L’HISTOIRE« Laïos était roi <strong>de</strong> Thèbes. <strong>Le</strong> dieu lui fit savoir par <strong>la</strong> bouche <strong>de</strong>sPrêtres, que son fi ls l’enjamberait. Laïos, qui n’était pas disposéA payer le prix d’une naissance qui lui coûterait <strong>la</strong> vieArracha le nouveau-né <strong>de</strong>s seins <strong>de</strong> sa mère, lui transperça les orteilsSoigneusement, pour qu’il ne le surpasse pas, et les cousit trois fois.Afi n qu’il le présente aux oiseaux sur un p<strong>la</strong>teau <strong>de</strong> montagne, il le donnaA un serviteur, ma propre chair ne me recouvrira pasEt <strong>de</strong> cette façon, par pru<strong>de</strong>nce, il é<strong>la</strong>rgit le pied qui <strong>de</strong>vait l’écraser<strong>Le</strong> serviteur n’accorda pas l’enfant à l’appétit <strong>de</strong>s oiseauxIl le confi a à d’autres mains pour qu’on le sauvât en un autre pays.Là, l’enfant <strong>de</strong> haute naissance prospéra sur ses pieds enflésPersonne ne possè<strong>de</strong> ma démarche, son défaut, son nom, et utilisant sesPieds et d’autres, le <strong>de</strong>stin suivit son chemin, retenant chaque pasPrécipitant le suivant, un pas après l’autre. »« Commentaire »in SOPHOCLE / ŒDIPE, TYRANd’après Höl<strong>de</strong>rlin<strong>de</strong> Heiner MüllerENTRETIEN avec Matthias LANGHOFF et Evelyne DIDIréalisé par Guil<strong>la</strong>ume FulconisG. F. - Matthias, cette version d’Œdipe occupe unep<strong>la</strong>ce particulière dans ton parcours, puisque c’estcelle à <strong>la</strong>quelle tu reviens souvent dans les lieux lesplus divers : Autriche, Espagne, France et bientôtRussie et Amérique <strong>la</strong>tine…M. L. - Sans doute parce qu’elle m’ai<strong>de</strong> à êtrec<strong>la</strong>ir avec moi-même en tant qu’être social,à comprendre le chaos auquel moi-mêmeje participe. Car tout mouvement d’essai <strong>de</strong>changement <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> est lié à une violence. Ilest question <strong>de</strong> ce<strong>la</strong> dans beaucoup <strong>de</strong> tragédiesgrecques et c’est tout à fait central dans Œdipe.E. D. - <strong>Le</strong>s grecs, on y revient toujours. C’estquelque chose qui renaît <strong>de</strong> manière différente àchaque fois qu’on y travaille. Et il n’y a jamais <strong>de</strong>réponses pour toujours...M. L. - Il y a malheureusement <strong>de</strong>s metteurs enscène qui croient avoir <strong>de</strong>s réponses pour toujours.<strong>Le</strong> metteur en scène a toujours entre les mainsl’attitu<strong>de</strong> et l’esprit avec lesquels une équipe entredans le travail. On doit faire avec ça. Je ne veux pasc<strong>la</strong>rifi er Œdipe .Et c’est très lié à <strong>la</strong> façon dont j’envisage montravail dans une école <strong>de</strong> théâtre. Il s’agit d’unecertaine manière d’une attitu<strong>de</strong> pro<strong>du</strong>ctive contrel’école qui se pense comme une institution pourcréer le théâtre, d’une résistance à certains réfl exes.Si <strong>la</strong> tragédie grecque est un vrai théâtre politiquec’est parce qu’elle est une confrontation avecl’instabilité permanente <strong>de</strong> notre vie. Au fond,les tragédies sont peut-être les seuls moments <strong>de</strong>progrès.Retrouvez <strong>la</strong> totalité <strong>de</strong> l’entretien surwww.ensatt.fr
Un maître <strong>de</strong> c<strong>la</strong>sse pour enseigner œdipe18 Juillet, 2011Festival d'Avignon 2011À Villeneuve, Matthias Langhoff part <strong>de</strong> Sophocle et passe par Höl<strong>de</strong>rlin et Heiner Müller pour rendreà <strong>la</strong> tragédie son plein sens politique à lʼheure <strong>de</strong> <strong>la</strong> peste. Avignon,envoyé spécial.Singulière aventure au long cours que celle entreprise par Matthias Langhoff. Il présente, encol<strong>la</strong>boration avec Évelyne Didi et Shaghayegh Beheshti, sous le titre générique Lyon Kaboul Thèbes,aller-retour, <strong>de</strong>ux versions <strong>de</strong> Sophocle/Œdipe, tyran, dʼaprès Höl<strong>de</strong>rlin, <strong>de</strong> Heiner Müller (1). Lapremière est interprétée dans leur <strong>la</strong>ngue par les comédiens <strong>du</strong> Théâtre Aftaab, formés à Kaboul parAriane Mnouchkine, accueillis un an <strong>du</strong>rant à lʼÉcole nationale supérieure <strong>de</strong>s arts et techniques <strong>du</strong>spectacle (Ensatt, ex-rue B<strong>la</strong>nche), sise à Lyon, tandis que <strong>la</strong> secon<strong>de</strong> version est <strong>du</strong> ressort,justement, tous métiers confon<strong>du</strong>s, <strong>de</strong> <strong>la</strong> 70e promotion <strong>de</strong> lʼEnsatt. Entre les <strong>de</strong>ux se glisse Neige surThèbes, pièce satirique composée par Langhoff à lʼusage <strong>de</strong>s jeunes comédiens français. Cet Œdipelà,Langhoff lʼa déjà monté en Autriche, en Espagne et ailleurs en France, chaque fois avec <strong>de</strong>sacteurs dʼidiomes et <strong>de</strong> culture différents. Il dit : « Cette œuvre mʼai<strong>de</strong> à être c<strong>la</strong>ir avec moi-même entant quʼêtre social, à comprendre le chaos auquel moi-même je participe. »La version afghane a dʼemblée <strong>de</strong> <strong>la</strong> force. Lʼeffet dʼétrangeté <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>la</strong>ngue, <strong>la</strong> cohésion dans le chant,lʼexacte rythmique <strong>du</strong> chœur, lʼal<strong>la</strong>nt percussif et le caractère dʼauthenticité rurale <strong>du</strong> tout concourent àune adhésion immédiate. Cʼest ensuite lʼintermè<strong>de</strong> violemment burlesque sur <strong>la</strong> famille tuyau <strong>de</strong> poêlerégnant sur Thèbes. Des filles <strong>de</strong> lʼEnsatt, travesties en hommes (Œdipe et ses fils, Étéocle etPolynice) jouent dans un bac à sable avec une Jocaste inerte, tandis que les mâles <strong>de</strong> <strong>la</strong> cité dansenten tutus ; lʼOcci<strong>de</strong>nt christiano-freudien vu par Langhoff. Vient alors <strong>la</strong> version en français, avec unesérie <strong>de</strong> plusieurs Œdipe tournants, <strong>de</strong> manière à montrer <strong>de</strong>s élèves le savoir-faire, à ausculter leurprésence au sein dʼun collectif <strong>de</strong> jeu, avec <strong>de</strong>s décors, <strong>de</strong>s costumes, <strong>du</strong> son et <strong>de</strong> <strong>la</strong> lumière faitsmaison à lʼEnsatt. Ils bénéficient dʼune véritable mise en scène par un maître en cette discipline, avecpour chacun une approche originale, dans une atmosphère lour<strong>de</strong> <strong>de</strong> sens où le cri jaillit quand il lefaut, où les corps nettement sʼopposent en tensions <strong>de</strong> forces. Ce qui semb<strong>la</strong>it naturel chez lesAfghans passe plus par <strong>la</strong> tête chez les Français. Question <strong>de</strong> « gestus » propre à chaque <strong>la</strong>ngue, <strong>de</strong>théorie <strong>de</strong>s climats et <strong>de</strong> disparité sociale.De Sophocle à Müller via Höl<strong>de</strong>rlin (on entend <strong>de</strong> ses vers, articulés par <strong>la</strong> voix <strong>de</strong> bronze <strong>de</strong>Langhoff) en passant par <strong>de</strong>s extraits <strong>du</strong> film <strong>de</strong> Bunuel, Las Hur<strong>de</strong>s (Terre sans pain) avec sesvisages <strong>de</strong> <strong>la</strong> misère espagnole <strong>de</strong>s années trente qui ressemble furieusement à celle dʼaujourdʼhui iciet là ; <strong>de</strong> <strong>la</strong> ru<strong>de</strong> exaltation dionysiaque, <strong>la</strong>quelle à point nommé galvanise le p<strong>la</strong>teau, naît un actethéâtral brut, dont lʼunique enjeu est <strong>de</strong> rendre sa validité politique à <strong>la</strong> tragédie par excellence.(1) Jusquʼau 26 juillet (20 h 45) dans <strong>la</strong> baraque foraine <strong>du</strong> clos <strong>de</strong> lʼabbaye à Villeneuve-lès-Avignon,relâche le 21, <strong>du</strong>rée 5 heures environ.Jean-Pierre LéonardiniURL source: http://www.humanite.fr/17_07_2011-un-ma%C3%AEtre-<strong>de</strong>-c<strong>la</strong>sse-pour-enseigner-%C5%93dipe-476453
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