !..... <strong>et</strong> ici ilreconnaît les tous chauds de MURILLO, là, la touche de VAN DICK, là, le coloris <strong>du</strong> POUSSIN, là, le dessin de CARAVAGE <strong>et</strong> deDAVID ; son étonnement redouble, sa tête s'exalte, il feuill<strong>et</strong>te le catalogue, <strong>et</strong> ce sont les noms de l'ALBANE, <strong>du</strong> GUERCHIN, deRIBERA, de CHAMPAIGNE, de VAN LOO, de TENIERS, de LE BRUN, de GIRODET, de LE SUEUR, qu'il lit. Partout de grands noms,partout des grands maîtres, partout des chefs-d'oeuvre. Il se demande s'il a bien sa raison à lui, s'il n'est pas sous l'empired'un songe, si tout cela n'est pas une <strong>du</strong>perie ? Car enfin, par quel art magique la p<strong>et</strong>ite ville a-t-elle pu réunir tant deprécieu<strong>ses</strong> rar<strong>et</strong>és ? Où a-t-elle pu trouver assez d'or pour les payer, elle qui, faute de capitaux, se voit dépourvue desétablissements les plus indispensables ? C'est à croire à un coup de bagu<strong>et</strong>te ! Eh ! bien oui, il a fallu plus qu'un coup debagu<strong>et</strong>te, plus qu'un pouvoir magique, il a fallu tout le génie, toute la volonté, toute la vie d'un homme ! d'un « homme dont onaurait peine à trouver le pareil parmi les hommes. » [51]Prononcer son nom, c'est déjà faire son éloge.[p. 126]THOMAS HENRY est né à <strong>Cherbourg</strong> en 1766 [52]. Fils de commerçants, il fut d'abord lui-même commis négociant, <strong>et</strong> ne putconsacrer à l'étude de l'art, vers lequel il se sentait porté, que les moments de loisir que lui laissaient <strong>ses</strong> occupations.Enflammé <strong>du</strong> désir de visiter la Grèce, c<strong>et</strong>te terre classique de l'art, il s'embarqua à l'âge de 20 ans sur un navire qui


partait pour la Méditerranée ; mais il était dit que le jeune voyageur ne verrait point la patrie, alors si malheureuse, desHomère, des Praxitèle, des Phidias, des Appèle <strong>et</strong> de tant d'autres grands hommes. Le navire, assailli par les mauvais temps,relâcha à Bordeaux <strong>et</strong> changea de destination. Henry entra de <strong>nouveau</strong> dans une maison de commerce qu'il quitta pours'engager en qualité de canonnier volontaire, dans les bataillons que la république dirigeait contre les rebelles de la Vendée.A la fin de c<strong>et</strong>te guerre, il se rendit à Paris <strong>et</strong> reprit encore la carrière commerciale, puis entra dans les bureaux <strong>du</strong>ministère de la marine. Entraîné par <strong>ses</strong> goûts, sa vocation <strong>et</strong> les conseils des artistes que <strong>ses</strong> rares dispositions étonnaient, ilquitta définitivement c<strong>et</strong>te partie pour se livrer tout entier à la peinture, <strong>et</strong> devint bientôt, sinon grand peintre, <strong>du</strong> moinsexcellent connaisseur. Il partit pour l'Italie[p. 127]<strong>et</strong> visita successivement l'Allemagne <strong>et</strong> les Pays-Bas. Ce fut pendant ces voyages que son talent acquit c<strong>et</strong>te finesse, cedegré de perfection qui l'ont ren<strong>du</strong> célèbre. Nommé ensuite commissaire-expert des Musées royaux, il a conservé ce postejusqu'à sa mort arrivée le 7 janvier 1836.Ses hautes capacités n'étaient pas seulement appréciées en France, mais dans toute l'Europe, <strong>et</strong> si son nom ne se trouvedans aucune de nos biographies contemporaines, c'est un oubli qui, nous l'espérons, ne tardera pas à être réparé.L'Angl<strong>et</strong>erre, ce peuple admirateur de toutes les gloires, lui a ren<strong>du</strong> justice avant <strong>ses</strong> propres compatriotes. Un ouvrage quevient de publier à Londres sir William Kinghton, fait le plus brillant éloge des connaissances de M. Henry, de ce tact, de cejugement sûr qui ne s'est jamais trompé.M. Henry avait passé sa vie à amasser la belle collection de tableaux que le voyageur admire aujourd'hui. Inspiré par lepatriotisme le plus généreux, il conçut la pensée d'en faire don à sa ville natale. Voici la manière dont M. le maire tracel'historique de c<strong>et</strong>te donation [53] :« En 1831, l'administration fut prévenue qu'une personne qui désirait rester inconnue, avait l'intention de donner à sa villenatale quelques bons tableaux pour servir de modèles à ceux de <strong>ses</strong> compatriotes[p. 128]qui pourraient avoir le goût de la peinture. On demandait si l'administration municipale voudrait les recevoir <strong>et</strong> les placerconvenablement. La réponse ne pouvait être douteuse. Plusieurs envois ne tardèrent pas à avoir lieu, <strong>et</strong> bientôt la salle desséances <strong>du</strong> conseil municipal se trouva remplie. Ce fut alors que le conseil sentit qu'il lui fallait un local approprié àl'importance de c<strong>et</strong>te collection, <strong>et</strong> que le proj<strong>et</strong> de c<strong>et</strong>te galerie fut arrêté.Une année cependant s'était écoulée sans que nous connussions au moins d'une manière certaine le nom de notrebienfaiteur. Malgré les graves présomptions qui nous désignaient celui de M. Henry, <strong>et</strong> dont la manifestation indirecte arrivaplus d'une fois jusqu'à lui, sa modestie le déroba pendant long-temps à l'expression de notre reconnaissance. Il s'aperçutenfin que son secr<strong>et</strong> était pénétré <strong>et</strong> trop répan<strong>du</strong> pour qu'il pût en r<strong>et</strong>arder l'aveu.Le plan de la galerie proj<strong>et</strong>ée lui fut soumis <strong>et</strong> dès lors il annonça l'intention d'en couvrir tous les murs. L'exécution de c<strong>et</strong>tepromesse ne tarda pas à se manifester par de <strong>nouveau</strong>x envois. Les emplacements manquèrent, <strong>et</strong> nous fûmes obligésd'entasser ces précieux obj<strong>et</strong>s comme des marchandi<strong>ses</strong> dans un magasin. »Le conseil municipal voulant témoigner de la gratitude à M. Henry pour son magnifique présent,[p. 129]décida que le Musée porterait le nom de MUSÉE-HENRY, <strong>et</strong> que le buste <strong>du</strong> donateur, exécuté aux frais de la ville, par unstatuaire célèbre, — DANTAN — serait placé dans la galerie.On s'était mis à l'oeuvre <strong>et</strong> les travaux s'avancèrent rapidement. On se conforma aux intentions de M. Henry pour leplacement des tableaux, <strong>et</strong> l'inauguration <strong>du</strong> Musée eut lieu le 29 juill<strong>et</strong> 1835, en présence des autorités civiles, militaires <strong>et</strong>maritimes de <strong>Cherbourg</strong>. M. le maire prononça un discours digne de la circonstance, <strong>et</strong> qui fut fort applaudi. La fouleencombra la galerie tout le reste <strong>du</strong> jour.Les tableaux sont au nombre de 162. — 31 de l'école italienne, 7 de l'école espagnole ; 51 des écoles flamande <strong>et</strong>hollandaise, 72 de l'école française, 1 de l'école anglaise.Le Musée est ouvert tous les jours aux artistes depuis huit heures <strong>du</strong> matin jusqu'à quatre heures, excepté le samedi,depuis le premier octobre jusqu'au premier avril qu'il ferme à deux heures, <strong>et</strong> le lundi, pendant toute l'année, qu'il n'ouvre qu'à


midi. — Il est ouvert aux habitants tous les dimanches depuis dix heures jusqu'à quatre, <strong>et</strong> aux étrangers tous les jours,depuis midi jusqu'à deux heures, sur la présentation de leurs passeports.La direction <strong>du</strong> Musée est confiée à un conservateur, sous l'autorité <strong>du</strong> maire. Il a sous <strong>ses</strong> ordres un inspecteur <strong>et</strong> ungardien. Les personnes qui désirent travailler dans le Musée doivent demander[p. 130]l'autorisation <strong>du</strong> conservateur. Il ne l'accorde qu'aux artistes <strong>et</strong> aux amateurs en état de copier un tableau seuls <strong>et</strong> sans lesecours d'un maître.Le bienfait de M. Henry commence à porter <strong>ses</strong> fruits. Une foule de jeunes artistes, qui ignoraient leur vocation ou que lemanque de suj<strong>et</strong>s d'étude empêchait de se livrer à la peinture, vont chaque jour travailler au Musée ; ils sont dirigés par desmaîtres habiles, <strong>et</strong> tout fait espérer que les travaux de plusieurs d'entr'eux ne seront pas per<strong>du</strong>s pour l'art.Nous aurions voulu en terminant ces quelques lignes, nous faire l'interprète de nos concitoyens <strong>et</strong> rendre un hommagepublic à la mémoire de M. Henry, de c<strong>et</strong> homme si noble <strong>et</strong> si désintéressé, dont la modestie réhaussait encore le mérite ; dec<strong>et</strong> homme que <strong>Cherbourg</strong> s'honore d'avoir vu naître <strong>et</strong> dont nous nous avouons avec orgueil les compatriotes. Mais lesentiment de notre incapacité r<strong>et</strong>ient notre plume ; l'oeuvre d'ailleurs est là qui parle plus haut que tout ce qu'on pourrait dire !Henry a élevé un temple à l'art, son souvenir <strong>du</strong>rera chez nous autant que l'art ; car son nom n'est pas seulement écrit enl<strong>et</strong>tres d'or au fronton <strong>du</strong> Musée, la reconnaissance l'a gravé en caractères ineffaçables dans nos coeurs.[p. 131]CATALOGUE DES TABLEAUX.Ecole d'Italie.1 — La Salutation angélique, par F. ALBANI dit l'ALBANE.2 — La Circoncision de N. S. J.-C. — le même.3 — Le Sacrifice d'Abraham. — C. ALLORI.4 — Saint-François d'Assise. — F. BAROCHE.5 — L'Automne <strong>et</strong> l'Hiver. — J. DA PONTE de BASSANO. dit le BASSAN.6 — Vue <strong>du</strong> boulevard Montmartre à Paris. — CANELLA.7 — La Mort d'Hyacinthe. — Michel Ange AMERIGHI dit le CARAVAGE.8 — Un Ermitage. — Ecole Florentine.9 — Déposition de la croix. — id.11 — L'Adoration des rois Mages. — Lavinie FONTANA,12 — La Mise au tombeau. — Santi TOSINI, surnommé dans son couvent FRA GIOVANNI ANGELICO.13 — Judith. — F. FURINI.14 — La Vierge apparaissant à S.t-Torbido <strong>et</strong> à S.t-Bernard. — A.-D. GABBIANI.15 — L'Enfant Jésus <strong>et</strong> S.t-Jean-Baptiste. — D. CORRADI dit GHIRLANDAIO.16 — S.t-Pierre. — L. GIORDANO.17 — Tancrède, secouru par Vafrin <strong>et</strong> Herminie. — J.-F. BARBIERI dit le GUERCHIN.18 — L'Erection de la croix. — P. LAURI.19 — Paysage. — A. LUCATELLI.20 — id. — le même.21 — Sisara, assassiné par Jahel. — L. PALMA, le jeune.22 — Le Camp-Vaccino à Rome. — J.-P. PANNINI.23 — Les Ruines <strong>du</strong> Colysée <strong>et</strong> l'arc de Constantin. — le même.24 — La Vierge, l'Enfant Jésus <strong>et</strong> S.t-Jean-Baptiste. — D. PULIGO.25 — Le Sommeil de Jésus. — (copie d'après RAPHAEL.) RAFAELLO.26 — S.t-Sébastien. — B. SCHEDONE.27 — Joseph expliquant les songes de Pharaon. — A. MEDULA dit le SCRIAVONE.[p. 132]28 — Les envoyés de Joseph découvrent la coupe qu'il a fait cacher dans un des sacs de blé délivrés à <strong>ses</strong> frères. — le même.29 — Le Songe de Jacob. — F. SOLIMENE dit l'ABBATE CICCIO30 — Buste de S.t-Jean l'évangéliste. — A. TIARINI.31 — Une Eruption <strong>du</strong> Vésuve. — Le Ch. VOLAIRE.Ecole Espagnole.32 — Madeleine, repentante. — Claudio COELLO.


[p.134]33 — David, pénitent. — le vieux F. HERRERA.34 — Job. — le même.35 — Jésus portant sa croix. — B.-E. MURILLO.36 — S.t-Sébastien. — Don A.-A. PALOMINO DE VELASCO.37 — Philosophe tenant un livre. — J. de RIBERA dit l'ESPAGNOLET.38 — Un astronome. — le même.39 — Bouqu<strong>et</strong> de fleurs. — G. Van AELST.Ecoles Flamande <strong>et</strong> Hollandaise.40 — Une Femme <strong>et</strong> deux Enfants présentant une offrande à Bacchus <strong>et</strong> à Cérès. — H. Van BALEN.41 — Combat de deux jeunes taureaux. — BERRÉ.42 — Paysage. — P. BRIL.43 — L'Assomption de la Vierge. — P. de CHAMPAIGNE.44 — Portrait d'un Homme d'église. — le même.45 — Portraits de Frédéric III <strong>et</strong> de Jean...., électeurs de Saxe. — L. CRANACH.46 — Portrait d'une dame hollandaise. — Corneille Janson Van CUYLEN.47 — Portrait de Vieillard. — C.-G.-E. DIETRICK.48 — Méléagre présentant à Atalante la hure <strong>du</strong> Sanglier de Calydon. — Antoine Van DYCK.49 — Juif arménien. — Gerbrant vanden EECKHOUT.50 — Une Madone. — Du temps des frères van EYCK.51 — La Femme a<strong>du</strong>ltère. — François FRANCK, le jeune.52 — Un Fusil de chasse <strong>et</strong> diver<strong>ses</strong> pièces de gibier. — Jean FYT.53 — Paysage. — J. GLAUBER dit POLIDOR [54].54 — Animaux de basse-cour, gibier, fruits, <strong>et</strong>c. — Abraham GRYEF.55 — Gibier gardé par des chiens. — Le même.[p. 133]56 — Portrait d'une dame hollandaise <strong>du</strong> XVII e siècle. — A. HANNEMAN.57 — Portrait d'un Homme d'église. — Bartholomé Vander HELST.58 — Paysage. — HERMAN SWANEVELT, souvent appelé HERMAN D'ITALIE.59 — Coucher <strong>du</strong> Soleil. — Le même.60 — Un Singe <strong>et</strong> un Perroqu<strong>et</strong>. — Melchior HONDEKOETER.61 — Adoration des Rois Mages. — J. JORDAENS.62 — Paysage. — J. Vander KABEL.63 — Paysage. — Le même.64 — Poissons, Oiseaux, Végétaux <strong>et</strong> autres obj<strong>et</strong>s de nature morte. — Jean van KESSEL.65 — La Mélancolie. — Jacques van LOO.66 — Paysans belges. — Jan MESSYS.67 — Choc de cavalerie. — A.-F. Vander MEULEN.68 — Portrait d'un Bourguemestre hollandais. — F. MIERIS.69 — Jésus <strong>et</strong> la Samaritaine. — J.-F. MILE.70 — Les Apprêts de la sépulture de J.-C. — Pierre van MOL.71 — Pâtre gardant des vaches. — B.-P. OMMEGANCK.72 — Paysage. — J.-F. van BLOSMEN dit ORRIZZONTE.73 — Paysage. — Le même.74 — Portraits en pied de François II de Médicis, grand-<strong>du</strong>c de Toscane, <strong>et</strong> de Marie sa fille, plus tard femme de Henri IV. — F. PORBUS.75 — Paysage. — Roland ROCHMAN. [55]76 —Les trois Marie soutenant les restes inanimés de J.-C. Aux deux côtés de ce tableau sont attachés des vol<strong>et</strong>s représentant St.-Françoisd'Assi<strong>ses</strong> <strong>et</strong> la Madeleine. — ROGER.77 — Deux Brebis sur le devant d'un paysage. — P. ROOS, dit ROSE DE TIVOLI.78 — Deux Chèvres traversant une mare. — Le même.79 — L'Enfant Jésus <strong>et</strong> sa mère, servis par des anges. — J. ROTHNAMER.80 — Bouqu<strong>et</strong> de fleurs. — Rachel RUYSCH van POOL.81 — Poissons, Coquillages, <strong>et</strong>c., déposés sur le bord de la mer. — F. SNEYDERS.82 — Vue de l'un des bras de mer qui bordent les côtes de la Hollande. — Abraham STORCK.83 — Les Singes au cabar<strong>et</strong>. — David TENIERS.84 — Intérieur d'un Temple protestant. — H. Van VLIET.85 — Plage au moment de la basse mer. — L. VERBOECKHOVEN.86 — Vieillard représenté à mi-corps. — Jean VICTOOR.87 — Paysage. — J.-B. WEENIX.


88 — Intérieur d'un Ménage rustique. — T. WYCK.89 — Un Pâtre <strong>et</strong> son Troupeau. — J.-V. BERTIN.90 — Site montagneux. — Le même.91 — Paysage. — Joseph-Xavier BIDAULD.92 — Autre Paysage. — Le même.93 — La Sainte Famille. — Jacques BLANCHARD.94 — Houdon dans son atelier. — L-L. BOILLY.95 — Intérieur de l'Arche Marion à Paris. — E. BOUHOT.96 — Choc de cavalerie. — J. COURTOIS BOURGUIGNONEcole Française.97 — Le Bois de Boulogne, pris de la mare d'Auteuil. — E. BRUAUDET [56]98 — L'Assomption de la Vierge. — Charles LE BRUN.99 — Intérieur d'une Cuisine. — CHARDIN.100 — Une jeune Veuve. — L.-C.-A. COUDER.101 — Entr<strong>et</strong>ien de Don Quichotte avec la Tête enchantée. — A. COYPEL.102 — Philoctète dans l'Ile de Lemmos. — J.-L. DAVID.103 — Turc, fumant sa pipe. — H. DECAISNE.[p.135]104 — Déjeûner de faneurs. — J.-L DEMARNE.105 — Marine. — Le même.106 — Citadins faisant un goûter avec <strong>du</strong> lait dans la cour d'une ferme. — Le même.107 — Village traversé par une grande route. — DEMAY.108 — Schéhérazade racontant au Sultan les aventures des Mille <strong>et</strong> une Nuits. — P.-E. DESTOUCHES.109 — Une Prairie. — A.-H. DUNOUY [57].110 — Une Dame répondant à une l<strong>et</strong>tre que vient de lui apporter un jeune val<strong>et</strong>. — Pierre DUVAL-LE-CAMUS.111 — Le Couvent de la Madone di Puzzano à Castellamare (Royaume de Naples). — Augustin ENFANTIN.112 —Le jeune roi André de Hongrie a été assassiné par la princesse Jeanne, sa femme ; son confesseur <strong>et</strong> sa nourrice lui rendent les derniersdevoirs. — L.-N.-P.-A. comte de FORBIN.113 — La pêche <strong>du</strong> Marsouin. — L. GARNERAY.114 — Rémus <strong>et</strong> Romulus. — L. GAUFFIER.115 — Scène familière. — M. lle M. GÉRARD.116 — Portrait d'Homme. — A.-L. GIRODET-TRIOSON.117 — Portrait <strong>du</strong> baron Denon, directeur général des Musées royaux de France sous Napoléon. — J.-B. GREUZE118 — Vue <strong>du</strong> port <strong>et</strong> de la rade de Lorient. — J.-F. HUE.119 — Portrait de Femme. — F. CLOUET dit JANET.120 — Combat <strong>du</strong> vaisseau français le Formidable contre trois vaisseaux <strong>et</strong> une frégate anglaise. — JOZAN.121 — Le Triomphe <strong>du</strong> Formidable. — Le même.122 — La mort de la Vierge. — C. DE LAFOSSE.123 — La présentation au Temple. — Le même.124 — Portrait d'Homme. — N. de LARGILLIÈRE.125 — Autre portrait d'Homme. — Le même.126 — Intérieur d'Etable. — H. de LATTRE.127 — Paysage. — Hyppolite LECOMTE.128 — La Demande accordée. — N.-B. LÉPICIÉ.129 — Jeune Paysanne d'Italie priant une Madone. — Hortense-Victorine LESCOT.130 — La sainte Famille, sainte Elisab<strong>et</strong>h <strong>et</strong> saint Jean-Baptiste. — L. LICHERIE.[p.136]131 — Geneviève de Brabant, baptisant son enfant. — J.-B. MALLET.132 — Les Parques <strong>et</strong> les Amours filent des jours à l'hymen. — Le même.133 — Paysage. — P.-L. MEUNIER [58]134 — Vue d'un Monastère. — MONTVIGNIER.135 — Aigle s'abattant sur un Lièvre. — J.-B. OUDRY.136 — Deux Paysages. — Pierre PATEL, père [59].137 — Environs de Rome. — Nicolas POUSSIN.138 — La Vierge pleurant sur le corps de son fils. — Le même.139 — Pyrame <strong>et</strong> Thisbé. — Le même.140 — L'Assomption de la Vierge. — P.-P. PRUD'HON.141 — Jeunes dames donnant à manger à un Cygne. — P. REVOIL.


142 — François I er . présenté à Louis XII. — F.-F. RICHARD.143 — Le Financier Montmartel <strong>et</strong> son épouse. — H. RIGAUD.144 — Enfant regardant un jeune Dessinateur. — L.-E. RIOULT.145 — Ruines d'un Temple. — H. ROBERT.146 — Autres Ruines, parmi lesquelles on distingue le Colysée. — Le même.147 — Jésus enseignant sa doctrine aux Juifs. — Eustache LE SUEUR.148 — La Justice. — Le même.149 — Course de Chevaux. — J.-F.-J. SWEBACH.150 — Chasseurs à cheval franchissant une palissade. — Edouard SWEBACH, fils <strong>du</strong> précédent.151 — Joûte musicale entre des Bergers. — N.-A. TAUNAY.152 — Portrait d'un Architecte. — R. TOURNIÈRES.153 — Portrait de François Dorban, architecte français. — F. DE TROY.154 — Intérieur d'une Eglise d'architecture mauresque. — TRUCHOT.155 — Diane <strong>et</strong> plusieurs Nymphes partant pour la chasse. — VALLIN.[p.137]156 — Paysage avec eff<strong>et</strong> de neige. — Coesar van LOO.157 — Paysage. — Claude-Joseph VERNET.158 — Portrait de François Girardon, sculpteur. — J. VIVIEN.159 — Cérès foulant aux pieds les attributs de la guerre. — S. VOUET.160 — Paysage. — O'CONNOR.161 — Paysage. — Gaspard DUGHET dit Le Gaspre [60].162 — Allégorie. — Gérard de LAIRESSE.163 — Portrait de Louis XVI. — R. LE FEBVRE.Ecole Anglaise.SCULPTURE.Quatre bas-reliefs en terre cuite représentant :L'Astronomie <strong>et</strong> la Géométrie ;L'Architecture <strong>et</strong> la Géographie ;La Musique ;La Peinture <strong>et</strong> la Sculpture.Ces bas-reliefs, modelés par Claude-Michel CAUDION, sont l'esquisse de quatre bas-reliefs, six fois plus grands, qu'il exécuta en pierre, <strong>et</strong> quifirent partie de l'exposition <strong>du</strong> Louvre en 1779.BIBLIOTHÈQUE. — CABINET D'ANTIQUITÉS ET D'HISTOIRE NATURELLE.La bibliothèque de <strong>Cherbourg</strong> est composée d'ouvrages confisqués sur les émigrés pendant la révolution, <strong>et</strong> surtout deslivres de la curieuse collection de M. Duchevreuil, acquise par la ville en 1832 ; elle contient 2308 volumes répartis comme ilsuit :Théologie, 505. — Jurisprudence, 114. — Sciences <strong>et</strong> arts, 263. — Belles-l<strong>et</strong>tres, 590. — Histoire <strong>et</strong> géographie, 836.[p. 138]On voit que la partie la plus riche est celle qui traite de l'histoire ; elle comprend presque tous les historiens normands, unassez grand nombre d'historiens français <strong>et</strong> d'ouvrages sur la numismatique <strong>et</strong> l'archéologie.Parmi les ouvrages imprimés aux XV e . <strong>et</strong> XVI e . siècles, on compte huit ouvrages de théologie.Deux ouvrages de jurisprudence : le grand Coutumier <strong>du</strong> pays <strong>et</strong> <strong>du</strong>ché de Normendie, latin-français, in-folio gothique,1523.Coutumes générales <strong>du</strong> pays <strong>et</strong> <strong>du</strong>ché de Br<strong>et</strong>agne, 1541, in-8.° gothique.Le Rommant de la Rose en prose, 1521, in-folio gothique ; le même ouvrage en vers 1529, p<strong>et</strong>it in-8.°Sept ouvrages d'histoire : la Mer des histoires, deux volumes en un, 1536, in-folio gothique ; les Annalles d'Acquitaine,


faicts <strong>et</strong> gestes en sommaire des roys de France <strong>et</strong> d'Angl<strong>et</strong>erre, pays de Naples <strong>et</strong> de Milan, 1536, un volume in-foliogothique ; les Chroniques des très-chrétiens roys de France, depuis l'excidion de Troye jusqu'au temps <strong>et</strong> règne <strong>du</strong> trèschrétienroi, François I. er , translatées <strong>du</strong> latin, 1515, un volume in-folio gothique ; l'Histoire <strong>et</strong> Chronique de Normandie, avecles figures tant de ladite Normandie que de la ville de Rouen, métropolitaine d'icelle, 1581, un volume in-8.° ; les trèsélégantes<strong>et</strong> très-copieu<strong>ses</strong> annales, des très-chrétiens modérateurs des belliqueu<strong>ses</strong> Gaules, par Nicolle Gilles, 1547, avec[p. 139]planches, un volume in-folio ; Recueil des roys de France, leur couronnement <strong>et</strong> maison, ensemble les rangs des grands deFrance, par Jean <strong>du</strong> Till<strong>et</strong>, plus une chronique abrégée, <strong>et</strong>c., 1580, un volume in-folio ; Chroniques d'Enguerran deMonstrel<strong>et</strong>, 1571, deux volumes in-folio ; le sixième volume de Perceforest, in-folio gothique, 1528.Les manuscrits sont au nombre de douze ; savoir :Cartulaire de l'abbaye de <strong>Cherbourg</strong>, pendant le XIV. e <strong>et</strong> le XV. e siècles ; — Histoire <strong>du</strong> Cotentin, par Toustaint de Billy ;c<strong>et</strong>te copie, différente de celle de Caen, est la même que celle de S.t-Lo ; — un volume in-folio contenant, 1.° Table des nomsde familles compri<strong>ses</strong> dans la RECHERCHE DE NORMANDIE de Montfault ; 2.° Table des familles reconnues d'anciennenoblesse dans la généralité de Caen ; 3.° Table des anoblis par Chartres ; 4.° Table des nobles des quatre races ; 5.° Tabledes anoblis depuis le 1. er janvier 1611 ; 6.° Etat des usurpateurs de titre de noblesse de la généralité de Caen ; 7.° Table desnoms véritables des nobles qui ont usurpé d'autres noms que les leurs ; 8.° Table alphabétique des différentes parois<strong>ses</strong> dela généralité de Caen ; — Copie d'une chronologie historique des grands baillis <strong>du</strong> Cotentin, depuis le règne de PhilippeAuguste, par M. de Chantereyne, 1787, un volume in-folio [61] ; — Etat de la généralité[p. 140]de Caen, par M. Foucault, intendant de ladite généralité, un volume p<strong>et</strong>it in-folio. Il doit être de la fin <strong>du</strong> XVII. e siècle ; —Chronique des <strong>du</strong>cs de Normandie, manuscrit sur vélin, de la fin <strong>du</strong> XIV. e ou <strong>du</strong> commencement <strong>du</strong> XV. e siècle, couvertureen bois [62] ; — Recueil de différents articles théologiques <strong>du</strong> XVII. e siècle, in-8.° ; — Discours des sorciers, dressé parmessire Jean Boqu<strong>et</strong>, 1601, in-32 ; — Catéchisme (auteur inconnu), deux volumes in-12 ; — Livre des curieu<strong>ses</strong> recherches<strong>du</strong> Mont-S.t-Michel, par Th. Servy, de la congrégation de S.t-Maur, 1647 ; — Histoire civile <strong>et</strong> religieuse de <strong>Cherbourg</strong>, depuisles temps les plus anciens jusqu'en l'année 1823 <strong>et</strong> suivantes, suivie de plusieurs mémoires, par l'abbé Demons.Parmi les autres ouvrages on remarque :DESCRIPTION DE L'EGYPTE, recueil d'observations faites pendant l'expédition de Bonaparte ; Expédition de Morée ;Thesaurus linguoe groecoe, édition Firmin Didot ; Voyage en Orient, par Léon de la Borde ; Galerie chronologique <strong>et</strong>pittoresque, par Perrin ; Architecture arabe, par Pascal Costé ; Galeries historiques de Versailles ; Journal des Savants ;Collection des auteurs latins de Panckouke ; Essai sur la littérature anglaise, <strong>et</strong> Paradis per<strong>du</strong> ; les Egli<strong>ses</strong> gothiques ; lePanthéon littéraire ; les Classiques latins de Nisard <strong>et</strong> grecs de Didot, <strong>et</strong>c.[p. 141]A la bibliothèque est joint un cabin<strong>et</strong> d'antiquités <strong>et</strong> d'histoire naturelle.Parmi les obj<strong>et</strong>s de la première division, on remarque une belle urne cinéraire, trouvée dans un tombeau à Athènes, <strong>et</strong>donnée par M. Laurens de Choisy ; des poteries de Bernard de Palissy ; un tableau sur émail attribué au même artiste ; unportrait <strong>du</strong> père Lachaise aussi sur émail, par Laudin ; des haches celtiques en pierre <strong>et</strong> en bronze ; un moule en bronze àfondre des coins gaulois ; des fragments d'épées des mêmes peuples, des gantel<strong>et</strong>s, casques, cuiras<strong>ses</strong> <strong>du</strong> moyen âge, <strong>et</strong>un grand nombre de figures en bronze, en terre, <strong>et</strong> d'autres antiquités recueillies dans les fouilles faites à Digulville, dans lesMielles, dans la montagne <strong>du</strong> Roule, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong>c. ; une momie égyptienne de femme mariée, avec l'interprétation de l'inscription,écrite de la main de Champollion, <strong>et</strong> son dernier ouvrage ; une pirogue d'Eskimaux, avec des habits d'homme <strong>et</strong> de femme, <strong>et</strong>tous les instruments pour la pêche en mer, <strong>et</strong>c.L'histoire naturelle n'est pas très-riche ; on remarque cependant une superbe défense de narwal, quelques beauxcoquillages <strong>et</strong> un fo<strong>et</strong>us d'un mois, conservé dans l'alcool ; deux cais<strong>ses</strong> d'insectès ; 600 échantillons de minéraux, <strong>et</strong>c.Un conservateur est attaché à c<strong>et</strong> établissement, qui est ouvert au public, les mardi, jeudi <strong>et</strong> vendredi de chaque semaine.PLACE D'ARMES.La place d'Armes, qui est située sur l'emplacement


[p. 142]de la Tour-Carrée <strong>et</strong> de la Tour Gouberville, au dessus des souterrains qui les faisaient communiquer entr'elles, a 90 mètresde long sur 45 mètres au sud <strong>et</strong> 36, 60 au nord. Elle est soutenue <strong>du</strong> côté de la mer par un mur qui, le long de la Place <strong>du</strong>Rempart qui la touche, contient encore des restes des vieilles fortifications de <strong>Cherbourg</strong>.D'après un plan récemment adopté <strong>et</strong> qui recevra son exécution prochainement, c<strong>et</strong>te place sera agrandie de tout l'espacecompris entre l'extrémité de la j<strong>et</strong>ée ouest <strong>du</strong> port de commerce <strong>et</strong> le fort de Longl<strong>et</strong>, qu'on enlèvera à la mer. La vieille tourplacée auprès de l'église, se trouvera ainsi isolée dans un coin de c<strong>et</strong>te immense place.Dans la partie sud, en face l'Hôtel-de-Ville, est une fontaine en granit, surmontée d'un obélisque aussi en granit ; elle futachevée en 1817 <strong>et</strong> destinée à perpétuer le souvenir <strong>du</strong> débarquement <strong>du</strong> <strong>du</strong>c de Berry à <strong>Cherbourg</strong>, lors de la restauration,comme l'attestaient ces mots : 13 AVRIL 1814, qu'on y lisait, avant la révolution de 1830.La cuv<strong>et</strong>te <strong>et</strong> l'aiguille sont l'une <strong>et</strong> l'autre d'une seule pierre. L'obélisque a 9 m. 95 c. de hauteur ; il est, à la base, large de64 centimètres <strong>et</strong> de 37 au somm<strong>et</strong>.TRIBUNAUX.C'est par erreur que M. A. de Berruyer a dit dans son Guide <strong>du</strong> Voyageur que l'établissement d'un tribunal civil à<strong>Cherbourg</strong>, date seulement <strong>du</strong> 1. er [p. 143]janvier 1812. En janvier 1790, par suite de la nouvelle circonscription territoriale de la France, c<strong>et</strong>te ville était devenue cheflieude district, <strong>et</strong> siége d'une justice de paix <strong>et</strong> d'un tribunal civil <strong>et</strong> criminel. — Ce tribunal, supprimé sous le directoire, futremplacé par un tribunal de simple police, réuni à la justice de paix, <strong>et</strong> par un tribunal de police correctionnelle. — Lors de ladivision des départements (loi <strong>du</strong> 17 février 1800) en préfectures, sous-préfectures, cantons <strong>et</strong> communes, <strong>Cherbourg</strong>, dechef-lieu de district, descendit au simple rang de chef-lieu de canton de l'arrondissement de Valognes ; son tribunalcorrectionnel lui fut en conséquence r<strong>et</strong>iré.Peu de temps après son voyage à <strong>Cherbourg</strong>, l'Empereur en fit un chef-lieu d'arrondissement (décr<strong>et</strong> <strong>du</strong> 19 juill<strong>et</strong> 1811) <strong>et</strong>y établit une sous-préfecture <strong>et</strong> un tribunal de première instance. Ce tribunal entra en fonctions le 1. er janvier 1812, <strong>et</strong> siégead'abord dans une des salles de l'hôtel-de-ville ; il se transporta ensuite dans un local dépendant d'une maison particulière,(place d'Armes, N.° 20) qu'il occupe encore aujourd' hui.On comprend que ce local, dont la destination était tout autre, manque des accessoires les plus indispensables. De plus,son éloignement de la prison force les détenus à traverser une partie de la ville, ce qui les expose, non pas seulement auxregards des curieux, mais aux injures, <strong>et</strong> quelquefois même aux mauvais traitements <strong>du</strong> menu peuple. L'administration[p. 144]municipale voulant m<strong>et</strong>tre un terme à c<strong>et</strong> état de cho<strong>ses</strong>, s'est décidée à faire construire un palais de justice sur la place de laDiv<strong>et</strong>te, derrière la prison. Les proj<strong>et</strong>s ont été adoptés en juill<strong>et</strong> 1835, <strong>et</strong> les travaux commencés en septembre de la mêmeannée. Ils sont actuellement fort avancés, <strong>et</strong> l'on compte que le tribunal pourra commencer à y siéger au mois d'octobre 1839.Si nous étions appelés à donner notre avis sur le mérite architectural <strong>du</strong> palais de justice, nous dirions que la façade aquelque chose d'étriqué, de mesquin ; que les cinq arcades qui forment l'entrée ne pro<strong>du</strong>isent pas l'eff<strong>et</strong> qu'on semble s'enêtre promis ; qu'elles sont d'un style lourd <strong>et</strong> de dimensions trop rétrécies pour le reste de l'édifice. De plus, nousmanifesterions la crainte que les appartements ne soient pas assez éclairés, <strong>et</strong> que les dimensions de l'enceinte réservée aupublic dans la salle d'audience n'aient même pas été calculées en raison de la population actuelle de notre ville. Cependant,ce n'est point pour les jours où quelques habitués seulement viennent témoigner de leur fidélité à suivre les audiences qu'ilfallait travailler, mais bien pour ces circonstances solennelles où la foule, curieuse d'entendre <strong>et</strong> de voir, envahit le sanctuairede la justice [63].Le tribunal de <strong>Cherbourg</strong> est composé de trois[p. 145]juges, y compris le président ; d'un procureur <strong>du</strong> Roi <strong>et</strong> de son substitut, <strong>et</strong> d'un greffier.


Les travaux judiciaires ont habituellement lieu dans l'ordre suivant : — Lundi, affaires de police correctionnelle. — Mardi,affaires non contradictoires, affaires sommaires <strong>et</strong> provisoires, appels de juges de paix devant être jugés sommairement,affaires ordinaires lorsque l'heure le perm<strong>et</strong>, lectures <strong>et</strong> publications de cahiers de charges, adjudications préparatoires <strong>et</strong>définitives, adjudications devant un juge commissaire. Les audiences sur référé commencent immédiatement après l'audienceordinaire. — Mercredi, la première heure des audiences <strong>du</strong> mercredi est consacrée à l'expédition à bureau ouvert des affaires<strong>du</strong> domaine <strong>et</strong> de l'enregistrement, les deux autres heures <strong>et</strong> toute l'audience <strong>du</strong> jeudi sont consacrées aux affairesordinaires. — La <strong>du</strong>rée des audiences est fixée de onze heures <strong>du</strong> matin à deux de l'après-midi.L'installation d'un tribunal de commerce à <strong>Cherbourg</strong> remonte au 31 octobre 1791 ; il se compose d'un président, de quatrejuges <strong>et</strong> de quatre suppléants ; il siège une fois la semaine, le vendredi, dans la salle <strong>du</strong> tribunal civil.Les greffes de ces tribunaux sont au rez-de-chaussée.PRISON.La prison est attenante au <strong>nouveau</strong> tribunal avec lequel elle communiquera au moyen d'une ouverture pratiquée dans lemur extérieur d'enceinte.[p. 146]L'ancienne prison, située dans les Mielles, précisément en face <strong>du</strong> Champ-de-Mars, à l'endroit même qu'occupeaujourd'hui l'école d'enseignement mutuel, tombait en ruines ; on transféra les prisonniers dans la nouvelle en 1827. Elle peutcontenir environ trois cents détenus ; il y en avait trente-cinq seulement au mois de juin dernier. — Dix-huit militaires, douzebourgeois <strong>et</strong> cinq femmes. Ce nombre peut être considéré comme terme moyen.Chacune des salles peut recevoir sept personnes. Les militaires sont séparés des bourgeois <strong>et</strong> ceux-ci des femmes. — Il ya quatre cours où l'on perm<strong>et</strong> aux détenus de se promener. La première est affectée aux condamnés militaires, la secondeaux prévenus militaires, la troisième aux bourgeois <strong>et</strong> la quatrième aux femmes. — La chapelle est desservie par unaumônier.SALLE DE SPECTACLE.(Rue de la Paix).<strong>Cherbourg</strong> n'a eu long-temps pour salle de spectacle qu'un magasin malpropre, dans lequel on avait élevé un théâtre <strong>et</strong>quelques loges. On osa cependant y con<strong>du</strong>ire l'impératrice Marie-Louise en 1813. Les guirlandes qu'on y plaça alors y étaientencore en 1828.Une maison en bois, construite dans la rue de la Paix, pour servir de lieu de réunions à la société philharmonique, a ététransformée en salle de spectacle ; elle a été meublée <strong>et</strong> ornée avec goût ; les décors[p. 147]sont trop peu nombreux, mais ils sont frais <strong>et</strong> d'un bon eff<strong>et</strong>. Il y aurait sans doute encore bien des cho<strong>ses</strong> à désirer, mais ellepeut servir convenablement en attendant que la ville en fasse construire une autre qui soit plus spacieuse <strong>et</strong> moinsdangereuse en cas d'incendie.Elle peut contenir environ 500 personnes.ÉGLISE SAINTE-TRINITÉ.(Place de l'Église au bord de la mer. V. page 77.)ÉGLISE DE NOTRE-DAME DE L'IMMACULÉE CONCEPTION.C<strong>et</strong>te modeste église, située à l'entrée <strong>du</strong> faubourg <strong>du</strong> Roule, a été élevée en 1831 à l'aide de souscriptions, <strong>et</strong> consacréel'année suivante. On vient d'y ajouter deux ailes, de sorte qu'elle a aujourd'hui la forme d'une croix gothique. Le gothique aaussi été suivi dans la construction <strong>du</strong> reste de l'édifice, mais on n'a pas réfléchi que les fenêtres en ogive, les vitraux colorésveulent être soutenus par des rosaces, des colonn<strong>et</strong>tes, <strong>et</strong> surtout par ces mille p<strong>et</strong>ites sculptures qui font de la pierre unedentelle coqu<strong>et</strong>tement travaillée. L'intérieur en est décoré avec assez de goût. L'autel, d'abord disposé à la romaine, a été


approché de la muraille. On y remarque une statue de saint Joseph, deux tableaux de M. Mouchel, <strong>et</strong> dans l'une deschapelles latérales, une Mater Dolorosa qu'on a eu l'heureuse idée de placer sur une montagne de rocailles brutes, telles quele Roule les fournit.[p. 148]L'évêque de Coutances a élevé l'église <strong>du</strong> Roule à la dignité de succursale, mais la ville a toujours refusé de la reconnaîtrepour telle : 1.° parce que c'est une propriété part iculière ; 2.° parce qu'on a le proj<strong>et</strong> ultérieur d' en construire une plusspacieuse dans le quartier des Mielles.TEMPLE PROTESTANT.(A l'extrémité de la rue <strong>du</strong> Vieux-Quai, près <strong>du</strong> Faubourg).Pasteur : M. Gourjon, bachelier en théologie de l'université de Strasbourg.A l'époque de la réformation, des égli<strong>ses</strong> nombreu<strong>ses</strong> <strong>et</strong> florissantes se formèrent dans les différentes villes de la Basse-Normandie. <strong>Cherbourg</strong> fut la seule, disent nos historiens, « où les huguenots n'eurent point de prêche public, <strong>et</strong> où l'hérésien'infecta aucune famille. » Il n'en faut pas conclure que les <strong>Cherbourg</strong>eois fussent meilleurs catholiques que leurs voisins.Non, mais on <strong>du</strong>t ce résultat aux mesures rigoureu<strong>ses</strong> que prit le maréchal de Matignon, pour interdire aux hérétiques l'entréedes villes soumi<strong>ses</strong> à son commandement. C<strong>et</strong> homme célèbre [64], emporté par un zèle fanatique, qui n'était que tropcommun alors, s'est souvent montré d'une sévérité excessive, <strong>et</strong> l'odieux massacre des protestants de Valognes, (1562) qu'ileût dû empêcher, est une tache qui ternira toujours l'éclat de son nom. [65][p. 149]Aujourd'hui il n'y a pas moins de deux cents protestants à <strong>Cherbourg</strong>. Cependant c<strong>et</strong>te ville n'a commencé à figurer sur lesétats de l'église réformée qu'en 1831 ; un pasteur, M. Gourgeon, y fut envoyé, <strong>et</strong> son installation eut lieu le 19 février 1832.Le local choisi pour la célébration <strong>du</strong> culte ne pouvant plus suffire, les membres <strong>du</strong> consistoire s'adressèrent au conseilmunicipal à l'eff<strong>et</strong> d'obtenir un temple plus spacieux. Le conseil rej<strong>et</strong>a c<strong>et</strong>te demande, <strong>et</strong> M. le maire fut chargé d'exprimer auconsistoire les regr<strong>et</strong>s <strong>du</strong> corps municipal ; mais on l'autorisa en même temps, pour le cas où le consistoire voudrait en faireériger un à <strong>ses</strong> frais, à offrir la concession gratuite d'un terrain propre à le recevoir [66].Le consistoire accepta c<strong>et</strong>te proposition, <strong>et</strong> s'entendit avec M. le maire pour le choix d'un emplacement. On demandaensuite l'autorisation <strong>du</strong> gouvernement, qui l'accorda. Le temple commencé en 1834 sur les plans de M. Virla, ingénieur destravaux hydrauliques, put être terminé en 1835, <strong>et</strong> la dédicace en fut faite le 18 octobre de c<strong>et</strong>te même année devant uneassemblée nombreuse, composée de chrétiens réformés <strong>et</strong> de catholiques.M. Bonnissent, sous-préf<strong>et</strong> ; M. Noël-Agnès, maire ; MM. Pinel <strong>et</strong> Morin, adjoints ; M. Fossey,[p. 150]procureur <strong>du</strong> roi ; M. de Morlincourt, commandant de la place, assistaient à c<strong>et</strong>te religieuse solennité.L'édifice est de modeste apparence, <strong>et</strong> la plus grande simplicité se remarque à l'intérieur. On y lit seulement troisinscriptions tirées de l'évangile. — Il y a une stalle recouverte en drap bleu pour le pasteur <strong>et</strong> des bancs où s'asseient lesfidèles. — C<strong>et</strong>te simplicité puritaine, commune à tous les temples protestants, a quelque chose qui prête au recueillement <strong>et</strong>inspire de pieu<strong>ses</strong> pensées. Les ornements de nos égli<strong>ses</strong> catholiques, au contraire, distraient l'imagination <strong>et</strong> n'élèvent pointl'ame à Dieu.Il n'est ouvert que le dimanche aux heures des offices. — Le matin à dix heures <strong>et</strong> demie <strong>et</strong> l'après-midi à trois heures.CIMETIÈRES.Le cim<strong>et</strong>ière était d'abord auprès de l'église, <strong>et</strong> comprenait l'espace renfermé entre le presbytère <strong>et</strong> la mer. On y a trouvéencore beaucoup d'ossements en creusant, il y a quelques années, les fondements <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong> clocher. Plus tard, quand lapopulation se fut accrue, on le transporta dans un terrain dépendant de l'Hôtel-Dieu, situé à l'emplacement qu'occupeaujourd'hui la rue Auvray. En 1792, on en ouvrit un troisième dans un espace triangulaire à l'extrémité de la rue de la Paix,entre la mer <strong>et</strong> les établissements <strong>du</strong> Port-Militaire. En 1833, il avait déjà été trois fois labouré.


On sentit enfin que le respect qu'on doit à la cendre des morts demandait un plus vaste terrain. La ville[p. 151]ach<strong>et</strong>a trois pièces de terre situées au pied d'Octeville, au bas de la rue de la Duché, sur la route des Pieux. Ce cim<strong>et</strong>ièrecontient 178 ares 30 centiares. Trente-deux ares ont été donnés aux protestants.On le reconnaît de loin à <strong>ses</strong> grands murs crépis de chaux, à sa situation en glacis : la partie inférieure est marécageuse.Une rangée de funèbres sapins <strong>et</strong>, dans le bas, de ces grands peupliers d'Italie qui se plaisent au bord des eaux, le m<strong>et</strong>tenten rapport avec sa destination ; les familles ont placé sur les tombeaux des croix, des colonn<strong>et</strong>tes, des cyprès, de pompeu<strong>ses</strong>inscriptions, emblèmes souvent menteurs des regr<strong>et</strong>s de ceux qui survivent. Une lisière placée au sud est réservée pour lesconcessions à perpétuité.On désirerait qu'il y eût aux portes un gardien pour en maintenir l'entrée ouverte aux personnes qui se souviennent encorede ceux qui ne sont plus, <strong>et</strong> empêcher le vol des obj<strong>et</strong>s déposés sur les tombes [67].HOSPICE CIVIL.Rue Tour-Carrée ou de l'Hôpital. C<strong>et</strong> établissement a aussi une dépendance rue de la Duché, en face <strong>du</strong> cim<strong>et</strong>ière. Voyezplus haut, page 73.ÉTABLISSEMENT DE BIENFAISANCE ET MAISON D'ÉDUCATION.(Rue de la Bucaille).Ce bel établissement construit en 1833 <strong>et</strong> qu'on[p. 152]s'occupe encore d'agrandir, est la propriété de M. lle Duchevreuil, supérieure des soeurs de charité.Une portion louée par la ville est destinée à recevoir le dépôt général <strong>du</strong> linge, des médicaments <strong>et</strong> des autres obj<strong>et</strong>squ'elle accorde aux pauvres à titre de secours.Sont considérés comme indigents tous ceux dont les ressources journalières ne s'élèvent pas à plus de vingt-cinqcentimes pour chacun des membres de la famille. — Les secours se divisent en secours annuels <strong>et</strong> en secours temporaires.Les premiers consistent en pain, viande, linge, paille, chauffage <strong>et</strong> filature ; les autres en bouillons, médicaments, bains, <strong>et</strong>c.Avant 1830, l'établissement de Bienfaisance était réuni à l'hospice civil ; il est aujourd'hui desservi par cinq soeurs decharité <strong>et</strong> dirigé par une supérieure. Les soeurs sont chargées de confectionner <strong>et</strong> de distribuer les bouillons <strong>et</strong> autressecours, de visiter les malades indiqués par les dames de charité <strong>et</strong> de leur donner les soins que réclame leur état. Lasupérieure dirige tout le travail intérieur <strong>et</strong> veiile à ce que les fournitures soient de bonne qualité.Le conseil municipal m<strong>et</strong> chaque année une somme de 14,000 fr. à la disposition <strong>du</strong> bureau de Bienfaisance. Deux milleindigents environ ont eu part, en 1837, aux distributions. Elles ont consisté en 26,126 kilog. de pain. — 2,606 rations deviande. — 8,381 litres de bouillon. — 2,520 fagots. — 4,976 bottes de paille. — 1,545 paires de draps changées.[p. 153]— 1,267 chemi<strong>ses</strong> changées. — 13,374 litres de tisane. — 56 kilog. de sirops. — 2,049 soupes [68]. — 241 litres de vin. —1,737 litres de lait. — 2,586 sangsues. — 204 bains. — 104 kilog. de farine de lin. — 16 kilog. de linimens. — 829 potions.Douze jeunes orphelines sont admi<strong>ses</strong> dans l'établissement <strong>et</strong> élevées aux frais de M. lle Duchevreuil. Outre la lecture,l'écriture <strong>et</strong> le calcul, on leur apprend un état qui les m<strong>et</strong>tra à même de vivre honorablement dans le monde. C'est pour veniren aide à leur bienfaitrice, que plusieurs dames ont eu l'heureuse pensée d'intro<strong>du</strong>ire chez nous l'usage des loteries. Chaqueannée un appel est fait aux personnes charitables qui généralement s'empressent d'envoyer leur offrande. Le 5 décembredernier, le Musée — Henry se trouva transformé en un bazar, où la foule se pressait pour admirer les délicieu<strong>ses</strong> cho<strong>ses</strong>, lesriens charmants que le sort devait repartir le lendemain. Il y avait là des écrans peints, des écrans brodés, des nécessaires enpalissandre aux incrustations de citronnier, des corbeilles en velours, de riches portefeuilles, une Notre-Dame de Parismagnifiquement reliée, des peintures, des gouaches, des aquarelles, des dessins, des gravures, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong>c. ;


[p. 154]la souscription pro<strong>du</strong>isit 2,000 francs, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te somme permit à M. lle Duchevreuil de se charger de trois nouvelles orphelines.La maison d'é<strong>du</strong>cation dont nous avons maintenant à parler est tout-à-fait en dehors <strong>du</strong> bureau de Bienfaisance. Nous neles avons réunis sous un même titre que parce qu'ils se trouvent réunis dans un même établissement <strong>et</strong> sont dirigés par unemême supérieure.C<strong>et</strong>te maison reçoit des pensionnaires, des demi-pensionnaires <strong>et</strong> des externes. L'enseignement comprend l'instructionreligieuse, les travaux d'aiguille, la lecture, l'écriture, la langue française, l'arithmétique, la géographie, l'histoire tant ancienneque moderne <strong>et</strong> le dessin.Il y a actuellement (25 juill<strong>et</strong>) 11 pensionnaires <strong>et</strong> 68 externes.SALLE D'ASILE ET ÉCOLES MUTUELLES.Les salles d'asile, il n'est personne qui ne le sache, sont des établissements charitables où les enfants des deux sexespeuvent être admis, jusqu'à l'âge de six ans accomplis, pour recevoir les soins de surveillance maternelle <strong>et</strong> de premièreé<strong>du</strong>cation. Le conseil municipal qui, bon gré mal gré, marche depuis plusieurs années dans la voie des innovations, a compriscombien il serait avantageux pour notre ville, dont la population se compose presque en entier d'artisans <strong>et</strong> d'ouvriers, d'avoirune de ces salles, <strong>et</strong>[p. 155]il s'est décidé à en faire élever une au Faubourg, à côté <strong>du</strong> temple protestant. Commencée en 1837, elle a pu être ouverte le2 juill<strong>et</strong> dernier. Plus de 50 enfants ont été admis dans les quinze jours qui ont suivi l'ouverture, <strong>et</strong> le nombre des inscrits quiseront pris successivement, ne se montait pas à moins de 100 ; elle peut en contenir environ 200.A la suite de la salle d'asile, vient un établissement construit en même temps <strong>et</strong> sur le même modèle, <strong>et</strong> servant d'écoled'enseignement mutuel. La classe est vaste <strong>et</strong> bien disposée ; cent cinquante enfants y sont instruits : elle en contiendraitfacilement 250. <strong>Cherbourg</strong> possède encore deux autres écoles mutuelles, l'une place <strong>du</strong> Champ-de-Mars <strong>et</strong> l'autre rue de laPaix ; elles sont également fort bien dirigées <strong>et</strong> dans l'état le plus prospère.MANUFACTURE DE DENTELLES.C<strong>et</strong> établissement, sous la direction de cinq religieu<strong>ses</strong>, a employé 240 ouvrières pendant l'année 1837. Plus de la moitiéd'entr'elles n'avaient pas encore atteint leur onzième année, <strong>et</strong> une trentaine seulement n'ont reçu aucun salaire à cause deleur jeune âge. Ces ouvrières ont gagné ensemble 16,042 f. 43 c., ce qui donne une moyenne de 76 f. — Le maximum <strong>du</strong>gain a été 300 f., le minimum de 20 f., — 200 jeunes filles reçoivent en outre les bienfaits de l'instruction dans l'établissement.Les pro<strong>du</strong>its de la manufacture sont adressés à[p. 156]MM. Lefebure <strong>et</strong> Soeurs à Bayeux. Le prix de la façon des dentelles varie depuis 20 c. jusqu'à 60 f.Divers beaux ouvrages sortis de c<strong>et</strong>te manufacture ont été offerts aux princes<strong>ses</strong> qui ont visité <strong>Cherbourg</strong> dans cesderniers temps.COLLÉGE DE CHERBOURG.(Rue de Bailly ou <strong>du</strong> Collége).Fondé en 1813, dans un endroit agréable <strong>et</strong> sain, auprès de la campagne, le collége de <strong>Cherbourg</strong> n'a cessé de prendredepuis lors des développements, <strong>et</strong> aujourd'hui il embrasse toutes les études classiques moins la philosophie. En 1836, on ya joint une école primaire supérieure, dont les cours sont quelquefois communs avec ceux de l'école secondaire.L'enseignement primaire supérieur réuni au collége comprend la religion, les langues française <strong>et</strong> anglaise, lesmathématiques usuelles, l'histoire sainte, générale, de France ; la géographie moderne, l'histoire naturelle, des notions dephysique, le dessin, la musique vocale <strong>et</strong> la calligraphie.


L'enseignement secondaire comprend le latin <strong>et</strong> le grec, l'histoire ancienne, romaine, <strong>du</strong> moyen-âge <strong>et</strong> de France, lagéographie ancienne comparée, la rhétorique, les mathématiques, la cosmographie <strong>et</strong> la physique.Le premier de ces enseignements <strong>du</strong>re trois, le second sept années.Le cours d'anglais <strong>du</strong>re deux ans.[p. 157]Les élèves reçoivent en outre dans le collége les leçons propres à les préparer à la première communion.Pendant la <strong>du</strong>rée des clas<strong>ses</strong> qu'ils ne suivent pas, les élèves de l'école primaire sont placés sous une surveillanceparticulière ; les leçons d'arts d'agrément sont données pendant les récréations, <strong>et</strong> payées par les parents.Les dortoirs sont éclairés pendant la nuit ; dans la journée les écoliers sont surveillés avec le plus grand soin ; il y a troisheures de travail les jours de congé ; ces jours-là les pensionnaires vont le matin à la messe, le soir à la promenade. Tous lestrois mois, le principal envoie aux parents des notes sur tout ce qui concerne leurs enfants.Des élèves externes sont admis, comme les internes, à faire leurs devoirs sous la surveillance d'un maître d'étude. Depuisla fusion des deux enseignements, les prix sont fixés comme il suit :Par mois, pour un seul cours,4 fr.Pour deux cours <strong>et</strong> au-dessus, jusqu'à concurrence de tous les cours, soit <strong>du</strong> collége, soit de l'école primaire, 6Pour les cours des deux établissements, 8Les élèves paient en outre deux francs pour la rétribution universitaire.Pension, par an, 400 fr., demi-pension, 200 fr., camérie, 62 fr., <strong>et</strong> admission à l'étude, 50 f.Les rétributions sont payables : 3/10 en octobre,[p. 158]3/10 en janvier, 3/10 en avril <strong>et</strong> 1/10 en juill<strong>et</strong>.Le principal <strong>du</strong> collége avait aussi demandé au conseil municipal une chaire de philosophie ; sa demande n'a pas été priseen considération.HALLE.Ce vaste édifice, que nous avons enten<strong>du</strong> plusieurs fois comparer à une gigantesque tortue, lourdement appuyée sur <strong>ses</strong>quatre pattes, a été commencé en 1828 <strong>et</strong> terminé en 1832. Il est ouvert au public depuis le 1. er janvier 1833. Avant c<strong>et</strong>teépoque, <strong>Cherbourg</strong> ne possédait aucune halle, <strong>et</strong> le marché au blé se tenait à découvert.La halle a extérieurement 24 mètres de hauteur, 61 mètres 46 centimètres de longueur, <strong>et</strong> 64 mètres 40 centimètres delargeur. Elle se compose à l'intérieur d'une galerie <strong>et</strong> d'une grande pièce rectangulaire. — Quatre p<strong>et</strong>its pavillons placés auxangles de deux cours de 16 mètres de largeur servent au logement des employés.Ce bâtiment serait assez grand pour une population de 70 à 80,000 ames. Le commerce <strong>du</strong> blé occupe à peine aujourd'huiun côté de la galerie ; quelques portions des autres côtés sont louées à des particuliers ; on s'en sert aussi comme lieu dedépôt pour les pompes à incendie.Nous ne blâmerons pas à coup sûr les vastes dimensions de la halle ; la population prend chaque année unaccroissement rapide, <strong>et</strong> ce n'est pas autant pour le présent que pour l'avenir qu'on a dû travailler.[p. 159]Mais les jours ont été mal disposés, ou ils ne sont pas en assez grand nombre ; <strong>et</strong> ce n'est que difficilement que les ach<strong>et</strong>eursparviennent à s'assurer de la qualité <strong>du</strong> grain. Un établissement de c<strong>et</strong>te nature demandait au contraire à être bien éclairé.


On avait eu le proj<strong>et</strong> de faire servir la grande pièce <strong>du</strong> milieu à une salle de spectacle. Ensuite on a proposé de construirec<strong>et</strong>te salle sur la place <strong>du</strong> Château, si bien que la façade de la halle se fût entièrement trouvée masquée. Ce dernier proj<strong>et</strong> aencore été abandonné, <strong>et</strong> c'est avec raison. On comprend en eff<strong>et</strong> combien une telle agglomération d'établissements aussidisparates, sur un même point, serait de mauvais goût.FABRIQUES DES PRODUITS DE SOUDES DE VARECH.Avant de parler des deux fabriques de pro<strong>du</strong>its chimiques que possède notre localité, nous croyons devoir donnerquelques détails sur l'exploitation des varechs qui en constituent la matière première. Une partie de ces détails serontempruntés au journal de <strong>Cherbourg</strong> <strong>du</strong> 22 août 1838.Le varech de la classe des algues est une plante fort commune le long de nos côtes. La récolte en est permise deux foispar an. On l'arrache à la force des poign<strong>et</strong>s, <strong>et</strong> on le r<strong>et</strong>ire de la mer avec de longs râteaux. Il est ensuite chargé sur descharr<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> transporté dans les <strong>environs</strong>. La première récolte sert spécialement à engraisser les terres. Mais le varech quela mer j<strong>et</strong>te chaque jour sur le rivage <strong>et</strong>[p. 160]celui de la deuxième récolte, sont soigneusement ramassés, séchés à l'air, <strong>et</strong> mis à l'abri de la pluie jusqu'à ce qu'on en aitassez pour les brûler.La combustion se fait dans de grandes fos<strong>ses</strong> en ardoi<strong>ses</strong> ; elle doit être lente <strong>et</strong> sans flamme, pour ne pas altérer larichesse <strong>du</strong> pro<strong>du</strong>it. Le rési<strong>du</strong> de l'incinération présente une masse saline <strong>du</strong>re <strong>et</strong> compacte, qu'on nomme soude de varech,nom assez impropre, atten<strong>du</strong> qu'elle renferme peu de sel de soude. Ces cendres sont employées dans la fabrication <strong>du</strong> verreà bouteille. Mais il est bien plus avantageux d'en r<strong>et</strong>irer tous les sels qu'elles renferment, <strong>et</strong> c'est là le but des deux fabriquesdont nous voulons parler.M. Couturier est le premier qui ait formé à <strong>Cherbourg</strong>, il y a 30 ou 40 ans, un établissement de ce genre. Mais c<strong>et</strong>tefabrication était loin d'avoir l'importance qu'elle a acquise depuis quelques années. On n'en r<strong>et</strong>irait alors qu'un seul pro<strong>du</strong>it,connu dans le commerce sous le nom de sel de varech. Il paraît qu'il était particulièrement employé pour la blanchisserie. Onl'obtenait tout simplement par le lessivage des cendres <strong>et</strong> l'évaporation des eaux. Le débouché en était difficile, <strong>et</strong>conséquemment la fabrication très-restreinte. Aujourd'hui les pro<strong>du</strong>its qu'on r<strong>et</strong>ire <strong>du</strong> varech sont très-multipliés, <strong>et</strong> plusieursd'entr'eux trouvent un écoulement certain <strong>et</strong> avantageux. La concurrence des nouvelles usines qui se sont[p. 161]établies ici <strong>et</strong> ailleurs, a élevé le prix des soudes brutes <strong>et</strong> éten<strong>du</strong> leur fabrication, de sorte que c<strong>et</strong>te in<strong>du</strong>strie est devenueune source de prospérité pour les habitants des côtes.Les pro<strong>du</strong>its les plus abondants que l'on r<strong>et</strong>ire aujourd'hui <strong>du</strong> raffinage des soudes brutes, consistent particulièrement ensels de potasse. Parmi ces sels, il en est un fort important, <strong>et</strong> qui intéresse l'état lui-même, c'est le muriate de potasse, aumoyen <strong>du</strong>quel on obtient une partie des salpêtres nécessaires à la fabrication de la poudre à canon.Lorsque les eaux de lessivage ont été dégagées des sels de potasse <strong>et</strong> de soude qu'elles contiennent, elles prennent lenom d'eaux-mères, <strong>et</strong> donnent ensuite par diver<strong>ses</strong> opérations chimiques, deux <strong>nouveau</strong>x corps découverts depuis peud'années, <strong>et</strong> qui servent particulièrement en médecine ; ce sont l'iode <strong>et</strong> le brome, au moyen desquels on forme l'hydriodatede potasse <strong>et</strong> le bromure de potassium qui trouvent un emploi plus facile dans la consommation.C<strong>et</strong>te in<strong>du</strong>strie, qui emploie un assez grand nombre d'ouvriers dans les deux maisons situées à <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> à Tourlaville,<strong>et</strong> qui fait vivre tant de familles sur les côtes, mérite toute la bienveillance <strong>et</strong> tous les encouragements <strong>du</strong> gouvernement.Usine de la rue de Paris.L'usine de MM. Couturier <strong>et</strong> compagnie, située à l'angle S.-E <strong>du</strong> Champ-de-Mars, a long-temps[p. 162]existé seule à <strong>Cherbourg</strong> ; son état de vétusté <strong>et</strong> d'imperfection, forçant ces in<strong>du</strong>striels à l'abandonner, ils viennent de faireconstruire un vaste établissement sur les terrains qui longent à l'est la promenade <strong>du</strong> Roule. Le voyageur le reconnaîtrafacilement à sa haute cheminée quadrangulaire, en briques, d'où s'échappe une fumée noire que le vent courbe <strong>et</strong> balancecomme un immense panache.


Usine de la route de Tourlaville (côté sud).Outre la célèbre manufacture de glaces dont nous avons parlé précédemment (page 32), Tourlaville possédait unefabrique de bouteilles de verre. Elles furent l'une <strong>et</strong> l'autre rançonnées par les Anglais en 1758. Les travaux momentanémentsuspen<strong>du</strong>s furent repris <strong>et</strong> continués dans c<strong>et</strong>te dernière jusqu'en 180. ; depuis lors elle n'a plus ren<strong>du</strong> aucun service. Lesbâtiments qui la composaient ont été ach<strong>et</strong>és il y a deux ou trois ans, par MM. Delaunay <strong>et</strong> Vildieu, banquiers, qui y ont établiune fabrique des pro<strong>du</strong>its de soude de varech.Une société en commaudite par actions avait été formée pour l'exploitation de c<strong>et</strong>te usine ; par acte passé le 6 juin 1838c<strong>et</strong>te société s'est adjoint la maison Couturier. — Capital social, un million deux cent mille francs, divisé en deux mille quatrecents actions.Ces établissements sont dignes en tout point de fixer l'attention des chimistes <strong>et</strong> même des simples curieux. — S'adresseraux propriétaires.ÉTABLISSEMENT DES BAINS DE MER.(A l'extrémité nord de la rue de la Cayenn.)[p. 163]L'établissement des Bains de mer froids <strong>et</strong> chauds, entrepris par une société en commandite en 1827, élevé pendant lesannées 1828 <strong>et</strong> 1829, est encore inachevé, <strong>et</strong> au train dont vont les cho<strong>ses</strong>, il y a tout lieu de croire qu'il en sera encore longtempsainsi.C<strong>et</strong> établissement, construit sur le modèle de ceux de la Rochelle <strong>et</strong> de Dieppe, se trouve dans la position la plusavantageuse. On accède à la mer par une superbe plage, d'une pente douce <strong>et</strong> <strong>du</strong> sable le plus fin <strong>et</strong> le plus uni. De dessusla terrasse, la vue s'étend au loin <strong>et</strong> embrasse presque à la fois Tour-la ville avec sa lande aride <strong>et</strong> sa p<strong>et</strong>ite chapelle S. t-Maur ; la pointe <strong>du</strong> cap Lévi, le fort de l'Ile-Pelée ; la Digue qui enserre dans <strong>ses</strong> vastes bras la rade bleue comme le ciel,polie comme une glace, où se mirent complaisamment les navires à l'ancre ; le fort <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>, la redoute des Fourches, leshauteurs de Querqueville ; les établissements <strong>du</strong> Port-Militaire, les j<strong>et</strong>ées <strong>du</strong> port de Commerce <strong>et</strong> tout le côté nord de la ville.Il y a aussi une plate-forme, d'où la vue n'est que plus belle <strong>et</strong> plus éten<strong>du</strong>e, <strong>et</strong> un jardin qu'il suffirait d'entr<strong>et</strong>enir <strong>et</strong> deprotéger contre les vents <strong>du</strong> nord, pour le rendre magnifique.Le corps de bâtiment principal a 64 m. 08 c. de longueur <strong>et</strong> 16 m. 50 c. de largeur. Il offre au centre une grande salled'assemblée <strong>et</strong> de bal, avec péristyles sur les deux façades ; de chaque côté deux salons,[p. 164]<strong>et</strong> à chaque extrémité un pavillon distribué pour recevoir dix cabin<strong>et</strong>s de toil<strong>et</strong>te <strong>et</strong> des chambres au-dessus. — Au-dessousde tout ce bâtiment sont des caves destinées à remiser les charriots <strong>et</strong> à recevoir les obj<strong>et</strong>s d'approvisionnement. — Laterrasse que la mer vient battre dans les vives-eaux est défen<strong>du</strong>e par une brise-lame <strong>et</strong> a 16 m. de largeur. — Le jardin longde 192 m. <strong>et</strong> large de 64, s'accède par une grille en fer à deux battants, aux côtés de laquelle se trouvent deux pavillons.L'établissement, tel qu'il est aujourd'hui, a coûté 135,000 fr. environ, <strong>et</strong> 80,000 fr. au moins seraient nécessaires pour l<strong>et</strong>erminer. Il manque de cabin<strong>et</strong>s pour les baigneurs étrangers, de logements de maîtres, de bains d'eau chaude, de remi<strong>ses</strong>,d'écuries, d'un café, d'un restaurant, <strong>et</strong> d'une foule d'accessoires les plus indispensables.Les fonds versés par les actionnaires étaient depuis long-temps épuisés ; M. Cuman-Solignac, directeur-gérant, voyantl'impossibilité de trouver de <strong>nouveau</strong>x souscripteurs, fit, au mois d'octobre 1837, une convocation générale de la société. Ellese réunit le 16 dans une des salles de l'hôtel-de-ville, <strong>et</strong> les sociétaires présents ayant refusé de doubler le prix de leursactions, elle fut déclarée dissoute. L'établissement des bains de mer passera donc en de nouvelles mains ; s'il est bien dirigé,il y a tout lieu d'espérer que l'avenir lui réserve un sort prospère.Trois personnages marquants l'ont visité successivement.[p. 165]Le <strong>du</strong>c d'Angoulême en 1829 ; Louis-Philippe en 1833, <strong>et</strong> le général Bertrand en octobre 1836 [69]. Le <strong>du</strong>c d'Angoulêmedaigna perm<strong>et</strong>tre qu'il prît le nom de Bains de S. A. R. Monseigneur le DAUPHIN. On pense bien que c<strong>et</strong>te inscription disparutlors des événements de juill<strong>et</strong> 1830. C'était une leçon ; on ne s'en tint cependant pas là, <strong>et</strong> Louis-Philippe, sur de pressantes


sollicitations, permit également que son nom allât orner la façade de l'établissement. C'est le titre qu'il porte aujourd'hui ;vienne une nouvelle révolution, <strong>et</strong> ce titre sera de <strong>nouveau</strong> badigeonné <strong>et</strong> remplacé par un autre. L'esprit courtisanesque nes'arrête devant aucun ridicule.De p<strong>et</strong>ites tentes mobiles ont été construites pour les personnes qui désirent prendre des bains froids. — S'adresser auconcierge.MAGASIN AUX BOIS DE CHAUFFAGE.Ce magasin est situé rue des Mielles, à l'un des angles <strong>du</strong> prolongement de la rue de Paris. C'est là que sont pris tous lesbois nécessaires à la consommation des troupes en garnison à <strong>Cherbourg</strong>. — Fournisseur, M. Besselièvre.CORDERIES DU COMMERCE.Elles sont établies sur un terrain vague, qui se[p. 166]prolonge de la rue des Mielles à la mer. Il s'y fabrique une grande quantité de cordages de toutes les grosseurs, qu'onemploie au gréement des navires <strong>du</strong> commerce.CHAMP-DE-MARS.Une personne qui aurait quitté <strong>Cherbourg</strong> il y a douze ans, <strong>et</strong> qui y reviendrait aujourd'hui, ne se reconnaîtrait certes pasdans le quartier des Mielles ; à la place de ces jolies maisons, de ces jardins fertiles <strong>et</strong> bien plantés qu'on voit sur tous lespoints, s'étendait une vaste plaine de sable, parsemée de buttes, recouvertes en grande partie de millegreust, d'arrête-boeuf<strong>et</strong> de caille-lait. — Lorsque la ville fit la vente de ces terrains (1826 <strong>et</strong> 1828), elle se réserva <strong>du</strong> côté sud de la route deBarfleur, un emplacement d'environ 200 mètres de long sur 140 de large qu'elle destina aux évolutions militaires <strong>et</strong> auxrevues : c'est le Champ-de-Mars. C<strong>et</strong>te place qui, si elle était bien entr<strong>et</strong>enue, serait la plus belle de la ville, est en grandepartie l'ouvrage <strong>du</strong> 24. e alors en garnison à <strong>Cherbourg</strong>. Depuis 1827 elle sert aux troupes de terre qui y viennent chaque jour,pendant l'été, faire l'exercice.CASERNES.[p. 167]ÉTABLISSEMENTS MILITAIRES.La troupe de terre en garnison à <strong>Cherbourg</strong> n'a véritablement pas de casernes. On a long-temps donné ce nom à desmaisons particulières destinées à un tout autre usage <strong>et</strong> que leur état de vétusté a forcé d'abandonner : trois compagniesseulement occupent encore l'une d'elles située près <strong>du</strong> vieil arsenal ; le reste de la garnison est logé, partie à Chantereynedans une caserne cédée par la Marine au département de la guerre en 1827 (v. Etablissements maritimes), <strong>et</strong> partie dans lesbâtiments qui servirent de logement aux prisonniers espagnols envoyés à <strong>Cherbourg</strong> en 1809. Il y a en outre quelquescompagnies détachées tant à la Hougue que dans les forts.Si le conseil municipal entend bien nos intérêts <strong>et</strong> se décide à faire construire des casernes, il ne pourra, ce nous semble,choisir d'emplacement plus convenable que le terrain actuellement occupé par l'ancienne fabrique de soude de M. Couturier,c<strong>et</strong> endroit, l'un des plus salubres de la ville, se trouvant borné au sud par la p<strong>et</strong>ite rivière le Trottebec <strong>et</strong> au nord par la place<strong>du</strong> Champ-de-Mars.MANUTENTION DE LA GUERRE.C<strong>et</strong> établissement est situé rue <strong>du</strong> Val-de-Saire, N.° 6.Le vaste bâtiment quadrangulaire qu'on aperçoit en entrant a été terminé en 1824. Au rez de chaussée[p. 168]se trouvent le Magasin au pain <strong>et</strong> la Boulangerie dont les voûtes sont à l'épreuve de la bombe. Il y a trois fours pouvantcontenir chacun 250 pains de munition ou 500 rations. Chaque pain pèse 3 livres 1/2, ce qui porte à 875 livres le poids d'une


fournée. Un seul four est en activité dans les temps ordinaires ; six fournées (terme moyen) suffisent aux besoins journaliersde la garnison. — Le premier <strong>et</strong> le second étage servent de greniers pour les farines. Le froment est déposé dans le bâtimentlong, situé à l'est de la cour. On évalue à 6,000 quintaux la contenance de chacun des greniers.POUDRIÈRE ET SALLE D'ARMES DE L'ARTILLERIE DE TERRE.S'il faut en croire le Charivari, ce p<strong>et</strong>it journal si spirituel, si mordant, si éminemment français, M. de Salvandy se trouvantun soir dans un bal aurait dit, en faisant allusion à la situation politique de la France, nous dansons sur un volcan. Subsistuezle verbe vivre au verbe danser, <strong>et</strong> ce mot trouvera chez nous une application vraie. Une poudrière pouvant contenir 300milliers de poudre <strong>et</strong> qui en renferme aujourd'hui 150 milliers, se trouve placée presque au centre de la ville. Si par malheurelle venait à sauter, la population entière serait ensévelie sous les débris des maisons, <strong>et</strong> c'est à peine si de tous cesétablissements commerciaux <strong>et</strong> maritimes qui font l'admiration des étrangers, qui ont coûté tant de soins <strong>et</strong> de dépen<strong>ses</strong>, ilresterait quelques[p. 169]décombres pour attester que <strong>Cherbourg</strong> fut là : une étincelle, une légère imprudence, un rien cependant, peuvent amener uneexplosion.C<strong>et</strong>te poudrière, l'une des plus remarquables <strong>du</strong> royaume, n'a pas moins de cinquante ans d'existence ; elle est voûtée àl'épreuve de la bombe, <strong>et</strong> les barils qui renferment la poudre, au lieu d'être entassés les uns sur les autres, ont chacun leurcase. — Des personnes s'étonnent que ce foyer de destruction ait été placé dans un lieu sans défense. Si elles avaient mieuxétudié notre histoire, elles sauraient qu'on a eu longtemps le proj<strong>et</strong> d'enceindre <strong>Cherbourg</strong> d'une muraille bastionnée, <strong>et</strong> quele magasin aux poudres se fût ainsi trouvé à l'abri. Les fortifications qu'on se proposait d'établir sur les hauteurs devaient aureste rendre l'approche de la ville très-difficile [70].« Plus d'une fois déjà, disait M. de Berruyer en 1833 (Guide <strong>du</strong> v.), des pétitions ont été adressées au gouvernement parles habitants, pour demander que les poudres soient emmagasinées dans quelque autre bâtiment situé hors des murs de laville. » Depuis c<strong>et</strong>te époque, de nouvelles réclamations se sont élevées de toutes parts, des démarches ont été faites par leconseil municipal, qui s'est offert à entrer pour une forte somme dans les dépen<strong>ses</strong> qu'entraînera l'abandon de la poudrière.Mais les cho<strong>ses</strong> restent dans le même état : le danger est[p. 170]éminent cependant ; c'est de la vie de plus de vingt mille personnes, de l'existence de la ville entière, des intérêts de laFrance, en un mot, qu'il s'agit. Le gouvernement doit se hâter de prendre un parti, autrement il ferait preuve d'une incurie querien ne pourrait excuser <strong>et</strong> dont le pays serait en droit de lui demander compte.Le rez de chaussée <strong>du</strong> grand bâtiment qu'on aperçoit de la rue, sert de lieu de dépôt aux cartouches confectionnées. Lasalle d'armes de l'artillerie de terre se trouve au premier. Elle renferme près de 7,000 fusils <strong>et</strong> une grande quantité de sabres,de mousqu<strong>et</strong>ons, de pistol<strong>et</strong>s <strong>et</strong> autres obj<strong>et</strong>s d'équipement. On y remarque un fusil d'honneur garni en argent, donné par lepremier consul au nommé Monnier, sergent pionnier, mort il y a quelques années à <strong>Cherbourg</strong>. Une plaque apposée sur lacrosse porte c<strong>et</strong>te inscription :Le premier consul au C. er François Monnier, fusilier de la 40. e 1/2 B. de d'inf.ie, lequel déjà blessé, resta sur le champ debataille jusqu'à ce qu'une seconde blessure l'eût mis hors de combat. B. lle de Marengo,Une permission spéciale <strong>du</strong> directeur d'artillerie de terre est indispensable pour visiter c<strong>et</strong> établissement.ARSENAL DE LA GUERRE.Après la suppression de l'abbaye de Notre-Dame-<strong>du</strong>-Voeu, les vastes bâtiments qui la composaient restèrent vacantsjusqu'au moment où le <strong>du</strong>c d'Harcourt n fit le siège de son gouvernement. Une caserne[p. 171]couverte en paille avait été construite, en 1783, contre un des murs d'enceinte, pour servir de logement aux soldats de laMarine employés au remplissage des cônes ; mais ils ne l'occupèrent que peu de temps, <strong>et</strong> elle fut cédée, en 1786, à unecompagnie d'ouvriers artilleurs, appelés à <strong>Cherbourg</strong> par M. Mennier, inventeur d'une nouvelle espèce d'affuts que c<strong>et</strong> officier<strong>du</strong> génie destinait à l'armement des forts de la rade. C<strong>et</strong> établissement prit dès lors de l'importance. La Marine y fit exécuterun parc d'artillerie, un hangar couvert, un magasin à poudre, des murs de clôture, une porte d'entrée, plusieurs forges, unefonderie, des magasins au fer <strong>et</strong> au charbon, <strong>et</strong>c. ; <strong>et</strong> sous la république, il s'accrut de plusieurs corps de bâtiments occupés


par le <strong>du</strong>c d'Harcourt. L'artillerie de terre en a toujours conservé la jouissance depuis c<strong>et</strong>te époque, <strong>et</strong> c'est là qu'est déposéen grande partie le matériel nécessaire à la défense de la place. Le directeur de l'artillerie y a son logement <strong>et</strong> <strong>ses</strong> bureaux. —Plusieurs des bâtiments de l'abbatiale sont bien conservés ; on y remarque diver<strong>ses</strong> sculptures <strong>et</strong> notamment la cheminée dela salle principale de l'abbaye. Nous renvoyons aux détails que nous avons donnés, page 104, 1 re partie, sur ce curieuxmonument.FORTS ET REDOUTES.<strong>Cherbourg</strong>, que de puissantes murailles <strong>et</strong> des tours nombreu<strong>ses</strong> défendaient, dont le château était, au[p. 172]dire de Froissart, un des plus forts <strong>du</strong> monde ; <strong>Cherbourg</strong> qui résista plus de six mois à Duguesclin, <strong>et</strong> qui força ce grandcapitaine à avouer, en levant le siège, qu'il perdait son temps <strong>et</strong> que <strong>Cherbourg</strong> était imprenable, n'est plus aujourd'hui qu'uneville ouverte <strong>et</strong> pour ainsi dire sans défense <strong>du</strong> côté de la terre. Château, donjon, remparts, bastions, tourelles, tout esttombé : ce que le temps eût respecté encore bien des siècles, a été impitoyablement détruit par la main de l'homme, <strong>et</strong> c'est àpeine s'il reste un souvenir de tant de grandeurs passées ; si, de ces murs orgueilleux qui élevaient leurs têtes crénelées versle ciel, il reste quelques vestiges sous le sol. Louis XIV, assez fort pour abattre, se trouva impuissant pour réédifier : lestravaux de la nouvelle ville proj<strong>et</strong>ée par Vauban (1788), furent suspen<strong>du</strong>s presque aussitôt qu'entrepris, <strong>et</strong> peu de tempsaprès même, on détruisit ce qui avait été fait.<strong>Cherbourg</strong> est l'unique place forte <strong>du</strong> Cotentin, <strong>et</strong> ce n'est pas seulement comme port d'armement, de r<strong>et</strong>raite <strong>et</strong> decommerce, qu'il importe à la France de le protéger contre les entrepri<strong>ses</strong> de la Grande-Br<strong>et</strong>agne, mais encore comme villefrontière. On comprend, en eff<strong>et</strong>, que si l'Anglais en était une fois maître, il pourrait bien ne pas se borner à en renverser lesétablissements ou à l'occuper dans le seul but de nuire à notre commerce <strong>et</strong> de couper le passage aux navires quitraverseraient la Manche ; mais qu'il tenterait de s'en servir comme de point de départ[p. 173]pour s'avancer vers l'intérieur ; <strong>et</strong>, qui sait si de la prise de <strong>Cherbourg</strong> ne dépendrait pas une nouvelle invasion pareille à cellequi, au XV e siècle, mit le royaume à deux doigts de sa perte ?Après l'achèvement des travaux de la rade, <strong>Cherbourg</strong> sera véritablement imprenable par mer, <strong>et</strong> il est douteux quel'ennemi se hasarde jamais à l'attaquer de ce côté. Comme en 1758, il choisira pour effectuer son débarquement quelqu'unedes plages qui se trouvent dans le littoral, soit à l'E., soit à l'O., <strong>et</strong> si c<strong>et</strong>te opération réussit, il se dirigera aussitôt sur la villequ'il essaiera d'enlever. Car on ne peut supposer qu'il se risque, en laissant une place de c<strong>et</strong>te force sur <strong>ses</strong> derrières, à s<strong>et</strong>rouver pris entre deux feux, <strong>et</strong> à voir sa r<strong>et</strong>raite coupée.Il est donc indispensable de fortifier <strong>Cherbourg</strong> <strong>du</strong> côté de la terre, <strong>et</strong> de le m<strong>et</strong>tre en état d'opposer une longue <strong>et</strong> sérieuserésistance. On nous assure qu'il n'y a encore rien d'arrêté à l'égard des ouvrages qu'il conviendrait d'établir. MM. les officiers<strong>du</strong> génie sont même d'opinions fort divergentes, <strong>et</strong> la question ne paraît pas devoir être résolue de sitôt. Cependant, afin queceux de nos lecteurs que cela intéresse, puissent préjuger, par analogie, quelle serait la nature de ces moyens de défense,nous allons donner ici une courte analyse de quelques-uns des plus anciens proj<strong>et</strong>s.<strong>Cherbourg</strong> se trouve assis dans un bas fonds, <strong>et</strong> les hauteurs <strong>du</strong> Roule, de la Fauconnière, de S.t-Sauveur [71],[p. 174]des Roqu<strong>et</strong>tes, des Fourches, <strong>du</strong> Tot <strong>et</strong> des Coupl<strong>et</strong>s qui le circonscrivent <strong>et</strong> le commandent <strong>du</strong> S.-E. à l'O.-N.-O., sontcoupées par des ravins. C'est donc principalement sur la situation respective de ces hauteurs, que les divers proj<strong>et</strong>s, soitqu'ils comprennent ou non la ferm<strong>et</strong>ure de la ville, ont dû être basés.Le premier remonte à l'année 1774 : on demandait que la ville fut fermée par une enceinte bastionnée, ayant neuf fronts ;que deux ouvrages en forme de bonn<strong>et</strong> de prêtre fussent établis, l'un sur la montagne <strong>du</strong> Roule, l'autre sur la Fauconnière, <strong>et</strong>qu'une p<strong>et</strong>ite redoute couvrît la partie E. de la montagne de S.t-Sauveur.Deux ans après, le directeur des fortifications, Decaux, proposa également une ferm<strong>et</strong>ure bastionnée avec chemincouvert ; mais au lieu d'un ouvrage en forme de bonn<strong>et</strong> de prêtre, il plaçait sur le Roule un ouvrage couronné, avec ré<strong>du</strong>itintérieur. Un p<strong>et</strong>it ouvrage à cornes <strong>et</strong> deux redoutes, communiquant par un chemin couvert, occupaient la montagne de S.t-Sauveur dans toute sa longueur. Ce proj<strong>et</strong> avait encore cela de remarquable, que les eaux de la Div<strong>et</strong>te, contenues par unbatardeau de dix pieds de haut, auraient circulé <strong>et</strong> formé une inondation en avant des fronts <strong>du</strong> S. <strong>et</strong> de l'O. Les eaux deTrottebec, repoussées par ce même batardeau, devaient pareillement couvrir le terrain en avant des fronts de l'E.


[p. 175]La mise à exécution des Travaux de la Digue, vint nécessairement changer la face des cho<strong>ses</strong> ; on ne tarda pas àcomprendre de quelle utilité il serait pour notre Marine d'avoir dans la Manche, outre une rade tranquille <strong>et</strong> sûre, un bon portde refuge <strong>et</strong> même d'armement, muni de tous les établissements nécessaires au radoub, à la construction <strong>et</strong> au gréement desvaisseaux <strong>et</strong> frégates. Les proj<strong>et</strong>s antérieurs dûrent dès lors subir d'importantes modifications, <strong>et</strong> c'est en raisonnant dansl'hypothèse d'un port militaire, que la commission de 1792, arrêta qu'il était nécessaire :« 1.° D'occuper par des ouvrages permanents les pri ncipaux points des hauteurs qui dominent immédiatement <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> la plaine <strong>du</strong> Gal<strong>et</strong>. »2.° De fermer par une simple enceinte bastionnée l' espace compris entre le fort <strong>du</strong> Gal<strong>et</strong> <strong>et</strong> celui <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>, destiné à l'emplacement <strong>du</strong> portnational.3.° De fermer de même par une enceinte la ville de <strong>Cherbourg</strong>, les établissements militaires qu'elle contient, <strong>et</strong> ceux qui restent à former pour leservice des troupes de terre <strong>et</strong> pour celui des côtes.A l'Est, la ligne de défense devait avoir une éten<strong>du</strong>e de 1750 m. ; elle appuyait sa gauche à la redoute de Tourlaville, <strong>et</strong> sadroite à la montagne <strong>du</strong> Roule, dont la partie supérieure était occupée au N. par un ouvrage couronné.A l'Ouest, c<strong>et</strong>te ligne couvrait tout l'espace compris — 7000 m. environ. — entre le ravin de la Div<strong>et</strong>te <strong>et</strong> le fort deQuerqueville ; mais il n'y aurait eu d'ouvrages de fortification permanents que sur les seules hauteurs de la Fauconnière,d'Octeville, des Fourches <strong>et</strong> des Coupl<strong>et</strong>s.[p. 176]De <strong>nouveau</strong>x proj<strong>et</strong>s ont été dressés depuis lors ; mais ne les ayant pas sous les yeux, nous ne pouvons en indiquer lesba<strong>ses</strong>. Nous tenons de bonne part qu'on a entièrement renoncé à fermer <strong>et</strong> protéger la ville par une enceinte ; quant àl'occupation des hauteurs, elle a été vivement combattue, <strong>et</strong> elle trouve encore de nombreux adversaires. Leur principaleobjection consiste à dire qu'une fois l'ennemi maître de ces points, il se servira de nos ouvrages contre nous, pour s'emparerde la ville <strong>et</strong> <strong>du</strong> port militaire. On répond à cela, que la prise des hauteurs, fortifiées ou non fortifiées, entraînera celle de laville, <strong>et</strong> que le Port Militaire ne sera plus tenable dès que l'assaillant pourra y faire pleuvoir des milliers de boul<strong>et</strong>s qui yporteront le ravage <strong>et</strong> l'incendie. Il faut donc disputer le terrain à l'ennemi par tous les moyens que l'art m<strong>et</strong> en notre pouvoir,ne fût-ce que pour donner le temps aux secours d'arriver. Il est au reste de toute nécessité que <strong>Cherbourg</strong> soit à l'abri d'uncoup de main.Les forts ou redoutes qui le protègent en ce moment <strong>du</strong> côté de la terre, sont au nombre de cinq. Le premier, celui <strong>du</strong>Roule a été bâti en partie sous la république <strong>et</strong> achevé par les prisonniers espagnols. Il est situé dans l'emplacement d'unep<strong>et</strong>ite redoute <strong>et</strong> à l'endroit même d'où Duguesclin, pendant le siège de 1379, lançait sur la ville, en guise de boul<strong>et</strong>s, degros<strong>ses</strong> boules de granit, dont on a vu long-temps des échantillons dans nos rues. Les r<strong>et</strong>ranchements à pierres sèches ensont en fort mauvais état.[p. 177]Les quatre autres, situés sur les hauteurs d'Octeville, des Fourches [72], <strong>du</strong> Tot <strong>et</strong> des Coupl<strong>et</strong>s, ont été exécutés sousl'empire, <strong>et</strong> ne sont que de simples ouvrages de campagne, qui ne soutiendraient pas une attaque sérieuse. Leur constructionn'offre rien de remarquable, <strong>et</strong> c'est à peu près la même pour tous : une base polygonale de maçonnerie circonscrite defossés profonds, un pont-levis plus ou moins considérable, puis au milieu d'une cour en talus, un édifice quelque fois percé demeurtrières.La rade <strong>et</strong> l'entrée <strong>du</strong> Port-Marchand étaient anciennement défen<strong>du</strong>es par huit principaux forts ; quoiqu'ils ne soient plusd'aucune utilité <strong>et</strong> qu'ils soient même en grande partie détruits, nous croyons devoir en dire quelques mots. On trouvait à l'E.la redoute de Tourlaville, quadrilatère qui subsiste encore, <strong>et</strong> dont les revêtements en maçonnerie sont entourés de fossés ; <strong>et</strong>à l'O., 1.° La batterie de Longl<strong>et</strong>, située à l'angle de la nouvelle ville proj<strong>et</strong>ée par Vauban. Ce qu'il en reste, sert de chantier deconstruction à un particulier. 2.° Le fort <strong>du</strong> Gal<strong>et</strong>, dont la gorge était fermée par un p<strong>et</strong>it front bastionné, <strong>et</strong> que les habitantsavaient construit en 1690, à leurs propres frais. C'était le plus important, <strong>et</strong> celui qui a ren<strong>du</strong> le plus de services ; il est presqueentièrement démoli. 3.° La batterie Choiseul qui était adhérente au fort actuel <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>. 4.° Le fort d'Equeurdreville,[p. 178]avec une batterie à barb<strong>et</strong>te. 5.° Le fort des Autels. 6.° La batterie en terre de S.te-Anne. 7.° Le grand <strong>et</strong> le p<strong>et</strong>it fort deQuerqueville.Les forts de l'Ile-Pelée, <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong> <strong>et</strong> de Querqueville, étant particulièrement affectés à la défense de la Rade, nous enparlerons à l'article qui la concerne.ÉTABLISSEMENTS


COMMERCIAUX.La formation <strong>du</strong> port marchand de <strong>Cherbourg</strong> est <strong>du</strong>e au cours de la Div<strong>et</strong>te <strong>et</strong> <strong>du</strong> Trottebec, <strong>et</strong> il a toujours existé. Il estprésumable qu'il était fréquenté dès le temps des Romains, puisqu'ils avaient choisi c<strong>et</strong> endroit pour y établir une station quela carte Théodosienne indique sous le nom de Coriallum ; cependant aucun de nos historiens contemporains n'en fait mentiond'une manière positive avant 1181, époque à laquelle Henri II, roi d'Angl<strong>et</strong>erre s'y embarqua avec le roi d'Ecosse. Ils parlentbien <strong>du</strong> long séjour qu'Aigrold, roi de Dannemarck fit en notre ville vers 940 (v. page 20, 1 re PARTIE) ; mais ils ne la citent pascomme le point d'arrivée de ce prince. Il y a tout lieu de croire néanmoins qu'il en fut ainsi [73], <strong>et</strong> que plus tard, lorsqu'il allacombattre Louis d'Outremer,[p. 179]ce fut là qu'il mit à la voile avec 22 gros vaisseaux. Tel a été au reste le sentiment des divers historiens généraux deNormandie.La principale mention qui soit faite de notre port après 1181, se trouve dans un privilège accordé par Philippe-Auguste, en1207, à la ville de Rouen y est dit que les marchands de c<strong>et</strong>te ville feront commerce de l'Irlande à l'exclusion de tous leshabitants de la Normandie, ceux de <strong>Cherbourg</strong> exceptés, qui pourront y envoyer tous les ans un navire. — Nous voyonsensuite que les Anglais descendirent à <strong>Cherbourg</strong> vers 1293 [74], <strong>et</strong> qu'ils incendièrent la ville <strong>et</strong> pillèrent l'abbaye. — Troisans après, Philippe-le-Bel fit payer 8832 liv. (166,000 f.) à Othon de Tocy, chevalier <strong>et</strong> amiral de la mer, tant pour le fait de sacharge que pour les réparations dont <strong>ses</strong> navires, alors à <strong>Cherbourg</strong>, avaient besoin. « C<strong>et</strong> armement, ajoute M. Asselin, étaitune partie de la flotte, ou bien la flotte toute entière qui fut envoyée en Angl<strong>et</strong>erre sous le commandement de Mathieu deMontmorency <strong>et</strong> de Jean d'Harcourt. » On en pourrait tirer une preuve irréfragable de l'importance que le port avait acquisedès ce temps : nous croyons au surplus en avoir dit assez pour établir son antiquité, <strong>et</strong> sans nous arrêter aux mentions plusou moins directes que les historiens ont pu en faire, à l'occasion d'événementsultérieurs, nous arrivons à l'époque des premiers travaux.[p. 180]Mais pour se former une idée juste de ce qui a été fait, il est nécessaire de bien connaître ce qu'était le port dans son étatprimitif. Les Détails historiques de M. Asselin en contiennent une description qui ne laisse rien à désirer ; nous empruntons àc<strong>et</strong> ouvrage les passages suivants :« Avant qu'on eût détourné leurs cours, c'est-à-dire il y a à peu près 50 ans, [75] elles (la Div<strong>et</strong>te <strong>et</strong> le Trottebec) venaient se réunir à l'extrémité dela vallée que forment les deux montagnes <strong>du</strong> Roule <strong>et</strong> de la Fauconnière : delà elles traversaient ce qu'on appelait l'arrière-bassin [76], le port <strong>et</strong> lechenal pour se rendre à la mer..... Alors, le flot de chaque marée ne rencontrant dans ce grand espace aucun obstacle pour l'arrêter dans sa marche,la mer montait, plus ou moins, suivant la hauteur des marées, bien au-delà des limites <strong>du</strong> port actuel, <strong>du</strong> côté de l'Est, jusqu'au bas de la montagne <strong>du</strong>Roule, vers le Sud ; <strong>et</strong>, <strong>du</strong> côté de l'Ouest, tout près des maisons <strong>du</strong> faubourg <strong>et</strong> de la rue qui porte maintenant le nom de rue de l'Ancien-Quai. On l'avue souvent s'élever dans les marées d'équinoxe jusqu'au pont <strong>du</strong> Roule, qui était alors le seul accès possible pour entrer dans <strong>Cherbourg</strong> de ce côté.C<strong>et</strong>te immense plage étant ainsi couverte des eaux de la mer deux fois chaque jour, les bâtiments, lors de leur arrivée, y choisissaient leur placesuivant leur tirant d'eau ; <strong>et</strong>, pendant la basse mer, ils se trouvaient à portée soit de prendre, soit de déposer leur chargement ; ceux qui avaient besoinde se faire réparer, attendaient une grande mer qui les portait au rivage,[p. 181]où ils étaient à sec pendant la morte eau, <strong>et</strong> une autre grande mer venait les rem<strong>et</strong>tre à flot. »Les habitants de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> il en existe beaucoup qui peuvent se souvenir de c<strong>et</strong>te époque, ont vu le port tel que je viens de le décrire. Ils ont vul'immense éten<strong>du</strong>e que la mer couvrait depuis les Mielles jusqu'au faubourg <strong>et</strong> au bas de la montagne ; ils ont vu construire des bâtiments de toutegrandeur tout près des maisons de la rue de l'Ancien-Quai, au-delà de la nouvelle prison, <strong>et</strong> surtout vers l'année 1764, le navire le Maréchal-de-Bellefonds, de 220 à 240 tonneaux. Ils ont vu construire aussi, au bas de la rue <strong>du</strong> Château, en 1766, les navires le Télémaque <strong>et</strong> l'Aimée-Olive, tousdeux de 120 à 130 tonneaux ; de ces divers points de la ville, beaucoup de personnes s'embarquaient sur des canots pour aller à l'ermitage <strong>du</strong> bas dela montagne ou au Cauchin. »Lorsqu'en 1687, Vauban se transporta à <strong>Cherbourg</strong> sur les ordres de Louis XIV, pour y dresser le plan d'un établissementmaritime, le port de commerce se trouvait dans l'état où nous venons de le voir, <strong>et</strong> si l'on en excepte une ancienne j<strong>et</strong>ée àpierres sèches qui, <strong>du</strong> côté de l'Est, protégeait la passe contre les envahissements des sables, rien n'avait été fait pourl'améliorer. On sait (v. page 32) qu'il ne fut alors donné aucune suite aux proj<strong>et</strong>s <strong>du</strong> maréchal, ce qui fut en grande partiecause de la perte de nos vaisseaux après le combat de la Hougue, puisque si <strong>Cherbourg</strong> leur eût offert un refuge, ilsn'eussent pas tenté de gagner Brest ou Saint-Malo. (v. SAINT-VAAST-LA-HOUGUE).Les vives représentations de l'ingénieur en chef <strong>du</strong> génie, de Caux, déterminèrent enfin le gouvernement (1736) àentreprendre les ouvrages regardés comme les plus indispensables, <strong>et</strong> une adjudication en ayant


[p. 182]été passée moyennant 560,000 fr., on se mit à l'oeuvre en 1739. Le général Asfeld envoya un régiment de travailleurs sur leslieux <strong>et</strong> l'on s'occupa presque simultanément de la construction de deux j<strong>et</strong>ées, à droite <strong>et</strong> à gauche <strong>du</strong> chenal, de murs dequai dans l'avant-port, d'une écluse de 52 m. 65 c. de longueur sur 13 m. d'ouverture, d'un pont-tournant <strong>et</strong> d'une chaussée àl'Est. Ces travaux furent poussés avec une telle activité qu'ils étaient tous achevés en 1742. [77] On entreprit ensuite laconstruction d'une paire de portes de flot <strong>et</strong> des murs <strong>du</strong> quai Est <strong>du</strong> bassin. Le commerce <strong>du</strong> port occupait déjà plus de 50capitaines au long cours <strong>et</strong> de 100 maîtres pour le cabotage.Le port était ainsi devenu plus sûr <strong>et</strong> plus commode ; mais les services qu'il devait rendre, tant à la marine marchande qu'àla marine militaire, furent de courte <strong>du</strong>rée. En 1758, à peine les Anglais étaient-ils en pos<strong>ses</strong>sion de <strong>Cherbourg</strong>, qu'ilss'empressèrent de miner <strong>et</strong> de détruire tout ce qui avait quelque importance ; les j<strong>et</strong>ées, les murs de quai, l'écluse [78] furent[p. 183]renversés <strong>et</strong> leurs débris comblèrent en partie le chenal <strong>et</strong> le port. Les portes, le pont-tournant <strong>et</strong> trente-quatre navires [79]devinrent la proie des flammes ; il ne fut pas même fait grâce aux cordages <strong>et</strong> aux bois de construction que l'ennemi trouvadans les chantiers <strong>et</strong> magasins particuliers.La mer un moment contenue avait repris <strong>ses</strong> anciennes limites, <strong>et</strong> sauf les divers fondements que les mines n'avaient puatteindre, tout le travail de vingt années était à refaire ; mais le déplorable état des finances ne permit pas de s'en occuperpour lors, <strong>et</strong> l'on se borna au déblaiement d'une partie <strong>du</strong> chenal <strong>et</strong> de l'avant-port.Le ministère, touché des malheurs <strong>et</strong> de la situation critique de notre commerce, consentit enfin à fournir les fondsnécessaires pour le rétablissement <strong>et</strong> l'achèvement <strong>du</strong> port, <strong>et</strong> il fut, à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, passé successivement six adjudications. Lapremière est en date <strong>du</strong> 4 juill<strong>et</strong> 1763 ; la 2 e <strong>du</strong> 29 août 1766 ; la troisième <strong>du</strong> 1 er juin 1770 ; la quatrième <strong>du</strong> 16 février 1778 ;la cinquième <strong>du</strong> 20 janvier 1779, <strong>et</strong> la sixième <strong>du</strong> 10 août 1780. Elles comprenaient, abstraction faite des épuisements,fouilles <strong>et</strong> déblais : 1° La construction de portes de flot, d'un pont-tournant [80], <strong>du</strong> radier [81] <strong>et</strong> des bajoyers de l'écluse ; des[p. 184]murs de quai de l'avant-port <strong>et</strong> de ceux <strong>du</strong> bassin avec une digue provisoire en sable au S. ; <strong>du</strong> pont de l'Ermitage, <strong>et</strong> del'écluse de l'E. <strong>et</strong> de <strong>ses</strong> accessoires ; 2° La répar ation (provisoire <strong>et</strong> à pierres sèches), des j<strong>et</strong>ées <strong>et</strong> de l'écluse de l'O.exécutée anciennement par le département des fortifications.Tous ces travaux ne portèrent point cependant le port à sa perfection ; outre que plusieurs établissements n'étaient queprovisoires, il manquait encore des accessoires les plus indispensables. Mais l'attention <strong>du</strong> gouvernement se concentra sur larade ; puis vinrent les bouleversements politiques, <strong>et</strong> nous voyons qu'il ne fut donné aucune suite aux proj<strong>et</strong>s, successivementélaborés, de l'ingénieur en chef Lefebvre, de l'ingénieur en chef Pitron <strong>et</strong> de la commission de 1792. Les travauxd'achèvement <strong>du</strong> bassin, entrepris en 1803, furent bientôt discontinués, <strong>et</strong> jusqu'en 1820, on se borna, pour ainsi dire, à destravaux d'entr<strong>et</strong>ien.Mais depuis c<strong>et</strong>te époque, les cho<strong>ses</strong> ont bien changé, <strong>et</strong> encore quelques années d'une activité pareille à celle qui a étédéployée, le commerce n'aura plus rien à désirer. — Nous allons maintenant nous occuper de la description <strong>et</strong> de l'usage dechaque établissement en particulier.CHENAL.[p. 185]L'avant-port de commerce communique à la rade par un chenal dont la direction est <strong>du</strong> Sud au Nord, <strong>et</strong> qui a 600 mètresenviron de longueur sur 50 de largeur. Il est compris entre deux j<strong>et</strong>ées, <strong>et</strong> la mer y monte à 6 mètres au moins dans les viveseauxordinaires. On le débarrasse des alluvions qui pourraient en gêner les abords, au moyen des chas<strong>ses</strong> de l'écluse del'Est, dont nous parlerons par la suite.JETÉE DE L'ESTLorsqu'en 1758 les Anglais détruisirent nos établissements maritimes, la j<strong>et</strong>ée de l'Est n'était pas encore terminée. Il n'y enavait que 253 m. 37 c. de longueur d'exécutés, à partir de l'avant-port ; le reste, moins une lacune de 48 m. 73 c., étaitseulement fondé. La partie minée fut relevée provisoirement en moellons <strong>et</strong> libages posés à sec, genre de maçonnerie peu<strong>du</strong>rable à la mer ; aussi, lorsque, il y a une vingtaine d'années, on s'occupa <strong>du</strong> rétablissement définitif de c<strong>et</strong>te j<strong>et</strong>ée, s<strong>et</strong>rouvait-elle dans un état de dégradation complète. Elle ne pouvait empêcher les dépôts de sable dans le chenal, <strong>et</strong> loin de


endre des services aux navires, elle était au contraire, dans les gros temps, un écueil pour ceux qui avaient à entrer dans leport.Sa reconstruction qu'on réclamait depuis longtemps, <strong>et</strong> qui devenait de plus en plus urgente, fut enfin approuvée le 14juill<strong>et</strong> 1818. Une première adjudication[p. 186]fut passée le 6 janvier 1820, <strong>et</strong> tout étant disposé, les travaux purent être entrepris à la grande mer <strong>du</strong> 14 mars. Le 19 octobresuivant, une nouvelle adjudication eut lieu pour l'achèvement <strong>du</strong> musoir.La j<strong>et</strong>ée a été exhaussée sur les fondements de l'ancienne, établis à 1 m. 35 c. en contre-bas de la laisse des bas<strong>ses</strong>mers de vives-eaux. Elle se compose d'une partie ancienne, à pierres sèches, de 350 m. de longueur, dont les deux tiers aumoins disparaîtront quand l'avant-port sera terminé, <strong>et</strong> d'une partie neuve de 245 m. en maçonnerie de moellon avecrevêtements, parap<strong>et</strong> <strong>et</strong> pavage de granit. — Elle a 6 m. 96 de largeur, 8 m. 02 de hauteur, <strong>et</strong> s'élève à 2 m. 26 au-dessusdes hautes mers de vives-eaux. — A son extrémité nord est un musoir arrondi en demi-cercle, qui l'excède en largeur <strong>et</strong> enhauteur, <strong>et</strong> qui s'y raccorde au moyen d'une partie intermédiaire formant également saillie. — Deux échelles ménagées dansle mur de revêtement, en facilitent l'accès <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> chenal. On y a aussi fixé cinq organeaux pour le hallage des navires.Cinq canons sont scellés dans la maçonnerie sur l'axe <strong>du</strong> couronnement, <strong>et</strong> au centre de la partie circulaire <strong>du</strong> musoir, s<strong>et</strong>rouve une tourelle dont nous parlerons par la suite (voy. PHARES).Autrefois les bâtiments étaient pour ainsi dire bloqués dans le port par les vents de N.-E., les seuls qui soient favorablespour démancher ; depuis la construction de la j<strong>et</strong>ée, ils peuvent sortir avec facilité <strong>et</strong>[p. 187]profiter ainsi de ces vents. — Elle a été terminée à la fin de 1825, <strong>et</strong> a nécessité une dépense d'environ 540,000 fr.JETÉE DE L'OUEST.Le chenal <strong>du</strong> côté de l'Ouest était anciennement fixé par un clayonnage <strong>et</strong> par une maçonnerie à pierres sèches que lespleines mers couvraient en grande partie. C<strong>et</strong>te j<strong>et</strong>ée ne s'élevait au-dessus de leur niveau, que sur 50 m. de sa longueur, àpartir de l'avant-port, <strong>et</strong> elle se terminait par un plan incliné, qui allait se perdre dans les sables à 250 m. de son origine.L'adjudication pour la nouvelle j<strong>et</strong>ée a été passée le 12 juill<strong>et</strong> 1833. Les travaux furent presque immédiatement entrepris,<strong>et</strong> ils ont été achevés en 1838 ; la réception provisoire s'en est faite le 1 er octobre. La dépense s'élève à 466,892 fr.C<strong>et</strong>te j<strong>et</strong>ée est parallèle à celle de l'E., <strong>et</strong> elle a été exécutée d'après le même système. Elle a la même largeur, la mêmeélévation ; un musoir circulaire en saillie <strong>du</strong> côté de l'Ouest la termine au N., <strong>et</strong> elle se compose également de deux parties,l'une ancienne, à pierres sèches, de 210 m. de longueur, dont on vient d'entreprendre la démolition pour l'agrandissement del'avant-port, <strong>et</strong> l'autre neuve, de 120 m., avec revêtement en granit.On remarquera qu'elle n'atteint guère en longueur que la moitié de l'autre. Ceci tient à des considérations que, ne pouvantprésenter ici dans toute leuréten<strong>du</strong>e, nous allons tâcher d'indiquer sommairement :[p. 188]Les vents d'E, ainsi que nous l'avons dit, sont ceux dont la majeure partie des navires qui fréquentent le port de commerceont besoin pour démancher, <strong>et</strong> c'est surtout afin de procurer à ces bâtiments la faculté de se haler jusqu'à l'extrémité <strong>du</strong>chenal, pour delà prendre leurs bordées <strong>et</strong> gagner le large, que la j<strong>et</strong>ée de l'Est a été construite : on comprendra aisémentqu'ils eussent été gênés dans leurs manoeuvres <strong>et</strong> qu'ils eussent couru les risques d'être affalés sur les rochers de la côte, oumême sur la j<strong>et</strong>ée de l'O. si elle eût été de même longueur que la précédente. Quant aux inconvénients qui peuvent résulterde c<strong>et</strong>te disposition pour l'entrée par ces vents, ou de la sortie par ceux d'O., ils n'ont rien de bien sérieux.AVANT-PORT.La longueur de l'avant-port, depuis l'écluse <strong>du</strong> bassin jusqu'au chenal, est de 234 m., <strong>et</strong> sa largeur moyenne de 194 m. 70.Les murs de quai sont en granit, <strong>et</strong> ils offrent de chaque côté un développement de 250 m. A l'E., c<strong>et</strong>te longueur se divise endeux parties : l'une de 120 m., appartient au commerce, <strong>et</strong> l'autre de 130 m., est réservée à la marine. (V. VIEIL ARSENAL).


Dans sa partie N., l'avant-port est terminé à l'O. par un plan incliné ou plage naturelle qui, avant l'achèvement <strong>du</strong> bassin,servait de cale de construction au commerce. C'est là que s'échouent les navires[p. 189]qui ont besoin de légères réparations. Un chantier semblable, affecté au service de la marine, se trouve à l'Est. On y aconstruit plusieurs bâtiments de guerre de plus ou moins fortes dimensions ; il est aujourd'hui tout-à-fait hors d'usage. — Iln'existe dans l'avant-port que deux débarcadères, l'un au N. <strong>et</strong> l'autre au S.-E. Des échelles sont pratiquées, de distance endistance, dans le parement des murs de quai.BASSIN.Le bassin à flot a aujourd'hui 406 m. de longueur, 127 m. de largeur, <strong>et</strong> 51,562 m. de superficie. — Dans les gros temps,240 bâtiments en relâche, de tout tonnage, peuvent y trouver un abri.Les murs de quai ont leurs fondements à 0 m., 70 c. au-dessous <strong>du</strong> niveau des plus bas<strong>ses</strong> mers, <strong>et</strong> leur couronnement à0 m. 25 c. au-dessus des plus hautes. Comme ceux de l'avant-port, ils sont en granit. Leur développement perm<strong>et</strong> à 28navires au moins, d'effectuer ensemble leur chargement ou leur débarquement. Ils sont pavés en grés sur une largeurconstante de 10 m. [82], <strong>et</strong> ils offrent, à l'E. <strong>et</strong> à l'O., 23 m. 33 c. de largeur, ce qui donne la faculté d'y déposer provisoirementles marchandi<strong>ses</strong> sans entraver la circulation.Au S., le bassin est terminé par deux cales de construction, de 41 m. de largeur chacune, sur lesquelles on peut construireà la fois six ou huit bâtiments, <strong>et</strong>[p. 190]par une cale de carénage ou môle en talus, de 45 m. de largeur, qui sépare ces deux cales. L'abattage des navires s'exécuteau moyen d'organeaux fixés dans la maçonnerie. — Au N., de chaque côté de l'écluse se trouve un escalier pour le service<strong>du</strong> bac. — Dans l'angle N.-O. est une rampe de débarquement. — Vers l'angle N.-E. on remarque une ancienne voûte quiservait au passage des mâtures que l'on conserve dans la R<strong>et</strong>enue, <strong>et</strong> qui a été boûchée sur presque toute sa longueur. Lesabords en sont fort dégradés ; mais sous peu elle sera remplacée par une rampe de débarquement pareille à la précédente.Il y a quelques années le bassin était traversé de l'E. à l'O. par une digue de sable, revêtue en pierres sèches, qui ledivisait en deux parties. La première, dont le commerce était en jouissance, <strong>et</strong> qui communiquait avec l'avant-port, avait 203m. 50 de longueur. La seconde, dans laquelle des mâtures étaient déposées, avait une longueur à peu près semblable ; maiselle n'était moyennement déblayée qu'à une profondeur de 4 m. 50, <strong>et</strong> il n'existait de murs de quai que <strong>du</strong> côté de l'O [83]. Leseaux y arrivaient par une brèche pratiquée dans le mur de revêtement de la r<strong>et</strong>enue.Le bassin ainsi partagé n'offrait pas une éten<strong>du</strong>e proportionnée au nombre de bâtiments qui viennent[p. 191]chaque hiver chercher un refuge à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> son insuffisance se faisant de plus en plus sentir, on résolut de m<strong>et</strong>tre unterme à c<strong>et</strong> état de cho<strong>ses</strong>. Un proj<strong>et</strong> d'achèvement comprenant la construction d'un mur de quai à l'Est, de chantiers <strong>et</strong> d'unecale de carénage au Sud ; le déblai <strong>du</strong> barrage, <strong>et</strong>c., fut rédigé <strong>et</strong> approuvé en 1826. On mit ces travaux en adjudication le 1 erdécembre, <strong>et</strong> ils purent être entrepris dans les premiers mois de l'année suivante. Ce n'est qu'en septembre 1833 qu'ils ontété entièrement terminés ; mais dès la fin de 1831, le commerce avait pris pos<strong>ses</strong>sion <strong>du</strong> nouvel établissement. — Lesdépen<strong>ses</strong> se sont élevées à près de 500,000 fr.La partie N. <strong>du</strong> bassin était encombrée de sables, de va<strong>ses</strong>, de pierres qui, dans les mortes eaux, rendaient l'approche desquais difficile ; on en a opéré le curage en 1834 <strong>et</strong> 1835, au moyen d'une drague mue par une machine à vapeur.PORTES DE FLOT.Les navires sont toujours à flot dans le bassin. L'eau qui s'y intro<strong>du</strong>it à la marée montante y est r<strong>et</strong>enue au moyen d'unepaire de portes busquées qui ferment l'écluse de communication à l'avant-port. Ces portes, quoique carénées tous les trois ouquatre ans, éprouvent une destruction rapide, qu'elles doivent à une espèce de ver d'une p<strong>et</strong>itesse extrême [84],[p. 192]<strong>et</strong> déjà l'on a été plusieurs fois dans l'obligation de les renouveler. Celles qui existent aujourd'hui datent de 1818 [85] ; elles


ont fait leur temps <strong>et</strong> elles vont être prochainement remplacées par des portes en fonte de fer, confectionnées d'après un<strong>nouveau</strong> système qui n'a pas encore reçu d'application en France pour d'aussi grandes dimensions. Chaque ventail aura 7 m.70 de largeur, mesurée suivant l'axe parallèle au busc, <strong>et</strong> 6 m. 90 de hauteur depuis le pied <strong>du</strong> busc jusqu'au dessus del'entr<strong>et</strong>oise supérieure. La dépense pourra s'élever à 21,000 fr. — Les portes en s'ouvrant se logent dans des enclaves ouchambres pratiquées dans le parement des bajoyers de l'écluse ; c<strong>et</strong>te disposition les préserve des avaries que le passagedes navires pourrait occasionner.PONT-TOURNANT.L'écluse est traversée par un pont-tournant à deux volées, construit en 1801, en remplacement d'un autre posé en 1775. Ilest dans un état de vétusté complète, <strong>et</strong> les fréquentes réparations qu'on est obligé d'y faire seraient bientôt impuissantes àprolonger sa <strong>du</strong>rée ; mais comme les portes, il va prochainement être renouvelé. Le <strong>nouveau</strong> pont s'exécute par voie d'unesoumission, approuvée le 22 décembre 1837, <strong>et</strong> d'après le système de celui qui existe. [86] Il a 29 m. 90 de longueur ; lalargeur de chacun des trottoirs est de 1 m., <strong>et</strong> celle de la chaussée qui les partage, de[p. 193]2 m. 10. On évalue à 25,000 fr. le montant des dépen<strong>ses</strong>. — A chaque extrémité <strong>du</strong> pont se trouve un p<strong>et</strong>it bâtiment enmaçonnerie, récemment reconstruit : celui de l'O. sert de bureau au capitaine <strong>et</strong> au lieutenant de port ; l'autre est destiné audépôt des instruments <strong>et</strong> cordages servant à la manoeuvre <strong>du</strong> pont <strong>et</strong> des portes.CANAL DE RETENUE.C'est vers 1769, que le canal de r<strong>et</strong>enue fut construit, <strong>et</strong> que le Trottebec <strong>et</strong> la Div<strong>et</strong>te, détournés de leur lit naturel, vinrentl'occuper : ces deux rivières le traversent réunies dans toute son éten<strong>du</strong>e avant de se j<strong>et</strong>er dans l'avant-port [87]. Il a environ500 m de longueur <strong>et</strong> 66 m. de largeur dans sa partie qui longe la route de Paris. Sa direction est <strong>du</strong> N. au S. mais à sonextrémité N. il se courbe <strong>et</strong> va, en se rétrécissant, sur une longueur de 192 m., se terminer à l'entrée de l'écluse de chasse. —On porte à 31,517 m. sa superficie mesurée sur le fond ; mais au niveau supérieur que l'eau atteint à l'instant des chas<strong>ses</strong>,c<strong>et</strong>te surface, augmentée des talus des revêtements, n'a pas moins de 37 à 38,000 m. On peut alors évaluer à 180,000 m.cubes le volume d'eau que contient ce réservoir.Les premiers murs exécutés en pierres brutes n'eurent qu'une courte <strong>du</strong>rée ; ceux qui existent[p. 194]actuellement ont été commencés en 1783, <strong>et</strong> terminés en 1788, ainsi qu'on le voit par c<strong>et</strong>te inscription gravée sur une despierres <strong>du</strong> couronnement à l'extrémité S. <strong>du</strong> parap<strong>et</strong> E. :CET OUVRAGE EST FAIT PAR M. MAURICE EN 1788.Ils sont d'une construction fort irrégulière. La portion en r<strong>et</strong>our est partie en granit <strong>et</strong> partie en moellon taillé, avec chaînesde granit de distance en distance <strong>et</strong> parap<strong>et</strong> de granit. — Les murs O. <strong>et</strong> S., dont le talus est établi sous un angle de 45°, so nten grès, avec chaînes en grands schistes, distantes l'une de l'autre de 7 m.50. Le parap<strong>et</strong>, qui n'est achevé que sur près de lamoitié de sa longueur, est en maçonnerie de moellon taillé avec couronnement de pierres posées de champ. — Le mur E.,fait provisoirement en pierres sèches, a cédé à l'effort des sables qui forment le remblai de la route de Paris, <strong>et</strong> il estmaintenant dans un état compl<strong>et</strong> de dégradation. — Au S. se trouve une écluse par laquelle entrent les eaux de la Div<strong>et</strong>te <strong>et</strong><strong>du</strong> Trottebec, <strong>et</strong> dont les portes de flot ; se fermant d'elles-mêmes, empêchent la mer de pénétrer dans le lit de ces rivières.En outre des services qu'il rend pour l'alimentation de l'écluse de chasse, le bassin de r<strong>et</strong>enue sert au dépôt des bois dematûre approvisionnés par la Marine. On sait que le meilleur moyen de conserver ces bois est de les submerger ; le mélanged'eau douce <strong>et</strong> d'eau de mer a encore ici l'avantage de les préserver de la piqûre des vers.ÉCLUSES.[p. 195]Dans la partie S. de l'avant-port se trouvent trois éclu<strong>ses</strong> : l'écluse de communication au bassin, <strong>et</strong> deux éclu<strong>ses</strong> dechasse. — La première, qui a été achevée en 1774, <strong>et</strong> dont le radier est établi au-dessous des plus bas<strong>ses</strong> mers, a 13 m. delargeur ; <strong>ses</strong> bajoyers, revêtus en granit, ont une hauteur de 8 m. 60, <strong>et</strong> l'eau s'y élève a 6 m. 69 dans les grandes vives-eauxd'équinoxe, de 5 m. 50 à 5 m. 80 dans les vives-eaux ordinaires, <strong>et</strong> de 3 m. 90 à 4 m. 20 seulement dans les mers ordinairesde morte eau. Pendant la vive-eau, tous les navires de commerce, quel que soit leur tirant, peuvent entrer dans le bassin. —Le curage de c<strong>et</strong>te écluse s'effectue au moyen de vannes ménagées dans les portes <strong>du</strong> bassin.


Nous avons maintenant à parler des deux éclu<strong>ses</strong> de chasse : comme leur nom l'indique, elles ont pour obj<strong>et</strong> d'enlever lesalluvions ou dépôts de sables <strong>et</strong> de va<strong>ses</strong> qui se forment dans l'avant-port ou aux abords <strong>du</strong> chenal. — Celle de l'O.communiquait avec le bassin par un canal couvert ; mais son peu d'efficacité en a fait depuis long-temps abandonner l'usage,<strong>et</strong> aujourd'hui elle est fermée vers sa tête S. par un masque en maçonnerie.Celle de l'E., dont le canal, également couvert, a 3 m. 90 d'ouverture au N. <strong>et</strong> 5 m. 85 au S., se compose de deux portestournantes <strong>et</strong> d'un poteau elliptique. Elle est alimentée par le bassin de r<strong>et</strong>enue, <strong>et</strong> les chas<strong>ses</strong> qu'elle procure sont un moyenpuissant de curage.[p. 196]Voici la manière dont elles s'opèrent : — A la marée montante la mer pénètre dans le réservoir, qu'elle remplit, <strong>et</strong> où lesportes la r<strong>et</strong>iennent pendant la <strong>du</strong>rée <strong>du</strong> reflux. Une heure à peu près avant le flot, on fait faire un quart de révolution aupoteau elliptique, les portes s'ouvrent <strong>et</strong> aussitôt l'eau se précipitant avec impétuosité hors de l'écluse, forme un torrent quibondit, écume, roule, tournoie, se replie, se tord, laboure les alluvions <strong>et</strong> les entraîne en tourbillonnant au-delà des j<strong>et</strong>ées[88]. — Ce spectacle attire toujours un grand nombre de curieux. — Par une forte marée on obtient pendant une heure dechasse, <strong>et</strong> pour un abaissement de 2 m. de l'eau de la r<strong>et</strong>enue, 100,000 m. cubes d'eau ; 66,000 m. cubes seulement seraientfournis par le réservoir ; mais ce volume est augmenté <strong>du</strong> pro<strong>du</strong>it des rivières qui, en s'élevant, inondent les parties bas<strong>ses</strong>des propriétés riveraines.CHANTIER DES PONTS ET CHAUSSÉES.Ce chantier, qui n'a absolument rien de remarquable, est situé à l'E. <strong>du</strong> bassin sur un terrain formé des déblais provenant<strong>du</strong> creusement de la r<strong>et</strong>enue. C'est là que l'entrepreneur Maurice, qui, pendant 37 ans consécutifs, a été chargé del'exécution des travaux <strong>du</strong> port de commerce, remisait <strong>ses</strong> bois, grues, chapel<strong>et</strong>s, machines, équipages, <strong>et</strong>c. On vient d'yconstruire deux magasins destinés à ce même usage.[p. 197]ENTREPÔT RÉEL. — DOUANE.Nous n'avons rien à ajouter à ce que M. de Berruyer disait, en 1833, de l'Entrepôt réel ; nous empruntons donc à l'ancienGuide l'article qui concerne c<strong>et</strong> établissement.« Il y a deux sortes d'entrepôt : l'entrepôt fictif <strong>et</strong> l'entrepôt réel. — L'entrepôt fictif n'a lieu que pour les denrées importées des Colonies françai<strong>ses</strong>.Il consiste à laisser aux propriétaires de ces denrées la faculté de les conserver un an dans leurs magasins particuliers, sans être obligés d'en acquitterles droits avant le moment de la consommation. — L'entrepôt réel, placé sous la surveillance de la douane, est ordinairement un vaste édifice, danslequel on dépose toutes les denrées qui ne viennent pas des colonies françai<strong>ses</strong>. Elles peuvent y rester trois ans entiers. Passé ce temps, il faut enacquitter les droits ou les exporter.L'entrepôt réel de <strong>Cherbourg</strong> est situé sur le quai à l'E. <strong>du</strong> bassin de commerce. On a commencé à le bâtir vers 1807, <strong>et</strong> il a été achevé dans lesannées suivantes. Il se compose de trois bâtiments <strong>et</strong> d'une grande cour de forme rectangulaire. La largeur de ces trois bâtiments est la même, environ9 mètres. La longueur de celui de l'E. est de 39 m. 40, <strong>et</strong> celle de chacune des ailes <strong>du</strong> N. <strong>et</strong> <strong>du</strong> S., de 35 m. 29. — Au rez de chaussée, sont desmagasins <strong>et</strong> au premier des greniers. — A droite de la porte d'entrée, se trouve un p<strong>et</strong>it bureau pour le contrôleur des douanes de service à l'entrepôt,<strong>et</strong> à gauche un corps-de-garde pour les préposés. »Les droits perçus à <strong>Cherbourg</strong> par la Douane, s'élèvent, année commune :1° Pour les importations, à 93,000 f.2° Pour les exportations, à 22,0003° Pour le droit <strong>et</strong> demi-droit de tonnage, à 52,500_______Ce qui fait une somme totale de 167,500 f.[p. 198]Les bureaux de la douane sont situés rue de la Div<strong>et</strong>te.ECLAIRAGE.L'avant-port <strong>et</strong> le bassin sont éclairés au moyen de reverbères à réflecteurs, de la fabrique de M. Bordier-Marc<strong>et</strong>. Cesreverbères, quoique à un seul bec, repandent une vive clarté. Ils sont montés sur des candelabres en fer coulé, scellés dans


des bornes de granit. Leur forme est très-élégante.Des canons d'amarrage sont placés de distance en distance le long des quais.Tel est l'état des principales constructions qui constituent aujourd'hui le port de commerce de <strong>Cherbourg</strong>. Le chiffre desdépen<strong>ses</strong> faites pour c<strong>et</strong> établissement depuis son origine ne nous est pas connu ; depuis sa remise au département del'intérieur, en 1819, elles s'élèvent à plus de 1,700,000 fr.Il nous reste à parler des ouvrages regardés comme devant former le complément indispensable <strong>du</strong> port ; nouscommencerons par ceux qui sont en cours d'exécution. La chambre des députés, dans sa séance <strong>du</strong> 16 mai 1838, ayantaffecté à ces ouvrages une somme de 600,000 fr., ils ont été, le 3 août suivant l'obj<strong>et</strong> d'une adjudication. — Ils comprennent :1° Le prolongement <strong>du</strong> quai de l'Ouest de l'avant-po rtsur 115 mètres de longueur, ci. 40,736 f. 64.c.2° L'établissement d'une cale de construction ; de radoub <strong>et</strong> d'échouage à l'extrémité Nord <strong>du</strong> quai de l'Ouest <strong>et</strong> perpendiculairement àsa longueur. Elle aura 45 m. de largeur <strong>et</strong> 100 m. de longueur. Son plan incliné prendra naissance au niveau <strong>du</strong> fond de l'avant-port <strong>et</strong>s'élèvera à 6 m. 50 ; c'est-à-dire à la hauteur <strong>du</strong> quai, ci. 83,760 333° La construction d'un terre-plein de 30 m. de lar geur, au Nord de la cale, <strong>et</strong> réservé à la circulation <strong>et</strong> au dépôt desapprovisionnements, ci.68,635 344° Le raccordement <strong>du</strong> terre-plein avec la j<strong>et</strong>ée de l'Ouest au moyen de deux murs de revêtement circulaires, ci 178,256 995° La construction d'un mur de soutènement circulai re partant de l'extrémité Ouest <strong>du</strong> terre-plein <strong>et</strong> se prolongeant sur une longueurde 311 m. jusqu'à l'escarpe Sud de la redoute de l'Ongl<strong>et</strong>. Une rampe de communication avec la plage sera établie à 120 m. del'extrémité Est de ce mur, [89] ci.42,292 89________413,682 19REPORT 413,682 196° Le creusement de la partie Ouest de l'avant-port , ci 81,243 387° Les remblais à effectuer à l'intérieur <strong>du</strong> terre- plein <strong>et</strong> de son prolongement circulaire, au pourtour de la cale <strong>et</strong> au derrière <strong>du</strong> mur desoutènement, ci7,323 93Plus une somme à valoir, pour dépen<strong>ses</strong> imprévues, de 47,750 50TOTAL_________550,000 00[90]Ces travaux, qui comportent ainsi le compl<strong>et</strong> achèvement de la partie Ouest de l'avant-port, ont été entrepris vers la fin de1838 <strong>et</strong> ils sont aujourd'hui en pleine activité. Voyons maintenant ce qui restera encore à faire pour porter le port à saperfection. C'est :1° Le prolongement <strong>du</strong> mur de quai de l'Est sur un développement de 115 m., de manière à porter à 360 m. 60 c. lalongueur de l'avant-port.[p. 201]2°. L'établissement d'une cale de construction de radoubs <strong>et</strong> d'échouage, parallèle <strong>et</strong> semblable à celle de l'Ouest.3° La construction d'un terre-plein, également parallèle <strong>et</strong> semblable à celui de l'Ouest, <strong>et</strong> se raccordant avec la j<strong>et</strong>ée del'Est par deux murs courbes.4° L'achèvement de la j<strong>et</strong>ée de l'Est sur 125 m. de l ongueur, depuis l'extrémité Sud de la partie neuve jusqu'à la naissancedes raccordements circulaires.5° Le creusement de la partie Est de l'avant-po rt exécutée en prolongement <strong>et</strong> le curage de la partie actuellementexistante.Ces divers ouvrages, y compris quelques améliorations <strong>et</strong> reconstructions, nécessiteront une dépense qu'on évalue à750,000 fr. — Le port offre déjà toutes les facilités désirables pour l'entrée [91], le stationnement <strong>et</strong> la sortie des navires ;après son achèvement, sa régularité, <strong>ses</strong> heureu<strong>ses</strong> dispositions d'ensemble en feront un des plus beaux ports de commercede France.


Il est à regr<strong>et</strong>ter qu'il ne possède avec l'intérieur aucune communication d'eau, <strong>et</strong> que sa situation peu favorable sous cerapport ne perm<strong>et</strong>te pas de supposer qu'on puisse, d'ici long-tems, le rattacher à aucun proj<strong>et</strong> de canalisation. Le cours de laDiv<strong>et</strong>te est trop irrégulier <strong>et</strong> trop encombré de moulins pour que l'on pense à s'en servir ; le seul canal praticable dans[p. 202]l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong> serait celui qui établirait une communication entre ce port <strong>et</strong> Saint-Vaast au moyen <strong>du</strong>Trottebec <strong>et</strong> de la Saire ; mais malgré les avantages qui en résulteraient en tems de guerre, puisque la communication entre<strong>Cherbourg</strong>, le Havre <strong>et</strong> la Seine se trouverait ainsi assurée, on y a renoncé depuis bien des années.Quoique nous ayons déjà eu occasion de parler de l'état actuel de notre commerce, nous croyons en terminant c<strong>et</strong> article,devoir revenir sur c<strong>et</strong> important obj<strong>et</strong> destatistique ; de <strong>nouveau</strong>x documents nous perm<strong>et</strong>tent d'ailleurs d'être plus éten<strong>du</strong>s <strong>et</strong>surtout plus rapprochés de la vérité. — Le commerce à <strong>Cherbourg</strong> comprend presque tous les genres d'opérations ; mais ilest loin d'être aussi florissant qu'on pourrait le désirer [92]. Et soit à cause de sa position topographique, soit à cause <strong>du</strong>voisinage <strong>du</strong> port militaire, le port consomme en quantité beaucoup plus qu'il n'exporte :[p. 203]les importations vont toujours en augmentant, tandis que le chiffre des exportations, sans rester stationnaire, est loin de suivrele même accroissement.Année commune, les exportations sont faites par 60 bâtiments français <strong>du</strong> port de 2,250 tonneaux <strong>et</strong> par 66 étrangers <strong>du</strong>port de 20,000 tonneaux.La valeur de ces importations est pour les bâtiments français de 75,000 f. 00Et pour les étrangers de 1,200,000 f. 00____________Ce qui présente un total de 1,275,000 f. 00Année commune, la valeur des exportations est, pour 320 navires, jaugeant ensemble 5500 tonneaux, de 1,900,000 fr.Le grand cabotage emploie de 10 à 14 bâtiments, <strong>du</strong> port ensemble de 1,300 tonneaux <strong>et</strong> montés par 80 hommes. — Lep<strong>et</strong>it cabotage emploie de 100 à 110 bâtiments d'un tonnage ensemble de 3,500 tonneaux, <strong>et</strong> montés par 445 hommes. — Il ya de 12 à 15 bâtiments, armés pour le long-cours, jaugeant ensemble 3,700 tonneaux, <strong>et</strong> montés par 210 hommes. — Lapêche <strong>du</strong> poisson est ordinairement faite par 92 bâtiments, montés par 370 hommes, <strong>et</strong> pro<strong>du</strong>it 60,000 fr. — Enfin le nombredes navires qui entrent annuellement dans le port, varie de douze à seize cents, selon que l'hiver est plus ou moins rigoureux.En eff<strong>et</strong>, près des deux tiers de ce nombre appartiennent toujours à la classe des relâcheurs, <strong>et</strong> c'est ce qui a fait dire àVauban que <strong>Cherbourg</strong> est l'Auberge de la Manche.[p. 204]ÉTABLISSEMENTS MARITIMES [93].1° RADE ET DÉPENDANCES.La rade de <strong>Cherbourg</strong> est située à l'extrémité de la presqu'île <strong>du</strong> Cotentin, presque au centre de la Manche, vis-à-vis del'île de Wight, de Portsmouth, des rades de Spithead <strong>et</strong> de Sainte-Hélène, <strong>et</strong> dans la partie la plus rapprochée des côtesd'Angl<strong>et</strong>erre. Elle occupe une baie de 7,017 m. d'ouverture, <strong>et</strong> de 3,000 m. de profondeur, comprise entre l'Ile-Pelée <strong>et</strong> lapointe de Querqueville, <strong>et</strong> qui n'est elle-même que le fond d'une grande baie dont le cap Lévi forme l'extrémité E., <strong>et</strong> le cap dela Hague l'extrémité O.<strong>Cherbourg</strong> paraît au point le plus reculé de ce vaste croissant ; il s'est comme r<strong>et</strong>iré dans une profonde échancrure, <strong>et</strong>c'est delà qu'il offre une hospitalité généreuse à l'étranger qui vient lui faire visite, au navire qui manque de provisions, ou quela tourmente assaille <strong>et</strong> menace d'angloutir. C'est de là aussi qu'il défie son éternelle ennemie, l'Angl<strong>et</strong>erre, <strong>et</strong>[p. 205]qu'il semble la narguer <strong>du</strong> geste <strong>et</strong> de la voix. Il l'attend dans la pose intrépide d'un preux des anciens temps, sa digue aupoing pour bouclier, <strong>ses</strong> forts pour armes défensives ; un de <strong>ses</strong> pieds s'enfonce dans la mer, l'autre est hardiment appuyécontre la chaîne des collines environnantes, qui sont devenues comme le rempart naturel de la France au Nord.


La rade de <strong>Cherbourg</strong> était ce qu'on appelle une rade foraine. Abritée naturellement depuis l'O.-N.-O. jusqu'à l'E.-N.-E.,par les côtes qui la circonscrivent au midi, elle est soumise à l'action des vents dans toute sa partie septentrionale. C'est c<strong>et</strong>teouverture que l'on a voulu couvrir par la formation de la Digue.Elle a 7,796,000 m. (à peu près une lieue carrée de 2,000 toi<strong>ses</strong>) de superficie totale, comprise entre la Digue <strong>et</strong> le rivage.Le fond, composé d'un sable doux <strong>et</strong> ferme, est d'une excellente tenue, <strong>et</strong> les navires peuvent j<strong>et</strong>er l'ancre presque partoutsans crainte de déraper, ni d'endommager leurs câbles. C<strong>et</strong>te éten<strong>du</strong>e cependant est loin d'être entièrement propre aumouillage des vaisseaux de ligne. Il faut à ces bâtiments, terme moyen, une hauteur d'eau d'au moins 8 m. à mer basse, <strong>et</strong>c<strong>et</strong>te profondeur ne se rencontre que dans une surface d'environ 2,817,200 m., dont il faut dé<strong>du</strong>ire près des deux tierscomme n'offrant pas, l'hiver surtout, toute la sûr<strong>et</strong>é rigoureusement désirable. L'éten<strong>du</strong>e dont les vaisseaux disposent s<strong>et</strong>rouve ainsi ré<strong>du</strong>ite à 1,000,000 de mètres carrés.[p. 206]Un vaisseau exige de 35 à 40,000 m. superficiels pour son mouillage, de manière qu'en temps ordinaire 25 ou 30vaisseaux, avec un nombre proportionnel de frégates <strong>et</strong> corv<strong>et</strong>tes, trouveraient place dans la rade. En cas de foule ce nombrepourrait être augmenté d'un tiers ou même <strong>du</strong> double pendant la belle saison.Le sol de la rade forme, à partir <strong>du</strong> rivage, une pente qui gagne insensiblement le large. La hauteur d'eau s'accroît enraison de c<strong>et</strong>te pente <strong>et</strong> varie à mer basse dans les vives-eaux d'équinoxe depuis zéro jusqu'à 15 m. au plus. On trouve alorsde 6 m. 50 c. à 8 m. 12 c. de profondeur dans une éten<strong>du</strong>e d'environ 1,227,870 m. carrés ; de 8 m. 12 c. à 9 m. 75 c. dansune éten<strong>du</strong>e de 456,000 m. c. ; de 9 m. 75 à 14 m. 60 dans une éten<strong>du</strong>e de 2,459,638 m. <strong>et</strong> enfin de 11 m. 37 à 14 m. 60 surla direction de la Digue. — Au moment de la pleine mer, dans les vives-eaux d'équinoxe, la hauteur d'eau varie depuis zérojusqu'à 22 m. au plus.Des doutes ont été élevés à diver<strong>ses</strong> repri<strong>ses</strong> sur la permanence des fonds de la rade ; mais on a pu se convaincre qu'ilne s'y forme aucun attérissement sensible, que les hauteurs d'eau sont partout à très-peu de chose près ce qu'elles étaient àl'origine des travaux. Les dernières sondes faites par M. Beautems Beaupré porteraient même à croire que le sol, surtoutdans l'O., tend plutôt à se curer qu'à s'ensabler.Nous avons dit que la distance entre l'île Pelée <strong>et</strong> le fort de Querqueville est de 7017 m. La Digue fondée en suivant c<strong>et</strong>teligne couvre la rade sur 3,760 m.[p. 207]de longueur <strong>et</strong> laisse à chacune de <strong>ses</strong> extrémités une passe de 2,300 m. à l'O. <strong>et</strong> de 950 m. à l'E.Quatre vaisseaux peuvent aisément entrer ou sortir de front <strong>et</strong> à toute heure de marée par la passe de l'O. : on y trouve de11 à 14 m. d'eau à basse mer. Deux vaisseaux seulement pénétreraient à la fois par la passe de l'E. ; encore devraient-ilséviter de prendre le moment de la basse mer, la plus grande hauteur d'eau n'y étant alors que de 10 m. à 10 m. 50. Il est vraiqu'à moins de circonstances extraordinaires ce moment n'est jamais celui que l'on choisit pour arriver dans une rade ou pourappareiller. Deux heures avant <strong>et</strong> deux heures après le flot, il y a toujours une profondeur suffisante même pour les vaisseauxde premier rang. L'accession <strong>et</strong> la sortie de la rade par l'une ou par l'autre passe, sont aussi faciles que sûres, seulement ilest de prudence que les forts navires rangent de plus près possible les extrémités de la Digue.Dans tous les temps, mais principalement aux différentes époques où la France s'est trouvée en guerre avec l'Angl<strong>et</strong>erre,on a senti l'urgence d'avoir dans la Manche, pour les escadres, un asile qui pût balancer les avantages que l'ennemi r<strong>et</strong>iraitdes excellentes positions que lui a comme prodiguées la nature. Depuis que le gouvernement a eu la pensée de satisfaire àce besoin de notre marine militaire, son attention s'est presque toujours fixée d'une manière toute spéciale sur <strong>Cherbourg</strong>,dont la rade réunissait déjà la majeure partie des conditions voulues.[p. 208]« En eff<strong>et</strong>, dit M. le baron Cachin [94], sa situation très avancée sur la route des vaisseaux offre toutes les facilités désirables, soit pour surveillerles mouvements de l'ennemi, soit pour inquiéter <strong>ses</strong> convois, soit enfin pour rassembler tous les détails nécessaires à une grande expéditionmaritime. — C<strong>et</strong>te rade, d'une excellente tenue, est également favorable à l'arrivée <strong>et</strong> au départ des vaisseaux de presque toutes les aires de vent <strong>et</strong>dans tout état de marée ; elle comprend un mouillage d'une vaste éten<strong>du</strong>e ; elle est susceptible de toute sorte de moyens d'attaque, de protection <strong>et</strong> dedéfense ; elle réunit enfin, sous les rapports militaires <strong>et</strong> maritimes, tous les avantages qui peuvent influer sur le sort de nos forces navales <strong>et</strong> de nosrelations commerciales » — A c<strong>et</strong> exposé des propriétés de la rade, nous ajouterons que, par sa situation centrale, elle commande aux différentspoints de la Manche, — qu'étant en deçà <strong>du</strong> courant général des marées, toutes les manoeuvres qui ont pour obj<strong>et</strong> l'arrivée au mouillage ou le départdes navires y sont d'une facilité extrême ; — qu'on peut communiquer avec la terre à toutes les heures <strong>du</strong> jour <strong>et</strong> de la nuit ; — que les vaisseaux ont lafaculté de mouiller à portée des forts ; — que le peu de distance où ils sont les uns des autres est d'un grand avantage lorsqu'il s'agit d'appareiller ; —qu'à peine hors des pas<strong>ses</strong> <strong>et</strong> en avant <strong>du</strong> fort de l'île Pelée, ils peuvent recevoir l'ordre de bataille <strong>et</strong> prendre rang sans qu'il soit au pouvoir del'ennemi de les inquiéter ; — que dans le cas où des forces supérieures ennemies voudraient les bloquer dans la rade, le courant général traversierfavoriserait leur fuite qui pourrait même demeurer inaperçue ; <strong>et</strong>c.


Vauban, qui avait une connaissance parfaite <strong>du</strong> littoral désigna <strong>Cherbourg</strong> comme le point le plus favorable à la formationd'un grand établissement maritime (M. de la Br<strong>et</strong>onnière). Ses proj<strong>et</strong>s ne reçurent malheureusement qu'un commencementd'exécution,[p. 209]<strong>et</strong> moins de quatre ans après le pays eut à supporter les funestes résultats de l'absence de tout lieu de refuge dans laManche. — La défaite <strong>du</strong> maréchal de Tourville (V. SAINT-VAAST-LA-HOUGUE, page 106, 2 e partie.) eût dû concentrerl'attention sur <strong>Cherbourg</strong>, ou <strong>du</strong> moins éloigner l'idée de fonder un port à la Hougue ; ce fut précisément le contraire quiarriva : on oublia que les courants si dangereux de ce parage, avaient seuls été la cause primitive <strong>du</strong> désastre, <strong>et</strong> desingénieurs appelés à prononcer sur le mérite respectif des deux positions accordèrent la préférence à c<strong>et</strong>te dernière. Unecommission, nommée en 1756, s'en occupa même exclusivement <strong>et</strong> en fit l'obj<strong>et</strong> d'un proj<strong>et</strong> plus éten<strong>du</strong> que tous ceux quiavaient précédé.Cependant c<strong>et</strong>te préten<strong>du</strong>e supériorité de la Hougue ne devait pas tenir contre une étude plus approfondie des localités <strong>et</strong>des besoins de la marine militaire. Lorsque en 1777, le conseil <strong>du</strong> roi eut résolu l'exécution <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> de Vauban, MM. de laBr<strong>et</strong>onnière, capitaine de vaisseau, <strong>et</strong> Méchin, qui plus tard a été de l'académie des sciences, furent envoyés sur les lieuxpour déterminer le choix d'un emplacement. Ces deux commissaires, après un examen comparatif <strong>et</strong> réfléchi, optèrent pour<strong>Cherbourg</strong> contre la Hougue. M. de la Br<strong>et</strong>onnière, aussi bon écrivain qu'hydrographe distingué, consigna dans un mémoireles motifs sur lesquels il basait son opinion. La question était considérée par lui sous toutes <strong>ses</strong> faces ; toutes[p. 210]les objections étaient victorieusement refutées ; il appuyait <strong>ses</strong> observations des données de l'expérience <strong>et</strong> deraisonnements pleins de force <strong>et</strong> de lucidité ; les propriétés <strong>et</strong> les inconvénients des deux places étaient mis en parallèle <strong>et</strong>pesés d'une main impartiale ; <strong>Cherbourg</strong> l'emportait parce que <strong>Cherbourg</strong> réunit, à très peu près, tous les avantages qu'ontrouve à la Hougue <strong>et</strong> qu'il en a beaucoup qui lui sont particuliers. C<strong>et</strong>te dialectique pressante, éclairée, porta la lumière dansles esprits, <strong>et</strong> si la difficulté ne fut pas tranchée sur le champ, il n'y a pas à m<strong>et</strong>tre en doute que ce mémoire n'ait eu la plusgrande influence sur les déterminations ultérieures <strong>du</strong> gouvernement.L'insurrection américaine <strong>et</strong> la guerre qui éclata à c<strong>et</strong>te occasion entre la France <strong>et</strong> l'Angl<strong>et</strong>erre, firent hâter l'entreprise destravaux de <strong>Cherbourg</strong>. Dans le courant de 1778, deux vaisseaux anglais pénétrèrent audacieusement dans la rade <strong>et</strong>donnèrent la chasse aux navires qui s'y trouvaient à l'ancre. Les désastres de 1758 étaient trop récens pour qu'on ne craignîtpas de les voir se renouveler <strong>et</strong>, quoiqu'il n'y eût encore rien d'arrêté entre la Hougue <strong>et</strong> <strong>Cherbourg</strong>, M. Decaux, directeur desfortifications, reçut l'ordre de rédiger un proj<strong>et</strong> de défense de ce dernier port. La baie avait été sondée, pour la première fois,en 1773, par le capitaine de Bavre ; mais ces sondes étaient loin d'avoir l'exactitude <strong>et</strong> la précision désirables, <strong>et</strong> M. Decaux,jugeant de l'éten<strong>du</strong>e de la rade par sa superficie apparente, ne fit guère que repro<strong>du</strong>ire un ancien[p. 211]proj<strong>et</strong> consistant à la fermer par une digue dirigée en ligne droite de la pointe <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong> à l'Ile-Pelée, <strong>et</strong> formée par descaissons partiels remplis en maçonnerie <strong>et</strong> superposés en r<strong>et</strong>raite. (M. CACHIN, Mémoire sur la Digue de <strong>Cherbourg</strong>) Ce proj<strong>et</strong>considéré sous les rapports maritimes était d'autant moins convenable, qu'il laissait à découvert <strong>et</strong> sans défense la partie laplus essentielle de la baie, la seule qui fût propre au mouillage des vaisseaux de ligne. La portion très circonscrite que l'onproposait de protéger contre l'agitation des vagues <strong>et</strong> l'attaque de l'ennemi n'eût été évidemment accessible qu'aux bâtiments<strong>du</strong> commerce, aux corsaires <strong>et</strong> autres bâtiments légers. » (M. CACHIN. Mémoire sur la Digue de <strong>Cherbourg</strong>).Précédemment M. de la Br<strong>et</strong>onnière avait émis l'idée de couvrir la rade par une digue en pierres per<strong>du</strong>es, assise sur ladirection de l'Ile-Pelée à la pointe de Querqueville, <strong>et</strong> s'était même attaché à démontrer les facilités que l'on rencontrerait à<strong>Cherbourg</strong> pour l'exécution de ce grand ouvrage. Il s'éleva avec force contre la proposition <strong>du</strong> directeur des fortifications, enétablit l'insuffisance <strong>et</strong> fit comprendre les conséquences fâcheu<strong>ses</strong> que son adoption pourrait avoir pour l'avenir <strong>du</strong> port. Legouvernement flottait incertain <strong>et</strong> n'osait encore se résoudre, toute décision fut ajournée. Néanmoins, vu la gravité descirconstances, il ordonna, le 3 juill<strong>et</strong> 1779, la construction immédiate des forts de l'Ile-Pelée <strong>et</strong> <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>,[p. 212]conformément aux dispositions générales <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> de M. Decaux. C'était, on le voit, reconnaître de fait <strong>Cherbourg</strong> comme lelieu le plus propre à la formation d'un grand établissement maritime dans la Manche ; <strong>et</strong> depuis c<strong>et</strong>te époque il n'a pour ainsidire plus été question de la Hougue que d'une manière indirecte.DIGUE.


Malgré toutes les propriétés qui lui sont inhérentes, si elle fût restée ouverte, la rade de <strong>Cherbourg</strong> n'eût pas rempli le butque l'on se proposait. Exposée aux vents de la partie N., qui sont les plus violents <strong>et</strong> les plus à craindre dans nos parages,l'agitation des vagues y devenait quelquefois extrême, <strong>et</strong> loin alors qu'elle eût pu offrir aux vaisseaux les garanties d'abri <strong>et</strong> desûr<strong>et</strong>é rigoureusement exigibles, ils y eussent couru de véritables dangers.Mais à quelle distance <strong>et</strong> comment devait-on couvrir la rade ? C<strong>et</strong>te importante <strong>et</strong> difficile question demeurait indécise —En 1780, M. Lambert de Paimpol, membre d'une commission chargée de reconnaître les côtes de la Manche, repro<strong>du</strong>isit laproposition de M. Decaux. M. de la Br<strong>et</strong>onnière la combattit de <strong>nouveau</strong> <strong>et</strong> parvint enfin à éclairer le gouvernement. Ce ne futcependant qu'en 1781, après le voyage que le prince de Condé, son fils <strong>et</strong> les ministres de la guerre <strong>et</strong> de la marine firent à<strong>Cherbourg</strong>, pour s'assurer par eux-mêmes de l'état des cho<strong>ses</strong>, que la direction de la Digue fut définitivement fixée de l'îlePelée à la[p. 213]pointe de Querqueville. — Peut-être est-il à regr<strong>et</strong>ter qu'elle n'ait pas été portée à quelques centaines de mètres plus aularge ; la dépense n'eût pas été beaucoup plus considérable <strong>et</strong>, au lieu de 30 vaisseaux que la rade peut contenir en tempsordinaire, 60 y eussent trouvé place. — Restait à décider lequel des divers systèmes, proposés pour la formation <strong>du</strong> briselame,obtiendrait la préférence.Tous soulevaient de sérieu<strong>ses</strong> objections. Sur ces entrefaites M. de Cessart, ingénieur des ponts-<strong>et</strong>-chaussées à lagénéralité de Rouen, émit l'idée d'une suite de cais<strong>ses</strong> coniques remplies en pierres sèches, coulées base à base sur ladirection déterminée, <strong>et</strong> formant une espèce de claire voie qui pût rompre la violence des vagues <strong>et</strong> pro<strong>du</strong>ire dans la rade toutle calme désirable — Ce moyen, plus ingénieux que solide, sourit à Louis XVI, qui y donna son approbation, <strong>et</strong> l'inventeur,chargé de la direction générale des travaux, fut envoyé sur les lieux. — Mais avant de rien entreprendre le gouvernementordonna qu'un cône d'essai serait construit au Havre. On se mit à l'oeuvre en 1782 ; le cône était achevé à la fin deseptembre <strong>et</strong> la flottaison, fixée au 8 novembre, réussit au delà de ce qu'on avait osé espérer. — C<strong>et</strong>te expérience futregardée comme décisive <strong>et</strong> l'adoption <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> définitivement arrêtée. — La caisse démontée <strong>et</strong> transportée à <strong>Cherbourg</strong> yfut reconstruite en 1783. Tout était disposé pour la con<strong>du</strong>ire à sa destination, lorsque, en septembre, une forte tempête causades[p. 214]avaries considérables aux gréements <strong>et</strong> appareils, <strong>et</strong> mit dans la nécessité d'ajourner l'opération jusqu'au printemps suivant.Une activité extraordinaire régnait à <strong>Cherbourg</strong> ; des bois y étaient approvisionnés de toutes parts, quatre <strong>nouveau</strong>x cônesy étaient entrepris à la fois ; une administration particulière, composée d'ingénieurs, de con<strong>du</strong>cteurs <strong>et</strong> d'agents comptablesvenait d'y être organisée ; tous les artisans <strong>et</strong> manouvriers de la ville <strong>et</strong> des <strong>environs</strong> y trouvaient <strong>du</strong> travail ; on avait mêmefait un appel aux ouvriers charpentiers de la capitale <strong>et</strong> des provinces, qui y arrivèrent au nombre de près de 800 <strong>et</strong> formèrentune association connue depuis sous le nom des Compagnons <strong>du</strong> devoir.Le 6 juin 1784, la caisse conique, exécutée au Havre, fut mise à flot <strong>et</strong> échouée à 1169 m. de distance de l'île Pelée, demanière à former l'extrémité E. de la Digue. — Ce spectacle, encore sans exemple, avait attiré à <strong>Cherbourg</strong> des milliersd'étrangers, <strong>et</strong> au moment de l'immersion, la rade était couverte d'embarcations chargées de curieux. — Un mois après, unsecond cône fut coulé avec le même succès, tangentiellement à la base <strong>du</strong> premier, vers l'O.Nous devons, pour l'intelligence de ce qui va suivre, présenter ici une analyse succincte <strong>du</strong> système de construction <strong>et</strong> <strong>du</strong>mode d'emploi de ces gigantesques machines, qui déjà fixaient l'attention de la France entière. — Les cônes étaient descais<strong>ses</strong> en[p. 215]charpente, sans fond, ayant en eff<strong>et</strong> la figure de cônes tronqués à leur somm<strong>et</strong>. Leur diamètre inférieur, atteignait de 43 à 46m. ; leur diamètre supérieur, égal à leur hauteur perpendiculaire, n'était que de 19 m. 50. Quatre-vingt-dix montants en boisde chêne, assemblés <strong>et</strong> fixés par quatre ceintures de moi<strong>ses</strong>, également en chêne, composaient le corps de charpente.L'épaisseur de c<strong>et</strong>te enveloppe à claires-voies augmentait insensiblement <strong>du</strong> couronnement à la base ; au centre restait unvide immense, que 4,880 m. cubes de pierres parvenaient à peine à combler. — Chaque caisse vide pesait 20,000quintaux. — Les procédés au moyen desquels ces lourdes pyramides étaient manoeuvrées paraissent d'autant plussurprenants qu'ils étaient très-simples.Les pièces de charpente étaient travaillées aux abords de l'anse Chantereyne <strong>et</strong> mi<strong>ses</strong> en place sur la plage même. Aprèsl'entière confection <strong>du</strong> cône, on profitait d'une basse mer de vive-eau pour adapter intérieurement <strong>et</strong> extérieurement, à lapartie inférieure des montants, une double ceinture de tonnes vides. A la marée montante, sollicité par <strong>ses</strong> alléges, il quittaitsa plate-forme <strong>et</strong> prenait flot. Des navires le traînaient à la remorque jusqu'à l'endroit désigné pour l'immersion, où des ancres


l'assuj<strong>et</strong>tissaient. L'opération s'achevait ensuite avec une merveilleuse célérité ; des tranchants à coulisse, coupaient lescâbles qui r<strong>et</strong>enaient les tonnes, <strong>et</strong> le colosse, cédant à sa propre pesanteur, s'enfonçait majestueusement[p. 216]dans l'abîme. — On commençait aussitôt à le remplir de pierres jusqu'à quatre pieds au-dessous de son somm<strong>et</strong> ; ce travail,fait par un grand nombre de p<strong>et</strong>its navires, ne demandait ordinairement que de quinze à dix-huit jours. Près de la moitié despierres tombaient, en les versant, en dehors de l'orifice, de sorte que pour chaque caisse, le cube transporté s'élevait à plusde 9,700 m.Dans le principe, la pierre sèche était seule employée. On crut devoir y substituer la maçonnerie cimentée à partir de laligne des bas<strong>ses</strong> mers d'équinoxe. — Chaque caisse ne coûtait que de 360 à 400,000 fr. de dépense première ; — bois, fers<strong>et</strong> main-d'oeuvre — mais à c<strong>et</strong>te dépense on doit ajouter celles, beaucoup plus considérables, qui avaient pour obj<strong>et</strong> laflottaison, l'échouage <strong>et</strong> le remplissage, de manière que la dépense totale se trouvait, tous comptes faits, portée à près d'unmillion. — Il fallait pour couvrir un front de 3,900 m., longueur proj<strong>et</strong>ée, 90 cais<strong>ses</strong> coniques.Deux seulement purent être échouées en 1784, celle qui l'avait été le 7 juill<strong>et</strong> n'était pas encore achevée de remplir,lorsqu'un fort coup de vent survint le 18 août, <strong>et</strong> en enleva la partie supérieure, depuis le niveau des bas<strong>ses</strong> mers. C<strong>et</strong>accident donna à réfléchir : la mise à flot des cônes ne pouvant s'opérer que dans la vie eau, on reconnut l'impossibilité d'enplacer plus de cinq à six par année ; <strong>et</strong> à ce compte quinze à dix-huit ans eussent à peine suffi pour compléter[p. 217]l'établissement. Il fut décidé qu'au lieu d'être contigus à leur base, comme le supposait le proj<strong>et</strong>, les cônes seraient désormai<strong>ses</strong>pacés de 58m. 50, <strong>et</strong> que l'intervalle laissé entre eux serait comblé en p<strong>et</strong>ites pierres jusqu'au niveau des bas<strong>ses</strong> mers, defaçon à former une digue continue. « C<strong>et</strong>te combinaison supposait à la fois des principes peu concordants, puisque lanécessité des cônes n'avait paru fondée que sur l'instabilité des pierres privées d'une défense extérieure, tandis que cesmêmes pierres allaient au contraire devenir la défense des cônes dont elles devaient envelopper la base. » (Notice de laMarine à <strong>Cherbourg</strong> pour l'an V de la république).Néanmoins l'application de ce système mixte commença l'année suivante. Trois cônes furent ainsi coulés pendant c<strong>et</strong>tecampagne, <strong>et</strong> leur remplissage s'effectua sans accident.En 1786, une grande activité fut imprimée aux travaux. La première immersion se fit le 15 mai, à peu de distance <strong>du</strong> côneque la tempête <strong>du</strong> 7 juill<strong>et</strong> 1784 avait endommagé. Sept jours après, le comte d'Artois arrivait à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> un deuxièmecône était échoué en sa présence. Il fut suivi d'un troisième le 13 juin, puis d'un quatrième le 23 <strong>du</strong> même mois. La place decelui-ci avait été marquée à l'extrémité E. <strong>du</strong> brise-lame, de manière à rétrécir la passe de 122 m. 80. L'échouage eut pourspectateur Louis XVI ; ce prince, qui prenait un vif intérêt aux travaux de la rade, avait voulu les voir par lui-même[p. 218]<strong>et</strong> s'était ren<strong>du</strong> sur les lieux. On lui disposa un magnifique pavillon sur le cône coulé dix jours auparavant <strong>et</strong> qu'on s'était hâtéde remplir. C'est de ce point qu'il suivit les opérations de la mise en place ; avant de se rembarquer il y dîna avec sa suite. —Il y eut encore un cône d'immergé dans c<strong>et</strong>te campagne ; on avança aussi beaucoup la construction des digues en pierresper<strong>du</strong>es. — Dès le mois de juin, une escadre de vingt-deux voiles avait pu mouiller à l'abri de la nouvelle digue. Afin dedissiper entièrement les incertitudes <strong>du</strong> gouvernement, que les partisans de la Hougue essayaient de réveiller, <strong>et</strong> en outrepour s'assurer des résultats avantageux pro<strong>du</strong>its par les ouvrages, le Triton, vieux vaisseau de 64, fut envoyé à <strong>Cherbourg</strong> aumois de septembre, <strong>et</strong> mouillé sur la rade où il passa l'hiver. Au printemps de l'année suivante, on lui adjoignit le Brillant, autrevaisseau de 64. Ils restèrent à leur poste, l'un cinq années <strong>et</strong> l'autre dix, sans recevoir d'avaries. C<strong>et</strong>te épreuve éclatante levatous les doutes <strong>et</strong> établit de la manière la plus évidente les propriétés de c<strong>et</strong>te position. — Les travaux ne se ralentirent pointen 1787 ; ils acquirent même un développement extraordinaire <strong>et</strong> au 19 juin 1788, époque où le dernier cône fut coulé, lenombre de ces cages s'élevait à vingt. Deux seulement étaient jointives à leur base ; en conséquence des diver<strong>ses</strong>modifications apportées au proj<strong>et</strong> primitif, toutes les autres avaient été espacées successivement davantage, d'abord de 58m. 50 commeil a été dit, puis de 200 m. <strong>et</strong> enfin de plus de 390 m.[p. 219]Cependant l'expérience ne répondait pas à la confiance que l'on avait eue dans les procédés de M. de Cessart : les cônesétaient sans doute d'admirables machines, <strong>et</strong> la célébrité qu'ils valurent à leur inventeur était méritée ; mais ils se trouvaientimpuissants à maîtriser les efforts véritablement incalculables de la mer. On n'avait pu les remplir tous jusqu'à leur somm<strong>et</strong> ;le ciment hydraulique, si nécessaire pour maintenir la stabilité des couches supérieures de la pierre, avait cessé d'être


employé, de sorte qu'ils éprouvaient en général des avaries considérables qu'on s'efforçait en vain de réparer ou de prévenir.Les débris de la charpente, trop pesants pour flotter, étaient entraînés dans la rade par les courants, <strong>et</strong> l'on eut à craindrequ'ils ne nuisissent à la bonté <strong>du</strong> mouillage ; c'est pourquoi, en 1789, on se détermina à récéper tous les cônes qui n'avaientpas encore leur couronnement emporté ; celui de l'E. seul fut épargné pour indiquer aux navigateurs l'ouverture de la passe. Ileut le sort commun dans une tempête survenue le 12 février 1799.L'insuffisance des cônes était reconnue que l'engouement dont ils étaient l'obj<strong>et</strong> n'avait pas permis de proposer leurabandon. Aux yeux des hommes de l'art, les enrochements devinrent l'unique espoir des travaux, <strong>et</strong> l'on en avait poursuiviactivement la formation. Mais on ne tarda[p. 220]pas à s'apercevoir qu'il n'existait aucune parité entre les deux systèmes, <strong>et</strong> que l'un, loin de prêter appui à l'autre en causeraitinévitablement la ruine. En eff<strong>et</strong>, les digues adhérentes aux cônes, devaient suivre les affaissements <strong>et</strong> les ruptures del'enveloppe en charpente ; quelquefois même, en perdant leur point d'appui, ces mas<strong>ses</strong>, profondément remuées par lestempêtes, étaient culbutées sur une grande éten<strong>du</strong>e. — Une Digue uniquement en pierres per<strong>du</strong>es, comme l'avait proposé M.de la Brétonnière, parut être ce qu'il restait à faire, <strong>et</strong> ce système commença dès lors à être suivi. Les versements dematériaux se succédaient avec tant de rapidité qu'en 1739 ils atteignirent un cube de 175,410 m.Le calme pro<strong>du</strong>it dans la rade était déjà trop évident, trop de voix en témoignaient pour que les détracteurs de c<strong>et</strong>teposition osassent nier l'utilité des ouvrages entrepris ; ils se tournèrent d'un autre côté <strong>et</strong> des doutes inquiétants furentrépan<strong>du</strong>s sur la nature <strong>et</strong> la qualité <strong>du</strong> fond, sur la suffisance de l'espace propre au mouillage des vaisseaux, en raison <strong>du</strong> peude profondeur de l'eau. Afin de lever toute incertitude, le gouvernement nomma en juill<strong>et</strong> 1789, deux commissions chargéesséparément de faire des sondes. C<strong>et</strong>te double opération eut lieu dans les derniers mois de l'année, <strong>et</strong> les résultats de 5,000coups de sonde, quoique obtenus par des procédés différents, furent à très-peu de chose près les mêmes. Ces résultatsrassurèrent complètement, <strong>et</strong> mirent un terme à[p. 221]des imputations que la passion, bien plus qu'une raison éclairée, avait dirigées.En 1790, les travaux d'exhaussement des digues se continuèrent avec la même vigueur. Elles furent élevées dans touteleur éten<strong>du</strong>e à la hauteur moyenne des bas<strong>ses</strong>-mers, sur une largeur de 90 m. à la base <strong>et</strong> de 30 m. au couronnement. — Levolume des pierres versées en rade depuis l'entreprise des ouvrages était évalué à 2,665,400 m. cubes.Ces pierres de p<strong>et</strong>ites dimensions avaient été en partie j<strong>et</strong>ées en pleine mer, sans nulle liaison, <strong>et</strong> abandonnées à ellesmêmes. Elles composaient un massif essentiellement hétérogène, dont la surface était sans cesse labourée par les vagues.Quelquefois même elles subissaient des déplacements considérables <strong>et</strong> il ne se passait pas de tempête que desaffouillements ne se déclarassent <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> large ; on crut que pour remédier à c<strong>et</strong> inconvénient <strong>et</strong> assurer la fixité desp<strong>et</strong>ites pierres, il suffirait de couvrir la partie supérieure <strong>du</strong> brise-lame <strong>et</strong> le talus N., jusqu'à 3 ou 4 m. en contrebas de labasse mer, de blocs de 50 à 60 centimètres cubes. Ce <strong>nouveau</strong> genre de travail, autorisé au commencement de 1791, futentrepris à titre d'expérience sur environ 100 m. de longueur. Les blocs, après un premier dérangement, s'étaient arrimés, <strong>et</strong>leur stabilité, éprouvée par les tempêtes de l'hiver si rigoureux de 1791, parut incontestable. Ce résultat satisfaisant, établitl'excellence <strong>du</strong> procédé <strong>et</strong> rallia toutes les opinions.On voit que les orages de la révolution n'avaient pas[p. 222]encore à c<strong>et</strong>te époque ralenti l'activité des travaux de la Digue ; plus que jamais l'importance de c<strong>et</strong>te vaste conceptionfrappait tous les esprits ; l'assemblée législative qui avait à coeur de la voir réalisée, se fit rendre compte de la situation desouvrages <strong>et</strong> mit des fonds à la disposition <strong>du</strong> ministre de la marine pour les continuer ; mais persuadée que la plupart desavaries dont il a été question avaient eu leur principe dans la disparité des systèmes suivis, soit simultanément soitsuccessivement, <strong>et</strong> reconnaissant qu'un plan d'ensemble bien conçu, qu'une marche régulière, uniforme, pourraient seulsassurer le succès de l'entreprise, elle chargea le pouvoir exécutif de nommer une commission composée d'officiers <strong>du</strong> génie,d'officiers de marine <strong>et</strong> d'ingénieurs, à l'eff<strong>et</strong> de constater les avantages des travaux exécutés à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> de proposertous les moyens de perfection <strong>et</strong> les constructions nouvelles qu'elle jugerait utiles au complément de c<strong>et</strong> établissement. (Loi<strong>du</strong> 1 er août 1792).C<strong>et</strong>te commission se réunit à <strong>Cherbourg</strong> le 14 octobre 1792, <strong>et</strong> employa deux <strong>ses</strong>sions à l'examen des importantesquestions qui lui avaient été soumi<strong>ses</strong>. Elle se prononça pour le recouvrement en gros blocs, extraits des carrières <strong>du</strong> Roule<strong>et</strong> de la Fauconnière, de la masse de p<strong>et</strong>ites pierres, <strong>et</strong> elle proposa en outre, afin de procurer en tous les tems <strong>et</strong> à toutes lesheures une tranquilité parfaite dans la rade, que le couronnement de la Digue fût porté à 3 m. au-dessus des plus hautes


mers de vives eaux d'équinoxe, sur 10 m. de largeur.[p. 223]La Digue avait 3,767 m. de longueur, mesurée entre les deux cônes extrêmes ; elle se divisait comme aujourd'hui en deuxbranches d'inégale éten<strong>du</strong>e <strong>et</strong> formant un angle obtus, saillant vers le N., d'environ 169°. — Les dépen <strong>ses</strong> de toute naturefaites depuis l'origine des travaux dépassaient déjà 31 millions ; la commission évaluait à 18 millions celles qui restaientencore à faire <strong>et</strong> elle portait à quatre ou cinq années le tems nécessaire pour terminer les ouvrages.Le gouvernement accepta les dispositions de ce proj<strong>et</strong> ; mais son bon vouloir <strong>du</strong>t céder à la gravité des circonstances ; <strong>et</strong>les travaux, ajournés à des tems meilleurs, se bornèrent en 1793 <strong>et</strong> pendant les ans II, III, <strong>et</strong> IV à élever une vigie à l'extrémitéO. de la Digue, pour indiquer la passe aux navigateurs, <strong>et</strong> à enrocher le môle de l'E, où se trouvait aussi une vigie. — Leproj<strong>et</strong> de perfectionnement proposé par la commission n'a jamais été exécuté, dans son entier <strong>du</strong> moins ; mais les judicieu<strong>ses</strong>observations qui l'accompagnaient ont éclairci bien des points douteux, répon<strong>du</strong> à bien des objections <strong>et</strong> ce n'est pas tropavancer que de dire qu'il a véritablement préparé le système de construction suivi aujourd'hui.Il est dans la nature des révolutions d'avoir d'autant moins de <strong>du</strong>rée, qu'elles ont plus de violence. — Celle de 93 passavite, <strong>et</strong> le même homme qui nous mit en guerre avec toute l'Europe, travailla de toute l'activité de son génie à rétablir l'ordre <strong>et</strong>le calme à l'intérieur. Bonaparte avait trop l'instinct des créations[p. 224]hardies, <strong>et</strong> tout ce qui tenait à la défense des frontières intéressait trop sa gloire personnelle, qui devint celle de la France,pour que les travaux de <strong>Cherbourg</strong> lui demeurassent inaperçus. Dès 1800, il prit connaissance de l'état effectif de la Digue <strong>et</strong>des divers proj<strong>et</strong>s dont elle avait été l'obj<strong>et</strong>. La continuation des travaux fut immédiatement résolue, mais sous un point de vuebeaucoup plus militaire, <strong>et</strong> une commission, chargée de déterminer la nature <strong>et</strong> l'emplacement des ouvrages de fortification àétablir sur le brise-lame, pour rendre impossible à l'ennemi l'accès de la Rade, se réunit à Valognes en 1802. Conformémentaux intentions <strong>du</strong> premier Consul ; c<strong>et</strong>te commission s'occupa moins de la sûr<strong>et</strong>é de la rade <strong>et</strong> des services que sa position lam<strong>et</strong> à même de rendre à la marine militaire, que des exigences de la stratégie. Pour tout ce qui tenait à la constructionproprement dite, elle s'en rapporta aux dispositions <strong>du</strong> rapport de la commission de 1792.Un ordre ministériel <strong>du</strong> 9 septembre de la même année annonça la reprise des travaux, qui eut lieu dans les derniers jours<strong>du</strong> mois. Le gouvernement arrêta le 15 octobre suivant que la partie centrale de la Digue serait élevée à 2 m. 92 au-dessus<strong>du</strong> niveau des plus hautes mers, sur 195 m. d'éten<strong>du</strong>e, afin qu'on pût y établir une batterie de 20 pièces d'artillerie <strong>du</strong> plusgros calibre, <strong>et</strong> que les extrémités E. <strong>et</strong> O. des branches seraient ultérieurement disposées pour recevoir une semblabledestination. Les ouvrages de la partie centrale devaient être achevés dans l'espace de deux années.[p. 225]Toutes les carrières des <strong>environs</strong> furent aussitôt mi<strong>ses</strong> en exploitation. Les bateaux à pierres précédemment employésavaient été détruits ; seize chaloupes canonnières, en station à <strong>Cherbourg</strong>, plusieurs autres amenées <strong>du</strong> Havre <strong>et</strong> de St-Malo,<strong>et</strong> quelques bâtiments <strong>du</strong> commerce furent armés pour le service des transports ; mais ces moyens devinrent insuffisants <strong>et</strong>les embarcadères s'encombraient de matériaux. Le gouvernement qui voulait avant tout l'exécution rapide <strong>du</strong> travail approuvala construction de 16 gabarres <strong>du</strong> port de 60 tonneaux.Les versements se fesaient au point d'intersection des deux branches, <strong>et</strong> à la fin de l'an XI (1803), c<strong>et</strong>te partie de la Digueavait atteint sur 195 m. de longueur <strong>et</strong> 19 m. 50 de largeur, l'élévation fixée par l'arrêté <strong>du</strong> 15 octobre. — Il y avait alors 74navires employés aux divers transports ; le nombre des hommes occupés au relèvement de la p<strong>et</strong>ite pierre <strong>et</strong> des blocs étaitde douze cents. — La guerre que la République soutenait alors contre l'Angl<strong>et</strong>erre décida l'établissement immédiat <strong>et</strong>provisoire sur le môle d'une batterie armée de quatre pièces de canon de 36 <strong>et</strong> de deux mortiers à grande portée.L'inauguration en fut faite le 28 thermidor (16 août 1803). On entreprit aussitôt la construction <strong>du</strong> terre-plein <strong>et</strong> d'une partie del'épaulement destiné à couvrir la batterie ; ce dernier ouvrage, exécuté trop à la hâte, ne put tenir contre une forte tempêtesurvenue le 18 décembre, <strong>et</strong> fut renversé. C<strong>et</strong> accident n'inspira néanmoins aucune[p. 226]crainte sérieuse touchant la solidité des enrochements <strong>et</strong> la garnison, composée de 60 hommes, passa l'hiver à son poste.Le travail poussé en 1804 avec toute la célérité que pouvaient perm<strong>et</strong>tre les moyens de transport, était assez avancé pourqu'au mois de mai 1805, sur un ordre <strong>du</strong> gouvernement, on pût, dans l'espace de 24 heures, armer la batterie de 20 piècesd'artillerie ; la garnison fut augmentée de 90 hommes.


La batterie avait 194 m. 90 de longueur <strong>et</strong> 32 m. 70 dans sa plus grande largeur. Elle était de forme circulaire, terminée à<strong>ses</strong> extrémités par deux orillons de 19 m. 49 de diamètre ; on y arrivait par deux rampes de 3 m. 90 de largeur. Ellecomportait dans son développement l'installation de 30 pièces d'artillerie espacées de 5 m. 85. — Deux bâtiments en bois, enforme de tentes, élevés sur la même direction <strong>et</strong> ayant chacun 23 m. 40 de longueur <strong>et</strong> 5 m. 85 de largeur, tenaient lieu decasernes. Deux p<strong>et</strong>its pavillons élevés à l'entrée de la batterie servaient l'un de corps-de-garde, l'autre de logement aucommandant. Au centre des orillons se trouvaient deux rotondes, également en bois, destinées au dépôt des munitions <strong>et</strong> desvivres.On s'occupa pendant la campagne de 1806 de recharger en gros blocs les talus <strong>du</strong> N., afin de leur donner la forcenécessaire pour résister au choc des vagues. — Le 18 février 1807, le mur de revêtement, battu par une violente tempête,s'écroula sur[p. 227]19 m. 50 d'éten<strong>du</strong>e ; le 29 mai suivant, les dégâts furent également considérables, <strong>et</strong> telle était la force de la mer, qu'ellefranchit tous les obstacles <strong>et</strong> submergea le sol de la batterie. — Ces avaries réparées, on continua le travail desenrochements.Le système de recouvrement en gros blocs était suivi depuis seize années <strong>et</strong> plus de trente tempêtes avaient éprouvé lasolidité des ouvrages, sans qu'aucune altération grave se manifestât dans la masse générale. On se croyait en droit de jugerde l'avenir par l'expérience <strong>du</strong> passé ; mais l'ouragan <strong>du</strong> 12 février 1808, le plus fort que de mémoire d'homme on eût ressentidans nos parages, vint renverser les prévisions les mieux fondées <strong>et</strong> rem<strong>et</strong>tre en doute la possibilité d'avoir jamais en rade unétablissement stable.On était alors en vives eaux : à deux heures <strong>du</strong> matin, comme la mer montait, les vents qui depuis quelques jourssoufflaient <strong>du</strong> S.-O. passèrent subitement au N.-O, <strong>et</strong> avec une telle impétuosité que les vagues, devenues monstrueu<strong>ses</strong>,franchirent le rempart <strong>et</strong> submergèrent une seconde fois le sol de la batterie. Plus la mer acquérait de hauteur, plus les chocsétaient pressés <strong>et</strong> terribles ; bientôt le parap<strong>et</strong> fut renversé, le terre-plein détruit, <strong>et</strong> les eaux, se précipitant par l'immensebrèche qu'elles s'étaient ouverte, balayèrent tout ce qui se trouva sur leur passage. Les affûts des pièces lancés contre lescasernes, les défoncèrent, <strong>et</strong> peu d'instants après, elles disparurent de[p. 228]même que les pavillons circulaires, le corps-de-garde <strong>et</strong> divers autres p<strong>et</strong>its bâtiments. Il n'y avait en ce moment d'abri nullepart, le môle était tout entier enveloppé par les lames.Les ouvriers <strong>et</strong> les soldats surpris à la Digue par la tempête étaient au nombre de 263. Déjà quelques-uns avaient péri,entraînés par les flots ou ensevelis sous les débris des habitations ; un des pilastres en granit, qui s'élevaient de chaque côtéde la grille d'entrée, en blessa <strong>et</strong> en écrasa plusieurs dans sa chute ; d'autres pourchassés de r<strong>et</strong>raite en r<strong>et</strong>raitesuccombèrent au froid <strong>et</strong> à la fatigue. — La position de ces malheureux devenait de moins en moins tenable, <strong>et</strong> aucunsecours ne pouvait leur être apporté de la terre ; les plus forts navires mouillés en rade perdaient leurs ancres <strong>et</strong> fesaientcôte. — Cependant trois hommes parvinrent à gagner à la nage une des caïques dont on se servait pour le transport desouvriers <strong>et</strong> qui était amarrée à peu de distance sur un corps-mort. Ils profitèrent <strong>du</strong> calme pro<strong>du</strong>it par la basse mer pouraccoster la batterie <strong>et</strong> faire embarquer leurs compagnons d'infortune. Telle était encore la violence <strong>du</strong> vent, que 12 minutesaprès qu'ils eurent mis à la voile, ils entraient dans le port de commerce. — Ce désastreux événement coûta la vie à 194personnes. [95] 69 furent sauvées ; 38 seulement[p. 229]l'avaient été à bord de la caïque ; mais une partie de la garnison <strong>du</strong>t son salut à des grottes ménagées au milieu des blocsdans l'E. de la batterie.Il n'était resté debout sur le môle que le logement <strong>du</strong> commandant <strong>et</strong> la prison ; tout le reste avait été bouleversé de fonden comble. On travailla aussitôt à rétablir le sol de la batterie, qui fut réarmée de 20 bouches à feu, <strong>et</strong> à construire de<strong>nouveau</strong>x logements pour une garnison composée de 60 hommes d'artillerie de marine seulement.La digue resta dans c<strong>et</strong> état jusqu'en 1811, époque à laquelle l'empereur s'étant ren<strong>du</strong> à <strong>Cherbourg</strong> la visita. Il reconnut lanécessité de substituer une défense permanente <strong>et</strong> définitive à c<strong>et</strong>te batterie provisoire, <strong>et</strong> d'une résistance douteuse. Mais laconfiance que l'on avait accordée au système des enrochements s'était usée dans la lutte d'une application sans cessecontrariée <strong>et</strong> qui, en résultat, n'offrait véritablement plus de garanties suffisantes ; il fallut recourir à d'autres moyens. M.Cachin proposa de construire, en arrière de la batterie, une tour elliptique en maçonnerie pleine <strong>et</strong> revêtue en granit ; ce proj<strong>et</strong>fut adopté par Napoléon qui, le 7 juill<strong>et</strong> 1811, rendit le décr<strong>et</strong> suivant :


Article 1. er — La batterie à établir sur la Digue de <strong>Cherbourg</strong> sera construite dans une tour elliptique en maçonnerie de pierre de taille de granit,dont le grand axe aura trente-cinq toi<strong>ses</strong> <strong>et</strong> le p<strong>et</strong>it axe dix-neuf, conformément au plan <strong>et</strong> coupe annexés au présent décr<strong>et</strong> <strong>et</strong> aux dispositionssuivantes :Art. 2. — Les fondations seront établies sur l'enrochement intérieur au niveau des bas<strong>ses</strong> mers.[p. 230]Art. 3. — Sur ce massif de fondation qui aura vingt-huit pieds de hauteur <strong>et</strong> au niveau <strong>du</strong> terre-plein de la batterie actuelle, sera placée une casernedont les murs seront percés de soixante-dix-huit créneaux, capable de contenir une garnison de cent cinquante hommes, le magasin à poudre <strong>et</strong> laciterne.Art. 4. — La gorge de c<strong>et</strong>te batterie sera défen<strong>du</strong>e par deux flancs.Art. 5. — Une plate-forme générale sur c<strong>et</strong>te caserne, qui sera voutée, à l'abri de la bombe, servira d'emplacement à une batterie casematée dedix-neuf pièces de canon de trente-six. Le seuil des embrasures sera élevé de trente pieds au-dessus des plus hautes mers.Art. 6. — Une seconde plate-forme sera construite au-dessus des casemates, <strong>et</strong> pourra, au besoin, recevoir une batterie sur affûts de côte.Art. 7. — La batterie actuelle, extérieure à la tour, sera conservée, <strong>et</strong> les talus à la mer qui la protègent seront soigneusement conservés.Les travaux furent immédiatement entrepris ; mais deux ans après, les événements politiques mirent dans la nécessité deles suspendre. Repris en 1823, ils furent de <strong>nouveau</strong> discontinués, <strong>et</strong> aujourd'hui encore il n'y a guère d'exécuté que le massifqui doit servir de base aux casernes <strong>et</strong> à la batterie casematée.En 1820, le cube des matériaux, blocs <strong>et</strong> p<strong>et</strong>ites pierres, versés en rade pour l'exhaussement de la Digue depuis l'originedes travaux, était de 3,702,557 m. La dépense proprement dite s'élevait à 20,968,936 f.Vers 1828, la Restauration, qui avait fait si peu pour les travaux de la Digue, se rappela enfin que l'entreprise de cemonument datait <strong>du</strong> règne de Louis XVI, <strong>et</strong> elle se décida à l'achever, ne fût-ce que pour[p. 231]rendre hommage à une sainte mémoire. — Au printemps de c<strong>et</strong>te même année, M. Hyde de Neuville, ministre de la marine,se rendit à <strong>Cherbourg</strong>, accompagné de M. Charles Dupin, pour y prendre connaissance de la situation des ouvrages <strong>et</strong> desmoyens de perfectionnement qui semblaient offrir le plus de chances de succès. M. Fouques-Duparc, directeur des travauxhydrauliques, attaché au port depuis 1803, <strong>et</strong> qui en avait dirigé les travaux sous les ordres de M. Cachin [96], éclaira laquestion des lumières de son expérience <strong>et</strong> développa dès lors les ba<strong>ses</strong> <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> qu'il se proposait de soum<strong>et</strong>tre à l'examen<strong>du</strong> gouvernement.De grands changements avaient dû s'opérer dans la configuration d'une masse de pierres livrées à l'action des lamesdepuis plus de quarante hivers ; avant de rien entreprendre il était indispensable que des profils scrupuleusement établisfissent connaître ces déplacements. Dès 1829 on sonda sur toute l'éten<strong>du</strong>e de la Digue <strong>et</strong> l'on reconnut, que pour élever lesdeux branches à la hauteur des bas<strong>ses</strong> mers de vives eaux d'équinoxe, le cube des rechargements en moellons à effectuerserait d'environ 709,435 m. — La branche de l'O. se trouvait de deux à trois mètres au moins en contrebas des plus bas<strong>ses</strong>mers.Ce n'est véritablement, toutefois, qu'en 1830 que la reprise des travaux a eu lieu. Quoiqu'il n'y eût encore rien de décidé àl'égard des divers systèmes[p. 232]proposés, la Digue fut comprise au budg<strong>et</strong> de c<strong>et</strong> exercice pour une somme de 700,000 fr. On s'occupa aussitôt de réparerles bâtiments qui avaient autrefois servi au transport des pierres ; un appel fut fait aux particuliers qui s'empressèrent d'armer,<strong>et</strong> en très peu de temps, le nombre des navires dont on disposait, s'éleva à plus de 30. La campagne s'ouvrit à la fin de mars,<strong>et</strong> pendant la belle saison, 133,600 m. cubes massifs de moellons, provenant <strong>du</strong> creusement <strong>du</strong> bassin à flot, <strong>et</strong> pris auxdépôts anciennement formés au pourtour de ce bassin, furent versés tant à l'E. qu'à l'O. <strong>du</strong> fort central. La branche de l'E.atteignit au niveau des bas<strong>ses</strong> mers de vives eaux ordinaires.Une même somme de 700,000 fr. fut allouée en 1831. Au printemps on comptait 68 navires employés au transport despierres. Les versements, dont le cube massif s'éleva à 168,000 m., se firent en majeure partie sur la branche de l'O. — Lemême travail se continuait au commencement de 1832 lorsque, le 14 avril, une dépêche ministérielle annonça l'adoption <strong>du</strong>


proj<strong>et</strong> de M. Duparc.Ce proj<strong>et</strong>, qui a fait la gloire de son auteur, diffère essentiellement de tous les systèmes de construction suivis jusque làpour la Digue. — Comme on l'a vu, le brise-lame, fondé sur le sable, se divise en deux branches formées en pierres per<strong>du</strong>es.On avait cru pouvoir assurer la fixité de ces matériaux, dont le volume <strong>et</strong> la pesanteur n'étaient pas en équilibre avec l'actiondes vagues, en les recouvrant[p. 233]de blocs de fortes dimensions ; mais l'expérience a prouvé que ces blocs, quelque volumineux qu'ils fussent, ne rempliraientjamais le but ; qu'il ne se passait pas de tempête qu'il n'y en eût un plus ou moins grand nombre de détachés <strong>du</strong> revêtement<strong>et</strong> entraînés par la mer dans la direction des vents. — M. Duparc, convaincu que ce n'est qu'en substituant maçonnerie auxblocs isolés que l'on parviendra à faire un ouvrage <strong>du</strong>rable, proposa en conséquence de couvrir la rade par un bloc unique oumuraille, d'une épaisseur moyenne de 10 m. C<strong>et</strong>te muraille de maçonnerie pleine <strong>et</strong> revêtue en pierres de granit taillé, estétablie sur le massif en pierres sèches, <strong>et</strong> s'élève depuis le niveau des bas<strong>ses</strong> mers jusqu'à 3 m. 70 au-dessus <strong>du</strong> niveau desplus hautes mers. Du côté <strong>du</strong> Nord, elle est défen<strong>du</strong>e à son pied par une risberme en béton <strong>et</strong> plus au large, par desenrochements en gros blocs.Il n'entre pas dans notre plan d'analyser les autres systèmes qu'une aussi grave question avait fait éclore ; mais nous nepouvons cependant passer sous silence l'idée ingénieuse qu'un de nos compatriotes, M. D..........., émit en c<strong>et</strong>te circonstance.Il proposait de couvrir ou plutôt d'envelopper la Digue d'un réseau en chaînes de fer, recouvert lui-même d'une couche debéton d'un mètre d'épaisseur. Ce moyen parut inadmissible. En eff<strong>et</strong>, lors même qu'il y aurait eu possibilité de tendre c<strong>et</strong>immense fil<strong>et</strong>, on sait avec quelle promptitude l'eau de la mer oxide <strong>et</strong>[p. 234]détruit le fer. Quant au béton, quelque rapidité de prise qu'on lui suppose, il eût été infailliblement délavé par le clapotage.Le procédé de construction que l'on devait suivre se trouvant ainsi arrêté, on s'occupa sur le champ de tous lespréliminaires que nécessitait c<strong>et</strong>te colossale entreprise. — C'est par la branche de l'E. que les travaux ont été commencés ;c<strong>et</strong>te branche, qui couvre l'entrée <strong>du</strong> Port-Militaire, était la plus élevée <strong>et</strong> la mieux consolidée ; le sol en fut déblayé <strong>et</strong> régalépour asseoir les fondements des ouvrages de maçonnerie. Tout étant disposé le 25 juin, la première des cais<strong>ses</strong> de béton dela risberme fut con<strong>du</strong>ite en rade <strong>et</strong> échouée avec un succès compl<strong>et</strong>. — Les travaux de fondation étaient assez avancés le 14août suivant, pour que la pose de la première pierre pût avoir lieu ; le 7 septembre c<strong>et</strong>te assise inférieure ayant déjà 45 m.courants, on entreprit la pose de la seconde. — A la fin de la campagne, on avait échoué 42 cais<strong>ses</strong> <strong>et</strong> exécuté 104 m. defondations ; on comptait 90 m. de première assise <strong>et</strong> 75 m. de seconde. Les versements de moellons, quoiquenécessairement rallentis, dépassèrent 75,000 m. cubes.On ne peut s'attendre à ce que nous donnions ici un détail de toutes les opérations auxquelles entraîne la mise àexécution <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong> système, qu'on pourrait appeler d'une simplicité compliquée. Voici en peu de mots quelle est la marche<strong>du</strong> travail : — lorsque le couronnement <strong>du</strong> massif en pierres sèches a acquis la[p. 235]régularité convenable, on le couvre d'une couche de béton [97] d'un mètre d'épaisseur, que des cais<strong>ses</strong> ou blocs artificielsprotègent <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> large. Des tabl<strong>et</strong>tes provenant des carrières <strong>du</strong> Becqu<strong>et</strong> <strong>et</strong> des dalles schisteu<strong>ses</strong> de grandesdimensions sont ensuite posées sur ce mélange <strong>et</strong> forment la partie inférieure de la muraille ; ce n'est point immédiatementqu'elle atteint sa plus grande hauteur, mais on l'exhausse gra<strong>du</strong>ellement <strong>et</strong> par assi<strong>ses</strong> sur une éten<strong>du</strong>e déterminée. Lesblocs artificiels qui composent la risberme au N. <strong>et</strong> que la mer couvre dans les bas<strong>ses</strong> marées de mortes eaux, étaientautrefois fabriqués à terre sur la plage <strong>et</strong> présentaient déjà un certain degré de <strong>du</strong>r<strong>et</strong>é lorsque, au moyen de p<strong>et</strong>its pontons,on les transportait en rade. Maintenant, pour plus de facilité, les cais<strong>ses</strong> sont remplies après l'échouage [98]. — Les cimentshydrauliques <strong>et</strong> pouzzolanes dont on fait usage sont tous de la prise la plus prompte <strong>et</strong> de la résistance la plus énergique.Dans le cours de 1833, les travaux de maçonnerie acquirent un grand degré d'activité. Lorsque les mauvais temsfermèrent la campagne, la muraille s'élevait au-dessus des plus hautes mers de vives eaux d'équinoxe sur une longueur de100 m. On avait en outre complété divers moyens d'exécution entrepris l'année précédente, tels que chalands, pontons,appareils, outils, équipages, <strong>et</strong>c.[p. 236]En 1834, on exécuta 217 m. de fondation <strong>et</strong> 150 m. de muraille, élevée jusqu'à la 9 e assise. C'est de c<strong>et</strong>te même annéeque date la construction d'un hangar mobile pour la fabrication à couvert, <strong>et</strong> le plus près possible des points deconsommation, des mortiers employés dans les maçonneries.


On s'occupa au commencement de 1835 de réparer quelques dégradations survenues pendant les coups de vent del'hiver. Ensuite on entreprit <strong>et</strong> l'on porta jusqu'à la dixième assise l'exhaussement de la portion de muraille fondée l'annéeprécédente. Les fondations nouvelles s'étendirent sur 187 m. de longueur.En 1836, on a élevé 252 m. courants de muraille. — La branche de l'E. présentait déjà une longueur de près de 1,000 m.au-dessus des hautes mers, quand, le 24 décembre, un ouragan terrible se déclara <strong>et</strong> causa des avaries considérables auxouvrages. Le vent soufflait N.-N.-E., dans une direction presque perpendiculaire à c<strong>et</strong>te branche ; la mer s'était couverted'écume, des lames d'une grosseur effrayante apparaissaient au large, brisaient contre le parement N. qu'elles ébranlaient deleurs épouvantables chocs, <strong>et</strong> s'élançaient en gerbes à plus de 40 m. de hauteur. Ces mas<strong>ses</strong> d'eau en s'affaissantenveloppaient la muraille qu'on n'apercevait plus qu'à de longs intervalles. — Mais si ce spectacle, vu de la terre, était d'ungrandiose sublime, à la Digue, sur le lieu de la scène, le coeur le plus intrépide ne pouvait se défendre d'un sentiment de[p. 237]crainte. Les blocs qui composent l'enrochement de la risberme N., <strong>et</strong> dont le poids atteint de 2,800 à 3,000 k., étaient le jou<strong>et</strong>des vagues ; soulevés à plus de 7 m. de hauteur, ils franchissaient la muraille d'un seul bond <strong>et</strong> r<strong>et</strong>ombaient sur le risbermeS. — Après le coup de vent, qui <strong>du</strong>ra trois jours, 200 de ces blocs avaient passé ainsi <strong>du</strong> large dans la rade. L'enrochemententier était r<strong>et</strong>roussé au pied des maçonneries ; la plupart des cais<strong>ses</strong> de béton, d'un poids de 13,000 kilog., avaient subi desdéplacements extraordinaires, plusieurs même étaient r<strong>et</strong>ournées sens dessus dessous ; le hangar mobile avait été emporté.Ce n'était là cependant que la moindre partie des dommages essuyés pendant ces désastreu<strong>ses</strong> journées : des lézardestransversales, accompagnées de lézardes perpendiculaires à l'axe de la Digue, existaient sur différents points. Une lézardelongitudinale de 100 m. s'était assez élargie pour que dans presque toute c<strong>et</strong>te longueur, au N., la maçonnerie fût renverséesur la risberme. La partie <strong>du</strong> travail, exécutée en 1836, avait plus souffert encore ; une large coupure, qu'on voyait aisément<strong>du</strong> rivage, la traversait <strong>du</strong> S. au N.On crut d'abord que le heurt répété des blocs contre la muraille avait seul déterminé ces avaries ; mais un examen attentiffit bientôt reconnaître qu'elles n'avaient d'autre principe que les inégalités de tassement <strong>du</strong> massif en pierres sèches. Cemassif, on le sait, a été élevé à diver<strong>ses</strong> repri<strong>ses</strong> <strong>et</strong> d'après des systèmes différents ; il ne peut donc avoir partout la[p. 238]même homogénéité. En eff<strong>et</strong>, on trouve que les emplacements des cônes offrent un sol moins compressible que celui desintervalles qui les séparent. L'affaissement pro<strong>du</strong>it par le poids énorme de la muraille — 20,000 kilog. environ par mètrecarré — ne s'exerçant pas uniformément, il en résulte des irrégularités de base que le couronnement en maçonnerie doitsuivre : alors rien de plus naturel, lorsque la masse générale était ébranlée par une tempête, que les déchirures qui semanifestèrent les 24, 25 <strong>et</strong> 26 décembre. — C<strong>et</strong> inconvénient est grave sans doute <strong>et</strong> <strong>ses</strong> fâcheux eff<strong>et</strong>s pourront serepro<strong>du</strong>ire, en partie <strong>du</strong> moins, tant que la masse des pierres per<strong>du</strong>es n'aura pas acquis une fixité parfaite ; mais il n'est pasde nature à inspirer de justes craintes pour l'avenir des ouvrages. L'expérience d'ailleurs a prouvé que d'aussi forts coups devent n'arrivent guère que tous les trente ans ; celui-ci a été comparé pour sa violence à l'ouragan <strong>du</strong> 12 février 1808, <strong>et</strong> il adépassé en <strong>du</strong>rée toutes les tempêtes dont on a conservé le souvenir à <strong>Cherbourg</strong>.Les premiers mois de 1837 furent employés à réparer les dégâts de l'hiver. Ensuite on reprit le travail des maçonneries <strong>et</strong>l'on établit 302 m. de fondations nouvelles, couronnées d'une première assise sur presque toute c<strong>et</strong>te longueur. Lesversements de pierres sur la branche de l'O. dépassèrent 10,000 cubes.[p. 239]Ces divers travaux se sont poursuivis en 1838 <strong>et</strong> ils se continuent aujourd'hui avec une activité toujours croissante.L'élévation <strong>du</strong> massif qui supporte la muraille est de 10 à 14 m., suivant la régularité <strong>du</strong> fond. On estime à 90 m. la largeurmoyenne de sa base ; son talus <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> N. s'appuie à sa partie supérieure contre les cais<strong>ses</strong> de béton de la risberme, <strong>et</strong>se prolonge vers le large, sur le revers de l'ancienne Digue, avec une pente d'un dixième au moins. Du côté de la radel'inclinaison <strong>du</strong> glacis, beaucoup plus rapide, est de 45°. — La muraille a 10 m. 82 d'épaisseur à sa b ase <strong>et</strong> 9 m. environ à sonsomm<strong>et</strong> ; elle aura 9 m. 30 de hauteur. — La longueur de la branche de l'E., depuis le Fort central jusqu'à la passe, est fixée à1535 m. <strong>et</strong> celle de la branche de l'O. à 2230 m. ; elles seront l'une <strong>et</strong> l'autre terminées par un musoir couronné d'une batteriecasematée. — La commission spéciale, chargée en 1830 de l'examen des proj<strong>et</strong>s présentés pour l'achèvement de la Digue, alaissé indécise la forme à donner à ces ouvrages. M. Duparc, persuadé qu'il y aurait les inconvénients les plus graves à cequ'ils affectassent une saillie quelconque vers le N., pensait que leur revêtement extérieur ne devait être que le prolongementde celui de la muraille, <strong>et</strong> n'offrir, en conséquence, qu'une ligne parfaitement droite : l'élargissement que nécessitel'établissement des batteries aurait été pris en totalité dans la rade. Un proj<strong>et</strong> rédigé récemment par M. l'ingénieur Virla, maisdans un sens différent, quant


[p. 240]au musoir de l'O., donne 40 m. de diamètre à ce musoir <strong>et</strong> 30 m. à celui de l'E.La branche de l'E. est maintenant fondée (août 1839) jusqu'à l'origine de <strong>ses</strong> raccordements avec le musoir, <strong>et</strong> tout faitespérer qu'avant la fin de la campagne, elle sera élevée dans toute son éten<strong>du</strong>e, moins toutefois le pavage <strong>et</strong> lecouronnement qui ne sont encore exécutés sur aucun point. — La branche de l'O. découvre presque partout dans les bas<strong>ses</strong>mers de vives-eaux on s'occupe toujours de la recharger, <strong>et</strong> l'on emploie, à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, les pierres provenant de l'excavation del'arrière-bassin <strong>du</strong> port militaire. Les travaux de maçonnerie de c<strong>et</strong>te branche ont été commencés c<strong>et</strong>te année ; déjà plusieursassi<strong>ses</strong> sont placées, <strong>et</strong> les fondations dépassent une longueur de 163 m. — On accède maintenant au fort central par un belescalier double en granit, construit en 1838. — Des casernes pour les ouvriers, des logements <strong>et</strong> des bureaux pour lesingénieurs <strong>et</strong> les con<strong>du</strong>cteurs, la cantine, des magasins <strong>et</strong>c., occupent provisoirement c<strong>et</strong>te partie <strong>du</strong> môle. — Au centre estun phare tout récemment achevé. — A l'E. se trouve un p<strong>et</strong>it port de refuge, on se propose d'établir une gare semblable àl'abri de chaque musoir.Il y a en ce moment 550 ouvriers employés à la Digue. — Le nombre des bateaux qui transportent la pierre est de 40 ; <strong>et</strong>celui des bateaux à vapeur remorqueurs de trois. — Une somme de 1,226,930 fr. a été affectée à ce grand travail pourl'exercice de 1839.[p. 241]Le proj<strong>et</strong> de M. Duparc portait approximativement à 25 millions les dépen<strong>ses</strong> que nécessiterait l'achèvement de la Digue.Ces dépen<strong>ses</strong>, y compris celles qui avaient été faites antérieurement à la reprise des travaux, étaient au 1 er janvier 1838 de 28,040,192 f. 44 e.On évaluait à 18,174,964 56————————les dépen<strong>ses</strong> restant à faire à c<strong>et</strong>te époque. — La Digue entièrement terminée aura donc coûté 46,215,157 f. 00.Le calme devient chaque jour plus sensible dans la rade, <strong>et</strong> bientôt les navires mouillés à l'abri de la Digue y seront en touttemps <strong>et</strong> par tout état de mer dans une sûr<strong>et</strong>é parfaite. — La manière dont les ouvrages se sont comportés pendant lesfréquentes tempêtes qu'ils ont eu à soutenir, a pleinement justifié l'adoption <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong> système de construction. Larésistance des enrochemens en gros blocs <strong>et</strong> la stabilité de la muraille ne peuvent guère plus être mis en doute ; mais quelque soit le sort que l'avenir réserve à ce monument, il n'en sera pas moins la création la plus audacieuse <strong>et</strong> la plusgigantesque dont l'histoire ait fait mention jusqu'à notre époque.CHEMIN DE FER.Ce chemin de fer est destiné au transport des blocs <strong>et</strong> des moellons provenant des carrières <strong>du</strong> Roule <strong>et</strong> employés àl'achèvement de la Digue. — Il prend son origine au pied de la montagne, coupe la route royale,[p. 242]entre dans le Cauchin, traverse une seconde fois la route royale <strong>et</strong> vient aboutir le long <strong>du</strong> quai de l'Est <strong>du</strong> bassin decommerce, où les matériaux s'embarquent. M. l'ingénieur Virla [99], auteur <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> de ce chemin de fer, en a fait l'obj<strong>et</strong> d'unenotice, insérée dans les Annales des ponts <strong>et</strong> chaussées des mois de mars <strong>et</strong> d'avril 1835 ; nous n'avons rien de mieux àfaire que d'extraire de ce travail les passages qui nous semblent de nature à intéresser nos lecteurs [100].Les blocs extraits des carrières de la montagne <strong>du</strong> Roule, <strong>et</strong> destinés à former les enrochements N. de la Digue de <strong>Cherbourg</strong>, ont été transportés,jusqu'à la fin de 1833, au moyen de grands camions à deux roues, qui, basculant autour de leur essieu, formaient une plate-forme inclinée sur laquelleon chargeait les blocs à l'aide d'un treuil ou virevaut (espèce de cabestan placé horizontalement). Ces mas<strong>ses</strong>, dont le poids surpasse souvent 4,000kilog., étaient ensuite déposées sur les divers points d'embarquement, d'où les bâtiments de transport les enlevaient au moyen de fortes caliornesfrappées à leur mât.Le volume des blocs nécessaires à l'achèvement de la Digue devant s'élever à près de 200,000 m. cubes, on a pensé que l'établissement d'unchemin de fer provisoire contribuerait à diminuer les mains-d'oeuvre de transport <strong>et</strong> d'embarquement. La construction de ce chemin a été ordonnée parM. le ministre de la marine le 21 août 1830.[p. 243]Les carrières <strong>du</strong> Roule, actuellement en exploitation, se développent au N. de la montagne, sur une éten<strong>du</strong>e d'environ 500 m. Le chemin qui passeau pied de ces carrières a une pente moyenne de 0 m. 08 c. par mètre ; mais à partir de la route royale jusqu'au bassin de commerce, la différence deniveau devient presque nulle. Le proj<strong>et</strong> à étudier présentait donc deux parties distinctes : le danger des accidents a fait renoncer à l'idée d'employer sur


la première aucune construction fixe. On a pensé qu'il serait plus avantageux de faire usage de deux espèces de chariots, les uns pour le service descarrières jusqu'au pied de la montagne, <strong>et</strong> les autres pour le transport sur le chemin de fer proprement dit. — Ce chemin de fer, qui devait se terminerparallèlement au quai de l'Est <strong>du</strong> bassin <strong>du</strong> commerce, ne pouvait avoir pour axe une seule ligne droite : afin d'éviter les courbes trop brusques, on atracé tout son développement, à l'exception de la portion qui se prolonge sur le quai, suivant un axe de cercle de 350 m. de rayon moyen. Sa pente estde 0 m. 003 par mètre. Il est à double voie sur tout son développement. La largeur de chaque voie est de 1 m. 50, mesurés en dehors des rails. Cellede l'intervalle qui les sépare est également de 1 m. 50 m., <strong>et</strong> celle des accotements de 1 m. 25 ; le chemin a par conséquent une largeur totale de 7m. ; sa longueur est de 615 m. — Aux extrémités <strong>du</strong> chemin, les deux voies se réunissent en une seule, par une courbe de raccordement composéede deux arcs de cercle opposés ; de sorte que les chariots vides ou chargés peuvent facilement passer d'une voie sur l'autre, au moyen de barresmobiles qui se déplacent à volonté. — Puisque la <strong>du</strong>rée de ce chemin n'est que temporaire, sa construction n'a dû être que provisoire ; les railsconsistent donc simplement dans des barres de fer forgé de 0 m. 05 c. de largeur sur 0 m. 03 c. d'épaisseur, clouées bout à bout sur des longrines enbois de chêne de 0 m. 20 de hauteur sur 0 m. 15 de largeur. De deux en deux mètres, ces longrines sont fixées sur des traver<strong>ses</strong> enfoncées dans l<strong>et</strong>errain, <strong>et</strong> par un taqu<strong>et</strong> placé sur chaque face, pour empêcher le déversement.Les p<strong>et</strong>its camions à deux roues qui transportent les pierres des carrières à l'origine <strong>du</strong> chemin de fer, sont chargés au[p. 244]moyen de virevauts placés sur leur avant. Le peu de diamètre des roues <strong>et</strong> la pente <strong>du</strong> sol donnent à ces camions une position presque horizontalelorsqu'on les fait basculer, ce qui rend la main-d'oeuvre de charge beaucoup plus prompte <strong>et</strong> plus facile qu'avec les anciens camions dont les rouesétaient fort grandes. Deux ou trois chevaux, attelés à ces p<strong>et</strong>its chariots, con<strong>du</strong>isent jusqu'au pied de la rampe <strong>et</strong> le long d'un mur de soutènement, despoids de 4,000 à 4,500 kil. Là, au moyen de grues, manoeuvrées chacune par trois hommes au plus, les blocs passent horizontalement sur les grandschariots qui parcourent le chemin de fer. Les roues de ces derniers sont en fer fon<strong>du</strong>, <strong>et</strong> pèsent moyennement 125 kil. : elles font corps avec le<strong>ses</strong>sieux <strong>et</strong> ont leurs rebords placés en dehors de la voie. — Lorsque les chariots sont arrivés au point d'embarquement, ils s'arrêtent sous unéchafaudage en charpente, faisant saillie sur le bassin <strong>et</strong> portant un treuil à engrenage qui soulève les blocs <strong>et</strong> les con<strong>du</strong>it horizontalement au-dessusde l'écoutille <strong>du</strong> bateau qui doit les recevoir. Deux hommes suffisent pour c<strong>et</strong>te manoeuvre.Les carrières <strong>du</strong> Roule fournissent aussi <strong>du</strong> moellon qui est également transporté par le chemin de fer. Des cais<strong>ses</strong> à fond mobile, portant chacuneun mètre massif, ou 2,600 kil., sont employées à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>. La charge sur les chariots <strong>et</strong> l'embarquement à bord des navires, s'effectuent à très-peu decho<strong>ses</strong> près comme pour les blocs.Ce chemin a été entrepris en 1830 <strong>et</strong> terminé en 1833. Il a coûté 140,000 fr. de dépense première.PORT DU BECQUET.Le port <strong>du</strong> Becqu<strong>et</strong> étant, comme le chemin de fer une annexe de la Digue, sa description terminera ce que nous avions àdire de ce monument.Il est situé à 5 kilomètres dans l'E. de <strong>Cherbourg</strong>, parallèlement à la côte, entre deux rochers appelés les Becqu<strong>et</strong>s. Ondoit sa formation aux travaux de la Digue :[p. 245]dès les premiers temps de c<strong>et</strong>te vaste entreprise, la montagne schisteuse <strong>du</strong> Becqu<strong>et</strong>, par sa nature, sa situation <strong>et</strong> songrand développement, fut considérée comme un point d'exploitation très important, <strong>et</strong> ce fut pour faciliter l'embarquement desmatériaux extraits des carrières qu'on se proposait d'y ouvrir, que la marine, en 1783 <strong>et</strong> en 1784, fit agrandir <strong>et</strong> fermer pardeux digues à pierres sèches le hâvre le plus rapproché <strong>du</strong> centre des travaux.Les revêtements extérieurs de ces digues ne purent résister au choc des vagues, <strong>et</strong>, moins de deux ans après, ils étaientdétruits en totalité. On leur substitua une estacade en charpente que les vers attaquèrent <strong>et</strong> qui n'eut également qu'une courte<strong>du</strong>rée. Lors de la reprise des travaux, en l'an XI, les pierres poussées par la mer avaient comblé le port ; on le déblaya <strong>et</strong> l'onrétablit la digue de l'O. partie en p<strong>et</strong>ites pierres, <strong>et</strong> partie en gros blocs, ainsi que l'avait proposé la commission de 1792.Aujourd'hui il est circonscrit de murs de quai, construits à pierres sèches, posées de champ, <strong>et</strong> protégé <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> largepar une digue ou j<strong>et</strong>ée à pierres per<strong>du</strong>es, revêtue en blocs. Il a environ 200 m. de longueur, 40 m. de largeur <strong>et</strong> 12,500 m. desuperficie ; <strong>ses</strong> murs de quai présentent un développement de 550 m. La mer n'y atteint jamais à une grande hauteur ; maisles bateaux à pierres qui le fréquentent ne tirent moyennement que 2 m. d'eau. Il peut recevoir 30 de ces navires.[p. 246]A 500 m. <strong>du</strong> port, vers le S., on voit un vaste établissement élevé à l'époque des premiers travaux pour servir au logementdes militaires employés à l'extraction de pierres. Il se compose d'un corps de bâtiments principal, où 500 hommes ont puhabiter, <strong>et</strong> de deux bâtiments détachés qui en forment les dépendances. Depuis la révolution c<strong>et</strong>te caserne n'a été occupéequ'un moment, pendant les Cent Jours, par des hommes de levées. Elle est actuellement dans un état compl<strong>et</strong> d'abandon.On remarque aussi, en face de la passe, un établissement créé de 1785 à 1790, par les anciens entrepreneurs chargésdes exploitations, <strong>et</strong>, entre le port <strong>et</strong> les chantiers des pierres, un pavillon isolé, construit pour les ingénieurs auxquels était


confiée la direction <strong>du</strong> travail.Il y a au Becqu<strong>et</strong> plusieurs aiguades très abondantes qui fournissent toute l'eau douce consommée à la Digue.Le commerce de ce port est absolument nul <strong>et</strong> il ne s'y fait aucun armement. Ce n'est qu'un port de circonstance qui tienttoute son activité des travaux de la rade. — Le cube des pierres, blocs <strong>et</strong> moellons, qui s'y sont embarqués en 1838, est de12,900 m. environ.Les pierres de granit qui composent les revêtements des maconneries de la Digue sont tirées, partie de la côte deFermanville, à 3 lieues dans l'E. de[p. 247]<strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> partie de la côte de Flamanville, à 5 lieues environ dans le S.-O.FORTS DE LA RADE.La rade est en ce moment défen<strong>du</strong>e par trois forts permanens : le Fort de l'île Pelée, le Fort <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong> <strong>et</strong> celui deQuerqueville. Nous avons déjà dit en quelles circonstances les deux premiers ont été entrepris. (V. page 211). Le travail se fitd'abord par régie ; on crut devoir ensuite employer le mode plus économique de l'entreprise, <strong>et</strong> les ouvrages restant àexécuter furent passés en adjudication au mois d'août 1782. — Le Fort de l'île Pelée a été achevé en 1784 <strong>et</strong> le Fort <strong>du</strong>Homm<strong>et</strong> en 1785. — Lors de son voyage à <strong>Cherbourg</strong>, en 1786, Louis XVI avait reconnu la nécessité d'établir un troisièmefort, sur la pointe de Querqueville ; peu de temps après il en approuva la construction. C<strong>et</strong> ouvrage, commencé en 1787, futporté à un haut degré d'avancement en 1788 ; on continua d'y travailler jusque vers 1794 : il est resté imparfait.Ces trois forts, en pierre de taille de granit, sont d'un genre de construction uniforme <strong>et</strong> absolument <strong>nouveau</strong> [101].FORT DE L'ILE PELÉE.Le Fort de l'île Pelée a été bâti sur un rocher qui tenait encore en 1560 à la terre ferme, ainsi que le[p. 248]prouvent d'anciens manuscrits, mais que les envahissements de la mer en ont éloigné successivement davantage, <strong>et</strong> qui s'entrouve aujourd'hui à 2,900 m. environ. Ce roc était couvert de terre végétale <strong>et</strong> l'on voit même qu'il y avait des prairies où leshabitants de Tourlaville menaient paître leurs troupeaux. — Au milieu <strong>du</strong> XVII e siècle, la mer, en baissant, se r<strong>et</strong>irait assezpour que l'on pût s'y rendre à pied sec. — Un siècle après, il fallait se servir d'un cheval, mais la distance entre l'île <strong>et</strong> le rivagen'était encore que de 12 à 1300 mètres. La mer paraît maintenant rester stationnaire sur ce point de la côte.Ce fut l'ingénieur Ricard qui, en 1777, dressa le plan <strong>du</strong> fort de l'île Pelée ; M. Decaux ne fit que le modifier l'annéesuivante. — La première enveloppe est casematée <strong>et</strong> percée de 37 embrasures ; le fort intérieur, également vouté àl'épreuve, se compose d'un rez-de-chaussée, destiné au logement de la garnison, d'un étage percé de 22 embrasures, quidominent l'enveloppe, <strong>et</strong> d'une plate-forme à ciel découvert, propre à recevoir 20 pièces de canon <strong>et</strong> 14 mortiers. — Lespièces sont <strong>du</strong> plus gros calibre <strong>et</strong> pourraient tirer à boul<strong>et</strong>s rouges, chauffés au moyen d'un fourneau à reverbère.Ce fort a pour mission principale de défendre la passe de l'E., <strong>et</strong> il remplit parfaitement son obj<strong>et</strong>. — L'escalade en estregardée comme impossible : l'eau n'est pas assez profonde pour que des vaisseaux puissent l'approcher <strong>du</strong> côté de l'E. oupénétrer dans la[p. 249]rade ; il ne pourrait être bloqué que <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> large, à une grande distance, <strong>et</strong> sous le feu de <strong>ses</strong> batteries.Dans les dernières années de la révolution, le directoire y incarcéra plusieurs condamnés politiques. Le premier dont il soitfait mention, est le baron Dézoteux de Cormatin, major-général des armées vendéennes, qui y resta plus de quatreannées. — Il eut pour compagnon de captivité Barthelémy Porta, jeune homme de 21 ans, dont le nom véritable n'a jamaisété connu. Pris dans la Manche, sur un navire anglais, il fut d'abord considéré comme prisonnier de guerre ; condamnéensuite à la déportation comme émigré, <strong>et</strong> dirigé sur Rochefort, il s'échappa aux <strong>environs</strong> d'Hédé. — Le 14 messidor an V (2juill<strong>et</strong> 1797), Vadier, ancien président <strong>du</strong> comité de sûr<strong>et</strong>é générale, Buonarotti, célèbre babouviste, mort en 1837, Germain,ex-officier de cavalerie, Cazin, Moroy <strong>et</strong> Blondeau, qui tous étaient condamnés à la déportation pour avoir pris part à laconspiration de Gracchus-Baboeuf, arrivèrent à <strong>Cherbourg</strong> dans une cage grillée <strong>et</strong> furent détenus au fort : Vadier, jusqu'au


23 septembre 1799, <strong>et</strong> les cinq autres, jusqu'au 11 avril 1800, époque de leur translation à l'île d'Oléron [102].En 1786, Louis XVI avait baptisé c<strong>et</strong>te forteresse <strong>du</strong> nom de Fort-Royal, qu'elle quitta sous la République pour celui deFort-National. Elle s'appelait Fort-Impérial,[p. 250]lorsque les Bourbons lui restituèrent sa première dénomination.FORT DU HOMMET.Ce fort, situé sur un rocher nommé le Homm<strong>et</strong>, est presque à la même distance <strong>du</strong> fort de l'Ile-Pelée <strong>et</strong> <strong>du</strong> fort deQuerqueville. Il se compose de deux rangs de casemates à l'épreuve qu'on pourrait armer de 52 pièces <strong>du</strong> plus gros calibre,tirant à boul<strong>et</strong>s rouges, <strong>et</strong> d'une plate-forme disposée pour recevoir 23 autres pièces, non compris les mortiers. L'enceinteintérieure où sont les casernes, les magasins à poudre <strong>et</strong>c., est séparée de l'enveloppe par un fossé que l'on traverse sur unpont-levis.Il se trouve à la haute mer entièrement entouré d'eau : on y arrive par une chaussée en granit de 214 m. de longueur <strong>et</strong> de13 m. de largeur. C<strong>et</strong>te communication a une plate-forme <strong>et</strong> un parap<strong>et</strong> <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> N., de sorte qu'elle forme une très-grandebatterie où des canons <strong>et</strong> des mortiers seraient avantageusement installés : elle battrait même plus directement la partie O.de la rade que le fort lui-même ne pourrait le faire (V. LE RAPPORT cité ci-dessus).« L'emplacement <strong>et</strong> le tracé de ce fort, dit M. Cachin, avaient été déterminés dans un tems où les propriétés de la radeétaient encore inconnues. Si l'on eût prévu dès le principe l'extension que l'on devait donner à la rade, on eût sans douteassigné à c<strong>et</strong>te forteresse une forme <strong>et</strong> une position différentes, néanmoins[p. 251]dans son état actuel, elle protège l'anse Sainte-Anne, <strong>et</strong> elle repousserait efficacement l'ennemi s'il tentait de s'intro<strong>du</strong>ire dansla rade par la passe de l'O. » Comme celle de l'Ile-Pelée, elle a eu diver<strong>ses</strong> dénominations. On l'appela Fort-d'Artois lorsquele prince de ce nom la visita en 1786. Elle devint Fort de la Liberté sous la République. La Restauration lui rendit le nom deFort-d'Artois qu'elle a de <strong>nouveau</strong> per<strong>du</strong> en 1830 pour reprendre celui qu'elle doit à sa position.FORT DE QUERQUEVILLE.Il avait été proj<strong>et</strong>é sur des dispositions analogues à celles des deux forts dont il vient d'être question. Comme eux,composé d'une première enveloppe casematée <strong>et</strong> d'un fort intérieur à deux étages couronné d'une plate-forme, il devait être àtriple batterie. Mais par suite des sondes faites en 1789, la largeur de la passe de l'O. ayant été considérablementaugmentée, les batteries intérieures ne pouvaient plus remplir aussi bien l'obj<strong>et</strong> que l'on avait en vue <strong>et</strong> la construction en futabandonnée. Aujourd'hui il consiste en une grande batterie circulaire casematée de 315 m. 75 de développement intérieur,armée de 46 pièces de canon, qui, au moyen de trois fourneaux à réverbère, pourraient tirer à boul<strong>et</strong>s rouges. Aux extrêmitésE. <strong>et</strong> O. de c<strong>et</strong>te enveloppe se trouvent deux branches portant tout à la fois batterie vers la terre <strong>et</strong> vers la mer ; de ce derniercôté il y a place[p. 252]pour 26 pièces de canon <strong>et</strong> 18 mortiers. Ces 90 bouches à feu battent depuis l'anse Ste-Anne dans l'intérieur de la rade à l'E.jusque dans l'anse de Nacqueville, en dehors de la rade à l'O. — Divers ouvrages de fortification protègent la gorge de labatterie <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> S. <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te forteresse se trouve ainsi remplir un obj<strong>et</strong> très important pour la défense de <strong>Cherbourg</strong> parterre. — L'emplacement que le proj<strong>et</strong> de 1786 avait affecté au fort intérieur est occupé par un corps de caserne achevé dansla moitié de son éten<strong>du</strong>e seulement.Ces trois ouvrages seraient sans doute suffisans pour défendre l'entrée de la rade <strong>et</strong> protéger le mouillage des navires.Cependant l'armement de la partie centrale <strong>et</strong> de deux musoirs de la Digue ne devrait point être regardé comme unesuperfluité lors même qu'il n'aurait pour but que d'ôter à l'ennemi jusqu'à la pensée d'une tentative. En eff<strong>et</strong>, s'exposer auxfeux croisés d'aussi formidables batteries serait une entreprise d'une témérité folle, <strong>et</strong> si jamais une force navale quelconqueosait l'exécuter, nul doute qu'elle ne fût au même instant foudroyée, anéantie.BALISES.Les extrémités E. <strong>et</strong> O. de la branche de la Digue ne sont en ce moment indiquées que par de simples flotteurs. Lesgraves inconvénients qui peuvent résulter de c<strong>et</strong> état de cho<strong>ses</strong> font désirer la prompte


[p. 253]construction des musoirs, dont la masse saillante au-dessus des vagues sera une excellente vigie que les navigateurspourront toujours apercevoir de jour <strong>et</strong> même de nuit, au moyen d'un feu pareil à ceux <strong>du</strong> fort de l'Ile-Pelée. — La balise deforme pyramidale, en maçonnerie, établie sur les rochers en avant de la place d'Armes, a été élevée en 1833, pour indiqueraux bâtiments la position des premières roches de l'Ile-Pelée. Elle a 11 m. 60 de hauteur.[p. 254]2° PORT MILITAIRE ET DÉPENDANCES& nbsp; Ce n'était pas assez pour <strong>Cherbourg</strong> d'avoir une rade sûre, protégée contre les tempêtes <strong>et</strong> contre l'ennemi par uneDigue puissante ; sa position centrale, unique, audacieuse dans la Manche, exigeait qu'il fût doté d'un Port-Militaire, muni d<strong>et</strong>ous les établissements nécessaires pour le radoub, la construction <strong>et</strong> l'armement des vaisseaux, frégates <strong>et</strong> corv<strong>et</strong>tes. —C'est de c<strong>et</strong>te oeuvre colossale que l'on s'occupe depuis trente-six années. Il a déjà été beaucoup fait : — un avant-port, unbassin à flot, quatre cales couvertes pour la construction des vaisseaux, un magnifique hangar aux bois, un atelier des forgesavec <strong>ses</strong> accessoires, offrent d'immen<strong>ses</strong> ressources à la Marine ; — mais il reste encore beaucoup plus à faire, <strong>et</strong> trente-sixnouvelles années seront peut-être insuffisantes pour compléter <strong>et</strong> porter à sa perfection c<strong>et</strong> arsenal maritime, qui, on peut ledire, n'aura alors d'égal nulle part.Fidèles à la marche que nous avons suivie jusqu'ici, nous allons d'abord j<strong>et</strong>er un coup d'oeil sur les années antérieures àl'entreprise des travaux, ensuite nous nous occuperons de l'historique <strong>et</strong> de la description de chacun des établissements dontla Marine dispose en ce moment.L'Angl<strong>et</strong>erre possède dans la Manche plusieurs ports naturels, accessibles aux plus forts vaisseaux ; la France aucontraire, moins favorablement traitée,[p. 255]n'y a que des ports de marée où les p<strong>et</strong>its navires seuls peuvent aborder. Ce grave inconvénient s'est fait sentir dans tous lestemps, <strong>et</strong> bien avant l'entreprise des travaux de la rade on avait songé à employer les moyens de l'art pour y remédier. — Dèsla fin <strong>du</strong> XVII e siècle, Vauban avait rédigé plusieurs mémoires pour démontrer les avantages de la position de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> leRoi, sur son avis, avait ordonné d'y creuser un port propre à recevoir les plus forts vaisseaux de la Marine royale.L'emplacement désigné à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> était la fosse <strong>du</strong> Gal<strong>et</strong>, où une prairie, connue depuis sous le nom de pré <strong>du</strong> Roi, fut mêmealors ach<strong>et</strong>ée. On prit des mesures, on sonda les terrains [103] ; mais, comme nous l'avons dit précédemment, l'exécutiondes proj<strong>et</strong>s <strong>du</strong> célèbre maréchal fut presque aussitôt abandonnée qu'entreprise. — La perte de nos vaisseaux après lecombat de la Hougue, nos guerres maritimes avec l'Angl<strong>et</strong>erre sous Louis XV, purent bien rappeler l'attention <strong>du</strong>gouvernement sur <strong>Cherbourg</strong>, mais non en faire reprendre les travaux.C<strong>et</strong>te gloire était reservée à Louis XVI. — Si les travaux de la Digue précédèrent la construction de l'avant-port militaire, cen'est pas que l'on regardât c<strong>et</strong> établissement comme d'une utilité secondaire ; mais l'on était dans c<strong>et</strong>te idée qu'une radefermée[p. 256]présenterait à beaucoup d'égards, pour le moment <strong>du</strong> moins, les mêmes avantages qu'un port, <strong>et</strong> qu'un port sans rade ferméene pourrait remplir l'obj<strong>et</strong> que l'on avait en vue. On ajourna donc le creusement <strong>du</strong> port.Lorsque la révolution éclata, un siècle de prodigalités <strong>et</strong> de déprédations avait épuisé les finances ; force fut de suspendr<strong>et</strong>oute espèce de travaux publics, <strong>et</strong> ceux de <strong>Cherbourg</strong> eurent le sort commun. Loin que le gouvernement les mit en oubli, onsait (V. page 222.) qu'ils firent l'obj<strong>et</strong> d'une loi spéciale, portant qu'il serait formé une commission chargée de proposer toutesles constructions nouvelles qu'elle jugerait utiles. Une instruction <strong>du</strong> ministre de la marine indiquait, comme un des points dontil fallait s'occuper plus particulièrement, l'établissement d'un port-bassin entre le fort <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong> <strong>et</strong> celui <strong>du</strong> Gal<strong>et</strong>. Et nousvoyons, en eff<strong>et</strong>, qu'outre l'achèvement de la Digue <strong>et</strong> <strong>du</strong> port de commerce, la fortification de la ville <strong>et</strong> des hauteurs, lesproj<strong>et</strong>s de la commission comprennent la création d'un port militaire dans l'anse <strong>du</strong> Gal<strong>et</strong>. — Ce ne fut toutefois qu'en 1803,cinq mois après la reprise des travaux de la Digue, qu'un arrêté des consuls, ainsi conçu, ordonna la construction immédiated'un port militaire :Saint-Cloud, 25 germinal an XI (15 avril 1803).Le gouvernement de la République arrête ce qui suit :


Article 1 er . Il sera construit dans la rade de <strong>Cherbourg</strong> un avant-port <strong>et</strong> un bassin capables de contenir 12 vaisseaux de[p. 257]guerre avec un nombre proportionné de frégates, <strong>et</strong> trois formes de construction.Art. 2. Les travaux seront con<strong>du</strong>its de manière qu'avant le 1 er vendemiaire an XII, on ait fait des travaux pour au moins un million.Art. 3. La garnison de <strong>Cherbourg</strong> sera portée à 3,000 hommes pour fournir les travailleurs nécessaires.Art. 4. Tout sera disposé de manière que l'on puisse, lorsqu'on le jugera convenable, compléter ce port en construisant l'arrière-bassin <strong>et</strong> le m<strong>et</strong>tredans le cas de contenir 25 vaisseaux de ligne.Art. 5. Le ministre de la guerre fera faire par le génie les proj<strong>et</strong>s de fortifications nécessaires pour m<strong>et</strong>tre le port à l'abri de l'ennemi ; il soum<strong>et</strong>traces proj<strong>et</strong>s au gouvernement dans le courant de fructidor prochain.L'emplacement de l'avant-port <strong>et</strong> <strong>du</strong> bassin à flot fut sur-le-champ reconnu <strong>et</strong> répéré. Les travaux d'excavation,commencés le 26 floréal (16 mai), se poursuivirent avec c<strong>et</strong>te activité impatiente que Napoléon imprimait à toutes <strong>ses</strong>entrepri<strong>ses</strong>. De tous les points de la France, des appels avaient été faits aux ouvriers <strong>et</strong>, à mesure qu'ils se présentaient, ilsétaient dirigés sur les lieux aux frais <strong>du</strong> gouvernement. Un grand nombre de travailleurs volontaires, pris dans les demibrigadesde la garnison, s'honorèrent, à l'exemple des soldats romains [104] de concourir à l'accomplissement d'une oeuvreque nos dernières guerres avec l'Angl<strong>et</strong>erre fesaient regarder comme vraiment nationale.L'intérêt que le premier consul avait porté aux ouvrages[p. 258]de <strong>Cherbourg</strong> leur fut conservé par l'empereur, <strong>et</strong> même ils devinrent un des obj<strong>et</strong>s tout particuliers de sa sollicitude. — En1809, huit mille prisonniers espagnols furent envoyés à <strong>Cherbourg</strong> pour travailler au port ; ce sont eux qui ont élevé lesremparts qui protègent encore aujourd'hui l'enceinte. — En 1810, l'amiral Decrès, ministre de la marine, vint inspecter lestravaux. — L'année suivante, l'empereur voulut les voir par lui-même <strong>et</strong> entra à <strong>Cherbourg</strong>, le 26 mai, accompagné del'impératrice.Cependant le Port-Napoléon ne possédait à c<strong>et</strong>te époque aucun des établissements qui composent un grand arsenalmaritime ; excepté deux cales de construction, récemment exécutées dans l'anse Chantereyne, l'avoir se bornait à quelquesbâtiments provisoires, maçonnés avec de la terre ou construits à pierres sèches. A la veille, pour ainsi dire, de l'achèvementde l'avant-port, il était devenu urgent de s'occuper des accessoires sans lesquels ce bassin n'eût pu rendre tous les servicesque l'on s'en était promis. Un proj<strong>et</strong> dressé en conséquence par M. Cachin, avait été soumis à l'examen <strong>du</strong> gouvernement <strong>et</strong>les travaux de l'Arsenal permanent étaient commencés depuis le 16 mai, lorsque Napoléon arriva sur les lieux. — Suspen<strong>du</strong>sà la Restauration, repris plusieurs années après, ces travaux se continuent aujourd'hui, <strong>et</strong> quelques changements qu'ilsurvienne désormais dans la forme <strong>du</strong> gouvernement, tout porte à croire qu'ils n'auront plus à souffrir d'interruption.Une ordonnance royale <strong>du</strong> 29 juin 1837 a fixé les[p. 259]limites de la nouvelle enceinte qui s'étend bien au-delà des anciens remparts ; une autre ordonnance, <strong>du</strong> 15 août 1838, aprescrit d'entreprendre immédiatement le tracé de c<strong>et</strong>te enceinte, <strong>et</strong> déjà la clôture définitive destinée à séparer les propriétésde la marine de celles de la guerre est en cours d'exécution. Le génie militaire lui-même ne tardera pas non plus àentreprendre les ouvrages de défense qui doivent envelopper les établissements compris dans la délimitation actuelle.Le nouvel arsenal ne renferme encore en établissements civils définitifs que les quatre bâtiments qui recouvrent les calesde construction au S. de l'avant-port, les ateliers des forges, des machines, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong> le hangar aux bois : tous les autres sontprovisoires <strong>et</strong> n'ont été élevés que dans le but de satisfaire aux besoins les plus pressants des divers services ; ils serontsuccessivement abandonnés <strong>et</strong> remplacés par des constructions en harmonie avec l'importance <strong>du</strong> port. — Depuis 1830,plusieurs proj<strong>et</strong>s de distribution générale ont été adressés au ministre de la marine ; mais comme il n'y a encore rien de statuéà leur égard, nous n'avons pu en prendre connaissance. Les établissements qu'il conviendrait d'entreprendre le plusprochainement, sont la gare <strong>et</strong> la halle de mâture, le magasin aux câbles <strong>et</strong> la garniture <strong>et</strong> dépendances. Ce dernier, qu'on sepropose de placer sur le terre-plein ménagé entre l'avant-port, le bassin à flot <strong>et</strong> l'arrière-bassin, sera commencé en 1840.[p. 260]


Les ouvrages hydrauliques, exécutés au Port-Militaire jusqu'au commencement de 1839, ont coûté 25,500,000 f. 00Et les établissements civils permanents 1,500,000 f. 00 27,000,000 f. 00La dépense restant encore à faire pour compléter les ouvrages hydrauliques est estimée à 21,000,000 f. 00Et pour compléter les établissements civils, à 22,000,000 f. 00 43,000,000 f. 00De manière que l'arsenal entièrement terminé, aura exigé une dépense de 70,000,000 f. 00AVANT-PORT.Conformément à l'arrêté des consuls <strong>du</strong> 25 germinal an XI, tout étant disposé, les travaux d'excavation de l'avant-portfurent commencés le 26 floréal suivant. C<strong>et</strong>te entreprise présentait d'immen<strong>ses</strong> difficultés [105] ; grace aux lumières <strong>et</strong> àl'active surveillance des ingénieurs chargés de la diriger, elles furent toutes vaincues ; <strong>et</strong> dix ans après, ce bassin[p. 261]creusé à 17 m. 85 de profondeur [106], <strong>et</strong> circonscrit de murs de quai <strong>du</strong> plus beau granit, était prêt à recevoir les eaux de lamer. Il a 291 m. 66 de longueur, de 236 m. 72 à 202 m. 08 de largeur [107] <strong>et</strong> 67,957 m. 81 de superficie. Il communique avecla mer par un chenal qui lui est perpendiculaire, <strong>et</strong> dont la largeur varie de l'E. à l'O. de 63 m. 75 à 100 m. L'ouverture de c<strong>et</strong>tepasse est indiquée par deux môles qui, pendant la guerre, ont été garnis de pièces d'artillerie, <strong>et</strong> que l'on a dû surmonter l'und'un phare, l'autre d'un sémaphore ou télégraphe maritime.[p. 262]Il fut décidé que l'impératrice assisterait à l'immersion de l'avant-port : elle arriva à <strong>Cherbourg</strong> le 25 août 1813. Dès le 23,deux boîtes en chêne, recouvertes en plomb, renfermant toutes les pièces de monnaies françai<strong>ses</strong> en circulation <strong>et</strong> 80médailles en bronze <strong>du</strong> règne de l'empereur, avaient été, en présence <strong>du</strong> ministre de la marine, déposées <strong>et</strong> scellées dansdeux fos<strong>ses</strong> taillées dans le roc, l'une en face de la passe, l'autre en avant de la forme. On y avait placé en outre une plaqueen platine portant les dates de l'entreprise <strong>et</strong> de l'achèvement <strong>du</strong> port, les noms de l'empereur <strong>et</strong> de l'impératrice <strong>et</strong> ceux desgrands officiers qui avaient dirigé les travaux. — Le 26, Marie-Louise descendit au fond <strong>du</strong> bassin, <strong>et</strong> le parcourut en toutsens. Le sol n'en devait plus être foulé : elle s'était à peine r<strong>et</strong>irée, qu'une nappe d'eau d'un pied de profondeur le couvrit danstoute son éten<strong>du</strong>e. Quoique la grande immersion ne fût annoncée que pour le lendemain, on travailla aussitôt à la destruction<strong>du</strong> batardeau ou digue qui fermait l'entrée <strong>du</strong> bassin à la mer. — Ce bel ouvrage, dont les savantes dispositions fesaientl'admiration de tout le monde, « était principalement composé de deux longs bateaux ou caissons parallèles entre lesquelsavait été placé un grand massif de terre glaise qui reposait sur le fond même de la mer. » [108] Il avait 64 m. de longueur, 27m. 30 c. de largeur à la base, 14 m. 30 c. de largeur au somm<strong>et</strong> <strong>et</strong> 13 m. de hauteur.[p. 263]Monté dans l'intérieur de l'avant-port <strong>et</strong> ren<strong>du</strong> flottant au moyen de deux longues cais<strong>ses</strong>, il avait été con<strong>du</strong>it au lieu de sadestination <strong>et</strong> immergé le 3 septembre 1807, en une seule marée. Sa solidité était telle qu'il soutint <strong>du</strong>rant six années lesefforts des plus violentes tempêtes. — La charpente n'en fut point attaquée sur toute sa longueur : on pratiqua seulement versle centre trois ouvertures principales par lesquelles la mer devait pénétrer.Le 27, ce spectacle attira au port militaire plus de vingt-cinq mille personnes de tout rang, de toutes clas<strong>ses</strong>, groupéesdans toutes les directions <strong>et</strong> attendant avec impatience l'heure de la haute mer. Le peintre Crépin était chargé de l'exécutiondes points-de-vue que la rade <strong>et</strong> le port devaient offrir en c<strong>et</strong>te circonstance. — Le pavillon de l'impératrice, orné deguirlandes <strong>et</strong> de trophées, avait été dressé sur le quai de l'Est, près <strong>du</strong> chenal. Sur le même rang s'élevait une tente pour lespersonnes de la cour <strong>et</strong> les membres des diver<strong>ses</strong> administrations ; à l'opposite, deux tentes avaient été également disposéespour les étrangers de distinction <strong>et</strong> les notables de la ville. — Maintenant laissons à M. P. Lair, témoin occulaire, le soin denous r<strong>et</strong>racer les événements qui marquèrent la fin de c<strong>et</strong>te mémorable journée :« Les ouvriers avaient cessé de travailler, <strong>et</strong> au milieu de ce concours prodigieux de spectateurs il régnait un silence profond, vraiment imposant.Sur les cinq heures <strong>du</strong> soir, lorsque la mer fut parvenue à une certaine hauteur, on la vit tout à coup entrer à travers les trois ouvertures pratiquées à ladigue.[p. 264]« Pendant ce temps l'impératrice arrivait, <strong>et</strong> sa présence fut annoncée par les fanfares d'une musique guerrière <strong>et</strong> des salves multipliées d'artillerie.Les cris de joie se confondirent long-temps avec le bruit des batteries. S. M. se plaça dans le pavillon qui lui avait été préparé. Alors M. l'évêque deCoutances, environné de son clergé, s'avança vers elle <strong>et</strong> lui adressa un discours analogue à la circonstance. Après le cérémonial <strong>et</strong> les prièresd'usage, il se tourna <strong>du</strong> côté de l'avant-port <strong>et</strong> bénit c<strong>et</strong> ouvrage des hommes. »« .... Cependant la mer montait de plus en plus. Une triple cascade tombant d'une grande hauteur, jaillissait en forme de nappe, à travers la digue.Déjà une filtration connue sous le nom de Renard, qu'on n'avait pu arrêter pendant tout le cours des travaux, ne semblait comparativement qu'un


courant très-faible. »« .... Un magnifique spectacle se préparait. Un grand nombre de lampions avaient été allumés <strong>et</strong> placés sur plusieurs rangs dans le batardeau. Onavait mis le long <strong>du</strong> bassin beaucoup de pots à feu remplis de goudron enflammé. La mer continuait de monter <strong>et</strong> de prendre de la force. Il était neufheures <strong>du</strong> soir, lorsque tout à coup nous entendîmes un bruit effrayant venant <strong>du</strong> batardeau. Après un craquement épouvantable <strong>et</strong> une secousseviolente qui <strong>du</strong>rèrent quelques minutes, nous vîmes le centre <strong>du</strong> batardeau se briser en éclats <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> bassin. Alors la mer, s'ouvrant un largepassage, entra comme un torrent impétueux... ; nous nous étions approchés des parties <strong>du</strong> batardeau restées intactes, <strong>et</strong> nous les sentîmes tremblersous nos pieds. Le bruit pro<strong>du</strong>it par l'entrée rapide de l'eau de la mer continuait. De temps en temps il se faisait des déchirements dans la charpente, <strong>et</strong>il s'en détachait de gros<strong>ses</strong> pièces de bois avec un fracas horrible. La lumière vive des lampions <strong>et</strong> des pots-à-feu avait remplacé celle <strong>du</strong> jour, <strong>et</strong> nousfaisait paraître les eaux qui entraient en écumant, tantôt argentées <strong>et</strong> blanchâtres comme la neige, tantôt rouges comme <strong>du</strong> feu selon la différence desrefl<strong>et</strong>s. C<strong>et</strong>te scène était extraordinaire. Il est difficile d'en concevoir de plus belle..... Ce spectacle attachant <strong>du</strong>ra dans toute sa beauté, <strong>et</strong> l'eau de lamer continua d'entrer avec la même violence pendant une demi-heure, intervalle qui suffit pour achever de remplir le bassin, malgré son immenseéten<strong>du</strong>e. »[p. 265]<strong>Cherbourg</strong> était enfin doté d'un port militaire. Le premier navire qui y entra fut le Zélandais, vaisseau de 80 canons, lancéle 12 octobre suivant. Il fut suivi, moins d'un mois après, <strong>du</strong> Duguay-Trouin, vaisseau de 74, l'un <strong>et</strong> l'autre construits sur lescales Chantereine.C<strong>et</strong> avant-port ne doit être considéré que comme un lieu de stationnement pour les navires qui attendront leur admissiondans les bassins. Cependant, dans un moment de presse, on pourrait y amarrer six ou huit vaisseaux ou frégates. — Les plusforts vaisseaux y conservent moyennement 1 m. d'eau sous leur quille. On ne s'est pas aperçu en le visitant, il y a peud'années, avec la cloche à plongeur, qu'il s'y soit formé d'attérissements sensibles. — Le pourtour des murs de quai est garnid'organeaux <strong>et</strong> de canons d'amarrage. Plusieurs escaliers facilitent les mouvements des p<strong>et</strong>ites embarcations. C'est àl'escalier <strong>du</strong> quai Ouest que le <strong>du</strong>c de Berry <strong>et</strong> l'empereur don Pedro sont descen<strong>du</strong>s à leur arrivée à <strong>Cherbourg</strong> ; Charles X<strong>et</strong> la famille royale se sont embarqués dans l'angle N.-O. — L'avant-port <strong>et</strong> le chenal sont entièrement terminés. Lesdépen<strong>ses</strong> faites jusqu'à ce jour pour ces ouvrages s'élèvent à la somme de 16,618,906 f.BASSIN A FLOT.Le bassin à flot se trouve à la suite <strong>et</strong> au N. de l'avant-port, dont il est séparé par un terre-plein d'environ 39 m. de largeur.Sa longueur est également[p. 266]de 291 m. 66 ; mais il n'a que 217 m. 31 de largeur <strong>et</strong> 63,380 m. 63 de superficie. Commencé le 9 mai 1803 [109], les travauxs'en sont poursuivis plus ou moins activement jusqu'au 25 août 1829, époque de son ouverture.Elle eut lieu en présence de M. le <strong>du</strong>c d'Angoulême, grand amiral de France, arrivé à <strong>Cherbourg</strong> le 24 août. Ce prince serendit au Port-Militaire, le 25, vers midi, <strong>et</strong> descendit dans le bassin qu'il visita en détail. On le con<strong>du</strong>isit ensuite près de lafosse, creusée dans le roc sur l'axe de l'écluse de l'O., à 20 m. <strong>du</strong> pied <strong>du</strong> mur, <strong>et</strong> où devait être déposée une plaque enplatine, contenant l'inscription suivante :Charles X, roi de France <strong>et</strong> de Navarre, ayant permis que son nom fût donné au Port-Militaire de <strong>Cherbourg</strong>, l'ouverture de ce port a eu lieu le 25août 1829, en présence de son altesse royale monsieur le dauphin, fils de France, amiral de France. — ...... [110], ministre de la marine <strong>et</strong> descolonies ; M. Pouyer, préf<strong>et</strong> maritime ; M. Fouques Duparc, ingénieur en chef, directeur des travaux hydrauliques.C<strong>et</strong>te plaque fut présentée au Dauphin, par M. le Préf<strong>et</strong> maritime ; M. Duparc tenait la truelle, M. l'ingénieur Le Roux lemail <strong>et</strong> MM. Virla <strong>et</strong> Duparc fils, ingénieurs, portaient la jatte à mortier ; la boîte qui renfermait la plaque fut déposée dans lafosse par M. Le Chevalier, con<strong>du</strong>cteur principal des travaux. Le prince[p. 267]quitta ensuite le fond <strong>du</strong> bassin <strong>et</strong> se rendit sur le quai de l'Ouest, où un pavillon, élégamment décoré, lui avait été dressé. M.l'évêque de Coutances bénit le nouvel établissement, <strong>et</strong> le signal de l'immersion fut aussitôt donné. Deux voies s'ouvrirent à lamer, — les vannes de l'aque<strong>du</strong>c <strong>du</strong> N. <strong>et</strong> les pertuis <strong>du</strong> bateau-porte qui fermait l'écluse de communication à l'avant-port ; —mais elle ne faisait alors que commencer à remonter, <strong>et</strong> les chutes d'eau furent peu abondantes. Insensiblement ellesaugmentèrent, <strong>et</strong> au r<strong>et</strong>our de l'inspection que le dauphin était allé faire au fort <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>, le spectacle qu'elles présentaientétait devenu superbe. Les flots se précipitaient par torrents dans le nouvel asile qui leur était ouvert. On eût dit qu'ils étaienttourmentés d'une impatiente fureur. Et plus la mer montait, plus le bruit acquérait de force, plus l'écume devenaitblanchissante, plus les tourbillons de l'eau avaient de rapidité <strong>et</strong> de chocs. C'était à donner le vertige, tout le monde était saisi,transporté d'admiration ! — A cinq heures le fond <strong>du</strong> bassin était déjà recouvert d'une couche d'eau de 4 m. 40 de profondeur.


Ce ne fut que le lendemain matin, vers onze heures <strong>et</strong> demie, que le bateau-porte, cédant à une forte pression <strong>du</strong> dedansau dehors, se trouva subitement lancé dans l'avant-port. De ce moment il y eut libre communication entre les deux bassins.Le bassin à flot a la même profondeur que l'avant-port, 17 m. 85. Il peut recevoir 12,15 <strong>et</strong> même 18[p. 268]vaisseaux <strong>et</strong> frégates, selon qu'ils seraient amarrés, debout ou bord à quai. On estime à 4,872,873 f. les dépen<strong>ses</strong> faites poursa construction.ARRIÈRE-BASSIN.Si le port militaire n'avait pour destination unique que de servir à construire, armer <strong>et</strong> entr<strong>et</strong>enir un nombre plus ou moinsgrand de vaisseaux, frégates, corv<strong>et</strong>tes <strong>et</strong> autres bâtiments, l'avant-port <strong>et</strong> le bassin à flot ne laisseraient que peu à désirer ;mais par sa position dans la Manche, <strong>Cherbourg</strong> est bien plus spécialement appelé à servir de refuge ou de point derassemblement aux escadres qui, en tems de guerre, se trouveraient dans nos parages ou que les événements de la mer ycon<strong>du</strong>iraient. Or, les moyens dont on dispose aujourd'hui seraient loin alors d'être suffisants <strong>et</strong> vouloir s'y borner seraitrenoncer aux principaux avantages que l'on a toujours eus en vue, <strong>et</strong> perdre ainsi en partie le fruit des dépen<strong>ses</strong>considérables qui ont déjà été faites. Un deuxième bassin à flot est d'une nécessité absolue pour former le complément desressources. Le gouvernement actuel l'a compris comme ceux qui l'ont précédé, <strong>et</strong> par dépêche <strong>du</strong> 25 mai 1836, le ministre dela marine a donné l'ordre de procéder au tracé de c<strong>et</strong> arrière-bassin <strong>et</strong> d'en entreprendre immédiatement l'excavation.En conséquence, les premières carrières ont été ouvertes le 28 juin suivant, en présence de MM. les membres <strong>du</strong> conseild'administration <strong>du</strong> port ; <strong>et</strong> telle[p. 269]a été l'activité imprimée aux travaux d'exploitation qu'avant la fin de l'année on avait pu extraire 27,000 m. cubes de déblais,tant en terres qu'en pierres schisteu<strong>ses</strong>.L'arrière-bassin sera un rectangle de 400 m. de longueur N. <strong>et</strong> S. <strong>et</strong> de 180 m. [111] de largeur E. <strong>et</strong> O. Sa profondeur àpartir de l'arête des quais est fixée à 17 m. 86 c. Il s'étendra parallèlement aux quais O. de l'avant-port <strong>et</strong> <strong>du</strong> bassin à flot, dontil sera séparé par un terre-plein de 100 m. de largeur. Au sud seront cinq cales pour la construction des vaisseaux <strong>et</strong> à l'ouesttrois formes de radoub.Les travaux d'exploitation des carrières sont les seuls qui aient encore été entrepris ; une somme de 300,000 fr environ yest affectée chaque année. En mai 1839, la partie attaquée avait 148 m. de longueur <strong>et</strong> 171 m. de largeur, ce qui donne unesurface de 25,308 m. Les deux tiers de c<strong>et</strong>te surface étaient creusés à 8 m. de profondeur au-dessous <strong>du</strong> sol primitif ; le resten'était encore arrivé qu'à 4 m. La masse totale des déblais enlevés était de 168,000 m. cubes.Le terrain est généralement composé, jusqu'à 2 m. de profondeur, de terre meuble, de glaise <strong>et</strong> d'argile, ensuite vient unroc schisteux plus ou moins résistant. Ce sont d'abord des écalins, puis des moellons[p. 270]d'une qualité excellente <strong>et</strong> de superbes dalles. Parmi les couches que présente le schiste il n'est pas rare de rencontrer desmoellons d'une nature quartzeuse ; c'est c<strong>et</strong>te pierre, brisée en p<strong>et</strong>its morceaux, qu'on emploie à l'entr<strong>et</strong>ien des routes <strong>du</strong> portmilitaire. — Deux cents ouvriers, divisés en une quinzaine de brigades, sont occupés dans les différentes carrières.L'extraction se fait à la pioche, avec le secours de la mine. Les pro<strong>du</strong>its en sont enlevés au fur <strong>et</strong> à mesure par destombereaux, embarqués, en majeure partie, abord des bateaux à pierres qui les transportent en rade <strong>et</strong> versés sur la brancheO. de la Digue.Jusqu'ici les épuisements se sont faits au moyen de moulins-à-chapel<strong>et</strong>. Dans la belle saison trois de ces moulins, musdeux fois par jour, pendant quelques heures, suffisent pour maintenir à sec le fond des carrières ; mais l'hiver, à cause deseaux pluviales, il faut que la manoeuvre soit presque continuelle. Lorsque les filtrations seront plus abondantes on aura sansdoute recours à des machines mues par la vapeur.ECLUSES, PORTES ET PONT-TOURNANT.L'avant-port communique au bassin à flot par une écluse de 39 m. de longueur <strong>et</strong> de 17 m. 86 de largeur. Elle est ferméeau N. par des portes d'êbe placées en 1829 ; chaque ventail a plus de 115 m. de superficie. Lorsque le besoin s'en fera sentir,elle sera fermée en outre par une paire de portes de flot exécutées depuis 1830, mais qui n'ont encore ren<strong>du</strong>


[p. 271]aucun service <strong>et</strong> qui sont déposées à Chantereine sous un hangar. Elle est traversée par un pont-tournant, à double volée,posé en grande partie en 1832 <strong>et</strong> livré à la circulation en 1833. — Comme nous l'avons dit précédemment, pendant la <strong>du</strong>réedes travaux d'excavation <strong>du</strong> bassin un bateau-porte fermait l'écluse <strong>du</strong> côté de l'avant-port. Une opération de grandeimportance, était celle de l'abaissement de la partie de l'ancien radier sur laquelle ce bateau avait reposé. Ce travail, on leconçoit, ne pouvait se faire que sous l'eau, aussi a-t-il nécessité l'emploi de la cloche à plongeur. Chaque pierre <strong>du</strong> pavageétait détachée au moyen d'un long ciseau, sur la tête <strong>du</strong>quel frappait le mouton d'une sonn<strong>et</strong>te, puis saisie, enlevée <strong>et</strong>déposée à terre. La dépense faite pour c<strong>et</strong>te écluse <strong>et</strong> <strong>ses</strong> accessoires s'élève à la somme de 931,840 f.L'écluse à l'O., vis-à-vis le chenal, est destinée à établir une communication entre l'avant-port <strong>et</strong> le bassin enconstruction — Il n'y a encore d'exécuté que la tête de c<strong>et</strong>te écluse <strong>et</strong> une portion des bajoyers sur 12 m. de largeur ré<strong>du</strong>ite.On porte à 180,993 fr. les dépen<strong>ses</strong> déjà créditées, <strong>et</strong> à 376,000 fr. celles qui restent à faire.L'écluse à l'O. <strong>du</strong> bassin à flot aura la même destination. Il n'y a également d'exécuté que la tête <strong>et</strong> une portion desbajoyers. Ce travail a coûté 201,576 f. <strong>et</strong> 397,300 f. seront nécessaires pour le terminer.Comme les deux précédentes, l'écluse au N. <strong>du</strong> bassin n'est que commencée. Elle débouchera dans la[p. 272]gare de mâture qui, d'après un proj<strong>et</strong> approuvé en 1829, doit être établie dans c<strong>et</strong>te partie <strong>du</strong> port [112]. C<strong>et</strong>te portiond'écluse n'a encore nécessité qu'une dépense de 44,953 f., on évalue à 165,500 f. la somme restant à créditer.CALES DE CONSTRUCTION.Il y a peut-être plus de surprise que d'admiration dans le sentiment que l'on éprouve à la vue des gigantesquesétablissements <strong>du</strong> nouvel arsenal. Là toutes les lignes sont tracées au compas ; elles sont si savamment disposées, le calculen a si bien réglé les proportions, l'ensemble en est d'une sévérité si froidement géométrique que d'un seul coup d'oeil vousembrassez tout l'édifice. Là, le grandiose seul frappe, tout est pour l'esprit <strong>et</strong> rien pour le coeur. L'imagination, c<strong>et</strong>te âme d<strong>et</strong>oute oeuvre, n'a laissé son empreinte nulle part ; on ne s'est inspiré que <strong>du</strong> nécessaire. Aussi vous méprendriez-voussingulièrement si vous veniez chercher de l'art ici, il n'y a que de la science. Croyez-nous, allez voir cela une fois <strong>et</strong> voyez lebien, mais n'y r<strong>et</strong>ournez plus : un examen réfléchi détruirait le prestige, ce qui vous avait fait battre des mains vous fatiguerait<strong>et</strong> vous laisserait froid.Les bâtiments qui recouvrent les cales de construction sont certes de beaux édifices ; mais plus encore[p. 273]que les établissements qui nous restent à décrire, ils sont entachés de ce vice de régularité mathématique dont nous venonsde parler. Et qu'on n'aille pas supposer que le reproche que nous fesons à ces constructions doive r<strong>et</strong>omber sur lesingénieurs qui en ont dressé les plans ; nous savons qu'ils n'ont fait que suivre les règles qui leur étaient prescrites, <strong>et</strong>d'ailleurs ce que nous disons <strong>du</strong> port de <strong>Cherbourg</strong> peut s'appliquer aussi bien aux autres grands ports de France. C'estpartout la même sécheresse d'invention, la même uniformité de style, le même positivisme rigoriste.Les cales pour la construction des vaisseaux sont au nombre de quatre ; elles ont chacune 117 m. de longueur. Les deuxà l'O. de la forme ont chacun 24 m. de largeur, <strong>et</strong> les deux à l'E., seulement 20 m. Commencées en 1811, elles ont étéprimitivement terminées en 1813. La cale N° 1 fut a baissée, en 1822, de 1 m. 30 au-dessous de son ancien niveau ; les troisautres l'ont pareillement été en 1832 <strong>et</strong> 1833.Mais, les vaisseaux qu'on y construisait étaient exposés à toutes les intempéries des saisons. Ce fut pour obvier à cegrave inconvénient qu'on entreprit, en avril 1820, l'exécution des grands bâtiments qui forment aujourd'hui le recouvrement deces cales. La couverture de la cale N° 4, commencée la première, fut achevée en 1821 ; les autres furent successivementterminées dans les trois années qui suivirent. La hauteur de ces bâtiments, depuis le sol jusqu'au faîte, est de 26 m. 50. Dansle principe, ils étaient entièrement ouverts par[p. 274]leurs extrémités N. <strong>et</strong> S. <strong>et</strong> percés latéralement par de grandes arcades de 7 m. 50 de largeur, au-dessus desquelles régnaitune attique à jour. Il en résultait un défaut d'abri auquel on a remédié en fermant les archivoltes des arcades par despersiennes <strong>et</strong> les attiques par des châssis vitrés. Restaient les ouvertures de tête : on avait bien, à l'aide de masques encharpente, essayé de préserver l'avant <strong>et</strong> l'arrière des vaisseaux des atteintes de la pluie ; mais ce moyen était depuis long-


temps reconnu insuffisant. On a commencé en 1836 la mise à exécution d'un proj<strong>et</strong> de ferm<strong>et</strong>ure de la partie S. de chaquecale par une grande arcade en maçonnerie se raccordant avec les piliers de tête ; il n'y a encore que la cale N° 1 de ferméeainsi. — Chaque cale, y compris le bâtiment qui la recouvre, a donné lieu à une dépense qu'on évalue, terme moyen, à520,000 fr. — Les vaisseaux actuellement en chantier sont : le Friedland, de 120 canons ; le Diomède de 90 ; l'Ajax de 100 <strong>et</strong>le Henri IV de 100.En avant des cales se trouvent les ateliers de la serrurie <strong>et</strong> de la plomberie, dépendants de la direction des constructionsnavales.FORME DE RADOUB ET CALE DE CARÉNAGE.Entre les cales couvertes, dans l'emplacement que devait occuper l'écluse d'un bassin circulaire proj<strong>et</strong>é sous l'Empire <strong>et</strong>auquel l'intérêt de la fortification fit renoncer, se trouve la forme de radoub. On appelle[p. 275]ainsi un bassin, présentant à peu près la forme d'un vaisseau, où les navires qui ont besoin de réparations sont con<strong>du</strong>its àmer haute. Ce bassin est ensuite fermé par un bateau-porte, mis à sec au moyen de pompes que manoeuvre une machine àvapeur locomobile, <strong>et</strong> l'opération <strong>du</strong> radoub commence. — La forme est fondée sur le roc <strong>et</strong> construite en maçonnerie avecrevêtements de granit. Elle a 74 m. 75 c. de longueur, 23 m. 85 c. de largeur entre les murs supérieurs de revêtement <strong>et</strong> 8. m.60 c. de profondeur. Commencée en 1811, achevée en 1813, elle a coûté 571,100 fr.La cale de carènage, située à l'extrémité N. <strong>du</strong> bassin à flot, au niveau de l'arête des quais, a été terminée aucommencement de 1827.ATELIERS DES FORGES, DES MACHINES, DE LA FONDERIE ET DÉPENDANCES.Le vaste bâtiment qui contient ces ateliers est situé à l'E. des cales. Il a été commencé en 1831, <strong>et</strong> les ateliers desconstructions navales ont pu y être successivement installés en 1832 <strong>et</strong> 1833. Il présente une seule façade, régulière, de 116m. de longueur ; on travaille à le prolonger au S. sur une même éten<strong>du</strong>e.L'atelier des forges, qui occupe en ce moment la partie S. de l'établissement, renferme 12 feux doubles <strong>et</strong> un grand feuavec martin<strong>et</strong>.L'atelier des machines est situé au centre ; on y remarque un grand tour servant de machine à aléser <strong>et</strong>[p. 276]à tourner parallèlement, un p<strong>et</strong>it tour qui a le même usage, deux tours à fil<strong>et</strong>er, une machine à fil<strong>et</strong>er <strong>et</strong> à tarauder, un touranglais, dont les usages sont divers <strong>et</strong> nombreux, des tours à forer, plusieurs tours ordinaires, une machine à diviser pourroues d'engrenage, <strong>et</strong>c. Tous ces tours sont mis en mouvement par deux machines à vapeur : la première, à laquelle onaccède par un escalier en fonte de fer d'un beau travail, est oscillante, à haute pression <strong>et</strong> de la force de 6 chevaux ; l'autreest fixe, à basse pression, <strong>et</strong> d'une force pareille. L'étage de c<strong>et</strong> atelier est occupé par l'atelier de l'ajustage, dont l'installationn'est pas encore achevée.L'atelier de la fonderie occupe l'extrémité N. de l'établissement. Sa couverture en zinc repose sur une charpente en ferforgé. Dans la salle d'entrée on voit une machine à broyer le charbon, mue par la machine à vapeur. L'atelier renferme deuxgrues en fonte pour le transport des châssis ou moules <strong>et</strong> de la fonte dans les moules ; deux grands fourneaux à la Wilkinson,quatre p<strong>et</strong>its fourneaux de forge <strong>et</strong> deux fourneaux à manche. On remarque dans la salle de sortie, sur le derrière, unventilateur qui reçoit son mouvement des machines à pression. — Le prolongement en construction au N. seraparticulièrement affecté à la fonte des cuivres.Derrière ces ateliers règne une cour macadamisée, bornée à l'E. par une suite de bâtiments. Le premier, vers le S., est lepavillon de la romaine de la presse[p. 277]hydraulique ; ensuite vient le pavillon qui renferme c<strong>et</strong>te presse, puis ce sont des magasins <strong>et</strong> des bureaux. Au N. se trouventdeux fours à coak, abrités par une couverture en zinc que supporte une charpente en fer, <strong>et</strong>, en dehors de la grille, les parcs àcharbon <strong>et</strong> l'atelier de la tôlerie où sont confectionnées les cais<strong>ses</strong> à eau <strong>et</strong> les chaudières des bateaux à vapeur.


C<strong>et</strong> établissement, y compris <strong>ses</strong> dépendances, avait coûté, au 1 er janvier 1838, 197,401 fr. 52 c.HYDROMÈTRE. — BUREAUX SUR LE QUAI O. DE L'AVANT-PORT.L'enceinte <strong>du</strong> Port militaire ne renferme plus en constructions définitives que l'hydromètre, p<strong>et</strong>it bâtiment rond en pierresde taille de granit, situé sur le quai O. de l'avant-port, en avant de la grue. Tous les autres établissements sont provisoires.Nous citerons en première ligne un vaste bâtiment en bois, orné de quelques sculptures, <strong>et</strong> qui, par ce fait, ne manque jamaisd'attirer l'attention. C'est là que se trouvent les bureaux des différents services <strong>du</strong> port. — Derrière sont le dépôt de la rec<strong>et</strong>te<strong>et</strong> <strong>du</strong> mouvement des bois, l'école élémentaire, le dépôt des chaînes, le dépôt <strong>du</strong> perçage, l'atelier de la gournablerie <strong>et</strong>plusieurs hangars pour abriter les bois.CHANTIER DES TRAVAUX HYDRAULIQUES.Ce chantier, situé à l'O. <strong>du</strong> bassin à flot, comprend des magasins aux outils <strong>et</strong> aux métaux, une tonnellerie, une poudrière<strong>et</strong> un local où sont préparées[p. 278]les matières employées au chargement des mines, le logement <strong>du</strong> commandant de l'enceinte, des ateliers de modèlerie, degarniture, de charpenterie <strong>et</strong> de charronnerie ; des forges, des cabanes de maître, des bureaux, <strong>et</strong>c.PARC D'ARTILLERIE DE LA MARINE (au N. <strong>du</strong> précédent)C'est un vaste enclos, fermé par une grille en fer ; on y voit des canons, des mortiers, des obusiers, des boul<strong>et</strong>s, des obus<strong>et</strong> des bombes. La salle d'artifice <strong>et</strong> les bâtiments servant à la préparation des poudres sont à l'O. <strong>du</strong> parc.On trouve encore dans l'enceinte actuelle plusieurs établissements, tels que hangars pour la préparation des mortiers (Al'O. de l'avant-port), magasins, bureaux, corps-de-garde, dépôt de pompes à incendie, <strong>et</strong>c., mais ils sont de peu d'importance,<strong>et</strong> n'offrent absolument rien de remarquable.Le pavage des quais a été entrepris en 1832 ; la chaussée à 10 m. de largeur. — L'avant-port <strong>et</strong> le bassin sont, comme leport de commerce, éclairés au moyen de reverbères à réflecteurs paraboliques ; ces reverbères ont été placés de 1830 à lafin de 1832.CHANTIER DES CALES CHANTEREINE (en dehors des remparts actuels).Nous avons dit précédemment (V. CHAPELLE DE N.-D. DU VOEU) comment, au rapport des historiens, la reine Mathilde,assaillie par une violente tempête, échappa au naufrage <strong>et</strong> prit terre dans l'anse qui, depuis[p. 279]lors, a porté le nom de Chantereine. L'enceinte qui comprend c<strong>et</strong>te anse <strong>et</strong> les terrains adjacents renferme plusieursétablissements qu'il importe au voyageur de visiter.Cales de construction N os 5 <strong>et</strong> 6.Ces cales, non couvertes, particulièrement affectées à la construction des frégates, sont en maçonnerie avec bajoyers <strong>et</strong>pavage de granit. Construites au commencement de 1811, elles ont coûté ensemble 485,900 fr.Hangar aux bois.La construction <strong>du</strong> hangar aux bois a été entreprise le 20 octobre 1820 <strong>et</strong> achevée dans le courant de 1823. Ce vastebâtiment, long de 292 m., est composé de 130 piliers en pierre de taille, laissant entr'eux une ouverture de 8 m. 25 c. delargeur <strong>et</strong> de 6 m. de hauteur. Sa partie supérieure est en bois avec couverture en ardoi<strong>ses</strong> <strong>du</strong> pays. — Les bois qu'on yabrite sont destinés aux constructions navales : on les intro<strong>du</strong>it par les ouvertures latérales en déplaçant le cloisonnage quiest mobile. — Un bel escalier double con<strong>du</strong>it aux combles, où se trouvent la grande salle des gabarits ou tracé desvaisseaux, le musée naval, contenant différents modèles très-curieux de navires construits à <strong>Cherbourg</strong> ; les ateliers de lavoilerie, des chaloupes <strong>et</strong> canots, de la menuiserie <strong>et</strong> de la poulierie. — Un pavage de 10 m. de largeur, commencé en 1836,règne maintenant autour de ce hangar. — 688,115 fr.


[p. 280]Il y a en outre dans ce chantier divers ateliers de tonnellerie, de gros<strong>ses</strong> oeuvres, de modèles, de sculpture, de peinture,de forges, une scierie mécanique à la vapeur, des étuves à bordages, des cales pour la construction des p<strong>et</strong>its navires, undépôt de pompes à incendie, le dépôt central <strong>du</strong> charpentage, <strong>et</strong>, près de la grille de sortie, les remi<strong>ses</strong> des canots royaux. Al'E., en dehors, sont des magasins pour la fabrication des mortiers hydrauliques, employés aux travaux de la rade.CHANTIER CHANTEREINE.C'est à sa proximité de l'anse Chantereine que ce chantier doit son nom : on l'appelle aussi Parc aux bois. Son éten<strong>du</strong>e enlongueur est d'environ 500 m. <strong>et</strong> sa largeur moyenne de 195 m. Il est borné au S. par la rue de l'Abbaye où se trouve sonentrée principale, à l'E. par le prolongement de la rue de la Paix <strong>et</strong> au N. par l'anse Chantereine <strong>et</strong> la plaine en avant desremparts <strong>du</strong> port militaire. Les terrains qu'il comprend dépendaient anciennement de l'abbaye de N.-D. <strong>du</strong> Voeu. Il servit, àl'origine des travaux de la rade, au dépôt des bois employés à la construction des cais<strong>ses</strong> coniques. — En 1790, c'est là quefut célébrée la fête anniversaire de la prise de la Bastille. Un autel de la patrie de quarante pieds de haut, <strong>et</strong> sur lequel onarrivait par quatre rampes, y avait été dressé. Après la messe que le curé de <strong>Cherbourg</strong> y célébra, accompagné de sonclergé, les membres <strong>du</strong> district <strong>et</strong> de la municipalité prononcèrent plusieurs[p. 281]discours patriotiques appropriés à la circonstance. — Le chantier Chantereine porta ensuite le nom de Champ de l'Union. Uneseconde fête y eut lieu le 10 juill<strong>et</strong> 1794, en l'honneur des défenseurs de la patrie, morts au siège de Granville. Lereprésentant <strong>du</strong> peuple Le Carpentier, alors à Valognes, fut prié d'y assister, <strong>et</strong> elle surpassa en magnificence la fête de lafédération : un banqu<strong>et</strong> fraternel de trois mille couverts termina la journée.Ce chantier contient : 1° les bureaux, atelier s <strong>et</strong> magasins des salaisons <strong>et</strong> dépendances ; 2° la corderie, vaste bâtimentqui l'occupe au S. dans toute sa longueur, <strong>et</strong> les magasins aux brais <strong>et</strong> aux goudrons ; 3° des magasins aux chanvres <strong>et</strong> unesalle de peignerie <strong>et</strong> d'espadage ; [113] 4° la salle d'armes des compagnies d'ouvriers de la marine <strong>et</strong> le bureau des revues <strong>et</strong>armements, dans le pavillon anciennement construit, au centre, pour le logement des ingénieurs chargés de la direction destravaux ; 5° plusieurs hangars pour abriter les boi s.CASERNE DU CHANTIER CHANTEREINE.C<strong>et</strong>te caserne, attenante au Parc aux bois, a son entrée au côté N. de la route de <strong>Cherbourg</strong> à Equeurdreville. Elle secompose de deux grands corps de bâtiments principaux affectés au logement de la troupe,[p. 282]d'un autre réservéaux officiers <strong>et</strong> maîtres ouvriers <strong>et</strong> de plusieurs cours. Les chambres, au nombre de trente-deux, ontchacune 13 m. de longueur, 5 m. 85 de largeur <strong>et</strong> peuvent recevoir 25 hommes, ce qui perm<strong>et</strong> de loger 800 hommes, sousofficiers<strong>et</strong> soldats, dans la totalité de l'établissement. Ce nombre pourrait être porté à 1,300, si aux couch<strong>et</strong>tes à une place onsubstituait des hamacs,La caserne de Chantereine a été bâtie en 1811 pour servir au logement des ouvriers militaires qu'employait alors ladirection des constructions navales. La marine la céda, en 1827, au département de la guerre à condition d'y loger descompagnies de disciplinaires qu'on se proposait d'envoyer à <strong>Cherbourg</strong> pour travailler aux fortifications de la place. Cestravailleurs ne vinrent pas, mais la caserne fut, peu de tems après, occupée par un détachement de la garnison. Aujourd'huielle vient d'être ren<strong>du</strong>e à la marine <strong>et</strong> c'est là que sont casernés les 600 hommes <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong> régiment d'infanterie, qui font leservice <strong>du</strong> port.CASERNE DES ÉQUIPAGES DE LIGNE.C<strong>et</strong>te caserne pareillement située le long de la route de <strong>Cherbourg</strong> à Equeurdreville fait face à la précédente. Elle a étéconstruite de 1785 à 1786, sur un terrain dépendant de l'abbaye, pour servir de logement aux troupes de la marine employéesaux premiers travaux de la Digue. C'est un bâtiment de 146 m.[p. 283]de longueur, susceptible, dans son état actuel, de recevoir 810 hommes ainsi répartis : 666 dans la partie occupée par leséquipages de ligne, dont le couchage s'effectue au moyen de hamacs, <strong>et</strong> 144 dans les douze chambres réservées à l'E. pourles ouvriers d'artillerie de la marine, qui se servent de lits en fer, à une place. — A chaque extrémité se trouve un pavillondépendant de la caserne ; celui de l'O. est affecté au logement des officiers <strong>et</strong> <strong>du</strong> quartier-maître trésorier des équipages de


ligne ; celui de l'E. a la même destination pour le service de la 5 e compagnie d'artillerie. — Le bâtiment est précédé d'une courd'environ 31 m. de largeur, fermée par une grille. Une cour semblable existe au derrière : elles servent l'une <strong>et</strong> l'autre auxexercices militaires.BOULANGERIE DE LA MARINE, rue de l'Abbaye, N° 61.C<strong>et</strong> établissement est de la même époque que la caserne dont il vient d'être question. Il n'y avait d'abord que deux fours ;mais le nombre toujours croissant des ouvriers rationnaires força d'en construire deux <strong>nouveau</strong>x. Trois sont d'égalegrandeur ; — 2 m. 92 c. sur 3 m. 58 c. — l'autre est beaucoup plus p<strong>et</strong>it. — Ces trois grands fours peuvent cuire ensembl<strong>et</strong>rente fournées, ou 6,000 pains de trois livres chaque, par 24 heures : ce qui présente un poids total de 18,000 livres. — Lep<strong>et</strong>it four peut cuire 80 pains par fournée, ou 800 pains pesant ensemble 2,400 livres par 24 heures. — Le nombre desfournées de biscuit est également[p. 284]de dix par 24 heures. Chaque four peut contenir jusqu'à 396 biscuits, pesant moyennement ensemble 120 livres.Le magasin attenant à la boulangerie vient d'être reconstruit <strong>et</strong> agrandi ; on évalue à 160,000 livres de biscuits lacontenance des soutes qu'il renferme. — Près de là est le magasin aux farines, on y remarque trois blutoirs servant àl'épurement des farines brutes.HOPITAL DE LA MARINE. Même rue, (Côté Nord).L'hopital de la marine est à 1 kilomètre environ de la ville. Il a été formé en 1793, dans l'emplacement <strong>et</strong> avec une portiondes bâtiments de l'ancienne abbaye <strong>du</strong> voeu, occupés depuis l'entreprise des travaux de la rade jusqu'en 1789, par lesgouverneurs de Normandie. Des changements <strong>et</strong> des augmentations y ont été successivement faites, <strong>et</strong> il ne reste plusaujourd'hui des anciennes constructions que le Chapitre <strong>et</strong> le Réfectoire. — Il renferme un bâtiment occupé parl'administration, deux corps de bâtiments principaux contenant des salles de malades, un autre bâtiment affecté aux officiers<strong>et</strong> aux sous-officiers, un logement pour les officiers de santé, une chapelle, une bibliothèque, un amphithéâtre, diversbâtiments de servitude, des bains, un séchoir, un étang, des jardins, des cours <strong>et</strong> un cim<strong>et</strong>ière. — On y reçoit toutes lespersonnes attachées à la marine ou fesant partie de l'armée de terre <strong>et</strong> des autres corps organisés. — Il peut[p. 285]suffire dans l'état actuel des cho<strong>ses</strong> ; mais son importance serait loin d'être en rapport avec les besoins si, en temps deguerre, <strong>Cherbourg</strong> devenait un centre d'opérations navales.ANCIEN BAGNE.C'est en pluviose an XI, que des forçats furent destinés à passer <strong>du</strong> Hâvre à <strong>Cherbourg</strong> pour travailler aux ouvrages <strong>du</strong>port militaire. On leur disposa un local à l'aide des divers corps de bâtiments qui avaient composé la ferme de l'Abbaye. Ilsl'ont occupé jusqu'à la Restauration, époque à laquelle ils furent transférés au bagne de Lorient. — C<strong>et</strong> établissement estattenant à l'hopital ; il n'a plus aucune importance <strong>et</strong> sert de magasins à l'usage de l'artillerie.VIEIL ARSENAL.Le vieil arsenal de la marine, situé à l'E. de l'avant-port <strong>du</strong> commerce, parallèlement au quai, occupe une surface de 268ares. Sa longueur, depuis la grille d'entrée jusqu'à l'extrémité N. des anciens chantiers de construction, est d'environ 280 m.,<strong>et</strong> sa largeur entre le quai <strong>et</strong> la rue des Sables de 98 m. Il doit sa formation à l'entrepreneur Boulabert, qui, en 1782, futchargé de l'achèvement des forts de l'Ile-Pelée <strong>et</strong> <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>. La marine l'acquit en 1797 moyennant la somme de 119,315 fr.<strong>et</strong> y fit dès lors des augmentations considérables. Il se compose aujourd'hui de quatre cours environnées de bâtiments <strong>et</strong> d'unchantier où étaient établies des cales de construction.[p. 286]Dans le pavillon à droite en entrant se trouvent les bureaux de la majorité <strong>et</strong> ceux de la direction des mouvements <strong>du</strong>port. — La cour n° 1 <strong>et</strong> les bâtiments qui en dépend ent sont affectés au service <strong>du</strong> magasin général. — La cour n° 2,particulièrement réservée à la direction d'artillerie renferme les bureaux de c<strong>et</strong>te direction, une salle d'armes où se voient enassez grand nombre des fusils, des pistol<strong>et</strong>s, des sabres d'abordage, des haches d'armes, des poignards, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong> un fusil àsept coups, trophée pris à l'Angl<strong>et</strong>erre ; des forges, <strong>et</strong> à l'E. un corps de bâtiment qui a façade sur la rue des Sablescomprenant le greffe, la salle des séances <strong>du</strong> tribual maritime <strong>et</strong> les bureaux de l'inscription ou des clas<strong>ses</strong>. On remarqueencore dans c<strong>et</strong>te cour une pièce de canon, trouvée il y a quelques années dans la baie de la Hougue <strong>et</strong> provenant des


vaisseaux de l'amiral Tourville que l'ennemi incendia en 1692. (v. page 106, 2 e partie). « A droite en sortant est la bibliothèque<strong>du</strong> port. C<strong>et</strong>te bibliothèque, fondée en 1794 par M. Bleschamp, commissaire principal ordonnateur à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong>entièrement abandonnée pendant nombre d'années, fut rétablie sous le ministère de M. Hyde Neuville » (M. de BERRUYER,Guide <strong>du</strong> voyageur à <strong>Cherbourg</strong>.) Elle contient 1,600 volumes environ, parmi lesquels on remarque : Description de l'Egypte,in-folio, avec planches ; Histoire de la Russie, par Leclerc, in-4°, <strong>et</strong>c. — Dans la cour n° 3, les deux bâtiments parallèles auquai sont occupés l'un par un atelier d'armurerie <strong>et</strong>[p. 287]l'autre par un atelier de boussoles ; au N. se trouvent les ateliers de la garniture. — La prison <strong>et</strong> le logement <strong>du</strong> conciergedépendent de la cour n° 4, où la direction des cons tructions navales avait autrefois <strong>ses</strong> ateliers de forge <strong>et</strong> de serrurerie. — Ala suite de c<strong>et</strong>te cour sont plusieurs hangars employés au service de l'atelier de mâture — Des cales <strong>et</strong> des chantiers deconstruction occupaient le terre-plein N. ; ils ne sont plus, comme nous l'avons dit page 189, d'aucun usage.Ces constructions sont tout-à-fait provisoires <strong>et</strong> leur <strong>du</strong>rée ne devra se prolonger que jusqu'au moment où le port militairesera muni des établissements que le service de la marine exige. Déjà plusieurs ateliers ont été abandonnés ; tous les autresauront successivement le même sort.CHANTIER DES BATIMENTS CIVILS.(A l'angle S.-O. de la rue <strong>du</strong> Val-de-Saire).Etabli sur des alluvions pro<strong>du</strong>ites par la mer, il doit sa formation au département de l'intérieur. Il se compose : 1° d'un corpsde bâtiment principal où se trouvent les bureaux <strong>du</strong> commissaire général de la marine <strong>et</strong> ceux de la direction des travauxhydrauliques ; 2° d'une vaste cour circonscrite de bâtiments <strong>et</strong> hangars comprenant les ateliers <strong>et</strong> magasins de c<strong>et</strong>tedirection ; 3° d'une salle de dessin <strong>et</strong> de plusieur s salles de modèles <strong>et</strong> plans en relief.Salles des modèles <strong>et</strong> plans en relief.Ces plans <strong>et</strong> modèles ont une importance réelle, <strong>et</strong>[p. 288]ne fût-ce que pour le mérite de leur exécution, le voyageur ne devrait pas oublier de les visiter. — La première salle renfermeun vaste plan en relief, représentant le proj<strong>et</strong> général d'arsenal maritime que M. Cachin soumit à l'examen de l'empereur. Ceproj<strong>et</strong> n'était pas seulement incompatible avec le système de fortification que l'on avait alors en vue, mais il eût entraîné lasuppression de toute espèce de fortification, <strong>et</strong> ce fut là le motif qui le fit rej<strong>et</strong>er. Outre un avant-port, un bassin <strong>et</strong> un arrièrebassin,on y remarque un bassin demi-circulaire, couronné de quatorze formes doubles <strong>et</strong> de deux simples [114] — On voitencore dans c<strong>et</strong>te salle un modèle de la Digue telle qu'elle était avant la tempête <strong>du</strong> 12 février 1808, <strong>et</strong> un modèle de labatterie centrale telle que la suppose le proj<strong>et</strong> de 1811 ; — plus un broc en étain <strong>et</strong> divers obj<strong>et</strong>s trouvés en creusant l'avantportmilitaire.Dans la seconde salle se trouvent un plan en relief <strong>du</strong> terrain occupé par le port militaire (échelle d'un millimètre pourmètre) <strong>et</strong> un autre plan représentant le proj<strong>et</strong> de M. Cachin, modifié par les ordres de Napoléon. Il y a en outre différents p<strong>et</strong>itsmodèles, 1° d'un cône, 2° d'un pont pour le Vey, (pr oj<strong>et</strong> de M.[p. 289]Cachin), 3° de l'écluse de communication de l'avant -port au bassin à flot, avec deux paires de portes <strong>et</strong> un bateau-porte, 4° dela forme, 5° <strong>du</strong> batardeau, 6° des cales de construc tion de Chantereine, 7° d'un chapel<strong>et</strong> incliné, 8° d e l'obélisque de la placed'Armes, 9° de la machine fumigatoire de l'hôpital d e la marine, 10° <strong>du</strong> quart <strong>et</strong> de la moitié <strong>du</strong> soubas sement <strong>du</strong> phare quel'on se proposait d'établir sur un des môles à l'entrée de la passe de l'avant-port, <strong>et</strong>c.ETABLISSEMENT DU CAUCHIN.Il est situé au S. <strong>du</strong> bassin de commerce. Si nous le mentionnons ici, ce n'est pas pour son importance actuelle, qui estnulle, mais pour celle qu'il a dû avoir. Il a été acquis par la marine, vers 1786 ; on se proposait d'y construire un hôpital, <strong>et</strong>nous voyons que divers travaux préparatoires y furent exécutés dès ce temps ; on peut citer entr'autres le mur de quai,parfaitement conservé, qui longe la rivière Div<strong>et</strong>te <strong>et</strong> qui coûta plus de cent mille francs. C<strong>et</strong>te propriété se compose d'uncorps de bâtiment principal, de plusieurs bâtiments de servitude, de cours, de jardins <strong>et</strong> d'un vaste enclos traversé par lechemin de fer.


AQUEDUC DE DÉRIVATION DES EAUX DE LA DIVETTE. —CHATEAU D'EAU.Le port militaire manque d'eau, <strong>et</strong> jusqu'ici ce n'est qu'au moyen de dispendieux transports qu'on a pu subvenir auxbesoins toujours croissants de <strong>ses</strong> nombreux ateliers. Un canal de dérivation avait été commencé[p. 290]en 1788 pour amener les eaux de la rivière Div<strong>et</strong>te au Cauchin, où, comme nous l'avons dit, devait être construit un hôpital.Ce fut la ville [115] qui, en demandant à la marine de lui faire l'abandon de c<strong>et</strong> aque<strong>du</strong>c, donna l'idée d'en tirer parti pourl'alimentation des aiguades <strong>du</strong> nouvel arsenal. Deux proj<strong>et</strong>s furent, à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, rédigés par M. Leroux, ingénieur en chef destravaux hydrauliques, <strong>et</strong> adressés au ministre de la marine, l'un en 1834 <strong>et</strong> l'autre en 1835. Le dernier, <strong>et</strong> c'est celui qui a étéapprouvé, porte à 42 pouces le volume d'eau qui doit être pris à la rivière, sur lesquels 25 pouces seront concédés à la villemoyennant une certaine somme ; les 17 autres pouces appartiendront à la marine.Le canal de dérivation a son origine au-dessus <strong>du</strong> moulin de Quincampoix, à environ 1 kilomètre, 9 hect. de la ville. Ildevait avoir 2145 m. de longueur développée jusqu'à son point d'arrivée au-dessus de l'enceinte <strong>du</strong> Cauchin. 1491 m. étaientexécutés lorsque, en 1790, les réclamations de quelques particuliers firent suspendre les travaux, que la révolution empêchaensuite de continuer. Repris en 1836 ils sont au moment d'être achevés.[p. 291]La con<strong>du</strong>ite en maçonnerie ne se prolonge que jusqu'au réservoir-filtre ou château-d'eau, situé au sud de la propriété <strong>du</strong>Cauchin. C'est un bâtiment rectangulaire, recouvert en zinc, de 25 m. de longueur sur 13 m. de largeur, <strong>et</strong> dont l'élévation audessus<strong>du</strong> sol n'est que de 2 m. 50. — Dans l'intérêt des usines établies en aval de la prise d'eau, les eaux affluentes <strong>du</strong>rantla nuit seront reçues <strong>et</strong> conservées jusqu'au lendemain dans ce réservoir, de manière à n'en lever à la rivière qu'en 24 heuresl'eau dépensée moyennement chaque jour. — Un tuyau principal, en fonte de fer, déjà placé en majeure partie, con<strong>du</strong>ira l'eauaux fontaines disséminées dans l'intérieur de la ville <strong>et</strong> aux fontaines <strong>et</strong> aiguades <strong>du</strong> port militaire ; le développement total dece tuyau depuis le château d'eau jusqu'au port est de 2,640 m.L'établissement de la con<strong>du</strong>ite de dérivation aura les résultats les plus avantageux. Si dans les circonstances actuelles ilétait urgent que la ville <strong>et</strong> la marine pussent disposer d'un cours d'eau abondant <strong>et</strong> sûr, à quelle extrémité ne se fût-on pastrouvé ré<strong>du</strong>it dans le cas où des escadres seraient venues stationner sur la rade ? — Ce travail, y compris les dépen<strong>ses</strong>d'achat <strong>et</strong> d'installation des tuyaux, coûtera environ 345,000 fr.HIPP. V.Les feux de la rade de <strong>Cherbourg</strong> sont au nombre de cinq :[p. 292]PHARES.1° Feux fixes de l'Ile-Pelée. Ces deux fanaux à réflecteurs paraboliques élevés sur le donjon <strong>du</strong> fort de l'Ile-Pelée sont à 14m. de distance l'un de l'autre. — Lat. 49° 40' 16" — Long. O. 3° 55' 15" — Elévation 26 m. — Portée, 2 lieues. — Ils servent àindiquer aux bâtiments qui arrivent de nuit la position de la passe de l'E. : on se propose de les remplacer par un feu uniquesemblable à celui <strong>du</strong> fort de Querqueville.2° Feu <strong>du</strong> fort central de la Digue. — Fanalcatadioptrique, à courtes éclip<strong>ses</strong>, à 19 m. 30 au-dessus des hautes mersd'équinoxe. Allumé pour la première fois le 1 er avril 1839. — La tourelle en maçonnerie qui le supporte a 17 m. 20 d'élévation,à partir <strong>du</strong> sol ; elle a été construite en 1838, en vertu d'une adjudication passée le 26 janvier.Feu fixe <strong>du</strong> fort de Querqueville — Le fanalcatadioptrique qui indique l'entrée O. de la rade est à 49° 40' 21"de lat., <strong>et</strong> à 4°1' 18"de long. — Elévation, 18 m., portée 3 lieues. Il est établi sur une tourelle en maçonnerie, de 15 m. de hauteur, construiteau commencement de 1835. Le feu a été allumé pour la première fois le 17 juill<strong>et</strong> suivant. Il n'y avait à Querqueville, avantc<strong>et</strong>te époque, qu'un fanal sidéral, semblable à ceux <strong>du</strong> fort de l'Ile-Pelée.[p. 293]4° Feu de la j<strong>et</strong>ée de l'E. <strong>du</strong> Port de commerce. — La tourelle en pierre de taille qui supporte l'appareil catadioptrique,occupe le centre <strong>du</strong> musoir circulaire qui termine la j<strong>et</strong>ée. Sa hauteur est de 6 m. 90. Elle a été construite en 1837. Le feu a


été allumé le 1 er juill<strong>et</strong> 1838 pour la première fois ; il est fixe <strong>et</strong> de couleur rouge. Etabli à 10 m. au-dessus <strong>du</strong> niveau despleines mers d'équinoxe, il peut, par un beau temps, être aperçu jusqu'à la distance d'un mille marin en dehors des deuxpas<strong>ses</strong> de la rade.PHARE DE BARFLEUR.Le phare de Barfleur est situé à la pointe de Gatteville, à l'une des extrémités de la grande baie qui se termine auprès deFécamp, <strong>et</strong> dans laquelle se décharge la Seine, sur un rocher de granit qui ne tient au continent que par une chaussée. Cepoint, très-dangereux à cause des nombreux écueils qui l'environnent, <strong>et</strong> qui d'ailleurs, par sa situation en face de l'île deWight, forme le r<strong>et</strong>récissement le plus considérable de la Manche, ne pouvait manquer d'attirer l'attention de ceux quis'occupent de navigation. Aussi, dès 1675 établit on un phare à Barfleur. Cent ans plus tard (1774) la chambre de commercede Rouen en fit construire un autre qui existe encore aujourd'hui à côté de celui qui nous occupe, mais son peu d'élévation(27 m.) le rendait presqu'inutile, puisque les feux de la Hève avaient disparu bien avant qu'on entrât dans ceux <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong>phare. C'est pour remédier[p. 294]à c<strong>et</strong> inconvénient que l'administration des ponts <strong>et</strong> chaussées résolut, vers la fin de la Restauration, de l'exhausser de 32 m.,mais on reconnut bientôt que les réparations que nécessiterait ce proj<strong>et</strong> coûteraient presque autant qu'un <strong>nouveau</strong>monument, dont il n'aurait jamais ni la solidité ni le grandiose. M. Maurice de La Rue fut chargé de la direction des travauxd'un nouvel édifice qui, commencé en 1829, ne fut achevé qu'en 1833. L'appareil d'éclairage fut placé en 1834, <strong>et</strong> il fut allumépour la première fois le 1 er avril 1835. [116]C<strong>et</strong> édifice, entièrement construit de gros blocs de granit, s'élève en y comprenant la lanterne, à 83 m. au-dessus <strong>du</strong>niveau des plus hautes mers ; la base est carrée <strong>et</strong> haute de 24 pieds ; la colonne qui a 9 m. de diamètre à sa base <strong>et</strong> 6 ausomm<strong>et</strong>, est couronnée par un encorbellement de 80 centimètres de saillie ; les murs ont 1 m. d'épaisseur. C<strong>et</strong>te colonne estcreuse <strong>et</strong> entourée d'un escalier en hélice de 349 marches engagées dans le mur <strong>et</strong> dans le cylindre éclairé par 48 fenêtressur quatre lignes qui correspondent aux quatre points cardinaux.L'ascension des pierres se faisait par l'intérieur[p. 295]de la colonne au moyen d'une chèvre mise en mouvement par un seul cheval <strong>et</strong> dont tout l'appareil coûta 2,000 fr. — 11,000blocs de granit pesant ensemble 7,400,000 kilog. s'élevèrent ainsi. C'est la plus haute colonne <strong>du</strong> monde ; elle n'a coûté que332,213 fr. 91 c.Du haut de c<strong>et</strong> édifice la vue se promène au loin sur les plaines immen<strong>ses</strong> de la mer d'où se détachent çà <strong>et</strong> là des naviresavec leurs blanches voiles, sur les falai<strong>ses</strong> de la Hague qui apparaissent au milieu des brumes avec leurs clochers ausomm<strong>et</strong> des montagnes, sur la Digue de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> l'Ile-Pelée ; on aime à suivre de l'oeil les riches campagnes <strong>du</strong> Val-de-Saire couvertes d'une puissante végétation, parsemées de clochers <strong>et</strong> de villages blancs <strong>et</strong> gris au milieu des arbres verts, unhorizon de collines bizarrement découpées, Montaigu avec son église placée comme un nid d'aigle au haut d'une montagnepresque à pic, la plaine marécageuse qui s'étend jusqu'auprès de l'édifice, <strong>et</strong> à gauche, Barfleur, la vieille ville <strong>du</strong> moyen-âge,qui n'est plus aujourd'hui qu'une bourgade, avec son église de granit <strong>et</strong> son p<strong>et</strong>it port où passèrent tant d'illustres infortunés.C<strong>et</strong> aspect vous attriste : vous pensez à Henri I, à la Blanche-Nef ; votre esprit se reporte dans les siècles passés, <strong>et</strong> vousvoyez à vos pieds caracoler les preux chevaliers, <strong>et</strong> les belles demoiselles qui entouraient le monarque anglais s'ébattre dansla plaine. Tout est joyeux, tout respire plaisir <strong>et</strong> bonheur,[p. 296]car on vient d'une fête à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> l'on va r<strong>et</strong>rouver une fête en Angl<strong>et</strong>erre. Tout-à-coup un matelot vient trouver Henri :« Grand roi, lui dit-il, mon père a passé votre illustre père lorsqu'il marchait à la conquête, perm<strong>et</strong>tez-moi de vous con<strong>du</strong>ire àmon tour. » Le monarque anglais le remercia <strong>et</strong> lui dit : « Mon ami, j'ai choisi la nef sur laquelle je dois m'embarquer avec monépouse, je n'en changerai pas, mais je te confie ce que j'ai de plus cher au monde, Guillaume, mon fils l'héritier de macouronne, son frère Richard <strong>et</strong> leur soeur la comtesse de Mortagne. » Voyez-vous, à ces paroles <strong>du</strong> roi, toute c<strong>et</strong>te follejeunesse se précipiter dans la Blanche-Nef ; voyez le vin remplir les coupes aussitôt vidées ; écoutez les doux propos, lescontes joyeux <strong>et</strong> les tendres chansons d'amour ! Mais déjà le navire royal est sorti <strong>du</strong> port, il cingle vers la pleine mer ; lepilote de la Blanche-Nef s'en aperçoit, les rameurs pris de vin se penchent sur leurs rames, les chants joyeux continuent, maistout-à-coup ils se fondent en un cri d'angoisse. Le navire a touché contre un des écueils <strong>du</strong> raz ; il tourbillonne un instant, sepenche... <strong>et</strong> tout disparaît sous les eaux.Quelques hommes, quelques blanches écharpes de femmes flottent encore un moment. Guillaume se j<strong>et</strong>te dans une


arque ; il allait échapper, mais un cri de sa soeur le rappelle ; il court, il ne veut pas d'une vie qu'elle ne partagera point ; il lasaisit dans <strong>ses</strong> bras, il va la sauver, mais mille mains crispées par le dé<strong>ses</strong>poir[p. 297]s'accrochent à la barque ; elle fléchit sous le poids, chavire <strong>et</strong> s'engloutit à son tour. [117]Mais l'imagination nous emporte loin de notre suj<strong>et</strong>. Disons, pour finir, que le système suivi dans l'éclairage <strong>du</strong> phare deBarfleur est celui de Fresnel amélioré. Les miroirs sont concaves, paraboliques, <strong>et</strong> font converger les rayons obliques en unfaisceau de rayons parallèles ; on a suivi le système de Carcel pour les lampes <strong>du</strong> foyer.Le feu est tournant, <strong>et</strong> les éclip<strong>ses</strong> se succèdent de demi-minute en demi-minute. En temps ordinaire elles ne paraissenttotales qu'au delà d'une distance de 4 lieues marines.Les bâtiments accessoires séparés de la colonne sont aussi en granit.PHARE DU CAP DE LA HAGUE OU D'AUDERVILLE.Le phare <strong>du</strong> cap de la Hague, beaucoup moins haut que celui de Barfleur (il n'a que 140 pieds), est construit à peu prèssur le même plan, mais, en revanche, sa position est bien plus pittoresque. Assis sur un écueil granitique à un quart de lieuede la côte, au milieu des flots bouillonnants <strong>du</strong> raz Blanchard, on dirait un dieu des tempêtes dont la tête s'éleverait dans lesmers pour planer sur son domaine de destruction.[p. 298]C'est une heureuse idée de l'avoir placé au milieu de ces parages semés d'écueils sillonnés deux fois par jour par descourants contraires, devant une côte qui répéta tant de fois les plaintes des malheureux naufragés.Les abords en sont très difficiles ; l'enceinte circulaire qui lui sert de base occupe à peu près tout le rocher sur lequel ils'appuie ; il a 9 m. de diamètre à la base <strong>et</strong> 7 au somm<strong>et</strong> ; le terrain ne perm<strong>et</strong>tait pas de construire au pied les magasins <strong>et</strong>les chambres des gardiens ; on a été obligé de les placer dans la colonne, dont la moitié seulement est occupée par l'escalier.Le système d'éclairage est le même que pour celui de Barfleur, mais le feu est fixe ; on l'aperçoit à la distance de 6 lieuesmarines. Une machine sert à enlever <strong>et</strong> à transporter dans l'enceinte <strong>du</strong> phare les barils d'huile qui sont apportés par de p<strong>et</strong>itsbateaux, <strong>et</strong> que sans cela on aurait beaucoup de peine à débarquer.C<strong>et</strong> édifice a été achevé en trois ans ; il a été allumé pour la première fois le 1. er novembre 1837. Il est situé par 49° 42'22"de latitude, <strong>et</strong> 42° 17' 30"de longitude ouest.Dans les temps clairs, <strong>du</strong> somm<strong>et</strong> de la colonne on aperçoit toutes les îles anglo-françai<strong>ses</strong>.SOCIÉTÉ ROYALE ACADÉMIQUE DE CHERBOURG.[p. 299]C<strong>et</strong>te société fondée comme nous l'avons dit page 34, en 1735 par une société de savants, d'artistes <strong>et</strong> d'amis des l<strong>et</strong>tres,a compté parmi <strong>ses</strong> anciens membres l'abbé de Beauvais <strong>et</strong> Dumouriez ; elle se compose aujourd'hui de membres titulaires<strong>et</strong> de membres correspondants ; sa séance mensuelle, qu'elle tient à l'hôtel de ville, a lieu maintenant le premier vendredi dechaque mois ; elle n'a pas tenu en 1838 sa séance annuelle <strong>du</strong> mois de novembre.Parmi les membres titulaires actuels, qui ont publié quelques ouvrages, on remarque, dans leur ordre d'inscription, sur la liste : MM. Couppey, dontles savantes <strong>et</strong> élégantes recherches sur l'histoire de la Normandie sont appréciées de tous les savants ; Aug. Asselin, auteur de plusieurs mémoiresarchéologiques sur <strong>Cherbourg</strong> ; Delachapelle, père, qui a publié un travail assez éten<strong>du</strong> sur les plantes marines de l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong> ;Ob<strong>et</strong>, médecin, qui a composé plusieurs mémoires médicaux ; Le Monnier, professeur d'hydrographie, auteur d'une nouvelle Théorie des parallèles ;E. Delachapelle, avocat, régent <strong>du</strong> collége, qui s'est fait avantageusement connaitre par une tra<strong>du</strong>ction en vers de quelques fragments de l'Odyssée, <strong>et</strong>un charmant morceau de poésie, intitulé Le Rappel ; Ragonde, conservateur de la bibliothèque, auteur de plusieurs mémoires archéologiques <strong>et</strong> de lajolie nouvelle : Le château de Monthaguez ; Vérusmor, rédacteur en chef <strong>du</strong> Phare de la Manche, <strong>et</strong> auteur d'une continuation à l'histoire de <strong>Cherbourg</strong>de Voisin-la-Hougue, <strong>et</strong>c.Parmi les membres correspondants, savants ou littérateurs, on remarque également, d'après leur ordre d'inscription : MM. de Gerville, le plussavant antiquaire <strong>du</strong> département, auteur d'un grand nombre de mémoires ; L<strong>et</strong>ertre ; Laurens de Choisy ; Julien Travers, auteur de beaucoup depièces de vers,


[p. 300]opuscules, <strong>et</strong>c., où l'on trouve un grand talent, éditeur de l'Annuaire de la Manche ; Ancelot, l'un de nos plus spirituels <strong>et</strong> de nos plus féconds auteursdramatiques ; Gauthier-d'Arc, actuellement consul de France à Barcelone, qui a publié une tra<strong>du</strong>ction des Mille <strong>et</strong> une Nuits, à laquelle il a joint ungrand nombre de contes qui n'avaient pas encore été publiés en français, <strong>et</strong> quelques autres ouvrages tra<strong>du</strong>its également des langues orientales ;Daniel, proviseur au collége de Caen, auteur de plusieurs ouvrages d'é<strong>du</strong>cation ; De Caumont, antiquaire <strong>et</strong> fondateur <strong>du</strong> Congrès scientifique deFrance ; Le Chanteur de Pontaumont, qui a publié Raoul de Rayneval ou la Normandie au XIV e siècle ; de La Fontenelle de Vaux-Doré, directeur de laRevue anglo-française, à laquelle il fournit un grand nombre d'articles ; Alexis de Tocqueville, aujourd'hui député de Valognes, collaborateur de M. G.de Beaumont, pour le travail sur le système pénitentiaire aux Etats-Unis, <strong>et</strong> auteur <strong>du</strong> bel ouvrage sur la Démocratie en Amérique ; Chesnon, auteur deplusieurs ouvrages classiques d'histoire naturelle ; de Montaliv<strong>et</strong>, pair de France, qui a été plusieurs fois ministre, <strong>et</strong>c.Le bureau est composé de MM. Javain, directeur, rue <strong>du</strong> Chantier ; Couppey, juge au tribunal civil, secrétaire, rue Bondor, <strong>et</strong> Noël-Agnès, maireactuel de <strong>Cherbourg</strong>, archiviste ; rue des Corderies.JOURNAUX.JOURNAL DE CHERBOURG ET DU DÉPARTEMENT DE LA MANCHE,Politique, commercial, judiciaire, maritime, agricole <strong>et</strong> littéraire.D'abord simple feuille d'annonces, ce journal prit en 1832 une forme plus importante dans la main de M. A. de Berruyer ; ilparaissait alors seulement une fois la semaine dans le format in 4° ; il s'est successivement accru de puis ; en 1836, il parutgrand in folio comme les journaux de la capitale ; il est devenu politique en 1838, <strong>et</strong> en 1839 il a commencé à paraître deuxfois la semaine de jeudi <strong>et</strong> le dimanche, mais son format[p. 301]a été ré<strong>du</strong>it ; <strong>ses</strong> principes sont ceux de l'opposition constitutionnelle.Il a eu successivement pour rédacteurs MM. A. de Berruyer, Vérusmor <strong>et</strong> Hippolyte Vallée.On s'abonne à <strong>Cherbourg</strong> chez MM. Beaufort <strong>et</strong> Lecauf, imprimeurs, rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin. Le prix de l'abonnement pour<strong>Cherbourg</strong> est de 12 fr. par an, <strong>et</strong> 16 fr. par la poste.Rédacteur-en-chef, gérant, M. Fleury, rue Bondor.PHARE DE LA MANCHE, Gaz<strong>et</strong>te de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> <strong>du</strong> département.Ce journal a été fondé en 1836 par les avoués de <strong>Cherbourg</strong>, qui depuis février 1839 ont cessé cependant d'y faire insérerleurs publications judiciaires ; il portait d'abord le nom de Gaz<strong>et</strong>te de <strong>Cherbourg</strong>, qu'il a quitté à la fin de 1837. Il est devenupolitique en même temps que le Journal de <strong>Cherbourg</strong> ; il a toujours paru dans le même format <strong>et</strong> avec les mêmes conditionsd'abonnement que ce journal. — Le Phare est gouvernemental.On s'abonne à <strong>Cherbourg</strong>, chez M. Nobl<strong>et</strong>, imp., rue de la Fontaine.Rédacteur-en-chef, gérant : M. Vérusmor, Ancien-Quai.BIBLIOTHÈQUES PARTICULIÈRES.Les seules bibliothèques particulières que l'on puisse citer à <strong>Cherbourg</strong>, sont celles de MM. Augustin Asselin <strong>et</strong> Couppey.[p. 302]M. Aug. Asselin, ancien député de la Manche <strong>et</strong> sous-préf<strong>et</strong> de <strong>Cherbourg</strong> en r<strong>et</strong>raite, possède une bibliothèqueanciennement recueillie. Elle est plus remarquable par le choix de livres que par leur nombre, qui ne s'élève pas beaucoupau-delà de trois mille volumes.Elle se compose spécialement de manuscrits anciens sur vélin ; de quelques livres imprimés avant 1500, en l<strong>et</strong>tresgothiques ; d'une collection d'anciens poètes français, dont le premier est celui des mystères : d'une suite de classiques grecs<strong>et</strong> latins ; d'éditions de luxe, <strong>et</strong> de celles dites variorum <strong>et</strong> ad usum Delphini ; enfin de beaucoup d'ouvrages sur lanumismatique, sur l'histoire de France, notamment sur la Normandie <strong>et</strong> <strong>ses</strong> villes.


M. Asselin possède aussi une collection nombreuse de médailles de tous métaux, qui se compose des diver<strong>ses</strong> suitesgrecque, romaine, consulaire <strong>et</strong> impériale, de monnaies de France des trois races, de médaillons des rois de France, de <strong>ses</strong>hommes illustres, <strong>et</strong> des papes.La bibliothèque de M. Couppey, juge au tribunal, secrétaire de la société académique de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> membre de celledes antiquaires de Normandie, est composée environ de 4,500 volumes ; il possède en outre 1,000 ou 1200 volumes à sacampagne.Ce sont presque tous des livres de littérature <strong>et</strong> surtout des ouvrages sur l'histoire, les l<strong>et</strong>tres, les sciences, les religions ;on y remarque :Mémoires de l'académie des inscriptions <strong>et</strong> belles[p. 303]l<strong>et</strong>tres, 50 v. in 4° — Mémoires de la 3 e classe de l'institut, 8 v. in 4° — Notice des manu scrits de la bibliothèque <strong>du</strong> roi, 11 v.in 4° — Collection des historiens français de M. Gu izot, 30 v. in 8° — Chroniques de France en langue vulgaire, de Buchon,comprenant Froissart, Moustrel<strong>et</strong>, <strong>et</strong>c., 47 v. in 8° — Des bibles hébraïques, chaldéennes, des Septante, gothiques <strong>et</strong>c. —Histoire littéraire de France, par les Bénédictins, 15 v. in 4° — Des éditions Elzevier, Baen, <strong>et</strong>c. — La ngue <strong>et</strong> ouvrage desTroubadours, par Raymond, 6 v. in 8° — Roman de la Rose ; — Roman de Rou ; — Poésies de Marie de France ; — Unesuite complète des auteurs français des XI e , XII e , XIII e <strong>et</strong> XIV e siècles, depuis les fabliaux jusqu'à Marot ; Collection des Pèresde l'église ; un grand nombre d'ouvrages sur l'histoire de la Normandie ; Glossaire de Ducange ; Cartulaires des rois deFrance, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong>c.SOCIÉTÉS DE LECTURE.<strong>Cherbourg</strong> compte trois sociétés pour la lecture des journaux ; la plus ancienne <strong>et</strong> la plus nombreuse est la chambre delecture, qui se réunit dans un local de la rue des Bastions.Pour être admis à faire partie de c<strong>et</strong>te société, il faut être présenté par un des membres <strong>et</strong> agréé par les deux tiers desmembres présents pendant les huit jours où l'admission est pendante. C<strong>et</strong>te société reçoit les principaux journaux de Paris <strong>et</strong>des départements ; elle a une bibliothèque assez nombreuse <strong>et</strong> bien composée.[p. 304]Le cercle commercial établi Quai N. <strong>du</strong> Port, n'adm<strong>et</strong>tait primitivement que des négociants, mais aujourd'hui c<strong>et</strong>te conditionn'est plus exigée : on reçoit les journaux de commerce <strong>et</strong> la plupart des journaux politiques ; ce cercle n'a point debibliothèque.Le cercle français est placé dans un local qui fait face à la place Tour des Sarrasins ; on entre par la rue Notre-Dame. On yreçoit également les principaux journaux dont on fait collection. La bibliothèque est peu nombreuse.Chacune de ces sociétés a une salle de billard. — Dans toutes trois, les membres peuvent faire adm<strong>et</strong>tre dans la sociétéles étrangers leurs amis, pendant le temps que ceux-ci séjournent à <strong>Cherbourg</strong>. — La cotisation annuelle pour chacune estde 40 fr. par an.CHAMBRE DE COMMERCE.La chambre de commerce de <strong>Cherbourg</strong> a été créée par ordonnance royale <strong>du</strong> 15 décembre 1836 ; elle comprend dans<strong>ses</strong> attributions les arrondissemens de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de Valognes ; <strong>ses</strong> séances ont lieu à l'hôtel de ville.COURSES DE CHEVAUX.Caen <strong>et</strong> S.t-Lo avaient des cour<strong>ses</strong> de chevaux depuis plusieurs années, lorsqu'on conçut le proj<strong>et</strong> d'en établir desemblables à <strong>Cherbourg</strong> ; il y avait de grands obstacles à vaincre : mais les citoyens qui avaient formé ce proj<strong>et</strong> redoublèrentde zèle, <strong>et</strong> le succès couronna leurs efforts ; une souscription fut ouverte,[p. 305]elle donna 700 fr. ; le conseil municipal en ajouta 300, <strong>et</strong> les premières cour<strong>ses</strong> eurent lieu les 25 <strong>et</strong> 26 octobre 1836 sur laplage des Mielles, derrière l'établissement des bains de mer ; malgré la saison avancée, une grande foule assistait à c<strong>et</strong>te


fête, qui se termina par un bal dans la salle des Bains.Encouragés par ce premier succès, les membres <strong>du</strong> comité choisirent pour l'année suivante une époque plus favorable, <strong>et</strong>fixèrent les cour<strong>ses</strong> aux 18 <strong>et</strong> 19 juill<strong>et</strong> 1837 ; le conseil général <strong>et</strong> le gouvernement avaient ajouté leurs encouragements àceux des souscripteurs <strong>et</strong> <strong>du</strong> conseil municipal ; les prix étaient au nombre de six ; des concurrents, beaucoup plusnombreux, se présentèrent, <strong>et</strong> le nombre des étrangers fut plus que triplé.Cela devait stimuler les esprits, <strong>et</strong> les cour<strong>ses</strong> de 1838 s'ouvrirent avec plus d'appareil encore que les annéesprécédentes ; elles eurent lieu les 22 <strong>et</strong> 23 juill<strong>et</strong> ; huit prix avaient été indiqués : sept seulement furent gagnés, le huitième,qui devait être donné à des chevaux attelés, n'ayant pas été disputé faute de voiture ; le second jour, un pari particulier futvidé par une course au galop entre trois poneys. M. le <strong>du</strong>c d'Orléans donna un prix de 500 fr. ; le total des sommesdistribuées pour les prix s'élevait à 3,100 fr. ; les 300 f. <strong>du</strong> prix destiné aux chevaux attelés ont été réservés pour êtreemployés aux cour<strong>ses</strong> de 1839.Celles-ci ont eu lieu les 10 <strong>et</strong> 11 août ; trois prix ont été distribuée ; il y a eu des cour<strong>ses</strong> avec voitures[p. 306]attelées à un <strong>et</strong> deux chevaux ; le conseil général, le conseil municipal <strong>et</strong> M. le <strong>du</strong>c d'Orléans ont, comme les annéesprécédentes, encouragé c<strong>et</strong>te institution. Le total des sommes distribuées en prix a été de 3,200 f.Deuxième partie.LE ROULE.[p. 1]NOUVEAUGUIDE DU VOYAGEURA CHERBOURGAlentours de la ville.Nous avons déjà parlé <strong>du</strong> Roule (voyez page 107 <strong>et</strong> suivante) <strong>et</strong> nous n'aurons que quelques mots à ajouter.C<strong>et</strong>te montagne a 119 mètres au-dessus <strong>du</strong> niveau des bas<strong>ses</strong> mers d'équinoxe ; elle est composée de grès quartzeux ;on y a aussi découvert un filon de sulfate de baryte, <strong>et</strong> l'on exploitait autrefois une carrière de phyllades auprès de la nouvelleroute de Paris. C'est de la partie N.-O <strong>du</strong> Roule que sont tirés les blocs employés à la construction de la Digue. Deux gruesde nouvelle invention <strong>et</strong> un p<strong>et</strong>it chemin à rainures de fer, qui traverse la route en deux[p. 2]points, servent à faciliter le transport de ces blocs jusqu'au bassin de commerce. Là, une nouvelle machine les embarque, <strong>et</strong>,remorquées par un bateau à vapeur, les lourdes embarcations les apportent à ceux qui les doivent employer. Nous parleronsplus loin de la découverte d'antiquités faite sur un des versants <strong>du</strong> Roule. (Voyez ANTIQUITES ROMAINES).QUINCAMPOIX. — LA FAUCONNIÈRE. — LE TÉLÉGRAPHE.En laissant c<strong>et</strong>te montagne à gauche, pour se diriger <strong>du</strong> côté de Valognes, on trouve un peu plus loin, <strong>du</strong> côté opposé, unchemin qui con<strong>du</strong>it au joli vallon de Quincampoix.Quincampoix est un de ces lieux où l'on va errer quand on a le coeur jeune <strong>et</strong> l'imagination rêveuse. On aime à le voirs'abriter frileusement derrière les rochers, comme un oiseau dans son nid ; avec <strong>ses</strong> jolies maisonn<strong>et</strong>tes, sa rivière luisante ausoleil au milieu des aunes <strong>et</strong> des saules blafards qui la bordent dans son cours sinueux à travers les vertes prairies ; son bruitd'eaux <strong>et</strong> de moulins [118], <strong>ses</strong> côteaux couverts de bois, de pommiers, d'enclos <strong>et</strong> de jaunes moissons balancées par levent. On se plaît à suivre de l'oeil c<strong>et</strong>te double rangée de collines tortueu<strong>ses</strong> <strong>et</strong>[p. 3]


disparaissant les unes derrière les autres avec leurs flancs verts ou bruns ; leurs somm<strong>et</strong>s couverts d'arbres ou de rocailles ;à s'arrêter devant c<strong>et</strong>te Roche qui pend, dont les blocs fendillés menacent depuis quelques siècles le hameau bâti de leursdébris ; à grimper sur les collines <strong>et</strong> à laisser errer <strong>ses</strong> pensées vagabondes dans les courbures des vallons brumeux, dansles arbres des bois, derrière ces clochers épars <strong>et</strong> ces p<strong>et</strong>its hameaux blancs, d'où la fumée s'élève ; ou sur les pas de cesjolies laitières qui, la cruche de cuivre bien luisante sur l'épaule, viennent le soir traire en chantant dans les prés d'alentour, oubien encore sur la mer, lorsqu'une voile apparaît à l'horizon <strong>et</strong> se détache, blanche, de l'azur <strong>du</strong> ciel <strong>et</strong> des eaux.Sur la Fauconnière, celle des collines qui avec le Roule encaisse la route de Paris à l'entrée de la ville, on a établi untélégraphe qui, avec sa p<strong>et</strong>ite tour arrondie semble de loin un mystérieux géant à demi-enterré dans la montagne <strong>et</strong> faisantmouvoir de temps en temps <strong>ses</strong> grands bras échelonnés.Ce télégraphe fut mis en activité le 1. er mai 1835. Il est coupé à Avranches par la ligne de Brest. La ramification à laquelle ilappartient comprend une division de quinze postes dont chacune a deux stationnaires.Le directeur <strong>du</strong> télégraphe a seul le secr<strong>et</strong> des dépêches ; il est l'intermédiaire entre les ministres <strong>et</strong> les autoritéssupérieures de la ville. Il faut, lorsque[p. 4]le temps est favorable, 3'56"pour qu'un signal parti de <strong>Cherbourg</strong> arrive à Paris.La Fauconnière est comme le Roule formée de grès veiné de quartz <strong>et</strong> recouverte d'une terre végétale noire, entremêléede racines de bruyères <strong>et</strong> d'ajoncs ; elle forme une espèce de tourbe qu'on enlève pour brûler, sous le nom de blête.[p. 5]ANTIQUITÉS CELTIQUES DES ENVIRONSDE CHERBOURG.Notre pays, autrefois couvert d'épais<strong>ses</strong> forêts, coupé de landes arides, entouré de falai<strong>ses</strong> rocailleu<strong>ses</strong> où la mer vientmugir en écumant, paraît avoir été singulièrement chéri des Druides qui y ont laissé de nombreux monuments de leur culte ;nous allons indiquer sommairement les principaux les <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong>.Ces monuments sont différents de formes <strong>et</strong> paraissent avoir servi à des usages différents :Les uns se présentent au milieu d'un bois bien sombre, bien touffu, ou sur le somm<strong>et</strong> d'une montagne nue <strong>et</strong> rocailleuse,sous la forme d'une pierre ou table, non taillée, presque toujours de grès, placée horizontalement sur le sol, <strong>et</strong> quelquefoisbien loin des rochers d'où elle a été extraite. Il y a deux monuments de ce genre aux <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong>, l'un àBricquebec sur la colline des Gros<strong>ses</strong> Roches, l'autre dans la commune de Carneville.D'autres, <strong>et</strong> ce sont les plus imposants, sont quelquefois placés près d'un ruisseau sur le penchant d'une colline <strong>et</strong>s'élèvent en majestueuse colonne de pierre brute, triangulaire, quadrangulaire, pyramidale, <strong>et</strong> apparaissent blancs malgré leslichens qui les recouvrent, au milieu des arbres au tronc gris, au vert <strong>et</strong> épais feuillage. Autour de ces pierres tout estmystérieux ; la fontaine des <strong>environs</strong> porte[p. 6]le nom de Fontaine des Fées, <strong>et</strong> ces p<strong>et</strong>its êtres nocturnes viennent quelquefois y laver leur linge. Souvent pendant la nuit onles a enten<strong>du</strong>s rire <strong>et</strong> ronder autour <strong>du</strong> monument, puis au moindre bruit se cacher sous les roches voisines dans lesinterstices des pierres. Ailleurs ces colonnes sont placées sur un versant en face de la mer. Ceux qui ont été assez osés pouren approcher la nuit de Noël pendant la messe de minuit, se sont aperçus qu'il tournaient sur eux-mêmes ; ils ont enten<strong>du</strong> descris épouvantables dans le bois ou dans le creux des falai<strong>ses</strong> <strong>et</strong> ont vu des yeux flamboyants étinceler dans l'ombre. Cespierres sont très-nombreu<strong>ses</strong> dans les <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong>. On les appelle vulgairement pierres butées, pierres levées outournantes Les savants leur donnent le nom de menhirs ou peulvants.Parmi les monuments de ce genre on cite : les deux menhirs de Teurthéville-Hague, placés dans la vallée <strong>du</strong> Nér<strong>et</strong>, à peude distance l'un de l'autre, <strong>et</strong> hauts de neuf pieds, ceux des Pieux sur le penchant d'une falaise, de Négreville, près la Douve<strong>et</strong> de Carneville. Celui-ci est haut de douze pieds, <strong>et</strong> a pour base un triangle rectangle ; il est placé sur le somm<strong>et</strong> d'unecolline, au milieu d'un amas de granits brisés. On cite encore celui de Cosqueville, étranglé à la base <strong>et</strong> terminé par unepointe conique, peut-être travaillée de main d'homme, <strong>et</strong> les deux menhirs de Saint-Pierre-Eglise, dont l'un, le plusconsidérable <strong>du</strong> département, nommé la longue pierre,


[p. 7]à base triangulaire, est haut de douze pieds <strong>et</strong> demi <strong>et</strong> épais de cinq pieds sur trois pieds neuf pouces ; il est un peu incliné.Le second qui est moins grand, est aussi placé auprès d'un ruisseau à un quart de lieue au nord <strong>du</strong> bourg. — Ces troismonuments forment ce qu'on appelle dans le pays le mariage des trois princes<strong>ses</strong>. La dot de ces princes<strong>ses</strong> est, ajoute-t-on,enfouie dans le triangle déterminé par ces trois pierres. On y a souvent fait des fouilles afin de la découvrir, ainsi qu'àMontaigu-la-Bris<strong>et</strong>te, autre commune <strong>du</strong> Val-de-Saire, où des pierres semblables se r<strong>et</strong>rouvent avec la même tradition.Il y a encore des menhirs à Bouillon, à Quinéville, à Maupertus, au Mesnil-au-Val. Il existait aussi autrefois une pierre auserpent à Flamanville, détruite en 1725, une pierre butée auprès de la ferme de ce nom, à Tourlaville, sur la route deValognes, deux à Fermanville, une à Breuville, <strong>et</strong> sur les côtes beaucoup d'autres qui ont été renversées pour servir à laconstruction <strong>du</strong> port de <strong>Cherbourg</strong>.D'autres monuments qui paraissent avoir aussi joué un grand rôle dans le culte druidique, sont les pierres connues sous lenom de logans ou pierres branlantes.C'est ordinairement un bloc placé en équilibre sur un autre, de manière à n'avoir qu'un point d'appui <strong>et</strong> à pouvoir être misfacilement en mouvement. Quelquefois ces roches tremblantes étaient énormes. Elles ont attiré l'attention de tous ceux qui <strong>ses</strong>ont[p. 8]occupés d'antiquités ou de curiosités naturelles. C'était à ce qu'on croit des pierres d'épreuves pour les femmes dont lacon<strong>du</strong>ite était suspecte. Malheur à celle dont le corps était trop faible, les muscles trop délicats pour déterminer le mouvementdemandé ! Sa mort expiait la faute de la nature. Ces monuments qui sont communs en Br<strong>et</strong>agne sont assez rares dans ledépartement de la Manche. Le seul qu'on y trouve est situé à Lithaire, arrondissement de Coutances. Il est placé sur la pointed'un rocher au haut d'une montagne pittoresque, hérissée de rocs <strong>et</strong> très-escarpée. En 1804 il y en avait encore un, nomméle roc tremblant, situé au bord de la mer, sur la limite des communes de Cosqueville <strong>et</strong> de Fermanville ; il avait cent mètrescubes. On l'a détruit pour les travaux <strong>du</strong> port de <strong>Cherbourg</strong> ainsi qu'un autre placé à Br<strong>et</strong>teville-en-Saire, commune voisine.Souvent aussi sur le haut de grandes falai<strong>ses</strong> arides dont les flancs criblés de crevas<strong>ses</strong>, parsemés de gros blocs de grès,où à peine quelques ajoncs noirs, quelques perce-pierre, quelques gazons d'Olympe daignent étaler leurs p<strong>et</strong>ites fleurs, aubord d'une mer bleue ou houleuse qui se débat parmi les rochers bizarrement contournés de la côte, <strong>et</strong> dont les p<strong>et</strong>itesvagues agitées reflètent les rayons <strong>du</strong> soleil en myriades d'étincelles éblouissantes, ou sur le somm<strong>et</strong> d'une montagne dont lacroupe arrondie <strong>et</strong> nue domine de fertilles vallons, près d'un amas de roches[p. 9]crevassées, on trouve trois pierres, vierges comme la nature environnante, fixées solidement dans le sol <strong>et</strong> surmontées d'unequatrième roche beaucoup plus grosse, de forme irrégulière. Ces monuments sont hauts de dix ou douze pieds <strong>et</strong> connusdans le pays sous le nom de roches à trois pieds ou pierres levées. Les savants leur donnent celui de dolmen. Les Druidesqui paraissent avoir senti si bien la majesté des sites <strong>et</strong> la terreur des lieux, n'auraient eu garde d'oublier une pareillesituation ; aussi paraît-il prouvé que les dolmens qu'on trouve à Martinvast, sur le Hurc, près de la ferme de l'Oraille, <strong>et</strong> àFlamanville, ont une origine druidique. Ce dernier monument est situé sur une falaise très-haute, devant une vigie. On y aplacé un mât pour arborer les signaux sémaphoriques. Il est de granit comme toute la côte. — Celui de l'Oraille est de quartzgrénu.A Vauville, <strong>du</strong> haut d'une lande très-élevée, d'où la vue plane au loin sur les <strong>du</strong>nes sablonneu<strong>ses</strong> d'une grande baie, surles falai<strong>ses</strong> qui, avec leurs bords variés, leurs débris de rocailles <strong>et</strong> leurs précipices, se recourbent comme un grand calmarpour renfermer une partie de la mer, au loin sur ces belles îles enlevées à la France, <strong>et</strong> qui ne paraissent que comme unebrume à l'horizon, <strong>et</strong> auprès, sur l'ancien prieuré de S.t-Hermel, situé comme un vieux fort <strong>du</strong> moyen-âge au somm<strong>et</strong> d'unecolline voisine, on trouve un monument d'une cinquième espèce, auquel les savants[p. 10]ont donné le nom de galeries couvertes. Celui de Vauville porte chez les habitants celui de roches pouquelées, ou pierrespouquelées, c'est-à-dire adorées. Il y a dans le Cotentin plusieurs autres galeries couvertes. Elles paraissent toutes avoirconsisté en une double rangée de pierres, presque toujours de grès quartzeux ou de quartz grénu, rarement de granit,apporté de loin, recouvertes de roches de la même espèce. La largeur intérieure est de trois ou quatre pieds, la hauteur variede 2 à 4 pieds <strong>et</strong> leur longueur de 35 à 60 pieds. On les trouve presque toujours sur des hauteurs. Les habitants <strong>du</strong> paysracontent que ces pierres ont été apportées par les fées, nation d'une taille extrêmement p<strong>et</strong>ite ; ces galeries étaient leurdemeure <strong>et</strong> contiennent encore leurs trésors. On y faisait autrefois <strong>ses</strong> prières.


Trois monuments de ce genre se trouvent à Bricquebec, placés tous trois en ligne droite sur la colline des Gros<strong>ses</strong>-Roches, dans la forêt usagère : l'un près <strong>du</strong> hameau des Forges, sur un plateau qui domine la Douve, celui de la P<strong>et</strong>ite-Roche, le plus considérable <strong>du</strong> département, <strong>et</strong> celui de Castillon, à l'extrémité <strong>du</strong>quel on avait joint un dolmen. Un autre s<strong>et</strong>rouve sur la pente douce <strong>et</strong> exposée au midi d'une lande de la Haie d'Ectot, non loin <strong>du</strong> chemin de Bricquebec à Barneville,au-dessous d'une fontaine d'eau minérale.Les deux autres, plus rapprochés de <strong>Cherbourg</strong>,[p. 11]sont situés, le premier, au-dessus <strong>du</strong> château de Tourlaville, au sud de la route de <strong>Cherbourg</strong> à Barfleur, sur la lande St-Gabriel, dans un lieu d'où l'on domine toute l'anse de <strong>Cherbourg</strong>, à l'ouest de laquelle on voit quelquefois, par les beaux soirsd'été, le soleil se coucher, baigné de clartés resplendissantes, dans la mer qui reflète son disque <strong>et</strong> les magiques couleursdes nuages qui l'entourent.Le second se trouve dans un champ sur une hauteur entre les communes de Br<strong>et</strong>teville <strong>et</strong> de Digosville. Ils sont désignéssous le nom de pierres encouplées. Peut-être la hauteur où est placé le fort des Coupl<strong>et</strong>s dans la commune d'Equeurdreville,ne doit-il son nom qu'à une semblable construction.Presque tous ces monuments sont dégradés, soit par les fouilles <strong>et</strong> les travaux récents des hommes, soit par les suites dela proscription que les premiers chrétiens étendirent sur tout ce qui avait servi à un autre culte que le leur.On trouve encore sur la lande des Pieux un ouvrage d'une espèce particulière ; c'est une grande enceinte rectangulaire,formée de fossés construits en pierres recouvertes de terre, élevé à 1 mètre à peu près au-dessus <strong>du</strong> sol. Il a 23 mètres sur17. Dans l'intérieur, <strong>du</strong> côté <strong>du</strong> sud, se trouve un autre enclos de forme elliptique construit de la même manière que le grand.Il y a encore diver<strong>ses</strong> autres constructions dont on ne peut guère avoir une idée que sur le terrain. Ce monument a étédécouvert <strong>et</strong> décrit par M. Ragonde,[p. 12]qui a cru y reconnaître un temène ou enceinte sacrée dont l'origine remonterait à l'époque druidique.On voit encore sur c<strong>et</strong>te lande deux tumuli ou monceaux de terre allongés, de forme demi-cylindrique ou prismatique. Il yen a de semblables sur beaucoup de hauteurs inhabitées des côtes <strong>du</strong> département. On croit avec d'autant plus de raisonque ce sont des tombeaux, qu'on y a souvent trouvé, en les fouillant, des monnaies <strong>et</strong> des armes.Mais un autre monument bien autrement remarquable que ceux dont nous avons parlé jusqu'ici se trouve dans la paroissede Kerkeville (Kerk, église) ou Querqueville (quercuum villa), je veux parler de la p<strong>et</strong>ite église de St-Germain, placée dans lecim<strong>et</strong>ière sur une hauteur à côté de l'église paroissiale : sa forme primitive était un trèfle de 24 pieds <strong>du</strong> N. au S. <strong>et</strong> de 34 del'E. à l'O., terminé par trois dômes dont l'un, celui <strong>du</strong> milieu, avait une couverture circulaire de 3 pieds de diamètre. Il y avaitaussi une porte d'entrée <strong>et</strong> une ouverture dans chaque dôme à l'E. La maçonnerie était en zigzag, sorte de construction quine se trouve dans le département qu'aux égli<strong>ses</strong> de Ste-Croix de St-Lo, <strong>et</strong> d'Equeurdreville ; la hauteur est de 11 pieds àpartir <strong>du</strong> sol, <strong>et</strong> elle n'est pas différente sous les trois dômes ; les fenêtres étaient cintrées.Depuis sa première fondation on lui a fait subir une grande métamorphose ; sa forme trifoliée est devenue celle d'une croixà extrémités obtu<strong>ses</strong>, par[p. 13]l'addition d'une p<strong>et</strong>ite nef de 16 pieds de long ; sur l'un des trois dômes on a élevé un clocher qui le surpasse de 20 pieds, <strong>et</strong>les trois ouvertures cintrées <strong>et</strong> placées à l'E. ont été remplacées par quatre p<strong>et</strong>ites fenêtres ogives au N. <strong>et</strong> au S. Cesnouvelles constructions sont en pierres d'assi<strong>ses</strong> horizontales. Il est probable que c'est à l'époque de c<strong>et</strong>te restauration quece temple a pris le nom de St-Germain, à l'exemple d'un grand nombre d'autres égli<strong>ses</strong> <strong>du</strong> Cotentin qui ont voulu ainsihonorer le nom de leur apôtre.Ainsi il est clair que ce temple a eu une destination dans une religion antérieure au christianisme ; or, dit M. Asselin, à quinous empruntons ces détails, il n'y a que le culte druidique qui ait chez nous précédé le christianisme ; c'est donc à ce cultequ'il a dû appartenir, non pas aux Gaulois primitifs, sans doute, mais aux Gaulois de l'époque romaine qui bâtirent en eff<strong>et</strong>des temples, comme on en trouve la preuve dans différents auteurs, quoiqu'à l'origine ils n'eussent pas plus de constructionsreligieu<strong>ses</strong> que les autres peuples à demi-civilisés.On a trouvé auprès de presque tous les monuments dont nous avons parlé, des coffres en pierres qu'on croit être des


tombeaux, des monnaies grossières <strong>et</strong> sans légendes, des croix, des haches dont l'usage est inconnu. On a même trouvé àBricquebec un moule servant à fondre ces instruments. Il est au cabin<strong>et</strong> d'antiquités de la ville.[p. 14]Nous ne nous étendrons pas davantage sur ce suj<strong>et</strong>, <strong>et</strong> nous renverrons nos lecteurs aux sources où nous avons puisé[119].[p. 15]ANTIQUITÉS ROMAINES.Quoique moins particulières au pays <strong>et</strong> moins importantes que les antiquités celtiques, les antiquités romainesdécouvertes dans l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong> méritent cependant de trouver place dans ce volume.Le temps a détruit un grand nombre des vestiges de la domination romaine dans nos <strong>environs</strong>, <strong>et</strong> un grand nombred'ouvrages de ces conquérants, un grand nombre de découvertes de médailles <strong>et</strong> d'autres obj<strong>et</strong>s semblables ont passéinaperçues parce qu'on ne savait pas en apprécier l'importance, <strong>et</strong> l'on ne peut citer que ce qui a été trouvé depuis unecentaine d'années au plus. Nous parlerons d'abord des voies romaines.Trois voies romaines de grande communication ont attiré l'attention des savants : l'une qui a été l'obj<strong>et</strong> des travaux de M.de Gerville, partait de Coriallum, situé d'après lui, dans le quartier des Mielles [120][p. 16]traversait le hameau Quevillon, le grand camp de Tourlaville (auprès de la Glacerie) arrivait à Alauna (Alleaume), <strong>et</strong> de làsuivant le Chemin Perré, se rendait à Cosedia (Coutances), en passant par Pont-L'abbé <strong>et</strong> Périers ; une autre, découverte parM. Ragonde <strong>et</strong> dont on voit des traces dans la commune d'Octeville entre le fort de ce nom <strong>et</strong> la Croix-Bonamy, <strong>et</strong> au-delà dece hameau en suivant la direction de Flottemanville, dans une voie appelée le Grand-Chemin, traversait les communes deNouainville, Flottemanville, Sideville, Teurthéville <strong>et</strong> Benoistville, arrivait aux Pieux, puis, suivant toujours la côte <strong>et</strong> passantprès d'un camp romain situé auprès de Carter<strong>et</strong>, par Portbail, La Haye-<strong>du</strong>-Puits <strong>et</strong> Lessay, se rendait aussi à Coutances. Ilprétend que ce chemin est antérieur au Chemin-Perré, dont il ne conteste cependant pas l'origine romaine. — Une troisièmevoie, suivant M. de Gerville, con<strong>du</strong>isait <strong>du</strong> port d'Omonville au port de Bail (Portbail).Voici par ordre de dates les plus importantes découvertes d'antiquités romaines faites dans les <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong> :En 1741, un tombeau romain fut découvert vers le milieu d'une des deux pentes de la montagne <strong>du</strong> Roule ; on ne sait pluslaquelle. Il avait six pieds <strong>et</strong> demi de largeur, deux de hauteur sur le devant, <strong>et</strong> deux <strong>et</strong> demi dans le fond ; l'entrée en étaitinclinée <strong>et</strong> soutenue par trois pierres brutes en forme de[p. 17]colonne ; le tombeau était creusé dans le roc ; l'urne cinéraire se trouvait au fond <strong>et</strong> contenait une ceinture d'or <strong>et</strong> environ 200médailles en bronze des empereurs Antonin, Marc-Aurèle, Commode, de Faustine <strong>et</strong> de Lucille, avec des trophées <strong>et</strong>divinités romaines sur le revers. Ce tombeau a été gravé dans le 16. e volume de l'académie des inscriptions avec la relationde c<strong>et</strong>te découverte.Dans un champ nommé l'ancien Hameau, quoique la tradition n'y place pas de maisons, <strong>et</strong> tout parsemé de briques <strong>et</strong> depoteries que l'on croit d'origine romaine, un habitant de Sottevast avait, en 1819, fait abattre un fossé, <strong>et</strong> on labourait le terrainsur lequel il s'était trouvé, lorsque la charrue se trouva arrêtée par un obstacle ; quand elle l'eut franchi, elle ramena sur laterre une grande quantité de pièces de monnaie si noircies <strong>et</strong> si couvertes de terre, qu'il était impossible d'y rien distinguer :les habitants en ramassèrent, <strong>et</strong> sans en faire de cas, se les distribuèrent comme de mauvais deniers ; on cite même unremouleur qui en ach<strong>et</strong>a au poids à plus vil prix que le cuivre. Cependant le lendemain quelqu'un s'avisa d'en faire bouillirdans de l'eau avec <strong>du</strong> sel, <strong>et</strong> découvrit que c'était de l'argent. Les antiquaires d'ailleurs avaient eu connaissance de ladécouverte ; ils se transportèrent sur les lieux <strong>et</strong> en firent bientôt monter le prix ; il y en avait au moins 4 ou 5,000 ; ellesavaient été renfermées dans un vase de cuivre que la charrue avait mis en p<strong>et</strong>its fragments.[p. 18]Ces médailles étaient toutes <strong>du</strong> moyen-empire <strong>et</strong> comprenaient un espace de 75 années, depuis l'avènement de Septime-Sevère à l'empire jusqu'à la mort de Gallien. Quelques-unes sont très-précieu<strong>ses</strong>. « J'y ai vu, dit M. Asselin, une Didia-Clara,


au Gordien d'Afrique, père ; un Gordien d'Afrique, fils, <strong>et</strong> les autres têtes moins rares, mais plusieurs fois répétées, d'Albin,Macrin, Dia<strong>du</strong>menien, Aquila-Severa, Orbians, Maxime, Balbin, Puppien, AEmilien, Muriana. Il y avait en outre, parmi le grandnombre de médailles dont les têtes sont communes, beaucoup de revers plus ou moins rares ; je citerai seulement Julia-Moesa, au revers de sa consécration, Alexandre-Sevère <strong>et</strong> Gordien Pie, tous deux au revers des va<strong>ses</strong> pontificaux, <strong>et</strong> Saloninau revers de l'aigle impérial. Encore, ajoute-t-il, je n'en ai vu que quinze ou dix-huit cents, <strong>et</strong> il n'est pas douteux que dans lenombre des autres il n'y eût des rar<strong>et</strong>és dans la même proportion que celles que j'ai pu voir. — Ces médailles sont d'une belleconservation, beaucoup à fleur de coin. »En 1822, un paysan en bêchant dans un champ à Digulleville, découvrit un p<strong>et</strong>it cerf grossièrement travaillé, un masquehumain, <strong>et</strong> le tronc d'une statu<strong>et</strong>te revêtue d'une espèce de casaque croisée sur la poitrine <strong>et</strong> descendant seulement à lahauteur des genoux ; la tête avait été coupée antérieurement au dépôt. Le tout était en bronze, recouvert d'un beau vernisnaturel ou patina, <strong>et</strong> <strong>du</strong> travail le plus grossier, la[p. 19]statue surtout ; encouragé par c<strong>et</strong>te trouvaille, il continua de bêcher avec plus d'attention, <strong>et</strong> découvrit encore une hache enfer, recouverte sur les deux côtés de plaques de cuivre bien soudées, <strong>et</strong> cinq statu<strong>et</strong>tes en platre, que leur pose <strong>et</strong> leur nuditéabsolue semble désigner comme des Vénus, d'un travail bien supérieur à celui des obj<strong>et</strong>s en bronze.M. Duchevreuil à qui on les envoya, se rendit sur les lieux <strong>et</strong> trouva encore un p<strong>et</strong>it socle <strong>et</strong> un boeuf en bronze, un<strong>nouveau</strong> masque, un oiseau bien informe, <strong>et</strong> quelques fragments de poterie. Au reste pas de médailles, rien qui puisse faireprésumer l'époque de ce dépôt. « Probablement, dit le savant antiquaire, ces obj<strong>et</strong>s sont la dépouille <strong>du</strong> temple d'un pauvrepaïen, <strong>ses</strong> penates, <strong>ses</strong> instruments de sacrifice <strong>et</strong> les monuments de sa reconnaissance <strong>et</strong> de sa piété. »Nous avons déjà parlé de la maison romaine qui a été découverte dans les Mielles de <strong>Cherbourg</strong> ; un certain nombred'antiquités assez remarquables ont été trouvées, non pas dans c<strong>et</strong>te maison, mais sur la terre végétale dans les <strong>environs</strong>, cequi ferait croire que l'habitant fut surpris par la tempête. Quoi qu'il en soit, voici, encore d'après M. Asselin, les obj<strong>et</strong>s qu'on arecueillis :1.° Trois ou quatre cents médailles en bronze <strong>du</strong> moyen-empire avant Septime-Sevère, la plupart assez bien conservées,trois ou quatre impériales d'argent <strong>et</strong> autant de grands bronzes, dont un Trajan[p. 20]au revers de forum Trajani, un des plus rares de c<strong>et</strong>te tête d'empereur ; deux ou trois consulaires d'argent, dont un de lafamille Didia, deux de la famille Porcia.2.° Douze ou quinze figurines de Vénus sortant <strong>du</strong> bain, en terre cuite, blanche <strong>et</strong> polie, plus ou moins mutilées, toutescoulées dans le même moule <strong>et</strong> formées de deux demi-bos<strong>ses</strong> réunies au moyen d'un collage.3.° Cinq ou six figurines de chevaux, mutilées de manière qu'il ne reste que la tête <strong>et</strong> le corps, dans l'attitude <strong>du</strong> galop, <strong>et</strong>ne sortant pas <strong>du</strong> même moule. Ces figures se trouvaient dans tous les laraires romains ; c'était un hommage à Neptune.4.° Une femme assise dans un grand fauteuil, s outenant de <strong>ses</strong> deux bras un enfant appuyé sur sa poitrine (12centimètres). M. Asselin croit que c'est une statu<strong>et</strong>te de Lucine, la déesse des accouchements. C<strong>et</strong>te figure se trouve aussigravée dans la Religion des Gaulois de dom Martin <strong>et</strong> dans les Mémoires des Antiquaires de Normandie, 1826.5.° Une tête d'enfant qui rit. Elle se r<strong>et</strong>rouve aussi absolument la même dans les Antiquités de Caylus (VII, pl. 93).6.° Un Mercure en bronze, « d'une bonne conser vation, dit M. Asselin, mais d'un travail assez barbare pour qu'il annoncela décadence. »7.° Deux p<strong>et</strong>ites meules d'un moulin à bras de 42 centimètres de diamètre, l'une convexe <strong>et</strong> l'autre concave.Nous citerons encore les découvertes suivantes :[p. 21]En 1765, sur un des flancs <strong>du</strong> Roule, deux plaques d'or ayant la forme de hausse-col, <strong>et</strong> qui furent ven<strong>du</strong>es à un orfèvrede Caen. — En 1768, sur la même montagne, une figurine en bronze représentant un personnage en toge avec unecouronne de laurier, une patère <strong>et</strong> un volumen ; elle est au cabin<strong>et</strong> d'antiques de <strong>Cherbourg</strong>. — En 1782, dans la commune


<strong>du</strong> Vicel (arrondissement de Valognes), au-dessous de la Chapelle Saint-Jean, quelques médailles en bronze, puis dans lecreux d'une colonne de granit, recouverte par un autre bloc, environ mille impériales d'argent <strong>du</strong> haut <strong>et</strong> bas empire, <strong>et</strong> deuxp<strong>et</strong>ites cuillères d'or terminées par un anneau. — En 1785, sous un chêne <strong>du</strong> Mont-Catre, une plaque d'or pesant au moinsneuf onces ; elle fut fon<strong>du</strong>e par un orfèvre de Valognes ; on ne sait quel en pouvait être l'usage. — Trois ans plus tard dansl'exploitation <strong>du</strong> Grand-Cat<strong>et</strong> pour la construction de la Digue, sous une grosse pierre, près de l'endroit appelé le Brick,soixante ou quatre-vingts médailles romaines qui ont été per<strong>du</strong>es. — 1791, à Etoubeville, commune de Helleville, desmédailles <strong>et</strong> des médaillons d'or très-précieux ; les ouvriers qui les avaient trouvés se les partagèrent, se gardèrent le secr<strong>et</strong><strong>et</strong> les vendirent à des étrangers pour ne pas être découverts ; ces obj<strong>et</strong>s sont aujourd'hui presque tous au cabin<strong>et</strong> <strong>du</strong> roi. —L'année suivante, dans un éboulement qui se fit sur les falai<strong>ses</strong> de Gréville, environ 60 médailles romaines,[p. 22]toutes <strong>du</strong> haut empire. M. Asselin possède les mieux conservées. — En 1806, un Néron <strong>et</strong> un Marc-Aurèle dans la forêt deBrix, près <strong>du</strong> Mont-à-la-Kaine. Le Marc-Aurèle fait aujourd'hui partie de la collection de M. Asselin. — En 1818, à Hardinvast,deux Trajan d'or avec des médailles d'argent, presque toutes décomposées, acqui<strong>ses</strong> par M. Asselin. — En 1830, dans unfossé de Beaumont-Hague, un Trajan d'or, acquis par le même savant [121].[p. 23]PLANTES DES ENVIRONS DE CHERBOURG.(Nous devons une grande partie de la liste suivante aux travaux de MM. Delachapelle, ancien pharmacien <strong>et</strong> membre de l'académie de <strong>Cherbourg</strong>,<strong>et</strong> Bertrand Lachênée, qui, depuis plusieurs années, s'occupe de l'étude des plantes avec une activité <strong>et</strong> un zèle qu'on ne saurait trop encourager).Dicotylédones.RENONCULACEES.DICHLAMYDÉES.Clematis vitalba. — Anemone nemorosa. — Thalictrum flarum. — Ficaria ranonculoides.Ranunculus hederaceus, tripartitus, aquatilis <strong>et</strong> var., sceleratus, <strong>et</strong> var minimus, auricomus, repens <strong>et</strong> var., acris <strong>et</strong> var., bulbosus, philonotis <strong>et</strong> var.parviflorus, arvensis, lingua, flammula <strong>et</strong> var. — Myosurus minimus. — Helleborus fo<strong>et</strong>i<strong>du</strong>s, viridis. — Aquilegia vulgaris. — Caltha palustris. —Parnassia palustris.BERBERIDEES.Berberis vulgaris.NYMPHRACEES.Nympaea alba. — Nuphar lutea.PAPAVERACEES.Papaver hybri<strong>du</strong>m, argemone, rhaeas, <strong>du</strong>bium. — Chelidonium majus, glaucium.FUMARIEES,Fumaria officinalis, capreolata, media. — Corydalis claviculata.CRUCIFÈRES.Raphanus raphanistrum, sativus <strong>et</strong> var., maritimus. — Si napis nigra, arvensis, alba, orientalis. — Brassica campestris, napus, oleracea <strong>et</strong> var. —Hesperis alliaria, hortensis.Cheiranthus sinuatus, cheiri, <strong>et</strong> var. — Erysimum barbarea,


[p. 24]proecox. — Sisymbrium nasturtium, silvestre, sophia, officinale, tenuiflorum, murale. — Arabis thaliana. — Cardamine pratensis, hirsuta, silvatica. —Draba verna, muralis. — Cochlearia officinalis, danica, armoracia, anglica. — Coronopus vulgaris. — Lepidium campestre, sativum. — Hutchinsiap<strong>et</strong>raea. — Guepinia nudicaulis. — Capsella bursa pastoris. — Myagrum sativum. — Cakile maritima. — Crambe maritima. — Isatis tinctoria.VIOLACEES.Viola odorata, canina, tricolor <strong>et</strong> var., arvensis.POLYGALEES.Polygala vulgaris, serpyllacea.RESEDACEES.Reseda luteola, lutea, odorata, cultivée.DROSERACEES.Drosera rotundifolia.CISTINEES.Helianthemum guttatum, <strong>et</strong> var. plantagineum.CARYOPHYLLEES.Gypsophila muralis. — Saponaria officinalis. — Dianthus caryophyllus. — Silene inflata, uniflora, nutans, anglica, conica, muscipula. Cul. —Lychnis flos cuculi, dioica, sylvestris, githago. — Polycarpon t<strong>et</strong>raphyllum. — Sagina procumbens, ap<strong>et</strong>ala, erecta. — Alsine seg<strong>et</strong>alis. — Stellariaholostea, glauca, graminea, aquatica, media <strong>et</strong> var. — Holosteum umbellatum. — Elatine hydropiper. — Spergula arvensis, pentandra, nodosa,subulata. — Cerastium vulgatum, viscosum, semidecandrum, arvense, aquaticum. — Arenaria peploides, trinervia, serpyllifolia, tenuifolia <strong>et</strong> var., rubra,<strong>et</strong> var. marina, media.LINEES.Linum usitatissimum, angustifolium, catharticum. — Radiola millegrana.MALVACEES.Malva rotundifolia, silvestris, vulgaris, moschata <strong>et</strong> var, laciniata. — Althaea officinalis. — Lavatera arborea.TILIACEES.Tilia platyphylla, microphylla.HIPPOCASTANEES.AEsculus hippocastanum.ACERINEES.[p. 25]Acer pseudoplatanus, campestre.HYPERICEES.


Androsemum officinale. — Hypericum terapterum, perferatum, humifusum, linearifolium, pulchrum, hirsutum, elodes.VINIFERES.Vitis vinifera.GERANIEES.Geranium molle, dissectum, rotundifolium, robertianum, columbinum, pusillum. — Erodium cicutarium <strong>et</strong> var., moschatum, maritimum.OXALIDEES.Oxalis ac<strong>et</strong>osella, corniculata, stricta.RUTACEES.Ruta graveolens.CALICIFLORES.FRANGULACEES.Rhamnus frangula. — Evonymus europaeus. — Ilex aquilfolium.JUGLANDEES.Juglans regia.LEGUMINEUSES.Ulex europaeus, nanus. — Genista scoparia. — Ononis procurrens, var. repens, spinosa, <strong>et</strong> var. glabra. — Anthyllis vulneraria. — Trifoliumagrarium, procumbens, filiforme, fragiferum, subterraneum, pratense, sativum, alpestre, incarnatum, arvense, scabrum, striatum, repens, glomeratum,suffocatum. — Medicago sativa, lupulina, Willdenowii, maculata. — Trigonella ornithopodiodes. — Lotus corniculatus, <strong>et</strong> var. villosus, tenuifolius,angustissimus. — Phaseolus vulgaris. — Astragalus glycyphyllos. — Lathyrus pratensis, palustris, aphaca, sylvestris. — Pisum sativum, arvense. —Orobus tuberosa. — Vicia sativa <strong>et</strong> var., lathyroides, sepium, cracca, t<strong>et</strong>rasperma, hirsuta. — Fabavulgaris. — Ornithopus perpusillus. — Hypocrepiscomosa. — Onobrychis sativa.ROSACEES.Cerasus caproniana, juliana, avium. — Prunus spinosa, domestica. — Armeniaca vulgaris. — Persica vulgaris <strong>et</strong> var. — Spirae ulmaria. —Tormentilla erecta, reptans. — Potentilla reptans,[p. 26]fragaria, anserina. — Fragaria vesca. — Comarum palustre. — Geum urbanum. — Rubus fruticosus, idoeus, coesius, glan<strong>du</strong>losus, corylifolius. —Agrimonia eupatoria. — Poterium sanguisorba. — Sanguisorba officinalis. — Aphanes arvensis. — Rosa arvensis <strong>et</strong> var., pimpinellifolia, spinosissima,villosa, rubiginosa <strong>et</strong> var., canina <strong>et</strong> var. — Malus communis, acerba. — Pyrus communis. — Cratoegus oxyacantha <strong>et</strong> var., oxyacanthoides. —Mespylus germanica. — Sorbus aucuparia, domestica.MYRTINEES.Philadelphus coronarius. — Myrtus communis. Cultivées.CUCURBITACEES.Bryona dioica, — (Cucurbita maxima, lagenaria. — Cucumis melo, sativus. Cultivées.)ONAGRAIRES.


Callitriche aquatica <strong>et</strong> var. — Ceratophyllum demersum. — Myriophyllum verticillatum, spicatum <strong>et</strong> var. — Circea lut<strong>et</strong>iana. — Epilobium spicatum,intermedium, hirsutum, montanum, palustre, t<strong>et</strong>ragonum, molle.SALICARIEES.Lythrum salicaria, hyssopifolium. — Glaux maritima. — Peplis portula.TAMARASCINEES.Tamarix gallica.PORTULACEES.Portulaca oleracea. — Montia fontana, <strong>et</strong> var. major.PARONYCHIEES.Paronychia verticillata. — Hernaria glabra, hirsuta. — Corrigiola littoralis. — Scleranthus perennis, annuus.GROSSALARIEESRibes rubrum, nigrum, uva erispa, <strong>et</strong> var. grossularia.CRASSULACEESUmbilicus pen<strong>du</strong>linus. — Se<strong>du</strong>m telephium, dasyphyllum, anglicum, acre, sexangulare, reflexum. — Sempervivum tectorum.SAXIFRAGEES.Chrysiosplenium oppositifolium. — Saxifraga tridactylites.OMELLIFERES.Hydrocotyle vulgaris. — Sanicula europaea. — Apium p<strong>et</strong>roselinum,[p. 27]graveolens <strong>et</strong> var. sativum. — An<strong>et</strong>hum feniculum. — Smyrnium olusatrum. — Pastinica sativa. — Buplevrum odontites. — Caucalis arvensis,authriscus, nodifflora, scandicina. — Daucus carotta, hispi<strong>du</strong>s, gommifer. — Bunium denudatum. — Cicuta major. — Selinum oreoselinum. —Crithmum maritimum. — Heracleum sphondylium. — Angelica arkangelica. — Sium augustifolium, nodiflorum, repens. — Sisum verticillatum,inundatum, amomum. — OEnanthe fistulosa, pencedanifolia, pimpinelloides, crocata. — OEthusu cinapium. — Scandix pecten Veneris. —Chaerophyllum odoratum, temulum, sylvestre, cerefolium. — Imperatoria silvestris. — Seseli montanum. — Pimpinella saxifraga, magna, dissecta,dioica. — OEgopodium podagraria.CAPRIFOLIACEES.Lonycera periclymenum, caprifolium. — Viburnum lantana, opulus. — Sambucus nigra, ebulus — Comus sanguinea. — Hedera helix.LORANTHEES.Viscum album.RUBIACEES.Sherardia arvensis. — Asperula cynanchica. — Gallium verum, <strong>et</strong> var. littorale, cruciatum, palustre <strong>et</strong> var., mollugo <strong>et</strong> var., sylvestre, loeve,uliginosum, aparine. — Rubia lucida.VALERIANEES.


Valeriana officinalis. — Centranthus ruber. — Valerianella olitoria, dentata, carinata, eriocarpa.DIPSACEES.Dipsacus sylvestris, pilosus. — Scabiosa succisa, arvensis, atropurpurea. — Eryngium campestre, maritimum.SYNANTHEREES. — Chicoracées.Lampsana communis. — Prenanthes muralis. — Sonchus oleraceus, <strong>et</strong> var. asper, arvensis, palustris. — Lactuca sativa, virosa. — Hieraciumpilosella, auricula, <strong>et</strong> var monocalathi<strong>du</strong>m, murorum, umbellatum, sabau<strong>du</strong>m. — Crepis virens, scabra <strong>et</strong> var., biennis, tectorum, diffusa, agrestis. —Barkhausia fo<strong>et</strong>ida, teraxacifolia. — Taraxacum dens leonis, palustre. — Hypochaeris radicata. — Leontodon hirtum,[p. 28]autumnale <strong>et</strong> var. — Picris hieracioides. — Helminthia echioides. — Scorzonera humilis. — Tragopegon pratense, porrifolium. — Cichorium intybus,endivia.Car<strong>du</strong>acées.Onopordium acanthium. — Lappa tomentosa, minor, major. — Serratula tinctoria. — Centaurea nigra, jacea, nigrescens, cyanus, scabiosa,calcitrapa. — Car<strong>du</strong>us marianus ; tenuiflorus, achantoides, nutans, crispus. — Cirsium palustre, lanceolatum, dissectum vel anglicum, acaule, arvense,eriophorum. — Carlina vulgaris. — Cynara scolymus, car<strong>du</strong>nculus. — Eupatorium cannabinum. — P<strong>et</strong>asites vulgaris. — Tussilago farfara. —Gnaphallium luteo-album, rectum vel silvaticum, uliginosum, germanicum, montanum, dioicum, arvense. — Conyza squarrosa. — Tanac<strong>et</strong>umvulgare. — Artemisia vulgaris, maritima. — Absinthium vulgare. — Diotis candidissima.Radiées.Erigeron acre. — Aster tripolium. — Inula helenium, dysenterica, pulicaria, crithmoides. — Solidago virgaurea. — Senecio vulgaris, jacoboea,viscosus, sylvaticus, aquaticus. — Cineraria campestris. — Bellis perennis. — Matricaria chamomilla. — Pyr<strong>et</strong>hrum inodorum, parthenium. —Chrysanthemum leucanthemum, seg<strong>et</strong>um. — Calen<strong>du</strong>la arvensis. — Anthemis cotula, arvensis, nobilis, maritima. — Achillaea ptarmica,millefolium. — Bidens tripartita, cernua.CAMPANULACEES.Campanula pyramidalis, rapunculus, hederacea. — Phyteuma spicata.LOBELIACEES.Lobelia urens. — Jasione montana.VACCINIEES.Vaccinium myrtillus.ERICINEES.Erica vulgaris, cinerea, t<strong>et</strong>ralix, ciliaris.COROLLIFLORES.JASMINEES.Ligustrum vulgare. — Syringa vulgaris. — Fraxinus excelsior. — Jasminum officinale.APOCINEES.[p. 29]Vinca major, minor.


GENTIANEES.Gentiana pneunomanthe. — Chlora perfoliata. — Chironia centaurium, <strong>et</strong> var. fasciculata, palustris, pulchella. — Exacum filiforme. — Menyanthestrifoliata. — Villarsia nymphoides.CONVOLVULACEES.Convolvulus arvensis, sepium, soldanella. — Cucusta europaea.SOLANEES.Verbascum thapsus, nigrum, blattaria, blattaeoides. — Hyoscyamus niger. — Solanum nigrum, ochroleucum, miniatum, tuberosum. — Nicotianarustica.BORRAGINEES.Borrago officinalis. — Anchusa sempervirens. — Lycopsis arvensis. — Myosotis arvensis, intermedia, collina, versicolor, palustris, laxiflora. —Cynoglossum officinale. — Symphytum officinale. — Pulmonaria officinalis. — Echium vulgare. — Lithospermum officinale.ANTIRRHINEES.Scrophularia nodosa, aquatica, scorodonia, peregrina. — Linaria cymbalaria, elatine, spuria, arenaria, stricta, vulgaris. — Antirrhinum majus,oruntium. — Digitalis purpurea. — Limosella aquatica.UTRICULARIEES.Utricularia vulgaris, minor. — Pinguicula vulgaris, lusitanica.RHINANTACEES.Veronica spicata, serpillifolia, agrestis, pulchella. arvensis, <strong>et</strong> var. polyanthos, hederaefolia, chamaedris, montana, sctutellata, anagallis,beccabunga, officinalis. — Sibthorpia europaea. — Euphrasia officinalis, odontites. — Bartsia viscosa. — Rhinanthus cristagalli, <strong>et</strong> var. secunda. —Pedicularis palustris, sylvatica. — Melampyrum pratense.OROBANCHEES.Orobanche major, vulgaris, galii, minor, caerulea, ramosa.VERBENACEES.[p. 30]Verbena officinalis.LABIEES.Salvia verbenaca. — Lycopus europaeus. — Teucrium scoro. donia, scordium. — Adjuga reptans. — Saturia hortensis. — Nep<strong>et</strong>a cataria. —Mentha pulegium, aquatica, arvensis, rubra, palustris, viridis, piperita, sylvestris, rotundifolia. — Glechoma hederacea. — Lamium album, purpureum,incisum, amplexicaule. — Galeobdolon luteum. — Galeopsis ladanum, t<strong>et</strong>rahit, ochroleuca. — B<strong>et</strong>onica officinalis, <strong>et</strong> var. hirta. — Stachys sylvatica,palustris, arvensis. — Ballota fo<strong>et</strong>ida. — Marrubium vulgare. — Leonurus cardiaca. — Clinopodium vulgare. — Origanum vulgare. — Thymusserpillum. — Melissa officinalis, calamintha. — Brunella vulgaris. — Scutellaria galericulata, minor.PRIMULACEES.Primula grandiflora. — Hottonia palustris. — Lysimachia vulgaris, nummularia, nemorum. — Anagallis phaenicea, caerulea, tenella. — Centunculusminimus. — Samolus Valerandi.MONOCHLAMIDEES.


PLUMBAGINEES.Statice oleaefolia, armeria, arenaria vel plantaginea.PLANTAGINEES.Plantago lanceolata, major, coronopus, maritima, graminifolia. — Littorella lacustris.AMARANTHACEES.Amaranthus blitum.CHENOPODEES.Blitum virgatum. — B<strong>et</strong>a maritima. — Spinacia spinosa, inermis. — Artriplex littoralis, hortensis, augustifolia, patula, prostrata, hastata, laciniata,rosea vel alba, pedonculata, portulacoides. — Chenopodium urbicum, rubrum, murale, album vel leiospermum, <strong>et</strong> var. concatenatum, hybri<strong>du</strong>m,glaucum, polyspermum, fruticosum, maritimum, viride. — Salsola kali. — Salicornia herbacea.POLYGONEES.Polygonum amphibium, hydropiper, persicaria, lapathifolium, maritimum, aviculare, convolvulus, fagopyrum. — Rumex aquaticus, crispus,nemolapathum, sanguineus,[p. 31]divaricatus <strong>et</strong> var., pulcher, acutus, obtusifolius, palustris, maritimus, ac<strong>et</strong>osa, ac<strong>et</strong>osella.THYMELEES.Daphne laureola.ELEAGNEES.Hippophae rhamnoides.OSYRIDEES.Thesium linophyllum. — Hippuris vulgaris.EUPHORBIACEES.Euphorbia peplis, peplus, exigua, lathyris, paralias, portlandica, helioscopia, sylvatica. — Mercurialis annua, perennis. — Buxus sempervirens.URTICEES.Ficus carica. — Urtica dioica, urens. — Humulus lupulus. — Pari<strong>et</strong>aria diffusa vel judaica. — Cannabis sativa. — Xanthium strumarium.ULMACEES.Ulmus campestris.BETULACEES.B<strong>et</strong>ula alba. — Alnus glutinosa.SALICINEES.


Salix capraea, aurita, lanceolata, depressa vel epens, fissa, viminalis, monandra, rufinervus, acuminata vel cinerea, vitellina, alba, triandra,pentandra, fragilis, babylonica. — Populus alba, tremula, nigra, fastigiata.CORYLACEES.Corylus avellana. — Quercus robur, <strong>ses</strong>siliflora. — Castanea vesca. — Fagus sylvatica. — Carpinus b<strong>et</strong>ula. — Platanus orientalis.CONIFERES.Taxus baccata. — Abies excelsa, pectinata. — Pinus sylvestris. — Larix europaea. — Cupressus horizontalis, fastigiata.Monocotylédones.HYDROCHARIDEES.Hydrocharis morsus ranae.ORCHIDEES.Orchis bifolia, pyramidalis, morio, laxiflora, mascula, ustulata, militaris, latifolia, maculata, conopsea, palustris.[p. 32]— Satyrium viride. — Ophrys myodes, apifera. — Neottia spiralis. — Epipactis ovata.IRIDEES.Iris fa<strong>et</strong>idissima, pseudacorus. — Ixia bulbocodium.NARCISSEES.Narcissus pseudo-narcissus, po<strong>et</strong>icus, taz<strong>et</strong>ta.ASPHODELEES.Scilla nutans, autumnalis. — Allium ursinum, vineale, — Luzula maxima, campestris, congesta, repens. — Porrum sativum, cepa, schaenoprasum,ascalonicum (cultivés),ALISMACEES.Alisma nutans, ranunculoides, plantago. — Sagittaria, sagittae folia. — Butomus umbellatus.JUNCAGINEES.Triglochin palustre, maritimum.POTAMOPHILEES.Potamog<strong>et</strong>on natans, fluitans, lucens, densum, crispum, oppositifolium, gramineum, compressum, pectinatum, marinum, pusillum. — Ruppiarostellata. — Zostera marina. — Zanichellia palustris. — Lemna trisulca, minor, gibha, polyrhiza.ASPARAGINEES.Asparagus officinalis. — Paris quadrifolia. — Convallaria majalis, polygonatum, multiflora. — Ruscus aculeatus. — Tamus communis.JONCEES.


Juncus conglomeratus, acutus, maritimus, effusus, glaucus, squarrosus, bulbosus, taenageya, supinus, bufonius, lampocarpus, obtusiflorus,uliginosus, <strong>et</strong> var. prolifer <strong>et</strong> fluitans.TYPHACEES.Typha latifolia, augustifolia. — Sparganium ramosum, simplex, natans.AROIDEES.Arum vulgare, <strong>et</strong> var. maculatum.CYPERACEES.Cyperus longus. — Schaenus nigricans. — Scirpus acicularis, fluitans, s<strong>et</strong>aceus, maritimus, lacustris, palustris, caespitosus. — Eriophorumangustifolium, polystachion. —[p. 33]Carex dioica, pulicaris, arenaria, disticha, vulpina, divisa, divulsa, paniculata, ovalis, curta, stellulata, remota, caespitosa, stricta, gracilis, praecox,pululifera, eric<strong>et</strong>orum, glauca, hirta, flava, aederi, extensa, maxima, fulva, binervis, distans, bilicularis, panicea, drymeja, pseudo-cyperus, vesicaria.GRAMINEES.Triticum sativum <strong>et</strong> var., repens, junceum, acutum, caninum, pinnatum, sylvaticum, phaenicoides, rottbolla. — Lolium perenne, temulentum,multiflorum. — Secale cereale. — Elymus arenarius. — Hordeum vulgare, distichum, murinum, secalinum, maritimum. — Rottbolla incurvata,filiformis. — Nar<strong>du</strong>s stricta. — Cynosurus cristatus, echinatus. — Trachynotia stricta. — Anthoxanthum odoratum. — Alopecurus bulbosus, pratensis,geniculatus. — Phalaris phleoides, arenaria. — Phleum pratense, nodosum. — Lagurus ovatus. — Paspalum dactylon. — Panicum crus-galli,verticillatum. — Agrostis canina, rubra, vulgaris, stolonifera, alba, verticillata. — Millium effusum, lendigerum. — Calamagrostis arenaria, colorata,epigejos. — Arundo phragmites. — Danthonia decumbens. — Avena elatior, <strong>et</strong> var. bulbosa, flavescens, pratensis, sativa, fatua. — Holcus lanatus,mollis. — Aira coespitosa, flexuosa, caryophyllea, praecox. — Festuca elatior, maritima, caerulea, ovina, tenuifolia, rubra, <strong>du</strong>riuscula, cinerea,sabulicola, glauca. — Vulpia myurus, bromoides, uniglumis. — Koeleria cristata. — Poa maritima, aquatica, annua, trivialis, palustris, pratensis,compressa, nemoralis, airoides, rigida, procumbens. — Glyceria fluitans. — Melica uniflora. — Briza media. — Bromus secalinus, mollis, racemosus,squarrosus, asper, giganteus, sterilis. — Dactylis glomerata.CRYPTOGAMES.CHARACEES.Chara vulgaris, tomentosa, funicularis, hispida, hyalina.EQUISETACEES.Equis<strong>et</strong>um arvense, fluviatile, palustre.MARSILEACEES.Pilularia globulifera.LYCOPODIACEES.Lycopodium clavatum, selago, inundatum.FOUGERES.[p. 34]Ophioglossum vulgatum. — Osmonda regalis. — Blechnum spicans. — Scolopendrium officinale (var. bifi<strong>du</strong>m, un<strong>du</strong>latum, multifi<strong>du</strong>m). — C<strong>et</strong>erachofficinarum. — Asplenium trichomanes, marinum, ruta muraria, adianthum, nigrum, lanceolatum. — Athyrium felix-faemina. — Polypodium vulgare,dryopteris, leseblii. — Polystichum filix-mas, aculeatum, Pluken<strong>et</strong>ii, stipitatum, cristatum, callipteris, dilatatum, thelypteris, oreopteris. — Pterisaquilina. — Hymenophyllum tunbridgense.


Acotylédones.MOUSSES.Phascum subulatum, cuspidatum, rectum. — Sphagnum latifolium, capillifolium. — Gymnostomum truncatulum, ovatum, pyriforme. — Anyctangiumciliatum. — T<strong>et</strong>raphis pellucida. — Grimnia apocaula, apaucarpa, maritima, controversa, Dicksoni. — Pterogonium sciuroides. — Trichostomumpolyphyllum, h<strong>et</strong>erostichum, lanuginosum. — Tortula rigida, subulata, unguiculata, convoluta, ruralis, muralis, tortuosa. — Dicranum bryoides,taxifolium, adianthoides, scoparium, flagellare, h<strong>et</strong>eromallum, aciculare, viridissimum, purpureum, glaucum, flexuosum, ovale, pulvinatum. —Polytrichum commune, piliferum, juniperinum, strictum, urnigerum, aloides, nanum, subrotun<strong>du</strong>m. — Oligotrichum un<strong>du</strong>latum, minus. — Orthotrichumcrispum, anomalum, strictum, affine, rivulare, pumilum, diaphanum. — Neckera crispa, h<strong>et</strong>eromalla. — Funaria hygrom<strong>et</strong>rica. — Barthramia fontana,pomiformis. — Byrum palustre, nutans, capillare, caespititium, argenteum, alpinum, hornum, cuspidatum, punctatum, un<strong>du</strong>latum. — Hypnum sericeum,curvatum, myosuroides, complanatum, trichomanoides, denticulatum, serrulatum, Teesdalii, riparium, ruscifolium, un<strong>du</strong>latum, lucens, splendens,proliferum, praelongum, alopecurum, murale, velutinum, intricatum, serpens, tenellum, albicans, plumosum, lutescens, purum, Schreberi, cuspidatum,piliferum, rutabulum, striatum, fluitans, stellatum, squarrosum, loreum, triqu<strong>et</strong>rum, a<strong>du</strong>ncum, ancinatum, palustre, cupressiforme, filicinum,moluscum. — Fontinalis antipyr<strong>et</strong>ica.HEPATIQUES.[p. 35]Jungermannia blasia, epiphylla, Vaillantii, pinguis, multifida, furcata, bidentata, tomentella, nemorosa, platyphylla, complanata, tamarisci, dilatata,polyanthos, lanceolata, albicans, scalaris, asplenioides. — Marchantia polymorpha, stellata, umbellata, conica. — Anthoceros laevis. — Targioniahypophylla. — Sphaerocarpus Michelii. — Riccia natans, fluitans, glauca, bifurca.LICHENS.OBSERVATION. — Tous les lichens où il n'y a point de nom d'auteur sont <strong>du</strong> lichenographe suédois Acharius.Pulvérulents.I. Calicium trachelinum var. quercinum ; stigonellum, turbinatum.II. Lepraria antiquitatis, lactea, incana, bortryoides, rubens, leiphaema, chlorina, flava.III. Variolaria communis, amara <strong>et</strong> var. discoidea, rosea, Nob.IV. Spiloma tumi<strong>du</strong>lum.Crustacés.V. Arthronia astroidea, punctiformis var. galactina.VI. Opegrapha epipasta, macularis, stenocarpa var. denigrata, herp<strong>et</strong>ica, serpentina, DC. ; pulverulenta, DC. ; limitata, DC. ; cerasi, DC. ; b<strong>et</strong>ulae,DC. ; lithyrga.VII. Verrucaria epidermis, analepta, gemmata, maxima, DC. ; nitida, DC. ; ruderum, DC. ; Dufourii, DC. ; nigrescens, DC. ; plumbea.VIII. Porina pertusa, leioplaca.IX. Urceolaria Acharii, cineria, scruposa, <strong>et</strong> var. bryophila.X. Lecidea p<strong>et</strong>raea, atro-alba, parasema, <strong>et</strong> var. punctiformis, sanguinaria, atro-virens, premnea, immersa, sabul<strong>et</strong>orum, confluens, albocaerulescens,sulphurea, icmadophila, cinero-fusca, luteo-alba var. pyracea, caesiorufa var. festiva.XI. Lecanora atra, brunnea, haematoma, coarctata, subfusca var. argentata, rubricosa, galactina var. dispersa ; pachicarpa, (Léon Dufour) ;vitellina, citrina, angulosa, tartarea, <strong>et</strong> var. arborea,, parella var., pallescens, Turneri.[p. 36]Car tilagineux.


XII. Psora vesicularis, DC.XIII. Placodium fulgens, DC. ; murorum, DC. ; cand<strong>et</strong>arium, DC. ; elegans, DC. ; orchroleucum, DC. ; canescens, DC. ; albescens, DC.XIV. Parmelia caperata, perlata, perforata, c<strong>et</strong>rarioides, (Delise) ; olivacea ; velutina (Delise) ; Borreri, sinuosa ; pseudosinuosa, (Nob.) ; recurva,plumbea, virella, pari<strong>et</strong>ina, lanuginosa ; myriocarpa, (Delise) ; rubiginosa, omphalodes, <strong>et</strong> var panniformis, saxatilis, aquila, albinea, aleurites,conspersa, <strong>et</strong> var. stenophylla, speciosa, laevigata, hyperopta, conoplea, pulverulenta, aipolia, stellaris, caesia, cycloselis ; adglutinata, (Mougeot <strong>et</strong>Nesler) ; physodes, <strong>et</strong> var. vittata, diatrypa.XV. Collema nigrum, crispum, <strong>et</strong> var. cristatum, jacobeaefolium, fasciculare, lacerum, nigrescens.XVI. Endocarpon Weberi, tephroides.XVII. Sticta fuliginosa, limbata, sylvatica, aurata ; glomulifera, (Delise) ; herbacea, (Delise) ; pulmonacea, scrobiculata.XVIII. Peltidea scutata, horizontalis, canina, polydactyla.XIX. Nephroma parilis, resupinata.XX. C<strong>et</strong>raria glauca.XXI. Ramalina fraxinea, fastigiata, polymorpha, scopulorum, farinacea.XXII. Evernia prunastri.XXIII. Borrera ciliaris, tenella, <strong>et</strong> var. leptulea, chrsyopthalma, flavicans ; pygmaea, (Non Ach) ; leucomela.Filamenteux.XXIV. Usnea florida, <strong>et</strong> var. rubiginea, plicata, barbata.Coralloides.XXV. Roccella phycopsis.XXVI. Isidium corallinum, Westeringii, coccodes.XXVII. Sphaerophoron fragile, compressum, coralloides.XXVIII. Stereocaulon paschale, nanum, pileatum.XXIX. Cenomyce endiviaefolia, pocillum, verticillata, pixidata, fimbriata, <strong>et</strong> var. radiata ; ocmocyna, avec les variétés gracilis <strong>et</strong> elongata ; parecha,sparassa, delicata, caespititia, coccifera, bacillaris, deformis, bellidiflora, furcata, avec[p. 37]les trois variétés spadicea, nodosa <strong>et</strong> subulata ; uncialis, <strong>et</strong> var. a<strong>du</strong>nca, rangiferina, <strong>et</strong> var. sylvatica.XXX. Baeomyces roseus, rufus.THALASSIOPHYTESArticulées. (Conferves, auct.)Plantes brunes ou olivatres.Cladostephus myriophillum, spongiosus. — Sphacelaria scoparia, filicina, cirrhosa, plumosa, caespitula. — Ectocarpus siliculosus, littoralis.(Lyngb) ; tomentosus.


Plantes de couleur rose ou pourpre.Rhodomela subfusca, pinastroides. — Hutchinsia fastigiata, violacea, fruticulosa, parasitica, allochroa, flosculosa var. fibrillosa, bissoides,penicillata, stricta, elongata, coccinea var. hirsuta. — Ceramium pluma, scopulorum, secondatum, intricatum, Daviesii, diaphanum, var. pilosum,rubrum, pedicellatum, t<strong>et</strong>ragonum, arbuscula, Bouch<strong>et</strong>i (Chauvin), corymbosum, roseum, versicolor, t<strong>et</strong>ricum, plumula. — Griffithsia s<strong>et</strong>acea, corollina,multifida, equis<strong>et</strong>ifolia.Plantes de couleur verte.Conferva linum, aerea, scutulata, (Eng)., flaccida, fucicola, curta, congregata, glomerata, lanosa, flavescens, cericea, rupestris, membranacea.THALASSIOPHYTESInarticulées. (Hydrophytes.)Fucacées.Cystoscira fibrosa, barbata, granulata, oricoides, discors, abrotanifolia. — Fucus vesiculesus, <strong>et</strong> var. spiralis, ceranoides, serratus, siliculosus,nodesus, canaliculatus, tuberculatus, loreus. — Laminaria digitata, bulbosa, <strong>et</strong> var. Turneri, saccharina, phillitis, debilis. — Desmar<strong>et</strong>ia aculeata,ligulata. — Furcellaria lumbricalis. — Lichina pygmea, confinis. — Chorda filum.Floridées.Dumontia incrassata. — Halymenia implexa, palm<strong>et</strong>ta, membranifolia, rubens, reniformis, e<strong>du</strong>lis, Dubyi, palmata, <strong>et</strong> var. marginifera, ferarii, ciliata,palmata <strong>et</strong> var. jubata, linearis, angusta, lacerata, <strong>et</strong> var. uncinata, laciniata, bifida, ocellata, punctata, Gmelini. — Delesseria hypoglossum, ruscifolia,alata, sanguinea, sinuosa. — Chondrus[p. 38]norvegicus, crispus, <strong>et</strong> var. oequalis, patens, lacerus, planus, corneus, mamillosus. — Gelidium corneum, <strong>et</strong> var. crinale, coronopifolium. — Plocamiumvulgare, <strong>et</strong> var. uncinata, plumesum, <strong>et</strong> var. tenuissima. — Lomentaria tenuissima, intertexta, dasyphylla, kaliformis, articulata, vermicularis, <strong>et</strong> var.microphylla, opuntia. — Laurencia pinnatifida, <strong>et</strong> var. osmonda, hybrida, obtusa. — Gigartina confervoides, plicata, flagelliformis, purpurascens,acicularis, pistillata, scorpioides. — Polydes rotonda, griffithsiae. — Sporochnus rhisodes, pe<strong>du</strong>nculatus.Dictyotées.Dictyopteris polypioides. — Dictyota dichotoma, <strong>et</strong> var. intricata, implexa, laciniata, ciliata. — Padina pavonia, deusta. — Asperococcus rugosus.Ulvacées.Bryopsis arbuscula, hypnoides. — Scytosiphon faeniculaceus. — Ulva fistulosa, intestinalis, ventricosa, compressa, <strong>et</strong> var. crinita, linza. —Spongodium tomentosum, lactuca, purpurea, <strong>et</strong> var. umbilicata.Les genres suivants sont placés sur la limite qui sépare le règne végétal <strong>du</strong> règne animal, auquel des recherches microscopiques ont prouvé queplusieurs doivent se rattacher.Nostoch mesentericum, bullatum (Dub). — Mesogloia vermicularis, multifida. — Rivularia atra. — Bangia laminaris, torta, crispa. — Calothrixconfervicola, pulvinata. — Lyngbia crispa. — Diatoma marinum, unipunctatum, obliquatum. — Achnantes longipes. — Schizonema rutilans [122]..Canton de Beaumont.[p. 39]COMMUNES DE L'ARRONDISSEMENT DE CHERBOURG.(Partie de l'ancienne Hague ; 11,638 habitants ; 20 communes ; 4,197 hect. de bois, landes, terres vaines, chemins, <strong>et</strong>c.[123]BEAUMONT, p<strong>et</strong>it bourg, à 1 myriamètre 7 kilomètres de <strong>Cherbourg</strong> ; 895 habitants ; 765 hectares de terre labourée. —Schistes <strong>et</strong> grès intermédiaires présumés d'une époque identique.C'est dans c<strong>et</strong>te commune qu'on trouve le fameux r<strong>et</strong>ranchement connu sous le nom de Hague-Dick ; il a près d'une lieue


de longueur <strong>et</strong> se termine au Val-Ferrant en Gréville ; sa direction est ouest <strong>et</strong> est ; il s'élève très haut en quelques endroits. Ilservait à isoler de l'autre une partie de la Hague, <strong>et</strong> comprenait, à ce qu'on croit, tout l'espace entre les deux mers. Lesantiquaires sont également partagés <strong>et</strong> sur sa destination <strong>et</strong> sur l'époque à laquelle il <strong>du</strong>t être élevé. — On s'occupe de faireune route de Beaumont à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> une autre <strong>du</strong> même bourg à Valognes.ACQUEVILLE, à 1 m. de <strong>Cherbourg</strong> ; 487 hab. 560 hect.[p. 40]AUDERVILLE, à 2 m. 5 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 575 hab. ; 416 hect. — Roches granitoïdes.C'est sur c<strong>et</strong>te commune que se trouve le cap de la Hague, si l'on peut appeler cap une pointe de terre basse qui s'avanc<strong>et</strong>rès-peu dans la mer. C'est à un quart de lieue de la côte qu'est situé, sur un écueil nommé le Gros-<strong>du</strong>-Raz, le <strong>nouveau</strong> pharede la Hague ou d'Auderville. V. la 1. re partie.BIVILLE, à 1 m. 7 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 415 habit. 853 hect. — Stéashistes, phyllades <strong>et</strong> grawackes.L'église renferme le tombeau d'un saint prêtre <strong>du</strong> onzième siècle, connu sous le nom de Bienheureux Thomas. Après avoirlong-temps enseigné à lire aux enfants à <strong>Cherbourg</strong>, Thomas-Hélie était entré dans les ordres. La renommée de <strong>ses</strong> vertus <strong>et</strong>de sa bienfaisance ne tarda pas à parvenir à S. t-Louis, qui le nomma son aumônier. Mais le bon pasteur ne put supporter lavie frivole des cours ; il demanda <strong>et</strong> obtint de revoler vers <strong>ses</strong> chers concitoyens. Il fut successivement curé de la paroisse deS.t-Maurice <strong>et</strong> de celle de Biville, où il mourut en 1257. On a plusieurs biographies <strong>du</strong> bienheureux Thomas ; la plus connueest celle de Trigan, imprimée à la suite de celle de Pâté, curé de <strong>Cherbourg</strong>. Plusieurs cantiques, composés en son honneur,sont répétés avec dévotion par le peuple. Tous les estropiés, les blessés, les malades, ceux qui craignent de l'être affluentchaque jour sur sa tombe, placée dans le choeur de l'église de Biville. Avant la révolution de[p. 41]89, le tombeau était en calcaire ; il fut détruit, <strong>et</strong> l'on s'en disputa les débris. On l'a reconstruit en marbre blanc ; le saint y estsculpté en pied. Le temps est loin d'avoir diminué la vogue de ces pélerinages. Des miracles s'y opèrent encore tous lesjours ; l'église est pleine d'ex-voto, de béquilles, <strong>et</strong>c., que les pélerins y laissent pour s'en r<strong>et</strong>ourner biens portants. Chaqueannée, le 19 octobre, jour de la mort de Thomas, on se sert encore des ornements dont S.t-Louis lui fit présent en lecongédiant, <strong>et</strong> qu'on a religieusement conservés. C'est une chasuble, une étole <strong>et</strong> un calice en vermeil, avec la patène, autour<strong>du</strong>quel on lit ces mots, répétés six fois : SUIS DONNÉ PAR AMOUR.Biville est isolé <strong>du</strong> côté de <strong>Cherbourg</strong> par un p<strong>et</strong>it vallon demi-circulaire de phyllades, en deçà <strong>du</strong>quel s'élève la croupearrondie de la Lande <strong>du</strong> Bienheureux.C'est là qu'on trouve une fontaine aux propriétés merveilleu<strong>ses</strong> <strong>et</strong> dont l'origine est encore un miracle. Un jour, Thomasrevenait de visiter des malades ; c'était en été, <strong>et</strong> le soleil dardait <strong>ses</strong> rayons brûlants sur les flancs arides de la lande ; le sainthomme était accablé de fatigue, <strong>et</strong> il eût fallu marcher long-temps pour trouver un peu d'ombre : il fiche son bâton en terre, <strong>et</strong>s'appuie dessus. « Mon Dieu, que j'ai soif !» s'écrie-t-il ; puis il r<strong>et</strong>ire son bâton pour reprendre sa route ; mais, ô prodige ! unesource jaillit tout à coup <strong>et</strong> offre au serviteur de Dieu une eau limpide qui le désaltère. Les pélerins ne manquent jamais de[p. 42]remplir une bouteille de c<strong>et</strong>te eau, <strong>et</strong> ils en mêlent dans la bouillie de leurs p<strong>et</strong>its enfants. Voyez VUVILLE.BRANVILLE, p<strong>et</strong>ite commune à 1 m. 4 kil. de <strong>Cherbourg</strong>, 126 hab., 206 hect. — Stéashiste.DIGULLEVILLE, à 1 m. 9 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 726 hab. 761, hect. — Stéashiste, grès intermédiaire.On a trouvé dans c<strong>et</strong>te commune un grand nombre de figurines en bronze <strong>et</strong> en terre, qui sont au cabin<strong>et</strong> de <strong>Cherbourg</strong>.V. page 18.ECULLEVILLE, p<strong>et</strong>ite commune à 1 m. 6 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 137 hab., 227 hect. — Stéashiste <strong>et</strong> granit.FLOTTEMANVILLE-HAGUE, 8 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 660 hab., 1103 hect. — Grès <strong>et</strong> stéashiste.GRÉVILLE, à 1 m. 4 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 702 hab. 977 hect. — Stéashiste ; quelques filons de talc dans les roches <strong>du</strong>rivage. — Il y a le long de c<strong>et</strong>te commune des falai<strong>ses</strong> très-pittoresques, dont un des pics, nommé la Roche-<strong>du</strong>-Castel, a


fourni plusieurs antiques qui sont au cabin<strong>et</strong> de la ville. Il est célèbre dans l'histoire fabuleuse <strong>du</strong> pays : au-dessous est unecaverne qui porte le nom de Sainte-Colombe ; elle est très-profonde, <strong>et</strong> suivant les habitants s'avance jusque sous l'église deGréville, à 1/2 lieue de là. Plusieurs traditions se rattachent aussi à c<strong>et</strong>te caverne. La Hague-Dick s'avance jusque sur c<strong>et</strong>tecommune. — Il s'y tient trois foires assez fortes en bestiaux, le 11 avril, le 10 juin <strong>et</strong> le 17 septembre. — Filature de coton àmoteur hydraulique, dans le Val-Ferrant.HERQUEVILLE, à 2 m. 1 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 280 hab., 282 hect. — Grès intermédiaire <strong>et</strong> stéashiste.[p. 43]JOBOURG, à 2 m. 3 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 863 hab., 974 hect. Grès intermédiaires, roches granitoïdes <strong>et</strong> trappéennes.C'est dans c<strong>et</strong>te commune que sont les fameu<strong>ses</strong> falai<strong>ses</strong> qui attirent à Jobourg tant de curieux ; une description seraitbien froide auprès de ces immen<strong>ses</strong> précipices, de ces croupes arrondies <strong>et</strong> on<strong>du</strong>leu<strong>ses</strong>, couvertes d'un gazon brûlé par lesoleil, de ces murailles rocailleu<strong>ses</strong> coupées de p<strong>et</strong>its chemins trompeurs, qui vous laissent suspen<strong>du</strong>s au-dessus d'un abîmesi vous avez l'imprudence de les suivre, <strong>et</strong> semées des fleurs ro<strong>ses</strong> <strong>et</strong> nombreu<strong>ses</strong>, <strong>du</strong> gazon d'Olympe (Statice armaria), desombelles de la carotte maritime, des touffes dorées de l'anthyllide vulnéraire ; puis, à vos pieds, la mer, dont les vaguesétincellent un soleil comme des milliers de perles fines, devant vous, des roches déchiqu<strong>et</strong>ées, entrouvertes, creusées par lesflots, élevant çà <strong>et</strong> là une tête inégale <strong>et</strong> rocailleuse où viennent se reposer les oiseaux de mer ; au large, le raz avec <strong>ses</strong>ondes bouillonnantes, le phare d'Auderville blanc au soleil <strong>et</strong> les îles anglai<strong>ses</strong> à l'horizon. Ces falai<strong>ses</strong> sont souventsillonnées par les fraudeurs chargés de ballots, qui, malgré les dangers <strong>du</strong> passage, se hasardent la nuit à débarquer leursmarchandi<strong>ses</strong> dans les trous de rochers qui ne sont connus que d'eux seuls. — Sous les falai<strong>ses</strong> on trouve une caverneassez vaste, nommée le Trou aux Sorciers, qui est l'obj<strong>et</strong> de nombreu<strong>ses</strong> traditions ; elle sert de demeure à un[p. 44]grand nombre de chauves-souris <strong>et</strong> d'oiseaux de mer qui viennent s'y réfugier pendant la nuit. — Quelques étymologistes fontvenir Jobourg de Jovis burgus, bourg de Jupiter.NACQUEVILLE, à 9 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 633 hab., 840 hect. — Stéashiste.On y trouve, dans une jolie vallée de c<strong>et</strong>te commune, le château des Marais [124].A l'entrée de la même vallée on voit aussi une p<strong>et</strong>ite chapelle consacrée à S.t-Clair. C'était là que l'apôtre se r<strong>et</strong>ira avecdeux compagnons dans une espèce d'ermitage, d'où il fut plus tard chassé par les habitants <strong>du</strong> pays [125]. On tenait autrefoisdans les clos qui avoisinent la chapelle une foire qui a été transportée depuis dans la plaine de Querqueville.Sur une pointe qui s'avance dans la mer, on a construit sous l'empire la forteresse de Nacqueville.OMONVILLE-LA-PETITE, à 2 m. de <strong>Cherbourg</strong> ; 618 hab., 597 hect. — Roches stéachisteu<strong>ses</strong> <strong>et</strong> granitoïdes.OMONVILLE-LA-ROGUE, à 1 m. 9 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 414 hect. — Roches granitoïdes.Il reste dans c<strong>et</strong>te commune des débris d'anciennes fortifications <strong>et</strong> des noms d'origine anglaise [126] qui indiquent sonimportance, lorsque les Anglais[p. 45]étaient maîtres <strong>du</strong> pays. Sur la hauteur appelée Light-Heu, on voit encore les restes d'un fort, où probablement était un phare,sans doute celui dont le maréchal de Matignon parlait en 1562. Il lui parut très-ancien, mais il était si ruiné qu'il l'abandonna.On ne le croit cependant pas antérieur à l'expulsion des Anglais en 1450. Sur une autre hauteur appelée le Hutch-Heu, onremarque les restes d'une fortification circulaire de 21 toi<strong>ses</strong> de diamètre. L'entrée est à l'est ; au nord-ouest, il y avait un p<strong>et</strong>itouvrage avancé, demi-circulaire. Entre l'ancien fort <strong>et</strong> l'église on voit les restes d'un bâtiment de 21 toi<strong>ses</strong> 3 pieds de largeur ;il est partagé en cinq parties égales. C'était peut-être un lazar<strong>et</strong>. Une fontaine voisine s'appelle encore aujourd'hui fontaine dela Maladrerie. Les habitants m'ont raconté que ce lieu était autrefois l'emplacement d'un village très-peuplé, mais qu'il survintune épidémie qui n'y laissa pas un seul habitant.Le port d'Omonville est très-bien situé <strong>et</strong> pourrait être d'une grande utilité pour les bâtiments marchands <strong>et</strong> les bâtimentsde guerre, si le gouvernement consentait à faire pour c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> une dépense de quelques 10,000 fr. Il pourrait contenir 6vaisseaux <strong>et</strong> 6 frégates. Il n'est guère visité aujourd'hui que par les p<strong>et</strong>its navires que la mer vient y j<strong>et</strong>er, ou par les bateauxdes poissonniers. Il est très-ancien ; l'acte de mariage de Richard avec Judith on constate l'existence, <strong>et</strong> suivant M. deGerville il existait une voie romaine entre ce port <strong>et</strong> Portbail.


[p. 46]S.TE-CROIX-HAGUE, à 1 m. 3 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 687 hab., 962 hect. — Grès intermédiaire.S.T-GERMAIN-DES-VAUX, à 2 m. 6 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 1,020 hab. 620 hect. — Roches granitoïdes. — L'église, isolée sur unehauteur, n'a pas de clocher élevé au-dessus <strong>du</strong> reste de l'édifice.TONNEVILLE, à 8 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 267 hab. 375 hect. — Stéashiste. — Il y a dans c<strong>et</strong>te commune un vieux manoir célèbredans les légendes de la Hague.URVILLE-HAGUE, à 1 m. de <strong>Cherbourg</strong>, 442 hab. ; — Stéashiste. — C<strong>et</strong>te commune est célèbre par la descente desAnglais en 1758 [127] ; il y a peu d'années on voyait encore des boul<strong>et</strong>s enfoncés dans le pignon d'une maison qui se trouvesur le chemin de <strong>Cherbourg</strong> à la Hague. — Filature de laine à moteur hydraulique. — Une ferme de c<strong>et</strong>te commune, nomméela Baronnerie, conserve encore une poutre sur laquelle on lit la date 1102.VASTEVILLE, à 1 m. 3 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 858 hab, 1627 hect. — Grès intermédiaire, phyllades <strong>et</strong> grawackes ; une carrière degranit <strong>et</strong> une d'ardoise molle dite pierre noire.VAUVILLE, à 1 m. 8 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 672 hab. 1627 hect. — Grès intermédiaire <strong>et</strong> sables modernes. On trouve sur unehauteur de c<strong>et</strong>te commune un des monuments druidiques connus sous le nom de Pierres-pouquelées [128], <strong>et</strong> sur une falaisevoisine les ruines d'un monastère nommé le prieuré de S.t-Hermel.[p. 47]— Un seigneur de ce nom était à la conquête de l'Angl<strong>et</strong>erre. — Le château a été quelque temps le séjour de Thomas Hélie ;<strong>et</strong> il n'y a que peu d'années on visitait encore les ruines de la chambre où il mourut. — Le château actuel a été bâti par Césarde Costentin, frère <strong>du</strong> maréchal de Tourville. Il en était devenu pos<strong>ses</strong>seur par son mariage avec Jeanne, fille <strong>et</strong> héritière <strong>du</strong>seigneur de Vauville. — Ce château occupe l'emplacement de l'ancien dont on voit encore quelques tours. — C<strong>et</strong>te commune<strong>et</strong> celle de Biville, sont bordées le long de la mer par des <strong>du</strong>nes ou mielles, monticules de sable blanc <strong>et</strong> fin, dont leson<strong>du</strong>lations ressemblent à un paysage couvert d'une épaisse couche de neige. Le millegreust (Calamagrostis arenaria), avec<strong>ses</strong> feuilles d'un blanc sale, ose seul croître parmi ces <strong>du</strong>nes <strong>et</strong> leur donne un aspect très pittoresque.Pour Thomas Hélie, voyez BIVILLE.Canton des Pieux.(42,258 habitants. — 15 communes, 1429 hect. de terres vaines <strong>et</strong> vagues).LES PIEUX, bourg sur une hauteur à 2 m. de <strong>Cherbourg</strong>, 1610 hab., 1482 hect. ; — Grès intermédiaire, stéashiste,micashiste <strong>et</strong> gneiss. — L'église est ancienne <strong>et</strong> digne d'être étudiée ; le clocher a été plusieurs fois frappé par la foudre ; dela lande qui se trouve auprès on découvre une immense éten<strong>du</strong>e de clochers, de villages, de champs cultivés, de landesarides <strong>et</strong> de jolies vallées, le Rozel avec <strong>ses</strong> blanches maisons <strong>et</strong> les falai<strong>ses</strong> granitiques de[p. 48]Flamanville, puis au loin, la mer <strong>et</strong> les îles anglai<strong>ses</strong> de Jersey <strong>et</strong> de Guernesey dans la brume. On conçoit que les Druidesaient choisi un pareil endroit pour y faire leurs sacrifices, <strong>et</strong> l'on n'est pas surpris d'y rencontrer ce que M. Ragonde appelle untemène ; on y trouve aussi plusieurs tombelles [129] <strong>et</strong> un menhir sur le penchant d'une falaise. Le bourg a été pillé par lesAnglais dans la guerre de la succession. Au nord-ouest <strong>du</strong> bourg, on trouve une ferme qui, sous le nom de Rolvilla, paraîtavoir figuré dans le contrat de Judith [130]. Son nom moderne est Rouville. — Cinq foires : les 22 janvier, 23 avril, 23 juin, 5juill<strong>et</strong>, 12 novembre ; celle de juin est quelquefois très-considérable.BENOISTVILLE, à 1 m. 7 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 652 hab. ; 800 hect. ; — Stéashiste. — C<strong>et</strong>te commune fit autrefois partie desterres données par Richard-le-Bon, <strong>du</strong>c de Normandie, à la princesse Judith, en 1008, sous le nom de Benedictivilla ; uneferme nommée Reineville, située sur c<strong>et</strong>te commune <strong>et</strong> sur celle de Helleville, paraît aussi en avoir fait partie sous le nom deReginavilla.BRIQUEBOSQ, à 3 lieues <strong>et</strong> demie de <strong>Cherbourg</strong> ; 654 hab. ; 671 hect. — Stéashiste.[p. 49]


C<strong>et</strong>te paroisse est une des plus anciennes de la contrée ; on y r<strong>et</strong>rouve, affectés à différentes parties de son territoire, lesnoms de Briquebosq, Neuville, le Mesnil, Salmonville <strong>et</strong> Longueville, qui paraissent avoir figuré dans la donation de Richardle-Bonsous le nom de Brikobot, Novavilla, Mashile, Salmonisvilla, Longavilla.FLAMANVILLE, à 2 m. 3 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 1,287 habitants ; 1,204 hect.C'est c<strong>et</strong>te commune qui fournit une partie <strong>du</strong> beau granit gris qu'on emploie au port de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> au dallage de Paris.Dans les imposantes falai<strong>ses</strong> d'où les pierres sont tirées, on trouve une grande caverne de 60 pieds de haut sur 3 de large,nommée le Trou Baligan ; on n'y entre qu'à mer basse, <strong>et</strong> les vagues y ont creusé le granit à plus de 60 pieds de profondeur.Les habitants ont un grand nombre de traditions sur c<strong>et</strong>te caverne. On y voyait autrefois un rocher dans lequel étaient degrands filons rouges imitant la forme d'un serpent. On raconte que Saint-Germain, après être revenu des îles anglai<strong>ses</strong> surune roue de charr<strong>et</strong>te, avait abordé sur c<strong>et</strong>te côte, <strong>et</strong> changé en rocher un serpent qui habitait c<strong>et</strong> antre, d'où il exerçait <strong>ses</strong>ravages sur le pays d'alentour. — M. le comte de Sesmaisons, propriétaire <strong>du</strong> château de Flamanville, y a établi une fermemodèlequi fait le plus grand bien dans les <strong>environs</strong>. On voit encore dans le château un pavillon bâti par le marquis deFlamanville pour loger J -J. Rousseau. L'illustre[p. 50]écrivain, comme on sait, préféra Ermenonville. — Un dolmen remarquable, se trouve au bord de la mer, auprès d'une vigie. —Flamenovilla de la donation de Richard, ne peut être que Flamanville.GROSVILLE, à 1 m, 9 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 1,053 hab. ; 1,312 hect. — Granit <strong>et</strong> stéashiste. — C<strong>et</strong>te commune est peut-être laGeroldivilla <strong>du</strong> contrat de Richard-le-Bon ; la ferme de Cantepie paraît être la Chantapia de la même charte.Elle relevait autrefois <strong>du</strong> bailliage de Saint-Sauveur-le-Vicomte ; elle possède « des ruines <strong>et</strong> une chapelle où l'onremarque une longue inscription gothique, de p<strong>et</strong>ites tours <strong>et</strong> de vieux pans de murailles. » Grosville est la patrie de Ros<strong>et</strong>tede Brucourt, auteur d'un Essai sur l'é<strong>du</strong>cation de la noblesse, 1747, 2 v. in-12 <strong>et</strong> in-4.°, né en 1712 <strong>et</strong> mort en 1775. LaDiél<strong>et</strong>te, le Bus, la Scie <strong>et</strong> le Pommer<strong>et</strong> prennent leur source à Grosville.HÉAUVILLE, à m. 5 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 612 hab ; 1,027 hect., est citée dans le contrat de Judith sous le nomde Herardivilla. — Grès intermédiaires.HELLEVILLE, à 1 m. 5 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 441 hab. ; 564 hect. — Grès intermédiaires, stéashistes. — La ferme de Qu<strong>et</strong>tevilleest probablement la K<strong>et</strong>tevilla de la donation de Richard. — Il y avait aussi dans c<strong>et</strong>te commune avant la révolution un prieuréde Saint-Michel, nommé Etoublon, dans lequel il n'est pas difficile de r<strong>et</strong>rouver le Stobelout <strong>du</strong> même contrat.LE ROZEL, à 2 m. 4 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 464 habit. ; 540 hect. — Stéashiste <strong>et</strong> granit. — La ferme de Calville[p. 51]située sur c<strong>et</strong>te commune, paraît être le Calvilla de la charte de Richard.Pendant la guerre de la succession d'Espagne, soixante anglais avaient fait une descente dans c<strong>et</strong>te commune ; unhabitant parvint, dit-on, à les éloigner par un singulier stratagème. Il se plaçait dans un fossé de manière à ne laisser voir quesa tête <strong>et</strong> le bout de son fusil, puis il disparaissait pour reparaître plus loin, <strong>et</strong> figurait ainsi à lui seul une embuscade ; lesennemis y furent trompés <strong>et</strong> se replièrent sur Scioto <strong>et</strong> les Pieux qu'ils pillèrent.PIERREVILLE, à 2 m. 5 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 732 hab. ; 987 hect. — Stéashiste, grès <strong>et</strong> marbre intermédiaires. — On exploitec<strong>et</strong>te dernière roche. Une ferme de Pierreville appelée Mont-Hubert, pourrait bien être le Tober de la charte de Richard II. —Une mine de plomb argentifère se trouve dans c<strong>et</strong>te commune <strong>et</strong> dans celle de Surtainville. L'exploitation en a été concédéeà une compagnie par une ordonnance royale <strong>du</strong> 11 avril 1826 sur une éten<strong>du</strong>e de 4 k. 7 hect.S.T-CHRISTOPHE DU FOC, à 1 m. 3 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 273 habit. ; 340 hect. — Stéashiste. — La maison seigneuriale fitpartie des terres données à Judith sous le nom de Sanctus Christophorus, ainsi que la ferme <strong>du</strong> Foc située dans la mêmecommune, sous le nom de Fagum.SAINT-GERMAIN-LE-GAILLARD, à 2 m. 2 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 1,080 habit. ; 1,334 hect. — Stéashiste, granit, grèsintermédiaires <strong>et</strong> calcaire qu'on exploite.[p. 52]


— Le fief <strong>et</strong> le patronage de c<strong>et</strong>te paroisse furent donnés en 1213 à l'abbaye de Blanchelande par un Adam de Lang<strong>et</strong>ot. —A l'ouest <strong>du</strong> presbytère, on trouvait autrefois le Château Gaillard, qui, assiégé par les Anglais, ne se rendit qu'à cause <strong>du</strong>manque d'eau. — Foire le 26 mai, très-forte.SIOUVILLE, à 2 m. de <strong>Cherbourg</strong>, 780 hab. ; 617 hect. — Grès intermédiaires, phyllades <strong>et</strong> grawackes.C<strong>et</strong>te paroisse date, dit-on, <strong>du</strong> XI e siècle ; on ne la trouve cependant pas mentionnée dans les terres que Richard-le-Bondonna à Judith en 1008. Il s'y fabrique beaucoup de soude de varech. Elle s'est ren<strong>du</strong>e célèbre en 1837 à cause de <strong>ses</strong>opinions religieu<strong>ses</strong> : par suite de discussions avec l'évêque de Coutances, une partie de la population s'était soulevée <strong>et</strong>avait appelé un ministre protestant. Mais avec la réflexion, le zèle des <strong>nouveau</strong>x convertis s'est refroidi, <strong>et</strong> tout semble êtrerentré dans le calme. Il y a le long de la mer de grandes falai<strong>ses</strong> de granit.SOTTEVILLE, à 1 m. 4 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 365 habit. ; 588 hect. — C<strong>et</strong>te paroisse faisait partie des terres données à Judithsous le nom de Sottevilla. — Stéashiste.SURTAINVILLE, à 2 m. 7 k. de <strong>Cherbourg</strong> ; 4,288 hab. ; 1,446 hect. ; — Grès intermédiaire, quelques roches granitoïdes,marbre intermédiaire qu'on exploite. On y a aussi découvert une mine de plomb argentifère, qui est aujourd'hui abandonnée.Une grande partie de c<strong>et</strong>te commune est en potagers ;[p. 53]les Surtainvillais approvisionnent presque seuls de légumes <strong>Cherbourg</strong>, Valognes, Bricquebec <strong>et</strong> les Pieux. Les sites deSurtainville sont très variés. — A 200 mètres de l'église on trouve les ruines d'une chapelle St-Ergouèfle, dont l'architecturemérite d'être étudiée. Une foule de pélerins y venaient autrefois implorer St-Ergouèfle pour les maux de tête, <strong>et</strong>, pour lesmaux de reins, St-Léonard, dont la statue était placée dans la même chapelle.Il y eut, le 9 mai 1795, un combat naval entre les Français <strong>et</strong> les Anglais sous le fort de c<strong>et</strong>te commune ; la mielle <strong>et</strong> le basdes jardins furent criblés de boul<strong>et</strong>s.TRÉAUVILLE, à 2 m. de <strong>Cherbourg</strong> ; 967 hab. ; 1,223 hect. — Phyllades <strong>et</strong> grawackes, roches granitoïdes. — Trevilla deRichard II.C'est dans c<strong>et</strong>te commune que se trouve le joli port de Diél<strong>et</strong>te, à l'embouchure de la rivière <strong>du</strong> même nom. Le seigneur deFlamanville le fit creuser à <strong>ses</strong> frais quelques années avant la révolution, <strong>et</strong> en tira un assez bon revenu, quoiqu'il n'y entrâtpas de gros vaisseaux. Il est très-p<strong>et</strong>it ; la j<strong>et</strong>ée qui abrite les bâtiments est à peine à une encâblure de terre ; les rochers quil'entourent de toutes parts en rendent l'entrée très-difficile. Il n'est guère fréquenté que par des barques qui transportent lesgranits de Flamanville. Pendant la république <strong>et</strong> l'empire, il a souvent servi de refuge aux p<strong>et</strong>its caboteurs chassés par lesnavires anglais.Canton d'Octeville.[p. 54](Partie de la Hague <strong>et</strong> un peu <strong>du</strong> Val-de-Saire ; 17,142 hab. ; 17 communes ; terres vaines <strong>et</strong> vagues : 2,720 hectares.)OCTEVILLE, à 2 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 1,508 hab. ; 706 h. — Stéashiste, grès intermédiaire. — L'église doit être antérieure aurègne de Henri II ; elle est très-simple à la fois <strong>et</strong> très-élégante avec sa tour étranglée <strong>et</strong> <strong>ses</strong> vieilles sculptures ; il est fâcheuxqu'on se soit cru obligé de dégrader en dedans une partie des grotesques que les architectes <strong>du</strong> temps avaient cru devoir yajouter ; l'abside en est basse <strong>et</strong> percée de p<strong>et</strong>ites fenêtres antiques. Elle mérite encore d'être étudiée ; il y a extérieurement<strong>du</strong> côté <strong>du</strong> sud un bas-relief représentant la Cène, qui est de la même époque que l'église.C'est dans la circonscription de c<strong>et</strong>te commune que se trouve la Fauconnière <strong>et</strong> la chapelle S.t-Sauveur dont nous avonsdéjà parlé.BRETTEVILLE-EN-SAIRE, à 8 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 650 hab., 556 hect. — Stéashiste, micashiste <strong>et</strong> gneiss. Jolie p<strong>et</strong>ite communeau bord de la mer. — Au pied d'une colline, près <strong>du</strong> rivage, est un château bâti d'après le plan des constructions romaines. Ilfut le siège d'une seigneurie possédée par des seigneurs <strong>du</strong> nom de Picot, <strong>et</strong> qui, dès le 14. e siècle, fut portée par alliance deCécile Picot à Jean de Briqueville, aïeul de l'honorable colonel Armand de Briqueville, qui a long-temps représenté <strong>Cherbourg</strong>[p. 55]


à la chambre des députés. — Une galerie druidique ou Cist-Vean, sur les limites de c<strong>et</strong>te commune <strong>et</strong> celle de Digosville.DIGOSVILLE, à 7 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 814 hab., 881 hect. — Arkose, stéashiste, micashiste, <strong>et</strong>c.EQUEURDREVILLE, gros village, qui sans les empêchements que le génie militaire m<strong>et</strong> à l'érection des maisons sur unepartie de la route, deviendrait bientôt un faubourg, de <strong>Cherbourg</strong> dont il est éloigné de 2 k. — Pop. 1890 hab., 461 hec. —Stéashiste.C'est sur le territoire de c<strong>et</strong>te commune qu'étaient situés l'hôpital de la Bucaille, peut-être le couvent de Mau<strong>du</strong>in, l'abbaye<strong>et</strong> la chapelle Notre-Dame-<strong>du</strong>-Voeu. C'est là aussi qu'étaient les fourches patibulaires, sur un monticule qui a donné son nomà une carrière voisine, <strong>et</strong> à un fort situé à quelque distance sur la hauteur. On y voit encore la maison <strong>du</strong> diable dont l'origine<strong>et</strong> le nom remontent à une très-haute antiquité. Sur le bord de la mer, au-dessous des fortifications <strong>du</strong> Grand-Port, on trouve àmer basse, dans le creux des rochers, de l'eau douce qui se couvre d'une p<strong>et</strong>ite couche de bitume.HAINNEVILLE, à 5 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 880 hab., 742 hect. — Stéashiste.On trouve dans c<strong>et</strong>te commune l'anse Sainte-Anne, ainsi nommée d'une p<strong>et</strong>ite statue de c<strong>et</strong>te sainte placée dans uneniche. C<strong>et</strong>te niche était autrefois assez loin de la mer ; aujourd'hui les flots,[p. 56]après avoir entièrement détruit la route royale qui con<strong>du</strong>isait de <strong>Cherbourg</strong> au fort de Querqueville ont envahi les prés voisins,<strong>et</strong> si l'on n'y apporte un prompt remède, menacent d'engloutir la niche <strong>et</strong> même un hameau qui se trouve placé à une p<strong>et</strong>itedistance.HARDINVAST, à 8 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 650 hab., 698 hect. — Grès, phyllades <strong>et</strong> grawackes.LE MESNIL-AU-VAL, à 8 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 581 hab., 1302 hect. — Il y a un menhir dans c<strong>et</strong>te commune. — Stéashiste.MARTINVAST, à 6 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 865 hab., 1068 hect. — Stéashiste, grès intermédiaire.On voit encore quelques restes <strong>du</strong> château-fort de Martinvast dans une jolie vallée entourée d'arbres. Le seigneur de cevillage faisait au XII. e siècle, avec la communauté de <strong>Cherbourg</strong> le service dû à Henri II, roi d'Angl<strong>et</strong>erre ; (V. 1. re partie, page75, la note). L'église, qui n'est pas éloignée <strong>du</strong> château, doit être antérieure à c<strong>et</strong>te époque ; elle est irrégulière, mais d'autantplus remarquable, qu'on ne s'est pas avisé de la réparer comme celle d'Octeville. « Le choeur est voûté, dit M. de Gerville, lescolonnes y sont plus élevées que celles des égli<strong>ses</strong> romanes, les arches sont sans nervures diagonales entre elles ; lapremière en entrant dans le choeur, est ornée de moulures en frêles crénelées. La seconde est garnie d'un double zigzagtriangulaire ; plusieurs contreforts sont plats, larges, peu épais, <strong>et</strong> tels qu'on en voit aux égli<strong>ses</strong> de c<strong>et</strong>te époque. D'autresoffrent un mélange[p. 57]d'architecture grecque <strong>et</strong> romane. Ceux-ci entourent l'abside ; leur partie inférieure est romane. Elle est surmontée d'unecolonne cylindrique, simple, couronnée d'un chapiteau ionique, qui soutient des corbeaux grotesques <strong>et</strong> bizarres [131]. »Le château actuel de Martinvast est habité par M. Dumoncel, qui depuis quinze ans se livre à des expériencesd'agriculture ; il a amené dans c<strong>et</strong>te partie un grand nombre d'améliorations. Son exploitation est une espèce de fermemodèle. Ses propriétés ont 430 hectares ou 2,100 vergées ; 240 hectares sont en bois taillis ou de haute futaie. — Sur unehauteur s'élève une tour pyramide appelée la haute-folie, qui sert de point de vue au château. On l'aperçoit de fort loin.On trouve sur un monticule qui n'en est pas très-éloigné, un dolmen ou roche à trois pieds. — Il y a encore dans c<strong>et</strong>tecommune une filature de laines à moteur hydraulique.NOUAINVILLE, à 5 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 215 hab., 336 hect. — Stéashiste <strong>et</strong> grès intermédiaire.QUERQUEVILLE, à 6 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 853 hab., 511 hect. — Stéashiste.C'est sur une pointe de c<strong>et</strong>te commune que sont bâtis le fort <strong>et</strong> le phare qui ferment à l'ouest la rade de <strong>Cherbourg</strong> (V. la1. re partie).


Une grande forêt de chênes paraît avoir couvert autrefois toute la baie qui se trouve à l'est de c<strong>et</strong>te[p. 58]commune, <strong>et</strong> c'est de là que, suivant quelques auteurs, lui viendrait son nom (Quercuum villa). Selon M. Asselin, au contraire,le nom de c<strong>et</strong>te commune devrait s'écrire Kerkeville, de Kerk, église, à cause de l'église de S.t-Germain située dans lecim<strong>et</strong>ière même auprès de l'église paroissiale, <strong>et</strong> qui serait d'origine druidique. V. page 12, 2. e partie.S.t-MARTIN-LE-GRÉARD, à 1 m. 1 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 282 hab., 276 hect. — Grès intermédiaire.SIDEVILLE, à 6 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 445 hab., 620 hect. — Stéashiste, grès intermédiaire. — Il y a dans c<strong>et</strong>te commune un<strong>et</strong>erre de Raval<strong>et</strong>, nom que les descendants des seigneurs de Tourlaville ont substitué au leur. C'est probablement ce villagequi se trouve désigné dans le contrat de Richard-le-Bon sous le nom de Seroldivilla, peut-être aussi est-ce Sortosville-en-Beaumont (arrondissement de Valognes, canton de Barneville).TEURTHÉVILLE-HAGUE, à 1 m. de <strong>Cherbourg</strong>, 1168 ab., 1221 hect. — Grès intermédiaire, stéashiste, phyllades <strong>et</strong>grawackes. — C<strong>et</strong>te commune est depuis long-temps fameuse dans le pays pour <strong>ses</strong> associations de sorciers <strong>et</strong> les faitssurnaturels qui s'y passaient autrefois. On trouve dans le p<strong>et</strong>it bois de Nér<strong>et</strong>, au sud-est de l'église, deux menhirs <strong>et</strong> unefontaine appelée la Fontaine aux Fées. — Il y a sur le bord de la route de <strong>Cherbourg</strong> aux Pieux, une maison qui s'avancejusque sur le chemin, <strong>et</strong> qui porte le nom de Baudienville. Ne serait-ce pas, dit M. Couppey, le Bojoredivilla <strong>du</strong> contrat deRichard-le-Bon ?— Foires considérables les 3 mai, 30 septembre, 16 octobre.[p. 59]TOLLEVAST, à 8 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 854 hab., 1116 hect. — Grès intermédiaire, phyllades <strong>et</strong> grawackes.L'église de Tollevast, dit M. de Gerville, est le mieux conservé des anciens édifices de l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong>.« Tout en est antique, excepté la partie méridionale de la nef refaite dans le XVIII e siècle, <strong>et</strong> quelques fenêtres repercées pourprocurer un peu plus de lumière qu'on n'en donnait aux anciennes égli<strong>ses</strong>. Le choeur est voûté : <strong>ses</strong> arches en fer-à-chevaln'ont point de nervures intermédiaires ; elles sont ornées de zigzags redoublés. L'extérieur de l'abside ou rond-point orientalest très-remarquable. Sa forme demi-circulaire, <strong>ses</strong> contreforts plats, mais étroits, <strong>ses</strong> corbeaux grimaçants méritent de fixerl'attention. Le portail de l'ouest n'est pas moins curieux [132]. »TOURLAVILLE, à 4 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 3938 hab., 3071 hect. — Stéashiste, arkose, grès quartzeux.Des traditions terribles se rattachent à c<strong>et</strong>te commune <strong>et</strong> à la famille Raval<strong>et</strong> qui en avait la seigneurie. Ne pouvant donnerici place à toutes ces traditions, nous choisirons les plus remarquables.Un Raval<strong>et</strong> enleva une nuit une jeune fille dont son écuyer était amoureux, la traîna dans une orgie[p. 60]<strong>et</strong> le lendemain on ne trouva dans le préau <strong>du</strong> château que le cadavre mutilé de c<strong>et</strong>te femme auprès d'un jeu de quilles dontla boule était teinte de sang. — Raval<strong>et</strong> fut assassiné dans son lit huit jours après par l'amant de la jeune fille. — Un autreRaval<strong>et</strong> avait brûlé deux fermes au seigneur de Houteville dont les ânes étaient venus paître dans son pré. — Un autre avaitpen<strong>du</strong> trois villains à la porte de son château pour n'avoir pas envoyé moudre leur olé à son moulin. — Un troisième avait tuéson frère <strong>et</strong> était allé en expiation faire un pélérinage à la Terre-Sainte, <strong>et</strong> avait obtenu le pardon de son crime à la conditionde fonder des égli<strong>ses</strong> <strong>et</strong> des monastères, condition qu'il trouva moyen de ne pas remplir. — Un Raval<strong>et</strong> encore dont on necite pas davantage le prénom, était allé à la communion de Pâques après avoir chargé son estomac d'un bon déjeuner. Leprêtre indigné lui refuse l'hostie ; Raval<strong>et</strong> transporté de colère se précipite sur le prêtre, <strong>et</strong> le tue sur les marches de l'autel.L'église fut mise en interdit <strong>et</strong> l'excommunion prononcée entre le meurtrier. Il ne fut pas puni cependant ; soit qu'il fût parvenuà force d'argent à obtenir sa grace, soit que Henri IV qui, suivant la tradition, était alors roi de France, la lui eût accordée enrécompense de <strong>ses</strong> services contre les ligueurs.Enfin naquit à <strong>Cherbourg</strong> en 1549, un homme qui semble prendre à tâche de faire oublier tous ces crimes. Ce fut l'abbé deTourlaville, auquel M. Asselin[p. 61]


a consacré une notice dans l'Annuaire de la Manche de 1832. Il fit entr<strong>et</strong>enir les aque<strong>du</strong>cs de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de Coutances,contribua à la réédification de la chaire épiscopale <strong>et</strong> des stalles de la cathédrale dont il était grand vicaire, <strong>et</strong> son nom y estencore inscrit sur une plaque de cuivre. Il céda une rente pour payer au collége de Coutances cinq professeurs qui furentobligés de donner gratuitement l'instruction à tous ceux qui se présenteraient. Mais il fut contraint de passer sa vieillesse dansla douleur à la suite d'un événement tragique arrivé de son temps dans sa famille.Jean de Tourlaville, son frère, avait deux enfants : un fils nommé Julien, <strong>et</strong> une fille dont l'histoire n'a pas conservé le nom.Ces deux enfants s'aimaient tendrement dès leurs premières années, <strong>et</strong> quand ils furent devenus grands, leurs parentss'aperçurent que c<strong>et</strong>te amitié fraternelle, dont ils s'étaient applaudis eux-mêmes, avait fait place à un sentiment plus tendre.Julien fut éloigné sous prétexte de faire <strong>ses</strong> études à Paris, <strong>et</strong> l'on chercha un mari à la jeune fille. Un vieux receveur destailles de la généralité de Normandie se présenta, fut agréé par la famille, <strong>et</strong> la fille, la honte sur le front, n'osa refuser. Sonfrère revint alors : les deux amants se r<strong>et</strong>rouvèrent, s'aimèrent comme autrefois, furent découverts <strong>et</strong> s'enfuirent ensemble,poursuivis par le vieil époux. Après avoir erré dans une partie de la France, ils s'étaient arrêtés à Paris, où ils se croyaientmieux cachés, lorsqu'un[p. 62]jour ils furent saisis <strong>et</strong> traînés en prison ; la soeur était enceinte. Elle avoua son a<strong>du</strong>ltère, mais en niant que son frère eût étéson complice. Bientôt après elle accoucha d'une fille. Quand elle <strong>du</strong>t subir la torture de l'eau froide, le vieux mari, touché decompassion à la vue de sa douleur <strong>et</strong> de sa beauté, interj<strong>et</strong>a appel <strong>du</strong> jugement préparatoire de la question ; son appel futrej<strong>et</strong>é, <strong>et</strong> les deux amants condamnés à mort. Un nouvel appel fut rej<strong>et</strong>é comme le premier. Le père alla lui-même supplierHenri IV de faire grace. Peut-être le roi eût-il cédé à <strong>ses</strong> prières si, au rapport de De l'Estoile, la reine ne s'y fut opposée. Ilserait assez étonnant que Marguerite de Valois, qui elle-même avait été l'obj<strong>et</strong> d'une semblable accusation, se trouvât ici pourarrêter la clémence <strong>du</strong> roi, s'il n'arrivait pas quelquefois que ce sont les plus coupables qui, pour détourner les soupçons, semontrent les plus cruels. Le frère <strong>et</strong> la soeur furent exécutés le 2 décembre 1603. « Pardonnez-nous, mon Dieu, s'écriait lajeune femme au moment où la hache allait la frapper, pardonnez-nous notre iniquité, non comme aimant le vice, mais commeaimant les humains en qui les vices sont attachés dès le ventre de leur mère. » Ils furent enterrés dans une église de couventà Paris, <strong>et</strong> l'on écrivit sur leur tombe : Cy gisent le frère <strong>et</strong> la soeur. Passant, ne t'informe point de la cause de leur mort, passe<strong>et</strong> prie Dieu pour leurs ames.A la suite de ce malheur, l'abbé de Tourlaville se[p. 63]démit de son abbaye de Hambie <strong>et</strong> de sa dignité de chantre de la cathédrale de Coutances en faveur de son neveu, deFranqu<strong>et</strong>ot, <strong>et</strong> mourut peu de temps après. Le père <strong>et</strong> la mère obtinrent de quitter le nom de Raval<strong>et</strong> qui était devenu odieux,pour celui de Tourlaville, <strong>et</strong> ils passèrent le reste de leur vie en bonnes oeuvres, l'une desquelles fut la fondation d'un couventde Bénédictines dont nous avons déjà parlé, page 85, 1. re partie. — Il paraît que la famille fut éteinte à leur mort. On en trouvecependant encore des traces de leurs noms dans la Recherche de la noblesse de la généralité de Caen, par Chamillard ;mais tout porte à croire que ce nom appartenait à quelque branche collatérale, à laquelle il était revenu à défaut d'héritiersdirects.Le château qui se trouve aujourd'hui à Tourlaville, sur le penchant d'une colline, à peu de distance de l'église, n'est pascelui qui existait lors des premiers Raval<strong>et</strong> ; il a été bâti sous le règne de Henri IV par l'abbé de Tourlaville ; il ne reste del'ancien qu'une vieille tour en ruines. Nous ne savons pourquoi l'auteur d'un feuill<strong>et</strong>on inséré dans le Journal de Valognes <strong>du</strong>mois de mars 1838, dit que le château actuel n'est pas celui où furent élevés les deux enfants ; les peintures allégoriques, lesdevi<strong>ses</strong> à l'encre rouge tracées sur les murailles ; le portrait en pied d'une jeune fille entourée d'Amours aux yeux bandés,qu'elle repousse pour sourire à un autre dont les yeux sont sans bandeau <strong>et</strong> les ailes couvertes[p. 64]de sang, <strong>et</strong> l'inscription : UN SEUL ME SUFFIT écrite dans un coin, que la tradition assure être celui de la soeur de Julien : toutsemble se réunir pour attester le contraire. Le moyen de penser d'ailleurs que c<strong>et</strong>te famille, qu'on représente comme plongéedans le deuil, se soit plu à décorer aussi minitieusement un édifice qui ne devait servir à personne ! [133]L'église de Tourlaville passe pour avoir été bâtie par les Anglais lorsqu'ils étaient maîtres de <strong>Cherbourg</strong>. — On a trouvé, ily a quelques années, entre la Moinerie <strong>et</strong> le Pont-Marest, les ruines d'une ancienne chapelle, de forme rectangulaire (45pieds sur 16), que la tradition rapporte avoir été consacrée à S.te-Madeleine. — C<strong>et</strong>te commune possède aussi un monumentdruidique sur une hauteur voisine de l'église. — Voyez encore pour le port <strong>du</strong> Becqu<strong>et</strong>, dépendant de c<strong>et</strong>te commune, lapremière partie de c<strong>et</strong> ouvrage.VIRANDEVILLE, à 1 m. 1 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 840 hab., 793 hect., faisait partie des terres données à Judith sous le nom deVirandevilla. — Stéashiste. — Foire peu considérable le 14 septembre.


Canton de S.t-Pierre-Eglise.(16,315 hab. ; 20 communes ; terres vaines <strong>et</strong> vagues : 2,593 hectares).S.T-PIERRE-EGLISE, bourg très-ancien, à 1 m. 7 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 2274 hab., 769 hect — Granit <strong>et</strong> arkose,[p. 65]qui a servi à construire presque toutes les maisons de ce bourg. — Il y a dans c<strong>et</strong>te commune deux superbes menhirs. —L'ancien château de S.t-Pierre fut détruit par un sieur de Raffoville, ligueur qui fut condamné à mort par le parlement deNormandie, le 2 avril 1597. — On trouve, près <strong>du</strong> bourg même, un endroit dont les maisons sont très-anciennes <strong>et</strong> quiparaissent avoir appartenu à la famille <strong>du</strong> ligueur dont elles portent encore le nom — Les Castel, propriétaires <strong>du</strong> château deS.t-Pierre, ne le firent point relever, mais vers le milieu <strong>du</strong> dernier siècle, un des membres de c<strong>et</strong>te famille fit bâtir près de là leplus beau château moderne <strong>du</strong> département. Il appartient maintenant à M. de Blangy. — S.t-Pierre-Eglise est la patrie del'abbé de S.t-Pierre, dont nous avons déjà parlé.Marché le mercredi. — Commerce de blé, lin, filasse, fil, vaches maigres, <strong>et</strong>c. — Beaucoup de tisserands qui travaillent lespro<strong>du</strong>its <strong>du</strong> pays. — Foires, les mercredi des cendres, 3. e mercredi de carême, mercredi saint, 15 mai, 1. er mercredi après le15 novembre ; mêmes marchandi<strong>ses</strong>.ANGOVILLE, à 2 m. de <strong>Cherbourg</strong>, 70 hab., 116 hect. — Granit.BRILLEVAST, à 1 m. 5 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 775 hab., 888 hect., faisait partie sous le nom de Beroldvast, des terres données àJudith par Richard-le-Bon. — Arkose, phyllades <strong>et</strong> grawackes.CANTELOUP, à 2 m. 2 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 474 hect., 414 hect — Arkose, granit, gnéiss <strong>et</strong> micashiste.[p. 66]CARNEVILLE, à 5 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 570 hab., 652 hect., — Granit <strong>et</strong> arkose.L'église de Carneville avec <strong>ses</strong> p<strong>et</strong>ites fenêtres ; son abside arrondie <strong>et</strong> basse, appartient à l'époque romane. — Il y a dansc<strong>et</strong>te commune une table druidique <strong>et</strong> un menhir.CLITOURPS, à 1 m. 9 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 511 hab., 612 hect. — Arkose.COSQUEVILLE, à 3 lieues de <strong>Cherbourg</strong>, 820 hab., 853 hect. — Granit. — L'église de Cosqueville est romane. — Unmenhir.FERMANVILLE, à 1 m. 5 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 2,062 hab., 1125 hect., sur un terrain tout granitique. C'est delà qu'on a tiré unegrande partie des superbes blocs qui ont servi aux constructions <strong>du</strong> port de <strong>Cherbourg</strong>. Les Fermanvillais sont d'excellentsmarins. C'est sur c<strong>et</strong>te commune qu'on trouve le cap Lévi. (M. Aug. Asselin écrit le Vick) qui, situé en face de l'île de Wight,forme le r<strong>et</strong>récissement le plus considérable de la Manche. — On y avait creusé en 1783 un p<strong>et</strong>it port qui est aujourd'huipresque entièrement comblé par les gal<strong>et</strong>s.GATTEVILLE, à 2 m. 6 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 1298 hab., 938 hect. — Granit.Le cap de Gatteville termine la vaste baie de la Seine ; il est entouré d'écueils où la mer vient se briser avec fureur. Aussi ya-t-il long-temps qu'on a songé à en éclairer les abords par un phare qui correspondît[p. 67]aux feux <strong>du</strong> Havre. C<strong>et</strong>te idée n'a été entièrement exécutée qu'en 1829 — 33 [134].GONNEVILLE, à 1 m. 1 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 1,370 hab. 1,486 hect. — Micashiste <strong>et</strong> gneiss, arkose.C<strong>et</strong>te commune est située sur un des points les plus élevés <strong>du</strong> département, puisqu'on découvre à la fois les Veys, àl'embouchure de la Vire, <strong>et</strong> les montagnes de la Hague. Le château est bâti dans un vallon <strong>et</strong> semble dater <strong>du</strong> XVI e siècle ;cependant l'aile <strong>du</strong> sud sur laquelle est appuyé le donjon, paraît beaucoup plus ancienne. Il est flanqué de quatre pavillons <strong>et</strong>entouré de fossés. On y voit encore une poterne. Autour <strong>du</strong> château est un parc d'une lieue de périmètre, planté de bois de


haute futaie <strong>et</strong> entouré de murs. On trouve aussi deux tours élevées en 1331 par Richard de Courcy qui en était propriétaire.Le plus bel état de défense de c<strong>et</strong>te forteresse se rapporte à l'époque des guerres de religion. C'était un plein fief de haut ber,avec haute, moyenne, basse justice, <strong>et</strong> verderie ou juridiction forestière. Les seigneurs de Gonneville obtinrent de Louis XV l<strong>et</strong>itre de marquis ; leurs vassaux devaient gu<strong>et</strong> <strong>et</strong> garde au château.C'est le berceau <strong>du</strong> général d'Aboville, <strong>et</strong> de François Jouenne, fondateur des Etrennes Mignonnes qui parurent pour lapremière fois en 1724.Les forges de la Chatellerie, ven<strong>du</strong>es pendant la[p. 68]révolution, ont servi à l'établissement d'une filature à moteur hydraulique qui occupe environ 120 ouvriers. Les pro<strong>du</strong>its ensont ven<strong>du</strong>s à Rouen.GOUBERVILLE, à 2 m. 3 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 391 hab., 269 hect. — Granit. — Le nord de l'église de c<strong>et</strong>te commune appartientà l'époque de transition <strong>du</strong> style roman au style gothique.LE THEIL, à 1 m. 1 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 1080 hab., 1335 hect. — Stéashiste, grès intermédiaire, granit, arkose, red-marie <strong>et</strong>conglomérat (calcaire associé).LE VAAST, à 2 m. de <strong>Cherbourg</strong>, 1659 hab., 1263 hect. — Arkose, granit, phyllades <strong>et</strong> grawackes.C<strong>et</strong>te commune est remarquable par la filature de coton de M. de Fontenilliat, qui en vend les pro<strong>du</strong>its dans une maisonqu'il possède à Rouen. Fondée en 1807, elle occupe plus de 600 ouvriers. Le moteur hydraulique est un des plus forts quel'on connaisse ; il y a aussi des fabriques pour la construction <strong>et</strong> la réparation des machines. — Le propriétaire dirige encoreun moulin à blé d'après le système anglais ; construit en 1820, il se compose de quatre paires de meules qui donnent chacun120 k. de farine par heure. On y moud des blés de la Manche <strong>et</strong> de la Br<strong>et</strong>agne ; la farine se vend à <strong>Cherbourg</strong>, à Rouen <strong>et</strong>au Havre. — Il y a aussi au Vaast une p<strong>et</strong>ite pap<strong>et</strong>erie.MAUPERTUS, à 1 m. 1 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 325 hab., 323 hect. — Arkose, granit, micashiste <strong>et</strong> gneiss. — Il y a un menhirdans c<strong>et</strong>te commune ; on voit encore au bord de la mer l'emplacement <strong>du</strong> grand[p. 69]Castel de Maupertus. On y trouva au milieu <strong>du</strong> siècle dernier un nombre considérable de médailles des empereurs romains.NÉVILLE, à 2 m. 2 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 436 hab., 308 hect. — Une partie de l'église de c<strong>et</strong>te commune appartient à l'époqueromane. — Granit.RÉTHOVILLE, à 2 m. 1 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 288 hab., 330 hect. — Granit.THÉVILLE, à 1 m. 5 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 520 hab., 746 hect. — Arkose.Il y avait autrefois à Théville un château fort où se réfugia Dutourps après son inutile tentative sur <strong>Cherbourg</strong> (1591). De laChaux, alors gouverneur, s'empara de sa personne <strong>et</strong> le fit con<strong>du</strong>ire à <strong>Cherbourg</strong>. Il y avait eu un siège en règle. Goubervillequi donna son nom à la tour construite à l'extrémité de la place d'Armes de notre ville, y fut tué d'un coup de boul<strong>et</strong>.TOCQUEVILLE, à 2 m. 2 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 737 hab., 565 hect. — Granit <strong>et</strong> arkose.C'est la patrie de M. Alexis de Tocqueville, collaborateur de M. Gustave de Beaumont pour l'ouvrage sur le Systèmepénitentiaire des Etats-Unis, <strong>et</strong> auteur de la Démocratie en Amérique. Il y vient souvent passer l'été. — Foire ou plutôt loueriele 10 août.VAROUVILLE, à 1 m. 9 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 483 hab., 402 hect. — Granit <strong>et</strong> arkose.VRAVILLE, à 2 m. de <strong>Cherbourg</strong>, 152 hab., 139 hect. — Granit.[p. 70]


ARRONDISSEMENT DE VALOGNES.Après avoir fait une description détaillée de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de son arrondissement, nous croyons ne pouvoir passer soussilence Valognes <strong>et</strong> les principales communes qui l'environnent. Si nous sommes succincts ce n'est pas qu'elles soient moinsriches en antiquités que les nôtres, bien au contraire, mais les limites que nous nous sommes imposées nous forcent à nedonner que quelques pages, à ce qui mériterait des volumes. Le lecteur qui désirerait de plus amples détails pourraitconsulter les articles de M. de Gerville insérés dans les Mémoires de la société des Antiquaires, les Annuaires <strong>du</strong>département de la Manche <strong>et</strong> les deux journaux de Valognes.L'arrondissement de Valognes, le 6° <strong>du</strong> départem ent de la Manche, est situé de l'E. à l'O. entre le 3° 25' 5'' <strong>et</strong> le 4° 4' 30''de longitude O. <strong>du</strong> méridien de Paris, <strong>et</strong> <strong>du</strong> S. au N. entre le 49° 20' 45'' <strong>et</strong> le 49° 41' 51'' de latitud e, presque au centre de lapresqu'île <strong>du</strong> Cotentin, <strong>et</strong> borné au N. par l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong>, que Napoléon crut devoir en distraire en 1810, ausud par les arrondissements de Coutances <strong>et</strong> de S.t-Lo ; à l'E. <strong>et</strong> à l'O. par la mer. Sa plus grande longueur <strong>du</strong> N. au S. est de376 hectomètres, <strong>et</strong> sa plus grande largeur de l'O. à l'E. de 472 hectomètres.— Il se compose aujourd'hui de sept cantons, dont la population était en 1838 de 55926 habitants. — Le sol en est trèsfertile<strong>et</strong> très-varié. On y trouve[p. 71]d'excellents pâturages ; des champs cultivés avec soin <strong>et</strong> intelligence, qui pro<strong>du</strong>isent de bons froments <strong>et</strong> des cidres estimés,quelques landes <strong>et</strong> plusieurs forêts dont les bois servent à la construction <strong>et</strong> au chauffage. — La composition <strong>du</strong> terrain n'estpas moins variée. Le stéashiste en si grande abondance dans l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong>, ne s'y trouve nulle part ; legranit <strong>et</strong> surtout l'arkose y sont en p<strong>et</strong>ite quantité <strong>et</strong> seulement dans la partie formée de l'ancien Val de Saire ; mais enrevanche on y trouve abondamment le grès intermédiaire, le calcaire dit de Valognes, des phyllades <strong>et</strong> grawackes ; une partiede l'arrondissement de S.te-Mère-Eglise repose sur le lias ; les alluvions dominent dans le midi de l'arrondissement ; on ytrouve encore, mais en quantité beaucoup moindre, <strong>du</strong> calcaire à baculites, des faluns <strong>et</strong> quelques terrains d'eau douce. — Ily a en outre plusieurs sources d'eaux minérales. — Plus de 2,000 espèces de coquilles fossiles, formant à elles seules prèsde la moitié des espèces connues, ont été trouvées dans l'arrondissement de Valognes. — Six principales rivières l'arrosenten tous sens. Ce sont : l'Ouve ou Douve, qui a sa source au village des Flagues, va <strong>du</strong> N.-O. au S.-E. se j<strong>et</strong>er avec la Taute,dans la mer, à S.-Clément, dans les Veys., après avoir reçu la Scie, qui a sa source à Grosville, <strong>et</strong> le Merder<strong>et</strong> qui naît àTamerville, <strong>et</strong> passe à Valognes. Le Gris, dont la direction est <strong>du</strong> N. au S., <strong>et</strong> qui part de Saint-Maurice pour se j<strong>et</strong>er[p. 72]dans la baie de Portbail avec l'Olonde. La Sinope, dont la source est à Tamerville, <strong>et</strong> l'embouchure dans la Manche, <strong>et</strong> lecours de l'O. à l'E. Enfin la Saire, qui a sa source au Mesnil-au-Val <strong>et</strong> se j<strong>et</strong>te dans la mer, un peu au-delà <strong>du</strong> pont de Saire àRéville.ALLEAUME. Ce village, situé à quelques minutes de marche de Valognes, possède deux monuments d'origine romaine quiattestent de l'importance de l'ancienne ville d'Alauna, Allonia ou Lonia. Ils furent découverts de 1692 à 1695, par M. Foucault,intendant de Normandie, qui en leva des plans que le P. Montfaucon a repro<strong>du</strong>its dans son Antiquité expliquée. Nous allonsciter le passage de c<strong>et</strong> ouvrage relatif au théâtre romain d'Alleaume ; tome III, 2 e partie, page 248.« Le plan....... est fort différent de celui des autres théâtres qui ne sont qu'un hémicycle, en sorte que la ligne qui terminece théâtre serait le diamètre <strong>du</strong> cercle s'il était entier. Ici le théâtre contient beaucoup plus que le demi-cercle. — Le diamètreest de 204 pieds <strong>et</strong> la ligne qui termine ce théâtre n'est que de 192 pieds ; l'orchestre occupe encore bien plus d'espace audelàde l'enceinte que le théâtre ; il a 75 pieds de diamètre, <strong>et</strong> la ligne qui le termine n'a que 57 pieds. Le proscoenium a demême 57 pieds de longueur sur environ 12 de largeur. Tous les bâtiments qui étaient sur le devant, savoir : la scène <strong>et</strong> lesappartements[p. 73]des étrangers sont tellement ruinés qu'on n'en a pu même lever le plan. — Ce théâtre a deux précinctions, sans compter ladernière qui le termine ; il a dix escaliers qui sont <strong>du</strong> haut en bas ; ce qu'il y a ici de particulier, c'est qu'ils sont rangés deux àdeux en lignes parallèles. Ce théâtre, après ceux de Rome, est plus grand que ceux que nous avons vus ci-devant. »Nous trouvons dans le Recueil d'antiquités <strong>du</strong> baron Caylus, tome VII, page 315, que de son temps, c'est-à-dire près decinquante ans après Montfaucon, la portion la plus importante de ces ruines avait été démolie ; cependant le plan circulaire <strong>du</strong>théâtre aidait encore à en r<strong>et</strong>rouver l'enceinte. C<strong>et</strong> auteur ne pense pas qu'il pût contenir plus de 6,000 personnes : d'autresportent ce nombre à 10,000.


Aujourd'hui il n'en reste presque aucun vestige, <strong>et</strong> même beaucoup de personnes de l'endroit ne pourraient indiquerl'emplacement qu'il occupait. C'est au milieu d'un champ, qui, l'été dernier (1838) était ensemencé en avoine. L'annéeprécédente le propriétaire désirant tirer parti de son terrain y avait fait exécuter des redressements pour lesquels on abattit lesrestes d'un vomitorium ou couloir destiné à l'entrée <strong>et</strong> à la sortie des spectateurs. Les travaux d'excavation amenèrent ladécouverte de plusieurs médailles isolées de grand <strong>et</strong> de moyen bronze, toutes <strong>du</strong> haut empire ; d'une épingle en bronze,longue de quatre pouces, d'une anse très-forte[p. 74]d'amphore, portant les initiales I. T., <strong>et</strong> d'une plaque ronde en bronze, ayant d'un côté le N.° 1 <strong>et</strong> d e l'autre dix points disposésen forme de croissant, qu'on présume avoir dû servir de contre-marque.Non loin <strong>du</strong> théâtre se trouvaient les Thermes ou bains d'Alauna. Ils ont également été décrits par Montfaucon, qui leurattribue une longueur de 270 pieds <strong>et</strong> une largeur d'environ 135. Si l'on voulait hasarder, ajoute-t-il, on pourrait dire que lestrois chambres qu'on voit en enfilade <strong>du</strong> côté de l'entrée sont la chambre froide, la chambre tiède, <strong>et</strong> la chambre à suer, <strong>et</strong>que les deux chambres rondes étaient pour les bains... La grande galerie qui a 25 toi<strong>ses</strong> de long <strong>et</strong> les autres sallespourraient avoir été un éphébée ou lieu d'exercice pour les jeunes garçons.Vers 1772 le propriétaire de ce Balnéaire le dégrada <strong>et</strong> employa la sape <strong>et</strong> la mine pour en démolir les murailles, maisgrâce à la solidité de la maçonnerie, elles résistèrent à <strong>ses</strong> efforts ; <strong>et</strong> ce qui en reste aujourd'hui n'est pas très-différent <strong>du</strong>dessin publié par Caylus. Voici un passage de c<strong>et</strong> auteur :« Les murs <strong>du</strong> château ont encore 35 à 40 pieds de hauteur, <strong>et</strong> depuis 3 pieds jusqu'à 6 d'épaisseur. L'intérieur de cesmurs est fait de p<strong>et</strong>ites pierres brutes, <strong>et</strong> leur revêtement construit d'une autre p<strong>et</strong>ite pierre posée par lits, taillée carrément sur4 à 6 pouces de face extérieure, <strong>et</strong> de 4 à 5 pouces de cube. Toutes les ouvertures[p. 75]étaient en plein cintre. On a employé dans les arcs de la brique alternativement posée avec de p<strong>et</strong>ites pierres pour maintenirles bandeaux des cintres. »Dans une des salles était une piscine de forme circulaire, ayant 22 pieds de diamètre <strong>et</strong> de 2 à 3 pieds seulement deprofondeur. L'eau y arrivait par un bel aque<strong>du</strong>c, qui s'ouvrait sur une fontaine située au haut <strong>du</strong> châtel<strong>et</strong>, <strong>et</strong> était chauffée par12 p<strong>et</strong>its fourneaux placés sous le bassin. C<strong>et</strong>te piscine en stuc rougeâtre, uni comme une glace, s'était fort bien conservée ;elle fut détruite, à coups de masse, en 1773.Des médailles d'or, d'argent <strong>et</strong> de bronze ont été trouvées à diver<strong>ses</strong> époques dans ces ruines. Toutes étaient <strong>du</strong> hautempire, ce qui a fait supposer qu'Alauna a été détruite après Sévère, dans le III e siècle. — Les maisons étaient écartées lesunes des autres, <strong>et</strong> tout porte à croire qu'elles ont péri par le feu. La ville ne devait pas avoir moins de trois quarts de lieue delongueur. — Le Balnéaire était le point de départ des voies qui de là se dirigeaient vers Goriallum (<strong>Cherbourg</strong>), Cosedioe(Coutances), Crociatonum (Saint-Côme) <strong>et</strong> Grannonum (Portbail.)AMFREVILLE. Ce village est situé à 1 m. 6. k. de Valognes. — 805 hab. — Il possède un château ancien <strong>et</strong> considérable,qui a eu long-temps titre de Marquisat.BARFLEUR, à 2 m., 5 k. de <strong>Cherbourg</strong>, 1158 hab.L'origine de ce bourg n'est pas connue ; il possédait[p. 76]un château qui a soutenu plusieurs siéges ; son port le dispute en ancienn<strong>et</strong>é à celui de <strong>Cherbourg</strong>. Dès le IX e siècle noustrouvons qu'Ethelred aborda ad littora Saroe ; comme il n'y avait pas d'autre port aux <strong>environs</strong> de la Saire, il est probable quece fut à Barfleur ; on sait que son armée <strong>et</strong> sa flotte furent détruites par les Cotentinais. — C'est de ce port qu'Edouard-le-Confesseur partit après la mort de Canut pour faire valoir <strong>ses</strong> droits à la couronne d'Angl<strong>et</strong>erre ; il y revint plus tard.Guillaume-le-Roux, successeur <strong>du</strong> Conquérant y descendit en allant secourir Le Mans ; Etienne visita ce port ; Henri I er y vintdeux fois en 1105 <strong>et</strong> en 1120 ; la seconde fois, il eût donné la moitié de son royaume pour n'être pas venu. Ces flotstourbillonnants qui se brisent sur les roches sous-marines se lassèrent d'être impunément bravés, <strong>et</strong> engloutirent son fils <strong>et</strong>une partie de sa famille [135]. Au XII e siècle, Richard-Coeur-de-Lion y débarqua avec une armée, <strong>et</strong> il en partit en 1189 avecson frère Jean-sans-Terre. Au XIV e siècle, Barfleur perdit de son importance. Edouard III descendit à la Hougue avec 40,000hommes, le 1 er juill<strong>et</strong> 1346, attaqua Barfleur, qui capitula pour son malheur, car le farouche vainqueur, au mépris des traités,le mit au pillage <strong>et</strong> en enleva les habitants pour les placer sur les vaisseaux anglais. Depuis lors Barfleur disparaît de


l'histoire ; bientôt après il n'en est plus[p. 77]question que pour dire que c<strong>et</strong>te ville passe à Charles-le-Mauvais, <strong>et</strong> qu'en 1405 une flotte anglaise, commandée par lescomtes de Lancastre <strong>et</strong> de Kent, la brûla ainsi que La Hougue <strong>et</strong> les villages voisins. Froissard la cite encore ainsi comme uneplace forte au XIV e siècle. Les fortifications en furent démolies par ordre de Matignon, gouverneur de Normandie pour HenriIV. On croit que la mer en a envahi une partie. Dans une requête adressée à François I er par des religieux, on trouve queBarfleur qui avait eu dix-huit cents feux était alors ré<strong>du</strong>it à trente, <strong>et</strong> à deux cents habitants. — Ce bourg entièrement engranit, a un aspect très-ancien. Son port qui est naturel, n'est plus fréquenté que par de p<strong>et</strong>its navires. — Il y avait autrefois unphare ; celui qui porte aujourd'hui le nom de Barfleur, est situé sur la commune de Gatteville. Nous en avons parlé àl'occasion <strong>du</strong> port de <strong>Cherbourg</strong>. Il y avait aussi à Barfleur un monastère de chanoines réguliers de S.t-Augustin, fondé parPhilippe-le-Bel en 1286, pour accomplir un voeu qu'il avait fait pendant une tempête [136]. Il paraît qu'il y avait encoreauparavant un monastère de Sach<strong>et</strong>s <strong>et</strong> une confrérie de Thomas Beck<strong>et</strong>.[p. 78]BARNEVILLE. Bourg situé à 2 m. 7 k. de Valognes. — 1136 h. Les seigneurs de Barneville étaient au rapport des historiensune des familles anglo-normandes les plus remarquables <strong>du</strong> XI e au XII e siècles : un d'eux se distingua à la conquête del'Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> un autre appelé Roger, à la première croisade. Le Tasse, dans la Jérusalem délivrée, le cite comme un desplus valeureux guerriers Normands. Il donna des preuve nombreu<strong>ses</strong> de bravoure au siège de Nicée <strong>et</strong> fut un de ceux quiemportèrent Antioche par escalade. Peu de temps après, s'étant mis à la poursuite d'un corps de Sarrasins, il tomba dansune embuscade <strong>et</strong> perdit la vie. Comme il ne reste aujourd'hui aucun vestige <strong>du</strong> château de Barneville, nous n'entrerons pasdans de plus longs détails sur les seigneurs qui l'habitèrent. — L'église paraît être de la fin <strong>du</strong> XI e siècle ; M. de Gerville penseque c'est à Roger qu'il faut en attribuer la construction. — Ce bourg, peu distant des îles de Jersey, Guernesey <strong>et</strong> Aurigny, aavec elles un commerce assez éten<strong>du</strong> de denrées agricoles ; il possède une carrière de pierres calcaires veinées de grisblanc<strong>et</strong> des eaux minérales fréquentées.BEUZEVILLE-LA-BASTILLE. Ce village, qui s'appelait autrefois Beuzeville-la-Chaussée, est situé sur les rives de l'Ouve, à 2m., 3 k. de Valognes. Il doit son surnom actuel à une bastille construite au XIV e siècle près d'un gué, dont elle était destinée àempêcher le passage. — En 1376, l'amiral Jean de[p. 79]Vienne voulant resserrer les troupes anglai<strong>ses</strong> en garnison à S.t-Sauveur-le-Vicomte, s'empara de plusieurs forteres<strong>ses</strong> <strong>et</strong>notamment de c<strong>et</strong>te bastille, qui, peu d'années après, reçut une garnison de dix hommes d'armes. En 1449, elle fut de<strong>nouveau</strong> reprise aux Anglais. — La tour quadrangulaire, dont les ruines pittoresques se penchent aujourd'hui au bord del'Ouve, était, dit-on, flanquée de deux autres tours ; elle avait 35 pieds de hauteur <strong>et</strong> était couronnée d'une plate-forme avecparap<strong>et</strong>. Elle s'était fort bien conservée jusqu'au commencement de la révolution, <strong>et</strong> l'on a même pu y monter la garde en1792. Lorsque nous la visitâmes, on remarquait encore, au midi, dans un appartement, les raînures qui servaient à passer leschaînes <strong>du</strong> pont-levis, <strong>et</strong> à l'extérieur <strong>du</strong> même côté, où coulait une partie de la rivière, les restes d'une pile de pont.Un peu plus bas, au midi de l'Ouve, se trouve l'emplacement d'un ancien château-fort, dont il ne reste que des fondations<strong>et</strong> quelques parties d'enceinte. L'époque de sa construction n'est pas connue. — 120 hab.BRICQUEBEC, gros bourg à 1 m. 3 k. de Valognes. — 4414 hab. — Grès intermédiaire, deux sources d'eaux minéralesfroides, l'une près <strong>du</strong> bourg, l'autre à une demi-lieue de distance dans la forêt. — Fabriques de draps <strong>et</strong> drogu<strong>et</strong>s, de gros<strong>ses</strong>toiles, de dentelles, de sabots <strong>et</strong> d'ustensiles en bois.[p. 80]Les étymologistes sont partagés sur l'origine <strong>du</strong> nom de Bricquebec. M. de Gerville pense qu'il dérive <strong>du</strong> celtique <strong>et</strong> signifiebois pèsr d'un ruisseau. — La baronnie de Bricquebec fut donnée par Rollon à un de <strong>ses</strong> parents nommé Anslech. Lesdescendants de celui-ci prirent le nom de Bertram <strong>et</strong> conservèrent ce fief jusqu'au milieu <strong>du</strong> XIV e siècle. — Il passa ensuitedans la maison de Paisnel, <strong>et</strong> peu de temps après dans celle d'Estouteville. Il appartenait à c<strong>et</strong>te dernière famille lorsqueHenri V, roi d'Angl<strong>et</strong>erre, descendit sur nos côtes <strong>et</strong> s'empara de toute la province. Le Mont-Saint-Michel, seul, vaillammentdéfen<strong>du</strong> par Louis d'Estouteville, opposa une résistance qui fit échouer les forces <strong>du</strong> monarque anglais. — Henri V, par unacte conservé dans les archives <strong>du</strong> château de Bricquebec, en fit la donation au comte de Suffolk, qui le vendit ensuite au sireBerty Eutwizle. — Après la bataille de Formigny <strong>et</strong> l'expulsion des Anglais, la famille d'Estouteville rentra en pos<strong>ses</strong>sion de<strong>ses</strong> domaines. Le château appartint successivement aux familles de Bourbon-S.t-Paul, d'Orléans-Longueville <strong>et</strong> de Matignon.Le fils aîné <strong>du</strong> <strong>du</strong>c de Montmorency en était devenu pos<strong>ses</strong>seur, par son mariage avec mademoiselle de Matignon,lorsqu'éclata la révolution de 1789. Il émigra, <strong>et</strong> <strong>ses</strong> biens furent aliénés ; la restauration ne put lui rendre que quelques débrisde forêts.


Le château-fort de Bricquebec est situé au centre <strong>du</strong> bourg <strong>et</strong> au bas de la place des Buttes ; sa fondation[p. 81]remonte au XIV e siècle, mais il ne fut achevé que vers la fin <strong>du</strong> XVI e [137]. Il était de forme circulaire, enceint de fossés quirecevaient l'eau d'un ruisseau <strong>et</strong> défen<strong>du</strong> par six tours, non compris le donjon <strong>et</strong> la tour carrée de l'horloge qui se trouve sur laporte d'entrée. On y accédait par un pont-levis, qui lui-même était défen<strong>du</strong> par un fort. — La partie la plus digne de fixerl'attention est le donjon, un décagone d'une grande largeur <strong>et</strong> de 80 pieds de haut. On monte sur la plate-forme qui lecouronne par un escalier en hélice, éclairé au moyen d'ouvertures pratiquées dans l'épaisseur de la maçonnerie. — De là, lavue plane sur une immense éten<strong>du</strong>e de pays. — L'histoire ne mentionne pas que c<strong>et</strong>te forteresse ait eu aucun siège àsoutenir.Il y a 25 ans environ, le hasard fit découvrir des oubli<strong>et</strong>tes pratiquées dans un des murs, <strong>et</strong> dans lesquelles on trouva desossements humains <strong>et</strong> une gourde plate, en argent, armoriée sur les an<strong>ses</strong>, encore pleine de vin <strong>et</strong> suspen<strong>du</strong>e à une chaîneégalement en argent.Le château de Bricquebec n'a plus rien de sa grandeur passée ; les nobles seigneurs <strong>et</strong> les nobles dames qui l'habitaientont disparu <strong>et</strong> tout est tombé en ruines ; les fossés ont été comblés, les tourelles rasées, les fortifications minées <strong>et</strong> battuesen brèche.[p. 82]La pioche a brisé les sculptures <strong>et</strong> les fresques ; les vastes salles où resplendirent tant de fêtes, où d'élégants damoiseaux,maîtres passés dans la gentille science de galanterie, tinrent tant de mirifiques propos d'amour, où furent racontées tant deproues<strong>ses</strong>, tant de hauts faits d'armes, ont été démolies. L'écurie même où piaffaient les cavales fringantes, les destriersfougueux, a été transformée en un cabar<strong>et</strong>. Le donjon seul est resté debout ; les corbeaux continuent à voltiger autour de satête noircie <strong>et</strong> lézardée, <strong>et</strong> si le vandalisme ne vient point hâter sa ruine, il redira encore dans plusieurs siècles la puissancedes seigneurs de Bricquebec.Une vaste forêt que la hache <strong>du</strong> bûcheron décime chaque jour entourait autrefois ce bourg. Elle renferme plusieursmonuments druidiques <strong>du</strong> plus haut intérêt <strong>et</strong> la colline des Gros<strong>ses</strong>-Roches, où ils se trouvent, aurait même été, d'après unde nos antiquaires, le centre <strong>du</strong> druidisme de la contrée. (V. ANTIQUITÉS CELTIQUES). — Un grand nombre de médailles <strong>et</strong>d'obj<strong>et</strong>s de fabrique romaine ont été trouvés à diver<strong>ses</strong> époques en différentes parties de c<strong>et</strong>te commune. — L'église a étébâtie vers 1040, <strong>et</strong> la nef passe pour un des meilleurs modèles d'architecture romane. Sous Charles V, Bricquebec était lesiège d'une commanderie de Templiers.Près <strong>du</strong> château, au centre d'une p<strong>et</strong>ite place, se voit la statue <strong>du</strong> général comte Le Marrois, ancien aide-de-camp del'empereur, inaugurée le 22 octobre[p. 83]1837. Homme <strong>du</strong> peuple, simple soldat dans les armées de la république, ce brave guerrier gagna tous <strong>ses</strong> titres sur lechamp de bataille ou dans les divers gouvernements dont il fut investi. Sa statue en bronze est de grandeur naturelle : elledevait d'abord surmonter une fontaine monumentale ; mais il paraît qu'on s'en tiendra au piédestal actuel qui, outre samesquinerie, est <strong>du</strong> plus mauvais goût.Il nous reste maintenant à parler <strong>du</strong> couvent de Trappistes, situé à une p<strong>et</strong>ite demi-lieue au N. E. <strong>du</strong> bourg. Nous pourronsle faire d'autant plus pertinemment, que nous tenons nos renseignements de M. Onfroy, fondateur de c<strong>et</strong> abbaye <strong>et</strong> sonpremier abbé.La première pierre de l'établissement fut posée en 1823, sur un terrain encore tout en friche, qui avait fait partie de la forêt,<strong>et</strong> il s'éleva sous les auspices <strong>et</strong> en partie par la munificence de feu M. Dupont de Poursat, évêque de Coutances.L'inauguration s'en fit en 1824, sous le titre de Prieuré de N.-Dame-de-Grâce de la Trappe ; plus tard, lorsqu'il eut acquisl'accroissement convenable, le souverain pontife l'érigea en abbaye. Les religieux sont en ce moment au nombre de 32 ; 14sont prêtres.Voici le gros de l'observance : lever, à 2 heures les jours ordinaires, à une heure le dimanche <strong>et</strong> les jours de fête <strong>du</strong>second ordre, à minuit dans les grandes solennités. — La journée se partage entre les offices, l'oraison, la lecture <strong>et</strong> l<strong>et</strong>ravail. — Les[p. 84]


eligieux observent entre eux un silence perpétuel. Des signes sont établis, pour suppléer à la parole dans les cho<strong>ses</strong>indispensables. — Les frères de choeur jeûnent en tout temps ; les frères couvers ont six onces de pain sec le matin, quand iln'est pas jeûne d'église. De Pâques au 14 septembre on dîne <strong>et</strong> l'on soupe, sauf le mercredi <strong>et</strong> le vendredi, où l'on n'a le soirqu'une collation de trois onces de pain sec, <strong>et</strong> de deux seulement aux jeûnes d'église. Ceci se pratique tous les jours à partir<strong>du</strong> 14 septembre jusqu'à Pâques.Le pain est mitoyen <strong>et</strong> on le sert à discrétion au dîner <strong>et</strong> au souper. La nourriture commune se fait avec des légumes, desracines, des herbes <strong>et</strong> <strong>du</strong> laitage, sans autre assaisonnement que le sel <strong>et</strong> l'eau. Le laitage même est interdit dans l'Avent, leCarême aux Quatre-temps, aux Vigiles <strong>et</strong> tous les vendredis, hors le temps pascal. Pour le dîner on sert un potage, uneportion, <strong>et</strong>, à certaines époques, <strong>du</strong> fruit ou des raves : le souper consiste en une seule portion, ou une salade, ou <strong>du</strong> laitcaillé, selon les temps, avec un peu de fromage. Pour la salade, il est présenté de l'huile, <strong>et</strong> chacun en peut prendre unecuillerée. Elle n'est permise qu'avec ce seul m<strong>et</strong>s.Les religieux ne portent point de linge, même lorsqu'ils sont malades, <strong>et</strong> ils couchent toujours habillés. La couche secompose d'une paillasse piquée, de l'épaisseur de deux pouces environ, d'un traversin[p. 85]d'une ou de deux couvertures, selon la saison. Les malades n'ont également qu'une paillasse ; mais elle est non piquée <strong>et</strong>convenablement épaisse. Des draps, jamais. — On perm<strong>et</strong> aux malades l'usage de trois sortes de viandes : le boeuf, le veau<strong>et</strong> le mouton ; mais d'une sorte <strong>et</strong> une seule fois par jour. Le poisson est défen<strong>du</strong>.BRIX. Si vous vous rendez de Valognes à <strong>Cherbourg</strong>, vous apercevez sur votre gauche, à 1 m. 1 k. de la première de cesvilles, une église <strong>et</strong> quelques maisons pittoresquement posées sur un point très élevé. C<strong>et</strong>te paroisse, une des plusconsidérables de l'arrondissement, — 3,055 hab. — s'appelait primitivement Bruce, dont on a fait Bruis, puis Brix ou Bris. —Elle possédait deux châteaux-forts de barons, dont on voit encore l'emplacement : l'un, le château d'Adam, situé à l'extrémitéEst <strong>du</strong> mont sur lequel se trouve l'église, avait été bâti vers le milieu <strong>du</strong> XII e siècle, par un seigneur de Brix nommé Adam. Ilfut confisqué sous Philippe-Auguste, au commencement <strong>du</strong> XIII e siècle, <strong>et</strong> par suite démoli. On ne pense pas qu'il ait euaucun siège à soutenir. Quelques débris de la maçonnerie, des fondements <strong>et</strong> des souterrains, en partie comblés, sont toutce qui en reste aujourd'hui. — Les de Bruis occupaient une des premières places à l'échiquier. C<strong>et</strong>te famille, alliée aux <strong>du</strong>csde Normandie, a donné à l'Angl<strong>et</strong>erre plusieurs de <strong>ses</strong> hauts barons, <strong>et</strong> à l'Ecosse le plus grand <strong>et</strong> le plus vénéré de <strong>ses</strong> rois :Robert Bruce.[p. 86]L'autre, le château de la Luthumière, bâti postérieurement à la confiscation dont nous avons parlé, a totalement disparu.Ses pos<strong>ses</strong>seurs appartenaient à une des plus illustres familles de la Normandie ; plusieurs d'entr'eux ont même porté le titrede Connétable.L'église de Brix, située sur un fonds de granit <strong>et</strong> de schiste, a été en grande partie construite au XVI e siècle, avec lespierres provenant de la démolition <strong>du</strong> château d'Adam. Son élévation au-dessus <strong>du</strong> niveau de la mer, est de 149 mètres. Duhaut <strong>du</strong> clocher la vue est magnifique. — On voit à Brix un hêtre qu'on dit le plus gros <strong>et</strong> le plus ancien <strong>du</strong> pays ; c'est l'arbreTison ; il n'a pas moins de 20 pieds de circonférence.CARTERET, p<strong>et</strong>it port de mer situé à 2 m. 9 k. de Valognes. 540 hab. — On y embarque en grande quantité, pour Jersey,Guernesey <strong>et</strong> Aurigny, des denrées agricoles, des bestiaux <strong>et</strong> de la poterie de Néhou.Il ne reste rien <strong>du</strong> château qui était placé dans la pièce de terre où se trouve aujourd'hui l'église. Deux seigneurs deCarter<strong>et</strong> suivirent Guillaume-le-Bâtard à la conquête de l'Angl<strong>et</strong>erre en 1066. « La famille la plus ancienne <strong>et</strong> la plusdistinguée de Jersey porte le nom de Carter<strong>et</strong>, <strong>et</strong> fait remonter son origine jusqu'à ceux qui, sous le règne de PhilippeAuguste, quittèrent notre province. » [138] Un autre descendant de ces seigneurs a été créé baron d'Angl<strong>et</strong>erre,[p. 87]sous le titre de lord Carter<strong>et</strong>. — On cite les <strong>du</strong>nes de Carter<strong>et</strong> comme les plus curieu<strong>ses</strong> de la côte.CYR (SAINT). Ce village, situé à 4 k. de Valognes, est la patrie de l'abbé Gardin-Dumesnil, auteur des Synonymes latins.[139] — On y a trouvé en 1805 un ornement en or, d'origine gauloise ou romaine, auquel on donne le nom de hausse-col. —On remarque sur une hauteur appelée le Mont-Castre, le pourtour bien conservé, d'un camp romain. — 357 hab.GRENNEVILLE ET CRASVILLE. Ces deux villages, situés à 1 m. 3k. de Valognes, ont été réunis pour le temporel <strong>et</strong> ontensemble une population de 614 hab. — On voit à Grenneville, sur une élévation peu distante <strong>du</strong> château actuel,


l'emplacement de l'ancien château des seigneurs de Grenneville. C'est un cône assez considérable formé en partieartificiellement.[p. 88]M. de Gerville pense que c<strong>et</strong>te paroisse est le berceau de la famille <strong>du</strong> Marquis de Buckingham, qui se montra si généreuxenvers les émigrés pendant la révolution. — De l'église, l'oeil embrasse toute la baie de la Hougue.MAGNEVILLE. Village situé à 9 k. de Valognes 719 hab. Il y a tout lieu de croire que le château actuel de c<strong>et</strong>te commune estbâti sur l'emplacement même qu'occupait l'ancien château-fort des seigneurs de Magneville. Geoffroy, l'un d'eux, fit partie del'expédition d'Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> se signala à la bataille d'Hastings. En récompense de <strong>ses</strong> services, il eut une large part dans lesconcessions de terres conqui<strong>ses</strong>, <strong>et</strong> devint comte d'Essex <strong>et</strong> connétable de la Tour de Londres. Lors de la confection <strong>du</strong>Domesday book, il possédait en Angl<strong>et</strong>erre 118 seigneuries.MARCOUF. (Village <strong>et</strong> îles Saint-), à 1m. 4k. de Valognes. — Avec leur apre <strong>et</strong> sauvage énergie, leurs tons glacés, les<strong>du</strong>nes sablonneu<strong>ses</strong> de S.t-Marcouf ne sont certainement pas la partie la moins pittoresque de l'arrondissement de Valognes.Il n'y a pas longtemps encore que l'habitant de ces <strong>du</strong>nes était un être à part, ayant des moeurs, des habitudes à part ; sansidée aucune de la civilisation, menant une vie paresseuse, restant des jours entiers à dormir, éten<strong>du</strong> sur le sable, indifférent àtout ce qui n'était pas lui ; c'était, qu'on nous passe l'expression, le Br<strong>et</strong>on <strong>du</strong> Cotentin. Mais là, comme partout, le mouvementsocial s'est fait sentir, l'esprit civilisateur a pénétré sous la hutte ; l'instruction a développé ces cerveaux[p. 89]épais ; avec de nouvelles idées sont venus de <strong>nouveau</strong>x besoins ; l'amour <strong>du</strong> travail a succédé à l'indolence, <strong>et</strong> aujourd'hui l<strong>et</strong>emps se partage entre la pêche <strong>et</strong> l'agriculture. Les terrains situés entre la mer <strong>et</strong> les marais, jusqu'alors stériles, ont été misen labour <strong>et</strong> pro<strong>du</strong>isent en abondance la pomme de terre, le seigle, l'orge, la luzerne, <strong>et</strong> les différentes espèces de légumes.Au commencement <strong>du</strong> VI e siècle, un homme d'une grande piété, l'abbé Marcouf, né à Bayeux, vint habiter le village quiporte aujourd'hui son nom, <strong>et</strong> y fonda une communauté d'hommes. C<strong>et</strong>te abbaye qui avait acquis de l'importance, fut brûléepar les Normands. — L'église de S.t-Marcouf est <strong>du</strong> temps des <strong>du</strong>cs <strong>et</strong> possède une crypte.Les îles, au nombre de deux, sont éloignées l'une de l'autre d'environ 283 toi<strong>ses</strong>. Elles sont peu distantes <strong>du</strong> continentdont on croit qu'elles firent partie à une époque très-reculée. Anciennement elles étaient connues sous le nom deDuotimones, à cause sans doute de leur position entre deux bancs de sable ; comme le village, elles doivent leur nom actuelà l'abbé Marcouf qui, chaque année, y allait passer le carême dans la r<strong>et</strong>raite <strong>et</strong> la prière. En 1450, les cordeliers quihabitaient Guernesey vinrent s'établir dans l'une d'elles ; mais l'obligation de venir fréquemment sur la terre ferme, pours'approvisionner d'eau douce <strong>et</strong> d'aliments, les força quelques années après à l'abandonner. Valognes, où Guillaume LeTellier, baron de la Luthumière, <strong>et</strong> Louis, comte de Roussillon,[p. 90]leur firent plusieurs donations, fut le lieu de leur nouvelle résidence.Sous la république, l'Angl<strong>et</strong>erre pensa qu'un point aussi rapproché de nos côtes que le sont ces îles, pouvait n'être passans importance, soit pour intercepter la navigation entre le Havre <strong>et</strong> <strong>Cherbourg</strong>, soit pour rassembler des moyens d'attaquecontre la France, s'en étant emparée en messidor an III, elle y fonda un établissement militaire. Trois ans après legouvernement français voulut en chasser c<strong>et</strong>te puissance, <strong>et</strong> une expédition de chaloupes-canonnières, sous lecommandement <strong>du</strong> contre-amiral Muscain, fut organisée à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> à la Hougue ; elle prit la mer par le temps le plusfavorable ; le rivage <strong>et</strong> les hauteurs étaient couverts de personnes ; malgré l'esprit de rivalité <strong>et</strong> de désorganisation qui avaitprésidé aux préparatifs, tout présageait un succès. L'ennemi comprenant l'impossibilité de faire longue résistance, ne tardapas à cesser son feu. Le commandant anglais s'était j<strong>et</strong>é dans son canot, <strong>et</strong> déjà nos troupes se disposaient à débarquer,lorsqu'un signal <strong>du</strong> contre-amiral Muscain fit rentrer tous les bâtiments à la Hougue. C'est à c<strong>et</strong> ordre bizarre, que rienn'explique, qu'il faut attribuer la non-réussite de c<strong>et</strong>te tentative. — Ce ne fut qu'en 1802, à la paix d'Amiens, que les îles S.t-Marcouf furent ren<strong>du</strong>es à la France. La rupture de la paix mit le gouvernement dans la nécessité de les fortifier, <strong>et</strong> on yexécuta alors divers travaux, en tirant autant que possible parti des établissements ennemis. Mais ces moyens de défense[p. 91]ayant été trouvés insuffisants par Napoléon, il fit construire à l'île de Large, la superbe tour casematée, à deux batteries, l'unecouverte <strong>et</strong> l'autre à ciel ouvert, qu'on y voit aujourd'hui.Avant leur occupation comme poste militaire, ces îles étaient incultes <strong>et</strong> désertes.


MARIE-DU-MONT (SAINTE-), village situé à 2 m. 5 k. de Valognes. — 1472 hab. — Il était autrefois le siège d'une cour dejustice, dépendant <strong>du</strong> baillage de S.t-Sauveur-le-Vicomte. — Ses seigneurs s'appelaient Aux-Epaules. Un d'eux accompagnale <strong>du</strong>c Robert à la conquête de la Palestine. — Ils furent des premiers qui embrassèrent le protestantisme, <strong>et</strong> ils devinrent leschefs de ce parti dans le Cotentin. Sous Henri IV, Henri-Robert-Aux-Epaules, capitaine de 50 hommes d'armes dans la garde<strong>du</strong> Roi, lieutenant-gouverneur de Normandie, baillif de Rouen, <strong>et</strong>c., abjura <strong>et</strong> fit bâtir un vaste <strong>et</strong> beau château, ayant deuxailes ou pavillons fort allongés. — Ce château servit de prison au district de Carentan. Il a été démoli dans ces derniers temps(les bas<strong>ses</strong> cours exceptées) par un particulier qui en avait fait l'acquisition. — L'église paroissiale de S.te-Marie-<strong>du</strong>-Mont estfort remarquable ; on pense qu'elle a été bâtie au XIV e siècle. Henri-Robert y avait été enterré, <strong>et</strong> son tombeau en marbreblanc, d'un beau travail, s'y voyait avant la révolution. Un groupe représentant ce capitaine à genoux, armé de toutes pièces<strong>et</strong> accompagné de deux suis<strong>ses</strong>, surmontait le monument ; il a été conservé par M. Frigoult de Liesville.[p. 92]MÈRE-EGLISE (SAINTE-), bourg situé à 1 m. 7 k. de Valognes, sur la route royale de Paris à <strong>Cherbourg</strong>. — 1670 hab. — Il yavait dans c<strong>et</strong>te commune, sur le bord de la rivière qui la sépare d'Amfreville, au lieu appelé La Fière, une forteresse ourempart en terre, destiné, comme la bastille de Beuzeville, à empêcher le passage d'un gu<strong>et</strong>.MONTEBOURG — 2565 hab. — Ce bourg, situé à 7 k. de Valognes, sur la route de Paris à <strong>Cherbourg</strong>, possédait une riche<strong>et</strong> considérable abbaye. Elle a eu jusqu'à la révolution trente-neuf abbés, <strong>et</strong> c'est à Roger, premier abbé, qu'on fait remonterl'origine des premières constructions. L'église consacrée en 1152, par Hugues, archevêque de Rouen, Rothalde, évêqued'Evreux, <strong>et</strong> Richard, évêque de Coutances, en présence de Henri, <strong>du</strong>c de Normandie, était, dit M. de Gerville, « la plus vaste<strong>et</strong> la plus remarquable <strong>du</strong> Cotentin. » Elle comptait 200 pieds de longueur, <strong>et</strong> son clocher s'élevait à une hauteur de 106pieds. La démolition s'en était opérée successivement, lorsque en Février 1818, la mine acheva ce que la pioche avaitcommencé. Il ne reste maintenant de ce monastère que l'abbatiale <strong>et</strong> de grands murs de clôture.NÉHOU. Bourg situé à 1 m. 3 k. de Valognes. — 2400 hab. — Fabrication de briques <strong>et</strong> de poterie.Huit ans après la concession territoriale que Rollon fit à Richard, (v. ci-après Saint-Sauveur-le-Vicomte) ce dernier donna àson fils Néel, Nigellus, les terrains qui portent aujourd'hui le nom[p. 93]de Néhou, dérivé de Néel-Hou, habitation de Néel, <strong>et</strong> c'est à ces temps reculés qu'il faut rapporter la fondation <strong>du</strong> château-fortdont nous voyons les derniers débris sur les bords de l'Ouve, entre les égli<strong>ses</strong> de Néhou <strong>et</strong> de S.te-Colombe. — Les Néelfurent paisibles pos<strong>ses</strong>seurs de c<strong>et</strong>te chatellenie jusqu'en 1047, époque de la révolte de l'un d'eux contre Guillaume-le-Bâtard, qui la confisqua <strong>et</strong> la donna, avec titre de baronnie <strong>et</strong> droit de séance, à l'échiquier, à Baudouin de Meules, sonneveu. Les descendants de celui-ci, les Reviers-Vernon, la conservèrent [140] jusqu'en 1283, où, faute d'héritiers mâles, ell<strong>et</strong>omba en quenouille <strong>et</strong> passa en d'autres mains, divisée en trois parts. Mathilde de Vernon épousa un des seigneurs de laHaie, <strong>et</strong> la baronnie <strong>du</strong> château qui lui était échue, resta dans c<strong>et</strong>te[p. 94]famille jusqu'à l'échange qu'en fit (1366) Robert de la Haie, avec le roi Charles V, contre la chatellenie de Milly. Peu de tempsaprès, vers 1370, les Anglais, commandés par Geoffroy d'Harcourt, s'emparèrent <strong>du</strong> château <strong>et</strong> ne le rendirent au roi deFrance qu'en 1375. Il appartint successivement aux sires Bureau de la Rivière <strong>et</strong> d'Ivry, puis fut pris de <strong>nouveau</strong> par lesAnglais en 1418, <strong>et</strong> demeura en leur pouvoir jusqu'à leur expulsion de la Normandie (1450). — Quand <strong>et</strong> comment a-t-il étédémoli ? c'est un point sur lequel on n'a que des données fort incertaines. Tout porte à croire néanmoins que ce fut pendantson occupation par l'ennemi, peut-être à la suite d'un siège. Voici ce que nous lisons à ce suj<strong>et</strong> dans l'histoire de Néhou, parM. Le Bredonchel [141] : « Passant peu de temps après sous la domination des Anglais qui en firent une forteresse, <strong>et</strong> qui s'ymaintinrent avec des alternatives de bon <strong>et</strong> mauvais succès.... il est probable qu'il fut bien maltraité.... si toutefois ce ne futpas là l'époque de sa démolition.... une prisée ou estimation de c<strong>et</strong>te baronnie qui fut faite au mois de janvier 1473, vingt-troisans après le départ des Anglais.... ne parle plus que des ruines de ce château de Néhou : audict lieu de Néhou a motte, ousoullait[p. 95]avoir un bel <strong>et</strong> fort chastel, <strong>et</strong> sont les fossés doubles pleins d'eau tout à l'entour de la dicte motte, <strong>et</strong>c. » — Le donjon, queplusieurs habitants de Néhou se rappellent encore avoir vu, exista jusqu'au Lundi-Gras de l'an 1771. C'était, disent-ils, unegrosse tour carrée, en pierre de taille, qui avait dû s'élever à une grande hauteur, <strong>et</strong> qu'on démolissait chaque jour à sa basepour en extraire des matériaux ; elle s'écroula au milieu de la nuit par l'eff<strong>et</strong> d'un coup de vent. — Sauf quelquesr<strong>et</strong>ranchements avancés qu'on remarque encore au couchant, il ne reste plus aujourd'hui de c<strong>et</strong>te demeure seigneuriale, unedes plus importantes de notre presqu'île, que des décombres <strong>et</strong> quelques pans de murailles remarquables par leur solidité.Sa position sur les bords de l'Ouve, dans un lieu marécageux, en perm<strong>et</strong>tant d'en inonder les approches, devait en rendre


l'accès difficile à l'ennemi.L'église, construite à diver<strong>ses</strong> repri<strong>ses</strong>, n'offre rien qui soit digne de remarque. La partie la plus ancienne, qu'on croit <strong>du</strong>XV e siècle, est la chapelle méridionale, dont les arceaux se terminaient par des figures grotesques, représentant la fête desfous, de l'âne, <strong>du</strong> p<strong>et</strong>it évêque, des cornards, <strong>et</strong>c., que le curé de Néhou, par un rigorisme mal enten<strong>du</strong>, a fait disparaître en1829.Une léproserie avait été fondée, sous le règne de Philippe-Auguste, par la famille des Reviers-Vernon, près <strong>du</strong> lieu où s<strong>et</strong>rouve de nos jours l'ancienne[p. 96]chapelle de Monroc. C'est un terrain très-élevé, quoique plat en apparence, d'où la vue embrasse une vaste éten<strong>du</strong>e de pays.Par un beau temps, on distingue de là les clochers de dix-sept égli<strong>ses</strong>. L'époque à laquelle c<strong>et</strong>te léproserie a cessé d'existern'est pas connue. — La chapelle de Monroc fut dotée vers le milieu <strong>du</strong> XVI e siècle d'un monument en pierre de Caen, d'unseul morceau, représentant en personnages de grandeur naturelle, la mise au tombeau de J.-C. Le corps, enveloppé d'unlinceul, est descen<strong>du</strong> dans le sépulcre par deux hommes, l'un à la tête, l'autre aux pieds. Latéralement à la gauche <strong>du</strong> Christse trouvent, dans l'attitude de la douleur, S.t-Jean l'évangéliste, Joseph d'Arimathie <strong>et</strong> trois saintes femmes. On ne connaît nil'auteur, ni le donateur de ce monument qui, ne fût-il pas <strong>du</strong> temps de la renaissance, serait encore fort remarquable commeouvrage de sculpture. Ce n'est pas à la chapelle de Monroc qu'il faut aller pour le voir, mais à l'église paroissiale de Néhou, oùl'été dernier on l'a fait transporter.PERQUES (LES). Village situé à 1 m. 6 k. de Valognes. 334 hab. On voit dans c<strong>et</strong>te commune l'emplacement d'un ancienmanoir, construit de 1617 à 1699, qui fut long-temps l'apanage d'une branche cad<strong>et</strong>te des Bertrand, descendants d'Anslech,premier seigneur de Bricquebec <strong>et</strong> parent de Rollon. Une crypte (caveau funéraire), fort curieuse, se trouve sous l'endroitmême qu'occupait la chapelle de ce château.PORTBAIL. 2086 hab. Ce village, situé à 2 m. 8 k.[p. 97]de Valognes, a un p<strong>et</strong>it port de cabotage où les habitants de Jersey <strong>et</strong> de Guernesey viennent s'approvisionner des denrées<strong>du</strong> pays. — Ce port était fréquenté dès le temps des Romains, <strong>et</strong> même ils y avaient une station considérable connue sous lenom de Grannonum. On trouve beaucoup de briques romaines dans les champs voisins de Portbail. — L'église a été bâtiesous les <strong>du</strong>cs de Normandie.QUINÉVILLE. 391 hab. — Ce village, situé à 1 m. 5 k. de Valognes, possède un monument connu sous le nom de laGrande-Cheminée-de-Quinéville, qui a fort partagé les antiquaires. Il est à 50 toi<strong>ses</strong> environ de l'église <strong>et</strong> à 500 toi<strong>ses</strong> <strong>du</strong>rivage des pleines mers. M. Asselin le croit d'architecture romaine, <strong>et</strong> pense que sa construction remonte au premier siècle denotre ère. Voici la description qu'il en fait dans les Mémoires de l'Académie de <strong>Cherbourg</strong> :« La Grande-Cheminée-de-Quinéville a son ouverture au N.-E. Elle est composée d'un soubassement qui supporte une colonne.... Sa hauteurtotale est de 26 pieds environ, dont la colonne fait un peu moins de la moitié. La circonférence de son soubassement est de 30 pieds, sur le sol, <strong>et</strong> il vaen diminuant à mesure qu'il s'élève, de manière qu'il n'a que 21 pieds quand il parvient à la base de la colonne. Ce soubassement, qui est un massifbeaucoup plus large que la colonne qu'il supporte, présente, en s'élevant, une partie circulaire, mais dégradée. Elle était dirigée de manière à aboutirau bas de la colonne qui, étant creuse dans toute sa longueur <strong>et</strong> par conséquent ouverte à <strong>ses</strong> deux extrémités, devait établir une communication d'air<strong>et</strong> de lumière <strong>du</strong> bas de la colonne jusqu'au haut. Le soubassement, dont la lime <strong>du</strong> temps a beaucoup diminué la masse, est d'une maçonneriegrossière en schiste <strong>du</strong> pays <strong>et</strong> mortier de chaux : mais la colonne qui est ronde <strong>et</strong> polie, <strong>et</strong> construite en pierres calcaires, est d'un[p. 98]travail qui appartient au genre romain. Elle est ornée de p<strong>et</strong>ites colonnes qui s'élèvent avec elle dans toute sa hauteur, pour supporter son chapiteausur lequel est placée une rangée circulaire de trois p<strong>et</strong>ites colonnes, qui ont toutes aussi leur chapiteau : elles sont espacées moitié plein, moitié vide,pour laisser passer, comme nous l'avons dit, l'air <strong>et</strong> la lumière. Ce rond-point de p<strong>et</strong>ites colonnes est surmonté d'un p<strong>et</strong>it toit en pierres d'appareil, dontle temps n'a détruit que la moindre partie. Il termine la colonne en pointe ou plutôt en forme de dome. »M. Asselin ajoute que la forme <strong>et</strong> la position de c<strong>et</strong>te colonne doivent donner l'idée d'un phare, <strong>et</strong> qu'il est difficile, peut-êtreimpossible de lui supposer une autre destination. C<strong>et</strong>te opinion a été combattue dans divers numéros <strong>du</strong> Journal del'arrondissement de Valognes ; nous citerons celui <strong>du</strong> 11 mai 1838 :« Si, après les antiquaires de Normandie, on peut citer la société académique de <strong>Cherbourg</strong>, on verra des explications, non moins erronées surl'ancienne cheminée de Quinéville, dont on veut faire un phare, quoique l'appareil <strong>du</strong> feu soit à la hauteur des cheminées ordinaires, <strong>et</strong> quoique ce p<strong>et</strong>itmonument soit tout-à-fait au pied d'une éminence qui en empêche la vue aux navigateurs, tandis qu'il eût été si facile de l'établir sur c<strong>et</strong>te éminence sitelle eût été sa destination. Nous pouvons assurer en outre que la hauteur de ce monument excède d'un tiers celle qu'on lui donne. Une boussoleétablie au pied, suffit pour démontrer l'inexactitude des assertions contenues dans le recueil de l'académie de <strong>Cherbourg</strong>. Nous n'en dirons pas


davantage aujourd'hui ; mais au besoin, nous serions en mesure de prouver qu'il n'y a pas encore d'explication satisfaisante de l'usage d'unmonument, que des antiquaires français, tels que MM. Denon, de Tersan <strong>et</strong> Charles Lenormand rapportent aux Romains, tandis que le directeur de lasociété des antiquaires de Londres en fait une cheminée <strong>du</strong> moyen-âge.[p. 99]On voit à Quinéville, sur une hauteur, près de la chapelle de S.t-Michel-de-Lestre, une pierre plantée de p<strong>et</strong>ite dimension.RÉVILLE. 2 m. 1 k. de Valognes. — 1929 hab. Ce village, situé à l'embouchure de la Saire <strong>et</strong> à peu de distance de laHougue, a donné naissance à l'histoire merveilleuse la plus répan<strong>du</strong>e des arrondissements de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de Valognes ;celle qui à la campagne fait encore le suj<strong>et</strong> de la conversation <strong>du</strong>rant les longues veillées d'hiver, <strong>et</strong> que jeunes <strong>et</strong> vieuxn'écoutent jamais sans frissonner. Nous voulons parler de l'histoire <strong>du</strong> MOINE-DE -SAIRE.Non loin <strong>du</strong> pont de Saire, à l'extrémité <strong>du</strong> magnifique Val de ce nom, qui passe pour un des plus beaux de France,habitait il y a plusieurs siècles un riche seigneur, dont le frère était moine <strong>et</strong> avait fait voeu de pauvr<strong>et</strong>é. Un jour que celui-ci s<strong>et</strong>rouvait seul au château, lisant dévotement son bréviaire, il fut distrait par l'arrivée d'un villageois qui tenait à bail une desfermes seigneuriales, <strong>et</strong> qui venait payer son terme de Noël. Le moine toucha la somme <strong>du</strong>e <strong>et</strong> promit de la rem<strong>et</strong>tre à sonfrère ; mais des passions mal éteintes s'étaient réveillées dans son coeur, sa cupidité s'était enflammée à la vue de c<strong>et</strong> or, ilcéda à la mauvaise pensée de s'en emparer, <strong>et</strong> plus tard il nia formellement avoir rien reçu. — C<strong>et</strong> homme, dit-il, en montrantle fermier que le seigneur avait fait appeler, est un fourbe <strong>et</strong> un calomniateur : si jamais il m'a remis un denier,[p. 100]je veux que le diable m'emporte <strong>et</strong> que le pont de Saire me serve de cellule !...... Un grand bruit succéda tout-à-coup à cesparoles impies ; les antiques portraits de famille qui étaient appen<strong>du</strong>s aux boiseries de la salle, tombèrent avec fracas ; lesmurailles <strong>du</strong> château furent ébranlées jusqu'en leurs fondements, <strong>et</strong> la cloche de la chapelle, qu'une main invisible mit enbranle, sonna le glas des funérailles ! Quand le seigneur <strong>et</strong> le fermier, pâles d'effroi, j<strong>et</strong>èrent un regard autour d'eux,l'imprécation <strong>du</strong> moine était exaucée ; il avait disparu ! — Depuis c<strong>et</strong>te époque, il apparaît chaque nuit sous diver<strong>ses</strong> formes,tantôt le long <strong>du</strong> rivage, sur les rocs les plus élevés, livrant son crâne chauve aux vents <strong>du</strong> nord, tantôt dans les cheminsavoisinants, tantôt sur le pont qui lui sert de demeure, <strong>et</strong> ces apparitions sont toujours suivies de scènes bizarres ouhorribles ; c'est un pêcheur auquel il joue un mauvais tour ; c'est un voyageur qu'il égare ou précipite dans la rivière. LeMOINE-DE -SAIRE est le génie <strong>du</strong> mal de nos contrées [142] — Le château de Réville était très-ancien, <strong>et</strong> il fut pris <strong>et</strong> brûlé parles Anglais à diver<strong>ses</strong> repri<strong>ses</strong>. Une vieille tour a long-temps subsisté après sa ruine ; ce fut le dernier seigneur de Réville quil'a fit démolir. — La nef de l'église est d'architecture romane.SAUVEUR-LE -VICOMTE, (SAINT-) P<strong>et</strong>ite ville située[p. 101]sur les rives de l'Ouve, à 1 m. 5 k. de Valognes. — 3,896 hab. — On vient d'y découvrir une mine de houille qui va être miseen exploitation, <strong>et</strong> que tout annonce devoir être très-pro<strong>du</strong>ctive.Rollon partagea entre <strong>ses</strong> compagnons d'armes les terres que le traité de Saint-Clair-sur-Epte lui avait concédées.Richard, un de <strong>ses</strong> parents <strong>et</strong> de <strong>ses</strong> principaux capitaines, obtint le territoire qui, de nos jours, forme les communes deNéhou <strong>et</strong> de Saint-Sauveur-le-Vicomte, lequel était couvert de bois <strong>et</strong> composé de marais <strong>et</strong> de terres sèches, <strong>et</strong> lui fut donnéà titre d'honneur, avec obligation d'hommage <strong>et</strong> de service militaire. A peine en fut-il en pos<strong>ses</strong>sion, qu'il j<strong>et</strong>a les fondements<strong>du</strong> château-fort, dont nous voyons encore les imposantes ruines, <strong>et</strong> qui, après avoir été la demeure <strong>du</strong> chef le plus puissantde tout le pays, est aujourd'hui transformé en un modeste hôpital. — En 938, Guillaume-Longue-Epée, honora Néel, fils deRichard, <strong>du</strong> titre de vicomte ; « dignité, dit M. de Gerville, qui devint héréditaire dans sa postérité, <strong>et</strong> qui a fait donner à S.t-Sauveur le surnom de le vicomte. » — En 1002 ou 1003, un Néel accourut au secours de Barfleur, <strong>et</strong> tailla en pièces l'arméed'Ethelred, roi d'Angl<strong>et</strong>erre (v. page 20, 1 re partie). — On sait les troubles qui agitèrent les premières années <strong>du</strong> règne deGuillaume-le-Bâtard : Gui, comte de Bourgogne, voulut disputer à ce <strong>du</strong>c <strong>ses</strong> droits au <strong>du</strong>ché de Normandie, <strong>et</strong> entraîna danssa révolte Néel de S.t-Sauveur-le-Vicomte, avec un grand nombre d'autres seigneurs. La bataille <strong>du</strong> Val-des-Dunes (1045),en[p. 102]donnant gain de cause à Guillaume, força Néel à s'expatrier ; <strong>et</strong> plus tard, lorsqu'il obtint son pardon (1048), <strong>ses</strong> domainesavaient été démembrés <strong>et</strong> les terres <strong>et</strong> le château de Néhou concédés à Baudouin de Meule, qui les conserva.Au XII e siècle, la baronnie de S.t-Sauveur passa dans la famille de Tesson par le mariage de l'héritière des Néel avecJourdain Tesson ; puis de la même manière dans la célèbre famille de Harcourt. Nous ne ferons pas ici l'histoire de ceGeoffroy, dont la forfaiture, si diversement appréciée des historiens, entassa tant de maux sur la France. Poussé par le plus


infernal esprit de vengeance, il débarqua à Barfleur à la tête des troupes anglai<strong>ses</strong> (1346), <strong>et</strong> mit toute la Basse-Normandie àfeu <strong>et</strong> à sang. On connaît son repentir <strong>et</strong> son amende honorable, la hart au col ; puis sa reprise d'armes contre la France dixans après, <strong>et</strong> enfin sa mort héroïque.« Par le traité de Brétigny, la France céda au roi d'Angl<strong>et</strong>erre le château de S.t-Sauveur, qui fut donné par ce prince aufameux Jean Chandos, le plus grand capitaine de son temps : c'est à ce pos<strong>ses</strong>seur qu'il faut rapporter tous les grandstravaux de fortification <strong>du</strong> château <strong>et</strong> notamment le donjon, si remarquable, que défigure aujourd'hui une toîture tout-à-fait endésaccord avec le but de c<strong>et</strong>te forteresse. — Après la mort de Chandos, arrivée vers 1368, les Anglais restèrent enpos<strong>ses</strong>sion <strong>du</strong> château de S.t-Sauveur, devenu une de leurs principales forteres<strong>ses</strong> en Normandie. La garnison de c<strong>et</strong>teplace parcourait impunément[p. 103]le pays jusque dans la haute Normandie. Pour s'opposer à <strong>ses</strong> ravages, les états de la province furent convoqués <strong>et</strong>donnèrent des fonds suffisants pour lever une armée capable de s'emparer <strong>du</strong> château. C<strong>et</strong>te armée, commandée par l'amiralJean de Vienne, en fit le siège en 1373. Mais il était si bien fortifié, <strong>et</strong> la garnison s'y défendit si vaillamment, qu'après unsiège très-long <strong>et</strong> très-meurtrier, l'amiral n'était pas plus avancé que le premier jour. Enfin, par un traité <strong>et</strong> pour une sommed'argent très-considérable, la garnison évacua la place. »« Après le règne de Charles V, qui en avait repris pos<strong>ses</strong>sion, <strong>et</strong> sous le règne de Charles VI, les Anglais rentrèrent dansle château de S.t-Sauveur. Ses fortifications bien entr<strong>et</strong>enues, furent encore dans le cas de soutenir un siège en 1450. Maisl'emploi <strong>du</strong> canon en hâta la prise. Depuis ce temps, il n'est plus parlé dans l'histoire <strong>du</strong> château de S.t-Sauveur. Il futsuccessivement abandonné par les rois de France, d'abord, comme récompense de services militaires, ensuite, comme gagede d<strong>et</strong>tes contractées par la couronne, <strong>et</strong>, enfin, comme apanage à des princes <strong>du</strong> sang. Pendant ce temps, vers le milieu <strong>du</strong>règne de Louis XIV, on y établit un hôpital, qui avait subsisté jusqu'à la révolution de 89, dans un état passable, approprié auxbesoins de la localité, <strong>et</strong> qui est maintenant dans un grand dénuement. » [143][p. 104]Voilà plus de deux siècles que les fortifications <strong>du</strong> château de S.t-Sauveur n'ont été entr<strong>et</strong>enues ; cependant, quelquesdégradées qu'elles soient, on peut encore en suivre les principaux traits <strong>et</strong> se former une idée assez n<strong>et</strong>te des moyens dedéfense usités à l'époque de leur construction. C'est le monument <strong>du</strong> moyen-âge le plus entier que possède l'arrondissementde Valognes.Nous avons dit comment Néel, n'ayant pas voulu reconnaître l'autorité <strong>du</strong> <strong>du</strong>c Guillaume, s'était vu forcé de passer àl'étranger. A son r<strong>et</strong>our à S.t-Sauveur, il travailla à agrandir son habitation, <strong>et</strong> fonda en 1049 une abbaye de Bénédictins, qui asubsisté dans l'enceinte même <strong>du</strong> château jusqu'en 1067. Les religieux se trouvèrent trop à l'étroit, <strong>et</strong> ils s'adressèrent à lapieuse munificence de Néel, qui fit bâtir une nouvelle maison en dehors des murs. Ce sont les ruines de l'église <strong>et</strong> del'abbatiale de ce monastère qu'on aperçoit à la sortie de S.t-Sauveur, sur la route de la Haie-<strong>du</strong>-Puits. L'église est le travailsuccessif des trois grandes familles qui ont possédé le château avant son occupation par les Anglais : elle n'était pas encoreachevée lors de sa dédicace en 1188. — Après la mort de Geoffroy d'Harcourt, l'abbaye fut rasée par Chaudos, dont ellecontrariait les vues militaires ; mais l'expulsion des Anglais permit de la restaurer, <strong>et</strong> depuis ce temps jusqu'après le milieu <strong>du</strong>siècle dernier, des religieux l'ont habitée constamment. La révolution n'en trouva pas un seul debout ; la mort[p. 105]les avait tous frappés l'un après l'autre. Leur maison n'existe plus.C<strong>et</strong>te abbaye, de même que celle de Montebourg, a appartenu à des particuliers qui l'ont ruinée pour en extraire la pierrede taille. Les propriétaires actuels se proposent, nous a-t-on assuré, de faire don des restes de l'église à la communauté defemmes qui s'est établie dans l'abbatiale. On a donc l'espoir que l'exploitation s'arrêtera là.Ces ruines sont <strong>du</strong> plus bel eff<strong>et</strong>, <strong>et</strong> nous regr<strong>et</strong>tons de n'en pouvoir faire ici une description détaillée. Là, tout est poétique,tout est éloquent, tout parle au coeur avec une sagesse de sept siècles. Puisse comme nous, le lecteur, les visiter par un jourde solennité religieuse, à l'heure des complies, au moment où le soleil s'abime dans un gouffre de pourpre <strong>et</strong> dore de <strong>ses</strong>derniers rayons les sculptures noircies <strong>du</strong> vieil édifice. Il entendra une voix pure, un chant céleste s'élever radieux vers le ciel,puis d'autres voix, d'autres chants répondre en choeur à c<strong>et</strong>te voix. Alors comme nous, vivement impressionné, débordantd'émotions, il s'assiéra sur quelques pieux débris, <strong>et</strong> se perdra dans d'ineffables rêveries de passé <strong>et</strong> d'avenir.TAMERVILLE. Village situé à 4 k. de Valognes. 1294 hab. — Nous avons eu occasion de parler de ce terrible Geoffroyd'Harcourt, qui, à deux repri<strong>ses</strong>, s'arma contre la France <strong>et</strong> causa tant de maux à notre malheureux pays. Son nom se trouvemêlé à l'histoire


[p. 106]<strong>du</strong> château de Chiffrevast. N'est-ce pas déjà dire qu'il s'agit d'une haine à satisfaire, <strong>et</strong> que là aussi la vindication <strong>du</strong> sire deS.t-Sauveur-le-Vicomte se montra implacable ? Un jour, les gens de Nicolas de Chiffrevast, étant à la chasse, tuèrent unebiche blanche apprivoisée, qui portait un collier aux armes d'Harcourt. Grande fut la colère de Geoffroy, <strong>et</strong> il jura qu'il tireraitune vengeance éclatante de ce méfait. Il vint à la tête d'une p<strong>et</strong>ite armée faire le siège <strong>du</strong> château de son ennemi, <strong>et</strong> s'enétant emparé le premier dimanche de carême de l'an 1353, il le pilla, en brûla les titres <strong>et</strong> le ruina presque en totalité. Nicolasde Chiffrevast demanda justice au Roi ; mais la rébellion de Geoffroy <strong>et</strong> les graves événements qui survinrent ne permirentpas à ce monarque de lui faire réparation. Son fils Jean de Chiffrevast obtint de Charles VI, en 1396, des l<strong>et</strong>tres qui rétablirent<strong>et</strong> confirmèrent tous <strong>ses</strong> droits. A sa mort, la seigneurie <strong>du</strong> château tomba en quenouille, <strong>et</strong> eut pour pos<strong>ses</strong>seurs successifs,Robert de Percy <strong>et</strong> Robin d'Anneville. C'est à la famille de ce dernier qu'elle est restée jusqu'à la révolution. — Vers lecommencement <strong>du</strong> XVII e siècle, Henri d'Anneville ayant achevé la démolition de l'ancien château, le remplaça par celui quenous voyons aujourd'hui. De forts beaux bois l'environnent. Il appartient à M. Le Brun.VAAST-LA -HOUGUE. (SAINT-) P<strong>et</strong>ite ville maritime située sur la Manche, à l'embouchure de la Saire, <strong>et</strong> à 1 m. 7 k. deValognes. 3,575 hab. — Ce port a[p. 107]reçu de très-grands avantages de la nature ; <strong>et</strong>, lorsqu'il a été question de former un établissement maritime dans la Manche,on a long-temps balancé si la préférence ne lui serait pas donnée sur <strong>Cherbourg</strong>. L'option en faveur de celui-ci l'a enfincondamné à une importance toute secondaire ; mais cela n'empêche pas qu'il ne soit très-fréquenté par les navirescaboteurs, <strong>et</strong> que son commerce ne soit assez éten<strong>du</strong>. Les importations consistent en bois de construction, mâts, fer, zinc,étain, cuivre, houille, goudron, sucre, café, vins, eaux-de-vie, <strong>et</strong>c. Le commerce local s'alimente spécialement des pro<strong>du</strong>its dela pêche <strong>du</strong> hareng <strong>et</strong> <strong>du</strong> maquereau, <strong>et</strong> de l'importation, de la mise en parc <strong>et</strong> <strong>du</strong> transport à Courseulles, à Paris, <strong>et</strong>c., deshuitres de cancale. — S.t-Vaast possède 1 navire faisant la navigation des Colonies ; 2 celle de Terre-Neuve <strong>et</strong> 90 lecabotage. On y compte en outre 250 bateaux employés à la pêche. Il y avait dix navires sur les chantiers lorsque nous levisitâmes en juin 1838. — C<strong>et</strong>te position est à jamais célèbre par le combat <strong>du</strong> maréchal de Tourville ; mais avant de nousoccuper de c<strong>et</strong>te glorieuse <strong>et</strong> funeste page de notre histoire, nous allons en peu de mots rappeler les événements antérieursdont la Hougue a été le théâtre.« Il n'est besoin que de voir la grande baie de la Hougue, dit M. de Gerville, pour se convaincre de la facilité d'y opérer, surpresque tous les points, des débarquements formidables : » aussi lisons-nous que, dès 1137, le roi Etienne y débarqua avecune suite[p. 108]nombreuse. En 1346, Edouard III y aborda également avec une flotte considérable ; de nouvelles descentes eurent lieu en1405, en 1412 <strong>et</strong> en 1574 : à c<strong>et</strong>te dernière époque il y avait <strong>du</strong> canon à Tatihou. — Au XIV e siècle, S.t-Vaast fournit dixvaisseaux pour sa part, de la flotte qu'Edouard III, défit dans la désasreuse journée de l'Ecluse. — Un siècle après on yexécuta divers travaux, <strong>et</strong> l'amiral de Bourbon, seigneur de la Hougue, conçut le proj<strong>et</strong> de fortifier c<strong>et</strong>te place <strong>et</strong> d'y établir unport ; nous citerons à ce propos un passage de l'histoire des <strong>du</strong>cs de Bourgogne.« Sans doute que l'amiral de France jugeait, comme le <strong>du</strong>c de Bourgogne, de l'importance de celle position. Il envoya au roi un long mémoire pourlui conseiller de construire un port <strong>et</strong> d'établir une ville à la Hougue ; il disait que le proj<strong>et</strong> en avait été proposé au feu roi ; il faisait voir tous lesavantages de ce port, qui serait sûr pour les vaisseaux <strong>et</strong> facile à défendre, à cause d'une île qui est au devant ; quant à la ville, il s'offrait de la bâtirainsi que la citadelle ; seulement il demandait que le roi lui donnât un ressort de 120 parois<strong>ses</strong>, dont les habitants seraient chargés, pour tout service,de faire le gu<strong>et</strong> au bord de la mer. Il voulait le titre de baronnie ; haute, moyenne <strong>et</strong> basse justice, ressortissant seulement à l'échiquier de Normandie ;la création d'un maire <strong>et</strong> de deux échevins, juges de tous procès entre les habitants ; l'exemption de tous subsides pour ceux qui viendraient s'yétablir ; la permission à tous les marchands <strong>et</strong> facteurs des pays étrangers, alliés <strong>du</strong> Roi, d'y avoir leurs comptoirs ; le marché trois fois la semaine, <strong>et</strong>trois foires franches de quinze jours chacune, comme celles que le roi avait établies à Lyon ; le Roi accorda tous ces priviléges. Cependant le port ni laville n'ont jamais été faits. »Nous arrivons en l'année 1692. — Jacques II, roi d'Angl<strong>et</strong>erre, chassé de son royaume, se réfugia en France. Louis XIV luifit le meilleur accueil <strong>et</strong> se[p. 109]déclara son protecteur. Il encouragea les complots de <strong>ses</strong> partisans <strong>et</strong> entreprit même de le rétablir sur le trône par la forcedes armes. Une descente en Angl<strong>et</strong>erre fut résolue à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong>, <strong>et</strong> au printemps de 1692, les réfugiés Jacobites <strong>et</strong> un corps d<strong>et</strong>roupes françai<strong>ses</strong>, commandés par le maréchal de Belle-fonds sous les ordres de l'ex-roi, furent dirigés sur la Hougue, oùtrois cents navires, déjà réunis dans les baies de Saint-Vaast, de Barfleur <strong>et</strong> de <strong>Cherbourg</strong>, devaient les venir prendre pourles transporter outre Manche. Deux escadres, l'une sous le commandement de l'amiral de Tourville, l'autre sous celui <strong>du</strong> <strong>du</strong>cd'Estrées, avaient été armées dans les ports de Brest <strong>et</strong> de Toulon <strong>et</strong> avaient mission de se joindre dans la Manche, afin deprotéger le transport <strong>et</strong> le débarquement de l'armée expéditionnaire. — Le <strong>du</strong>c d'Estrées prit la mer au commencement de


mai ; mais contrarié par les vents, il ne put arriver à temps. L'amiral de Tourville, sur un ordre exprès <strong>du</strong> roi, qui lui enjoignaitd'appareiller de suite, <strong>et</strong> d'attaquer la flotte anglaise partout où il la rencontrerait, partit de Brest le 12 <strong>et</strong> parut le 27 à lahauteur de la Hougue, avec 44 vaisseaux de ligne. Le surlendemain au point <strong>du</strong> jour, il découvrit les escadres combinées del'Angl<strong>et</strong>erre <strong>et</strong> de la Hollande, fortes ensemble de plus de 80 vaisseaux. Il n'y avait pas à reculer, <strong>et</strong> c'était à des forcesdoubles qu'il fallait faire face.Les deux flottes se trouvèrent en présence <strong>et</strong> se[p. 110]rangèrent en bataille entre Barfleur <strong>et</strong> l'île de Wight. — Cependant l'armée expéditionnaire campait sur le rivage, <strong>et</strong> JacquesII, qui avait établi son quartier-général à Quinéville, voyait <strong>du</strong> haut de la tour les préparatifs <strong>du</strong> combat. Il avait desintelligences parmi <strong>ses</strong> anciens suj<strong>et</strong>s ; l'amiral Russel, commandant le corps de bataille, ne lui était pas contraire <strong>et</strong> avaitmême, assure-t-on, entr<strong>et</strong>enu correspondance avec lui ; mais contre son attente la résistance allait devenir sérieuse, <strong>et</strong> pasun vaisseau ennemi ne ferait défection. — Vers dix heures <strong>du</strong> matin la flotte française s'avança en bon ordre jusqu'à uneportée de pistol<strong>et</strong> de la flotte alliée. Le dispositif était à peu près le même pour les deux armées. Le Soleil-Royal que montaitTourville était au corps de bataille, le marquis d'Amfreville commandait l'avant-garde <strong>et</strong> M. de Gabarr<strong>et</strong> l'arrière-garde. Uncoup de canon, parti d'un vaisseau hollandais, donna le signal <strong>du</strong> combat. Aussitôt un feu terrible s'engagea sur tous lespoints. Tourville soutint l'attaque <strong>et</strong> se défendit avec une bravoure <strong>et</strong> une habil<strong>et</strong>é de manoeuvre presque sans exemple :deux fois il parvint à faire plier le vaisseau amiral ennemi <strong>et</strong> les deux vaisseaux qui l'escortaient.L'éloignement <strong>du</strong> centre où se trouva l'arrière-garde faillit comprom<strong>et</strong>tre le sort de l'escadre. Elle n'avait pu former la ligneau signal qui lui en était fait par l'amiral, <strong>et</strong> 25 vaisseaux anglais parvinrent à se placer dans l'intervalle demeuré libre :Tourville[p. 111]fut ainsi pris entre deux feux. Le vent qui, jusque là lui avait été favorable, étant venu à changer, il eut en outre à lutter contreles éléments. Enveloppé de toutes parts, obligé de j<strong>et</strong>er l'ancre pour maîtriser le courant, sa défense aussi savante quevigoureuse devint héroïque, il coula un vaisseau, en fit sauter un autre, chacune de <strong>ses</strong> bordées causait d'effroyables dégâts ;mais le Soleil-Royal était lui-même criblé de coups <strong>et</strong> totalement désemparé, peut-être allait-il succomber sous le nombre, siplusieurs vaisseaux n'étaient venus partager son danger <strong>et</strong> lui prêter secours. Le feu se ranima avec encore plus de fureur,chacun redoublait de courage <strong>et</strong> d'efforts, de bravoure <strong>et</strong> d'audace, <strong>et</strong> c<strong>et</strong>te lutte inouïe, c<strong>et</strong>te scène d'horrible carnage necessa que lorsque la fumée eut tellement obscurci l'air, que les deux partis ne pouvaient plus se reconnaître.L'action avait <strong>du</strong>ré trois heures ; lorsque, vers cinq heures, la brume qui l'avait fait suspendre se fut dissipée, ellerecommença avec non moins d'acharnement. De <strong>nouveau</strong>, Tourville tint en échec l'armée hollando-anglaise, <strong>et</strong> telle fut savaleur héroïque, telle fut son habil<strong>et</strong>é de grand capitaine, qu'il ne s'était pas laissé entamer quand la nuit força de cesser lefeu. On peut véritablement dire que tous les avantages étaient pour lui, <strong>et</strong> qu'il avait remporté les honneurs de la journée. Siplusieurs de <strong>ses</strong> navires étaient fort maltraités, ceux de l'ennemi ne l'étaient pas moins, <strong>et</strong> le nombre des morts était à peuprès[p. 112]le même de chaque côté. Il avait combattu « moins en homme obligé de se défendre contre un ennemi bien supérieur ennombre, dit Rapin de Thoyras, historien protestant, qu'en guerrier fier de sa supériorité <strong>et</strong> sûr de la victoire. »Cependant son triomphe ne l'aveugla point, il sentit l'impossibilité de tenir tête plus long-temps à des forces aussisupérieures, une r<strong>et</strong>raite ne pouvait avoir rien que d'honorable en c<strong>et</strong>te circonstance ; elle fut résolue, <strong>et</strong>, les préparatifs étantfaits, il donna le signal <strong>du</strong> départ à une heure <strong>du</strong> matin. Huit vaisseaux seulement le suivirent, 26 rallièrent ensuite, 3 sedirigèrent sur Brest <strong>et</strong> les 6 autres sur la Hougue. Si <strong>Cherbourg</strong> eût possédé un port de refuge pour la marine militaire, nuldoute que l'escadre entière n'eût été sauvée ; mais il n'avait encore qu'un port de marée, inaccessible aux vaisseaux, <strong>et</strong>Tourville tenta de gagner Saint-Malo. 22 vaisseaux passèrent le raz-Blanchard <strong>et</strong> échappèrent à l'ennemi qui s'était mis à leurpoursuite. Malheureusement le vaisseau amiral <strong>et</strong> 12 autres, dont les avaries ralentissaient la marche, ne purent profiter de lamarée <strong>et</strong> rebroussèrent chemin. Tourville donna l'ordre de con<strong>du</strong>ire à <strong>Cherbourg</strong> le Soleil-Royal, l'Admirable <strong>et</strong> le Triomphantqui étaient les plus endommagés, passa sur un autre navire <strong>et</strong> se rendit à la Hougue avec le surplus, où deux autres lerejoignirent bientôt après. Une partie de la flotte alliée bloqua les trois vaisseaux refugiés à <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> les fit sauter le 1 erjuin.[p. 113]Les douze qui avaient gagné la Hougue, <strong>et</strong> qu'en dé<strong>ses</strong>poir de cause on avait échoués pour en sauver les gréements <strong>et</strong>l'artillerie, eurent le même sort le lendemain. — Les éléments ont été l'unique cause de ce revers, <strong>et</strong> jamais la belle réputation


de Tourville ne s'en est trouvée entachée ; on a même dit que sa défaite fut un triomphe.Dans les grandes mers, le reflux découvre quelquefois assez loin pour qu'on puisse voir les débris des vaisseauxincendiés à la Hougue. Le 7 mars 1833, à mer basse, on put même r<strong>et</strong>irer, d'une de ces vieilles carcas<strong>ses</strong>, deux canons <strong>et</strong>une très-grande quantité de boul<strong>et</strong>s.Peu de temps après le combat de la Hougue, Louis XIV, sentant la nécessité de fortifier c<strong>et</strong>te position, y fit construire —1794 — par l'ingénieur Combe, sur les plans de Vauban, la tour qui existe encore, mais à laquelle on a ajouté ultérieurementd'autres ouvrages de fortification. — La tour de Tatihou est de la même époque ; il y a un lazar<strong>et</strong> dans c<strong>et</strong>te île. — « J'ignorejusqu'à quel point ces ouvrages pourraient garantir la place d'une attaque sérieuse, dit M. de Gerville, que nous avons déjà eutant de fois occasion de citer, ce qu'il y a de plus constant, c'est que depuis les derniers travaux, l'ensemble de la Hougueoffre aux dessinateurs une superbe perspective. La position <strong>du</strong> fort, les tours comparables aux plus pittoresques donjons, lesvariations de la mer, les eff<strong>et</strong>s de lumière, les côtes <strong>du</strong> Bessin dans le lointain,[p. 114]tout en fait un suj<strong>et</strong> digne <strong>du</strong> pinceau de Vern<strong>et</strong>, surtout quand le soleil passe au couchant <strong>et</strong> que la mer est pleine. » —Joseph Vern<strong>et</strong> a fait plusieurs dessins de la Hougue ; un Anglais, M.G. Parez, en a exposé une vue à l'huile au salon royaldes arts à Londres.En exécution d'un proj<strong>et</strong> approuvé le 28 août 1827, une j<strong>et</strong>ée de 300 m. de longueur <strong>et</strong> de 6 m. de largeur vient d'êtreconstruite à Saint-Vaast. La première pierre avait été posée le 26 juin 1828.VALOGNES. C<strong>et</strong>te ville est située à 83 lieues de Paris, à 5 de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> à 3 de la mer. — Chef-lieu de souspréfecture. — Tribunal de première instance. — Collége communal <strong>et</strong> école gratuite de musique <strong>et</strong> de dessin. — Caissed'épargnes. — Six foires. — Pop. 6,655 hab.Elle est bâtie dans un vallon où se réunissent plusieurs ruisseaux <strong>et</strong> près de l'emplacement qu'occupait l'ancienne ville deLogne (v. ALLEAUME). On fait remonter sa fondation à l'époque où fut détruite la cité romaine. Les habitants qui échappèrent àl'incendie se refugièrent au val, alors habité par des potiers, <strong>et</strong> s'y établirent : la principale rue de Valognes porte mêmeencore le nom de rue de Poterie. L'étymologie <strong>du</strong> mot Valognes s'explique par la situation de la ville : de val de Logne, onaura fait par abréviation val-Logne, <strong>et</strong> enfin par euphonie Valognes.Les historiens ne nous ont rien conservé de bien[p. 115]intéressant touchant c<strong>et</strong>te ville. Son rôle a presque toujours été passif. Durant les guerres qui désolèrent la province, depuisle XII e siècle jusqu'au XVII e , elle a pu avoir part à la bonne ou mauvaise fortune des villes circonvoisines, mais non exercerune influence notable. Elle possédait un château-fort, qu'un des continuateurs de l'abbé Velly a dit avoir été bâti par Clovis,mais sans citer de garants, <strong>et</strong> comme pour la plupart des cités <strong>du</strong> moyen-âge, son histoire se lie si intimément à celle de sonchâteau, qu'elles ne font pour ainsi dire qu'une.La première mention qui soit faite de Valognes se trouve à l'occasion de Guillaume I er , <strong>du</strong>c de Normandie. Ce prince yrésidait volontiers, <strong>et</strong> c'est là que son fou vint l'avertir, au milieu de la nuit, que les seigneurs <strong>du</strong> Bessin <strong>et</strong> <strong>du</strong> Cotentin,conjurés contre lui, se proposaient de le surprendre <strong>et</strong> de l'assassiner. Il monta aussitôt à cheval, s'enfuit à travers cent périls<strong>et</strong> gagna Falaise. La bataille <strong>du</strong> Val-des-Dunes, en ruinant les prétentions de Guy, comte de Bourgogne, assura au Bâtard lapos<strong>ses</strong>sion de son <strong>du</strong>ché. — Le château était sans doute peu considérable à c<strong>et</strong>te époque, puisque Guillaume s'y crut si peuen sûr<strong>et</strong>é, qu'au lieu d'y attendre <strong>ses</strong> ennemis, il mit la plus grande précipitation à s'en éloigner. — Il n'en est plus questionjusqu'en 1346.Edouard III, roi d'Angl<strong>et</strong>erre, prit la ville sans coup férir, y coucha, la fit piller <strong>et</strong> en partit le lendemain après l'avoirincendiée. — Neuf ans après[p. 116]un traité conclu à Valognes même céda c<strong>et</strong>te ville avec le Cotentin, à Charles II, roi de Navarre. On a tout lieu de croire quece prince, à qui <strong>Cherbourg</strong> <strong>du</strong>t les hautes <strong>et</strong> puissantes murailles qui le défendaient, la fortifia également. Du moins, lorsqu'en1364, Duguesclin vint en faire le siège, le château était-il en bon état de défense. Il soutint plusieurs assauts, <strong>et</strong> à la honte dela garnison qui avait capitulé, une poignée d'Anglais put résister seule encore quelques jours, <strong>et</strong> ne céda que par surprise. L<strong>et</strong>raité de Guerrande rendit c<strong>et</strong>te forteresse au roi de Navarre qui la perdit de <strong>nouveau</strong> en 1378. Duguesclin, maître de toutesles villes que ce prince possédait en Normandie, n'avait échoué que devant <strong>Cherbourg</strong> ; la garnison anglaise de c<strong>et</strong>te place


escarmouchait fréquemment avec les garnisons des places voisines. Les deux partis, ayant leurs principaux chefs en tête, serencontrèrent le 4 juill<strong>et</strong> 1379, dans la forêt de Valognes <strong>et</strong> en vinrent aux mains. « La bataille, dit Froissart, <strong>du</strong>ra longuement,<strong>et</strong> moult fut fort combattue <strong>et</strong> bien continuée tant d'un côté comme d'autre. » A la fin cependant les Anglais eurent le dessus,<strong>et</strong> Guillaume des Bordes, gouverneur <strong>du</strong> Cotentin, fut fait prisonnier.— 1415 — L'aliénation mentale dans laquelle était tombé le roi Charles VI, l'inimitié qui avait éclaté entre les grands <strong>du</strong>royaume <strong>et</strong> les troubles que c<strong>et</strong>te division suscita, encouragèrent les prétentions de Henri V, roi d'Angl<strong>et</strong>erre. Il mit sur pie<strong>du</strong>ne armée[p. 117]de plus de 50,000 hommes, passa en France <strong>et</strong> s'empara successivement de toute la Normandie ; <strong>Cherbourg</strong> fut la dernièreville qu'il prit, encore n'y parvint-il qu'après un siège de trois mois, qui lui coûta la perte d'un tiers de <strong>ses</strong> troupes, <strong>et</strong> ensubornant à prix d'or le gouverneur. A partir de c<strong>et</strong>te époque (1418) Valognes, comme le reste de la province, resta plus d<strong>et</strong>rente ans sous la domination anglaise.En 1449, les hostilités recommencèrent, <strong>et</strong> Charles VII enleva à l'Angl<strong>et</strong>erre plusieurs des places dont elle avait lapos<strong>ses</strong>sion : Valognes était <strong>du</strong> nombre ; mais l'année suivante, Thomas Kiriel, général anglais, étant venu l'assiéger, ill'amena à capituler après un blocus de trois semaines, <strong>du</strong>rant lequel les habitants se défendirent avec une vigueur qui honoreleur courage. Les succès des armes anglai<strong>ses</strong> touchaient à leur terme. L'échec de Formigny porta un coup terrible à nos fiersvainqueurs ; la plupart des villes de Basse-Normandie leur furent aussitôt repri<strong>ses</strong>, <strong>et</strong> la reddition de <strong>Cherbourg</strong>, le 12 août,les chassa enfin <strong>du</strong> territoire français.Le pays put goûter quelque repos, <strong>et</strong> plus d'un siècle s'écoule avant qu'il soit de <strong>nouveau</strong> fait mention de Valognes. En1562, les protestants, excités <strong>et</strong> soutenus par Elisab<strong>et</strong>h, s'insurgèrent <strong>et</strong> se rendirent maîtres d'un grand nombre de villes. Ilsassiégèrent Valognes <strong>et</strong> se servirent <strong>du</strong> canon de la tour de l'île Tatihou, pour battre le château : les uns disent qu'ilsl'emportèrent, d'autres, que Matignon,[p. 118]arrivé à temps, les força de se r<strong>et</strong>irer. A la paix conclue le 19 mars 1563, la France rentra dans <strong>ses</strong> pos<strong>ses</strong>sions. —Montgommery, à la tête des protestants, arriva devant Valognes le 6 février 1573 ; il le bloqua <strong>et</strong> l'attaqua vigoureusementsans pouvoir le ré<strong>du</strong>ire. Après 24 jours d'efforts inutiles <strong>et</strong> des pertes considérables, tant en hommes qu'en matériel, il leva lesiège [144]. Plus heureux l'année suivante, il prit la ville <strong>et</strong> le château, mais ne les conserva que peu de temps.En 1588, c<strong>et</strong>te place eut part à l'insurrection de presque toutes les villes de Normandie <strong>et</strong> entra dans la Ligue. — En 1593,Matignon reçut <strong>du</strong> roi l'ordre d'en démolir le château ; c<strong>et</strong> ordre n'ayant point été exécuté, elle soutint encore un siège en1649. Celui-ci eut lieu à l'occasion de la Fronde. Le comte de Bellefonds commandait pour le roi dans la Basse-Normandie, <strong>et</strong>Matignon, — p<strong>et</strong>it-fils de celui dont il vient d'être parlé, — y tenait pour les Frondeurs. Valognes devint un centre desopérations <strong>du</strong> parti Mazarin ; Matignon, conformément aux ordres que lui avait expédiés le <strong>du</strong>c de Longueville, chef desmécontents, réunit de six à sept mille hommes de troupes, se présenta, le 20 mars, sous les murs de la ville, <strong>et</strong> somma legouverneur de la lui livrer. Bellefonds refusa, quoiqu'il n'eût avec lui que deux cents soldats <strong>et</strong> une milice bourgeoise peunombreuse. Elle fut investie sur le champ,[p. 119]<strong>et</strong> les fortifications furent battues en brèche par cinq fortes pièces de canon amenées de <strong>Cherbourg</strong> [145]. Elle était malapprovisionnée ; les munitions s'épuisèrent, <strong>et</strong> force fut de capituler, quand elle eût pu tenir encore un certain temps. Lapopulation eut sans doute beaucoup à souffrir de ces événements, car un témoin oculaire, qui en écrivit alors la relation sur leregistre des baptêmes de l'église Saint-Malo, termine son récit par ces mots : Dieu préserve Valognes de pareils malheursque ceux qu'il a soufferts pendant ce siége. — Huit jours après on commença la démolition <strong>du</strong> château ; mais elle ne futconsommée que sous Louis XIV, en 1689, année où tomba pareillement celui de <strong>Cherbourg</strong>. Quelques pans de murailles,quelques logements restés debout disparurent lorsqu'on aplanit le terrain en 1788. C<strong>et</strong>te forteresse se trouvait dansl'emplacement qu'occupe aujourd'hui la place <strong>du</strong> Château. Il n'en reste aucun vestige apparent, <strong>et</strong> les souterrains, en partiecomblés, sont sans issue.Depuis 1749, Valognes ne paraît plus dans l'histoire ; avant de parler de son état actuel, nous allons faire connaître lesétablissements religieux auxquels il devait anciennement beaucoup de son importance.Egli<strong>ses</strong>. — Il y a deux égli<strong>ses</strong> paroissiales : — la première, dédiée à Saint-Malo, a été bâtie il y a de trois[p. 120]


à quatre cents ans. Elle est surmontée d'un dôme <strong>et</strong> d'une tour carrée terminée en pointe. A la révolution elle subit le sortcommun ; aujourd'hui elle est une des mieux tenues <strong>du</strong> diocèse. On remarque principalement les boiseries sculptées <strong>du</strong>choeur. — La seconde église paroissiale est celle d'Alleaume. L'époque de sa fondation n'est pas connue ; au rapport de latradition elle aurait été élevée sur les fondements d'un temple païen, dédié à Jupiter custos ou gardien. — Au siècle dernier,le clergé des deux parois<strong>ses</strong> se montait à plus de cent ecclésiastiques. — Autrefois le cim<strong>et</strong>ière se trouvait de chaque côté del'église Saint-Malo. On abandonna c<strong>et</strong> emplacement pour le cim<strong>et</strong>ière moins insalubre de l'Hôtel-Dieu ; aujourd'hui on enterredans un enclos situé près de l'hospice.Couvents. — Il y avait à Valognes, avant la révolution, deux communautés d'hommes, l'une de capucins <strong>et</strong> l'autre decordeliers, <strong>et</strong> une abbaye de femmes bénédictines. — Nous avons déjà eu occasion de parler des cordeliers qui, au XV esiècle, s'étaient établis dans l'une des îles Saint-Marcouf, qu'ils quittèrent ensuite pour Valognes, où Louis de Bourbon, comtede Roussillon <strong>et</strong> de Ligny, leur avait fait des donations. Le cloître fut rebâti au commencement <strong>du</strong> siècle dernier <strong>et</strong> devint laplus belle des maisons que l'ordre possédât en Normandie. Les religieux en furent chassés en 1792, <strong>et</strong> l'on y établit unemanufacture de faïence qui n'eut qu'une courte activité. Il passa en diver<strong>ses</strong> mains ; le dernier propriétaire[p. 121]le proposa à la ville pour en faire une caserne, usage auquel il eût été très-propre ; mais c<strong>et</strong>te offre n'ayant pas été acceptée,la démolition en fut aussitôt entreprise. La porte d'entrée est tout ce qui reste aujourd'hui. — Le couvent des Capucins, fondévers 1630, était propre <strong>et</strong> bien bâti. Il fut ven<strong>du</strong> comme bien national <strong>et</strong> occupé par une manufacture de draps. Depuis 1807, ilest habité par des religieu<strong>ses</strong> bénédictines. — Nous avons parlé page 85, première partie, de la fondation <strong>du</strong> couvent deBénédictines, sous le nom de Notre-Dame-de-Protection. Les édifices de c<strong>et</strong>te maison étaient considérables. L'église, dont lesanctuaire est élevé de plusieurs degrés au-dessus de la nef, est surtout remarquable. Comme les cordeliers <strong>et</strong> les capucins,ces religieu<strong>ses</strong> évacuèrent leur monastère à la révolution. Il servit d'abord d'hôpital militaire <strong>et</strong> ensuite d'hospice civil,destination qu'il a encore.Hôtel-Dieu. — C<strong>et</strong> établissement fut fondé en 1498, par Jean Lenepveu, chapelain de Jeanne de France, épouse de Louisde Bourbon. Plus tard il appartint aux religieux hospitaliers <strong>du</strong> S.t-Esprit. L'hôpital général, dont il va être question, en avait lajouissance, lorsque la république vint <strong>et</strong> le transforma en boulangerie militaire. C'est là que la troupe, en garnison à Valognes,a ensuite été casernée.Hôpital-général. — Il eut pour fondateur, vers 1660, un vieux domestique qui consacra à c<strong>et</strong>te bonne oeuvre tout son avoir.C<strong>et</strong> exemple fut suivi par plusieurs personnes, <strong>et</strong> l'établissement acquit de l'importance.[p. 122]Dans ces derniers temps le couvent de bénédictines fut préféré, comme étant sans doute plus convenable ; l'ancien hôpitalcessa d'être utile <strong>et</strong> fut démoli. Le <strong>nouveau</strong> palais de justice, la prison <strong>et</strong> l'hôtel-de-ville, se trouvent dans son emplacement.Le Séminaire était autrefois considéré comme le plus bel édifice que la ville possédât. Son fondateur, l'abbé François de laLuthumière, l'avait fait bâtir en 1654 pour l'instruction des pauvres prêtres. L'évêque de Coutances, Matignon, le donna vers1720 à des missionnaires eudistes qui l'ont conservé jusqu'à la fin <strong>du</strong> siècle dernier. Ces prêtres ne remplissaient que lachaire de philosophie, toutes les autres étaient occupées par des professeurs externes. Maintenant le séminaire est convertien collége, <strong>et</strong> c'est un des mieux tenus <strong>du</strong> département. M. Tollemer, principal, est auteur de plusieurs ouvrages très-estimés[146].Quoique centrale, la position de Valognes est peu favorable, <strong>et</strong> ne perm<strong>et</strong> pas de supposer que c<strong>et</strong>te ville puisse jamaisacquérir une grande importance. Elle devint cependant très-florissante au XVIII e siècle. — Il y avait alors de dix à douze millehabitants, sans compter la garnison qui, en temps de paix, était de deux à trois bataillons, <strong>et</strong> en temps de[p. 123]guerre de trois à quatre mille hommes, infanterie <strong>et</strong> cavalerie. — Elle avait cessé d'être un gouvernement de place, mais nond'avoir un gouverneur. — Ce qui la rendait surtout remarquable, c'étaient les nombreu<strong>ses</strong> juridictions dont elle était le siège : ily avait bailliage, élections comprenant 176 parois<strong>ses</strong>, vicomté, sénéchaussée, mairie, juges des traites, maîtrise des eaux <strong>et</strong>forêts, officialité, <strong>et</strong>c. — Son commerce, très-éten<strong>du</strong>, consistait en cuirs, en draps dont elle avait une manufacture, <strong>et</strong> en gantsqui s'y fabriquaient également. — Il n'y avait point de ville dans toute la généralité de Caen, où tant de gentilshommes fissentleur demeure. On y comptait plus de cent familles de noblesse distinguée. C<strong>et</strong>te noblesse y répandait l'abondance <strong>et</strong> enfaisait la magnificence par le nombre des équipages <strong>et</strong> les fêtes qui s'y donnaient tour à tour [147].Mais depuis lors elle a bien per<strong>du</strong> de sa splendeur : sa population a diminué de près de la moitié ; elle a cessé d'avoirgarnison en 1831 ; elle n'a plus qu'un tribunal de première instance <strong>et</strong> une justice de paix ; Napoléon a distrait de sonarrondissement toutes les communes qui composent celui de <strong>Cherbourg</strong> ; <strong>ses</strong> fabriques de draps <strong>et</strong> de gants sont depuis


long-temps oubliées ; le commerce s'y borne à la localité, <strong>et</strong> l'in<strong>du</strong>strie y est pour ainsi dire nulle. La révolution lui[p. 124]a porté un coup dont elle ne se relèvera pas de sitôt. Elle est tombée avec les riches <strong>et</strong> puissants seigneurs qui l'avaientren<strong>du</strong>e prospère ; plus de fêtes pour eux, plus de fêtes pour elle. Elle est toujours la résidence préférée de la noblesse, maisde la noblesse provinciale qui en est encore à pleurer <strong>ses</strong> priviléges, <strong>et</strong> qui mène une vie chagrine <strong>et</strong> r<strong>et</strong>irée. L'herbe y croîtdans plusieurs rues, le silence <strong>et</strong> l'inactivité règnent partout.Cependant elle vient de tenter quelques efforts pour sortir de c<strong>et</strong> état d'apathie qui eût pu la con<strong>du</strong>ire à une décadencecomplète. Une ordonnance royale, <strong>du</strong> 6 juill<strong>et</strong> 1836, y a autorisé l'établissement d'une caisse d'épargnes ; depuis trois annéeselle possède une société philharmonique dont les réunions sont de plus en plus brillantes, <strong>et</strong> voilà deux ans bientôt qu'il yparaît deux journaux hebdomadaires. Nul doute que ces feuilles n'exercent une puissante influence sur l'esprit public ; nuldoute que, secondées par le bon vouloir d'hommes courageux <strong>et</strong> progressifs, elles ne parviennent, à la longue, à rappelerdans la localité le besoin d'une vie active <strong>et</strong> in<strong>du</strong>strielle.La ville est entièrement située sur un banc très puissant de pierre calcaire d'excellente qualité ; c'est avec c<strong>et</strong>te pierre quesont bâties les maisons : en géral elles sont d'un coup-d'oeil agréable. Le seul édifice qui fixe l'attention est le palais dejustice. Commencé en 1834, il est terminé depuis plusieurs années.[p. 125]Il a coûté 107,474 fr. 81 c. — Quoique le goût de la comédie soit encore peu répan<strong>du</strong> à Valognes, une salle de spectacleoccupe l'étage de la halle. C'est tout ce qu'il faut pour le moment, mais ce n'est que ce qu'il faut. — En outre <strong>du</strong> couvent debénédictines dont nous avons parlé, il y a une communauté de Carmélites anglai<strong>ses</strong> qui vinrent s'y établir en 1828, <strong>et</strong> uneautre d'Augustines établie depuis 1816. — Cinq soeurs de la charité ont soin des malades <strong>et</strong> distribuent aux pauvres lessecours que la municipalité leur accorde ; de plus elles dirigent une manufacture de dentelles, qui entr<strong>et</strong>ient un assez grandnombre d'ouvrières. — La bibliothèque publique occupe une des ailes de l'ancien séminaire. A la révolution, la bibliothèquedes Cordeliers en avait formé le noyau ; aujourd'hui elle se compose de 88 manuscrits <strong>et</strong> de 16,000 volumes imprimés. Laplupart de ces ouvrages sont d'une date ancienne ; quelques-uns sont rares. Près de 4,000 volumes qui se trouvaient endouble vont être échangés avec le gouvernement contre des ouvrages plus modernes. On voit dans la même salle unecollection de fossiles recueillis dans l'arrondissement, un certain nombre de médailles antiques, un autel en pierre, découverten faisant une fouille dans la commune <strong>du</strong> Han, une statu<strong>et</strong>te représentant Tourville, <strong>et</strong>c. — Parmi les bibliothèquesparticulières, nous citerons celles de MM. de Gerville <strong>et</strong> Delalande ; ces deux antiquaires ont également chacun un très beaucabin<strong>et</strong> de numismatique.[p. 126]Valognes a 5 places publiques, 43 rues <strong>et</strong> 18 passages, appelés vulgairement chas<strong>ses</strong>.Parmi les hommes distingués qui y sont nés, on compte : — Landry, poète français <strong>du</strong> XII e siècle ; — Jean de Clamorgan,auteur, dans le XVI e , d'ouvrages sur la chasse <strong>et</strong> la navigation ; — Bazan, d'abord brigadier <strong>et</strong> capitaine de gens d'armes,puis abbé de Flamanville <strong>et</strong> enfin évêque de Perpignan ; — Jacques Le Fêvre <strong>du</strong> Quesnay, évêque de Coutances, né en1707 <strong>et</strong> mort le 9 septembre 1764 ; — Louis Froland, mort le 11 février 1736, jurisconsulte dont les publications forment 7volumes in-4° ; — Guillaume Mauquest Delamotte, né le 27 juill<strong>et</strong> 1655, <strong>et</strong> mort le 27 juill<strong>et</strong> 1737, chirurgien juré accoucheur,auteur d'un traité de chirurgie <strong>et</strong> d'un traité d'accouchements ; — Le-tourneur, né le 9 juin 1737, <strong>et</strong> mort le 24 janvier 1788,tra<strong>du</strong>cteur des Nuits d'Young, des Méditations d'Hervey, de Shakspeare, d'Ossian, de Clarisse Harlowe, <strong>et</strong>c. ; — Félix Vicqd'Azir, né en 1748 <strong>et</strong> mort le 20 juin 1794, membre de l'académie des sciences, successeur de Buffon à l'académie française,premier médecin de la reine en 1789, auteur d'un grand nombre d'éloges, de mémoires sur l'anatomie des oiseaux comparéeà celle de l'homme, sur la médecine <strong>et</strong> l'art vétérinaire, <strong>et</strong>c., en tout 6 vol. in-8° ; — Bon-Joseph Dac ier, né le 1 er avril 1742 <strong>et</strong>mort le 4 février 1833, secrétaire perpétuel de l'académie des inscriptions <strong>et</strong> belles-l<strong>et</strong>tres, membre de l'académie française,baron de l'empire, tra<strong>du</strong>cteur des histoires d'Ellien <strong>et</strong> de la Cyropédie de Xénophon, auteur d'éloges d'académiciens,de mémoires, de dissertations philologiques, <strong>et</strong>c.[p. 127]Les hommes célèbres nés dans l'arrondissement sont : L'historien Masseville, à Joganville ; le fabuliste <strong>et</strong> tra<strong>du</strong>cteur LeMonnier, à St-Sauveur-le-Vicomte ; le littérateur Tiphaigne de la Roche, à Montebourg ; le théologien Jean de Launay, au Valde-Scie; Joseph Dufort, à Ozeville ; l'abbé Frigot, <strong>et</strong>c., <strong>et</strong>c.[p. 128]


BIBLIOGRAPHIE.La vie <strong>et</strong> les vertus de messire Antoine Paté, curé de <strong>Cherbourg</strong> ; suivie de la vie <strong>du</strong> Bienheureux Thomas Hélie de Biville ;de Barthélemy Piquerey, <strong>et</strong>c., par M. Trigan, curé de Digosville. Coutances, Fauvel, 1747.Histoire de la ville de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de <strong>ses</strong> antiquités, par M. me R<strong>et</strong>au-Dufresne, Paris, 1760, in-12. (C<strong>et</strong>te histoire n'estqu'une copie défigurée de celle de Voisin La Hougue).Histoire sommaire <strong>et</strong> chronologique de <strong>Cherbourg</strong>, avec le journal de tout ce qui s'est passé au mois de juin 1786 pendantle séjour <strong>du</strong> roi en c<strong>et</strong>te ville. Paris, 1786, in-8.° de 50 pages.Notice de la marine à <strong>Cherbourg</strong>, par M. Gabriel Noël, ex-inspecteur des ponts <strong>et</strong> chaussées. <strong>Cherbourg</strong>, Clamorgam, anV, in-8.° de 100 pages.Notions sur la rade de <strong>Cherbourg</strong>, sur le port Bonaparte <strong>et</strong> sur leurs accessoires ; par un officier français (M. Savary, deS.t-Lo). <strong>Cherbourg</strong>, Boulanger, an XII, in-8.°Description de l'ouverture de l'avant-port de <strong>Cherbourg</strong>, par P. Aimé Lair. Caen, 1813, in-8.° de 20 pages.Mémoire sur la digue de <strong>Cherbourg</strong>, comparée au breakwater ou j<strong>et</strong>ée de Plymouth, par J.-M.-F. Cachin, inspecteurgénéral des ponts <strong>et</strong> chaussées. Paris, 1820, grand in-4.°, avec planches.[p. 129]Détails historiques sur l'ancien port de <strong>Cherbourg</strong>' par M. Asselin. <strong>Cherbourg</strong>, 1826, in-8.° de 68 pages.Recherches sur l'état des ports de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de Barfleur, dans le moyen-âge, par M. de Gerville.(Ce mémoire a été inséré dans les Archives normandes, 2. e année, 1826 ; il en a été tiré quelques exemplaires à part).P<strong>et</strong>it voyage de trois rats de cave à <strong>Cherbourg</strong>. Paris, 1829, in-18, avec figures.Notice géographique sur les îles Saint-Marcouf, par L.-J.-B. Mayeux, commandant desdites îles. Valognes, 1810, in-8.° de45 pages.Annuaire <strong>du</strong> département de la Manche pour l'an X de la république française ; id. pour l'an XI ; Almanach pour l'an XII, in-12. <strong>Cherbourg</strong>, Boulanger.Vie de S.t-Clair, prêtre <strong>et</strong> martyr, par l'abbé Demons, 1829, Boulanger. brochure in-12.Histoire <strong>du</strong> Cotentin, par Toustaint de Billy, curé de Mesnil-Opac. S.t-Lô, Elie, édition préparée par MM. Ragonde <strong>et</strong> JulienTravers (sous presse).Histoire générale de Normandie, par Gabriel Dumoulin, curé de Manneval, in-folio.Mémoires de la Société royale académique de <strong>Cherbourg</strong>, 1833, Boulanger, 2. e <strong>et</strong> 3. e volumes 1835 <strong>et</strong> 1838, Beaufort <strong>et</strong>Lecauf, in-8.°Notice sur la découverte des restes d'une habitation romaine dans la Mielle de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> sur d'autres antiquitéstrouvées de nos jours dans les arrondissements de Valognes <strong>et</strong> de <strong>Cherbourg</strong>, par[p. 130]M. Aug. Asselin, membre de la légion-d'honneur, in-8.° <strong>Cherbourg</strong>. Boulanger.Supplément à la notice précédente (réimprimées dans le troisième volume des mémoires de l'académie).L'Obélisque de Louqsor à <strong>Cherbourg</strong>, notice rédigée d'après les renseignements de M. Jauffr<strong>et</strong>, lieutenant de frégate,officier <strong>du</strong> Louqsor, par A. de Berruyer, rédacteur en chef <strong>du</strong> journal de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> <strong>du</strong> département de la Manche ; in-8°.


<strong>Cherbourg</strong>, Boulanger.Guide pittoresque <strong>du</strong> Voyageur en France, <strong>et</strong>c., chez Firmin Didot, livraisons 98 <strong>et</strong> 108.France pittoresque, tome II, 27.Histoire de la ville de <strong>Cherbourg</strong>, de Voisin La Hougue, continuée depuis 1728 jusqu'à 1835, par Vérusmor ; in-8°,Boulanger.Histoire de la paroisse de Néhou, depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, par M. Lebredonchel, curé deVaranguebec. <strong>Cherbourg</strong>, Nobl<strong>et</strong>, in-18.Biographie de M. Avoyne Chantereyne, par M. Asselin, in-8°, réimprimée dans les Mémoires de l'Académ ie de 1835.Mémoire sur la grande cheminée de Quinéville, par le même, in-8°, même réimpression.Carte cadastrale de toutes les parties <strong>du</strong> département de la Manche, par M. Bitouzé-Daux-Mesnil, géomètre en chef <strong>du</strong>cadastre <strong>du</strong> département.[p. 131]Carte géologique <strong>du</strong> département de la Manche, par M. de Caumont. Caen, Hardel.Annuaire des cinq départements de l'ancienne Normandie 1833-1839, publié par l'association normande. Caen, A. Le Roy.Mémoires de la société des antiquaires de Normandie.Mémoires de la société linnéenne de Normandie.Archives de la Normandie.Raoul de Rayneval ou la Normandie au XIV. e siècle, (1380) par M. Emile Le Chanteur de Pontaumont. <strong>Cherbourg</strong>,Boulanger, 1832.Histoire civile <strong>et</strong> religieuse de <strong>Cherbourg</strong>, suivie d'un grand nombre de mémoires relatifs aux antiquités de c<strong>et</strong>te ville <strong>et</strong> des<strong>environs</strong>, par l'abbé Demons, manuscrite, à la bibliothèque.Histoire de <strong>Cherbourg</strong>, par M. Avoyne de Chantereyne, membre des académies de Caen <strong>et</strong> de <strong>Cherbourg</strong>, (arrêtée en1604) suivie d'un mémoire sur la descente des Anglais dans l'anse d'Urville, avec un volume de notices sur les <strong>Cherbourg</strong>eoisqui se sont illustrés. Manuscrite.Le Guide <strong>du</strong> Voyageur à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong>c., ou description complète <strong>et</strong> historique de c<strong>et</strong>te ville, de son port militaire, de sonport de commerce <strong>et</strong> de tous <strong>ses</strong> établissements, par A. de Berruyer, rédacteur <strong>du</strong> Journal de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong>c. — <strong>Cherbourg</strong>,Boulanger, 1833, in-12.Annuaire de <strong>Cherbourg</strong> pour 1835, par le même,[p. 132]chez Savary ; id. pour 1837, chez Beaufort <strong>et</strong> Lecauf ; id. 1838 ; id. 1839, chez Lecoufl<strong>et</strong>, <strong>Cherbourg</strong>.Notice sur le port militaire de <strong>Cherbourg</strong>, par M. A. Gondin<strong>et</strong> (insérée dans le compte-ren<strong>du</strong> trimestriel de l'associationpolytechnique, juill<strong>et</strong> 1832).CHERBOURG, par M. Loëve-Veimars (Revue des Deux-Mondes, 15 août 1832).Digue de <strong>Cherbourg</strong> (Encyclopédie nouvelle, tome IV.Annuaire <strong>du</strong> département de la Manche de 1829 à 1838, in-12, pour 1839 in-8°, par Julien Travers. — S.t-Lo, Elie.


Presque tous ces volumes contiennent quelques articles sur <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> l'arrondissement.Mémoire d'après lequel le gouvernement a formé l'entreprise des travaux de <strong>Cherbourg</strong> en 1783, suivi d'un Mémoire relatifà la vérification des sondes de la rade, ordonnée au mois de juill<strong>et</strong> 1789. (Par M. de la Br<strong>et</strong>onnière). — <strong>Cherbourg</strong>,Clamorgam, 1796, in-4°.Précis historique des travaux de <strong>Cherbourg</strong>. — Moniteur des 6 <strong>et</strong> 7 thermidor an IX.Chemin de fer <strong>du</strong> port de <strong>Cherbourg</strong>, construit pour le transport des pierres de la montagne <strong>du</strong> Roule depuis les carrièresjusqu'au bassin de commerce, par M. Virla, ingénieur des ponts <strong>et</strong> chaussées, avec planches (Annales des Ponts <strong>et</strong>Chaussées V e année ; mars <strong>et</strong> avril 1835).Promenade maritime <strong>du</strong> Havre à <strong>Cherbourg</strong>, par Morlent, avec planches. — Le Havre, 1838.Troisième partie.[p. 133]NOUVEAUGUIDE DU VOYAGEURA CHERBOURG.ADRESSES.NOTA. Nous ne m<strong>et</strong>tons ici que les adres<strong>ses</strong> les plus importantes, renvoyant pour les autres à l'Annuaire de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de Valognes, qui sepublie chaque année chez Lecoufl<strong>et</strong>, libraire, rue des Corderies, à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> rue Siqu<strong>et</strong>, à Valognes.BUREAUX DE MESSAGERIES : DE CHERBOURG A CAEN, Messageries générales Lafitte <strong>et</strong> Caillard, Quai-<strong>du</strong>-Port. — Messageries royales, ruede la Marine. Ces voitures font alternativement le service. — Arrivée de la 1 re , à 5 heures <strong>du</strong> matin ; départ à 3 h. — Arrivée de la 2 e à 6 h. <strong>du</strong> soir ;départ à 5 h. <strong>du</strong> matin. — DE CHERBOURG A VALOGNES ET RETOUR. Carus, chez M. Bertaux, rue de la Fontaine, 2 voitures ; la 1 re part à 4 h. <strong>du</strong>soir, <strong>et</strong> revient à 10 h. <strong>du</strong> matin ; la 2 e part à 6 h. <strong>du</strong> matin <strong>et</strong> revient à 7 h. <strong>du</strong> soir. — Anger, dit Germain, Ancien-Quai ; départ à 6 h. <strong>du</strong> matin ; arrivéeà 7 h. <strong>du</strong> soir. — Alexandre, hôtel <strong>du</strong> Commerce, rue de la Fontaine ; départ à 4 h. <strong>du</strong> soir ; arrivée à 10 h. <strong>du</strong> matin. — DE CHERBOURG AUXPIEUX : Prevel, chez M. Burnouf, rue de la Fontaine ; départ à 4 h. <strong>du</strong> soir ; arrivée à 9 h. <strong>du</strong> matin. — DE CHERBOURG A BRICQUEBEC : Anqu<strong>et</strong>il<strong>et</strong> Digu<strong>et</strong>, chez M. Bourd<strong>et</strong>,[p. 134]place Vitrel ; arrivée à 9 h. <strong>du</strong> matin, les mardi, jeudi <strong>et</strong> samedi ; départ à 4 <strong>du</strong> soir. — DE CHERBOURG A ST-VAAST : Clairaux, chez le même ; départ à4 h. <strong>du</strong> soir ; arrivée à 9 h. <strong>du</strong> matin. — DE CHERBOURG A BARFLEUR : Ragaine <strong>et</strong> Gaillard, chez M me Gérard, rue <strong>du</strong> Château, mêmes heures. — Parmentier <strong>et</strong>C ie chez M. Pouhier, même rue, mêmes heures ; lundi, jeudi, samedi. — DE CHERBOURG A ST-PIERRE : M me Gérard, mêmes heures. BATEAUX A VAPEUR. DECHERBOURG AU HAVRE : L'Océan, bureau, Quai-<strong>du</strong>-Port ; arrivées, le dimanche ; départs, le mercredi. — ID. le Colibri, même bureau ; arrivées le mercredi ;départs le dimanche. — DE CHERBOURG A WEYMOUTH : City of Glascow, fait plusieurs voyages pendant l'été, même bureau, ou M. Le Magnen, Quai<strong>du</strong>-Bassin.POSTE AUX LETTRES : Quai <strong>du</strong> Port. — POSTE AUX CHEVAUX : Ancien-Quai.HOTELS ET RESTAURANTS : L'Hôtel <strong>du</strong> Commerce, rue de la Fontaine, 35, est le plus considérable <strong>et</strong> le plus fréquenté, surtout par les commis voyageurs. —Table d'hôte à 10 heures <strong>du</strong> matin <strong>et</strong> à 5 heures <strong>du</strong> soir. — L'hôtel d'Angl<strong>et</strong>erre, Quai-<strong>du</strong>-Port, 4, fondé depuis peu, où sont descen<strong>du</strong>s MM. le prince de Joinville <strong>et</strong>le maréchal de Grouchy. — L'hôtel de Londres, transféré maintenant rue Notre-Dame, où descendent surtout les Anglais. — L'hôtel de la Paix, rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin,est fréquenté par les commis voyageurs. — Table d'hôte à 5 heures. — Le Houelleur, Quai-<strong>du</strong>-Bassin, — Miquel, rue des Corderies. — L'hôtel de Normandie, ruedes Fossés.CAFÉS : Café des Arts, Quai-<strong>du</strong>-Port. — Grand Café, place Tour-des-Sarrasins. — Café des Navigateurs, Quai-<strong>du</strong>-Bassin. — Café de Paris, Café de l'Amitié <strong>et</strong>Café des Amis, Quai-<strong>du</strong>-Port. — Café Français, rue <strong>du</strong> Chantier.CABINETS DE LECTURE : MM. Lecoufl<strong>et</strong>, rue des Corderies, 19. — Motin, place des Sarrasins. — On peut se procurer des Livres en lecture aux mêmesendroits, <strong>et</strong> chez M. Le François, rue <strong>du</strong> Château. — M. Poulain, rue de la Vase, <strong>et</strong> M me V e Drou<strong>et</strong>, rue de l'Hôpital.BAINS : BAINS DE MER, rue de la Cayenne. — BAINS D'EAU DOUCE : Bancelin, au Gagne-P<strong>et</strong>it, rue de la Paix. — Renault, rue de l'Ongl<strong>et</strong>, 34.[p. 135] ADMINISTRATION. SOUS-PRÉFET, M. Bonnissent, bureau, rue Digard. — MAIRE, M. Noël-Agnès, rue des Corderies. — ADJOINTS : MM. Pinel,médecin, rue Corne-de-Cerf ; Morin, notaire, rue des Corderies.


ENREGISTREMENT, M. Peschau, receveur, rue des Corderies. — DOMAINES ET HYPOTHÈQUES, conservateur, M. Levavasseur, même rue. —CONTRIBUTIONS DIRECTES. Contrôleur, M. Lavigne, rue de la Paix. Percepteur, M. Patin, rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin. — RECETTE PARTICULIÈRE DES FINANCES,M. Louch<strong>et</strong>, qui est aussi payeur de la marine <strong>et</strong> de la guerre, rue <strong>du</strong> Chantier, — CONTRIBUTIONS INDIRECTES, M. Pajot de Marcheval, directeur, rue del'Abbaye. — DOUANES, M. Cadran, directeur, rue <strong>du</strong> Chantier ; M. Eudel, inspecteur-divisionnaire, rue des Bastions ; M. Mahieu, receveur principal, Quai-<strong>du</strong>-Bassin. C<strong>et</strong>te direction embrasse tout le littoral <strong>du</strong> département de la Manche, <strong>et</strong> une partie de celui <strong>du</strong> Calvados.POLICE. Commissaires : MM. Souque, rue de la Vase ; Soudeix, rue Bondor ; bureaux rue de la Paix. — OCTROI, Quai-Ouest <strong>du</strong> bassin. M. de la Martinière,préposé en chef place <strong>du</strong> Rempart.TRIBUNAL CIVIL. Président : M. Vrac, Quai-<strong>du</strong>-Port. — Juges, M. Couppey, rue Bondor ; M. Le Seigneurial, rue Grande-Vallée. — Procureur <strong>du</strong> Roi, M.Fossey, rue des Corderies. — Substitut, M. Géraldi, même rue. — Greffier, M. Ludé, place d'Armes. — JUSTICE DE PAIX, M. Dumont-Moulin, rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin. — TRIBUNAL DE COMMERCE, M. Antenor Liais, président, rue de l'Abbaye. — CHAMBRE DE COMMERCE : MM. Noël-Agnès, président honoraire ;Fontenilliat, président.AGENTS CONSULAIRES : MM. Le Jolis, vice-consul d'Angl<strong>et</strong>erre, rue de la Duché. — Ch. Noël, consul de Hanovre, remplacé en son absence par M. Le Jolis,précité. — Kirkham, vice-consul de Suède <strong>et</strong> Norwége, Quai-<strong>du</strong>-Port. — Mauger, vice-consul de Prusse, place <strong>du</strong> Rempart. — Liais (Eug.), vice-consul de Hollande,de Danemark <strong>et</strong> des Etas-Unis, rue <strong>du</strong> Val-de-Saire. — Liais (Victor), vice-consul d'Espagne, id. — Cuman-Soligniac, vice-consul <strong>du</strong> Portugal, rue Christine. —Bonfils, vice-consul <strong>du</strong> Brésil, rue <strong>du</strong> Val-de-Saire. — De-launay, vice-consul d'Autriche, Quai-<strong>du</strong>-Port.COURTIERS MARITIMES : MM. Rouland, rue de la Cayenne ;[p. 132]Jouanne, rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin ; Morvant, id. ; Monnoye, Quai-<strong>du</strong>-Port.Conservateur de la Bibliothèque, M. Ragonde, rue de la Paix. — Architecte de la ville, M. Le Sauvage, peintre, rue de la Poudrière. — Receveur municipal, M.Le Barbanchon, rue Corne-de-Cerf. — Commissaire priseur, M. Bonnissent (Victor), rue des Corderies.NOTAIRES : MM. Morin, rue des Corderies ; Lebarbenchou, rue <strong>du</strong> Château ; Lepoittevin, rue Corne-de-Cerf ; Vallemont, rue des Corderies. — AVOCATS :MM. Rossignol, rue des Corderies ; Hervieu, même rue ; A.-E. Delachapelle, rue Christine ; Laplanque........ ; Asselin (Paul), rue <strong>du</strong> Château ; Queslin, rue de laFontaine ; Bonfils, rue des Corderies ; Foulon, place de la Trinité ; Ciszeville, rue des Corderies ; Golle, rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin ; Vrac, place d'armes ; Lemarquand, rue<strong>du</strong> Port ; Gustave Duvivier, rue Tour-Carrée. — AVOUÉS : MM. Duvivier, rue Tour-Carrée ; Chevrel, rue Grande-Vallée ; L'Eguillon, même rue ; Belin, rue de laFontaine ; Mahieu, rue des Corderies ; Salley, place d'Armes. — HUISSIERS : MM. Le Grifon, rue Bondor ; Mabire, rue Christine ; Gauvain, id ; Le Mière ; rue de laFontaine ; Mill<strong>et</strong>, rue des Corderies ; Janvry, id. Allain, rue de la Fontaine ; Auvray, id. ; Le Rouvillois, place de la Trinité ; Le Gay, rue des Portes.MÉDECINS : MM. Pinel, rue Corne-de-Cerf ; Blanch<strong>et</strong>, rue Grande-Vallée ; Simon-Davaudiville, rue des Corderies ; Dubots, rue Grande-Vallée ; L'Eguillon,place d'Armes ; Viel-Hautmesnil, rue des Corderies ; Le François, rue de la Fontaine ; Monnoye, rue <strong>du</strong> Château ; Le<strong>du</strong>rdinier, rue des Moulins ; Gervais, rue Tour-Carrée ; La Chaise, rue des Portes ; Ledentu, rue des Corderies.ORDRE MILITAIRE. Sous-Intendant. M. Escher, rue Bondor. — Commandant de Place, M le colonel Boucher de Morlaincourt, rue <strong>du</strong> Chantier. — Directeurd'Artillerie, M. ... — Directeur <strong>du</strong> Génie, M. le colonel comte Dumoncel, rue de l'Avant-Port ; Ingénieur en chef, M. de Mondésir, chef de bataillon. — Lieutenantcommandantde la Gendarmerie départementale, M. de Braquemont, rue des Vieilles-Carrières.[p. 137] MARINE ROYALE. Préf<strong>et</strong> maritime, M. de Martineng, contre-amiral, rue des Bastions. — Major de la Marine, M. Lamarche, rue <strong>du</strong> Chantier. —Directeur des mouvements <strong>du</strong> port, M. Costé, capitaine de vaisseau de deuxième classe, rue Corne-de-Cerf. — Directeur d'Artillerie ; M. Charpentier, lieutenantcolonel,rue Auvray. — Directeur des constructions navales, M. Lefebvre, rue Grande-Vallée. — Id. des travaux hydrauliques <strong>et</strong> bâtiments civils, M. Reybell,ingénieur en chef, rue de la Marine ; bureaux, rue <strong>du</strong> Val-de-Saire. — Commissaire général de 2 e classe, M. de la Gatinerie, r. Tour-Carrée. — Infanterie de Marine,M. Lemaistre, chef de bataillon, r. de l'Abbaye. — Gendarmerie maritime, M. Couraye-Duparc, chef d'escadron, rue de la Paix. — Trésorier des Invalides, M.Pasquier, rue de la Marine. — Médecin en chef de l'Hôpital, M. Obel, rue des Corderies. — Chirurgien, id., M. Reynaud, rue de l'Abbaye. — Conservateur de labibliothèque, M. Gar, rue Grande-Vallée. — Professeur d'Hydrographie, M. Le Monnier, place d'Armes. — TRIBUNAL MARITIME. Commissaire rapporteur, M.Debout, rue Grande-Vallée. — Directeur des Subsistances, M. Bonjour, rue Christine.ARTISTES. Peintres. MM. Mouchel, Quai-Ouest <strong>du</strong> Bassin. Langlois, rue <strong>du</strong> Chantier ; Simon, rue Bondor ; M lle Robineau, Cauchin. — MUSICIENS.Professeurs de piano : M. Gregorieff, place d'Armes ; M me Langlois, rue <strong>du</strong> Chantier ; Miss Edmond, rue Christine. — Professeurs de violon : MM. Froeba, père <strong>et</strong>fils, rue <strong>du</strong> Chantier <strong>et</strong> des Carrières ; Biron, rue <strong>du</strong> Port ; Quenault, rue <strong>du</strong> Chantier. — M. Baudry, rue de la Paix, est luthier, professeur de piano <strong>et</strong> d'instruments àvent.Naturaliste-préparateur, M. Hébert, rue Quai-<strong>du</strong>-Bassin.[p. 138]Pour la commodité <strong>du</strong> voyageur qui ne se ferait pas accompagner d'une personne de <strong>Cherbourg</strong>, nous allons tracer ici un itinérairequ'il pourra suivre dans la visite des principaux établissements compris dans l'intérieur de la ville.Nous supposerons qu'il commence sa tournée à l'hôtel-de-ville, — v. page 119, 1 re partie — où se trouvent la caisse d'épargnes — 120 — le musée Henry —124 — <strong>et</strong> la bibliothèque — 137. — De r<strong>et</strong>our sur la place d'Armes — 141 — il verra l'obélisque — 142 — <strong>et</strong> plus au N.-E. le local où le tribunal de premièreinstance tient <strong>ses</strong> audiences — 142. — De là, s'il se dirige sur la balise — 252 — il aura la vieille tour — 59 — <strong>et</strong> l'église — 73 — à sa droite. En face, au midi, estl'hospice civil — 80 — Qu'il prenne à l'E. la rue de l'Eglise <strong>et</strong> marche en droite ligne jusqu'à l'avant-port — 178 <strong>et</strong> suiv. — il longera le quai, s'arrêtera au pont, fera le


tour <strong>du</strong> bassin à flot, passera devant l'entrepôt réel <strong>et</strong> le chantier des pouls <strong>et</strong> chaussées, <strong>et</strong> arrivera au chantier des bâtiments civils — 287. — Le vieil arsenal —285 — occupe le quai de l'E. de l'avant-port <strong>et</strong> son extrémité N. communique à la j<strong>et</strong>ée de l'E. — 185. — Tout près de là, le long de la plage, paraît l'établissementdes bains de mer — 163. — Que maintenant il tourne à l'E., puis au S., <strong>et</strong> il aura à sa gauche les corderies <strong>du</strong> commerce — 165. — Le prolongement de la rue <strong>du</strong>Val-de-Saire le con<strong>du</strong>ira au Champ-de-Mars ; — 166 — qu'il revienne sur <strong>ses</strong> pas <strong>et</strong> prenne la rue de Paris, que le canal de r<strong>et</strong>enue — 193 — longe à sa droite, <strong>et</strong>qui a à sa gauche l'une des fabriques des pro<strong>du</strong>its de soudes de varechs — 159. — A l'extrémité de c<strong>et</strong>te rue est le chemin de fer — 241 — <strong>et</strong> le Cauchin sur ladroite — 289 — puis rue <strong>du</strong> Roule, l'église de ce nom — 147 — <strong>et</strong> rue des Ru<strong>et</strong>tes, le château-d'eau — 289. — De l'angle S.-O. <strong>du</strong> bassin de commerce, onaperçoit à l'O., au-delà de la place de la Prison, le temple protestant — 148 — <strong>et</strong> la salle d'asile — 154 ; — on peut ensuite visiter la prison — 145 — le <strong>nouveau</strong>palais de justice — 142 — <strong>et</strong> la halle — 158. — En montant la rue Corne-de-Cerf on arrive à la rue de la Poudrière — 198 — <strong>et</strong> près de là à la rue de Bailly où sontsitués la manufacture de dentelles[p. 139]— 155 — <strong>et</strong> le collége — 156. — Le cim<strong>et</strong>ière — 150 — est rue de la Duché, laquelle joint la rue <strong>du</strong> Chantier, qui débouche rue de l'Abbaye, en face de l'entrée <strong>du</strong>chantier Chantereine — 280. — Il y a de l'un ou de l'autre côté de c<strong>et</strong>te dernière, la boulangerie de la Marine — 283 — la caserne <strong>du</strong> chantier Chanchantereine —283 — la caserne des équipages de ligne — 283 — la chapelle <strong>du</strong> Voeu — 93 — l'arsenal de la guerre — 170 — <strong>et</strong> l'hôpital de la marine — 283. — Que levoyageur revienne sur <strong>ses</strong> pas, entre dans le Port Militaire — 254 <strong>et</strong> suivantes — par la porte <strong>du</strong> Midi, tout près de la chapelle <strong>du</strong> Voeu, <strong>et</strong> se rende dans l'anseChantereine — 278 — par la coupure faite dans la fortification à l'E. des dernières cales de construction, <strong>et</strong> rentre dans la ville par le prolongement de la rue de laPaix, où se trouve la salle de spectacle — 146. — La rue des Corderies <strong>et</strong> le passage Digard le con<strong>du</strong>iront rue au Fourdrey, où se voit l'entrée d'un ancien couventde Bénédictines — 85 — <strong>et</strong> la vieille maison dont il est parlé ci-après dans les notes — 143.1 re PARTIE.[p. 140]NOTES ET RECTIFICATIONS.Page 3. Défen<strong>du</strong>e <strong>du</strong> côté de la terre par 8 forts placés sur les hauteurs, <strong>et</strong> qui en temps de guerre se joindraient, lisez : pourraient se joindre ; voyez, pour plusamples détails, page 171, 1 re partie.Ibid. Dans c<strong>et</strong>te superbe rade, 90 vaisseaux de ligne, lisez : bâtiments de guerre.Page 4. Depuis l'impression de ces pages, nous avons pu recueillir sur le commerce de <strong>Cherbourg</strong>, des détails plus précis <strong>et</strong> plus exacts ; le lecteur les trouverapage 202 <strong>et</strong> suiv., 1 re partie.Page 8. Aux noms que nous avons cités dans le texte, il faut ajouter celui de Thomas Voisin, sieur de La Hougue, né vers la fin <strong>du</strong> XVII e siècle, professeurd'hydrographie, fondateur de la société académique de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> auteur d'une histoire de notre ville, imprimée à Paris sous le nom de Mme R<strong>et</strong>eau-Dufresne,qui l'avait falsifiée, <strong>et</strong> publiée en 1835 à <strong>Cherbourg</strong>, avec une continuation par M. Vérusmor (Géhin). Voisin La Hougue est mort en 1773.Né à <strong>Cherbourg</strong> en 1762, Gilles-Aimable Troude servit d'abord dans la guerre de l'indépendance des Etats-Unis, rentra en 1783 dans la marine marchande,puis, dix ans après, nommé enseigne de vaisseau, il s'embarqua à bord de l'Achille, bâtiment de l'escadre de Morard de Galles, en croisière sur les côtes del'océan ; c'était pendant l'hiver, l'Achille perdit dans une tempête <strong>ses</strong> mâts qui, r<strong>et</strong>enus encore par les manoeuvres, menaçaient de défoncer les flancs <strong>du</strong> navire ;Troude se j<strong>et</strong>a à la mer <strong>et</strong> le débarrassa de sa mâture. Fait lieutenant de vaisseau en récompense de ce service, il assista au combat <strong>du</strong> 13 prairial, célèbre parl'explosion <strong>du</strong> Vengeur, qui aima mieux se faire sauter que de se rendre. Troude, capitaine <strong>du</strong> pavillon de l'amiral Bruix, à bord <strong>du</strong> Desaix, prit part au combat <strong>du</strong> 6juill<strong>et</strong> 1801 dans la baie d'Algéziras, où l'escadre française, bien qu'elle fût inférieure de moitié, força les Anglais à se r<strong>et</strong>irer à Gibraltar. Ce fut à la suite de cecombat qu'on[p. 141]lui confia le commandement <strong>du</strong> Formidable ; ce navire lourd <strong>et</strong> fort maltraité pendant le combat, ne put suivre l'escadre ; il se trouva une nuit dans les eaux de laflotte anglaise, <strong>et</strong> comme on y avait fait placer des feux semblables aux leurs, ils le prirent pour un de leurs vaisseaux ; au jour, le Formidable s'échappa, mais il futpoursuivi ; trois vaisseaux <strong>et</strong> une frégate l'atteignirent en face de Cadix ; <strong>et</strong> par un bonheur incroyable, Troude parvint à les m<strong>et</strong>tre en fuite <strong>et</strong> à rester maître <strong>du</strong>champ de bataille, après avoir mis un des vaisseaux hors de combat ; le Formidable n'avait per<strong>du</strong> que 25 hommes, mais il était hors d'état. Bonaparte, alors consul,voulut voir <strong>et</strong> féliciter le capitaine, qui fit ensuite plusieurs campagnes sur l'Infatigable <strong>et</strong> le Suffren en 1809 ; il partit de Lorient avec une division, pour aller porterdes conscrits <strong>et</strong> des munitions à la Martinique menacée par les Anglais ; mais l'île était prise quand il arriva : il se r<strong>et</strong>ira aux Saintes. Les Anglais vinrent le bloquerdans la rade, avec cinq vaisseaux <strong>et</strong> sept frégates ; il traversa pendant la nuit l'escadre anglaise, en la saluant de l'artillerie de <strong>ses</strong> deux bords. On le poursuivit : ilavait laissé derrière lui deux frégates qui profitèrent de ce mouvement pour s'échapper. Un des vaisseaux fut pris, mais six semaines après il mouillait avec le restede sa division sur la rade de <strong>Cherbourg</strong>. Il reçut alors le commandement de la 1 re division navale stationnée à <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> quand, en 1811, Napoléon vint visiterc<strong>et</strong>te ville, il lui signa sa nomination au grade de contre-amiral sur la culasse d'un canon <strong>du</strong> Courageux, un des vaisseaux que Troude avait ramenés. Le <strong>du</strong>c deBerry fut reçu par lui en 1814 ; ce prince l'envoya en Angl<strong>et</strong>erre au devant de Louis XVIII, qu'il ne ramena cependant pas, parce que tout était préparé pour unvoyage par Douvres <strong>et</strong> Calais ; Troude rapporta à <strong>Cherbourg</strong> ceux de <strong>ses</strong> compatriotes qui se trouvaient prisonniers à bord des pontons anglais. Mis à la r<strong>et</strong>raite,en 1816, le contre-amiral Troude est mort à Brest en 1824 [148].Page 19, ligne 4, ro, lisez : roi.Page 21, ligne 22, connaître, lisez : reconnaître.Page 22, ligne 2, 1039, lisez : 1139.


Même page, ligne 23, renfermer, lisez : enfermer.[p. 142]Page 28. Les priviléges accordés à la ville de <strong>Cherbourg</strong>, furent en outre confirmés par François II, en 1560, <strong>et</strong> par Louis XV, en 1718.Même page, ligne 24, en une grande, lisez : en grande.Page 31. Les habitants de Valognes ayant pris parti pour la Fronde, <strong>et</strong>c.Il y a ici une erreur, dans laquelle nous sommes tombés, sur la foi de Voisin-La-Hougue ; c<strong>et</strong> historien, qui regardait comme une tache honteuse pour une villed'avoir pris parti contre le souverain légitime, <strong>et</strong> qui avait tant de fois vanté a fidélité des <strong>Cherbourg</strong>eois, s'est trouvé ici sérieusement embarrassé, car le texte desauteurs est précis ; c'est bien <strong>Cherbourg</strong> qui prit parti pour la Fronde ; Valognes tenait au contraire pour Mazarin ; Matignon ne marcha pas sur Valognes au nom <strong>du</strong>roi, mais au nom des mécontents. L'écrivain cherbourgeois a mieux aimé dénaturer l'histoire que d'en convenir.Page 32, note 2, on ne conserve, <strong>et</strong>c., lisez : on ne conserva.Page 35, dernière ligne, est sous presse, lisez : un <strong>nouveau</strong> volume de Mémoires a paru en 1838 ; le Journal des Débats <strong>du</strong> 26 juill<strong>et</strong> en parle trèsfavorablement.Page 51, ligne 27, l'immersion fut, lisez : l'immersion en fut.Page 52. MANUFACTURE DE GLACES. — C<strong>et</strong>te vaste usine, qui occupait plus de 300 ouvriers, se composait de tous les bâtiments nécessaires à lafabrication des glaces, tels que fours à filtrer, ateliers pour le douci <strong>et</strong> le poli, pour la confection des fours <strong>et</strong> creus<strong>et</strong>s, pour l'extraction des sels de soude, forges,halles, moulins, <strong>et</strong>c. Elle était dans la situation la plus avantageuse, une p<strong>et</strong>ite rivière m<strong>et</strong>tait <strong>ses</strong> machines en mouvement, <strong>et</strong> les forêts, dont tout le paysenvironnant était couvert, fournissaient à tous <strong>ses</strong> besoins de combustible. Les glaces, qu'on y fabriquait, étaient soufflées <strong>et</strong> non coulées. Les matières premières,<strong>et</strong> principalement la soude d'Alicante, étant venues à manquer pendant nos guerres de la république, on y forma un atelier de verre à vitrer, pour la fabrication<strong>du</strong>quel on n'emploie que la soude de varech. — En 1758, les Anglais l'avaient imposée à 15,000 livres.Page 56. Nous avons omis de dire que M. de Gerville, qui[p. 143]était venu sur les lieux plusieurs jours avant M. Asselin, assure avoir vu, non pas une maison, mais un grand nombre de maisons. Voir les différents écrits de M. deGerville dans le Journal de l'arrondissement de Valognes <strong>et</strong> tous les recueils scientifiques de la Normandie.Page 57. ligne 22. Deux en chef, deux en pointe, lisez : un en pointe.Page 62. A l'extrémité de la rue au Fourdrey, en face de la Grande-Rue, on voit une maison, sur la porte de laquelle on lit l'inscription suivante :TECUM HABITATUN SEUL DIEU OPTIMUM TÔ PRCHAINSUR TOUT ALIENA FRUI CÔE TOI-MESME.INSANIA1569.On ignore ce que c'est que c<strong>et</strong>te maison.Page 93, ligne 19. Je fondrai, lisez : Je fonderai.Page 99, ligne 14, lisez : Ce fut dans c<strong>et</strong>te maison que les religieux <strong>du</strong> Voeu se r<strong>et</strong>irèrent, <strong>et</strong>c.Page 107, ligne 17. Le voyageur remarque à sa gauche, lisez : à sa droite.Page 112, ligne 3. Dont elles nouaient les crins pour servir d'étriers, lisez : Pour s'en servir comme d'étriers.Page 124, ligne 22, flancs à, lisez : flancs <strong>et</strong> à.Page 139. Nous avons omis d'indiquer les écoles auxquelles appartiennent les tableaux numérotés 161, 162, 163 ; le premier est de l'école italienne ; le secondde l'école hollandaise, <strong>et</strong> le troisième de l'école française ; un autre tableau de l'école française a été inscrit au musée sous le N° 164, depuis l'impr ession <strong>du</strong>catalogue que nous donnons ; c'est un paysage peint par le donateur même <strong>du</strong> musée, M. Thomas Henry. Un spirituel article sur ce connaisseur a été inséré dans


le Magasin pittoresque, livraison de mars 1839.Page 141. A la fin de l'article bibliothèque, ajoutez : La bibliothèque est maintenant ouverte tous les jours de midi à quatre heures, <strong>et</strong> les mercredi <strong>et</strong> vendredisoir de six à neuf heures.Page 146, ligne 7. Au mois de juin dernier, lisez : de juin 1838.[p. 144]Page 153, ligne 15. Le 5 décembre dernier, lisez : le 5 décembre 1837 ; la même fête s'est renouvelée en 1838, le 19 <strong>du</strong> même mois.Page 154 (25 juill<strong>et</strong>), ajoutez 1838. Page suivante : Le 2 juill<strong>et</strong> dernier, il s'agit toujours de l'année 1838.Page 158. A partir de l'année scholaire 1839-1840, un professeur de philosophie sera attaché au collége de <strong>Cherbourg</strong>.Après l'article sur le collége, lisez :ECOLE PRIMAIRE SUPÉRIEURE ET PENSIONNAT SECONDAIRE DE M. LE BARRIER.Jusqu'en 1839, l'enseignement primaire supérieur ne se donnait qu'au collége, où il avait pour directeur M. Le Barrier ; ce professeur a cru devoir se r<strong>et</strong>irer pourfonder un maison d'é<strong>du</strong>cation primaire sous son nom particulier. Il a choisi à c<strong>et</strong> eff<strong>et</strong> un vaste local, situé au numéro 6 de la rue des Moulins. Ses courscommenceront dans c<strong>et</strong>te maison le 1 er octobre 1839.On enseignera dans c<strong>et</strong> établissement la lecture, l'écriture, le français, l'anglais, le catéchisme <strong>et</strong> l'histoire de la religion, l'histoire ancienne <strong>et</strong> moderne, l'histoirede France, la géographie comparée ; les mathématiques élémentaires comprenant l'arithmétique, l'algèbre, la géométrie théorique <strong>et</strong> pratique, <strong>et</strong>c., le dessin, lamusique <strong>et</strong> le dessin linéaire.Les élèves seront repartis selon leur force, en un certain nombre de divisions auprès de chacune desquelles il y aura à chaque instant des maîtres particuliers ;pour passer d'une division dans une autre, il faudra subir des examens sur toutes les parties enseignées dans les divisions inférieures.Une bibliothèque, composée de livres d'études <strong>et</strong> d'agrément, sera mise à la disposition des élèves ; il y aura aussi un cabin<strong>et</strong> de physique, de cosmographie,<strong>et</strong>c.C'est M. Fuller, si avantageusement connu à <strong>Cherbourg</strong>, qui donnera les leçons d'anglais.Il y aura pension, demi-pension <strong>et</strong> externat ; le prix de la pension est de 400 fr.Les élèves seront toujours surveillés.Le prix, qui est extraordinairement minime, est de 6 francs par mois pour tous les cours ; les élèves au-dessous de 10 ans, ne paieront même que cinq francs.[p. 145]On paiera 200 fr. pour la demi-pension ; l'année scholaire sera de 11 mois.M. Le Barrier est en outre autorisé, d'après une décision <strong>du</strong> conseil royal de l'instruction publique, à établir un pensionat secondaire, où l'on enseignera le latin<strong>et</strong> le grec.Les élèves qui apprendront le latin paieront 12 fr. par mois au-dessous de 10 ans <strong>et</strong> 15 fr. au-dessus. Le maître de pension acquittera sur ces deux derniers prixla rétribution <strong>du</strong> collége, celle de l'Université <strong>et</strong> en fera la remise aux élèves qui seront exempts de l'une ou de l'autre.Page 231. M. Fouques-Duparc, Louis-Bénoît, inspecteur-divisionnaire des ponts <strong>et</strong> chaussées, directeur des travaux hydrauliques, officier de la légiond'honneur,né à Versailles en 1772, est mort à Paris le 23 mars 1838. — En 1798 il avait fait partie de la seconde promotion de l'école centrale des travaux publics(depuis école polytechnique) <strong>et</strong> était entré dans le corps des ponts <strong>et</strong> chaussées. Il remplit une mission en Italie, séjourna une année à Toulon <strong>et</strong> fut attaché au portde <strong>Cherbourg</strong>, qu'il n'a jamais quitté depuis <strong>et</strong> où il a acquis successivement <strong>ses</strong> différents grades. Tous nos travaux maritimes exécutés depuis 1803, soit à terre,soit en rade, portent des marques de sa coopération active <strong>et</strong> éclairée ; le proj<strong>et</strong> d'achèvement de la Digue est, comme nous l'avons dit, son oeuvre, <strong>et</strong> il donnaittous <strong>ses</strong> soins à l'accomplissement de c<strong>et</strong>te grande entreprise, lorsque la mort l'a surpris.Page 235, ligne 28, au lieu de mélangées <strong>du</strong>, lisez : mélangées avec <strong>du</strong>.Page 252, ligne 24, de la branche, lisez : des branches.


Le sonn<strong>et</strong> suivant, dont une copie se trouvait chez M. l'abbé La Roussellerie, était, dit-on, gravé sur la porte <strong>du</strong> second cim<strong>et</strong>ière. On peut, à certainesexpressions <strong>et</strong> tournures qu'il renferme, en fixer la date au XVIIe siècle. Nous devons c<strong>et</strong>te communication à l'obligeance de M. E. Delachapelle.Lorsque Jésus souffrait pour tout le genre humain,La Mort en l'abordant au fort de son supplice,Parut tout interdite <strong>et</strong> r<strong>et</strong>ira sa main,N'osant pas sur son maître exercer son office.[p. 146]Mais Jésus, en baissant la tête sur son sein,Fit signe à l'implacable <strong>et</strong> sourde exécutriceQue, sans avoir égard au droit de souverain,Elle achevât sans peur son sanglant sacrifice.L'implacable obéit ; <strong>et</strong> ce coup sans-pareilFit trembler la nature <strong>et</strong> pâlir le soleil.Comme si de sa fin le monde eût été proche,Tout gémit, tout frémit sur la terre <strong>et</strong> dans l'air :Et le Pécheur fut seul qui prit un coeur de roche,Quand les rochers semblaient en avoir un de chair.II e PARTIEPage 2, ligne 3. Ce ne sont pas les bateaux à pierre qui se rendent à la Digue, remorqués par un bateau à vapeur ; ce sont les chalands, sortes de cais<strong>ses</strong>chargées de mortier.Page 6, ligne 16 : peulvants, lisez peulvans.Page 10 ligne 21 : l'un près <strong>du</strong> hameau des Forges, <strong>et</strong>c.Ce monument a été en partie détruit pour réparer le chemin, <strong>et</strong> cela en 1889 !Page 13.Ajoutez à la fin de la dernière ligne. Un moule pareil a été découvert en 1839 dans l'arrondissement de Valognes.Page 17, ligne 5 : de Lucille, lisez Lucile.Page 22. Voir encore page 70 <strong>et</strong> suivantes de c<strong>et</strong>te 2 e partie ; <strong>et</strong> sur d'autres découvertes d'antiquités romaines dans l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong>, consulterles différents mémoires de M. de Gerville, insérés dans tous les recueils scientifiques de la Normandie, <strong>et</strong> résumés pour la plupart dans plusieurs articles <strong>du</strong> Journalde l'arrondissement de Valognes, année 1839.Page 23 <strong>et</strong> suivantes.Des fautes assez nombreu<strong>ses</strong> se sont glissées dans la liste des plantes ; nous indiquons les principales. — Les variétés sont imprimées en caractères italiques.Page 25, ligne 4 : Hypericum terapterum, lisez : t<strong>et</strong>rapterum.Id. ligne 19. Aquilfolium, lisez : aquifolium ; ligne 30, ornithopodiodes, lisez : ornithopodioides ; ligne 31, angustissimus,[p. 147]lisez, angustissimus, — page 26, ligne 13, Bryona, lisez : Bryyonia ; ligne 28, Hernaria, lisez : Herniaria ; ligne 30, GROSSALARIÉES, lisez : GROSSULARIÉES ;ligne 35, ajoutez : Tilloea muscosa ; ligne 36, lisez : Chrysosplenium ; ligne 37, OMBELLIFÈRES — page 27, ligne 2, pastinica, lisez : pastinaca ; ligne 9, o<strong>et</strong>husu,<strong>et</strong>c., lisez : o<strong>et</strong>husa cynapium ; ligne 16, comus, lisez : cornus. — Page 28, ligne 4, Onopordium, lisez : Onopor<strong>du</strong>m. — Page 29, ligne 12, blattoeoides, lisez :blattarioides ; ligne 14, ajoutez : Solanum <strong>du</strong>lcamara — Datura stramonium ; ligne 23, stricta, lisez : striata ; ligne 32, sctutellata, lisez, scutellata. — Page 30, ligne5, Saturia, lisez : Satureia. — Page 31, ligne 22, epens, lisez : repens ; ligne 28, b<strong>et</strong>ula, lisez : b<strong>et</strong>ulus. Après Monocoty lédones, lisez : PHANEROGAMES. —Page 32, ligne 12, nutans, lisez : natans ; ligne 28, taenegeya, lisez : tenageya.


Page 32. Une transposition, dont nous ne pouvons nous rendre compte, s'est glissée dans c<strong>et</strong>te page. Les lignes 8 <strong>et</strong> 9 doivent être ainsi rétablies : Alliumursinum, vineale, (porrum, sativum, <strong>et</strong>c.) ; les lignes 27 <strong>et</strong> 28 :.... bufonius. — Luzula maxima, campestris, congesta, repens, acutiflorus, lampocarpus.Page 33 : ligne 5 : bilicularis, lisez : biligularis. — page 34 : ligne 16 ; apaucarpa, lisez : apocarpa ; ligne 29 : Byrum, lisez : Bryum ; ligne 38, ancinatum, lisezuncinatum — page 35 : ligne 4. Ajoutez : Jungermannia bicuspidata, pusilla, un<strong>du</strong>lata, viticulosa, fissa, ciliaris, pubescens — page 36 : lignes 3 <strong>et</strong> 4 : lisez :candelarium ; ligne 37 : ocmocyna, lisez ; ecmocyna.Page 39, dernière ligne <strong>du</strong> texte.Ajoutez — Grès intermédiaire, phyllades <strong>et</strong> grawackes.Page 43. Jobourg.C'est par erreur que l'anthyllide vulnéraire se trouve citée au nombre des plantes qui croissent sur les falai<strong>ses</strong> de c<strong>et</strong>te commune. La seule légumineuse qui yvienne en abondance est l'Hypocrepis comosa.Page 44. La chapelle S.t-Clair, à Nacqueville, existait avant 1231.Page 46. Un acte que Chantereine assure avoir vu au chartrier de Querqueville fait foi d'un autre débarquement des Anglais au même lieu, dès l'année 1552.<strong>Cherbourg</strong> était alors commandé par Guillaume de Lestre.... L'ennemi n'osa attaquer la place, il se contenta de ravager le pays <strong>et</strong> d'emmener pour[p. 148]ôtage en Angl<strong>et</strong>erre Guillaume Nicolle, prêtre de l'endroit, jusqu'au paiement de la contribution qu'il exigea des habitants. — Les autres historiens de <strong>Cherbourg</strong>sont mu<strong>et</strong>s sur c<strong>et</strong> événement.Id. Urville.L'église a des parties d'architecture romane.Id. Vauville.Le journal d'Etudes Rigaud, archevêque de Rouen, qui vint en 1250, visiter les maisons religieu<strong>ses</strong> <strong>du</strong> diocèse de Coutances, rapporte qu'il se trouvait à c<strong>et</strong>teépoque, dans le prieuré de c<strong>et</strong>te paroisse, quatre moines de Cérisy, qui jouissaient d'un revenu de 1400 livres de rente. Ils ne suivaient aucune règle écrite <strong>et</strong>avaient des moeurs très-relâchées.Page 47. Après l'article sur Vauville, ajoutez :La tradition rapporte qu'il y avait autrefois une ville dans la Mielle de c<strong>et</strong>te côte ; un poème <strong>du</strong> XVIe siècle intitulé le Miroir de l'éternité ou les sept ages <strong>du</strong>monde, parle en eff<strong>et</strong> d'une tempête horrible qui serait arrivée sur ce point <strong>et</strong> y aurait fait périr un grand nombre d'hommes <strong>et</strong> d'animaux. Peut-être est-ce à c<strong>et</strong>tecatastrophe qu'il faudrait attribuer l'anéantissement de quelque grand village qui se trouvait sur ce point <strong>et</strong> que la tradition aura transformé en ville.Id. Lors de la descente des Anglais dont parle la note précédente, il y avait à Vauville des halles qui furent pillées, <strong>et</strong> c'est depuis c<strong>et</strong>te époque qu'il cessa d'yavoir un marché le mercredi.Id. ligne 24, gneiss,Ajoutez : Trappites sur la côte entre Le Rosel <strong>et</strong> Flamanville ; curite porphyroide près de Sciautot ; une carrière de kaolin qui s'emploie aux fabriques deporcelaine de Bayeux <strong>et</strong> Isigny. Page 48. Les Pieux. Ce canton est nommé Kelgent dans la charte de Richard II ; le nom de c<strong>et</strong>te commune vient probablement desa situation sur une hauteur, podium ; en celtique, pou ou puy.Page 50. Héauville.C<strong>et</strong>te commune est la patrie de Louis Le Bourgeois, poète <strong>et</strong> catéchiste, mort en 1680. Il y avait autrefois, sous l'invocation de S.t-Martin, un prieuré fort riche,avant qu'il eût été aliéné en 1562 ; pour 2400 livres de propriétés.[p. 149]Id. 50 : Grosville est la patrie de Ros<strong>et</strong>te de Brucourt.Telle est la version commune ; cependant une l<strong>et</strong>tre publiée dans le Journal de l'arrondissement de Valognes <strong>du</strong> 23 Novembre 1838, le fait naître à S.te-Marie<strong>du</strong>-Mont,au château de Brucourt en 1712. Il mourut à Caen en 1755. Il était lieutenant aux gardes françai<strong>ses</strong>. Quoiqu'il eût la fièvre au moment de la bataille de


Laufelt, il combattit cependant de manière à mériter la croix de S.t-Louis sur le champ de bataille. Une famille de Valognes a recueilli son héritage <strong>et</strong> possède sonportrait.Page 52. Siouville.Il y avait autrefois à Siouville un prieuré dépendant anciennement de S.te-Barbe en Auge, <strong>et</strong> en dernier lieu de S.t-Georges de Boscherville.Page 55. Digosville.Trigan, auteur de l'histoire ecclésiastique de Normandie, de la Vie <strong>et</strong> vertus de M. Paté, curé de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong>c., a été curé de c<strong>et</strong>te commune ; il mourut en1764.Page 56.... <strong>et</strong> si l'on n'y apporte un prompt remède, <strong>et</strong>c. On construit maintenant (1839) un glacis pour arrêter les invasions de la mer dans une partie de c<strong>et</strong>tebaie.Page 57. Nouainville.C<strong>et</strong>te commune est la patrie de Joseph Grisel, fondateur des religieu<strong>ses</strong> de S.te-Aure, mort en 1687.Page 58. Teurthéville.C<strong>et</strong>te commune possédait autrefois la chapelle de Gris<strong>et</strong>ot, où Thomas Beck<strong>et</strong> a plusieurs fois célébré la messe.En 1553, deux navires br<strong>et</strong>ons, chassés par deux corsaires flamands, voulaient gagner le port de <strong>Cherbourg</strong>. L'un parvint à gagner la fosse <strong>du</strong> Galley, ma sl'autre qui ne marchait pas si bien, chercha à terrir sous uerqueville. Les flamands envoyèrent vingt bombes sur deux chaloupes pour tâcher de reflouer le bâtimentà la marée montante, pendant qu'ils tiraient sur le rivage pour écarter les paysans, mais malgré leur artillerie, le navire br<strong>et</strong>on ne fut pas sauvé <strong>et</strong> l'on parvint mêmeà s'emparer des flamands qui montaient les chaloupes, <strong>et</strong> on les con<strong>du</strong>isit à la prison de <strong>Cherbourg</strong>.Page 65. S.t-Pierre.Nous croyons devoir ajouter ici quelques mots sur c<strong>et</strong> abbé. Son nom était Charles-Irénée Castel de S.t-Pierre ; il naquit[p. 150]le 13 février 1658 <strong>et</strong> fut aumônier de la <strong>du</strong>chesse d'Orléans, abbé commendataire de Tyron <strong>et</strong> membre de l'académie française. C'était un homme bon <strong>et</strong> simple, quidisait que toute la morale de l'homme vertueux doit se trouver dans ces deux mots : donner <strong>et</strong> pardonner ; Voltaire <strong>et</strong> d'Alembert disent que c'est à lui qu'on doit lemot bienfaisance ; quoi qu'il en soit, il fit de c<strong>et</strong>te vertu l'obj<strong>et</strong> unique de sa vie <strong>et</strong> de <strong>ses</strong> ouvrages ; il était continuellement sérieux <strong>et</strong> ne brillait pas dans laconversation. Etant un jour allé voir une dame très-spirituelle, il la trouva seule ; elle le connaissait assez peu, mais elle saisit adroitement le tour de l'esprit del'abbé, <strong>et</strong> dirigea la conversation en conséquence ; S.t-Pierre parla fort bien : madame, lui dit-il en la quittant, je suis un instrument <strong>et</strong> vous en avez bien joué.Il est auteur d'un assez grand nombre d'ouvrages, on cite : Annales politiques, 1757 ; son proj<strong>et</strong> de Paix perpétuelle entre les potentats de l'Europe, est le rêved'un homme de bien : il l'adressa sous le titre de Diète européenne au cardinal de Fleury : Vous avez oublié, lui dit le ministre, pour article préliminaire, decommencer par envoyer une troupe de missionnaires pour disposer le coeur <strong>et</strong> l'esprit des princes.S.t-Pierre mourut le 29 avril 1743.Guillaume de S.t-Pierre qui, au XIII e siècle, rima le roman <strong>du</strong> Mont-S.t-Michel, était aussi né à S.t-Pierre-Eglise ; peut-être était-ce un des ancêtres de l'abbé.Page 70, ligne 28 : 55,926 habitants, lisez : près de cent mille habitants sur lesquels 628 sont électeurs.Page 72, ligne 2, à Tamerville, lisez : Montaigu-la-Bris<strong>et</strong>te, au lieu nommé les Fontaines de Sinope.Page 80, ligne 3, bois pesr d'un ruisseau, lisez : bois près.Page 81, ligne 9, un décagone, lisez : undécagone.Page 82..... d'une commanderie de Templiers.Bricquebec s'est toujours fait remarquer par un grand nombre d'édifices religieux. Il y avait une chapelle S.te-Anne, reste d'un ancien ermitage <strong>et</strong> d'un couventde Calma<strong>du</strong>les, une chapelle de S.te-Croix qui existait au XIII e siècle ; une chapelle S.t-Martin ; un ermitage <strong>et</strong> une chapelle appartenant à l'abbaye de S.t-Sever,dont les moines furent supprimés en 1725 sur les plaintes <strong>du</strong> curé ; des chapelles S.t-Blaise, S.t-Siméon, S.t-François, S.te-Catherine <strong>et</strong> de La Houlate.


[p. 151]Page 86. Lorsque les reliques de S.t-Georges abordèrent à Portbail 1747 dans une p<strong>et</strong>ite-tour, accompagnées des livres <strong>et</strong> papiers, les habitants de l'endroit,désirant connaître la volonté de Dieu, attelèrent deux vaches à un chariot sur lequel on avait fait placer ces obj<strong>et</strong>s ; ces vaches s'arrêtèrent au lieu nommé Brucius,où l'on bâtit deux égli<strong>ses</strong>, dans lesquelles ces reliques furent conservées ; d'après la description des lieux <strong>et</strong> le nom, ce lieu ne peut être que Brix. V. Don Lucd'Acheri, III ; histoire de Néhou, par M. Le Bredonchel ; Histoire des évêques de Coutances, par M. Lecanu.Page 92, ligne 7, le passage d'un gu<strong>et</strong>, lisez : d'un gué.Page 96, ligne 20, l'été dernier, lisez : l'été 1838.Le monument dont il est question à l'article de Néhou, a été reporté à la chapelle de Monroc dans le courant de l'été 1839. Page 105. Guillaume Lambert,éditeur <strong>et</strong> réformateur de la Coutume de Normandie, naquit à S.t-Sauveur en 1520.Page 115, ligne 13. Guillaume I er ; <strong>du</strong>c de Normandie, lisez : Guillaume II, <strong>du</strong>c de Normandie, puisqu'il ne s'agit pas ici de ce prince comme roi d'Angl<strong>et</strong>erre.Page 132. Aux ouvrages sur la ville <strong>et</strong> les <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong>, ajoutez :Histoire des Evêques de Coutances, depuis la fondation de l'évêché jusqu'à nos jours, par M. Lecanu, curé de Bolleville, fort in-8°. Coutances, Voisin, 1 839.Vie <strong>et</strong> miracles <strong>du</strong> bienheureux Thomas Hélye, prêtre, natif de Biville, <strong>et</strong> par M. Hélye, curé de S.t-Pierre, de Coutances. — <strong>Cherbourg</strong>. M me Clamorgam, 1822,in-12.Vie <strong>du</strong> B. Thomas Hélye, prêtre de Biville, extraits d'un ms. déposé dans les archives de l'église de Biville, <strong>et</strong>c. — <strong>Cherbourg</strong>, Boulanger, in-24.Souvenir d'un voyage en Normandie pendant le voyage <strong>du</strong> roi des Français, par Huart. 1833. (Bibliothèque des villes <strong>et</strong> des campagnes).III e PARTIE.Page 135, ligne 9, M. Louch<strong>et</strong>, lisez : M. Gayard,[p. 152]En terminant c<strong>et</strong>te publication nous éprouvons le besoin de témoigner toute notre reconnaissance aux personnes qui ont bien voulu nous communiquer desrenseignements : comme le premier mérite d'un ouvrage de ce genre est l'exactitude, si le nôtre a quelque mérite, c'est à elles en partie que nous en seronsredevables.Nous nous plaisons aussi à payer notre tribut d'éloges à M de Berruyer. A lui la gloire d'avoir le premier déblayé le terrain <strong>et</strong> frayé la route. On voit cependantque nous ne nous sommes pas traînés sur <strong>ses</strong> pas ; des ouvrages historiques qui lui étaient restés inconnus ou qu'il avait négligés, des pièces originales,entièrement inédites, ont été mis par nous à contribution, <strong>et</strong> nous sommes parvenus à faire sur un suj<strong>et</strong> déjà traité une oeuvre à peu près entièrement neuve. C'estce qui explique comment notre publication s'est trouvée r<strong>et</strong>ardée, <strong>et</strong> con<strong>du</strong>ite au double de ce que nous avions proj<strong>et</strong>é d'abord.Nous sentons mieux que personne combien notre ouvrage est loin d'être parfait ; nous demandons excuse pour les fautes qui nous sont échappées, <strong>et</strong> nousprions les personnes qui en remarqueront de vouloir bien nous les faire connaître afin que nous puissions les réparer dans une nouvelle édition.<strong>Cherbourg</strong>, 3 Octobre 1839.[p. 153]TABLE DES MATIÈRES.I re PARTIE.Notions générales sur la ville <strong>et</strong> l'arrondissement. 1Précis de l'histoire de <strong>Cherbourg</strong>. 18LE VIEUX CHERBOURG. 54Vieille Tour. 59Ancien château. 63Chapelle <strong>du</strong> château. 70Eglise Ste-Trinité. 73Hôpital civil. 80


Couvent de Benédictines. 85Maison de Saint-Clair. 87Maison de l'abbé Beauvais. 89ANTIQUITÉS RELIGIEUSES EXTÉRIEURES A LA VILLE. 92Chapelle Notre-Dame-<strong>du</strong>-Voeu. 92Abbaye <strong>du</strong> Voeu. 96Abbaye Sartrine. 98Le Roule — L'Ermitage de haut. 107Grotte des fées — Ermitage de bas. 111Chapelle St-Sauveur. 113CHERBOURG MODERNE. 118ETABLISSEMENTS CIVILS ET PARTICULIERS. — Hôtel de ville. 119Caisse d'épargnes. 120Musée-Henry. 124Catalogue des tableaux <strong>du</strong> musée. 131Bibliothèque, Cabin<strong>et</strong> d'antiquités <strong>et</strong> d'histoire naturelle. 137Place d'Armes. — Obélisque. 141Tribunaux. 142Prison. 145Salle de spectacle. 146Eglise de Notre-Dame de l'Immaculée conception. 147Temple protestant. 148Cim<strong>et</strong>ières. 150Etablissement de bienfaisance <strong>et</strong> maison d'é<strong>du</strong>cation. 151[p. 154]Salle d'asile <strong>et</strong> écoles mutuelles. 154Manufacture de dentelles. 155Collége de <strong>Cherbourg</strong>. 156Institution primaire supérieure de M. Lebarrier, voyez dans les notes <strong>et</strong> additions, 2 e partie. 144Halle. 1 re partie. 158Fabriques des pro<strong>du</strong>its de soude de varech. 159Usine de la rue de Paris. 161Usine de la route de Tourlaville. 162Etablissement des bains de mer. 163Magasin aux bois de chauffage. 165Corderies <strong>du</strong> commerce. 165Champ de Mars. 166ÉTABLISSEMENTS MILITAIRES. — Casernes. 167Manutention de la guerre. 167Poudrière <strong>et</strong> salle d'armes de l'artillerie de terre. 168Arsenal de la guerre. 170Forts <strong>et</strong> Redoutes. 171ETABLISSEMENTS COMMERCIAUX. 178Chenal. 185J<strong>et</strong>ée de l'Est. 185J<strong>et</strong>ée de l'Ouest. 187Avant-Port. 188Bassin. 189Portes de flot. 191Pont-Tournant. 192Canal de r<strong>et</strong>enue. 193Ecluse. 195


Chantier des ponts <strong>et</strong> chaussées. 196Entrepôt réel. — Douane. 197Eclairage <strong>du</strong> port de commerce. 198Ouvrages proj<strong>et</strong>és 198Commerce de <strong>Cherbourg</strong>. 202ETABLISSEMENTS MARITIMES. — 1° R ADE ET DÉPENDANCES. 204Digue. 212Chemin de fer. 241Port <strong>du</strong> Becqu<strong>et</strong>. 244Forts de la Rade. 247[p. 155]Fort de l'Ile-Pelée. 247Fort <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>. 250Fort de Querqueville. 251Bali<strong>ses</strong>. 2522° P ORT MILITAIRE ET DÉPENDANCES. 254Avant port. 260Bassin à flot. 265Arrière-Bassin. 268Eclu<strong>ses</strong>, portes <strong>et</strong> pont-tournant. 270Cales de construction. 272Forme de radoub <strong>et</strong> cale de carénage. 274Ateliers des forges, des machines, de la fonderie, <strong>et</strong> dépendances. 275Hydromètre. — Bureaux sur le quai O. de l'avant-port. 277Chantier des travaux hydrauliques. 277Parc d'artillerie de la marine. 278Chantier des cales Chantereine. 278Cales de construction, n os 5 <strong>et</strong> 6 — Hangar aux bois. 279Chantier Chantereine. 280Caserne <strong>du</strong> chantier Chantereine. 281Caserne des équipages de ligne. 282Boulangerie de la marine. 283Hôpital de la marine. 284Ancien bagne. — Vieil arsenal. 285Chantier des bâtiments civils. 287Salle des modèles <strong>et</strong> plans en relief. 287Etablissements <strong>du</strong> Cauchin. 289Aque<strong>du</strong>c de dérivation des eaux de la Div<strong>et</strong>te. — Château d'eau. 289PHARES. 292Phare de Barfleur. 293Phare <strong>du</strong> cap de la Hague. 297Société académique de <strong>Cherbourg</strong>. 299JOURNAUX. Journal de <strong>Cherbourg</strong>. 300Phare de la Manche. 301Bibliothèques particulières. 301Sociétés de lecture. 303[p. 156]Chambre de commerce. 304Cour<strong>ses</strong> de chevaux. 304II e PARTIE.ALENTOURS DE LA VILLE.Le Roule. 1


Quincampoix. — La Fauconnière. — Le télégraphe. 2Antiquités celtiques des <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong>. 5Antiquités romaines. 13Plantes des <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong>. 25Dicotylédones. 25Monocotylédones. 31Acotylédones. 34Communes de l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong>. 39(Les communes y sont rangées alphabétiquement par cantons).Canton de Beaumont. 39Canton des Pieux. 47Canton d'Octeville. 54Canton de St-Pierre-Eglise. 64ARRONDISSEMENT DE VALOGNES. 70Principales communes de l'arrondissement de Valognes, par ordre alphabétique. 72Vaast-la-Hougue (St). 106VALOGNES. 114Bibliographie. 128III e PARTIE.Adres<strong>ses</strong>. 133Itinéraire que le voyageur pourra suivre dans la visite des établissements. 138Notes <strong>et</strong> rectifications. 140[1] L'agriculture a fait depuis quelques années beaucoup de progrès dans l'arrondissement de <strong>Cherbourg</strong>. On les doit presque tous àM. le comte Dumoncel. La pomme de terre est cultivée à la place <strong>du</strong> sarrasin, <strong>et</strong> rapporte un pro<strong>du</strong>it double au moins, parce qu'onl'exporte, <strong>et</strong> qu'elle sert d'ailleurs dans le pays à engraisser des porcs pour les salaisons de la marine militaire <strong>et</strong> commerciale, la culture<strong>du</strong> lin d'été est aussi en grande partie remplacée par celle <strong>du</strong> lin d'hiver, qui, quoique moins beau, est cependant bien préférable puisquela graine seule suffit pour payer amplement le cultivateur. Les grandes landes diminuent <strong>et</strong> les jachères sont moins fréquentes ; au trèfledes prés, connu sous le nom de tremaine, dont la culture ne rapporte pas assez, parce qu'on est obligé de le semer trop souvent sur lemême terrain, on a ajouté, pour les fourrages artificiels, la luzerne, qui est infiniment plus avantageuse, mais qui ne croît pas égalementbien partout, <strong>et</strong> le trèfle incarnat qu'on sème en septembre pour le récolter en avril. Les chemins con<strong>du</strong>isant à la mer <strong>et</strong> aux marbrières,sont aussi devenus plus commodes ; <strong>et</strong> par conséquent les fumiers meilleurs <strong>et</strong> plus faciles à transporter. [r<strong>et</strong>our][2] Sigebert, roi d'Ostrasie s'était emparé de <strong>Cherbourg</strong>, mais Théodebert, fils de Chilpéric, le reprit en 577. [r<strong>et</strong>our][3] Voir plus loin : Chapelle S.t-Sauveur.[r<strong>et</strong>our][4] Leur devise était : Semper fui conservatrix. [r<strong>et</strong>our][5] Lieutenant-général <strong>du</strong> roi en Normandie, prince de Montargue, comte de Thorigny, <strong>et</strong>c. [r<strong>et</strong>our][6] Lieutenant <strong>du</strong> roi <strong>et</strong> auteur d'un ouvrage intitulé : la Fortune des gens de Qualité.[r<strong>et</strong>our][7] On ne conserve que deux tours, celle des Sarrasins <strong>et</strong> celle de l'église.[r<strong>et</strong>our][8] Le Soleil-Royal de 120 canons, l'Admirable <strong>et</strong> le Triomphant. [r<strong>et</strong>our][9] La société académique de <strong>Cherbourg</strong>, ne se composait d'abord que de six membres ; ce nombre fut ensuite porté à vingt-quatre,tel qu'il est aujourd'hui, non compris les associés correspondants. — Elle s'occupe de littérature, de sciences <strong>et</strong> d'agriculture ; lesréunions ont lieu le premier jeudi de chaque mois, <strong>et</strong> il y a tous les ans une séance publique dans le mois de novembre. Un <strong>nouveau</strong>volume de Mémoires est sous presse. [r<strong>et</strong>our][10] Il fut enterré dans le cim<strong>et</strong>ière d'Urville ; on y voyait encore sa tombe il n'y a pas long-temps. [r<strong>et</strong>our][11] Ce magistrat s'était attiré la haine <strong>du</strong> peuple par sa trop grande sévérité. Il s'enfuit à Valognes, caché sous la paille d'unecharr<strong>et</strong>te. [r<strong>et</strong>our]


[12] Le représentant <strong>du</strong> peuple, Lecarpentier, était né à Helleville, canton des Pieux, arrondissement de <strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][13] Le Puits d'Enfer, entre les numéros 13 <strong>et</strong> 15 de la rue <strong>du</strong> Château. [r<strong>et</strong>our][14] C<strong>et</strong> espace compris sous le nom de Mielles a été ven<strong>du</strong> dans les années 1826 — 1828. Il n'a pas tardé à se couvrir de maisons<strong>et</strong> de jardins extrêmement fertiles. Les découvertes qu'on y a faites d'une ancienne chapelle de la Madeleine à quelque distance <strong>du</strong>rivage, d'un grand nombre de médailles, de figurines en terre cuite, d'un puits, des ruines d'une maison, ne perm<strong>et</strong>tent pas de douterque ce terrain n'ait été autrefois couvert accidentellement par la mer qui l'abandonne aujourd'hui pour se porter dans les baies de Sainte-Anne <strong>et</strong> de Br<strong>et</strong>teville.La maison était un rectangle de 9 mètres sur 7 ; les obj<strong>et</strong>s qu'on a trouvés aux <strong>environs</strong> étaient épars, <strong>et</strong> les médailles les plusrapprochées de nous, celles de Constantin, ce qui ferait penser que c<strong>et</strong>te submersion eut lieu à la suite d'une tempête vers lecommencement <strong>du</strong> 4 e siècle, lorsque les Romains occupaient encore notre presqu'île.M. de Gerville prétend avoir reconnu dans c<strong>et</strong>te plaine les restes d'une ville, Coriallum <strong>et</strong> de deux voies romaines, l'une d'Alauna(près de Valognes), à Coriallum, <strong>et</strong> l'autre de <strong>Cherbourg</strong> à Coutances. M. Asselin qui avait fait une notice sur l'habitation romaine dontnous venons de parler, a répon<strong>du</strong> qu'il n'y a jamais eu de voies romaines dans les Mielles <strong>et</strong> que Coriallum n'est autre chose que<strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][15] Voyez les notes à la fin de l'ouvrage. [r<strong>et</strong>our][16] Chantereyne, histoire manuscrite de <strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][17] Voyez plus loin, Phare de Barflenr. [r<strong>et</strong>our][18] Voyez plus loin, Chapelle <strong>du</strong> Voeu.[r<strong>et</strong>our][19] Il creva un jour les yeux de son filleul pour le punir d'une faute légère ; il faisait empaler les hommes <strong>et</strong> même les femmes dont ilcroyait avoir à se plaindre. [r<strong>et</strong>our][20] Histoire civile <strong>et</strong> religieuse de <strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][21] Probablement celui dont l'épitaphe se trouve encore dans l'église de <strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][22] L'auteur <strong>du</strong> Journal se trompe un peu ; l'archevêque de Valence a été d'abord con<strong>du</strong>it à Granville, où il était resté quelque tempsprisonnier sous la surveillance des évêques de Coutances. [r<strong>et</strong>our][23] Voyez page 30. [r<strong>et</strong>our][24] L'abbé Demons. [r<strong>et</strong>our][25] L'abbé Demons. [r<strong>et</strong>our][26] Voyez Notes sur les Iles Anglai<strong>ses</strong>, par M. Couppey, Ann. 1834. [r<strong>et</strong>our][27] Chantereyne, histoire manuscrite de <strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][28] Galia Christiana, XI. [r<strong>et</strong>our][29] C<strong>et</strong>te confrérie existait bien avant c<strong>et</strong>te époque, comme l'atteste un contrat passé le jour S.t-Thomas de l'an 1200, devantGuillaume de Tollevast, tabellion à <strong>Cherbourg</strong>, par lequel Guillaume de Martinvast <strong>et</strong> sa femme donnent à la confrérie de Notre-Dame 4sols tournois de rente, sur une maison située rue Onfroy (de la Vase), à <strong>Cherbourg</strong>, pour être reçus tous deux frères, <strong>et</strong> participer auxbienfaits de c<strong>et</strong>te confrérie. [r<strong>et</strong>our][30] Voir page 67 <strong>et</strong> suiv. [r<strong>et</strong>our][31] Voir page 67 <strong>et</strong> suiv. [r<strong>et</strong>our][32] M. A. DE BERRUYER.[r<strong>et</strong>our]


[33] Toustaint de Billy, hist. manuscrite <strong>du</strong> Cotentin. [r<strong>et</strong>our][34] « Ici reposent les restes des pieux prêtres François La Galle <strong>et</strong> Guillaume Cosme, lesquels ont donné la plus grande partie deleur fortune à la ville <strong>et</strong> à c<strong>et</strong>te église, l'un pour l'é<strong>du</strong>cation de la jeunesse, l'autre pour l'entr<strong>et</strong>ien de l'orgue. Tous deux sous condition deprières annuelles. Le premier est mort le 23 octobre 1657 ; le second, le 19 avril 1659.Qu'ils reposent en paix. » [r<strong>et</strong>our][35] NAGEREL, Chronique de Normandie. [r<strong>et</strong>our][36] M. DE BERRUYER.[r<strong>et</strong>our][37] CHANTEREYNE.[r<strong>et</strong>our][38] VOISIN-LA-HOUGUE ; CHANTEREYNE écrit Corberi. [r<strong>et</strong>our][39] V. Histoire religieuse de Normandie, <strong>et</strong>, dans l'Annuaire de la Manche, un article de M. Couppey, intitulé Fragments de l'Histoiremerveilleuse <strong>du</strong> département de la Manche. [r<strong>et</strong>our][40] Claude Léger, curé de St.-André-des-Arts, à Paris. Ce fut le premier exemple d'un évêque faisant l'éloge funèbre d'un simpleprêtre. [r<strong>et</strong>our][41] Ici repose Le Fillastre, qui fut autrefois la gloire de sa famille, l'honneur de la sainte religion, qui pendant sa vie fit rejaillir sur <strong>ses</strong>compagnons la renommée de <strong>ses</strong> moeurs, qui gouverna si bien toutes les affaires de sa communauté, qui fut l'hôte chéri <strong>et</strong> préféré desétrangers, <strong>et</strong> ne manqua jamais cependant à <strong>ses</strong> chers concitoyens ! O destin ! destin déplorable pour tous ceux qui s'intéressent à lavertu <strong>et</strong> à la bonne foi. Tu te tais seule, Atropos, <strong>et</strong> tu ne lui donnes pas d'éloges, envieuse, car tu fus le seul être de l'univers qui n'ait pujouir de <strong>ses</strong> bienfaits. [r<strong>et</strong>our][42] DEMONS, Mémoire manuscrit sur l'Abbaye <strong>du</strong> Voeu.[r<strong>et</strong>our][43] GUIDE DU VOYAGEUR A CHERBOURG.[r<strong>et</strong>our][44] Voir plus loin, FORTS ET REDOUTES.[r<strong>et</strong>our][45] Voyez dans les Martyrs de Châteaubriand, le bel épisode de Velleda.[r<strong>et</strong>our][46] Vie <strong>du</strong> bienheureux Barthélemy Picquerey, par TRIGAN, curé de Digoville, imprimée à la suite de celle de M. Pâté. —CHANTEREYNE, histoire manuscrite de <strong>Cherbourg</strong>.[r<strong>et</strong>our][47] Vie <strong>du</strong> bienheureux Barthélemy Picquerey, par TRIGAN, curé de Digoville, imprimée à la suite de celle de M. Pâté. —CHANTEREYNE, histoire manuscrite de <strong>Cherbourg</strong>.[r<strong>et</strong>our][48] Voir page 25. [r<strong>et</strong>our][49] Nous ferons exception pour la jolie maison chinoise qui longe la promenade <strong>du</strong> Roule. C<strong>et</strong>te charmante habitation dont laposition est des plus pittoresques, <strong>et</strong> que de fort beaux jardins environnent, a long-temps appartenu à M. le baron Cachin, inspecteurgénéraldes ponts <strong>et</strong> chaussées ; elle est aujourd'hui la propriété de M. Marie. [r<strong>et</strong>our][50] Statuts <strong>et</strong> réglements. [r<strong>et</strong>our][51] Discours prononcé par M. Noël-Agnès, à l'occasion de l'inauguration <strong>du</strong> Musée-Henry.[r<strong>et</strong>our][52] La maison où est né Thomas HENRY se voit encore rue <strong>du</strong> Faubourg, N.° 42 ; la ville y a fait apposer une plaque de marbre noirportant c<strong>et</strong>te inscription : Ici naquit, en 1766, Thomas HENRY, donateur <strong>du</strong> Musée de <strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][53] Lieu cité. [r<strong>et</strong>our][54] Les figures sont de GÉRARD DE LAIRESSE.[r<strong>et</strong>our]


[55] idem. Jean LINGELBACH.[r<strong>et</strong>our][56] La Chasse au cerf est d'Edouard SWEBACH.[r<strong>et</strong>our][57] Le Berger <strong>et</strong> le Troupeau sont d'Eustache-François DUVAL.[r<strong>et</strong>our][58] Les figures sont de E.-F. DUVAL.[r<strong>et</strong>our][59] idem. LE SUEUR.[r<strong>et</strong>our][60] Les figures sont de N. POUSSIN.[r<strong>et</strong>our][61] L'original de c<strong>et</strong> ouvrage est déposé dans les archives de la société académique. [r<strong>et</strong>our][62] C<strong>et</strong>te chronique a été publiée par J. Nagerel à Rouen 1581, 1610, Le Mégissier. [r<strong>et</strong>our][63] Le plan qu'on a suivi dans c<strong>et</strong>te construction est très-différent de celui qui avait été proposé par M. Le Sauvage, architecte de laville. [r<strong>et</strong>our][64] Voyez page 29. [r<strong>et</strong>our][65] Notre impartialité nous fait un devoir de dire que Matignon s'opposa de toutes <strong>ses</strong> forces à ce que les massacres qui suivirent laS.t-Barthélemy dans les provinces, s'étendissent jusqu'en Basse-Normandie. Les protestants d'Alençon, de S.t-Lo <strong>et</strong> de Valognes ne<strong>du</strong>rent leur salut qu'à sa généreuse intervention. [r<strong>et</strong>our][66] Séance <strong>du</strong> 23 Mars 1833. [r<strong>et</strong>our][67] Il y eut encore autrefois un cim<strong>et</strong>ière près de la chapelle Saint-Thomas, <strong>et</strong> l'Hôpital de la marine (V. ce mot) possède aussi lesien. [r<strong>et</strong>our][68] Ce chiffre ne comprend pas celles que l'établissement confectionne <strong>et</strong> fournit aux pauvres moyennant 12 c. 1/2 par soupe.Chaque hiver beaucoup de personnes charitables s'abonnent pour un certain nombre de cartes à soupe qu'elles distribuent ensuite àdes familles indigentes. Elles ont ainsi la certitude d'être véritablement utiles <strong>et</strong> de ne secourir que des malheureux que le besoin seulforce à demander l'aumône. [r<strong>et</strong>our][69] Les mauvais temps avaient obligé le général Bertrand, qui se rendait en Amérique, accompagné d'un de <strong>ses</strong> fils, à relâcher dansnotre port ; il y resta plus d'un mois. [r<strong>et</strong>our][70] Voyez plus loin Forts <strong>et</strong> Redoutes.[r<strong>et</strong>our][71] La hauteur <strong>du</strong> Roule a son somm<strong>et</strong> à 108 m. 25 c. au-dessus des quais de l'avant-port de commerce ; celle de la Fauconnière à95 m. 90 c., <strong>et</strong> celle de S.t-Sauveur à 68 m. 60 c. [r<strong>et</strong>our][72] C<strong>et</strong>te hauteur doit son nom à d'anciennes fourches patibulaires qui y étaient établies. [r<strong>et</strong>our][73] Ce fait nous paraît prouvé, de la manière la plus péremptoire, par M. Asselin, dans <strong>ses</strong> Détails historiques sur l'ancien port de<strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][74] Histoire civile <strong>et</strong> religieuse de la ville de <strong>Cherbourg</strong>, par M. Demons (ms). [r<strong>et</strong>our][75] M. Asselin écrivait ceci en 1826. [r<strong>et</strong>our][76] Ce n'est que depuis quelques années que le terrain compris entre le bassin <strong>et</strong> le faubourg <strong>du</strong> Cauchin, où passaientanciennement ces rivières, a été exhaussé. Il s'y était formé un vaste marais, dont les exhalaisons putrides occasionnaient fréquemmentdes fièvres épidémiques. [r<strong>et</strong>our][77] C'est <strong>du</strong> moins ce qu'avancent les divers historiens de <strong>Cherbourg</strong> ; mais il serait plus juste de dire que les ouvrages avaientacquis le degré d'avancement auquel on voulait sans doute alors les porter, car il n'y avait encore, en 1758, qu'une partie de la j<strong>et</strong>ée del'Est d'exécutée, <strong>et</strong> la naissance seulement de celle de l'Ouest. L'avant-port loin d'être entouré de murs de quai n'en possédait que <strong>du</strong>


côté de l'Est. [r<strong>et</strong>our][78] Il faut en excepter une portion des murs de quai <strong>du</strong> bassin, sur 117 m. de longueur, qui n'était pas encore terminée <strong>et</strong> qu'on ditaux Anglais devoir être démolie. [r<strong>et</strong>our][79] Les historiens de <strong>Cherbourg</strong> varient sur le nombre des navires brûlés. On en porte la perte, y compris celle des bois, cordages,<strong>et</strong>c., à 373,536 fr. [r<strong>et</strong>our][80] Ces portes <strong>et</strong> ce pont furent placés en 1775. [r<strong>et</strong>our][81] Le radier de l'écluse n'avait point été attaqué par les mines ; mais lors de la reconstruction des bajoyers on s'aperçut qu'on ne luiavait pas donné une épaisseur suffisante, <strong>et</strong> qu'il s'était arqué de 15 pouces sur son axe ; on se décida donc à le refaire en entier.[r<strong>et</strong>our][82] Le pavage de la partie ancienne <strong>du</strong> bassin a été entrepris en 1820, <strong>et</strong> celui de la partie neuve en 1833. [r<strong>et</strong>our][83] Ce mur avait été construit en l'an XI. L'achèvement <strong>du</strong> bassin avait alors pour but de faciliter le transport à bord des bateaux, dela pierre destinée à l'exhaussement de la Digue. Un ordre ministériel fit suspendre <strong>et</strong> ajourner indéfiniment les travaux entrepris. [r<strong>et</strong>our][84] Ces animacules piquent le bois, s'intro<strong>du</strong>isent entre <strong>ses</strong> fibres, <strong>et</strong> telle est leur activité, qu'en très-peu de temps il forment unvéritable crible, de la pièce la plus forte <strong>et</strong> la plus résistante. [r<strong>et</strong>our][85] Les précédentes avaient été placées en 1802. [r<strong>et</strong>our][86] Le mécanisme intérieur diffère seul. [r<strong>et</strong>our][87] Un aque<strong>du</strong>c, construit il y a quelques années, con<strong>du</strong>it aussi dans la R<strong>et</strong>enue les eaux de la ville. [r<strong>et</strong>our][88] Un massif de maçonnerie ou <strong>guide</strong>-eau dirige le torrent vers le col de la passe ; sans cela il courrait parallèlement au mur de quailatéral, <strong>et</strong> irait battre la tête de l'avant-port. [r<strong>et</strong>our][89] Un décr<strong>et</strong> impérial de 1811, ayant concédé à la ville les terrains situés sur la plage, en avant de la place d'Armes, elle va s<strong>et</strong>rouver en pos<strong>ses</strong>sion de la portion conquise sur la mer. — plus de 18,000 m. superficiels — il est vrai que l'établissement <strong>du</strong> mur desoutènement sera à sa charge sur 205 m. de longueur, mais il n'en résultera qu'une dépense d'environ 35,000 fr., que les avantagesqu'elle doit r<strong>et</strong>irer de c<strong>et</strong>te disposition couvriront bien au-delà. [r<strong>et</strong>our][90] Lors de l'adjudication, c<strong>et</strong>te estimation a subi un rabais de 22 1/2 p. %.[r<strong>et</strong>our][91] C'est au point, qu'au dire proverbial des marins, un aveugle y entrerait.[r<strong>et</strong>our][92] Le commerce des mul<strong>et</strong>s que l'on embarque à <strong>Cherbourg</strong> pour les Colonies devient chaque jour moins considérable <strong>et</strong> il ne s'yfait aucun armement pour la pêche de la baleine ni pour celle de la morue. « Mais il ne faut pas juger de l'importance <strong>du</strong> port par soncommerce local, ce serait comm<strong>et</strong>tre une grave erreur, dit le rapport de la commission chargée de l'examen <strong>du</strong> proj<strong>et</strong> de loi surl'amélioration des ports, son amélioration doit avoir lieu bien plus en considération de l'intérêt général qu'en vue de l'intérêt particulier dela ville ou des localités circonvoisines. Le port de <strong>Cherbourg</strong>, par sa position avancée dans la Manche, est en eff<strong>et</strong> un lieu de refuge dela plus haute importance pour le commerce <strong>du</strong> Havre, <strong>et</strong> même pour toutes les marines étrangères qui traversent la Manche. » [r<strong>et</strong>our][93] Trois permissions sont nécessaires au voyageur qui désire visiter les forts, les établissements de la Marine, tant à terre qu'enrade, <strong>et</strong> les bâtiments non armés. Pour la première, il s'adressera au commandant de la place de <strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> pour les deux autres, aubureaux de la majorité <strong>et</strong> des mouvements <strong>du</strong> port, situés dans le vieil arsenal. [r<strong>et</strong>our][94] Mémoire sur la Digue de <strong>Cherbourg</strong>, comparée au Breakwater ou j<strong>et</strong>ée de Plymouth ; par S.-M.-F. Cachin, inspecteur généraldes ponts <strong>et</strong> chaussées. [r<strong>et</strong>our][95] Et non à 400 comme cela a été dit plusieurs fois. On était alors au milieu de l'hiver, saison pendant laquelle les travaux perdentleur activité, <strong>et</strong> une partie des ouvriers étaient descen<strong>du</strong>s la veille pour la récolte des varechs, qui devait avoir lieu à Tourlaville. [r<strong>et</strong>our][96] V. les notes à la fin <strong>du</strong> volume. [r<strong>et</strong>our][97] Très-p<strong>et</strong>ites pierres mélangées <strong>du</strong> mortier. [r<strong>et</strong>our]


[98] Dans le principe on plaçait trois lignes de ces cais<strong>ses</strong> ; aujourd'hui on se contente d'une seule ligne. [r<strong>et</strong>our][99] Ce jeune <strong>et</strong> habile ingénieur, qui a longtemps été attaché au port de <strong>Cherbourg</strong>, est maintenant chargé de la direction destravaux <strong>du</strong> chemin de fer de Paris au Havre. [r<strong>et</strong>our][100] Nous n'eussions pu, sans dépasser les bornes de notre ouvrage, conserver à tous ces passages leur textualité rigoureuse ;c'est pourquoi, en comparant les textes, on remarquerait des phra<strong>ses</strong> tronquées ou même des paragraphes tout entiers résumés parquelques mots. [r<strong>et</strong>our][101] Rapport de la commission nommée pour l'examen des travaux de <strong>Cherbourg</strong>, conformément à la loi <strong>du</strong> 1 er août 1792. (ms.)[r<strong>et</strong>our][102] M. VÉRUSMOR. Phare de la Manche <strong>du</strong> 11 Mars 1838. [r<strong>et</strong>our][103] Une des broches en fer employée à c<strong>et</strong>te opération a même encore été trouvée dans l'emplacement <strong>du</strong> port actuel. [r<strong>et</strong>our][104] M. le capitaine SAVARY. Notions sur la rade de <strong>Cherbourg</strong>, sur le Port-Bonaparte <strong>et</strong> sur leurs accessoires. [r<strong>et</strong>our][105] Tant que l'avant-port communiqua avec la mer, les travaux d'exploitation ne purent avoir qu'une faible activité. Les ouvrierstravaillaient dans l'eau <strong>et</strong> dans la boue ; encore fallait-il attendre que le reflux eût laissé les carrières à découvert <strong>et</strong> procéder à desépuisements qui prenaient la meilleure part <strong>du</strong> peu de temps que l'on avait devant soi. On se hâta d'environner de murs de quai l'espacedestiné au bassin, mais ces murs étaient partout fondés sur le rocher, <strong>et</strong> souvent l'on était forcé de descendre à de grandes profondeurs.Les obstacles s'aggravèrent lorsqu'il fut question de construire les deux môles qui forment le chenal : même dans les plus bas<strong>ses</strong> mersde vives-eaux d'équinoxe, le sol sur lequel devaient reposer les fondements de la maçonnerie était recouvert de 5 à 6 mètres d'eau. Oneut recours à des moyens extraordinaires : un encaissement en charpente, de 24 m. de largeur <strong>et</strong> d'une longueur égale audéveloppement des môles, fut placé de chaque côté de la passe <strong>et</strong> rempli de mortier-béton jusqu'au niveau des bas<strong>ses</strong> mers de viveseaux.Ce fut sur c<strong>et</strong>te masse devenue consistante que l'on s'établit. — Après la mise en place <strong>du</strong> batardeau, l'extraction de la pierre,quoique plus facile <strong>et</strong> plus prompte, n'était néanmoins pas sans difficultés. Les pluies, les filtrations à travers les bancs de rocher, unefiltration considérable dans le barrage, occasionnèrent des embarras que les épuisements ne parvenaient pas toujours à maîtriser. On yobvia en partie, en creusant un vaste réservoir, où les eaux se rendaient de toutes parts, <strong>et</strong> qu'on asséchait à mer basse au moyend'aque<strong>du</strong>cs pratiqués dans l'intérieur des môles ; puis vint l'emploi des pompes à feu. [r<strong>et</strong>our][106] Telle est en eff<strong>et</strong> la profondeur verticale de l'avant-port, à partir de l'arrêté des quais ; mais l'eau ne s'y élève jamais à plus de16 m. 25. [r<strong>et</strong>our][107] C<strong>et</strong>te irrégularité dans la largeur provient des deux pans coupés placés aux angles S.-E. <strong>et</strong> N.-E. [r<strong>et</strong>our][108] P.-A. LAIR, Description de l'ouverture de l'avant-port de <strong>Cherbourg</strong>. [r<strong>et</strong>our][109] Et non vers les derniers temps de l'empire comme le dit M. de Berruyer. C'est même au printemps de l'an XII que fut entreprise,sur 136 m. de longueur, la construction des murs de quai qui forment l'angle N.-O. Nous voyons qu'en 1812 le bassin était bordé demurs de quai au S. <strong>et</strong> à l'O. [r<strong>et</strong>our][110] Il n'y avait pas en ce moment de ministre de la Marine. [r<strong>et</strong>our][111] La largeur de ce bassin a en eff<strong>et</strong> été arrêtée à 180 m ; mais l'on a tout lieu d'espérer qu'elle sera portée à 200 m. ; telle qu'elleest cotée sur les <strong>nouveau</strong>x plans. [r<strong>et</strong>our][112] C<strong>et</strong>te gare aura 217 m. 30 de longueur <strong>et</strong> 50 m. de largeur. Elle communiquera avec la mer par une écluse aboutissant dans lefossé <strong>du</strong> fort <strong>du</strong> Homm<strong>et</strong>. Le détail estimatif s'élève à la somme de 844,496 f. 23. [r<strong>et</strong>our][113] Un bal fut donné dans ce local au dauphin, lors de son voyage à <strong>Cherbourg</strong> en août 1829. Louis-Philippe <strong>et</strong> sa famille y ontdîné plusieurs fois. C'est là que se font les élections pour la députation. [r<strong>et</strong>our][114] C<strong>et</strong>te espèce de formes couvertes pour le radoub <strong>et</strong> la construction des vaisseaux, n'est plus en usage. Elles avaient le graveinconvénient de concentrer <strong>et</strong> d'entr<strong>et</strong>enir l'humidité, ce qui occasionnait la détérioration rapide des bois. Les cales couvertes, dans legenre de celles qui existent au S. de l'avant-port, sont regardées comme préférables. [r<strong>et</strong>our][115] L'insuffisance des fontaines, établies dans la ville se fesant de plus en plus sentir, l'administration municipale consulta M.Héricart de Thury, pour savoir s'il n'y aurait pas possibilité d'y suppléer par des puits artésiens. La réponse de ce savant, qui avait prisconnaissance de la constitution géologique de la localité, ne laissa aucun espoir à c<strong>et</strong> égard ; ce fut alors que l'on pensa à utiliser la


portion de con<strong>du</strong>ite anciennement exécutée. [r<strong>et</strong>our][116] Les rayons lumineux <strong>du</strong> <strong>nouveau</strong> phare ne s'étendent, il est vrai, qu'à neuf lieues. Ce n'est pas la moitié de la distance deBarfleur au Havre, mais les feux de la Hève, places sur le haut d'une falaise, sont soutenus par deux tours à la hauteur de 136 mètres,de sorte que lorsque ces feux disparaissent, ceux de Barfleur ne tardent pas à se montrer à l'horizon. [r<strong>et</strong>our][117] Ratrou II, comte de Perche, parvenu à se sauver, alla fonder, en 1112, l'abbaye de la Trappe, pour accomplir un voeu qu'ilavait fait dans le danger. DUBOIS, Histoire de la Trappe.[r<strong>et</strong>our][118] Le moulin de Quincampoix est très ancien. Il appartenait au domaine de S.t-Louis <strong>et</strong> était alors loué 32 livres, comme on le voitdans une charte donnée par ce prince à <strong>Cherbourg</strong> en 1278, où il rem<strong>et</strong> aux habitants les amendes qu'ils ont encourues en n'y envoyantpas moudre leur blé. (Chartrier de l'abbaye de <strong>Cherbourg</strong>.)[r<strong>et</strong>our][119] MM. DE GERVILLE,Mémoires sur les pierres druidiques <strong>du</strong> département de la Manche (I er vol. des Archives de la Normandie. —LE FILLASTRE, Description des monuments druidiques, <strong>et</strong>c. (Annuaire de la Manche 1833 <strong>et</strong> 1835) — L. RAGONDE, Description d'untemène, <strong>et</strong>c. (Mémoires de la Société royale académique de <strong>Cherbourg</strong>, I.) — AUG. AASSELIN : Mémoire sur le temple Gaulois deKerqueville, ibid.[r<strong>et</strong>our][120] Dans son ouvrage sur les Villes <strong>et</strong> Voies romaines de la Basse-Normandie, qui vient d'être imprimé, le savant antiquaire appuieson opinion par une remarque assez singulière. On a, dit-il, découvert dans la Mielle un grand nombre d'antiquités romaines, <strong>et</strong> l'on n'ajamais rien trouvé de l'autre côté de la rivière, <strong>et</strong> notamment dans les fondations de la prison <strong>et</strong> des halles. C<strong>et</strong>te objection tombe d'ellemême,<strong>et</strong> M. de Gerville en l'écrivant ne s'est pas donné la peine de réfléchir, car il sait mieux que personne que l'espace occupé par laprison <strong>et</strong> la halle de <strong>Cherbourg</strong>, était couvert par la mer à l'époque romaine, <strong>et</strong> ne peut par conséquent contenir d'antiques de c<strong>et</strong>teépoque. [r<strong>et</strong>our][121] Consulter pour plus de détails les ouvrages suivants : Des villes <strong>et</strong> voies romaines en Basse-Normandie, <strong>et</strong>c., par M. deGERVILLE ; Voies romaines dans le département de la Manche, par M. Ragonde (Annuaire de la Manche, 1830-1831). — Mémoires del'académie des Inscriptions, XVI, in-4°, 121. — Note de M. Duchevreuil sur quelques obj<strong>et</strong>s antiques découverts à Digulleville.(Mémoires de la société des Antiquaires de Normandie, I., p. 50). — Notice sur les restes d'une habitation romaine dans la Mielle de<strong>Cherbourg</strong>, <strong>et</strong> sur d'autres antiquités trouvées de nos jours dans les arrondissements de <strong>Cherbourg</strong> <strong>et</strong> de Valognes, par M. Aug. Asselin(dans les Mémoires de l'académie de <strong>Cherbourg</strong>, 1838, <strong>et</strong> à part) <strong>et</strong> Supplément à la précédente notice, 1830 ; puis, pour quelquesfouilles faites à Alleaume, par M. de Foucault, les Antiquités de Caylus.[r<strong>et</strong>our][122] Nous avons pour les plantes marines conservé la classification suivie par M. Delachapelle, dans sa Description succinte desThalassiophytes des <strong>environs</strong> de <strong>Cherbourg</strong>, imprimées dans les Mémoires de la société académique de <strong>Cherbourg</strong>, années 1833-35-38, où nous renvoyons ceux de nos lecteurs qui voudraient de plus longs détails sur ce suj<strong>et</strong>. [r<strong>et</strong>our][123] Nous donnons à chaque commune le nombre d'hectares de terres labourées qu'elle contient. — Il est inutile sans douted'avertir que le myriamètre équivaut à peu près à 2 lieues <strong>et</strong> demie de 2,000 toi<strong>ses</strong>, <strong>et</strong> que le kilomètre, qui en est la dixième partie, vautà peu près un quart de lieue de poste. [r<strong>et</strong>our][124] V. les notes à la fin de l'ouvrage. [r<strong>et</strong>our][125] Voyez pages 87, 88, 1. re partie. [r<strong>et</strong>our][126] Lait-Heu (light height) hauteur à lumière ; Jard-Heu (jarred height), hauteur disputée ; Tranchd-Heu (tranched height) hauteurr<strong>et</strong>ranchée. [r<strong>et</strong>our][127] Voyez page 35 <strong>et</strong> suivantes 1. re partie. [r<strong>et</strong>our][128] V. page 9, 2 e partie. [r<strong>et</strong>our][129] Tous les monuments druidiques qui sont indiqués dans c<strong>et</strong>te liste des communes ont été décrits à l'article ANTIQUITÉSCELTIQUES, où le lecteur devral es aller chercher. [r<strong>et</strong>our][130] Tout ce que nous dirons des villoe données à Judith est extrait d'un article fort curieux de M. COUPPEY, inséré dans l'Annuairede la Manche, année 1838. [r<strong>et</strong>our][131] Mémoires de la société des Antiquaires de Normandie 1834, 1. re partie. [r<strong>et</strong>our][132] Loco citato. [r<strong>et</strong>our]


[133] L'histoire des deux amants se trouve racontée au long dans un ouvrage imprimé à Rouen en 1700, sous le titre Histoir<strong>et</strong>ragique de notre temps, par de Ross<strong>et</strong>. V. aussi les articles que nous avons cités. [r<strong>et</strong>our][134] Voyez Phare de Barfleur, 1. re partie. [r<strong>et</strong>our][135] Voyez Phare de Barfleur, 1 re partie. [r<strong>et</strong>our][136] Gallia Christiana, XI. — Les frères de la Providence ou Sach<strong>et</strong>s ainsi nommés <strong>du</strong> sac qu'ils portaient, avaient été fondés àMarseille en 1250, sous la protection de Louis IX. C<strong>et</strong> ordre avait trois maisons en Normandie ; il <strong>du</strong>ra peu de temps <strong>et</strong> fut réuni auxAugustins. [r<strong>et</strong>our][137] On remarque dans la cour des colonnes qui, d'après M. de Gerville, datent <strong>du</strong> XI siècle. [r<strong>et</strong>our][138] M. de GERVILLE. Anciens châteaux <strong>du</strong> département de la Manche. [r<strong>et</strong>our][139] Jean-Baptiste Gardin-Dumesnil est né en 1720. Ses études terminées, il fut d'abord appelé au collège de Lieux commeprofesseur, puis au collège d'Harcourt où il enseigna la rhétorique. En 1765, lors de la suppression des Jésuites, on le nomma principal<strong>du</strong> collège Louis-le-Grand, fonctions qu'il ne cessa d'exercer qu'en se r<strong>et</strong>irant de l'enseignement. De r<strong>et</strong>our à Saint-Cyr, il fonda, <strong>du</strong>pro<strong>du</strong>it de <strong>ses</strong> épargnes, une école gratuite pour les jeunes gens ; mais c<strong>et</strong> établissement, obj<strong>et</strong> de toute sa sollicitude, ne fut pas delongue <strong>du</strong>rée ; à peine commençait-il à prospérer, que les troubles de la révolution survinrent <strong>et</strong> le ruinèrent. L'abbé Gardin s'expatria <strong>et</strong>ne rentra en France qu'après plusieurs années d'exil. Il mourut dans son village en 1802, à l'âge de 82 ans — La première édition desSynonymes latins parut en 1777 ; il en fut publié une seconde, revue <strong>et</strong> augmentée par l'auteur, en 1788. [r<strong>et</strong>our][140] En l'an 1086, Richard de Vernon inféoda à un chevalier appelé Guillaume, une partie des terres <strong>et</strong> forêts de Néhou. Un desdescendants de celui-ci inféoda à son tour, en 1252, la portion de <strong>ses</strong> domaines connus depuis lors sous le nom de la Roquelle, <strong>et</strong> où sevoient les ruines d'un vaste <strong>et</strong> beau château, que le concessionnaire fit bâtir. C<strong>et</strong> édifice exigerait de dispendieu<strong>ses</strong> réparations pour êtreremis en état ; mais sa situation au fond d'une forêt, dans un lieu presque désert <strong>et</strong> sans routes praticables, ne perm<strong>et</strong> pas de penserque son propriétaire, quelque amateur des constructions <strong>du</strong> moyen-âge qu'il puisse être, songe jamais à les entreprendre. Une voieromaine partant de <strong>Cherbourg</strong> pour aller à Coutances, passait à la Roquelle, où un chemin porte encore le nom de rue Coutances. Desmédailles romaines, des fragments de javelots, une espèce de poignard, des pointes en métal, des meules concaves <strong>et</strong> convexes <strong>et</strong>autres débris, ont été trouvés en défrichant dans la partie méridionale <strong>du</strong> bois de c<strong>et</strong>te paroisse. [r<strong>et</strong>our][141] C<strong>et</strong> ouvrage, écrit avec conscience <strong>et</strong> talent, renferme plusieurs faits fort curieux ; <strong>et</strong> si le lecteur fait jamais le voyage deNéhou, nous lui conseillons de se le procurer. Il a été imprimé en 1835, <strong>et</strong> se vend à Néhou dans les maisons qui avoisinent l'église.[r<strong>et</strong>our][142] Telle est une des principales traditions ; une autre, non moins répan<strong>du</strong>e, a fait le suj<strong>et</strong> d'une nouvelle publiée dans le Journal de<strong>Cherbourg</strong> <strong>du</strong> 1 er octobre 1837. [r<strong>et</strong>our][143] Journal de l'arrondissement de Valognes. [r<strong>et</strong>our][144] M. de GERVILLE. Anciens châteaux de la Normandie. [r<strong>et</strong>our][145] Au nombre de ces canons était le Gros-Robin, pièce monstrueuse dont le souvenir s'est long-temps conservé à <strong>Cherbourg</strong>.[r<strong>et</strong>our][146] Nous renvoyons ceux de nos lecteurs, qui désireraient de plus amples détails sur le vieux Valognes, à l'excellente notice queles Archives de la Normandie ont repro<strong>du</strong>ite <strong>du</strong> Dictionnaire universel de la France, par Robert de Hesselin, tome VI e , page 244 <strong>et</strong>suivantes. [r<strong>et</strong>our][147] Voir la Notice dont il est question dans la note précédente. [r<strong>et</strong>our][148] M. VÉRUSMOR. Annuaire de la Manche 1839. [r<strong>et</strong>our]

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