CR<strong>É</strong>ER DES EMPLOIS DANS LES TERRITOIRES• attirer les étudiants par des formations plus professionnalisantes,un encadrement plus proche et plussoucieux de leur réussite, une proximité avec le mondeprofessionnel ;• attirer les chercheurs de haut niveau par des équipementsperformants, un soutien sur leurs thématiques etpar une qualité de vie qui n’est pas (ou plus) celle desgrandes métropoles ;• jouer l’insertion dans des réseaux universitaires, nonseulement au niveau régional (PRES), mais aussi auniveau interrégional ou/et au niveau international.Participant nous-mêmes à des travaux de ce type,notamment avec les collectivités du Sud Aquitain, nouspouvons noter la transformation des esprits tant dans lemonde des collectivités territoriales que dans le mondeacadémique et, malgré les difficultés, la naissance d’unevolonté de co-construction de stratégies qui prennent encompte le rôle accru des universités dans le développementéconomique du territoire. Ce chemin n’est pourtantpas exempt de difficultés, et nous voudrionsconclure en en mentionnant certaines.CONCLUSION : LA DIFFICILE CONSTRUCTIONDES STRAT<strong>É</strong>GIES TERRITORIALESPlus la question de la revitalisation économique des territoiressera traitée « à froid », dans le cadre d’une stratégied’anticipation construite avec tous les acteurs duterritoire, plus grande, selon nous, sera l’importance duvolet « Enseignement supérieur-recherche » (ESR). Laconstruction des avantages distinctifs du territoire surcertaines thématiques attractives à la fois pour desentreprises et pour des chercheurs, sa (nécessaire) flexibilitééconomique (qui suppose une flexibilité suffisantede la main-d’œuvre, et donc des capacités de formation)passent, en effet, par un travail partenarial desreprésentants du territoire avec l’ESR. Certaines villesmoyennes l’ont bien compris et mettent en place,comme Albi, un conseil de site animé par la communautéd’agglomération qui associe non seulement lescollectivités territoriales et les représentants de l’ESR,mais aussi les représentants de l’Etat et du monde économique.Mais il ne faut pas non plus verser dans l’irénisme et desdifficultés subsistent : les logiques d’acteurs ne sont pasidentiques, y compris entre collectivités territoriales. Lebien public territorial n’est pas une donnée acquise : ilse construit, par bribes, dans les différentes initiativesqui se mettent en place. Pointons certaines des difficultésque nous avons pu observer.D’abord, le vaste mouvement de recomposition du systèmed’enseignement supérieur et de recherche n’estpas sans déstabiliser certains universitaires, qui viventmal ce qu’ils considèrent comme un affaiblissement desvaleurs académiques. Or, l’autonomie renforcée desétablissements universitaires fait désormais de ces établissementsdes acteurs stratégiques qui ne se laissentpas dicter leur politique, mais doivent d’autant plusconstruire, en interne, un difficile consensus entre leursmembres.Les collectivités territoriales, de leur côté, sont partiellementen compétition entre elles pour attirer les ressourceséconomiques, ce qui ne facilite pas l’expressiond’une politique commune. Elles sont, en outre, enmatière d’enseignement supérieur et de recherche, obligéesde compter avec l’Etat et les grands organismes derecherche nationaux, qui gardent encore les leviers institutionnelsde la labellisation et l’essentiel des financements,notamment au niveau des personnels.Enfin, se pose la délicate question de la relation au territoiredes acteurs académiques et économiques : il nefaut évidemment voir ni les uns ni les autres commeexclusivement liés à un territoire, fût-ce au niveaurégional. Le développement des établissements universitaires,voire leur survie, passe certes par un ancragelocal et une réponse aux attentes des interlocuteurs territoriaux,mais aussi, nécessairement, par l’inscriptiondans des réseaux plus larges, en France et à l’international,garants de leur qualité et de leur dynamisme académiques.Quant aux entreprises, notamment les plusgrandes, même si leur ancrage territorial, en lien avecdes compétences locales et le soutien des collectivités,peut s’avérer un avantage déterminant (Aggeri et Pallez,2004), il ne faut pas sous-estimer le fait qu’elles cherchentmaintenant à optimiser au niveau internationalleurs politiques d’implantations et de collaborationsavec le monde académique.La bataille des territoires ne fait que commencer.BIBLIOGRAPHIEAGGERI (F.) et PALLEZ (F.), Comment agir sur lesrisques de désindustrialisation dans la filière automobile? Rapport Sofirem/ENSMP, 2004.AUST (J.) et CRESPY (C.), Les collectivités locales faceà l’enseignement et la recherche. Pouvoirs locaux III/2009 (n° 82), 2009.CRESPY (C.), Gouvernance de la recherche et compétitivitédes régions : quel rôle pour l’action publique territoriale.Politiques et management public vol. 25 (n°2):pp23-44, 2007.ETZKOWITZ (H.) and LEYDESDORFF (L.), Eds,Universities in the global economy : a Triple helix ofUniversity-Industry-Government Relations. London,Cassell Academic, 1997.GUILLAUME (H.), Rapport sur la valorisation de larecherche, IGF-IGAENR, 2007.FIXARI (D.), LEFEBVRE (P.) et PALLEZ (F.), Quellearticulation entre PRES, RTRA et pôles de compétitivité? - Rapport pour la DIACT, 2008.LEFEBVRE (Ph.), Cluster policy in France : Regionsand multi-level governance in a state-led policy,Colloque Clusters policies in Europe, Audencia, Nantes,5-6th October 2009.64R<strong>É</strong>ALIT<strong>É</strong>S INDUSTRIELLES • AOÛT 2010
Les plateformesd’innovation : des facteursde compétitivitédes territoiresLevier essentiel de la politique de compétitivité, les plateformesd’innovation offrent aux membres des pôles de compétitivité unaccès ouvert à des ressources mutualisées (équipements, personnelset services associés).Ces plateformes constituent la première étape de la mise en placed’un écosystème impliquant les trois piliers des pôles de compétitivité: les entreprises, les organismes de recherche et les établissements d’enseignementsupérieur.CR<strong>É</strong>ER DES EMPLOISDANS LES TERRITOIRESpar Romain BEAUME* et Vincent SUSPLUGAS**Depuis le lancement de la politique des pôles decompétitivité, 1 950 projets de R&D collaboratifsont été déposés par les acteurs de ces pôlesdans le cadre des appels à projets du fonds unique interministériel(FUI), parmi lesquels 813 ont été soutenus,ce qui correspond à 4,3 milliards d’euros de dépenses deR&D et à 1,6 milliard d’euros de soutiens publics.Cette « usine à projets » constitue le cœur de l’activitédes pôles de compétitivité, à partir duquel ils se sontconstruits avant de développer de nouvelles dimensionsregroupées sous le terme d’ « écosystème d’innovationet de croissance ». En lien avec les acteurs existants(comme Ubifrance, en matière d’appui au développementinternational), les pôles de compétitivité visent àagir sur différents leviers essentiels de la compétitivitéde leurs membres :• le développement de synergies territoriales entre les troisacteurs pivots des pôles : les entreprises (grandes etpetites), les centres de recherches et les établissementsde formation (écoles et universités, laboratoires derecherche, services de valorisation, centres de formation…)afin de favoriser la conception de projets etd’actions collaboratifs ;• la conduite de projets collaboratifs entre grandes entreprises,PME et laboratoires (qu’il s’agisse de R&D surdes sujets de plus en plus déterminants pour le positionnementstratégique des entreprises ou de la mise encommun de plateformes de R&D et d’essais) ;* Ingénieur des Mines, Chef du Bureau « Politiques d’innovation et detechnologie » à la Direction générale de la Compétitivité de l’Industrie etdes Services (DGCIS) du ministère de l’Economie, de l’Industrie et del’Emploi.** Chef du Bureau « Politique des pôles de compétitivité » à la Directiongénérale de la Compétitivité de l’Industrie et des Services (DGCIS) duministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi.R<strong>É</strong>ALIT<strong>É</strong>S INDUSTRIELLES • AOÛT 2010 65